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N° 4385

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 21 février 2012.

PROPOSITION DE LOI

visant à assurer l’aménagement numérique
et en téléphonie mobile du territoire,

(Renvoyée à la commission des affaires économiques, à défaut de constitution
d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par

MM. Stéphane DEMILLY, Pascal BRINDEAU, Rudy SALLES, Jean-Christophe LAGARDE, Charles De COURSON, Hervé De CHARETTE, Raymond DURAND et Thierry BENOIT,

députés.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Ainsi qu’il est souligné en préambule d’un récent rapport de la commission de l’économie, du développement durable et de l’aménagement du territoire du Sénat sur la couverture numérique des territoires(1), « la France est en passe de manquer le virage du numérique, et le retard qu’elle prend aujourd’hui risque de s’avérer rapidement irréversible ».

En dépit des affirmations officielles, la situation n’est, en effet, pas satisfaisante, les chiffres annoncés en la matière étant pour le moins trompeurs :

– s’agissant du haut débit, si 98,3 % des foyers bénéficient d’un accès à l’ADSL, le seuil pris en compte est fixé à 512 Kbit/s. À 2 Mbit/s, seuil considéré comme minima, on ne compte plus que 77 % des foyers, et à 8 Mbit/s, seuil permettant l’accès à une offre triple play, environ la moitié de la population ;

– pour ce qui est de la téléphonie mobile, le taux de couverture officiel est de 99,82 % de la population par au moins un opérateur en technologie 2G, taux que la 3G égalera fin 2013. Ce taux n’est pas révélateur car le référentiel de mesure de la couverture mobile ne prend en comte que les zones habitées, à l’extérieur des bâtiments et en situation fixe. Quant au programme d’extension de couverture dans ces zones, lancé en 2003 et renforcé en 2008, il est loin d’être achevé et le critère utilisé pour en rendre compte est encore moins pertinent dans la mesure où il considère comme couverte une commune dont seul le centre-bourg est desservi ;

– enfin, en ce qui concerne le très haut débit, des objectifs ambitieux ont été fixés par le Président de la République en février 2010 – 100 % des foyers éligibles en 2025 et 70 % en 2020 –, là où seuls 1 135 000 foyers sont raccordables et 555 000 effectivement abonnés à la fibre. Au rythme de déploiement actuel, il faudrait le siècle entier pour desservir l’ensemble de la population de notre pays !

En réalité, le dispositif retenu par les pouvoirs publics ne semble pas suffisant. Il repose en effet sur les opérateurs privés, qui ne déploient que dans les zones rentables, c’est-à-dire les zones urbaines. En-dehors des zones les plus denses, qui correspondent aux 148 communes identifiées par l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP) en juin 2009, les opérateurs ont publié, suite à l’appel à manifestation d’intentions d’investissements (AMII) lancé par le Gouvernement début août 2010, leurs projets de déploiement de réseaux à très haut débit ne nécessitant pas de subvention publique. Les 3 400 communes dans lesquelles ils entendent investir sont naturellement les plus urbaines. Leurs projets de déploiement ne les engagent en aucune façon, mais bloquent en revanche l’initiative des collectivités territoriales. En-dehors de ces zones, c’est-à-dire dans les territoires ruraux et semi-ruraux, par définition les plus coûteux à desservir, il revient aux collectivités territoriales de prendre le relais, sans aucune assurance sur le concours de l’État puisque le fonds d’aménagement numérique du territoire (FANT), créé par la loi du 17 décembre 2009 relative à la lutte contre la fracture numérique, n’est toujours pas alimenté.

Les retards et incertitudes qui découlent de cette situation sont préjudiciables à notre pays, dont le « décrochage numérique » est fortement envisageable. Et les territoires ruraux, dans lesquels les investissements sont a priori les moins rentables, sont les plus exposés à ce risque d’élargissement de la « fracture numérique ».

Cette situation est désormais fortement contestée par de très nombreuses collectivités locales, dont l’ensemble des associations représentatives a repris les propositions au sein d’un mémorandum. Établi par sept collectivités et groupements, il appelle à les « replacer (...) au cœur de l’aménagement numérique »(2).

Notre pays a su s’engager en matière d’accès au haut débit grâce, notamment, à l’action des collectivités locales, qui ont obtenu le droit d’agir de manière non restreinte dans le champ de la réalisation d’infrastructures numériques pour le développement du haut et très haut débit au titre de l’aménagement de leurs territoires. Cette intervention a été reconnue grâce au vote de l’article L. 1425-1 du code général des collectivités territoriales (CGCT).

Ainsi, une démarche mixte s’est engagée, mêlant action privée et action publique et qui, bien qu’évoluant dans un champ concurrentiel, ne privilégie pas la première au détriment de la seconde.

La réussite du haut débit au travers des réseaux d’initiative publique a été notamment bâtie grâce à la mise en place de projets intégrés, prenant en compte la péréquation des territoires entre les zones rentables et les zones non rentables. Au titre du service public local qu’elles avaient mis en place dans le cadre de l’article L. 1425-1 du CGCT, de nombreuses collectivités locales se sont vu reconnaitre par la Commission Européenne le droit de subventionner leurs projets au titre des « services d’intérêt économique général » (SIEG). Cette qualification est distincte de celle actuellement mise en œuvre au titre des aides d’État dans le cadre du programme national très haut débit (PNTHD).

Or, force est de constater que les mesures privilégiées par le programme national très haut débit ne permettent pas de recréer les mêmes conditions favorables à la mise en œuvre du très haut débit que celles qui ont concouru au développement du haut débit.

Dans le rapport sur le déploiement du très haut débit remis l’année dernière au Premier ministre(3), puis dans le rapport précité sur la couverture numérique des territoires, notre collègue Sénateur Hervé Maurey, après avoir dressé un constat alarmant de la situation française, avait appelé à un véritable « sursaut » et énuméré des pistes de réforme en ce sens. Il préconisait a minima une révision du modèle de déploiement retenu par les pouvoirs publics, qui n’a pas fait la preuve de son efficacité.

Le présent texte reprend celles des préconisations de ce rapport qui sont de nature législative. Il vise notamment à assurer un véritable « haut débit pour tous », à améliorer la mesure de couverture en téléphonie mobile et à rendre efficient le mode de déploiement choisi pour la couverture de notre territoire en très haut débit.

Regroupant les articles 1 à 3, le titre Ier est consacré à des dispositions d’ordre général.

L’article 1er élargit le champ de compétence des schémas directeurs territoriaux d’aménagement numérique (SDTAN), créés par la loi relative à la lutte contre la fracture numérique précitée, pour qu’ils concernent tous les aspects de la problématique numérique et en constituent désormais l’ossature : très haut débit, mais aussi haut débit et téléphonie mobile, sans oublier les technologies satellitaires (proposition n° 2).

Afin d’accélérer l’adoption de ces documents fondateurs de la planification numérique locale et d’accroître leur portée, l’article 2 l’impose dans un délai d’un an après la publication du présent texte et supprime leur caractère indicatif (proposition n° 3).

L’article 3 fait des SDTAN la base d’une contractualisation, sous l’autorité de l’État, entre les collectivités territoriales et les opérateurs, afin que ces derniers soient réellement liés par leur contenu et leurs propres engagements concernant la couverture en très haut débit. Les conditions d’analyse technique de cette dernière renvoient aux décisions de 2009 et 2010 de l’ARCEP, au regard des termes définis par l’Autorité(4) (propositions n° 4 et 9).

Consacré aux mesures spécifiques, le titre II comporte quatre chapitres et rassemble les articles 4 à 24.

Le chapitre Ier et ses articles 4 à 7 traite de la téléphonie mobile.

L’article 4 vise à assurer la meilleure couverture mobile, tout en optimisant le nombre de points hauts (proposition n° 5).

Afin que soit redéfinie la manière d’appréhender les taux de desserte en téléphonie mobile, qui ne rendent pas réellement compte de la couverture ressentie par les populations à l’échelle locale, l’article 5 prévoit la mise en place d’un groupe de travail associant des représentants de l’ensemble des parties concernées (proposition n° 7).

L’article 6 prévoit une obligation de couverture des « zones grises » de téléphonie mobile, s’accompagnant d’une méthodologie d’identification (proposition n° 8).

Afin que le déploiement du réseau mobile de quatrième génération fasse autant que possible appel à la mutualisation des installations entre opérateurs, l’article 7 reprend une mesure qui avait été prévue par la loi du 4 août 2008 de modernisation de l’économie (LME) pour le réseau 3G (proposition n° 12).

Composé des articles 8 et 9, le chapitre II évoque le haut débit.

L’article 8 met en place un véritable haut débit pour tous, en reconnaissant à toute personne un « droit au haut débit opposable » garanti par l’État, sur la base d’un débit symétrique de 2 Mbit/s en 2012 et 8 Mbit/s en 2015. Pour les personnes se trouvant dans un territoire non éligible à une telle offre, le caractère symétrique du débit n’est pas garanti par l’État, laissant ainsi la voie ouverte à des solutions techniques complémentaires aux réseaux filaires dans les zones les plus difficilement accessibles (proposition n° 13).

En vue d’améliorer qualitativement la desserte des foyers ne bénéficiant actuellement que d’une connexion à faible débit, l’article 9 rend la montée en débit sur tout type de réseaux éligible au FANT dans les cas où l’arrivée du très haut débit ne constitue pas une « porte de sortie par le haut » à court terme, étant rappelé que l’accès aux réseaux de communications électroniques est assuré sous le contrôle de l’ARCEP en application des dispositions du code des postes et communications électroniques(CPCE) (proposition n° 15).

Consacré au très haut débit, le chapitre III regroupe les articles 10 à 14.

L’article 10 permet le financement public national des « projets intégrés » des collectivités, portant pour partie sur une zone non rentable, pour partie sur une zone rentable, à condition que ne soient subventionnées que les zones non rentables de ces projets, conformément aux prévisions du droit communautaire (proposition n° 18).

L’article 11 ouvre aux collectivités la possibilité de bénéficier du financement public national dans les zones que les opérateurs devaient couvrir dans les trois ans, selon les prévisions contractuelles découlant des SDTAN, en cas de carence établie par l’ARCEP à l’issue de ce délai (proposition n° 19).

L’article 12 donne à l’ARCEP la compétence et les moyens de contrôler et sanctionner le respect des engagements pris par les opérateurs sur la base des SDTAN (proposition n° 21).

Afin que s’opère de façon claire et définitive la transition du haut vers le très haut débit, l’article 13 propose d’intégrer dans les SDTAN la date à laquelle aura lieu le basculement du premier type de réseau vers le second, en renvoyant aux décisions de l’ARCEP (proposition n° 22).

La mise en place d’une régulation symétrique des réseaux fibre à l’abonné, tout comme les enjeux de la « Net neutralité » et la nécessité de favoriser la concurrence au bénéfice des consommateurs, imposent de conforter, dans le CPCE, l’activité d’« opérateurs de réseau ». Ce rôle est exercé aussi bien par des opérateurs privés que les collectivités et leurs groupements, dans le cadre de l’article L. 1425-1 du CGCT. L’article 14 modifie en conséquence ledit code (proposition n° 23).

Le chapitre IV concerne les mesures financières et rassemble les articles 15 à 19.

Conformément aux propositions figurant dans le rapport d’octobre 2010 du Sénateur Hervé Maurey, les articles 15 et 16 visent à assurer le financement du FANT durant sa période de fonctionnement attendue, soit jusqu’à la fin 2025. Il est prévu de l’alimenter au moyen, d’une part d’une contribution de solidarité numérique sur les abonnements internet et téléphonie mobile, et d’autre part d’une taxe sur les téléviseurs et les consoles de jeu. Cette solution a été retenue car celle d’une dotation de l’État, également avancée dans le rapport, se serait heurtée à une irrecevabilité financière (proposition n° 25).

Afin de tenir compte de la diversité des moyens et de développer en priorité la desserte des territoires les plus ruraux, l’article 17 conditionne le financement de leurs projets par le FANT aux capacités financières des collectivités et au degré de ruralité des zones couvertes (proposition n° 27).

Les tarifs de connexion pratiqués par les opérateurs en haut et, plus encore, en très haut débit sont excessivement élevés pour les entreprises, ce qui constitue notamment un obstacle à l’installation des petites et moyennes (PME) en milieu rural. Aussi l’article 18 donne-t-il mission à l’ARCEP de réaliser une étude sur ce sujet, préalable éventuel à la régulation de cette tarification (proposition n° 28).

En vue d’éclairer la représentation nationale sur la tarification par l’opérateur historique de l’accès à la boucle locale, dont il est propriétaire, et le cas échéant de dégager des sources de financement complémentaires pour le déploiement des réseaux très haut débit, l’article 19 charge l’autorité de régulation d’un rapport sur le sujet (proposition n° 29).

Le chapitre V comporte les articles 20 à 25 et traite de mesures diverses.

L’article 20 assigne un objectif prioritaire de couverture des territoires ruraux à la politique d’aménagement du territoire, à commencer par les zones économiques et les services publics (proposition n° 30).

Afin de favoriser l’interconnexion des réseaux, l’article 21 prévoit la création d’un groupement d’intérêt public (GIP) ayant pour objet l’harmonisation des référentiels techniques pour les réseaux très haut débit (proposition n° 31).

L’article 22 confie au comité de pilotage du très haut débit, qui serait préalablement réactivé, la tâche de réaliser, à la mi-2013, et avec l’appui technique de l’ARCEP, un premier bilan du PNTHD accompagné, le cas échéant, de propositions de réforme du dispositif (proposition n° 33).

L’article 23 veille à la cohérence entre les documents d’urbanisme et les SDTAN.

L’article 24 introduit, dans la composition du comité de gestion du FANT, qui en était dépourvu, des représentants des parlementaires.

Enfin, l’article 25 prévoit la compensation des charges qui pourraient éventuellement résulter de ce texte pour l’État par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 403, 575, 575 A et 991 du code général des impôts.

PROPOSITION DE LOI

TITRE IER

DISPOSITIONS GÉNÉRALES

Article 1er

À la première phrase du premier alinéa de l’article L. 1425-2 du code général des collectivités territoriales, les mots : « concernant prioritairement les réseaux à très haut débit fixe et mobile, y compris satellitaire » sont remplacés par les mots : « qu’ils soient fixes comme mobiles, y compris satellitaires, à haut débit comme à très haut débit ».

Article 2

I. – À la dernière phrase du premier alinéa de l’article L. 1425-2 du code général des collectivités territoriales, les mots : « , qui ont une valeur indicative, » sont supprimés.

II. – Les schémas directeurs territoriaux d’aménagement numérique sont adoptés dans un délai d’un an à compter de la publication de la présente loi. Leur révision est examinée tous les deux ans dans les conditions prévues par l’article L. 1425-2 précité.

S’agissant des schémas adoptés avant la publication de la présente loi, ce délai de deux ans court à compter de la publication de la présente loi.

Article 3

L’article L. 1425-2 du code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :

1° Le premier alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Dans les six mois suivant leur approbation, une négociation se met en place en vue d’améliorer la couverture des territoires en téléphonie mobile de deuxième et troisième génération et en accès à Internet à haut débit. » ;

2° Le deuxième alinéa est complété par six phrases ainsi rédigées :

« Le schéma recense les engagements des opérateurs privés en matière d’investissement dans la réalisation de lignes de communications électroniques en fibre optique très haut débit dans un délai de trois années à compter du 31 janvier 2011, date de clôture de l’appel à manifestations d’intention d’investissement des opérateurs privés conduit par le gouvernement. Ces opérateurs précisent l’intensité de déploiement sur laquelle ils s’engagent en volume de lignes construites jusqu’à la prise terminale optique située à l’intérieur du local de l’utilisateur final et en pourcentage de foyers et d’entreprises, le calendrier de déploiement, année par année, et la cartographie précise des zones à couvrir sur cette période. Ces engagements sont accompagnés des justificatifs permettant d’assurer la crédibilité des informations fournies, notamment un plan d’entreprise, ainsi qu’une preuve de l’existence d’un financement approprié ou tout autre élément susceptible de démontrer la faisabilité de l’investissement envisagé par les opérateurs privés. Les engagements conformes aux dispositions du présent article donnent lieu à une convention entre les opérateurs privés et les collectivités et les groupements de collectivités concernés, qui fait l’objet, s’il y a lieu, d’une annexe du schéma. Chaque année, les opérateurs privés rendent compte de l’état d’avancement de leurs déploiements à la personne publique rédactrice du schéma, ainsi qu’à toute collectivité ou à tout groupement de collectivités concerné à l’initiative d’un réseau de communications électroniques en application de l’article L. 1425-1 sur le territoire constituant le périmètre du schéma. En cas de non-respect des modalités de déploiement par l’opérateur privé, l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes peut être saisie dans les conditions prévues par l’article L. 36-14 du code des postes et communications électroniques. »

TITRE II

MESURES SPECIFIQUES

CHAPITRE IER

Téléphonie mobile

Article 4

Après le premier alinéa de l’article L. 1425-2 du code général des collectivités territoriales, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« La personne publique en charge du schéma réalise une étude des points hauts pertinents pour assurer la meilleure couverture du territoire et diminuer le nombre de points hauts. Ce schéma des points hauts est pris en compte dans les schémas de cohérence territoriale, les plans locaux d’urbanisme et les cartes communales. La création ou la transformation d’un point haut fait l’objet d’une procédure déclarative auprès de la commune concernée, qui consulte la personne publique en charge du schéma. Si le territoire est concerné par un ou plusieurs réseaux d’initiative publique, et en particulier par l’existence d’un réseau de collecte publique irriguant les zones concernées par les points hauts, une procédure de mutualisation de la collecte de ces points hauts est réalisée sous la responsabilité de la personne publique en charge du schéma, en lien avec les opérateurs concernés. Une offre spécifique est faite aux opérateurs pour faciliter l’adduction de ces sites par un lien en fibre optique. »

Article 5

Il est créé un groupe de travail associant des représentants de l’État, du Parlement, de l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes, des collectivités, des opérateurs et des consommateurs ayant pour objet la redéfinition des critères de couverture en téléphonie mobile de deuxième et troisième génération. Ce droit s’exerce dans des conditions prévues par un décret en Conseil d’État.

Article 6

I. – Après l’article L. 34-8-4 du code des postes et communications électroniques, il est inséré un article L. 34-8-5 ainsi rédigé :

« Art. L. 34-8-5. – Les zones, incluant les centre-bourgs ou des axes de transport prioritaires, non couvertes par tous les opérateurs de radiocommunications mobiles de deuxième génération, sont couvertes en services de téléphonie mobile de deuxième génération de voix et de données par l’un de ces opérateurs chargé d’assurer une prestation d’itinérance locale, dans les conditions prévues par l’article L. 34-8-1.

« Par dérogation à la règle posée à l’alinéa précédent, la couverture en téléphonie mobile dans certaines zones est assurée, si tous les opérateurs de radiocommunications mobiles en conviennent, par un partage d’infrastructures entre les opérateurs.

« Les zones mentionnées au premier alinéa sont identifiées par les préfets de région en concertation avec les départements et les opérateurs. En cas de différend sur l’identification de ces zones dans un département, les zones concernées sont identifiées au terme d’une campagne de mesures conformément à une méthodologie validée par l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes. Le ministre concerné rend publique la liste nationale des communes ainsi identifiées et la communique à l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes.

« Sur la base de la liste nationale définie à l’alinéa précédent et dans les deux mois suivant sa transmission aux opérateurs par le ministre précité, les opérateurs adressent audit ministre et à l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes un projet de répartition entre les zones qui seront couvertes selon le schéma de l’itinérance locale et celles qui seront couvertes selon le schéma du partage d’infrastructures, un projet de répartition des zones d’itinérance locale entre les opérateurs, ainsi qu’un projet de calendrier prévisionnel de déploiement des pylônes et d’installation des équipements électroniques de radiocommunication. Le ministre précité approuve ce calendrier prévisionnel dans le mois suivant sa transmission par les opérateurs. L’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes se prononce sur les répartitions proposées, qui ne doivent pas perturber l’équilibre concurrentiel entre opérateurs de téléphonie mobile, dans le mois suivant leur transmission par les opérateurs. La couverture d’une commune est assurée dans les trois ans suivant son identification par le ministre précité.

« Ledit ministre rend compte annuellement au Parlement de la progression de ce déploiement. »

II. – Au deuxième alinéa de l’article L. 34-8-1 du même code, les mots : « de deuxième génération » sont supprimés.

Article 7

Dans le respect des objectifs visés au II de l’article L. 32-1 du code des postes et des communications électroniques et afin de faciliter la progression de la couverture du territoire en radiocommunications mobiles de quatrième génération, l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes détermine, après consultation publique et au plus tard six mois après la promulgation de la présente loi, les conditions et la mesure dans lesquelles sera mis en œuvre, en métropole, un partage des installations de réseau de quatrième génération de communications électroniques mobiles, et notamment le seuil de couverture de la population au-delà duquel ce partage sera mis en œuvre.

CHAPITRE II

Haut débit

Article 8

Le droit à une connexion à un réseau de communications électroniques, sur la base d’un débit symétrique minimum de 2 Mbit/s en 2012 et 8 Mbit/s en 2015 et au regard de l’offre de débit proposée par les opérateurs et vérifiée par l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes, est garanti par l’État à toute personne en étant dépourvue.

Dans les territoires non éligibles à cette offre selon l’Autorité, l’État garantit le droit à une connexion sur la base d’un débit minimum de 2 Mbit/s en 2012 et 8 Mbit/s en 2015.

Les préfets de région veillent, dans le cadre de la stratégie de cohérence régionale pour l’aménagement numérique, à la mise en œuvre de ce droit. Celle-ci est examinée dans le cadre de l’élaboration des schémas directeurs territoriaux d’aménagement numérique et de leur révision.

Article 9

Le premier alinéa du I de l’article 24 de la loi n° 2009-1572 du 17 décembre 2009 relative à la lutte contre la fracture numérique est complété par un membre de phrase et une phrase ainsi rédigés : « y compris les travaux de montée en débit, quelle que soit la technologie des réseaux de communications électroniques mobilisés, lorsqu’ils auront été identifiés comme opportuns dans l’attente du déploiement du très haut débit selon la réglementation définie par l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes. »

CHAPITRE III

Très haut débit

Article 10

I. – Après le troisième alinéa du I de l’article 24 de la loi n° 2009-1572 du 17 décembre 2009 relative à la lutte contre la fracture numérique, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Les projets intégrés des collectivités territoriales et de leurs groupements, qui sont déployés dans les zones non rentables et dans les zones rentables de leur territoire dans le cadre de l’article L. 1425-1 du code général des collectivités territoriales, sont éligibles aux aides du fonds d’aménagement numérique des territoires à condition que ces aides ne soient assises que sur la partie de ces projets déployée dans les zones non rentables. On entend par zones rentables les zones dans lesquelles des opérateurs privés ont déjà déployé leur propre réseau de lignes de communications électroniques en fibre optique très haut débit desservant l’ensemble des utilisateurs finals de la zone considérée ou se sont engagés à le faire dans le cadre de la convention jointe en annexe du schéma directeur territorial d’aménagement numérique dans les conditions fixées par le deuxième alinéa de l’article L. 1425-2 du même code. »

II. – Les dispositions du présent article sont applicables au Fonds national pour la société numérique mis en place par le programme national très haut débit.

Article 11

Après le troisième alinéa du I de l’article 24 de la loi n° 2009-1572 du 17 décembre 2009 relative à la lutte contre la fracture numérique, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Il peut enfin attribuer des aides aux maîtres d’ouvrage pour ceux de leurs projets situés dans des zones que les opérateurs privés s’étaient engagés, conformément au deuxième alinéa de l’article L. 1425-2 du code général des collectivités territoriales, à couvrir dans un délai de trois ans à compter du 31 janvier 2011, lorsqu’il est établi, par l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes et à la demande de ces maîtres d’ouvrage, que les déploiements annoncés n’ont pas débuté au terme du délai précité ou qu’ils ont pris un retard significatif constaté par rapport au calendrier de réalisation initialement communiqué. »

Article 12

Après l’article L. 36-13 du code des postes et communications électroniques, il est inséré un article L. 36-14 ainsi rédigé :

« Art. L. 36-14. – L’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes contrôle le respect par les opérateurs des engagements contractuels pris lors de la concertation conduite par les collectivités territoriales et leurs groupements dans le cadre de l’élaboration des schémas directeurs territoriaux d’aménagement numérique en application de l’article L. 1425-2 du code général des collectivités territoriales. Elle peut être saisie par les collectivités en cas de contestation portant sur l’exécution desdits engagements contractuels. Lorsqu’elle constate leur non respect, partiel ou total, elle peut mettre l’opérateur concerné en demeure de mettre en œuvre ses obligations. Si le manquement persiste, elle peut constater que l’opérateur n’a pas respecté ses engagements et le sanctionner. Les décisions ainsi prises par l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes peuvent faire l’objet d’un recours dans les conditions prévues au III de l’article L. 36-8 du présent code.

« Les contestations portant sur l’exécution par les collectivités de leurs obligations font l’objet de recours devant les juridictions administratives compétentes. ».

Article 13

I. – Après la première phrase du premier alinéa de l’article L. 1425-2 du code général des collectivités territoriales, sont insérées trois phrases ainsi rédigées :

« Ils fixent par ailleurs le délai dans lequel doit s’opérer, sur le périmètre qu’ils couvrent, l’extinction du réseau haut débit fixe et son basculement intégral vers le réseau très haut débit. Ce basculement doit intervenir dès lors qu’au moins 60 % des foyers sont raccordables à une ligne de communications électroniques en fibre optique très haut débit. Ce délai n’excède pas le 31 décembre 2025. »

II. – L’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes établit annuellement, dans le cadre de son rapport adressé au Parlement, la liste des territoires départementaux concernés par la mise en œuvre de ce basculement.

Dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, elle établit les conditions dudit basculement.

Elle rend compte de l’ensemble de ces éléments aux commissions compétentes du Parlement.

Article 14

Le code des postes et communications électroniques est ainsi modifié :

1° Le 15° de l’article L. 32 est ainsi rédigé :

« 15° Opérateur de réseau

« On entend par opérateur de réseau toute personne physique ou morale, publique ou privée, établissant et exploitant des infrastructures et des réseaux de communications électroniques ouverts au public, en vue de leur mise à disposition, entièrement ou principalement, auprès d’opérateurs. » ;

2° Avant le dernier alinéa de l’article L. 36-6, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« L’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes prend en compte, dans l’élaboration de ces règles, les spécificités de chaque catégorie d’opérateurs dont les opérateurs de réseaux. Elle veille à assurer la présence dans les instances de concertation et d’expertise qu’elle met en place de tout opérateur, dont les opérateurs de réseaux, publics et privés, concernés par les règles envisagées, et à prendre en compte, dans ses décisions, chacune de ces catégories. »

CHAPITRE IV

Mesures financières

Article 15

Après l’article 302 bis KH du code général des impôts, il est inséré un article 302 bis KI ainsi rédigé :

« Art. 302 bis KI. – I. – Il est institué, jusqu’au 31 décembre 2025, une taxe due par tout opérateur de communications électroniques, au sens de l’article L. 32 du code des postes et des communications électroniques, qui fournit un service en France et qui a fait l’objet d’une déclaration préalable auprès de l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes en vertu de l’article L. 33-1 du même code.

« II. – Cette taxe est assise sur le montant, hors taxe sur la valeur ajoutée, des abonnements et autres sommes acquittés par les usagers aux opérateurs mentionnés au I en rémunération des services de communications électroniques qu’ils fournissent.

« III. – L’exigibilité de la taxe est constituée par l’encaissement du produit des abonnements et autres sommes mentionnés au II.

« IV. – Le montant de la taxe s’élève à 75 centimes d’euros par mois et par abonnement.

« V. – Les redevables procèdent à la liquidation de la taxe due au titre de l’année civile précédente lors du dépôt de la déclaration mentionnée au I de l’article 287 du mois de mars ou du premier trimestre de l’année civile.

« VI. – La taxe est recouvrée et contrôlée selon les mêmes procédures et sous les mêmes sanctions, garanties, sûretés et privilèges que la taxe sur la valeur ajoutée. Les réclamations sont présentées, instruites et jugées selon les règles applicables à cette même taxe.

« VII. – Le produit de la taxe est affecté au fonds d’aménagement numérique des territoires mentionné à l’article 24 de la loi n° 2009-1572 du 17 décembre 2009 relative à la lutte contre la fracture numérique. »

Article 16

Après l’article 302 bis KH du code général des impôts, il est inséré un article 302 bis KJ ainsi rédigé :

« Art. 302 bis KJ. – I. – Il est institué, jusqu’au 31 décembre 2025, une taxe due par tout constructeur de téléviseur et de console de jeu.

« II. – La taxe est assise sur le montant net desdits téléviseurs et consoles de jeu.

« III. – L’exigibilité de la taxe est constituée par la vente desdits produits au client final.

« IV. – Le montant de la taxe s’élève à 2 % du prix de vente net desdits produits.

« V. – Les redevables procèdent à la liquidation de la taxe due au titre de l’année civile précédente lors du dépôt de la déclaration mentionnée au I de l’article 287 du mois de mars ou du premier trimestre de l’année civile.

« VI. – La taxe est recouvrée et contrôlée selon les mêmes procédures et sous les mêmes sanctions, garanties, sûretés et privilèges que la taxe sur la valeur ajoutée. Les réclamations sont présentées, instruites et jugées selon les règles applicables à cette même taxe.

« VII. – Le produit de la taxe est affecté au fonds d’aménagement numérique des territoires mentionné à l’article 24 de la loi n° 2009-1572 du 17 décembre 2009 relative à la lutte contre la fracture numérique. »

Article 17

Après le mot : « compte », la fin du quatrième alinéa de l’article 24 de la loi n° 2009-1572 du 17 décembre 2009 relative à la lutte contre la fracture numérique est ainsi rédigée : « des capacités financières des maîtres d’ouvrage et du degré de ruralité de la zone concernée ».

Article 18

Chaque année suivant l’entrée en vigueur de la présente loi, l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes remet au Parlement un rapport sur la tarification par les opérateurs de l’accès aux réseaux haut et très haut débit pour les entreprises et formule des propositions.

Article 19

Dans les douze mois suivant l’entrée en vigueur de la présente loi, l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes remet au Parlement un rapport sur les conditions tarifaires et concurrentielles d’accès à la boucle locale et sur les provisions pour renouvellement du réseau et formule des propositions.

CHAPITRE V

Mesures diverses

Article 20

Après le 7° de l’article L. 111-2 du code rural et de la pêche maritime, il est inséré un 7° bis ainsi rédigé :

« 7° bis Favoriser le déploiement du très haut débit de façon prioritaire dans les zones rurales, en commençant par les zones d’activité et les services publics ; ».

Article 21

Il est créé un groupement d’intérêt public doté de la personnalité morale et de l’autonomie financière ayant pour objet, dans le respect des décisions de l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes, d’harmoniser les référentiels techniques utilisés pour l’élaboration, la construction et l’exploitation des réseaux à très haut débit.

Ce groupement est constitué, sans capital, entre l’État, les collectivités territoriales, leurs groupements et les opérateurs de communications électroniques.

Il ne donne lieu ni à la réalisation, ni au partage de bénéfices.

Il est administré par un conseil d’administration composé de représentants de ses membres constitutifs.

Son président est choisi par le conseil d’administration et assure les fonctions de directeur du groupement.

La convention par laquelle il est constitué doit être approuvée par le Premier ministre et le ministre en charge des communications électroniques.

Article 22

Au 1er juillet 2013, le comité de pilotage du très haut débit remet un rapport sur l’avancement du programme national « très haut débit » ainsi que, s’il le juge nécessaire, des propositions de réforme de ce dernier. Il s’appuie pour ce faire et en tant que de besoin sur l’expertise technique de l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes.

Article 23

Le code de l’urbanisme est ainsi modifié :

1° Après le troisième alinéa de l’article L. 122-1-12, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« – le schéma directeur territorial d’aménagement numérique lorsqu’il a été adopté sur le territoire considéré en application de l’article L. 1425-2 du code général des collectivités territoriales. » ;

2° Le troisième alinéa du 14° de l’article L. 123-1-5 du code de l’urbanisme est complété par une phrase ainsi rédigée : « En matière d’infrastructures et de réseaux de communications électroniques, les critères de qualité prennent en compte les dispositions du schéma directeur territorial d’aménagement numérique lorsqu’il a été adopté sur le territoire considéré en application de l’article L. 1425-2 du code général des collectivités territoriales ».

Article 24

Au deuxième alinéa du I de l’article 24 de la loi n° 2009-1572 du 17 décembre 2009 relative à la lutte contre la fracture numérique, après le mot : « État », sont insérés les mots : « et du Parlement ».

Article 25

Les charges qui pourraient résulter pour l’État de l’application de la présente loi sont compensées à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 403, 575, 575 A et 991 du code général des impôts.

Les charges qui pourraient résulter pour les collectivités territoriales et leurs groupements de l’application de la présente loi sont compensées à due concurrence par la majoration de la dotation globale de fonctionnement et corrélativement pour l’État par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

1 () Aménagement numérique des territoires : passer des paroles aux actes, rapport d’information n° 730 (2010-2011) de M. Hervé Maurey, sénateur.

2 () www.maitrisernotreamenagementnumerique.fr.

3 () Réussir le déploiement du très haut débit : une nécessité pour la France, rapport de M. Hervé Maurey remis au Premier ministre, octobre 2010.

4 () Décisions de l’ARCEP n° 2009-1106 en date du 22 décembre 2009 et n° 2010-1312 en date du 14 décembre 2010.


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