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N° 2959

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 8 juillet 2015.

PROPOSITION DE LOI

visant à améliorer la représentation des Français en instaurant l’élection des députés au scrutin de liste
à la représentation proportionnelle,

(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale
de la République, à défaut de constitution d’une commission spéciale
dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par Mesdames et Messieurs

François de RUGY, Barbara POMPILI, Laurence ABEILLE, Éric ALAUZET, Danielle AUROI, Denis BAUPIN, Michèle BONNETON, Christophe CAVARD, Sergio CORONADO, Cécile DUFLOT, François-Michel LAMBERT, Noël MAMÈRE, Véronique MASSONNEAU, Paul MOLAC, Jean-Louis ROUMEGAS et Eva SAS,

députés.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Depuis les débuts de la Ve République en 1958, le mode de scrutin majoritaire a été appliqué à toutes les élections législatives sauf à celles de 1986. Ce système n’est pas dénué d’inconvénients. D’une part, il exacerbe les ruptures plutôt que d’encourager les continuités. D’autre part, la représentation nationale qui en est issue ne reflète pas toujours le vote des Français dans sa diversité. L'expérience montre que ce mode de scrutin majoritaire est très déformant, une tendance qui s’est accentuée au fur et à mesure que les deux grands partis se sont affaiblis. Ainsi l’UMP détenait à elle seule 60 % des sièges à l’Assemblée nationale entre 2007 et 2012 alors que ses candidats n’avaient recueilli que 30 % des voix au premier tour des élections législatives.

Ce défaut de représentation est d’ailleurs l’un des principaux motifs d’abstention : selon un récent sondage, 31 % des Français se sont abstenus au second tour des élections départementales de 2015 car ils ne se reconnaissaient pas dans les candidats présents.

Lors de la campagne présidentielle de 2012, le candidat François Hollande s’était engagé à introduire une dose de proportionnelle à l’Assemblée nationale. En novembre 2012, la commission présidée par Lionel Jospin sur la « rénovation et la déontologie de la vie publique » préconisait que cette dose concerne 10 % des députés élus. Mais face à la triple crise que nous traversons - crise de confiance, crise de la représentation et, in fine, crise du vote - cette réforme partielle du mode de scrutin à l’élection législative apparaît insuffisante.

C’est pourquoi il vous est ici proposé d’instaurer l’élection des députés à la représentation proportionnelle à un tour, comme c’est le cas dans la plupart des pays européens.

Nos voisins allemands, espagnols ont montré qu’un parlement élu à la proportionnelle pouvait dégager des majorités stables. La France est d’ailleurs le seul pays de l’Union européenne, avec le Royaume-uni, à élire sa chambre basse au scrutin majoritaire.

La mise en œuvre de cette réforme peut s’envisager avec divers types de règles. Le plus simple, pour renforcer le pluralisme et la représentativité de l’Assemblée nationale, serait d’appliquer les règles du scrutin proportionnel à des listes nationales, mais cela reviendrait à nier l’ancrage territorial des députés et donc à affaiblir notre démocratie représentative. Une seconde possibilité consisterait à combiner scrutin proportionnel et listes départementales, comme ce fut le cas lors de l’élection législative de 1986. Mais cette expérience a montré que le cadre départemental générait des effets de seuil éloignés du seuil légal de 5 % et fragilisait le principe constitutionnel d’égalité devant le suffrage.

Dans la mesure où la loi n° 2015-29 du 16 janvier 2015 a permis de délimiter treize nouvelles régions qui formeront les circonscriptions des élections régionales de décembre 2015, l’application de la représentation proportionnelle dans le cadre de ces nouvelles circonscriptions régionales constituerait une solution efficace et équilibrée.

Par ailleurs, l’instauration d’un scrutin proportionnel suppose généralement de fixer un seuil et de définir une méthode d’attribution des sièges. En la matière, il semble pertinent de retenir le seuil de 5 % pour être admis à la répartition des sièges, afin que les petits partis ne soient pas exclus du jeu politique. Ce seuil est identique à celui qui existe déjà pour les différentes élections qui se font à la proportionnelle (municipales, régionales, européennes). Il a également été retenu dans la plupart des pays européens qui ont adopté le scrutin proportionnel. D’autre part, pour déterminer l’attribution des sièges, nous avons considéré que la méthode dite « du quotient électoral », qui fixe le nombre de voix à obtenir pour avoir un siège, demeurait la plus juste et la plus lisible. Enfin, s’agissant des sièges restants, il nous a semblé pertinent qu’ils soient attribués selon la méthode dite « de la plus forte moyenne », déjà utilisée dans le cadre des élections sénatoriales ou européennes.

À la fin de l’année, le cycle des élections intermédiaires se refermera. Il aura été marqué par une désaffection croissante des citoyens envers les dirigeants politiques. La réforme du mode de scrutin aux élections législatives, articulée à d’autres réformes institutionnelles sur le nombre de parlementaires, le raccourcissement de la procédure législative, ou encore les pouvoirs de contrôle du Parlement, permettrait de contribuer à revitaliser notre démocratie.

Tels sont, Mesdames, Messieurs, les motifs pour lesquels il vous est demandé d’adopter la proposition de loi dont le texte suit.

PROPOSITION DE LOI

Article unique

Le code électoral est ainsi modifié :

1° Après le mot : « scrutin », la fin de l’article L. 123 est ainsi rédigée :

« de liste à la représentation proportionnelle suivant la règle de la plus forte moyenne, sans panachage ni vote préférentiel. » ;

2° L’article L. 125 est ainsi rédigé :

« Art. L. 125. – Les circonscriptions sont les régions, territoires et zones déterminés conformément aux tableaux n° 1 et n° 1 bis annexés au présent code. » ;

3° L’article L. 126 est ainsi rédigé :

« Art. L. 126. – Seules sont admises à la répartition des sièges les listes ayant obtenu au moins 5 % des suffrages exprimés. Sur chaque liste, les sièges sont attribués aux candidats d’après l’ordre de présentation. Si plusieurs listes ont la même moyenne pour l’attribution du dernier siège, celui-ci revient à la liste qui a obtenu le plus grand nombre de suffrages. En cas d’égalité de suffrages, le siège est attribué au plus âgé des candidats susceptibles d’être proclamés élus. » ;

4° Au début du dernier alinéa de l’article L. 154, les mots : « Pour le premier tour de scrutin, » sont supprimés ;

5° L’article L. 155 est ainsi rédigé :

« Art. L. 155. – Chaque liste de candidats doit comporter trois noms de plus qu’il y a de sièges à pourvoir. Sur chacune des listes, l’écart entre le nombre des candidats de chaque sexe ne peut être supérieur à un. Chaque liste est composée alternativement d’un candidat de chaque sexe.

« Outre les renseignements mentionnés à l’article L. 154, la déclaration doit indiquer le titre de la liste et l’ordre de présentation des candidats.

« Une déclaration collective pour chaque liste est faite par un mandataire de celle-ci. Tout changement de composition d’une liste ne peut être effectué que par retrait de celle-ci et le dépôt d’une nouvelle déclaration. La déclaration de retrait doit comporter la signature de l’ensemble des candidats de la liste.

« Le retrait d’une liste ne peut intervenir après l’expiration du délai prévu pour le dépôt des déclarations de candidatures.

« En cas de décès de l’un des candidats au cours de la campagne électorale, les autres candidats de la liste peuvent le remplacer jusqu’à la veille de l’ouverture du scrutin par un nouveau candidat au rang qui leur conviendra. » ;

6° L’article L. 156 est ainsi modifié :

a) Après le mot : « dans », la fin du premier alinéa est ainsi rédigée :

« une même circonscription sur plusieurs listes ni dans plusieurs circonscriptions. »

b) Au deuxième alinéa, après le mot : « circonscriptions » sont insérés les mots :

« ou sur plusieurs listes dans une même circonscription. » ;

7° L’article L. 157 est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, après le mot : « préfecture », sont insérés les mots : « de région » ;

b) Les deux derniers alinéas sont remplacés par un alinéa ainsi rédigé :

« Il est donné au déposant un reçu provisoire de déclaration. Un récépissé définitif est délivré dans les quatre jours du dépôt de la déclaration de candidature si celle-ci est conforme aux prescriptions des lois en vigueur. » ;

8° À l’article L. 159, le mot : « préfet» est remplacé par les mots : « représentant de l’État dans la région » ;

9° Les articles L. 162 et L. 163 sont abrogés ;

10° L’article L. 167-1 est ainsi modifié :

a) Au début du premier alinéa du II, les mots : « Pour le premier tour de scrutin, » sont supprimés ;

b) Le dernier alinéa du même II est supprimé ;

c) Au premier alinéa du III, les mots : « au premier tour et de cinq minutes au second » sont supprimés ;

11° À l’article L. 174, après le mot : « circonscriptions », sont insérés les mots : « ou sur plusieurs listes dans une même circonscription » ;

12° À l’article L. 175, les mots : « du département » sont remplacés par les mots : « de la région » ;

13° L’article L. 210-1 est ainsi modifié :

a) La dernière phrase du premier alinéa est supprimée ;

b) Le deuxième alinéa est complété par quatre phrases ainsi rédigées :

« Nul ne peut figurer en qualité de remplaçant sur plusieurs déclarations de candidatures. Nul ne peut être à la fois candidat et remplaçant d’un autre candidat. Lorsqu’un candidat décède postérieurement à l’expiration du délai prévu pour le dépôt des déclarations de candidatures, son remplaçant devient candidat et peut désigner un nouveau remplaçant. Lorsqu’un remplaçant décède pendant la même période, le candidat peut désigner un nouveau remplaçant. » ;

14° À la première phrase du premier alinéa de l’article L. 330-1, les mots : « dans chacune des circonscriptions délimitées conformément au tableau n° 1 ter annexé au présent code » sont remplacés par les mots : « hors de France » ;

15° Au second alinéa de l’article L. 330-2, les mots : « de la circonscription » sont supprimés ;

16° L’article L. 330-4 est ainsi modifié :

a) À la première phrase du premier alinéa, les mots : « de la circonscription » sont supprimés ;

b) À la fin du second alinéa, les mots : « de leur circonscription » sont supprimés ;

17° Au 2° de l’article L. 330-5, les mots : « et son remplaçant » sont supprimés ;

18° La section 2 du livre III est complétée par un article L. 330-5-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 330-5-1. – Chaque liste de candidats doit satisfaire aux prescriptions de l’article L. 155 et doit, en outre, comporter les noms de personnes établies dans au moins un tiers des circonscriptions pour l’élection des membres de l’Assemblée des Français de l’étranger. » ;

19° Au premier alinéa de l’article L. 330-6-1, les mots : « de la circonscription, autre que le candidat ou son suppléant, » sont remplacés par les mots : « , autre que le candidat, » ;

20° À la fin du premier alinéa de l’article L. 330-9, les mots : « à l’intérieur de la circonscription » sont remplacés par les mots : « à l’étranger » ;

21° L’article L. 330-11 est ainsi modifié :

a) Aux premier et deuxième alinéas, les mots : « premier tour de » sont supprimés ;

b) Le dernier alinéa est supprimé ;

22° Le second alinéa de l’article L. 397 est supprimé.

23° Le tableau n° 1 annexé au même code est ainsi rédigé :

RÉGIONS, TERRITOIRES ET ZONES

NOMBRE DE DÉPUTÉS

Alsace, Champagne-Ardenne et Lorraine

39

Aquitaine, Limousin et Poitou-Charentes

39

Auvergne et Rhône-Alpes

50

Bourgogne et Franche-Comté

21

Bretagne

21

Centre

18

Corse

2

Guadeloupe, Saint-Barthélémy et Saint-Martin

3

Guyane

2

Île-de-France

76

Languedoc-Roussillon
et Midi-Pyrénées

37

Martinique

3

Mayotte

2

Nord-Pas-de-Calais et Picardie

39

Basse-Normandie
et Haute-Normandie

22

Pays de la Loire

23

Provence-Alpes-Côte d’Azur

33

Réunion

5

Français établis hors de France

9

24° Le tableau n° 1 bis annexé au même code est ainsi rédigé :

TERRITOIRES

NOMBRE DE DÉPUTÉS

Nouvelle-Calédonie

2

Polynésie française

2

Saint-Pierre-et-Miquelon

1

Îles Wallis-et-Futuna

1

25° Le tableau n° 1 ter annexé au même code est supprimé


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