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N° 4478

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 20 mars 2012.

PROPOSITION DE LOI

visant à faciliter l’accès au logement en instaurant
une garantie universelle des risques locatifs,

(Renvoyée à la commission des affaires économiques, à défaut de constitution
d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par Mesdames et Messieurs

Christian ESTROSI, Jean BARDET, Arlette GROSSKOST, Bernard DEPIERRE, Michel GRALL, Jean-Christophe LAGARDE, Christian MÉNARD, Bernard PERRUT, Jean-Marc ROUBAUD, Alfred TRASSY-PAILLOGUES, Philippe VITEL, Marc-Philippe DAUBRESSE, Anne GROMMERCH, Bertrand PANCHER, Éric STRAUMANN, Bernard BROCHAND, Raymond DURAND, Jean-Claude GUIBAL, Jacques REMILLER, Marc BERNIER, Jean-Pierre DECOOL, Jean-Pierre DUPONT, Jean-Michel COUVE, Richard MALLIÉ, Alain MOYNE-BRESSAND, Frédéric REISS, Fernand SIRÉ, Christian VANNESTE, Éric WOERTH, Nicolas DHUICQ, Henriette MARTINEZ, Jean PRORIOL, Jean-Pierre ABELIN, Bernard CARAYON, Guy GEOFFROY, Jacques LAMBLIN et Rudy SALLES,

députés.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Au cours des 5 dernières années, 500 000 personnes ont dû refuser un emploi en raison de l’impossibilité de disposer d’un logement économiquement accessible(1). Dans le même temps, un chef d’entreprise sur cinq affirme avoir rencontré des difficultés dans le recrutement d’un salarié toujours en raison d’un problème de logement.

Les bailleurs du parc locatif privé veulent en effet sécuriser leur investissement, ce qui est normal, en exigeant des garanties toujours plus importantes sous la forme d’une sélection drastique des profils de salariés ou de la production d’une caution financière.

Mais ces contraintes excluent quasi automatiquement les jeunes confrontés d’une part, à un marché du travail qui demande mobilité et flexibilité et d’autre part, à un marché du logement rigide et exigeant. Nous devons donc veiller à garantir une assurance aussi bien à l’ensemble des bailleurs qu’à tous les locataires qui travaillent ou ont des revenus stables.

La garantie des risques locatifs (GRL) est un contrat d’assurance qui assure le bailleur contre les risques liés à la location d’un logement : impayés de loyer, frais de procédures de recouvrement et dégradations du fait du locataire.

Son objectif est de faciliter l’accès au logement à tous, y compris des personnes en situation de précarité (CDD, étudiants, jeunes ménages…) en éliminant le risque financier lié à la location du logement pour le bailleur. Le risque de sur-sinistralité est pris en charge par Action Logement et par l’État.

Cependant, aujourd’hui coexistent deux dispositifs de garantie des loyers impayés :

– la garantie loyer impayé (GLI) pour les locataires dont les critères de solvabilité correspondent à ceux fixés par les assureurs (CDI et taux d’effort – (loyer+charges)/ressources – inférieur à 33 %), et produit donc de l’exclusion ;

– la garantie des risques locatifs (GRL) sans discrimination, pour tout locataire quel que soit son statut professionnel, et dont le taux d’effort est de 50 % maximum, soit les candidats locataires refusés en GLI.

Ce deuxième dispositif est une véritable réussite puisqu’il a permis en deux ans d’assurer 270 000 logements, soit 270 000 locataires dont 100 000 jeunes qui, au vu de leur situation professionnelle ou de leurs revenus, n’auraient sans doute pas trouvé un logement sans cette assurance.

Cette proposition de loi vise à généraliser la GRL qui repose sur deux piliers : un cahier des charges unique pour toutes les assurances proposées aux bailleurs, permettant de couvrir au mieux toutes les situations professionnelles des locataires ; un mécanisme de compensation pour les assureurs, financé par les partenaires sociaux et l’État.

Le produit unique permettrait un accroissement du taux de pénétration sur le marché locatif privé de la garantie locative, et faciliterait donc l’accès du plus grand nombre au logement locatif privé, tout en sécurisant totalement les propriétaires bailleurs du parc privé, et en garantissant une compensation aux assureurs.

Au fur et à mesure de sa généralisation, la GRL viendra remplacer d’autres dispositifs existants qui n’ont pas fait la preuve de leur efficacité, générant une plus grande efficience, tant en termes de lisibilité que d’économies.

L’unification des garanties et la simplification du recours à l’assurance au travers du produit unique, doit conduire à l’incitation du bailleur à s’assurer contre les risques de Loyers Impayés, lequel bailleur est de plus en plus sensibilisé à la question de la sécurisation de ses revenus.

Concernant les assureurs, la sur-sinistralité sera toujours réassurée par les partenaires sociaux et l’État. La liberté commerciale des assureurs sera préservée, comme dans les cas existants de contrats à cahier des charges type.

Enfin, le risque d’un désengagement massif des assureurs des dispositifs de garantie des loyers impayés est fort peu probable, dans la mesure où plusieurs assureurs distribuent déjà la GRL. Il est rare que les acteurs économiques décident volontairement de laisser un marché présentant peu de risques (du fait de la réassurance) à quelques-uns, alors même que ce marché présente l’avantage d’offrir d’importants fichiers de clientèle.

La dimension humaine et le bénéfice, tant social que politique, de la mise en place d’un dispositif unique de Garantie universelle des risques locatifs, s’inscrit donc dans une démarche solidaire et d’intérêt général, permettant d’élargir l’accès au logement, notamment dans les zones en tension d’emploi, tout en respectant les contraintes budgétaires actuelles, autant que le droit de la concurrence et l’impératif d’une gestion pluraliste pour les assureurs.

C’est une réponse forte aux problèmes localisés d’emploi que nous connaissons tous.

Les dépenses supplémentaires pour l’État, en cas de croissance des contrats d’assurance loyers impayés avec ce cahier des charges unique, proviennent de la réassurance, conjointement avec les partenaires sociaux, de la sur-sinistralité pour les contrats qui assurent un logement dont le locataire a un taux d’effort supérieur à 28 %.

La réassurance est financée en majeure partie par les partenaires sociaux, qui se sont déjà engagés à garantir 500 millions € sur trois ans.

Le tableau ci-joint offre une simulation des dépenses supplémentaires pour les deux parties2.

 

Taux de fréquence annuel net à 12 %

Nombre de nouveaux baux par année

Coût annuel du dispositif

Dont part de l’État

100 000

78 M€

12 M€

200 000

156 M€

23 M€

300 000(3)

208 M€

31 M€

400 000(4)

242 M€

36 M€

NB : le taux de sinistralité retenu est une hypothèse haute (supérieur au taux actuel).

Il est donc nécessaire de prévoir un financement nouveau pour compenser ces dépenses. A partir du moment où les volumes des contrats souscrits par les assureurs vont augmenter, et que l’État et les partenaires sociaux réassurent le dispositif, qui ne comporte donc pas de risques pour les assureurs, il est normal que les assureurs participent au financement global du mécanisme.

Dans ce contexte,

L’article 1 définit la notion de garantie universelle des risques locatifs.

L’article 2 propose de généraliser le cahier des charges de la garantie des risques locatifs pour toutes les garanties locatives.

L’article 3 propose une compensation financière des dépenses engendrées par cette proposition en augmentant la contribution sociale sur l’impôt sur les sociétés.

L’article 4 prévoit l’entrée en vigueur des dispositions de l’article 2, quatre mois après la promulgation de la loi afin de laisser le temps aux assureurs de créer leur produit d’assurance.

Tels sont les motifs pour lesquels il vous est demandé de bien vouloir adopter les dispositions suivantes.

PROPOSITION DE LOI

Article 1er

Il est instauré une garantie universelle des risques locatifs. Elle repose sur la généralisation de la garantie des risques locatifs, qui devient le produit d’assurance unique contre les loyers impayés. Celle-ci repose sur un contrat d’assurance destiné aux bailleurs au cahier des charges unique, et sur un mécanisme de compensation assuré par les partenaires sociaux et l’État.

Article 2

Le chapitre II du Titre IV du livre IV du code des assurances est complété par une section V ainsi rédigée :

« Section V

« Garantie des risques locatifs

« Art. L. 442-7. – Les contrats d’assurance contre les impayés de loyer respectent le cahier des charges mentionné au g de l’article L. 313-3 du code de la construction et de l’habitation. »

Article 3

La compensation est assurée par une surtaxe appliquée, à due concurrence des dépenses de l’État, à la contribution sociale sur l’impôt sur les sociétés, prévue à l’article 235 ter ZC du code général des impôts, due par les entreprises d’assurances qui y sont assujetties à l’exception de celles qui distribuent la garantie des risques locatifs.

Article 4

Les dispositions de l’article 2 entrent en vigueur quatre mois après la promulgation de la présente loi.

1 () CREDOC.

2 () APAGL.

3 () La mutualisation du risque fait mécaniquement baisser la fréquence de 12 % à 11 %.

4 () La mutualisation du risque fait mécaniquement baisser la fréquence de 12 % à 10 %.


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