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Commission d’enquête sur la situation de la sidérurgie et de la métallurgie françaises et européennes dans la crise économique et financière et sur les conditions de leur sauvegarde et de leur développement

Mercredi 19 juin 2013

Séance de 17 heures

Compte rendu n° 20

Présidence de M. Jean Grellier Président

– Audition, ouverte à la presse, de M. Arnaud Montebourg, ministre du redressement productif

La séance est ouverte à dix-sept heures dix.

Monsieur le président Jean Grellier. Mes chers collègues, nous entendons aujourd’hui M. Arnaud Montebourg, ministre du redressement productif, qui est, à ce titre, chargé de l’industrie. Notre commission arrive au terme de ses travaux même si elle n’a pas terminé sa réflexion. Nous avons non seulement entendu tous les grands acteurs de la filière sidérurgique mais aussi de nombreux segments des activités métallurgiques, sans oublier les secteurs de l’aluminium et du cuivre.

Il va sans dire que nos auditions et nos déplacements ont également été l’occasion de rencontrer les représentants syndicaux, au niveau des grandes fédérations comme des usines. Nous avons du reste consacré une table ronde spécifique aux organisations syndicales toute une matinée à l’Assemblée nationale, salle Lamartine. La commission d’enquête s’est par ailleurs déplacée en Savoie, à Dunkerque, à Fos-sur-Mer et en Lorraine. Elle a également rencontré, la semaine passée, le Commissaire Tajani, qui a évoqué le Plan acier européen adopté la veille.

Nous avons bien conscience, Monsieur le ministre, que nos travaux ne peuvent prétendre à l’exhaustivité. Nos constatations et nos propositions n’épuiseront pas le sujet. Il s’agit de savoir si notre industrie et les orientations des politiques commerciale, industrielle et énergétique de l’Union européenne sont en mesure de faire face aux défis de la mondialisation des échanges, notamment à la concurrence et souvent au dumping économique et social, de producteurs que l’on qualifie d’émergents alors qu’ils sont d’ores et déjà souvent dominants !

Ces questions, qui engagent le devenir de centaines de milliers d’emplois, mettent en jeu la souveraineté économique des principaux pays européens et donc l’indépendance de leurs approvisionnements dans des domaines absolument vitaux.

La commission s’est bien évidemment intéressée à la situation du groupe ArcelorMittal. Elle a d’ailleurs auditionné M. Lakshmi Mittal, le 17 avril dernier. Le respect scrupuleux qui est attendu de lui de l’accord qu’il a signé avec le Gouvernement, à la fin de l’année 2012, constitue un point non négociable.

Plus généralement, la commission a constaté qu’une partie essentielle des activités sidérurgiques et métallurgiques qui, il y a encore deux décennies, dépendaient de groupes français, nationalisés ou privés, est passée sous contrôle étranger, ce qui ne simplifie pas les choses. Au-delà du cas d’ArcelorMittal, il y a eu l’explosion du groupe Péchiney, qui était pourtant un leader mondial et une véritable multinationale française. Le contrôle de groupes étrangers porte aujourd’hui sur de nombreuses autres entreprises des secteurs qui retiennent l’attention de la commission. Ainsi, un fonds d’investissement américain, Apollo Global Management, est devenu l’actionnaire majoritaire de Constellium, qui regroupe des activités de transformation autrefois comprises dans le groupe Péchiney, ainsi que d’Ascométal, un spécialiste des aciers spéciaux qui travaille pour plus de 50 % à destination des constructeurs automobiles.

S’il ne s’agit pas pour nous de succomber à un nationalisme d’un autre âge, vous comprendrez cependant aisément, monsieur le ministre qu’une telle situation ait de quoi nous inquiéter. Car ces entreprises sous contrôle étranger sont les fournisseurs de secteurs stratégiques de notre économie comme l’aéronautique, les transports ou encore le nucléaire et la construction.

Nous touchons là à des questions de souveraineté. Il nous importe donc de savoir ce que les pouvoirs publics peuvent encore faire. Nous écouterons avec la plus grande attention les précisions que vous nous apporterez sur la doctrine d’investissement dans ces activités de la Banque publique d’investissement – BPI –, qui a absorbé le Fonds stratégique d’investissement – FSI. Les actionnaires continueront-ils encore longtemps à jouer au Monopoly industriel avec les sites de productions français au nom de stratégies lointaines qui manquent souvent de limpidité ? Cette question sous-tend une problématique essentielle pour la commission d’enquête, puisqu’elle porte sur nos savoir-faire et nos capacités de recherche et d’innovation, des domaines où la France a longtemps été en position de leader.

Voilà, Monsieur le ministre, ce que je tenais à rappeler de nos travaux antérieurs à votre audition. Après vous avoir entendu au titre de votre exposé liminaire, notre rapporteur, Alain Bocquet, et nos autres collègues engageront avec vous le dialogue au travers de questions que je souhaite à la fois brèves et précises, sachant que vos obligations nous fixent 18 h 30 comme limite à votre audition.

Au préalable, conformément à l’article 6 de l’ordonnance du 17 novembre 1958, je vous demande de prêter le serment de dire la vérité, toute la vérité, rien que la vérité.

M. Arnaud Montebourg, ministre du redressement productif, prête serment.

M. Arnaud Montebourg, ministre du redressement productif. La situation actuelle de la sidérurgie et de la métallurgie françaises et européennes est le résultat de décisions passées, prises tant aux plans national qu’européen. Ces décisions nous ont conduits à perdre le contrôle des outils de production industrielle qui, alors qu’ils étaient historiquement nationaux et européens, sont passés, après deux OPA – sur l’aluminium en 2004 et sur l’acier en 2006 –, sous le contrôle de groupes dont les centres de décision sont étrangers au territoire national et même à celui de l’Union européenne. De plus, les intérêts de ces groupes sont plus financiers qu’industriels, puisqu’ils doivent satisfaire des exigences de rentabilité inhabituelles dans l’histoire de l’industrie.

Alors que, le marché étant bas, nos capacités industrielles sont sous-employées, la question est de savoir comment éviter des destructions définitives d’outils industriels qui seront nécessaires pour répondre aux besoins du marché, le jour où nous aurons retrouvé le chemin de la croissance. Telles sont les questions que se posent tous mes homologues du Conseil des ministres chargés de l’industrie. À l’heure actuelle nous assistons à la multiplication des crises dans le secteur métallurgique : crise de l’acier en Italie, avec la défaillance du groupe Riva ; crise de l’acier en Allemagne consécutive aux difficultés du ThyssenKrupp ; crise, accompagnée de fermetures, provoquée par le groupe ArcelorMittal dans trois pays. Il n’y a guère que l’Algérie, qui a procédé à la nationalisation d’un site d’ArcelorMittal, pour y échapper. Quant au gouvernement wallon, il a exprimé son désir de rechercher un repreneur, y compris contre le consentement d’ArcelorMittal. Le fait est donc que tous les États cherchent aujourd’hui à reconquérir la maîtrise des outils industriels stratégiques.

Je récuse, au nom du Gouvernement, l’idée selon laquelle il y aurait des secteurs en déclin qu’il faudrait précipitamment abandonner et des secteurs en croissance dans lesquels il faudrait précipitamment investir. Il y a des entreprises en déclin et des entreprises en croissance dans tous les secteurs. Ceux qui pensent qu’on pourrait se passer de métal, sous prétexte que le secteur serait englouti, n’ont rien compris à l’industrie ou ignorent la composition de la totalité des matériaux utilisés notamment dans les moyens de transports – automobiles, avions, trains – ou l’électroménager. La métallurgie a de beaux jours devant elle. Maîtriser les amonts permet de maîtriser les avals. Être dépendant en amont, c’est être soumis à des intérêts étrangers aux intérêts nationaux.

Tel est l’esprit dans lequel travaille le ministère du redressement productif. Je tiens à rappeler que l’acier, en France, c’est 27 800 salariés, quarante-six sites industriels et une balance commerciale équilibrée. La France est également le troisième producteur européen d’acier, derrière l’Allemagne et l’Italie. Quant à l’aluminium, c’est 11 000 salariés à la fin de 2011, dont 70 % à la transformation, une production de 833 000 tonnes, dont 60 % issus du recyclage, et deux sites de production d’aluminium primaire – Saint-Jean-de-Maurienne et Dunkerque. Le Gouvernement ne saurait accepter la disparition de tels outils industriels.

L’arrivée des pays émergents se traduit par une montée du low cost dans le secteur de la métallurgie, ce qui relativise l’argument selon lequel ce secteur serait en surcapacité en Europe. En effet, le marché étant mondialisé, ce sont les changements de localisation des sites de production qui aboutissent à la création de capacités en dehors du continent européen. À ce facteur, il convient d’ajouter la montée du prix de l’énergie. Ces industries sont à usage intensif d’énergie, notamment électrique – c’est particulièrement vrai de l’aluminium. En dix ans, dix-neuf sites de production d’aluminium primaire ont disparu d’Europe pour réapparaître sur des continents dont les États pratiquent un prix de l’électricité particulièrement bas – c’est le cas du Canada, de l’Australie et de la Russie –, ce que la réglementation européenne nous interdit de faire.

Les Européens ont donc organisé eux-mêmes la destruction de leur propre industrie métallurgique, notamment en interdisant à leurs champions de disposer d’une taille critique leur permettant de se protéger des prises de contrôle. Je tiens à rappeler que la Commission européenne a interdit à Péchiney de prendre le contrôle d’Alcan, si bien qu’Alcan a mangé Péchiney pour être mangé à son tour par Rio Tinto, qui préfère aujourd’hui investir dans les mines et non plus dans l’industrie de transformation. Les deux sites ex-Péchiney de Saint-Jean-de-Maurienne et de Dunkerque sont à l’heure actuelle menacés en raison de la fin prochaine du contrat de fourniture d’électricité à tarif préférentiel dont profite Rio Tinto.

La responsabilité de la Commission européenne est donc immense. En empêchant le gouvernement français d’organiser la protection des intérêts stratégiques de ce bien collectif européen qu’était Arcelor, issu d’Usinor-Sacilor, lui-même le fruit, faut-il le rappeler, des efforts de plusieurs États membres de l’ancienne Communauté européenne du charbon et de l’acier – CECA –, la Commission européenne a permis à M. Mittal, à la fois, de supprimer depuis 2006 – date de son OPA – 36 000 emplois dans le secteur et de réaliser un LBO – leveraged buy-out – familial moyennant les services de Goldman Sachs. Aujourd’hui surendetté, le groupe ne peut faire face aux conséquences de la baisse du marché européen, ce qui le conduit à une stratégie de démantèlement. Une telle situation aurait pu être évitée si la Commission européenne n’avait pas cette vision dogmatique, voire talmudique du droit de la concurrence, qui lui tient lieu de politique industrielle.

J’ai souligné la responsabilité historique de la Commission européenne auprès de M. Joaquín Almunia, commissaire chargé de la concurrence : c’est l’incroyable aveuglement non pas des responsables politiques des États membres mais de la technocratie bruxelloise, qui nous a plongés dans cette situation très critique. Or cet aveuglement se double d’une stratégie catastrophique en matière de politique énergétique. Plus nous taxons le CO2 que l’Europe produit, plus nous favorisons la consommation du CO2 produit hors Union, si nous ne décidons pas de nous protéger du dumping environnemental en établissant des taxes carbone aux frontières de l’Union européenne. Si l’Europe a assurément raison de privilégier une démarche environnementaliste et si la France soutient la taxation du CO2 comme politique générale de lutte contre le réchauffement climatique sur le territoire européen, notre pays réclame cependant la réciprocité sur le CO2 produit hors de l’Europe, faute de quoi nous consommerons le CO2 produit ailleurs à bas coût.

La politique de la concurrence et la politique de l’énergie sont les deux faillites de la Commission européenne puisqu’elles nous rendent incapables de protéger nos outils industriels. Je ne peux donc que féliciter M. Antonio Tajani, commissaire européen chargé de l’industrie et de l’entreprenariat, d’avoir pour objectif de faire remonter à 20 % la part de l’industrie dans le PIB européen en 2020. Il conviendra toutefois, pour atteindre cet objectif, de réviser toutes les politiques européennes, notamment la politique de la concurrence, la politique commerciale extérieure et la politique environnementale extérieure. C’est ce que ne cesse de répéter le gouvernement français à chaque Conseil « compétitivité », non seulement par ma voix mais également par celles de Mme Delphine Batho, ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie, et de M. Pierre Moscovici, ministre de l’économie et des finances.

Nous ne pouvons pas toutefois passer notre temps à accuser l’Europe. Il nous faut prendre des mesures, en vue tout d’abord de conforter les sites industriels qui connaissent des pertes. Tel a été l’objet de la décision du Premier ministre dans l’ « affaire Florange » – je n’y reviens pas. Il faut ensuite, en cas de risque de défaisance, chercher de nouvelles alliances : c’est ce que nous faisons à Saint-Jean-de-Maurienne pour sauver l’aluminium français, où nous cherchons à reconstituer un « Péchiney » franco-allemand, les Allemands disposant toujours d’une industrie de l’aluminium solide, performante et innovante sur le plan technologique. Les investissements allemands doteraient ce groupe d’une taille suffisante et des innovations nécessaires lui permettant de reprendre l’initiative sur le terrain de l’aluminium, avec un coût d’accès à l’énergie qui doit rester modéré – c’est de la responsabilité nationale.

Il convient également de favoriser le recyclage de l’aluminium secondaire en prévoyant l’interdiction de l’exportation de nos déchets pour les traiter sur le territoire national, en vue de créer un marché ad hoc. Là encore, c’est une politique nationale que nous menons.

Nous avons par ailleurs prévu des outils : la Banque publique d’investissement, le Grand emprunt, le financement de la Banque européenne d’investissement ou celui de l’innovation technologique. Monsieur Michel Liebgott, élu sur la circonscription de Florange, ici présent, ne me démentira pas : si nous avons renforcé à Florange les trains de laminage à froid, c’est parce que la France produit les meilleurs aciers spéciaux du monde en raison de ses capacités d’innovation technologique.

En tant qu’État membre de l’Union européenne, la France réfléchit également à la reconstitution d’un acteur minier. Nous avons encore des acteurs spécialisés dans la mine – Areva, pour la transformation de l’uranium, ou Eramet, en lien avec Imerys, pour la production d’alliages spéciaux –, mais nous n’avons plus d’acteur minier de commodités, permettant de maîtriser l’approvisionnement en bauxite, cuivre, minerais de fer, coke, charbon, etc. Reconstituer un acteur minier de taille au moins européenne est un objectif national auquel travaillent les équipes du ministère du redressement productif.

Enfin, si la politique commerciale européenne nous interdit de nous protéger, je me montrerai toutefois optimiste, puisque nous avons obtenu l’ouverture de quatre procédures de protection de nos intérêts industriels – les taxes douanières sont du ressort de la Commission européenne. Ces procédures concernent les aciers spéciaux, la porcelaine et la céramique, les panneaux photovoltaïques et, dernière enquête ouverte, les équipements de télécommunication. Les commissaires européens commencent à ouvrir les yeux sur cette passoire qu’est l’Union européenne au sein de la mondialisation débridée. Du reste, en dépit de ces quatre procédures, l’Europe demeure ouverte à plus de 99 % quand certains de ses partenaires sont fermés à 100 % !

Si le cycle politique commence à évoluer, c’est sous la pression des opinions publiques, qui n’acceptent plus que l’Union européenne ne se porte pas au secours des intérêts des peuples européens. La politique de réorientation du gouvernement français produit donc quelques effets dont nous ne saurions toutefois nous contenter. Mais, à force de parler fort, d’assumer nos positions et de les défendre, nous arrivons parfois à nous faire entendre. J’ai du reste rappelé à M. Antonio Tajani qu’il ne suffisait pas de sortir des textes mais qu’il fallait également prendre des décisions, notamment en matière de politique commerciale, de politique de la concurrence et de politique énergétique, domaines où l’Union européenne devait commencer à se mettre au diapason du reste du monde. Nous continuons en effet d’observer dès règles obsolètes, prises il y a cinquante ans en vue d’harmoniser le marché intérieur européen. Aujourd’hui, le problème n’est plus d’empêcher d’éventuelles distorsions de concurrence entre la Bulgarie et la France : il est de permettre aux grandes nations issues de la révolution industrielle de se battre à armes égales avec leurs partenaires dans la mondialisation. Nous sommes comme des coureurs de fond qu’on aurait entravés et qui devraient lutter à cloche-pied contre des athlètes totalement libres de leurs mouvements ! Tel est le résultat de la politique de l’Union européenne.

Lorsque M. Barroso qui, à l’évidence, n’a rien compris à l’exception culturelle, s’autorise les déclarations que l’on sait et qui d’ailleurs le discréditent de manière assez définitive, comment s’étonner du divorce aujourd’hui constaté entre l’Europe et les peuples ? Comment s’étonner qu’ils veuillent sanctionner ces dirigeants ?

M. Alain Bocquet, rapporteur. Je partage et le ton et la teneur de vos propos, monsieur le ministre.

Tandis que les évolutions de la politique européenne sont bien lentes, nous avons à répondre à l’urgence de la question énergétique, notamment pour l’industrie de l’aluminium, qui est électro-intensive. Alors que les industriels ont besoin de visibilité dans le renouvellement de leur contrat énergétique, ceux dont bénéficient les usines de Saint-Jean-de-Maurienne et de Dunkerque prendront fin respectivement en 2014 et en 2017. Comment dans ces conditions assurer la pérennité de ces industries ? Or, je le répète, il y a urgence pour le secteur de l’aluminium. Que peut faire la France pour agir indépendamment de la réglementation européenne, alors même que d’autres États, notamment l’Allemagne ou la Norvège, se permettent des facilités en la matière ?

Par ailleurs, est-il possible, sans aller jusqu’à une nationalisation…

M. le ministre. Vous avez le droit de la proposer.

M. le rapporteur. …Est-il possible d’obtenir un droit de regard sur le groupe Mittal ? Ce droit pourrait prendre la forme d’une participation au capital du groupe via la BPI. Du reste, Monsieur Mittal respecte-t-il l’accord de Florange ?

En matière de litiges industriels, notamment avec la Chine ou l’Inde, chacun connaît les limites des procédures engagées dans le cadre de l’Organisation mondiale du commerce – OMC. Comment en arriver concrètement à la taxation de certains produits importés dans l’Union européenne ? Cette taxation est réclamée par tous les acteurs, notamment les syndicats.

Enfin, j’ai été, lors d’un des déplacements que j’ai effectués à l’occasion de cette commission d’enquête, très impressionné par le site de recherche et de développement d’ArcelorMittal de Maizières-lès-Metz, qui est un pôle mondial de recherche dans la sidérurgie, fort de 550 chercheurs, et à la création duquel a participé l’investissement public. Est-il envisageable de perdre un tel fleuron ? La même question se pose à propos de Saint-Jean-de-Maurienne : se pourrait-il que Rio Tinto ne vende que l’usine et conserve le centre de recherches avec la potentialité des brevets ? Ce serait intolérable. La question des centres de recherche est primordiale, surtout lorsqu’on apprend que Mittal soustrait de son propre budget de recherche le crédit impôt recherche dont il bénéficie pour le centre de Maizières-lès-Metz ! La recherche fait partie du socle du redressement productif.

M. le ministre. Une nationalisation, au moins temporaire, est d’autant moins à écarter lorsqu’il s’agit pour une nation de défendre ses intérêts stratégiques – le Président de la République l’avait du reste rappelé à l’issue de la crise de Florange –, que cet outil ne serait pas contraire au droit européen. Celui-ci, en effet, ne fixe pas de règles en matière de propriété du capital : il en fixe uniquement en matière de distorsion de concurrence en vue d’éviter toute aide indue à un secteur concurrentiel.

L’entrée minoritaire ou majoritaire dans le capital d’un groupe est un autre moyen d’action qui s’offre à nous – c’est la proposition que nous faisons pour le site de Saint-Jean-de-Maurienne. Le Fonds stratégique d’investissement – FSI – sera présent dans le tour de table, aux côtés de l’allemand Trimet, pour rebâtir un « Péchiney » franco-allemand.

Il est également possible de recourir à la négociation d’avantages fiscaux en échange de contreparties.

Pour le moment, l’accord de Florange est respecté. M. François Marzorati, sous-préfet, y veille sur place, sous le regard très pointu des organisations syndicales et des élus du territoire.

Quant au crédit impôt recherche, le nôtre est un des plus attractifs du monde puisqu’il conduit les grandes entreprises à considérer la France comme la première destination européenne en matière d’investissement en R&D. Il n’est donc pas dans l’intérêt des entreprises de se défaire de leur outil de R&D.

S’agissant de l’usine de Saint-Jean-de-Maurienne, il n’est pas question d’accepter la scission du laboratoire de recherche. Le Gouvernement est particulièrement attentif à la préservation des outils de R&D.

Enfin, concernant le prix de l’énergie, je rappelle que l’Allemagne fait l’objet de deux procédures relatives au prix de l’électricité payé par ses industries électro-intensives : une notification de la Commission européenne et l’annulation, par le tribunal de grande instance de Düsseldorf et à la demande d’une centaine d’associations de consommateurs, de l’exonération de frais de réseau consenti aux industries électro-intensives.

S’agissant du prix de l’énergie, la France a toujours privilégié les ménages plutôt que l’industrie. Il ne faudrait qu’elle le paye un jour trop cher.

Nous essayons, mes homologues britanniques et allemands et moi-même, d’obtenir le desserrement de la législation sur les aides d’État de manière que, sur le terrain du prix de l’énergie, l’Union européenne cesse de nous tirer dans le dos. M. Tajani a lui-même pris position en ce sens dans le cadre de son Plan acier, ce qui représente, à mes yeux, un progrès sensible. La rhétorique progresse, nous attendons les actes.

M. Michel Liebgott. Il faut rappeler que les restructurations dans le secteur de la sidérurgie se sont toujours faites dans la douleur – déjà 17 000 suppressions d’emplois en 1977 dans le cadre du Plan acier. Toutes les solutions ont déjà été essayées, notamment la nationalisation qui, à l’époque, se révéla pertinente. L’envisager de nouveau a permis d’exercer une pression considérable sur ArcelorMittal et d’obtenir l’accord qui a été évoqué.

Au plan européen, on ne peut que regretter la disparition de la CECA. Ne conviendrait-il pas de réfléchir à la création d’un nouvel outil qui s’en inspirerait ?

Il ne faut jamais hésiter à innover. En Lorraine, l’usine Sogérail devait disparaître. Reprise par Corus devenu Tata Steel, elle produit aujourd’hui les meilleurs rails du monde, grâce notamment à des accords passés avec la SNCF. C’est la preuve que des politiques publiques bien menées peuvent dynamiser la production sidérurgique.

L’État aide ArcelorMittal non seulement à travers le crédit impôt recherche, dont bénéficie largement le centre de Maizières-lès-Metz, mais également à travers le projet LisLow impact Steelmaking – : il faudra évidemment contrôler la bonne utilisation de ces crédits.

Laplace Conseil, que nous avons auditionné, a clairement évoqué la possibilité de la faillite du groupe ArcelorMittal compte tenu de son haut niveau d’endettement. Quant aux cabinets Syndex et Secafi Alfa, ils nous ont indiqué, la semaine suivante, qu’une vente par appartements n’était pas forcément exclue, même si la faillite d’ArcelorMittal était loin d’être probable.

Ne faut-il pas envisager de racheter les différentes unités d’ArcelorMittal en cas de faillite ou de vente du groupe ?

S’agissant enfin des surcapacités, elles sont mondiales puisque nous traversons une période de faible croissance. La Chine elle-même est en situation de surcapacité. Chacun devra donc se protéger d’une manière ou d’une autre : les Américains et les Chinois le faisant déjà, via des barrières douanières ou des actions environnementales, il n’y a aucune raison pour que nous ne nous y mettions pas.

M. le ministre. Lorsqu’elle fut créée, la Communauté européenne du charbon et de l’acier (CECA) disposait du pouvoir de fixer des quotas de production par pays et par industrie. Aujourd’hui, nous démantelons toute forme d’intervention de marché, y compris dans le cadre de la politique agricole commune. Il est par conséquent assez difficile d’imaginer désormais que les libéraux qui dirigent l’Union européenne, eux et leurs idéologies et intérêts partisans, que ce soit au Parlement européen à la Commission européenne ou dans la majorité des États membres, puissent désirer reprendre ce chemin. Cela étant, si cette question était à l’ordre du jour, le Gouvernement français serait bien sûr tout à fait prêt à l’examiner. Dans le cadre du Plan automobile, j’ai d’ailleurs demandé à la Commission européenne de limiter les installations de nouveaux sites industriels sur le territoire européen afin de faire travailler de préférence les sites existants et d’éviter ainsi la défaisance et les délocalisations – y compris dans les zones à bas coût de l’Union européenne. Je n’ai cependant pas été entendu.

Et nous demandons désormais à l’excellent Commissaire Karel de Gucht de doter l’Europe d’outils de surveillance du marché, encore appelés outils de monitoring, visant tout particulièrement les importations abusives. Je précise que même Monsieur Mittal a demandé à bénéficier de protections douanières – et, pour une fois, je suis bien d’accord avec lui ! En effet, onze enquêtes sont actuellement en cours à la Commission européenne, portant sur divers types d’acier spéciaux, en raison du dumping qu’exercent les Chinois sur les aciers produits à bas coût, et notamment sur les aciers à revêtement organique. Seul le redémarrage d’outils de surveillance du marché nous permettrait de connaître avec exactitude l’état des flux d’importation et d’exportation ainsi que les besoins technologiques qui en découlent. L’Union européenne, dans son libéralisme forcené, en est arrivée à l’idée qu’il lui fallait être aveugle au point de refuser de savoir : nous demandons qu’elle renonce à un tel aveuglement ! Comme l’écrivait Marguerite Yourcenar dans les Mémoires d’Hadrien, « tâchons d’entrer dans la mort les yeux ouverts ». En d’autres termes, si notre industrie européenne de l’acier se meurt à feu doux, que nous sachions au moins pourquoi !

Le projet Lis suit son cours – la question restant de savoir où il sera implanté. Or, dans la mesure où il n’y a plus de hauts-fourneaux à Florange, Mittal prétend vouloir l’installer à Dunkerque. Le député de la circonscription concernée étant ici présent, je ne commettrai pas l’injure d’affirmer que l’implantation doit avoir lieu à l’endroit où le sinistre a été commis. Quoi qu’il en soit, la protection des sites existants est acquise dans l’accord conclu par le Premier ministre avec Mittal, que j’ai moi-même contresigné.

Mme Michèle Bonneton. Nous avons beaucoup entendu dire que les contrats imposés par la Commission européenne en matière énergétique étaient de cinq ans au plus, soit une durée trop brève pour les entreprises qui ont besoin de disposer d’une certaine visibilité à long terme : comment peut-on, dans ce domaine également, ramener la Commission à la raison ?

Ainsi que l’a souligné Alain Bocquet, nous disposons de véritables fleurons à Maizières-lès-Metz mais aussi à Saint-Jean-de-Maurienne, la technologie appliquée dans cette entreprise faisant encore autorité dans le monde d’aujourd’hui. Il serait donc fort regrettable que ces beaux outils disparaissent.

En matière de recherche, l’État verse très généreusement aux entreprises un crédit d’impôt recherche (CIR) qu’elles apprécient beaucoup. Ainsi Monsieur Mittal nous a-t-il appris qu’ArcelorMittal avait reçu de la France 100 millions d’euros au titre du CIR au cours des trois dernières années, sans que l’État ait exigé la moindre contrepartie : est-il envisagé de conditionner les aides publiques ?

D’autre part, bien que le prix de la tonne de dioxyde de carbone soit faible, il semblerait que les industriels aient plutôt intérêt à ne pas faire fonctionner leurs hauts-fourneaux et à revendre les quotas de carbone qui leur sont attribués : comment y remédier et quelle est la politique menée au niveau européen en la matière ?

Enfin, envisager l’entrée de l’État dans le capital de certaines entreprises me paraît une excellente chose, comme l’illustre d’ailleurs le cas de Thales dont on a pu sauver des filiales du fait que l’État en était le premier actionnaire. Ce levier important permet en effet à la puissance publique de contribuer à la définition de la stratégie des entreprises concernées. De ce point de vue, la politique du Fonds stratégique d’investissement (FSI) n’est pas toujours très limpide et des inquiétudes se sont fait entendre chez Constellium. En outre, il se trouve dans ma circonscription, à Voreppe, dans l’Isère, un centre de recherche et de fonctions support de Rio Tinto au sein duquel 100 licenciements sont annoncés. Pourriez-vous nous apporter des précisions sur ces aspects ?

Monsieur  le ministre. L’Union européenne nous agace effectivement beaucoup en limitant à cinq ans  la durée des contrats énergétiques – durée qui ne correspond en rien à celle de l’amortissement des équipements par les entreprises. C’est là ce que j’appelle l’obsession talmudique de la recherche de la distorsion de concurrence, quand, dans le même temps, le gouvernement canadien concède aux usines d’aluminium de Rio Tinto des barrages leur permettant d’exploiter son électricité à bas prix et sans condition ! C’est pourquoi le Gouvernement français mène aujourd’hui un combat en faveur de l’application de clauses de réciprocité, qui nous confèreraient le droit de recourir aux mêmes procédés que ceux que nous font subir nos concurrents dans la compétition mondiale. Et j’ai bien l’intention de faire un usage tout à fait inconsidéré de ces clauses tant notre exaspération est à son comble ! Car pendant que l’Europe est en train de s’affaisser économiquement, des dirigeants européens passent leur temps à importuner nos industries ! C’est pourquoi le ton monte au sein du Conseil « compétitivité ». Et je ne suis d’ailleurs pas le seul à protester : c’est aussi le cas de nos amis italiens, espagnols, roumains, belges, et même parfois allemands. Je puis donc vous affirmer que la Commission européenne n’est pas très populaire aujourd’hui auprès des États membres et que le seul moyen d’agir est de la mettre en minorité lors des prochaines élections européennes. C’est de la politique qu’il faut faire, madame la députée, et pas seulement dans l’enceinte de l’Assemblée nationale, mais aussi au niveau européen. Il convient ainsi d’éduquer nos concitoyens en leur expliquant en quoi consiste vraiment le libéralisme et de faire en sorte que cette Commission, qui doit répondre de ses actes devant le Parlement européen, soit mise dans l’impossibilité de mener sa politique. Je souhaite donc que cette réforme très importante de l’Union européenne se déroule dans les urnes.

Quant à la conditionnalité des aides publiques, M. Jean-Jacques Queyranne, ancien ministre et président de la région Rhône-Alpes, aidé de M. Jean-Philippe Demaël, président directeur général de l’entreprise Somfy et de M. Philippe Jurgensen, inspecteur général des finances, soulignent dans un rapport rendu hier le manque de performance d’un grand nombre d’entre elles, proposant au Gouvernement d’en supprimer mais aussi d’en renforcer d’autres – dont vous pourrez lire l’éloge inattendu. Le Conseil national de l’industrie a pour sa part institué un groupe de travail sur cette question mais le Gouvernement n’a formé aucun projet à ce sujet et vise davantage à en assurer la lisibilité, la simplification et l’allégement. Cela dit, le Parlement peut formuler des propositions sur le sujet à tout moment.

Enfin, quant la participation de l’État ou de ses outils bancaires et financiers, tels le FSI et la BPI, dans le capital des entreprises du secteur que vous examinez, vous avez pris l’exemple de Constellium – qui constitue pour nous une entreprise stratégique pour la transformation de l’aluminium à destination des filières automobile et aéronautique. Or, lorsque Rio Tinto a procédé à une vente en 2009 au fonds d’investissement Apollo Global Management, le FSI en a profité pour entrer dans le capital de Constellium à hauteur de 10 %. Et il y a quelques semaines, Constellium a été introduit en bourse dans l’objectif de faire sortir progressivement Rio Tinto du groupe Apollo. Dans le même temps, le FSI a porté sa participation dans le groupe à 12,5 % de manière à en devenir à terme l’actionnaire de référence, une fois que Rio Tinto et Apollo en seront sortis. Quant aux problèmes de suppression de postes dans ces entreprises, ils ne relèvent pas d’enjeux de propriété du capital : nous tentons plutôt de les résoudre en lien avec les commissaires régionaux au redressement productif, avec l’objectif de limiter les dégâts et de préserver les outils de travail concernés.

M. Christian Hutin. Il règne au sein de notre commission, qui eût pu s’intituler « commission d’enquête pour le redressement de la sidérurgie et de la métallurgie », une forme de consensus dépassant les clivages partisans : ayant en effet tous compris sa dimension de combat et de non-renoncement, nous avons ainsi localisé les lieux où mener la bataille. Et sans préjuger des conclusions que nous rendrons la semaine prochaine, il me semble que le Waterloo de Péchiney ne nous empêchera pas de faire la campagne de France et que nous serons autre chose que des Marie-Louise ! En tout état de cause, je souscris complètement à vos propos, Monsieur le ministre, et je soutiens pleinement votre action.

Nous avons auditionné, ce matin même, M. Patrick de Schrynmakers, ancien secrétaire général de l’Association européenne de l’acier (AEA) qui a fait preuve d’une franchise extraordinaire : il aura fallu douze ans à la Commission européenne pour qu’elle se décide à dresser un bilan de la situation. Mais, bel exemple de « schizophrénie », elle est le malade, et non le docteur ! Il semblerait néanmoins que nous ayons progressé sur un certain nombre de points et que notre commission d’enquête remporte quelque succès.

Imaginons à présent un monde de rêve dans lequel le ministre du redressement productif pourrait bénéficier de prérogatives législatives d’ordre national : sur quel arsenal législatif souhaiterait-il s’appuyer ? Je songe notamment aux nationalisations : le groupe Mittal représente en effet 15 % de la richesse du bassin dunkerquois – qui ne dépend par conséquent que d’un homme et de son fils. Or, on ne sait jamais ce qui peut arriver. Compte tenu de l’intérêt stratégique que présentent le fer et l’aluminium pour notre pays, une nationalisation me paraîtrait assez logique. Les 1 400 milliards d’euros d’encours de l’assurance-vie pourraient alors servir à financer l’opération.

Monsieur le ministre. Nous disposons de beaucoup de marges de manœuvre pour protéger nos intérêts : votre commission pourrait notamment œuvrer au renforcement de l’arsenal législatif anti-offre publique d’achat (OPA) afin d’éviter que ne se reproduise ce qui est arrivé à nos deux fleurons de l’acier et de l’aluminium, Arcelor et Péchiney.

D’autre part, quelle attitude devons-nous adopter vis-à-vis d’une Commission européenne, qui, dans la confrontation avec les aspirations partagées des États membres et sur le fondement de ses pouvoirs propres, s’obstine aujourd’hui à appliquer des règles obsolètes – c’est-à-dire non pertinentes compte tenu de nos besoins –, et à utiliser la machinerie d’une technocratie trop puissante dans une période où l’on a besoin de soutien et non d’obstacles ? Nous faut-il nous comporter en bons élèves ou allons-nous enfin défier la Commission européenne ? Cette question finira de toute manière par se poser sur le terrain du droit de l’énergie sur lequel nous ne sommes pas d’accord. La façon dont cette institution s’interprète comme gardienne des traités est absolument incompatible avec les aspirations découlant du mandat que nous a accordé le suffrage universel des Français. Ce problème ne peut donc être résolu que de manière politique. La question des pouvoirs propres de la Commission européenne en matière d’aides d’État n’a plus de sens et doit faire partie des points à revoir dans le Traité de Rome. Il conviendrait pour le moins que le Parlement européen puisse tempérer ces pouvoirs qu’elle n’exerce d’ailleurs pas, la plupart du temps, quand il conviendrait de réguler le marché mais qu’elle exerce au contraire de manière excessive lorsqu’elle devrait s’en abstenir ! C’est là tout l’enjeu de la coupure de l’Europe vis-à-vis de l’aspiration des peuples – problème politique majeur sur lequel l’Europe joue actuellement sa survie politique. Car chaque fois que l’on prend une décision contre les peuples, ceux-ci le lui font payer au centuple. Une telle analyse personnelle n’engage toutefois que moi, et pas le gouvernement français.

Mme Édith Gueugneau. Lors de nos auditions précédentes, certaines entreprises et grandes fédérations nous ont signalé et cela à plusieurs reprises le coût important de l’énergie dans leur activité : votre ministère travaille-t-il sur ce sujet en partenariat avec le ministère de l’écologie, du développement durable et de l’énergie ?

Les syndicats ont quant à eux dénoncé les délocalisations. Or, le 14 juin dernier, vous avez présenté plusieurs dispositifs permettant de favoriser les relocalisations. Quel serait l’impact de ces mesures pour les grands groupes et les grands pourvoyeurs d’emploi ?

Enfin je tiens ici à saluer le travail accompli par vos interlocuteurs régionaux, les commissaires au redressement productif, qui accompagnent les entreprises dans la proximité.

Monsieur le ministre. C’est le ministère de l’énergie qui est chargé de la protection des intérêts énergétiques du pays et qui est par conséquent chef de file sur ce type de dossier. Je puis néanmoins vous affirmer que nous travaillons dans le cadre du débat sur la transition énergétique à la définition de mesures de soutien aux énergies intensives telles que la cogénération industrielle. D’autres amendements apparaîtront également quant au statut des réseaux intensifs. Nous avançons, certes, mais timidement et de manière insuffisante car chaque fois que nous prenons une initiative au plan national, nous nous heurtons aux réactions de la Commission européenne. Tout cela doit donc en permanence être négocié.

Nous nous battons effectivement pour diminuer nos coûts de production, à l’aide du crédit d’impôt compétitivité emploi, le CICE, d’une part, qui permet de faire baisser le coût du travail, et de la BPI, d’autre part, qui permet d’agir sur le coût du capital. Quant au coût de l’énergie, il est actuellement discuté dans le cadre du débat sur la transition énergétique, qui vise notamment à déterminer qui financera la hausse structurelle de ce coût, compte tenu de notre refus d’exploiter le gaz de schiste et du démantèlement d’une partie de notre parc nucléaire. Je pose pour ma part ce débat en termes industriels.

Monsieur le président Jean Grellier. Nous vous remercions pour ces réponses et vous invitons à relayer cette urgente question énergétique – même si vous n’en êtes pas directement responsable – tant les perspectives en la matière sont inquiétantes. Cet enjeu aura en effet un impact direct sur la pérennité de nos sites industriels, et ce, dès demain matin.

Il conviendra également de songer à recourir aux nationalisations – même si nous ne saurions nier notre besoin de capitaux internationaux – ainsi qu’aux modalités d’évolution du partenariat entre la puissance publique et la capitalisation des entreprises afin d’atténuer notre perte de souveraineté. Lorsque l’on s’aperçoit par exemple que le crédit impôt recherche perçu ne représente que 25 % du budget du centre de recherche de Maizières-lès-Metz, sans doute l’État dispose-t-il du moyen de discuter avec le groupe. Et sans doute pourra-t-on élaborer des solutions, notamment dans le cadre du futur projet de loi sur la cession des sites rentables, afin d’assurer la maîtrise de nos outils industriels, et peut-être ensuite dans le cadre d’un texte sur la gouvernance des entreprises. Nous sommes à la veille de rendez-vous importants.

L’audition s’achève à dix-huit heures dix.

——fpfp——

Membres présents ou excusés

Commission d’enquête sur la situation de la sidérurgie et de la métallurgie françaises et européennes dans la crise économique et financière et sur les conditions de leur sauvegarde et de leur développement

Réunion du mercredi 19 juin 2013 à 17 heures

Présents. – M. Alain Bocquet, Mme Michèle Bonneton, M. Jean Grellier, Mme Edith Gueugneau, M. Christian Hutin, M. Denis Jacquat

Excusés. – M. Gaby Charroux, M. Jean-Yves Le Déaut