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Commission des affaires étrangères

Mercredi 30 avril 2014

Séance de 9 heures 30

Compte rendu n° 53

présidence de Mme Elisabeth Guigou, Présidente

– Hébergement et fonctionnement du centre de sécurité Galileo (n° 1846) – Mme Pascale Boistard, rapporteure

– Consortium des centres internationaux de recherche agricole en qualité d'organisation internationale : accord de siège et immunités sur le territoire français (n° 1766 et n° 1767) – M. Jacques Cresta, rapporteur

–  Canada : accord relatif à la mobilité des jeunes (n° 1796) – M. Patrice Martin-Lalande, rapporteur.

La séance est ouverte à neuf heures trente.

M. Jean-Paul Dupré. Avant de passer à l’ordre du jour, je voudrais évoquer un point d’actualité. Je pense que la commission des affaires étrangères devrait prendre officiellement position sur la situation des observateurs de l’OSCE qui sont retenus dans l’est de l’Ukraine. Nous pourrions notamment demander à la Russie de tout mettre en œuvre pour qu’ils soient libérés. Plus généralement, on doit s’interroger sur ce qui a conduit à une telle situation, qui est d’autant plus inadmissible qu’elle survient sur le sol de l’Europe.

Mme la présidente Elisabeth Guigou. Je soutiens cette proposition. On pourrait envisager que notre intervention prenne la forme d’une lettre.

M. Jacques Myard. Apparemment, M. Poutine lui-même aurait déclaré qu’il souhaitait la libération des observateurs. Notre commission n’a aucune raison de ne pas la demander.

M. François Rochebloine. Je devrais moi-même aller observer les élections présidentielles du 25 mai en Ukraine au titre du Conseil de l’Europe. La prise en otage d’observateurs internationaux est inacceptable et nous devons réagir.

Mme la présidente Elisabeth Guigou. J’étais à Kiev il y a quelques jours avec mes homologues d’Allemagne et de Pologne. J’y ai rencontré la directrice de la mission électorale de l’OSCE, qu’il ne faut pas confondre avec la mission d’observation des évènements dans l’est de l’Ukraine dont les membres sont actuellement retenus. Cette personne a indiqué qu’il y avait déjà une centaine d’observateurs déployés dans les bureaux de vote et que l’on devrait atteindre un nombre d’environ 900 le jour des élections, qu’il s’agisse de personnes mandatées par l’OSCE ou par d’autres organisations. J’ai cru comprendre que l’Union européenne était effectivement attachée à ce qu’il y ait une présence massive d’observateurs lors de ces élections, car une telle présence exercerait un effet dissuasif. Je compte bien demander au ministère des affaires étrangères ce qui est et sera fait pour qu’il y ait effectivement davantage d’observateurs et pour leur sécurité.

M. Jean-Paul Bacquet. Nous avons pu constater à l’occasion de notre déplacement en Centrafrique, la situation délicate où se trouvent nos forces. C’est un miracle qu’il n’y ait pas eu dans ce pays d’épisode génocidaire. Nous attendons des renforts, qui tardent à arriver, et je crois qu’il serait bienvenu que la Commission se rende prochainement sur place pour témoigner notre soutien aux militaires français.

M. Pierre Lellouche. La situation en Centrafrique n’est nullement réglée, je dirais même que l’affaire se présente mal, et il me semble que notre engagement en Centrafrique mérite un véritable suivi de la Commission.

Par ailleurs, pourquoi ne pas envoyer une délégation de parlementaires, éventuellement conjointe avec nos homologues allemands et polonais, à l’Est de l’Ukraine ? Ce serait un moyen plus efficace de témoigner notre soutien aux Ukrainiens qu’une simple lettre.

Mme la présidente Élisabeth Guigou. Je partage vote inquiétude sur la Centrafrique, mais vous savez que nous sommes confrontés à des problèmes budgétaires majeurs. J’évoquerai cette question avec le Président de notre Assemblée.

M. Gérard Charasse. Je souhaite m’associer pleinement à la demande de mes collègues.

M. Philippe Cochet. Sur un tout autre sujet, j’aimerais exhorter nos collègues à la plus grande prudence dans leur réponse aux sollicitations des « Moudjahidine du Peuple ». Je sais que ces derniers disposent de moyens et de relais puissants en France, mais ils ne reflètent pas leur place en Iran.

M. Jacques Myard. Je dirais même qu’il faut s’en méfier. Les « Moudjahidine du Peuple » sont violents et pour cette raison totalement décrédibilisés en Iran.

Mme la présidente Élisabeth Guigou. En effet, les « Moudjahidine du Peuple » ont des moyens financiers considérables. Je ne saurais trop vous conseiller de vous tenir à distance de cette organisation.

M. Alain Marsaud. Je partage complètement ces préventions.

*

Hébergement et fonctionnement du centre de sécurité Galileo (n° 1846)

La commission examine, sur le rapport de Mme Pascale Boistard, le projet de loi autorisant l’approbation de l’accord relatif à l’hébergement et au fonctionnement du centre de sécurité Galileo (n° 1846).

Mme Pascale Boistard, rapporteure. Le programme Galileo vise à doter l’Europe d’un dispositif indépendant de géopositionnement par satellite, qui sera complémentaire du GPS, qui a été déployé par les États-Unis, et des systèmes comparables que les autres grandes puissances déploient ou vont déployer.

Galileo est l’un de ces trop rares grands programmes qui peuvent incarner, pour ses citoyens, une Europe concrète et tournée vers l’avenir. C’est en effet le premier grand projet européen civil d’infrastructure. Il est prévu qu’en une vingtaine d’années, de son lancement en 1999 à 2020, il mobilise environ 13 milliards d’euros d’argent public, essentiellement en provenance du budget communautaire.

Galileo, c’est aussi un investissement dans les technologies qui portent aujourd’hui la croissance, puisqu’actuellement le marché des équipements GPS quintuple tous les dix ans.

C’est enfin, pour l’Europe, un choix d’indépendance technologique, mais aussi politique, car les systèmes de géopositionnement n’ont pas que des usages civils et commerciaux, ils sont essentiels pour tout ce qui a trait à la sécurité et à la défense. À cet égard, Galileo sera de fait le premier outil européen au service de la Politique étrangère et de sécurité commune de l’Union européenne, ainsi que des politiques régaliennes de ses États membres. C’est pourquoi, à côté de l’usage « grand public » gratuit du signal Galileo, comparable au GPS, et des applications commerciales, le système comprendra un service crypté destiné aux seules autorités gouvernementales, dont la gestion sera placée sous le contrôle du Service européen d’action extérieure.

Galileo fonctionnera à l’aide d’une trentaine de satellites et d’un réseau de stations au sol réparties dans les territoires de l’Union européenne, y compris l’Outre-mer français, très utile pour avoir une couverture mondiale. Quatre satellites ont été lancés en 2011-2012 pour tester le dispositif. Le lancement des autres satellites va prochainement débuter. L’objectif est une exploitation opérationnelle à l’horizon 2017.

A ceux qui mettent en cause l’utilité de Galileo, en invoquant l’existence du GPS américain, on peut répondre techniquement que la redondance des systèmes, qui seront complémentaires, sera un gage de sécurité et de précision du service. On peut surtout faire observer, sur un plan politique, que les principales puissances anciennes ou émergentes, à savoir, outre les États-Unis et l’Europe, la Chine, la Russie, le Japon et l’Inde, ont mis en place, déploient ou envisagent des dispositifs de géopositionnement par satellite.

Comme pour tout programme européen majeur, les implantations des organismes liés à Galileo ont été réparties entre différents États membres. Ainsi l’autorité de supervision qui gérera le système opérationnel sera à Prague ; les centres de contrôle seront l’un en Italie, l’autre en Allemagne ; le centre de services sera à Madrid ; enfin, le Royaume-Uni et la France ont proposé ensemble, en 2009, d’accueillir sur leur sol les deux implantations du centre chargé de la sécurité du système. Plus précisément, le centre de sécurité principal doit être installé à Saint-Germain-en-Laye, dans l’emprise militaire du Camp des Loges, tandis qu’un centre de secours sera implanté outre-Manche, à Swanwick, cette redondance, avec un centre principal et un de secours, étant nécessaire pour ce genre d’infrastructure.

La mission de ce centre de sécurité est très importante, puisqu’elle comprendra notamment la gestion des accès au service crypté réservé aux usages régaliens. Ce n’est sans doute pas un hasard si ce sont les deux principales puissances militaires de l’Union qui se sont portées candidates pour l’accueillir sur leur territoire.

L’accord que nous examinons aujourd’hui est relatif à cette implantation française du centre de sécurité Galileo. Il a été signé le 12 juin 2013 après une négociation avec la Commission européenne qui a été un peu complexifiée par des problèmes strictement juridiques. La Commission voulait signer avec la France un simple arrangement administratif et y associer l’autorité de supervision du futur Galileo. Pour des raisons tenant à notre ordre juridique, le gouvernement français a souhaité signer un accord international en bonne et due forme, ce qui nous vaut aujourd’hui d’avoir à l’examiner, tout en acceptant que l’autorité de supervision de Galileo en soit cosignataire bien qu’elle n’ait pas la personnalité de droit international.

Sur le fond, les stipulations de l’accord que nous examinons sont très classiques. Il s’agit de celles que l’on trouve dans tous les « accords de siège » relatifs à des implantations internationales. Ces stipulations sont de deux natures.

Il y a d’abord la définition des engagements matériels et techniques des parties, qui sont d’ailleurs précisés dans un cahier des charges annexé à l’accord. L’économie générale en est que la France fournit et finance l’infrastructure immobilière, tandis que les équipements opérationnels et naturellement le fonctionnement courant seront du ressort de l’Union et plus particulièrement de l’autorité de supervision de Galileo.

D’après l’étude d’impact et les informations fournies par le ministère des affaires étrangères, la construction du centre, à la charge de la France, a mobilisé un peu plus de 4 millions d’euros de crédits publics et le coût d’entretien du bâtiment, propriété de l’État, est évalué à 30 000 euros par an sur trente ans. Cette construction a été achevée dans le respect du calendrier et le bâtiment a été réceptionné et mis à la disposition de l’autorité de supervision de Galileo à l’été 2013. C’est actuellement la phase de déploiement et de validation des équipements techniques, en vue d’une mise en service opérationnelle en 2016.

Le budget communautaire couvrira l’exploitation du centre et versera notamment au ministère de la défense une somme forfaitaire de 40 000 euros par an en contrepartie des prestations de proximité assurées par le Camp des Loges au profit du centre, telles que l’accès à ses mess, ses terrains de sport, la fourniture d’eau et d’électricité, etc. Par ailleurs, le fonctionnement du centre, qui emploiera une trentaine de personnes, devrait engendrer 2 millions d’euros par an de contrats divers, payés sur fonds européens, qui pourraient notamment profiter à nos entreprises.

Après ces engagements matériels, on trouve dans l’accord la définition des « privilèges et immunités », selon la formule classique, dont le centre et ses personnels bénéficieront, particulièrement en matière fiscale. Ces privilèges comprennent notamment l’exonération du centre et de ses personnels, pour leurs salaires versés par le centre, de tous impôts et charges nationaux, ainsi que, pour ces personnels venant d’autres pays, la possibilité de conserver leur résidence fiscale dans leur pays d’origine.

Sur ces points, qui peuvent toujours susciter des interrogations, je tiens à souligner deux choses. D’une part, ces « privilèges et immunités » sont strictement repris du Protocole dit n° 7 sur les privilèges et immunités de l’Union européenne, qui est un texte annexé aux traités européens, et l’on est donc dans la stricte application du droit commun européen à une implantation européenne. D’autre part, il faut rappeler que si les salaires des fonctionnaires européens, dont les futurs agents du centre de sécurité Galileo, échappent aux impôts et charges nationaux, ils sont soumis à l’impôt progressif européen au profit du budget de l’Union. Et, contrairement à ce que beaucoup croient, cet impôt est assez comparable aux nôtres, puisqu’il comprend un barème progressif allant jusqu’à 45 %, auquel s’ajoute, de 2014 à 2023, un « prélèvement de solidarité » de 6 %.

Je vous invite donc à approuver cet accord qui permettra à notre pays d’accueillir sur son sol l’une des infrastructures clés de Galileo, donc de jouer un rôle majeur dans la mise en œuvre d’un des projets les plus concrets, innovants et fédérateurs de l’Europe.

M. Pierre Lellouche. Je soutiens naturellement le projet Galileo et l’adoption de ce projet de loi. Vous me pardonnerez en revanche d’avoir l’esprit d’escalier pour mentionner un point oublié lors de nos échanges précédant l’examen des projets de loi.

Nous avons hier été appelés à voter sur le programme de stabilité présenté par le Gouvernement. Or nous ne dispositions d’aucun document. Je n’ai pour ma part pas eu connaissance du programme de stabilité. Ne conviendrait-il pas que nous organisions sur de tels sujets une réunion de travail au sein de notre commission comme la commission des affaires européennes peut le faire ? Nous pourrions à cette occasion examiner de manière détaillée le contenu du programme de stabilité. Auparavant les deux commissions étaient destinataires des informations. Nous n’avons pas polémiqué hier mais c’est un vrai sujet.

M. Jacques Myard. Je me félicite que le projet Galileo prenne enfin corps. Il y a une nécessité absolue d’indépendance française et européenne par rapport au GPS américain. J’aurai deux questions. La première est d’ordre pratique : combien de satellites sont à ce jour dans le ciel ? La deuxième est fondamentale : quelle sera précisément l’indépendance de Galileo par rapport au système américain ? Dans le passé, lorsque les Européens ont envisagé de mettre ce projet en œuvre, des notes verbales fortes ont été adressées à Bruxelles par les Américains très opposés au projet. Ils auraient alors exigé et obtenu un accès à la partie militaire cryptée. S’il n’est pas étonnant de voir quels sont les deux pays qui se sont portés candidats pour héberger le centre de sécurité, il faut avoir à l’esprit que les Britanniques ne sont pas vraiment indépendants des Etats-Unis et que le Royaume-Uni est parfois une banlieue américaine.

Enfin, je souligne que cet accord est un monstre juridique. Je n’ai jamais vu quelque chose comme l’article 21, lequel prévoit l’application du droit européen et à défaut du droit national, ce qui sera une source évidente de divergences d’interprétation.

Mme Estelle Grelier. Je souscris à la présentation qui été faite par la rapporteure. Sur le plan budgétaire, je veux souligner le fait que pour la première fois, dans le cadre du nouveau cadre financier pluriannuel, la dépense pour Galileo est budgétée sur une ligne dédiée alors que le projet était jusqu’à présent financé sur les reliquats d’autres programmes.

Concernant l’organisation des débats financiers, comme M. Lellouche, je constate que les enjeux ne sont pas étrangers à certains textes examinés par la commission des affaires étrangères et qu’il aurait été utile que nous soyons associés aux débats sur le programme de stabilité.

Mme Pascale Boistard, rapporteure. Concernant l’état du projet Galileo, quatre satellites ont été lancés et à terme il y en aura trente. Plusieurs nouveaux satellites doivent être lancés en milieu d’année. Il faut y ajouter les stations au sol dont sept sont en Outre-mer (Guyane, Tahiti, Réunion, Wallis…).

Concernant la complémentarité avec les Américains, M. Myard a fait référence à l’accord de 2004. On peut regretter qu’il n’y ait pas d’indépendance totale mais avant il n’y en avait aucune. On peut se féliciter que le site principal de sécurité soit à Saint-Germain-en-Laye (le Royaume-Uni hébergeant le site secondaire) et se réjouir de ce qu’avec Galileo, en termes d’indépendance, l’Europe avance ; cet état d’esprit a d’ailleurs pu être constaté à nouveau dans les rapports de l’Europe avec les Etats-Unis s’agissant des données personnelles.

Suivant les conclusions de la rapporteure, la commission adopte sans modification le projet de loi (n° 1846).

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Mme la Présidente Elisabeth Guigou. A propos de l’organisation des débats relatifs au programme de stabilité, je précise d’abord que les documents ont été transmis à tous les députés avant le vote et sont disponibles en ligne sur le site du ministère de l’Economie depuis mercredi dernier. Il est vrai que nous n’avons pas eu de séance de travail dédiée pour des raisons circonstancielles : aux incertitudes de calendrier liées au changement de gouvernement, s’est ajouté le fait que l’Assemblée interrompait ses travaux la semaine où le programme passait en conseil des ministres, alors même que les travaux parlementaires avaient déjà été interrompus pendant cinq semaines. Ces interruptions successives sont un inconvénient du cumul des mandats dont l’interdiction me parait d’autant plus opportune.

Comment s’organiser pour l’avenir ? De manière générale, il faut que notre commission soit mieux associée notamment aux travaux de la commission des Finances, certes compétente au fond en matière de finances publiques mais qui ne saurait demeurer une enceinte fermée s’agissant d’enjeux dépassant le cadre national. Chaque commission doit conserver ses prérogatives.

Je vous propose que nous organisions un débat sur les recommandations de la Commission européenne avant leur examen par le Conseil européen de juin. Une audition du secrétaire d’Etat chargé des Affaires européennes va être programmée. Je sais que la Commission des Affaires européennes l’entendra mardi prochain, mais nous auditionnerons pour notre part au même moment le ministre de la Défense. Par ailleurs, nous ne devons pas nous interdire de solliciter le ministre des Finances.

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Consortium des centres internationaux de recherche agricole en qualité d'organisation internationale : accord de siège et immunités sur le territoire français (n° 1766 et n° 1767)

La commission examine, sur le rapport de M. Jacques Cresta, le projet de loi autorisant l'approbation de l'accord instituant le Consortium des centres internationaux de recherche agricole en qualité d'organisation internationale (n° 1766) et projet de loi autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Consortium des centres internationaux de recherche agricole relatif au siège du Consortium et à ses privilèges et immunités sur le territoire français (n° 1767) – M. Jacques Cresta, rapporteur.

M. Jacques Cresta, rapporteur. Le ministre des affaires étrangères a présenté le 5 février 2014 un projet de loi autorisant l’approbation de l’accord instituant le Consortium des centres internationaux de recherche agricole en qualité d’organisation internationale, signé à Montpellier le 13 septembre 2011, et un projet de loi autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Consortium des centres internationaux de recherche agricole relatif au siège du Consortium et à ses privilèges et immunités sur le territoire français, signé dans la même ville le 4 mars 2013.

Les deux accords, respectivement signés le 13 septembre 2011 et le 4 mars 2013 confèrent au Consortium des centres internationaux de recherche agricole la qualité d’organisation internationale et localisent son siège à Montpellier. Il est demandé à l’Assemblée nationale de les approuver aujourd’hui.

La qualité d’organisation internationale permettra au Consortium des centres internationaux de recherche agricole de renforcer son efficacité dans le système mondial de recherche agricole. Quant au choix de Montpellier pour accueillir son siège, il confirme le rayonnement international de la ville, la qualité de sa recherche et une collaboration exemplaire entre l’Etat, les collectivités territoriales et la communauté scientifique.

Pour mémoire, le Consortium du Groupement Consultatif pour la Recherche Agricole Internationale, ou CGIAR, créé en 1971, coordonne et soutient les programmes de recherche agricole internationale de 15 centres à travers le monde dans le but de réduire la pauvreté et d'assurer la sécurité alimentaire dans les pays en voie de développement. Depuis le début des années 1970, les recherches menées par le CGIAR ont joué un rôle majeur au niveau mondial en faveur du développement agricole. On a coutume de dire qu’un dollar investi dans la recherche du CGIAR rapporte 9 dollars en accroissement de productivité dans les pays en voie de développement.

Dans les années 2000, sous l’effet d’une réforme d’ampleur, le CGIAR a pris un nouvel élan. Les efforts conjoints des donateurs, des partenaires, des centres internationaux et de la communauté scientifique ont permis de redéfinir les contours de son action et de son fonctionnement, à travers notamment l’établissement de ses deux nouveaux piliers que sont le Consortium CGIAR et le Fonds CGIAR.

L’article 1er de l’accord institue le Consortium en qualité d’organisation internationale indépendante, jouissant de la pleine personnalité juridique et de la capacité juridique de conclure des traités, des accords et des contrats ; d’acquérir et d’aliéner des biens meubles et immeubles ; et d’ester en justice.

L’attribution de la qualité d’organisation internationale constitue la reconnaissance formelle d’un acteur international de premier rang. Surtout, elle garantit à la structure une stabilité juridique et un fonctionnement autonome en termes de recrutement de personnel et de signature de contrats d’achat de biens et de services. Ce statut facilitera enfin la mobilisation de ressources financières et la coordination de la recherche agricole mondiale au service du développement.

La signature de ces accords est un succès à mettre au crédit de notre diplomatie scientifique. Ils témoignent du soutien de la France à l’amélioration du système international de recherche agricole vers des partenariats et une solidarité renforcés pour mieux relever les défis de la faim, de la malnutrition, de la lutte contre la pauvreté rurale, et de la gestion durable des ressources naturelles.

Le premier défi est celui de la lutte contre la faim, et l’amélioration de la productivité. Selon le rapport de l’ONU sur les objectifs de développement du millénaire, une personne sur huit dans le monde est chroniquement sous-alimentée. Il faut donc accroître les capacités de production, pour permettre à chaque exploitant de vivre décemment de son travail. Mais l’augmentation de la productivité doit aussi préserver l’environnement, la santé des populations et des écosystèmes. Le second défi est donc celui de la gestion durable des ressources naturelles, c’est le développement d’une agriculture écologiquement intensive.

Pour cela, la recherche est un outil précieux de développement. Une société ne saurait se développer sur le long terme sans produire elle-même les connaissances dont elle a besoin pour imaginer et construire son avenir. Seul le renforcement de la culture scientifique dans les pays les plus démunis permettra de réduire la fracture entre pays et cheminer vers un développement durable à l'échelle planétaire. L’installation d’un CGIAR doté de pouvoirs nouveaux à Montpellier concourt à la construction d’un système mondial de recherche agronomique partagé et distribué.

J’aimerais maintenant insister sur le choix de Montpellier, sur le site d’Agropolis International, pour accueillir le siège du Consortium. Ce choix souligne l’excellence et le rayonnement international de la recherche française dans les domaines de l’agriculture, de l’alimentation, de la biodiversité et de l’environnement. Il est aussi le reflet du succès d’une stratégie développée par les collectivités locales pour faire de la ville un centre mondial de la recherche agricole.

En effet, à la suite de la création du Consortium des centres internationaux de recherche agricole, un appel d’offres international a été ouvert pour accueillir le siège de cette institution. La France a présenté la candidature de la ville de Montpellier, en compétition avec Addis-Abeba, Nairobi, New Delhi et Rome.

C’est la cohérence d’ensemble du dossier français, ainsi que son sérieux, qui a fait pencher la balance en faveur de Montpellier. La proposition française a présenté dans des conditions très attractives les trois principales composantes du dossier de candidature, grâce à une collaboration exemplaire entre l’Etat, les collectivités territoriales et les établissements scientifiques. L’offre immobilière, tout d’abord. La région Languedoc-Roussillon a construit, en assurant l’intégralité du financement, un bâtiment de 800 mètres carrés, à l’usage du Consortium qui devrait s’y installer avant le mois de mai 2014. Ensuite, le contexte académique régional dans le domaine de l’agro-environnement, formé par les universités, les grandes écoles et de nombreux organismes de recherche, ainsi que la visibilité et la notoriété du pôle scientifique représenté par Agropolis International ont été des atouts majeurs de la candidature française. Enfin, l’accord de siège signé le 4 mars 2013 a permis à Montpellier d’être retenue.

Cet accord aménage les droits, privilèges et immunités du Consortium et de son personnel. Ils sont conformes aux pratiques juridiques et conventionnelles, internationales et françaises, concernant les accords de siège. Pour la vingtaine d’accords de siège approuvés par la France avec des organisations internationales situées sur son territoire, comme l’Institut international des ressources phytogénétiques (IPGRI), par exemple, les dispositifs sont similaires :

– pour l’organisation, ils ont essentiellement trait à la personnalité juridique, l’inviolabilité des locaux, l’immunité de juridiction ainsi que, sous certaines conditions, l’exemption de contraintes juridiques ou administratives et l’exonération fiscale ;

– pour les personnels et experts de l’organisation, ils concernent principalement, sous certaines conditions, la liberté de circulation, l’immunité de juridiction et l’exonération de charges sociales et fiscales nationales, à certaines conditions. Je précise ici que l’accord de siège aura une conséquence financière marginale, liée essentiellement à l’application de l’article 20 qui traite de l’exonération de l’impôt sur le revenu des membres du personnel du Consortium, soit 27 personnes à ce jour.

La venue du Consortium à Montpellier représente une opportunité exceptionnelle pour l’ensemble de la communauté scientifique française impliquée dans des efforts de recherche en faveur du développement au Sud. Il est attendu un renforcement de la masse critique de chercheurs présents de manière permanente ou occasionnelle à Montpellier, dans le domaine des sciences agricoles. De nombreuses rencontres scientifiques et administratives découleront de l’implantation du Consortium à Montpellier. Par ailleurs, la construction d’un bâtiment neuf pour héberger le siège, son fonctionnement administratif et logistique, ainsi que sa maintenance seront à l’origine d’emplois directs ou induits.

En conclusion, la ratification de ces accords était un engagement fort pris par le Gouvernement pour soutenir la candidature de Montpellier comme siège du Consortium. L’accord instituant le Consortium en qualité d’organisation internationale est désormais en vigueur puisque, selon les dispositions de l’article 8, deux États sont devenus parties : le Danemark et la Hongrie. En tant que dépositaire, le Gouvernement français souhaite, dès lors qu’il est en vigueur, être l’un des premiers Etats adhérant à l’accord.

Quant à l’entrée en vigueur de l’accord de siège, elle doit être effective le plus rapidement possible pour garantir une stabilité juridique à la structure et faciliter son fonctionnement de manière autonome. L’inauguration à Montpellier du nouveau bâtiment du siège du Consortium est prévue le 2 juin prochain. L’approbation des accords, auquel je vous invite aujourd’hui, est donc un signe politique fort de l’intérêt et du soutien de la France au système de recherche agricole international au service du développement.

Mme la présidente Elisabeth Guigou. Nous avons en France des pôles d’excellence universitaires qui remportent des succès internationaux, il est bon de le souligner.

M. Jacques Myard. Galileo est important sur le plan de la coopération intergouvernementale comme sur ses retombées industrielles, cela méritait un débat un débat en séance.

Mme la présidente Elisabeth Guigou. Effectivement, mais vous savez que l’ordre du jour de l’Assemblée est très encombré ; cela illustre encore une fois que les semaines de suspension n’ont pas facilité nos travaux et qu’il faut mettre un terme au cumul des mandats.

M. Jean-René Marsac. On se réjouit de l’institution de ce consortium et de ce travail de recherche en matière agricole. Il serait bon que sur le fond du sujet et sur la question de la lutte contre la malnutrition, nous ayons une communication dans le futur et que, en 2015, par exemple, une mission d’information soit constituée sur le thème de la sécurité alimentaire, fondamentale pour la sécurité entre les peuples.

Mme Anne-Yvonne Le Dain. Je suis membre de la commission des lois et je vous remercie de me permettre de m’exprimer comme je l’ai souhaité car je suis agronome et je fais de la recherche scientifique au CIRAD. Ce dossier m’est cher car j’y travaille depuis 10 ans. Ces recherches agronomiques ont débuté à la fin des années 50, avec des centres de recherche dédiés par plante et dans l’intérêt des anciens dispositifs. Il y a aujourd'hui 18 centres de recherche dans le monde de ce type, par exemple sur le riz, aux Philippines, sur le palmier, en Indonésie. Il y en a aussi sur la forêt, la biodiversité, sur le monde animal nomade ou cultivé. Cependant, la nécessité s’est faite peu à peu de travailler sur des programmes conjoints et elle s’est imposée récemment, au début des années 2000, par exemple sur l’eau et l’alimentation, ou encore sur les ressources génétiques, les graines et les semences. On passe donc de plus en plus à une approche par thématiques.

La France a été dans une situation particulière ; elle a connu des vicissitudes avec son centre de recherche de Montpellier sur la banane plantain qui n’avait pas d’accord de siège et était rattaché administrativement au pôle de recherche sur la biodiversité de Rome. En fait, la France bloquait car elle considérait qu’un accord de siège ne pouvait concerner qu’un centre basé à Paris. Cela a suscité des difficultés pour les personnels, par exemple américains, qui ont perdu les bénéfices de l’accord de siège. Il y a eu des mesquineries préjudiciables. En d'autres termes, ce qui se décide aujourd'hui montre à la communauté scientifique mondiale la volonté de notre pays de trouver des solutions concrètes. Il y a 2000 scientifiques dans le domaine de l’agronomie à Montpellier avec une grande reconnaissance internationale. Le message est d’autant plus fort que la France était ici en compétition avec Rome, Nairobi, New Delhi. On a eu le soutien de personnalités scientifiques de renommée mondiale et parce que la région a engagé 4 millions d’euros sur le projet pour le bâtiment. Il est important de reconnaître ce patrimoine scientifique, diplomatique qui contribue à changer les choses.

Mme la présidente Elisabeth Guigou. Merci pour cet éclairage et votre expertise scientifique, qui souligne l’importance de ce dossier, mais je voudrais dire que la France ne met jamais d’obstacle à l’implantation de centres en province quand on en a la capacité. Notre diplomatie est au contraire soucieuse de se coordonner avec ce qui se fait en régions, quels que soient les sujets.

M. Jacques Myard. Je suis celui qui a fait installer à Montpellier le centre sur la banane plantain. Cela a été difficile car le projet était assez mal monté, mais je ne peux laisser dire que la France ait refusé d’installer un centre en province, même s’il y a une tendance partagée par tous les gouvernements à limiter les privilèges et immunités. Il y a un pôle à Montpellier mondialement reconnu, il faut s’en féliciter.

Mme Chantal Guittet. La recherche est primordiale pour la lutte contre la malnutrition. Y a-t-il aussi dans cet accord un aspect juridique relatif à la question de la propriété intellectuelle ? Je pense à ce qui s’est passé sur les brevets Monsanto dont on s’est aperçu ensuite qu’ils contribuaient à appauvrir les populations.

M. Michel Terrot. Je voudrais me féliciter de cet accord. Mais j’observe aussi qu’il n’y a eu que peu de signatures en trois ans – la Hongrie, le Danemark ou encore le Bénin – et aucune ratification. Cet accord est pourtant présenté comme très nécessaire. Comment expliquer ce retard ?

M. François Loncle. C’est un travail remarquable qui a été fait en Languedoc-Roussillon dans le domaine universitaire et de l’enseignement. Je voudrais rappeler que Georges Frêche en est à l’origine.

M. Jacques Cresta, rapporteur. La question posée par Chantal Guittet relève de la propriété intellectuelle, suivie par des organismes spécifiques.

Je n’ai pas de réponse aux interrogations concernant la signature de ces accords, mais je vous ferai parvenir les éléments qui me seront transmis.

Suivant les conclusions du rapporteur, la commission adopte sans modification les projets de loi (n° 1766 et 1767).

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Canada : accord relatif à la mobilité des jeunes (n° 1796)

La commission examine, sur le rapport de M. Patrice Martin-Lalande, le projet de loi autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Canada relatif à la mobilité des jeunes (n° 1796).

M. Patrice Martin-Lalande. Chaque année, 14.000 jeunes Français et 2.600 jeunes Canadiens traversent l’Atlantique pour acquérir, par un stage, une formation, un travail temporaire ou un « travail d’été » une précieuse expérience et une ouverture sur le monde. Ils le font dans le cadre juridique d’un accord franco-canadien d’octobre 2003 qui régit ce genre d’échanges et qui, indéniablement, constitue un succès : depuis son entrée en vigueur, près de 80.000 Français et 22.000 Canadiens en ont bénéficié. Toutefois, en dépit de – mais, aussi, sans doute, grâce à – ces excellents résultats, il est apparu nécessaire d’y apporter des modifications, notamment pour simplifier les procédures et allonger les durées de séjour autorisées. Tel est l’objet de l’accord franco-canadien du 14 mars 2013 dont il nous est demandé, aujourd’hui, d’autoriser l’approbation et qui a été signé par Mme Valérie Fourneyron, alors ministre des sports et de la jeunesse, et par le ministre canadien en charge du patrimoine.

Pour ce faire, et avant de présenter le dispositif et de souligner l’intérêt de cet accord, il me semble intéressant de rappeler brièvement le contexte dans lequel il doit être replacé : celui des accords dit « vacances travail ». En effet, la France a conclu avec huit autres États ou gouvernements (le Japon, la Nouvelle-Zélande, l’Australie, la Corée du Sud, Hong-Kong, le Brésil, l’Argentine et le Canada), des accords dits « vacances travail », basés sur le même modèle : ils permettent à des jeunes de 18 à 30 ans (35 dans le cas du Canada), sur une base réciproque, de découvrir d'autres cultures par le voyage mais aussi le travail. Dans ce type d'échange, le séjour est limité à un an, le nombre de bénéficiaires étant variable d'un pays à l'autre. Ces programmes rencontrent un succès grandissant auprès des jeunes Français, a fortiori en ces temps économiques moroses où partir à l’étranger présente bien des attraits et peut être une option stratégique particulièrement intelligente dans l’élaboration de son parcours professionnel. Les accords « vacances travail » n’ont ainsi pas vocation à organiser une filière d’émigration mais plutôt à permettre d’acquérir une expérience précieuse mais aussi à s’« oxygéner » auprès d’une culture et d’un environnement linguistique nouveaux.

L’accord conclu il y a dix ans avec le Canada, comme je l’ai dit en introduction de mon propos, est très prisé par nos jeunes compatriotes. Toutefois, il est rapidement apparu qu’il pouvait être considérablement amélioré par le biais d’une simplification et d’une uniformisation des procédures mais aussi en augmentant sensiblement certaines durées de séjours au-delà d’un an. Une renégociation de l’accord en ce sens aété engagée dès 2009 et a permis la signature du texte dont nous sommes saisis.

La principale innovation de l’accord de 2013, par rapport à celui de 2003, réside assurément dans son article 5 qui fixe les modalités de séjour sur le territoire de l’autre État. D’une manière générale, la durée des séjours effectués dans le nouveau cadre est fixée à 24 mois, soit 12 mois de plus que le régime établi il y a 10 ans mais aussi que ceux fixés par les accords que la France a signé avec 7 autres pays. Cet allongement d’une année est, indéniablement, une bonne nouvelle pour les jeunes concernés. En effet, de nombreuses entreprises peuvent être amenées à se poser des questions au moment de recruter un jeune dont elles savent que le visa ne court que sur une seule année. Doubler cette durée conduira à diminuer les réticences de l’employeur quant à la rentabilité de son « investissement » dans un jeune Français ou un jeune Canadien. De surcroît, l’accord prévoit plusieurs possibilités de porter la durée du séjour dans l’autre Etat à 36 mois. Par exemple, des jeunes Français partant au Canada pour 2 ans dans la catégorie « vacances travail » ou « jeune professionnel » pourront prétendre à un séjour supplémentaire de 12 mois dans la catégorie « stage ». La même possibilité sera offerte aux jeunes Canadiens. L’accord stipule, de surcroît, que les séjours pourront « être continus ou discontinus et s’effectuer dans n’importe quel ordre ». Cela permettra de répondre aux souhaits du plus grand nombre. Concrètement, les Français comme les Canadiens auront un crédit de 36 mois qu'ils pourront utiliser pour des séjours continus ou discontinus et commencer par un stage ou un séjour de travail. Un Canadien comme un Français pourra ainsi commencer par un stage en entreprise dans le cadre de ses études puis poursuivre par un séjour jeune professionnel ou vacances travail. Un Canadien comme un Français pourra également décider de prendre une ou deux années sabbatiques et demander à faire un séjour vacances-travail pour deux ans dans l'autre pays. Il pourra ensuite reprendre ses études et demander à bénéficier d'un stage. Le nouvel accord apporte donc plus de souplesse.

Parmi les autres dispositions notables, l’article 6 a trait à la délivrance des titres de séjour. S’agissant des jeunes Français dont la demande de séjour au Canada a été acceptée, ils se feront remettre une « lettre d’introduction sur le territoire canadien », et, dès leur arrivée dans ce pays, un permis de travail. Les jeunes Canadiens, eux, recevront un titre de séjour d’une durée maximale de douze mois, renouvelable si nécessaire et sans difficulté. Surtout, principal attrait aux yeux du Canada : ce titre de séjour permettra à ses ressortissants de travailler immédiatement, sans passer par une demande d’autorisation de travail (une procédure qui peut décourager bien des employeurs). Dans les deux cas, la situation du marché de l’emploi ne sera pas opposable aux jeunes concernés.

L’accord prévoit également, en son article 7, l’égalité de traitement avec les ressortissants du pays d’accueil pour tout ce qui concerne l’application des lois régissant les relations et conditions de travail, la protection sociale, la santé, l’hygiène et la sécurité au travail. Cet article est utile car il permet de sécuriser, sur le plan juridique, l’égalité de traitement pour nos jeunes compatriotes qui partent au Canada, le code du travail français excluant déjà toute discrimination en raison de la nationalité en matière de relations et conditions de travail.

Voici, madame la Présidente, mes chers collègues, les principales dispositions de l’accord dont nous sommes saisis. Bien entendu, vous trouverez mes observations sur les autres articles dans mon rapport écrit.

Avant de conclure, il me semble utile d’insister rapidement sur un point : du côté français, le quota de 14.000 places dévolu par chaque Etat aux ressortissants de l’autre Etat est systématiquement atteint alors que du côté canadien, le nombre de jeunes venant en France s’élève en moyenne à 2.600. Cette année, 50.000 jeunes Français ont postulé ! Bon nombre de demandes ne sont pas satisfaites. J’ai interrogé le gouvernement à ce sujet ainsi que l’ambassade du Canada, à l’occasion d’une réunion de travail de l’Association interparlementaire franco-canadienne. Il apparaît, en fait, que ce chiffre de 14.000 est un compromis issu des négociations menées annuellement par les deux Parties. Il a été doublé depuis 2004 face à la demande croissante des jeunes Français mais il correspond aussi, aujourd’hui, à la capacité d’accueil maximum pouvant être consentie par les autorités canadiennes. Ces dernières ne semblent pas disposées, pour le moment, à augmenter les effectifs, d’autant plus que l’allongement des temps de séjours prévu par l’accord de 2013 va mécaniquement avoir pour effet d’augmenter le nombre global de jeunes Français pouvant se rendre au Canada. Il n’en reste pas moins qu’il faut rester attentif et surveiller la question de l’évolution des quotas.

Je vous invite à adopter le projet de loi qui nous est soumis, en émettant le vœu que l’accord qu’il porte puisse un jour servir de modèle dans les relations que nous entretenons avec les Etats de la Francophonie. Certes, aujourd’hui, nous en sommes loin, en particulier parce qu’entrent en jeu des considérations spécifiques fort compréhensibles telle que la maîtrise des flux migratoires. Mais les accords « vacances travail » pourraient représenter un immense atout pour le monde francophone.

M. Michel Terrot. Cet accord introduit de la souplesse dans le domaine de la mobilité entre la France et le Canada – ou plutôt le Québec. Je suis néanmoins gêné d’apprendre que le Canada vient de rompre, de manière unilatérale, un accord plus ancien relatif aux frais de scolarité des étudiants français, qui étaient alignés sur ceux des étudiants canadiens. Ces frais vont ainsi passer de 1 500 ou 1 600 à 5 000 ou 6 000 euros, voire davantage. C’est une décision très pénalisante.

M. François Rochebloine. On ne peut qu’être favorable à cet accord, mais la réalité est souvent assez difficile. J’ai été saisie par une jeune femme de ma circonscription qui bénéficiait d’un permis « vacance travail » depuis juin 2013, et qui a fait une demande de renouvellement de son visa « jeune professionnel », afin de rester dix-huit mois supplémentaires. Alors qu’elle avait reçu une lettre d’acceptation conditionnelle, on a fini par lui dire que la copie de son passeport en format PDF n’était pas lisible. J’ai interrogé l’ambassade du Canada à Paris, sans avoir de réponse. C’est un vrai parcours du combattant. Il faudra donc veiller à la bonne application du texte qui nous est soumis.

M. Patrice Martin-Lalande. Nous sommes dans un goulot d’étranglement. Les 14 000 places disponibles ont été pourvues 8 minutes après l’ouverture des inscriptions. Or comme je vous le rappelais précédemment, ce sont en tout 50 000 jeunes Français qui se proposent comme candidats. Nous faisons face à un problème d’inadéquation entre le quota qui a fait l’objet d’un accord et la demande française qui est très forte.

Le Canada veut avoir la maîtrise du volume d’accueil des jeunes Français, notamment pour qu’ils soient reçus dans des conditions correctes.

Il existe peut-être une piste pour réduire ce problème. Cela pourrait consister à faire du type de séjour des jeunes la meilleure entrée possible pour l’immigration car ils auront alors une bonne connaissance de la réalité du pays et pourront bien s’intégrer. Il faudrait mettre l’accent sur le lien entre ce type de séjour et la réalité que constitue une bonne première entrée au Canada. Cela pourrait être une possibilité de renégociation des quotas.

Il faut tout de même rappeler que même s’il reste toujours un excédent en raison d’une demande française très importante, ces quotas ont doublés depuis dix ans, ce qui n’est pas négligeable.

M. François Rochebloine. L’exemple de la personne que j’évoquais demeure problématique car elle est en demande de renouvellement de séjour alors qu’elle est déjà restée un an au Canada. Les autorités canadiennes soulignent un problème de passeport alors qu’elle avait déjà été enregistrée. A présent, on lui rétorque qu’il n’est pas lisible et on ne lui donne pas de réponse, ce qui n’est pas acceptable.

M. Patrice Martin-Lalande. L’objectif du nouvel accord est justement de réduire ces difficultés dont vous parlez. Il va concourir à résoudre une partie de ces problèmes. La prolongation de deux ans du séjour par exemple va désormais être acquise de droit avec le nouvel accord. Il y aura donc bien une partie des difficultés qui va être résolue même si ça ne concernera pas la question des quotas.

Pour répondre à M. Michel Terrot au sujet des droits d’inscription universitaire des Français, le Québec a pris une décision unilatérale qui consiste à faire payer aux étudiants français ce que les étudiants québécois eux-mêmes payent en frais d’inscription. Le gouvernement précédent avait prévu de revenir sur cet aspect en 2014, seulement il y a eu un nouveau gouvernement et le projet n’a finalement pas abouti.

Il est important de faire en sorte que cela ne touche pas les étudiants en cours de scolarité là-bas au Québec, et d’essayer de réduire l’impact des mesures qui ont été prises.

Suivant les conclusions du rapporteur, la commission adopte sans modification le projet de loi (n° 1796).

La séance est levée à onze heures quinze.

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Membres présents ou excusés

Commission des affaires étrangères

Réunion du mercredi 30 avril 2014 à 9 h 30

Présents. - M. Pouria Amirshahi, M. Avi Assouly, Mme Danielle Auroi, M. Jean-Paul Bacquet, M. Philippe Baumel, M. Jean-Luc Bleunven, M. Alain Bocquet, Mme Pascale Boistard, M. Gwenegan Bui, M. Jean-Claude Buisine, M. Gérard Charasse, M. Guy-Michel Chauveau, M. Jean-Louis Christ, M. Philippe Cochet, M. Jacques Cresta, Mme Seybah Dagoma, M. Jean-Louis Destans, M. Michel Destot, M. Jean-Pierre Dufau, M. Nicolas Dupont-Aignan, M. Jean-Paul Dupré, M. François Fillon, M. Hervé Gaymard, M. Paul Giacobbi, M. Jean Glavany, Mme Estelle Grelier, M. Jean-Claude Guibal, Mme Élisabeth Guigou, Mme Chantal Guittet, M. Serge Janquin, M. Pierre-Yves Le Borgn', M. Pierre Lellouche, M. Patrick Lemasle, M. François Loncle, M. Jean-Philippe Mallé, Mme Marion Maréchal-Le Pen, M. Jean-René Marsac, M. Alain Marsaud, M. Patrice Martin-Lalande, M. Jacques Myard, M. Axel Poniatowski, M. François Rochebloine, M. René Rouquet, M. André Schneider, M. Michel Terrot, M. Michel Vauzelle

Excusés. - M. Christian Bataille, M. Édouard Courtial, Mme Thérèse Guilbert, M. Jean-Jacques Guillet, Mme Françoise Imbert, M. Lionnel Luca, M. Noël Mamère, M. Thierry Mariani, M. Jean-Claude Mignon, M. Didier Quentin, M. Jean-Luc Reitzer, Mme Odile Saugues, M. François Scellier, M. Guy Teissier

Assistaient également à la réunion. - M. Dino Cinieri, Mme Anne-Yvonne Le Dain