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ART. 3N°31 (Rect)

ASSEMBLÉE NATIONALE
2 octobre 2015

GRATUITÉ ET MODALITÉS DE LA RÉUTILISATION DES INFORMATIONS DU SECTEUR PUBLIC - (N° 3090)

Commission
 
Gouvernement
 

Retiré

AMENDEMENT N°31 (Rect)

présenté par

M. Belot

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ARTICLE 3

I. – Supprimer la seconde phrase de l’alinéa 2.

II. – En conséquence, après le même alinéa, insérer les deux alinéas suivants :

« Les administrations mentionnées à l’article premier peuvent établir une redevance de réutilisation si le coût de la reproduction, de l’anonymisation ou de la numérisation de leurs informations publiques représente une part significative de leurs ressources.

« L’alinéa précédent ne s’applique pas aux administrations mentionnées à l’article premier si la diffusion d’informations publiques fait partie de leurs missions principales. »

III. – En conséquence, compléter cet article par les deux alinéas suivants :

« II. –Le troisième alinéa du I de l’article 15 de la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 portant diverses mesures d'amélioration des relations entre l'administration et le public et diverses dispositions d'ordre administratif, social et fiscal , dans sa rédaction résultant de la présente loi, entre en vigueur douze mois après la promulgation de la présente loi.

« III. – La perte de recettes pour les administrations mentionnées à l'article 1er de la même loi est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux droits mentionnés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »

EXPOSÉ SOMMAIRE

L’article 1er de la directive 2013/37/UE disposant que la directive « fixe un ensemble minimal de règles concernant la réutilisation et les moyens pratiques destinés à faciliter la réutilisation de documents existants détenus par des organismes du secteur public des États membres », l’alinéa 2 de l’article 3 va au-delà de ce qu’impose la directive en instituant un principe de gratuité de la réutilisation d’informations publiques.

-Le présent amendement propose de donner une plus grande application du principe de gratuité de la réutilisation d’informations publiques affirmé par le comité interministériel pour la modernisation de l’action publique (CIMAP) du 18 décembre 2013 :« Décision n°26 : Le Gouvernement précise sa doctrine en matière d’exceptions au principe de gratuité :

‐ aucune redevance ne saurait être exigée sur des données résultant des missions de service public des administrations générales. Il est demandé aux administrations d’accroître leurs efforts en matière de publication de données leur permettant de mener à bien leurs missions, de motiver leurs décisions, de mesurer leurs activités ou leur bilan. Le site data.gouv.fr, est en mesure d’accueillir ces données ;

‐ le respect du secret statistique et donc l’anonymisation des informations pouvant éventuellement permettre d’identifier des personnes est un principe central du droit français. Certaines redevances ont été instaurées pour financer cette tâche, qui est indispensable avant ouverture de la donnée. Le Gouvernement demande au SGMAP d’apporter tout le soutien possible aux services publics concernés, afin d’identifier les moyens de réduire ces coûts sans dégrader la qualité de cette anonymisation ;

‐ enfin, le Gouvernement réaffirme que les opérateurs dont la mission même est de produire des données doivent rechercher des modèles économiques leur permettant de faire face à un paysage économique en profonde reconstitution. Conformément aux conclusions du rapport Trojette, il leur demande d’engager, dans les meilleurs délais, avec l’appui du SGMAP et du ministère du Budget, une réflexion sur les évolutions de leurs modèles économiques. Il leur demande de rechercher des modèles stimulant l’innovation autour de leurs données, favorables aux entrepreneurs innovants, et soutenables à l’heure de l’économie numérique, de la production de nombreuses données par les citoyens eux-mêmes, et des stratégies de plateformes. »

Dans une étude de 1988, le Conseil d’État a admis que « certains services publics aspirent à se procurer des ressources propres et soient aptes à en bénéficier pour des prestations déterminées qui s’ajoutent aux tâches normales des administrations… Mais il attire l’attention du Gouvernement sur le risque d’altération de la notion de service public autour de laquelle notre administration est construite si se développait la tendance à instituer des ressources annexes qui seraient demandées aux usagers en contrepartie de la mission naturelle des services » ([1]). Le Conseil d’État a également affirmé en 2002 que si « la possibilité même d’une rémunération par l’usager est nécessairement exclue lorsque le service n’a pas de bénéficiaire direct, il peut en aller différemment dans les autres cas, où certains services, même ceux essentiellement assurés dans l’intérêt général, s’adressent en même temps à des utilisateurs déterminés. Le paiement par l’usager peut alors être envisagé, mais il n’a rien d’inéluctable. C’est là affaire de choix politique. En fonction de la nature et de l’objet du service, le recours à la solidarité nationale, qui suppose un financement par l’impôt, peut être jugé préférable. » ([2])

Un service, même exercé en direction d’une personne déterminée, est parfois réputé assuré dans l’intérêt général, et non dans l’intérêt du bénéficiaire apparent, ce qui implique un financement par la solidarité national et pas par la voie de la redevance[3]. Ces services font en général l’objet de dispositions constitutionnelles, législatives ou particulières, prohibant ou encadrant expressément la perception de sommes auprès de leurs bénéficiaires. C’est par exemple le cas du service public de la diffusion du droit par l’Internet (article 1er du décret n°2002‑1064 du 7 août 2002 : « il est créé un service public de la diffusion du droit par l’internet. Ce service a pour objet de faciliter l’accès du public aux textes en vigueur ainsi qu’à la jurisprudence. Il met gratuitement à la disposition du public les dispositions suivants … »)

Par exemple, l’article 1er du décret n° 46‑1432 du 14 juin 1946 portant règlement d’administration publique pour l’application des articles 32 et 33 de la loi de finances du 27 avril 1946 relatifs à l’institut national de la statistique et des études économiques pour la métropole et la France d’outre-mer donne comme missions à l’INSEE :

« 1° D’établir, de rassembler et de mettre à jour les statistiques relatives à l’État et au mouvement des personnes et des biens dans la métropole et dans les territoires d’outre-mer en utilisant, le cas échéant, les éléments qui lui sont fournis par les diverses administrations ;

3° De donner et de tenir à jour l’inventaire permanent de l’économie ;

4° D’observer l’évolution de la situation économique dans la métropole, dans la France d’outre-mer et à l’étranger ;

6° De diffuser ou de publier s’il y a lieu les résultats de ses travaux ; »

Autre exemple, le décret n° 2011‑1371 du 27 octobre 2011 relatif à l’Institut national de l’information géographique et forestière (IGN) donne pour missions à l’IGN

3° Constituer et mettre à jour sur l’ensemble du territoire les bases de données géographiques et les fonds cartographiques dont la liste est fixée par arrêté du ministre chargé du développement durable, notamment le référentiel à grande échelle (RGE).

4° Constituer et mettre à jour, sur le territoire métropolitain, les bases de données relatives aux ressources et aux milieux forestiers ainsi qu’un référentiel géographique de description des essences forestières cohérent avec le référentiel à grande échelle, publier un rapport annuel des résultats de l’inventaire permanent forestier, fournir les éléments nécessaires à la délimitation de régions forestières homogènes, suivre et surveiller spécifiquement les écosystèmes forestiers, produire des indicateurs de gestion durable de la forêt française conformes aux critères internationaux et participer aux travaux de conférences et d’organisations internationales dans le domaine forestier, dans des conditions fixées par arrêté du ministre chargé des forêts ;

7° Diffuser les bases de données géographiques et forestières ainsi que les fonds cartographiques qu’il constitue, notamment au moyen d’un portail INSPIRE tel que défini à l’article L. 127‑1 du code de l’environnement ; ».

Naturellement, les travaux entrant dans le champ de la prestation pourront toujours faire l’objet d’une rémunération, mais cela ne relève pas du niveau législatif.

Le législateur devra en revanche faire preuve de la plus grande cohérence, en compensant pour ces administrations la perte des redevances par une augmentation de leur dotation budgétaire.

Cette disposition n’entrera toutefois en vigueur que dans un délai de douze mois à compter de la publication de la présente loi, pour permettre aux organismes concernés d’adapter leur modèle économique.

([1]) Conseil d’État, Études et documents de 1988, cité par M. Mohammed Adnène Trojette, rapport au Premier ministre, « Ouverture des données publiques, les exceptions au principe de gratuité sont-elles toutes légitimes ? », juillet 2013.

([2]) Conseil d’État, Études de 2002 cité par M. Mohammed Adnène Trojette, op. cit.

[3] Secrétariat général du Gouvernement et Conseil d’État, Guide pour l’élaboration des textes législatifs et réglementaires