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Edition J.O. - débats de la séance
Articles, amendements, annexes

Assemblée nationale
XIVe législature
Session extraordinaire de 2014-2015

Compte rendu
intégral

Troisième séance du jeudi 16 juillet 2015

SOMMAIRE

Présidence de M. Denis Baupin

1. Programmation militaire pour les années 2015 à 2019

Présentation

Mme Patricia Adam, rapporteure de la commission mixte paritaire

M. Jean-Yves Le Drian, ministre de la défense

Discussion générale

M. Philippe Meunier

M. Philippe Folliot

Mme Gilda Hobert

M. Jean-Jacques Candelier

M. Christophe Léonard

M. Philippe Vitel

M. Joaquim Pueyo

Mme Geneviève Gosselin-Fleury

Vote sur l’ensemble

Suspension et reprise de la séance

2. Actualisation du droit de l’outre-mer

Discussion des articles (suite)

Après l’article 15

Amendement no 110

Mme Paola Zanetti, rapporteure de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République

Mme George Pau-Langevin, ministre des outre-mer

Article 15 bis A

Amendement no 69

Article 15 bis

Après l’article 15 bis

Amendement no 84

Article 15 ter

Article 15 quater

Article 15 quinquies

Amendement no 73 rectifié

Article 15 sexies

Article 15 septies

Article 15 octies

Amendement no 142

Article 15 nonies

Article 15 decies

Article 15 undecies

Amendement no 68

Avant l’article 16 A

Amendement no 127

Article 16A

Article 16

Article 17

Article 18

Amendements nos 19 , 20 , 72

Article 19

Amendement no 126 rectifié

Article 19 bis

Article 20

Article 20 bis

Après l’article 20 bis

Amendement no 89

Article 21

Après l’article 21

Amendement no 13

Article 22

Amendement no 9

Articles 22 bis A à 22 bis

Article 23

Amendements nos 152 , 118

Après l’article 23

Amendements nos 111 , 117 , 14

Article 23 bis

Amendement no 56

Articles 23 ter à 24

Après l’article 24

Amendements nos 15 , 155 (sous-amendement)

Article 24 bis A

Amendement no 131

Article 24 bis B

Amendement no 128

Articles 24 bis à 24 quinquies

Après l’article 24 quinquies

Amendements nos 113 , 85 , 112 rectifié , 86

Article 25

Amendements nos 129 , 124 rectifié , 147 (sous-amendement)

Article 26

Article 26 bis AA

Amendements nos 1 , 45

Articles 26 bis A à 26 bis

Après l’article 26 bis

Amendements nos 137, deuxième rectification , 16 rectifié, 17 rectifié , 149 rectifié

Article 27

Explications de vote

M. Philippe Gomes

M. Daniel Gibbes

M. Ibrahim Aboubacar

Vote sur l’ensemble

Mme George Pau-Langevin, ministre

3. Ordre du jour de la prochaine séance

Présidence de M. Denis Baupin

vice-président

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à vingt et une heures trente.)

1

Programmation militaire pour les années 2015 à 2019

Commission mixte paritaire

M. le président. L’ordre du jour appelle la discussion, sur le rapport de la commission mixte paritaire, du projet de loi actualisant la programmation militaire pour les années 2015 à 2019 et portant diverses dispositions concernant la défense (n° 2987).

Présentation

M. le président. La parole est à Mme Patricia Adam, rapporteure de la commission mixte paritaire.

Mme Patricia Adam, rapporteure de la commission mixte paritaire. Monsieur le président, monsieur le ministre de la défense, mes chers collègues, nous arrivons aujourd’hui au terme du processus d’actualisation de la programmation militaire pour les années 2015 à 2019.

Réunie hier soir, à la même heure, la commission mixte paritaire est en effet parvenue à s’accorder sur un texte susceptible de convenir aux deux assemblées.

La notion de procédure accélérée porte ici particulièrement bien son nom puisque le projet de loi n’a été déposé que le 20 mai. Deux mois plus tard, nous nous apprêtons ce soir – du moins je l’espère – à l’adopter définitivement. Le Sénat, quant à lui, l’examinera demain.

Certains de nos collègues, sur une partie des bancs de l’opposition, n’ont pas manqué de souligner, et de la façon la plus audible qui soit, à quel point nous avons dû travailler vite. Vite, mais bien : j’ai la faiblesse de penser que cette rapidité n’a pas nui à la qualité de nos travaux tout en démontrant, si besoin était, que le Parlement peut, de manière responsable, tenir compte de l’urgence sans pour autant abandonner ses prérogatives.

Depuis le mois de janvier, l’anticipation, notion bien connue de nos armées, a constitué le fil conducteur de nos travaux – et je remercie de leur efficacité tous les collègues qui y ont participé. Je le rappelle : nous savions, dès le vote de la loi de programmation militaire, la LPM, que celle-ci devrait faire l’objet d’une actualisation. Nous savions également, depuis le mois de janvier, que l’examen du projet de loi d’actualisation devrait avoir lieu dans un délai court.

En effet, l’urgence était là ; en raison de l’opération Sentinelle, bien sûr, mais aussi du rythme particulièrement soutenu auquel nos armées doivent mener leurs opérations sur l’ensemble des théâtres extérieurs. Il fallait donc en tenir compte, en tout premier lieu, sur le plan de l’entretien des matériels qui sont, nous le savons, très sollicités et, en second lieu, en mettant l’accent sur des acquisitions supplémentaires indispensables, tout particulièrement en matière d’hélicoptères ou de transport aérien.

L’actualisation de la programmation traduit pleinement les décisions prises par le Président de la République au cours des conseils de défense du début de l’année : je crois utile de m’y arrêter un instant pour dire, une nouvelle fois, quels en sont les principaux apports.

Il s’agit bien sûr d’abord, et cela était attendu, de la moindre réduction des effectifs, la déflation prévue initialement ayant été atténuée de 18 750 postes. Sans exonérer le ministère de la défense d’une amélioration de son organisation – loin s’en faut –, cette mesure permet le renforcement de la force opérationnelle terrestre. Il s’agit en effet de donner à celle-ci les moyens d’exercer, dans la durée, de nouvelles missions intérieures tout en maintenant un haut niveau de qualification, d’entraînement et d’engagement au profit de sa fonction d’intervention.

Pour la première fois depuis très longtemps, certains de nos régiments vont donc être densifiés, avec, par exemple, la création de compagnies ou d’escadrons. Qui peut s’en plaindre ? Certainement pas les membres de notre commission.

Le second axe de ce projet de loi concerne les crédits : leur augmentation se double d’une levée de l’hypothèque des recettes exceptionnelles, tant souhaitée par de nombreux parlementaires, sur tous les bancs.

La LPM votée en 2013 prévoyait en effet une stabilisation des crédits jusqu’en 2016, préalablement à une remontée progressive et modérée des moyens à partir de 2017. Le projet d’actualisation propose que cette fameuse « courbe en J » des crédits soit d’une part nettement plus prononcée, avec l’affectation de 3,8 milliards d’euros de crédits budgétaires supplémentaires, et d’autre part plus précoce, avec une augmentation de 600 millions d’euros dès 2016.

La deuxième grande hypothèse déterminante de cette programmation résidait dans le volume des recettes exceptionnelles, initialement fixées à 6,3 milliards d’euros. Tant leur montant que leur calendrier suscitaient de légitimes interrogations : la question du produit de la cession de certaines bandes de fréquences hertziennes a largement nourri nos débats depuis un an, tout en nous conduisant à utiliser, à deux reprises, les nouveaux pouvoirs de contrôle de nos deux assemblées sur pièce et sur place.

Lors du Conseil de défense du 29 avril, le Président de la République a décidé que l’essentiel des recettes exceptionnelles seraient converties en crédits budgétaires, à l’exception, comme vous le savez, de celles liées aux cessions d’emprises immobilières de la défense ou de matériels d’occasion. Cette décision permet une clarification certaine du cadre budgétaire de la programmation.

Si l’on y ajoute les bonnes nouvelles en matière d’exportations, notamment du Rafale, monsieur le ministre, il est évident que la trajectoire financière et capacitaire de la LPM est affermie.

M. Jean-Jacques Bridey. Bravo !

Mme Patricia Adam, rapporteure. Pour autant, bien des difficultés demeurent, et nous ne pouvons, bien sûr, pas les nier – vous ne les avez d’ailleurs pas cachées, monsieur le ministre.

Ainsi, la situation internationale et intérieure, dont vous rendez régulièrement compte devant la commission de la défense, ne laisse pas d’inquiéter, comme en témoigne l’actualité de ce jour en Égypte.

Pour y faire face, les moyens restent comptés. Il conviendra naturellement de veiller avec la plus grande attention au déroulement de la double manœuvre qui, en matière de de ressources humaines, combine d’importants recrutements au profit des forces avec la poursuite du mouvement de rationalisation des soutiens.

En ce qui concerne l’entretien des matériels, les besoins restent très importants, même si des crédits supplémentaires lui sont affectés. Certains matériels anciens s’usent en effet bien plus vite que prévu, alors que leurs successeurs ne sont pas attendus avant parfois, pour certains d’entre eux, de longues années.

Enfin, les économies budgétaires ont largement pesé sur les infrastructures et affecté les conditions de vie et de travail de nos soldats, mais aussi, on l’a vu récemment hélas, la sécurité même d’emprises militaires. Monsieur le ministre, je vous sais particulièrement vigilant sur ce point : là encore, le chantier devant nous est considérable. Nous veillerons avec vous à ce qu’il soit mené à bien.

Aussi faut-il concevoir cette actualisation comme une première étape, laquelle sera, à n’en pas douter, nécessairement suivie de plusieurs autres. Les problèmes stratégiques auxquels nous faisons face ne se résoudront pas en quelques années : nos concitoyens doivent être conscients qu’un effort de longue durée s’impose sur le plan financier comme sur le plan humain. La commission que j’ai l’honneur de présider prendra toute sa part au débat public sur ces problèmes, comme elle l’a toujours fait, et nous serons à vos côtés, monsieur le ministre, pour faire en sorte que la loi votée soit exécutée strictement.

Voilà qui me ramène à l’objet même de notre vote de ce soir, c’est-à-dire au texte issu des travaux de la commission mixte paritaire.

Avant de résumer les modifications intervenues, qu’il me soit permis ici de remercier particulièrement nos collègues sénateurs pour la manière constructive avec laquelle ils ont abordé ce dossier jusqu’à hier soir. Ils ont su s’élever au-dessus des querelles partisanes, voire des postures, pour travailler sur le fond et améliorer le dispositif proposé.

M. Jean-Jacques Bridey. On ne peut pas en dire autant de certains députés !

Mme Patricia Adam, rapporteure. Leurs apports sont nombreux et significatifs dans deux domaines principaux. Tout d’abord, tirant profit de la marge de manœuvre plus grande dont ils bénéficient en matière de recevabilité financière des amendements, nos collègues sénateurs ont intégré plusieurs clauses de sauvegarde supplémentaires. Il s’agit de prendre toutes les garanties nécessaires pour que les crédits soient au rendez-vous.

Ensuite, les pouvoirs du Parlement sont renforcés par un dispositif permettant de demander la levée du secret de la défense nationale. Sur ce point, le projet de loi a également été amélioré en commission mixte paritaire : ses travaux ont permis d’encadrer davantage le texte du Sénat en laissant l’initiative de la demande aux présidents des commissions permanentes directement concernées.

En définitive, ce dispositif équilibré, qui ne met pas en péril les secrets de notre défense, peut aussi être interprété, monsieur le ministre, comme un appel insistant à faire preuve d’un plus grand discernement en matière de décisions de classification.

S’agissant des associations professionnelles nationales de militaires – APNM –, le texte final est également équilibré. Il confirme une partie des modifications souhaitées par notre assemblée en première lecture tout en tenant compte de la prudence souhaitée par les sénateurs. Tout dépendra désormais de la manière dont les militaires eux-mêmes s’approprieront ce nouvel outil de dialogue. J’ai toute confiance en eux, ainsi que dans leur hiérarchie, pour que ces associations soient mises au service de la cohésion et de l’esprit de responsabilité.

Je n’oublie pas de préciser que la commission mixte paritaire a également entériné quelques mesures nouvelles proposées par le Gouvernement en première lecture au Sénat concernant la sécurité informatique des opérateurs d’importance vitale, celle de nos installations nucléaires militaires ou bien les données relatives aux passagers aériens.

La copie d’ensemble me paraît aussi bonne qu’équilibrée : c’est la raison pour laquelle j’invite bien sûr notre assemblée à adopter le texte issu des travaux de la commission mixte paritaire. Je remercie particulièrement l’ensemble des membres de la communauté de défense, et plus particulièrement nos armées, car elles nous ont accompagnés dans le travail de préparation de ce projet de loi. Je sais, pour les rencontrer régulièrement, qu’ils attendent avec impatience l’actualisation de la LPM. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen et du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de la défense.

M. Jean-Yves Le Drian, ministre de la défense. Monsieur le président, madame la présidente de la commission de la défense et rapporteure de la CMP, mesdames et messieurs les députés, je voudrais, en quelques mots, rappeler les deux enjeux majeurs de l’actualisation de la loi de programmation militaire dans un contexte qui – chacun le sait et le reconnaît – fait peser des menaces sans précédent sur la sécurité des Français.

Ce contexte mobilise, par voie de conséquence, nos armées à un degré extrêmement fort, au prix de la qualité de l’entraînement et de la préparation qui fait pourtant leur excellence. Mais cette situation est temporaire, puisque l’actualisation va permettre d’y remédier.

Le premier de ces deux grands enjeux majeurs est la sécurisation financière et opérationnelle de notre politique de défense. Madame la présidente de la commission de la défense, vous avez rappelé que cette sécurisation s’opère à travers trois mesures-phares, désormais bien connues, et qui ont été décidées par le Président de la République : la diminution très significative de notre déflation d’effectifs, la fin des ressources exceptionnelles, et l’augmentation des moyens financiers, à la fois par l’affectation de crédits budgétaires nouveaux à hauteur de 3,8 milliards d’euros et par le redéploiement de 1 milliard d’euros lié à l’évolution des indices économiques.

Le second enjeu majeur est la mise en place des associations professionnelles nationales de militaires. Vous le savez, nous avons été conduits à introduire ces dispositions nouvelles suite à l’arrêt de la Cour européenne des droits de l’homme, en conformité avec la Convention européenne des droits de l’homme ratifiée par la France. Je n’y reviens pas, mais chacun mesure ici que cette création est une novation majeure qui contribuera à la rénovation de la concertation militaire et fera date dans l’histoire de notre défense.

Ce sont donc sur ces deux sujets essentiels que se sont concentrés prioritairement les travaux de la commission mixte paritaire réunie hier soir. J’observe avec satisfaction que ses membres ont convergé sur un texte qui s’inscrit dans la droite ligne des deux priorités que je viens d’évoquer.

Le Gouvernement est donc favorable au compromis issu des travaux de la commission mixte paritaire.

Je souhaiterais toutefois faire trois observations.

La première concerne les ressources liées à l’évolution des indices économiques. La commission mixte paritaire a repris la clause de sauvegarde que le Sénat avait proposée et votée, compensant une éventuelle défaillance par des crédits budgétaires. Vous le savez, le Gouvernement n’est pas favorable à une telle clause – j’avais ici défendu la solution proposée par M. Lamour dans un de ses amendements. En effet, c’est au Gouvernement de proposer en loi de finances les crédits budgétaires de la défense, sans que cette clause ait pour effet de faire dépasser les annuités prévues par cette actualisation. Le Parlement a voulu exprimer une préoccupation à l’égard de l’équilibre financier de la défense. J’émets donc une réserve à l’égard de cette mesure, dont je comprends les attendus. Tous les éléments qui sont déjà en ma possession, qui résultent des travaux communs de l’inspection générale des finances et du contrôle général des armées, me permettent de dire ce soir que cette clause n’aura pas à être activée.

La deuxième concerne le financement des opérations intérieures. La commission mixte paritaire a prévu que ce sujet serait traité dans le rapport que le Gouvernement devra remettre au Parlement avant le 31 janvier 2016 et qui fera, je vous le rappelle, l’objet d’un débat. À cette échéance, le Gouvernement disposera de tous les éléments, après la mise en place de l’opération Sentinelle, pour mesurer et analyser les conséquences du nouveau contrat opérationnel de protection, en particulier sur le surcoût induit par un tel dispositif.

Enfin, la troisième concerne la clause de sauvegarde concernant l’immobilier. Le Sénat avait souhaité exonérer totalement le ministère de la défense de la décote qui s’applique aux cessions d’immeubles domaniaux. Une solution de compromis a été trouvée en commission mixte paritaire. Elle préserve la volonté du Gouvernement de développer le logement social tout en garantissant les intérêts financiers du ministère. J’exprime une réserve de la part du Gouvernement, mais, au regard des résultats déjà enregistrés dans les ventes d’immobilier de la défense au cours des derniers mois et de ce que l’on peut anticiper pour 2016 et 2017, je pense que nous pouvons être collectivement rassurés sur notre capacité à disposer des recettes exceptionnelles attendues. De manière plus générale, vous le savez – et certains s’en sont émus –, il y aura une clause de revoyure à la fin de 2017.

M. Jean-François Lamour. C’était nécessaire !

M. Jean-Yves Le Drian, ministre. Effectivement. Il y avait une clause de revoyure pour la fin de 2015, nous y sommes. Celle de 2017 permettra d’apprécier les évolutions sur ce sujet comme sur les indices économiques.

Telles sont les quelques observations et les deux réserves que je voulais faire au nom du Gouvernement.

Je vous remercie, madame la présidente de la commission, ainsi que les membres de la commission et l’ensemble des parlementaires qui ont suivi avec attention cette actualisation, pour votre mobilisation. À un moment où nos armées sont particulièrement sollicitées et doivent faire face à l’ensemble des menaces auxquelles nous sommes quotidiennement confrontés, elles peuvent être assurées du plein soutien de la représentation nationale, tel qu’il s’exprime à travers cette actualisation.

C’était un défi en soi, et je me félicite donc que le Parlement l’ait relevé dans des délais exigeants, en étroite relation avec le Gouvernement, avec comme seul objectif l’intérêt de nos armées et la sécurité de notre pays. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen et du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.)

Discussion générale

M. le président. Dans la discussion générale, la parole est à M. Philippe Meunier.

M. Philippe Meunier. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le vote de la loi de programmation militaire et son actualisation sont deux moments importants pour nos armées et pour notre communauté nationale.

La défense de la France doit, à chaque nouvelle loi de programmation militaire, s’adapter pour faire face aux nouvelles menaces. Vous êtes aux responsabilités, monsieur le ministre, et vous ne l’avez pas fait. Faute d’avoir su anticiper et préparer nos armées, vous avez convoqué le Parlement en urgence pour réévaluer votre loi de programmation militaire initiale afin d’essayer vainement de compenser vos carences.

Étudier un texte qui engage notre défense et donc la sécurité de notre pays sur de nombreuses années avec un délai si court, qui n’a pas permis à nos groupes politiques de déposer le moindre amendement,…

Mme Patricia Adam, rapporteure. Certains l’ont fait, pas vous !

M. Philippe Meunier. …est une marque de désinvolture et même d’irrespect à l’endroit du Parlement, de l’opposition et de nos forces armées. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.) L’audition de nos chefs d’état-major après la date limite autorisant le dépôt des amendements en est une triste illustration, pour ne pas dire un scandale. Jamais le Parlement n’a été traité de la sorte pour un sujet de cette importance. (Mêmes mouvements.)

M. Gilbert Le Bris. On voit que vous n’y êtes pas depuis longtemps !

M. Philippe Meunier. Ce n’est pas à la hauteur de la charge d’un Président de la République et d’un gouvernement dignes de ce nom.

À la fin de 2013, lors des débats parlementaires concernant votre loi de programmation militaire 2014-2019, nous vous avons alerté solennellement sur la nécessité de renforcer notre outil de défense pour faire face aux nouvelles menaces, notamment terroristes, mais, comme à l’accoutumée, votre gouvernement et vous-même n’avez rien voulu entendre, prenant le risque de mettre en danger nos armées et la sécurité de nos soldats.

M. Gwendal Rouillard. Sarkozy, sors de ce corps !

M. Philippe Meunier. L’échec de votre loi de programmation militaire initiale est tout d’abord la conséquence de vos erreurs d’analyse en matière de politique étrangère.

Mali, Centrafrique, Ukraine, Syrie, Irak : nos armées payent aujourd’hui les erreurs et les fautes de la politique étrangère du gouvernement auquel vous appartenez.

M. Gilbert Le Bris. Quelle caricature !

M. Philippe Meunier. Mali : François Hollande annonçait la fin des interventions militaires en Afrique et la seule mise en œuvre d’une aide logistique à la force d’intervention africaine. Finalement, nous voyons une intervention de nos troupes décidée en urgence et la mise en place de l’opération Barkhane pour une durée indéterminée.

Centrafrique : après des mois d’inaction de la diplomatie devant les massacres de chrétiens, le Gouvernement a décidé de lancer l’opération Sangaris, qui devait, selon vos déclarations, ne durer que quelques semaines, voire quelques mois. Nous connaissions tous la suite des événements.

Ukraine : François Hollande, totalement aligné sur la position américaine,…

M. Nicolas Dhuicq. Tout à fait !

M. Philippe Meunier. …demande à notre armée de l’air de déployer ses moyens en Europe de l’Est, comme si la Russie menaçait l’intégrité territoriale des pays membres de l’OTAN,…

M. Nicolas Dhuicq. Bravo !

M. Philippe Meunier. …pour un conflit concernant un État qui n’est pas membre de l’OTAN et qui n’a pas le moindre accord de coopération militaire avec la France.

Syrie, Irak : après avoir aidé massivement les rebelles hostiles au régime de Damas, qui, soit dit en passant, sont maintenant les alliés des islamistes, François Hollande, véritable pompier pyromane, demande à notre armée de l’air de bombarder l’État islamique en Irak, mais pas en Syrie, pour ne pas soulager ce régime. Les historiens établiront les responsabilités des uns et des autres et la Cour pénale internationale jugera les acteurs et les complices de ce jeu mortifère pour les minorités, notamment chrétiennes.

En moins de deux ans, votre loi de programmation militaire 2014-2019 a littéralement volé en éclat.

Votre majorité s’est lourdement trompée en 2012 sur le niveau des effectifs de nos armées nécessaires pour accomplir les missions qui leur sont demandées.

Le gouvernement auquel vous appartenez et que vous soutenez a fait le choix délibéré de diminuer les effectifs de nos armées de 33 675 postes d’ici à la fin de 2019…

M. Gilbert Le Bris. C’est de l’amnésie ! Vous êtes ridicule !

M. Philippe Meunier. …pour financer en partie le recrutement, jugé inutile selon la Cour des comptes elle-même, de 60 000 agents supplémentaires pour le compte du ministère de l’éducation. Votre gouvernement a ainsi fait le choix de sacrifier les moyens et la sécurité de nos armées pour des raisons bassement électoralistes. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.)

Aujourd’hui, conséquence de la poursuite de l’opération Sentinelle, vous tentez d’éviter la déstructuration de notre armée de terre en réduisant votre déflation de 18 750 hommes, mais la vérité oblige à dire qu’à l’issue de l’actualisation de la loi de programmation militaire que vous nous proposez, nos armées auront moins d’effectifs qu’en 2012, en dépit de la multiplication des théâtres d’opérations extérieurs sur lesquels vous les engagez.

Nous ne pouvons donc pas nous en satisfaire, contrairement à certains, frappés par le syndrome de Stockholm, qui les pousse à en oublier leur responsabilité politique ou leur devoir de réserve.

L’armée de l’air et la marine, à qui vous demandez un effort considérable en termes de déflation de personnel, sont aussi en limite de rupture compte tenu de leurs multiples engagements opérationnels. Elles n’ont d’ailleurs toujours pas connaissance de vos arbitrages au sujet de l’évolution de leurs effectifs alors que nous sommes censés en étudier les modalités avec votre projet de loi.

La vente des Rafale, qui nécessite un détachement de personnels auprès des pays acheteurs, et la livraison de la FREMM Normandie à l’Égypte, qui a pour conséquence de prolonger le service des anciennes frégates L70, nécessitant trois fois plus de marins, rendent de surcroît quasiment impossible la déflation des effectifs que vous leur imposez.

M. Gwendal Rouillard. Alors, il ne faut pas vendre ?

M. Philippe Meunier. Oser affirmer qu’avec cette loi de programmation militaire actualisée, les effectifs vont remonter, comme l’a fait à plusieurs reprises la présidente de la commission, relève tout simplement du mensonge. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.)

M. Gilbert Le Bris. C’est un spécialiste qui parle !

M. Gwendal Rouillard. C’est pitoyable !

M. Philippe Meunier. Les Français et nos soldats ne méritent pas cela.

François Hollande a déjà trompé les Français au sujet de l’inversion de la courbe du chômage. Cessez ces mensonges qui n’honorent pas la politique et affaiblissent notre démocratie.

M. Gilbert Le Bris. Vous n’y connaissez rien !

M. Philippe Meunier. L’engagement massif de nos troupes entraîne une usure accélérée des matériels, notamment de l’armée de terre mais aussi de l’armée de l’air. L’armée de terre voit son parc matériel très éprouvé par les engagements en opérations extérieures. Son capital en matériel est entamé et l’entretien programmé du matériel prévu ne réglera pas la question de son ancienneté, à l’image de notre VAB, le véhicule de l’avant blindé, qui attend d’être remplacé par son successeur du programme Scorpion – programme dont vous avez décalé le plus possible la signature, comme vous nous l’avez avoué ici même lors de nos débats sur le budget de la défense de 2015, faute d’avoir l’assurance d’en obtenir le financement.

L’armée de l’air engage un nombre d’avions de combat supérieur à son contrat opérationnel. La surutilisation de ses Mirage 2000 D oblige l’état-major à les remplacer par des Mirage 2000 C sans pod qualifié. L’exportation du Rafale aura également des conséquences sur les capacités de nos forces aériennes stratégiques, qui seront dans l’obligation de prolonger les Mirage 2000. Le retard pris pour le remplacement des Alpha Jet entraîne également le décalage du projet Cognac dit 2016, dont tout le monde sait qu’il ne sera pas concrétisé en 2016. Cela aura des conséquences sur les coûts en fonctionnement de la formation des pilotes et donc un impact négatif sur le budget de l’armée de l’air.

La marine subira, quant à elle, un retard des livraisons de ses FREMM à la suite de la vente de la frégate Normandie à l’Égypte.

M. Gwendal Rouillard. C’est faux !

M. Philippe Meunier. Il faudra attendre 2019 pour récupérer les capacités opérationnelles perdues. La refonte à mi-vie du porte-avions Charles-de-Gaulle, opération majeure, débutera en 2017 et non plus à la fin de 2016, ce qui permettra de reporter la charge financière sur la prochaine majorité. Les forces sous-marines subiront également un décalage de livraison de leur premier sous-marin Barracuda, contrairement à ce qui avait été décidé par la loi de programmation militaire initiale.

M. Gwendal Rouillard. C’est faux !

M. Philippe Meunier. L’augmentation des budgets est reportée sur la prochaine majorité. Il suffit de comparer les budgets de votre loi de programmation militaire pour les années 2015 à 2019 pour mesurer à quel point la ficelle est grosse. En 2015, le budget resté inchangé. En 2016, est prévue une augmentation de seulement 500 millions d’euros. En 2017, comme par hasard, année d’élection, nouvelle majorité politique, vous ne vous sentez plus concerné en augmentant le budget de 700 millions d’euros. Pour 2018, vous prévoyez 1 milliard d’euros en plus – pourquoi pas ? – et, en 2019, cerise sur le gâteau, si j’ose m’exprimer ainsi, 1,51 milliard d’euros en plus.

Par rapport à la loi de programmation initiale, les 3,8 milliards de budget supplémentaires que vous annoncez sont donc, à l’image de vos anciennes recettes exceptionnelles, un chèque en blanc.

Si la loi de programmation militaire actualisée que vous nous proposez était sérieuse et crédible, monsieur le ministre, vous auriez dû avoir l’honnêteté de commencer par faire l’inverse, à savoir augmenter de 1,51 milliard le budget dès cette année, car c’est maintenant que nos armées et notre industrie ont besoin de ces sommes. Malheureusement, vous préférez dresser un énième rideau de fumée, pensant certainement une nouvelle fois que cela suffira à tenir jusqu’en 2017.

Après des mois de tergiversations au sujet de la vente des fréquences, de la création de sociétés de projets totalement ubuesques et de l’augmentation sans précédent du report de charges, l’exécutif, poussé par ses propres impasses budgétaires, inscrit donc en urgence à l’ordre du jour de nos travaux ce projet de loi d’actualisation de la loi de programmation militaire, qui ne répond pas aux besoins de nos armées pour accomplir leurs missions.

Alors, permettez-moi de vous le dire, en dépit des qualificatifs que vous avez utilisés en commission à l’encontre de l’opposition pour essayer de dissimuler vos erreurs, pour ne pas dire les fautes de votre gouvernement, vous convainquez de moins en moins de personnes, et votre autosatisfaction, à l’image de celle de François Hollande, ne trompe plus les Français.

M. Gwendal Rouillard. Quel sens de la nuance !

M. Gilbert Le Bris. Tout ce qui est excessif est dérisoire !

M. Philippe Meunier. Votre loi de programmation militaire initiale est un échec. L’actualisation que vous nous proposez n’est qu’un rideau de fumée. Les 3,8 milliards d’euros annoncés ne répondent pas aux enjeux et aux besoins de nos armées.

Nos armées n’ont pas besoin d’aumône. Elles ont besoin d’une loi de programmation militaire et d’un budget dignes de ce nom. Ne comptez pas sur nous pour sombrer dans un pseudo-compromis, qui ne relèverait en fait que de la compromission.

M. Christophe Léonard. Les sénateurs apprécieront !

M. Philippe Meunier. Ne comptez pas sur nous pour tomber dans le panneau de votre pseudo-union nationale, qui n’est en fait qu’une basse manœuvre politicienne.

Le peuple français, civil comme militaire, en a plus qu’assez de ces mensonges. À la fin de 2017, après cette loi de programmation militaire actualisée, vous laisserez avec François Hollande nos armées dans l’état où les avait laissées Lionel Jospin en 2002 (Rires sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen), exsangues.

M. Gwendal Rouillard. Et Sarkozy ?

M. Philippe Meunier. Monsieur le ministre, même texte, même sanction. Je voterai donc contre le texte de la CMP. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe Les Républicains.)

M. Christophe Léonard. Nos armées apprécieront !

Plusieurs députés du groupe socialiste, républicain et citoyen. C’est minable !

M. Philippe Vitel. De tels qualificatifs ne devraient pas être employés dans l’hémicycle !

M. le président. La parole est à M. Philippe Folliot.

M. Philippe Folliot. Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la présidente de la commission, mes chers collègues, la loi de programmation militaire est un moment particulièrement important et attendu par l’ensemble de la communauté militaire. Dans un tel cadre, il nous paraît important d’avoir toute la hauteur exigée par les circonstances.

M. Gilbert Le Bris. Cela nous changera !

M. Philippe Folliot. Nous tenons avant tout à saluer l’action exemplaire menée par nos militaires dans des conditions souvent très difficiles. Nous ne pouvons que souligner le professionnalisme, l’engagement et le dévouement dont font preuve nos troupes. Nous devons également honorer la mémoire des soldats tombés au champ d’honneur. Ils font la fierté de la France. Cet engagement de nos troupes, c’est avant tout celui de la France pour l’application du droit international, pour la défense de l’intégrité territoriale d’un État allié, pour la démocratie, la liberté et la lutte contre le terrorisme et le fondamentalisme.

Toutefois, depuis le début du quinquennat, notre inquiétude est grande : la France sera-t-elle encore capable, demain, de mener de telles actions avec succès, afin de défendre la liberté et les populations et de lutter contre le terrorisme ? En 2013, lors de l’examen du projet de loi de programmation militaire, le groupe UDI avait fait part des inquiétudes et des réserves qui justifiaient notre opposition, et nous avions mis en garde le Gouvernement sur les risques qui obligeraient inévitablement à revoir la loi de programmation militaire avant son terme, du fait de l’inadéquation entre les objectifs annoncés et les moyens mis en avant.

Des risques très élevés pesaient en effet sur les moyens humains, du fait des baisses d’effectifs prévues, puisque 23 500 postes devaient être supprimés, auxquels devaient s’ajouter les 54 000 postes supprimés dans la précédente loi de programmation militaire. Aucun ministère n’a d’ailleurs fait, pour le redressement des comptes publics, des efforts à la hauteur de ceux consentis par le ministère de la défense. Des incertitudes subsistaient par ailleurs sur les crédits : il était ainsi évident que les recettes exceptionnelles espérées – dont le montant, 6,1 milliards d’euros, était particulièrement élevé – ne seraient pas au rendez-vous. Enfin, nous avions des interrogations sur les matériels et les moyens.

Force est de constater que les faits nous ont malheureusement donné raison et qu’il est nécessaire de revoir la loi de programmation militaire initiale, étant donné le changement de contexte qui a vu l’engagement fort et continu de la France en OPEX, avec les opérations Barkhane dans toute la bande sahélo-saharienne, Sangaris en Centrafrique et Chammal en Irak.

Le coût de ces OPEX est très élevé, et le financement des dépassements, partagé entre l’interministériel et le ministère de la défense, pose problème. En 2014, ce dépassement atteint 665 millions d’euros, le niveau plus important depuis dix ans. Les tragiques événements qui ont endeuillé la France au mois de janvier dernier ont conduit en outre le Gouvernement à déployer dans l’urgence 10 000 puis 7 000 personnels dans le cadre de ce qui est devenu l’opération Sentinelle.

Si nous pouvons nous féliciter, à certains égards, des conséquences positives que ce dispositif a eues, en conduisant à réduire la déflation des effectifs dans l’armée de terre, nous pouvons toutefois nous interroger, sur le moyen terme, sur ce déploiement dans la durée des forces de l’armée de terre pour des missions qui sont peut-être plus du ressort de la police et de la gendarmerie, voire de sociétés privées. Quant au coût de cette opération, il est estimé par le ministère de la défense à 1 million d’euros par jour, alors que la provision initiale était de 11 millions seulement.

Ce projet d’actualisation de la loi de programmation militaire va dans le bon sens et, sans pour autant les faire disparaître, il est de nature à réduire les nombreux aléas qui pèsent sur la réalisation de la LPM. C’est un progrès et, fidèles à l’attitude constructive qui a toujours été la nôtre, nous tenons à saluer vos efforts, monsieur le ministre, dans un contexte que chacun sait très contraint. Il était urgent d’allouer des crédits supplémentaires à la défense, afin d’éviter un défaut de paiement avant l’été, qui aurait été une catastrophe. Nous nous réjouissons, à ce titre, que les sociétés de projet aient été abandonnées. Nous préférons que les crédits budgétaires ne soient pas hypothétiques.

En outre, le maintien de 18 500 postes était tout autant nécessaire pour que la France soit en mesure non seulement de continuer son engagement dans le monde, mais également de protéger nos concitoyens face à la menace terroriste. Les 3,8 milliards d’euros annoncés d’ici à 2019, s’ils sont une rustine nécessaire, risquent de ne pas être en mesure de maintenir notre outil de défense à son niveau actuel, en particulier de couvrir les OPEX en cours et futures. La France est-elle en mesure de rester la puissance globale et mondialisée qu’elle devrait être ?

Pour ce qui est du droit d’association des militaires, notre commission a procédé à de nombreuses auditions qui ont permis d’effectuer un travail sérieux et de trouver, entre le statu quo et la syndicalisation que nous rejetons, un équilibre que nous approuvons.

Dans le cadre de ses propositions dans le domaine de la défense, rendues publiques il y a dix-huit mois, l’UDI avait soutenu la transposition en métropole du service militaire adapté, très apprécié outre-mer. Le projet de loi va dans ce sens, et c’est pourquoi nous approuvons l’expérimentation en cours. Nous regrettons en revanche que le ministère de la défense supporte seul la charge financière d’une expérimentation qui, à nos yeux, relève plutôt de l’interministériel, compte tenu des publics ciblés. Si le rattrapage de jeunes en difficulté ne fait pas partie des missions premières de la défense, nous soutiendrons malgré tout cette mesure.

Cette actualisation répond enfin à un besoin opérationnel majeur, s’agissant des hélicoptères, pour mener à bien les opérations en cours, particulièrement les missions de lutte contre des éléments terroristes armés et mobiles dans l’environnement africain. Le tandem prévu, composé d’un renforcement des activités de maintenance aéronautique, en parallèle d’acquisitions complémentaires – 7 Tigre HAD et 6 NH90 –, permettra d’apporter plus vite une capacité opérationnelle supplémentaire, tout en redonnant un peu de charge à l’industrie, sous-optimisée dans la loi de programmation militaire en vigueur.

Nous saluons également la poursuite de la rénovation des avions de détection et de commandement aéroportés de l’armée de l’air et de la marine, ainsi que la livraison de FREMM et de frégates de taille intermédiaire. Je rappelle souvent, monsieur le ministre, que le maintien et la sauvegarde de notre souveraineté sur notre zone économique exclusive – l’un des premiers domaines maritimes au monde –, sont un enjeu particulièrement important.

Nous tenons enfin à souligner tous les efforts faits pour optimiser les moyens en matière de renseignement, lequel est essentiel, notamment dans la lutte contre le terrorisme.

Pour autant, des interrogations demeurent. Les phénomènes de report de charge sont toujours aussi inquiétants et lourds d’incertitude pour l’avenir : 3,45 milliards d’euros à la fin de l’année 2013 pour l’ensemble de la mission défense, dont 2,4 milliards pour le programme 146 sur les crédits d’équipement. Nous avons aussi des inquiétudes sur les matériels : les crédits alloués aux équipements, pour les quatre ans à venir, ne sont qu’un minimum qui ne suffira pas pour remplacer nos véhicules usés et notre matériel défectueux, lequel a parfois plus de cinquante ans.

Les programmes d’armement, bien entendu nécessaires dans le contexte actuel, sont toujours plus coûteux, en raison des technologies nouvelles. Les crédits alloués à ces programmes sont les bienvenus, mais ils ne seront pas, eux non plus, suffisants.

Le groupe UDI croit fermement en la nécessité d’une Europe de la défense, que nous appelons de nos vœux, car le seul cadre collectif en matière de défense ne peut pas demeurer l’OTAN. La mise en commun des moyens à l’échelle européenne conduirait de manière certaine à la formation d’un ensemble plus puissant, pouvant prendre toute sa place sur la scène internationale. Nous appelons le Gouvernement à intensifier son action et nous nous félicitons que nos amendements déposés en ce sens en séance aient été adoptés.

Ces amendements visaient à engager un débat avec nos partenaires européens sur la possibilité de créer un pôle de défense européenne à Strasbourg ainsi qu’un quartier général militaire européen au Mont Valérien, ainsi que sur le mécanisme Athéna et le financement de la défense européenne, qui constituera un préalable nécessaire à la mise en place d’un budget européen dédié à la politique de sécurité et de défense commune ; à encourager les programmes industriels européens, dits « pooling and sharing », en particulier pour les moyens capacitaires, dans une logique d’autonomie stratégique au niveau européen ; à travailler à la création d’une académie européenne du renseignement.

Mais, une nouvelle fois, nous ne pouvons que regretter l’absence, parfois, d’une vision à moyen terme.

M. Jean-François Lamour. Parfois ?

M. Philippe Folliot. Malheureusement, notre politique budgétaire est toujours une politique de réaction, en réponse à des besoins de court terme.

Nos inquiétudes sur la place de la France dans le concert des nations demeurent vives, alors que notre monde est de plus en plus instable et dangereux et que des pays se réarment : les Russes ont augmenté leur budget de défense de 30 % et les Chinois de près de 20 %. Dans un tel contexte, il nous paraît essentiel que l’Union européenne aille plus loin pour garantir l’autonomie de la défense de notre continent.

C’est pourquoi nous ne pouvons plus continuer à réduire les moyens de la défense, qui relève des missions régaliennes de l’État. Il est en effet nécessaire d’adapter nos moyens à un monde toujours plus instable et dangereux, où existent de nombreux risques asymétriques. Les moyens que propose le présent texte sont tout juste suffisants : ils ne sont pas tout à fait à la hauteur de nos ambitions ni de nos enjeux. Alors que nous avions voté contre la loi de programmation militaire initiale, nous soulignons cette fois les avancées indéniables de ce texte, sur lequel le groupe UDI s’abstiendra positivement. (Sourires.)

M. Jean-Jacques Bridey. Il faut voter, au contraire !

M. le président. La parole est à Mme Gilda Hobert.

Mme Gilda Hobert. Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la présidente de la commission de la défense et des forces armées, mes chers collègues, je n’ai pas l’intention de me lancer dans une litanie de reproches, mais je saluerai plutôt les efforts fournis. (« Ah ! » sur plusieurs bancs du groupe Les Républicains.)

M. Philippe Meunier. C’est une surprise !

Mme Gilda Hobert. Nous sommes réunis en séance pour discuter, après l’accord intervenu hier soir en commission mixte paritaire, de l’actualisation nécessaire de la loi de programmation militaire pour les années 2015 à 2019. En effet, depuis que nous l’avons votée, en décembre 2013, le contexte a évolué.

D’une part, les dramatiques attentats survenus à Paris en janvier dernier ont démontré la nécessité d’un déploiement accru des forces sur le sol national, tant pour garantir la sûreté des populations que pour participer à la lutte contre le terrorisme. D’autre part, la multiplication des crises en Afrique et au Moyen-Orient a contraint l’armée française à déployer des moyens importants sur des théâtres nouveaux, notamment dans la bande sahélo-saharienne et en Irak, pour des opérations militaires de contre-terrorisme exigeantes.

Le temps est donc venu de vérifier la bonne adéquation entre les objectifs fixés dans la loi de programmation militaire et les réalisations, puis d’affiner certaines des prévisions qui y sont inscrites, notamment dans les domaines de l’activité des forces et des capacités opérationnelles. En sanctuarisant les crédits de la défense à hauteur de 31,4 milliards pour 2015 et en dégageant 3,8 milliards de crédits supplémentaires pour couvrir les quatre prochaines années, le Président de la République a, en conséquence, fait le choix opportun d’augmenter l’effort de défense.

Il permettra de réaliser les adaptations indispensables sans remettre en cause ni les grands principes de la stratégie de défense et de sécurité nationale énoncés dans le Livre blanc, ni les grands équilibres de la programmation militaire, d’autant que l’actualisation de cette loi permet de sécuriser les ressources financières dont bénéficie le ministère, puisque la majeure partie des recettes exceptionnelles prévues par la programmation initiale, qui devaient en partie provenir de la cession de la bande de fréquence des 700 mégahertz, sera remplacée par des crédits budgétaires.

Dès l’année 2015, et pour les années suivantes, les ressources de la programmation militaire seront constituées des crédits budgétaires de la mission « Défense » et des seules recettes extrabudgétaires issues des cessions immobilières et de matériels militaires. Ainsi, avec un financement en hausse et sécurisé, l’actualisation permettra une adaptation tout d’abord en termes d’effectifs.

Les attaques de janvier à Paris ont montré que la France, comme les autres États européens, était directement exposée à une menace terroriste en pleine expansion. Face à ce constat alarmant, le Président de la République a décidé que le rythme de réduction des effectifs du ministère de la défense devait être révisé. La diminution des effectifs de la mission « Défense », initialement prévue à hauteur de 33 675 postes, est atténuée de 18 750 et s’établira sur la période 2015-2019 à 14 925.

La protection terrestre sera ainsi renforcée, avec la capacité de déployer 7 000 hommes durant une année sur le territoire national, et la possibilité de monter jusqu’à 10 000 pendant un mois. Cela implique de porter le format de la force opérationnelle terrestre à 77 000 hommes au lieu des 66 000 prévus initialement par la LPM. C’est une décision là encore salutaire, tant le haut niveau d’engagement des forces armées aussi bien sur le territoire national qu’au titre des opérations extérieures doit être renforcé. À ce titre, 2,8 milliards d’euros y seront consacrés.

Pour répondre aux besoins croissants en matière de protection du territoire national, la contribution de la réserve opérationnelle militaire sera, rappelons-le, accrue elle aussi. Pour atteindre cet objectif, le budget qui lui est consacrée sera augmenté de 75 millions d’euros sur la période 2016-2019. J’ajoute qu’en cas de menace sur la sécurité nationale, il sera possible d’augmenter le nombre de jours d’activité des réservistes salariés et de réduire le préavis d’information de leurs employeurs, et qu’un élargissement des recrutements dans les entreprises sera favorisé pour mettre fin à l’érosion des effectifs, le but étant de faire passer de 28 000 à 40 000 le nombre de réservistes. C’est un dispositif utile, tant la réserve opérationnelle est une capacité à part entière de nos forces, qu’il convient donc de développer.

Autre objectif de l’actualisation : une adaptation en termes d’équipements, à commencer par la régénération des matériels. L’activité des forces était déjà une priorité de la loi de programmation militaire, marquée par un effort financier important dans ce domaine puisque les crédits consacrés à l’entretien programmé des matériels progressaient en moyenne de 4,3 % par an en valeur sur la période. Grâce à cette actualisation, l’effet financier sera encore amplifié au profit des matériels les plus sollicités en opérations, avec une dotation supplémentaire de 500 millions d’euros sur la période 2016-2019. En effet, le niveau actuel des engagements, leur nature et les moyens disponibles pour s’y préparer nécessitent de maintenir dans la durée un potentiel technique des forces armées suffisant.

L’actualisation permettra également une amélioration dans le domaine des équipements critiques, au profit en premier lieu de la composante hélicoptères, avec sept Tigre supplémentaires, mais aussi de la capacité de projection aérienne tactique, avec notamment l’avancement de la livraison de plusieurs avions ravitailleurs, et enfin, dans le domaine du renseignement, avec un renforcement de nos capacités d’observation spatiale par l’acquisition, notamment, d’un troisième satellite.

Le projet de loi contient par ailleurs deux autres dispositifs importants.

Tout d’abord, il institue un droit d’association professionnelle des militaires. Afin que notre législation soit en conformité avec la Convention européenne des droits de l’homme, ces derniers auront désormais le droit de créer des organismes ayant pour objet la préservation de leurs intérêts professionnels et d’y adhérer. De même, sera garanti à ces organismes, par l’attribution de certains droits et moyens, l’exercice effectif de leur mission, notamment à travers la reconnaissance d’un droit au dialogue social avec la hiérarchie militaire. C’est une évolution nécessaire, qui doit cependant demeurer, selon nous, réfléchie et responsable, tant la libre disposition de la force armée répond à des impératifs particuliers.

Et puis il prévoit de créer, à titre expérimental, un service militaire volontaire tourné vers des jeunes âgés de dix-sept à vingt-cinq ans, pour une durée variable de six mois à un an. Ce dispositif est vraiment remarquable puisqu’il ambitionne d’accompagner ainsi de jeunes décrocheurs – dont certains rencontrent aujourd’hui de graves problèmes d’insertion dans le monde professionnel – sur le chemin de la socialisation et de l’emploi, en leur offrant une formation globale. Il s’agira d’abord d’une formation militaire au cours de laquelle ils apprendront pendant un mois, au sein de l’armée de terre, le goût de l’effort, du dépassement, et qui pourra être aussi l’occasion pour eux de porter assistance aux populations dans le cadre des missions de sécurité civile. De plus, la formation sera aussi citoyenne, passant par une remise à niveau scolaire, un apprentissage des valeurs de la République et des règles de vie en collectivité, ainsi que par la préparation au permis de conduire et l’enseignement du secourisme.

M. Nicolas Dhuicq. Vous voulez des internats !

Mme Gilda Hobert. Enfin, une formation professionnelle sera proposée et, le cas échéant, les volontaires stagiaires pourront effectuer des périodes de mise en situation professionnelle en entreprise. Ce service militaire volontaire présente donc plusieurs intérêts qui devraient pousser à le généraliser au-delà des deux années prévues pour son expérimentation parce qu’il est une solution originale et innovante pour l’insertion des jeunes, qu’il contribuera au renforcement de la cohésion nationale et à l’esprit de défense par une diffusion de la culture militaire, et qu’il apportera aux entreprises une ressource jeune ayant acquis les bases de la vie en collectivité et de l’insertion professionnelle.

Le groupe radical, républicain, démocrate et progressiste soutient ce projet de loi,…

M. Jean-Jacques Bridey. Bravo !

Mme Gilda Hobert. …car il donne à la France les moyens de mettre en œuvre un modèle d’armée ambitieux, apte à répondre au besoin de sécurisation du territoire national et à l’évolution des enjeux internationaux. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Candelier.

M. Jean-Jacques Bridey. Ne nous décevez pas !

M. Jean-Jacques Candelier. Les députés du Front de Gauche se sont déjà prononcés contre la révision de la loi de programmation budgétaire militaire. Notons que le groupe Les Républicains a adopté une position ambiguë à l’Assemblée nationale,…

M. Nicolas Dhuicq. Nous, nous sommes contre : il n’y a pas d’ambiguïté !

M. Jean-Jacques Candelier. …tandis que le Sénat, majoritairement à droite, a approuvé le texte – le consensus a finalement été trouvé, c’est une bonne chose.

Après dix ans de baisse du budget, 3,8 milliards d’euros supplémentaires seront attribués à la défense au cours des quatre prochaines années mais, hélas, la majeure partie, soit 2,5 milliards, est programmée pour après 2017, année de l’élection présidentielle et des législatives… C’est un peu tardif pour moi. Cet effort supplémentaire intervient parce que la politique d’austérité ne permet plus de faire fonctionner l’armée au quotidien.

Beaucoup trop d’équipements sont vétustes. L’état général des matériels se dégrade donc de manière accélérée en raison de leur ancienneté, mais aussi de leur utilisation intensive dans des zones climatiques éprouvantes. Les matériels nouveaux arrivent au compte-gouttes. L’entraînement des personnels comme la vie courante dans les unités font aussi les frais de l’austérité, et le niveau d’entraînement des unités s’effondre. En dépit du ralentissement de la déflation initialement programmée, les effectifs, déjà insuffisants, devraient encore diminuer de près de 7 000 militaires dans les quatre années à venir. Mais nous prenons acte que cette actualisation substitue des crédits budgétaires aux ressources exceptionnelles, dont le caractère était par définition aléatoire.

Une disposition intéressante figure dans le texte issu de la CMP. En effet, un amendement venu du Sénat permet d’ouvrir aux commissions parlementaires – permanentes, spéciales ou d’enquête – la procédure qui permet aux juridictions de demander la déclassification et la communication d’informations protégées au titre du secret de la défense nationale. Cette procédure prévoit qu’une telle demande entraîne la saisine de la Commission consultative du secret de la défense nationale. Cet accès aux documents « secret défense » sera utile pour que les parlementaires puissent enquêter, par exemple sur les circonstances entourant l’attentat du 8 mai 2002 à Karachi. Notre proposition de résolution demandant une telle enquête, déposée le 2 octobre 2012, est toujours valable pour faire la transparence sur cette affaire politique et financière impliquant l’État français !

Nous prenons acte également de l’abandon du dispositif de location-vente de matériels militaires sous la forme de sociétés de projet dont les fonds étaient censés remplacer des ressources exceptionnelles défaillantes. Ce montage financier étrange et complexe était trop hasardeux pour nos finances publiques, ne traduisait pas une vision à long terme du financement de nos équipements militaires et aurait pu affecter l’utilisation souveraine de nos matériels.

La grande nouveauté est le choix stratégique d’une présence visible et permanente de forces terrestres sur le territoire national. Cela a nécessité de porter les effectifs de la force opérationnelle terrestre à 77 000 hommes au lieu des 66 000 initialement prévus. Cette conception d’une protection recentrée sur le territoire national nous invite à réfléchir sur la doctrine d’emploi de nos armées à l’intérieur de nos frontières.… On peut douter de l’utilité d’un tel choix. Il faudrait offrir aux militaires, notamment ceux engagés dans l’opération Sentinelle, des conditions de vie décentes,…

M. Nicolas Dhuicq. Très juste !

M. Jean-Jacques Candelier. …leur permettant de tenir dans la durée et de ne pas se présenter fatigués, sans avoir pu parfaire leur entraînement, au moment de leur départ en opération extérieure.

M. Jean-François Lamour. C’est vrai.

M. Jean-Jacques Candelier. S’agissant des ANPM, les travaux parlementaires ont amélioré les droits des militaires par rapport au projet initial du Gouvernement. Mais là aussi, ce texte ne va pas assez loin. On peut s’attendre à l’ouverture d’autres contentieux qui aboutiront à ce que, un jour, les militaires aient le droit de se syndiquer, monsieur le ministre.

M. Gilbert Le Bris. Ce n’est pas demain la veille !

M. Jean-Jacques Candelier. Je rappelle que les juges ont estimé que la liberté des militaires pouvait faire l’objet de restrictions légitimes, mais pas au point d’interdire de manière pure et simple de constituer un syndicat ou d’y adhérer. Or, cette interdiction subsiste dans le texte.

Par ailleurs, l’expérimentation d’un service militaire volontaire, largement inspiré par le succès du service militaire adapté en outre-mer, semble une bonne mesure, il faudra être vigilant sur l’évaluation du dispositif et sur son financement.

Au-delà des aspects positifs que je viens d’évoquer, il n’en demeure pas moins que nous avons toujours de profonds désaccords avec certains choix majeurs de la loi de programmation militaire initiale, notamment en ce qui concerne la sanctuarisation politique et financière de l’arsenal nucléaire. En outre, je regrette que le Gouvernement ne respecte pas ses engagements sur l’amélioration de l’indemnisation des victimes des essais nucléaires. Les parlementaires sont impuissants à améliorer le dispositif, du fait de l’article 40. Le Premier ministre avait promis à des collègues d’outre-mer reçus à Matignon qu’il déposerait des amendements au Sénat… Or, il n’en a rien été !

J’insisterai pour finir sur la place de la France dans l’OTAN, monsieur le ministre. Cette organisation n’a plus lieu d’être. Elle nous coûte cher et se croit investie de la sécurité du monde en lieu et place de l’ONU. Elle s’est élargie en intégrant, contrairement aux engagements pris envers Gorbatchev, nombre de pays anciennement socialistes, et avance ainsi méthodiquement dans un processus d’encerclement de la Russie en multipliant les bases militaires Étasuniennes dans ces pays. Cette politique ouvertement agressive s’est accompagnée de l’installation d’un bouclier de missiles anti-missiles à proximité de la Russie, éventuellement destiné à permettre une première frappe nucléaire sur ce pays en stérilisant ou en limitant de façon drastique ses possibilités de réplique. Le gouvernement américain, partisan d’une doctrine militaire incluant la guerre préventive, y compris par l’usage de l’arme nucléaire, est doté de plus de 700 bases militaires réparties sur tout le globe. Les États-Unis sont décidés à combattre la menace terroriste mais sans la volonté d’en rechercher les causes, ce qui conduit l’OTAN, et donc la France, à participer, dans un chaos organisé, à une guerre permanente au mépris de nos intérêts et de notre propre sécurité.

M. Philippe Meunier. Ça, c’est vrai !

M. Jean-Jacques Candelier. De la Yougoslavie à l’Irak, de la Syrie à la Libye, la France use son potentiel militaire et son crédit diplomatique, et oublie les valeurs de son peuple au profit d’une politique définie à Washington.

M. Jean-Jacques Bridey. C’est scandaleux de dire cela !

M. Jean-Jacques Candelier. En réalité, les États-Unis mènent, à travers l’OTAN, une politique de guerre généralisée qui ne saurait demeurer plus longtemps celle de notre nation. Il est grand temps que la France recouvre la souveraineté de ses décisions et la liberté de choisir ses partenaires en conformité avec sa philosophie et les intérêts du peuple français. Il est tout à fait possible et souhaitable que la France renonce à son appartenance au traité de l’Atlantique Nord et retire ses armées du commandement intégré.

Au nom des députés du Front de gauche, je voterai une dernière fois contre ce projet de loi. Je ne change pas d’avis. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. Christophe Léonard.

M. Christophe Léonard. Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la présidente de la commission de la défense et des forces armées, chers collègues, savoir où l’on va est une chose, savoir d’où l’on vient en est une autre. Ce préalable est indispensable lorsqu’il s’agit de garantir à notre patrie la puissance militaire indissociable de toute puissance diplomatique et économique.

Nous ne pouvons pas être dans le monde des Bisounours quand la France et sa politique de défense sont en débat. Et c’est bien parce que nous sommes des gens sérieux dans cet hémicycle qu’il n’est pas inutile, et même qu’il est salutaire de savoir tirer collectivement les enseignements des échecs passés, et plus particulièrement ceux des lois de programmation militaire pour les années 2002 à 2008 et pour les années 2008 à 2014. (Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains.)

En 2004, notre armée de terre souffrait en effet d’un sous-effectif de l’ordre d’une brigade, soit 6 000 équivalents temps plein, faute des crédits de rémunération nécessaires. Au cours de la période 2009-2012 on notait, comme l’a souligné la Cour des comptes, une absence de maîtrise budgétaire s’agissant tant de la non-réalisation des recettes exceptionnelles que de l’augmentation de la masse salariale pour un total de 2 milliards d’euros. Parallèlement, la dette publique française doublait entre 2002 et 2012, passant de 930 à 1 860 milliards d’euros, c’est-à-dire de 60 % à 90 % du PIB. (Mêmes mouvements.)

M. Jean-Jacques Bridey. Eh oui ! À qui la faute ?

M. Christophe Léonard. Rappelons encore les 54 000 suppressions de postes prévus par la loi de programmation militaire pour les années 2008 à 2014 et les milliers d’erreurs dans le versement des soldes de nos soldats à cause du logiciel de paye Louvois (Mêmes mouvements) – et j’en oublie, chers collègues de l’opposition !

Dans ce contexte, la loi de programmation militaire pour les années 2014 à 2019 du 18 décembre 2013 a su, avec responsabilité, fixer le cap d’un modèle d’armées cohérent et opérationnel, conformément aux réflexions du Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale de 2013. Toutefois, cette programmation initiale était susceptible de s’adapter aux menaces extérieures et intérieures ; son article 6 le prévoyait d’ailleurs expressément.

C’est pourquoi, au lendemain des attentats terroristes de ce début d’année, lorsque le Président de la République a ordonné le déploiement de nos soldats sur le territoire national dans le cadre de l’opération Sentinelle, l’actualisation de la programmation militaire pour les années 2015 à 2019 s’est imposée.

Ce projet de loi, qui, pour la première fois dans l’histoire, acte l’augmentation des crédits d’une loi de programmation militaire en cours d’exécution, prévoit notamment une augmentation du budget de la défense de 3,8 milliards d’euros pour la période 2015-2019, dont 2,8 milliards consacrés aux emplois, 500 millions à l’entretien programmé des matériels et 500 autres millions aux opérations d’armements, ainsi que la substitution pour 5 milliards d’euros de crédits budgétaires aux ressources exceptionnelles prévues par la loi de programmation militaire initiale, une déflation des effectifs militaires de 6 918 équivalents temps plein durant la période considérée au lieu des 25 668 initialement prévus, la mise en œuvre d’un nouveau contrat « protection » permettant le déploiement dans la durée de 7 000 hommes sur le territoire national – contingent pouvant être augmenté jusqu’à 10 000 hommes –, le renforcement par au moins 2 000 personnes des effectifs travaillant dans le domaine du renseignement et de la cyberdéfense, et l’expérimentation d’un service militaire volontaire.

Mais ce projet de loi, dans sa version définitive issue du travail de la commission mixte paritaire, est surtout l’expression du meilleur compromis possible entre le Gouvernement, l’Assemblée nationale et le Sénat. Le texte vise en effet à réaffirmer le rôle moteur de la France dans la construction de l’Europe de la défense, à souligner l’urgence de la mise en place d’un budget européen dédié à la politique de sécurité et de défense commune, à garantir par l’inscription dans la loi de clauses de sauvegarde financière notre trajectoire d’investissements militaires, comme le financement des opérations intérieures – dont le Président de la République a indiqué le 14 juillet qu’elles s’inscrivaient dans la durée –, et à approfondir les conditions de représentativité afin de permettre aux associations professionnelles nationales de militaires de siéger au sein du Conseil supérieur de la fonction militaire.

Reléguant l’obstruction inutilement polémique et caricaturale, dont nous venons d’avoir une triste illustration, des députés du groupe Les Républicains au rang de guéguerre picrocholine (Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains), les députés de la majorité et les sénateurs de la majorité comme de l’opposition ont su hier soir se rassembler derrière notre armée et les femmes et les hommes qui la composent pour adopter à une écrasante majorité le texte de la CMP ; ils sont en effet conscients que les Français nous regardent (Mêmes mouvements), que nos soldats nous attendent, et que personne ne comprendrait que l’on préfère la posture à l’intérêt supérieur de la nation.

En conséquence, les députés du groupe socialiste, républicain et citoyen voteront unanimement le texte de la commission mixte paritaire visant à actualiser la programmation militaire pour les années 2015 à 2019.

Au terme de cet examen, et en guise de conclusion, permettez-moi de saluer l’action du ministre de la défense, aux côtés de celle du Président de la République, chef de nos armées.

M. Philippe Meunier. Quelle audace !

M. Christophe Léonard. Ils ont la volonté commune de renforcer nos armées au service de la France et de son rayonnement dans un monde multipolaire, malheureusement chaque jour plus incertain qu’hier. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen et du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.)

M. le président. La parole est à M. Philippe Vitel, pour cinq minutes.

M. Philippe Vitel. Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la présidente de la commission, mes chers collègues, « nous sommes en guerre contre le terrorisme, une menace qu’il faudra combattre dans la durée. Nous ne pouvons pas perdre cette guerre, parce que c’est au fond une guerre de civilisation. C’est notre société, notre civilisation, nos valeurs que nous défendons. » Si nous préférons pour notre part parler de guerre de la barbarie contre la civilisation plutôt que de guerre de civilisation, nous partageons totalement l’inquiétant tableau qu’a dépeint le Premier ministre Manuel Valls le 28 juin dernier.

Mais quant à savoir si le présent projet de loi d’actualisation de la programmation militaire contient les réponses aux terribles menaces évoquées, et cela sur un temps long, je réponds, comme la quasi-totalité des députés Les Républicains : non. De même, nous avions dit non il y a dix-huit mois à un projet de loi de programmation militaire qui nous semblait mettre en grand danger notre outil de défense, à un moment où il était évident que les menaces contre notre patrie et, de manière plus globale, contre l’Occident étaient de plus en plus fortes.

Et elles ont été effectivement de plus en plus prégnantes, comme en témoigne l’inexorable développement de Daech, aujourd’hui à 350 kilomètres des côtes européennes. Il a cependant fallu attendre le choc des attentats de janvier pour que les consciences se réveillent. C’est en effet à ce moment-là qu’a éclaté comme une évidence la faiblesse du volet prioritaire de notre défense, qui permet d’assurer la protection de nos concitoyens sur le territoire national.

Monsieur le ministre, dans les moments tragiques que nous vivons, il est de votre responsabilité d’obtenir les moyens de répondre à la triple exigence de concevoir un modèle capable de pérenniser nos capacités à l’extérieur, de reprendre pied sur le territoire national et de participer efficacement à l’encadrement des jeunes citoyens.

Lors du vote sur le projet de loi de programmation militaire, en décembre 2013, nous avions dénoncé une enveloppe financière en totale inadéquation avec les objectifs stratégiques définis par le Livre blanc. Tous les spécialistes s’accordaient à dire qu’il manquait à l’appel entre 10 et 15 milliards d’euros. Aujourd’hui, compte tenu de l’intensité de nos engagements en opérations intérieures et extérieures et des milieux hostiles dans lesquels nos troupes évoluent, ces évaluations ont été revues à la hausse : on considère désormais qu’il manque quelque 3 milliards d’euros par an pour faire le compte, soit 18 milliards sur la durée de la loi de programmation militaire.

À l’époque, nous ne comprenions pas, monsieur le ministre, votre volonté de réduire encore davantage le format de nos armées, en ajoutant une déflation de 24 000 postes aux 54 000 suppressions déjà programmées.

Mme Patricia Adam, rapporteure. En revanche, les suppressions que vous, vous aviez programmées, vous les compreniez…

M. Philippe Vitel. Nous ne comprenions pas votre engouement pour les recettes exceptionnelles, donc aléatoires, dont le montant dépassait les 6 milliards d’euros. Nous ne comprenions pas non plus que la volonté commune sur tous les bancs de cet hémicycle de doter nos soldats, nos marins, nos aviateurs de moyens matériels que l’intensité et la répétition de leurs engagements exigeaient passe sous les fourches caudines de la maîtrise comptable froide et cynique de Bercy. Car au lieu de définir les besoins par les opérations, vous aviez adopté l’approche inverse : il fallait donner un contenu stratégique à un objectif de dépenses. Faire mieux avec moins est devenu un poison mortel ! Et si nous constatons que le présent projet d’actualisation semble aller dans le sens que nous souhaitions il y a dix-huit mois, il le fait bien timidement.

Non, ce texte ne répond ni aux enjeux, ni aux menaces actuelles ; il n’est pas au rendez-vous du nécessaire réarmement de notre pays. Il n’accorde qu’un bonus de 2 milliards d’euros à l’acquisition de nouveaux matériels, à l’entretien programmé des matériels et à leur remise en condition opérationnelle, alors que 20 % des véhicules utilisés en OPEX sont irréparables, les autres étant dans un état calamiteux du fait de leur intense utilisation dans les milieux les plus hostiles. Et encore : l’un des deux milliards résulte d’une embellie inattendue, du fait d’indices économiques particulièrement favorables. Non, monsieur le ministre, le compte n’y est pas !

Si la budgétisation pérenne des recettes exceptionnelles – lesquelles ne sont d’ailleurs pas au rendez-vous, comme nous l’avions prévu il y a dix-huit mois – est une bonne chose, il est bon de rappeler que sans ce sauvetage de dernière minute, nos armées auraient été en cessation de paiement le 30 juin. Quant à la limitation des déflations de personnels, elle n’est là encore que trop partielle. De plus, elle posera d’énormes problèmes de ressources humaines dans la marine et l’armée de l’air ; nous ne pourrons compter en 2019 que sur une armée de 261 161 professionnels, soit moins qu’en 1996, année où a été décidée, après la suspension de la conscription, la professionnalisation.

Monsieur le ministre, le temps n’est plus à l’approximation et au bricolage. Nos armées sont en guerre, et nos soldats, nos aviateurs et nos marins, à qui nous devons respect et attention, méritent un engagement de la nation à la hauteur des circonstances, ainsi qu’à la hauteur de l’engagement et des compétences des femmes et des hommes qui servent notre pays.

Je veux avoir une pensée pour les 102 de nos soldats qui, depuis 2003, sont tombés sur les théâtres de crise en Afghanistan, au Mali et en République Centrafricaine pour défendre nos libertés et notre drapeau ; une pensée aussi pour nos plus de 700 blessés, parfois lourdement handicapés pour le restant de leur vie, et que nous nous devons d’accompagner vers une reconversion et une réinsertion ô combien douloureuse et difficile. À ceux qui sont morts, à ceux qui ont souffert d’horribles blessures, comme à leurs camarades aujourd’hui au combat, et aussi à chacun de nos compatriotes, nous devons des choix avisés et courageux, et un engagement volontariste quant aux moyens budgétaires que nous devons y consacrer. Face à un ennemi qui n’a comme objectif que l’éradication de notre civilisation, nous ne devons lésiner sur rien : il y va de la survie de la patrie.

Ce texte, même si nous reconnaissons qu’il comporte quelques avancées utiles,…

M. Christophe Léonard. Ah ! Un éclair de lucidité !

M. Philippe Vitel. …reste bien en deçà des exigences du moment et ne permet pas le nécessaire réinvestissement dans notre défense qu’impose la spectaculaire montée des menaces intérieures et extérieures qui pèsent sur la France et sur l’Occident.

Pour toutes ces raisons, monsieur le ministre, les députés du groupe Les Républicains confirmeront à la fois leur vote de décembre 2013 et celui qu’ils ont exprimé en première lecture le 9 juin dernier :…

Mme Patricia Adam, rapporteure. Pas tous !

M. Philippe Vitel. …je rappelle en effet que le vote contre avait alors obtenu 91,23 % des suffrages dans nos rangs, les autres ayant pu s’abstenir, mais personne n’ayant voté en faveur du texte. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains.)

Mme Patricia Adam, rapporteure. Ce fut différent au Sénat !

M. Philippe Vitel. Nous sommes à l’Assemblée nationale. Nous sommes élus par le peuple, nous !

M. le président. La parole est à M. Joaquim Pueyo, pour cinq minutes.

M. Joaquim Pueyo. Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la rapporteure, chers collègues, ce texte est le fruit des débats et de l’accord d’une large majorité des députés et des sénateurs afin de permettre une mise en œuvre rapide de la loi de programmation militaire. Cette actualisation indique à nos soldats et à nos concitoyens que les dispositions nécessaires doivent être prises le plus rapidement possible si l’on veut répondre aux défis auxquels notre pays est confronté.

C’est pourquoi je tiens à féliciter les membres de la commission mixte paritaire, et à saluer l’action et le travail de la présidente de la commission de la défense nationale et des forces armées de l’Assemblée nationale, Mme Patricia Adam, et du président de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées du Sénat, M. Jean-Pierre Raffarin, qui ont permis ce compromis, que notre rapporteure vient de présenter avec précision.

En effet, les femmes et les hommes de nos armées sont plus que jamais mobilisés et sollicités pour faire face à des menaces multiples. Il était donc indispensable d’actualiser le texte que nous avions voté en 2013 pour tenir compte de l’évolution constante de l’environnement international.

Les missions de sécurisation du territoire national consécutives aux attaques terroristes du mois de janvier s’avèrent plus que jamais indispensables. Au même moment, nos soldats sont engagés sur de nombreux théâtres d’opérations : au Sahel, en Centrafrique, en Irak, nos troupes travaillent chaque jour à nous protéger. La sécurité de la France et la défense des intérêts de l’Europe se jouent aussi là-bas. Il était donc essentiel que nous envoyions un message fort aux femmes et aux hommes de nos armées, afin qu’ils sachent que les parlementaires français sont capables de se retrouver, au-delà des postures politiciennes – indignes de la nation que nous représentons –, sur des sujets aussi importants.

Dans ce contexte, trois points doivent être soulignés.

Le premier est bien sûr l’effort budgétaire consenti, puisqu’une majoration d’un montant de 3,8 milliards d’euros permettra de mobiliser plus de 162 milliards d’euros au cours de la période 2015-2019. Concernant le financement des opérations extérieures et intérieures, un compromis a pu être trouvé entre la position du Sénat et celle de l’Assemblée nationale – même si cette question fera probablement encore l’objet de débats lors des prochains arbitrages budgétaires.

Le deuxième point que je veux mettre en exergue est celui des ressources humaines. Le Gouvernement et les parlementaires souhaitent que les déflations prévues dans la loi initiale soient adaptées. Auparavant fixée à hauteur de 33 675 équivalents temps plein – ETP –, la déflation s’établira, pour la période 2014-2019, à 14 925 ETP. Là encore, il s’agit d’un effort budgétaire conséquent de la part du Gouvernement. Cela permettra notamment de doter la mission Sentinelle des effectifs nécessaires, c’est-à-dire la mobilisation de plus de 7 000 militaires.

Nous demandons beaucoup aux femmes et aux hommes de la défense nationale. Il était donc nécessaire de leur donner les marges de manœuvre aussi bien sur le plan des effectifs que sur celui des équipements. Ce texte d’ajustement prévoit 500 millions d’euros supplémentaires pour la régénération des matériels et 1,5 milliard pour les équipements critiques afin de répondre aux missions multiples auxquelles les forces françaises sont confrontées.

Le troisième point qu’il me paraît important de souligner est le renforcement du lien armée-nation, qui se traduit par un effort au bénéfice de la réserve opérationnelle et par la création du service militaire volontaire. Après la célébration du 14 juillet, où les Français ont manifesté leur attachement à nos armées et aux valeurs qu’elles véhiculent, nous nous devions de renforcer ces deux dispositifs qui répondent à une demande forte. Une fois encore, monsieur le ministre, vous avez répondu à nos sollicitations.

L’actualisation de la loi de programmation militaire prévoit de renforcer la réserve opérationnelle et de faire passer le nombre de réservistes de 28 000 à 40 000 pour répondre à une demande croissante. Le budget sera également renforcé avec 75 millions d’euros supplémentaires pour la période 2016-2019, de manière à traduire cette volonté par des actes.

Le Président de la République et vous-même avez également pris la décision d’expérimenter le service militaire volontaire, inspiré du service militaire adapté, véritable succès dans nos territoires d’outre-mer. Ce dispositif encadré par des militaires permettra de donner aux jeunes qui le souhaitent une chance de servir notre pays tout en se construisant un avenir professionnel.

Par conséquent, la loi de programmation militaire actualisée répond aux défis auxquels nous devons faire face et montre que nous savons adapter notre défense aux enjeux d’aujourd’hui et de demain.

Chacun le reconnaît ici : il est de l’intérêt de notre pays de faire front derrière nos soldats. Le devoir de la nation est également de veiller aux conditions dans lesquelles nos militaires exercent leurs missions, missions qui exigent des qualités professionnelles et psychologiques de premier plan.

Pour finir, je tiens à saluer l’action du ministre de la défense, Jean-Yves Le Drian, qui a respecté les engagements qu’il avait pris en première lecture.

M. Philippe Vitel. Ce n’est pas un ministre, c’est un comptable. Et ses sous, il préfère les donner à la Grèce !

M. Joaquim Pueyo. Contrairement à ce que vient de dire M. Meunier, notre ministre a fait les bonnes analyses, il a pris les bonnes décisions avec un sens aigu de l’intérêt de l’État, de la défense nationale et de tous les militaires, avec franchise et vérité. Je tenais à le souligner devant la représentation nationale. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen, du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

M. le président. La parole est à Mme Geneviève Gosselin-Fleury.

Mme Geneviève Gosselin-Fleury. Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la présidente de la commission de la défense, mes chers collègues, ce projet de loi vient traduire les engagements pris par le Président de la République lors du Conseil de défense du 29 avril dernier, au cours duquel les conséquences du niveau d’engagement exceptionnel de nos forces, tant à l’étranger que sur notre territoire national, ont été tirées.

Les deux assemblées, conscientes de la nécessité d’adapter notre outil militaire au nouveau contexte stratégique et sécuritaire français depuis les attentats de janvier dernier, sont parvenues à un accord, permettant ainsi à nos armées de s’adapter le plus rapidement possible afin d’assurer la protection de notre territoire. Ce projet de loi renforce les moyens alloués à la défense d’abord en termes budgétaires, avec une augmentation de 3,8 milliards d’euros entre 2016 et 2019, ensuite en termes d’effectifs, avec une moindre déflation portant sur 18 750 postes, enfin en termes de capacité, avec 1 milliard d’euros supplémentaire affecté à l’équipement des forces. Il est par ailleurs intéressant de noter que cette augmentation des ressources de la défense s’inscrit dans un mouvement européen plus général de hausse des budgets militaires constatée dans onze États de l’Union Européenne.

La réforme des ressources humaines se justifie tant par la nécessité de préserver notre défense nationale que par la préoccupation de maintenir nos capacités opérationnelles. L’opération Sentinelle, déclenchée au lendemain des attentats, a bouleversé le fonctionnement de l’armée de terre. Avec cette actualisation de la loi de programmation militaire, ses effectifs seront augmentés de 11 000 hommes qui participeront à toutes les activités opérationnelles terrestres. En juillet 2017, après une montée en force progressive, ses effectifs opérationnels atteindront 77 000 hommes.

Il convient néanmoins de rappeler que si la « manœuvre RH » proposée dans ce projet de loi constitue une sorte de ballon d’oxygène pour les armées, elle ne met pas pour autant un terme à l’effort d’optimisation du ministère de la défense prévu dans la loi de programmation militaire 2014-2019. C’est donc un grand défi auquel le ministère de la défense va devoir faire face, au titre d’une double « manœuvre RH » : constituer des forces de combat et, en parallèle, continuer les efforts d’optimisation et de modernisation déjà engagés.

Ce texte permet donc de dégager avec pragmatisme les ressources humaines, techniques et financières nécessaires à la protection du territoire national. Il adapte notre outil de défense pour répondre au défi sécuritaire auquel nous faisons face. Il fait également évoluer la représentation dans la fonction militaire avec les dispositions présentées au chapitre II, qui crée des associations professionnelles nationales de militaires, les APNM. Les discussions dans les deux assemblées ont sur ce point été marquées par des divergences, notamment quant à la possibilité pour les APNM de siéger aux conseils de la fonction militaire, comme cela avait été introduit par notre commission. Le Sénat a préféré pour sa part revenir au texte proposé par le Gouvernement, au motif qu’il fallait préalablement observer les conditions de l’intégration des APNM au Conseil supérieur de la fonction militaire avant d’envisager l’élargissement de leur participation aux autres instances de concertation. C’est donc cette position qui a été retenue en commission mixte paritaire. Comme il est indiqué à l’article 7 de ce projet, il me semble indispensable que ces associations représentent au moins les trois forces armées pour pouvoir siéger au Conseil supérieur de la fonction militaire, afin d’éviter toute forme de corporatisme.

Enfin, suite à l’adoption d’un amendement présenté par notre rapporteure, le Gouvernement devra présenter au Parlement, dix-huit mois après la publication de la loi, un rapport sur « la mise en œuvre de l’ensemble des dispositions relatives à la concertation et au dialogue social des militaires ». Cette mesure permettra de justifier les seuils de représentativité et de procéder, si nécessaire, à leur modification.

Mes chers collègues, ce projet de loi issu d’un compromis entre les deux assemblées permettra d’adapter la défense française aux évolutions du contexte stratégique et, ainsi, d’assurer la sécurité de la nation.(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen, du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

M. le président. La discussion générale est close.

Vote sur l’ensemble

M. le président. Je mets aux voix l’ensemble du projet de loi, compte tenu du texte de la commission mixte paritaire.

(L’ensemble du projet de loi est adopté.)

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.)

Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à vingt-deux heures cinquante-cinq, est reprise à vingt-trois heures.)

M. le président. La séance est reprise.

2

Actualisation du droit de l’outre-mer

Suite de la discussion d’un projet de loi

M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion, après engagement de la procédure accélérée, du projet de loi adopté par le Sénat relatif à l’actualisation du droit de l’outre-mer (nos 2910, 2949, 2941).

Discussion des articles (suite)

M. le président. Cet après-midi, l’Assemblée a commencé l’examen des articles du projet de loi, s’arrêtant à l’amendement n110 portant article additionnel après l’article 15.

Après l’article 15

M. le président. La parole est à M. Serge Letchimy, pour soutenir l’amendement n110.

M. Serge Letchimy. J’ignore le sort qui sera réservé à cet amendement, mais je souhaite qu’il contribue à la prise de conscience de la question de la jeunesse. Nous en avons discuté en commission : c’est une question essentielle en France mais plus encore en outre-mer, où 55 à 60 % des jeunes de moins de vingt-cinq ans sont en inactivité. Nous avons d’ailleurs évoqué cet après-midi le dispositif « Migration retour ».

Je considère qu’il est impératif de créer un conseil de la jeunesse. Cette instance peut être directement mise en place par la collectivité puisque, comme l’a indiqué Mme la rapporteure, elle relève de son organisation propre. Je propose cependant que l’on étudie la possibilité d’introduire, dans le cadre du conseil économique, social, environnemental, de la culture et de l’éducation – le CESECE, dont je rappelle qu’il résulte de la fusion de deux conseils et qu’il est par conséquent divisé en deux grandes sections, l’une économique et l’autre culturelle –, une section « politiques publiques de la jeunesse ». Ce serait un signe fort pour l’avenir, raison pour laquelle je soumets cet amendement à votre sagacité.

M. le président. La parole est à Mme Paola Zanetti, rapporteure de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République, pour donner l’avis de la commission.

Mme Paola Zanetti, rapporteure de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République. En effet, le conseil économique, social, environnemental, de la culture et de l’éducation comporte deux sections qui peuvent émettre des avis. Il ne me paraît pas nécessaire de créer d’autres sections, pour les jeunes ou – comme le propose un autre amendement – pour les personnes âgées. Pour améliorer la représentativité, la collectivité de Martinique disposera de toute latitude pour désigner directement des jeunes ou des représentants des jeunes, des personnes âgées ou des représentants des personnes âgées, au sein de l’une ou l’autre des deux sections.

Je vous le dis à titre d’information, des représentants des jeunes peuvent aussi siéger au sein des CESE de métropole. Je l’ai d’ailleurs été moi-même. Avis défavorable.

M. le président. La parole est à Mme la ministre des outre-mer, pour donner l’avis du Gouvernement.

Mme George Pau-Langevin, ministre des outre-mer. L’idée d’associer les jeunes au conseil économique, social, environnemental, de la culture et de l’éducation, placé auprès des assemblées délibérantes, est bonne. Nous avons tous le souci que la jeunesse trouve sa place, particulièrement en Martinique.

En revanche, il ne me semble pas utile de faire figurer une telle disposition dans un texte législatif. Puisqu’un conseil est déjà créé, il suffirait que, parmi les diverses personnalités nommées, l’on prenne garde de choisir des représentants d’associations de jeunesse et qu’une commission soit dédiée à la jeunesse. Beaucoup de structures se préoccupent ainsi d’avoir un conseil des jeunes.

Cet amendement relève d’une bonne idée mais il n’a pas sa place dans le texte. La collectivité de la Martinique pourra parfaitement constituer une commission dédiée à la jeunesse au sein de son conseil consultatif.

M. le président. La parole est à M. Serge Letchimy.

M. Serge Letchimy. Je retire mon amendement.

(L’amendement n110 est retiré.)

Article 15 bis A

M. le président. La parole est à Mme Paola Zanetti, rapporteure, pour soutenir l’amendement n69.

Mme Paola Zanetti, rapporteure. Il est rédactionnel.

(L’amendement n69, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

(L’article 15 bis A, amendé, est adopté.)

Article 15 bis

(L’article 15 bis est adopté.)

Après l’article 15 bis

M. le président. La parole est à M. Serge Letchimy, pour soutenir l’amendement n84.

M. Serge Letchimy. Le premier tour des élections à la collectivité unique aura lieu le 6 décembre et le deuxième tour le 13. Par conséquent, au 18 décembre de cette année seront installés l’assemblée et l’exécutif.

Or, lorsque nous avons mis en place la collectivité de Saint-Martin, nous avons réalisé les procédures administratives après les élections, ce qui a pris deux à trois mois.

Si nous prenons autant de temps pour remplir les formalités auprès de l’URSSAF, l’INSEE, la CNRACL, l’IRCANTEC, Pôle emploi, qui représentent autant de procédures obligatoires car il n’est pas possible de faire fonctionner une collectivité sans compte bancaire ni compte pour les salariés, la collectivité risque de ne pouvoir exécuter les dépenses au nom de l’ancienne collectivité entre le 18 et le 31 décembre, comme vous l’y autorisez par votre amendement.

Or, si les démarches administratives nous prennent trois mois, entre le 1er janvier et le 27 ou 28 février, la collectivité ne pourra pas fonctionner. Je considère qu’il faut donner pouvoir au président de la région et au président du département – en Martinique et en Guyane, ce sont deux hommes –, pour engager les procédures administratives – j’insiste sur le mot : il ne s’agit pas de politique – de sorte que la collectivité puisse commencer à fonctionner dès le 18 décembre. Il y va de la continuité du service public.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Paola Zanetti, rapporteure. Je vous invite à retirer votre amendement, monsieur le député, car il est satisfait. La transition est déjà organisée, à la fois par la loi du 27 juillet 2011 et l’ordonnance du 13 décembre 2012, notamment modifiée par l’article 15 sexies du projet de loi.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme George Pau-Langevin, ministre. Nous comprenons bien le souci de continuité qu’exprime M. Letchimy mais il est évident que, d’ores et déjà, le président du conseil régional et celui du conseil général ont compétence pour organiser la suite. C’est d’ailleurs ce qu’ils font. Ils préparent la création des collectivités uniques depuis de nombreux mois. Cet amendement n’apportera rien de plus d’autant plus que personne ne conteste la compétence des élus actuels pour préparer l’avènement de la nouvelle collectivité. Il me semble que cet amendement est satisfait.

M. le président. La parole est à M. Serge Letchimy.

M. Serge Letchimy. Madame la ministre, vous avez raison, et je considère que votre déclaration pourra faire œuvre de jurisprudence auprès de l’Assemblée. Vous nous dites en effet que ce que nous faisons pour la comptabilité, le budget, l’organisation administrative préalable, les compatibilités entre nomenclatures comptables nous donne aussi l’autorisation de faire une déclaration à l’IRCANTEC, à la Sécurité sociale, à l’URSSAF, pour la nouvelle collectivité. J’en prends acte et je retire l’amendement, qui est en effet satisfait.

(L’amendement n84 est retiré.)

Article 15 ter

(L’article 15 ter est adopté.)

Article 15 quater

(L’article 15 quater est adopté.)

Article 15 quinquies

M. le président. La parole est à Mme Paola Zanetti, rapporteure, pour soutenir l’amendement n73 rectifié.

Mme Paola Zanetti, rapporteure. L’article 15 quinquies complète les matières pour lesquelles l’assemblée de Guyane peut déléguer à son président l’exercice de certaines de ses attributions, dès sa première réunion. À l’inverse, l’exposé des motifs de l’amendement gouvernemental adopté au Sénat faisait valoir qu’une telle faculté était déjà offerte à la collectivité unique de Martinique par la loi du 27 juillet 2011. Cette explication justifiait que la Martinique soit tenue à l’écart du dispositif.

Or, les délégations prévues à l’article L. 7224-18, par lesquelles l’assemblée de Martinique pourra déléguer au président du comité exécutif le soin d’ester en justice, demeureront soumises au délai de prévenance de douze jours posé par l’article L. 7222-21, ce qui exclut leur adoption lors de la première réunion suivant leur renouvellement.

Cet amendement propose d’y remédier en donnant délégation au président pour représenter la collectivité en justice y compris lors de la première réunion d’installation.

(L’amendement n73 rectifié, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

(L’article 15 quinquies, amendé, est adopté.)

Article 15 sexies

(L’article 15 sexies est adopté.)

Article 15 septies

(L’article 15 septies est adopté.)

Article 15 octies

M. le président. La parole est à Mme la ministre, pour soutenir l’amendement n142.

Mme George Pau-Langevin, ministre. L’article 37 de la loi du 15 novembre 2013 a habilité le conseil régional de la Martinique à adapter et fixer des règles spécifiques à la Martinique en matière de transport intérieur de passagers et de marchandises terrestres et maritimes et à créer une autorité organisatrice de transport unique – AOTU.

L’article 15 octies de ce projet de loi autorise le conseil régional de la Martinique à créer cette AOTU sous la forme d’un établissement public sui generis, c’est-à-dire ne se rattachant pas à une catégorie d’établissement public déjà existante.

Cet amendement tend à préciser le champ de l’habilitation et à sécuriser ainsi la démarche du conseil régional, ce qui permettra de s’assurer que le conseil régional a toute latitude pour définir les conditions de fonctionnement du futur établissement public.

(L’amendement n142, accepté par la commission, est adopté.)

(L’article 15 octies, amendé, est adopté.)

Article 15 nonies

(L’article 15 nonies est adopté.)

Article 15 decies

(L’article 15 decies est adopté.)

Article 15 undecies

M. le président. La parole est à Mme Paola Zanetti, rapporteure, pour soutenir l’amendement n68.

Mme Paola Zanetti, rapporteure. Il est rédactionnel.

(L’amendement n68, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

(L’article 15 undecies, amendé, est adopté.)

Avant l’article 16 A

M. le président. La parole est à Mme la ministre, pour soutenir l’amendement n127.

Mme George Pau-Langevin, ministre. Cet amendement tend à modifier la rédaction du 4° de l’article L. 155-2 du code de la sécurité intérieure afin de mieux préciser la répartition des compétences entre l’État et la Polynésie française en matière de sécurité civile, en application de la loi organique du 27 février 2007 portant statut d’autonomie de la Polynésie française.

L’État ne dispose que d’une compétence d’attribution limitative en la matière tandis que la Polynésie française dispose d’une compétence générale, ce qui n’apparaît pas clairement dans les dispositions actuelles de l’article L.155-2 du code de la sécurité intérieure.

(L’amendement n127, accepté par la commission, est adopté.)

Article 16A

(L’article 16A est adopté.)

Article 16

(L’article 16 est adopté.)

Article 17

(L’article 17 est adopté.)

Article 18

M. le président. La parole est à M. Napole Polutélé, pour soutenir l’amendement n19.

M. Napole Polutélé. Cet article vise à autoriser l’ouverture de casinos sur les navires immatriculés à Wallis et Futuna. Sont concernés le poker et autres jeux de cartes, la roulette, le craps, le chemin de fer, mais aussi les machines à sous.

Cette mesure est attendue depuis longtemps et ouvre, pour le pavillon de Wallis et Futuna, des perspectives très intéressantes de développement.

Il faut, pour cela, que les conditions demandées soient réalistes et applicables sur un bateau, spécialement de petite taille, où l’espace est restreint comme c’est le cas des bateaux immatriculés au registre de Mata-Utu.

Sur ces navires de croisière, le moindre mètre carré utilisé est optimisé. Il convient donc d’adapter la législation en prenant en compte ces données. Tel est l’objet de cet amendement dans le strict respect des principes régissant ce loisir.

Le pavillon de Wallis et Futuna offrira à cette occasion à la France la possibilité d’occuper une place digne de son rang au sein des puissances maritimes dans un secteur en plein développement.

Il n’est pas raisonnable de bloquer toute une filière, de la construction navale à l’hôtellerie maritime, par des exigences administratives excessives.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Paola Zanetti, rapporteure. Avis défavorable. Par exception à l’interdiction générale de jeux de hasard, le législateur a accordé deux dérogations au profit des casinos installés à bord de certains navires de commerce transportant des passagers : pour les navires immatriculés au registre international français, et ceux inscrits au registre polynésien.

L’article 18 propose d’en ouvrir une troisième, au profit du registre de Wallis.

Ces dérogations sont toutefois assorties de conditions strictes. Les navires concernés doivent être immatriculés dans l’un des registres et assurer des croisières de plus de quarante-huit heures, en dehors des lignes régulières. Ces casinos sont ouverts à bord pour une durée limitée et doivent être situés dans des locaux spéciaux, distincts et séparés.

L’accès à ces locaux n’est possible qu’en zone internationale.

Vous proposez, cher collègue, d’assouplir cette condition au bénéfice des seuls navires immatriculés à Wallis. Même si je comprends l’intérêt économique de cet amendement, une telle souplesse affaiblirait la protection du joueur contre les excès du jeu, qui doit être assurée aussi bien à terre qu’en mer ou en ligne.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme George Pau-Langevin, ministre. Nous connaissons vos préoccupations, monsieur le député, pour développer le pavillon de Wallis. Je comprends les enjeux économiques et financiers pour Wallis et Futuna, mais il me semble que le texte contient déjà une avancée majeure, en ouvrant la possibilité d’installer des casinos à bord des navires de croisière enregistrés à Wallis et Futuna. L’idée de constituer des espaces polyvalents sur les navires se heurte à de réels obstacles.

Des locaux spéciaux, distincts et séparés, s’imposent pour des raisons d’ordre public et de sécurité : sécurité des passagers, d’abord, avec la nécessité en particulier d’empêcher l’accès des mineurs à ces locaux ; sécurité des armateurs ensuite, puisque la circulation importante de numéraire peut attiser les risques de piraterie. Chacun a à l’esprit la fragilité des navires de croisières et le souvenir de l’attaque dont a été victime la compagnie du Ponant en Somalie.

La réglementation en matière de police des jeux se justifie aussi par deux autres éléments : la sincérité des jeux, qui a des conséquences fiscales, et qui impose d’éviter les manipulations et les branchements de machines à sous en dehors des heures consacrées au jeu ; et des motifs de santé publique, la lutte contre l’addiction aux jeux étant un enjeu majeur.

Dès lors, la séparation des locaux est la seule réponse à l’impératif de leur sécurisation, qui impose l’utilisation continue de systèmes de vidéosurveillance et l’enregistrement du son et de l’image au-dessus de chaque table de jeux, de chaque pièce, de chaque entrée de salle de jeux. La mixité de l’ensemble des locaux du navire, induisant un accès libre aux jeux en tous lieux, serait incompatible avec l’ensemble de ces contraintes.

Si cet amendement était adopté, les exigences de sécurité et de contrôle propres aux locaux susceptibles d’accueillir les jeux de hasard sur les navires immatriculés au registre de Wallis-et-Futuna ne seraient plus garanties.

Il convient donc de trouver d’autres solutions, ce que la taille de ces navires devrait permettre. Je comprends vos motivations, mais ne peux qu’être défavorable à cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Napole Polutélé.

M. Napole Polutélé. J’entends bien l’argumentation de Mme la rapporteure et de Mme la ministre. L’article 18 ouvre la possibilité d’ouvrir des casinos embarqués sous le pavillon de Wallis-et-Futuna, mais vous appliquez à ces navires des restrictions qui concernent essentiellement les casinos à terre. Cela revient à les priver d’une option supplémentaire. Je retire cet amendement, au profit du n20.

(L’amendement n19 est retiré.)

M. le président. Vous gardez la parole, monsieur Polutélé, pour soutenir l’amendement n20.

M. Napole Polutélé. Il est défendu.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Paola Zanetti, rapporteure. Il s’agit d’un amendement de repli, pour lequel j’userai des mêmes arguments. Avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme George Pau-Langevin, ministre. Vous avez obtenu la possibilité d’ouvrir des casinos sur des navires, ce qui représente un avantage non négligeable pour Wallis-et-Futuna et une avancée significative consentie par le ministère de l’intérieur. Il convient de mettre en œuvre telle quelle la disposition prévue par l’article 18 : la taille de ces navires permet d’aménager des locaux spécifiques, dans l’intérêt de tous. Avis défavorable.

M. le président. La parole est à M. Napole Polutélé.

M. Napole Polutélé. Je retire l’amendement.

(L’amendement n20 est retiré.)

M. le président. La parole est à Mme Paola Zanetti, pour soutenir l’amendement n72.

Mme Paola Zanetti, rapporteure. Amendement de coordination.

(L’amendement n72, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

(L’article 18, amendé, est adopté.)

Article 19

M. le président. La parole est à Mme la ministre, pour soutenir l’amendement n126 rectifié.

Mme George Pau-Langevin, ministre. Cet amendement vise à retirer de la liste des articles du livre V du code de la sécurité intérieure applicables en Nouvelle-Calédonie l’article L. 514-1. En effet, cet article crée une commission consultative des polices municipales. Or c’est une compétence qui relève de la Nouvelle-Calédonie, à la fois au regard de la composition de cette commission et des sujets pour lesquels elle est compétente. Le présent amendement vise donc à rétablir le respect de la répartition des compétences entre la Nouvelle-Calédonie et l’État en matière de fonction publique communale.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Paola Zanetti, rapporteure. Cet amendement vise à corriger une erreur. Avis favorable.

(L’amendement n126 rectifié est adopté et l’article 19 est ainsi rédigé.)

Article 19 bis

(L’article 19 bis est adopté.)

Article 20

(L’article 20 est adopté.)

Article 20 bis

(L’article 20 bis est adopté.)

Après l’article 20 bis

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n89, portant article additionnel après l’article 20 bis. La parole est à M. Victorin Lurel, pour le soutenir.

M. Victorin Lurel. Nous en revenons aux casinos, un vrai sujet au moment où l’on nous demande d’être compétitifs et attractifs. Alors que nous disposons de deux casinos seulement en Guadeloupe, l’île d’Antigua, au nord, ne compte pas moins de mille casinos en ligne ! Et je ne parle pas des casinos de Sainte-Lucie, proche de la Martinique où ne sont implantés également que deux casinos. Notre collègue Gibbes peut également témoigner : à Saint-Martin, la partie française n’a pas le moindre casino alors que quinze casinos, dont je n’évoquerai pas les propriétaires, se trouvent dans la partie hollandaise !

L’aspiration française à la pureté, la lutte contre le blanchiment d’argent, qui est certes de bonne politique, font de l’installation d’un casino un parcours du combattant – pardonnez-moi l’expression.

Le présent amendement prévoit que les communes d’outre-mer pourront demander une autorisation d’implantation dans le cadre des schémas d’aménagement régionaux, ce qui est une procédure très encadrée. Un décret en Conseil d’État est nécessaire pour modifier un schéma d’aménagement régional. Pour le reste, le ministère de l’intérieur continuera d’exercer les mêmes contrôles et vérifications, mais les élus des régions d’outre-mer auront ainsi la possibilité de discuter des demandes de certaines communes soucieuses de leur attractivité.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Paola Zanetti, rapporteure. M. Lurel propose d’élargir, dans les collectivités de l’article 73 de la Constitution, la liste des communes où peut être autorisée l’implantation de casinos. Il existe deux casinos en Guadeloupe, et deux en Martinique. Même si les casinos en dur sont confrontés à des difficultés financières et à l’essor des jeux en ligne, il me semble prudent d’en rester là, compte tenu des enjeux d’ordre public et de prévention de l’addiction aux jeux. Avis défavorable.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme George Pau-Langevin, ministre. Je comprends le souhait de Victorin Lurel d’utiliser les casinos pour développer l’économie touristique des outre-mer, et notamment des Antilles. Mais la réglementation est stricte. L’offre est limitée pour des raisons d’ordre public, notamment la lutte contre le jeu addictif et les risques de blanchiment. La loi définit précisément des règles, qu’il paraît difficile d’assouplir sur une partie seulement du territoire national.

Je rappelle enfin que, s’il est vrai que la concurrence est importante dans les îles voisines, il n’y a pas de déséquilibre entre les DOM et l’Hexagone dans le rapport entre le nombre d’habitants et celui des casinos. Il existe encore des marges, à droit constant, pour l’ouverture de nouveaux casinos outre-mer. Les communes éligibles ne disposent pas toutes d’un casino, et la loi ne fixe pas de limites au nombre de casinos qu’elles peuvent compter. Il est possible de développer les casinos outre-mer, notamment en Guadeloupe, sans qu’il soit nécessaire de modifier la législation existante.

M. le président. La parole est à M. Victorin Lurel.

M. Victorin Lurel. J’entends les arguments de Mme la ministre. Il ne s’agit pas de dessaisir le ministère de l’intérieur de ses pouvoirs.

Nous avons tenté d’installer de nouveaux casinos en Guadeloupe, notamment à Bouillante. Mais les critères exigés – que la ville soit une station balnéaire, thermale ou climatique, qu’elle compte suffisamment d’hôtels, alors que leur nombre chez nous décroît, ou d’anneaux de marinas – ont rendu la chose impossible. Le numerus clausus, en quelque sorte, est atteint.

La décentralisation, c’est faire en sorte que le pouvoir soit le plus proche possible des électeurs. Nous sommes une république à organisation décentralisée, mais c’est Paris qui décide, en l’occurrence le ministère de l’intérieur, pour les régions. Cela me gêne.

J’avais interpellé l’ancien Premier ministre, M. Fillon, au moment de la loi sur les jeux en ligne : comment être à parité avec Antigua, Sainte-Lucie ou la partie néerlandaise de Saint-Martin ? Je ne suis pas joueur, je n’ai jamais mis les pieds dans un casino de ma vie, mais je sais quelles sont les contraintes de l’activité touristique !

Cet après-midi, nous avons précisément refusé de taxer l’addiction au jeu en augmentant la fiscalité de 2,5 points. Et pourtant, l’addiction est un mal qui flambe. Elle ne concerne pas seulement les casinos, mais les paris, au premier rang desquels le PMU, et les jeux en ligne.

Madame la ministre, je retire cet amendement. Mais le problème reste entier. C’est le secteur touristique qui est l’avantage compétitif et comparatif des outre-mer. Mais on ne nous donne pas les moyens de notre épanouissement !

(L’amendement n89 est retiré.)

Article 21

(L’article 21 est adopté.)

Après l’article 21

M. le président. La parole est à M. Philippe Gomes, pour soutenir l’amendement n13 portant article additionnel après l’article 21.

M. Philippe Gomes. Cet amendement vise à permettre l’installation d’un établissement public d’insertion de la défense – EPIDE – en Nouvelle-Calédonie, ce qui est une nécessité pour favoriser l’insertion des jeunes, dont une part se trouve en difficulté.

Par ailleurs, je voudrais appeler l’attention de la ministre sur l’article prévoyant de limiter le nombre d’armes. Les amendements que j’avais présentés ont été rejetés en commission, mais je souhaiterais obtenir du Gouvernement l’engagement qu’une large consultation sera menée sur ce sujet difficile. Un consensus politique a été trouvé. Comme je l’ai déjà indiqué, l’ensemble des institutions, des groupes politiques et des parlementaires de Nouvelle-Calédonie sont intervenus pour que cette disposition ne soit pas adoptée. Il faudrait organiser une concertation avec les institutions, les associations et les fédérations représentatives afin, autant que faire se peut, de parvenir à un consensus sur ce sujet difficile.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Paola Zanetti, rapporteure. Avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme George Pau-Langevin, ministre. Défavorable. Je partage l’avis de M. Gomes sur l’EPIDE, une structure qui permet d’encadrer des jeunes qui, parfois, manquent de repères. Mais les collectivités d’outre-mer bénéficient d’un dispositif plus satisfaisant encore, le service militaire adapté – SMA. Les EPIDE, créés en métropole, sont une forme atténuée du SMA. L’État, en voulant développer le SMA outre-mer pour augmenter le nombre de jeunes encadrés, met un bon outil à disposition des collectivités.

En revanche, les collectivités peuvent parfaitement créer des structures d’encadrement des jeunes. Il y a en effet un véritable travail à accomplir en matière de protection des jeunes en difficulté en Nouvelle-Calédonie. Nous avons prévu d’y travailler ensemble dans le cadre du contrat liant l’État à l’autorité territoriale.

Quoi qu’il en soit, nous ne pouvons pas nous engager concernant un centre EPIDE, car il s’agit d’un outil différent qui fut en quelque sorte la transposition en métropole de ce que nous faisions déjà très bien outre-mer grâce au SMA.

Quant aux armes, la question est désormais dépassée, mais j’ai toujours indiqué que nous étions prêts à organiser une très large concertation sur le sujet et je maintiens naturellement cet engagement.

(L’amendement n13 est retiré.)

Article 22

M. le président. La parole est à M. Daniel Gibbes, pour soutenir l’amendement n9.

M. Daniel Gibbes. Tout d’abord, madame la ministre, j’ai entendu à l’instant votre propos sur le SMA : je vous confirme que Saint-Martin attend également le sien avec impatience ! Et je suis d’accord avec vous quant à la formule adoptée.

L’objectif du présent amendement est de sécuriser les critères de dérogation à la législation européenne relative aux aérodromes à usage restreint, afin de l’adapter aux caractéristiques de l’aérodrome de Saint-Barthélemy.

Selon moi, l’ajout par le Gouvernement d’un article 22 bis au projet de loi ne résout en rien la situation particulière de l’aérodrome de cette collectivité d’outre-mer au statut de PTOM – pays et territoires d’outre-mer.

Le texte actuel prévoit que ces dérogations ne sont possibles que lorsque des conditions ou des nécessités opérationnelles sont imprévues et urgentes, et lorsqu’elles sont de durée limitée. Or, l’aéroport de Saint-Barthélemy est un aéroport à usage restreint qui bénéficie de dérogations pour rester ouvert à la circulation aérienne publique. Par conséquent, seuls certains types d’avions peuvent le fréquenter en bénéficiant eux aussi de dérogations en fonction de leurs performances.

L’agence européenne de la sécurité aérienne a fait adopter un texte dit « Air OPS » comportant plusieurs restrictions qui mettent en difficulté l’exploitation de certains types d’appareils tels que le C208, que le Président de la République et vous-même, madame la ministre, avez utilisé pour vous rendre à Saint-Barthélemy. Or, le C208 est en exploitation à Saint-Barthélemy depuis plus de quinze ans.

Un aéroport à usage restreint, selon nous, est dérogatoire en permanence par rapport au droit national. Ainsi, un commandant de bord ne peut pas s’y poser s’il n’a pas obtenu de qualification préalable.

D’autre part, compte tenu du fait que Saint-Barthélemy ne fait plus partie de l’Union européenne depuis le 1er janvier 2012, les directives et règlements européens qui relèvent des compétences de l’État peuvent être adaptés par le gouvernement français afin que l’autorité compétente – la DGAC, direction générale de l’aviation civile, dans le cas de Saint-Barthélemy – puisse délivrer des dérogation si, bien entendu, le niveau de sécurité n’est pas remis en cause.

Ainsi, cet amendement vise à assouplir les règles en supprimant les mots « imprévues et urgentes d’une durée limitée » au second alinéa de l’article L. 6732-3 du code des transports, ce qui rendrait la dérogation valable pour des périodes plus longues, en cohérence avec le statut de l’aéroport.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Paola Zanetti, rapporteure. Nous discutions encore tout à l’heure avec M. Gibbes de ce sujet extrêmement technique : l’adéquation des dérogations prévues par la réglementation européenne avec la situation particulière de l’aéroport de Saint-Barthélemy.

Les pays et territoires d’outre-mer français, dont Saint-Barthélemy, ne sont pas soumis de plein droit aux directives et règlements européens. Ainsi, le règlement européen du 20 février 2008 concernant les règles communes dans le domaine de l’aviation civile n’est applicable dans ces territoires qu’en vertu d’une disposition expresse. En l’état, l’article L. 6732-3 du code des transports prévoit l’application de ce règlement européen et permet d’y déroger « en cas de circonstances opérationnelles ou de nécessités opérationnelles imprévues et urgentes d’une durée limitée, pour autant que ces dérogations ne réduisent pas le niveau de sécurité ».

Les conditions ainsi posées sont inadaptées à la situation de l’aérodrome de Saint-Barthélemy, dont les contraintes opérationnelles sont liées à la topographie : la piste d’atterrissage, très courte, est enserrée entre la mer d’un côté et la montagne de l’autre.

Le Gouvernement a présenté au Sénat un amendement qui introduit un article 22 bis tendant à autoriser des dérogations pérennes dès lors que le niveau de protection n’est pas remis en cause. Cette initiative semble avoir satisfait l’amendement du sénateur Michel Magras, qui visait à étendre à Saint-Barthélemy les possibilités de dérogation à ce règlement. Votre amendement, monsieur le député, qui reprend celui de M. Magras, me paraît donc satisfait lui aussi.

Dès la promulgation de la loi, l’aéroport de Saint-Barthélemy pourra bénéficier d’une dérogation adaptée à sa situation. Je propose donc à M. Gibbes de bien vouloir retirer son amendement. J’aimerais également que Mme la ministre nous fasse part de l’expertise rendue par la DGAC sur la question qu’il a soulevée.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme George Pau-Langevin, ministre. Je partage l’avis de la commission. Je comprends la volonté du sénateur Magras et du député Gibbes de sécuriser au maximum l’arrivée à Saint-Barthélemy : nous savons tous qu’elle est quelque peu sportive ! Toutefois, nous avons déposé un amendement au Sénat qui, selon nous, répond à leur demande car il ouvre la possibilité, outre le « cas de circonstances opérationnelles ou de nécessités opérationnelles imprévues et urgentes d’une durée limitée », de déroger plus durablement aux règles fixées par les règlements européens en matière de sûreté et de sécurité aériennes lorsque le niveau de protection est équivalent au niveau de sécurité exigé par les règles européennes, sans qu’il soit nécessaire pour cela de justifier de circonstances imprévues ou urgentes – c’est le sens de l’alinéa 3. Selon nous, votre préoccupation est donc satisfaite.

M. le président. La parole est à M. Daniel Gibbes.

M. Daniel Gibbes. En effet, madame la rapporteure, madame la ministre, le sénateur Magras a déposé cet amendement et vous lui avez donné la même réponse. L’amendement du Gouvernement étant arrivé en séance, il n’a pas eu le temps de l’étudier. Depuis, nous avons eu le temps de nous rencontrer pour l’examiner, et vous m’avez apporté des garanties, par rapport à la DGAC notamment, sur le fait que cet aéroport puisse jouir de façon pérenne des dérogations nécessaires à son bon fonctionnement. Si ces garanties sont maintenues ce soir, je retire mon amendement.

(L’amendement n9 est retiré.)

(L’article 22 est adopté.)

Articles 22 bis A à 22 bis

(Les articles 22 bis A, 22 bis B et 22 bis sont successivement adoptés.)

Article 23

M. le président. Je suis saisi de deux amendements, nos 152 et 118, pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à Mme la ministre, pour soutenir l’amendement n152.

Mme George Pau-Langevin, ministre. La loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt du 13 octobre 2014 prévoit diverses dispositions visant à favoriser la mise en œuvre de contrôles dans le domaine de la pêche illicite. Dans le but de renforcer la lisibilité du droit applicable en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et à Wallis-et-Futuna en matière de lutte contre les activités illégales de pêche, le présent amendement vise à étendre les dispositions de cette loi dans ces trois collectivités.

M. le président. La parole est à Mme Maina Sage, pour soutenir l’amendement n118.

Mme Maina Sage. Il est satisfait, je le retire.

(L’amendement n118 est retiré.)

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n152 ?

Mme Paola Zanetti, rapporteure. Avis favorable. Je comprends que Mme Sage ait retiré son amendement, car celui du Gouvernement répond à sa préoccupation tout en levant certaines difficultés rédactionnelles.

(L’amendement n152 est adopté et l’article est ainsi rédigé.)

Après l’article 23

M. le président. Je suis saisi de plusieurs amendements portant article additionnel après l’article 23. La parole est à M. Serge Letchimy, pour soutenir le n111.

M. Serge Letchimy. J’aborde là une question que vous connaissez très bien, madame la ministre, et que tout l’outre-mer connaît, en particulier les pays de la Caraïbe – non seulement la Martinique, la Guadeloupe et Saint-Martin, mais aussi la Guyane : il s’agit des algues sargasses.

Ce phénomène extrêmement grave ne manque pas de surprendre : certains spécialistes estiment qu’il est lié au changement climatique, d’autres qu’il provient de la mer des Sargasses, d’autres encore qu’il trouve son origine du côté de l’Amérique du Sud. En tous les cas, il a pour conséquence d’inonder la Martinique, la Guadeloupe et la Guyane d’algues qui posent de véritables problèmes de santé et de très graves problèmes économiques. Les enfants sont malades, le matériel électronique est ruiné, les bâtiments et les maisons commencent à être affectés.

Certaines initiatives sont prises par les collectivités régionales de la Martinique et de la Guadeloupe pour enlever les algues, car, stockées en masse le long des côtes, elles posent de véritables problèmes fonctionnels. Or, il faut bien stocker quelque part ces produits extrêmement nocifs, pour lesquels les processus de réutilisation sont encore précaires et artisanaux. Le matériel de ramassage des algues et même les prévisions en la matière sont parfois obsolètes.

L’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie, l’ADEME, qui connaît très bien ce sujet, a décidé en lien avec l’État et avec les régions de Martinique et de Guadeloupe de lancer des appels à projets pour ramasser ces algues et surtout pour les traiter. Des très beaux projets de valorisation ont été déposés.

Pourtant, s’il existe des procédures très précises concernant les cyclones ou d’autres risques chimiques et technologiques, il n’y a aucune déclaration de catastrophe naturelle concernant les algues sargasses. Notre collègue Nestor Azerot l’avait demandé, mais il n’existe aucune procédure. D’autre part, il n’existe pas non plus de processus permettant d’assimiler ce phénomène à un risque naturel.

Mon amendement vise donc à ce qu’il puisse être couvert dans le cadre d’un plan de prévention des risques naturels – PPRN.

M. le président. Veuillez conclure, cher collègue.

M. Serge Letchimy. Oui, monsieur le président, mais c’est un sujet extrêmement important, que je vous invite à aller découvrir sur place !

Je sais, madame la ministre, l’observation que vous me faites quant aux conséquences de l’utilisation du PPRN, et il n’est pas question pour moi d’imposer une interdiction d’habiter ou de fonctionner. Je ne fais donc que vous proposer cette solution, mais il me semble que vos services en ont préparé une autre basée sur un processus de vigilance. Un tel processus n’existe pas aujourd’hui, pour un problème pourtant si grave.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Paola Zanetti, rapporteure. En effet, j’ai vu des photographies d’échouages d’algues sargasses : c’est très impressionnant. Pour autant, comme vous l’avez rappelé, monsieur le député, le PPRN n’est pas la bonne « entrée » pour traiter du problème, puisqu’il porte sur les contraintes de constructibilité liées à l’existence de risques naturels graves et permanents et qu’il entraînerait des conséquences extrêmement importantes pour vos communes.

Il me semble plus proportionné de traiter les échouages d’algues sargasses par un ramassage rapide que par des interdictions de construction. C’est pour cela que l’État a pris des mesures d’aide au ramassage assuré par les collectivités, dans l’attente des conclusions d’un rapport du Haut conseil de la santé publique sur les impacts sanitaires de ce phénomène. Je crois en effet savoir que l’État finance des « brigades vertes » et a débloqué des fonds de l’ADEME à hauteur de 1 million d’euros pour acquérir des engins de ramassage. L’avis de la commission est donc défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme George Pau-Langevin, ministre. Il est vrai que depuis près d’un an, les Antilles sont confrontées au phénomène nouveau et récurrent de l’échouage d’algues sargasses en quantités extrêmement importantes. Lors de mon déplacement à la Martinique, cette année, j’ai eu l’occasion de survoler l’île et de constater l’ampleur des dégâts.

Cela étant, il s’agit d’un phénomène complexe, qui va et qui vient : un échouage massif peut se produire un jour et les algues peuvent avoir disparu le lendemain.

Nous avons donc, avec la ministre de l’environnement, pris plusieurs mesures afin d’aider les collectivités qui sont chargées du ramassage. Nous participons financièrement à la constitution de brigades vertes afin de former et de payer les ramasseurs. Nous avions d’abord mis à disposition des jeunes du service militaire adapté, mais le ramassage ne saurait devenir leur travail, dans la mesure où il s’agit d’un phénomène récurrent. Bref, nous avons financé ces brigades vertes. Il faut désormais que les élus se chargent de la formation des jeunes qui y participent.

D’autre part, nous participons au financement de l’achat par les communes de matériel de ramassage sur les plages les plus touchées. Il nous faut reconnaître que ce phénomène, qui semblait ponctuel, est désormais récurrent et que nous devons nous organiser pour le combattre durablement. On nous a indiqué que le matériel de ramassage n’est pas toujours adapté ; il faut y remédier.

D’autre part, nous conduisons des études pour comprendre l’origine du phénomène : la mer des Sargasses se trouve au nord des Antilles, alors que les sargasses dont nous parlons viennent plutôt du Sud. Autrement dit, il s’agit d’un phénomène nouveau que nous ne parvenons pas encore à comprendre et qu’il faut analyser.

Enfin, il faut également décider quoi faire de ces algues lorsqu’elles s’échouent en grandes quantités. Certes, elles dégagent une odeur particulièrement désagréable, mais elles contiennent également des nutriments qui peuvent être utilisés soit en cosmétique, soit en agriculture. Il faut donc que nous affinions les recherches sur la manière de traiter ces algues une fois qu’elles sont ramassées.

Je suis d’accord avec vous, c’est une question importante, mais la solution qui consiste à réglementer l’utilisation des sols, voire à proposer des servitudes d’urbanisme ou des interdictions de construction sur la bande littorale ne nous semble correspondre ni aux difficultés ni aux habitudes en Martinique et aux Antilles. Je ne crois pas que ce soit la bonne réponse.

Enfin, l’état de catastrophe naturelle, que beaucoup nous demandent, s’il facilite l’indemnisation des personnes, ne permet pas d’obtenir des fonds supplémentaires. Nous avons approfondi la question mais sans voir en quoi cela serait une solution.

Le plan que nous avons engagé, financé en grande partie par l’ADEME, compte tenu du fait qu’il s’agit d’un phénomène extrêmement désagréable, nous permet d’avancer. Les autres solutions, qui peuvent paraître plus séduisantes, ne me semblent pas reposer sur des considérations juridiques solides.

M. le président. La parole est à M. Victorin Lurel.

M. Victorin Lurel. Je remercie Mme la ministre pour la qualité de sa réponse. Je peux comprendre que l’amendement de Serge Letchimy ne soit pas la bonne entrée, mais j’aimerais lui exprimer ma solidarité car lui et moi sommes confrontés à peu près à la même réalité.

Nos collègues ne se rendent pas compte de ce qu’est cette réalité. La Guadeloupe fait partie d’un archipel composé de Marie-Galante, Terre-de-Bas, Terre-de-Haut et La Désirade. Récemment la maire Marlène Miraculeux-Bourgeois était tellement désespérée qu’elle a menacé de monter au sommet d’une grue et de se jeter dans le vide. Emmanuel Duval, maire de Terre-de-Bas, a décidé de faire la grève de la faim. J’ai été obligé de sauter dans une barge avec des matériels de location pour aller dégager le port, ce qu’avait aussi fait le département, et dégager les plages. Il est impossible d’accoster ! C’est toute l’économie qui est paralysée, on ne peut rien faire, sans parler des nuisances olfactives et de l’éventuelle nocivité des algues !

On nous dit que nous pourrions peut-être en faire de l’engrais, du plastique, du charbon actif… Bref, la recherche n’est pas prête. Les études n’ont pas abouti, même avec l’aide des satellites et des avions.

Je remercie le Gouvernement des aides qu’il a déjà annoncées : 1,5 million d’euros et des emplois aidés pris en charge à 100 %. Pourtant, j’ose le dire, ce n’est pas suffisant.

J’ai moi-même été amené à mutualiser avec le préfet de région, et j’imagine que Serge Letchimy a fait de même, pour créer un fonds. Je contribue également à l’achat de matériels, mais ils ne sont pas adaptés. À Marie-Galante, par exemple, on nettoie les plages avec des cane loaders, des appareils utilisés pour lever la canne à sucre, ce qui détruit les plages et les fonds marins. Et toutes sortes de vendeurs viennent nous proposer des matériels expérimentaux… Bref, on veut nous voir régler le problème alors que les Bretons ont mis plus de trente ans pour mettre au point une filière de traitement des algues vertes !

Je demande aussi au Gouvernement d’expliquer aux gens qu’on ne peut pas déclarer l’état de catastrophe naturelle. Si nous, nous pouvons le comprendre, les opinions publiques, qui vivent douloureusement cette réalité, ne le comprennent pas. Il faut leur expliquer, peut-être en allant plus loin que sont allées les ministres de l’écologie et des outre-mer. C’est une urgence. Même les États-Unis, le « géant américain », n’ont pas su régler le problème. Peut-être faut-il donner une explication, engager plus de moyens, accélérer la recherche et trouver les solutions appropriées, et peut-être aussi des solutions juridiques.

M. le président. La parole est à M. Daniel Gibbes.

M. Daniel Gibbes. Je me joins à Victorin Lurel et Serge Letchimy, car les algues sargasses représentent une véritable problématique dans nos îles. Si c’est vrai pour la Martinique et la Guadeloupe, qui sont deux destinations touristiques, imaginez ce que cela peut représenter pour Saint-Martin et Saint-Barthélemy, qui vivent à 90 % du tourisme !

Je me réjouis d’apprendre que des fonds ont été débloqués pour ces deux territoires. Nous n’en bénéficions pas encore mais je pense, madame la ministre, qu’il s’agit d’un oubli que vous allez réparer rapidement.

Je confirme que, pour nos destinations, les algues sargasses sont devenues une problématique qu’il devient de plus en plus urgent de régler. C’est pourquoi je m’associe à cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Serge Letchimy.

M. Serge Letchimy. Madame la ministre, je tiens à exprimer clairement ma désapprobation. Je suis d’accord avec vous sur la porte d’entrée : classer la présence des algues dans les PPRN poserait des problèmes. J’en ai d’ailleurs discuté avec vos services, qui devaient préparer un amendement du Gouvernement sur le sujet. Je ne vois pas d’amendement du Gouvernement, ce qui veut dire que vos services n’ont pas tenu parole.

Très honnêtement, les deux situations qui viennent d’être décrites sont en deçà de la réalité. Il y a quelque temps, il y a eu des algues vertes en France : la procédure de catastrophe naturelle a été enclenchée, ce qui a permis de régler des problèmes d’indemnisation et de protéger les activités économiques.

À la Martinique, aujourd’hui, plusieurs hôtels ont fermé, de nombreux touristes sont déportés à différents endroits, des pêcheurs ne peuvent plus travailler, des activités économiques cessent, en particulier les restaurants situés le long des côtes, parce que les réfrigérateurs, les ordinateurs ne fonctionnent plus. On parle de gêne olfactive, comme s’il s’agissait juste d’une petite odeur. Mais ce n’est pas une petite odeur, c’est une odeur qui génère des maladies. Et cela fait quatre ans que ça dure, pas un !

Certes, l’État n’en porte pas la responsabilité. Et puisqu’il faut parler d’argent, l’État en verse. Mais la collectivité que je gère a dépensé 1,5 million d’euros et participe au financement de projets qui n’aboutiront que dans cinq ou six ans. Car avant de faire fonctionner une usine de retraitement de plastique, il faudra bien cinq ans ! Et pendant ce temps, que fait-on des sargasses ?

J’ouvre une porte au Gouvernement car c’est une question qui devient éminemment politique. Lors de sa visite en Martinique, une représentante du groupe de M. Gibbes, Mme Kosciusko-Morizet, a clairement condamné le Gouvernement en disant que c’était une situation anormale. Bien sûr, nous l’avons contrée, mais il n’en demeure pas moins que le problème est devenu éminemment politique et que nous allons vers une catastrophe économique. Nous avions des sargasses tous les dix ans, maintenant nous en avons chaque année.

M. Victorin Lurel. Chaque semaine !

M. Serge Letchimy. Je vous invite à regarder les photos du phénomène, vous verrez que la situation est grave. Nous sommes en plein dedans, essayant de nous débrouiller, alors ne me répondez pas que l’État va apporter 100 000 ou 200 000 euros ! L’an dernier, j’ai dépensé 400 000 euros pour cofinancer le ramassage à la main par des jeunes. J’y ai moi-même participé il y a quatre ans.

Je considère qu’une mobilisation est nécessaire. Je préfère que vous me répondiez que cet amendement n’est pas acceptable parce la porte d’entrée n’est pas la bonne, et d’ailleurs je le retire, mais en dehors du droit il y a une décision éminemment politique à prendre.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme George Pau-Langevin, ministre. Ce n’est pas la peine de s’énerver ainsi, monsieur le député. Nous sommes face à un phénomène naturel extrêmement désagréable pour vous, mais ce n’est pas le Gouvernement qui fait venir les sargasses ! C’est un phénomène nouveau que personne ne sait analyser, dont personne ne sait d’où il vient. Je ne vois pas comment, seuls, avec nos petits bras, nous trouverions le moyen de le régler.

Je vous ai indiqué qu’avec Mme Ségolène Royal, nous avions commencé à aider les communes pour le ramassage des algues et à étudier le phénomène, pour comprendre notamment d’où il vient. Car avant de régler les problèmes, il faut d’abord les analyser.

Nous avons engagé des moyens pour aider les communes à régler ce problème. Je suis prête à réexaminer le dossier et à intensifier notre aide, mais je n’admets pas que l’on reproche au Gouvernement de mettre lui-même le tourisme de la Martinique dans une situation difficile.

Par ailleurs, monsieur le député, vous qui êtes très engagé dans la zone, il me semble que s’il y a un sujet sur lequel nous devons travailler avec les autres États de la Caraïbe, c’est bien celui des sargasses ! Car si les algues arrivent sur les côtes de la Martinique et de la Guadeloupe, elles arrivent aussi dans les autres îles. Il me semble que nous devons partager notre analyse et notre explication du phénomène ainsi que les différents traitements possibles avec les pays voisins.

Ensuite, les représentants du ministère de l’intérieur, avec qui j’ai discuté du problème à plusieurs reprises, considèrent qu’il ne relève pas de la catégorie des catastrophes naturelles. Les personnes que nous avons rencontrées sur place nous disent, par exemple, que depuis l’arrivée des sargasses leur réfrigérateur a noirci ou que leurs bijoux sont abîmés. Mais le problème est qu’il n’existe aucune causalité entre les dommages allégués et l’arrivée des sargasses, précisément parce que c’est un phénomène nouveau et que les uns et les autres sommes dans l’incapacité d’expliquer ce qui se passe.

D’ailleurs, Mme Kosciusko-Morizet, qui est venue sur place, a dit que c’était scandaleux et que le Gouvernement devait faire quelque chose, mais pour l’instant nous ne l’avons pas entendue exprimer la moindre idée pour nous expliquer ce que nous devrions faire !

M. Victorin Lurel. C’est exact !

Mme George Pau-Langevin, ministre. Je veux bien y travailler, je veux bien, avec les communautés de communes qui ont commencé à s’impliquer, essayer de régler le problème, mais je veux vous dire que lorsque j’ai effectué mon premier voyage à la Martinique en tant que ministre, il y a un an, personne ne m’a parlé de sargasses. Tout le monde pensait que ce n’était pas un phénomène durable. Aujourd’hui, nous avons compris que nous devions nous organiser dans la durée, mais nous n’y arriverons pas en nous rejetant les uns sur les autres la responsabilité de la crise du tourisme.

Nous devons aborder le problème tranquillement. Nous sommes déterminés à aider vos territoires. Nous avons compris le drame que représente l’invasion des sargasses pour le tourisme, mais, encore une fois, lorsque des catastrophes naturelles ou des événements comme celui-là surviennent, il faut travailler, retrousser ses manches pour y faire face, mais nous n’arriverons à rien si certains partent du principe qu’ils sont maltraités parce que tout cela se passe outre-mer.

M. Serge Letchimy. Ce n’est pas du tout ma conception !

M. le président. Je crois avoir compris, monsieur Letchimy, que l’amendement n111 était retiré.

M. Serge Letchimy. En effet.

(L’amendement n111 est retiré.)

M. le président. La parole est à Mme Maina Sage, pour soutenir l’amendement n117.

Mme Maina Sage. C’est un amendement que j’avais déposé en commission et qui permet de compléter la procédure d’assermentation pour les agents du Service du développement rural et les agents de la santé. Ceux-ci doivent être désignés, en Polynésie, non pas par le tribunal de grande instance mais par le tribunal de première instance.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Paola Zanetti, rapporteure. Nous avons effectivement eu ce débat en commission et je reprendrai malheureusement le même argument. Cet amendement, s’il part d’une bonne intention, pose problème car il prévoit une extension partielle de l’article L. 206-1 du code rural et de la pêche maritime en omettant cependant de prévoir une voie de recours contre l’ordonnance du juge des libertés et de la détention. Avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme George Pau-Langevin, ministre. Actuellement, les agents locaux ne disposent pas de la faculté de procéder à des visites de locaux professionnels en vue de rechercher et constater les infractions dans les domaines prévus par l’article L. 205-1 du code rural et de la pêche maritime. L’article L. 205-5, qui donne la possibilité à ces agents de visiter tous les lieux dont l’accès est autorisé au public, n’est pas applicable en Polynésie française.

L’article L. 206-1 du même code institue en métropole une procédure de recours au juge des libertés et de la détention en cas d’obstruction à l’accès à ces locaux.

En vertu de l’article 26 bis A du présent projet de loi, le Gouvernement sera habilité à adopter toute mesure relevant du domaine de la loi visant à étendre et à adapter, dans les collectivités régies par l’article 74 de la Constitution et en Nouvelle-Calédonie, les dispositions permettant aux agents publics de rechercher et de constater par procès-verbal certaines infractions aux réglementations édictées localement, notamment en matière d’environnement, de chasse, de pêche, d’urbanisme, de stationnement payant, de santé ou de salubrité publique.

Dans le cadre de cette habilitation, le Gouvernement donnera aux agents locaux la faculté de visiter les locaux professionnels et encadrera la procédure de recours au juge des libertés et de la détention en cas d’obstruction à la mise en œuvre de cette faculté. Moyennant ces dispositions, je demande le retrait de l’amendement.

M. le président. Acceptez-vous de le retirer, madame Sage ?

Mme Maina Sage. Je le retire.

(L’amendement n117 est retiré.)

M. le président. La parole est à M. Philippe Gomes, pour soutenir l’amendement n14.

M. Philippe Gomes. C’est un amendement d’appel qui a pour but d’inciter le Gouvernement à déposer lui-même un amendement visant à l’habiliter à actualiser par ordonnance la partie législative du code pénal applicable en Nouvelle-Calédonie.

L’ordonnance de 1996 a étendu le code pénal à la Nouvelle-Calédonie, ainsi qu’aux autres territoires d’outre-mer. Depuis lors, un certain nombre de lois ont été votées sans être étendues à la Nouvelle-Calédonie. Cet amendement d’appel vise à réparer ce préjudice.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Paola Zanetti, rapporteure. Je prie notre collègue de bien vouloir retirer son amendement, puisque c’était un amendement d’appel auquel le Gouvernement va répondre par l’amendement n137, deuxième rectification qu’il a déposé après l’article 26 bis.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme George Pau-Langevin, ministre. Même avis : l’amendement est satisfait.

M. le président. Maintenez-vous votre amendement, monsieur Gomes ?

M. Philippe Gomes. Je le retire, monsieur le président.

(L’amendement n14 est retiré.)

Article 23 bis

M. le président. La parole est à Mme Paola Zanetti, pour soutenir l’amendement n56.

Mme Paola Zanetti, rapporteure. Amendement de précision.

(L’amendement n56, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

(L’article 23 bis, amendé, est adopté.)

Articles 23 ter à 24

(L’article 23 ter est adopté.)

(L’article 23 quater est adopté.)

(L’article 24 est adopté.)

Après l’article 24

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n15 portant article additionnel après l’article 24, qui fait l’objet d’un sous-amendement n155 du Gouvernement.

La parole est à M. Philippe Gomes, pour soutenir l’amendement.

M. Philippe Gomes. Il s’agit de permettre l’homologation de peines d’emprisonnement qui ont été adoptées par le congrès de la Nouvelle-Calédonie ou la province Sud, qui nécessitent comme chacun le sait une homologation par le Parlement pour entrer en vigueur.

M. le président. La parole est à Mme la ministre, pour soutenir le sous-amendement n155 et donner l’avis du Gouvernement sur l’amendement.

Mme George Pau-Langevin, ministre. Le Gouvernement est favorable à l’homologation des peines d’emprisonnement prévues par les lois du pays mentionnées dans l’amendement, sous réserve de la suppression de la référence aux articles 416-6 et 424-9 du code de l’environnement de la province Sud. En effet, l’article 416-6 ne vise aucune peine, et la peine envisagée à l’article 424-9 est supérieure à la peine analogue prévue par l’article 173-4 du code de l’environnement. Aussi le sous-amendement précise-t-il que les dispositions des articles 416-6 et 424-9 du code de l’environnement de la province Sud ne peuvent faire l’objet d’une homologation : nous proposons par conséquent de supprimer la référence à ces articles des peines homologuées.

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur l’amendement et le sous-amendement ?

Mme Paola Zanetti, rapporteure. La commission est favorable à l’amendement, sous réserve de l’adoption du sous-amendement du Gouvernement.

(Le sous-amendement n155 est adopté.)

(L’amendement n15, sous-amendé, est adopté.)

Article 24 bis A

M. le président. La parole est à Mme la ministre, pour soutenir l’amendement n131.

Mme George Pau-Langevin, ministre. L’article 24 bis A tire les conséquences de la décision du Conseil constitutionnel n2014-3 du 11 septembre 2014 sur la prescription des créances sur les personnes publiques en Polynésie française. Par cette décision, le Conseil constitutionnel a en effet jugé qu’en étendant la loi de 1968 à la Polynésie française, le législateur était intervenu dans une matière ressortissant à la compétence de la Polynésie française.

Si l’article ne pose pas de difficulté sur le fond, il nécessite sur la forme quelques modifications rédactionnelles. Une réserve importante s’attache en effet au 2° du III : le terme « sans préjudice » laisse penser que les modifications de la loi de 1968 qui seraient prises par les autorités locales compétentes seraient sans incidence sur l’application des dispositions de la loi. Or les dispositions législatives intervenues dans le champ de compétence de la Polynésie française demeurent applicables tant qu’elles n’ont pas été modifiées ou abrogées par la Polynésie française, selon l’article 12 de la loi organique du 27 février 2004 portant statut d’autonomie de la Polynésie française, afin de ne pas créer de vide juridique. En conséquence, la Polynésie française peut d’ores et déjà modifier ou abroger les règles édictées par l’État en matière de prescription des créances la concernant ou relatives à ses établissements publics.

(L’amendement n131, accepté par la commission, est adopté et les amendements n57 et 58 tombent.)

(L’article 24 bis A, amendé, est adopté.)

Article 24 bis B

M. le président. La parole est à Mme la ministre, pour soutenir l’amendement n128.

Mme George Pau-Langevin, ministre. Cet amendement vise à restaurer le champ de compétence de la Polynésie française et de la Nouvelle-Calédonie en matière de procédures administratives non contentieuses. En effet, les dispositions législatives ou réglementaires relatives aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations de l’État, les communes et leurs établissements publics sont applicables de plein droit en Polynésie française et en Nouvelle-Calédonie. En revanche, ces collectivités sont seules compétentes pour édicter les règles encadrant leurs relations avec le public. Ainsi, l’extension à la Nouvelle-Calédonie des dispositions de l’ordonnance du 8 décembre 2005 était erronée.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Paola Zanetti, rapporteure. Favorable.

M. le président. La parole est à M. Philippe Gomes.

M. Philippe Gomes. Un débat a déjà eu lieu sur le sujet ; il avait été tranché d’une autre manière. Je prends acte de la position juridique qui est aujourd’hui exprimée par le Gouvernement sur le sujet.

(L’amendement n128 est adopté et l’article est ainsi rédigé.)

Articles 24 bis à 24 quinquies

(Les articles 24 bis, 24 ter A, 24 ter, 24 quater et 24 quinquies sont successivement adoptés.)

Après l’article 24 quinquies

M. le président. La parole est à M. Gabriel Serville, pour soutenir l’amendement n113 portant article additionnel après l’article 24 quinquies.

M. Gabriel Serville. Cet amendement rétablit l’article L. 4436-4 du code des collectivités territoriales et le modifie de façon à instaurer une obligation de saisine par la future collectivité de Guyane du Conseil consultatif des populations amérindiennes et bushinengués pour avis sur tout projet ou proposition de délibération de la collectivité ayant des conséquences sur leur cadre de vie. Il a pour objectif une meilleure prise en considération des avis de ces populations évoluant dans un environnement fragilisé, qui seront directement concernées par les délibérations de la future collectivité de Guyane.

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur cet amendement ?

Mme Paola Zanetti, rapporteure. J’invite M. Serville à retirer cet amendement. En effet, les dispositions dont il est question n’ont pas été abrogées par la loi du 27 juillet 2011 : elles continuent de s’appliquer jusqu’à la constitution de la collectivité unique de Guyane, puis les dispositions de la présente loi viendront s’y substituer. À défaut de retrait, l’avis de la commission serait donc défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme George Pau-Langevin, ministre. Compte tenu de la modification qui interviendra au 1er janvier 2016, le Conseil consultatif pourra mieux fonctionner. Néanmoins, nous sommes très attentifs au problème que vous soulevez. Je me suis rendue sur place pour rencontrer ces populations bushinengués et amérindiennes, et je suis consciente qu’il y a là un vrai sujet. Comme vous le savez, le Gouvernement a confié une mission à deux parlementaires, votre collègue Marie-Anne Chapdelaine et la sénatrice Aline Archimbaud, qu’il a chargées de lui faire des propositions en matière de lutte contre la surmortalité par suicide dans ces populations et d’amélioration de leur situation sur le plan scolaire et sur celui de la santé. Nous avons confié au professeur Jehel, basé à la Martinique, le soin de faire également des propositions en matière de santé.

Nous sommes donc très sensibles à la question. J’attends beaucoup des propositions qui seront faites par les deux parlementaires en mission. Nous pensons en effet que c’est en renforçant les pouvoirs du Conseil consultatif et en lui donnant les moyens de fonctionner de manière plus autonome que nous parviendrons à améliorer la situation.

Soyez donc assuré que même si je ne donne pas un avis favorable à votre amendement, monsieur Serville, nous suivons de très près le sujet. Nous savons qu’il y a des situations humaines insupportables, notamment chez les jeunes, qu’il nous faut impérativement traiter.

M. le président. La parole est à M. Gabriel Serville.

M. Gabriel Serville. Je constate que Mme la ministre maîtrise parfaitement le sujet. J’espère que la mission parlementaire ne se cantonnera pas à des constats et qu’il y aura une étroite corrélation entre ce qui sera décidé et les conditions dans lesquelles la future collectivité pourra être saisie de manière obligatoire. Actuellement, ce n’est qu’une possibilité offerte par la loi, sans caractère obligatoire. Tel était le sens de mon amendement. Cela étant, attendons janvier 2016 pour voir comment évoluera la situation. Je retire l’amendement.

(L’amendement n113 est retiré.)

M. le président. La parole est à M. Victorin Lurel, pour soutenir l’amendement n85.

M. Victorin Lurel. Je sollicite par cet amendement le concours de notre éminent, estimé et distingué président de la commission des lois sur une affaire qui met en cause ce qu’il appelle lui-même la souveraineté des parlementaires. Il s’agit d’un arrêté, qui aurait dû être pris il y a déjà deux ans.

En juin 2013, une proposition de loi a été adoptée pour améliorer la qualité de l’offre alimentaire dans les outre-mer. Elle a prévu de limiter la teneur maximale en sucres ajoutés pour les produits alimentaires distribués dans les outre-mer par référence à la teneur maximale constatée pour les produits équivalents ou comparables distribués dans l’Hexagone. Cette disposition-là est appliquée. En revanche, pour les produits fabriqués sur place, chez nous, dans les outre-mer, l’arrêté n’a jamais été pris. Pourquoi ? Il devait être signé par les ministres chargés de la santé, de l’agriculture, de la consommation et des outre-mer.

Cet amendement n’est pas dirigé contre le ministère des outre-mer. Je crois savoir qu’un arrêté était prêt et que plusieurs ministres l’ont signé. Un seul ne l’a pas fait et refuse de le faire, celui des affaires sociales. Voilà deux ans que cela dure ! Quel mépris à l’égard de la souveraineté des parlementaires ! Est-ce parce que cette disposition a fait l’objet d’une proposition de loi au lieu d’être intégrée à la grande loi de santé publique ? On a recommencé tout le processus il y a peu, en saisissant la Commission européenne !

La loi est en partie appliquée. Le ministère des outre-mer a fait son travail, mais nous nous heurtons aujourd’hui à un blocage. Je sollicite donc le concours du président de la commission des lois pour que cette affaire soit réglée au plus vite.

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur cet amendement ?

Mme Paola Zanetti, rapporteure. Cela fait en effet deux ans que le Gouvernement doit prendre un arrêté fixant la liste des produits alimentaires distribués dans les outre-mer dont le taux de sucres ajoutés doit être défini par référence à la teneur maximale constatée pour les produits équivalents ou comparables distribués dans l’Hexagone. Force est de constater que ce décret n’a toujours pas été publié. J’ai cru comprendre que c’était notamment dû au fait que cette mesure constituait une barrière à l’entrée sur les territoires des collectivités d’outre-mer, et qu’elle devait par conséquent être autorisée par la Commission européenne pour pouvoir entrer en vigueur. Même si j’émets un avis défavorable sur cet amendement, j’aimerais donc interroger Mme la ministre : la Commission européenne a-t-elle bien été saisie ? Va-t-elle bientôt se prononcer ? Le décret sera-t-il pris prochainement ?

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme George Pau-Langevin, ministre. Mon prédécesseur Victorin Lurel avait su traiter le sujet avec son énergie coutumière. (Sourires.) Il faut distinguer deux dispositions de la loi. Pour les produits que l’on peut trouver à la fois dans l’Hexagone et dans les outre-mer, la loi s’applique, puisqu’une référence existe. Mais pour les produits fabriqués dans les outre-mer, on nous a opposé qu’il était impossible de savoir vraiment ce qu’il en était. Nous multiplions donc les démarches pour surmonter les obstacles techniques et parvenir à déterminer si un produit est plus sucré en outre-mer. Par ailleurs, un projet d’arrêté a été soumis à consultation et aux professionnels du secteur. L’arrêté sera notifié en septembre à la Commission européenne, et sa publication sera effective avant la fin de l’année 2015.

Je comprends votre mouvement d’humeur, mais je ne pense pas qu’il serait plus efficace de passer outre la signature du ministère des affaires sociales. Soyez assuré que nous travaillons à aboutir dans ce dossier. Au bénéfice de ces explications, je vous invite à retirer cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Victorin Lurel.

M. Victorin Lurel. J’entends les observations de la ministre, et je suis prêt à retirer cet amendement. Mais auparavant, je tiens à faire part de mon étonnement devant l’argument employé de « barrière à l’entrée ». S’il y avait barrière à l’entrée, cela concernerait plutôt la partie déjà appliquée ! Tout produit venant de l’extérieur et consommé dans les outre-mer doit respecter la même teneur en sucre : cela, on pourrait dire que c’est une barrière à l’entrée, un obstacle technique, constitutif d’une entrave au libre commerce.

En revanche, ce dont nous parlons, c’est de la production locale, qui est actuellement libre d’instiller la quantité de sucre qu’elle veut. Or, on sait que c’est une manière de susciter une addiction, de créer une clientèle captive et d’accroître la durée de vie des produits en repoussant leur date limite de consommation. On sait cela. Ce n’est peut-être pas de l’empoisonnement, mais c’est tout de même grave. On laisse délibérément faire. Je me tourne vers mon ami M. Polutélé : on sait ce que représente le problème du surpoids et de l’obésité dans toutes les régions, chez lui comme en Polynésie, chez moi comme en Martinique, et dans une moindre mesure en Guyane. C’est un vrai sujet de santé publique.

Or, on continue à nous opposer des arguments, après une année de résistance du ministère des affaires sociales. Il a mis plus d’un an pour accepter de seulement travailler sur le sujet ! Un décret était pourtant prêt dès 2014. Il me semble, madame la ministre, que vous l’aviez vous-même signé, à l’instar de Stéphane Le Foll et de Guillaume Garot. Je ne comprends donc pas comment l’on peut nous dire subitement, après deux ans d’atermoiements, qu’il faut tout reprendre, et qu’il s’agit peut-être d’une barrière à l’entrée.

Madame la ministre, je retire l’amendement, mais on sait que, si vous étiez seule à signer, la loi serait déjà totalement appliquée. Il en va de la santé des ultramarins. Il ne s’agit pas seulement de préserver les intérêts du libre commerce et du libre profit.

(L’amendement n85 est retiré.)

M. le président. La parole est à M. Gabriel Serville, pour soutenir l’amendement n112 rectifié.

M. Gabriel Serville. Madame la ministre, cet amendement vise à étendre à l’ensemble des territoires d’outre-mer le principe de séparation des Églises et de l’État, garanti par la loi du 9 décembre 1905. À cette fin, il abroge l’ordonnance royale du 27 août 1828, fondement juridique qui régit encore aujourd’hui les relations entre l’Église catholique et les pouvoirs publics, notamment en Guyane. Il vise donc à retirer du budget du conseil départemental et, consécutivement, de la future collectivité de Guyane, le financement des prêtres du culte catholique, afin d’assurer ainsi la promotion de l’égalité entre tous les citoyens, d’une part, sans exception, et entre tous les cultes d’autre part. Tel est le sens de cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Paola Zanetti, rapporteure. Il me semble que ce sujet mériterait d’être abordé en concertation avec les Églises des territoires concernés. Remettre en cause par un amendement parlementaire les régimes spécifiques des cultes, en outre-mer comme ailleurs – originaire de la Moselle, je connais cette problématique ! – me semble en tout état de cause inadapté. Aussi j’émets un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme George Pau-Langevin, ministre. Nous sommes tous d’accord sur le fait que notre République est laïque. Aussi peut-il apparaître assez singulier que le conseil départemental puisse payer les salaires des prêtres. Il y a manifestement là quelque chose à faire évoluer. Nous sommes d’accord sur ce point.

Cela étant, le texte de référence remontant à 1828, il semble raisonnable, avant de supprimer le système existant aujourd’hui en Guyane, de mener une concertation avec les personnes concernées, à savoir les prêtres catholiques. Il n’en demeure pas moins vrai que le système actuel ne peut prospérer en l’état. Je crois savoir que le sénateur Karam a déposé une proposition de loi et que vous en préparez une vous-même, monsieur le député. Je peux vous assurer que, si ces propositions de loi ont fait l’objet des concertations nécessaires, le Gouvernement vous suivra pleinement pour mener à bien l’évolution nécessaire de ce régime.

M. le président. La parole est à M. Gabriel Serville.

M. Gabriel Serville. Madame la ministre, je veux vous rassurer : avant de faire cette proposition, le sénateur Antoine Karam et moi-même avons pris le soin de consulter les curés, les prêtres, l’évêque de Cayenne, qui comprennent tout à fait cette évolution. On peut considérer en effet qu’il n’est pas sain que seul le culte catholique continue à bénéficier des deniers publics.

Ce qui a sans doute gêné, dans mon amendement, est le fait qu’il ne concerne pas que la Guyane mais également les autres collectivités d’outre-mer. Peut-être aurait-il fallu qu’il ne vise que l’ordonnance royale de 1828 et mette de côté les décrets Mandel qui, eux, concernent l’ensemble des collectivités d’outre-mer.

Cela étant, je considère que c’est un bon moyen, pour notre gouvernement, d’aller gratter quelques sous qui nous font cruellement défaut par moments. Le conseil départemental de Guyane, vous le savez aussi bien que moi, a des finances exsangues ; il ne parvient pas toujours à répondre aux aspirations des politiques comme à celles de la population.

J’ai déjà déposé la proposition de loi. Elle n’est pas rédigée dans les mêmes formes que cet amendement. Nous prendrons donc le temps, avec vos services, de voir comment l’améliorer, afin qu’elle puisse aboutir dans des conditions acceptables et dans des délais assez courts. En effet, la future collectivité va se mettre en place très rapidement, et nous savons d’ores et déjà les difficultés qu’elle va rencontrer pour se procurer les recettes fiscales, les financements lui permettant de faire face à ses obligations. Je prends acte de votre réponse, des perspectives qui nous attendent, et je retire l’amendement.

(L’amendement n112 rectifié est retiré.)

M. le président. La parole est à M. Victorin Lurel, pour soutenir l’amendement n86.

M. Victorin Lurel. Cet amendement est relatif à la qualité du service public de distribution et de transport d’électricité dans les départements d’outre-mer.

Un arrêté, qui s’avère discriminatoire, est source de difficultés. Lorsque l’on autorise l’existence de 3 % d’utilisateurs mal alimentés dans la France hexagonale, on admet que ce chiffre atteigne 5 % dans les outre-mer. Il en va de même s’agissant de la durée des coupures : on tolère six coupures longues, à raison de treize heures annuelles, et trente-cinq coupures brèves par année en France métropolitaine. Partout ailleurs – en Corse, en Guadeloupe, en Martinique, partout dans les outre-mer – c’est laissé à la totale discrétion d’EDF. Il y a là un problème de qualité du service public et une discrimination. Aussi je demande par cet amendement la remise d’un rapport permettant d’élucider cette question.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Paola Zanetti, rapporteure. Il s’agit, me semble-t-il, d’un amendement d’appel à l’intention du Gouvernement, pour l’inviter à modifier le décret n2007-1826 afin d’aligner les niveaux des prescriptions techniques en matière de qualité des réseaux publics d’électricité sur ceux applicables en métropole, plutôt que d’une véritable demande de rapport. Je m’en remets à la réponse du Gouvernement au sujet de la modification du décret. Pour ma part, et sous l’œil bienveillant du président de la commission des lois (Sourires), j’émettrai un avis défavorable.

M. le président. Quel est donc l’avis du Gouvernement ?

Mme George Pau-Langevin, ministre. Sur le fond, nous savons bien que les réseaux électriques des DOM sont assez vulnérables, du fait de l’absence de raccordement au réseau continental et de leur taille réduite. Ce sont des systèmes qui sont souvent plus fragiles et instables que les systèmes continentaux. Aujourd’hui, il est difficile de déterminer si la continuité de l’alimentation électrique d’un réseau insulaire présente ou non une qualité insuffisante au niveau réglementaire actuel. Le travail est engagé entre le Gouvernement et EDF, afin de définir des valeurs limite relatives aux coupures ainsi qu’un seuil de qualité. Nous travaillons donc déjà sur ce sujet mais, compte tenu de l’importance de cette question pour la vie quotidienne des gens et de sa technicité, il me semble que, plutôt que de demander un rapport, idée à laquelle je ne suis pas opposée sur le principe, il serait plus efficace de demander au ministère de l’écologie de missionner des inspecteurs, qui seront plus compétents que ceux dont nous pouvons disposer. Mais je peux donner un avis favorable à votre demande de rapport.

M. le président. La parole est à M. Victorin Lurel.

M. Victorin Lurel. La rapporteure n’a pas tort, c’est un amendement d’appel, parce que je n’ai pas reçu de réponse du ministère de l’écologie, du développement durable et de l’énergie. Cela pose quelques problèmes pour tous les syndicats mixtes d’électricité, qui entretiennent un dialogue quelque peu compliqué avec l’opérateur.

Je retire donc l’amendement, pour ne pas gêner notre ministre, mais en espérant que la ministre de l’écologie me réponde.

(L’amendement n86 est retiré.)

Article 25

M. le président. La parole est à Mme la ministre, pour soutenir l’amendement n129.

Mme George Pau-Langevin, ministre. Pour répondre aux préoccupations exprimées par M. le député Aboubacar, cet amendement a pour objet de préciser la rédaction de l’habilitation prévue dans cet article. Il s’agit, d’une part, de satisfaire plus explicitement un objectif d’alignement du code du travail d’ici 2018, tel que le prévoit le document stratégique « Mayotte 2025 », signé le 13 juin dernier par le Premier ministre et l’ensemble des grands élus de Mayotte. Il s’agit, d’autre part, de permettre l’application à Mayotte de toutes les dispositions utiles en matière de travail, d’emploi et de formation professionnelle qui ne figurent pas dans le code du travail. Cette habilitation est sollicitée pour une durée de dix-huit mois, afin de permettre le déroulement de ces travaux complexes, qui permettront notamment d’étendre les dispositions prioritaires qui ont été rappelées par M. le député Aboubacar.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Paola Zanetti, rapporteure. Favorable.

(L’amendement n129 est adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n124 rectifié, qui fait l’objet d’un sous-amendement n147. La parole est à Mme la ministre, pour soutenir l’amendement.

Mme George Pau-Langevin, ministre. Là encore, il s’agit d’insérer une nouvelle habilitation permettant de prendre par ordonnance l’ensemble des mesures d’adaptation nécessaires à l’application à Mayotte des dispositions de la loi du 31 juillet 2014 relative à l’économie sociale et solidaire. Nous sommes d’accord avec ce que disent les élus de Mayotte. C’est un secteur porteur d’emplois pérennes et non délocalisables. Nous sommes attachés à ce que ces dispositions puissent être appliquées à Mayotte mais nous avons conscience qu’elles ne peuvent être insérées dans un texte en l’état : il faut les adapter. C’est la raison pour laquelle j’ai demandé un délai, pour que nous puissions prendre les mesures d’adaptation nécessaires.

M. le président. La parole est à Mme la rapporteure, pour soutenir le sous-amendement n147 et donner l’avis de la commission sur l’amendement n124 rectifié.

Mme Paola Zanetti, rapporteure. Comme Mme la ministre l’a rappelé, cet amendement a pour objet d’insérer une habilitation supplémentaire dans l’article 25 afin d’étendre la loi sur l’économie sociale et solidaire à Mayotte. Il prévoit un délai de préparation de l’ordonnance de neuf mois, sachant que le délai de ratification, prévu à l’article 25, est de trois mois. Mme la ministre l’a indiqué, cette habilitation répond aussi à une autre préoccupation, largement évoquée en commission par M. Aboubacar.

Je suis favorable à cet amendement, sous réserve de la réduction du délai de préparation de neuf à six mois. Tel est l’objet du sous-amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement sur le sous-amendement ?

Mme George Pau-Langevin, ministre. Chacun souhaite que ces travaux aient lieu dans des délais rapides, et je comprends que, compte tenu de la situation de Mayotte, on essaie d’aller vite. Mais il faut aussi avoir conscience que l’adaptation de tous les textes existants à Mayotte représente un travail important. À la limite, si l’on me demandait un délai de trois mois, je pourrais l’accepter, mais mes services n’accomplissent pas ce travail tout seuls ! Nous devons travailler avec d’autres ministères. Il me semble donc que le délai que nous avions prévu était plus raisonnable, mais si l’Assemblée se prononce en faveur des six mois, nous verrons ce qu’il est possible de faire.

On ne peut pas dire que Mayotte ne fasse pas l’objet d’adaptations : beaucoup de textes sont pris pour essayer de mettre à jour toute la réglementation applicable. Mais il est certain que cela réclame un travail considérable. Par conséquent, il me semble qu’il vaut mieux prendre le temps de faire les choses correctement, mais sur le sous-amendement, je m’en remets à la sagesse de l’Assemblée.

M. le président. La parole est à M. Ibrahim Aboubacar.

M. Ibrahim Aboubacar. Je ne suis pas intervenu tout à l’heure, car je souhaitais m’exprimer en même temps sur l’ordonnance relative au code du travail et sur celle qui concerne l’économie sociale et solidaire.

J’aimerais, à l’instar de Mme la rapporteure, que le délai soit raccourci. Les sénateurs, auxquels la même question a été posée, ont refusé de le faire. Je rappelle, madame la ministre, qu’on leur a indiqué que le travail avait été engagé et qu’il était avancé. La nouvelle habilitation ne marque donc pas le début du processus, d’autant qu’elle fait suite à une ancienne habilitation qui n’avait pas été exécutée par le Parlement. Le travail ayant donc déjà débuté sous l’ancienne habilitation, un délai de six mois nous paraît amplement suffisant pour terminer la tâche, comme l’indique la rapporteure.

En revanche, concernant l’habilitation relative au code du travail, la durée de dix-huit mois retenue semble adaptée. Je sais que l’achèvement de cette tâche requiert du temps. J’avais d’ailleurs déposé un amendement sur le sujet, qui a été déclaré irrecevable au titre de l’article 40 de la Constitution, et je remercie Mme la ministre de l’avoir repris.

Au-delà des dispositions applicables en matière de travail, d’emploi et de formation professionnelle, mentionnées dans l’article, il convient de rappeler que Mayotte connaît des difficultés particulières avec son code du travail, que personne ne comprend plus. Il existe à Mayotte une codification spécifique du droit du travail, différente de celle qui s’applique en métropole, et les passerelles sont extrêmement difficiles à établir de l’une à l’autre. Ce code n’est plus compris par personne, ni par les acteurs économiques, ni par les socioprofessionnels, ni même par les autorités de l’État chargées de l’appliquer. Le travail à accomplir est donc double, voire triple.

En revanche, s’agissant de l’économie sociale et solidaire, nous pouvons aller plus vite. Les partenaires sociaux sont avertis, ils ont commencé de travailler, et il serait bon de les associer, de les saisir afin de gagner du temps. Je partage donc l’avis de la rapporteure.

(Le sous-amendement n147 est adopté.)

(L’amendement n124 rectifié, sous-amendé, est adopté.)

(L’article 25, amendé, est adopté.)

Article 26

(L’article 26 est adopté.)

Article 26 bis AA

M. le président. Nous en venons aux amendements à l’article 26 bis AA.

La parole est à M. Ibrahim Aboubacar, pour soutenir l’amendement n1.

M. Ibrahim Aboubacar. Je le retire, monsieur le président.

(L’amendement n1 est retiré.)

M. le président. La parole est encore à M. Ibrahim Aboubacar, pour soutenir l’amendement n45.

M. Ibrahim Aboubacar. Je le retire également, monsieur le président. Je pense que nous avons épuisé les sujets de discussion sur ce sujet.

(L’amendement n45 est retiré.)

(L’article 26 bis AA est adopté.)

Articles 26 bis A à 26 bis

(Les articles 26 bis A, 26 bis B et 26 bis sont successivement adoptés.)

Après l’article 26 bis

M. le président. Nous en venons à des amendements portant articles additionnels après l’article 26 bis.

Je suis saisi de trois amendements, nos 137, deuxième rectification, 16 rectifié et 17 rectifié, pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à Mme la ministre, pour soutenir l’amendement n137, deuxième rectification.

Mme George Pau-Langevin, ministre. Cet amendement vise à habiliter le Gouvernement, dans les conditions prévues à l’article 38 de la Constitution, à adopter par voie d’ordonnance des dispositions de nature législative concernant la Nouvelle-Calédonie dans trois domaines : l’actualisation de la partie législative du code pénal applicable en Nouvelle-Calédonie, l’extension et, le cas échéant, l’adaptation des dispositions du code de l’urbanisme relatives à la procédure administrative contentieuse et à la procédure pénale, et enfin l’extension et, le cas échéant, l’adaptation des règles de procédure pénale relatives au contrôle des établissements sociaux et médico-sociaux définies par le code de l’action sociale et des familles.

M. le président. Toujours dans la discussion commune, les amendements nos 16 rectifié et 17 rectifié peuvent faire l’objet d’une présentation groupée.

La parole est à M. Philippe Gomes, pour les soutenir.

M. Philippe Gomes. L’amendement présenté par le Gouvernement répond aux attentes que j’avais exprimées à la fois dans mon amendement précédent sur l’actualisation du code pénal en Nouvelle-Calédonie et dans les deux présents amendements, qui concernent, pour le premier, les dispositions du code de l’urbanisme relatives à la procédure administrative contentieuse et à la procédure pénale et pour le second les adaptations nécessaires pour les règles de procédure pénale relatives au contrôle des établissements sociaux et médico-sociaux. Dans ces conditions, je retire ces amendements, monsieur le président.

(Les amendements nos 16 rectifié et 17 rectifié sont retirés.)

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n137, deuxième rectification ?

Mme Paola Zanetti, rapporteure. Favorable.

(L’amendement n137, deuxième rectification est adopté.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre, pour soutenir l’amendement n149 rectifié.

Mme George Pau-Langevin, ministre. Cet amendement concerne la collectivité territoriale de Saint-Martin, dont la situation budgétaire est très dégradée.

Le revenu de solidarité active ou l’aide personnalisée à l’autonomie pèsent sur les dépenses de la collectivité et connaissent un taux de progression très important. Le RSA représentait à peine 5 millions d’euros en 2008, mais 16 millions d’euros en 2013. La dette de la collectivité au titre de cette prestation envers la caisse d’allocation familiale atteignait à la fin de l’année 2013 un montant de 13,65 millions d’euros.

À ce contexte financier s’ajoute le contexte social particulier de l’île, voisine du territoire néerlandais de Sint Maarten, qui rend nécessaire la mise en place de modes de versement permettant d’éviter la fraude. Il vous est donc proposé d’autoriser Saint-Martin à adapter à la fois les montants et les conditions de service du RSA pour une durée de deux ans dans des modalités proportionnelles et adaptées, sans méconnaître le principe d’égalité de traitement.

La situation est un peu particulière, car la collectivité de Saint-Martin, dont les finances sont extrêmement dégradées, est contrainte d’assumer des dépenses sociales qu’elle ne peut pas budgéter, puisqu’il s’agit d’une sorte de remboursement a posteriori. Ce n’est absolument pas sain.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Paola Zanetti, rapporteure. Favorable.

M. le président. La parole est à M. Daniel Gibbes.

M. Daniel Gibbes. L’article additionnel que tend à insérer le présent amendement, qui a été déposé tardivement, est la stricte reprise d’une délibération prise par le conseil territorial de la collectivité d’outre-mer de Saint-Martin le 26 juin 2014. Siégeant en tant que chef de l’opposition au sein de ce conseil, je m’étais abstenu lors du vote qui eut lieu en séance voilà un an.

Je souhaite m’expliquer sur cette abstention. Le RSA représente un problème de fond à Saint-Martin, il n’est pas question de le nier : les dépenses sont exponentielles et plombent littéralement le budget de la collectivité, comme vous l’avez rappelé à l’instant, madame la ministre. Saint-Martin est une île binationale et nombre d’allocataires perçoivent le RSA côté français alors qu’ils travaillent et perçoivent des revenus sur la partie hollandaise de l’île. Ce n’est un secret pour personne, et le président de la commission des lois peut en attester. Et je ne cite que ce cas de figure symptomatique.

À cet égard, je ne suis pas opposé à une habilitation si cette dernière permet à la collectivité de mettre sur pied une véritable politique de contrôle des bénéficiaires du RSA, qui doit passer par un échange de fichiers et, plus largement, par un travail étroit de collaboration avec Sint Maarten. Je m’étais cependant abstenu lors du vote, parce que cette demande d’habilitation me semble cacher des desiderata politiques plus que hasardeux à mes yeux. Je tenais simplement à souligner les tentatives risquées que la majorité en place a d’ores et déjà entreprises en la matière.

Quand je lis que l’habilitation, octroyée pour deux ans, permettrait d’agir sur les conditions d’accès au RSA, ses modalités de versement et son montant, je ne peux m’empêcher d’imaginer les bidouillages administratifs que l’équipe en place ne manquera pas de tenter en aval. Vous saurez sans aucun doute tenir des propos rassurants à mon adresse, madame la ministre, en me certifiant que le contrôle interministériel est strict et que le Gouvernement ne laissera pas la collectivité d’outre-mer jouer aux apprentis sorciers. Je vous en remercie par avance.

(L’amendement n149 rectifié est adopté.)

Article 27

M. le président. La commission a maintenu la suppression par le Sénat de l’article 27.

Nous avons achevé l’examen des articles du projet de loi.

Explications de vote

M. le président. Dans les explications de vote, la parole est à M. Philippe Gomes, pour le groupe de l’Union des démocrates et indépendants.

M. Philippe Gomes. Au terme de l’examen de ce projet de loi, je tenais à affirmer, au nom de mon groupe, que nous avons fait œuvre utile pour le droit de l’outre-mer. Le texte du Gouvernement, enrichi par l’ensemble des contributions des parlementaires, est parvenu à répondre à certaines attentes, même si d’autres, dont l’acuité était pourtant évidente, n’ont pu être prises en considération. J’espère néanmoins que les messages sont passés.

Concernant en particulier la Nouvelle-Calédonie, je souhaite rappeler que la concertation et le consensus sont les deux mamelles de notre pays. Nous en avons fait la preuve encore récemment dans le cadre de l’examen de la loi organique ou du compromis politique qui se dessine sur le corps électoral provincial. Je souhaite que, s’agissant de la question des armes, concertation et consensus soient également au rendez-vous dans le cadre du décret qui a été prévu par cette loi.

M. le président. La parole est à M. Daniel Gibbes, pour le groupe Les Républicains.

M. Daniel Gibbes. J’avais regretté, lors de la discussion générale, le manque d’ambition du présent projet de loi. Il n’en demeure pas moins que chacun de nous a pu faire adopter un certain nombre d’amendements pour son territoire et permettre ainsi des avancées. Je tiens à vous en féliciter, madame la ministre.

En revanche, je déplore que ces débats aient été « saucissonnés », entrecoupés d’autres points à l’ordre du jour, ce qui a pu empêcher certain collègue ici présent de présenter des amendements. Il y a néanmoins des circonstances atténuantes, et je ne m’étendrai pas davantage sur ce point. Cela étant dit, le groupe Les Républicains, que je représente ici, votera pour ce texte.

M. le président. La parole est à M. Ibrahim Aboubacar, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.

M. Ibrahim Aboubacar. Ainsi que je l’affirmais hier, ce projet de loi est un texte extrêmement utile pour tous, et la passion qui a pu parfois animer nos débats montre bien que nous avons, à plusieurs reprises, touché à des sujets essentiels pour la vie des citoyens de nos collectivités territoriales.

Je tiens particulièrement à remercier le Gouvernement car, à en juger par l’écart entre le texte d’origine et celui auquel nous avons abouti, nous venons de réaliser un véritable travail de co-construction de la loi, ce qui montre la capacité d’écoute dont a fait preuve Mme la ministre tout au long de ces travaux. Certaines dispositions ont été retenues dans ce texte, et différents rendez-vous ont été pris au nom du Gouvernement pour continuer de traiter un certain nombre de préoccupations majeures qui ont été évoquées tout au long des débats ; chacun les connaît, je ne les rappellerai pas.

Je souhaite remercier à nouveau Mme la rapporteure, qui s’est immergée quelque temps dans nos outre-mer et a fait, à cette fin, un voyage dans nos trois océans, un long voyage, dans le temps et l’espace, comme elle n’en avait peut-être jamais fait auparavant ! Je salue son effort de compréhension, sa passion et son souci du détail. Nous pouvons ainsi dire que chacun ici, sur tous les bancs, a fait un beau travail, et c’est avec beaucoup d’enthousiasme que le groupe socialiste approuvera ce texte.

Vote sur l’ensemble

M. le président. Je mets aux voix l’ensemble du projet de loi.

(Le projet de loi est adopté à l’unanimité.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme George Pau-Langevin, ministre. Je souhaite simplement, en quelques mots, remercier les parlementaires qui, comme l’a souligné M. Aboubacar, ont réellement participé à l’élaboration de ce texte et défendu des préoccupations dont nous savons l’importance pour les ressortissants de l’outre-mer. J’ai compris que nous avions aussi fixé notre programme de travail pour les six prochains mois ; compte tenu de l’ampleur de la tâche, nous avons du pain sur la planche ! Nous nous retrouverons donc.

3

Ordre du jour de la prochaine séance

M. le président. Prochaine séance, ce matin, à neuf heures trente :

Discussion, en nouvelle lecture, du projet de loi portant adaptation de la procédure pénale au droit de l’Union européenne.

La séance est levée.

(La séance est levée, le vendredi 17 juillet 2015, à zéro heure quarante-cinq.)

La Directrice du service du compte rendu de la séance

de l’Assemblée nationale

Catherine Joly