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N° 3585

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 22 juin 2011.

PROPOSITION DE LOI

tendant à adapter la loi de réforme des collectivités territoriales
aux caractéristiques et contraintes particulières
de la Guadeloupe,

(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale
de la République, à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus
par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par Mesdames et Messieurs

Victorin LUREL, Jean-Marc AYRAULT, Sylvie ANDRIEUX, Jean-Paul BACQUET, Claude BARTOLONE, Christian BATAILLE, Daniel BOISSERIE, Christophe BOUILLON, Martine CARRILLON-COUVREUR, Jean-Paul CHANTEGUET, Alain CLAEYS, Jean-Michel CLÉMENT, Marie-Françoise CLERGEAU, Gilles COCQUEMPOT, Pierre COHEN, Catherine COUTELLE, Frédéric CUVILLIER, Guy DELCOURT, François DELUGA, Bernard DEROSIER, Michel DESTOT, Jean-Pierre DUFAU, William DUMAS, Jean-Paul DUPRÉ, Christian ECKERT, Henri EMMANUELLI, Albert FACON, Martine FAURE, Geneviève GAILLARD, Jean GAUBERT, Marc GOUA, Élisabeth GUIGOU, Jean GRELLIER, Christian HUTIN, Jean-Louis IDIART, Françoise IMBERT, Serge JANQUIN, Henri JIBRAYEL, Marietta KARAMANLI, Jérôme LAMBERT, Jean LAUNAY, Annick LE LOCH, Patrick LEMASLE, Catherine LEMORTON, Bernard LESTERLIN, Jean-Claude LEROY, Michel LIEBGOTT, Louis-Joseph MANSCOUR, Sandrine MAZETIER, Kléber MESQUIDA, Philippe NAUCHE, Alain NÉRI, Jean-Luc PÉRAT, Marie-Françoise PÉROL-DUMONT, Catherine QUÉRÉ, Jean-Jack QUEYRANNE, Simon RENUCCI, Marie-Line REYNAUD, René ROUQUET, Michel SAINTE-MARIE, Philippe TOURTELIER, Jacques VALAX, Michel VERGNIER, André VÉZINHET, Alain VIDALIES et les membres du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche (1) et apparentés (2),

députés.

____________________________

(1)  Ce groupe est composé de Mesdames et Messieurs : Patricia Adam, Sylvie Andrieux, Jean-Marc Ayrault, Jean-Paul Bacquet, Dominique Baert, Jean-Pierre Balligand, Gérard Bapt, Claude Bartolone, Jacques Bascou, Christian Bataille, Delphine Batho, Marie-Noëlle Battistel, Jean-Louis Bianco, Gisèle Biémouret, Serge Blisko, Patrick Bloche, Daniel Boisserie, Maxime Bono, Jean-Michel Boucheron, Marie-Odile Bouillé, Christophe Bouillon, Monique Boulestin, Pierre Bourguignon, Danielle Bousquet, François Brottes, Alain Cacheux, Jérôme Cahuzac, Jean-Christophe Cambadélis, Thierry Carcenac, Christophe Caresche, Martine Carrillon-Couvreur, Laurent Cathala, Bernard Cazeneuve, Guy Chambefort, Jean-Paul Chanteguet, Alain Claeys, Jean-Michel Clément, Marie-Françoise Clergeau, Gilles Cocquempot, Pierre Cohen, Catherine Coutelle, Pascale Crozon, Frédéric Cuvillier, Claude Darciaux, Pascal Deguilhem, Michèle Delaunay, Guy Delcourt, Michel Delebarre, François Deluga, Bernard Derosier, Michel Destot, Julien Dray, Tony Dreyfus, Jean-Pierre Dufau, William Dumas, Jean-Louis Dumont, Laurence Dumont, Jean-Paul Dupré, Yves Durand, Odette Duriez, Philippe Duron, Olivier Dussopt, Christian Eckert, Henri Emmanuelli, Corinne Erhel, Laurent Fabius, Albert Facon, Martine Faure, Hervé Féron, Aurélie Filippetti, Geneviève Fioraso, Pierre Forgues, Valérie Fourneyron, Michel Françaix, Jean-Claude Fruteau, Jean-Louis Gagnaire, Geneviève Gaillard, Guillaume Garot, Jean Gaubert, Catherine Génisson, Jean-Patrick Gille, Jean Glavany, Daniel Goldberg, Gaëtan Gorce, Pascale Got, Marc Goua, Jean Grellier, Élisabeth Guigou, David Habib, Danièle Hoffman-Rispal, François Hollande, Sandrine Hurel, Monique Iborra, Jean-Louis Idiart, Françoise Imbert, Michel Issindou, Éric Jalton, Serge Janquin, Henri Jibrayel, Régis Juanico, Armand Jung, Marietta Karamanli, Jean-Pierre Kucheida, Conchita Lacuey, Jérôme Lambert, François Lamy, Jack Lang, Colette Langlade, Jean Launay, Jean-Yves Le Bouillonnec, Marylise Lebranchu, Patrick Lebreton, Gilbert Le Bris, Jean-Yves Le Déaut, Michel Lefait, Jean-Marie Le Guen, Annick Le Loch, Patrick Lemasle, Catherine Lemorton, Annick Lepetit, Bruno Le Roux, Jean-Claude Leroy, Bernard Lesterlin, Michel Liebgott, Martine Lignières-Cassou, François Loncle, Victorin Lurel, Jean Mallot, Louis-Joseph Manscour, Jacqueline Maquet, Marie-Lou Marcel, Marie-Claude Marchand, Jean-René Marsac, Philippe Martin, Martine Martinel, Frédérique Massat, Gilbert Mathon, Didier Mathus, Sandrine Mazetier, Michel Ménard, Kléber Mesquida, Jean Michel, Arnaud Montebourg, Pierre Moscovici, Pierre-Alain Muet, Philippe Nauche, Henri Nayrou, Alain Néri, Marie-Renée Oget, Michel Pajon, George Pau-Langevin, Christian Paul, Germinal Peiro, Jean-Luc Pérat, Jean-Claude Perez, Marie-Françoise Pérol-Dumont, Martine Pinville, Philippe Plisson, François Pupponi, Catherine Quéré, Jean-Jack Queyranne, Dominique Raimbourg, Marie-Line Reynaud, Alain Rodet, Marcel Rogemont, Bernard Roman, Gwendal Rouillard, René Rouquet, Alain Rousset, Michel Sainte-Marie, Michel Sapin, Odile Saugues, Christophe Sirugue, Pascal Terrasse, Jean-Louis Touraine, Marisol Touraine, Philippe Tourtelier, Jean-Jacques Urvoas, Daniel Vaillant, Jacques Valax, André Vallini, Manuel Valls, Michel Vauzelle, Michel Vergnier, André Vézinhet, Alain Vidalies, Jean-Michel Villaumé, Jean-Claude Viollet, Philippe Vuilque.

(2)  Chantal Berthelot, Gérard Charasse, René Dosière, Paul Giacobbi, Annick Girardin, Joël Giraud, Christian Hutin, Serge Letchimy, Apeleto Albert Likuvalu, Jeanny Marc, Dominique Orliac, Sylvia Pinel, Simon Renucci, Chantal Robin-Rodrigo, Christiane Taubira.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Le 26 juin 2009, sur la base de l’engagement du Président de la République de leur laisser 18 mois pour travailler à des propositions, les élus de Guadeloupe ont commencé les travaux d’élaboration d’un projet de société dont l’évolution des institutions pouvait être un des volets.

L’hypothèse de la création d’une assemblée unique faisait l’objet d’une étude approfondie quand le Parlement, sans attendre l’échéance du délai de 18 mois, a voté l’inclusion de la Guadeloupe dans le champ d’application de la loi de réforme des collectivités territoriales.

La loi a ainsi prévu la création, en Guadeloupe, d’assemblées délibérantes pour la région et le département composées strictement des mêmes membres. Le Conseil constitutionnel, saisi de la question, n’a cependant pas considéré que ces assemblées constituaient une assemblée unique au sens du dernier alinéa de l’article 73 de la Constitution.

Le congrès des élus départementaux et régionaux de Guadeloupe a pris acte de la situation créée par la volonté du Gouvernement et du Parlement d’imposer l’application à la Guadeloupe de la loi de réforme des collectivités territoriales malgré les engagements du Président de la République. Il a cependant formulé des propositions d’adaptation de la loi, relatives au mode de scrutin et au nombre de sièges de ces assemblées. Ces propositions s’inscrivent dans l’esprit de la loi du 16 décembre 2010 dont l’article 87 autorise le Gouvernement à prendre par voie d’ordonnance les mesures d’adaptation du chapitre 1er de son titre 1er dans les départements et régions d’outre-mer.

Le Président de la République qui a reçu, le 14 février dernier, les parlementaires et le président de l’association des maires de Guadeloupe leur a indiqué que ces demandes d’adaptation pouvaient soulever des problèmes juridiques mais les a néanmoins encouragés à poursuivre leurs réflexions.

L’objet de la présente proposition de loi est de soumettre au Parlement les demandes d’adaptations issues du congrès des élus de Guadeloupe.

L’avis du Conseil d’État, que le président de l’Assemblée nationale peut solliciter en vertu du dernier alinéa de l’article 39 de la Constitution, sur les points de droit exposés ci-après permettrait de lever les interrogations qui subsistent sur le plan juridique et de s’assurer de la constitutionnalité de la présente proposition. En effet, le contenu combiné de la décision du Conseil constitutionnel et des analyses des services du Gouvernement telles qu’elles ont été communiquées aux parlementaires de Guadeloupe soulève non seulement des interrogations sur la réalité même du concept d’assemblée unique mais aussi sur les assouplissements du principe d’adaptation également issus de la révision constitutionnelle de 2003.

I. La décision du Conseil constitutionnel soulève la question de la définition de ce que peut être une assemblée unique au sens du dernier alinéa de l’article 73 de la Constitution.

L’article 73 de la Constitution, issu des révisions constitutionnelles du 28 mars 2003 et du 23 juillet 2008, prévoit en effet, dans son dernier alinéa, l’éventualité de « l’institution d’une assemblée délibérante unique pour [un département et une région d’outre-mer] ».

Cette éventualité ne peut, selon l’article 73, intervenir « sans qu’ait été recueilli […], le consentement des électeurs inscrits dans le ressort de ces collectivités ».

Elle est clairement distinguée, dans l’article 73, de l’autre éventualité également subordonnée au consentement des électeurs et qui est « la création par la loi d’une collectivité se substituant à un département et une région d’outre-mer ».

La loi de réforme des collectivités territoriales du 16 décembre 2010 prévoit qu’à partir de 2014, les conseils régionaux seront composés de l’ensemble des conseillers territoriaux siégeant dans les conseils généraux des départements composant la région. Dans les régions monodépartementales d’outre-mer qui n’ont pas opté pour la création d’une collectivité unique se substituant au département et à la région, cette mesure revient à conférer la même composition au conseil général et au conseil régional.

Dans une décision du 9 décembre 2010, le Conseil constitutionnel a considéré que, malgré une composition identique, le conseil général et le conseil régional, dans les régions monodépartementales de la Guadeloupe et de la Réunion, ne formaient pas une « assemblée délibérante unique » au sens de l’article 73 de la Constitution. Le Conseil constitutionnel s’est appuyé, pour qualifier ces assemblées, d’« assemblées distinctes » sur le fait qu’elles étaient « dotées de compétences propres et régies par des règles de fonctionnement distinctes ».

À l’occasion de l’audience qu’il a accordée aux parlementaires et au président de l’association des maires de Guadeloupe, le 14 février 2011, le Président de la République a indiqué que les analyses juridiques effectuées par les services du Gouvernement concluaient que la Guadeloupe demeurant à la fois un département et une région, les possibilités d’adaptation en matière institutionnelle étaient limitées et ne pouvaient par exemple aller jusqu’à prévoir un mode de scrutin différent ou un nombre de sièges pour le conseil général et le conseil régional qui s’éloignerait trop des normes prévues pour les autres régions.

Le contenu combiné de la décision du Conseil constitutionnel et des analyses juridiques du Gouvernement conduit alors à s’interroger sur ce que peut recouvrir concrètement, pour un département et une région d’outre-mer, le concept d’assemblée délibérante unique prévu par l’article 73 de la Constitution.

Plusieurs questions se posent :

1. La question des compétences :

Dans le cas de l’assemblée délibérante unique prévue au dernier alinéa de l’article 73, le département et la région subsistent en tant que collectivités territoriales, personnes morales de droit public avec leurs compétences respectives. La Constitution ayant en effet distingué l’éventualité de la collectivité unique de celle de l’assemblée unique, il paraît logique de considérer que, dans ce dernier cas, les deux collectivités, département et région, ne fusionnent pas et conservent leur existence propre. Une assemblée unique aurait donc à délibérer tantôt dans le domaine de compétences du département et tantôt dans celui de la région, domaines qui resteront distincts. Or le caractère distinct des compétences est précisément un des critères relevés par le Conseil constitutionnel pour estimer que deux assemblées de même composition ne forment pas une assemblée unique.

Les modalités de gestion des compétences respectives du département et de la région, dans l’hypothèse de l’institution, en Guadeloupe, d’une assemblée délibérante unique au sens de l’article 73 de la Constitution restent donc à préciser.

À cet égard, il serait intéressant de savoir dans quelles limites le mode de traitement, par le conseil de Paris, des compétences du département et de la commune de Paris, pourrait inspirer le mode de traitement des compétences du département et de la région par une assemblée délibérante unique en Guadeloupe.

2. La question de l’organisation de l’assemblée :

On déduit de la décision du Conseil constitutionnel que, dans la mesure où deux assemblées de même composition ne forment pas une assemblée unique si leur organisation reste distincte, une assemblée unique doit alors avoir une organisation unique. Cela laisserait donc supposer qu’une telle assemblée ne pourrait comporter des commissions dédiées aux affaires du département et d’autres dédiées aux affaires de la région. Il s’agirait là d’une contrainte délicate à respecter notamment pour les domaines où les compétences des deux collectivités sont clairement différentes (par exemple le domaine social ou celui de la formation professionnelle). De même le président de l’assemblée semble nécessairement devoir être unique (comme pour le conseil de Paris).

Il serait donc utile que soient précisées les caractéristiques à prévoir par la loi pour l’organisation de l’assemblée afin qu’elle réponde aux critères de l’assemblée délibérante unique prévue à l’article 73 de la Constitution.

3. La question de l’exécutif :

Dans l’hypothèse de l’institution d’une assemblée unique, la question de l’exécutif des collectivités reste posée. Il se trouve que le code général des collectivités territoriales (CGCT) prévoit, pour les départements et les régions, que le président de l’assemblée délibérante et l’exécutif de la collectivité sont confondus en une même personne (articles L. 3221-1 et L. 4231-1 du CGCT). L’assemblée délibérante, d’une part, et l’exécutif, d’autre part, restent cependant deux organes distincts de ces collectivités. L’institution d’une assemblée délibérante unique semble supposer, aux termes de la décision du Conseil constitutionnel, l’unicité de la présidence de l’assemblée. En revanche, elle n’implique pas automatiquement l’unicité de l’exécutif. Les articles L. 3122-3 et L. 4133-3 du CGCT rendent d’ailleurs incompatibles les fonctions de président de conseil général et celles de président de conseil régional. Or sous les appellations « président de conseil général » et « président de conseil régional » coexistent deux organes : le président de l’assemblée délibérante et l’exécutif de la collectivité. Si, dans l’hypothèse de l’institution d’une assemblée délibérante unique, l’incompatibilité semble, par construction, devoir tomber pour ce qui concerne le président de l’assemblée délibérante, il n’en va pas de même pour les exécutifs. Au contraire, les analyses juridiques du Gouvernement dont le Président de la République a fait part aux élus de Guadeloupe tendent à considérer qu’en cas de maintien d’un département et d’une région, les possibilités d’adaptations institutionnelles sont limitées. Elles pourraient donc laisser supposer que, même dotés d’une assemblée délibérante unique (et donc d’un président unique de l’assemblée), un département et une région d’outre-mer devraient continuer à disposer de deux exécutifs distincts pour ne pas trop s’écarter du droit commun. On peut dès lors s’interroger sur les marges d’adaptation en la matière ?

II. La question des marges d’adaptation institutionnelle possibles, pour les DOM, en dehors de l’assemblée ou de la collectivité unique, se pose également.

La décision du Conseil constitutionnel du 2 décembre 1982 a longtemps servi de base constitutionnelle pour considérer que la loi ne pouvait conférer à un département d’outre-mer une organisation particulière, possibilité alors réservée aux territoires d’outre-mer régis par l’article 74 de la Constitution.

Aujourd’hui, après la révision constitutionnelle de 2003, d’une part, il n’est plus fait référence dans l’article 74 à « une organisation particulière » pour les collectivités territoriales d’outre-mer mais à « un statut qui tient compte de leurs intérêts propres » et, d’autre part, les modifications portées à l’article 73 ont prévu la création ou l’institution de collectivités qui tout en restant régies par l’article 73 peuvent être dotées d’une organisation particulière : il en va ainsi de la création d’une collectivité unique se substituant à la région et au département ou de l’institution d’une assemblée unique pour ces deux collectivités.

Par ailleurs, avant la révision constitutionnelle du 28 mars 2003, les mesures d’adaptation de l’organisation administrative des DOM devaient être nécessitées par leur situation particulière. La révision constitutionnelle du 28 mars 2003 a supprimé cet impératif de nécessité et a modifié la rédaction de l’article 73 dans le sens d’un assouplissement des possibilités d’adaptation en prévoyant que les lois et règlements pouvaient faire l’objet d’adaptations tenant aux caractéristiques et contraintes particulières de ces collectivités.

Les possibilités d’habilitation à adapter la règle ou à la fixer constituent également une manifestation de l’évolution de la notion d’adaptation.

1. La question du champ des ordonnances prévues par la loi :

La loi de réforme des collectivités territoriales du 16 décembre 2010 prévoit, dans son article 87, que « le Gouvernement est autorisé à prendre par voie d’ordonnance […] les mesures d’adaptation du chapitre Ier du titre Ier […] dans les départements et régions d’outre-mer ». Cette disposition n’ayant pas été censurée par le Conseil constitutionnel, elle confirme que des adaptations institutionnelles peuvent être mises en œuvre dans les départements d’outre-mer.

L’État lui-même a d’ailleurs conféré à ses services une organisation particulière dans les DOM, ce qui peut être considéré comme une forme d’adaptation institutionnelle.

Or les élus de Guadeloupe ont compris des indications que leur a fournies le Président de la République, le 14 février dernier, qu’en dehors des formes d’évolution subordonnées par l’article 73 au consentement des électeurs (collectivité unique et assemblée unique), il était difficile de concevoir d’autres formes d’adaptations institutionnelles, dans les départements d’outre-mer. Dès lors, on peut se demander quelles mesures peuvent être prises par ordonnance pour adapter aux DOM la loi de réforme des collectivités territoriales, à quoi peuvent toucher ces adaptations et quelle peut être leur ampleur.

Il est également légitime de se demander si d’autres formes d’adaptations des institutions des départements et régions d’outre-mer peuvent être mises en œuvre en dehors de celles subordonnées au consentement des électeurs et si elles peuvent-elles aller jusqu’à leur conférer une organisation particulière.

De même, on peut s’interroger sur l’objet même du dernier alinéa de l’article 73 de la Constitution : est-il de subordonner les formes les plus importantes d’évolution institutionnelle des départements et régions d’outre-mer au consentement des électeurs ou bien est-il de verrouiller les possibilités d’adaptations en les limitant à la collectivité unique et à l’assemblée unique ?

Fin juin 2009, les élus de Guadeloupe ont commencé à travailler collectivement à une évolution de leurs institutions en comptant sur un délai de 18 mois pour remettre des propositions au Président de la République qui avait accepté ce délai. La majorité de ces élus ne considérait pas l’évolution des institutions de l’archipel comme une priorité mais, dans la mesure où un projet de loi de réforme des collectivités territoriales était en cours d’élaboration au niveau national, ils ont été conduits à s’y intéresser et à en rechercher les formes les plus pertinentes d’adaptation à la Guadeloupe.

À la différence de leurs homologues de Guyane et de Martinique, la majorité des élus guadeloupéens n’a pas souhaité orienter les travaux vers la création d’une collectivité unique se substituant au département et à la région. L’option de l’assemblée unique réunissait davantage de partisans, les Guadeloupéens, dans leur ensemble, tenant au maintien du département et de la région en tant que collectivités territoriales.

La loi de réforme des collectivités territoriales ayant été votée, avant l’expiration du délai de 18 mois et en incluant la Guadeloupe dans son champ d’application, les élus ont pris acte du fait que la loi leur imposait une forme d’assemblée « unique » (ou « commune ») et, réunis en congrès le 28 décembre 2010, ont demandé que des adaptations à la loi soient prévues pour la Guadeloupe.

2. La question du nombre de sièges :

La première adaptation demandée portait sur le nombre de sièges du conseil général (et donc du conseil régional).

Actuellement, le total des sièges du conseil régional (41) et du conseil général (40) s’élève à 81. La loi votée mais censurée sur ce point par le Conseil constitutionnel prévoyait un effectif réduit à 43. Pour des raisons développées ci-dessous, le congrès des élus de Guadeloupe a demandé que cette réduction se limite à 65. Le Président de la République, arguant de risques juridiques, a indiqué que la réduction pourrait être atténuée de quelques unités mais pas davantage. C’est donc un effectif de 45 que le Gouvernement a retenu dans le projet de loi retouché adopté en conseil des ministres et en cours de discussion au Parlement.

Selon le congrès des élus de Guadeloupe, les considérations suivantes paraissaient cependant plaider en faveur d’une diminution du nombre de sièges inférieure à la diminution moyenne observée au plan national :

Au plan national, le nombre de conseillers territoriaux chargés des compétences des départements et des régions devait s’élever à 3 493 selon le tableau retouché après la décision du Conseil constitutionnel et annexé à la loi de réforme des collectivités territoriales. Comparé aux effectifs actuels des conseillers généraux et des conseillers régionaux des régions et départements concernés par la loi (c’est à dire en excluant la Corse, la Guyane et la Martinique), soit 5 980, cet effectif de 3 493 marque une baisse de 41,58 %. En Guadeloupe, si le nombre de sièges devait rester à 45, il s’agirait d’une baisse de 44,44 % supérieure à la baisse moyenne.

Cette baisse supérieure n’est pas justifiée et poserait des problèmes de « bonne administration » dans une région de petite taille. Le volume de travail des élus pour conduire les affaires d’une collectivité territoriale de l’importance d’une région ou d’un département, est certes dépendant de la taille de cette collectivité mais il n’en n’est pas une fonction linéaire. Pour faire fonctionner une région de 403 000 habitants comme la Guadeloupe, il faut des élus pour siéger dans des comités, commissions, conseils d’administration etc. dont le nombre est souvent voisin de celui d’une région de 2 000 000 habitants par exemple. Le nombre d’heures de travail pour l’élaboration d’un budget de 400 M€ n’est pas 10 fois inférieur à celui nécessaire pour l’élaboration d’un budget de 4 milliards €. Les illustrations de ce type peuvent être multipliées. Cela signifie qu’il y a un volume fixe de travail à réaliser par les élus quelle que soit la taille de la région. En supposant qu’un conseiller territorial consacre en moyenne la moitié de son temps au département et l’autre moitié à la région, la région Guadeloupe aurait, en 2014, à fonctionner avec l’équivalent de 22,5 temps-pleins d’élus. C’est manifestement insuffisant alors qu’on observe qu’avec 41 élus aujourd’hui (dont 3 seulement cumulent leur fonction avec celle de conseiller général), il est déjà délicat d’assurer une présence dans toutes les instances internes ou externes à la région.

Les régions et les départements d’outre-mer sont dotés de compétences supplémentaires par rapport aux collectivités équivalentes de l’hexagone. Ces compétences sont prévues par le CGCT. En matière de planification et de fiscalité, leurs responsabilités sont plus importantes. La possibilité nouvelle donnée à ces collectivités d’être habilitées par le Parlement à intervenir dans les domaines législatif et règlementaire crée une charge de travail supplémentaire pour les élus qui assurent désormais une partie du travail normatif que l’État assurait jusqu’à présent. C’est particulièrement le cas en Guadeloupe où la région a été habilitée à assurer la production de normes dans le domaine des énergies renouvelables, de normes thermiques de construction et de textes relatifs à la maîtrise de la demande en énergie. Ces responsabilités supplémentaires ou nouvelles justifient un nombre d’élus adapté et une baisse moins importante du nombre de sièges que dans l’hexagone.

Collectivités éloignées de l’hexagone, les départements et régions d’outre-mer doivent faire face à des handicaps structurels reconnus par l’article 349 du Traité de l’Union européenne (« éloignement, insularité, faible superficie, relief et climat difficiles, dépendance vis-à-vis d’un petit nombre de produits, facteurs dont la permanence et la combinaison nuisent particulièrement à leur développement… »). Elles présentent des caractéristiques et connaissent des contraintes particulières reconnues par l’article 73 de la Constitution. Il s’agit donc de collectivités plus lourdes à administrer que celles de l’hexagone. Elles nécessitent davantage d’implication de la puissance publique. Il ne paraît donc pas pertinent de leur appliquer une baisse du nombre d’élus en charge de leurs affaires, supérieure à la moyenne nationale.

Les possibilités d’adaptation offertes par l’article 73 de la Constitution semblent aussi pouvoir justifier une baisse inférieure la moyenne nationale. S’agissant de l’effectif du conseil général de Guadeloupe, la région Guadeloupe ne comprenant qu’un seul département, la question du respect d’un équilibre démographique entre départements d’une même région ne se pose pas. Certes, la Guadeloupe restera une région, que le droit commun lui soit appliqué ou qu’elle opte pour la formule de l’assemblée unique. Certes, le considérant n° 38 de la décision du Conseil constitutionnel du 9 décembre 2010 pourrait laisser supposer qu’il conviendrait d’appliquer aux régions entre-elles le principe d’équilibre démographique. Toutefois, au plan général, le fondement de cette application aux régions entre-elles mérite d’être explicité et, dans le cas particulier d’une région d’outre-mer, reconnue par le CGCT (4e partie Livre IV) comme région à statut particulier, y déroger ne paraît pas, de surcroît, excéder les possibilités d’adaptation de l’article 73.

Dans le cas de la Guyane et de la Martinique, les futures collectivités disposeront de 51 conseillers pour la Guyane soit une augmentation de 0,5 % par rapport au total actuel des conseillers généraux (19) et des conseillers régionaux (31) et de 60 élus pour la Martinique (51 conseillers et 9 membres du conseil exécutif) soit une réduction de 30 % par rapport au total actuel des conseillers généraux (45) et régionaux (41). Or ces collectivités ne seront certes plus des régions mais auront à traiter exactement les mêmes compétences que les conseils général et régional de la Guadeloupe.

Le fait que la Guadeloupe reste une région et ne devienne pas une collectivité unique de l’article 73 ne semble pas justifier que lui soit appliqué, sans possibilité d’adaptations tenant à ses caractéristiques et contraintes particulières, un principe d’équilibre démographique entre régions ou que lui soit interdit d’être dotée, pour l’exercice des mêmes compétences, du même nombre de sièges que la Guyane ou la Martinique. Il importe cependant que soit déterminé jusqu’où peuvent aller ces adaptations.

Le congrès des élus de Guadeloupe a aussi estimé que les comparaisons suivantes pouvaient justifier une moindre diminution du nombre de sièges :

Plusieurs départements auront un ratio d’habitants par conseiller territorial plus fort que celui qu’aurait la Guadeloupe si l’effectif de 45 était confirmé, soit un pour 8 955 habitants. Ainsi la Lozère aura 15 conseillers territoriaux pour 77 193 habitants, soit un ratio de un pour 5 146 habitants. Avec le même ratio, la Guadeloupe obtiendrait 78 conseillers territoriaux.

La Creuse avec 19 conseillers territoriaux pour 123 798 habitants affiche un ratio de un conseiller territorial pour 6 515 habitants. Le même ratio appliqué à la Guadeloupe lui donnerait 62 conseillers. Ces effectifs n’ont pas été censurés par le Conseil constitutionnel dans sa décision du 9 décembre 2010.

S’agissant des régions, on observe qu’avec un conseiller territorial pour 8 165 habitants, la région Limousin a un ratio supérieur à celui de la Guadeloupe. De manière générale, on peut noter que, plus la population d’une région est faible, plus le ratio est élevé. Ainsi le Limousin qui a deux fois moins d’habitants que la Basse-Normandie (743 265 contre 1 470 669 n’a pas deux fois moins de conseillers territoriaux (91 contre 117) mais seulement 22 % de moins. Appliqué à la Guadeloupe et au Limousin, ce taux de réduction de 22 % donnerait 71 conseillers territoriaux pour la Guadeloupe (alors que le rapport de population n’est même pas de 1 à 2 et que logiquement, ce n’est pas un taux de 22 % de baisse mais un taux inférieur qu’il conviendrait d’appliquer puisqu’il s’agit de régions plus petites que dans l’exemple précédent).

L’exemple de la Corse est encore plus parlant. La collectivité de Corse pour une population de 306 906 habitants compte 60 élus, 51 à l’assemblée et 9 au conseil exécutif. Certes la Corse n’est pas concernée par la réforme. Les compétences de cette collectivité sont cependant très proches, en tout cas s’agissant du volume de travail d’élus qu’elles impliquent, de celles de la seule région Guadeloupe qui n’en compterait, si on en restait aux propositions du Gouvernement, que 45, et encore à mi-temps car les conseillers territoriaux de Guadeloupe auraient à partager leur temps entre le département et la région, soit 22,5 équivalents temps-plein d’élus ! Le ratio serait donc, pour faire fonctionner la collectivité de Corse de un temps-plein d’élu pour 5 115 habitants, et pour faire fonctionner la région Guadeloupe qui a les mêmes compétences et 33 % de population en plus, de un temps-plein d’élu pour 17 922 habitants ! Pour compléter la comparaison, il convient d’ajouter les 30 conseillers généraux de Haute-Corse et les 22 de Corse-du-Sud. Cela signifie donc que, pour traiter quasiment des mêmes compétences, pour 306 906 habitants, la Corse (collectivité et départements confondus) dispose de 112 élus, quand la Guadeloupe pour 403 257 habitants (région et département) en compterait 45. Le ratio corse appliqué à la Guadeloupe donnerait 147 conseillers territoriaux !

Compte tenu des exemples ci-dessus qui montrent, d’une part, que, pour des collectivités qui relèvent de l’article 72, les écarts par rapport à la moyenne peuvent être relativement forts et, d’autre part, que pour une collectivité comme la Corse qui, a priori, ne peut bénéficier d’adaptations aussi fortes que celles prévues à l’article 73 pour les DOM qui constituent des collectivités plus éloignées et plus différentes, des effectifs beaucoup plus importants sont admis en termes de ratio d’habitants par élu, l’existence d’un risque constitutionnel sérieux attaché à l’acceptation, dans la loi, des propositions du congrès des élus de Guadeloupe en termes de nombre de sièges (soit 65 au total pour siéger au conseil général et au conseil régional) mériterait d’être précisée.

3. La question du mode de scrutin :

Le congrès des élus départementaux et régionaux a également demandé que le mode de scrutin pour l’élection des conseillers territoriaux soit adapté. Les élus, compte tenu des caractéristiques de la Guadeloupe ont proposé :

– soit un scrutin mixte combinant un scrutin uninominal majoritaire à deux tours pour la moitié de l’effectif et un scrutin à la proportionnelle avec prime majoritaire de 50 % pour l’autre moitié de l’effectif ;

– soit un scrutin à la proportionnelle avec sections territoriales et prime majoritaire de 25 % (comme en Guyane et en Martinique).

Ils ont estimé que cette demande d’adaptation était justifiée par les caractéristiques et contraintes particulières suivantes :

La Guadeloupe est une région monodépartementale ce qui constitue une différence fondamentale avec les régions de l’hexagone. Dans l’hexagone, un citoyen du Lot par exemple verra les affaires de son département traitées par une assemblée de 19 membres et celles de sa région (Midi-Pyrénées) par une assemblée de 250 membres. L’effet de masse ainsi que la diversité de provenance des conseillers territoriaux siégeant au conseil régional fera que la dimension régionale des affaires sera prise en compte. En Guadeloupe, si le mode de scrutin n’est pas adapté, les affaires du département et celles de la région seront traitées par les mêmes conseillers territoriaux, élus sur une base uniquement cantonale. On peut craindre que les préoccupations de ces conseillers ne soient exclusivement focalisées sur leur canton et n’intègrent pas suffisamment la dimension régionale. L’effet de masse ne jouera pas, la diversité de provenance non plus. La prise en compte de la dimension régionale doit donc être trouvée par une adaptation du mode de scrutin qui fasse que l’ensemble formé par les conseillers territoriaux soit, non seulement porteur de la dimension départementale (cantonale) de l’assemblée mais aussi de sa dimension régionale. Un scrutin mixte associant proportionnelle et majoritaire ou un scrutin proportionnel avec sections territoriales est davantage susceptible de conférer une dimension régionale à une partie au moins des conseillers territoriaux.

La Guadeloupe est une région de très faible superficie (15 fois inférieure à la moyenne des régions) et une région faiblement peuplée (6 fois moins que la moyenne des régions). La question de la représentation des territoires s’y pose forcément d’une manière différente que dans les autres régions. Même s’il existe des « territoires » à la personnalité bien marquée en Guadeloupe, ils sont moins nombreux que dans une région 15 fois plus vaste ou 6 fois plus peuplée. Il y a donc moins de « territoires » à représenter. Il y existe donc, dans le scrutin servant à désigner les conseillers territoriaux, une place pour une dose de proportionnelle.

Le faible nombre de communes, en Guadeloupe, 44 fois moins élevé que dans une région moyenne, plaide aussi pour que le scrutin devant désigner les conseillers territoriaux soit moins axé sur la représentation des collectivités ou circonscriptions infra régionales et davantage sur celle des sensibilités politiques.

La Guadeloupe est une région éloignée, ultrapériphérique. Elle forme un ensemble homogène dont les instances représentatives et, en premier lieu la région et le département sont extrêmement visibles par les citoyens. Davantage que dans l’hexagone, la région et le département sont connus des Guadeloupéens. Ils s’y identifient bien plus qu’un habitant du Centre ou du Poitou-Charentes. Il importe donc, davantage que dans l’hexagone, que la composition de l’assemblée délibérante de ces collectivités reflète bien la diversité des sensibilités, des sexes et des territoires.

Le Sénat offre l’exemple d’une assemblée dont les membres sont élus selon des modes de scrutin distincts en fonction de l’importance démographique des départements (ou plus exactement du nombre de sièges à pourvoir, ce qui est lié). Le scrutin mixte proposé par les élus de Guadeloupe semble soulever encore moins de questions au regard du principe d’égalité des électeurs devant le suffrage dans la mesure où tous voteraient deux fois (une fois pour le conseiller territorial du canton et une seconde fois pour une liste). Ils seraient ainsi placés sur un pied d’égalité. Le scrutin à la proportionnelle avec sections territoriales, déjà validé par le Conseil constitutionnel ne semble pas non plus poser de difficulté.

Cependant, le Président de la République a également écarté cette demande au motif qu’elle pourrait soulever des problèmes de constitutionnalité.

Il convient donc, s’agissant du scrutin mixte que nous retenons dans la présente proposition de loi, de se poser les questions suivantes :

– pourrait-il vraiment poser des problèmes de constitutionalité et, si oui, lequel et comment pourraient-ils être éventuellement corrigés ?

– dans la mesure où chaque électeur voterait deux fois, une fois au titre du scrutin majoritaire et une autre fois au titre du scrutin à la proportionnelle, pourrait-il réellement y avoir un risque de rupture d’égalité entre les électeurs ?

– dans la mesure où il s’agit de la combinaison de modes de scrutin étant considéré chacun comme clair et intelligible pour les électeurs et où la concomitance de deux scrutins le même jour n’est pas une originalité, pourrait-il y avoir, malgré tout, un risque d’inconstitutionnalité à ce titre ?

– un tel mode de scrutin pourrait-il excéder les possibilités d’adaptation offertes par l’article 73 de la Constitution ?

– pourrait-il être considéré comme une adaptation ne tenant pas ou insuffisamment aux caractéristiques particulières de la Guadeloupe ou ne répondant pas ou insuffisamment à ses contraintes, malgré les justifications ci-dessus développées ?

– la question de la constitutionnalité de ce mode de scrutin se pose-t-elle dans les mêmes termes pour toutes les options institutionnelles prévues à l’article 73 (les questions d’adaptation du mode de scrutin étant alors considérées comme indépendantes du caractère unique de la collectivité ou de l’assemblée) ou bien doit-on considérer que la collectivité unique ou l’assemblée unique offre davantage de souplesse à cet égard ?

S’agissant du scrutin à la proportionnelle avec sections territoriales qui est une solution également envisagée par le congrès mais qui, à ce stade, n’a pas été retenue dans la présente proposition de loi :

– pourrait-il vraiment poser des problèmes de constitutionalité et, si oui, lequel et comment pourraient-ils être éventuellement corrigés ?

– dans la mesure où ce mode de scrutin est inspiré du scrutin des élections régionales déjà jugé par le Conseil constitutionnel comme étant d’une « complexité justifiée par… », peut-on considérer qu’il ne poserait pas davantage de problème d’intelligibilité, en tant qu’adaptation à la Guadeloupe de la loi de réforme des collectivités territoriales ?

– ce mode de scrutin poserait-il, dans les départements d’outre-mer, un problème d’égalité des électeurs devant le suffrage universel ?

– pourrait-il être considéré comme une adaptation ne correspondant pas ou insuffisamment aux caractéristiques particulières de la Guadeloupe ou ne répondant pas ou insuffisamment à ses contraintes, malgré les justifications ci-dessus développées ?

– dans la mesure où il s’agit du mode de scrutin retenu pour l’élection des membres de l’assemblée délibérante des collectivités uniques de Guyane et de Martinique dont les compétences seront la simple adition des compétences du département et de la région, en quoi pourrait-il être conforme à la Constitution en Guyane et en Martinique et pas en tant qu’adaptation à la Guadeloupe de la loi de réforme des collectivités territoriales ?

– la constitutionnalité de ce mode de scrutin se pose-t-elle dans les mêmes termes dans le cas de la collectivité unique et de l’assemblée unique ?

PROPOSITION DE LOI

Article 1er

Le nombre de conseillers territoriaux est fixé, pour le département et la région de Guadeloupe, à 65.

Article 2

I. L’article 1er de la loi n° 2010-1563 du 16 décembre 2010 est complété par quatre alinéas ainsi rédigés :

« Les conseillers territoriaux de Guadeloupe sont élus :

« – pour 33 d’entre eux au scrutin uninominal à deux tours selon les modalités prévues au titre III du livre 1er du code électoral ;

« – pour 32 d’entre eux au scrutin de liste à la proportionnelle avec prime majoritaire de 50 % et répartition des restes à la plus forte moyenne selon les modalités prévues au titre 1er du livre IV du code électoral.

« Ils sont renouvelés intégralement tous les 6 ans. Les deux scrutins ont lieu le même jour. »

II. Pour l’application de l’article L. 338 du code électoral, les mots : « au quart » sont remplacés par deux fois par les mots : « à la moitié » et le mot : « arrondi » est remplacé par deux fois par le mot : « arrondie ».


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