Accueil > Travaux en séance > Les comptes rendus > Les comptes rendus de la session > Compte rendu intégral

Afficher en plus grand
Afficher en plus petit
Edition J.O. - débats de la séance
Articles, amendements, annexes

Assemblée nationale
XIVe législature
Session ordinaire de 2013-2014

Compte rendu
intégral

Deuxième séance du mercredi 08 janvier 2014

Présidence de Mme Laurence Dumont

vice-présidente

Mme la présidente. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à vingt et une heures quarante-cinq.)

1

Modification de l’ordre du jour

Mme la présidente. Le Gouvernement a informé le président de l’inscription à l’ordre du jour du jeudi 16 janvier de la proposition de loi visant à harmoniser les délais de prescription des infractions prévues par la loi sur la liberté de la presse à la place du projet de loi renforçant la protection du secret des sources des journalistes.

2

Agriculture, alimentation et forêt

Suite de la discussion d’un projet de loi

Mme la présidente. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt (nos 1548, 1639, 1614, 1604).

Le temps de parole restant pour la discussion de ce texte est de six heures et cinquante-six minutes pour le groupe SRC, dont 245 amendements sont en discussion, huit heures trente-huit minutes pour le groupe UMP, dont 761 amendements sont en discussion, deux heures vingt-sept minutes pour le groupe UDI, dont 129 amendements sont en discussion, une heure trente et une minutes pour le groupe écologiste, dont 111 amendements sont en discussion, une heure dix-sept minutes pour le groupe RRDP, dont 30 amendements sont en discussion, une heure dix-sept minutes pour le groupe GDR, dont 101 amendements sont en discussion, et vingt-quatre minutes pour les députés non-inscrits.

Discussion des articles (suite)

Mme la présidente. Cet après-midi, l’Assemblée a commencé l’examen des articles du projet de loi, s’arrêtant à l’amendement n133 à l’article 1er.

Article 1er (suite)

Mme la présidente. La parole est à M. Martial Saddier, pour soutenir l’amendement n133.

M. Martial Saddier. Madame la présidente, monsieur le ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt, je serai très bref. La discussion générale a fait la démonstration implacable du caractère bavard du présent projet de loi. L’article 1er comporte notamment de nombreuses dispositions bien trop compliquées et pas suffisamment précises. Le présent amendement vise à simplifier sa rédaction afin d’en venir au fait.

Mme la présidente. La parole est à M. Germinal Peiro, rapporteur de la commission des affaires économiques, pour donner l’avis de la commission.

M. Germinal Peiro, rapporteur de la commission des affaires économiques. Tout le monde connaît les mots de Jean-Étienne-Marie Portalis, qui, je vous le rappelle, était à l’instar du Périgourdin Jacques Maleville un corédacteur du code civil : « Les lois sont des volontés. » On pourrait penser, monsieur Saddier, que l’ensemble du titre préliminaire ne doit pas figurer dans la loi. Je pense au contraire qu’il est très important de réaffirmer les grands objectifs de la loi dans son introduction ; cela a d’ailleurs été le cas de toutes les grandes lois d’orientation agricole depuis 1960. La commission émet donc un avis défavorable.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt, pour donner l’avis du Gouvernement.

M. Stéphane Le Foll, ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt. Après les références culturelles et politiques de M. le rapporteur, le Gouvernement se contente d’émettre le même avis que la commission !

(L’amendement n133 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Paul Molac, pour soutenir l’amendement n269.

M. Paul Molac. Cet amendement vise tout simplement à ajouter aux dimensions européenne et nationale de la politique en faveur de l’agriculture et de l’alimentation une dimension territoriale. En effet, ce projet de loi renforce le rôle des collectivités territoriales, en particulier des régions, dans la conduite des politiques agricoles. Il convient donc de préciser dans ses grands principes que la politique agricole a également une dimension territoriale.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Germinal Peiro, rapporteur. Cet amendement permet de tenir compte de la problématique régionale, qui a été évoquée lors de l’examen du texte en commission. Avis donc favorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Le Foll, ministre. Même avis.

(L’amendement n269 est adopté et l’amendement n270 tombe.)

Mme la présidente. La parole est à M. Bruno Nestor Azerot, pour soutenir l’amendement n770.

M. Bruno Nestor Azerot. Il s’agit, par cet amendement sur un projet de loi qui englobe dans son champ toute l’agriculture française, de ne pas oublier que celle-ci a aussi, grâce à l’apport des outre-mer, une dimension mondiale très spécifique, avec des cultures certes européennes mais aussi tropicales et équatoriales. La France est ainsi l’un des premiers producteurs de bananes et de cannes à sucre au monde.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Germinal Peiro, rapporteur. Je comprends bien ce que veut dire notre collègue. À travers l’export, l’agriculture française a évidemment une dimension mondiale. Cela étant dit, la référence à une double dimension nationale et européenne vise le cadre juridique de définition de la politique de l’agriculture. Or les outre-mer, même s’ils se développent sur l’ensemble de la planète, font bien partie de notre pays. Par conséquent, je juge qu’il n’est pas nécessaire de préciser cette dimension. L’avis de la commission est donc défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Le Foll, ministre. Dans l’esprit de la réponse du rapporteur, j’ajoute que le texte comporte des articles spécifiques sur le sujet et une partie consacrée aux outre-mer. Il n’est donc pas nécessaire de faire mention de cette dimension à cet endroit du texte. L’avis du Gouvernement est donc le même que celui de la commission.

(L’amendement n770 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Annie Genevard, pour soutenir l’amendement n1374.

Mme Annie Genevard. Monsieur le ministre, cet amendement propose d’inverser l’ordre des alinéas 5 et 6. La question de la place donnée au producteur par rapport au consommateur me paraît fondamentale. Votre collègue ministre du redressement productif attribue le déclin industriel de la France à la priorité qui a été donnée au consommateur, au détriment du producteur. Ne faisons pas la même erreur dans le secteur agricole. Il y aura toujours en France des consommateurs, mais y aura-t-il toujours des producteurs si l’on alourdit déraisonnablement les conditions économiques de la production ?

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Germinal Peiro, rapporteur. Défavorable. Nous considérons en effet que la première finalité de l’agriculture n’est pas simplement de produire, mais de produire en vue de nourrir les hommes.

Mme Annie Genevard. Encore faut-il qu’il y ait des producteurs ! C’est une question fondamentale !

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Le Foll, ministre. Même avis. J’estime que tout produit agricole a une destination, que ce soit l’alimentation animale ou, in fine, l’alimentation humaine. Cela ne remet pas en cause l’objectif de production agricole.

Mme la présidente. La parole est à Mme Annie Genevard.

Mme Annie Genevard. Je ne me suis sans doute pas exprimée assez clairement : il ne s’agit pas de considérer que le producteur est plus important que le consommateur, mais de rappeler que si l’on ne garantit pas les conditions du maintien de la production en France, les consommateurs se tourneront vers des produits étrangers qui n’auront pas forcément été produits dans les conditions optimales que nous souhaitons. Je pense pour ma part que protéger le producteur, c’est protéger le consommateur.

M. Stéphane Le Foll, ministre. Vous avez raison !

(L’amendement n1374 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Michèle Bonneton, pour soutenir l’amendement n271.

Mme Michèle Bonneton. Si la dimension économique de l’agroécologie est facile à cerner, sa dimension environnementale mérite d’être précisée, car tout le monde n’est pas toujours d’accord sur ce qu’est l’environnement. Tel est l’objet de cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Germinal Peiro, rapporteur. Nous avons déjà examiné cet amendement en commission et vous posez là, madame Bonneton, une question tout à fait légitime. Vous avez raison de signaler que la notion d’agroécologie n’est pas clairement définie. Elle ne figure d’ailleurs pas dans le code rural et de la pêche maritime et le dictionnaire n’en fournit encore aucune définition. Pour autant, nous en avons déjà suffisamment parlé pour pouvoir en préciser les contours. Je vous demande donc de retirer cet amendement au profit d’un amendement du Gouvernement qui viendra en discussion ultérieurement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Le Foll, ministre. Je suis du même avis que le rapporteur. Nous avons essayé, en tenant compte des débats qui ont eu lieu en commission et des remarques de Mme Bonneton et d’autres députés, d’établir une définition de l’agroécologie, dans un amendement qui sera bientôt discuté. Je souhaite que vous vous y ralliiez, madame la députée. Avis défavorable.

Mme la présidente. Acceptez-vous de retirer l’amendement n271, madame Bonneton ?

Mme Michèle Bonneton. Oui, madame la présidente, car l’amendement du Gouvernement est intéressant.

(L’amendement n271 est retiré.)

Mme la présidente. La parole est à M. André Chassaigne, pour soutenir l’amendement n561.

M. André Chassaigne. Cet amendement s’intéresse au partage de la valeur ajoutée. En effet, le dernier rapport de l’Observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires, rendu public en 2013, montre des disparités très importantes dans l’évolution des marges, notamment dans la grande distribution. Ainsi, la hausse des coûts de production dans l’élevage est plus ou moins retranscrite au long des filières.

On note cependant une véritable stratégie d’accroissement des marges brutes et nettes de la distribution pour les produits de grande consommation, par ailleurs les plus consommés, ce qui n’est pas sans lien avec la perte de pouvoir d’achat des consommateurs. Comme le précisent les auteurs du rapport, les rayons volaille et charcuterie affichent les taux de marge nets rapportés au chiffre d’affaires les plus élevés des rayons alimentaires frais en 2012, et ces taux sont en augmentation en 2013. De même, l’Observatoire fait le constat que le rayon des produits laitiers présente en 2012 une marge nette avant l’impôt bien supérieure à la moyenne de l’ensemble des rayons frais étudiés.

Dans ces conditions, la question de la répartition de la valeur ajoutée est bien centrale : les prix d’achat des principales productions, telles que le porc ou le lait, ne couvrent même pas la forte augmentation des coûts de production de l’élevage alors que, dans le même temps, la distribution poursuit sa politique d’accroissement des marges sur ces produits, qui sont parmi les plus consommés. Cet amendement vise donc à insister davantage sur la nécessité du partage de la valeur ajoutée.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Germinal Peiro, rapporteur. À titre personnel, je suis très favorable à cet amendement. J’ai d’ailleurs déposé un amendement sur la création de la valeur ajoutée, un préalable indispensable au partage de celle-ci.

Monsieur Chassaigne, l’article 7 du projet de loi prévoit que le Médiateur des relations commerciales agricoles puisse émettre des recommandations sur le partage de la valeur ajoutée tout au long de la chaîne alimentaire. Nous sommes là au cœur d’un sujet. La contractualisation a tenté de répondre à cette question. Aujourd’hui se pose la question d’un partage de la valeur ajoutée tout au long de la chaîne qui permette à chaque maillon de vivre, en particulier aux producteurs. Avis donc favorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Le Foll, ministre. Même avis. Nous en revenons là à la question de la place qui doit être donnée à la production par rapport à la consommation, que nous avons évoquée voilà quelques instants. Il s’agit bien de répartir la valeur ajoutée. Faire en sorte qu’une partie de celle-ci aille à la production, c’est garantir la production. Le Gouvernement est favorable à cet amendement.

(L’amendement n561 est adopté.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Danielle Auroi, pour soutenir l’amendement n273.

Mme Danielle Auroi. Je propose par cet amendement une modification d’ordre sémantique : à la première phrase de l’alinéa 7, substituer aux mots « compétitivité et l’innovation » le mot « durabilité ». Puisque nous nous inscrivons dans une logique d’agroécologie, il convient de faire référence plus clairement au développement durable. Nous voulons une politique agricole plus juste, qui soutient les petites exploitations, appuie le développement des circuits courts et de la production en agriculture biologique et qui respecte la souveraineté alimentaire de chaque région du monde. La durabilité permet d’englober tous ces aspects. C’est pourquoi je propose cette terminologie, en phase avec les objectifs inscrits dans ce projet de loi.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Germinal Peiro, rapporteur. L’alinéa 7 évoque le revenu des agriculteurs et les moyens de le soutenir. Il est tout à fait évident, madame Auroi, que le projet défendu par le ministre vise à soutenir l’agriculture durable. Je ne suis toutefois pas favorable à la suppression des notions de compétitivité et d’innovation dans cet alinéa.

Mme Laure de La Raudière. Ah bon ?

M. Germinal Peiro, rapporteur. On voit bien que l’innovation est absolument nécessaire dans tous les domaines de la vie. Cela vaut pour le secteur agricole comme pour tous les autres secteurs économiques. Quant à la compétitivité, ce n’est pas un gros mot, c’est une réalité. Aujourd’hui, qu’on le veuille ou non, dans les échanges commerciaux, on est en compétition avec des partenaires qui peuvent être européens ou internationaux.

M. Christian Jacob. Dommage que vous ne soyez pas toujours au rendez-vous pour incarner cette position !

M. Germinal Peiro, rapporteur. Je ne pense pas qu’il soit utile de substituer aux mots compétitivité et innovation le mot durabilité, car celui-ci ne recouvre pas tout à fait le même spectre. La commission a donc émis un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Le Foll, ministre. Même avis. Je suis certes attaché à l’idée de la combinaison des performances économiques et écologiques, mais on est obligé d’admettre que dans un marché, les producteurs, les « transformateurs » sont en concurrence. Or, pour conserver des parts de marché, il faut être compétitif. Je souhaite donc le maintien de cette notion, sachant que le terme « durabilité » est mentionné à plusieurs reprises dans d’autres articles.

Mme la présidente. La parole est à Mme Danielle Auroi.

Mme Danielle Auroi. Compte tenu des arguments avancés, je retire l’amendement.

(L’amendement n273 est retiré.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Laure de La Raudière, pour soutenir l’amendement n1014.

Mme Laure de La Raudière. Mon amendement vise à supprimer la dernière phrase de l’alinéa 7, « Elle préserve le caractère familial de l’agriculture », en raison du flou juridique qui entoure cette expression de « caractère familial ». À tout le moins, monsieur le ministre, il faudrait que vous expliquiez ce qu’elle recouvre précisément d’un point de vue juridique. On a l’impression qu’elle renvoie à la notion d’exploitation à responsabilité personnelle, ce qui ne couvre pas l’ensemble des exploitations en France, ni les évolutions futures de l’agriculture. Écoutons le président du Conseil constitutionnel : ce qui est inutile, ce qui est flou, nul besoin de l’inscrire dans la loi ! Tel est l’objet de mon amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Germinal Peiro, rapporteur. Permettez-moi, madame la députée, de rappeler d’une part que la notion d’agriculture familiale existe dans les lois antérieures, notamment celle de 1999, qui fait référence, et de l’autre d’indiquer que l’ONU a déclaré l’année 2014 année internationale de l’agriculture familiale. Pourquoi ? Parce que cela veut encore dire quelque chose !

Mme Laure de La Raudière. Non.

M. Germinal Peiro, rapporteur. Cela veut dire quelque chose aussi bien dans les pays avancés que dans les pays en voie de développement. Supprimer cette mention serait une erreur. Affirmer et privilégier le caractère familial de l’agriculture n’empêche pas la mise en œuvre d’autres formes d’exploitation, par exemple les formes sociétaires. Dans bon nombre d’exploitations agricoles, il y a le chef d’exploitation et son conjoint, homme ou femme, qui travaille à l’extérieur. Telle est la réalité, il n’y a pas lieu de la gommer. C’est l’histoire de l’agriculture de notre pays. Avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Le Foll, ministre. Même avis que le rapporteur. Pour favoriser l’agriculture, il faut garder des chefs d’exploitation, maîtres du capital foncier et du capital de production. Il ne faudrait pas donner à penser qu’on peut avoir une agriculture d’investisseurs et de détenteurs de capitaux.

Mme la présidente. La parole est à M. Christian Jacob.

M. Christian Jacob. Je souhaite soutenir l’amendement de Laure de La Raudière. Le caractère familial de l’agriculture figure certes, M. le rapporteur l’a rappelé, dans de nombreux textes. Mais votre rédaction tend à le rendre presque exclusif. Or nous avons besoin aujourd’hui des formes sociétaires les plus évoluées. Vous soutenez l’innovation, monsieur le ministre, mais l’innovation peut aussi être d’ordre juridique.

M. Stéphane Le Foll, ministre. Absolument.

M. Christian Jacob. Lorsque vous dites que le chef d’exploitation doit avoir la maîtrise du foncier, je n’imagine pas qu’il s’agisse d’une remise en cause du statut du fermage. Nous avons besoin de gens qui apportent des capitaux extérieurs et du foncier, c’est ce qui permet l’installation. D’un point de vue dynamique, l’un des handicaps aujourd’hui est souvent la taille trop faible des exploitations. Il faut donc favoriser les initiatives de regroupement, ce qui a conduit Marc Le Fur à défendre les coopératives d’utilisation en commun de matériel agricole tout à l’heure. Et au-delà de ces CUMA, il y a beaucoup d’autres formes sociétaires de regroupement à imaginer pour arriver à des tailles d’exploitation suffisantes.

Mme Catherine Quéré. Le GIEE !

M. Christian Jacob. Ne nous laissons pas enfermer dans la seule vision de l’agriculture familiale, il faut aller bien au-delà. Personne ne la remet en cause, mais il ne faut pas s’enfermer dans un carcan…

Mme Laure de La Raudière. C’est le message que vous faites passer.

M. Christian Jacob. …et faire marche arrière sur de grandes avancées comme l’exploitation agricole à responsabilité limitée ou les formules qui ont permis à des détenteurs de capitaux d’investir dans l’agriculture et de permettre l’installation de jeunes agriculteurs. Dans une loi censée porter l’avenir et l’innovation, il ne faut pas être restrictif.

Mme Laure de La Raudière. Très bien !

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.

M. Germinal Peiro, rapporteur. La formulation du texte actuel est reprise de la loi de 1999.

M. Christian Jacob. Je l’ai dit.

M. Germinal Peiro, rapporteur. À vous entendre, monsieur Jacob, j’ai l’impression que les exploitations familiales vous gênent et que vous voulez les éliminer.

Plusieurs députés du groupe UMP. Mais non !

M. Germinal Peiro, rapporteur. Je ne vois pas en quoi dire que l’on préserve les exploitations familiales signifierait que l’on ne s’occupe pas des autres. Contrairement peut-être à l’UMP, il nous semble important de préserver les exploitations familiales. Si vous n’êtes pas d’accord, dites-le et votez contre. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

En tout état de cause, le caractère familial des exploitations correspond à une réalité dans notre pays, que l’on ne peut nier et qu’il nous semble important de préserver. Cela veut bien dire ce que cela veut dire. Sinon, dans quelques années, il n’y aura plus d’exploitants agricoles, mais uniquement des grands dirigeants de sociétés d’un côté et des salariés agricoles de l’autre. Ce n’est pas ce que nous voulons et c’est pourquoi nous avons repris des éléments de la loi de 1999.



Mme la présidente. La parole est à M. Dominique Potier.

M. Dominique Potier. Je rejoins les propos du rapporteur et je ne voudrais pas que l’on laisse entendre que la famille est du côté du passé – et il me plaît de le dire à mes collègues de l’opposition (Sourires) – et que d’autres formes sociétaires seraient du côté de l’avenir. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.)

Si l’agriculture est ce qu’elle est aujourd’hui et si elle représente encore un avenir pour notre pays, c’est parce qu’elle a cumulé deux formes de résistance au libéralisme : d’une part, le patrimoine, la tradition familiale de la transmission des valeurs et des savoir-faire, et d’autre part la capacité à accueillir de nouveaux entrepreneurs. Je peux en témoigner, on peut associer les deux. Rappeler cela, c’est rappeler un combat à l’échelle mondiale afin que le libéralisme ne soit pas la forme dominante dans l’économie agricole parce qu’elle n’est pas performante.

M. Olivier Marleix. Vous défendez le kolkhoze ?

M. Dominique Potier. La famille a un rôle extrêmement important à côté d’autres formes sociétaires. C’est avec un plaisir non dissimulé que je la défends face à vous. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et écologiste.)

Plusieurs députés du groupe UMP. C’est assez rare en effet ! (Sourires.)

Plusieurs députés du groupe SRC. Mariton, reviens ! (Sourires.)

(L’amendement n1014 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Antoine Herth, pour soutenir l’amendement n616.

M. Antoine Herth. Monsieur le ministre, je vais faire un pas vers vous : sous une autre forme, je vais répéter ce que vous venez d’expliquer.

M. Stéphane Le Foll, ministre. Je suis d’accord !

M. Antoine Herth. Ne tombons pas dans la caricature. Il n’y a pas d’un côté ceux qui défendent la famille et de l’autre ceux qui ne la défendraient pas. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

M. Jean-Frédéric Poisson. Et pourtant…

M. Antoine Herth. L’exploitation familiale n’a pas été un rempart face au métayage à une époque, pas plus qu’elle ne l’a été face aux contrats d’intégration, dont on sait à quel point ils ont été nuisibles dans un certain nombre de productions. Je vous propose de clarifier cette ambiguïté et de dire les choses comme elles sont. La vérité, c’est que nous souhaitons tous préserver le caractère d’autonomie et de responsabilité individuelle de l’exploitant, sans préjuger de la forme juridique que cela doit revêtir. Il me semble que nous pouvons partager cette idée.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Germinal Peiro, rapporteur. Après le vote qui a consacré le maintien de l’exploitation familiale, je pense comme vous, monsieur Herth, que cela n’exclut pas de mettre en exergue l’autonomie et la responsabilité individuelle de l’exploitant.

M. Jean-Yves Caullet, rapporteur pour avis de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire. C’est un ajout.

M. Germinal Peiro, rapporteur. De notre point de vue, il n’a jamais été question de remplacer l’un par l’autre. Je vous propose donc d’accepter votre amendement, mais en ajoutant la préposition « et » au début. On préservera ainsi le caractère familial des exploitations et d’autonomie et de responsabilité individuelle de l’exploitant.

M. Thierry Benoit. Très bien.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Le Foll, ministre. Je suis tout à fait favorable à cette proposition, qui s’inscrit dans l’objectif que nous recherchons : garder à la fois le caractère d’autonomie et de responsabilité individuelle de l’exploitant et le cadre de l’exploitation familiale.

Mme la présidente. Monsieur Herth, êtes-vous d’accord avec cette modification ?

M. Antoine Herth. Elle me semble être de bon augure pour la suite des débats !

M. Yannick Favennec. Très bien !

Mme la présidente. L’amendement 616 rectifié propose donc de rédiger ainsi la fin de la seconde phrase de l’alinéa 7 : « et d’autonomie et de responsabilité individuelle de l’exploitant. »

La parole est à M. Patrick Hetzel.

M. Patrick Hetzel. Je remercie le rapporteur de reconnaître que cet amendement va bien dans le sens de l’autonomie et de la responsabilité individuelle. Ces points sont importants pour nous car il s’agit d’affirmer que l’agriculture a une vocation économique. Ce n’est pas être dans une logique d’opposition que de dire qu’exclure la dimension économique de l’agriculture serait réducteur. J’espère que nous parviendrons à un consensus sur ce point.

(L’amendement n616, tel qu’il vient d’être rectifié, est adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de plusieurs amendements identiques.

La parole est à M. Marc Le Fur, pour soutenir l’amendement n4 deuxième rectification.

M. Marc Le Fur. L’article 1er définit des règles générales. Nous devons donc y affirmer que l’agriculture doit contribuer à l’amélioration de la balance commerciale française. Il est important de le dire à un moment où notre secteur agricole et agroalimentaire reste certes excédentaire, mais pas si l’on exclut les vins et les spiritueux. Attention, mes chers collègues ne nous berçons pas d’illusions sur ce point.

Il convient aussi de réaffirmer que l’agriculture concourt à la politique de l’emploi. L’emploi dans les exploitations agricoles, cela existe. Le monde des salariés agricoles, cela existe, et l’on aurait bien tort de le négliger. Ce sont des emplois directs, dans les exploitations, des emplois dans les CUMA, même si le CICE ne reconnaît pas ces dernières, ainsi que je l’ai rappelé lors de la discussion générale, dans les SDAEC, et des emplois pour les services de remplacement à disposition des exploitants agricoles, services extrêmement utiles.

Enfin, d’une manière générale, l’agriculture concourt à la politique économique voulue par notre pays. Il ne s’agit pas seulement d’une pétition de principe, monsieur le rapporteur : à un moment donné, il faut dire les choses. L’agriculture n’est pas un chapitre du livre de l’environnement.

M. Nicolas Dhuicq. Très bien !

M. Marc Le Fur. C’est une réalité économique que nous devons affirmer. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Mme la présidente. La parole est à M. Guillaume Chevrollier, pour soutenir l’amendement n364.

M. Guillaume Chevrollier. Le présent amendement vise à insérer cet alinéa après l’alinéa 7 : « 2°bis De contribuer à l’amélioration de la balance commerciale française, à la politique de l’emploi et à la politique économique définies par le Gouvernement. »

La politique en faveur de l’agriculture et de l’alimentation doit avoir pour objectif de contribuer à la politique économique de la France et à sa politique de l’emploi. À travers cet amendement, il s’agit d’affirmer le rôle stratégique de l’agriculture pour la France.

Mme la présidente. La parole est à M. Martial Saddier, pour soutenir l’amendement n451.

M. Martial Saddier. Il est défendu, madame la présidente.

Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Armand Martin, pour soutenir l’amendement n673.

M. Philippe Armand Martin. Défendu.

Mme la présidente. La parole est à Mme Annie Genevard, pour soutenir l’amendement n911 rectifié.

Mme Annie Genevard. Défendu également.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission sur ces amendements identiques ?

M. Germinal Peiro, rapporteur. Sur le fond, nous n’avons aucune divergence. Monsieur Le Fur, nous considérons bien l’activité agricole comme une activité économique, il n’y a aucun doute là-dessus.

M. Patrick Hetzel. C’est bien de le dire !

M. Germinal Peiro, rapporteur. Le ministre l’a dit et redit : nous soutenons une agriculture de production qui permettra à notre pays non seulement de nourrir ses habitants, ce qui est bien normal, mais aussi d’être présent sur les marchés internationaux. C’est absolument évident. Jamais vous ne trouverez un écrit émanant de la majorité qui affirmerait le contraire.

Se pose simplement une question de forme : ces amendements identiques sont satisfaits.

M. Marc Le Fur. Contrairement à moi !

M. Germinal Peiro, rapporteur. Je ne désespère pas de vous satisfaire d’ici à la fin du débat, monsieur Le Fur ! (Sourires.) Je vous renvoie donc à l’alinéa 7 de l’article 1er, qui mentionne la défense de l’emploi parmi les finalités de la politique agricole soutenue par le ministre. Je vous renvoie également à l’alinéa 10, qui met en avant le renforcement de la capacité exportatrice de la France et l’augmentation de la valeur ajoutée. Ce qui nous importe, ce n’est pas d’exporter des produits de base mais de créer de la valeur ajoutée sur notre territoire avant de vendre à l’étranger. C’est ainsi que nous créerons de la richesse dans nos régions, pour l’ensemble des producteurs.

Je suis donc au regret de vous dire que, pour des raisons de forme et non de fond, j’émets un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Le Foll, ministre. Il n’y a pas de discussion sur le fond. À la suite du rapporteur, je vous renvoie à l’alinéa 7 pour l’emploi et à l’alinéa 10 pour la capacité exportatrice de la France. Avis défavorable.

(Les amendements identiques nos 4 deuxième rectification, 364, 451, 673 et 911 rectifié ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. La parole est à M. Paul Molac, pour soutenir l’amendement n274.

M. Paul Molac. Cet amendement vise à ajouter après l’alinéa 7 l’alinéa suivant : « 2° bis De promouvoir la conversion à une agriculture biologique ».

L’agriculture biologique est, je tiens à le dire, une agriculture économique en intrants, puisqu’elle n’utilise ni produits phytosanitaires ni engrais, mais aussi une agriculture compétitive au regard de la double performance économique et écologique.

Prenons l’exemple d’un agriculteur bio qui produit 8 000 litres de lait par an avec des vaches de race montbéliarde : il entretient un lien très fort à la terre, produit ses propres matières azotées et vend son lait biologique quasiment au même prix que le lait classique. Qu’on ne me dise pas qu’il n’est pas compétitif ! D’autant que les productions bio s’exportent.

Il n’y a pas que le modèle danois qui soit compétitif. Il y a d’autres modèles tout à fait performants qui permettent aux agriculteurs de bien gagner leur vie et de bien nourrir leurs comptes en banque. C’est cela l’essentiel.

M. Jacques Lamblin. C’est caricatural !

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Germinal Peiro, rapporteur. Monsieur Molac, sur le fond, je comprends votre préoccupation. Je considère que l’agriculture biologique est un aboutissement de l’agroécologie. Il n’y a aucune divergence entre nous de ce point de vue.

Je pourrais vous répondre que votre amendement est satisfait car l’alinéa 5 souligne que l’alimentation doit être produite dans des conditions favorisant la protection de l’environnement et que l’alinéa 14 évoque la performance environnementale et la transition écologique. Mais à titre personnel, je préfère vous dire que j’y suis favorable.

M. Jacques Lamblin. Il y a vraiment deux poids deux mesures !

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Le Foll, ministre. Le Gouvernement s’en remet à la sagesse de l’Assemblée. Pour ma part, je considère que l’agriculture biologique constitue, à l’évidence, l’un des objectifs globaux que nous devons fixer à notre agriculture mais qu’elle ne peut être son unique objectif. Nous avons ainsi présenté un plan Ambition Bio 2017 qui vise un doublement des surfaces dédiées à l’agriculture biologique à condition que ses productions soient valorisées comme telles.

Mme la présidente. La parole est à M. Nicolas Dhuicq.

M. Nicolas Dhuicq. J’appelle l’attention de notre assemblée sur l’exposé sommaire fort intéressant de cet amendement hautement idéologique.

Cela fait plus de 5 000 ans que les espèces que l’homme cultive ou élève ont évolué avec lui, ainsi que les bactéries et les virus qui les accompagnent. Cet amendement post-moderne, d’essence profondément réactionnaire, veut retourner à un âge d’or idéal situé avant l’apparition de la chimie et des produits phytosanitaires. Autrement dit, il repose sur l’idée que nous pourrions, nous humains, revenir en arrière et gommer toute l’évolution des bactéries et des microfaunes qui se sont développées depuis des siècles, évolution qui s’est accélérée à mesure que nous avons progressé dans la connaissance du vivant et de la chimie. Il entend donc revenir à un système d’exploitation post-néolithique, je le dis sans provocation. (Rires sur les bancs des groupes UMP.)

En réalité, revenir à un âge d’or d’avant les progrès scientifiques est scientifiquement impossible. Vous ne nourrirez pas la planète avec ce type d’amendement. Les productions chuteront et dans les zones humides, le paludisme reviendra. En tant que médecin ayant un peu de formation scientifique, je dis que cet amendement est totalement absurde et incohérent. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Mme la présidente. La parole est à M. Christian Jacob.

M. Christian Jacob. Suivant une argumentation un peu différente de celle de mon collègue, je veux moi aussi m’opposer à cet amendement.

L’agriculture biologique, qui se développe depuis de nombreuses années, a trouvé une place sur le marché. D’une technicité de plus en plus poussée, je suis d’accord avec vous monsieur Molac, elle est parvenue à des résultats tout à fait intéressants en termes de production. Simplement, il ne faut pas s’enfermer dans un modèle unique. Il existe d’autres formes d’agriculture, l’agriculture raisonnée notamment, qui trouvent elles aussi leur place sur le marché.

Nous avons besoin de systèmes d’accompagnement et de conversion vers le bio, mais nous avons besoin aussi d’une production de masse. Et là, je vais aborder un sujet sur lequel nous sommes en complet désaccord, chers collègues du groupe écologiste : l’innovation en matière de recherche variétale. En tant que défenseur des OGM, j’estime que la recherche semencière est dans une situation catastrophique.

Mme Laure de La Raudière. Très bien !

M. Christian Jacob. Pendant plus de cinquante ans, nous avons été des leaders mondiaux en ce domaine. Aujourd’hui, nous prenons du retard. Le dogme qui a abouti à bloquer toute recherche sur les OGM a permis d’assurer les plus beaux jours qui soient à des sociétés comme Monsanto qui occupent aujourd’hui des situations de monopole.

M. Marc Le Fur. Eh oui !

M. Christian Jacob. Elles n’ont plus de concurrents en France, peu de concurrents à l’échelle européenne. Il faut au contraire laisser toute sa place à l’innovation. Dans cette perspective, je souhaite que nous puissions enfin reprendre la recherche sur les OGM, et ce en plein champ. Certes, cette position est peu partagée mais je la défends avec beaucoup de conviction. Nous avons bloqué la recherche en France et laissé prospérer les monopoles à l’étranger, ce qui fait que Monsanto peut inonder aujourd’hui le monde de ses produits.

Veillons donc à ne pas nous enfermer dans un modèle unique. Le bio a toute sa place, il a encore des parts de marché à conquérir, c’est une évidence. Mais ne soyons pas dans l’exclusive. Or la rédaction de votre amendement et l’argumentation qui le sous-tend visent à l’exclusive. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP.)

Mme la présidente. La parole est à M. Thierry Benoit.

Mme Danielle Auroi. Allez les industriels !

M. Thierry Benoit. Dans la discussion générale comme en commission, le groupe UDI a redit la nécessité de concilier urgence économique et urgence écologique.

M. Yannick Favennec. C’est vrai !

M. Thierry Benoit. Alors que nous entamons la discussion des articles, je veux faire part de mon étonnement devant la façon dont ont été traités deux amendements successifs. Lorsque M. Le Fur a proposé de préciser que la politique devait contribuer à l’amélioration de la balance commerciale française, à la politique de l’emploi et à la politique économique définie par le Gouvernement, cela ne remettait aucunement en cause votre projet, monsieur le ministre. Pourtant, vous-même et le rapporteur avez émis un avis défavorable sur cet amendement, qui à mon sens aurait adressé un signal intéressant aux agriculteurs et, en aval, aux industriels de l’agroalimentaire.

M. Yannick Favennec. Il a raison !

M. Thierry Benoit. Mais deux minutes après, en vertu de cette formule, de ce slogan de l’agroécologie que vous avez imaginé, vous avez cédé aux charmes, aux sirènes d’une sensibilité qui s’exprime ici, mais pas forcément à due proportion de ce qu’elle représente à travers le pays. Et si subrepticement, voire sournoisement, vous persévérez dans cette voie jusqu’au terme de ce texte, nous avons de quoi être préoccupés.

Je vous ai observé très attentivement, monsieur le rapporteur : vous vous êtes interrogé quant à l’avis à donner sur l’amendement de nos collègues écologistes.

M. François Brottes, président de la commission des affaires économiques. Comme pour tous les amendements !

M. Thierry Benoit. Cet amendement, à titre personnel, je l’estime acceptable.

Mme Delphine Batho. Ah !

M. Thierry Benoit. Mais il est acceptable à la condition de trouver un juste équilibre, monsieur le ministre, et d’envoyer des signaux positifs aux diverses agricultures de France : l’agriculture familiale, l’agriculture sociétaire, l’agriculture industrielle, l’agriculture de niche. Si vous agissez ainsi, alors vous aurez relevé le défi que vous vous êtes fixé à travers ce projet de loi. Mais que penser si, sans vouloir le dire, vous continuez d’envoyer des signaux qui ne sont pas ceux attendus par les populations concernées, comme c’est le cas dans trop de textes ? En l’occurrence, il s’agit des professionnels de l’agriculture et de l’industrie agroalimentaire.

Car, mes chers collègues du groupe écologiste, pour nous, l’agroindustrie n’est pas un gros mot.

M. Paul Molac et Mme Danielle Auroi. Mais non !

M. Thierry Benoit. Je sais que ce que la France et ma région, la Bretagne, lui doivent. Diantre, n’ayons pas peur d’appeler les choses par leur nom !

Je voterai donc cet amendement, à la condition, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, que vous appliquiez un traitement uniforme et constructif à l’ensemble des propositions, de quelque groupe qu’elles émanent. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et UDI.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Lamblin.

M. Jacques Lamblin. À la différence de mon prédécesseur, je pense que cet amendement n’est pas acceptable. Son auteur établit une hiérarchie entre l’agriculture raisonnée et l’agriculture biologique alors que nous considérons que ces deux types d’agriculture sont également respectables. Dans son exposé sommaire, il souligne que « l’agriculture biologique doit constituer une priorité explicite de la politique agricole », ce qui veut dire en clair qu’il importe de substituer l’agriculture biologique à l’agriculture raisonnée, qui est la plus couramment pratiquée aujourd’hui.

Accepter cet amendement, c’est vous engager dans une voie qui dénature complètement l’état d’esprit général de votre texte initial, monsieur le ministre. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Sophie Dessus.

Mme Sophie Dessus. J’avais déjà entendu des propos étonnants, et les voilà confirmés. Je suis même stupéfaite de ce que je viens d’entendre.

C’est peut-être la femme de Cro-Magnon qui vous parle ce soir, ou plutôt de Néandertal, puisque je vis au bord de la Corrèze ! Mais figurez-vous que pendant trente ans, sans le savoir, j’ai fait du bio.

M. Jacques Lamblin. Et aujourd’hui, vous faites de la prose !

Mme Sophie Dessus. Je n’avais pourtant pas l’impression de revenir des siècles en arrière et je vous assure que faire de l’élevage bio en Limousin requiert toute une technique, et que c’est tout aussi compliqué que de faire de l’élevage autrement ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Mme Delphine Batho. Très bien !

Mme Sophie Dessus. C’est un métier, c’est une passion pour les professionnels. Nous ramener à l’époque de la chandelle, c’est faire preuve du même obscurantisme que celui que vous reprochez aux verts ou aux écolos.

M. Jean-Frédéric Poisson. Ce n’est pas ce qu’il a dit !

Mme Sophie Dessus. C’est vous au contraire qui donnez l’impression de vivre à la chandelle.

Il faut laisser la liberté à chaque éleveur, à chaque agriculteur de faire une agriculture comme il la sent, parce que c’est la diversité de cette agriculture qui fera sa force !

M. Marc Le Fur. Évidemment !

Mme Sophie Dessus. Et puisqu’il a été question de Monsanto, je souhaite ajouter un mot concernant les semences de ferme. L’amendement que j’ai proposé sur ce point n’a pas été adopté, mais une chose demeure essentielle : il faut laisser les agriculteurs libres chez eux, sur leur propriété, de resemer leurs propres semences de ferme, sinon nous dépendrons demain des grands groupes tels que Monsanto. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et écologiste.)

M. Jacques Lamblin. Vous ne connaissez pas le sujet !

Mme la présidente. La parole est à M. Patrick Hetzel.

M. Patrick Hetzel. Je voudrais en revenir à l’amendement n274, puisque c’est de lui qu’il s’agit. Ainsi que l’ont déjà rappelé nos collègues, tant son exposé sommaire que sa formulation manifestent une volonté de créer une hiérarchie. En réalité, il est question de défendre une forme d’agriculture au détriment d’une autre.

M. Pierre Morel-A-L’Huissier. C’est bien là le problème !

M. Patrick Hetzel. Voilà le véritable problème de fond, contre lequel nous nous insurgeons. Nous ne pensons pas que l’agriculture biologique n’a pas sa place, mais imaginer aujourd’hui qu’elle pourra nourrir la planète et nos concitoyens est une illusion, une utopie ! (Applaudissements sur divers bancs du groupe UMP.) C’est le premier point.

Par ailleurs, je voudrais aborder une question de méthode. Monsieur le rapporteur, à propos de nos amendements de tout à l’heure, notamment celui soutenu brillamment par Marc Le Fur, qu’avez-vous dit ? « Monsieur Le Fur, cet amendement est satisfait, raison pour laquelle je m’y oppose. » Or, que venez-vous de dire en réponse à cet amendement n274 ? « Cet amendement est satisfait, raison pour laquelle j’y suis favorable. » Mais enfin, cela pose un véritable problème !

M. Thierry Benoit. Tout à fait !

M. Patrick Hetzel. Pour la même raison, d’un côté vous êtes contre, et de l’autre vous êtes pour ! Cela démontre que votre choix est idéologique : vous voulez hiérarchiser les différentes formes d’agriculture, ce qui est extrêmement dangereux. Que le ministre de l’agriculture de la majorité s’en remette à la sagesse du Parlement…

M. François Brottes, président de la commission des affaires économiques. Il s’agit du ministre de la France, pas de la majorité !

M. Patrick Hetzel. …démontre que vous voulez en réalité substituer une forme d’agriculture à une autre. Cela revient à leurrer nos concitoyens ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Encore une fois, votre vision est idéologique. Cela rejoint ce qu’a fait M. le ministre Martin il y a quelques semaines en évoquant ceux qui défendraient le lobby des hydrocarbures au sujet de la recherche sur les gaz de schiste : vous êtes dans la négation, dans la volonté de ne pas voir se développer la recherche dans ce pays. En faisant cela, la France va régresser. Nous avons besoin de compétitivité, nous avons besoin d’innovation : tout le contraire de ce que vous êtes en train de faire ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. Philippe Martin, ministre. C’est à M. Jacob qu’il faut dire cela, cela lui fera plaisir !

Mme Sophie Dessus. Il faudra toujours neuf mois pour faire un veau !

Mme la présidente. La parole est à M. Dominique Potier.

M. Dominique Potier. L’agriculture biologique ne mérite pas qu’on la réduise à l’enfer décrit par M. Dhuicq, ni à une agriculture primitive. Plus personne ne croit cela.

M. Nicolas Dhuicq. Ce n’est pas ce que j’ai dit !

M. Dominique Potier. Elle n’est pas non plus l’Éden, ni la solution universelle pour demain.

Le ministre s’en est remis à notre sagesse concernant cet amendement sur lequel nous avons tous hésité, car nous n’en partageons pas tous l’exposé des motifs, mais dont la formulation me paraît pouvoir prendre sa place dans le présent texte. Je vous invite donc, au nom du groupe SRC, à l’envisager de cette façon.

Je suis l’auteur d’un amendement en commission portant sur le bio-contrôle. Il ne vise pas à imposer le seul bio-contrôle, puisque l’agronomie, la rotation ou les systèmes combinés de cultures sont aussi efficaces. Mais nous avons voulu, avec le ministre et le rapporteur, promouvoir cette forme de lutte biologique qu’est le bio-contrôle en l’inscrivant dans l’article 1er.

Mme Laure de La Raudière. Écrire la loi, ce n’est pas faire de la communication !

M. Dominique Potier. Il s’agit d’une orientation politique. Aujourd’hui, puisque l’agroécologie nous rassemble, nous voulons signifier que l’agriculture biologique constitue un laboratoire de l’agroécologie et représente un marché qui concourt à l’équilibre de la balance commerciale, ainsi que vous le souhaitez. Il est bon de le rappeler, car le bio-contrôle ainsi que toute autre forme de valeur ajoutée sont les bienvenus dans ce combat commun pour la valeur ajoutée, l’environnement et l’agroécologie. Alors, pas de caricature ! Nous appelons à nous rassembler sur cet amendement, qu’il ne faut pas diaboliser.

Mme la présidente. La parole est à M. Paul Molac.

M. Paul Molac. Je souhaite rappeler que je respecte les choix de tous les agriculteurs, c’est un premier point. Deuxième point : la conversion est un processus difficile, que nous devons par conséquent aider. Troisième point : puisque vous parlez d’importation, sachez que la France importe des produits bio, c’est un aspect que nous devons prendre en compte. Enfin, je parlerai des OGM avec M. Jacob, mais un autre jour…

Mme la présidente. La parole est à Mme Delphine Batho.

Mme Delphine Batho. Tout d’abord, on ne peut pas laisser passer une assimilation entre l’agriculture biologique et le paludisme. Je pense, chers collègues de l’opposition, que vous êtes mus par une sorte de réflexe pavlovien et que vous menez un combat d’arrière-garde. Cela étant, je vous reconnais le mérite de la continuité puisque c’est le gouvernement de Jean-Pierre Raffarin qui a supprimé les aides à la conversion mises en place par le gouvernement Jospin.

Mais il faut souligner votre incohérence, car vous avez voté la loi sur le Grenelle de l’environnement qui fixait un objectif de 20 % des surfaces en agriculture biologique, objectif que vous n’avez pas atteint et sur lequel la France a un immense retard. C’est dommage, parce que vous restez ainsi à côté de la société, au sein de laquelle l’augmentation structurelle de la demande de consommation de produits bio, de 8 % par an, ne faiblit pas. Malheureusement, aujourd’hui, nous importons un certain nombre de produits bio en provenance de nos voisins européens, notamment d’Italie s’agissant des fruits et légumes. Il est dommage que l’agriculture française ne soit pas en mesure de répondre à cette demande.

M. Patrick Hetzel. Et comment faites-vous pour nourrir la planète avec l’agriculture biologique ?

Mme Delphine Batho. En revanche, il faut lever tout malentendu sur la hiérarchie des objectifs et sur le fait qu’il n’existerait plus qu’un modèle unique. Aussi, je propose à M. Molac de songer à insérer son amendement après l’alinéa 10 plutôt que l’alinéa 7. Il y serait ainsi question de développer la valeur ajoutée dans chacune des filières agricoles afin, notamment, de renforcer la capacité exportatrice de la France, d’encourager la diversité des produits, les démarches de qualité et d’origine, la transformation sur zone ainsi que les circuits courts, et enfin de promouvoir la conversion à une agriculture biologique.

M. Dominique Potier. Excellent !

Mme Delphine Batho. Nous éviterions ainsi les remarques formulées contre un prétendu modèle unique, car tel n’est pas l’esprit de l’amendement.

M. Thierry Benoit. Dans ce cas, retenez plutôt l’amendement de Marc Le Fur !

Mme la présidente. La parole est à M. Martial Saddier.

M. Martial Saddier. Je ne pensais pas intervenir, mais je ne peux pas laisser passer ce qui vient d’être dit. Je voudrais rappeler à la représentation nationale que le ministre de l’agriculture qui a le premier lancé un débat sur le besoin dans notre pays d’un plan quinquennal pour l’agriculture biologique était M. Philippe Vasseur. Il est le premier ministre de l’agriculture à s’être intéressé à l’agriculture biologique.

Au terme de ce plan lancé par M. Philippe Vasseur, le Premier ministre de l’époque, M. Jean-Pierre Raffarin, a demandé au ministre de l’agriculture de l’époque, M. Hervé Gaymard, de nommer un parlementaire en mission pour en dresser le bilan et proposer un nouveau plan quinquennal. Je le dis très modestement, ce parlementaire en mission, c’était moi.

M. Jean-Frédéric Poisson. Excellent !

M. Martial Saddier. Cette proposition de deuxième plan quinquennal pour l’agriculture biologique avait à l’époque fait l’objet d’un consensus national. Je reconnais que M. Le Foll, tout comme d’autres ministres de l’agriculture avant lui, dont M. Bruno Le Maire qui est présent ce soir, a consacré beaucoup d’énergie à l’agriculture biologique. Le troisième plan quinquennal va dans le même sens. Bref, même si chaque ministre et chaque gouvernement ont apporté leur vision de l’agriculture biologique, il n’y a pas eu fondamentalement de grands bouleversements depuis quinze ans dans la ligne directrice adoptée pour l’agriculture biologique. Sans entrer dans le détail de cet amendement, je crois qu’il n’était pas inutile à ce moment du débat de rappeler ces points précis. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. Nicolas Dhuicq. Très bien !

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.

M. Germinal Peiro, rapporteur. Je souhaite répondre sur deux points. Tout d’abord, sur la forme, monsieur Hetzel, vous m’avez mis en accusation en affirmant que j’appliquais deux poids deux mesures. Ce n’est pas vrai.

M. Patrick Hetzel. Si !

M. Germinal Peiro, rapporteur. Non, ce n’est pas vrai ! Je peux le prouver. Reprenez tous les débats en commission et dites-moi, dites à vos collègues de droite si je n’ai pas accepté certains de vos amendements, si je n’ai pas émis d’avis favorable pour certains d’entre eux.

M. Jacques Lamblin. Pas sur ce sujet-là !

M. Patrick Hetzel. Nous parlons de cet amendement-là !

M. Germinal Peiro, rapporteur. Toutefois, je me suis mal exprimé en disant à M. Molac « J’aurais pu vous répondre que votre amendement est satisfait ». Dans l’esprit, c’est vrai, mais dans les faits, aucun des deux alinéas que j’ai cités à M. Molac ne comportent les termes « agriculture biologique ». C’est pour cela que j’ai dit cela. En vérité, l’amendement n’est pas satisfait et aucun objectif de la loi ne comporte les termes « agriculture biologique ». Je me suis mal exprimé, et je vous prie de m’en excuser.

Deuxième point, sur le fond : mes chers collègues, il faut raison garder ! J’ai bien écouté M. Saddier, qui confirme l’intérêt de cet amendement en montrant que des gouvernements de droite ont assuré la promotion de la conversion à l’agriculture biologique. Je serai moi-même malhonnête si je ne reconnaissais pas que, quand Bruno Le Maire était ministre de l’agriculture, la nuciculture périgourdine a été encouragée à opérer sa conversion vers le bio. Je tiens à le dire !

M. Bruno Le Maire. Je vous en remercie !

M. Germinal Peiro, rapporteur. Il faut donc raison garder. Monsieur Jacob, ce n’est pas parce que les objectifs de la loi assurent la promotion de la conversion à l’agriculture biologique que nous créons une exclusive en interdisant toutes les autres formes d’agriculture !

M. Christian Jacob. L’exposé des motifs du projet de loi va pourtant dans ce sens !

M. Germinal Peiro, rapporteur. Enfin, mes chers collègues, il faut répondre à la demande de la société. Aujourd’hui, le bio représente 3 % de la surface agricole en France : ce n’est donc pas le bio qui va menacer le reste !

Pour terminer, monsieur Dhuicq, je rappelle que nous sommes dans la période post-néolithique. Vous savez comme moi que la période néolithique a commencé 9 000 ans avant Jésus-Christ, pour se terminer en - 3 000 avant Jésus-Christ, et qu’elle s’est caractérisée par la conversion de l’humanité à l’agriculture. C’est sans doute ce que vous vouliez dire. Nous sommes largement après Jésus-Christ, dans la période post-néolithique, en plein dans la période de l’agriculture : c’est une activité tout à fait normale des hommes. Faire en sorte que les hommes s’orientent vers des méthodes de culture plus proches de l’environnement me paraît tout simplement relever du bon sens, ce que nos concitoyens ont du reste fort bien compris.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. Stéphane Le Foll, ministre. J’en avais appelé à la sagesse du Parlement. Ce terme convient tout à fait en l’occurrence : lorsque les débats s’emballent quelque peu, il faut revenir à plus de raison !

L’agriculture bio est une réalité. Le Grenelle de l’environnement avait fixé comme seul objectif un seuil de 20 % des surfaces en agriculture bio, ce que j’ai d’ailleurs toujours considéré comme réducteur par rapport à l’enjeu environnemental que constitue l’agriculture : il faut que cela soit plus large. La proposition de Delphine Batho concernant le positionnement de l’amendement, afin de faire figurer la promotion de la conversion vers l’agriculture bio parmi les grands objectifs fixés pour la politique agricole de la France, me semble être une bonne solution, une solution de sagesse.

Mme la présidente. Chers collègues de l’opposition, même si nous sommes en temps législatif programmé, et sachant qu’il y a déjà eu plus de dix interventions sur cet amendement, la moitié émanant du groupe UMP, je propose que vous ne repreniez pas tous la parole. Nous pourrions nous fixer cela comme règle, même si elle n’est pas écrite. En effet, compte tenu du nombre d’amendements, vous en viendriez à manquer de temps ! J’avais déjà évoqué ce point avec M. Lamblin. Aussi, si vous en êtes d’accord monsieur Hetzel, je propose de ne pas vous redonner la parole.

M. Patrick Hetzel. Entendu.

Mme la présidente. Monsieur Molac, que pensez-vous de la suggestion faite par Mme Batho de placer votre amendement après l’alinéa 10 et non après l’alinéa 7 ?

M. Paul Molac. Je suis d’accord.

(L’amendement n274 est adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. André Chassaigne, pour soutenir l’amendement n560.

M. André Chassaigne. Il s’agit des finalités de notre politique agricole. Comme chacun d’entre nous, j’ai lu les différents alinéas et cherché quel sens ils pouvaient receler. L’alinéa 8 a pour objet de « contribuer à la protection de la santé publique, de veiller au bien-être et à la santé des animaux, à la santé des végétaux et à la prévention des zoonoses ». Pour ma part, j’y ai vu, concernant la protection de la santé publique, un lien avec la qualité sanitaire de la production agricole. Il m’a donc semblé qu’il manquait, alors que cet alinéa évoque le bien-être et la santé des animaux et la santé des végétaux, une référence à ceux qui travaillent la terre, d’où l’objet du présent amendement.

En effet, ceux qui travaillent la terre n’apparaissent pas explicitement dans cet alinéa. Nous proposons donc d’insérer les mots « notamment celle des agriculteurs et salariés du secteur agricole ». Cette problématique est assez nouvelle car pendant des années, le lien n’a quasiment jamais été fait entre l’activité d’agriculteur, le travail de la terre et la santé de celui qui travaille la terre. Je me souviens de l’un des vice-présidents de l’Association nationale des retraités agricoles, lors d’une assemblée générale, qui nous avait dit qu’il avait aspergé toute sa vie les sols de pesticides sans jamais se demander quels effets cela pouvait avoir sur sa santé !

Depuis, des avancés ont eu lieu, notamment en 2005 grâce à l’étude épidémiologique AGRICAN – agriculture et cancer – conduite par la MSA. Si les résultats de cette enquête ne sont pas encore complètement connus, ils sont assez révélateurs de conséquences sur la santé. Par ailleurs, en octobre 2012, un rapport a été publié par le Sénat qui dénonce la sous-évaluation des risques sur la santé liés aux pesticides, pointant une certaine omertà dans le monde agricole. Et je pourrais citer d’autres exemples qui montrent qu’il faut faire référence explicitement, à l’alinéa 8, aux travailleurs de la terre comme on le fait à la santé des végétaux et des animaux.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Germinal Peiro, rapporteur. Je crois que nous partageons tous ici les préoccupations de M. Chassaigne. La MSA a effectivement montré que certains agriculteurs souffrent de maladies dues à l’utilisation de produits phytosanitaires dangereux pour la santé humaine.

M. Pierre Morel-A-L’Huissier. C’est vrai !

M. Germinal Peiro, rapporteur. C’est une évidence que personne ne peut nier. Toutefois, je précise que l’alinéa 8 de l’article 1er prévoit que la politique agricole doit contribuer à la protection de la santé publique. Qui dit santé publique de nos concitoyens dit bien évidemment santé publique de nos agriculteurs. J’émets donc un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Le Foll, ministre. Je partage l’avis du rapporteur. On entend par santé publique la santé de tous les publics. Si l’on précisait à l’alinéa 8 « notamment celle des agriculteurs et salariés du secteur agricole », cela voudrait dire que pour les autres, la notion de santé publique n’est pas bien claire…

M. Thierry Benoit. Tout à fait !

M. Stéphane Le Foll, ministre. En conservant le terme générique de santé publique, on fait à coup sûr référence à la santé des agriculteurs et des salariés du secteur agricole. Je suis donc défavorable à cet amendement, même s’il n’y a aucun doute à avoir sur les objectifs à poursuivre.

M. Thierry Benoit. Très bien !

Mme la présidente. La parole est à M. Marc Le Fur.

M. Marc Le Fur. Pour ma part, je suis plutôt favorable à l’amendement de M. Chassaigne. Poser la question de la santé des agriculteurs et des salariés du secteur agricole ne me semble pas déplacé dans un article de cette nature. Mais je souhaite le sous-amender, si M. Chassaigne en est d’accord, en ajoutant, après les mots « secteur agricole », les mots « et agroalimentaire ». En effet, le secteur agroalimentaire est le grand oublié de ce texte. Or chacun sait que les salariés de ce secteur souffrent de troubles du muscle et du squelette provoqués par les gestes répétitifs qu’ils font, et de surcroît dans une ambiance froide, puisqu’ils doivent travailler en permanence à une température de 3 ou 4 degrés.

Nous avons là l’occasion d’évoquer ces catégories de salariés et je suis extrêmement surpris, monsieur le ministre, que vous n’ayez pas saisi l’occasion de ce texte pour engager une action ambitieuse afin de lutter contre les maladies des troubles musculo-squelettiques qui touchent des milliers de nos compatriotes.

M. Stéphane Le Foll, ministre. Cela relève de la santé publique !

M. Marc Le Fur. C’est pire que l’amiante ! On n’en parle pas, parce que les gens n’en meurent pas, mais ces hommes et ces femmes sont cassés ! Leur existence, leurs corps sont cassés, parfois dès l’âge de vingt ou trente ans ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.) Nous avons ici l’occasion de prendre position que cette question.

Mme la présidente. La parole est à M. André Chassaigne.

M. André Chassaigne. J’ai déposé des amendements sur d’autres articles qui abordent la question de la santé des agriculteurs et des maladies professionnelles, notamment dans le secteur agroalimentaire. Comme j’ai obtenu une réponse satisfaisante du rapporteur et du ministre, je retire l’amendement n560.

M. Marc Le Fur. Les salariés du secteur agroalimentaire sont pourtant les grands oubliés de ce texte !

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. Stéphane Le Foll, ministre. Monsieur Le Fur, puis-je vous poser une question ?

Mme Laure de La Raudière. Non, cela prend du temps de parole ! (Sourires.)

M. Stéphane Le Foll, ministre. Dans le cadre de la réforme des retraites, avez-vous voté nos propositions sur la pénibilité ? (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et écologiste.) Si vous l’avez fait, avouez-le, je vous féliciterai !

M. Marc Le Fur. Vous oubliez la loi Fillon !

M. Stéphane Le Foll, ministre. Il ne fait aucun doute qu’il s’agit là de sujets extrêmement importants, mais qui concernent l’ensemble des questions de la santé au travail et de la pénibilité. Il est vrai que les jeunes, et les moins jeunes d’ailleurs, hésitent à se tourner vers le secteur agroalimentaire, en particulier à travailler dans les abattoirs, en raison de la pénibilité. C’est là que notre dispositif prend tout son sens.

(L’amendement n560 est retiré.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Danielle Auroi, pour soutenir l’amendement n275.

Mme Danielle Auroi. Je propose, à l’alinéa 8 de l’article 1er, de substituer aux mots : « veiller au bien-être et à la santé des animaux, » les mots : « garantir le respect du bien-être et de la santé des animaux, de veiller ». Cela nous paraît plus en phase avec la législation européenne qui garantit le bien-être animal, en particulier parce qu’ils sont reconnus comme des êtres sensibles, mais aussi parce que lorsqu’on leur donne beaucoup de médicaments, on finit par les retrouver dans ce qu’on mange.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Germinal Peiro, rapporteur. Je suis persuadé que personne, sur ces bancs, ne veut nuire aux bien-être des animaux. Il est parfaitement normal de veiller à leur bien-être. Toutefois, je ne suis pas favorable à l’idée de remplacer le mot « veiller » par le mot « garantir ». En effet, garantir le bien-être des animaux nous engagerait dans une discussion sur la définition du bien-être. Or vous savez, madame la députée, que le bien-être animal peut prendre des dimensions tout à fait particulières : il y a des gens qui considèrent que le bien-être de leur chien, c’est de vivre dans leur maison, de manger à leur table et de coucher dans leur lit ! Est-ce que garantir le bien-être des animaux peut aller jusque-là ?

M. Jean-Frédéric Poisson. On pourrait peut-être demander aux animaux leur avis !

M. Germinal Peiro, rapporteur. Veiller au bien-être des animaux est déjà un point important.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Le Foll, ministre. Nous discutons là sur les mots.

M. Jean-Frédéric Poisson. C’est souvent le cas ici !

M. Stéphane Le Foll, ministre. Les mots peuvent avoir des sens très spécifiques. Le mot « garantir » signifierait que le bien-être est garanti par rapport à un droit existant, que c’est le droit qui définit le bien-être. Notre objectif est bien de « veiller » à faire respecter le bien-être. Il n’y a pas de règles pour garantir le bien-être en dehors des règles de droit qui, comme l’a dit Mme Auroi, sont définies à l’échelle européenne. Le Gouvernement est donc défavorable à cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Lamblin.

M. Jacques Lamblin. Je pense que cet amendement est valable et que vos explications, monsieur Peiro, ne tiennent pas. Vous dites que l’on ne peut pas garantir quelque chose qui est mal défini : mais on ne peut pas veiller non plus à quelque chose qui est mal défini ! En revanche, « garantir le respect » cela engage. En matière d’élevage, il existe des normes. Garantir le respect de ces normes, c’est la moindre des choses.

M. Stéphane Le Foll, ministre. C’est autre chose !

M. Jacques Lamblin. Je suis donc favorable à cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à Mme Danielle Auroi.

Mme Danielle Auroi. Je crois que nous avons été entendus sur le principe, en particulier sur le respect des règles européennes. Je retire donc cet amendement.

(L’amendement n275 est retiré.)

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l’amendement n1738.

M. Germinal Peiro, rapporteur. Cet amendement rejoint les préoccupations de très nombreux collègues sur ces bancs et un sujet qu’a évoqué M. Le Fur, lors de la discussion générale et cet après-midi. Je vous propose de promouvoir l’information des consommateurs, ce qui va dans le sens de la traçabilité qui doit être l’un des objectifs de la politique agricole et alimentaire.

M. Yannick Favennec. Tout à fait !

M. Germinal Peiro, rapporteur. Lors de l’examen du projet de loi sur la consommation, au moins de juin dernier, j’avais proposé un amendement visant à exiger la traçabilité de la viande dans les plats préparés. Vous savez que le ministre délégué chargé de la consommation s’était engagé alors à organiser un déplacement à Bruxelles, avec une délégation de députés issus de l’ensemble des partis politiques, afin d’y rencontrer le commissaire compétent M. Borg. Celui-ci a encouragé le Parlement français à s’exprimer. Le Sénat et l’Assemblée nationale ont donc voté un amendement demandant une telle traçabilité. Mais l’affaire n’est pas totalement terminée puisque certains pays européens ont intérêt à ce qu’il n’y ait pas de traçabilité. Et pour être tout à fait honnête, monsieur Le Fur, il y a aussi des industriels français qui n’en sont pas de farouches défenseurs, y compris dans votre région, parce qu’ils achètent des produits à l’étranger.

Je considère que la promotion de l’information des consommateurs quant aux lieux de production et de transformation des produits agricoles et agroalimentaires doit figurer dans les objectifs de la loi. C’est pourquoi je vous propose cet amendement, qui a reçu un avis favorable de la commission.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Le Foll, ministre. Le Gouvernement s’en remettra à la sagesse de l’Assemblée nationale sur cet amendement.

Je vous informe que début février sera présenté un objectif de traçabilité, avec une référence aux productions de viandes de France. Un accord a été trouvé entre la grande distribution et l’ensemble des interprofessions concernant la viande porcine, bovine et ovine. Un logo « Viande de France » sera présenté, avec un cahier des charges qui intègre bien-être animal, questions environnementales, et questions sociales dans la production des abattoirs. Cela fera disparaître les logos « viande porcine française » et « viande bovine française », qui ne sont pas très lisibles. Cette lisibilité, cette traçabilité permettront aux consommateurs d’être informés. Promouvoir l’information des consommateurs me paraît être une bonne démarche. Je suis donc favorable à cet amendement.

Mme la présidente. Monsieur le ministre, vous vous en remettez à la sagesse de l’Assemblée nationale ou vous êtes favorable à l’amendement ?

M. Stéphane Le Foll, ministre. Sagesse !

M. Thierry Benoit. C’est une sagesse positive !

Mme la présidente. La parole est à M. Christian Jacob.

M. Christian Jacob. Monsieur le ministre, je suis d’accord avec votre proposition, que je trouve bonne. En revanche, je suis opposé à cet amendement. Quelle est la définition d’un lieu de production ? Par exemple, lorsqu’on fabrique du fromage ou des yaourts, il faudra assurer une traçabilité éleveur par éleveur : lorsqu’on collecte le lait de vingt producteurs par exemple, comment met-on en place cette traçabilité et comment indique-t-on le lieu de production ? C’est la même chose pour la viande : quand on regroupe une centaine de viandes dans un centre d’allotement, on ne peut pas indiquer le lieu de production !

Je pense que l’idée d’indiquer « Viande de France » est bien meilleure. Il faudrait retirer cet amendement et voir si l’annonce qui vient d’être faite par le ministre peut être transcrite dès maintenant ou s’il faut attendre. Mais le lieu de production est impossible à indiquer dans les productions transformées.

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.

M. Germinal Peiro, rapporteur. Je vous remercie, monsieur Jacob d’apporter, peut-être sans le vouloir, de l’eau à mon moulin. Relisez l’amendement : il s’agit de « promouvoir l’information des consommateurs ». Promouvoir, cela veut dire organiser des actions de promotion pour informer le consommateur sur les lieux de production et de transformation. Ce qu’a annoncé le ministre est une déclinaison d’un objectif général.

M. Christian Jacob. Prenez sa définition, alors !

M. Germinal Peiro, rapporteur. Nous examinons les objectifs généraux de la loi. Pourquoi ai-je déposé cet amendement ? Parce que, vous le savez comme moi, monsieur Jacob, des produits agricoles provenant d’autres pays d’Europe, d’Amérique du sud ou de Chine par exemple, arrivent chez nous, dans nos régions, y subissent une transformation et repartent avec le label de la région. C’est vrai en Périgord, c’est vrai en Bretagne, c’est vrai dans toutes les régions de France. Je n’ose même pas vous citer des régions de France, vous en connaissez certainement, où l’on utilise le label régional alors que l’on sait très bien que le produit de base arrive d’autres régions.

Cet amendement est générique : il appelle à organiser la promotion de l’information des consommateurs. Le ministre le décline avec la mesure « Viande de France ». Je rappelle que cet amendement ne concerne pas que les produits de l’élevage, mais l’ensemble des produits agricoles. Aujourd’hui, pour de nombreuses productions, le consommateur ne peut savoir où l’aliment a été produit ni où il a été transformé.

Mme la présidente. La parole est à Mme Laure de La Raudière.

Mme Laure de La Raudière. Je suggère une rectification à l’amendement du rapporteur : on pourrait remplacer « lieu » par « région » ou « pays ».

Mme la présidente. La parole est à M. Christian Jacob.

M. Christian Jacob. Je veux simplement rappeler la difficulté que cet amendement peut soulever. Nous élaborons un texte législatif, qui amènera des déclinaisons. Je préfère cent fois la notion exposée par le ministre à celle de lieu de production. Prenez un groupe comme Champagne Céréales : il collecte sur la France entière ! Comment allez-vous mettre en place la traçabilité par producteur ?

Vous dites que cet amendement fait une déclaration générale, mais non : à partir du moment où il s’agit d’un texte législatif, on peut s’appuyer dessus pour le décliner. La définition du ministre me paraît beaucoup plus sensée et beaucoup moins risquée que la vôtre. Vous avez toute la navette parlementaire pour voir si vous pouvez modifier le texte, mais sachez que la notion de lieu de production telle qu’elle figure ici peut susciter des difficultés énormes.

Mme la présidente. Monsieur le rapporteur, acceptez-vous la rectification de Mme de La Raudière ?

M. Germinal Peiro, rapporteur. Monsieur Jacob, les céréales de Champagne, ce sont les céréales de Champagne !

M. Christian Jacob, M. Bruno Le Maire et M. Antoine Herth. Mais non ! Un groupe comme Champagne Céréales collecte sur la France entière !

M. Germinal Peiro, rapporteur. Nous examinons aujourd’hui les objectifs de la loi, pas leur déclinaison. Ce que nous souhaitons, c’est d’abord que les consommateurs soient informés. Aujourd’hui, ils ne sont pas toujours en capacité de savoir dans quel pays l’aliment a été produit. Car c’est à cela que je pense : le principal n’est pas de savoir s’il provient de Bretagne ou de Champagne, mais surtout s’il a été produit dans un autre pays.

Mme Laure de La Raudière. Alors, écrivez « pays » !

M. Christian Jacob. Ou « État » !

M. Germinal Peiro, rapporteur. « Lieu », c’est plus générique que « pays ». Nous fixons ici les objectifs de la loi, nous n’entrons pas dans les précisions. Laissons les choses se faire et nous arriverons, j’en suis persuadé, à améliorer l’information du consommateur. On ne peut pas légiférer sur l’agriculture et l’alimentaire sans se donner pour objectif d’informer les consommateurs. J’émets un avis défavorable à la rectification de Mme de La Raudière.

M. Christian Jacob. Reprenez la formulation du ministre !

Mme la présidente. La parole est à M. Marc Le Fur.

M. Marc Le Fur. Le problème se pose pour les produits carnés. Il y a deux étapes : celle de la viande fraîche, que vous évoquiez monsieur le ministre, sur laquelle il est relativement aisé de légiférer, et celle des produits transformés. Je suis tout à fait d’accord avec le président Jacob : sans entrer dans un degré de détail excessif, il faut que l’on sache si l’animal qui a servi à la préparation d’un produit transformé est né, a été élevé, a été abattu, a été transformé en France – ou en Allemagne, ou en Pologne, ou au Brésil. C’est cela, le vrai sujet : c’est l’attente des consommateurs et c’est l’attente des producteurs. Il faut donc que nous y arrivions.

J’ai bien entendu votre propos, mais sauf erreur de ma part, il est relatif aux viandes fraîches. Or, comme j’ai essayé de le dire dans la discussion générale, l’enjeu est celui des produits transformés.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. Stéphane Le Foll, ministre. J’ai évoqué les viandes ovines, bovines, porcines, mais aussi la volaille : s’agissant de la volaille, il peut y avoir des produits transformés.

M. Marc Le Fur. Et les plats préparés ?

M. Stéphane Le Foll, ministre. Ah non ! Ce logo ne concerne pas les plats préparés, mais les viandes de France. Et il peut y avoir des volailles entières.

M. Marc Le Fur. Mais le vrai problème, ce sont les plats préparés !

M. Stéphane Le Foll, ministre. C’est tout le débat sur l’étiquetage, sur les origines des plats transformés. C’est un débat à l’échelle européenne. Mais faire la promotion de la transparence sur les origines des viandes me semble un objectif qu’on peut partager.

(L’amendement n1738 est adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Éric Alauzet, pour soutenir l’amendement n277.

M. Éric Alauzet. Il porte sur le même sujet, dans le même esprit. Le débat vient d’avoir lieu. Notre objectif est d’aller un peu plus loin que « promouvoir » : il faut « assurer » la traçabilité et l’étiquetage, en vue de garantir la sécurité sanitaire des aliments. Nous avons vu à travers différents scandales qu’elle était loin d’être toujours assurée.

Il faut mieux informer le consommateur et mieux responsabiliser le producteur. Il s’agit en réalité de renforcer le lien entre l’un et l’autre. Historiquement, quand la production était locale, le lien allait de soi : on connaissait le producteur, qui était à quelques kilomètres. Maintenant que le producteur est à des milliers de kilomètres, la façon d’assurer le lien, c’est d’informer sur le lieu de production et sur les modes d’élevage. S’agissant des œufs par exemple, on précise s’ils sont de plein air, s’ils sont bio… Il peut en être de même pour l’élevage.

Je conçois que c’est difficile. La question doit être posée et nous devons réfléchir à la façon d’avancer sur ces questions, en particulier au sujet des aliments transformés, car c’est là que le diable se cache. Le débat a lieu au niveau européen et il est extrêmement compliqué, je le sais.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Germinal Peiro, rapporteur. L’amendement que nous venons d’adopter est beaucoup plus large. Il fixe un objectif. Ici, nous entrons dans le détail, puisqu’il s’agit non seulement de l’origine, mais aussi des modes d’élevage. À chaque jour suffit sa peine. Il existe une législation européenne et nous avons aussi une gamme de labels et de certifications qui peuvent nous permettre de mieux préciser les modes de production. Compte tenu de l’amendement que nous venons d’adopter, j’émets donc un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Le Foll, ministre. Pour ce qui est de l’information, il existe déjà un cadre réglementaire européen. Les labels, le bio, la production en plein air existent déjà. Je propose de ne pas en reparler dans la loi, cela ne nous aiderait pas à avancer. Je souhaite le retrait de cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. Éric Alauzet.

M. Éric Alauzet. Il est retiré.

(L’amendement n277 est retiré.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Philippe Nilor, pour soutenir l’amendement n771.

M. Jean-Philippe Nilor. Outre la diversification et le développement durable, la présente loi doit mettre au nombre de ses priorités le développement des capacités de production endogènes des territoires, notamment outre-mer, mais pas seulement. En effet, l’approvisionnement en produits frais ou transformés, l’accès aux marchés des différentes productions et à la création d’emploi, pour les exploitations comme pour les acteurs de la production, restent des problématiques majeures. C’est pour garantir la qualité et la traçabilité des produits que la loi doit englober l’ensemble du processus, de la production à la commercialisation, et soutenir réellement la structuration de filières agricoles compétitives et durables pour éviter tout abus ou distorsion.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Germinal Peiro, rapporteur. La commission a estimé que cet amendement était satisfait à l’alinéa 10, qui précise que la politique en faveur de l’agriculture encourage la transformation sur zone, mais également à l’alinéa 27, qui dispose qu’elle a pour objectif de favoriser la satisfaction de la demande alimentaire locale. Je suis confus de dire que la commission a émis un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Le Foll, ministre. Même avis : cet objectif est déjà fixé dans d’autres alinéas.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Philippe Nilor.

M. Jean-Philippe Nilor. Compte tenu de ces explications, je retire mon amendement.

(L’amendement n771 est retiré.)

Mme la présidente. La parole est à M. André Chassaigne, pour soutenir l’amendement n559.

M. André Chassaigne. Il est défendu.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Germinal Peiro, rapporteur. Cet amendement important est satisfait, puisque l’alinéa 23 prévoit de maintenir sur l’ensemble des territoires un nombre d’exploitants agricoles en adéquation avec les enjeux et que l’alinéa 28 précise que la politique menée concourt au maintien de l’activité agricole en montagne, majoritairement constituée d’élevage extensif, en pérennisant les dispositifs de soutien accordés. Vous avez totalement satisfaction, monsieur Chassaigne.

Mme la présidente. La parole est à M. André Chassaigne.

M. André Chassaigne. Je retire l’amendement.

(L’amendement n559 est retiré.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Danielle Auroi, pour soutenir l’amendement n278.

Mme Danielle Auroi. Après l’alinéa 9, il vise à ajouter l’alinéa suivant : « de prendre en compte les situations spécifiques de chaque région. Elle valorise en particulier les services éco-systémiques. »

Pour aller vite, il s’agit tout simplement de prendre en compte ce qu’on appelle les aménités, qui ont déjà été reconnues dans la loi du 25 juin 1999 sur l’orientation, l’aménagement et le développement durable du territoire.

Ces aménités, c’est par exemple l’eau, le bois, les paysages. Cet amendement vise à affirmer clairement que ces services sont reconnus comme essentiels à la vitalité des territoires, à leur agriculture bien sûr, et à leur préservation.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Germinal Peiro, rapporteur. Cet amendement vise à préciser la place des territoires et à fixer pour objectif à la politique agricole de prendre en compte la situation spécifique de chaque région, ce qui me paraît tout à fait naturel dans un pays où les régions sont à la fois si diverses et si différentes. Je dois vous dire que la commission a émis un avis défavorable, mais qu’à titre personnel, je suis favorable à cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Le Foll, ministre. Sagesse.

Mme la présidente. La parole est à M. Julien Aubert.

M. Julien Aubert. La loi doit être intelligible pour tous, or, voilà que je découvre le terme « écosystémique ». Lorsqu’ils liront la loi, nombre de citoyens s’interrogeront sur ce que nous avons voulu dire. Si nous pouvions trouver une formulation qui signifierait exactement la même chose sans jargonner, le texte gagnerait en lisibilité.

Mme la présidente. La parole est à M. Nicolas Dhuicq, pour apporter un peu de lisibilité à cet amendement (Sourires.)

M. Nicolas Dhuicq. Je soutiens mon excellent collègue Julien Aubert.

Il est donc question d’écosystèmes. La microfaune ou votre flore intestinale, fatalement différente et qui a évolué depuis des milliers d’années, en font-elles partie, chaque être humain étant en soi un écosystème ? Ce terme me semble par trop générique.

Je me souviens de Mme Cohen-Tannoudji, que j’ai eu la plaisir d’avoir comme professeur de physique à Paris. Avant chaque devoir, elle nous demandait de rappeler le référentiel défini. En l’occurrence, le terme utilisé est extrêmement vague. Je ne sais pas, par exemple, s’il intègre les micro-territoires.

Ainsi parlons-nous de régions. J’appartiens à une région dans laquelle il n’y a aucun rapport entre les paysages de Champagne, où l’on élève un excellent vin pétillant, et les grandes plaines céréalières. Je comprends donc le terme d’écosystème en écologie scientifique, mais je ne le comprends pas dans la loi. Je ne sais pas ce qu’est un écosystème parce qu’il n’est pas défini. J’en ignore le référentiel, de même que l’échelle prise en considération.

À force d’user de jargonaphasie, on finit par produire une loi dont je gage qu’elle sera incompréhensible pour l’ensemble de nos compatriotes.

Mme la présidente. La parole est à Mme Danielle Auroi.

Mme Danielle Auroi. Je rappelle à mes collègues que la loi du 25 juin 1999 d’orientation pour l’aménagement et le développement durable du territoire dispose que les aménités, parmi les services écosystémiques, s’intègre dans cette logique. J’ai simplement repris les termes juridiques en vigueur.

M. Nicolas Dhuicq. Cela ne veut rien dire !

(L’amendement n278 est adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Germinal Peiro, rapporteur, pour soutenir l’amendement n1173.

M. Germinal Peiro, rapporteur. Cet amendement vise à ajouter les mots « et alimentaires » après les mots « agricoles » à la première phrase de l’alinéa 10.

(L’amendement n1173, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Laure de La Raudière, pour soutenir l’amendement n1001.

Mme Laure de La Raudière. Je n’aime pas, surtout dans le cas d’espèce, l’adverbe « notamment » dans les lois – à l’instar d’ailleurs de M. le président de la commission des affaires économiques.

M. François Brottes, président de la commission des affaires économiques. Excellente référence ! (Sourires.)

Mme Laure de La Raudière. En effet. Je pense que vous soutiendrez donc mon amendement qui vise, afin d’atteindre les objectifs mentionnés au présent article, à rédiger comme suit le dixième alinéa : « De développer la valeur ajoutée dans chacune des filières agricoles et de renforcer la capacité exportatrice de la France ».

M. François Brottes, rapporteur. Très bon amendement !

Mme Laure de La Raudière. Merci, monsieur le président !

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Germinal Peiro, rapporteur. La vérité m’oblige à dire que la commission a émis un avis défavorable à l’adoption de cet amendement, mais sans doute a-t-elle mal perçu son intérêt. (Sourires.) J’émets donc à titre personnel un avis favorable. (« Ah ! » sur les bancs du groupe UMP).

(L’amendement n1001, accepté par le Gouvernement, est adopté et l’amendement no 913 tombe.)

Mme la présidente. La parole est à M. André Chassaigne, pour soutenir l’amendement n558.

M. André Chassaigne. Cet amendement ne tend pas à proposer une simple évolution rédactionnelle pour des raisons rythmiques. Il vise à établir un lien direct entre le renforcement de la capacité exportatrice de la France et l’encouragement à la diversité des produits, au développement des productions sous signes de qualité et d’origine, à la transformation sur zone ainsi qu’aux circuits courts.

Il s’agit d’une autre conception de la capacité exportatrice de la France.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Germinal Peiro, rapporteur. Cet amendement, très honnêtement, introduit une différence tout à fait mineure puisqu’il ne change à peu près rien à la rédaction de l’alinéa 10, sinon de supprimer le point après la première phrase. Cela relevant du strict domaine rédactionnel, on peut émettre un avis favorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Le Foll, ministre. Sagesse sur cet amendement en effet rédactionnel.

(L’amendement n558 est adopté et les amendements nos 1092 rectifié et 1174 du rapporteur tombent.)

Mme la présidente. La parole est à M. André Chassaigne, pour soutenir l’amendement n557.

M. André Chassaigne. Il est défendu.

M. François Brottes, président de la commission des affaires économiques. Désormais, le rapporteur va se méfier ! (Sourires.)

(L’amendement n557, accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 1003 et 1406.

La parole est à Mme Laure de La Raudière, pour soutenir l’amendement n1003.

Mme Laure de La Raudière. Je souhaite à nouveau supprimer un « notamment ».

Les objectifs de la politique en faveur de l’agriculture, de l’alimentation et de la pêche maritime doivent rester des orientations globales. L’utilisation de précisions introduites à la fin de l’alinéa 11, après « notamment », n’a donc pas lieu d’être. Une nouvelle fois, j’espère avoir le soutien du président de la commission à laquelle j’appartiens ! (Sourires.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Annie Genevard, pour soutenir l’amendement n1406.

Mme Annie Genevard. Cet amendement est donc identique au précédent, mais j’ajoute une raison supplémentaire à sa défense en appelant l’attention de l’Assemblée nationale sur la valorisation optimale des sous-produits, objectif pouvant conduire à des excès. Par exemple, en Allemagne, la production de la viande de porc est devenue un sous-produit de la méthanisation, ce qui constitue une évolution préjudiciable. Je propose donc également la suppression de la fin de l’alinéa 11.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Germinal Peiro, rapporteur. Avis défavorable à ces deux amendements, la rédaction actuelle devant être conservée.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Yves Caullet, rapporteur pour avis de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire.

M. Jean-Yves Caullet, rapporteur pour avis de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire. J’ai bien compris l’acharnement dont l’adverbe « notamment » fait l’objet (Sourires). Je propose quant à moi de maintenir les deux éléments de l’alinéa en supprimant l’adverbe superfétatoire en question et de rédiger ainsi l’alinéa 11 : « De concourir à la transition énergétique (…) et de valoriser de manière optimale et durable les sous-produits d’origine agricole dans une perspective d’économie circulaire. »

Mme Annie Genevard. Quid des sous-produits ?

M. Stéphane Le Foll, ministre. On les garde !

Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission des affaires économiques.

M. François Brottes, président de la commission des affaires économiques. À cette heure avancée de la nuit je souhaite – notamment – (Sourires) demander une suspension de séance de cinq minutes afin d’examiner la réécriture éventuelle de cet amendement par le sous-amendement du rapporteur pour avis.

Suspension et reprise de la séance

Mme la présidente. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à vingt-trois heures vingt-cinq, est reprise à vingt-trois heures quarante.)

Mme la présidente. La séance est reprise.

Nous en revenons aux amendements identiques nos 1003 et 1406, sur lesquels le rapporteur a émis un avis défavorable.

La parole est à M. Julien Aubert.

M. Julien Aubert. Certains ont la marotte de l’adverbe « notamment ». Ma marotte à moi, c’est ce que l’on écrit, car la loi d’avenir pour l’agriculture doit être lisible pour l’homme de la rue, notamment pour les agriculteurs. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Or, lorsque je lis à l’alinéa 11que l’une des finalités du texte est « De concourir à la transition énergétique en contribuant au développement des énergies renouvelables et à l’indépendance énergétique de la nation, notamment par une valorisation optimale et durable des sous-produits d’origine agricole dans une perspective d’économie circulaire », j’ai plus l’impression d’un cours jargonneux que de l’exposé d’objectifs politiques. Notre débat, du reste, montre bien qu’il y a un problème de compréhension.

Je propose donc un sous-amendement rédigeant ce paragraphe, afin de l’expliciter, de la façon suivante : « De concourir à la transition énergétique en contribuant, via le recours à la méthanisation, au développement des énergies renouvelables. » C’est la même chose, mais je pense que cette fois mes agriculteurs du Vaucluse comprendront.

Mme la présidente. Monsieur Aubert, fixons-nous pour règle de déposer les amendements sous forme écrite à l’avance, ce qui facilite le déroulement du débat.

La parole est à M. le rapporteur.

M. Germinal Peiro, rapporteur. Nous ne sommes pas favorables à la suppression de la deuxième partie de cet alinéa, relative à la « valorisation optimale et durable des sous-produits d’origine agricole ». Je réitère donc mon avis défavorable sur ces deux amendements.

Mme la présidente. L’avis défavorable de la commission avait bien été enregistré avant la suspension de séance.

Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Le Foll, ministre. Même avis. Défavorable.

(Les amendements identiques nos 1003 et 1406 ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Frédéric Poisson, pour soutenir l’amendement n922.

M. Jean-Frédéric Poisson. Il y a une chasse, dont la saison est ouverte toute l’année dans cet hémicycle, c’est la chasse aux adverbes ! Et si le président de la commission des affaires économiques n’aime pas lire « notamment » dans la loi, la commission des lois non plus. Il ne s’agit en effet, la plupart du temps, que d’une précision superfétatoire : la loi étant universelle par définition, il ne sert à rien de préciser qu’elle s’applique, en particulier, à l’un ou l’autre des domaines de son champ d’application. C’est la raison pour laquelle je propose, à l’alinéa 11, de supprimer purement et simplement cet adverbe, qui ne sert à rien.

Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission des affaires économiques.

M. François Brottes, président de la commission des affaires économiques. Il s’agit là d’un débat fondamental, chacun en convient ! Je suis absolument opposé à l’adverbe « notamment », mais le supprimer ici, cela revient à dire qu’il n’existe aucune autre solution. Or il en est d’autres, en matière de développement de l’énergie. Il faut sûrement travailler à une nouvelle rédaction de cet alinéa d’ici la seconde lecture, mais supprimer purement et simplement l’adverbe « notamment » poserait un problème, puisqu’on donnerait l’exclusivité à une solution, ce qui n’est la volonté ni des uns, ni des autres.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission sur cet amendement ?

M. Germinal Peiro, rapporteur. Avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Le Foll, ministre. Même avis défavorable, car il existe de nombreuses manières d’utiliser les sous-produits d’origine agricole et de produire de l’énergie : le photovoltaïque, l’éolien, et d’autres encore.

(L’amendement n922 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Germinal Peiro, rapporteur, pour soutenir l’amendement n1177.

M. Germinal Peiro, rapporteur. S’agissant toujours des sous-produits d’origine agricole, je propose de préciser qu’ils peuvent être « d’origine agricole et agroalimentaire » puisque nous savons que ces produits sont utilisés, notamment dans la méthanisation.

M. Thierry Benoit. Très bien !

(L’amendement n1177, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. André Chassaigne, pour soutenir l’amendement n556.

M. André Chassaigne. Madame la présidente, je suis tétanisé car la rédaction de l’amendement comprend le mot « notamment » ! Je le considère donc comme défendu.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Germinal Peiro, rapporteur. La commission a estimé que cet amendement était satisfait par les évolutions récentes de l’aide alimentaire au niveau européen. Aujourd’hui, le dispositif est déconnecté de la PAC, mais il existe – notamment – grâce à l’action qu’a menée le Gouvernement français. J’émets donc un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Le Foll, ministre. Je suis d’accord avec ce qui vient – notamment – d’être dit. Ce débat sur le programme européen d’aide aux plus démunis a duré près de trois ans et nous avons fini par obtenir gain de cause sur un sujet que je sais être largement partagé sur ces bancs. Avis défavorable.

Mme la présidente. La parole est à M. André Chassaigne.

M. André Chassaigne. Je retire l’amendement.

(L’amendement n556 est retiré.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Brigitte Allain, pour soutenir l’amendement n276.

Mme Brigitte Allain. Les enjeux alimentaires combinés à la démographie croissante à l’échelle mondiale font de la capacité de la planète à nourrir ses habitants l’un des trois grands défis du siècle en cours, avec les enjeux énergie-climat et du cycle et de la qualité de l’eau.

Actuellement, 826 millions d’individus sont gravement sous-alimentés. Selon les rapports de la FAO, la terre peut nourrir la totalité de sa population, et contrairement à une idée reçue que l’on a pu entendre au sein de cet hémicycle, l’agriculture biologique peut nourrir le monde. Il est possible de s’appuyer sur les témoignages de M. Rahbi ou de l’agronome Marc Dufumier : l’agroécologie et les cultures associées sont, dans l’hémisphère sud, bien plus performantes que n’importe quel OGM ou pesticide.

Le droit des peuples à la souveraineté alimentaire doit être garanti à l’échelle nationale et européenne. Alors que le transport de marchandises, notamment alimentaires, contribue au changement climatique qui dérègle nombre de systèmes agricoles dans le monde et produit plusieurs millions d’émigrés environnementaux et économiques chaque année, la France ne peut définir une politique agricole et alimentaire digne de ce nom sans intégrer parmi ses objectifs celui du droit des peuples à se nourrir eux-mêmes.

Cette politique doit s’inscrire en cohérence avec la politique de développement et de solidarité internationale de la France.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Germinal Peiro, rapporteur. Toutes les politiques alimentaires dans tous les pays du monde doivent concourir à lutter contre la faim dans le monde. Avis favorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Le Foll, ministre. Même chose, il n’y a pas de raison de ne pas être favorable à l’idée de lutter contre la faim dans le monde. Avis favorable.

(L’amendement n276 est adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Germinal Peiro, rapporteur, pour soutenir l’amendement n1094.

M. Germinal Peiro, rapporteur. Il s’agit d’un amendement rédactionnel qui ne change absolument rien sur le fond, mais qui établit une nouvelle rédaction qui rend la disposition en question plus claire et plus lisible. La commission a rendu un avis favorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Le Foll, ministre. Le Gouvernement est favorable à cet amendement rédactionnel.

(L’amendement n1094 est adopté et les amendements nos 279, 1482, 1724, 555, 772, 783, 280, 773, 1725, 1407 tombent.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement n1412 rectifié qui fait l’objet de plusieurs sous-amendements, nos 1743 et 1742.

La parole est à M. le ministre, pour soutenir l’amendement.

M. Stéphane Le Foll, ministre. Un débat est en cours sur l’agroécologie. Il est donc normal que cette loi en précise les objectifs. C’est l’objet de cet amendement. Je souhaite qu’il recueille un large accord puisqu’il propose une définition précisant bien les objectifs de l’agro-écologie et le cadre dans lequel elle s’inscrit.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Germinal Peiro, rapporteur. Avis favorable.

Mme la présidente. La parole est à Mme Michèle Bonneton, pour soutenir le sous-amendement n1743.

Mme Michèle Bonneton. Il s’agit d’un amendement de précision. Il y est expliqué que le mode de production biologique est la forme la plus aboutie de l’agro-écologie. C’est effectivement l’horizon vers lequel doivent tendre les pratiques de l’agro-écologie.

Comme l’a dit M. le rapporteur, l’agriculture biologique est une forme de l’agro-écologie. C’est la seule qui soit reconnue par un label parfaitement défini. Puisque nous avons entendu beaucoup de fantasmes de la part des députés siégeant à droite,…

M. Christian Jacob. Que connaissez-vous de nos fantasmes ?

Mme Michèle Bonneton. …j’ajouterai que l’agriculture biologique demande beaucoup de connaissances, aussi bien de l’agronomie que des écosystèmes, car il existe beaucoup d’écosystèmes différents. Cette agriculture demande également beaucoup de technicité, donc de la recherche et de l’innovation. C’est tout sauf une agriculture du passé.

Je précise que nous sommes tout à fait attachés à la diversité des agricultures en France.

Mme la présidente. La parole est à Mme Brigitte Allain, pour soutenir le sous-amendement n1742.

Mme Brigitte Allain. Cet amendement tend à substituer aux mots « les préservant » les mots « maintenant leur capacité de renouvellement. » Ainsi nous introduisons la notion de durabilité et de régénération des ressources naturelles dans la définition de l’agroécologie.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission sur ces sous-amendements ?

M. Germinal Peiro, rapporteur. On ne peut pas me soupçonner de ne pas défendre la production biologique, mais il me semble excessif de soutenir le sous-amendement n1743 qui tend à préciser que l’agriculture biologique constitue la forme la plus aboutie. J’émets donc un avis défavorable au sous-amendement n1743.

En revanche, sur le sous-amendement n1742 qui prévoit de maintenir les capacités de renouvellement par rapport aux ressources, j’émets un avis favorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Le Foll, ministre. Même avis que le rapporteur. Je précise qu’il ne peut pas y avoir une seule forme aboutie, par définition. Un champ s’ouvre, nous n’allons pas le fermer. Personne ne remet en cause le fait que l’agriculture biologique, qui requiert de l’adaptation et de la technique, sera très demandeuse en termes de connaissances puisque qu’elle repose sur la maîtrise des processus. Elle nécessitera donc un savoir.

Aussi, j’émets, comme le rapporteur, un avis défavorable au sous-amendement n1743 et un avis favorable au sous-amendement n1742.

Mme la présidente. La parole est à M. Antoine Herth.

M. Antoine Herth. Il est important de s’arrêter quelques instants sur l’amendement du Gouvernement, car il est extrêmement instructif.

Tout d’abord, il montre l’extrême volatilité de ce texte. J’ai relu l’alinéa 14 à la suite duquel s’insère cet amendement. Les élèves d’une classe de CM2 à laquelle vous soumettriez ces deux rédactions afin de les résumer vous répondraient que c’est à peu près la même chose. C’est du verbiage, monsieur le ministre !

M. Nicolas Dhuicq et M. Julien Aubert. Très bien !

M. Antoine Herth. Nous sommes en train d’écrire la loi, mais ici, comme dans la chanson, ce ne sont que « paroles et paroles et paroles ».

Sur le fond, cet amendement démontre point par point que ce que je vous ai dit hier était parfaitement vrai. Vous dites qu’il faut améliorer la compétitivité en diminuant la consommation d’énergie. Vous remplacez donc un objectif de résultat, la compétitivité, par un objectif de moyens. Vous êtes en train de changer la nature du métier d’agriculteur ! Au lieu de leur dire : soyez compétitifs, sachez produire du blé, sachez produire du lait, il en va de votre responsabilité car c’est votre métier, vous indiquez aux agriculteurs comment ils doivent faire dans le détail.

Je vous disais que tout ce texte s’est décidé sous des lambris dorés, et qu’il va décrire les faits et gestes quotidiens des agriculteurs, en voilà la preuve.

Vous nous avez dit avec malice que ce n’était pas vous qui surtransposiez les directives européennes, mais dans cet amendement, vous êtes en train de surjouer la réglementation européenne, monsieur le ministre. C’est le deuxième défaut de cet amendement. Sur cette question de diminution, si nous prenons l’exemple des produits phytopharmaceutiques, la réglementation européenne fixe pour objectif de diminuer la dépendance des agriculteurs aux produits phytopharmaceutiques. Elle ne prévoit pas de diminuer la quantité, mais la dépendance à l’égard de ces produits.

Ce qui a été transcrit suite au Grenelle de l’environnement, c’est l’objectif de diminuer « si possible » les quantités. Il n’était pas fixé d’emblée, d’autorité, un objectif aux agriculteurs. Une possibilité d’appréciation est laissée aux agriculteurs sur la façon d’utiliser les produits phytopharmaceutiques, en fonction des conditions climatiques. Nous savons qu’en 2011, l’utilisation de ces produits a été en baisse, et nous nous en réjouissons. En 2012, nous verrons les statistiques, mais je fais le pari que cela sera un peu plus compliqué vu les conditions climatiques. Tout dépend des conditions, et cela ne peut pas se décider dans un ministère, cela se décide dans une cour de ferme.

Le troisième intérêt de votre amendement est qu’en définitive, vous dévoilez vos batteries, monsieur le ministre. Le ministre de l’écologie est parti parce qu’il trouvait que finalement, l’affaire ne venait pas assez vite. Mais nous avons lu dans un excellent journal hebdomadaire paru ce matin que le groupe écologiste serait bientôt en difficulté puisqu’il est réduit à quinze membres. Si jamais l’un d’entre eux venait à faire défection, il faudra trouver des solutions.

M. Paul Molac. Il ne faut pas croire tout ce qui est écrit dans les journaux !

M. Antoine Herth. Depuis le début de cette séance, vous faites les yeux de Chimène et vous prenez des postures de Vert-Galant à l’égard des écologistes, vous les caressez dans le sens du poil pour leur signifier que s’ils ont un problème, ils n’ont qu’à rejoindre le groupe SRC. Voilà le fond de votre pensée. Lorsque l’on écrit une loi avec des arrière-pensées politiciennes, on ne rédige pas une bonne loi en définitive.

Monsieur le ministre, nous avons tout à l’heure voté de concert un amendement aux termes duquel les agriculteurs doivent rester autonomes et indépendants. Vous êtes en train d’écrire l’exact contraire dans la loi.

Je vous disais en commission qu’un concept dans le code rural prévoyait de « gérer en bon père de famille ». Ces six mots, tout le monde les comprend. Chaque paysan de France sait ce que cela veut dire. Vous, vous avez besoin de cent quarante-huit mots pour dire peut-être la même chose, mais à mon avis vous prévoyez en fait des choses très graves qui vont à l’encontre de l’essence même du métier de paysan. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Mme la présidente. La parole est à M. Christian Jacob.

M. Christian Jacob. Cet amendement est très lourd de conséquences, à plusieurs titres.

Tout d’abord, lorsque nous avons parlé d’autonomie de décision des exploitants, tout le monde s’y est retrouvé. Mais dans cet amendement, vous allez vers un autre concept : l’autonomie des exploitations agricoles. Cela veut-il dire l’autarcie pour vous ?

M. Stéphane Le Foll, ministre. Mais non !

M. Christian Jacob. De la même manière, une de nos collègues défendait tout à l’heure les semences de fermes. Mais attention où nous nous engageons sur ce sujet.

Vous connaissez la pratique des agriculteurs qui utilisent des semences de ferme : ils ne le font qu’une année sur deux.

Mme Sophie Dessus. Ils le font depuis la nuit des temps !

M. Christian Jacob. L’exploitation agricole ne peut pas vivre en autarcie : elle a besoin d’innovation, de recherche et d’interventions extérieures, de même que de conseils en développement et en gestion. Elle a besoin de s’enrichir des différentes innovations : le concept d’autonomie des exploitations est donc extrêmement dangereux.

Deuxième point : vous ne dites pas un mot sur la concurrence. Vous parlez de compétitivité, mais vous définissez cette notion uniquement à l’aune de la protection de l’environnement. Or nous évoluons dans un marché ouvert : nos concurrents sont européens, et se situent même au-delà de l’Europe. Vous oubliez totalement la rentabilité économique ! Vous ne définissez la compétitivité que par la diminution des intrants. Cette définition n’est pas la bonne : la compétitivité consiste à se positionner de façon plus favorable face à nos concurrents. Voilà la réalité du marché, à laquelle nos agriculteurs sont confrontés au quotidien !

Troisième élément, extrêmement grave : dans cet amendement, vous reniez toute la notion de développement durable. Ce dernier repose sur un trépied. Il est d’abord fondé sur la rentabilité économique, sans laquelle aucun projet ne peut tenir. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.) Il s’appuie ensuite sur le progrès social, qui doit apporter un plus à ceux qui travaillent ; or vous ne dites pas un mot sur les hommes qui travaillent. Vous n’évoquez que le troisième pilier, le pilier environnemental : on fait passer la protection de l’environnement avant celle des hommes et des femmes qui exercent ce métier, et avant toute notion de concurrence avec les autres pays. (Murmures sur les bancs du groupe SRC. – Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

Il ne sert à rien de parler d’exportations : c’est du baratin ! Votre définition de la compétitivité dans cet amendement est catastrophique pour notre agriculture.

M. Antoine Herth. Tout à fait !

M. Christian Jacob. Si notre balance commerciale présente aujourd’hui un excédent de 10 milliards d’euros en provenance du secteur agricole et agroalimentaire, c’est parce que nous avons une activité de production. Il n’existe pas un modèle d’industrie agroalimentaire au monde qui tienne sans activité de production. Cette dernière est fondée sur la concurrence et sur le progrès social des hommes et des femmes qui travaillent dans ce secteur ; vous reniez ces notions pour vous enfermer uniquement sur un concept environnemental. C’est catastrophique pour le développement de notre agriculture ! Le reste, ce sont des phrases. La manière dont vous définissez la compétitivité dans cet amendement est dangereuse. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et UDI.)

Mme la présidente. La parole est à M. Julien Aubert.

M. Julien Aubert. Le Bourgeois gentilhomme faisait de la prose sans le savoir. De même, j’ai découvert ce qu’étaient selon le Gouvernement les agro-écosystèmes : « ils utilisent les ressources naturelles, en particulier les ressources en eau, la biodiversité, la photosynthèse, les sols et l’air ». J’ai appris des choses ce soir !

En fait, monsieur le ministre, vous décrivez ici la fin du ministère de l’agriculture et l’ébauche d’un futur ministère de l’agroécologie : c’est l’idée qu’il faudrait fusionner une activité de production qui, comme cela a été dit, date de plusieurs milliers d’années, et des impératifs auxquels nous devrions adapter nos modes de vie modernes, notamment le fameux développement durable.

Vous effectuez un certain nombre de mélanges. Vous mélangez la compétitivité et l’efficience lorsque vous dites que l’agriculture ne peut être compétitive qu’à partir du moment où elle diminue sa consommation d’intrants. Vous mélangez la qualité et le bio quand vous considérez qu’une agriculture de qualité est uniquement une agriculture qui s’oriente vers le bio – ce n’est pas ce que vous écrivez dans cet amendement, mais c’est ce que vous avez dit précédemment. Il peut y avoir d’autres agricultures de qualité, en termes de terroir ou de choix des produits, sans pour autant passer par le bio. Il existe plusieurs objectifs d’agriculture de qualité.

Par ailleurs, votre description de l’agroécologie est marquée par une vision très malthusienne, et c’est ce qui m’inquiète. Vous avez une vision très repliée de l’agriculture, très malthusienne et très pessimiste quant à l’avenir. Vous en arrivez à transformer une activité de production en une activité de jardinier qui serait davantage préoccupé par des questions de protection de l’environnement que par son objectif initial, à savoir nourrir les Français et les Françaises.

Pour résumer ce que je vous reproche, votre vision de l’agriculture idéale est marquée par deux grands absents. En premier lieu, vous oubliez la production ; or il faut quand même se concentrer sur l’objectif principal, à savoir que les Français et les Françaises se nourrissent bien et à un prix raisonnable. Mon deuxième reproche rejoint les propos du président Jacob : la notion humaine est totalement absente de votre raisonnement. Vous êtes extrêmement inquiets de ce qui peut arriver aux plantes ; en revanche, l’humain qui vit au milieu de cet écosystème ou de ces « systèmes écosystémiques » – je ne sais plus exactement quel est votre jargon – n’est pris en compte nulle part.

M. Marc Le Fur. C’est vrai !

M. Julien Aubert. Nos points de vue sont donc marqués par une vraie différence de philosophie quant à ce que doit être l’agriculture.

Mme la présidente. La parole est à M. Dominique Potier.

M. Dominique Potier. Pour parler franchement, monsieur Herth, j’ai un peu de mal à vous suivre. Vous évoquez la perversité des objectifs chiffrés. Or notre majorité est arrivée aux responsabilités cinq ans après le Grenelle ; nous avons tiré le bilan du plan Écophyto, pour lequel avait été fixé l’objectif chiffré de moins 50 % en dix ans.

M. Antoine Herth. Si possible !

M. Jean-Yves Caullet, rapporteur pour avis. Notamment ! (Sourires.)

M. Dominique Potier. « Notamment », « si possible » : peu importe ! Vous aviez communiqué partout sur l’objectif de moins 50 %. Quand le ministre de l’agriculture et moi-même, six mois plus tard, sommes arrivés au pilotage de ce dispositif, quand le ministère a fixé de nouveaux caps, nous avons constaté une progression de l’utilisation des produits phytosanitaires de 2 %. Heureusement, l’année 2012 a été meilleure, et le résultat est globalement positif sur les cinq ans, mais il n’est pas à la hauteur des espérances que vous aviez fixées. C’est vous, chers collègues de l’opposition, qui aviez fixé des objectifs !

Dans sa prudence et sa sagesse, le ministre de l’agriculture a proposé de construire une deuxième version de ce plan, et de remodeler le système en l’orientant davantage vers des aspects agronomiques et en encourageant le biocontrôle, que vous aviez vous-mêmes promu dans le cadre d’une mission parlementaire dont nous avons repris les acquis, dans une certaine continuité. Nous avons souhaité rester raisonnables quant aux objectifs, dans la mesure où il fallait d’abord effectuer une nouvelle réforme de la PAC et élaborer une loi d’avenir pour engranger des résultats durables en la matière.

La plus grande prudence, la sagesse paysanne, la sagesse pratique et économique sont donc plutôt du côté du Gouvernement et de la majorité. Cela ne nous empêche pas d’avoir une ambition environnementale, mais nous ne l’avons pas chiffrée, comme vous l’aviez fait avec des résultats in fine assez faibles.

En outre, monsieur Jacob, vous identifiez l’autonomie des exploitations comme un objectif d’autarcie. Ce n’est pas ce qui est écrit dans le texte, qui prévoit que les exploitations dans leur globalité, au niveau d’une région, et même à l’échelle d’une nation comme la France ou de l’Europe, doivent gagner en autonomie.

M. Christian Jacob. Ah non ! Ce n’est pas ce qui est écrit !

M. Dominique Potier. Ce n’est pas le cas aujourd’hui : l’agriculture européenne et l’agriculture française dépendent du pétrole et des importations massives de protéines pour l’alimentation animale – vous le savez !

M. Christian Jacob. Relisez le texte ! Ce n’est pas ce qui est écrit !

M. Dominique Potier. L’autonomie des exploitations repose donc sur un système de fermes françaises qui gagnent en performance. Même le président de la FNSEA – qui n’est pas celui que je cite toutes les cinq minutes – parle d’économies circulaires pour des petites régions agricoles : en effet, des fermes céréalières peuvent bénéficier des effluents de fermes d’élevage, et des fermes d’élevage peuvent profiter de l’autonomie fourragère que peuvent fournir des fermes céréalières en enrichissant leurs rotations. C’est de cette modernité-là dont nous parlons ! N’essayez pas de caricaturer cette définition qui est brillante, sage et prudente.

Ne mettez pas la compétitivité à toutes les sauces. Je vous l’ai dit lors de la discussion sur l’article : la vraie compétitivité est celle du social, de l’environnement et de l’économie. L’agroécologie en trace la voie. Le vrai bilan de la compétitivité de l’économie agricole française passera par cette double performance, que nous cherchons à définir aujourd’hui de façon pragmatique. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Mme la présidente. La parole est à M. Thierry Benoit.

M. Thierry Benoit. Monsieur le ministre, alors que nous progressons dans l’examen de ce texte, nous en sommes arrivés à votre amendement n1412 rectifié qui traduit, en quelque sorte, le risque que nous soulignions hier et en commission : je veux parler de la nébuleuse autour du concept d’agroécologie que vous entendez mettre en œuvre. Au fil des heures, au fil de nos discussions, je perçois un déséquilibre entre la nécessaire économie et la nécessaire écologie.

Depuis maintenant vingt-quatre heures, nous étudions ce texte dans l’hémicycle : après la discussion générale, nous avons abordé l’examen des amendements. Monsieur le ministre, vous allez devoir nous préciser comment vous entendez trouver cet équilibre, afin de soutenir une véritable agriculture de production, et non ce que j’appelais hier, dans la discussion générale, une agriculture occupationnelle, une agriculture ludique (Exclamations sur les bancs du groupe écologiste et sur plusieurs bancs du groupe SRC)

M. Julien Aubert. Très bien !

M. Thierry Benoit. …qui s’appuierait, aux termes de l’exposé sommaire de votre amendement, « sur les mécanismes naturels en les optimisant et en préservant les ressources pour les générations futures ». Au-delà d’une évidence, il s’agit là d’une nébuleuse, d’une notion qui se trouble au fur et à mesure que l’on avance.

De plus, je ne perçois pas le nécessaire lien entre la production agricole et l’aval de la filière, c’est-à-dire l’industrie agroalimentaire,…

M. Marc Le Fur. Elle est complètement oubliée !

M. Thierry Benoit. …alors que ce débat sur la loi d’avenir devrait mettre en lumière le nécessaire lien entre l’agriculture de production et l’industrie agroalimentaire. C’est pourquoi, monsieur le ministre, le groupe UDI vous soutient pour trouver un pendant à votre concept d’agroécologie : l’agro-industrie. Cependant, je formule de réelles réserves et des craintes : vous allez devoir vous expliquer sur vos intentions, monsieur le ministre !

M. Stéphane Le Foll, ministre. Pas de problème !

Mme la présidente. Sur l’amendement n1412 rectifié, je suis saisie par le groupe de l’Union pour un mouvement populaire d’une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.

La parole est à M. le ministre.

M. Stéphane Le Foll, ministre. Quel est l’objectif de cet amendement ? Je ne comprends pas les arguments relatifs à l’économie, à la compétitivité et à l’agroécologie. Dans un processus de production, l’objectif est de produire : pour ce faire, il existe des facteurs de production et des consommations intermédiaires nécessaires à la production. Dans tous les processus de production, en particulier industriels et agricoles, l’objectif est de diminuer les coûts de la production : il est quand même assez incroyable que vous ayez oublié cela, messieurs les députés de l’opposition ! En diminuant les consommations intermédiaires, vous améliorez la compétitivité puisque vous réduisez vos coûts de production.

M. Antoine Herth. Ce n’est pas ce qui est écrit !

M. Stéphane Le Foll, ministre. C’est le b-a ba de l’économie ! Comment avez-vous pu oublier cela ?

M. Christian Jacob et M. Jean-Frédéric Poisson. Ce n’est pas ce qui est écrit !

M. Stéphane Le Foll, ministre. En outre, vous avez fait référence aux mécanismes naturels – cela a fait l’objet d’une plaisanterie de la part d’un député, auquel je suis prêt à donner un certain nombre d’exemples.

Le labour est une pratique ancienne : on a coutume de dire que « labourage et pâturage sont les deux mamelles de la France ». Cette activité était nécessaire lorsqu’il n’existait pas d’autre moyen pour désherber et semer en vue des récoltes. Or, du fait de certaines évolutions, nous avons aujourd’hui moins besoin – voire plus besoin du tout – du labour. Nous nous sommes aperçus qu’il existait dans les sols des mécanismes naturels, que nous avions oubliés : je veux parler des lombrics, ou des vers de terre pour ceux qui préfèrent le langage de la rue.

M. Christian Jacob. Les agriculteurs y ont pensé avant vous !

M. Stéphane Le Foll, ministre. À trois tonnes dans les sols, ils remplacent le labour. Voilà une réflexion simple (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe UMP), qui permet de diminuer la consommation d’énergie fossile et de faire travailler les seuls mécanismes du sol. Quel problème cette pratique vous pose-t-elle ? Un problème idéologique, conceptuel ? C’est tout le débat sur l’agroécologie, qui consiste à utiliser des mécanismes naturels pour économiser l’énergie.

M. Christian Jacob. Vous ne répondez à aucune des questions que nous vous avons posées !

M. Stéphane Le Foll, ministre. Ou bien vous voulez donner au débat un aspect très politicien, ou bien le progrès, la science et l’évolution des connaissances vous font peur. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et écologiste.)

Plusieurs députés du groupe UMP. Avec le lombric ? (Sourires.)

M. Julien Aubert. Et le silex ? (Mêmes mouvements.)

M. Stéphane Le Foll, ministre. Vous devez accepter l’idée que l’on puisse passer d’un modèle à un autre ! Pourquoi a-t-on consommé autant de produits phytosanitaires pendant des années ? Ne peut-on pas imaginer une diminution de la consommation ? Y aurait-il une fatalité selon laquelle on ne pourrait jamais plus se poser la question d’une diminution de la consommation de produits phytosanitaires ? Eh bien non : on peut diminuer la consommation de ces produits ! Je ne dis pas cela parce que j’aurais des connaissances particulières, mais parce que je m’appuie sur des pratiques qui existent sur le terrain, et dont certaines ont été mises en place par mes prédécesseurs – je pense notamment au plan Écophyto initié par Michel Barnier, et au Certiphyto aujourd’hui.

Les résultats obtenus par certaines exploitations prouvent que l’on peut diminuer, selon les cas, la consommation de produits phytosanitaires de 15, 20, 30 voire 50 %. Est-ce que vous êtes contre, messieurs de l’opposition ? Non : au contraire, vous êtes pour ! Ne soyez donc pas effrayés par cette avancée conceptuelle ! (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et écologiste.)

Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Le Ray.

M. Philippe Le Ray. Monsieur le ministre, je me vois obligé de réagir à vos propos. Vous définissez en permanence la compétitivité par l’autarcie. Vous considérez que l’agriculteur doit carrément s’isoler – c’est quand même ce qui ressort de votre amendement – s’il veut que son revenu augmente. Je crois que c’est une grosse bêtise, car il n’y a rien, ni dans le texte ni dans l’exposé des motifs, sur le volume, sur les objectifs de production. Or, je vous l’ai dit, la production française recule.

Prenez l’exemple de la Bretagne. Que s’y est-il passé depuis des années ?

M. Stéphane Le Foll, ministre. Depuis dix ans !

M. Philippe Le Ray. Si des secteurs continuent de produire, d’autres sont en train de reculer. Pourquoi ? Tout simplement du fait de contraintes environnementales et de lenteurs administratives.

M. Marc Le Fur. Exactement !

M. Philippe Le Ray. Pourtant, ces agriculteurs-là ne vous ont pas attendu, ils font des économies d’énergie, des économies de phytosanitaires, des économies de tout.

Il ne faut d’ailleurs pas isoler ce texte du reste. Avec la mise en place du bail environnemental et celle des GIEE, vous êtes bien en train d’enfermer notre agriculture. Vous définissez bien une agriculture autarcique, tout simplement.

M. Stéphane Le Foll, ministre. Il n’y a pas de fermeture ! Tout est ouvert !

M. Philippe Le Ray. Mais non ! Et il n’y a pas d’objectif de production !

Mme la présidente. Monsieur Jacob, je vous redonne la parole exceptionnellement.

M. Antoine Herth. Il reste encore un peu de temps d’ici au scrutin que vous avez annoncé, madame la présidente.

Mme la présidente. Les cinq minutes réglementaires sont écoulées, monsieur Jacob.

M. Antoine Herth. Je répondrai rapidement au ministre s’agissant notamment de la question de l’objectif de production qu’évoquait à l’instant notre collègue.

La rentabilité, monsieur le ministre, c’est à la fois une baisse des charges et une augmentation des volumes – de la production.

M. Stéphane Le Foll, ministre. On est d’accord !

M. Antoine Herth. Comment parvenir à cette augmentation ? De deux manières : soit par l’intensification, soit par l’extensification, c’est-à-dire grâce à plus de terres mises en production. Or on n’aura pas en France plus de surfaces mises en production. Il faut donc plus d’intensification, ce qui ne veut pas nécessairement dire, d’ailleurs, plus d’intrants. C’est la raison pour laquelle j’ouvrais tout à l’heure le débat sur les OGM : par la recherche variétale, on peut développer beaucoup plus fortement nos capacités de production. Intensifier, c’est produire davantage, et on peut le faire avec moins d’intrants.

Ce que l’on vous reproche à propos de ce texte, c’est que vous définissiez la compétitivité uniquement à l’aune de la réduction des intrants et de la protection de l’environnement, sans prendre en compte les facteurs extérieurs tels que la recherche et les techniques. Bien évidemment, vous avez évoqué les techniques de production, mais ce n’est pas parce que c’est écrit dans la loi qu’on fait du semis direct, c’est parce que les agriculteurs y ont trouvé un intérêt !

M. Marc Le Fur. Bien sûr !

M. Antoine Herth. Vous ne prenez pas en compte l’augmentation de la production, la rentabilité économique de l’entreprise. Tout cela est balayé d’un trait et l’on se focalise uniquement sur le seul facteur environnemental. C’est pour cela que cette rédaction nous paraît dangereuse.

Je demande la parole, madame la présidente.

Mme la présidente. Vous l’avez déjà eue, monsieur Herth.

La parole est à M. Marc Le Fur.

M. Marc Le Fur. Madame la présidente, nous sommes là pour débattre !

Moi, ce qui m’inquiète, monsieur le ministre, c’est que vous êtes en train de justifier une réduction des intrants. Pourquoi pas ? Mais quand un ministre d’un gouvernement qui s’est fait une spécialité de la pression fiscale (Exclamations sur les bancs du groupe SRC) met cela en avant, je m’inquiète. Pourquoi ? Je me demande si vous n’êtes pas en train de justifier la disparition d’un certain nombre de spécificités fiscales en matière agricole. Vous savez que des dispositifs fiscaux plus favorables aux agriculteurs existent en ce qui concerne le fioul agricole – le rouge, comme on dit. Ces dispositifs sont essentiels à l’activité de notre agriculture.

Mon problème, c’est qu’un certain nombre de nos collègues sont en train de pousser l’idée de faire disparaître ces avantages spécifiques aux agriculteurs. Je voudrais donc, à ce stade de la discussion, que vous nous répondiez, c’est très important : oui ou non, gardera-t-on les avantages dont bénéficie le fioul agricole ? Au travers de dispositions littéraires comme celles qui sont l’objet de l’amendement que nous examinons, vous êtes en train de justifier leur disparition. Par pitié, si j’ose dire, rassurez le monde agricole !

M. Antoine Herth. Je demande la parole, madame la présidente.

Mme la présidente. Non, monsieur Herth.

Tout à l’heure, je vous ai proposé une petite méthode pour essayer de vous laisser du temps pour défendre tous les amendements jusqu’à la fin du texte. L’idée était que chacun prenait la parole aussi longtemps qu’il le souhaitait, et qu’il ne la reprenait pas.

M. Marc Le Fur. Ce n’est pas dans le règlement !

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. Stéphane Le Foll, ministre. Monsieur Jacob, il n’y a pas, dans cette définition, de carcan, il n’y a pas d’autarcie.

Prenons un autre exemple, celui de la production laitière. Aujourd’hui, il y a des systèmes de couverture de sols avec ce qu’on appelle des mélanges de méteil, qui confèrent une autonomie aux exploitations et leur évitent d’acheter du soja. Celui-ci est aujourd’hui très cher, d’autant que la Chine en consomme énormément.

Par ailleurs, vous avez défendu, avec moi et d’autres, au Parlement européen, l’autonomie fourragère, et, aujourd’hui, vous envisagez l’autonomie comme un problème. C’est, au contraire, une partie de la solution ! Et cela n’empêche pas d’atteindre – ce sont les exemples que j’ai en tête et je vous les transmettrai – une production laitière de 9 000 ou 10 000 litres par vache, avec une autonomie à 95 % de l’exploitation.

Jamais il n’a été dit que l’on allait baisser la production ! Bien sûr, on peut jouer à la fois sur le coût et sur le niveau de la production, mais jamais il n’a été dit que la réduction des consommations intermédiaires allait de pair avec un objectif de baisse de la production.

J’ai bien entendu M. Le Fur, et j’ai bien compris le raisonnement qui pourrait être tenu, mais c’est précisément parce qu’on a un projet d’agroécologie qui crée de la dynamique et combine économie et environnement que je ne suis pas favorable à des systèmes de taxe ; je l’ai dit lors de la conférence environnementale au ministre de l’écologie, s’agissant notamment des produits phytosanitaires ou l’azote. Je sais effectivement que l’efficacité tient à la nature du système, non à la fiscalité.

M. Marc Le Fur. Ma question portait sur le fioul !

M. Stéphane Le Foll, ministre. En ce qui concerne le fioul, nous avons pris en loi de finances des dispositions qui visent à garantir à l’agriculture les avantages qui sont les siens. N’imaginez pas que nous allons maintenant renchérir le coût de l’énergie ! Si je peux vous rassurer, monsieur Le Fur, pour une fois, ce sera fait.

M. Antoine Herth. Je demande la parole pour un rappel au règlement !

Mme la présidente. La parole est à M. Antoine Herth, pour un rappel au règlement.

M. Antoine Herth. Madame la présidente, je demande, sur la base de l’article 58-1 du règlement, une suspension de séance de cinq minutes, pour que les groupes puissent se réunir.

Mme la présidente. Il s’agit donc plus d’une demande de suspension de séance que d’un rappel au règlement, monsieur Herth.

La suspension est de droit.

Suspension et reprise de la séance

Mme la présidente. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue le jeudi 9 janvier 2014 à zéro heure vingt-deux, est reprise à zéro heure vingt-quatre.)

Mme la présidente. La séance est reprise.

(Le sous-amendement n1743 n’est pas adopté.)

(Le sous-amendement n1742 est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n1412 rectifié, tel qu’il a été sous-amendé.

(Il est procédé au scrutin.)

Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants105
Nombre de suffrages exprimés105
Majorité absolue53
Pour l’adoption76
contre29

(L’amendement n1412 rectifié, sous-amendé, est adopté.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Brigitte Allain, pour soutenir l’amendement n281 rectifié.

Mme Brigitte Allain. Je le retire.

(L’amendement n281 rectifié est retiré.)

Mme la présidente. La parole est à M. Martial Saddier, pour soutenir l’amendement n931.

M. Martial Saddier. Il est défendu.

(L’amendement n931, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 2 et 124.

La parole est à M. Marc Le Fur, pour soutenir l’amendement n2.

M. Marc Le Fur. Il est défendu.

Mme la présidente. La parole est à M. Guillaume Chevrollier, pour soutenir l’amendement n124.

M. Guillaume Chevrollier. Il est défendu.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Germinal Peiro, rapporteur. Ces deux amendements sont satisfaits par l’alinéa 17. Avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Le Foll, ministre. Défavorable.

(Les amendements identiques nos 2 et 124 ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. La parole est à M. Bruno Nestor Azerot, pour soutenir l’amendement n774.

M. Bruno Nestor Azerot. Dans les outre-mer, l’ODEADOM, l’Office de développement de l´économie agricole des départements d’outre-mer, à l’instar de FranceAgriMer, a un rôle essentiel d’équilibre et d’organisation des filières mais, surtout, contribue efficacement à la modernisation des agricultures. Il est important qu’il demeure un pont entre le niveau national et le niveau local pour garder aux politiques mises en œuvre la cohérence nécessaire.

(L’amendement n774, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. André Chassaigne, pour soutenir l’amendement n554.

M. André Chassaigne. Cet amendement vise à pallier une terrible carence – je dis bien : une terrible carence. Effectivement, l’alinéa 17 porte sur les actions à conduire « dans les domaines de l’éducation et de l’information pour promouvoir l’équilibre et la diversité alimentaires ainsi que la qualité nutritionnelle de l’offre alimentaire », oubliant ainsi dans la législation – d’un pays dont la gastronomie a été inscrite au patrimoine immatériel de l’humanité par l’UNESCO – ce qui est absolument essentiel : le goût ! Il ne s’agit pas seulement du plaisir qu’il donne, de toutes ces sensations qui vont partir du nez, de la bouche, voire du contact, pour aller jusqu’au cerveau. Le goût, c’est aussi un gage de qualité du produit.

Parler du développement de l’agriculture française, notamment en termes d’exportations, en considérant que l’acheteur s’appuiera uniquement sur la qualité nutritionnelle du produit, c’est passer à côté de bien des choses. Est-ce neutre que de compter quarante-six fromages AOC ? Ne doit-on pas plutôt valoriser des fromages prestigieux, comme le Cantal, le Saint-Nectaire et, bien entendu, la Fourme d’Ambert ? (Sourires.)

M. Christian Jacob. Et que dire du Brie !

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Germinal Peiro, rapporteur. Cet amendement est apparu de bon goût à la commission, qui a émis un avis favorable. (Sourires.)

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Le Foll, ministre. Même avis.

Mme la présidente. La parole est à M. Nicolas Dhuicq.

M. François Brottes, président de la commission des affaires économiques. Restons dans le bon goût…

M. Nicolas Dhuicq. Chacun connaît l’introduction du Larousse gastronomique d’Escoffier, qui propose une excellente recette de purée de pommes de terre... Plus sérieusement, ne serait-il pas plus sage d’employer le terme d’ « organoleptique » ? (Sourires.)

Mme la présidente. La parole est à M. André Chassaigne.

M. André Chassaigne. Tout à l’heure, un intervenant parlait du Bourgeois gentilhomme. Pour ma part, je ne parlerai pas des Femmes savantes, mais des « Hommes savants » !

(L’amendement n554 est adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement n553, qui fait l’objet d’un sous-amendement n1733.

La parole est à M. André Chassaigne, pour soutenir l’amendement.

M. André Chassaigne. Cet amendement rédactionnel fait référence aux produits sous signes de qualité et d’origine – SIQO.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre, pour soutenir le sous-amendement n1733.

M. Stéphane Le Foll, ministre. Ce sous-amendement précise la rédaction en se référant à la dénomination « signes d’identification de la qualité et de l’origine. »

Mme Laure de La Raudière. Drôle de forme pour un sous-amendement !

M. Christian Jacob. Il s’agit en effet d’un amendement à part entière.

M. François Brottes, président de la commission des affaires économiques. Les alinéas auxquels il fait référence sont ceux de l’amendement n553, non du texte. Faites-nous confiance.

Mme la présidente. Effectivement, l’alinéa 1 auquel il est fait référence est celui de l’amendement de M. Chassaigne.

M. Christian Jacob. Nous vous faisons confiance, madame la présidente.

Mme la présidente. C’est ce que je souhaitais entendre ! (Sourires.)

Quel est l’avis de la commission sur l’amendement et le sous-amendement ?



M. Germinal Peiro, rapporteur. Avis favorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement sur l’amendement ?

M. Stéphane Le Foll, ministre. Avis favorable.

(Le sous-amendement n1733 est adopté.)

(L’amendement n553, sous-amendé, est adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement n835, qui fait l’objet d’un sous-amendement n1732.

La parole est à Mme Brigitte Allain, pour soutenir l’amendement.

Mme Brigitte Allain. Cet amendement est particulièrement emblématique pour les écologistes, qui, lorsqu’ils siègent dans les conseils régionaux ou dans les collectivités, sont souvent impliqués dans les questions d’agriculture et d’alimentation.

Répondant aux attentes du terrain, il propose un nouvel outil pour relocaliser la production et la consommation : le contrat alimentaire territorial. Les citoyens consommateurs ont des attentes fortes en matière alimentaire ; ils souhaitent une alimentation de qualité qui valorise les productions de terroirs, dans la mesure du possible dans une relation de proximité avec les zones de production et les agriculteurs. Par ailleurs, les enjeux énergétiques, climatiques, environnementaux, et sanitaires sont importants en matière d’agriculture et d’alimentation.

Avec la création de projets alimentaires territoriaux, il est proposé de fournir un cadre à une démarche partenariale entre l’État, les collectivités territoriales, les citoyens consommateurs et les acteurs économiques et sanitaires, afin de répondre aux attentes des acteurs des territoires, dans une logique de valorisation des productions des territoires, de relocalisation, et de création de lien social autour de l’alimentation.

Aujourd’hui, ils doivent trouver un cadre juridique à chaque projet qu’ils souhaitent porter collectivement. La logique de contractualisation autour de systèmes alimentaires territoriaux répond à la fois aux attentes des consommateurs, des acteurs publics, des forces économiques et aux enjeux environnementaux. Nous comptons sur notre assemblée pour soutenir ce projet, qui pourrait être comparé à un GIEE alimentaire.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre, pour soutenir le sous-amendement n1732.

M. Stéphane Le Foll, ministre. On ne peut exclure les distributeurs de tels projets. Il convient donc de les ajouter à la liste des partenaires.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission sur l’amendement et le sous-amendement ?

M. Germinal Peiro, rapporteur. Cet amendement répond à un besoin qui s’exprime dans nombre de nos territoires. Les circuits courts, de proximité, se développent et l’on voit autour de ces projets s’agréger des acteurs qui vont de la production aux collectivités locales, en passant, comme l’a dit M. le ministre, par les distributeurs.

C’est ce que nous faisons déjà en Dordogne, un exemple que connaît bien Mme Allain. Nous avons créé une SCIC, « Mangeons 24 », qui encourage la mise en relation des producteurs et des consommateurs. Nous avons démarré avec la restauration scolaire, pour déboucher sur la création de dix-sept magasins de producteurs de pays et d’une trentaine de marchés de producteurs de pays, structures contrôlées par la chambre d’agriculture.

Cet amendement vise à préciser dans la loi ce qui existe et répond aux attentes de nos concitoyens. Avis favorable sur l’amendement et sur le sous-amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement sur l’amendement ?

M. Stéphane Le Foll, ministre. Avis favorable.

Mme la présidente. La parole est à M. Dominique Potier.

M. Dominique Potier. Cette proposition vient enrichir le texte et renforce les perspectives de développement territorial. Fernand Braudel disait que les économies les plus solides sont celles qui ont un pied dans l’économie-monde et l’autre dans un système local dense. Cette disposition vient formaliser des dynamiques qui existent déjà. Merci pour cette contribution.

(Le sous-amendement n1732 est adopté.)

(L’amendement n835, sous-amendé, est adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de six amendements identiques, nos 179, 481, 644, 926, 1531 rectifié et 1580.

La parole est à M. Dino Cinieri, pour soutenir l’amendement n179.

M. Dino Cinieri. Depuis la mise en place du programme national de l’alimentation – PNA – en 2010, le Conseil national de l’alimentation – CNA – est directement associé à son élaboration et au suivi de sa mise en œuvre, ce qui permet un débat fructueux et favorise l’implication de l’ensemble des parties prenantes.

Malheureusement, le texte proposé prévoit de réduire le rôle du CNA à la seule organisation de débats publics sur l’élaboration et la mise en œuvre de ce programme. Le rôle du CNA dans l’élaboration et le suivi de la mise en œuvre du PNA doit être réaffirmé sans ambiguïté dans cette loi d’avenir.

Par ailleurs, il est indispensable que les débats soient organisés de la façon la plus cohérente possible entre l’échelon national et l’échelon régional. En conséquence, et compte tenu de l’expertise approfondie et reconnue du CNA sur le PNA, la loi devrait préciser que les débats en région seront organisés en collaboration entre le conseil économique, social et environnemental régional et le CNA, en cohérence avec les avis déjà rendus en la matière.

Mme la présidente. La parole est à M. Martial Saddier, pour soutenir l’amendement n481.

M. Martial Saddier. Il est défendu.

Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Le Ray, pour soutenir l’amendement n644.

M. Philippe Le Ray. Défendu.

Mme la présidente. La parole est à M. Alain Marleix, pour soutenir l’amendement n926.

M. Alain Marleix. Également défendu.

Mme la présidente. La parole est à M. Alain Leboeuf, pour soutenir l’amendement n1531 rectifié.

M. Alain Leboeuf. Le CNA organisait jusqu’à ce jour des concertations entre tous les acteurs de la chaîne alimentaire. Alors que vous ne cessez de prôner la concertation, pour construire utilement ensemble, vous imaginez que ce conseil, qui pourtant a fait ses preuves, ne soit plus associé à l’élaboration et à la mise en œuvre du PNA et soit cantonné au seul rôle d’animateur de débats publics. Il est indispensable de modifier l’alinéa 19, en rappelant le rôle primordial du CNA dans l’élaboration et le suivi du PNA.

Mme la présidente. La parole est à M. Thierry Benoit, pour soutenir l’amendement n1580.

M. Thierry Benoit. Ce texte est l’occasion de proclamer et de réaffirmer le rôle du CNA. Pourquoi le restreindre ainsi ? En commission, comme hier lors de la discussion générale, nous avons évoqué la nécessité de connecter l’agriculture et l’alimentation. Ces amendements ne vont pas à l’encontre des objectifs de ce projet de loi d’avenir.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Germinal Peiro, rapporteur. La commission a considéré qu’il était absolument évident que le conseil national de l’alimentation participe à l’élaboration du programme national pour l’alimentation. Comment pourrait-il en être autrement ? Cette participation apparaissait si naturelle que la commission n’a pas jugé utile de la préciser. C’est là en effet une partie de son rôle. Avis défavorable.

(Les amendements identiques nos 179, 481, 644, 926, 1531 rectifié, 1580, repoussés par le Gouvernement, ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. La parole est à M. Bruno Nestor Azerot, pour soutenir l’amendement n775.

M. Bruno Nestor Azerot. Il est défendu.

(L’amendement n775, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Le Ray, pour soutenir l’amendement n1076.

M. Philippe Le Ray. Cet amendement vise à substituer à l’alinéa 21 deux autres alinéas pour définir autrement les installations progressives. Sur le principe, nous sommes opposés aux installations progressives mais nous souhaitons qu’elles ne soient pas aléatoires. Aussi proposons-nous d’en renforcer le cadre – familial ou au titre de sociétés.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Germinal Peiro, rapporteur. La première partie de cet amendement est rédactionnelle puisque le premier alinéa reprend, mot pour mot, les termes de l’alinéa 21. Quant au second, sa rédaction, quasiment la même que celle du projet de loi, n’apporte pas de modification significative. Avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Le Foll, ministre. Même avis, mais je voudrais préciser que toutes ces mesures relatives à l’installation ne relèvent pas uniquement d’une décision du Gouvernement ou d’une commission. Elles sont le fruit d’un travail réalisé au cours d’assises sur l’installation, conduit et mené avec les jeunes agriculteurs ainsi qu’un certain nombre d’organisations de jeunesse qui veulent, non pas favoriser les installations aléatoires, mais en élargir le plus possible le cadre pour assurer le renouvellement des générations d’agriculteurs. Avis défavorable.

(L’amendement n1076 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Gilles Lurton, pour soutenir l’amendement n1212.

M. Gilles Lurton. Cet amendement vise à modifier quelque peu la rédaction de l’alinéa 22 pour donner une image plus positive de l’agriculture. À l’heure où nous connaissons de nombreuses pertes d’emplois en agriculture et dans l’agro-alimentaire, il est important d’affirmer qu’un objectif majeur de la politique agricole doit encore être de promouvoir une agriculture productive, cela à divers titres : maintien et développement du potentiel de production, conservation et développement des emplois, contribution à la balance du commerce extérieur, place de la France dans l’Europe et dans le monde. Il importe de ne pas sacrifier la productivité à la multiplicité des systèmes de production.

C’est pourquoi je propose d’ajouter, à la fin de l’alinéa 22, après le terme « promouvoir », les mots : « une agriculture productive », la suite restant inchangée jusqu’à « performance économique et environnementale ».

M. Thierry Benoit. Très bien.

M. Gilles Lurton. Par ailleurs, il est surabondant de mentionner en particulier les systèmes relevant de l’agroécologie, dès lors que la politique d’installation et de transmission en agriculture tend déjà à promouvoir la diversité des systèmes de production, et en particulier ceux permettant d’associer performance économique et environnementale. Je vous propose par conséquent de finir l’alinéa 22 sur le terme « environnementale » et de supprimer la partie « notamment ceux relevant de l’agroécologie ».

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Germinal Peiro, rapporteur. Cet amendement est satisfait et l’ajout, en particulier, de la notion d’agriculture productive, peut se retrouver à l’alinéa 5, c’est-à-dire dans la définition principale de l’agriculture qui est de produire pour assurer l’alimentation de la population. Avis défavorable.

(L’amendement n1212, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. André Chassaigne, pour soutenir l’amendement n552 rectifié.

M. André Chassaigne. Il est défendu.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Germinal Peiro, rapporteur. Avis favorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Le Foll, ministre. Sagesse.

(L’amendement n552 rectifié est adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Germinal Peiro, rapporteur, pour soutenir l’amendement n1095.

M. Germinal Peiro, rapporteur. Cet amendement vise à ajouter la performance sanitaire à la performance sociale dans les objectifs de la politique d’installation. La commission a émis un avis favorable.

(L’amendement n1095, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Germinal Peiro, rapporteur, pour soutenir l’amendement n1097.

M. Germinal Peiro, rapporteur. Rédactionnel.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Le Foll, ministre. Favorable.

Mme la présidente. La parole est à M. Christian Jacob.

M. Christian Jacob. J’évoquais tout à l’heure une rédaction qui me semblait dangereuse. Il en va de même ici. Quel est le titre de l’article 1er ? « Objectifs de la politique en faveur de l’agriculture ». Parmi les objectifs définis figure celui de « maintenir sur l’ensemble du territoire un nombre d’exploitants agricoles en adéquation avec les enjeux qu’ils recouvrent en matière d’accessibilité, d’entretien des paysages, de biodiversité ou de gestion foncière ». Où est la vocation alimentaire ? La production ? L’alimentation humaine ? L’alimentation animale ? Pas un mot !

Vous définissez les missions et le nombre d’exploitations agricoles uniquement au regard de l’accessibilité au territoire, de l’entretien des paysages, de la biodiversité ou de la gestion foncière. Est-ce cela, votre définition de l’agriculture ?

M. François Brottes, président de la commission des affaires économiques. Mais non, il faut lire tout l’article !

M. Christian Jacob. Je lis l’alinéa. Chaque alinéa précise une disposition. Celui-ci porte sur le nombre d’exploitations. Si vous voulez un nombre d’exploitations en rapport avec ces objectifs, vous n’en avez pas besoin de beaucoup puisqu’il vous suffirait d’un tracteur et d’un girobroyeur !

Mme Laure de La Raudière. Il a raison !

M. Christian Jacob. Vous n’avez pas besoin d’élevage ni d’aucune production ! Un agriculteur, un tracteur et un girobroyeur vous suffiront à couvrir des centaines et des milliers d’hectares ! Et vous répondriez aux objectifs que vous vous êtes fixés car, à coups de girobroyeurs, on parvient à remplir ceux d’accessibilité, de biodiversité, d’entretien des paysages et de gestion foncière ! Aucune activité économique, aucun projet d’installation, aucun élevage ne seraient nécessaires ! C’est cela la définition que vous donnez du maintien du nombre d’agriculteurs ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.

M. Germinal Peiro, rapporteur. Vous mettez le doigt sur un alinéa, monsieur Jacob, en faisant mine d’oublier tout ce qui a été dit avant.

M. Christian Jacob. Pas du tout.

M. Germinal Peiro, rapporteur. Vous essayez de faire croire que la politique agricole prônée par le ministre et le Gouvernement se résume à l’entretien des paysages.

M. Christian Jacob. C’est ce qui est écrit.

M. Germinal Peiro, rapporteur. Reprenez le texte depuis le début. Nous en sommes à l’alinéa 23 mais sans doute avez-vous lu les précédents qui traitent de la production ou visent à assurer de la nourriture à la population dans des conditions économiquement respectables, à répondre à l’accroissement démographique, à soutenir et développer l’emploi des agriculteurs, à renforcer la compétitivité et l’innovation dans les filières de production, et j’en passe.

Cela étant, si vous pointez cet alinéa, c’est qu’il aurait sans doute mérité d’être rédigé autrement.

M. Christian Jacob. Sans doute !

M. Germinal Peiro, rapporteur. Je vous le concède, mais, sur le fond, vous exploitez une faiblesse alors que le Gouvernement prône une politique qui vise à corriger celles que vous avez soutenues durant des décennies et qui ont conduit à la baisse de 26 % du nombre des exploitations agricoles entre 2002 et 2012. Ce sont les chiffres officiels. C’est contre cette tendance que nous voulons lutter, monsieur Jacob. Nous nous battons pour maintenir le plus grand nombre d’exploitations sur l’ensemble du territoire, pas uniquement pour entretenir les paysages, mais pour assumer des fonctions de production et pour remplir les autres fonctions sociales, qu’il s’agisse de l’emploi ou de l’aménagement de notre territoire. Vous nous faites là un mauvais procès.

Mme la présidente. La parole est à M. Christian Jacob.

M. Christian Jacob. Cet alinéa définit les objectifs à atteindre pour maintenir le nombre d’agriculteurs. C’est bien cela, n’est-ce pas, puisque chaque alinéa correspond à un objectif ? Or, aucun des objectifs que vous fixez ne fait référence à la production, à l’activité économique. Vous vous fondez uniquement sur l’occupation de l’espace. Si vous craignez que le nombre d’agriculteurs ne baisse, votre peur va être décuplée ! Pour remplir les objectifs que vous fixez, un bon tracteur et un girobroyeur feraient l’affaire.

M. Stéphane Le Foll, ministre. Un gros girobroyeur alors !

M. Christian Jacob. Parfaitement, je vous invite d’ailleurs à le tester. (Sourires.)

Plus sérieusement, je voudrais que vous preniez conscience de ce que vous écrivez dans ce texte lorsque vous définissez les objectifs des exploitations agricoles. Le nombre d’agriculteurs est défini ici par rapport aux enjeux, définis ici en toutes lettres : l’accès au territoire, l’entretien des paysages, la biodiversité et la gestion foncière. Ce n’est pas moi qui les invente, c’est écrit !



Mme la présidente. La parole est à Mme Frédérique Massat.

Mme Frédérique Massat. Cet alinéa 23 résulte d’un amendement que nous avons déposé à plusieurs – j’étais l’une des co-signataires, tout comme Martial Saddier et Jeanine Dubié. Il est le fruit, je tenais à le préciser, d’un travail réalisé avec les agriculteurs de montagne, entre autres.

M. Christian Jacob. Cela ne retire rien à mes propos.

Mme Frédérique Massat. Le rapporteur et le ministre avaient accepté cette écriture, et je les en avais remerciés. Nous pouvons nous engager à préciser et réécrire, en deuxième lecture, le texte, de façon concertée, afin que toutes les ambiguïtés soient levées.

Mme Laure de La Raudière. Merci.

(L’amendement n1097 est adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Bruno Nestor Azerot, pour soutenir l’amendement n776.

M. Bruno Nestor Azerot. Il est défendu.

(L’amendement n776, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Bruno Nestor Azerot, pour soutenir l’amendement n777.

M. Bruno Nestor Azerot. Il est défendu.

(L’amendement n777, accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Germinal Peiro, rapporteur, pour soutenir l’amendement n1099.

M. Germinal Peiro, rapporteur. Il s’agit d’un amendement rédactionnel.

(L’amendement n1099, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Michel Clément, pour soutenir l’amendement n1103.

M. Jean-Michel Clément. Mon intervention portera également sur l’amendement n1104, qui est lié. L’alinéa 28 précise que la politique en faveur de l’agriculture tient compte des spécificités des territoires de montagne en recourant à l’article 8 de la loi de 1985 – je crois voir là une nouvelle connivence entre Mme Massat et M. Saddier… Je souhaiterais aller plus loin en y ajoutant une référence aux zones humides telles qu’elles sont définies à l’article L. 211 du code de l’environnement. En effet, ces zones possèdent toutes les caractéristiques visées par le présent texte, qui allie économie et écologie, puisqu’il s’y trouve souvent des élevages extensifs qui permettent d’y maintenir une emprise agricole certaine.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Germinal Peiro, rapporteur. Je comprends parfaitement le souci qu’a M. Clément de préserver les zones humides, notamment de les sauvegarder grâce à la pratique de l’élevage extensif. Cela étant, si nous faisons référence aux zones humides, il faudra aussi intégrer les autres zones, en particulier les zones sèches – je suis moi-même élu du sud de la Dordogne, une région de causses et de pelouses sèches sur lesquelles se pratique un autre type d’élevage extensif, celui du mouton. Certains pourront aussi demander une référence aux zones littorales, aux plaines ou à d’autres secteurs encore. En clair, nous ouvririons là une liste.

La référence faite aux zones de montagne s’explique par la loi montagne du 9 janvier 1985, qui justifie ce traitement différencié. Je suis donc contraint d’émettre un avis défavorable à l’amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Le Foll, ministre. Même avis.

(L’amendement n1103 est retiré.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Annie Genevard, pour soutenir l’amendement n1408.

Mme Annie Genevard. Cet amendement vise à compléter l’alinéa 28, qui fait mention des grands prédateurs, en ajoutant une précision relative au type particulier de grand prédateur qu’est le loup. La formulation que je propose autorise le recours au tir direct de prélèvement, sans passer par l’effarouchement, lorsque les éleveurs ont déjà subi plusieurs attaques de loup.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Germinal Peiro, rapporteur. Nous avons évoqué le problème des grands prédateurs et aurons l’occasion d’y revenir, qu’il s’agisse du loup ou de l’ours dans les Pyrénées. En toute franchise, je ne crois pas que ce degré de précision, par lequel on autoriserait une forme de tir de prélèvement, relève de la loi. La commission a donc émis un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Le Foll, ministre. Même avis.

(L’amendement n1408 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

3

Ordre du jour de la prochaine séance

Mme la présidente. Prochaine séance, demain, à neuf heures trente :

Suite de la discussion du projet de loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt.

La séance est levée.

(La séance est levée, le jeudi 9 janvier 2014, à une heure cinq.)

Le Directeur du service du compte rendu de la séance

de l’Assemblée nationale

Nicolas Véron