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N
° 1233

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 10 juillet 2013.

RAPPORT D’INFORMATION

DÉPOSÉ

en application de l’article 145 du Règlement

PAR LA COMMISSION DE LA DÉFENSE NATIONALE ET DES FORCES ARMÉES

en conclusion des travaux d’une mission d’information (1)

relatif à une revue capacitaire des armées

ET PRÉSENTÉ PAR

MM. Yves Fromion et Gwendal Rouillard,

Députés.

——

(1) La composition de cette mission figure au verso de la présente page.

La mission d’information relative à une revue capacitaire des armées est composée de :

MM. Gwendal Rouillard et Yves Fromion, rapporteurs ;

Mmes Nathalie Chabanne, Danièle Hoffman-Rispal et M. Nicolas Dhuicq, membres.

SOMMAIRE

___

Pages

INTRODUCTION 7

I. UNE PROGRAMMATION AMBITIEUSE, UNE EXÉCUTION BUDGÉTAIRE CONTRARIÉE 9

A. UNE PROGRAMMATION AMBITIEUSE, CENTRÉE SUR LES ÉQUIPEMENTS 9

1. Un Livre blanc ambitieux 9

2. Une loi de programmation de production 10

B. UNE EXÉCUTION CONTRARIÉE 12

1. Un début d’exécution globalement conforme aux prévisions en début d’exercice 12

2. Un décrochage évident à partir de 2011 13

3. 2013, une année de transition ? 15

II. UNE MODERNISATION INCONTESTABLE MAIS DES DÉFICITS CAPACITAIRES IMPORTANTS 19

A. UNE MODERNISATION SÉLECTIVE DE L’OUTIL DE DÉFENSE : DES PROGRAMMES STRUCTURANTS EN VOIE DE LIVRAISON 19

1. La dissuasion au rendez-vous de la modernisation 19

2. La fonction « connaissance et anticipation » 21

3. La fonction « protection » 22

4. La fonction « intervention » : des améliorations qualitatives évidentes 23

a. Les forces terrestres : un saut qualitatif certain pour la composante coercition 23

b. Les forces navales : les toutes premières livraisons d’équipements structurants 25

c. Les forces aériennes : l’aviation de chasse profondément renouvelée 26

B. LES FONCTIONS STRATÉGIQUES EN TENSION : CONNAISSANCE ET ANTICIPATION, PROTECTION, INTERVENTION 28

1. Connaissance et anticipation 28

a. Les capacités satellitaires 28

b. Les drones 29

2. Protection 30

3. Intervention 31

C. L’ENTRETIEN DES MATÉRIELS : UNE ORGANISATION EFFICACE MAIS EN SOUS-DOTATION 34

1. Le bon fonctionnement de l’organisation par milieux 35

a. Le milieu aéronautique 35

b. Le milieu maritime 36

c. Le milieu terrestre 37

2. La sous-dotation des moyens du MCO 38

D. UN TISSU INDUSTRIEL DISPERSÉ MAIS RICHE 40

III. L’ENGAGEMENT EN OPÉRATIONS, ENTRE MODERNISATION ET FRAGILITÉS 47

A. LES RÉUSSITES D’UNE ARMÉE MODERNE ET PROFESSIONNELLE EN OPÉRATIONS 47

B. LE BON FONCTIONNEMENT DES PROGRAMMES EN URGENCE OPÉRATIONNELLE 51

C. LA FRAGILISATION DE CERTAINES CAPACITÉS SUR LE TERRITOIRE NATIONAL 53

IV. LES INSUFFISANCES CAPACITAIRES DE LA LPM 2009-2014 DOIVENT GUIDER LA CONCEPTION DE LA NOUVELLE PROGRAMMATION. 57

A. POUR UN MEILLEUR SUIVI BUDGÉTAIRE 57

B. FAIRE DU MAINTIEN EN CONDITION OPÉRATIONNELLE UNE PRIORITÉ 59

C. SAISIR LES OPPORTUNITÉS DE COOPÉRATION EUROPÉENNES ET INTERNATIONALES 60

1. Europe de la défense 60

a. Drones 60

b. Transport et ravitaillement en vol 61

c. Cyberdéfense 61

d. Sauvegarde maritime 61

e. Formation 62

f. Certification 62

2. La place de la France dans l’OTAN 63

a. Sur le plan politique 63

b. Sur le plan militaire 63

c. Sur le plan industriel 64

EXAMEN EN COMMISSION 67

ANNEXES 75

ANNEXE 1 : LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LES RAPPORTEURS 75

ANNEXE 2 : PROGRAMMES PRINCIPAUX EN COOPÉRATION FIGURANT DANS LE TABLEAU DE SYNTHÈSE DU RAPPORT D’EXÉCUTION 2011 DE LA LOI DE PROGRAMMATION MILITAIRE 79

ANNEXE 3 : DISPONIBILITÉ TECHNIQUE OPÉRATIONNELLE DES PRINCIPAUX MATÉRIELS SUR LA PÉRIODE 2012 ET 2013 82

ANNEXE 4 : LES RISQUES DE RUPTURE CAPACITAIRE POUR LA MARINE 84

ANNEXE 5 : LES RISQUES DE RUPTURES CAPACITAIRES POUR L’ARMÉE DE TERRE 85

ANNEXE 6 : LES RISQUES DE RUPTURES CAPACITAIRES POUR L’ARMÉE DE L’AIR 87

ANNEXE 7 : LES DIX PRINCIPALES MESURES DU PACTE PME-DÉFENSE 89

ANNEXE 8 : LETTRE COMMUNE DES INDUSTRIELS DE LA DÉFENSE 90

INTRODUCTION

Le Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale de 2008 avait annoncé une rupture, quatorze années après le précédent exercice. Il marquait l’ambition d’une armée devenue professionnelle, qui devait accroître ses capacités de projection et d’intervention. La loi de programmation militaire (LPM) pour les années 2009 à 2014 a décliné ces objectifs en une feuille de route capacitaire, affichant un haut niveau d’ambitions budgétaires, matérielle et industrielle, dont la contrepartie était une réforme profonde des structures et du format des armées, qui prolongerait la révision générale des politiques publiques (RGPP) initiée en 2008.

Cet ensemble est apparu d’autant plus ambitieux que, dès 2008-2009, la France a été confrontée à une grave crise économique, rapidement devenue budgétaire. Le travail de rédaction d’un nouveau Livre blanc conduit en 2012-2013 vise précisément à fixer les ambitions capacitaires de la France compte tenu des contraintes financières pesant sur l’action de l’État. Le nouveau document adopté, le Gouvernement prépare naturellement un projet de loi de programmation militaire, et propose une répartition des moyens dévolus à la défense pour la période 2014-2019.

C’est dans cette perspective que la commission de la défense nationale et des forces armées a souhaité faire un état des lieux au terme de la LPM 2009-2014 sous un angle capacitaire. Il s’agit d’analyser en quoi nos armées ont atteint les objectifs fixés par le Livre blanc et déclinés par la programmation. Cette démarche suppose non seulement d’étudier l’évolution des principaux programmes intéressant la mission « Défense », et singulièrement le programme 146 « Équipement des forces », mais également de regarder comment les armées ont réellement fonctionné. Cela signifie, concrètement, examiner les capacités militaires sur le terrain, en opérations extérieures, mais également en métropole, vérifier dans quelle mesure les armées ont disposé des moyens d’entretenir les matériels pour mettre en œuvre leur potentiel, mais encore s’interroger sur les capacités industrielles du pays.

C’est en conduisant cette analyse capacitaire de la façon la plus objective possible que les rapporteurs entendent contribuer à éclairer l’examen de la programmation à venir par le Parlement, en réaffirmant que l’ambition stratégique de la France implique qu’elle conserve un outil de défense totalement crédible, à même de trouver sa place dans une Europe de la défense à la hauteur de ses responsabilités.

I. UNE PROGRAMMATION AMBITIEUSE, UNE EXÉCUTION BUDGÉTAIRE CONTRARIÉE

A. UNE PROGRAMMATION AMBITIEUSE, CENTRÉE SUR LES ÉQUIPEMENTS

1. Un Livre blanc ambitieux

Troisième document de ce type sous la Ve République, après ceux de 1972 et 1994, le Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale de 2008 répondait à l’objectif de « parer aux risques et aux menaces susceptibles de porter atteinte à la vie de la nation » (1) en dressant une analyse stratégique globale pour les quinze années à venir et en proposant un cadre général pour l’élaboration d’une nouvelle politique de défense et de sécurité. Cette initiative était d’autant plus justifiée que la professionnalisation de nos armées décidée en 1996 avait atteint un niveau de maturité suffisant pour tirer des enseignements pertinents et tracer des perspectives réalistes.

Innovation majeure par rapport au précédent, ce Livre blanc appréhendait de façon globale nos intérêts de sécurité, sans les limiter aux seules ambitions de défense. Il définissait pour ce faire une stratégie de sécurité nationale apportant des réponses à l’ensemble des risques et menaces anticipés.

Cette stratégie de sécurité nationale s’articulait autour de cinq nouvelles fonctions stratégiques dont les forces de défense et de sécurité doivent avoir la maîtrise :

– la connaissance et l’anticipation, érigée en priorité ;

– la prévention ;

– la dissuasion, fondement essentiel de cette stratégie, garantie ultime de la sécurité et de l’indépendance de la France ;

– la protection ;

– l’intervention.

Pour remplir ces cinq fonctions stratégiques, le Livre blanc de 2008 annonçait sur la période 2009-2020 un effort de défense, certes important, mais cohérent, avec le double souci d’améliorer la disponibilité et la modernisation des équipements les plus utilisés en opérations et de lancer les programmes liés au renseignement et à la préparation de l’avenir.

L’effort financier qui devait accompagner les choix retenus était « majeur et cohérent », sans baisse des crédits de défense.

Il était ainsi prévu que, dans un premier temps, les ressources annuelles (hors charges de pension) soient maintenues en volume, c’est-à-dire croissant au rythme de l’inflation, abondées par des ressources exceptionnelles.

Dans un second temps, dès l’année 2012, le budget devait s’accroître au rythme de 1 % par an, en volume, c’est-à-dire de 1 % en plus de l’inflation. D’ici 2020, l’effort total consenti pour la défense, hors pensions, devait donc s’élever à 377 milliards d’euros.

En parallèle, avec une diminution importante des effectifs sur six à sept ans (– 54 000 postes) et une réduction des coûts de fonctionnement du ministère et des armées, les marges de manœuvre dégagées devaient être intégralement réinvesties au profit de la condition du personnel, mais surtout au profit du budget d’équipement qui devait passer de 15,2 milliards d’euros en 2008 à 18 milliards d’euros en moyenne par an pour la période 2009-2020.

2. Une loi de programmation de production

La loi de programmation militaire pour les années 2009 à 2014 avait pour objectif de définir précisément les modalités physiques et financières pour réaliser l’ambition définie par le Livre blanc.

Examinée au printemps 2009 par le Parlement, la loi de programmation militaire souffrait dès l’origine d’un handicap certain par rapport à l’ambition affichée par le Livre blanc adopté en juin 2008, la crise internationale de l’automne 2008 ayant contraint les pouvoirs publics à adopter une nouvelle stratégie pour les finances publiques.

Cette loi de programmation militaire n’en demeurait pas moins ambitieuse, son axe structurant étant le renforcement de l’outil de défense par un effort sur les équipements. Ainsi, elle prévoyait de nombreuses commandes et livraisons pour la plupart des grands contrats d’armement (Rafale, FREMM, A400M, Barracuda, MRTT, VBCI et Félin), permettant d’engager le renouvellement des principaux matériels des armées caractérisés par une forte ancienneté.

Sur la période de la programmation, les crédits d’équipement devaient bénéficier de 101,25 milliards d’euros, passant de 15,4 milliards d’euros en 2008 à plus de 18 milliards d’euros en 2014. Le graphique ci-après présente l’évolution annuelle prévisionnelle de ces crédits.

Évolution prévisionnelle des crédits d’équipement

(en milliards d’euros 2008)

Source : alinéa 469 du rapport annexé à la loi de programmation militaire.

Comme l’avaient relevé les rapporteurs de la commission de la défense sur le projet de loi de programmation, « il est regrettable que le rapport annexé ne reprenne pas la nomenclature budgétaire existante » (2), ce qui a pour conséquence de rendre plus difficile le suivi de son exécution. Selon la loi, les crédits d’équipement couvrent « les crédits consacrés aux opérations d’armement, à la dissuasion, à l’entretien programmé des matériels et du personnel, à l’infrastructure et aux études de défense » (3).

La loi de programmation décomposait cette enveloppe de 101,25 milliards d’euros 2008 en cinq catégories de dépenses :

– 50,6 milliards d’euros pour les programmes à effet majeur (PEM), les programmes d’environnement et les équipements d’accompagnement ;

– 20,2 milliards d’euros pour la dissuasion, y compris les crédits d’étude, d’infrastructure et de MCO ;

– 17,2 milliards d’euros pour l’entretien programmé du matériel ;

– 8 milliards d’euros pour les infrastructures et la politique immobilière de la défense ;

– 5,25 milliards d’euros pour les études de défense (hors dissuasion).

À cette enveloppe de la loi de programmation est venu s’ajouter le volet défense du plan de relance de l’économie. Le 4 décembre 2008, le Président de la République Nicolas Sarkozy a présenté les principales orientations de ce plan de relance destiné notamment à accélérer les investissements publics. L’État devait ainsi consacrer 26 milliards d’euros à ces investissements dont près de 2,4 milliards d’euros pour la défense nationale. Ces crédits devaient notamment permettre d’anticiper des acquisitions d’équipements qui n’étaient programmés qu’après 2014.

Les crédits d’équipement de la programmation devaient ainsi bénéficier de 1,4 milliard d’euros supplémentaires et devaient permettre le lancement d’un troisième bâtiment de projection et de commandement (BPC), l’accélération des livraisons des moyens de protection des hélicoptères, l’accélération des livraisons de VBCI ou encore la commande anticipée de stations Syracuse pour les forces terrestres ou la marine.

B. UNE EXÉCUTION CONTRARIÉE

1. Un début d’exécution globalement conforme aux prévisions en début d’exercice

En matière d’équipements, les deux premières années d’exécution de la LPM ont été globalement conformes aux prévisions.

Si l’on s’en tient aux seuls crédits du programme 146 « Équipement des forces », on observe ainsi en 2009 une nette inflexion des paiements consécutive au lancement de la LPM, abondée par le plan de relance de l’économie. L’augmentation des paiements est spectaculaire cette année-là, leur volume augmentant de 2,5 milliards d’euros par rapport à 2008, permettant d’atteindre un montant total de paiements de 11,8 milliards d’euros.

La renégociation de différents contrats d’armement s’est traduite en outre par un niveau record d’engagements : 19,2 milliards d’euros, dont 9 milliards d’euros de commandes globales et 1,1 milliard d’euros de commandes issues du plan de relance de l’économie adopté en 2009.

Ces commandes globales portaient sur l’acquisition de 332 véhicules blindés de combat d’infanterie (VBCI), 16 554 systèmes d’armes FELIN, 150 missiles de croisière navals (MdCN), 680 armements air-sol modulaires (AASM), 1 200 bombes, 60 Rafale, 3 frégates européennes multi-missions (FREMM) et un second sous-marin nucléaire de type Barracuda. Parmi les commandes du plan de relance de l’économie, on peut relever la commande du troisième BPC ainsi que de quatre engins de débarquement amphibie et la batellerie associée.

Après une année 2009 exceptionnelle, les engagements 2010 furent nécessairement en retrait pour s’établir à 9,3 milliards d’euros. Les paiements s’établirent à 10,2 milliards d’euros cette année-là, dans la continuité de l’année 2009.

Au total, aux termes des deux premières années d’exécution, la trajectoire d’exécution de la LPM des seuls crédits d’équipement du programme 146 était très proche de la programmation initiale puisque l’écart n’était que de 600 millions d’euros fin 2011.

Cet écart s’explique principalement par la non-réalisation dans les temps d’une hypothèse forte retenue dans la construction de la loi de programmation militaire : les cessions de bandes de fréquences hertziennes. Celles-ci devaient procurer des recettes de 1,45 milliard d’euros entre 2009 et 2011 dont 600 millions en 2009 et 600 millions en 2010. Cette baisse des ressources budgétaires fut en partie compensée, on l’a vu, par le plan de relance de l’économie de 2009.

Les premières recettes des cessions de fréquences, affectées au compte d’affectation spéciale Fréquences (CAS F), ne furent versées qu’en 2011 pour un montant limité à 89,3 millions d’euros. Ce décalage du calendrier initial a pesé par la suite sur le respect des prévisions de la programmation.

2. Un décrochage évident à partir de 2011

Dès l’été 2010, dans un contexte de crise économique s’amplifiant et de volonté de maîtrise des comptes publics, l’élaboration de la programmation budgétaire triennale (PBT) 2011-2013 marque une nette inflexion par rapport à la trajectoire définie par la LPM.

La loi de programmation avait été construite sur la base des hypothèses budgétaires de 2009 qui prévoyaient un retour à l’équilibre des finances publiques dès 2012, devant permettre une croissance de 1 % par an du volume du budget de la défense à partir de 2012.

Compte tenu de la crise des finances publiques, cette hypothèse n’a pu se concrétiser et la programmation triennale a rectifié la trajectoire initiale en imposant une évolution en « zéro valeur » du budget de la défense.

À ces décisions de l’été 2010 sont venues s’ajouter des contraintes liées à la non-réalisation de certaines hypothèses financières de la LPM, grevant un peu plus les crédits destinés à l’équipement des forces.

La masse salariale, tout d’abord, malgré un niveau de déflation des effectifs en avance sur les prévisions, a baissé moins que prévu sous l’effet d’une forte augmentation des dépenses de mobilité et d’indemnisation et de nombreuses requalifications. Les hypothèses retenues pour le « glissement vieillissement-technicité » (GVT) se sont avérées insuffisantes. Cela a nécessité d’importantes dotations complémentaires de crédits pour les dépenses de personnel – plus de 1,5 milliard d’euros en lois de finances entre 2009 et 2012 – au détriment en premier lieu des dépenses d’équipement, tant pour les programmes d’armement que l’entretien programmé du matériel.

Par ailleurs, les hypothèses d’exportation du Rafale retenues dans la construction de la loi de programmation militaire ne se sont pas vérifiées. L’exportation de l’avion devait alimenter le plan de charge des industriels à hauteur d’un appareil en 2010 et de quatre appareils en 2011. L’État s’étant engagé auprès des industriels pour la production de 11 Rafale par an, l’absence d’exportation l’a contraint à accélérer le rythme de ses propres commandes. Cela a entraîné un surcoût de l’ordre de 350 millions d’euros sur la période de 2009 à 2011.

Enfin, pour faire face à l’aggravation des déficits publics, le Gouvernement a dû procéder, en gestion, à d’importantes annulations de crédits, formalisées dans les différentes lois de finances rectificatives. Ce sont ainsi pas moins de 200 millions d’euros qui ont été retirés au programme d’équipement des forces en 2011 et 500 millions en 2012.

Dès lors, malgré l’abondement en 2012 des ressources issues du CAS Fréquences pour 937 millions d’euros, les dépenses d’équipements s’écartent de la trajectoire de la LPM de manière significative à partir de 2011.

EXÉCUTION DES CRÉDITS DE PAIEMENT DU PROGRAMME 146
ÉQUIPEMENT DES FORCES

CP HT2

2009

2010

2011

2012

2013

En Md€ courant

Ressources budgétaires

Ressources CAS F

Ressources budgétaires

Ressources CAS F

Ressources budgétaires

Ressources CAS F

Ressources budgétaires

Ressources CAS F

Ressources budgétaires

Ressources CAS F

LPM 2009 - 2014

10,8

0,6

10,6

0,6

9,7

0,25

10,7

0

11,5

0

Exécution

11,8

0

10,1

0

8,6

0,089

8,5

0,937

   

Source : direction générale de l’armement.

Comme on peut le lire dans le tableau ci-dessus, les paiements du programme 146 baissent à 8,7 milliards d’euros en 2011 pour remonter à 9,6 milliards en 2012. Selon la direction générale de l’armement, l’écart par rapport à la programmation initiale se creuse donc à 3,5 milliards d’euros à la fin de l’année 2012, ce qu’illustre le graphique ci-après.

EXÉCUTION FINANCIÈRE 2009-2012 DU PROGRAMME 146 ÉQUIPEMENT DES FORCES

Source : direction générale de l’armement.

De surcroît, le Gouvernement a dû procéder à des arbitrages et décaler le lancement de plusieurs programmes d’armement après 2013 pour un montant total de près de 4,5 milliards d’euros. On peut notamment citer :

– le report de la commande du programme CERES (satellite d’écoute électromagnétique) de 2012 à 2015 ;

– le décalage de la rénovation des radars du système de surveillance aérienne du territoire (SCCOA 4) ;

– le report des rénovations des Mirage 2000D de 2010 à 2015, et des Atlantique 2 de 2011 à 2013 avec une réduction de la cible de 22 à 18 ;

– le décalage de l’acquisition de nouveaux équipements (MRTT de 2011 à 2013, SCORPION de 2012 à 2014, MdCN, ARTEMIS) ;

– le décalage des programmes de défense sol-air (de 2010 à 2013).

3. 2013, une année de transition ?

Dernier exercice budgétaire de la programmation en cours, le budget de l’année 2013 a été présenté comme un budget d’attente.

M. Fromion souligne que les crédits sont maintenus en valeur au niveau de ceux de 2012, ce qui est louable. Toutefois, si le budget général de l’État est en « zéro valeur » sur les années 2012 à 2015, celui de la défense, toutes ressources confondues se retrouve à - 4 % sur la même période. Son exécution est empreinte de réelles incertitudes liées aux perspectives d’annulations de crédits comme l’a indiqué aux rapporteurs le chef d’état-major des armées.

Pour autant, M. Rouillard relève que les ressources totales de la loi de finances pour 2013 sont identiques à celles de l’année 2012 et ont pour ambition de conserver une ressource pour l’équipement de plus de 16 milliards d’euros, dont 3,3 milliards pour la recherche et le développement, de préserver au plus haut les crédits d’activité et augmenter les crédits d’entretiens de matériels pour s’assurer une disponibilité maximale des équipements.

L’objectif d’augmentation de 1 % des crédits de la défense à partir de 2012 prévue par le Livre blanc de 2008 semble donc bien hors d’atteinte.

Si l’on reconstitue l’agrégat équipements dans son ensemble, à savoir les crédits de la dissuasion, des programmes d’équipement à effet majeur, des autres opérations d’armement, de l’entretien programmé du matériel, de l’entretien programmé du personnel et des études, les dépenses se sont élevées à 15,5 milliards d’euros en 2012 contre 18 milliards d’euros prévus par le Livre blanc de 2008.

ÉVOLUTION DES CRÉDITS D’ÉQUIPEMENT SUR LA PÉRIODE DE LA PROGRAMMATION

Source : État-major des armées.

En conclusion, sur la seule période 2009-2012 et alors que la LPM 2009-2014 avait identifié la nécessité d’un effort important sur le renouvellement des équipements, les dépenses d’équipement s’établissent, selon l’état-major des armées, à 63,74 milliards d’euros contre 69,28 milliards prévus par la LPM, soit un écart de 5,5 milliards d’euros (- 7,8 %).

Il n’est pas contestable que la crise économique et financière qui secoue l’Europe et la France depuis 2008 a impacté la LPM 2009-2014. Au demeurant, la problématique qui s’attache de façon récurrente à l’exécution des lois de programmation militaire rend intéressant un regard critique sur les expériences d’un passé récent (cf. encadré ci-après).

M. Fromion souligne qu’au cours des périodes où les difficultés financières n’entraînaient pas des contraintes aussi lourdes qu’en la période actuelle, l’exécution des LPM ne pouvait être qualifiée d’exemplaire.

L’exécution des précédentes lois de programmation en matière d’équipements

La loi de programmation 1997-2002 fut celle du passage à l’armée de métier. Elle prévoyait de consacrer une enveloppe annuelle de crédits pour la défense de 30,68 milliards d’euros (185 milliards de francs). Dès 1998, les prévisions budgétaires ont conduit à une « revue des programmes » aboutissant à une baisse significative des financements. Les dépenses d’équipements ont été moindres de 13 milliards d’euros par rapport à la trajectoire initiale, soit l’équivalent d’une année de programmation (– 20 %). De nombreux programmes ont été annulés (satellite radar Horus, missiles tactiques terrestres et Apache), d’autres ont vu leur cible réduite (chars Leclerc, SNLE nouvelle génération), d’autres ont été retardés (Rafale, missile M51).

Une hausse importante des crédits d’équipement était prévue par la loi de programmation 2003-2008. Ils devaient être portés à 14,84 milliards d’euros par an – contre 13 milliards dépensés lors de la LPM précédente – soit 88,87 milliards sur la période. Mais de nombreuses raisons structurelles comme la hausse des crédits de fonctionnement et de rémunération, l’alourdissement des charges liés aux engagements en OPEX ou la dérive des coûts de grands programmes d’armement ont conduit à un écart d’exécution de 11 milliards d’euros en matière d’équipements en fin de programmation, soit les trois quarts d’une annuité (– 12,4 %).

Le graphique ci-dessous retrace les dépenses d’équipements des lois de programmation militaire depuis 1970 :

Source : direction du budget.

II. UNE MODERNISATION INCONTESTABLE MAIS DES DÉFICITS CAPACITAIRES IMPORTANTS

A. UNE MODERNISATION SÉLECTIVE DE L’OUTIL DE DÉFENSE : DES PROGRAMMES STRUCTURANTS EN VOIE DE LIVRAISON

La loi de programmation militaire pour les années 2009 à 2014 a incontestablement contribué à une réelle modernisation de nos forces armées, une diversification fonctionnelle et une amélioration des performances.

Un grand nombre de programmes d’équipements majeurs ont en effet commencé leurs premières livraisons tandis que d’autres arrivaient à leur terme, conformément à la programmation.

1. La dissuasion au rendez-vous de la modernisation

En application des orientations du Livre blanc de 2008 et des dispositions de la loi de programmation militaire, les crédits de la dissuasion se sont maintenus à un niveau élevé pendant la période de programmation. Les sommes prévues ont permis de poursuivre la modernisation des composantes et d’assurer ainsi l’avenir de la dissuasion française.

La composante aéroportée de la dissuasion est assurée par les forces aériennes stratégiques (FAS) et la force aéronavale nucléaire (FANU).

Les FAS se décomposent en plusieurs unités opérationnelles réparties sur l’ensemble du territoire regroupant des avions de chasse – Rafale et Mirage 2000N – porteurs des missiles à tête nucléaire et des unités de ravitaillement en vol.

Les avions de chasse sont désormais répartis en deux escadrons : un escadron de Mirage 2000N-K3, basé à Istres, dans les Bouches-du-Rhône, et un escadron de Rafale F3, à Saint-Dizier, en Haute-Marne. Un troisième escadron, situé à Luxeuil, en Haute-Saône, a été dissous en 2011 en application du principe de stricte suffisance posé en 2008 par le Livre blanc.

La polyvalence du Rafale et des équipages est un atout majeur pour notre dissuasion mais aussi pour l’armée de l’air : en mars 2011, des éléments de l’escadron de Saint-Dizier ont ainsi mené des missions conventionnelles de frappe ou de reconnaissance au-dessus de la Libye. D’une génération précédente, le Mirage 2000N-K3 est également un appareil de grande qualité qui peut assurer de nombreuses missions. Son retrait du service actif est prévu à l’horizon 2018.

La permanence de la composante aéroportée de la dissuasion nucléaire exige de disposer d’une capacité de ravitaillement en vol pour garantir aux appareils porteurs de missiles à tête nucléaire une élongation suffisante pour frapper à très longue distance. Celle-ci est aujourd’hui assurée par des C 135 et les KC 135 à l’âge avancé – plus de quarante-huit années de service. La commande de nouveaux avions ravitailleurs qui devrait être annoncée en 2013 est donc aujourd’hui indispensable (cf. infra).

Depuis 2009, les FAS bénéficient du remplacement progressif des missiles ASMP (air-sol moyenne portée) par des missiles ASMP-A (air-sol moyenne portée améliorée). Une première capacité opérationnelle ASMP-A a été mise en place sur les Mirage 2000N-K3 de la base aérienne d’Istres puis en 2010 sur les Rafale de Saint Dizier. Comme prévu, le retrait de service actif du dernier missile ASMP s’est achevé en mai 2011. Ces missiles sont aujourd’hui en cours de démantèlement. Les missiles ASMP-A sont équipés de têtes thermo-nucléaires, récemment renouvelées. Depuis 2009, la tête nucléaire aéroportée (TNA) a remplacé progressivement la tête nucléaire 81 (TN81), entrée en service en 1988. La TNA a bénéficié de la campagne d’essais de 1995 et a été validée in fine par simulation.

Les équipements de la FANU se sont également adaptés à l’arrivée de l’ASMP-A. Le porte-avions Charles-de-Gaulle a été modifié pour accueillir une première capacité opérationnelle sur Rafale au début 2010 et une pleine capacité à la fin de cette même année. Cette montée en puissance de la capacité Rafale/ASMP-A a permis l’abandon de la capacité ASMP du Super Étendard modernisé. Le retrait programmé des Super Étendard modernisés et des Mirage 2000N-K3 fera à terme du Rafale l’unique avion de la dissuasion aéroportée, capable d’opérer aussi bien à partir de la terre que depuis la mer.

La composante océanique de la dissuasion est mise en œuvre par la force océanique stratégique (FOST) qui s’appuie pour cela sur les sous-marins nucléaires lanceurs d’engins (SNLE). Sur la période de programmation, les objectifs capacitaires liés au contrat opérationnel ont pu être tenus.

Avec une flotte de quatre SNLE, la France est aujourd’hui au plancher de la crédibilité de sa composante océanique, la permanence en mer n’étant plus assurée en deçà de ce seuil. Depuis 1997, les quatre SNLE de la classe Triomphant ont progressivement remplacé les six SNLE de la classe Redoutable.

Le quatrième SNLE de la nouvelle génération, Le Terrible, a été admis au service actif en septembre 2010. Il a été le premier à recevoir la dotation en nouveau missile balistique, le M51, entré en service au mois de juillet précédent.

Une deuxième dotation en M51 sera mise en service courant 2013 sur Le Vigilant. Une troisième sera mise en service sur Le Triomphant en 2015 tandis que le quatrième SNLE, Le Téméraire, sera adapté au M51 à l’horizon 2018. Le M51 aura donc remplacé l’ensemble des M45 avant la fin de la décennie. La nouvelle tête nucléaire, plus adaptée et dite TNO, doit remplacer les têtes nucléaires actuelles dites TN75 à partir de 2015.

Sur le plan méthodologique, le renouvellement des équipements se déroule progressivement, au rythme d’un SNLE tous les deux ou trois ans, un cadencement qui illustre l’approche française, échelonnée, ce qui garantit la permanence de la dissuasion ainsi que la tenue rigoureuse des calendriers.

Enfin, ce que l’on considère souvent comme la troisième composante de la dissuasion, à savoir les transmissions, est également au rendez-vous de la modernisation.

Le Livre blanc de 2008 insistait en effet sur l’importance de celles-ci qui donnent au Président de la République la possibilité d’engager en permanence les forces nucléaires, y compris dans un environnement dégradé et alors que tous les autres réseaux de communication ont été mis hors service. Ces réseaux particuliers se décomposent en quatre grands ensembles :

– le réseau maillé et durci implanté sur le territoire permettant de relier les postes de commandement de l’exécutif avec les postes de commandement opérationnels ;

– le réseau de stations à très basses fréquences et hautes fréquences de la force océanique ;

– le réseau des stations radios des forces aériennes stratégiques ;

– un système de dernier recours permettant d’émettre les ordres essentiels lorsque tous les autres moyens ont été détruits.

La modernisation de ces réseaux a été engagée avec les programmes Ramses évolution, Ramses IV.1 puis Ramses IV.2 pour le réseau durci, Transoum pour le réseau de la FOST et Syderec pour le réseau de dernier recours. Ces opérations permettront de répondre aux besoins de la dissuasion pour les quinze ans à venir.

2. La fonction « connaissance et anticipation »

Pour la fonction « connaissance et anticipation », tous les objectifs capacitaires liés au contrat opérationnel n’ont pas été atteints : l’accroissement de nos capacités dans le domaine des satellites d’observation est toutefois en cours avec le lancement des deux satellites duaux Pléiades et le lancement de la réalisation de la composante spatiale optique de MUSIS.

La réalisation de la composante spatiale de ROEM (renseignement d’origine électromagnétique – CERES) a été décalée par les mesures de régulation budgétaire. Alors que la LPM prévoyait une commande en 2015 pour une livraison en 2016, la stratégie d’acquisition des systèmes de drones de moyenne altitude longue endurance (MALE) (4) a été réorientée pour tenir compte du traité franco-britannique du 2 novembre 2010. Celui-ci prévoit en effet le développement d’une capacité MALE pérenne en coopération avec les Britanniques et l’acquisition d’un système de drones MALE intermédiaire permettant de maintenir la capacité jusqu’à l’arrivée de cette future génération de drones (cf. infra). Les travaux liés au développement d’une charge utile ROEM aéroporté et à l’acquisition des données géophysiques au travers du programme GEODE 4D sont prévus pour débuter au cours de la nouvelle LPM.

3. La fonction « protection »

La plupart des objectifs capacitaires liés au contrat opérationnel ont été atteints.

La surveillance de l’espace aérien et extra-atmosphérique repose sur les moyens coordonnés par l’opération SCCOA (système de commandement et de contrôle des opérations aériennes). La modernisation du réseau de détection aérienne français est engagée avec la commande de plusieurs radars au titre de l’étape 4 du programme SCCOA. Par ailleurs, le radar GRAVES assure une capacité nationale de surveillance de l’espace qu’il conviendra de rénover d’ici 2015.

En matière de cybersécurité, la direction générale de l’armement (DGA) a tenu ses objectifs de renforcement de l’expertise de l’État. Elle s’est également assurée, en coopération avec l’ANSSI, de la disponibilité de produits de sécurité de haut niveau.

L’Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information

L’Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information (ANSSI) a été créée en juillet 2009, sous la forme d’un service à compétence nationale. Elle est rattachée au Secrétaire général de la défense et de la sécurité nationale (SGDSN), autorité chargée d’assister le Premier ministre dans l’exercice de ses responsabilités en matière de défense et de sécurité nationale.

Elle répond à une des recommandations du Livre blanc de 2008 qui invitait l’État à se doter d’une capacité de prévention et de réaction aux attaques informatiques, et à en faire une priorité majeure de son dispositif de sécurité nationale. En particulier, dans le domaine de la défense des systèmes d’information, il soulignait la nécessité de disposer d’une capacité de détection précoce des attaques informatiques, et d’une organisation propre à contrer les attaques les plus subtiles comme les plus massives. Dans le domaine de la prévention, il proposait un recours accru à des produits et à des réseaux de haut niveau de sécurité, et la mise en place d’un réservoir de compétences au profit des administrations et des opérateurs d’infrastructures vitales.

L’ANSSI a été créée pour mettre en place et développer ces diverses capacités. Elle est l’autorité nationale en matière de sécurité et de défense des systèmes d’information. Elle a pour principales missions d’assurer la sécurité des systèmes d’information de l’État et de veiller à celle des opérateurs nationaux d’importance vitale, de coordonner les actions de défense des systèmes d’information, de concevoir et déployer les réseaux sécurisés répondant aux besoins des plus hautes autorités de l’État et aux besoins interministériels, et de créer les conditions d’un environnement de confiance et de sécurité propice au développement de la société de l’information en France et en Europe. Son budget s’élevait à 75 millions d’euros en 2012 et elle dispose d’un effectif de 250 personnes.

L’amélioration de la protection contre les menaces NRBC a fait l’objet de la mise en place d’une organisation interministérielle (comité stratégique Défense NRBC-e) pilotée par le SGDSN. Au plan Défense, une opération d’ensemble SAFIR a été constituée pour piloter de façon cohérente les différentes composantes du système de défense NRBC. Le système est globalement cohérent avec les menaces à traiter et un schéma directeur a identifié les lacunes capacitaires à traiter en priorité.

Pour ce qui relève de la défense contre les menaces balistiques, le système satellitaire probatoire pour le recueil de signatures infrarouges de fonds de terre a bien été exploité entre 2009 et 2011 (SPIRALE) et un démonstrateur radar à très longue portée a été lancé pour une livraison prévue en 2014. La décision de lancement du programme d’alerte spatiale restait en attente des conclusions du Livre blanc de 2013.

4. La fonction « intervention » : des améliorations qualitatives évidentes

L’essentiel des objectifs capacitaires liés au contrat opérationnel a pu être tenu, à l’exception de ceux nécessaires à la distance de projection (8 000 km) restée sur la période hors de portée de nos capacités de transport aériennes et maritimes dans les délais de mise en place requis par le contrat (cf. infra).

a. Les forces terrestres : un saut qualitatif certain pour la composante coercition

Comme a tenu à le souligner le chef d’état-major de l’armée de terre lors de son entretien avec les rapporteurs, « le milieu terrestre est celui dans lequel finissent par s’affronter physiquement toutes les volontés ». C’est un « milieu complexe » où toute intervention est une combinaison de « projection de puissance » et de « projection de force ». Aussi, a-t-il poursuivi, « la réactivité et la puissance opérationnelle de l’armée de terre reposent sur la cohérence de ses capacités et la complémentarité de ses équipements ».

Force est de constater que la « remise à niveau des moyens de combat, en particulier des moyens terrestres », souhaitée par le Livre blanc de 2008, et affichée comme la priorité pour la période 2009-2014, demeure incomplète et que la cohérence de l’ensemble des composantes de l’armée de terre n’est pas pleinement assurée. Si l’arrivée de nouveaux équipements à haute technologie lui a fait franchir des sauts qualitatifs importants, elle ne saurait cacher des capacités dans l’ensemble vieillissantes.

Quatre grands programmes d’équipement ont été livrés selon le calendrier initial et ont permis, au cours de la période de programmation, de moderniser la composante coercition de l’armée de terre.

Lancé en novembre 2003, le système de combat FELIN (fantassin à équipements et liaisons intégrés), a été qualifié le 30 avril 2010. Premier système d’arme intégré de ce type, il est destiné à optimiser les capacités naturelles du combattant. Il s’agit d’un des programmes majeurs de modernisation des forces terrestres. Il contribue à accroître l’efficacité, la protection et l’intégration dans l’espace numérique de bataille des soldats au sol. Le système a été déployé dès le mois de décembre 2011 sur le théâtre afghan et, plus récemment, au Mali. Projeté un an après sa première livraison, le système de combat FELIN a consacré l’accession du combattant débarqué français au meilleur niveau mondial.

La commande globale porte sur 22 588 équipements avec une livraison achevée en 2015. Près de 10 000 équipements l’ont été d’ores et déjà été (avec 9 régiments équipés) soit plus de 40 % de la cible. Le coût unitaire d’acquisition par système est actuellement de 30 350 euros. Le coût global du programme sur 14 ans (durée de vie des équipements) est estimé à 1,86 milliard d’euros en ajoutant au coût de réalisation (1,122 milliard d’euros) l’infrastructure adaptée, les coûts de soutien et de maîtrise technique. L’objectif est de faire évoluer le programme afin d’alléger les 4 000 derniers systèmes avant la fin de production prévue en 2015.

Lancé en 2004 avec une cible initiale de 77 exemplaires, le programme CAESAR (camion équipé d’un système d’artillerie) est arrivé au bout de son exécution au cours de cette dernière programmation. Il a été qualifié en 2008 et la première livraison est intervenue en juillet de la même année. Les quatre derniers exemplaires ont été livrés à l’armée de terre en 2011, clôturant le programme dont le coût total s’élève à 339,18 millions d’euros.

Ses capacités sont un véritable atout pour l’armée de terre : le camion se déplace à 85 km/h sur route – 50 km/h sur chemin – et le canon tire 6 coups par minute avec une portée de 4,5 à 38 kilomètres, ce qui offre une grande souplesse d’action. Son temps de mise en batterie est inférieur à la minute. 8 systèmes ont été déployés en Afghanistan, 5 au Liban et 4 au Mali. Il a donné pleine satisfaction aux forces en apportant une capacité de feux d’appui directs ou indirects.

Le programme de VBCI (véhicule blindé de combat d’infanterie) est également en voie d’achèvement puisque pas moins de 445 véhicules avaient été livrés à la fin de l’année 2012 sur les 630 prévus à l’horizon 2015. La commande globale, en 2009, des 332 derniers VBCI a permis d’atteindre la cible initiale.

Sa projection en Afghanistan et au Mali en a démontré les qualités opérationnelles. Le retour d’expérience permet de dire que « cet engin de combat vient bien conférer à l’infanterie des capacités accrues, dont la plus-value opérationnelle est inestimable, et ce, sans pour autant révolutionner son concept d’emploi » (5). Les forces engagées en Afghanistan soulignent notamment ses capacités d’observation, de mobilité et de puissance de feu. De plus, sa masse imposante joue un rôle dissuasif. Le coût global du programme est de 2,8 milliards d’euros, le coût unitaire étant de 3,49 millions d’euros pour les véhicules de combat d’infanterie et de 2,74 millions pour la version poste de commandement.

Le programme d’hélicoptères de combat TIGRE est également bien avancé. Sa cible a été réduite de 120 à 80 exemplaires dès 2009, mais 40 ont déjà été commandés et plus de 40 ont déjà été livrés à la fin de l’année 2012. Comme cela a été indiqué aux rapporteurs, l’engagement de ces hélicoptères donne entièrement satisfaction. Ils ont montré en Afghanistan puis en Libye toute la plus-value qu’apportaient les dernières technologies en matière de pilotage de nuit, de conduite de tir et d’autoprotection. Le coût unitaire est de 27 millions d’euros dans sa version « appui protection » et 35,6 millions dans sa version « appui destruction ».

Ces équipements modernes hissent incontestablement l’armée de terre française au premier rang européen. Peu après leur livraison, ils ont été engagés sur des théâtres d’opération, à l’image des VBCI au Mali, preuve de la pertinence de ces besoins opérationnels.

Les moyens de combat « médians » (VAB, blindés légers de types AMX10RC et ERC90 Sagaie) restent en revanche un sujet de forte préoccupation en raison de leur âge et de leur obsolescence opérationnelle (cf. infra).

b. Les forces navales : les toutes premières livraisons d’équipements structurants

L’effort d’équipement de la marine ne devait intervenir que dans la seconde phase de la LPM (2015-2020). Celle-ci a néanmoins reçu au cours de la période écoulée, les toutes premières livraisons d’équipements de premier plan, esquissant ce que sera la marine de demain, technologique et optimisée.

Appelées à devenir la véritable épine dorsale de la marine, les frégates européennes multi-missions (FREMM) doivent remplacer les frégates de premier rang actuellement en service.

Lancé en avril 2002, le programme FREMM est mené en coopération avec l’Italie. La commande française a évolué à la suite du Livre blanc de 2008 et de la LPM qui a suivi : la commande initiale passée en 2005 prévoyait 17 bâtiments, à savoir : 8 frégates de lutte anti-sous-marine (ASM) et 9 frégates d’actions vers la terre (AVT). En 2008, le format a été réduit à un total de 11 frégates pour la marine nationale : 9 ASM et 2 de défense aérienne (FREDA). Les frégates AVT sont retirées du programme. Le programme FREMM demeure cependant majeur sur le plan budgétaire puisque son coût total est de 8,3 milliards d’euros.

Alors que les 11 frégates ont été commandées – dont 3 au cours de cette programmation, la première de la série, l’Aquitaine a débuté ses essais à la mer en 2011 et a été livrée à la marine le 23 novembre 2012. Elle devrait être admise au service actif au plus tôt à la fin de l’année 2013. Une seconde frégate devrait être livrée en 2014.

Les FREMM sont des bâtiments polyvalents qui pourront accomplir la large gamme des missions opérationnelles de la marine : sûreté de la force océanique stratégique, escorte d’unités précieuses, embargo, sécurisation des axes maritimes, action de l’État en mer…Équipées de nombreux systèmes d’armes et de renseignement, armées d’équipages optimisées (moins d’une centaine de marins), elles vont faire franchir un saut qualitatif significatif à la marine.

Par ailleurs, les frégates de type Horizon Forbin et Chevalier Paul, commandées lors de la LPM 2003-2008, ont été admises en service actif respectivement en 2010 et 2011.

La flotte de bâtiments de projection et de commandement (BPC) et des transports de chalands et de débarquement (TCD) a été complétée par l’admission au service actif du troisième BPC, le Dixmude, commandé en 2009 dans le cadre du plan de relance de l’économie. La batellerie a été modernisée par la livraison en 2012 de quatre engins de débarquement amphibies (EDAR)

Parmi les autres livraisons majeures pour la marine, on peut citer :

– l’avion de combat Rafale, en remplacement du Super Etendard ;

– l’hélicoptère NH90, qui doit remplacer le Lynx sur les frégates de nouvelle génération, Horizon et FREMM, à raison d’un hélicoptère par frégate. Si le programme a connu d’importants retards d’origine industrielle, 8 NH90 ont d’ores et déjà été livrés au 31 décembre 2012 et participent dès à présent aux missions de sauvetage en mer et de contre-terrorisme maritime. En revanche, leur capacité de lutte anti-sous-marine est toujours en cours d’acquisition

L’absence de second porte-avions reste une contrainte forte, affectant la permanence à la mer du groupe aérien embarqué pendant les arrêts pour maintenance du porte-avions Charles de Gaulle. Hormis ce point, les moyens navals dont dispose la marine lui permettent, hors contraintes spécifiques, de tenir le contrat de trois groupes navals (un GAN, un groupe amphibie et un groupe de frégates par exemple).

c. Les forces aériennes : l’aviation de chasse profondément renouvelée

Le Rafale est appelé à devenir le principal avion de combat de l’armée de l’air, remplaçant ainsi la large famille Mirage à l’exception des Mirage-2000D qui vont être modernisés. L’atout principal de l’avion est sa polyvalence, l’appareil pouvant remplir plusieurs types de missions au cours d’une même sortie : supériorité aérienne, reconnaissance, attaque au sol. Les qualifications de nouveaux standards enrichissent constamment ses capacités, telles que l’intégration de l’AASM IR (6) ou du pod Damoclès à l’été 2011. Les prochaines évolutions majeures portent sur les capteurs, notamment le nouveau radar à antenne active AESA dont le premier Rafale équipé vient d’être admis en service. Ce radar optimisera l’emploi du futur missile METEOR.

Le Rafale est opérationnel au sein de l’armée de l’air depuis 2006 et participe depuis à la posture permanente de sécurité (PPS). Engagé en OPEX en 2007, 2008, 2009 et 2011, il s’est particulièrement illustré dans l’opération Harmattan, entre mars et octobre 2011. Largement employé, il a ainsi confirmé la pertinence des choix de conception effectués durant la genèse du programme.

Sur les 286 Rafale prévus (air et marine), 180 ont été commandés pour l’armée de l’air et 115 lui auront été livrés à la fin 2012. Le plan de livraison des avions est, on l’a vu, toujours établi en tenant compte d’un contrat à l’exportation, le principal acheteur potentiel à ce sujet étant désormais l’Inde. Les négociations sont cependant toujours en cours. Le scénario actuel est donc celui d’une livraison de 11 Rafale par an jusqu’en 2017. L’année 2018 et une partie de 2019 seraient consacrées à l’exportation. À défaut, la fin des livraisons de la 4tranche interviendrait en 2018.

La frappe dans la profondeur repose sur les avions Rafale et Mirage 2000 armés de missiles SCALP, utilisés avec succès lors de l’opération Harmattan. Cette capacité est en voie de renforcement par une capacité de frappe navale (missile de croisière naval – MdCN), depuis les frégates FREMM et les sous-marins Barracuda. La capacité visée pour la fonction « ciblage » est globalement honorée, même si son volet « acquisition des cibles » repose sur des systèmes de renseignement tactiques ou de théâtre encore perfectibles (drones MALE et tactiques).

Le vieillissement de la flotte de transport tactique C130 et C160, couplé au retard pris par le programme A400M, a conduit à recourir à des solutions palliatives (acquisition de CASA 235 notamment). Avec le retrait progressif des Transall, il ne sera pas possible de satisfaire le contrat opérationnel tant que les A400M n’auront pas été livrés. Actuellement, la réduction temporaire de capacité (RTC) est compensée par le recours à des avions étrangers pour assurer la projection d’une force d’urgence, comme ce qui fut le cas au Mali.

De nombreux programmes concernent également les trois armées, tel que le programme Contact porté par Thales, leader mondial dans le domaine des radiocommunications militaires. Ce programme stratégique, notifié en juin 2012 par le ministère de la Défense, s’étale jusqu’en 2030 et va permettre d’équiper une grande majorité des plateformes des forces armées par une nouvelle génération d’équipements radio tactiques permettant d’offrir un débit accru, une plus grande sécurité et interopérabilité. En phase d’exécution de sa deuxième tranche, la bonne exécution de ce programme appelle une vigilance particulière.

B. LES FONCTIONS STRATÉGIQUES EN TENSION : CONNAISSANCE ET ANTICIPATION, PROTECTION, INTERVENTION

La programmation 2009-2014 a permis le renouvellement d’équipements majeurs. Pour autant, le manque de ressources a empêché d’atteindre tous les objectifs fixés par le Livre blanc pour les grandes fonctions stratégiques.

5. Connaissance et anticipation

Le premier secteur souffrant d’insuffisances concerne la fonction « connaissance et anticipation ». Les déficits sont de deux ordres : moyens satellitaires et drones.

a. Les capacités satellitaires

Le renseignement d’intérêt militaire nécessite de la précision, de la réactivité ainsi qu’une couverture mondiale et permanente. Cela suppose un ensemble cohérent de systèmes de collecte de données. Ces moyens sont coûteux et la régulation budgétaire a conduit à certains réaménagements dans la planification.

Le programme de capacités de renseignement électromagnétique spatial CERES a pour objectif de détecter, localiser et caractériser depuis l’espace les signaux envoyés par les systèmes adverses, notamment les émetteurs de télécommunications et les radars. En 2011, son lancement a été reporté de quatre ans.

Le programme MUSIS (7), successeur des systèmes d’observation spatiaux optique Hélios II, radars allemands SAR-Lupe et italiens Cosmo-SkyMed, vise quant à lui à offrir aux partenaires européens de la France (Allemagne, Belgique, Espagne, Grèce, Italie et Pologne) un ensemble de capacités de suivi de situation et de veille stratégique, une aide à la prévention et à l’anticipation des crises ainsi qu’à la planification et à la conduite des opérations. Indispensable à la souveraineté européenne, il a connu des retards du fait du retrait de nos partenaires européens.

Compte tenu du besoin impérieux pour les forces françaises, le Gouvernement a validé en 2008 le lancement en national de la réalisation de la composante spatiale optique sur un périmètre de deux satellites au lieu des trois initialement envisagés (la LPM reposant sur l’hypothèse initiale d’une participation de six pays européens). Il s’agit d’éviter toute rupture capacitaire lorsque les satellites actuels HELIOS II arriveront en fin de vie. Le programme a par ailleurs rencontré des difficultés techniques liées à la fabrication de certains composants qui ont conduit au report du lancement du premier satellite à 2017.

Pour l’avenir, les rapporteurs identifient des points de tension avec la fin de vie du démonstrateur ELISA (2016) et celle de la flotte des Transall Gabriel (2020), ainsi que sur les communications stratégiques, avec la fin de vie des satellites Syracuse 3 à compter de 2019 et l’obsolescence à horizon comparable du réseau d’infrastructure résilient SOCRATE.

b. Les drones

La LPM avait mal anticipé le besoin en drones MALE, prévoyant la commande d’une capacité pérenne en 2015 pour une livraison en 2016. Ce schéma n’était ni réaliste (les délais de commande et fabrication sont plus longs), ni adapté au besoin opérationnel.

La chronique de l’équipement en drones MALE est celle d’un échec politique et industriel. Au long des années 2000, nombreuses étaient pourtant les voix, notamment parlementaires, ayant appelé au lancement d’un programme européen ou national permettant de remplacer les drones intérimaires Harfang au tournant de 2010. Avec le recul, plusieurs raisons expliquent cet échec :

– une réticence idéologique et parfois organique de certains cercles militaires et industriels face à ce nouvel équipement, susceptible d’absorber des crédits limités et de modifier des pratiques sanctuarisées par la tradition ;

– la difficulté à monter un véritable partenariat industriel avec l’Allemagne sur ce sujet, ce dont attestent les échecs des projets EuroMALE et Talarion ;

– les retards de livraison du drone Harfang occasionnant pour les armées près de cinq années de retard dans la mise en service ;

– enfin, et compte tenu de ces différents facteurs, l’insuffisant suivi politique de la question dans la durée.

Après avoir retenu à l’été 2011 le projet d’adaptation nationale du drone israélien Heron TP par l’avionneur Dassault aviation, le ministère de la Défense a finalement annoncé en 2013, après plus d’un an de réflexion et de concertation, son choix d’acquérir une capacité de 12 vecteurs américains de type Reaper, dont un premier système en urgence, dès la fin de l’exercice en cours. Il devrait permettre de faire face aux urgences au Sahel. Se posera néanmoins la question de la circulation des données, sur laquelle le Gouvernement se veut vigilant : en l’état, nos alliés européens équipés de Predator n’ont eu d’autre choix que d’accepter le transit des informations via des satellites américains, avec des codes sources imposés. Une situation inconfortable de sujétion mais qui, à tout le moins, a le mérite de régler la question du partage du renseignement avec les États-Unis. M. Fromion souligne avec force les faiblesses de ce choix, sous contrainte, qui entame notre autonomie stratégique et industrielle.

Le bilan de la « décennie drones » est particulièrement décevant sur le plan de la base industrielle et technologique de défense (BITD). Responsables politiques, militaires et industriels n’ont pas su, voulu ou pu organiser une offre française pour répondre à un besoin pourtant évident depuis longtemps. Les parlementaires de la commission de la défense, toutes sensibilités confondues, avaient régulièrement mis en avant cette question et ne peuvent aujourd’hui que regretter cet épilogue.

Sur le moyen terme, la France travaille au développement d’un drone MALE européen, fondé sur un noyau industriel franco-britannique à la suite des traités dits de Lancaster House, signés le 2 novembre 2010. Ce projet mérite d’être soutenu car l’Europe doit se doter d’une capacité à fabriquer ses propres drones MALE. La maîtrise de cette technologie est cruciale Elle connaît un développement prometteur dans le domaine civil. Par ailleurs, sur le plan militaire, ces appareils sont non seulement devenus indispensables à la guerre moderne, mais la conception et la fabrication de ces systèmes d’armes font partie de l’ensemble plus large de l’aéronautique de combat. Il existe en effet une communauté technologique entre le développement des drones armés et l’aviation de combat. Il est donc nécessaire de traiter dans une même perspective les drones, ceux de combat et la préparation de l’avion de combat du futur, censé succéder au Rafale. L’axe franco-britannique doit être privilégié autant que possible, tout en mesurant bien la contrainte qui fait peser l’ancrage atlantique de la BITD britannique.

À moyen terme, il sera également nécessaire de développer un système de drone tactique terrestre ainsi qu’un drone aéromaritime embarquable sur les plateformes navales.

6. Protection

Si, pour la fonction « protection », la plupart des objectifs capacitaires liés au contrat opérationnel ont été atteints, les rapporteurs relèvent des fragilités concernant la surveillance de l’espace aérien et extra-atmosphérique. Celle-ci repose sur les moyens coordonnés par le système de commandement et de contrôle des opérations aériennes (SCCOA) ainsi que sur le radar GRAVES, qui assure une capacité nationale de surveillance de l’espace qu’il conviendra de rénover d’ici 2015.

Les rapporteurs identifient deux risques majeurs de rupture capacitaire au cours des années à venir. La sauvegarde maritime doit faire l’objet d’une attention particulière : ses moyens tant aériens que maritimes sont déjà passés en dessous du seuil des besoins minimaux et la mission d’action de l’État en mer, confiée à la marine nationale, en est durablement affectée, notamment outre-mer. Tout nouveau retard porterait un préjudice majeur à cette fonction. En outre, la modernisation du réseau de détection aérienne français devra impérativement être poursuivie, sauf à accepter des ruptures majeures dans la protection du territoire.

Aussi, en attendant l’arrivée des bâtiments de surveillance et d’intervention maritime (BATSIMAR), des avions de surveillance maritime (AVSIMAR) ou encore des bâtiments multi missions (B2M) des prolongations de bâtiments et aéronefs anciens ayant dépassé les trente ans d’âge vont devoir être conduites avec tous les risques inhérents à une telle opération.

Le programme BATSIMAR

Ce programme a pour objectif de remplacer la composante maritime hauturière (intervention rapide, emploi de la force graduée) en remplacement d’une flotte hétérogène (7 types de patrouilleurs différents) en fin de vie (30 à 40 ans en 2017) destinée principalement aux missions de sauvegarde : défense maritime du territoire, surveillance de la ZEE et police des pêches, lutte contre les trafics illicites et lutte antipollution et sauvetage.

La LPM 2009-2014 prévoyait la livraison de 16 unités à compter de 2017 à un rythme de 2 unités par an. Aujourd’hui, le programme est en phase amont et la conception détaillée n’a pas encore commencé. Aussi, du fait de l’urgence du traitement des ruptures temporaires de capacité (RTC), en particulier en outre-mer, il a été nécessaire de convertir des navires en patrouilleurs (Le Malin et L’Arago) et de prolonger la majorité des patrouilleurs et bâtiments de transports existants.

Afin de ne pas aggraver la réduction des capacités à l’horizon 2020, les rapporteurs resteront vigilants quant à l’exécution prochaine de ce programme.

7. Intervention

La plupart des objectifs capacitaires liés à la fonction « intervention » ont également pu être tenus. L’inquiétude porte toutefois sur les moyens nécessaires à la projection à distance (8 000 kilomètres), une ambition demeurée hors de portée des capacités de transport aérien et maritime dans les délais de mise en place et l’ampleur requis par le contrat opérationnel. Les déficits concernent essentiellement l’armée de terre et l’armée de l’air.

Ÿ En ce qui concerne les forces terrestres, les premiers déploiements en opérations (Afghanistan, Libye, Mali) du système FELIN ont amélioré la protection des fantassins et leur capacité d’agression. Ils ont été notamment accompagnés de véhicules de combat d’infanterie VBCI, d’hélicoptères de combat Tigre et de systèmes d’artillerie CAESAR. Tous ces systèmes ont été livrés au cours de la période selon un calendrier nominal. Cependant, les moyens de combat « médians » (VAB, blindés légers de types AMX10RC et ERC90 Sagaie) sont devenus un sujet de préoccupation croissante en raison de leur âge et de leur obsolescence opérationnelle (le programme Scorpion vise à les renouveler).

Le décalage du programme Scorpion (8), décidé en 2012, est particulièrement problématique car il porte sur la modernisation des principaux équipements de l’armée de terre. Son coût global est estimé à 2,5 milliards d’euros, mais le cœur, « l’info valorisation », représente 500 millions d’euros et permet la mise en place d’un socle de diffusion et de partage de l’information en temps réel, ainsi que des moyens de simulation. Les rapporteurs soulignent la gravité des conséquences pour nos forces terrestres d’un retard dans la mise en œuvre de ce programme majeur.

La capacité d’intervention de l’armée de terre pourrait également se trouver fragilisée compte tenu du décalage à 2014 du lancement de la version non protégée du porteur polyvalent terrestre (PPT II) et à 2016 pour sa version protégée ainsi que de la réduction de cible du véhicule léger tactique polyvalent (qui est passée de 2 400 véhicules à 1 800).

Ÿ Les capacités dans le domaine de l’aéromobilité constituent un point noir de cette programmation.

Tout d’abord pour des raisons industrielles. Le premier exemplaire de l’avion de transport européen A400M devrait être livré aux forces à la fin 2013, soit avec quatre années en retard (les premières livraisons devaient intervenir le 31 octobre 2009). Ce retard, associé à un surcoût significatif, a conduit le ministère de la Défense à décider de mesures palliatives coûteuses : étirement de la durée de service actif de la flotte de C160 Transall, particulièrement fragile, ainsi que l’acquisition de huit transporteurs Casa CN 235. Les capacités de transport tactiques se trouvent ainsi dans une situation sous-critique.

Mais ces retards s’expliquent également par des raisons budgétaires. Ainsi, la programmation prévoyait d’engager le renouvellement de la flotte des ravitailleurs de type C135 et KC135 par des avions MRTT en 2011. Ce sont en effet les plus vieilles plateformes aéronautiques en service au sein du ministère de la Défense. Elles souffrent de nombreuses fragilités et notamment de fréquents problèmes de cellule. À ce jour pourtant, aucun processus d’acquisition n’a été lancé. Compte tenu de l’urgence, l’objectif serait aujourd’hui de passer une commande à la fin 2013 pour escompter des premières livraisons en 2017.

La LPM prévoyait également la modernisation de l’aviation de combat afin d’aligner une flotte de 300 appareils polyvalents à l’horizon 2020. Si les commandes de Rafale ont été supérieures à la prévision, l’autre volet de la modernisation qui reposait sur la rénovation à mi-vie de la flotte des Mirage 2000D à partir de 2010 n’a pas pu être honoré. Cette rénovation devait permettre de transformer ces appareils en avions polyvalents afin de disposer d’une flotte homogène composée de Rafale et de Mirage 2000D rénovés en 2020. Le coût unitaire était d’environ 10 millions d’euros par appareil, pour une cible d’une soixantaine d’unités. Les besoins en ressources pour la LFI 2011 ont conduit à réorganiser les priorités au détriment de ce programme. L’adoption d’un nouveau format pour l’armée de l’air et les forces aéronavales laisse aujourd’hui ouverte la possibilité de reprendre ce projet. Pour compléter ce panorama, l’évolution du Rafale au standard F3R a également été reportée pour être désormais envisagée pour la programmation à venir.

Dans le domaine naval, le vieillissement des pétroliers-ravitailleurs à simple coque constitue une fragilité majeure pour la capacité de déploiement des groupes navals.

Pour la décennie à venir, les sujets d’attention sont multiples :

– le principe de mutualisation adopté par le Livre blanc, nécessitera de faire des arbitrages délicats, sur l’emploi des moyens, entre les missions permanentes et les missions occasionnelles : ceci sera particulièrement sensible pour les frégates anti sous-marines ;

– les lacunes concernant l’entrée en premier touchent plus particulièrement les capacités de suppression des défenses antiaériennes. Elles sont liées à l’absence de moyens de brouillage offensif ou de missiles spécifiques antiradars. Des travaux sont néanmoins en cours pour exploiter pleinement les moyens de détection disponibles à bord du Rafale (radar, système de contre-mesures, pod de reconnaissance) ainsi que ses armements air-sol « basiques », de manière à lui conférer des capacités performantes de destruction de ces défenses ;

– un nouveau report du programme Scorpion entraînerait une rupture temporaire de capacités, plus ou moins accentuée en fonction des décisions de la LPM relatives à la montée en puissance des équipements « médians » VBMR et EBRC (véhicule blindé multirôles et engin blindé de reconnaissance et de combat). Or, la fiabilité des véhicules de la génération actuelle est préoccupante et leur protection notoirement insuffisante face aux menaces modernes (9) ;

– la protection des véhicules blindés terrestres doit continuer à faire l’objet de travaux technico-opérationnels (introduction de systèmes de protection « active » contre les roquettes et missiles) ;

– dans le domaine de l’action navale, une décision quant à l’éventuel successeur de l’appareil de détection et de surveillance aériennes embarqué E2C Hawkeye devra être prise à l’horizon 2017 ;

– les capacités de sauvegarde maritime reposent aujourd’hui sur une flotte disparate de patrouilleurs hauturiers de 7 types différents, dont la plupart arrivent au terme de leur durée de vie et d’avisos A69 reconvertis en patrouilleurs de haute mer depuis 2009. L’analyse capacitaire montre que les prolongations déjà consenties sur un grand nombre de bâtiments en service ne laissent qu’une marge étroite. Le retrait de service des derniers P400, prévu en 2017 aggravera le besoin capacitaire. À cette date et sans compensation, la capacité hauturière, que ce soit outre-mer ou en métropole, présentera un déficit capacitaire supérieur à 50 %. C’est tout l’enjeu des programmes BATISMAR et B2M qui doivent incarner l’ambition maritime de notre pays ;

– le renouvellement de la capacité de guerre des mines navales, au travers de systèmes robotisés permettant d’éloigner les bâtiments du champ de mines et des menaces côtières, est nécessaire pour faire face à l’évolution des menaces nouvelles (y compris dans le cadre de la dissuasion) ;

– un nouveau décalage de la rénovation du Mirage 2000D aurait un impact à moyen terme sur le format de l’armée de l’air et sur la tenue de son contrat opérationnel ;

– à plus long terme, les évolutions de l’aéronautique de combat reposent sur l’introduction d’une composante non pilotée à l’horizon 2030 en complément du Rafale ; il convient d’en poursuivre les études de faisabilité et de démonstration à la suite du démonstrateur nEUROn.

C. L’ENTRETIEN DES MATÉRIELS : UNE ORGANISATION EFFICACE MAIS EN SOUS-DOTATION

Il semble que les moyens de l’équipement soient toujours tendus entre l’ambition d’acquérir un maximum de capacités et le besoin de les mettre en œuvre au maximum de leur potentiel, ce que permet l’entretien programmé des matériels (EPM) et, au jour le jour, le maintien en condition opérationnelle (MCO).

EPM et MCO

L’entretien programmé des matériels (EPM) est l’appellation usuelle retenue dans la nomenclature budgétaire au sein du programme 178 pour couvrir les opérations stratégiques d’entretien des matériels de chaque milieu (matériel des forces navales, terrestres ou aériennes). Le MCO couvre quant à lui :

– l’ensemble des processus organisations et acteurs directement financés au titre de l’EPM (tels que les industriels dans le cadre des marchés de maintien en condition opérationnelle), des acteurs internes au ministère ;

– le contenu physique des opérations d’entretien des équipements, qu’il s’agisse d’entretien préventif ou correctif (suite à aléas), effectué en entretien courant ou lors d’arrêts techniques spécifiques.

Les indicateurs de disponibilité des matériels ont évolué à partir de 2011 et ont été harmonisés suivant directive de l’EMA (10). Deux indicateurs sont utilisés :

– la disponibilité technique (DT), représentative de l’efficacité du MCO des matériels, est le ratio du nombre de jours de disponibilité sur une période considérée ;

– la disponibilité technique opérationnelle (DTO), qui rend compte de la capacité d’une famille de matériels à assurer le contrat opérationnel et s’appuie sur leur valeur opérationnelle et sur la DT.

1. Le bon fonctionnement de l’organisation par milieux

Sur le plan fonctionnel, les années 2000 ont vu la réorganisation des structures d’entretien des équipements, substituant à une logique d’armée une approche par milieu. Ont ainsi été créés : la structure intégrée de maintien en condition opérationnelle des matériels aéronautiques de la défense (SIMMAD) pour le milieu aéronautique, le service de soutien de la flotte (SSF) pour le milieu maritime ainsi que la structure de maintien en condition opérationnelle des matériels terrestres (SIMMT) pour le terrestre.

a. Le milieu aéronautique

Organisme interarmées, la SIMMAD a pour mission d’obtenir la meilleure disponibilité possible des matériels aéronautiques au regard du contrat opérationnel. D’un rôle initial essentiellement contractuel, ses responsabilités se sont progressivement élargies. Elle exerce désormais un rôle d’expertise et participe aux équipes de définition des programmes d’armement. Le périmètre de la SIMMAD a fortement augmenté depuis 2008 – notamment avec la prise en compte de l’aéronautique de la marine nationale –, les matériels de l’armée de l’air ne représentant plus que 60 % de son activité. Pour accomplir sa mission, la SIMMAD rassemble plus de 1 100 personnels issus des différentes forces armées et de la DGA.

Elle se consacre également à la préparation de l’avenir, anticipant les plans de charge futurs. Il s’agit par exemple de préparer le MCO des A400M, d’envisager le soutien en service des pod DAMOCLES MP ou encore de préparer le soutien en service des systèmes d’armes de la famille Sol Air Futur (FSAF), des missiles ASTER 15 et 30.

Un pôle du MCO aéronautique s’est développé dans la région bordelaise autour de la SIMMAD. Cette concentration permet des synergies au quotidien, illustrée par exemple par le plateau technique Sycomore, qui met en relation les principaux acteurs du MCO, notamment autour de la maintenance des moteurs.

Pour déléguer la maîtrise d’ouvrage, la SIMMAD établit des contrats avec des acteurs industriels variés, parmi lesquels le service industriel de l’aéronautique (SIAé), dont le fonctionnement est assis sur un compte de commerce. La SIMMAD est son principal client et son activité se répartit entre les activités de maintenance des aéronefs en tant que telles, celle des moteurs et enfin celle des radômes (11) et composites.

De l’avis général, le SIAé est un très bel outil, source d’économies pour la Défense. Le ministère estime ainsi que l’État a économisé entre 40 et 50 millions d’euros par an grâce à son action. Les exemples l’illustrant sont nombreux, tels que l’optimisation du cycle de maintenance des Alphajet ou encore l’accroissement de l’intervalle des grandes visites du Mirage 2000, du Lynx, de l’Atlantique, et aussi du Puma. Il joue également un rôle d’expertise très utile dans la négociation avec des industriels parfois en situation de monopole. Ainsi, ses compétences techniques ont permis de négocier à la baisse le contrat de remise en état des drones Harfang avec l’industriel lorsque l’un des vecteurs avait été gravement endommagé en Afghanistan (12).

b. Le milieu maritime

Créé en 2001 (13), dirigé par un ingénieur général de l’armement, le service de soutien de la flotte relève du chef d’état-major de la marine. Pour l’exécution de ses missions, il s’appuie sur la direction générale de l’armement et la marine nationale.

Il se compose d’une direction centrale basée à Paris, de deux directions locales à Toulon et à Brest au plus près des activités d’entretien, et d’antennes situées à Cherbourg et Outre-mer (Papeete, Nouméa, Fort de France, la Réunion), en charge des navires de ces ports et rattachées à la direction locale de Brest.

À titre d’illustration, le tableau ci-après donne le montant des crédits affectés au SSF pour l’entretien programmé des matériels placés sous sa responsabilité en engagements et en paiements sur 2012-2013 :

En millions d’euros courants

   

2012

LFI 2013

EPM naval

(dissuasion et classique hors munition)

Engagements

1253

621

Paiements

865

929,5

Source : SSF.

Le service qui rassemble des personnels civils et militaires de la marine nationale ou mis pour emploi par la DGA, a connu une réduction d’effectif régulière depuis sa création (1 570 personnels en 2003 ; 786 personnels fin 2012, répartis en 459 civils et 327 militaires). En particulier en 2011, 400 personnes ont été transférées au service interarmées des munitions (SIMu), dans le cadre du processus d’interarmisation des services de soutien spécialisé. À l’été 2012, les 10 agents restants à la station d’essais des combustibles et lubrifiants de la flotte (SECLF) ont été transférés au service des essences des armées (SEA).

Afin de prendre en compte le maintien en condition opérationnelle le plus en amont possible dans les opérations d’armement, le SSF désigne pour chaque équipement à venir un responsable du suivi en service, chargé de s’assurer de la viabilité du système de soutien dès le stade d’élaboration du programme et d’assurer la transition avec les contrats de MCO.

c. Le milieu terrestre

Créée à la suite du décret n° 2010-1238 du 20 octobre 2010, la structure intégrée du maintien en condition opérationnelle des matériels terrestres est un organisme à vocation interarmées qui relève du chef d’état-major de l’armée de terre.

La SIMMT est la structure de maîtrise d’ouvrage du ministère en charge de soutien spécifique du milieu terrestre. Forte de 1 087 personnels, elle est majoritairement implantée en Île-de-France sur le plateau de Satory, dans les locaux précédemment occupés par la direction centrale du matériel de l’armée de terre (DCMAT) et le service central des achats de la maintenance (SCAM), dont elle est l’héritière.

Elle est pilotée par un comité directeur, présidé par le chef d’état-major des armées, auquel participent les chefs d’états-majors d’armées et les directeurs de services spécialisés qui lui ont délégué leurs responsabilités en matière de MCO des matériels terrestres. Ce comité directeur est chargé de proposer la politique, de fixer les orientations et d’organiser les missions liées au maintien en condition opérationnelle des matériels terrestres, 90 % de ces matériels étant opérés par l’armée de terre.

Ses responsabilités s’exercent dans tous les domaines techniques, logistiques et budgétaires :

– elle assure la gestion logistique et comptable des équipements terrestres, des rechanges adaptés et outillages spécifiques ;

– elle participe aux planifications budgétaires ;

– elle passe les marchés relatifs à l’acquisition de rechanges, de prestations ainsi que de matériels terrestres, en dehors des opérations d’armement conduites par la DGA ;

– elle agit en matière réglementaire par l’entretien des référentiels.

En outre, la SIMMT garantit la mise en cohérence des méthodes, des outils et des capacités industrielles de maintien en condition opérationnelle, dans un contexte budgétaire contraint.

Pour ce faire, la SIMMT entretient des relations avec près de 350 fournisseurs privés dont environ 250 PME, au travers de marchés publics. La SIMMT se distingue par la grande diversité des matériels qu’elle est conduite à gérer : on recense ainsi, hors hélicoptères, 12 000 types de matériels, des chars Leclerc aux boussoles (contre environ 300 types de matériels pour le SFF ou 1 600 pour la SIMMAD).

Particularité du MCO terrestre, il mobilise une forte proportion de PME-PMI (environ 300, représentant près de 15 000 emplois) et les crédits d’entretien contribuent à soutenir la BITD terrestre. La SIMMT a conservé des capacités en propre lui permettant de produire également elle-même des pièces. La SIMMT conduit une politique de contractualisation exigeante avec ses prestataires, liant la rémunération au résultat.

La SIMMT permet à l’armée de terre de faire face à une forte sollicitation opérationnelle, avec environ 10 régiments projetés chaque année depuis plus de 10 ans. Ce besoin opérationnel permanent dimensionne l’organisation de la chaîne de soutien, au point parfois de priver les unités demeurées en métropole de l’ensemble des moyens nécessaires à l’entretien de leurs matériels.

Sur le plan méthodologique, les rapporteurs ont relevé avec intérêt toute l’utilité de réunir régulièrement les autorités en charge du MCO avec les sous-traitants des grands groupes, car il est en effet crucial de dialoguer directement avec ces acteurs, qui ont besoin d’entretenir un contact avec la haute hiérarchie militaire.

2. La sous-dotation des moyens du MCO

Régulièrement qualifiée de « LPM de production », la programmation 2009-2014 a maintenu les crédits d’entretien des équipements en sous-dotation chronique, faute d’avoir anticipé les besoins à un niveau suffisant en 2008. Elle se fondait sur une hypothèse de stabilité de la consommation permise par la réduction de format. Or, tout au long de la période, EPM comme MCO sont demeurés à des niveaux que l’on pourrait qualifier de « tout juste insuffisants ».

Sur le plan budgétaire, les trois armées ont connu des insuffisances croissantes. L’entretien programmé des matériels (EPM) de l’armée de terre nécessiterait théoriquement 430 à 450 millions d’euros par an pour chaque milieu (terrestre et aéroterrestre). Or, la dotation s’est trouvée minorée chaque année, s’élevant par exemple à 370 millions d’euros en 2013. En cumul, une annuité d’EPM a manqué sur l’ensemble de la période. Il n’a été possible d’en limiter les effets que grâce aux dépenses imputables à l’OPEX afghane (50 millions d’euros chaque année pour l’EPM terrestre, remboursés en fin d’exercice).

Les difficultés sont du même ordre concernant les matériels aéronautiques. Il faudrait ainsi 300 millions d’euros de plus par an, selon les chiffres donnés par l’état-major de l’armée de l’air, pour assurer une disponibilité du matériel suffisante à même d’assurer l’entraînement des pilotes tel que prévu dans le contrat opérationnel : 180 heures dans la chasse, 350-400 heures pour le transport et 200 heures pour les hélicoptères.

Au total, les crédits consacrés à l’EPM se sont éloignés des prévisions, ce qu’illustre le tableau ci-après.

ÉCART DES CRÉDITS D’EPM EXÉCUTÉS PAR RAPPORT À LA PROGRAMMATION

(en millions d’euros)

 

2009

2010

2011

2012

Cumul 09-12

Cumul 09-12

EPM

6

-97

-37

-93

-221

-8 %

Maintenues à moins de 10 % en cumulé, les baisses peuvent sembler relativement limitées. Cependant, leur accumulation dans le temps risque d’entraîner un besoin de crédits particulièrement élevé lors de la nouvelle programmation. Il pourrait être difficile d’assumer un tel report de charges, ce qui entraînerait inévitablement des dégradations de capacité.

Parallèlement des efforts importants ont été demandés aux armées sur le plan des effectifs. Le plan de déflation des effectifs organisé par le RGPP portait pour deux tiers sur ceux dits de soutien. Le périmètre RH de la fonction MCO a été évalué à environ 42 000 personnels militaires et civils en 2010. Les tableaux ci-dessous retracent l’évolution des réductions d’effectifs du MCO dans le cadre de la RGPP pour les milieux aéronautique et terrestre, le milieu naval n’étant pas concerné par le chantier RGPP.

GAINS CUMULÉS EN EFFECTIFS DEPUIS LE LANCEMENT DE LA RGPP :
MCO AÉRONAUTIQUE

 

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

Total

MCO aéro

521

1220

679

550

230

506

59

254

4 019

SIAé

30

90

80

30

80

77

105

228

720

 

551

1310

759

580

310

583

164

482

4739

Source : État-major des armées.

GAINS EN EFFECTIFS DEPUIS LE LANCEMENT DE LA RGPP : MCO TERRESTRE

 

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

Total

Terre

 

608

1573

800

575

146

192

 

3894

Air

2

30

22

39

41

0

   

134

Autres

       

12

17

27

 

53

 

2

638

1595

839

628

163

219

0

4084

Source : État-major des armées.

L’armée de terre indique avoir perdu 4 000 hommes et femmes chargés de la maintenance (soit 25 % des effectifs). Cet effort était considérable : les personnels du MCO représentaient 4 % de l’effectif global mais ont assumé 8 % de l’effort global. De son côté, l’armée de l’air reconnaît par exemple la nécessité de faire remonter le taux de mécaniciens, trop fortement réduit depuis les restructurations de 2008, afin d’espérer atteindre un taux de disponibilité opérationnel correspondant aux objectifs de la programmation, et devrait pour ce faire remonter à 11 – 12 personnes.

Les effectifs du soutien ont été d’autant plus sollicités que la France a entretenu un nombre important d’implantations en OPEX. Pour un même nombre de matériel, la multiplication du nombre d’empreintes logistiques crée mécaniquement un surcroît de besoin. Celui d’assurer un MCO de théâtre, dans des conditions d’insécurité parfois élevées, nécessite en outre de conserver des compétences en propre dans tous les domaines de base, quel que soit l’intérêt d’en confier l’essentiel au secteur privé en métropole.

La manœuvre dans le domaine des ressources humaines a été colossale. Il faut saluer la performance des personnels de soutien, qui sont parvenus à maintenir des taux de disponibilité opérationnelle à un niveau honorable, voire exceptionnel en OPEX, malgré les efforts considérables qui leur étaient demandés.

D. UN TISSU INDUSTRIEL DISPERSÉ MAIS RICHE

La souveraineté de la France repose sur plusieurs piliers dont l’un est industriel. Notre pays a la chance de disposer d’une industrie de défense de haut niveau, couvrant l’essentiel du spectre des besoins capacitaires. Rassemblant quelques grands groupes d’envergure internationale ainsi que de nombreuses PME, qui pèsent plus de 15 milliards d’euros de chiffre d’affaires par an, elle pourvoit près de 165 000 emplois directs, et autant d’indirects sur des domaines d’activité a priori peu délocalisables (cf. annexe 8). Elles fournissent des équipements ainsi que des services, incluant notamment l’EPM et le MCO des matériels, mais également, de façon croissante, des prestations de conseil ou de formation.

RÉPARTITION DES INDUSTRIES DE LA DÉFENSE PAR BASSIN D’EMPLOI

 

Ventilation des effectifs

industriels défense

Poids dans les effectifs

industriels totaux

Ile de France

28 %

12 %

Provence Alpes Côte d’Azur

15 %

20 %

Bretagne

9 %

10 %

Centre

9 %

10 %

Aquitaine

8 %

11 %

Pays de Loire

6 %

4 %

Midi Pyrénées

6 %

7 %

Basse Normandie

4 %

9 %

Source : conseil des industries de défense.

La défense est un levier de politique industrielle. L’achat de matériels français présente des avantages indéniables en termes de souveraineté, d’emplois, mais également budgétaire –il assure le retour de TVA au budget général –, et, plus généralement, sur le plan économique, la recherche de défense irriguant l’ensemble du tissu industriel, tant les grands groupes que les PME.

À l’exception de la fabrication de missiles, l’activité des industriels de défense repose généralement sur un plan de charge dual, mêlant activités civiles et militaires. Cet équilibre leur permet de lisser les effets de cycle – les deux secteurs connaissant généralement des variations différentes – et de mutualiser certaines innovations et leur savoir-faire. La croissance des débouchés exports dans le civil ainsi que le tassement des flux d’investissement militaire en Europe concourent à modifier cet équilibre. La part des activités militaires tend ainsi à décroître chez de nombreux acteurs. C’est le cas par exemple de Dassault aviation, pour lequel l’activité de défense ne représente plus que 25 % du chiffre d’affaires. En outre, la diversification des débouchés suppose d’entretenir un équilibre militaire/civil mais également marché intérieur/exportations. C’est par exemple la stratégie retenue par le groupe DCNS. Son plan de développement Championship affiche pour ambition de générer un chiffre d’affaires réparti pour un tiers de commandes militaires françaises, un tiers d’exportations militaires et un tiers de ventes dans le domaine civil des énergies renouvelables.

Combinée au plan de relance de l’économie, la LPM a assuré un plan de charge à l’industrie dans une période difficile pour les secteurs civil et militaire. La commande d’un BPC en 2009 a permis de donner un plan de charge aux chantiers de l’Atlantique alors confrontés à une situation particulièrement difficile. Toutefois, la dégradation de la situation budgétaire a malheureusement conduit à des annulations de commandes ou à l’étirement de programmes. Il semble néanmoins que ces restrictions aient été suffisamment bien pilotées pour ne pas plonger la BITD française dans de graves difficultés. Les responsables industriels auditionnés par les rapporteurs ont d’ailleurs affirmé leur compréhension des difficultés budgétaires. Les révisions de commandes sont plus acceptables pour l’industrie si l’État sait offrir en contrepartie une visibilité accrue sur ses perspectives de commandes à moyen et long termes. La filière missile a ainsi pu absorber des diminutions de commandes relativement importantes sur la période 2008-2013 tout en se restructurant, l’État ayant parallèlement identifié les domaines à ses yeux stratégiques, garanti un niveau de commande sur deux programmations, et confirmé l’importance des partenariats de défense européens et notamment franco-britannique.

La filière missiles

Société française, MBDA est issue de la fusion du français Aérospatiale Matra Missiles, du Britannique BAe Dynamics et d’Alenia Marconi Systems.

En France, les commandes concernant la filière missile ont été revues à plusieurs reprises depuis 2008, de l’équivalent d’une annuité. Le programme Aster est ainsi passé d’une cible de commande de 555 unités à une réalisation de 265, tandis que le RMV Mistral a diminué de près de moitié, passant d’une cible de 1 500 unités en 2008 à 850 aujourd’hui. Le programme Exocet a quant à lui été conduit conformément à la programmation.

En contrepartie, l’État s’est engagé à offrir une plus grande visibilité sur la conduite des programmes au cours des années à venir. C’est dans ce contexte que la société a initié un plan d’optimisation dit One MBDA, visant à accroître l’intégration du groupe et à diminuer ses coûts de fonctionnement de 30 %. Parallèlement, le groupe a diminué sa dépendance vis-à-vis des marchés intérieurs en menant une politique d’exportation dynamique.

En 2013, la décision du Président de la République de soutenir le programme d’antinavire léger (ANL) a non seulement marqué le soutien de la France dans le partenariat franco-britannique, mais a également souligné la confiance de notre pays dans le développement de groupes indispensables à la souveraineté européenne.

Les diminutions de commandes permettent à l’État de réaliser des économies, notamment en AE et, bien plus faiblement à court terme, en CP. Toutefois, ces renégociations ne sont pas toujours profitables sur le moyen et long termes du point de vue budgétaire. Ainsi, les cibles de FREMM ont été réduites depuis 2008, passant de 17 à 11. Or, l’étalement des commandes et les frais de dédit représentent l’équivalent de 3,5 bâtiments, sans compter l’impact négatif sur l’emploi et les bureaux d’étude.

Les compétences des bureaux d’études sont un patrimoine précieux dont disposent peu de pays. Les dépenses de défense doivent entretenir ce vivier afin de garantir dans la durée le maintien de la souveraineté nationale. Dans le domaine de l’aviation de combat par exemple, le groupe Dassault aviation entretien des bureaux d’étude au plus haut niveau mondial depuis plus de six décennies. L’absence de rupture de charge pour ces équipes a permis la transmission des savoir-faire sur plusieurs générations. Au cours de la LPM, le développement de programmes nouveaux, directement liés à l’aviation de combat a non seulement entretenu les compétences de l’avionneur, mais a même permis d’en développer de nouvelles. Le programme nEUROn a ainsi mobilisé une équipe de 250 ingénieurs pendant trois ans ; il importe aujourd’hui de conserver ce savoir-faire et de l’investir dans un programme de long terme afin de « transformer l’essai » technologique. Le projet de lancement d’un drone de combat en coopération avec le Royaume-Uni, envisagé pour la fin 2013 (pour un coût de développement d’environ 4 milliards d’euros (14)), s’inscrit naturellement dans cette perspective au même titre que la réflexion autour du futur de l’aviation de combat.

En complément des grands contrats, l’état-major des armées, les armées et les services en charge du maintien en condition opérationnelle veillent également au maintien de la BITD française, notamment au travers des contrats de MCO. Pour les grands groupes, ils sont le complément indispensable aux contrats d’équipement car ils contribuent à donner aux industriels de la visibilité économique dans le temps, à réaliser un chiffre d’affaires supplémentaire, mais également à entretenir des compétences (comme l’illustrent les chantiers de rénovation des Atlantique 2 ou encore les grandes visites du porte-avions Charles de Gaulle), ainsi qu’à s’imprégner d’un retour d’expérience direct issu de la confrontation des machines aux conditions d’emploi sur le terrain. Ces marchés sont également essentiels aux plus de 4 000 PME travaillant étroitement avec le ministère de la Défense, dont les structures de MCO sont parfois les clients exclusifs.

La LPM a vu une évolution importante du paysage français de défense. La montée au capital de Thales de l’avionneur Dassault, ainsi que celle du groupe Thales dans celui de DCNS, ont esquissé une recomposition industrielle horizontale. Les discussions entre Safran et Thales portant sur une optimisation des compétences de chaque groupe, fortement encouragées par l’État, n’ont malheureusement pas abouti. Il se constitue néanmoins un ensemble dans lequel les grands industriels français se regroupent, mettant fin par étapes à une dispersion somme toute assez marquée au regard de l’organisation retenue par nos partenaires européens, par exemple italien ou britannique.

L’industrie terrestre a également connu des changements importants. Le groupe Renault Trucks, sous capital suédois (groupe Volvo), a acquis en 2012 la société Panhard, deuxième constructeur français dans le domaine militaire terrestre, constituant ainsi un pôle industriel autour du suédois Volvo. La question du devenir de Nexter est toujours en suspens. Certes, l’entreprise, issue de la reconfiguration de GIAT industries, jouit d’une situation fort honorable, mais il est évident que faute d’une alliance avec un partenaire approprié, elle risque d’être fragilisée par son isolement.

EADS apparaît comme un cas particulier. Société européenne de droit néerlandais, elle est très fortement implantée en France autour de son pôle toulousain et possède des sociétés françaises clés pour notre défense, telles qu’Astrium qui participe notamment aux programmes spatiaux et au volet balistique de la dissuasion, ou encore Eurocopter. La société a connu une actualité forte au cours de la deuxième partie de programmation avec l’échec du projet de rapprochement entre elle et le Britannique BAe à la mi-2012 puis, à la fin de la même année, avec l’accord des gouvernements français et allemands pour diminuer leur participation au capital de la société.

La tentative de rapprochement EADS-BAe

Le projet de rapprochement des deux groupes visait à donner naissance à un géant européen de la taille de Boeing dans les domaines civils et militaires avec 77 milliards d’euros de chiffre d’affaires et 220 000 employés pour le nouvel ensemble (49 pour EADS et 28 pour BAe), contre 59 milliards d’euros pour Boeing. Un groupe qui aurait été leader mondial de l’aéronautique, de l’espace et de la sécurité. Ce projet était en partie motivé par la rétraction des commandes militaires de part et d’autre de l’Atlantique.

Les actionnaires d’EADS auraient détenu 60 % du futur groupe, les 40 % restant revenant à ceux de BAe. Chaque État devait disposer d’une « action en or », lui offrant une sorte de droit de veto sur les grandes décisions.

Le projet n’a malheureusement pas abouti et les rapporteurs le regrettent.

Comme l’avaient très pertinemment relevé les députés Dominique Caillaud et Jean Michel dans leur rapport d’information sur le sujet (15), la loi de programmation militaire 2009 -2014 a choisi de globaliser la plupart des contrats, qui ont de facto réduit l’activité des PME. Aussi, il est aujourd’hui nécessaire de mettre en place des dispositifs de soutien et d’accompagnement ont été mis en place à leur profit. C’est le cas par exemple du programme RAPID, conduit par la DGA et qui a permis de financer les PME innovantes à hauteur de 40 millions d’euros en 2012, porté à 50 millions d’euros en 2013 dans le cadre du pacte PME-Défense. Ce pacte vise à accroître le soutien de l’État au développement des PME de défense françaises en leur facilitant l’accès à certains marchés, en soutenant leur trésorerie et en encourageant l’innovation (16).

Dans le même sens, des labels en cours d’expérimentation ont été créés pour les PME et des partenariats avec les régions ont été établis – notamment avec la région Bretagne et la région Aquitaine.

Comme cela a déjà été précisé, environ 4 000 PME de défense travaillent étroitement avec le ministère de la Défense. Il s’agit donc d’un réseau dense, permettant de conserver une base industrielle et technologique forte dans notre pays. Pourtant, ces PME peuvent manquer de visibilité face aux grands groupes industriels. Aussi, après EADS, Safran, Thales, MBDA et Nexter, DCNS s’est également engagé, en ce mois de juillet 2013, par le biais d’une convention avec le ministère, à favoriser la croissance des PME sous-traitantes. Concrètement, les grands groupes industriels signataires s’engagent à améliorer l’accès des PME aux marchés de la défense, à favoriser des relations équitables et partenariales entre PME et donneur d’ordre et surtout, à contribuer à leur développement international. En effet, si la France est bien représentée sur les marchés internationaux de défense grâce à nos grands groupes, la place des PME reste à conforter. Notre réseau de PME est une des clés du renouveau de notre industrie française. C’est pourquoi, les rapporteurs s’engagent en faveur de leur développement et leur compétitivité.

Les PME dans le secteur de la défense : quelques chiffres

Plus de 4  000 PME sont répertoriées dans le secteur de la défense, la plupart d’entre elles exerçant des activités duales. Parmi elles, près de 400 sont considérées comme stratégiques par la DGA.

Selon une étude réalisée par la chambre de commerce et d’industrie de Lyon, sur les entreprises et la recherche dans la défense, l’activité défense représente entre 15 et 32 % du chiffre d’affaires des PME et cette part est supérieure à 50 % pour seulement 20 % des entreprises du panel. L’activité de ces entreprises de défense est fortement tournée vers l’innovation.

Source : rapport d’information de MM. Caillaud et Michel précité.

En effet, la pérennité de notre BITD et sa nécessaire consolidation sont les gages de notre souveraineté. Or le marché national n’offre pas de perspectives suffisantes pas plus d’ailleurs que le contexte européen de réduction des budgets militaires et d’un immobilisme institutionnel. L’exportation et le développement de coopérations industrielles dans l’environnement extra-communautaire s’imposent donc comme des impératifs de défense nationale.

III. L’ENGAGEMENT EN OPÉRATIONS, ENTRE MODERNISATION ET FRAGILITÉS

L’analyse capacitaire des armées doit s’établir à l’aune du Livre blanc de 2008, qui définissait leurs grands objectifs. Mais il doit également se lire au travers du prisme des opérations, et singulièrement de l’engagement des forces en OPEX. Au cours de la période de programmation, trois grands engagements peuvent ainsi être considérés comme dimensionnant : l’Afghanistan, la Libye et le Mali.

Cette approche permet de constater le haut niveau atteint par les armées françaises en opération. D’autant que les dépenses engagées au titre des urgences opérationnelles ont permis de combler certaines défaillances dans de déroulement de la programmation, mais aussi de moderniser graduellement les forces. Néanmoins, dans ce contexte contraint, la priorité donnée à de longs engagements extérieurs induit également un coût capacitaire, les moyens demeurés sur le territoire national s’en trouvant parfois fragilisés.

A. LES RÉUSSITES D’UNE ARMÉE MODERNE ET PROFESSIONNELLE EN OPÉRATIONS

En deux décennies, l’armée française a su se transformer profondément, passant d’une armée de conscription organisée pour affronter l’Union soviétique mais peinant à se projeter en Irak à une armée moderne projetable et capable de conduire une coalition.

S’agissant de l’Afghanistan, l’engagement français a connu trois phases distinctes :

– entre 2001 et 2008 : un déploiement terrestre essentiellement centré sur Kaboul, ainsi que le déploiement de capacités de combat aériennes depuis la mer, puis à partir de bases aériennes ;

– entre 2008 et 2012 : un engagement dans des zones de combat de plus haute intensité en Surobi-Kapissa, les forces françaises se trouvant alors directement aux prises avec une guérilla ;

– depuis la fin 2012 et jusqu’en 2014, le retrait des forces qui occasionne la plus grande manœuvre logistique depuis plusieurs décennies.

L’ensemble de ces configurations a conduit les forces armées à mobiliser un spectre étendu de capacités, d’une façon globalement réussie.

En premier lieu, les capacités d’entraînement des troupes se sont révélées cruciales, en particulier à partir de 2008. Les modules spécifiques de formation au théâtre afghan se sont déroulés sur le site du 1er régiment de chasseurs d’Afrique basé à Canjuers. De l’avis général, l’armée de terre a offert un entraînement de très grande qualité. Les soldats des différentes armées ayant servi sur le territoire afghan ont, par ailleurs, bénéficié d’une étape de réacclimatation dans un sas dit « de décompression » installé à Paphos (Chypre) avant leur retour en France. L’amélioration de la prise en charge des personnels en amont comme en fin de mission est la conséquence d’une décennie d’engagement en Afghanistan. Un détachement d’adaptation opérationnelle a été mis en place en 2009 afin de superviser les préparations aux OPEX œuvrant en milieux complexes.

Sur le terrain, les équipements de l’armée de terre se sont montrés globalement adaptés et robustes, à l’image du VAB. L’embuscade des 18-19 août 2008 en vallée d’Ouzbine a mis en lumière certaines insuffisances et, dans le même temps, a conduit à accélérer la modernisation de l’armée de terre. Celle-ci, en comparaison avec ses homologues anglo-saxonnes n’avait en effet pas connu le « choc modernisateur » de l’Irak. Ainsi, le retour sur cette embuscade a souligné tout l’intérêt d’accompagner systématiquement les manœuvres d’une couverture par des drones tactiques. Nos groupements tactiques interarmes (GTIA) ont rapidement été équipés en drones de type SDTI-Sperwer, fabriqués par la société Sagem, qui ont donné entière satisfaction sur le théâtre (771 vols effectués entre 2008 et 2012).

L’appui feu a également été renforcé avec le déploiement, dès leur mise en service opérationnelle, des hélicoptères de combat Tigre.

L’apport des hélicoptères de l’aviation légère de l’armée de terre (ALAT)

Le Tigre a donné entière satisfaction lors de son emploi (Afghanistan, Libye, Somalie, Mali), ce qui a confirmé la pertinence des choix de conception. Il a permis d’assurer l’appui protection et la sécurité des convois en Afghanistan, avec un effet dissuasif remarqué sur l’ennemi.

Son action décisive en Libye, en duo avec des Gazelle équipées de missiles Hot, a également démontré la pertinence de la version HAD équipée du missile Hellfire II. Opérant à partir de bâtiments de projection et de commandement de la marine, leurs équipages ont pris des risques considérables et accompli de véritables prouesses.

Les hélicoptères de manœuvre (COUGAR, CARACAL, PUMA) ont également été largement déployés au profit de mission de secours ou de transport de commandos, particulièrement par les forces spéciales.

Les dizaines de PUMA opérés de jour comme de nuit pour le transport ont confirmé leur utilité, même si, pour l’armée de terre, « leur vétusté s’est également fait sentir ».

Les premiers équipements FELIN ont été déployés, renforçant encore la supériorité de l’armée de terre dans les interventions de nuit. L’effort de sécurisation a été utilement complété par les actions civilo-militaires menées par les armées, ainsi que le travail d’accompagnement des gendarmes dans le domaine de la sécurité (17). À cet égard, la complémentarité armées-gendarmerie fait incontestablement partie des atouts de la France sur les théâtres asymétriques.

Également déployées dans le cadre de l’opération Atalante de lutte contre la piraterie maritime, les forces de la marine nationale ont pris une grande part aux opérations en Libye et au Mali. Elles ont assuré des missions de projection de puissance depuis la mer grâce aux Rafale depuis le porte-avions, et aux hélicoptères de combat de l’ALAT embarqués sur les BPC. Par ailleurs des Atlantique 2 ont réalisé des tirs de bombes guidées laser sur des désignations à partir de drones. Dans le même temps, des missions de transport, de protection, de renseignement, grâce à ses Atlantique 2, ses frégates et ses SNA.

L’opération Atalante

L’opération Atalante est la première opération navale de l’Union européenne et s’inscrit dans le cadre de la politique européenne de sécurité et de défense (PESD) pour lutter contre la piraterie. Adoptée par le Conseil de l’Union européenne le 10 novembre 2008, elle a pour mission de fournir une protection aux navires affrétés par le PAM, de protéger les navires marchands et recourir aux moyens nécessaires, y compris à l’usage de la force, pour dissuader, prévenir et intervenir afin de mettre fin aux actes de piraterie ou aux vols à main armée qui pourraient être commis dans les zones où ceux-ci s’exercent, principalement au large de la Somalie et dans le golfe d’Aden.

L’opération est jusqu’à aujourd’hui un succès tactique. En effet, selon le rapport du bureau maritime d’information (BMI), en 2012, la piraterie mondiale a connu un net recul. Les attaques de pirates sont passées de 439 en 2011 à 297 en 2012. En Somalie et dans le golfe d’Aden, seules 75 attaques ont été recensées contre 237 en 2012.

Déployées dans le ciel libyen, l’armée de l’air et la marine ont démontré que la France disposait d’une grande armée aérienne : maîtrise du temps et de l’espace, capacité d’élongation, contrôle de l’emploi de la force jusqu’au moment ultime, maîtrise des risques. Le Rafale a donné entière satisfaction, permettant lors de l’opération Serval de réaliser des missions dans le Sahel depuis la France, pendant plus de neuf heures et demi d’affilée. Le drone MALE Harfang a effectué en Afghanistan son premier déploiement en OPEX. Il a participé à l’opération Harmattan et vole actuellement au Mali à un rythme jamais atteint (plus de 100 heures par semaine). Aux fonctions de surveillance, le Harfang a confirmé au Mali son utilité pour la désignation laser de tir d’armement. Désormais, il n’est plus concevable d’engager de telles opérations sans drones MALE.

De même, l’ensemble des capacités SIC permettent à la France d’assurer les responsabilités de nation-cadre ainsi que le commandement de composantes terrestre, navale, aérienne et de forces spéciales. L’opération Serval a rappelé quant à elle à quel point il était indispensable de disposer de capacités satellitaires souveraines pour le renseignement comme pour les communications.

L’intervention au Mali, outre qu’elle conforte les observations se rapportant à l’engagement de nos forces en Afghanistan, a prouvé la pertinence du dispositif de souveraineté en Afrique. La base logistique de Dakar a servi de pivot pour le déploiement des cinq Atlantique 2 de la marine, des systèmes de détection et de commandement aéroporté (SDCA) et les moyens de transport aériens et maritimes pour le transit des équipements, de la logistique et surtout des personnels de l’armée de terre, mobilisés en 48 heures dans le cadre du dispositif GUEPARD. Il s’agit de moyens non permanents mais qui ont pu être projetés parce que la France a conservé une escale aérienne (créneaux d’atterrissage, soutien en carburant, mais pas de munitions) à Dakar. Ces points d’appui sont capitaux : ils assurent la réactivité de la France dans la région. Discuté au cours de la programmation, le maintien de la base française à N’Djaména semble plus que jamais crucial. C’est depuis cette base qu’ont opéré par exemple des avions de combat mobilisés pour arrêter les groupes djihadistes armés. Le pré positionnement de forces spéciales dans la région a permis aux forces françaises d’être présentes sur le terrain et d’agir de façon déterminante moins de 24 heures après la décision du Président de la République.

Sur le terrain, les forces françaises ont travaillé de façon cohérente. L’armée de terre a constitué sur place des groupements tactiques interarmes. Ils regroupent des éléments venus d’unités différentes autour de celles issues d’un régiment pivot et est constitué à l’avance afin de bénéficier ensemble de la préparation opérationnelle. De surcroît, les armées ont amélioré leur interopérabilité, tant entre elles qu’avec les armées alliées, comme l’illustre la généralisation des systèmes de communication interalliés ROVER, acquis en urgence opérationnelle.

Toutefois, ces opérations, et notamment celle conduite au Mali, ont rappelé les faiblesses identifiées par les rapporteurs, en premier lieu des moyens dévolus au transport tactique et stratégique, au ravitaillement en vol, ainsi que ceux du renseignement, en particulier les capacités en drones. De ce point de vue, les livraisons annoncées pour la programmation à venir seront déterminantes. L’A400M augmentera considérablement la capacité d’emport sur longue distance par rapport aux C160 Transall et C130 Hercules, et donc la réactivité de l’armée française.

Enfin, des capacités très spécifiques ont été mobilisées telles que le parachutage de troupes ou d’équipements en basse altitude. Certaines de ces compétences sont parfois menacées par manque de personnels ou, surtout, de disponibilité technique. Les opérations menées en Libye ou au Mali prouvent qu’il faut les conserver car c’est bien le fait disposer du spectre le plus large de capacités, utilisées de façon cohérente qui conditionne la souveraineté de la France, ainsi que son rang sur la scène internationale.

De ce point de vue, les opérations en Libye et surtout au Mali ont mis en lumière les positions de nos alliés européens. Si, dans le ciel malien, les forces françaises ont pu compter sur l’appui – immédiat et sans restriction d’emploi – de forces britanniques, belges ou encore danoises, au sol, nos alliés ne sont aucunement européens mais bien tchadiens, nigériens ou mauritaniens. Pour les rapporteurs, cette situation est une véritable interpellation dans le cadre des réflexions concernant l’Europe de la défense.

B. LE BON FONCTIONNEMENT DES PROGRAMMES EN URGENCE OPÉRATIONNELLE

Les succès en opération ont été obtenus grâce au haut niveau de qualification des personnels et à la qualité de leurs équipements, c’est-à-dire par le bon déroulement de la programmation. La confrontation au terrain a cependant induit des besoins nouveaux, peu ou pas anticipés dans la planification. Pour y faire face, les armées ont la possibilité de mobiliser des ressources limitées permettant de faire face aux besoins les plus pressants dans le cadre des procédures dites d’urgence opérationnelle (UO).

L’instruction générale 1516/DGA définit l’urgence opérationnelle comme une procédure particulière de conduite d’une opération d’armement permettant de répondre à un besoin impérieux dans des délais très courts. Le recours à cette procédure relève d’une décision du CEMA. Leur financement est assuré par un réagencement des plans d’engagement annuels et le ralentissement ou la suspension de certaines opérations programmées. En cas de difficulté, des arbitrages peuvent être décidés au sein du programme 146.

Pour ce dernier, les dépenses induites directement par les urgences opérationnelles ont évolué en fonction de l’intensité de l’engagement sur le théâtre afghan, ce qu’illustre le tableau ci-après.

ÉVOLUTION DES CRÉDITS D’URGENCE OPÉRATIONNELLE ENTRE 2007 ET 2012

(en millions d’euros)

 

2007

2008

2009

2010

2011

2012

Montants des UO lancées

6

128

237

153

127

<4

Source : Ministère de la défense.

L’essentiel des UO a en effet été mobilisé pour le théâtre afghan, ce que montre le diagramme ci-après :


Source : Ministère de la défense.

L’Afghanistan a absorbé l’essentiel des ressources consommées. Le théâtre a ainsi joué un rôle de modernisation de premier plan. Les UO ont représenté un montant total d’environ 560 millions d’euros sur le programme 146. Il s’agit de montants importants, mais relativement contenus par rapport aux dépenses engagées par certains alliés, par exemple britanniques, qui se mesurent en milliards d’euros.

Le diagramme ci-après décrit la ventilation par année du volume d’UO afghan.


Source : Ministère de la défense.

La prise de responsabilité en Surobi-Kapissa à l’été 2008 a entraîné un surcroît de dépenses. Elle explique la forte augmentation de dépenses sur la période 2008-2011. À compter de l’été 2008 en effet, l’intensification des combats (marquée par l’attaque d’Ouzbine) et l’augmentation du contingent français (de 900 hommes en 2006 à 3 300 en 2008) comme des moyens déployés ont nécessité une adaptation des équipements ainsi que l’acquisition de certains matériels spécifiques. Le durcissement du théâtre afghan s’est traduit par l’investissement de plus de 80 % des ressources consacrées aux UO pour ce théâtre. Concrètement, de nombreuses urgences opérationnelles ont été nécessaires pour combler le manque de protections de nos forces de contact, notamment face aux menaces des engins explosifs improvisés (EEI) et roquettes, ce qui impliquait par exemple l’installation de surblindages, de toureleaux téléopérés ou encore de brouilleurs. Le système ROVER, indispensable à l’interopérabilité des armées avec les alliés, a également été commandé dans ce cadre, d’abord pour équiper les avions de combat.

À partir de l’été 2010, les demandes d’UO se sont amoindries, les forces projetées étaient dotées des équipements acquis lors de la phase précédente. Enfin, les montants alloués aux UO (ainsi que les demandes) ont fortement diminué à compter de 2011, dès lors que le retrait du théâtre était acquis.

Cette souplesse dans l’emploi des crédits s’est révélée très utile. Elle doit être maintenue, l’idéal étant peut-être de prévoir ab initio des lignes de crédits non affectées dans le programme 146 pour y faire face. Cependant, si les UO sont indispensables à la protection des forces et à la réussite de la mission, y recourir à l’excès accentue l’hétérogénéité des parcs. La surmobilisation des moyens pour certains théâtres pourrait instaurer un clivage entre les unités et matériels projetés et ceux demeurant en métropole.

C. LA FRAGILISATION DE CERTAINES CAPACITÉS SUR LE TERRITOIRE NATIONAL

La mobilisation d’un maximum de ressources en faveur des opérations relève de l’évidence, mais, à ressources limitées, elle induit une rétraction des moyens disponibles pour les missions d’entraînement sur le territoire national. Cette rétraction est problématique dès lors qu’elle se conjugue aux déficits capacitaires et, plus généralement, au resserrement de certaines capacités décidées dans le cadre de la RGPP et de la LPM.

Ÿ Tous les moyens n’étant pas au rendez-vous pour la mise en œuvre des matériels correspondant au contrat opérationnel, l’armée de terre a fait mention de ses difficultés à assurer un temps d’entraînement suffisant à certains équipages, par exemple des chars Leclerc. Le respect strict du contrat opérationnel supposerait un volume d’heures d’utilisation des chars de 25 000 heures par an. Or, le taux de disponibilité technique de ces engins ne permettant d’obtenir que 16 000 heures par an, un tiers des exercices doivent donc être effectués en VBCI.

Dans l’ensemble, le taux de disponibilité technique opérationnelle (DTO) moyen de l’armée de terre est de 60 %. La politique d’emploi et de gestion des parcs (PEGP) a cependant permis de limiter la pénurie, conciliant des taux de disponibilité moyens et la nécessité de soutenir les engagements et de répondre au besoin d’entraînement.

Les armées donnent naturellement la priorité aux OPEX. Les taux de disponibilité des appareils y sont particulièrement élevés et les moyens matériels sur consommés. Ainsi, 46 % du carburant consommé par l’armée de terre chaque année l’est en OPEX. Un véhicule blindé léger de l’armée de terre effectuait en deux mois 6 000 kilomètres en Afghanistan, soit près de la moitié de son potentiel. Cela contraint à une gestion fine des parcs afin de renouveler régulièrement les matériels pour mettre les plus éprouvés « au repos » en métropole.

Ÿ Comme l’armée de terre, la marine connaît des taux de disponibilité techniques contrastés. Le tableau ci-après l’illustre pour les principaux équipements.

DISPONIBILITÉ DES MATÉRIELS PAR RAPPORT
AUX EXIGENCES DES CONTRATS OPÉRATIONNELS

(en %)

 

DT

2010

réalisation

DT

2011

réalisation

DTO

2011

réalisation

DT

2012

réalisation

DTO

2012

réalisation

DT

2013 prévisions

PAP 2013

DTO

2013 prévisions

PAP 2013

Porte-avions

70,7

68

51

84

55

50

38

SNA

54

47

56

50

60

57

70

Composante frégates

67,4

NC

55

77

45

85

53

Composante guerre des mines

88,3

76

69

72

62

86

76

Bâtiments amphibies

77,4

69

42

78

58

92

57

Bâtiments de souveraineté et de présence

75,7

74

45

77

46

86

46

Synthèse tous bâtiments

74

77

50

71

NC

84

58

Source : Projet annuel de performances pour 2013.

L’essentiel des missions de la marine sont permanentes. Quoique se déroulant sur l’ensemble des théâtres d’opération, elles ne sont pourtant financées qu’à la marge par des crédits OPEX. Toute suractivité liée à une opération de circonstance telle que Harmattan ou Serval, vient donc entamer le potentiel normalement consacré à l’entraînement ou aux missions de routine.

Ÿ Cette problématique est également particulièrement sensible pour l’armée de l’air. Faute d’une DTO suffisante, celle-ci n’a pas pu réaliser son contrat opérationnel. Le tableau ci-après illustre, par catégorie de pilote, la persistance des déficits constatés au long de la programmation.

HEURES D’ENTRAÎNEMENT DES PILOTES DE L’ARMÉE DE L’AIR

 

Rappel cible

LPM

2009-2014

2009 (réalisé)

2010 (réalisé)

2011 (réalisé)

2012 (réalisé)

2013 (prévision)

Chasse

180

176

170

190

169

160

Transport

400

250

287

310

265

260

Hélicoptère

200

180

170

190

199

195

Source : SIMMAD.

Les cibles LPM correspondent aux normes minimales retenues dans le cadre de l’OTAN. Les heures d’activité des pilotes en OPEX sont intégrées à ces statistiques, qu’elles contribuent donc fortement à améliorer. Or, l’armée de l’air ne peut projeter de pilotes pas ou peu expérimentés. Mécaniquement, les pilotes expérimentés sont donc davantage sollicités, tandis que les heures d’entraînement s’en trouvent particulièrement comptées tant pour les pilotes revenus d’opérations que pour les autres, et notamment les plus jeunes.

En outre, la comparaison de la cible retenue pour les pilotes de transport avec la réalisation montre que le retard du programme A400M aura été préjudiciable aux armées, y compris dans leurs capacités d’entraînement. Tenir le contrat opérationnel en métropole implique donc non seulement des moyens pour le MCO mais également une confiance complète dans la capacité des industriels à tenir leurs engagements.

Globalement, les heures dévolues à l’entraînement des militaires français semblent légèrement insuffisantes, y compris en incluant les heures d’intervention en OPEX. Le tableau ci-après fournit, à titre indicatif, des éléments de comparaison avec les armées britannique et allemande, aux moyens comparables.

TABLEAU COMPARATIF DES HEURES D’ENTRAÎNEMENT
FRANCE – ROYAUME -UNI - ALLEMAGNE
(FORCES TERRESTRES, AÉRIENNES ET MARITIMES

     

FRANCE

ROYAUME-UNI

(2011)

ALLEMAGNE

(2011)

 

ACTIVITÉ

(par unité

et par an)

Normes d’entraînement

OTAN

Normes d’activité

LPM

Réalisé 2009

Réalisé 2010

Réalisé 2011

Réalisé 2012

Prévision 2013

ARMÉE DE TERRE

Journées de préparation et d’activités opérationnelles (JPAO)/ homme

/

150

(actualisé à 120 au PAP 2009)

105

119

117

109

105

216 jours / cycle de 30 mois

86.4 jours en moyenne annuelle hors OPEX

85 Hors OPEX

Nombre d’heures de vol/ pilote d’hélicoptère/an

/

180

(actualisé à 200 au PAP 2013)

170

177

180

170

172

200 environ

(de 170 pour Gazelle à 240 pour Apache)

120 à 150 heures pour les pilotes en unités projetables.

MARINE

Jours de mer par bâtiment (bâtiments de haute mer)

80

(108)

dont 20 (27) JdM par trimestre

100

(110)

87

(97)

91

(103)

92

(107)

89

(98)

88

(97)

106

115

Heures de vol/ pilote de chasse

(qualifié appontage de nuit)

240

180

(220)

195

(199)

199

(224)

196

(232)

167

196)

180

(220)

180

Pas de d’aviation de chasse au sein de la marine

Heures de vol /r pilote d’hélicoptère

220

188

218

199

220

220

180

120

Heures de vol / équipage de patrouille maritime

350

324

318

353

328

350

240

160

ARMÉE DE L’AIR

Heures de vol

par pilote de chasse

180

180

176

170

190

169

160

180

125

Heures de vol / pilote de transport

400

250

287

310

265

260

450

134

Heures de vol / pilote d’hélicoptère

200

182

170

190

199

195

240 à 380 selon

type d’appareil

78

Source : État-major des armées.

Il ressort de ce tableau que les heures d’entraînement sont en France comptées au plus juste. Il faudra garder cet élément à l’esprit dans la perspective de l’examen des crédits de la LPM à venir, s’agissant notamment du MCO. Car il faut évidemment relativiser la haute qualité de l’équipement d’une armée quand celle-ci ne dispose pas des moyens suffisants pour entraîner les personnels chargés de l’utiliser.

Les engagements extérieurs se maintenant à un haut niveau depuis plus de dix ans, il paraît s’installer une sorte de dualité dans les armées entre les moyens en métropole et ceux déployés à l’extérieur ainsi que, symétriquement, entre les heures d’entraînement offertes aux personnels déployés et aux autres. Cette fragilité souligne un réel manquement pour une programmation qui a su doter ses soldats d’équipements de grande qualité, mais n’a pas toujours pu dégager les moyens humains et financiers pour en exploiter tout le potentiel.

IV. LES INSUFFISANCES CAPACITAIRES DE LA LPM 2009-2014 DOIVENT GUIDER LA CONCEPTION DE LA NOUVELLE PROGRAMMATION.

A. POUR UN MEILLEUR SUIVI BUDGÉTAIRE

Les ambitions budgétaires de la LPM se sont révélées hors de portée compte tenu des effets de la crise économique et financière qui a débuté à l’automne 2008. En effet, le contexte de crise économique et budgétaire ne pouvait épargner les dépenses de défense. Pour autant, en faisant abstraction des contributions du ministère de la défense aux restrictions de dépenses publiques, un certain nombre d’éléments méthodologiques ont pesé défavorablement sur les moyens de la défense. Si l’impact d’une crise est difficilement prévisible en entrée de programmation, ces biais méthodologiques peuvent quant à eux servir d’enseignement pour l’exercice à venir.

Ÿ En premier lieu, il conviendra de définir clairement l’objectif de dépense associé au titre 2. Celui-ci doit être posé en termes d’effectifs et ou de masse salariale. L’approche par la masse salariale suppose de prendre en compte l’évolution des rémunérations dans la durée, liée à l’avancement des personnels ou encore au glissement vieillesse technicité. Mais, s’agissant d’une programmation, il faut anticiper la façon dont seront gérées les conséquences de facteurs non maîtrisables par avance. Or, s’il revient au ministère de la Défense d’assumer les conséquences des mesures catégorielles qu’il déciderait (telles que le repyramidage des effectifs), il ne doit pas être comptable des évolutions générales actées en dehors de lui pour l’ensemble de la fonction publique. En particulier, les crédits d’équipement n’ont pas vocation à financer le surcroît de dépense lié à la politique des rémunérations de la fonction publique ou à l’évolution des conditions de liquidation des retraites. Il s’agit de dépenses récurrentes qui s’accumulent chaque année et pèsent finalement considérablement dans l’exécution de la programmation (18).

Dans ce contexte, une clause dite de sauvegarde avait été décidée en programmation 2009-2014. Elle devait protéger les crédits de la mission Défense de fluctuations du titre 2 concernant les agents de l’État. Cette clause n’a pas été appliquée et la mission Défense a dû régulièrement financer ces fluctuations sur ses propres crédits. Pour la nouvelle programmation, il pourrait donc être positif non seulement de reconduire cette clause, mais aussi d’innover en l’appliquant. Il est en effet contre-productif de faire un budget d’investissement une variable d’ajustement compte tenu de l’impact qui en résulte sur la BITD et en définitive sur l’emploi dans des secteurs de haute ou très haute technologie.

Ÿ Le financement des dépenses liées aux opérations extérieures mériterait lui aussi d’être davantage abondé en LFI. Si ce surcoût dépasse l’enveloppe de la LFI – ce qui est le cas chaque année –, le ministère de la Défense n’est remboursé du dépassement qu’en fin d’année. Or, le fait de devoir attendre la fin d’année pour jouir de ces crédits désorganise mécaniquement les calendriers de dépenses. Il faut donc poursuivre l’effort d’accroissement de la dotation OPEX pour la rendre la plus proche possible du besoin réel.

Ÿ Autre élément méthodologique, l’anticipation d’une exportation du Rafale. Celle-ci devait permettre une pause dans les livraisons françaises et donc une moindre sollicitation des crédits de paiement. La non-réalisation de ces prospects a conduit le ministère à mobiliser en cours de programmation des ressources que la LPM avait, par optimisme, déjà affecté à d’autres programmes. Si l’exportation du Rafale est désormais probable, il semble cependant audacieux de tabler sur un calendrier précis en programmation, en affectant par avance des ressources aux autres actions du programme 146. Il conviendrait au contraire de considérer cela comme une forme de ressources exceptionnelle, en indiquant quelle serait son affectation en toute hypothèse.

Ÿ Au-delà des grands arbitrages pris par le président de la République se posera la question des conditions d’entrée en LPM. L’année 2013 est contrainte par le surgel (215 millions d’euros) et le risque de non levée de la réserve (536 millions d’euros) soit environ 50 millions d’euros d’hypothèque au total sur le programme 146. La date de levée de réserve sera importante afin que les crédits puissent être effectivement employés. Il faudra également absolument prévoir les budgets d’équipements prévus par le modèle d’armée en 2014/2015, sous peine de voir tout le modèle déstabilisé, sous l’angle opérationnel comme industriel. L’exercice sera d’autant plus difficile que les marges de manœuvre sont considérablement réduites, du fait de la rigidité des engagements passés (93 % de l’ensemble des besoins liés aux programmes à effet majeur en 2014 et 85 % en 2015 selon la DGA) et les difficiles négociations sur les programmes en coopération.

Ÿ S’agissant, précisément des ressources exceptionnelles, les rapporteurs considèrent qu’elles ont permis un abondement très positif de la mission Défense. Cependant, leur calendrier de versement n’a pas été tenu et leur provenance n’a pas été telle qu’attendue. Il apparaît ainsi relativement hasardeux d’attacher le calendrier d’acquisition d’équipements à la perception de telle ou telle ressource, notamment immobilière. L’apport de ressources exceptionnelles doit être garanti annuellement quelle qu’en soit la provenance. Les rapporteurs soutiennent ainsi la position du ministre selon laquelle ces ressources doivent également provenir d’actifs non directement liés à la défense. Pour mémoire, le Livre blanc donne l’orientation d’un effort financier de 364 milliards d’euros en valeur 2013 sur la période 2014-2025, dont 179,2 sur 2014-2019, période de la prochaine LPM. Les ressources exceptionnelles devraient représenter environ six milliards d’euros, censés financer principalement les programmes à effet majeur du programme 146.

B. FAIRE DU MAINTIEN EN CONDITION OPÉRATIONNELLE UNE PRIORITÉ

L’ambition d’un couple Livre blanc-LPM réaliste est partagée par tous. Elle doit se traduire par un schéma simple faisant correspondre un contrat opérationnel révisé à des capacités peut-être moindres mais pleinement opérationnelles. Pour ce faire, il faut résister à la tentation de sous-doter le MCO en programmation afin de lancer davantage d’acquisition. Ce type de schéma conduit à des effets de bourrage et à une rigidification des dépenses particulièrement difficile à gérer dans les moments de crise.

Il revient aux spécialistes de la Défense d’évaluer précisément les besoins à venir, étant entendu que les prochains exercices devraient solliciter davantage de crédits compte tenu du croisement de parcs composés d’appareils en début ou toute fin de vie (par exemple le couple A400M - C160 Transall). Le Parlement se montrera vigilant sur la cohérence du modèle d’armée proposé par le LPM, cohérence dont le montant suffisant des crédits en faveur du MCO est une condition première. Cette dotation devra être construite en fonction du besoin opérationnel, en OPEX comme en métropole, afin de ne pas laisser se former une armée « à deux vitesses ».

De leur côté, les armées devront poursuivre les démarches d’économies. Par exemple, dans son dialogue avec les industriels, l’armée de terre a demandé que le coût du MCO des matériels nouveaux, généralement contractualisés, soit équivalent à celui des anciens qu’ils remplaceront.

Enfin, un effort doit également être consenti par les acteurs industriels du MCO. Il est légitime que cette activité alimente leur chiffre d’affaires, mais il apparaît encore que certaines prestations sont parfois étonnamment onéreuses : le MCO du Harfang équivaut à 15 000 euros de l’heure de vol, les filtres à huile du VBCI sont facturés 96 euros lorsque l’équivalent coûte 16 euros dans le commerce, etc. Autant d’exemples anecdotiques mais qui encouragent plus que jamais l’État à conserver des moyens en propre afin d’effectuer certains travaux (compétences du type SIAé), pour être capable d’expertiser les prestations mais également analyser le détail des coûts ainsi que leur répartition dans la chaîne des contractants et des sous-traitants.

À cet égard, il pourrait s’avérer utile de mieux utiliser les compétences du comité des prix de revient des fabrications d’armement et la pertinence de ses travaux.

Construire une LPM réaliste, c’est tenir compte de la croissance mécanique des besoins en MCO ainsi que, sur le plan méthodologique, raisonner en coûts de possession dès l’achat des équipements.

C. SAISIR LES OPPORTUNITÉS DE COOPÉRATION EUROPÉENNES ET INTERNATIONALES

Tandis que les perspectives budgétaires européennes plaident pour avancer de manière significative dans le domaine de la coopération, le bilan de la programmation 2009-2014 incite quant à lui à une certaine prudence. La voie médiane est donc celle d’une approche réaliste, organisée projet par projet qui porte sur des domaines emblématiques aussi bien que sur certaines capacités plus concrètes.

1. Europe de la défense

Ÿ Dans le domaine de l’aéronautique de combat, l’intérêt de l’Europe est de rassembler ses forces pour disposer d’une capacité propre dans les domaines de drones MALE, des drones de combat ainsi que de l’aviation de combat à l’horizon 2020-2030.

Le traité de Lancaster House ainsi que la démarche de développement du démonstrateur technologique nEUROn ont ouvert la voie à un renouveau dans ce domaine : les coopérations doivent se fonder sur des schémas industriels rationnels et sur un lien de confiance réciproque, illustré éloquemment par le projet EPURE à Valduc et TDC à Aldermaston qui permet aux deux pays de partager des installations indispensables à la simulation nucléaire (19).

a. Drones

Cette ambition suppose une volonté politique forte, d’autant que les Européens mobilisent souvent leurs ressources dans le domaine aéronautique de défense en faveur de l’industrie américaine : équipement quasi généralisé en drones MALE produit par General Atomics, cotisation des partenaires de la France dans le développement du projet de F35 à hauteur de huit milliards de dollars, soit près des deux tiers de coût de développement du Rafale ! Autant de ressources qui seront évidemment indisponibles au cours des années 2020 pour développer des projets communs. Il faudra donc mobiliser de nouvelles lignes de crédits pour préparer l’avenir, sauf à renoncer définitivement à la souveraineté technologique européenne dans le domaine de l’aéronautique de la défense.

Cette volonté politique se consolidera si des projets de court terme, plus pragmatiques, consolident la confiance dans la mutualisation des efforts. Dans la perspective du sommet européen de décembre 2013, le premier consacré aux questions de défense, les rapporteurs souhaitent que la France plaide pour un accroissement des coopérations dans les domaines des transports stratégiques (A400M) du ravitaillement en vol (MRTT), de la cyberdéfense, de la sauvegarde maritime, de la formation, de l’entraînement et de la certification (20).

Pour qu’ils aboutissent, ces projets doivent être ciblés et reposer sur des segments qui ne mettent pas directement en jeu la souveraineté nationale.

b. Transport et ravitaillement en vol

Les opérations françaises en Libye et au Mali ont montré notre dépendance vis-à-vis de nos partenaires américains et européens dans ces domaines. La décision d’acquérir une capacité MRTT ainsi que l’arrivée des A400M devraient soulager l’armée de l’air mais des besoins plus ponctuels continueront de se faire sentir. Dans cette perspective, les rapporteurs estiment qu’il est crucial d’organiser les modalités de mise en commun de capacités. Il s’agirait précisément de définir les conditions de mise à disposition de prestations de transport ou de ravitaillement en vol afin de permettre une planification la plus précise possible en amont. Cela porterait notamment sur les volumes mobilisables ainsi que sur les éventuelles restrictions d’emploi. À cet égard, la création de l’EATC (European Air Transport Command) s’annonce comme une initiative prometteuse.

c. Cyberdéfense

Il s’agit d’un domaine encore sensible où les coopérations opérationnelles semblent difficiles, sauf à identifier des menaces extérieures bien précises.

Des coopérations sont néanmoins possibles, pour la mise en commun de retour d’expérience (lorsqu’un pays a déjoué une attaque par exemple) ou encore pour la définition d’une stratégie commune visant à faire peser la voie de l’Europe dans les discussions relatives à l’organisation du cyberespace, des discussions qui sont aujourd’hui sino-amériaines.

d. Sauvegarde maritime

L’Union européenne à 27 pays comptabilise 90 000 kilomètres de côtes réparties sur 2 océans et 4 mers parmi lesquels transitent 90 % du commerce extérieur de l’UE et 40 % de son commerce intrazone. La sauvegarde maritime s’avère donc être un enjeu majeur.

Pour autant, l’UE ne possède pas de stratégie intégrée maritime (SIM) et sa politique maritime intégrée (PMI), ne traite qu’une faible dimension de la Sécurité et de la sauvegarde maritime. En effet, les mesures de la « PSCD maritime » ne visent principalement que les opérations de gestion de crise et de manière générale, encourage et facilite les solutions collectives régionales. Depuis 2009, l’UE possède un système de surveillance maritime intégré dont l’aboutissement est la connaissance partagée de l’information maritime. La mise en marche de ce dispositif contribuerait de manière efficace à la surveillance du domaine maritime.

En effet, comme le souligne le rapport sénatorial consacré à l’Europe de la défense (21), « Dans le domaine maritime, une stratégie maritime d’ensemble s’impose. Il serait souhaitable de lancer la négociation d’un accord afin d’autoriser la visite de tout navire battant pavillon d’un État-membre par un navire d’État de l’Union européenne, quelle que soit sa nationalité. Cela devrait permettre de mieux lutter contre les trafics illicites. En second lieu, il faudrait arriver à mutualiser les moyens maritimes de surveillance des approches et l’harmonisation de la fonction de garde-côtes. Enfin, cette stratégie devrait permettre la surveillance commune des routes maritimes vitales. Plusieurs projets tels MARSUR lancés par l’AED pourraient être regroupés au sein d’un ensemble cohérent. »

En cette période de forte pression budgétaire et de situation géopolitique mondiale incertaine, la France se doit donc de prolonger son impulsion politique pour des discussions approfondies sur nos intérêts stratégiques, aider à une plus grande intégration industrielle et travailler en lien avec les forces armées pour permettre d’aller vers une plus grande convergence des besoins et des spécifications.

e. Formation

La formation compte parmi les domaines cibles : les États européens ont en partage un nombre croissant d’équipements et sont souvent engagés sur des théâtres similaires. Il pourrait être envisagé de mutualiser les structures d’entraînement et de formation, à l’image de celles qui existent déjà avec l’Allemagne et la Belgique. Cette démarche présenterait le double avantage de partager les dépenses de structures et de permettre aux bénéficiaires de travailler ensemble. Ce type de projet s’inscrit naturellement dans la logique du traité de Lancaster House, qui prévoit la constitution d’un corps expéditionnaire commun. Il a évidemment vocation à rapprocher l’ensemble des armées européennes dans des domaines nombreux : mise en œuvre des équipements partagés d’un grand nombre d’États, tels le Reaper ou l’A400M à venir, entraînement à certains types d’opérations, par exemple le combat en zone urbaine, ou encore des préparations communes à des projections.

f. Certification

La vente et l’achat d’équipements à l’intérieur de l’Union européenne se trouvent encore trop souvent compliqués voire renchéris du fait de divergences de normes. Conformément aux dispositions relatives à la PSDC contenues dans le Traité de Lisbonne, l’agence européenne de défense (AED) peut jouer un rôle majeur dans l’harmonisation des demandes, en les confrontant aux possibilités industrielles mais également en exerçant un rôle de conseil pour harmoniser a priori les normes à venir. Malgré ses faiblesses, elle s’affirme comme reste un cadre unique de concertation des Européens dans le domaine industriel de défense. Il conviendrait de lui confier le pilotage de projets de dimensionnement moyen afin de poursuivre les dynamiques vertueuses qui ont pu s’engager à petite échelle. On peut citer à cet égard le sujet de la guerre des mines. Il s’agit d’un projet essentiel pour l’avenir, d’une taille suffisamment contenue pour lever les réticences et initier une collaboration vertueuse. Il s’agit surtout de consolider une dynamique vertueuse permise par le pilotage du programme A400M mené par l’OCCAR.

2. La place de la France dans l’OTAN

La réintégration de la France dans le commandement intégré de l’OTAN, décidée sous la présidence de Nicolas Sarkozy, implique que l’on s’assure que cette décision produise bien au fil du temps les effets escomptés.

En cohérence avec les conclusions du rapport d’Hubert Védrine (22), les rapporteurs réaffirment l’importance de la place de la France dans le commandement intégré de l’OTAN et soulignent que « la France doit retrouver une influence de premier plan dans l’Alliance atlantique (…) De plus, cette politique d’influence facilitera les efforts de la France en faveur d’une Europe de la défense. À ce titre, "la politique de défense de la France doit être conçue de façon synthétique au niveau national et menée ensuite en fonction des caractéristiques et des potentialités de chaque enceinte : Union européenne, Otan, coopérations ad hoc. »

En effet, l’OTAN offre un cadre de coopération dans lequel la France doit s’assumer et s’affirmer politiquement, militairement et industriellement

a. Sur le plan politique

Du fait de son retour au sein de l’OTAN, la France doit pleinement intégrer son nouveau rôle, tout en restant vigilante. C’est-à-dire qu’elle doit affirmer ses positions, mettre en place une stratégie d’influence au sein de l’Alliance et réaffirmer les objectifs de l’Alliance lorsqu’elle jugera la situation nécessaire.

b. Sur le plan militaire

Depuis 2009, la France a augmenté le nombre d’officiers dans les services, tout en prenant le commandement de deux commandements militaires à Norfolk. De 290 représentants en 2007, la France est passée à environ 1 250 officiers dont 17 généraux en 2009 pour représenter environ 10 % des effectifs en 2012.

En effet, ré-intégrer le commandement intégré de l’OTAN prévoit que la France entre en pleine coopération et mette des forces armées et des moyens à disposition de l’Alliance. Pour autant, les rapporteurs insistent sur l’importance pour les forces armées françaises de conserver toutes leurs capacités d’analyse des menaces et des situations de crise, de réflexion, de précision et de planification, tout comme l’a préconisé Hubert Védrine dans son rapport.

c. Sur le plan industriel

L’organisation de la représentation de la France à l’OTAN et de sa diplomatie économique a, dès le départ, été adaptée afin de mieux soutenir les industriels et PME/ETI françaises auprès des instances de l’Alliance. Son bilan d’actions démontre que la France est dotée d’un fort potentiel pour s’imposer encore plus fortement qu’elle ne l’est déjà sur les marchés de l’OTAN.

Il est à noter que tous budgets communs – budget civil, militaire et d’investissement – financés en commun par les alliés, correspondent annuellement à 2,2 milliards d’euros, dont 500 millions sont véritablement ouverts à la compétition industrielle. La France contribue en moyenne à 10 % de ces budgets.

À ce titre, la présence de l’industrie française est principalement assurée par des contrats relevant de l’Agence de communication et d’information de l’Alliance, la NCIA. En effet, les industries françaises (Thales, EADS, Astrium) sont particulièrement bien placées sur ces marchés via deux contrats majeurs :

– le « contrat pour les communications de la force de l’OTAN en Afghanistan – CISAF » remporté par la société Thales Communications en 2006 et qui devraient encore générer 80 millions d’euros et 50 millions d’euros de chiffre d’affaires pour Thales en 2013 ;

– le contrat « Air Command and control System – ACCS » dont la maîtrise est assurée par la filiale française de Thales Raytheon System.

Ce dernier contrat permet aujourd’hui, à la France de détenir plus de 40 % du montant des contrats attribués en 2012 et en 2013 par la NCIA). Les rapporteurs notent également que depuis 2009, même si elles sont encore en retrait par rapport aux industries américaines ou allemandes, les industriels français sont en progression constante sur les marchés de l’Agence OTAN de soutien. En 2011, ils détenaient 10 % des marchés.

En revanche, les PME et ETI françaises sont très peu présentes sur les marchés de l’OTAN. Leurs capacités d’investissements en propre sont limitées et les lourdeurs administratives de l’OTAN sont bien souvent dissuasives pour les petites et moyennes structures. La France, en lien avec sa représentation à l’OTAN, se doit donc d’aider à l’accompagnement des petites structures et orienter les acteurs dans les bonnes directions.

Ainsi, malgré une progression constante de la présence française, via son tissu industriel, et le désinvestissement américain, les rapporteurs réaffirment l’importance du dispositif de concertation mis en place par la Direction générale de l’armement dans le cadre de la « smart defense » afin de permettre l’identification des intérêts industriels et de la possible participation de la France dans les différents projets multinationaux.

En conclusion, les rapporteurs insistent sur deux préconisations majeures pour l’avenir de la France dans l’OTAN :

– la participation à l’élaboration de normes techniques communes, véritable axe d’influence de l’industrie de défense, permettant l’interopérabilité des équipements militaires élaborés au sein de l’Alliance ;

– la poursuite du renforcement des services de la diplomatie économique pour permettre la tenue des objectifs annoncés, comme cela a été identifié dans le rapport de la Cour des comptes en novembre 2012.

EXAMEN EN COMMISSION

La Commission procède à l’examen du rapport de la mission d’information relatif à une revue capacitaire des armées au cours de sa réunion du mercredi 10 juillet 2013.

Un débat suit l’exposé des rapporteurs.

Mme la présidente Patricia Adam. Nous lirons votre rapport d’information avec beaucoup d’attention avant les prochains débats de la rentrée. Sur la question de la réintégration de la France au sein du commandement intégré de l’OTAN, je souhaiterais faire deux observations. En premier lieu, il n’y a pas eu de réel débat à l’époque. En effet, la décision a été prise alors même que la rédaction du Livre blanc n’était pas terminée. Il aurait été bien plus respectueux d’attendre la fin des travaux de la commission du Livre blanc ! En second lieu, les circonstances ont évolué et modifié le regard sur les conditions mises au retour au sein du commandement intégré de l’OTAN dans la mesure où le Président des États-Unis a changé tout comme la posture de ceux-ci, avec notamment une orientation plus forte vers l’Asie et une modification de la politique internationale et d’intervention sur certains théâtres, comme l’Afghanistan par exemple. Ces changements modifient nécessairement le regard que l’on doit porter sur l’OTAN. L’Europe doit certes se construire désormais en matière de défense et de sécurité ; la question est de savoir s’il faut le faire au sein de l’OTAN ou d’une autre structure, et ce débat n’est pas tranché.

Mme Marie Récalde. Je félicite à mon tour mes deux collègues pour leur excellent rapport. Je note qu’Yves Fromion a parlé de « vétusté » au sujet du MCO aéronautique. On sait que les coûts liés au MCO ont pris des proportions importantes puisqu’ils représentent, en matière aéronautique, plus des deux-tiers du coût d’un aéronef. Je souhaiterais obtenir quelques précisions sur la structure intégrée de maintien en condition opérationnelle des matériels aéronautiques de la défense (SIMMAD), créée il y a une dizaine d’années. Celle-ci a apporté en termes d’expertise une réelle plus-value et est aujourd’hui localisée auprès des industriels et du commandement du soutien des forces aériennes (CSFA). Cette synergie a créé les conditions d’une réelle efficience et d’une maîtrise des coûts. Toutefois, les acteurs du MCO sont désormais dans l’attente des évolutions annoncées par le ministère de la Défense. Pensez-vous, comme moi, que le MCO aéronautique a fait ses preuves et démontré toute son efficience ? Par ailleurs, s’agissant des frégates FREMM, les interlocuteurs de DCNS que j’ai rencontrés récemment m’ont fait part de leur crainte face aux chiffres annoncés, qui varient entre huit et onze frégates alors que le ministre de la Défense s’était, semble-t-il, engagé sur le chiffre de onze frégates.

M. Yves Fromion, rapporteur. Lors de la création de la SIMMAD, tout le monde n’était pas convaincu de l’intérêt de cette nouvelle structure car elle rompait avec une habitude ancestrale où les limites entre les armées et « l’arsenal » étaient très claires. On a pourtant tenté de mettre en place une gestion plus intelligente, en rapprochant l’industrie et les opérateurs militaires dans une articulation qui produit une meilleure cohérence et répartition des tâches. C’est un jeu « gagnant-gagnant » pour les deux parties, qui permet en outre aux armées d’acquérir une réelle expérience dans la gestion des coûts. Je note d’ailleurs que personne ne songe plus à revenir sur cette organisation qui a fait ses preuves, même s’il est bien sûr toujours possible de l’améliorer.

M. Gwendal Rouillard, rapporteur. Dans notre rapport d’information, nous disons le plus grand bien de la SIMMAD, du service de soutien de la flotte (SSF) et de la structure intégrée pour le maintien en condition opérationnelle du matériel terrestre (SIMMT). Leurs résultats sont très positifs, même si des marges de progression demeurent possibles, notamment en matière de partenariat avec les PME. Pour ce qui concerne les FREMM, le ministre de la Défense s’est bien engagé sur un chiffre de onze. Aujourd’hui, le sujet qui est posé est celui du rythme des livraisons. Certains, au ministère de la Défense, ont d’abord tenté de faire valoir le chiffre de huit ou de huit plus trois, ou bien de prévoir la production d’une FREMM tous les 18 mois. Dans ce dernier cas, il faut être bien conscient que cela entraînerait un plan social chez DCNS qui concernerait 350 à 400 personnes à Lorient et 600 à 700 personnes dans la sous-traitance. Il n’en demeure pas moins que DCNS et la marine nationale ont travaillé pour construire un scénario fiable, tant industriellement qu’économiquement. Il existe également des discussions sur les successeurs des frégates Lafayette, dites frégates de taille intermédiaire (FTI). Ce sujet concerne la marine nationale mais comporte également un volet exportations. En effet, les FREMM, d’environ 7 500 tonnes, coûtent entre 600 et 800 millions d’euros tandis que les FTI, d’environ 4 000 tonnes, coûtent seulement de 400 à 450 millions d’euros. Il est donc clair que le programme FTI, que j’appelle de mes vœux, comporte un potentiel à l’exportation beaucoup plus important.

M. Yves Fromion, rapporteur. Je comprends parfaitement l’intérêt de maintenir ainsi la base industrielle et technologique de défense (BITD) mais il peut cependant y avoir débat dans la mesure où le pendant de cette décision est une réduction de 34 000 postes dans les armées. C’est un arbitrage budgétaire difficile et personne ne sait vraiment où supprimer des postes, dans la mesure où deux tiers des réductions de postes ont déjà été effectués dans la fonction « Soutien » au cours de la dernière programmation de loi militaire. Comment peut-on raisonnablement imaginer supprimer encore 34 000 postes dans la sphère défense ?

M. Christophe Guilloteau. Je m’associe aux félicitations adressées à nos deux rapporteurs. Je note que beaucoup de leurs préconisations rejoignent les orientations du dernier Livre blanc, notamment en ce qui concerne l’A400M et le MRTT. S’agissant de la dissuasion nucléaire, le chiffre de 20 % qui a été évoqué m’a fortement surpris. De même, sur les exportations, les chiffres mériteraient sans doute d’être vérifiés. Par ailleurs, on a beaucoup dit que la dernière loi de programmation militaire avait servi aux engagements extérieurs en Afghanistan, au Liban et au Mali. À l’inverse, est-ce que ces conflits n’ont pas entraîné des modifications dans la logique de cette loi ? Je pense notamment aux canons Caesar.

M. Yves Fromion, rapporteur. Les chiffres que j’ai communiqués sur le nucléaire concernaient l’investissement et il est clair que la dissuasion ne représente pas 20 % du budget de la Défense. S’agissant des équipements, on sait qu’après l’Afghanistan la cadence de production des Caesar a été accrue. Je rends ici hommage à notre ancien collègue Jean-Claude Sandrier, qui s’est battu avec moi dans ce sens au moment où l’ancien ministre de la Défense, M. Alain Richard, voulait au contraire stopper leur développement. Le lancement d’une pré-série de six canons Caesar a permis de se rendre compte de la qualité de cet armement et a accéléré l’équipement d’un régiment. Il en est de même pour les VBCI. C’est en effet le plan de relance qui a accéléré la production de ces véhicules, qui ont été envoyés en Afghanistan lorsqu’on s’est rendu compte des insuffisances des véhicules de la génération précédente. Les conséquences de l’embuscade de la vallée d’Uzbin ont parallèlement accéléré le développement des drones Harfang ainsi que du programme FELIN. On peut donc dire que l’intervention en Afghanistan a bien été l’occasion d’une prise de conscience de la nécessité de fournir une meilleure protection à nos troupes.

M. Christophe Léonard. Je me félicite également de la communion de pensée entre nos deux rapporteurs. Je voudrais savoir quelle est votre perception de la puissance militaire de la France. Pour paraphraser la citation du Général de Gaulle affichée dans cette commission, l’État est-il en train de se détruire ou non ? D’autre part, on sait que la loi de programmation militaire peut connaître divers écarts. Quelles prescriptions feriez-vous aux parlementaires de notre commission pour les éviter ? Enfin, et en forme de provocation, est-ce que la France, au regard du contexte budgétaire et économique, n’est pas une grenouille qui veut se faire plus grosse que le bœuf ?

M. Yves Fromion, rapporteur. La crédibilité de nos forces armées repose avant tout sur la qualité de nos hommes. Partout où ils ont été mis en situation d’être comparés à d’autres soldats, leur valeur a été reconnue.

S’agissant de nos équipements, le constat est plus contrasté : leur qualité est loin d’être homogène. Si certains de nos matériels comptent parmi les plus performants, à l’image du Tigre ou du Rafale, d’autres sont à bout de souffle ; l’opération Serval au Mali a bien montré que tel était le cas de nos C160 Transall et de nos C130 Hercules. En la matière, cette opération a d’ailleurs souligné combien nous étions dépendants de nos alliés.

M. Gwendal Rouillard, rapporteur. Le Président de la République a promis que, sur la prochaine période de programmation, le budget de la Défense serait maintenu à 31,4 milliards d’euros par an. Mais cette somme inclut 5,9 milliards d’euros de recettes exceptionnelles sur l’ensemble de la durée de la programmation, pour la réalisation desquelles il va falloir que nous soyons très vigilants.

Pour ce qui est de la crédibilité de nos armées, tant des forces conventionnelles que des forces spéciales, leurs succès sont reconnus par l’ensemble de nos alliés, y compris à Washington et à Londres. Je relève d’ailleurs que des pays comme la Norvège ou le Canada sont demandeurs de partenariats avec nos forces spéciales. La crédibilité de notre outil de défense ressort d’ailleurs renforcée du Livre blanc, qui réaffirme la place de la France notamment en Afrique, avec un dispositif de forces prépositionnées dont le principe n’est plus remis en cause. Ainsi, malgré ses lacunes, notre système de défense reste crédible.

M. Bernard Deflesselles. Le retour d’expérience des dernières opérations extérieures, notamment Serval, nous est particulièrement utile dans l’optique de la discussion de la prochaine loi de programmation militaire.

Lorsque l’on compare les prévisions financières de l’actuelle LPM et les budgets alloués chaque année, il ne faut pas se limiter à une comparaison en valeur absolue, mais aussi les apprécier en valeur relative : on s’aperçoit alors qu’il ne s’agit pas d’un écart considérable en pourcentage. Il faut aussi comparer cet écart à celui qu’on a connu pour d’autres périodes de programmation : l’écart était bien plus considérable pour la loi de programmation militaire 1997-2002.

Vous avez passé en revue les principaux programmes d’armement. Mais quelles sont, selon vous, les trois ou quatre priorités absolues que la prochaine loi de programmation militaire devra sanctuariser ?

S’agissant de l’Agence européenne de défense, son rôle est certainement à revisiter, et il faut s’interroger sur les perspectives qu’elle offre. Mais avec le relatif désengagement des États-Unis de l’OTAN, n’y a-t-il pas une opportunité pour développer les organes européens de défense au sein d’une Alliance atlantique rééquilibrée ?

M. Yves Fromion, rapporteur. En valeur relative, l’écart entre les objectifs de la loi de programmation et les budgets effectivement votés atteint 7 % des crédits d’investissement, ce qui n’est pas considérable compte tenu du contexte économique général.

Concernant l’opération Serval, c’est incontestablement un succès, mais il faut l’apprécier avec un certain recul : nos forces n’ont pas eu à faire à des éléments ennemis très organisés ou très puissamment armées, même s’ils étaient férocement déterminés. Serval reste une opération de moyenne intensité. Or, elle n’en a pas moins montré les limites de nos capacités matérielles, notamment en matière logistique. Il en ressort donc que nos moyens sont à peine suffisants pour des opérations de moyenne intensité, ce qui doit nous conduire à ne pas baisser la garde. Toute coupe budgétaire significative pourrait avoir des conséquences calamiteuses. Et quand le Président de la République estime que nos armées seraient encore en mesure de mener une nouvelle opération de type Serval l’an prochain, je n’en suis pas tout à fait convaincu.

En outre, nous devrons veiller à la cohérence globale de notre outil de défense, qui ne peut pas reposer in fine seulement sur la dissuasion nucléaire.

M. Gwendal Rouillard, rapporteur. Je suis d’accord avec notre collègue Bernard Deflesselles à propos de l’Agence européenne de défense : les blocages répétés des Britanniques ne lui permettent pas d’évoluer, et il faut la recentrer sur des missions de recherche et technologies plutôt que sur la conduite de programmes d’armement, que fait déjà très bien l’Organisation conjointe de coopération en matière d’armement (OCCAR).

M. Yves Fromion, rapporteur. L’OCCAR et l’Agence ont d’ailleurs conclu récemment un accord visant à mieux coordonner leurs activités.

S’agissant des priorités à fixer, la tentation est toujours légitime pour un gouvernement, quel qu’il soit, de décaler des programmes d’armement. Mais ces choix ne tiennent pas toujours suffisamment compte des coûts de renégociation des contrats : parfois, il est presque plus cher de décaler des livraisons que de s’en tenir aux calendriers initiaux. On l’a bien vu dans le cas des frégates multi-missions.

Mme la présidente Patricia Adam. Beaucoup de ces éléments sont connus, et discutés au sein de notre commission, depuis plus de dix ans. Le retour d’expérience du Mali confirme certains éléments, et met en lumière l’importance fondamentale du renseignement.

M. Bernard Deflesselles. Les retours d’expérience sont là pour mettre en lumière à la fois certains aspects positifs et certaines insuffisances.

On doit, à mon sens, prendre conscience de deux éléments. D’une part, notre base industrielle et technologique de défense est capable de produire à peu près tous types d’armements, du fusil d’assaut au sous-marin nucléaire. Mais, d’autre part, le choix effectué est toujours celui du plus haut niveau technologique, ce qui entraîne des coûts de maintien en condition opérationnelle très élevés. Peut-être faudra-t-il, à l’avenir, accepter une montée en gamme technologique moins rapide, afin de faire des économies sur les dépenses de MCO.

M. Daniel Boisserie. Je tiens à mon tour à saluer le talent de nos rapporteurs, qui devancent nos questions. Néanmoins, nous avons bien senti que vous étiez très favorables à l’OTAN, ce que nous n’ignorions pas en ce qui concerne Yves Fromion et que nous apprenons en ce qui concerne Gwendal Rouillard. Vous citez des chiffres relatifs à la participation française à l’OTAN qui s’élèverait, selon vous, à 11 % et aurait des retombées de 42 % ; je souhaiterais que vous nous indiquiez précisément le montant en euros de la contribution française et du retour sur investissement.

M. Gwendal Rouillard, rapporteur. Il s’agit d’estimations. Les chiffres précis figureront dans le rapport. L’estimation des marchés générés par l’OTAN est d’environ un milliard par an dont 42 % pour la France qui verse une participation annuelle comprise entre 150 et 200 millions d’euros.

M. Yves Fromion, rapporteur. J’admets que l’on stigmatise ma position en faveur de l’OTAN mais je souligne que le Président de la République a déclaré que l’on pouvait se reposer sur l’OTAN pour la défense de l’Europe et de la France, je suis donc en accord sur ce point avec les plus hautes autorités de l’État.

M. Olivier Audibert Troin. Ma première question porte sur l’État stratège. Vous n’avez pas évoqué la cession envisagée des participations de l’État dans l’industrie de l’armement. Par ailleurs, vous avez souligné la priorité que le Livre blanc accorde à la marine tout en indiquant que les capacités devaient couvrir l’ensemble du spectre. Il me semble utile d’attirer votre attention sur la situation de l’armée de terre, à laquelle beaucoup d’efforts ont déjà été demandés et dont le moral est aujourd’hui au plus bas. Elle s’interroge aujourd’hui sur son avenir et celui de sa capacité d’intervention. Ceci me préoccupe et je souhaite avoir votre avis à ce sujet.

M. Gwendal Rouillard, rapporteur. L’objet du rapport n’était pas de traiter de la stratégie de l’État. Nous avons abordé ce sujet à la marge en évoquant les enjeux, dont l’évolution de l’actionnariat de DCNS, et réaffirmons dans notre rapport l’importance de la politique industrielle et la nécessaire association du Parlement à la définition de cette politique.

Je me suis personnellement enquis du moral de l’armée de terre auprès des officiers de Saint-Cyr Coëtquidan et j’ai senti certes un malaise mais également de la combativité. Le rapport confirme l’importance du programme Scorpion. J’espère que le « prisme marine » n’est pas réducteur ; il permet, en l’occurrence, d’illustrer au regard de différents programmes de l’action de l’État en mer et de leurs décalages, dont le coût est encore inconnu, la nécessité de l’amélioration du dialogue entre les différents ministères dont ils relèvent.

M. Yves Fromion, rapporteur. Nous n’ignorons pas que la répartition des crédits entres les armées donnera lieu à des débats difficiles. Je souhaite toutefois rappeler que l’armée de terre supporte l’essentiel du poids des interventions car, de toute éternité, les guerres se terminent par une occupation du terrain qui finit par emporter la décision. Il serait donc à mon sens dommageable, voire criminel, pour notre dispositif de défense de sacrifier l’armée de terre lors des débats budgétaires. Il est question de la suppression d’une brigade, soit 7 000 hommes, alors que la réduction envisagée pour les effectifs du ministère est de plus de 30 000. Il me semble aujourd’hui que demander des efforts et des contraintes supplémentaires à l’armée de terre, socle de la stratégie militaire, est susceptible d’obérer les capacités d’action de l’ensemble des forces armées.

M. François de Rugy. Je crains que le consensus, salué par certains de nos collègues, conduise à ne pas faire de choix bien que de vrais débats commencent à émerger. Je suis d’ailleurs, une fois n’est pas coutume, d’accord avec Bernard Deflesselles et je trouve que la simple énumération des besoins conduit au « toujours plus » alors même que les moyens manquent, sauf à recourir à la diminution drastique d’autres budgets ou à l’augmentation massive des impôts, que personne ne soutient. Je souhaiterais donc être éclairé sur les choix à faire. Je m’interroge sur la conclusion qu’il convient de tirer des propos d’Yves Fromion qui, tout en faisant le constat de nos faiblesses, auquel je souscris, indique qu’il ne faut pas baisser la garde. Doit-on augmenter le budget de la Défense ? Il faudra légiférer, dans le cadre budgétaire des 31 milliards fixés par le Président de la République, et impérativement procéder à des arbitrages en dépit de la stabilité du budget dont je rappelle que des ministères importants ne bénéficient pas.

Nous voulons tout faire parce que nous savons tout faire, comme l’a dit Bernard Deflesselles. Il s’agit, selon moi, d’un piège qui conduit à une diminution des moyens ou à un décalage des programmes et, par voie de conséquence, à une moindre efficience de nos interventions. Une discussion stratégique doit donc s’engager, dans le cadre de la contrainte budgétaire. Je ne pense pas qu’il faille, comme l’a indiqué Gwendal Rouillard, être présent dans tout le spectre capacitaire. Je suis d’avis qu’une intervention de la nature de celle de la France au Mali peut être appelée à se reproduire et si nous choisissons de combler les lacunes capacitaires constatées en matière de ravitaillement et de transport, nous devrons renoncer à d’autres équipements. Il ne s’agira plus d’énumérer les besoins mais, dans le cadre d’un débat sur la stratégie, de faire des choix entre les programmes (l’A400 M face au Rafale ou aux SNA) et entre les trois armées qui ne pourront être toutes du niveau d’une grande puissance susceptible d’intervenir sur tous les théâtres.

M. Yves Fromion, rapporteur. Je peux comprendre votre point de vue, qui ne correspond toutefois pas aux orientations arrêtées au travers du Livre blanc par le Président de la République et définissant les limites du contrat opérationnel confié aux armées. Dans le cadre de la rédaction de ce rapport, notre mission ne consistait pas à remettre en cause ces orientations mais à faire un état des lieux de l’exécution de la précédente LPM, à relever les lacunes et les progrès et à dessiner l’avenir dans le cadre précité. Je ne suis, à titre personnel, pas favorable à l’orientation prise par le Président de la République et à la baisse de la masse budgétaire et c’est pourquoi je pense qu’il ne faut pas baisser la garde.

M. Gwendal Rouillard, rapporteur. Notre rapport n’a pas d’autre ambition que de contribuer au débat qui se déroulera à l’automne. Le concept de différenciation introduit dans le Livre blanc est la réponse à la question de la présence sur l’ensemble du spectre capacitaire. La différenciation permettra d’adapter les moyens stratégiques, opérationnels et humains aux enjeux et aux théâtres en conciliant les contraintes budgétaires avec le maintien du spectre capacitaire, que je pense vital pour la Nation.

M. Philippe Nauche. Je rappelle que nous avions, dans un précédent rapport de 2010, évalué à 130 millions d’euros le surcoût annuel de la réintégration de la France dans le commandement intégré de l’OTAN, hors dépenses supplémentaires du budget commun des opérations.

Je m’interroge sur la notion de « capacité d’entrer en premier » qui me semble dépendre de capacités apportées par un soutien allié, qu’il s’agisse de la logistique, du renseignement, de la surveillance du théâtre, autant de lacunes que le rapport met certainement en évidence. Il me semble important de dire ce que nous pouvons faire et ce que nous ne pouvons pas faire.

La politique menée par la DGA depuis quelques décennies ne devrait-elle pas, plutôt que de procéder pour des raisons budgétaires au décalage, et donc à l’allongement, de certains programmes, s’orienter vers une simplification et une réduction du nombre de spécifications et sortir ainsi de la religion de l’exemplaire unique, laquelle ne correspond pas toujours au besoin véritable et pose d’importants problèmes de MCO ?

M. Yves Fromion, rapporteur. La « capacité d’entrer en premier » est une notion très subjective et propre à chaque théâtre. L’entrée au Mali n’a pas posé de problème insurmontable en raison de l’absence de défense aérienne. En revanche, en Libye, les avions et les hélicoptères français ne sont intervenus dans des conditions de vulnérabilité acceptables qu’une fois les défenses antiaériennes libyennes détruites, essentiellement par les forces britanniques et américaines. Il n’est pas certain que la France ait disposé seule de suffisamment de missiles de croisière pour y parvenir. D’aucuns ont évoqué l’hypothèse d’une intervention en Syrie : elle nécessiterait également une opération préalable de suppression de défenses antiaériennes très denses. Je rappelle que les Américains ont en fait gagné la guerre en Irak en une demi-heure, une fois neutralisés les défenses antiaériennes et les systèmes de communication du pays, éléments déterminants d’une défense moderne.

M. Gwendal Rouillard, rapporteur. Les chiffres cités à propos de l’OTAN seront vérifiés. Je me situe personnellement dans « l’OTAN-pragmatisme » et je comprends que cette question suscite un débat. Mais il faut, à mon sens, se confronter au principe de réalité, cesser de considérer cette participation comme une faute et assumer la présence de la France dans l’OTAN pour être en mesure de définir la stratégie française au sein de l’organisation.

*

* *

La Commission autorise, en application de l’article 145 du Règlement, le dépôt du rapport de la mission d’information en vue de sa publication.

ANNEXES

ANNEXE 1 :
Liste des personnes auditionnées par les rapporteurs

Ø État-major des armées :

—  Amiral Édouard GUILLAUD, chef d’état-major des armées.

—  Général de corps aérien Jean-Robert MORIZO, sous-chef plan EMA ;

—  Général de division Bruno LE RAY, chef de la division plans, programmation, évaluation ;

—  Contre-amiral Charles-Henry GARIÉ, chef de la division cohérence capacitaire.

Ø Direction générale de l’armement :

—  Ingénieur général de l’armement Laurent COLLET-BILLON, Délégué général de l’armement ;

—  Ingénieur général de l’armement François COTET, directeur des plans, programmes et du budget à la DGA ;

—  Général de division Alain BOUQUIN, chef du service d’architecture des systèmes de forces de la direction de la stratégie ;

—  Ingénieur général de l’armement Blandine VINSON-ROUCHON ;

—  M. Guillaume VEGA, conseiller auprès du délégué.

Ø État-major de l’armée de terre :

—  Général d’armée Bertrand RACT MADOUX, chef d’état-major de l’armée de terre ;

—  Général d’armée Jean-Philippe MARGUERON, major général de l’armée de terre ;

—  Général de division Bernard GUILLET, sous-chef performances synthèse de l’EMAT,

—  Général de division Francis AUTRAN, sous-chef plans et programmes de l’EMAT ;

—  Colonel Charles BEAUDOUIN, chef du bureau programmes et systèmes d’armes de l’EMAT ;

—  Colonel Claude GOUDEAU, chef du bureau maintien en condition opérationnelle de l’EMAT ;

—  Commissaire-colonel Jean-Philippe LAPORTE, chef du bureau programmation finances budget de l’EMAT ;

—  Colonel Hervé PIERRE, rédacteur du MGAT ;

—  Lieutenant-colonel Nicolas de SAINT-HIPPOLYTE, officier chargé des relations avec le Parlement à l’EMAT.

Ø État-major de la marine :

—  Amiral Bernard ROGEL, Chef d’état-major de la Marine ;

—  Contre-amiral Bruno TOUVENIN, sous-chef plans programmes ;

—  Capitaine de Vaisseau Benoit GRISON, chef du bureau cohérence organique ;

—  Capitaine de Vaisseau Jean-Philippe CHAINEAU, officier de cohérence d’armée.

Ø État-major de l’armée de l’air :

—  Général d’armée aérienne Denis MERCIER, chef d’état-major de l’armée de l’air ;

—  Général Guy GIRIER, sous-chef Plans, programmes de l’état-major de l’armée de l’air ;

—  Colonel Matthieu PELISSIER, chef du bureau Plans ;

—  Colonel Pascal AVONTURE.

Ø Services de maintenance des équipements :

SIMMAD :

—  Général de corps aérien Michel PINAUD, général de corps aérien, directeur central ;

—  Colonel Jean-Denis BERTHON, sous-directeur de la comptabilité et du budget de la SIMMAD.

SSF :

—  M. François PINTART, directeur du Service de soutien à la Flotte, directeur central, ingénieur général HC de l’armement ;

—  Mme Fabienne MAGUET, capitaine de frégate, chef de cabinet.

SIMMT :

—  Général de corps aérien Jean-Yves DOMINGUEZ, directeur central de la Structure intégrée du maintien en condition opérationnelle des matériels terrestres ;

—  Colonel Claude GOUDEAU ;

—  Colonel Bruno LACARRIÈRE.

Ø Coordonnateur national du renseignement :

—  M. le préfet Ange MANCINI.

Ø Industriels :

—  MBDA : M. Antoine BOUVIER, Président directeur général, M. Pierre MULLER, directeur Business Development France et Mme Patricia CHOLLET, chargée des relations parlementaires ;

—  Nexter : M. Philippe BURTIN, Président directeur Général, M. JP. BAILLET, directeur de Nexter Systems et président de Nexter Munitions et Mme Laetitia BLANDIN, directrice de la communication externe ;

—  Thales : M. Patrice CAINE, directeur général Groupe, Général Bernard LIBAT, conseiller Défense, Groupe Thales, et Mme Isabelle CAPUTO ;

—  EADS : M. Bertrand de CORDOUE, directeur coordination défense, Mme Annick PERRIMOND-Du BREUIL, M. Philippe COQ et M. Philippe BOTTRIE directeur des affaires publiques France ;

—  SAFRAN : M. Jean-Paul HERTEMAN, président ;

—  DCNS : M. Patrick BOISSIER, président-directeur général, Mme Marie ANDRE, directeur adjoint de la division Service, et Mme Rebecca PERES, directrice des affaires publiques ;

—  Dassault : MM. Éric TRAPPIER et Bruno GIORGIANI.

Ø Déplacement à Londres le 3 juin 2013 :

Entretiens avec :

– Colonel Nicolas CHAMBAZ, attaché de défense adjoint air, et Mme Valérie LEIGNEL, service du protocole de l’ambassade de France ;

– Dr Alan ROBINSON ;

– Dr Andrew MURRISON MP, Minister for International Security Strategy ;

– M. David WILLIAMS, Director General Finance ;

– Air Marshal Steve HILLIER, Deputy Chief of the Defence Staff (Capability) ;

– M. Bob REGAN, Head Policy France et le Dr Alan ROBINSON ;

– M. James ARBUTHNOT – Bureau de Portcullis House.

Ø Déplacement à Bruxelles le 17 juin 2013 :

Entretiens avec :

– Général Gilles ROUBY, Chef de la représentation militaire française auprès du Comité militaire de l’Union européenne, chef de la mission militaire de la représentation permanente de la France auprès de l’Union européenne, délégué militaire de la France auprès de l’Union européenne occidentale, chef de la représentation militaire française auprès du Comité militaire du Conseil de l’Atlantique Nord et chef de la mission militaire de la représentation permanente de la France auprès de l’TOAN à Bruxelles ;

– Son Excellence Philippe ERRERA, Ambassadeur, représentant permanent de la France auprès de l’OTAN ;

– M. Jean MARCIA, conseiller défense du Premier ministre belge ;

– M. Arnaud DANJEAN, député européen.

ANNEXE 2 :
Programmes principaux en coopération figurant dans le tableau de synthèse du rapport d’exécution 2011 de la loi de programmation militaire

Le tableau ci-dessous reprend les programmes principaux en coopération figurant dans le tableau de synthèse du rapport d’exécution 2011 de la loi de programmation militaire.

Capacité

Principaux équipements

Nature du partenariat

Économies / Surcoûts

Souplesse / Rigidité

Connaissance et anticipation

Observation spatiale

MUSIS

L’arrangement technique initial (2006) incluait 5 partenaires européens.

La recherche de coopération vise à inclure les composantes d’observation spatiale radar allemande et italienne et une composante d’observation spatiale optique «champ large» espagnole pour échanger

des capacités.

Dans ce cadre, la France et l’Italie ont initié des échanges sur la définition des interfaces entre les composantes française et italienne, non abouti à ce jour.

Pour MUSIS, en l’absence d’accord de coopération finalisé les travaux sont conduits en national.

L’absence d’accord de coopération pendant le stade de conception a conduit la France à lancer le programme en national, tout en préservant les possibilités d’accueil futur d’autres nations (financement du 3e satellite).

Une proposition de financement a été formulée par la Belgique uniquement.

En l’absence d’accord, le nombre de satellites de la composante spatiale optique est à ce stade abaissé de 3 à 2.

HELIOS

Programme conduit en coopération avec la Belgique, l’Espagne, la Grèce et l’Italie. De plus, des échanges avec les composantes spatiales optiques italiennes et radar allemand sont réalisés.

Chaque partenaire non français a contribué à hauteur de 2,5 % du coût du programme pour un total d’environ 150 millions d’euros (4 X 2,5 %). Cependant, ces 10 % d’économie consomment plus de 10 % des capacités des satellites.

La coopération internationale rigidifie le processus de planification des prises de vues.

Le retour sur investissement n’est pas favorable à la France (2,5 % du coût donne droit à plus de 2,5 % de la production).

La valorisation des images pour les échanges (optique vs radar, Hélios vs Cosmo-Skymed) est délicate.

Protection

Détection et protection anti-aérienne

SAMP/T & ASTER 30

Coopération bilatérale avec l’Italie. Programme géré par l’OCCAr.

Difficile à évaluer (pas de base de comparaison avec ce qu’aurait été le programme en national). Il apparaît, en revanche que le programme n’aurait certainement pas été aussi ambitieux en national. La coopération a ainsi permis :

- de franchir des marches (développement du B1)

- de bénéficier d’un effet de série sur la commande globale de missiles.

Rigidité : conduite du programme (lenteurs administratives via OCCAR, convergence des besoins), utilisation sous-optimale des ressources industrielles

MIDE

Programme mené en coopération avec l’Allemagne, l’Italie, la Suède, l’Espagne et le Royaume-Uni qui en est le pilote.

Pour le développement, il est construit sur une base de juste retour industriel où le partage du travail est égal au partage du coût (12,4 % de part France)

Rigidité : programme notifié à MBDA UK conduit par le ministère de la défense britannique. Contrat forfaitaire, ferme, de droit et de coutume britannique.

Intervention

 

LRU

Coopération multilatérale pour l’acquisition de roquettes dans le cadre de l’accord sur les MLRS.

Coopération pour la modernisation des lanceurs dans le cadre d’un accord avec l’Allemagne et l’Italie.

Difficiles à évaluer : des économies d’échelle pour les roquettes ont été générées par un contrat au sein duquel la France représente moins de 5 % des commandes.

Économies pour les lanceurs générées par le partage entre FR, IT et ALL des frais fixes de développement, d’industrialisation et de qualification.

Rigidité : contrat lanceurs de droit allemand notifié par BAAINBw (DGA allemande) et contrat munitions de droit US notifié par AMCOM (agence de contractualisation de l’US Army).

Hélicoptères d’attaque

TIGRE

Coopération FR, ALL puis ESP. Pgm géré par l’OCCAr. Australie en client export souhaite rejoindre l’OCCAr pour le soutien en service.

Partage des coûts de dév. Mais choix d’un missile différent de l’ESP sur le HAD. TIGRE ALL et FR très différents. Augmentation des coûts liée surtout à la réduction de cible (215, 120, 80, ….). Surcoût lié à la formation des mécaniciens en All.

Rigidités des engagements entre nations.

Hélicoptères de manœuvre

NH90

Coopération FR, ALL, ITA, HOL, puis PORT (en cours de retrait), puis BEL. Nbreuses nations exports (8). Pgm géré par l’agence OTAN NAHEMA à Aix en provence.

Partage des coûts fixes (développement). Les coûts exports sont plus importants. Mais plusieurs versions en fonction des nations. Surcoûts liés au partage industriel. Mais c’est ce partage qui a permis de faciliter les ventes exports.

Doit faciliter la coopération entre les nations dans un avenir proche. Les surcouts de la coopération sont compensés par les partages des coûts fixes.

Souplesse : contrats non liés au code des marchés publics. Rigidités des engagements entre nations.

Frégates

FREMM

Coopération bilatérale avec l’Italie. Programme géré par l’OCCAr.

Difficile à évaluer, mais l’impact de la coopération est probablement limité : les frégates ont été étudiées en coopération, mais chaque pays fait ensuite construire dans ses propres chantiers ses frégates. Les navires sont assez différents.

Du fait des constructions séparées, par les industriels nationaux, peu de rigidité.

Horizon

Coopération bilatérale avec l’Italie. Programme géré par l’OCCAr.

Difficile à évaluer. Les coûts d’études/développements ont été partagés équitablement, ceux de production au prorata de la valeur des commandes chaque pays. Chaque pays a fait construire ses navires dans ses propres chantiers.

Le soutien en service est assuré en national.

La rigidité provient des choix industriels : certaines installations communes aux deux pays sont conçues et développées par un industriel FR ou IT, qui seul peut donc intervenir en cas de difficulté de mise au point. Les délais de résolution des problèmes peuvent alors être prohibitifs.

 

MU90

Coopération FR-IT, via un consortium (DCNS/THALES/WASS) pour la production. Pour le soutien, un accord international existe entre FR, IT et Allemagne (club des pays utilisateurs).

Difficile à évaluer : probablement peu d’impact.

Rigidité liée à la fragilité du consortium Eurotorp (relations inter industriels).

Numérisation de l’espace de bataille

Syracuse III

Syracuse III est un programme purement national dont la composante spatiale comprenait deux satellites en orbite et

une redondance « à définir ». En 2006, le retour d’expérience des opérations récentes a conduit à considérer que deux satellites en orbite n’étaient plus suffisants et qu’il fallait obtenir une ressource supplémentaire en orbite.

Un arrangement de coopération avec l’Italie a été signé en 2007.

Il se concrétise par une charge utile française sur le satellite SICRAL2 réalisé en coopération avec l’Italie. La ressource sera disponible début 2015.

La France dispose d’un demi-satellite de télécommunication pour un prix inférieur à un hypothétique satellite SYR III C.

La réalisation du satellite a été retardée d’un an en raison du contexte économique en Italie.

La France ne dispose pas d’une autonomie totale de gestion du satellite, à l’instar de Syracuse III.

Transport aérien

A400M

Programme multinational à sept pays confié à l’OCCAr qui a signé le contrat d’acquisition en 2003 et le pilote au nom des nations

Difficile à évaluer : aucun des partenaires du programme A400M ne pouvait lancer seul ce programme.

La renégociation contractuelle de 2010 a entraîné une augmentation de 11 % du devis pour tous les partenaires, mais essentiellement pour des raisons de viabilité industrielle.

Le partage entre nations du programme de la charge industrielle peut pénaliser la recherche la plus économique en coût - performances

L’obligation de définir des positions communes à toutes les nations du programme génère des contraintes, mais c’est incontournable pour conserver le même avion (aux options près) et donc pouvoir être interopérable et mettre en place des clauses communes de soutien (et obtenir des économies en la matière)

Source : EMA.

ANNEXE 3 :
Disponibilité technique opérationnelle des principaux matériels
sur la période 2012 et 2013

Le tableau ci-dessous présente la DTO réalisée des principaux matériels en 2010, en 2011 et en 2012 ainsi que les prévisions pour 2012 et 2013. Les chiffres entre parenthèses sont calculés selon l’ancienne méthode.

 

2010
Réalisation

2011
Réalisation

2012
Prévision PAP 2012

2012
Prévision actualisée

Réalisation 2012

2013
Cible PAP 2012

Synthèse matériels tactiques de l’armée de terre

75

60,3

72

60

58

87

Armée de terre Char Leclerc

81

72,3

85

63

61

85

Armée de terre AMX 10 RCR

44

49,6

65

45

36

65

Armée de terre VAB

78

59,3

70

60

57

90

Armée de terre VBCI + AMX 10 P

63

60,7

75

80

82

80

Armée de terre Pièces de 155 mm

91

76,5

95

60

52

90

Synthèse matériels aéronautiques de l’armée de terre

68

61

95

61

62

90

Armée de terre Hélicoptères de manœuvre

52

47,7

95

47

48

90

Armée de terre Hélicoptères d’attaque ou de reconnaissance

82

74,2

95

75

75

0

Marine nationale Porte avions

(70,7)

(67,8) 51

46

63

55

75

Marine nationale SNA

(54)

(56,1) 56

60

63

60

60

Synthèse autres bâtiments de la marine

(74)

50

52

53

52

51

Marine nationale Composante frégates

(67,4)

(73,5) 55

60

46

45

60

Marine nationale Composante Guerre des mines

(88,3)

(93,4) 69

70

66

62

68

Marine nationale Bâtiments amphibie

(77,4)

(69,4) 42

49

51

58

50

Marine nationale Bâtiments de souveraineté et de présence

(75,7)

(71) 45

50

48

46

50

Synthèse matériels aéronautiques de la marine

(74)

(73) 63,3

49

50

50

48

Marine nationale Aéronefs embarqués

(65)

(66) 60,2

49

48

47

49

Marine nationale Hélicoptères (service public et combat)

(76)

(75) 69,7

51

51

51

49

Marine nationale Patrouille maritime

(67)

(71) 50,3

35

39

39

34

Matériels aéronautiques de l’armée de l’air

91,4

94,2

76

66

64,9

76

Armée de l’air Avions de combat

97,4

100,6

77

69

66,8

77

Armée de l’air Avions de transport tactique

83,7

85,2

64

52

54,3

67

Armée de l’air Avions de transport stratégique

(94,2)

(93,6)

(95)

45

42,2

95

Armée de l’air Avions à usage gouvernemental

90,2

93,5

90

97

102,8

90

Armée de l’air Avions spéciaux

73,3

82,2

80

70

70,4

80

Armée de l’air Hélicoptères de manœuvre

86,9

91,2

90

76

76

90

Armée de l’air Hélicoptères légers

86,1

87,7

88

72

65,6

90

Source : EMA.

Interprétation du périmètre : les trois armées (hors directions et services) ; il s’agit de fournir les capacités disponibles effectives pour la projection en regard des capacités d’intervention requises (théoriques) par le « contrat intervention » ; on exclut du périmètre les capacités consacrées à la dissuasion, à la protection, à la connaissance-anticipation et à la prévention.

ANNEXE 4 :
Les risques de rupture capacitaire pour la marine

Les risques de rupture capacitaire vont concerner la plupart des domaines compte tenu du vieillissement de la presque totalité des équipements. Trois capacités apparaissent plus nettement touchées.

a) Surveillance et intervention maritime

Patrouilleurs

L’ensemble de la composante « patrouilleurs » connaîtra une aggravation supplémentaire de la situation - déjà considérée comme préoccupante, si les premières livraisons de BATSIMAR ne sont pas programmées dans la LPM.

Outre-mer, le retrait des derniers patrouilleurs P400 prolongés en 2020 rendra la situation critique. Ainsi, l’acquisition de patrouilleurs légers pour la Guyane (PLG) et de bâtiments multi-missions (B2M) devient impérative pour atténuer la réduction capacitaire.

En métropole, il est envisagé de prolonger l’activité des certains avisos, convertis en patrouilleurs de haute mer, jusqu’à 40 ans. Cette solution est très sensible aux aléas techniques inhérents à des flottes aussi âgées. Elle ne permettra pas de combler totalement le déficit de moyens qui sera très délicat autour de 2025.

Aviation de surveillance et intervention maritime

La prolongation des F200-Gardian jusqu’à l’horizon 2020 permettrait de tenir le dispositif du Pacifique mais avec des risques techniques pour cette composante âgée. La bascule des Falcon F50 Marine vers le Pacifique serait nécessaire pour maintenir cette capacité au retrait des Gardian.

En métropole, si le programme AVSIMAR était repoussé au-delà de 2020, le tuilage pourrait être assuré par les F50 ex-AUG et une contribution d’ATL2 en fonction SURMAR.

b) Guerre des mines

Compte tenu de leur fragilité intrinsèque et du niveau de technologie de leur système de combat, très sensible à l’obsolescence, le prolongement de l’activité des chasseurs de mines n’est pas envisageable au-delà de 35 ans.

c) Logistique et ravitaillement des forces déployées

Les pétroliers ravitailleurs vont devoir être prolongés au-delà de 35 ans. Ce sont des bâtiments à simple coque, en dérogation à la réglementation civile actuellement en vigueur. Leur remplacement est inévitable compte tenu des enjeux capacitaires et opérationnels. Un risque de limitation capacitaire existe dans les années 2020.

ANNEXE 5 :
Les risques de ruptures capacitaires pour l’armée de terre

Les domaines capacitaires suivants illustrent les ruptures capacitaires.

a) Combat embarqué et débarqué médian

Scorpion inclut le véhicule blindé VBMR et l’engin blindé de reconnaissance et de combat (EBRC) afin de remplacer les véhicules de l’avant blindés (VAB) et les blindés AMX10 RCR vieillissants qui constituent l’ossature de l’équipement actuel des régiments.

Le schéma suivant illustre une rupture capacitaire contenue pour le combat débarqué sous réserve d’une livraison des VBMR à compter de 2017 et à un rythme rapide. Tout retard du programme accentuera rapidement la réduction de capacité.

De la même façon, pour un contrat opérationnel nécessitant 300 véhicules, la décroissance rapide des parcs ERC 90 et des VAB HOT totalement obsolètes en 2020 et celle progressive des AMX 10 RCR créent un risque important de rupture capacitaire en 2020 au regard d’une opération EBRC qui ne doit souffrir d’aucun retard.

b) Les appuis feux

La deuxième commande de 64 canons CAESAR pour remplacer les TRF1 et AUF1 a été reportée par l’EMA de 2014 à 2017, imposant de facto le maintien d’une partie des TRF1 et des AUF1 jusqu’en 2021.

Par ailleurs, des incertitudes persistent sur la cible du programme de lance-roquettes unitaires (LRU) (26 lanceurs prévus en commandes LPM dont 13 ont été reportés post LPM). Outre les aléas liés aux arbitrages budgétaires, ce retard résulte également des difficultés de la coopération multinationale (France, Allemagne et Italie).

c) La capacité d’aéromobilité

Elle repose entièrement sur les livraisons NH 90 (les parcs COUGAR et CARACAL étant limités et en partie dévolus aux FS). La rénovation des PUMA a été abandonnée. Une simple mise en conformité avec l’évolution de la réglementation de la circulation aérienne générale sera entreprise sur une flotte limitée d’appareils de l’armée de Terre (31). Ce parc, le plus ancien de l’armée de Terre connaît une chute inexorable et une disponibilité technique opérationnelle (DTO) moyenne médiocre.

Source : Armée de terre.

ANNEXE 6 :
Les risques de ruptures capacitaires pour l’armée de l’air

La LPM couvre les besoins capacitaires tout en prenant en compte des hypothèses de construction contraignantes : prolongation des systèmes anciens pour compenser le ralentissement de la modernisation des équipements, respect strict des calendriers de livraison prévus, mise en œuvre d’outils d’optimisation des formats, pérennisation de l’organisation actuelle du MCO aéronautique.

a) Aviation de chasse

Le calendrier Rafale de la LPM prévoit un ralentissement de la modernisation de l’aviation de chasse et le format chasse visé permet d’assurer les contrats opérationnels, sous réserve :

- de la mise en service des premiers M2000D rénovés (traitement des obsolescences, intégration AASM et canon) dès 2018 ;

- de pouvoir prolonger les M2000-5 au-delà de 2021 (étude nécessaire sur l’augmentation de la durée de vie de 7500 h à 9000 h) ;

- de l’application du principe de différenciation des forces, édicté par le Livre Blanc, se traduisant par la modernisation de l’outil de formation des pilotes de chasse. Cette rénovation s’opèrera grâce au remplacement en 2017 des TB30 et des Alphajet par un nouvel avion école, doté d’un système d’armes simulé et d’une avionique adaptée aux nouvelles exigences du Rafale. Il permettra une activité de complément pour une partie des pilotes de chasse (2e cercle).

b) Drone MALE

La montée en puissance de la capacité drone MALE est prise en compte par l’acquisition de 4 systèmes (12 vecteurs). Mais le maintien d’une capacité minimale transitoire repose tout à la fois sur la prolongation réussie du système actuel Harfang (jusqu’en 2017) et sur la mise en œuvre du nouveau système à l’horizon prévu.

c) Aviation de transport tactique

Les capacités de transport tactique sont déjà déficitaires et le resteront jusqu’à un horizon 2030. Le calendrier ralenti de montée en puissance de l’A400M repose sur la prolongation de 14 C160, mesure compensatoire absolument indispensable pour maintenir les compétences des équipages et garantir la transition sur A400M.

d) Aviation de transport stratégique

Le ralentissement de la montée en puissance du MRTT s’appuie sur les prolongations, d’une part des Airbus A310 et A340, d’autre part des flottes de ravitailleurs KC135 et C135. Cependant, l’âge (50 ans) et la fragilité des ravitailleurs font peser un risque très important de rupture capacitaire en cas d’aléas techniques graves. Cette rupture pèserait sur l’aptitude à opérer en OPEX, sur la protection de l’espace aérien français et sur la tenue de la posture de dissuasion.

e) MCO

Les capacités de l’armée de l’air reposent enfin sur une activité aérienne régulière et soutenue des équipages, pour acquérir et maintenir leurs compétences. Un risque de rupture capacitaire peut naître si la diminution du niveau d’entraînement, programmé pendant les 2 à 3 ans à venir, devait perdurer au-delà.

Le MCO doit être adapté au plus près de l’activité. La pérennisation de l’organisation actuelle du maintien en condition opérationnelle aéronautique est à ce titre indispensable pour générer et réaliser cette activité aérienne socle, pour laquelle la SIMMAD est un acteur central.

ANNEXE 7 :
Les dix principales mesures du pacte PME-Défense

– Rendre obligatoire la prise en compte de la dimension PME dans les processus achat du ministère de la Défense par une étude systématique de leur positionnement sur le segment considéré et définir la stratégie d’achat en conséquence ;

– Attribuer en priorité les marchés de moins de 15 000 euros (seuil de publicité) aux PME et aux TPE sous réserve que le tissu qu’elles constituent localement soit compétitif et que l’attribution se fasse après mise en concurrence ;

– Valoriser les approches innovantes dans les achats courants pour atteindre un volume de 2 % de la commande publique effectués auprès des PME et ETI innovantes, à l’horizon 2020, conformément au pacte national pour la croissance, la compétitivité et l’emploi ;

– Porter de 10 à 20 % le pourcentage minimum de l’avance attribuée aux PME dans les nouveaux marchés d’armement et optimiser l’utilisation de cette avance pour les autres marchés du ministère ;

– Maintenir pendant 3 ans le montant des crédits budgétaires d’études amont, augmentés de 10 % dans la loi de finances 2013 à 750 millions d’euros ;

– Porter de 40 M€ à 50 M€ en 3 ans le montant des crédits soutenant l’innovation duale des PME (RAPID).

– Garantir un nombre minimum annuel de 30 marchés portant sur des travaux de R&T et d’un montant inférieur à 2M€ HT, plus accessibles aux PME ;

– Faciliter l’intégration des innovations des PME soutenues par le ministère de la Défense dans les programmes et les systèmes d’armes des maîtres d’oeuvre dans le cadre de conventions bilatérales signées entre le ministère de la Défense et les principaux maîtres d’œuvre industriels ;

– Expérimenter l’attribution de labels aux PME et aux ETI pour les aider à conquérir de nouveaux marchés hors ministère de la Défense, en France et à l’exportation ;

– Créer des Pôles régionaux à l’économie de défense pour développer les PME en région, leur donner un meilleur accès aux informations sur les marchés de défense, répondre à leurs attentes et appuyer les acteurs locaux du développement économique.

ANNEXE 8 :
Lettre commune des industriels de la défense



1 () Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale (tome 1), juin 2008, p.16.

2 () Rapport n° 1615 de MM. Patrick Beaudouin et Yves Fromion sur la loi de programmation militaire pour les années 2009 à 2014, avril 2009.

3 () Alinéa 471 du rapport annexé.

4 () On distingue généralement les drones MALE qui permettent de couvrir un théâtre (le Harfang français vole à 7km d’altitude) des drones tactiques, tels le Sperwer français, qui accompagnent les unités en opération en vol à 3-4 kilomètres d’altitude).

5 () Chef de bataillon Devignon, « Le VBCI : outil de combat majeur d’une infanterie prête pour l’engagement », in Héraclès n° 39, juillet / août 2010.

6 () Armement Air-Sol Modulaire Infrarouge.

7 () De l’anglais multinational space-based imaging system for surveillance, reconnaissance and observation.

8 () Voir fiche en annexe.

9 () L’annexe 5 détaille les risques de rupture capacitaire sur ces programmes.

10 () Lettre D-12-008557 DEF/EMA/MCO/NP du 21/08/201, traduite pour les indicateurs du milieu naval dans la note n°0-3307-2012 DEF/EMM/STN/NP du 21/05/2012.

11 () Dôme protecteur de certains radars.

12 () Avis de M. Jean-Claude Viollet n° 2862 Tome VI, sur le projet de loi de finances pour 2011 – Défense : « Préparation et emplois des forces – air » déposé le 14 octobre 2010.

13 () Par le décret 2000-585 du 28 juin 2000 modifié.

14 () À cet égard, les rapporteurs rappellent que le développement du Rafale a été particulièrement contenu, autour de 9 milliards d’euros sur l’ensemble du cycle de développement, un coût à mettre en comparaison avec celui de son concurrent américain F35 qui atteint aujourd’hui près de 35 milliards de dollars.

15 () Rapport d’information n° 3663 sur les PME et la défense, au nom de la Commission de la défense nationale et des forces armées, juillet 2011.

16 () Le détail des dix mesures du pacte PME-Défense figure en annexe.

17 () Rapport n° 3661 de MM. Guy Chambefort et Philippe Folliot sur les actions civilo-militaires, déposé le 12 juillet 2011 et rapport n° 744 de MM. Philippe Meunier et Philippe Nauche sur le retrait d’Afghanistan, déposé le 26 février 2012.

18 () Sans compter l’inflation de certaines dépenses d’accompagnement social, non anticipées en programmation : celles liées au chômage sont passées de 35 millions d’euros en 2008 à 160 millions d’euros aujourd’hui ; celles liées au risque amiante s’élevaient à 25 millions d’euros en 2007 contre 100 millions d’euros aujourd’hui.

19 () Avis n° 3401de Monsieur Marc Joulaud sur le projet de loi n° 3385 autorisant la ratification du traité entre la République française et le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du nord relatif à des installations radiographiques et hydrodynamiques communes, déposé le 10 mai 2011.

20 () Rapport d’information n° 911 de la commission des affaires européennes sur la relance de l’Europe de la défense, par MM. Joaquim Pueyo et Yves Fromion, avril 2013.

21 () Rapport d’information n° 713 de MM. Daniel Reiner, Jacques Gautier, André Vallini, Xavier Pintat au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, juillet 2013.

22 () Les conséquences du retour de la France dans le commandement intégré de l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord (Otan), sur l’avenir de la relation transatlantique et les perspectives de l’Europe de la défense, 14 novembre 2012.


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