Accueil > Documents parlementaires > Propositions de loi
La version en format HTML, à la différence de celle en PDF, ne comprend pas la numérotation des alinéas.
Version PDF
Retour vers le dossier législatif

N° 2036

_____

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 5 novembre 2009.

PROPOSITION DE LOI

visant à interdire aux criminels et aux délinquants sexuels
de s'établir dans la commune de résidence de leur victime,

(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale
de la République, à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus
par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par

M. Éric CIOTTI,

député.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Comme l’actualité dramatique, nous l’a une nouvelle fois rappelé, il est indispensable d’accroître la protection des victimes face à leurs agresseurs.

Le gouvernement a déjà mis en œuvre de nombreuses mesures destinées à renforcer la protection des victimes : peines planchers, rétention de sûreté.

Néanmoins, parce que la protection des victimes est la première des libertés, il nous faut aller plus loin.

En effet, le meurtre de Marie-Christine Hodeau, par un récidiviste installé à deux rues de sa première victime, une jeune femme de 18 ans, a mis en exergue la difficile application des articles 131-31 et 131-32 du code pénal.

L’article L. 131-31 du code pénal dispose que : « La peine d’interdiction de séjour emporte défense de paraître dans certains lieux déterminés par la juridiction. Elle comporte, en outre, des mesures de surveillance et d’assistance. La liste des lieux interdits ainsi que les mesures de surveillance et d’assistance peuvent être modifiées par le juge de l’application des peines, dans les conditions fixées par le code de procédure pénale.

L’interdiction de séjour ne peut excéder une durée de dix ans en cas de condamnation pour crime et une durée de cinq ans en cas de condamnation pour délit. »

De plus l’article 131-32 précise que « Lorsque l’interdiction de séjour accompagne une peine privative de liberté sans sursis, elle s’applique dès le commencement de cette peine et son exécution se poursuit, pour la durée fixée par la décision de condamnation, à compter du jour où la privation de liberté a pris fin.

Toute détention intervenue au cours de l’interdiction de séjour s’impute sur la durée de celle-ci.

Sous réserve de l’application de l’article 763 du code de procédure pénale, l’interdiction de séjour cesse de plein droit lorsque le condamné atteint l’âge de soixante-cinq ans. »

La peine complémentaire prévue est malheureusement difficilement applicable. Durant son incarcération, le délinquant est isolé de sa victime mais lors des permissions, des aménagements de peines ou des libérations conditionnelles, il est beaucoup plus difficile de faire appliquer ces dispositions, a fortiori une fois que la peine est exécutée.

Pour autant, la présence, à proximité d’une victime, de son agresseur est insupportable. Il n’est pas tolérable que des victimes vivent dans la crainte de se retrouver confrontées de nouveau à leur agresseur. Cette situation les conduit à revivre le traumatisme subi.

La présente proposition vise à renforcer cette disposition. Il est proposé que cette peine complémentaire d’interdiction de séjour à proximité de sa victime devienne une peine complémentaire automatique pour tous les criminels et les délinquants sexuels condamnés sur le fondement des articles 222-22 à 222-27.

Cette peine sera prononcée par la juridiction de jugement. Les magistrats ne pourront y déroger sauf à motiver leurs décisions et après avoir entendu la position de la victime sur le sujet.

Cette peine est, par la suite, susceptible d’être réexaminée par le juge d’application des peines qui pourra modifier les conditions de cette interdiction selon les termes du code de procédure pénale.

Enfin par dérogation aux dispositions 131-31 et 131-32 du code pénal, cette interdiction dans les infractions de type agressions sexuelles ou viols est d’une durée minimum de 15 ans à compter de son prononcé. Les magistrats peuvent accroître ce délai pour des raisons inhérentes à la personne de la victime ou à la dangerosité de l’auteur.

PROPOSITION DE LOI

Article unique

Après l’article 222-48-1 du code pénal, il est inséré un article 222-48-2 ainsi rédigé :

« Art. 222-48-2. – Par dérogation aux articles 131-31 et 131-32, les personnes physiques coupables des infractions prévues aux articles 222-23 ou 222-27 encourent obligatoirement une peine d’interdiction de résidence dans la ou les communes de résidence de la victime.

« Cette interdiction est prononcée par les magistrats lors de la condamnation.

« Cette interdiction de séjour est au minimum de 15 ans à compter de son prononcé. Le magistrat peut décider souverainement d’accroître ce délai.

« Il ne peut y être dérogé que dans des circonstances exceptionnelles, dument motivées.

« La liste des lieux interdits ainsi que les mesures de surveillance et d’assistance peuvent être modifiées par le juge d’application des peines dans les conditions fixées par le code de procédure pénale. Dès lors, la victime devra être entendue préalablement à toute levée ou aménagement de l’interdiction. »


© Assemblée nationale