N° 1111
RAPPORT
FAIT
AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE LÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU PLAN (1)
SUR LE PROJET DE loi de finances pour 1999 (n° 1078),
TOME I
PAR M. DIDIER MIGAUD
Rapporteur général,
Député
SOMMAIRE
____
PRÉSENTATION GÉNÉRALE
PREMIÈRE PARTIE : LES
OBJECTIFS : CONFORTER LA CROISSANCE, DÉVELOPPER LEMPLOI, APPROFONDIR LA
SOLIDARITÉ
CHAPITRE PREMIER : Un environnement international DÉGRADÉ
ET INSTABLE, AU SEIN DUQUEL LA ZONE EURO BÉNÉFICIE DE MEILLEURES PERSPECTIVES
A.- UN ENVIRONNEMENT INTERNATIONAL DÉGRADÉ ET INSTABLE
1.- Une croissance mondiale ralentie
2.- Un environnement financier en crise
B.- DES ÉCONOMIES AFFAIBLIES OU EN VOIE DE RALENTISSEMENT
EN DEHORS DE LA ZONE EURO
1.- La persistance de la crise au Japon
2.-Lincertitude sur la reprise des économies émergentes dAsie
3.-La fragilité des économies des pays dEurope de lEst et dAmérique
latine
4.-Une moindre croissance dans les pays anglo-saxons
C.- DES PERSPECTIVES PLUS FAVORABLES POUR LA ZONE EURO
1.-Une croissance plus ferme, recentrée sur les facteurs internes
2.-La possibilité de tirer parti de certains des effets de la crise asiatique
CHAPITRE II : LA CROISSANCE FRANÇAISE RETROUVÉE A BESOIN
DÊTRE CONFORTÉE
A.- UNE REPRISE DE LINVESTISSEMENT DANS UN CONTEXTE
DE BONNE SANTÉ FINANCIÈRE DES ENTREPRISES
1.- Le réveil de linvestissement
2.- La bonne santé financière des entreprises
B.- UNE FORTE CROISSANCE DE LA CONSOMMATION DES MÉNAGES
1.-Une progression du pouvoir dachat du revenu disponible liée aux créations
demplois
2.-Une inflation maîtrisée
3.-Un regain de confiance des ménages
C.- LES BUDGETS ÉCONOMIQUES POUR 1999
1.-Un scénario international « gris et contrasté »
2.-La zone euro : un pôle de croissance dans un environnement instable
CHAPITRE III : LE BUDGET POUR 1999 DOIT MARQUER
LENTRÉE RÉUSSIE DE LA FRANCE DANS LA ZONE EURO
A.- LE DESSERREMENT DE LA CONTRAINTE COMMERCIALE.
1.-Une nouvelle amélioration des échanges extérieurs
2.-Une progression des importations liée à la reprise économique
3.-Une contraction relative des exportations
B.- LE CHANGEMENT DE NATURE DE LA CONTRAINTE FINANCIÈRE
1.-La « nouvelle donne » monétaire
2.-Les effets bénéfiques de lunion monétaire
C.- LE NÉCESSAIRE SOUTIEN À LINTÉGRATION DES
ENTREPRISES FRANÇAISES DANS LESPACE ÉCONOMIQUE EUROPÉEN
1.- Linternationalisation de léconomie française
2.- La nécessaire amélioration de la compétitivité de nos entreprises
D.- LA POURSUITE DE LASSAINISSEMENT DE NOS FINANCES
PUBLIQUES
CHAPITRE IV : LE BUDGET DOIT ÉGALEMENT FAVORISER LE
RENFORCEMENT DE LA COHÉSION SOCIALE, ENCORE TROP FRAGILE
A.- LE MARCHÉ ET LA POLITIQUE DE LEMPLOI :
DES PROGRÈS QUI RESTENT À AMPLIFIER
1.-La contribution des différents secteurs dactivité à lamélioration de
lemploi
2.-Une diminution globale du nombre des chômeurs en 1998
3.-Une amélioration encore trop inégale selon les catégories de demandeurs
demploi
4.-La nécessité daccroître lefficacité des politiques spécifiques de
lemploi
5.-Le choix dune politique de lemploi ambitieuse
6.- Un dialogue social renforcé
B.- LA LUTTE CONTRE LES INÉGALITÉS DANS LA SOCIÉTÉ
FRANÇAISE : UN CHANTIER TOUJOURS RENOUVELÉ
1.-Lutter contre la précarité
2.-Veiller au respect des droits fondamentaux
3.- Favoriser légalité des chances
PRÉSENTATION GÉNÉRALE
PREMIÈRE PARTIE
LES OBJECTIFS :
CONFORTER LA CROISSANCE
DÉVELOPPER LEMPLOI
APPROFONDIR LA SOLIDARITÉ
Si le bilan économique et financier au milieu de lannée dernière montrait une
« France en panne », les nouvelles orientations mises en oeuvre à partir de
lété 1997 auront permis une remise en mouvement aussi bien sur le chemin de la
croissance que sur la voie de la convergence européenne.
Lobjectif, que daucuns jugeaient irréaliste, dune croissance de 3%
en 1998 devrait être atteint, voire légèrement dépassé.
Le « bouclage budgétaire », que les mêmes avaient jugé impossible, a
été effectué sans imposer des sacrifices supplémentaires à lensemble des
Français. Lamélioration constatée a aujourdhui dégagé des marges
appréciables pour développer encore la stratégie de croissance et de solidarité, que
les Français ont appelée de leurs voeux en mai-juin 1977.
Lhorizon international sest cependant obscurci. Amplifié par la brutalité
des réactions des marchés financiers, symptôme des dérèglements inhérents à un
capitalisme incontrôlé, lenchaînement des crises - asiatique, japonaise,
russe...- constitue un choc majeur, que les économies européennes, en marche vers
leuro, doivent garder la capacité de surmonter.
Les perspectives économiques en Europe restent favorables et, avec un projet de budget
qui réinvestit judicieusement les « fruits de la croissance » retrouvée,
notre pays peut - sauf tourmente mondiale - espérer tenir la
prévision de croissance, prudemment révisée, de 2,7% pour 1999, en phase avec les plus
récentes prévisions du FMI prenant en compte les derniers développements des désordres
financiers internationaux connus à la mi-septembre 1998.
La croissance, dabord alimentée par lexportation, repose désormais sur la
demande intérieure, comme y incitaient les orientations de politique économique
arrêtées il y a un an. La consommation, bénéficiant de la hausse du pouvoir
dachat et du retour de la confiance, a contribué à une réorientation favorable de
la demande.
Linvestissement, trop longtemps hésitant, est enfin reparti et, nourri des
perspectives maintenues de croissance, devrait, à son tour, alimenter celle-ci.
Cette croissance autonome, si elle contribue à une certaine vigueur des importations,
ne remet cependant pas en cause léquilibre de nos échanges extérieurs.
Structurellement, notre balance commerciale peut supporter tant le ralentissement des
exportations lié à la crise mondiale, dailleurs atténué par lorientation
privilégiée de nos ventes vers une Europe occidentale aux perspectives satisfaisantes,
que le raffermissement des importations résultant du dynamisme de la consommation des
ménages et du redressement de linvestissement. Par ailleurs, linflation est
contenue, et la perspective de la mise en place de leuro a préservé lEurope
des turbulences financières, lui permettant de bénéficier de taux dintérêts
historiquement bas.
Bouclant un cercle vertueux, la croissance, recentrée sur les composantes internes de
la demande, a permis denregistrer un redressement de lemploi et un repli du
taux de chômage, ce qui génère des revenus soutenant la consommation et raffermit
encore la confiance des ménages.
Dans ce contexte, qui reste encourageant en dépit des incertitudes externes, le
partage des « fruits de la croissance » fait lobjet darbitrages
raisonnables et équilibrés :
16 milliards de francs sont affectés au financement des priorités de
la Nation, avec une progression de 1% en volume des dépenses, cette progression
maîtrisée étant permise par un effort sans précédent de redéploiement de la dépense
publique ;
quelque 21 milliards de francs sont consacrés à une nouvelle
réduction du déficit budgétaire contribuant à envisager globalement, pour 1999, un
besoin de financement des administrations publiques de 2,3%, le budget de lEtat
devant atteindre, pour la première fois depuis 1991, léquilibre primaire ;
enfin, environ 16 milliards de francs confortent le mouvement de
décrue des prélèvements obligatoires, amorcé en 1998, dans le cadre dun
processus tendant à réorienter notre système fiscal vers lemploi et la justice
sociale.
Sil est nécessaire de profiter de la croissance retrouvée pour reconstituer des
marges pour lavenir, les aléas liés à lenvironnement international doivent,
en effet, inciter à une certaine prudence et cette croissance doit donc être confortée.
Lévolution maîtrisée de la dépense participe ainsi de la volonté
dinscrire dans le moyen terme les priorités politiques de la majorité
plurielle : agir rapidement et puissamment pour lemploi et la solidarité, en
poursuivant leffort de soutien à la croissance engagé lan dernier.
La réduction du déficit est un impératif autant social quéconomique.
Le déficit alimente, en effet, un endettement qui conduit à prélever sur les revenus
dactivité pour servir des intérêts, cest-à-dire, en fait, à favoriser la
« rente » au détriment des entrepreneurs et des classes moyenne et populaire.
Le poids du service de la dette dans le budget est tel que la dette « nourrit la
dette », et accroît la « viscosité » du budget. Par ailleurs, il
convient de dégager, en phase de haute conjoncture, les marges qui permettront, le cas
échéant, de faire face à un éventuel ralentissement économique dans le respect de nos
engagements européens.
La volonté de diminuer les prélèvements obligatoires prend en compte
le poids désormais unanimement jugé excessif de notre fiscalité, même si les
comparaisons internationales souvent mises en avant doivent être tempérées par la prise
en considération du niveau des prestations collectives, résultant lui-même des
traditions nationales et des exigences du corps social. Lexercice est dautant
plus méritoire que, parallèlement, il a été résolument entrepris de mettre en cause
une situation fiscale déséquilibrée, en procédant à une nouvelle approche de la
répartition de nos impôts entre les prélèvements pesant sur le travail et ceux pesant
sur le capital, et en allégeant la charge fiscale des ménages les plus modestes.
CHAPITRE PREMIER
UN ENVIRONNEMENT INTERNATIONAL DÉGRADÉ ET INSTABLE, AU SEIN DUQUEL
LA ZONE EURO BÉNÉFICIE DE MEILLEURES PERSPECTIVES
Après des années de perspectives favorables visàvis desquelles tranchait
la faible croissance de léconomie de lEurope continentale, léconomie
mondiale offre pour les années 1998 et 1999 une image inversée. Les onze Etats de la
zone euro (1) se trouvent en effet dans une situation
plus favorable que le reste du monde grâce à une accélération de la croissance qui
fait figure dexception dans une économie internationale fortement ralentie dans son
ensemble.
Cette évolution est dabord la conséquence de la crise asiatique, qui a
provoqué des perturbations profondes : des crises monétaires et financières en
chaîne en Asie se propageant, par contagion, dun pays à lautre au fur et à
mesure que la défiance des investisseurs se manifestait, et entraînant une récession,
ou, au mieux, un fort ralentissement économique, alors que ces pays émergents
dExtrêmeOrient avaient représenté lélément le plus dynamique de
léconomie internationale dans les années antérieures ; la fragilisation des
autres économies émergentes dEurope de lEst et dAmérique latine, sous
leffet des mêmes mécanismes, fragilisation qui a même conduit à la crise en
Russie et au Brésil ; une forte chute du prix des matières premières, au premier
rang desquelles le pétrole, dont les Etats producteurs se trouvent ainsi fortement
pénalisés ; laggravation des difficultés de léconomie du Japon, atone
depuis le début de la décennie.
Mais, linversion du contexte économique provient également du ralentissement
des économies anglosaxonnes, après plusieurs années satisfaisantes, pour partie
en raison de la crise asiatique, certes, mais plus sûrement sous leffet de facteurs
liés à lachèvement dun cycle normal de croissance.
Enfin, on ne saurait trop insister sur limportance des facteurs internes aux
économies dEurope continentale, puisque lannée 1998 est marquée par une
évolution favorable de la consommation et de linvestissement, qui viennent
opportunément prendre le relais du commerce extérieur au moment où les débouchés à
lexportation se réduisent.
La crise russe, qui sest exacerbée au milieu du mois daoût 1998, la crise
latino-américaine, apparue dans le courant du mois de septembre, notamment au Brésil, et
la crise financière mondiale ne semblent pas devoir fondamentalement remettre en cause
ces perspectives dune économie internationale présentant des conjonctures
profondément décalées entre les grandes régions, même si toutes leurs conséquences
sont loin dêtre mesurées. Notamment, le rôle de léconomie russe semble
suffisamment restreint au niveau européen, pour ne pas provoquer une inversion des
tendances de fond décelées par les prévisionnistes dès le printemps 1998. La crise
russe devrait ainsi seulement affaiblir la reprise européenne, ce dont le Gouvernement a
dailleurs tenu compte en corrigeant légèrement, au début du mois de septembre,
ses prévisions de croissance pour 1999 (2,7%, au lieu de 2,8% envisagés en juillet
dernier).
Ces crises attirent néanmoins notre attention sur limportance des facteurs
dincertitude : la crise financière dans les économies émergentes
dAmérique latine et dEurope de lEst ; lévolution des
marchés boursiers mondiaux ; la difficulté du Japon à procéder à une relance de
son économie, après léchec de nombreux plans ; la portée de
lengagement des pays du G7 à favoriser une croissance tirée par la demande
intérieure. Ces éléments rendent, cette année, particulièrement malaisée la
présentation des perspectives économiques internationales.
En outre, la parité du dollar par rapport à leuro constitue un facteur
dincertitude majeur pour la croissance européenne. A cet égard, les hypothèses
associées au projet de loi de finances retiennent un cours de 6 francs pour
lannée 1999. Pour être établie selon la méthode habituelle, cette prévision
paraît cependant, en létat, quelque peu en décalage avec la réalité
daujourdhui, voire des anticipations.
A.- UN ENVIRONNEMENT INTERNATIONAL
DÉGRADÉ ET INSTABLE
1.- Une croissance mondiale ralentie
a) Le moindre dynamisme de la croissance mondiale
et du commerce international
La croissance mondiale pourrait être de lordre de 2,5% en 1999, soit une
légère reprise par rapport au taux de 2,2%, voire de 2% selon les prévisions révisées
du FMI, de lannée 1998. Néanmoins, cette perspective est très en retrait par
rapport au dynamisme des années passées (4,1% en 1997).
Témoin de ce ralentissement, le commerce mondial savère moins dynamique. Selon
les estimations de lOCDE (2), sa croissance en
volume sétablirait à 7,1% seulement en 1998 et 7% en 1999, très en retrait par
rapport à la progression de 9,8% constatée en 1997, essentiellement sous leffet de
la réduction des importations des pays émergents dAsie et de limpact de la
diminution des recettes dexportation des pays producteurs de pétrole et de produits
de base, affectés par la chute des cours consécutive à la crise asiatique. Plus
récentes, les prévisions du rapport économique, social et financier, confirment cette
inflexion du commerce mondial avec 7,3% en 1998 et 5,4% en 1999.
Le commerce interne aux pays de lOCDE augmenterait, pour sa part, plus vite que
la moyenne du commerce mondial, avec 9,6% en 1998 et 7,5% en 1999. Les exportations de ces
pays vers les pays tiers naugmenteraient que de 2,1% en 1998 et de 5,7% en 1999,
contre 7,2% en 1997, en conséquence de la contraction des débouchés dans les économies
émergentes. Les importations réalisées par les pays de lOCDE, favorisées par la
forte dépréciation des monnaies des pays dorigine des produits concernés,
seraient moins affectées, avec des taux de progression de 6,1% en 1998 et de 6,7% en
1999, en retrait il est vrai par rapport à celui de 1997, qui était de 7,8%.
b) La crise asiatique et ses conséquences
La crise asiatique est apparue lorsque, face à la dégradation de la situation
financière des banques et entreprises des pays émergents dAsie du sud-est, les
capitaux internationaux se sont massivement désengagés des pays concernés, lun
après lautre. Le premier pays touché a été la Thaïlande, dès le 2 juillet
1997. Ensuite, la crise sest propagée aux Philippines, à lIndonésie, puis
à Hong Kong, ce qui a provoqué une importante crise boursière internationale dans la
semaine du 20 octobre, et enfin, à la Corée. Le FMI a dû intervenir afin de
sassurer que la liquidité des pays concernés serait préservée.
Sur le fond, la crise sexplique par un certain nombre de facteurs, certains
structurels, dautres conjoncturels.
Sagissant des facteurs structurels, on note le manque de transparence et de
rigueur du contexte dans lequel certaines des économies émergentes ont évolué :
opacité des modes de direction des entreprises, insuffisante définition des droits de
propriété, manque dinformation sur la situation financière des emprunteurs,
absence de règles prudentielles et de système efficace de surveillance, notamment des
banques, spéculation effrénée, financement par lemprunt international
dinvestissements à la rentabilité douteuse dans quelques secteurs exportateurs et
limmobilier, et parfois, systèmes politiques faibles et insuffisamment soucieux de
lintérêt collectif.
En ce qui concerne les facteurs conjoncturels, le lien des monnaies avec le dollar
sest avéré préjudiciable dès lors que ce dernier sest apprécié, érodant
la compétitivité de ces économies très dépendantes de leurs débouchés à
lexportation.
Une fois que la défiance des investisseurs se fut manifestée, le reflux des
financements en provenance de létranger a rendu impossible le maintien de ce lien
avec le dollar, provoquant une accélération du phénomène de retrait et le décrochage
successif des différents pays affectés au fur et à mesure que les risques étaient
réévalués, et que les arbitrages défavorables se portaient dun pays à
lautre, dans le cadre dun effet dit « de domino ».
La crise des changes et le retrait des capitaux ont entraîné une crise de liquidité
dautant plus forte que la dépréciation des monnaies a accru le poids de
lendettement contracté en devises étrangères, provoquant la faillite de
nombreuses banques et institutions financières locales et un effondrement du crédit. Ce
dernier a entraîné des faillites industrielles ainsi que de fortes tensions sur les taux
dintérêt accompagnées, en outre, dun élargissement des écarts de taux sur
les financements en devises.
Cette crise de liquidité a amplifié lajustement des prix des actifs financiers
et immobiliers et a paralysé lactivité économique. Ses effets nont été
estompés que partiellement, grâce à lintervention de la communauté
internationale et aux programmes de soutien mis en oeuvre par le FMI au profit de la
Thaïlande, de lIndonésie et de la Corée du Sud.
Selon le rapport annuel du FMI, rendu public le 13 septembre 1998, les engagements de
la communauté internationale et du FMI en réponse à la crise asiatique pour la Corée,
la Thaïlande et lIndonésie, compte non tenu des engagements à légard des
Philippines, atteignaient 117,7 milliards de dollars le 23 juillet 1998, comme
lindique le tableau ci-après.
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ENGAGEMENTS DE LA
COMMUNAUTÉ INTERNATIONALE EN RÉPONSE À LA CRISE ASIATIQUE |
(en milliards de dollars) |
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ENGAGEMENTS |
|
Pays |
FMI |
Multilatéraux
(a) |
Bilatéraux
(b) |
Total |
Versements du FMI |
Indonésie |
11,2 |
10,0 |
21,1* |
42,3 |
5,0 |
Corée |
20,9 |
14,0 |
23,3 |
58,2 |
17,0 |
Thaïlande |
4,0 |
2,7 |
10,5 |
17,2 |
2,8 |
Total |
36,1 |
26,7 |
54,9 |
117,7 |
24,8 |
Source : Fonds monétaire international.
* estimation
a) les engagements dorigine multilatérale sont ceux de la Banque mondiale et de
la Banque asiatique de développement ;
b) les contributions dorigine bilatérale en faveur de lIndonésie et de la
Corée ont constitué une seconde ligne de défense. |
Sur le plan de la croissance, la crise asiatique sest traduite par une forte
chute de lactivité, qui na pas été sans conséquences sur les pays
développés, notamment le Japon dont les difficultés ont été aggravées.
Néanmoins, sagissant des pays occidentaux, les effets de la crise apparaissent
assez limités.
Le secrétariat de lOCDE a procédé à une estimation des effets de la crise sur
les pays de lorganisation, que résume le tableau ci-après.
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EFFETS DE LA CRISE DANS LES
PAYS ÉMERGENTS DASIE
SUR LES PAYS DE LOCDE EN 1998 ET 1999
(écarts par rapport au scénario fondé sur labsence de crise
en Asie) |
|
Croissance du PIB réel
(%) |
Niveau du PIB réel
(%) |
Balance courante
(en milliards de dollars) |
|
1998 |
1999 |
1999 |
1998 |
1999 |
Etats-Unis |
- 0,4 |
- 0,4 |
- 0,8 |
- 13 |
- 27 |
Japon |
- 1,3 |
- 0,7 |
- 2,0 |
- 12 |
- 22 |
Union européenne |
- 0,4 |
- 0,2 |
- 0,6 |
- 19 |
- 28 |
Canada |
- 0,2 |
- 0,3 |
- 0,5 |
- 2 |
- 3 |
Australie et Nouvelle-Zélande |
- 0,9 |
- 0,1 |
- 1,0 |
- 3 |
- 4 |
Total OCDE, hors Corée |
- 0,5 |
- 0,3 |
- 0,8 |
- 53 |
- 90 |
Corée |
- 6,8 |
- 2,6 |
- 9,2 |
+ 28 |
+ 34 |
Total OCDE |
- 0,7 |
- 0,4 |
- 1,1 |
- 26 |
- 55 |
Source : Perspectives
économiques, n° 63, juin 1998. |
« Il ressort des chiffres que limpact négatif sur la
croissance globale de la zone de lOCDE, à lexclusion de la Corée, est
d'environ un demi pour cent en 1998 et denviron un quart pour cent en 1999, soit au
total quelque trois quarts pour cent du PIB (3).
Comme indiqué dans le n° 62 des Perspectives économiques de lOCDE, le
Japon est le plus touché et limpact en 1998 est aussi relativement important en
Australie et en Nouvelle-Zélande. Les répercussions sur les Etats-Unis sont similaires
à celles ressenties par lUnion européenne, les engagements commerciaux de ces deux
régions vis-à-vis des économies de marché émergentes dAsie nétant pas
très différents. La variation globale des balances courantes dans la zone de
lOCDE, à lexclusion de la Corée, sétablit aux alentours de
90 milliards de dollars ». (4)
En ce qui concerne les effets de la crise dans les pays asiatiques émergents, de même
que ceux de latonie persistante de léconomie japonaise, sur les économies
occidentales, ils sont assez largement compensés par les conséquences de la baisse des
taux obligataires et par celles de la détente monétaire, qui se traduit par une baisse
des taux dintérêt, ainsi que par la baisse des prix du pétrole.
De son côté, la direction de la prévision a tenté dapprécier, de manière
plus générale, les effets de la crise économique en Asie.
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IMPACT INTERNATIONAL DE LA
CRISE ASIATIQUE
|
Ecarts par rapport à un scénario sans
crise |
Crise dans les pays
émergents dAsie |
Crise au Japon |
Baisse des taux obligataires
et détente monétaire |
Impact global de la crise, y
compris baisse du prix du pétrole |
|
1998 |
1999 |
1998 |
1999 |
1998 |
1999 |
1998 |
1999 |
Niveau du PIB (en %) |
|
|
|
|
|
|
|
|
Etats-Unis |
- 0,5 |
- 0,7 |
- 0,3 |
- 0,7 |
0,3 |
0,6 |
- 0,4 |
- 0,7 |
Union européenne |
- 0,5 |
- 0,8 |
- 0,4 |
- 0,9 |
0,3 |
0,8 |
- 0,6 |
- 0,8 |
Allemagne |
- 0,6 |
- 1,0 |
- 0,5 |
- 1,1 |
0,4 |
1,0 |
- 0,6 |
- 1,0 |
France |
- 0,5 |
- 0,8 |
- 0,3 |
- 0,9 |
0,2 |
0,7 |
- 0,5 |
- 0,9 |
Niveau des prix (en %) |
|
|
|
|
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|
|
|
Etats-Unis |
- 0,8 |
- 1,6 |
- 0,3 |
- 1,3 |
0,3 |
1,2 |
- 0,9 |
- 1,8 |
Union européenne |
- 0,5 |
- 1,0 |
- 0,2 |
- 0,8 |
0,0 |
0,3 |
- 0,7 |
- 1,6 |
Allemagne |
- 0,3 |
- 1,0 |
-,0,1 |
- 0,6 |
0,0 |
0,3 |
- 0,3 |
- 1,4 |
France |
- 0,2 |
- 0,6 |
- 0,2 |
- 0,7 |
0,0 |
0,1 |
- 0,5 |
- 1,3 |
Source : Ministère de
léconomie, des finances et de lindustrie - Direction de la
prévision. |
Ainsi, selon la direction de la prévision, « globalement, on
peut estimer que la crise asiatique et les difficultés japonaises coûteront de
lordre dun demi point de croissance à lEurope en 1998, comme en 1999.
Aux Etats-Unis, limpact de la crise serait légèrement inférieur. La crise est
également un important facteur de désinflation (selon les pays, linflation serait
réduite dun demi point à un point cette année comme lan prochain) ».
2.- Un environnement financier en crise
a) Une sphère monétaire et financière en crise
Lenvironnement monétaire et financier international apparaît à lautomne
1998 en crise après avoir été profondément agité et perturbé au cours de
lannée. Les fortes baisses boursières et monétaires, souvent corrigées par des
hausses tout aussi soudaines, en témoignent.
A lorigine de lagitation des marchés, on observe le renforcement de
plusieurs facteurs susceptibles de provoquer des transferts massifs de capitaux et de
fortes chutes des monnaies ou des valeurs mobilières :
une défiance visàvis des pays émergents qui nont pas
été affectés directement par la crise asiatique et par la crise russe : pays de
lEurope orientale ; pays dAmérique latine ; Chine ;
une incertitude sur lévolution des cours des actions américaines,
qui ont beaucoup augmenté ces dernières années et dont le niveau reste très élevé eu
égard aux bénéfices distribués, face aux perspectives de ralentissement de
léconomie américaine et aux interrogations sur lévolution des profits des
entreprises dans un contexte de restriction des marchés, notamment au plan
international ;
des inquiétudes latentes, maintenant reléguées au second plan avec
lamplification de la crise et les craintes dune récession affectant une
majorité de pays, sur une éventuelle reprise de linflation dans les pays
développés et un durcissement corrélatif de la politique monétaire. Ce phénomène a
particulièrement affecté les EtatsUnis, où les marchés attendaient avec une
impatience particulière les décisions de la Réserve fédérale relatives aux taux
dintérêt ;
une inquiétude sur le devenir des créances douteuses des établissements
bancaires et financiers, dont certains, avec linternationalisation des marchés et
la globalisation des économies, se sont fortement engagés sur les pays émergents
dAsie, dAmérique latine, de Russie et dEurope centrale et
orientale ;
une vigilance sur le maintien des capacités dintervention
internationale pour limiter lampleur des crises de défiance affectant la liquidité
dun pays.
A cet égard, le rapport annuel du FMI récemment publié note que le ratio de
liquidité du fonds, défini comme le rapport des ressources utilisables et des
engagements liquides, est passé de 120,5% à 48,8% du 30 avril 1997 au 30 avril
1998.
Si ce taux est inférieur au niveau jugé raisonnable de 70%, les capacités
dintervention du fonds apparaissent pour le futur préservées, dune part,
grâce aux Accords généraux demprunts qui permettent au FMI de mobiliser
15 milliards de dollars auprès des Etats ou des banques centrales de onze pays (5) pour soutenir, dans le cadre de son fonds durgence,
léconomie dun pays en cas durgence et de risque de crise, et
dautre part, grâce à laugmentation de 45% des quotas (qui constituent les
fonds propres du FMI) décidée cette année.
La montée de la défiance a conduit à une crise financière généralisée, qui
sest notamment aggravée après la publication par le FMI de ses perspectives de
croissance dans le monde, révisées en baisse, au cours du mois de septembre,
caractérisée par une forte chute des places occidentales, les seules encore en gain
depuis le début de lannée.
Certes, cette forte baisse ne fait que corriger une hausse spéculative et excessive
tout au long de lannée. Il nen reste pas moins quelle est susceptible
davoir des conséquences importantes sur le niveau de lactivité dans les
différents pays occidentaux.
Elle sest également traduite par une forte chute du dollar, passé de plus de
6,10 francs au début du mois de juillet 1998 à 5,48 francs le 5 octobre
dernier.
b) La nécessité dune action coordonnée des grands pays
et des organisations internationales
Les crises monétaires et financières successives de ces dernières semaines, qui ont
frappé notamment la Russie et lAmérique latine, mettent laccent sur la
nécessité de procéder à la mise en place dinstruments internationaux de
régulation des capitaux afin de mieux impliquer le secteur privé dans la régulation de
ces crises, daccroître la transparence des marchés, de renforcer le rôle des
institutions financières internationales dans lappréhension des défis mondiaux et
de renforcer leur contrôle sur les économies émergentes.
Il est donc à souhaiter que les initiatives prises en ce sens aboutissent.
Dans cet esprit, votre Rapporteur général soutient donc les orientations tracées
tant par le Premier ministre, M. Lionel Jospin (6),
que par le ministre de léconomie, des finances et de lindustrie, M. Dominique
Strauss-Kahn.
Selon le Premier ministre, il convient dabord détablir des règles,
notamment prudentielles, pour le fonctionnement des marchés internationaux et des
principes de transparence financière, à légard des « centres financiers offshore »,
entre autres. Il juge, par ailleurs, nécessaire de favoriser les flux financiers qui sont
utiles à lactivité économique par rapport à ceux qui sont motivés par le seul
but dune plus-value spéculative à court terme. Mais il sagit également
daller plus loin en « renforçant larchitecture financière mondiale »
grâce à la constitution de larges ensembles économiques régionaux, chacun structuré
autour dune union monétaire, et articulés entre eux par un régime de changes
flexibles, mais maîtrisés. Les pays en voie de développement seraient, en outre,
associés à la gestion des marchés financiers mondiaux.
La mise en oeuvre de telles orientations paraît, en effet, indispensable, pour mettre
fin aux désordres monétaires et financiers internationaux actuels. Ainsi que la
suggéré le ministre de léconomie, des finances et de lindustrie,
M. Dominique Strauss-Kahn, léconomie internationale a besoin dune
refondation monétaire et financière semblable à celle à laquelle il avait été
procédé à Bretton Woods en août 1944.
On doit donc se féliciter de ce que ces propositions trouvent un écho au sein de la
communauté internationale, comme le montre lintervention, le 14 septembre
dernier, du Président des Etats-Unis, M. Bill Clinton, en faveur dun soutien
du FMI en Amérique latine et dun renforcement des moyens du Fonds, et
lengagement, le même jour, des ministres et des gouverneurs des banques centrales
du G7 à coopérer pour « préserver ou créer les conditions dune
croissance intérieure soutenable » pour leurs propres économies, dans le cadre
dune déclaration commune.
La Conférence des Nations-Unies pour le commerce et le développement (CNUCED), dans
un rapport publié le 16 septembre 1998, propose dinstaurer un contrôle des
mouvements de capitaux pour les pays débiteurs.
Parmi les propositions les plus intéressantes, on notera celle du Premier ministre du
Royaume-Uni, M. Tony Blair, qui, dans un discours prononcé le 21 septembre
dernier devant le New-York Stock Exchange, a proposé la refonte des institutions
issues des accords de Bretton Woods, le FMI et la Banque mondiale, dont il
estime que le rôle doit être renforcé.
Cette réforme serait fondée sur plusieurs éléments :
une plus grande transparence avec la mise en place dun code de bonne
conduite en matière financière et monétaire, le développement des normes
internationales de comptabilité publique et la fixation de principes généraux du
gouvernement dentreprise ;
lamélioration de la surveillance de la réglementation financière
et linstitution dune coordination entre le FMI et la Banque mondiale,
dune part, et les organismes dits régulateurs, Banque des règlements
internationaux, Comité de Bâle, Fédération des sociétés de bourse, dautre
part ;
la création dun prêteur international en dernier ressort pour
répondre aux crises de liquidités ;
la maîtrise des flux de capitaux, grâce à une meilleure coopération
entre les gouvernements et le secteur privé ;
un meilleur contrôle de lactivité des organisations, notamment une
évaluation externe des programmes du FMI.
Ces propositions rejoignent pour partie le mémorandum adressé par la France à ses
principaux partenaires au cours du mois de septembre.
Celui-ci propose en effet les éléments suivants :
une contribution européenne au soutien de la croissance mondiale ;
la construction dun nouveau Bretton Woods, fondé sur la mise
en place dun véritable gouvernement politique du FMI approuvant par vote les
orientations stratégiques, le renforcement de la transparence du système financier
international, le caractère progressif de louverture des marchés de capitaux des
pays émergents, le maintien dun flux de capitaux publics daide au
développement et lassociation du secteur privé à la résolution des crises.
Par ailleurs, la crise financière mondiale pose de nouveau la question de la taxe dite
« Tobin » proposée par le prix Nobel déconomie, James Tobin, en 1978.
Cette taxe, proportionnelle aux transactions, constituerait certes un frein aux mouvements
de court terme purement spéculatifs, en diminuant le rendement de ces opérations. La
taxe serait dautant moins lourde que la durée du placement dans la devise
concernée serait long, eu égard au rendement des capitaux placés.
La mise en uvre de cette taxe est cependant délicate car de nombreuses
opérations de règlement dopérations commerciales ou de couverture du risque de
change seraient aussi taxées. En outre, les conditions de sa mise en place seraient
exigeantes. Elle devrait nécessairement être mise en place par tous les Etats, sans
exception aucune. De plus, il conviendrait de veiller à ce que le marché monétaire et
financier mondial ne se retrouve à nouveau inutilement cloisonné.
Se fondant sur les mesures en vigueur au Chili, le rapport économique, social et
financier annexé au projet de loi de finances pour 1999 montre les avantages dun
système de réserves obligatoires pour les prêts assurés par les banques étrangères
et dun contrôle des agences de notation internationales préalablement aux
émissions des banques et entreprises sur les marchés internationaux.
Enfin, on observera avec satisfaction que les pays du G7 se sont engagés à endiguer
la crise et à sauvegarder la croissance lors de leur réunion du samedi 3 octobre à
Washington.
B.- DES ÉCONOMIES AFFAIBLIES OU EN VOIE
DE RALENTISSEMENT EN DEHORS DE LA ZONE EURO
1.- La persistance de la crise au Japon
Léconomie japonaise souffre dune croissance particulièrement faible
depuis le début de la décennie. Seule lannée 1996 a fait exception, avec une
croissance de 3,9%. 1997 a été une année de quasistagnation, lévolution du
PIB étant de 0,9%. Pour 1998, la récession savère plus forte que celle qui était
initialement prévue, le recul du PIB étant estimé à 1,8%.
Cette évolution défavorable sexplique dabord par un facteur devenu
structurel : la faiblesse dun système bancaire et financier affecté par
léclatement des « bulles » de spéculation, boursière en 1990 et
immobilière en 1992, et par le ralentissement de lactivité du début de la
décennie, qui ont conduit à un gonflement anormal des créances douteuses qui
sélèvent à 17% du PIB, selon les estimations officielles, et à une dégradation
des ratios prudentiels, à cause, notamment, de la réduction des plusvalues
latentes, comptabilisées dans le capital (7).
Les effets de cette crise bancaire sont dautant plus forts que les participations
croisées sont importantes.
Elle provient également de facteurs conjoncturels. Dune part, la crise asiatique
a été particulièrement dure pour ce pays qui réalisait, en 1996, une forte proportion
de son commerce international avec les pays émergents de la région, (42,4% de ses
exportations et 35,2% de ses importations) et a plus encore affaibli la situation de ses
banques, fortement engagées dans la zone. Dautre part, latonie de la demande
intérieure, qui affecte tant la consommation que linvestissement, est liée au
resserrement budgétaire de lannée 1997. Cette politique restrictive sest
traduite par une réduction de 1,5 point de la demande totale de léconomie,
avec, entre autres, une chute de 11,1% de la formation brute de capital fixe du secteur
public. Sagissant de la consommation des ménages, celleci naura
progressé que de 1,1% en 1997. Parmi les éléments explicatifs, on observera un climat
général dégradé, laugmentation de deux points de la taxe sur la consommation
(équivalent de la TVA), qui est passée de 3% à 5%, le faible niveau de confiance des
ménages face à une augmentation du chômage et à la stagnation des rémunérations,
ainsi que les défaillances de grands établissements financiers. Linvestissement
privé a été affecté par le rationnement du crédit, consécutif aux difficultés
persistantes des banques, mais a pu progresser de 4,5%, tandis que la construction de
logements seffondrait de 15,7%.
La baisse du yen face au dollar, 20% en un an, a certes amélioré la compétitivité
des produits japonais, mais a aussi aggravé les difficultés dune Asie en crise.
Le commerce extérieur continue de contribuer à la croissance, mais cela tient
essentiellement au resserrement des importations, même si la chute du yen par rapport au
dollar a amélioré, jusqu'à ce que le dollar faiblisse, très récemment, la
compétitivité des produits japonais.
Lannée 1998 est marquée par la persistance de cette récession. Certains
observateurs craignent même que le pays ne soit au bord de la déflation ; le Japon
a en effet connu trois trimestres successifs de récession : le quatrième trimestre
de 1997 et les deux premiers trimestres de 1998. Le PIB pourrait diminuer de 2% cette
année, selon les estimations du rapport économique, social et financier annexe au projet
de loi de finances pour 1999, de 2,5% selon le FMI.
Dans ce contexte, les perspectives de reprise pour 1999 sont très incertaines. Les
estimations, de lordre de 1%, récemment rectifiées à 0,5% par le FMI, paraissent
étroitement liées à lefficacité des mesures dassainissement du système
financier et à la réussite des mesures de relance budgétaire engagées par le
Gouvernement, après léchec de plusieurs plans de relance successifs. Il
sagit, dune part, de la réduction des taux dintérêt, avec, le
9 septembre dernier, un abaissement du taux au jour le jour, qui est passé de 0,5%
à 0,25%, et des engagements de la Banque du Japon dopérer une injection massive de
liquidités dans le système bancaire, qui devra être restructuré. La réduction des
taux dintérêt devrait avoir cependant un impact limité, leur niveau étant faible
depuis longtemps déjà et labsence de reprise laissant penser que cet instrument
est inefficace, en dehors du soulagement quil apporte aux établissements
financiers. Dautre part, un plan de relance, décidé en avril 1998, a complété
des mesures de soutien déjà adoptées au cours de lannée 1997 et en février
1998 ; il portait sur 16.600 milliards de yens (soit environ 760 milliards
de francs). De nouveaux allégements fiscaux et des dépenses publiques supplémentaires
ont été annoncés, qui devraient avoir des effets positifs.
Le nouveau Gouvernement a en effet pris lengagement de prendre des mesures
supplémentaires pour dynamiser la demande. Ce huitième plan devrait représenter 3,5% du
PIB, dont 2 points au titre des dépenses publiques et 1,5 point au titre
dallégements fiscaux.
2.- Lincertitude sur la reprise des
économies émergentes dAsie
La résorption des conséquences de la crise asiatique savérant très difficile,
le calendrier de la reprise reste des plus incertains pour les économies émergentes
dExtrême-Orient.
Le redémarrage de lactivité ne peut être que graduel et dépend
essentiellement de la capacité des pays concernés à mettre en oeuvre les réformes
structurelles susceptibles de restaurer la confiance des investisseurs internationaux.
a) La forte récession des pays affectés par la crise asiatique
A lexception de Singapour, de la Chine et de Taiwan, dont la production
naura connu quune petite inflexion de sa croissance, grâce à une inflation
maîtrisée, un secteur bancaire assez sain, un solde extérieur positif et un taux
dendettement extérieur peu élevé, ainsi quà une industrie très
compétitive, les pays émergents dExtrêmeOrient ont connu cette année une
phase de contraction.
Une fois passées les premières conséquences de la crise financière, le maintien à
un niveau élevé des taux dintérêt à court terme, le caractère déprimé des
marchés boursiers, lévolution défavorable des taux de change, et un étranglement
du crédit aggravé par les difficultés des banques en raison de la forte baisse des prix
de limmobilier, ont entraîné un repli de lactivité économique et des
tensions inflationnistes résultant de laugmentation des prix des produits
importés. Ainsi, lensemble de ces pays connaît un net ralentissement, avec une
récession particulièrement marquée en Thaïlande, en Indonésie et en Malaisie et des
perspectives qui restent déprimées et dépendantes dajustements difficiles. Pour
lavenir, lamélioration des perspectives apparaît étroitement liée à la
poursuite de lassainissement du système financier, nécessaire au développement du
crédit et à un retour à la confiance des investisseurs internationaux.
La Corée du Sud, qui a bénéficié, à lautomne 1997, dun programme de
renflouement de 57 milliards de dollars sous légide du FMI face à la menace
dun défaut de paiement, a été particulièrement affectée, avec une forte chute
de la demande intérieure de près de 10% cette année, après 3,1% en 1997. Le PIB
pourrait chuter de 6% cette année. Les perspectives séclaircissent cependant,
compte tenu des importantes restructurations industrielles ou bancaires et des mesures de
relance annoncées. Elles permettent d'envisager, peut-être, un retour à la croissance
dès 1999.
b) Une conjoncture très dépendante de lévolution de la
Chine
La situation de la Chine est suivie avec attention par les opérateurs internationaux,
dans la mesure où elle présente certains signes de fragilité et où lon craint
une nouvelle déstabilisation des pays émergents voisins. Une dévaluation du yuan
savérerait très préjudiciable aux économies des autres pays nouvellement
industrialisés dExtrêmeOrient. La relance de la compétitivité des produits
chinois, concurrents des leurs, porterait, en effet, préjudice à leur rétablissement,
déjà difficile.
Or, on observe que léconomie chinoise présente certains des facteurs de
faiblesse qui ont conduit au déclenchement de la crise en Thaïlande :
limportance des créances douteuses du système bancaire, fortement
concentré ; le déficit persistant des entreprises publiques ; le
développement des activités spéculatives favorisé par labondance du crédit dans
les années passées ; lencours de la dette extérieure, qui a crû de manière
notable.
Cependant, sur le plan financier, la situation de la Chine reste solide, avec un
excédent des comptes courants, même si celuici diminue rapidement (2,5% du PIB en
1997, et une prévision de 1,2% en 1998 et de 0,6% en 1999), ainsi que labsence de
libre convertibilité du yuan.
Sagissant de la croissance, léconomie chinoise connaît en 1998 un certain
ralentissement lié à lérosion de ses exportations et au fléchissement de la
demande intérieure, notamment de la consommation. La croissance reste cependant de
lordre de 5,5% et pourrait être paradoxalement renforcée par la nécessité de
reconstruire une partie des régions inondées par les crues de lété.
Pour lavenir, le raffermissement des perspectives de léconomie chinoise
exige la résolution des faiblesses structurelles de lappareil de production et du
système bancaire.
En ce qui concerne HongKong, le freinage de lactivité est
spectaculaire, avec une croissance de 0,9% cette année contre 5,2% en 1997. Pour 1999,
les perspectives sont meilleures, sous réserve des éventuelles évolutions des marchés
financiers et de lassainissement dun secteur financier fortement affecté par
la chute de limmobilier et les conséquences de la crise des pays voisins.
3.- La fragilité des économies des pays
dEurope de lEst
et dAmérique latine
De manière générale, les économies émergentes des pays dEurope orientale et
dAmérique latine ont été fragilisées par la crise asiatique et la crise russe.
a) La crise russe
Lannée 1997 a été la première, depuis le début des transitions économiques,
durant laquelle la Russie na pas enregistré de diminution de sa production sur
lensemble de lannée.
Cependant, les difficultés persistantes en matière de recouvrement des impôts par
lEtat et de versement des salaires, linstabilité des marchés et
leffondrement des prix des matières premières ont eu raison des perspectives
favorables qui semblaient sesquisser. De plus, lépuisement dun système
financier fondé sur des taux dintérêt élevés attirant des capitaux
internationaux qui sinvestissaient surtout en emprunts dEtat, a aggravé les
difficultés financières de lEtat et a empêché le financement des investissements
nécessaires au développement économique.
La crise russe a ainsi éclaté le 17 août dernier, lorsque le Gouvernement a
renoncé à défendre la parité du rouble visàvis du dollar, et a annoncé
la suspension du remboursement de la dette extérieure pour une durée de
quatrevingtdix jours, provoquant, sur le plan interne un début de panique qui
a eu des effets dévastateurs sur une économie profondément désorganisée, mettant
notamment en péril les établissements financiers. La fuite devant la monnaie, par
lachat de devises et le stockage des biens, et lhyperinflation ont réapparu.
Léconomie pourrait régresser de 6% cette année selon le FMI.
Les perspectives économiques dépendant essentiellement de lévolution de la
situation politique, votre Rapporteur général observera seulement que la résolution des
difficultés structurelles de léconomie russe exige que plusieurs conditions soient
remplies, dont la première est le rétablissement de la capacité de lEtat à lever
les impôts, ne seraitce que pour préserver sa capacité demprunt.
b) LEurope de lEst
En 1997, les pays dEurope centrale, hors Russie et pays balkaniques, ont
bénéficié dune croissance proche de 5%. Cette performance est assez remarquable,
car elle sest accompagnée de la poursuite de la réduction de linflation,
laquelle reste cependant élevée en raison du dynamisme de la demande, notamment de la
consommation privée et de linvestissement. Ce dynamisme pèse cependant sur les
comptes extérieurs, déficitaires, et a même imposé deux plans de stabilisation
successifs en République tchèque.
Pour 1998, le taux de croissance devrait être de lordre de 4,3% pour
lensemble de ces pays, la République tchèque faisant exception avec 1,5% environ.
Les perspectives de 1999 étaient assez favorables, avant que néclate la crise
russe.
Sagissant de léconomie des pays balkaniques, 1997 a été marquée par
linflation et la récession. Pour 1998 et 1999, une certaine amélioration était
attendue.
c) La crise financière en Amérique latine
En 1997, lAmérique latine a connu une croissance de 5,1%, particulièrement
remarquable, notamment en Argentine, au Pérou et au Chili.
Le Venezuela a commencé à se relever de la récession de 1996. Ce dynamisme a eu pour
contrepartie laccroissement du déficit courant, comblé heureusement par des
entrées de capitaux sans précédent. La croissance a même atteint 7%, poussée par le
dynamisme de la demande intérieure privée, ce qui représente un rattrapage de la chute
de 1995.
Pour 1998, léconomie des pays dAmérique du Sud est marquée par un
ralentissement qui est la conséquence de la crise asiatique et particulièrement de la
baisse des cours des produits de base, notamment du pétrole. La croissance devrait
sétablir à 2,8%. Le Brésil est dautant plus affecté quaprès un
resserrement de la politique économique, monétaire et budgétaire, opéré à la fin de
1997, ce qui nétait pas sans influence sur lArgentine, il a été touché de
plein fouet par la crise financière.
Pour 1999, le FMI donne des perspectives de croissance de 2,7%.
4.- Une moindre croissance dans les pays
anglo-saxons
Les économies anglosaxonnes, dont le RoyaumeUni qui présente un décalage
conjoncturel avec lEurope continentale, devraient connaître, en 1999, un
ralentissement, pour partie lié à des éléments externes tels que le niveau du dollar
et de la livre ainsi que la crise asiatique, qui a restreint leurs débouchés, mais
également, à des facteurs internes de réduction du dynamisme de la demande intérieure.
Par ailleurs, on ne manquera pas dobserver que ce ralentissement correspond à la
fin dun cycle dexpansion qui aura été, sagissant des Etats-Unis,
particulièrement long.
a) Le ralentissement de léconomie américaine
Léconomie américaine aura connu, en 1998, sa septième année de croissance
consécutive. Après un exercice 1997 jugé extrêmement satisfaisant par lOCDE, en
raison dun taux de croissance de 3,8%, 1998 serait également marqué par une
progression de lordre de 3,4%, selon le rapport économique, social et financier
annexé au projet de loi de finances pour 1999. On notera plus particulièrement la
performance du premier trimestre, avec une forte progression correspondant à un taux
annuel de 5,5%. La croissance du deuxième trimestre a été plus modeste, avec un rythme
annuel estimé de 1,4%, en raison dun réajustement des stocks, dont le niveau
était particulièrement élevé, ainsi que dune dégradation des résultats du
commerce extérieur, marqué par la progression soutenue des importations et le repli des
exportations.
Il est remarquable que, malgré des pressions certaines, linflation ait été
maîtrisée. On observera, en effet, que lamélioration du marché du travail, avec
un taux de chômage, particulièrement bas, de 4,8% en 1998, a entraîné une
accélération des gains horaires et des coûts de lemploi, laquelle a été
compensée par un accroissement de la productivité du travail, une expansion rapide des
capacités de production et une baisse des prix à limportation.
Lannée 1999 devrait cependant être marquée par un moindre dynamisme, plusieurs
facteurs dordres interne et externe contribuant à une réduction de la croissance.
Sur le plan externe, les conséquences négatives de la crise asiatique et de la
persistance des difficultés du Japon auraient un impact encore significatif. La perte de
croissance résultant du premier facteur passerait de 0,5% du PIB en 1998 à 0,7% du PIB
en 1999. Sagissant des conséquences de la crise japonaise, les pertes de croissance
seraient respectivement de 0,3% et de 0,7%. Ces effets ne seraient que partiellement
compensés par ceux, bénéfiques, de la baisse des taux dintérêt et de la
détente monétaire, qui représenteraient un supplément de croissance de 0,6% du PIB en
1999, contre 0,3% en 1998.
Globalement, même si on peut compter sur une relative reprise de certaines
exportations de biens avec le rétablissement progressif de la situation en Asie, la
contribution du commerce extérieur américain à la croissance serait négative.
LOCDE a ainsi estimé, au printemps dernier (8),
que les importations de biens continueraient à croître à un rythme significatif, avec
9,7% en 1999, même si on note un retrait par rapport aux deux années antérieures (13,6%
en 1998 et 15% en 1997), alors que les exportations ne croîtraient quà un rythme
beaucoup plus modéré, de 5,2% en 1998 et 5,4% en 1999, contre 15,1% en 1997 et 9,5% en
1996. Néanmoins, la baisse récente du dollar pourrait faciliter les exportations.
Sur le plan interne, après une année 1998 où elle aura été assez soutenue, la
consommation privée devrait connaître un certain ralentissement et sétablir à
3%, en retrait par rapport aux années 1997 et 1998 (respectivement 3,3% et 3,8%). La
baisse des prix des produits importés, qui a marqué lannée 1998, naurait
plus le même effet, et le redressement du taux dépargne ainsi que la contraction
des dépenses financées à laide des plusvalues réalisées sur le marché
boursier contribueraient également à peser sur la consommation. La progression de
linvestissement des entreprises devrait également se ralentir après le rythme
particulièrement soutenu de ces dernières années, lOCDE relevant que le stock de
capital atteindra, en 1999, un niveau sans précédent depuis vingt ans.
Sur le plan monétaire, la baisse de 0,25% du niveau des fonds fédéraux, observée le
29 septembre dernier, a ramené le taux dintérêt de 5,50% à 5,25% et
constitue ainsi un facteur favorable au soutien de la croissance.
Limportance de la croissance pour 1999 dépend, en outre, de trois facteurs
essentiels qui peuvent lourdement peser sur lévolution de l économie
américaine dans les prochains mois : lévolution des marchés financiers, qui
affecte les ménages américains ; le niveau du dollar, notamment par rapport à
leuro, qui peut avoir un effet dopant sur le commerce extérieur, une poursuite de
la dépréciation favorisant certes la compétitivité des entreprises américaines et un
renforcement des exportations, mais pouvant également favoriser les pressions
inflationnistes au moment où la demande faiblirait ; le niveau du ralentissement de
la consommation, déterminant pour la croissance.
Le rapport économique, social et financier annexé au projet de loi de finances pour
1999 prévoit une croissance de 1,9% pour 1999, ce qui est proche de la plus récente
prévision du FMI, publiée à la fin du mois de septembre 1998 (2%).
b) Laffaiblissement de la croissance au RoyaumeUni
Après plusieurs années de croissance satisfaisante depuis 1994, dont lannée
1997 naura pas été la moindre avec une progression de 3,3%, léconomie du
RoyaumeUni est entrée cette année dans une phase de ralentissement, qui devrait
être plus marquée lan prochain. Le PIB augmenterait de 2,3% en 1998 et de 1,6% en
1999.
Ce ralentissement ne constitue guère une surprise, la croissance ayant entraîné des
tensions inflationnistes. Ces dernières se sont notamment manifestées sur le marché du
travail : la progression de lemploi a été de 2% en 1997, le taux de chômage
a été réduit à son plus bas niveau depuis 1980 et laugmentation des gains moyens
a été appréciable. Il faut également tenir compte des perspectives liées à
lintroduction dun salaire minimum. Ces pressions sur les prix ont cependant eu
des conséquences modérées, sous leffet de la baisse des prix des produits
importés consécutive à lappréciation de la livre sterling à partir de 1996 et
de la baisse des prix des produits de base.
La réduction de lactivité est plus largement le fruit de la manière dont a
été orientée la politique économique, policy mix, notamment la politique
monétaire, conduite par la Banque dAngleterre, qui a pris des orientations
restrictives depuis deux ans déjà.
Les conditions monétaires ont été durcies dès la mi1996. Elles ont été
renforcées au second semestre 1997. Le taux des prises en pension de la Banque
dAngleterre a ainsi été relevé de manière significative, ce qui sest
traduit par une augmentation des taux dintérêt à court terme, qui sont passés de
6% en mai 1997 à 7,5% en juin 1998.
La politique budgétaire a également fait lobjet de mesures semblables sur les
exercices 1997/1998 et 1998/1999, même si les dépenses publiques devraient augmenter de
4% sur le deuxième exercice. Le déficit des administrations publiques pourrait ainsi
être réduit et passer de 1,9% du PIB en 1997 à 0,8% en 1998 et 0,4% en 1999.
Sagissant des facteurs externes, sans quil faille négliger, naturellement,
limpact de la crise asiatique, lappréciation de la livre sterling depuis le
milieu de lannée 1996 a érodé la compétitivité des produits britanniques, ce
qui a entraîné un ralentissement sensible des flux dexportation. Leur croissance
devrait ainsi passer à 5% en 1998 et 4,8% en 1999, après les taux assez dynamiques de
6,8% en 1996 et 8% en 1997. Les importations se maintiennent, en revanche, à un taux
similaire à celui des années précédentes, avec une croissance de 9% en 1998.
Sagissant de la demande interne, les taux de croissance de la consommation et des
investissements, encore vigoureux en 1998, avec respectivement 2,1% et 5%, devraient
sétablir à des niveaux jugés par lOCDE proches de leurs moyennes de long
terme : 2,1% et 3,5%.
Ce ralentissement de la demande, qui devrait conduire à un apaisement des tensions
inflationnistes, pourrait permettre dans le futur un assouplissement de la politique
monétaire et un retour à la croissance.
C.- DES PERSPECTIVES PLUS FAVORABLES POUR
LA ZONE EURO
Pour 1999, les perspectives des onze pays de la zone euro sont plus favorables que pour
le reste du monde, lactivité devant progresser à un rythme assez soutenu après
avoir connu une accélération qui sest amorcée au cours de lannée 1997 et
sest poursuivie cette année.
Cette situation peut sembler paradoxale dans un contexte marqué par la crise asiatique
et, plus récemment, par la crise russe.
Elle tient pour lessentiel au fait que lEurope continentale se trouve dans
une phase de reprise lui permettant de supporter des facteurs négatifs venus du reste du
monde dans la mesure où son exposition aux risques extérieurs est assez faible. En
effet, le degré douverture de la zone euro nest que de 10% environ ; son
degré dexposition aux pays émergents dAsie et au Japon est inférieur à 2%
de son PIB et sétablit à 1,4% vis-à-vis de la Russie et des pays de lEst,
si lon se réfère à la structure des exportations.
En outre, certaines des conséquences de la crise asiatique et de la crise russe,
telles que la chute des cours de matières premières et la détente des taux
dintérêt à long terme consécutive à lafflux de capitaux motivé par les
bonnes perspectives de leuro et la recherche de placements plus sûrs par les
investisseurs, compensent, au moins partiellement, la restriction des débouchés à
lexportation.
Cependant, le niveau du dollar, qui a chuté de près de 10% depuis le début du mois
daoût, de 6 francs à 5,50 francs, représente un élément
dincertitude notable pour lampleur de la reprise européenne.
1.- Une croissance plus ferme, recentrée
sur les facteurs internes
Les perspectives des pays de la zone euro sont assez favorables, avec une reprise de la
croissance : 2,9% en 1998 et 2,8% en 1999, soit des taux supérieurs à 1997 (2,5%)
et à 1996 (1,6%), selon les estimations du rapport économique, social et financier
annexé au projet de loi de finances pour 1999. Ce décalage conjoncturel par rapport au
reste du monde sexplique par une réorientation de la croissance au profit des
facteurs internes.
Ce recentrage sobserve dabord dans le fait que le commerce extérieur, qui
a contribué à la croissance en 1997, à raison de 0,7 point, naurait plus
dinfluence positive sur lactivité en 1998 et en 1999. Après avoir progressé
de plus de 8% en 1999, les exportations de la zone euro connaîtraient ainsi une
évolution plus modérée de 5% environ par an sur 1998 et 1999. Cette évolution tient
dune part au recul des exportations vers les pays asiatiques et au ralentissement
des économies anglosaxonnes, dautre part, à la perte de compétitivité
consécutive à la dépréciation des monnaies de pays émergents. A linverse, les
importations provenant de pays extérieurs à la zone resteraient soutenues, en liaison
avec le dynamisme de la demande interne.
En contrepartie, la demande intérieure a clairement pris le relais comme facteur de
croissance. La consommation privée présente un certain dynamisme, soutenue par plusieurs
facteurs : une reprise de lévolution du pouvoir dachat, qui connaîtrait
une progression de 2,6% en 1998 et de 2,9% en 1999, en net progrès par rapport à 1996 et
1997, au cours desquelles les chiffres de 0,8% et de 1,2% ont été constatés, les
salaires réels et lemploi évoluant favorablement ; un regain de confiance des
ménages ; le faible niveau des taux dintérêt ; le caractère moins
restrictif des finances publiques. Les perspectives sont également favorables aux
investissements, notamment aux investissements productifs, en raison, dune part, de
la baisse des taux dintérêt à long terme et, dautre part, dune
certaine tension sur lutilisation des capacités de production. Enfin, il faut
relever que le développement des échanges à lintérieur de la zone exercera un
effet stabilisateur non négligeable.
Cette conjoncture apparaît ainsi favorable à lemploi, dont la croissance, assez
faible en 1997 à raison de 0,2%, apparaît plus significative dès cette année, avec 1%.
Le taux de chômage a ainsi diminué, sétablissant à 11,2% en juin 1998 contre
11,8% un an auparavant.
Audelà des tendances communes, on observe un décalage conjoncturel qui conduit
à opérer la distinction entre les pays, certains dentre eux étant en avance par
rapport au cycle européen. Au coeur de léconomie de la zone euro, on trouve
lAllemagne, la France et lItalie, qui contribuent de manière prépondérante
au cycle économique. A la périphérie, et en avance par rapport au cycle européen, les
PaysBas, la Finlande, lIrlande, lEspagne et le Portugal.
En ce qui concerne lAllemagne, après plusieurs années de croissance
lente, la reprise sest manifestée avec un taux de 2,2% en 1997 et des perspectives
de 2,6% cette année et 2,7% en 1999. La croissance de lannée 1997 a principalement
été alimentée par les exportations. Lannée 1998 a débuté avec une reprise de
lensemble des composantes de la demande intérieure, à lexception des stocks.
Laccélération la plus notable a concerné linvestissement privé, qui a cru
au rythme de 5,4% au premier trimestre. La consommation privée a notamment bénéficié
de la relative décrue du chômage et dun certain retour à la confiance des
ménages. Pour lannée 1999, la croissance devrait être soutenue par les mêmes
composantes.
Sagissant de lItalie, la reprise sest engagée au second
semestre 1997 et a reposé sur la consommation. Au début de lannée 1998, les
perspectives sont renforcées par une forte progression des investissements.
Léconomie devrait connaître une croissance de 2,4% en 1999 contre 1,8% en 1998.
2.- La possibilité de tirer parti de
certains des effets
de la crise asiatique
Limpact de la crise asiatique et de latonie de léconomie du Japon
est estimé par la direction de la prévision, pour la zone euro, à une perte de
croissance dun demi point de PIB en 1998 et de trois quarts de points en 1999.
Si cet impact est réduit, cest grâce à leffet significatif de la
détente monétaire et de la réduction des prix du pétrole, estimé pour lensemble
de la zone euro à 0,3 point de croissance en 1998 et 0,8 point en 1999.
a) La réduction des cours des matières premières
La crise asiatique a entraîné de fortes chutes sur les marchés des matières
premières et des produits de base, en provoquant une contraction de la demande dans la
zone, qui a constitué, au cours des années précédentes, le marché le plus dynamique
de ces produits et le principal vecteur de la demande mondiale.
Cette évolution constitue indéniablement un facteur favorable à la croissance en
Europe, en entraînant une réduction des coûts de production et une amélioration du
pouvoir dachat des consommateurs. Même si le redressement de certains marchés,
comme celui du pétrole, doit être envisagé, les cours devraient rester assez modérés
en 1999.
Le prix du pétrole (estimé daprès le panier OPEP) a connu,
après octobre 1997, une forte réduction, de 30% en moyenne, les effets négatifs de la
chute de la demande consécutive à la crise asiatique venant accentuer la pression sur un
marché par ailleurs structurellement sujet à un excès doffre avec la montée en
puissance des pays extérieurs à lOPEP depuis le milieu des années 1980. Le cours
est ainsi passé de 18,8 dollars le baril, en moyenne sur lannée 1997, à
11,5 dollars le baril, avant de remonter légèrement. Il a atteint un niveau
inférieur à celui davant la crise pétrolière de 1973, hors inflation.
En ce qui concerne la demande, leffet de la crise des pays
dExtrêmeOrient a été dautant plus fort que ce marché a été le plus
dynamique dans les années passées, puisquil a représenté, de 1991 à 1997, près
du tiers de la demande mondiale de pétrole. En outre, la douceur climatique de
lhiver 19971998 a entraîné une faible croissance de la demande des pays de
lOCDE.
Lexcès doffre a trouvé son origine, dune part, dans la difficulté
des pays producteurs à respecter les contingents fixés, ce qui a conduit lOPEP à
prendre acte de cette situation et à les relever en novembre 1997, dautre part,
dans le retour de lIrak sur le marché après 1996, en application de laccord
« pétrole contre nourriture » conclu avec lONU.
Plusieurs engagements ont été récemment conclus entre les pays producteurs de
manière à réduire lexcédent de loffre et à provoquer une remontée des
cours.
Lévolution des prix sur le second semestre de lannée 1998 et
lannée 1999 dépend donc essentiellement de la capacité des pays producteurs
concernés à respecter leurs engagements et de la capacité de léconomie mondiale
à résorber les stocks pétroliers, lesquels ont atteint en juillet dernier un niveau
particulièrement élevé.
Les prix devraient ainsi remonter. Un cours sétablissant entre 15 et
17 dollars le baril peut donc être envisagé.
Le maintien de lexcédent structurel de loffre sur la demande devrait, en
effet, maintenir les prix à un niveau relativement modéré, mais acceptable pour les
producteurs.
Sagissant des autres produits de base, lensemble des marchés ont
été déséquilibrés par la crise asiatique, quil sagisse des produits
agricoles à usage alimentaire tels que le blé ou le sucre, des matières à vocation
industrielle comme le coton, ou des métaux. Pour ces derniers, les cours ont chuté de
manière assez spectaculaire, une réduction de 42% ayant été enregistrée sur le
nickel, de 24% sur laluminium de septembre 1997 à août 1998. Lor est
également affecté.
Le mouvement dajustement des stocks opéré ces derniers mois na pas eu de
répercussion positive sur les prix. Aussi, malgré de bonnes perspectives de
développement de la demande en Europe et aux EtatsUnis, un redressement rapide des
cours nest pas envisagé.
b) La détente des taux dintérêt
La crise asiatique a entraîné un reflux des capitaux vers les économies
occidentales, et particulièrement celles dEurope continentale, sous leffet de
la « préférence pour la qualité », qui conduit les investisseurs à
rechercher la sécurité en période troublée et à préférer les valeurs mobilières
- surtout les obligations - des grands pays industrialisés. Ce reflux a permis
une réduction des taux dintérêt à long terme.
De manière générale, la défiance des investisseurs à légard de
lensemble des pays émergents alimente ce phénomène, qui est venu prolonger une
tendance de fond à la réduction des taux dintérêt, engagée à la fin de
lannée 1992 et concernant tant les taux courts que les taux longs. Ce mouvement
sest appuyé sur la maîtrise de linflation, sur la perspective de
leuro, ainsi que sur la disparition progressive des contraintes liées au
financement de la réunification allemande.
Ainsi, le taux moyen à trois mois, pondéré sur la base du PIB de chacun des onze
Etats de la zone euro, est passé de 5,8% au début de 1996 à 3,9% en août 1998.
De manière plus concrète, de janvier 1997 à septembre 1998 les taux à dix ans sont
passés de près 6% en France et en Allemagne à 4,03% pour le taux des emprunts
dEtat allemand à dix ans et à 4,18% pour les OAT à dix ans en France le 12
septembre 1998.
Pour lavenir, ce faible niveau des taux ne devrait pas être remis en cause par
la politique budgétaire des différents pays concernés, compte tenu de la poursuite de
la nette amélioration des finances publiques constatée depuis 1995 et des obligations du
pacte de stabilité. En outre, la zone euro est clairement apparue, à loccasion des
turbulences monétaires et financières de ces derniers mois, comme une zone refuge pour
les capitaux.
c) Des perspectives dévolution des prix favorables
Les perspectives dévolution des prix apparaissent favorables dans les pays de la
zone euro. Linflation a dailleurs continué à baisser, avec 1,6% en 1997 et
une moyenne annuelle de 1,3% au premier semestre 1998.
Ces perspectives reposent sur plusieurs éléments.
Sur le plan interne, il faut rappeler, dune part, la modération des évolutions
salariales et limportance des gains de productivité et, dautre part,
lexistence dun écart denviron 2% entre le niveau du PIB et le potentiel
de production de lensemble des pays de la zone, selon le FMI et lOCDE. Le
retard de la demande enregistré depuis le début de la décennie na donc pas été
comblé.
Sur le plan extérieur, on observe, outre la faiblesse ou la modération des cours des
matières premières, une absence de perspectives de reprise de linflation chez les
principaux partenaires commerciaux des pays de la zone euro. Dans les pays
anglosaxons, les tensions inflationnistes resteraient encore assez modérées avec
2,5% au Royaume-Uni, 2,7% aux EtatsUnis et 1,5% au Canada. Sagissant du Japon,
limportance des pressions déflationnistes fait que lon peut sattendre
à une baisse des prix au second semestre 1998 et au cours de lannée 1999.
Les perspectives économiques des pays de la zone euro apparaissent ainsi plus
favorables que celles des autres pays. Parce quelles reposent sur des éléments
internes, elles ne sauraient être fondamentalement remise en cause par les évolutions
extérieures.
Néanmoins, il convient de rester vigilant face à lévolution du dollar. Une
baisse sensible de son taux de change vis-à-vis de leuro assombrirait les
perspectives économiques européennes et pourrait nuire au maintien dune forte
croissance et au développement de lemploi.
La bonne santé, à terme, de léconomie européenne repose sur une parité
raisonnable entre leuro et le dollar.
CHAPITRE II
LA CROISSANCE FRANÇAISE RETROUVÉE A BESOIN DÊTRE CONFORTÉE
Au vu des comptes du deuxième trimestre de 1998, la situation de notre économie est
conforme aux prévisions formulées à lautomne 1997. Si la dégradation de
lenvironnement extérieur se traduit par un tassement des exportations (+ 0,1%
au premier trimestre et au deuxième trimestre de 1998, contre encore + 1,5% au
quatrième trimestre de 1997), les facteurs internes ont pris le relais pour nourrir la
croissance.
La consommation des ménages sest notablement accélérée, avec un
« acquis de croissance » de 2,9% à la fin du premier semestre de 1998,
linvestissement des entreprises enregistrant, de son côté, un acquis de croissance
de 5,7%.
Au total, gagnant en autonomie, la croissance devrait, malgré les périls extérieurs,
conserver sa vigueur, le consensus des conjoncturistes restant en phase avec la prévision
raisonnée - 2,7% - qui sous-tend le présent projet de loi de finances.
Mais, dans un environnement international perturbé, rester sur ce chemin de croissance
suppose que les pouvoirs publics ne demeurent pas inertes. La vigueur de la consommation
requiert le maintien des orientations définies lan passé pour soutenir le pouvoir
dachat, particulièrement en direction des classes moyenne et populaire. Le ressort
de linvestissement doit être maintenu en faisant bénéficier également les
entreprises des baisses dimpôt quautorise lamélioration de la
situation de nos finances publiques. Une politique active, et sélective, de la dépense
publique doit, enfin, apporter sa contribution au soutien de la demande intérieure.
Avant daborder lévolution de linvestissement et de la consommation,
qui constituent le moteur de lactuelle croissance, on rappellera quelle a été
lévolution, au cours de la décennie, des différentes composantes de la
croissance française.
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CONTRIBUTIONS À LA
CROISSANCE DU PIB
aux prix de lannée précédente |
Contributions |
1990 |
1991 |
1992 |
1993 |
1994 |
1995 |
1996 |
1997 |
Consommation finale des ménages
des administrations publiques
des administrations privées |
1,4 0,4
0 |
0,7 0,5
0 |
0,8 0,6
0 |
0 0,6
0 |
0,8 0,2
0 |
0,9 0
0 |
1,1 0,5
0 |
0,4 0,2
0 |
Formation brute de capital fixe dont : SQS-EI
non financières |
0,6 0,5 |
0 0 |
- 0,7 - 0,2 |
- 1,3 - 0,9 |
0,2 0,1 |
0,4 0,3 |
- 0,2 0 |
0 0 |
Variations de stocks |
0,2 |
- 0,7 |
- 0,5 |
- 1,0 |
1,3 |
0,4 |
- 0,6 |
0,1 |
Echanges extérieurs de biens et services dont :
Exportations
|
- 0,2 1,2
- 1,4 |
0,3 0,9
- 0,6 |
0,8 1,1
- 0,3 |
0,4 - 0,3
0,7 |
0,1 1,5
- 1,4 |
0,3 1,3
- 1,0 |
0,5 1,2
- 0,7 |
1,5 3,2
- 1,7 |
Produit intérieur brut |
2,4 |
0,8 |
1,0 |
- 1,3 |
2,6 |
2,0 |
1,3 |
2,2 |
Source : Comptes de la
Nation. |
A.- UNE REPRISE DE
LINVESTISSEMENT DANS UN CONTEXTE DE BONNE SANTÉ FINANCIÈRE DES ENTREPRISES
1.- Le réveil de linvestissement
La reprise économique, amorcée en 1996 grâce à la demande extérieure et stimulée
ensuite par la demande intérieure, se traduit, à partir du milieu de lannée 1997,
par une progression de linvestissement productif, alors que celui-ci était très
décevant depuis la récession de 1993. Alors quelle avait atteint, en 1992, ce qui
apparaît comme un sommet, avec 700 milliards de francs courants, la formation brute
de capital fixe (FBCF) des sociétés et quasi-sociétés (SQS) sest fortement
contractée, avec 639 milliards en 1993, avant de progresser médiocrement en 1994
(650 milliards), 1995 (673 milliards) et 1996 (676 milliards).
Le retournement du deuxième trimestre de 1997 ne se traduit pas dans les statistiques
annuelles, quil sagisse de cette même FBCF en 1997 (674 milliards), du taux
dinvestissement (FBCF/valeur ajoutée) ramené pour les SQS de 16,1% en 1996 à
15,5% en 1997 ou de linvestissement productif de lensemble des sociétés et
quasi-sociétés et entreprises individuelles, dont lINSEE, a considéré, dans sa
note de conjoncture de juin 1998, quil na pas progressé sur lensemble
de lannée 1997.
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|
INVESTISSEMENT PRODUCTIF DES
ENTREPRISES
(volumes aux prix de lannée précédente, évolutions en %) |
Secteurs (et pondérations) (a) |
1994 |
1995 |
1996 |
1997 |
1998 (b) |
Grandes entreprises nationales (12%) |
- 21,8 |
- 4,9 |
8,5 |
4,2 |
- 2,0 |
Entreprises du secteur concurrentiel (88,0%)
|
4,9 |
4,6 |
0 |
- 0,5 |
7,3 |
Agriculture (6,0%) |
9,9 |
8,2 |
3,7 |
- 1,0 |
1,1 |
Industrie (28,7%) |
5,4 |
0,4 |
2,1 |
0,6 |
9,0 |
Commerce - Services (50,6%) |
4,6 |
7,3 |
- 1,1 |
- 1,2 |
7,0 |
Bâtiment - Travaux publics (2,7%) |
- 1,7 |
- 6,7 |
- 9 |
2,2 |
4,0 |
Ensemble des SQS et EI (prix de
lannée précédente) |
0,9 |
3,5 |
0,9 |
0 |
6,2 |
Ensemble des SQS et EI (prix de 1980) |
1,3 |
3,8 |
1,1 |
0 |
6,8 |
(a) Structure de linvestissement en valeur
en 1997. (b) Prévision.
Source : INSEE, Note de conjoncture, juin 1998. |
Cest une approche plus fine qui permet de mettre en évidence,
comme le fait lINSEE dans cette dernière note, le retournement de conjoncture du
deuxième trimestre de 1997, la reprise des investissements étant ensuite confirmée par
les résultats des comptes nationaux pour le deuxième trimestre de 1998.
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|
RESSOURCES ET EMPLOIS DE
BIENS ET SERVICES AU PRIX DE 1980 PAR TRIMESTRE |
(en pourcentage de variation
t/t-1) |
|
1996 |
1997 |
1998 |
|
|
Acquis (b) |
|
T1 |
T2 |
T3 |
T4 |
T1 |
T2 |
T3 |
T4 |
T1 |
T2 |
1996 |
1997 |
1998 |
Produit intérieur brut |
1,4 |
- 0,1 |
0,8 |
0,3 |
0,2 |
1,1 |
0,9 |
0,8 |
0,6 |
0,7 |
1,5 |
2,3 |
2,5 |
FBCF totale |
- 0,2 |
0,1 |
0,0 |
- 0,1 |
- 1,1 |
1,1 |
0,6 |
0,2 |
1,9 |
0,9 |
- 0,5 |
0,0 |
3,3 |
dont SQS et EI |
0,2 |
0,9 |
0,9 |
- 0,4 |
- 2,5 |
1,4 |
1,1 |
0,5 |
3,0 |
1,8 |
0,6 |
- 0,4 |
5,7 |
Ménages hors EI |
- 0,7 |
1,3 |
- 2,8 |
1,1 |
- 0,6 |
0,2 |
0,3 |
- 0,2 |
0,1 |
1,6 |
- 1,0 |
- 0,6 |
1,3 |
Administrations publiques |
- 2,1 |
- 5,2 |
- 0,2 |
- 1,7 |
2,0 |
1,4 |
- 0,4 |
0,0 |
1,4 |
- 2,5 |
- 7,5 |
0,2 |
- 0,3 |
Demande intérieure (a) |
0,7 |
0,1 |
0,2 |
0,2 |
- 0,5 |
0,5 |
0,9 |
0,7 |
1,3 |
0,9 |
0,9 |
0,8 |
3,1 |
(a) La demande intérieure est définie comme le
total des ressources moins les exportations. (b) Lacquis est le taux de croissance
annuel qui serait observé si la variable concernée restait au niveau atteint au dernier
trimestre connu. Il ne sagit pas dune prévision mais dune indication de
limpact des évolutions passées. |
Source : INSEE, Informations
rapides, n° 247, septembre 1998. |
Ainsi, la FBCF des sociétés et quasi-sociétés et entreprises
individuelles a reculé de 0,4% sur lensemble de lannée 1997, en raison
dune baisse de 2,5% au premier trimestre qui na pas été compensée par la
croissance des trimestres suivants. En 1998, la progression de 3% au premier trimestre et
de 1,8% au deuxième trimestre témoigne du dynamisme de linvestissement des
entreprises : selon la note de conjoncture de juin 1998, qui envisageait pourtant un
moindre dynamisme au premier semestre que celle de septembre 1998, la croissance de la
FBCF pourrait dépasser 6% pour toute lannée.
Sagissant de lavenir, lenquête annuelle de la Banque de France
auprès de 8.677 entreprises des secteurs de lindustrie et du bâtiment-génie
civil (9) retrace de bonnes prévisions
dinvestissements pour 1998.
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PRÉVISIONS
DINVESTISSEMENTS PHYSIQUES EN 1998 |
(évolution en pourcentage) |
|
Entreprises employant |
Ensemble |
Secteurs |
moins de 100 salariés |
de 100 à 499 salariés |
500 salariés et plus |
des entreprises |
Industries agro-alimentaires |
- 2 |
1 |
- 8 |
- 6 |
Biens de consommation |
15 |
10 |
6 |
8 |
Industrie automobile |
12 |
3 |
- 7 |
- 7 |
Biens déquipement |
8 |
18 |
- 1 |
4 |
Biens intermédiaires |
20 |
30 |
21 |
24 |
Industrie |
12 |
18 |
4 |
9 |
Bâtiment |
- 9 |
- 2 |
11 |
- 3 |
Génie civil |
1 |
- 12 |
29 |
14 |
Bâtiment-génie civil |
- 7 |
- 10 |
26 |
5 |
Source : Banque de France
(mars 1998). |
Selon cette enquête, linvestissement physique des entreprises
industrielles devrait se redresser très nettement en 1998 (+ 9% en valeur, après
- 4% en 1997). Ce mouvement devrait surtout concerner les petites et moyennes
entreprises, la reprise étant plus modérée pour les grandes entreprises. Les
perspectives dinvestissement des entreprises de taille moyenne et de petite taille
sont ainsi en très forte hausse (+ 18% et + 12%), alors que les grandes
entreprises augmenteraient leurs dépenses dinvestissement de 4% environ.
Sagissant de lévolution sectorielle, en 1998, les investissements
physiques dans le bâtiment et le génie civil devraient progresser, sous leffet
dune nette amélioration des perspectives dinvestissements dans le génie
civil (+ 14%). Une nouvelle baisse des dépenses, de plus faible ampleur, serait
enregistrée dans le bâtiment (- 3%), avec une contraction de 16% des
investissements physiques dans le gros oeuvre, alors quils seraient en hausse de 3%
dans le second oeuvre.
Les variations de stocks ont été décevantes en 1997, avec un déstockage
prolongé sur lensemble de lannée (- 9,2 milliards de francs 1980), la
reconstitution des stocks étant lente au premier semestre 1998 (+3,3 milliards de francs
1980). LINSEE constate donc que les variations de stocks ont eu une contribution
neutre à la croissance du deuxième trimestre, le faible restockage sexpliquant par
les perspectives de prix. Cependant, la reconstitution des stocks pourrait
saccélérer au deuxième semestre, compte tenu de la poursuite de lactivité.
Enfin, la reprise de linvestissement sest accompagnée dune
augmentation très significative du taux dutilisation des capacités de
production. Ce taux sétait dégradé, revenant de 84,8% à lété 1995 à
82,1% en octobre 1996. Il sest progressivement relevé, puis plus fortement, gagnant
1,5 point entre janvier 1998 (85,1) et avril 1998 (86,6) (10).
2.- La bonne santé financière des
entreprises
Cette reprise de linvestissement est intervenue dans un contexte de bonne santé
financière confirmée pour les entreprises.
Lexcédent brut dexploitation (EBE) des sociétés et quasi-sociétés a
progressé de 5,57% en 1997, à comparer aux 2,61% daugmentation de la masse des
rémunérations et au 1,23% de croissance des impôts nets de subventions. Ainsi le
partage de la valeur ajoutée (+3,44%) a-t-il été particulièrement profitable aux
sociétés. Le taux de marge (EBE/valeur ajoutée) a donc augmenté pour atteindre 32,34%
au lieu de 31,69% en 1996.
Le taux dépargne (épargne/VA) des sociétés et quasi-sociétés a lui aussi
progressé (18,34% en 1997 au lieu de 18,01% en 1996) ainsi que le taux
dautofinancement (épargne/FBCF) qui, pour la cinquième année consécutive,
dépasse 100% (118,31% en 1997, après 112,09% en 1996). En vérité, ce dernier ratio est
moins significatif quauparavant car, grâce au niveau très bas des taux
dintérêt, les entreprises ont tendance à augmenter leurs emprunts pour le
financement de leurs investissements.
Force est donc de constater que les Cassandre se sont lourdement trompés qui, il y a
un an, avaient annoncé que la création dune contribution temporaire et la
modification du régime des plus-values des sociétés, prévues par la loi n° 97-1026 du
10 novembre 1997 portant mesures urgentes à caractère fiscal et financier, obéreraient
la bonne santé des entreprises et briseraient la reprise naissante. Les grosses
sociétés ont facilement supporté le prélèvement supplémentaire, estimé par la Cour
des comptes à 19,8 milliards pour 1997, et le choix de la nouvelle majorité
sest révélé des plus pertinents. La reprise de linvestissement, attendue
depuis quelques années, a été stimulée, à partir du deuxième semestre de 1997, par
une politique économique nouvelle favorisant, pour des raisons sociales autant
quéconomiques, la consommation des ménages.
Certes, en ce début du mois doctobre 1998, les perspectives de croissance, à
léchelle mondiale, semblent obérées par les crises financières asiatique, russe
et sud-américaine. Sagissant dune variable aussi difficilement prévisible
que linvestissement, il est délicat de confirmer comme de démentir les pronostics
optimistes du premier semestre. Alors que Rexecode considérait, à la mi-septembre,
quune reprise durable, liée à la psychologie des chefs dentreprises, était
menacée par la crise, la Banque de France constatait quen juillet lactivité
industrielle sétait maintenue au niveau élevé de juin et que « les
projets dinvestissements retenus pour 1998 ont été globalement réalisés ».
Un retournement de conjoncture est certes toujours possible, et à craindre, mais les
indicateurs dinvestissement restent, pour linstant, excellents, ce dont chacun
ne peut que se féliciter.
B.- UNE FORTE CROISSANCE DE LA
CONSOMMATION DES MÉNAGES
Soutenant pour une très large part la reprise de linvestissement des
entreprises, la consommation des ménages, qui représente 60% du PIB, progresse
sensiblement depuis le second semestre 1997. Sa croissance en moyenne annuelle devrait
atteindre 2,9% en 1998, alors quelle avait enregistré, lannée précédente,
lune de ses plus faibles performances depuis trente ans, avec une augmentation de
0,9%, seulement.
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|
|
|
|
CONSOMMATION TOTALE (Y
COMPRIS NON MARCHANDE) ET PRINCIPALES COMPOSANTES
(moyennes annuelles)
(en %) |
|
1996 |
1997 |
1998 (a) |
Consommation totale (b) |
2,0 |
0,9 |
2,9 |
- Alimentation (19,5%) |
0,1 |
0,8 |
0,5 |
- Energie (8,7%) |
3,2 |
- 1,5 |
0,8 |
- Services (41,3%) |
2,5 |
1,9 |
2,9 |
- Produits manufacturés (30,5%) |
2,1 |
0,4 |
5,2 |
dont : Durables (9,1%) |
5,5 |
- 4,2 |
8,2 |
|
- 0,5 |
1,1 |
4,0 |
|
1,2 |
2,9 |
3,8 |
(a) Prévision. (b) Les données entre
parenthèses donnent la part du poste en 1995. |
Source : INSEE, Note
de conjoncture, juin 1998, page 61. |
La consommation de produits manufacturés illustre tout
particulièrement la vigueur de ce facteur, puisquen juin 1998 elle marquait une
progression de 8,3% par rapport au mois de juin 1997. Au total, la consommation de ces
produits devrait croître de plus de 5% en 1998.
La plupart des composantes de la consommation totale sont concernées par la hausse des
achats et même la consommation alimentaire, qui sétait rétractée sensiblement au
premier trimestre 1998 (- 1%), augmente au deuxième trimestre (+ 1,5%). Les
achats dautomobiles devraient croître de près de 10% en volume en 1998, après une
médiocre année 1997, liée à larrêt, en septembre 1996, de loctroi de la
prime « qualité ».
Parallèlement, linvestissement des ménages se redresse. En particulier, les
autorisations de construire des maisons individuelles progressent fortement au deuxième
trimestre 1998 par rapport au deuxième trimestre 1997 (+10,6%) et linvestissement,
dans son ensemble, est favorisé par le bas niveau des taux dintérêt.
Cette évolution très favorable de la consommation est imputable à la progression du
pouvoir dachat du revenu disponible, à la modération de linflation et,
surtout, au regain de confiance des ménages.
1.- Une progression du pouvoir
dachat du revenu disponible liée aux créations demplois
Le pouvoir dachat du revenu disponible brut des ménages devrait progresser en
1998 de 3,1% en moyenne annuelle (contre + 2,5% en 1997) et enregistrer ainsi son
meilleur résultat depuis 1990. Cette évolution sexplique principalement par la
hausse des revenus dactivités, car, dune part, la croissance des prestations
sociales devrait être plus modérée quen 1997 et, dautre part, les
prélèvements obligatoires sur les ménages devraient être légèrement accrus.
|
|
|
|
|
EVOLUTION DU POUVOIR
DACHAT DU REVENU
DISPONIBLE BRUT DES MÉNAGES
(moyennes annuelles)
(en %) |
|
1996 |
1997 |
1998 (a) |
Salaires bruts (54%) (b) |
2,9 |
3,0 |
3,7 |
Prestations sociales (36%) |
3,7 |
3,5 |
2,8 |
Excédent brut des ménages (26%) |
2,5 |
2,7 |
3,6 |
Revenu de la propriété et de lentreprise et Assurance
(7,0%) |
2,9 |
9,1 |
7,8 |
Prélèvements sociaux et fiscaux (-23%) |
6,2 |
2,9 |
3,7 |
dont : Cotisations des salariés (-9,6%) |
4,8 |
- 3,2 |
- 20,9 |
Cotisations des non salariés (-2,4%) |
7,9 |
0,5 |
- 22,9 |
Impôts sur le revenu + CSG (-11%) |
7,1 |
8,9 |
28,9 |
Revenu disponible brut (100%) |
2,4 |
3,6 |
3,7 |
Déflateur : Prix de la consommation des ménages |
1,8 |
1,0 |
0,6 |
Pouvoir dachat du revenu disponible brut |
0,6 |
2,5 |
3,1 |
(a) Prévision. (b) Les chiffres entre
parenthèses donnent la structure de lannée 1996. |
Source : INSEE, Note
de conjoncture, juin 1998, page 59. |
a) Une forte accélération des revenus
dactivité
Les revenus dactivité devraient saccroître de 3,4% en 1998, soit une
progression plus marquée quen 1997 (2,7%).
Les revenus des non salariés devraient profiter de la vigueur de lactivité et,
en conséquence, lexcédent brut des entreprises individuelles pourrait croître de
2,3% après 1,5% en 1997.
La croissance de la masse salariale du secteur privé devrait être particulièrement
dynamique (+4,3%). Néanmoins, le salaire moyen par tête connaîtrait une croissance
moins soutenue quen 1997 (+ 2,3% après + 2,7%). En effet, la faible
augmentation des prix à la consommation et la perspective du passage aux trente-cinq
heures semblent avoir modéré la progression des salaires nominaux. Il convient,
toutefois, dobserver que la hausse du SMIC brut devrait être plus sensible
(+ 3%), grâce notamment à la revalorisation de 2% intervenue le 1er juillet,
qui incluait un « coup de pouce » de 0,5% par rapport au minimum prévu par la
loi.
Lexcellente évolution de la masse salariale résulte donc principalement des
nombreuses créations demplois attendues (lINSEE prévoit que les entreprises
non financières non agricoles, hors grandes entreprises nationales, devraient créer
300.000 emplois en 1998, contre 180.000 en 1997).
La masse salariale de la fonction publique bénéficierait, quant à elle, du
développement des emplois jeunes, ainsi que des revalorisations de lindice de
traitement brut et des mesures en faveur des bas salaires prévues par le protocole
salarial du 10 février 1998. En moyenne annuelle, la valeur du point dindice
augmenterait de 1,3%.
b) Une progression modérée des prestations sociales
En 1998, les prestations sociales devraient croître de 2,8% (11) (pour une prévision de hausse des prix à la
consommation de 1% en glissement annuel), soit un résultat sensiblement inférieur à
celui de lannée précédente (+ 3,5%).
Cette évolution sexpliquerait dabord par le ralentissement des prestations
familiales versées aux ménages (+ 1,4%, après + 3,7% en moyenne annuelle en
1997), en raison des mesures prises dans le cadre de la loi de financement de la
sécurité sociale. Ainsi, les allocations familiales sont attribuées en 1998 sous
conditions de ressources et le taux de prise en charge des cotisations sociales pour
lemploi dune personne à domicile (allocation de garde denfant à
domicile) a été réduit de moitié à partir du premier trimestre.
Cette décision ne saurait cependant être évoquée sans que soient prises en compte
les nombreuses mesures prises depuis la mi-1997 en faveur des familles : on citera en
particulier la majoration de lallocation de rentrée scolaire, ainsi que le
maintien, par la loi de finances pour 1998, des réductions dimpôt au titre des
frais de scolarité, dont le précédent Gouvernement avait prévu la suppression.
Les prestations de retraite du régime général croîtraient également à un rythme
légèrement moins soutenu quen 1997 (+ 3,7% après + 4,5%). Ce
ralentissement proviendrait surtout de lévolution démographique, le nombre de
salariés atteignant lâge de la retraite diminuant transitoirement. Par ailleurs,
les pensions ont connu une revalorisation en 1998 voisine de celle de lannée
précédente (1,1% contre 1,2% en 1997), supérieure à une inflation décroissante.
Le ralentissement des prestations sociales versées aux ménages sexpliquerait
également par celui des prestations chômage (+ 2,9% après + 9,3% en 1997), du
fait, dune part, dune diminution du nombre de demandeurs demploi (le
taux de chômage passant de 12,2% fin 1997 à 11,5% fin 1998) et, dautre part,
dune croissance plus modérée du nombre de bénéficiaires de lallocation de
remplacement pour lemploi (ARPE) (+ 6% environ après + 32% en 1997). On
doit, à cet égard, se féliciter du signal fort donné aux partenaires sociaux par le
Gouvernement, qui a fait part récemment de sa volonté dapporter une participation
financière substantielle pour permettre de poursuivre et damplifier ce dispositif.
Les prestations versées par la branche maladie connaîtraient une progression
modérée (+ 2,4% en moyenne annuelle, comme en 1997), conformément aux objectifs de
maîtrise des dépenses de santé.
Enfin, les « autres prestations sociales » versées par les administrations
publiques progresseraient à un rythme soutenu en raison du dynamisme des aides au
logement et du revenu minimum dinsertion.
c) Une évolution des prélèvements obligatoires sur les
ménages influencée par laccélération des revenus dactivité
La croissance nominale des prélèvements obligatoires sur les ménages devrait
atteindre 3,7% en 1998, après 2,9% en 1997. Cette progression doit être reliée à celle
des revenus dactivité (+3,4%), ce qui permet de constater une pause dans la
progression de la pression fiscale pesant sur les ménages.
Cette progression, nominale, dailleurs très inférieure à celle observée en
1996 (+ 6,2%), est surtout imputable à la forte accélération des revenus
dactivité évoquée précédemment. Elle résulte également, pour partie, de
lextension de la CSG aux revenus du capital dans le cadre du transfert des
cotisations maladie, prévu par la loi de financement de la sécurité sociale pour 1998,
qui sest néanmoins traduit par un gain de pouvoir dachat de 1,1% pour les
salariés du régime général.
On observera que les contribuables aux ressources modestes ont vu leur impôt diminué
grâce à une série de mesures : rétablissement de la réduction dimpôt pour
frais de scolarité, plafonnement à 1.500 francs de la taxe dhabitation,
extension du champ dapplication du plafonnement de cette taxe en fonction du
revenu...
2.- Une inflation maîtrisée
Après avoir augmenté de 1,9% en 1996 et de 1,1% en 1997, les prix à la consommation
hors tabac devraient encore ralentir leur progression en 1998, en évoluant de
+ 0,9%.
Certes, linflation sous-jacente, cest-à-dire lindice hors tarifs
public et produits à prix volatils, devrait légèrement remonter sur lensemble de
1998, atteignant 1,3% en fin dannée, mais lindice densemble serait plus
faible, en raison notamment de la baisse des prix de lénergie. LINSEE estime,
en effet, que lannonce faite par les principaux pays pétroliers, à la fin du
premier trimestre 1998, dun accord sur la réduction de leur production, ne devrait
pas empêcher le maintien des prix des produits pétroliers à un niveau inférieur à
celui observé en 1997.
3.- Un regain de confiance des ménages
La maîtrise de linflation et la hausse du pouvoir dachat du revenu
disponible des ménages ne sont pas des phénomènes nouveaux. Ces orientations favorables
à la consommation pouvaient déjà être constatées en 1997. Pourtant, malgré une
augmentation de 2,2% du pouvoir dachat du revenu disponible, la consommation des
ménages navait alors connu quune faible croissance de 0,9%. Un facteur
supplémentaire, très important, est donc intervenu en 1998 : le retour de la
confiance.
Lenquête mensuelle de conjoncture auprès des ménages, réalisée par
lINSEE, indique clairement que les anticipations de ceux-ci sur lévolution du
chômage saméliorent continûment depuis le début de lannée et que,
parallèlement, ils sont de plus en plus nombreux à estimer que la période est favorable
pour effectuer des achats importants.
Cette confiance nouvelle pourrait conduire les ménages à modifier leur comportement
dépargne. Le taux dépargne, qui était remonté progressivement tout au long
de lannée 1997 (au second semestre, il était de 15%), tendrait ainsi à fléchir,
pour sétablir à 14,7% en moyenne sur lannée.
A la fin de 1997, on dénombrait 12 millions de comptes titres ouverts par les
personnes physiques ; elles occupent le deuxième rang des détenteurs de valeurs
mobilières, après le secteur des entreprises dassurance et des caisses de
retraite. Lencours des portefeuilles des ménages sélevait à
1.837 milliards de francs.
De la même façon, les ménages accélèrent légèrement leur rythme
dendettement : en mars 1998, les crédits à lhabitat ont progressé de
6% en glissement annuel et les crédits de trésorerie de 8,1%.
Cet optimisme puise probablement sa source dans lamélioration de la situation de
lemploi, mais il est également conforté par la politique menée par le
Gouvernement depuis lété 1997.
En effet, contrairement à son prédécesseur, qui avait décidé de mettre les
ménages à contribution par un relèvement de la TVA en 1995, le nouveau Gouvernement a
immédiatement décidé de faire peser prioritairement leffort dajustement du
budget de lEtat sur les grosses sociétés, dont la situation financière est
globalement satisfaisante, tout en veillant à ne pas pénaliser les petites entreprises.
La loi précitée portant mesures urgentes à caractère fiscal et financier a ainsi
institué une contribution temporaire sur limpôt sur les sociétés pour les
entreprises réalisant au moins 50 millions de francs de chiffre daffaires.
Elle a également prévu la taxation au taux normal de la plupart des plus-values
quelles réalisent.
En outre, un certain nombre de mesures ciblées ont été prises pour soutenir la
consommation : revalorisations du SMIC aux 1er juillet 1997 et 1998 supérieures
au minimum légal ; élévation à 1.600 francs de lallocation de rentrée
scolaire, alors quelle avait été fixée à 1.000 francs en 1996 ;
création dun crédit dimpôt sur le revenu, remboursable pour les personnes
non imposables, pour les dépenses dentretien afférentes à lhabitation
principale, plafonnement à 1.500 francs de la taxe dhabitation pour les
redevables aux ressources très faibles...
Cet effort de soutien à la consommation des ménages doit être poursuivi,
dautant que la conjugaison des crises asiatique, russe et sud-américaine pourrait
entamer leur confiance en lavenir, dune part, et mettre fin à la forte hausse
de la valeur du patrimoine financier des ménages constatée au cours des premiers mois de
cette année, dautre part.
Le Gouvernement sest déjà engagé dans cette voie en prenant lengagement
de stabiliser et, si possible, de baisser les prélèvements obligatoires, engagement dont
la concrétisation commence à être perceptible (le projet de loi de finances pour 1999
supprime cinq taxes, allège la TVA sur certains produits, diminue les impôts sur les
ventes de locaux dhabitation...). En outre, ayant conscience que
lamélioration du marché du travail est un déterminant essentiel de la confiance
des ménages, il propose dans le présent projet de loi de finances une fiscalité plus
favorable à lemploi grâce, en particulier, à une profonde réforme de la taxe
professionnelle visant à exclure les salaires de sa base.
C.- LES BUDGETS ÉCONOMIQUES POUR 1999
La Commission des comptes de la Nation sest réunie le 1er octobre
1998 afin dexaminer les budgets économiques pour 1999. Cette séance a été
précédée, comme il est dusage, par la réunion dun groupe technique,
destinée à confronter les prévisions du ministère de l'économie, des finances et de
l'industrie à celles des principaux instituts de conjoncture et dimportantes
institutions financières.
Lécart qui peut être observé entre les prévisions moyennes du groupe
technique et le résultat des modélisations économétriques effectuées par la direction
de la prévision, reflète essentiellement les différences dappréciation portées
sur lenvironnement international. En revanche, laccord est général sur la
vigueur de la demande intérieure, française et européenne, en 1999, qui devrait, en
tout état de cause, préserver largement le potentiel de croissance de la zone euro.
1.- Un scénario international
« gris et contrasté » (12)
a) Crise asiatique et conjoncture mondiale :
récession, dépression ou effondrement ?
Comme la plupart des analystes, la direction de la prévision table, pour 1999, sur un
ralentissement prononcé de la croissance mondiale, en concordance avec les perspectives
publiées récemment par le Fonds monétaire international. Après une récession sévère
en Asie en 1998, marquée par une diminution du PIB de 7%, 1999 serait une année à peine
meilleure, avec un nouvel effritement du PIB ( 1% en moyenne sur la zone).
Cette opinion est largement partagée : Paribas voit le « creux »
dactivité en Asie en 1999, de même que Morgan Stanley, qui estime que seuls les
pays les mieux placés dans la phase dajustement macroéconomique, comme la Corée,
pourraient éventuellement redémarrer en 1999. Limportance du commerce intra-zone,
qui représente près de 40% des échanges totaux des pays dExtrême-Orient, exerce
pour lheure un effet néfaste en transmettant rapidement, au sein du secteur réel,
les influences récessives qui affectent successivement ou simultanément chaque pays.
· Bien que nayant pas intégré les effets de ce schéma à leurs évaluations
chiffrées, la plupart des analystes envisagent très sérieusement la possibilité
quune nouvelle crise se déclenche en Asie. Les deux acteurs principaux de ce
scénario sont la Chine et le Japon.
Les statistiques officielles chinoises sont peu fiables en ce qui concerne la
production industrielle ; il est difficile de croire, selon Morgan Stanley, que la
Chine puisse connaître une croissance de 7% en 1998. Les importations chinoises seraient
un indicateur plus significatif du dynamisme de lactivité intérieure, sachant que
léconomie chinoise a un degré douverture sur lextérieur
denviron 20%. Or les importations chinoises ont tendance à diminuer depuis quelque
temps. La BNP estime également que les indications dun ralentissement de
lactivité en Chine se font de plus en plus évidentes.
Dans ces conditions, il nest pas exclu que le niveau de change du yuan, bien que
non convertible sur les marchés, savère surévalué et quun ajustement ne
doive se produire dans quelque temps. Le yuan a déjà baissé de près de 40% sur le
marché parallèle de Shanghai, remarque LExpansion. Le dollar de Hong Kong
subirait alors de vives tensions, perturbant à nouveau les relations financières de la
zone du fait du rôle de Hong Kong comme place financière et commerciale dans la région.
Aux yeux de la totalité des membres du groupe technique, la clef de la stabilisation
ou du décrochage en Asie se trouve au Japon. Frappé par un immobilisme politique qui
empêche, jusquici, dengager la restructuration du secteur bancaire avec toute
la détermination nécessaire, le Japon est, selon les termes de la Société française
dassurance crédit (SFAC), « un risque systémique majeur ». La
tendance haussière du taux dépargne traduit limpossible reprise de la
consommation des ménages, sans que lannonce dun allégement de la fiscalité,
dans le cadre du septième plan de relance depuis le début de la crise en 1990, ait
provoqué, pour linstant, quelque frémissement de cette composante majeure de
lactivité économique. Labaissement des taux dintérêt a si peu
deffet sur lactivité que certains se demandent si le Japon ne se trouve pas
aujourdhui dans un cas typique de « trappe à liquidité », tel que
décrit par la théorie keynésienne de la monnaie (13).
La direction de la prévision estime, malgré tout, que le plan de relance devrait
donner à léconomie un « stimulus » denviron 3 points de PIB
et que lengagement de la réforme bancaire devrait permettre de commencer à apurer
le stock immense des créances douteuses. Le Japon pourrait, dans ces conditions,
connaître une légère reprise en 1999.
· Les analyses divergent sur le point de savoir si la propagation aux autres
zones géographiques dune nouvelle crise, qui naîtrait en Asie, est inévitable.
Sur la base de la comparaison des taux de change réels au cours des dernières
années, Paribas fait valoir que, pour une base 100 en 1993-1995, les pays asiatiques ont
aujourdhui un taux de change de 80 environ, tandis que les pays dEurope
centrale et orientale ainsi que lAmérique latine auraient des taux de change de 110
à 120 environ. Une telle distorsion, de près de 40 points en quatre ans,
nest évidemment pas tenable. En sens inverse, la SFAC estime que le risque de crise
« en dominos » nest pas certain ; on peut penser, au contraire, que
les pays les plus atteints ont déjà « touché le fond ».
La BNP souligne une distinction importante : la certitude quun processus
récessif se déclenche actuellement au sein de léconomie mondiale ne signifie pas
pour autant quun scénario catastrophe est inévitable. A ce titre,
lAssociation française des économistes dentreprise (AFEDE) juge que, bien
gérée, la dévaluation vraisemblable du real brésilien peut permettre de limiter les
effets potentiellement dévastateurs dune crise des changes en Amérique latine.
La situation financière de lAmérique latine a, ces dernières semaines, été
fragilisée par des mouvements de capitaux déstabilisateurs. Pourtant, la majeure partie
des membres du groupe technique a souligné la vigueur sous-jacente des indicateurs
économiques dans cette zone pendant les derniers semestres (14). Le Centre dobservation économique de la chambre
de commerce et dindustrie de Paris (COE) note que la forte croissance quont
connue les pays dAmérique latine ces dernières années devrait être seulement
atténuée par la crise actuelle. En revanche, lObservatoire français des
conjonctures économiques (OFCE) estime que lAmérique latine devrait connaître une
chute de 5 points de croissance en 1999. Pour la SFAC, le Brésil représente
linconnue essentielle dans la zone, sans pour autant constituer un risque
systémique.
Tous saccordent cependant à reconnaître que lefficacité des politiques
économiques, en cas de déclenchement dune nouvelle phase aiguë de la crise
actuelle, est un paramètre difficilement appréciable pour juger du danger réel de
récession. La BNP estime quen Asie, les politiques économiques nont pas
été dune efficacité flagrante et que les assouplissements monétaires et
budgétaires, lorsquils ont eu lieu, nont pas donné de résultats
convaincants jusquici. Cependant, laggravation des risques a facilité les
efforts de coordination entre les gouvernements, comme en témoignent les concertations
mises en uvre pour protéger lAmérique latine. LExpansion,
cependant, est convaincue que la partie encore dynamique du « centre »
économique du monde les États-Unis et lEurope subira plus
quelle nagira.
En tout état de cause, la crise devrait durer : « régler des problèmes
de surinvestissement est toujours long », selon lAFEDE. La BNP estime que
la reconstitution des passifs, dans les bilans bancaires, sera le premier investissement
des pays asiatiques pendant plusieurs mois, ce qui pèsera sur la croissance.
Le panorama de léconomie mondiale auquel se sont livrés les organismes
participant au groupe technique suggère que la frontière est aujourdhui ténue
entre la récession (15), qui paraît
désormais certaine, la dépression, qui sinscrit dans une durée plus étendue, et
leffondrement, dont loccurrence dépend daléas clairement identifiés.
Selon le mot de Goldman Sachs, « le scénario dit
central , sur lequel sont bâties les évaluations chiffrées, est
en fait optimiste. Nous espérons que la réalité en sera proche
».
Dans ce contexte, la dynamique économique qui sera observée aux États-Unis aura une
influence renforcée sur la croissance en Europe.
b) Une sortie de cycle insaisissable aux États-Unis
La croissance du PIB américain, évaluée à 3,3% ou 3,4% en 1998, reviendrait en 1999
à un niveau très sensiblement inférieur : 1,9% pour la direction de la prévision,
1,9% en moyenne pour les institutions financières participant au groupe technique, 1,5%
en moyenne pour les instituts de conjoncture.
Lintervalle important qui sépare les estimations fournies par les membres du
groupe technique traduit, au-delà de lassentiment partagé sur la tendance
générale, une certaine perplexité sur la façon dont le cycle devrait sachever
aux États-Unis. En un sens, pas plus que lon na su expliquer la vigueur
surprenante de la croissance américaine durant les derniers semestres, pas plus on ne
semble savoir, aujourdhui, exprimer précisément les déterminants et les
répercussions des phénomènes économiques qui gouvernent le ralentissement programmé
de la première puissance mondiale.
· Les indicateurs avancés suggèrent cependant que « le compte à
rebours de la récession a commencé », pour lOFCE, qui voit
lévolution trimestrielle du PIB devenir négative au milieu du printemps 1999.
La vulnérabilité de la consommation à un krach boursier, ou, plus simplement, à une
correction sérieuse et prolongée de Wall Street, a été une nouvelle fois soulignée.
Cependant, la Caisse des dépôts et consignations a relevé quil semble subsister,
dans les portefeuilles boursiers des ménages, un potentiel de plus-values latentes encore
suffisamment important pour « lisser » limpact dun éventuel choc
boursier sur la consommation.
LExpansion remarque dans la majorité des indicateurs conjoncturels les
prémices de la fin du cycle : la demande extérieure adressée aux États-Unis est
en diminution, conséquence directe de la réduction des débouchés en Asie et au
Japon ; le prix des matières premières diminue, ce qui dissuade le stockage et
constitue « lun des canaux de la déflation » ;
linvestissement donne limpression dêtre à un point de
retournement ; enfin la chute du taux dépargne des ménages, dans le courant
de lété, au niveau très surprenant de 0% du revenu disponible ne peut conduire
quà un relèvement, qui, par effet de miroir, pèsera mécaniquement sur la
consommation. Avec une prévision de 1% de croissance en 1999, LExpansion est
cependant deux fois plus optimiste que lOFCE, qui affiche 0,5% seulement dans ses
prévisions.
LOFCE souligne, par ailleurs, les effets potentiellement déstabilisateurs, à
moyen terme, de la politique monétaire conduite par la Réserve fédérale.
Laplatissement, puis linversion de la courbe des taux ne sest pas faite,
comme on aurait pu sy attendre, par une augmentation des taux courts conjuguée à
une stabilité des taux longs, mais par une diminution des taux longs. La Réserve
fédérale semble avoir voulu développer une action expansive sur le compartiment du long
terme tout en conservant sa garde sur le compartiment du court terme. Cela a pu contribuer
à développer des sentiments daversion envers le risque.
Dans ces conditions, la diminution du taux directeur de la Réserve fédérale, le
29 septembre 1998, à hauteur dun quart de point, ne devrait pas avoir beaucoup
dinfluence. Les taux courts nominaux devraient, en effet, baisser jusquà 3,5%
pour avoir une influence bénéfique sur lactivité.
Enfin, le parallèle entre la situation du Japon au début des années quatre-vingt-dix
et la situation des États-Unis aujourdhui ne peut manquer de susciter des
questions. Comme le Japon à lépoque, les États-Unis connaissent en 1998-1999 une
inflation faible, un excédent budgétaire et des surcapacités de production.
Connaîtront-ils la même dépression rampante, qui sape léconomie de
larchipel nippon depuis bientôt huit ans, sinterroge lOFCE, qui ne
semble cependant pas croire à un fort ralentissement de la croissance aux Etats-Unis.
· Dautres membres du groupe technique remarquent cependant que les facteurs
de résistance sont nombreux. Certes, estime le COE, la diminution des taux à court terme
est modeste et était anticipée par les marchés. Elle intervient cependant à un instant
inhabituel dans le cycle, très tôt par rapport au déclenchement de la phase baissière.
La gestion de la politique monétaire a permis de lisser correctement les à-coups
conjoncturels ces toutes dernières années. Il nest pas impossible que
laction précoce de la Réserve fédérale, même si elle est essentiellement
motivée par la situation financière internationale, ait les mêmes vertus
contra-cycliques quauparavant.
Dailleurs, si, comme le remarque la Caisse des dépôts, 80% de lactivité
aux États-Unis provient des services, qui obéissent à une dynamique propre, le
ralentissement pourrait ne pas être aussi fort que ce que suggèrent les indicateurs
industriels classiques.
Au demeurant, les exportations seraient soutenues par la diminution prévue du taux de
change du dollar, sur laquelle les membres du groupe technique ont des évaluations
convergentes. Lestimation effectuée par la direction de la prévision, qui a, comme
les années précédentes, retenu lhypothèse conventionnelle dune
stabilisation du taux de change au niveau observé pendant lété 1998, se traduit
ainsi par un décalage sensible avec les prévisions moyennes du groupe technique :
là où la direction de la prévision voit un taux de change du dollar à 6 francs en
1999, les instituts de conjoncture comme les institutions financières lestiment à
5,50 francs.
Enfin, la SFAC estime que les États-Unis ne sont peut-être pas à la fin du
« cycle long » dinvestissement dans les nouvelles technologies
dinformation et de communication, qui ont fortement contribué à lévolution
favorable de cet agrégat durant les derniers semestres.
Les plus optimistes des conjoncturistes, la Caisse des dépôts, GAMA, la BNP, le
Crédit agricole, Morgan Stanley, Goldman Sachs et Paribas, prévoient une croissance au
moins égale à 2% en 1999 aux États-Unis.
Au-delà de ces divergences quantitatives, qui ne remettent pas en cause la validité
du diagnostic porté sur les États-Unis, il apparaît que le contexte international
amène à prévoir une décélération de la demande mondiale adressée à la France en
1999. Après avoir crû de 7,3% en 1998, elle ne croîtrait plus que de 5,4% en 1999,
selon les évaluations de la direction de la prévision. Les conjoncturistes sont, pour
leur part, plus pessimistes : leur prévision sétablit à 4,4% en moyenne. Il
est vrai que le point de départ quils retiennent, pour lannée 1998, est
également plus bas : 6,1% de croissance, à comparer à 7,3% selon la direction de
la prévision.
2.- La zone euro : un pôle de
croissance
dans un environnement instable
Le dynamisme persistant évoqué par la direction de la prévision pour lensemble
de la zone euro repose essentiellement sur la vigueur de la demande intérieure, qui, dans
une large mesure, contribue à immuniser lactivité économique contre les
turbulences financières et commerciales observées à lextérieur. Après avoir
crû légèrement de 1997 à 1998, passant de +2,5% à +2,8%, la croissance resterait
stable en 1999 à ce même niveau.
a) LAllemagne au cur de la zone euro
Le jugement de la direction de la prévision se fonde sur une amélioration de la
situation de lemploi, y compris en Allemagne, sur les effets bénéfiques de la
désinflation importée qui entraîne une augmentation du revenu réel de la
zone et sur le caractère favorable des conditions monétaires et
financières. A cet égard, la direction de la prévision table sur une baisse des taux
dintérêt en France et en Allemagne (16).
Si, dans ses grandes lignes, le scénario construit par les services du ministère de
l'économie, des finances et de l'industrie est comparable à ceux développés par les
autres membres du groupe technique, les différences dappréciation au sein de ce
groupe ne sont pas mineures.
Lévaluation numérique de la croissance en Allemagne montre, en premier lieu, un
décalage de 0,4 point entre la direction de la prévision (+2,7% en 1999) et la
moyenne du groupe technique (+2,3%). Pour le ministère de l'économie, des finances et de
l'industrie, la croissance allemande connaîtrait ainsi une légère accélération,
après avoir réalisé +2,6% en 1998 ; pour les membres du groupe technique, au
contraire, léconomie allemande ralentirait, à partir du même niveau de 2,6% en
1998.
La majeure partie des conjoncturistes prévoit une légère diminution de la croissance
du PIB allemand, de 0,4 point de PIB environ ; Morgan Stanley et LExpansion
sont les moins optimistes, retenant une croissance du PIB limitée à 1,5% en 1999 ;
la Caisse des dépôts et consignations, Rexecode, la BNP et le Crédit agricole
envisagent une stabilité entre 1998 et 1999, à un niveau compris, selon
lorganisme, dans une fourchette de 2,5% à 2,7% ; seul le Bureau
dinformations et de prévisions économiques (BIPE) est en phase avec la prévision
gouvernementale, en estimant que la croissance allemande passera de 2,9% en 1998 à 3% en
1999.
Le principal facteur dincertitude pour les prévisions relatives à
lAllemagne porte sur le comportement du marché du travail et sur la consommation.
Le retournement positif sur le marché du travail sest produit, en France, il y a
bientôt deux ans, alors quil semble nintervenir que depuis quelques mois en
Allemagne, selon Goldman Sachs. Ce retournement, sil est confirmé par
lenclenchement dune véritable tendance à la baisse du chômage
ou tout au moins à une reprise du marché de lemploi est un
facteur essentiel de la reprise de la consommation. LExpansion estime
également que la consommation est déprimée par la situation encore fragile du marché
du travail, et évoque des incertitudes dues au résultat des élections législatives et
au changement de gouvernement.
La Caisse des dépôts et consignations fait, à cet égard, observer, à juste titre,
que le nouveau gouvernement devrait être plus sensible que le précédent au nécessaire
soutien à la demande intérieure.
Pour lensemble de la zone euro, la quasi totalité des participants soulignent
limportance de la politique monétaire et ses interactions avec la politique de
change. LAFEDE rappelle que, si les effets directs dune baisse du dollar
peuvent toujours être envisagés avec quelque certitude (impact sur léquilibre
commercial, impact sur les évolutions des taux dintérêt), lavènement de la
zone euro élimine un certain nombre deffets indirects, en particulier
linstabilité des taux de change et le biais général vers le resserrement des
politiques monétaires, que lon observait antérieurement. La diminution prévue de
100 points de base pour les taux à court terme aux États-Unis est, en elle-même,
un puissant facteur de baisse des mêmes taux au sein de lEuroland. Il
conviendrait donc, selon cet institut, de relativiser, aujourdhui plus quhier,
les effets allégués de la baisse du dollar.
Ceci permettrait certainement damortir le choc sur léconomie allemande de
la crise russe, qui se transmettrait par lintermédiaire des pays dEurope
centrale et orientale. Sur lampleur de ce choc, les avis divergent. Certains, comme
Morgan Stanley, estiment que lon na pas encore vu tous les effets induits de
la crise russe en Allemagne et en Europe centrale et orientale. Une partie des débouchés
commerciaux de ces derniers pays se réduit et les primes de risque augmentent, rendant
ainsi plus coûteux les financements extérieurs. LExpansion met en avant
lexposition financière de lAllemagne en Russie et son exposition commerciale,
via les pays dEurope centrale. A linverse, la Caisse des dépôts et
consignations estime que lamalgame entre la Russie et les pays dEurope
centrale et orientale est peu pertinent : ces derniers sont de plus en plus associés
aux pays dEurope occidentale, au plan économique et financier.
De lavis général, le risque principal pour la zone euro provient des pays qui
nont pas encore clairement amorcé le relais de la demande extérieure par la
demande intérieure : lAllemagne et lItalie. Pour autant, selon Goldman
Sachs, le relâchement des efforts gouvernementaux en matière de réduction des déficits
structurels sera le bienvenu dans les mois qui viennent, car la politique monétaire sera,
selon cette institution financière, fortement contrainte par les impératifs et les
conséquences de la convergence. Dailleurs, ce relâchement ne devrait pas marquer
la fin des efforts dajustement ; il doit, selon Goldman Sachs,
sinterpréter comme une réaction intelligente de la politique économique aux
conditions nouvelles de la croissance en Europe.
La France, à lévidence, ne peut échapper à cet assombrissement des
perspectives de croissance, mais elle semble avoir la capacité de le gérer avec succès.
b) Une France touchée par linfluence du ralentissement
mondial,
mais solidement portée par sa demande intérieure
Le consensus des conjoncturistes prévoit une réduction marquée du taux de croissance
du PIB français, qui passerait de 3% environ en 1998 à 2,4% en 1999. Pour sa part, la
direction de la prévision est plus optimiste et nenvisage quune diminution de
0,4 point, le taux de croissance annuelle du PIB revenant de 3,1% en 1998 à 2,7% en
1999.
Si les évaluations des prévisionnistes sont, de façon générale, assez
concordantes, LExpansion et Morgan Stanley se distinguent par une prévision
particulièrement pessimiste de 2%. LExpansion envisage une forte chute du
rythme de croissance de la consommation des ménages, qui reviendrait de 3,1% en 1998 à
2,1% en 1999, associée à un freinage brutal de linvestissement des entreprises,
dont le taux de croissance passerait de 6,5% en 1998 à 4% en 1999. Dans le même temps,
la moyenne des analystes envisage un ralentissement de la consommation des ménages
limité à 0,8 point (2,6% en 1999 au lieu de 3,4% en 1998) et un simple
infléchissement de la formation brute de capital fixe des entreprises (5,4% en 1999 au
lieu de 6,7% en 1998). De plus, en moyenne, la formation brute de capital fixe des
ménages accélérerait de 1,5 point, passant de +2,1% en 1998 à +3,6% en 1999.
La majeure partie des instituts de conjoncture et des institutions financières adhère
donc à lidée dune demande intérieure robuste face au choc de demande
provoqué par la récession en Asie et les incertitudes dans les pays anglo-saxons, et au
choc de compétitivité provoqué par la chute des taux de change hors zone euro et,
notamment, la baisse prévue du dollar.
Lanalyse détaillée des prévisions chiffrées fournies par les membres du
groupe technique montre, en fait, une assez bonne concordance sur certains déterminants
de la demande intérieure, mais une variabilité beaucoup plus élevée sur les échanges
extérieurs, tant pour les importations que pour les exportations. Cette variabilité
traduit clairement les incertitudes évoquées ci-avant sur lampleur effective du
ralentissement mondial et les conséquences de celui-ci pour léconomie française.
Par ailleurs, les prévisions relatives à linvestissement des entreprises
montrent également des écarts assez sensibles. Là où la direction de la prévision
envisage une stabilité entre 1998 et 1999, avec un taux de croissance identique de 5,7%,
certains prévoient un décrochage brutal (GAMA, LExpansion, Morgan Stanley,
Paribas) tandis que dautres estiment quune augmentation certes
légère est possible (BIPE, Goldman Sachs).
Les chefs dentreprise resteraient confiants dans les bonnes perspectives de
croissance à moyen terme en France et en Europe, selon la majeure partie des membres du
groupe technique, malgré les inflexions qui pourraient être apportées au cours des
prochains trimestres du fait de la dégradation des anticipations sur les perspectives à
court terme. Ainsi, Morgan Stanley juge que linvestissement réagirait fortement,
mais uniquement de façon transitoire, aux mauvaises nouvelles en provenance de
linternational ; la révision en baisse des plans dinvestissement serait
rapide (plus que les années précédentes car les chefs dentreprise sont
aujourdhui plus réactifs), mais ceux-ci seraient à nouveau mis en uvre
après labsorption du choc. Cette vision du comportement des chefs dentreprise
est globalement partagée par Goldman Sachs et plusieurs autres organismes.
Enfin, sur le front des prix, JP Morgan écarte catégoriquement lidée
dune déflation. La diminution du prix des matières premières na, depuis
plusieurs années, que peu dimpact sur lévolution des prix à la
consommation. Une déflation supposerait un enchaînement mécanique entre baisse des
prix, baisse des revenus, puis baisse des dépenses. Or la zone euro est importatrice
nette de matières premières : toute diminution du prix des matières premières
entraîne une hausse du revenu de la zone. Par ailleurs, linflation étant déjà
très basse, il faudrait que limpact déflationniste de la baisse du prix des
matières premières passe par le canal des salaires pour que samorce un processus
auto-entretenu ; ceci est peu probable, compte tenu de la modération salariale
déjà constatée aujourdhui. Enfin, la demande intérieure semble se déplacer,
depuis quelque temps, vers des biens et services peu soumis à la concurrence étrangère,
par exemple vers le secteur de la construction. Ce processus paraît autrement plus
déterminant dans lappréciation des évolutions à venir de lindice des prix
à la consommation.
La SFAC estime même, pour sa part, que le faible niveau du prix des matières
premières peut être un facteur de soutien de lactivité, sinon de reprise, via
les comportements de stockage. Relevant que, dans le système industriel actuel, les
stocks sont désormais en majeure partie concentrés à lamont des filières, donc
que la part des matières premières ou peu transformées y est plus importante
quauparavant, la SFAC juge que les comportements de stockage et de déstockage sont
désormais plus largement gouvernés par les évolutions des prix des matières
premières. Or il est probable que lon a atteint un point bas, après les baisses de
ces derniers mois, ce qui pourrait inciter les entreprises à engager un restockage qui
viendrait apporter une contribution positive à la croissance.
Les budgets économiques prévoient, comme lannonçait par ailleurs le
Gouvernement lors de la présentation du projet de loi de finances pour 1999, une
diminution du besoin de financement des administrations publiques à 2,3% du PIB en 1999.
Les instituts de conjoncture et les institutions financières ont une vision plus
pessimiste des finances publiques puisque, en moyenne, le besoin de financement des
administrations publiques ne serait réduit que jusquà 2,5% du PIB.
Ce léger décalage sexplique aisément par les différences, déjà relevées,
entre les membres du groupe technique et la direction de la prévision portant, dune
part, sur la consommation des ménages, dautre part sur lévolution globale du
PIB. Il ne remet cependant pas en cause, aux yeux de votre Rapporteur général, la
cohérence des évaluations effectuées par le Gouvernement à lappui du cadrage
macroéconomique associé au projet de loi de finances pour 1999.
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|
PRÉVISIONS
MACROÉCONOMIQUES DES ORGANISMES DE PRÉVISION |
|
Budgets
économiques
Oct. 1998 |
B.I.P.E.
Oct. 1998 |
C.D.C.
Oct. 1998 |
C.O.E.
Oct. 1998 |
|
1998 |
1999 |
1998 |
1999 |
1998 |
1999 |
1998 |
1999 |
I.- Environnement international |
|
|
|
|
|
|
|
|
|
6,0 |
6,0 |
5,83 |
5,6 |
5,9 |
5,3 |
5,93 |
5,58 |
|
|
|
3,5 |
3,75 |
3,6 |
3,7 |
3,5 |
3,5 |
|
3,4 |
1,9 |
2,8 |
1,4 |
3,3 |
2,0 |
3,3 |
1,7 |
|
2,6 |
2,7 |
2,9 |
3,0 |
2,5 |
2,5 |
2,7 |
2,2 |
|
7,3 |
5,4 |
|
|
6,0 |
5,1 |
6,8 |
5,0 |
II.- Équilibre des biens et services |
|
|
|
|
|
|
|
|
Évolution (%) |
|
|
|
|
|
|
|
|
|
3,1 |
2,7 |
3,2 |
2,8 |
2,9 |
2,5 |
3,0 |
2,5 |
|
8,3 |
5,2 |
9,3 |
7,4 |
7,2 |
3,7 |
7,7 |
5,4 |
|
3,1 |
2,7 |
3,0 |
2,8 |
3,5 |
2,7 |
3,5 |
2,6 |
|
5,7 |
5,7 |
6,5 |
7,0 |
6,7 |
5,0 |
7,1 |
6,6 |
|
6,8 |
4,2 |
7,8 |
6,0 |
4,7 |
3,0 |
5,0 |
3,5 |
|
0,3 |
0,0 |
0,4 |
- 0,1 |
0,4 |
0,1 |
0,5 |
0,2 |
III.- Prix, salaires, emploi |
|
|
|
|
|
|
|
|
Évolution (%) |
|
|
|
|
|
|
|
|
|
0,9 |
1,3 |
0,8 |
1,0 |
0,7 |
0,9 |
0,8 |
0,9 |
|
1,8 (e) |
1,8 (e) |
1,4 (f) |
1,4 (f) |
1,9 (g) |
1,1 (g) |
2,0 (g) |
1,5 (g) |
|
1,4 |
1,5 |
1,4 |
1,2 |
1,7 |
1,5 |
1,4 |
1,2 |
IV.- Comptes dagents |
|
|
|
|
|
|
|
|
|
31,6 (f) |
31,4 (f) |
31,5 (h) |
31,7 (h) |
31,1 |
31,4 |
32,1 |
32,0 |
|
2,8 |
2,5 |
2,6 |
2,5 |
3,1 |
2,2 |
3,1 |
2,4 |
|
- 2,9 |
- 2,3 |
- 2,6 |
- 2,0 |
- 3,0 |
- 2,6 |
- 2,9 |
- 2,5 |
V.- Commerce extérieur |
|
|
|
|
|
|
|
|
|
164 |
149 |
|
|
170 |
170 |
|
|
(a) Taux au jour le jour.
(b) Contribution à la croissance du PIB (en point de PIB).
(c) Déflateur de la consommation des ménages (en moyenne annuelle).
(d) Chiffres douaniers, en milliards de francs. |
(e) Branches marchandes non agricoles.
(f) Secteur non financier non agricole, hors grandes entreprises nationales.
(g) Secteur marchand non agricole.
(h) Y compris entreprises individuelles. |
PRÉVISIONS
MACROÉCONOMIQUES DES ORGANISMES DE PRÉVISION |
G.A.M.A.
Oct. 1998 |
REXECODE
Oct. 1998 |
O.F.C.E.
Oct. 1998 |
A.F.E.D.E.
Oct. 1998 |
EXPANSION
Oct. 1998 |
|
1998 |
1999 |
1998 |
1999 |
1998 |
1999 |
1998 |
1999 |
1998 |
1999 |
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
I.- Environnement international |
5,92(a) |
5,47(a) |
5,94 |
5,53 |
5,9 |
5,4 |
5,92 |
5,7 |
5,9 |
5,35 |
|
3,4 |
3,7 |
3,5 |
3,5 |
3,5 |
3,5 |
3,52 |
3,5 |
3,6 |
3,4 |
|
3,3 |
2,0 |
3,3 |
1,3 |
3,2 |
0,5 |
3,5 |
1,8 |
3,3 |
1,0 |
|
2,7 |
2,4 |
2,5 |
2,5 |
2,6 |
2,4 |
2,4 |
2,2 |
2,6 |
1,5 |
|
|
|
5,2 |
4,2 |
6,4 |
4,9 |
6,0 |
4,6 |
6,0 |
3,0 |
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
II.- Équilibre des biens et services |
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
Évolution (%) |
3,1 |
2,3 |
2,9 |
2,3 |
3,0 |
2,7 |
2,9 |
2,3 |
2,8 |
2,0 |
|
7,4 |
3,4 |
7,6 |
5,3 |
8,0 |
8,0 |
7,2 |
4,8 |
6,8 |
2,5 |
|
3,4 |
2,3 |
3,6 |
2,7 |
3,5 |
3,1 |
3,2 |
2,5 |
3,1 |
2,1 |
|
6,8 |
4,2 |
7,0 |
5,6 |
6,3 |
5,9 |
6,2 |
5,0 |
6,5 |
4,0 |
|
4,0 |
2,6 |
4,8 |
3,6 |
5,8 |
6,4 |
5,7 |
4,4 |
4,5 |
2,5 |
|
1,0 |
0,2 |
0,4 |
0,0 |
0,6 |
0,2 |
0,4 |
- 0,2 |
0,4 |
0,0 |
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
III.- Prix, salaires, emploi |
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
Évolution (%) |
0,7 |
1,4 |
0,8 |
1,1 |
0,7 |
0,9 |
0,8 |
1,0 |
0,8 |
0,6 |
|
1,6 (g) |
0,2 (g) |
1,8 (f) |
1,5 (f) |
|
|
1,4 (f) |
1,2 (f) |
1,6 (f) |
1,0 (f) |
|
1,6 |
1,3 |
1,5 |
1,7 |
1,7 |
2,2 |
1,4 |
1,4 |
1,7 |
1,5 |
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
IV.- Comptes dagents |
40,9(h) |
41,0(h) |
31,9 |
31,7 |
|
|
32,5(h) |
32,4(h) |
|
|
|
2,1 |
1,9 |
2,8 |
2,2 |
|
|
2,3 |
2,2 |
2,5 |
2,1 |
|
|
|
- 2,8 |
- 2,4 |
|
|
- 2,9 |
- 2,5 |
- 2,9 |
- 2,8 |
|
|
|
|
|
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|
|
|
|
|
V.- Commerce extérieur |
|
|
|
|
|
|
165 |
150 |
160 |
140 |
|
B.I.P.E. : Bureau dinformations et de
prévisions économiques. C.D.C. : Caisse des dépôts et consignations.
C.O.E. : Centre dobservation économique (chambre de commerce et dindustrie
de Paris).
G.A.M.A. : Groupe danalyse macro-économique appliquée (université de Paris
Nanterre et C.N.R.S.).
REXECODE : Centre de recherches pour lexpansion de léconomie et le
développement des entreprises.
O.F.C.E. : Observatoire français des conjonctures économiques (pour
lenvironnement international : département des diagnostics).
A.F.E.D.E. : Association française des économistes dentreprises.
EXPANSION : Groupe de lExpansion. |
CHAPITRE III
LE BUDGET POUR 1999 DOIT MARQUER LENTRÉE RÉUSSIE
DE LA FRANCE DANS LA ZONE EURO
Souhaitable, le soutien de la croissance paraît possible, dans la mesure où la
constitution de la zone euro accroît nos marges de manoeuvre.
Lévolution structurelle de notre commerce extérieur, orienté de façon
privilégiée vers lEurope occidentale, a conduit, par rapport à la situation des
années quatre-vingt, à un desserrement de la contrainte commerciale.
Dans le même temps, la contrainte financière a changé de nature : avant même
la mise en oeuvre effective de la monnaie unique, il est déjà possible den mesurer
les effets favorables. Ainsi, les onze Etats de la zone euro ont-ils été largement
épargnés par les conséquences des crises financières qui se sont succédées au cours
des derniers mois.
Mais, pour bénéficier à plein de l« effet euro », il convient de
veiller à la compétitivité de nos entreprises, largement intégrées à lespace
économique européen.
En outre, lentrée dans la zone euro implique, en matière de finances publiques,
des disciplines que rend, en tout état de cause, indispensable la nécessité de
reconstituer, en période de croissance, les marges budgétaires qui permettront de faire
face, le moment venu, à un éventuel retournement de la conjoncture.
Le desserrement de la contrainte commerciale et le changement de nature de la
contrainte financière doivent ainsi permettre tant daccompagner lintégration
des entreprises françaises dans lespace économique européen que de poursuivre
lassainissement de nos finances publiques.
A.- LE DESSERREMENT DE LA CONTRAINTE
COMMERCIALE
En 1997, pour la sixième année consécutive, les résultats du commerce extérieur
ont été spectaculaires : lexcédent a pratiquement doublé par rapport à
1996, près des deux tiers des échanges ayant été réalisés avec des pays de
lUnion européenne.
Ces performances autorisent la France à mener, plus librement que par le passé, une
politique de soutien de la demande interne et, partant, de la croissance. Le succès de
cette stratégie peut lui permettre, par ailleurs, de résister à un éventuel
ralentissement du commerce mondial, qui aurait été insupportable il y a seulement un an.
La contrainte extérieure a donc diminué de façon significative.
Ainsi, il est possible denvisager plus sereinement une stabilisation de
lexcédent commercial en 1998, voire un repli progressif en 1999, évolution
caractéristique dune croissance désormais davantage fondée sur la consommation et
sur linvestissement que sur les exportations.
1. Une nouvelle amélioration des
échanges extérieurs
a) Un excédent commercial sans précédent
Chaque année, depuis 1992, la balance française des échanges extérieurs de
marchandises réalise un nouveau record. 1997 ne fait pas exception :
lexcédent commercial est passé de 85 milliards de francs en 1996 à 169 milliards
de francs (17). La performance est
dautant plus remarquable quelle saccompagne dune forte progression
des flux.
En effet, les exportations et les importations ont nettement progressé. Dès lors, les
explications structurelles de lexcédent extérieur (amélioration de la
compétitivité-prix, de limage et de la qualité des produits français, bonne
orientation géographique, etc.) tendent à prendre le pas sur les facteurs conjoncturels
qui étaient invoqués, avec raison, lorsque lécart de croissance était important
entre la demande mondiale et la demande intérieure. La contribution du commerce
extérieur à la croissance économique et à lemploi a été dautant plus
forte.
|
|
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|
|
|
|
|
|
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|
|
|
COMMERCE EXTÉRIEUR
FRANÇAIS : 1988-1997 |
(résultats bruts FAB-FAB y
compris matériel militaire, en milliards de francs) |
|
1988 |
1989 |
1990 |
1991 |
1992 |
1993 |
1994 |
1995 |
1996 |
1997 |
Évolution97/96 (en %) |
Importations |
1.035 |
1.193 |
1.235 |
1.263 |
1.230 |
1.115 |
1.244 |
1.358 |
1.395 |
1.524 |
9,2 |
Exportations |
981 |
1.124 |
1.159 |
1.199 |
1.235 |
1.175 |
1.293 |
1.420 |
1.480 |
1.693 |
14,4 |
Solde |
- 54 |
- 69 |
- 76 |
- 64 |
5 |
60 |
49 |
62 |
85 |
169 |
98,8 |
Source : Direction
générale des douanes et droits indirects. |
Au premier semestre de 1998, lexcédent sest élevé
à 83,2 milliards de francs, marquant une baisse par rapport au précédent
semestre (91,4 milliards de francs), mais une hausse par rapport aux six premiers
mois de 1997 (77,8 milliards de francs).
Ces performances résultent, en 1997, dune progression de lensemble des
secteurs économiques, à lexception de lénergie. Lautomobile mise à
part, les améliorations saccompagnent dune forte reprise des échanges. Au
premier semestre de 1998, lallégement de la facture énergétique compense les
évolutions, plus contrastées, des autres secteurs.
· Le secteur de léquipement professionnel affiche sans
doute, en 1997, les meilleurs résultats. Les ventes de construction aéronautique et le
commerce des machines de bureau et du matériel électronique y ont particulièrement
contribué, le dynamisme des échanges ayant été sans précédent depuis dix ans.
Lexcédent a atteint 63,3 milliards de francs. Dès lors, il nest pas
étonnant que le premier semestre de 1998 ait été marqué par un léger repli
(lexcédent est de 28,5 milliards de francs), les flux déchanges au sein
de la branche poursuivant leur mouvement de hausse, mais à un rythme plus mesuré.
· Les échanges de biens intermédiaires, et notamment ceux du
secteur des demi-produits non métalliques, sont redevenus dynamiques après la
stagnation, voire le recul, de 1996 : les exportations ont progressé de 10,8% et les
importations de 8,9%. Au cours des premiers mois de 1998 cependant, seule la branche des
métaux a progressé.
· La diminution du déficit des biens de consommation se poursuit
également : il nétait plus que de 10,2 milliards de francs en 1997. Le
déficit des sous-secteurs « biens de consommation courante » et
« électroménager-électronique grand public » a encore baissé par rapport
à 1996. Au premier semestre de 1998, les échanges délectronique ménager ont
atteint de nouveaux sommets : la coupe du monde de football explique en partie la
hausse des importations de 32% et des exportations de 19%. Le secteur dans son ensemble
évolue favorablement.
· Lagro-alimentaire est à lorigine, comme toujours, du
plus gros excédent : 64,9 milliards de francs en 1997, soit la plus forte
progression depuis dix ans (+ 13 milliards de francs), avec une hausse des
exportations de 10% et des importations de 5%. Lexcédent a cependant nettement
diminué au premier semestre de 1998 et les tensions qui persistent sur le marché des
céréales continuent de peser sur les exportations françaises.
· La plus forte progression, en 1997, a été celle du secteur automobiles
et transports terrestres, lexcédent atteignant le niveau record de
64 milliards de francs. Certes, cette évolution sexplique en partie par un
décalage de conjoncture, le recul du marché français contrastant avec la vigueur de la
demande étrangère liée, notamment, aux primes gouvernementales instaurées en Italie et
en Espagne. Au premier semestre de 1998, le dynamisme persistant des exportations (+6%)
sest néanmoins conjugué avec une reprise sensible des immatriculations en France.
· Lénergie aura finalement été le seul secteur à se
dégrader en 1997 : le déficit a dépassé les 85 milliards de francs. La
hausse des achats de pétrole brut, en valeur, compte tenu de lappréciation du
dollar qui a plus que compensé la baisse des cours mondiaux, a provoqué une aggravation
du déficit de ce poste, qui a atteint 72,1 milliards de francs. Cependant, au
premier semestre de 1998, la facture énergétique sest allégée de
10 milliards de francs (31,8 milliards de francs, contre 42,4 milliards de
francs au semestre précédent), sous leffet, notamment, dune baisse du prix
du pétrole brut de 25% par rapport aux six derniers mois de 1997.
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ÉVOLUTION DES ÉCHANGES
EXTÉRIEURS PAR GROUPE DE PRODUITS
(résultats bruts CAF/FAB hors matériel militaire, en milliards de
francs) |
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1990 |
1991 |
1992 |
1993 |
1994 |
1995 |
1996 |
1997 |
1998 (a) |
Produits agricoles |
35,2 |
29,2 |
33,8 |
32,3 |
18,4 |
20,3 |
24,7 |
30,0 |
13,5 |
Produits des industries agro-
alimentaires |
13,3 |
12,3 |
16,1 |
20,3 |
22,5 |
26,4 |
26,9 |
34,9 |
12,9 |
Énergie |
- 95,4 |
- 96,4 |
- 81,6 |
- 70,8 |
- 67,2 |
- 60,8 |
- 79,1 |
- 85,8 |
- 31,8 |
Biens intermédiaires |
- 44,0 |
- 34,1 |
- 29,5 |
- 4,8 |
- 17,5 |
- 23,3 |
- 8,4 |
- 4,7 |
- 8,9 |
Équipement professionnel |
- 30,8 |
- 18,6 |
13,0 |
28,5 |
27,1 |
48,6 |
48,6 |
63,3 |
28,5 |
Automobile et transports terrestres |
21,6 |
29,5 |
28,6 |
25,6 |
26,7 |
20,3 |
24,5 |
64,0 |
36,1 |
Biens de consommation |
- 54,7 |
- 56,1 |
- 44,9 |
- 33,3 |
- 26,7 |
- 25,1 |
- 16,9 |
- 10,2 |
- 4,4 |
Divers |
3,4 |
2,7 |
2,5 |
3,2 |
3,1 |
2,7 |
2,9 |
2,5 |
1 |
Total |
- 151,4 |
- 131,5 |
- 62,0 |
1 |
- 13,6 |
9,1 |
23,2 |
94,0 |
46,9 |
(a) Résultats du premier semestre. |
Source : Direction
générale des douanes et droits indirects. |
b) Des transactions courantes de nouveau en hausse
Cette progression des échanges de marchandises explique largement comment le compte de
transactions courantes a pu enregistrer, en 1997, un excédent de 230 milliards de
francs, en hausse de plus de 100 milliards de francs par rapport à 1996, ce qui
place la France au deuxième rang mondial derrière le Japon. Mais les services y ont
également contribué : les échanges de biens et services ont été excédentaires
de 266,9 milliards de francs (159,8 milliards de francs en 1996). Sur les six
premiers mois de 1998, le solde du compte de transactions courantes a dégagé un
excédent pratiquement identique à celui du premier semestre de 1997
(+ 107 milliards de francs).
· Le solde des échanges de marchandises, en données FAB-FAB et en
méthodologie balance des paiements, sétablit à 154,7 milliards de francs, en
hausse de près de 90 milliards de francs par rapport à 1996 (18). Le solde des échanges de biens atteint
164,3 milliards de francs (en tenant compte de lexcédent dégagé par les
opérations davitaillement et de travail à façon et par les réparations).
· Le solde des services a également évolué favorablement, bien
que de façon moins spectaculaire, passant de + 77,3 milliards de francs en 1996
à + 102,6 milliards de francs en 1997. Après trois années de déclin, le
solde des voyages sest amélioré et a atteint le niveau record de
+ 66,7 milliards de francs (+ 54,3 milliards de francs en 1996). Des
phénomènes monétaires (appréciation du dollar, de la livre et de la lire) ont
contribué à cette évolution et la France sest située, en 1997, à la troisième
place sur le marché du tourisme international, derrière les Etats-Unis et lItalie.
Le solde touristique devrait se maintenir à un niveau très élevé en 1998, voire
progresser grâce aux recettes supplémentaires engendrées par lorganisation de la
coupe du monde de football. Cette évolution pourrait compenser un léger repli du solde
des échanges de services liés aux échanges extérieurs.
· Les revenus ont été excédentaires, en 1997, pour la première
fois depuis le début des années 1990 : + 19,2 milliards de francs, en
hausse de 30 milliards de francs par rapport à 1996. Les revenus
dinvestissements directs nets ont sensiblement progressé et si cette tendance
pourrait désormais sinverser, du fait des difficultés économiques qui affectent
les pays émergents dAsie, la dégradation devrait néanmoins rester modérée.
· Le déficit structurel des transferts courants, en revanche, a
augmenté, en 1997, de 11 milliards de francs par rapport à 1996, pour atteindre
56 milliards de francs (19).
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|
LES COMPOSANTES DES
TRANSACTIONS COURANTES
(en millions de francs) |
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1995 |
1996 |
1997 |
|
Recettes |
Dépenses |
Solde |
Recettes |
Dépenses |
Solde |
Recettes |
Dépenses |
Solde |
Transactions courantes |
2.147.425 |
2.092.931 |
54.494 |
2.230.888 |
2.125.903 |
104.985 |
2.562.467 |
2.332.351 |
230.116 |
Biens |
1.390.483 |
1.335.561 |
54.922 |
1.441.872 |
1.365.357 |
76.515 |
1.658.118 |
1.493.820 |
164.298 |
Services |
393.630 |
322.066 |
71.564 |
418.796 |
341.514 |
77.282 |
474.542 |
371.920 |
102.622 |
Autres biens et services |
25.748 |
7.839 |
17.909 |
8.544 |
2.579 |
5.965 |
0 |
0 |
0 |
Biens et Services |
1.809.861 |
1.665.466 |
144.395 |
1.869.212 |
1.709.450 |
159.762 |
2.132.660 |
1.865.740 |
266.920 |
Revenus |
230.846 |
271.800 |
- 40.954 |
249.480 |
259.499 |
- 10.019 |
312.306 |
293.145 |
19.161 |
Transferts courants |
106.718 |
155.665 |
- 48.947 |
112.196 |
156.954 |
- 44.758 |
117.501 |
173.466 |
- 55.965 |
Source : Banque de France. |
2.- Une progression des
importations liée à la reprise économique
Depuis 1990, la progression des importations restait limitée, du fait de latonie
de la demande interne. En 1994 notamment, puis de nouveau entre 1996 et la mi-1997, les
bonnes performances des échanges extérieurs résultaient largement dun décalage
de conjoncture, amplifié par la politique du précédent Gouvernement, entre la France et
ses partenaires.
Dans ce contexte, une politique économique de soutien de la demande interne permettant
daccélérer la croissance et de lutter efficacement contre le chômage
simposait. Il pouvait en résulter une reprise des importations, mais le risque
était contrebalancé par le dynamisme structurel et persistant des exportations. En tout
état de cause, une contraction de lexcédent commercial na rien
dinquiétant en soi, dès lors quelle reste mesurée et surtout quelle
reflète une résorption corrélative du déficit de croissance et demploi.
Cette analyse, déjà esquissée dans le précédent rapport général, est confortée
par les résultats obtenus depuis lors : la progression des importations
accompagne désormais celle des exportations.
· En 1997, la progression du pouvoir dachat des ménages et
lamélioration de la conjoncture ont favorisé un redémarrage progressif de la
demande interne. En termes de stocks, de consommation des ménages ou
dinvestissement productif, la reprise se manifeste dans la seconde partie de
lannée : la croissance des achats a fait un bond au troisième trimestre et
sur lensemble de lannée, les importations ont augmenté de 9,2%.
|
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ÉVOLUTION DES IMPORTATIONS
: 1996-1998 |
(résultats corrigés des
variations saisonnières et des jours ouvrables, FAB-FAB, y compris matériel militaire,
en millions de francs) |
|
1996 |
1997 |
1998 |
|
3e trim. |
4e trim. |
1er trim. |
2e trim. |
3e trim. |
4e trim. |
1er trim. |
2e trim. |
Importations |
347.841 |
356.311 |
362.685 |
370.757 |
391.375 |
398.790 |
406.603 |
405.120 |
Source : Direction
générale des douanes et droits indirects. |
· Au cours des six premiers mois de 1998, le caractère
soutenu de la consommation des ménages et de linvestissement des entreprises
sest confirmé. Laugmentation des importations, qui se sont élevées à
812 milliards de francs, ne sest donc pas démentie, malgré le léger recul du
deuxième trimestre. Ainsi, lévolution à la hausse constatée fin 1997
nétait pas conjoncturelle : la progression des importations est de 10% par
rapport au premier semestre de 1997, malgré la baisse de la facture énergétique
(- 16%). Elle est à lorigine de la diminution de lexcédent avec la
Communauté européenne, celui-ci continuant néanmoins à se situer à un niveau élevé
(+ 37,1 milliards de francs). La poussée des achats et la dégradation de la
balance commerciale sont particulièrement nettes avec lAllemagne : le retour
au déficit résulte dune hausse des importations de 6,3%.
La progression des importations na pas eu de répercussion sur léquilibre
des échanges extérieurs, les exportations restant dynamiques. La dégradation de
lenvironnement international pourrait mettre fin à cette situation mais ses
répercussions sont pour linstant limitées, et lampleur de lexcédent
commercial rend supportable lhypothèse dune légère baisse des exportations.
3.- Une contraction relative des exportations
La réorientation géographique du commerce extérieur de la France, engagée au cours
de la précédente décennie, est désormais achevée : près des deux tiers de ses
exportations sont dirigées vers lUnion européenne, et plus des trois quarts vers
lOCDE.
Cette restructuration lui permet de profiter pleinement de la hausse du commerce
mondial.
En 1997, la progression des exportations a été particulièrement forte : +14,4%
par rapport à 1996. Tous les pays industrialisés, à lexception du Japon, ont en
effet connu globalement une croissance soutenue. La demande des pays émergents est
restée ferme, au moins au cours du premier semestre : les effets de la crise
financière asiatique qui a affecté, à lété, lIndonésie, la Thaïlande,
la Malaisie, les Philippines et la Corée, nont été perceptibles quà la fin
de lannée. Le taux de progression en volume du commerce mondial de marchandises a
été de +9,9%, soit la deuxième plus forte hausse depuis vingt ans, mais après, il est
vrai, un ralentissement en 1996. La France a bénéficié de cet environnement en tirant
profit de la bonne compétitivité de ses entreprises et dune dépréciation de son
taux de change effectif (au regard du dollar, de la livre et de la lire). Sa part de
marché, par rapport à ses principaux partenaires de lOCDE, est désormais
stabilisée (20). Les exportations françaises
ont par ailleurs bénéficié, en 1997, dun montant exceptionnel de grosses
opérations : Airbus-Industrie a dépassé son précédent record de 1995, en
exportant, à partir de la France, 107 appareils, pour 46,5 milliards de francs
(107 appareils pour 42,6 milliards de francs en 1995, 90 appareils pour
36 milliards de francs en 1996).
· La part de lUnion européenne est en légère baisse, la
hausse des flux avec les Etats membres restant inférieure à laugmentation globale
des échanges. Mais lexcédent était proche de 90 milliards de francs en 1997,
soit une progression de plus de 60 milliards de francs par rapport à 1996.
LAllemagne est de loin le premier client et le premier fournisseur de la France. Le
Royaume-Uni est toujours son premier excédent bilatéral.
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LE COMMERCE EXTÉRIEUR DE LA
FRANCE EN 1997 PAR ZONES GÉO-ÉCONOMIQUES |
|
1997
(en milliards de francs) |
Evolution 97/96
(en %) |
Taux de |
|
Importations |
Exportations |
Solde |
Importations |
Exportations |
Couverture (en %) |
Union européenne |
948,1 |
1.037,7 |
89,6 |
4,9 |
11,3 |
109,4 |
UEBL (a) |
124,8 |
133,1 |
8,3 |
3 |
6,4 |
106,6 |
Pays-Bas |
77,9 |
77,4 |
- 0,6 |
4,2 |
15,1 |
99,3 |
Allemagne |
257,2 |
262,3 |
5,2 |
3,2 |
3,9 |
102 |
Italie |
151,8 |
153,4 |
1,5 |
3,6 |
12,9 |
101 |
Royaume-Uni |
129,6 |
167 |
37,4 |
8,6 |
20,7 |
128,9 |
Espagne |
103,3 |
132,7 |
29,4 |
4,3 |
14,1 |
128,4 |
OCDE hors UE |
280,9 |
249,1 |
- 31,8 |
15,2 |
16,2 |
88,7 |
Etats-Unis |
136,1 |
107,5 |
- 28,7 |
18,1 |
21,5 |
78,9 |
Japon |
52 |
28,4 |
- 23,6 |
12,7 |
3,8 |
54,6 |
Suisse |
36,9 |
58,1 |
21,2 |
5,4 |
2,5 |
157,4 |
Pays de lEst |
50,3 |
61,7 |
11,4 |
8,1 |
29,8 |
122,7 |
Russie |
20,3 |
14,8 |
- 5,5 |
- 1,7 |
44,3 |
72,8 |
Pays dAsie à économie en développement rapide
|
103,8 |
109,8 |
6 |
18,5 |
31,6 |
105,7 |
Chine |
38,7 |
20 |
- 18,7 |
24,4 |
60,9 |
51,6 |
Moyen-Orient |
33,7 |
41,9 |
8,2 |
10,4 |
20,1 |
124,4 |
Afrique |
67,3 |
87,4 |
20,1 |
9,3 |
5,9 |
129,9 |
Reste du monde |
69,9 |
64,7 |
- 5,2 |
16,7 |
1,8 |
92,5 |
Total CAF/FAB hors matériel militaire |
1.554 |
1.652,3 |
98,3 |
8,4 |
13,3 |
106,3 |
(a) Union économique Belgique-Luxembourg. Source : Direction générale des douanes et droits indirects. |
· Les échanges ont été plus dynamiques avec les pays de
lOCDE hors Union européenne, mais le déficit commercial, qui a légèrement
progressé, est resté important. Le solde sest aggravé avec le Japon (second
déficit bilatéral de la France) et, dans une moindre mesure, avec les Etats-Unis et la
Norvège qui sont, respectivement, nos premier et troisième déficits bilatéraux.
· Les pays tiers ont joué un rôle essentiel en 1997 : la
hausse des échanges a été plus forte avec la plupart dentre eux et le solde a
été excédentaire avec le Moyen-Orient et les pays de lEst, mais également avec
les pays dAsie à développement économique rapide : limpact de la crise
financière qui a affecté la région napparaît sur les exportations quen fin
dannée et reste donc très limité sur lensemble de 1997.
Incontestablement, le contexte international est moins favorable depuis que la crise
financière de lété 1997 sest propagée, durant lhiver, à la sphère
réelle des économies asiatiques. Lensemble de la région est affecté, dans des
proportions certes variables, ainsi que, par contagion, lAmérique latine et les
autres pays émergents. LAfrique subit, quant à elle, les effets de la chute des
cours du pétrole et des matières premières. Le commerce mondial pourrait ralentir de
quelque deux points en 1998, en raison dune baisse des importations des pays
émergents dAsie, mais aussi des pays de lOPEP. De même, la demande mondiale
de produits manufacturés adressée à la France passerait de 9,4% en 1997 à environ 7,4%
en 1998 (21).
Pour autant, limpact de cette dégradation doit être nuancé.
En premier lieu, on constate que, sur les six premiers mois de lannée en cours,
les exportations se sont maintenues à un niveau très élevé, même si le ralentissement
est sensible par rapport au second semestre de 1997, sous leffet de la
décélération de la demande mondiale.
|
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ÉVOLUTION DES
EXPORTATIONS : 1996-1998 |
(résultats corrigés des
variations saisonnières et des jours ouvrables, FAB-FAB, y compris matériel militaire,
en millions de francs) |
|
1996 |
1997 |
1998 |
|
3e trim. |
4e trim. |
1er trim. |
2e trim. |
3e trim. |
4e trim. |
1er trim. |
2e trim. |
Exportations |
371.007 |
382.980 |
394.587 |
416.613 |
436.492 |
445.058 |
447.449 |
447.508 |
Source : Direction
générale des douanes et droits indirects. |
En second lieu, un recul des exportations serait certes fâcheux mais
pourrait navoir que des conséquences limitées. Lexcédent est tel que la
France dispose, au niveau de léquilibre de ses échanges extérieurs, dune
marge confortable.
Surtout, la concentration géographique des échanges extérieurs de la France vers les
pays industrialisés limite, pour linstant, les répercussions directes de la crise
asiatique. Certes, les exportations vers les pays dAsie en développement rapide ont
fortement reculé au premier semestre de 1998 (-26,5%, après une hausse importante au
second semestre de 1997), et le retour au déficit est spectaculaire : le solde est
redevenu négatif (-11,9 milliards de francs, soit la moins bonne performance au
cours des dix dernières années). Mais lAsie ne représente finalement que 7% des
exportations françaises, et les cinq pays les plus touchés seulement 3% :
limpact est donc limité en valeur absolue. Quant à la Russie, elle nest la
destination que dun peu moins de 1% des exportations françaises.

Enfin, on observera que les pays du Sud-Est asiatique conservent malgré tout des
perspectives de croissance à moyen et long termes.
Dans limmédiat, les conséquences négatives, pour la France, de la crise
asiatique sont inégales selon les secteurs. La baisse des exportations vers lAsie
en développement touche durement les biens de luxe. Les alcools et les parfums ont
fortement reculé au premier semestre de 1998. Lhabillement, lhorlogerie et
lélectronique grand public risquent également dêtre affectés. Mais au
niveau global, la France a lavantage de commercer dabord avec des pays
industrialisés, et lampleur de son excédent commercial paraît lui permettre
denvisager sans crainte, en termes déquilibre, une légère détérioration
de son environnement extérieur.
Il reste que limpact à moyen terme pourrait être plus important. La
décroissance des exportations risque de saccompagner dune baisse de
compétitivité vis-à-vis des pays en crise (du fait de la dépréciation de leurs
monnaies) et dune tentation, de leur part, de privilégier la recherche de
débouchés extérieurs indépendamment des seules considérations de coût et de prix.
Leffet des ajustements en cours, le risque dun élargissement de la crise,
avec les turbulences qui affectent actuellement les autres pays émergents, les
difficultés de la Russie, sans compter un éventuel ralentissement américain et la
possible rechute du dollar, rendent la situation difficile à appréhender : une
certaine prudence simpose de toute évidence. Dans limmédiat, la seule
certitude est donc que des marchés qui constituaient, incontestablement, un fort
potentiel de développement, sont en train de se refermer : lun des moteurs de
la croissance des échanges français étant en train de se gripper, la vigueur de la
demande interne nen est que plus essentielle pour contrebalancer les aléas
extérieurs.
*
* *
Au terme de cette brève analyse, on constate que la contrainte extérieure a très
sensiblement diminué :
un recul des exportations serait supportable, sous réserve quil
reste limité et contrebalancé par une consommation intérieure dynamique ;
la reprise de la demande interne doit être confortée, le niveau actuel de
lexcédent commercial permettant denvisager sans trop dinquiétude une
hausse des importations.
Compte tenu des résultats du premier semestre et de la baisse de la facture
énergétique, qui devrait compenser un tassement du solde manufacturier, on peut penser
quen 1998, les excédents de la balance commerciale et de la balance des
transactions courantes devraient se stabiliser autour de leur niveau historique de 1997.
En 1999, lexcédent extérieur pourrait se contracter : une demande
intérieure soutenue se conjuguerait avec un ralentissement de la demande étrangère
adressée à la France, dans le cadre dun rééquilibrage de la croissance au profit
de la demande interne.
B. LE CHANGEMENT DE NATURE DE LA
CONTRAINTE FINANCIÈRE
Parce quil repose sur un transfert des compétences monétaires, sur le plan
institutionnel et politique, et quil réduit le nombre des instruments de
régulation conjoncturelle à la disposition du Gouvernement, le choix de la monnaie
unique a été, en son temps, particulièrement contesté.
La mise en oeuvre de lUnion économique et monétaire présente, en apparence,
des désavantages, car elle supprime, au plan interne, deux outils de politique
économique, à savoir laction sur le taux dintérêt et celle sur le taux de
change, et elle impose des contraintes à la politique budgétaire.
Cependant, lexpérience récente montre que ce choix a été pertinent, car il a,
jusquà présent, permis à notre pays de rester à labri des perturbations
monétaires internationales tout en lui offrant des perspectives de réduction des taux
dintérêt, alors que lexercice de sa souveraineté monétaire était
progressivement devenu illusoire.
1.- La « nouvelle donne »
monétaire
Dans le cadre de la « marche à leuro », le taux dintérêt et
le taux de change ont progressivement perdu leur statut dinstruments nationaux de
politique économique.
a) Le rôle du taux dintérêt et du taux de change comme
instruments de politique économique, selon la théorie économique
Selon la théorie économique, le rôle du taux dintérêt est essentiel à la
conduite de la politique économique, car il permet, sur le plan interne, de réguler la
demande, par le biais des incidences du coût du crédit sur linvestissement, sur la
construction de logements et sur la consommation privée, notamment la consommation de
biens durables, ainsi que de jouer sur larbitrage entre la consommation et
lépargne. En outre, ses conséquences sur le cours des valeurs mobilières doivent
être prises en compte dans le cadre des effets de richesses, les variations de la valeur
de ces actifs nétant pas sans influence sur la consommation des ménages, qui
utilisent à des fins de consommation ou dacquisition de logement une partie des
plusvalues quils réalisent.
Sur le plan externe, le taux dintérêt permet également de faire varier la
liquidité de léconomie et joue un rôle dans la détermination ou le maintien du
taux de change par son influence sur les capitaux internationalement mobiles.
Sagissant du taux de change, lintérêt dune dévaluation ou
dune dépréciation est, de manière générale, de relancer les exportations et de
réorienter la demande sur les produits non importés en favorisant la compétitivité des
produits nationaux dans une perspective de réduction dun déficit de la balance
commerciale (22). Sur le plan financier, une
variation du taux de change permet de fixer un taux dintérêt compatible avec les
objectifs retenus pour lévolution de la masse monétaire, du crédit, de
linvestissement et de la croissance.
b) La question de lautonomie de la politique budgétaire
En arrière plan, les réflexions sur le rôle du taux dintérêt et du taux de
change introduisent le débat sur lautonomie de la politique budgétaire, sur lequel
votre Rapporteur général reviendra de façon plus détaillée dans la deuxième partie
du présent volume.
En privant la politique économique des deux instruments qui permettent de corriger les
conséquences des écarts dinflation entre léconomie nationale et celles de
ses partenaires, la monnaie unique exerce sur la politique budgétaire une contrainte
forte. Elle consacre linterdiction de la monétisation des déficits et exige ainsi
un cadre coordonné au plan européen.
Pour leuro, ce cadre a été fixé par le pacte de stabilité et de croissance
adopté en juin 1997 lors du Conseil européen tenu à Amsterdam. Ce pacte précise les
dispositions du traité de Maastricht sur le suivi des politiques budgétaires après
ladoption de la monnaie unique, afin que les Etats membres retrouvent une situation
budgétaire où les fluctuations cycliques habituelles nentraînent pas de déficits
excessifs.
Le pacte repose sur deux éléments :
la surveillance multilatérale des politiques budgétaires, chaque Etat
soumettant chaque année au Conseil un programme de stabilité expliquant les moyens
quil compte mettre en oeuvre pour atteindre lobjectif dune situation des
administrations publiques proche de léquilibre à moyen terme, ou dégageant un
excédent. Le Conseil pourra, le cas échéant, adopter des recommandations sur les
programmes quil ne jugerait pas satisfaisants et assurera un suivi de la mise en
oeuvre de ces programmes ;
des sanctions financières dans le cas où le déficit des administrations
publiques sélèverait au-dessus de 3% du PIB, autrement quà titre
exceptionnel, temporaire, et limité.
c) La perte progressive de son autonomie monétaire par la France
Le contexte de la construction européenne, qui veut que le développement des
échanges ait lieu dans un cadre stable reposant essentiellement sur une intégration
économique et commerciale, a conduit à la mise en place du système de changes fixes et
ajustables du SME. En pratique, la combinaison de cette évolution et de limportance
de louverture financière de notre pays sur lextérieur à la suite de la
libéralisation des changes, a fait progressivement disparaître les marges de manoeuvre
théoriquement permises par la politique du taux dintérêt et par les variations du
change, qui sont devenues illusoires :
la dévaluation est apparue comme un instrument de correction des erreurs
et comme la sanction dune incapacité à maîtriser linflation et non comme un
instrument de souplesse et darbitrage de la politique économique ;
les variations du taux dintérêt ont été imposées par les
arbitrages opérés par les opérateurs internationaux : la politique du franc fort a
rendu nécessaire, au début de la présente décennie, des taux de court terme
particulièrement élevés ;
la défense de la parité du franc visàvis des autres
monnaies, essentiellement du mark, sest avérée très coûteuse en termes de
réserves de change et particulièrement difficile sagissant de la coordination de
laction des banques centrales, lors des attaques spéculatives fondées sur les
rumeurs ou des anticipations de dévaluation ;
les nécessités de la convergence économique ont limité la latitude de
la politique budgétaire.
Globalement, les impératifs de la stabilité des relations commerciales et du
développement de léconomie réelle, de même que la nécessité de tenir compte
des comportements des opérateurs financiers, ont contraint notre pays à entrer dans un
système mixte reposant sur laddition des contraintes : celles résultant de la
fixité des parités ; celles induites par lobligation de parer à la défiance
des marchés financiers internationaux.
2.- Les effets bénéfiques de
lunion monétaire
Lévolution monétaire de ces dernières années et la crise financière font
clairement apparaître les avantages de leuro.
La perspective très proche de la mise en place de leuro, dès le 1er janvier
1999, a montré ces derniers mois, et plus encore ces dernières semaines, que la monnaie
unique présentait deux avantages majeurs immédiatement perceptibles : une
protection contre la spéculation internationale ; un alignement des taux
dintérêt au plan européen.
a) La protection contre les crises financières et monétaires
internationales
Lors de la crise russe, leffet « bouclier » de leuro,
selon les termes de M. Yves-Thibault de Silguy, membre de la Commission européenne,
a parfaitement fonctionné. Aucune des monnaies de la zone euro na fait lobjet
dattaques spéculatives. La preuve en est fournie avec éclat par la situation du
« markka », resté remarquablement stable malgré limportance des
relations de la Finlande avec la Russie, alors que la couronne suédoise a fait
lobjet dune forte dépréciation. De même, après une certaine stabilité, la
livre sterling a été affectée. Enfin, alors que le reflux du dollar créait
habituellement des remous parmi les monnaies européennes, en raison de la préférence
des opérateurs pour les monnaies structurellement fortes comme le mark allemand, la chute
du dollar intervenue en septembre dernier na entraîné aucune tension.
A lorigine de cette protection, quatre facteurs principaux semblent avoir joué
chacun un rôle étroitement complémentaire :
la confiance des opérateurs visàvis de leuro et de sa
solidité, qui apparaît clairement depuis les débuts de la crise asiatique. Les marchés
européens, plus même que le marché américain, sont apparus pour les opérateurs comme
un lieu privilégié dinvestissement en une période de « recherche de la
qualité » sous forme davoirs à faibles risques, le pacte de stabilité
constituant sans doute lun des supports essentiels de cette confiance ;
la capacité dintervention des pays concernés, dans la mesure où il
est difficile de sopposer à un front uni comprenant onze banques centrales ;
les perspectives dune croissance endogène et sans tension
inflationniste dans les pays de la zone euro ;
la prise en compte de la faible dépendance des pays de la zone euro
visàvis de lextérieur, leurs exportations vers le reste du monde ne
représentant que 10% de son PIB, alors que chacune des économies qui la composent est
beaucoup plus ouverte compte tenu de limportance du commerce intrazone.
b) Lunification et la réduction des taux dintérêt
Sagissant des taux dintérêt, lavantage de leuro apparaît
clairement, car il conduit à leur unification ainsi quà leur alignement sur les
taux les plus bas. La surprime dont souffraient les pays à monnaie faible a presque
disparu, dès maintenant, et disparaîtra totalement dès la mise en place de la monnaie
unique.
Le graphique suivant, qui représente lévolution des taux nominaux à long terme
depuis 1996 aux EtatsUnis, au Japon et dans les principaux Etats de lUnion
européenne fait apparaître clairement cet effet : les taux des quatre pays
intégrés dans la zone euro (France, Allemagne, Italie, Espagne) ont convergé vers le
taux allemand le plus bas, ce qui na pas été le cas du taux du RoyaumeUni.

Cette convergence est particulièrement favorable à lactivité économique, car
elle bénéficie à lensemble des acteurs et permet de développer dans des
conditions et selon des modalités parfaitement saines loffre de crédit et
lappel à lépargne publique. Elle profite ainsi non seulement aux banques,
mais également aux institutions financières, aux entreprises, aux ménages et à
lEtat.
c) La reconquête de la souveraineté monétaire dans un cadre
collectif
Enfin, et cet élément nest pas le moindre, leuro permet de reconquérir,
dans un cadre collectif, une souveraineté perdue par les Etats, grâce à leur
participation aux instances de décisions. La France ne sera plus, ainsi, contrainte
daligner ses paramètres monétaires en fonction de la stratégie de la Bundesbank,
sous la pression des opérateurs internationaux, et naura plus non plus à faire
lexpérience des difficultés de la coordination entre plusieurs banques centrales,
dans lurgence des crises monétaires et financières.
Dune part, la composition des instances dirigeantes de la Banque centrale
européenne (BCE), lesquelles dirigent le système européen des banques centrales (SEBC),
assure la représentation de la France. Le gouverneur de la Banque de France est membre de
droit du Conseil des gouverneurs de la BCE, composé des membres du Directoire de la
banque et des gouverneurs des banques centrales européennes.
Dautre part, il convient de rappeler que la France a obtenu lors du Conseil
européen dAmsterdam en juin 1997 la création du Conseil de leuro qui pourra
se réunir, en tant que de besoin, avant les réunions du Conseil « économie et
finances » et devrait équilibrer le rôle de la BCE.
Cependant, pour tirer le meilleur parti de la réalisation de leuro, il
conviendra que la BCE, dans le cadre de son indépendance, ait pour objectifs la
coordination et loptimisation de la gestion du cycle économique et de la croissance
et ne succombe pas à la « tentation du bunker » en sarc-boutant
sur le seul objectif de la réduction de linflation et de la défense de la monnaie
dans une lecture trop stricte de larticle 105 du traité instituant la
Communauté européenne, qui prévoit, dans le cadre du chapitre sur la politique
monétaire, que lobjectif principal du système européen des banques centrales est
la stabilité des prix. Elle devra, en effet, tenir compte des orientations économiques
fixées par le Conseil.
Au regard de ces éléments, la garantie dune sécurité accrue, dans un monde en
crise financière, conduit, dores et déjà, à un bilan indéniablement favorable
à leuro.
C.- LE NÉCESSAIRE SOUTIEN À
LINTÉGRATION DES ENTREPRISES FRANÇAISES DANS LESPACE ÉCONOMIQUE EUROPÉEN
1.- Linternationalisation de
léconomie française
La mise en place de la zone euro le 1er janvier 1999, par la fixation du
taux de change de leuro avec chacune des monnaies des onze Etats membres, dont les
parités bilatérales ont déjà été arrêtées par le Conseil de Bruxelles des 2 et 3
mai 1998, ne constituera pas un bouleversement pour les entreprises françaises. Leur
intégration à lespace économique européen est ancienne, puisque lun des
fondements de la Communauté est la libre circulation des marchandises et que lunion
économique, avec la liberté détablissement et la libre prestation de services, a
précédé lunion monétaire.
On constate, en effet, que léconomie française est ouverte sur
lextérieur et que plus de la moitié de ses échanges avec létranger
concerne des pays de la zone euro.
On observe également linternationalisation croissante des entreprises
françaises dès le stade de la production, puisque les flux dinvestissement entre
la France et létranger sont en forte progression.
La compétitivité des entreprises françaises ne dépendra plus des variations de
change dans la zone euro, mais elle pourra être encore affectée par des écarts dans la
formation des prix. Les positions compétitives en Europe à la veille de lunion
monétaire sont donc importantes pour lavenir des entreprises françaises.
Le tableau ci-après retrace, pour chacun des pays de la zone euro, le degré douverture
à léconomie internationale.
|
|
|
|
|
|
|
LOUVERTURE DES PAYS DE
LA ZONE EURO À LINTERNATIONAL
(en %) |
|
Part des importations de
biens et services dans le PIB en 1995 |
Part des exportations de
biens et services dans le PIB en 1995 |
|
Tous pays |
Hors
zone euro |
Tous pays |
Hors
zone euro |
|
22,9 |
12,8 |
23,6 |
13,2 |
|
39,0 |
13,0 |
36,8 |
15,7 |
|
62,7 |
22,9 |
67,3 |
23,9 |
|
23,9 |
10,7 |
24,0 |
9,2 |
|
29,3 |
19,2 |
37,7 |
25,4 |
|
21,2 |
9,9 |
23,5 |
11,3 |
|
68,2 |
55,5 |
79,8 |
45,4 |
|
22,2 |
10,8 |
25,1 |
13,3 |
|
46,6 |
24,9 |
53,3 |
20,2 |
|
40,5 |
13,9 |
33,3 |
11,7 |
|
|
13,0 |
|
13,7 |
|
12,4 |
|
11,3 |
|
|
7,9 |
|
9,4 |
|
(a) Union économique Belgique-Luxembourg. Source : OCDE et INSEE. |
On constate que la part des importations comme des exportations dans le
PIB est plus forte pour chacun des pays de la zone que pour les Etats-Unis et, surtout,
que pour le Japon. Dans cet ensemble, léconomie française semble la moins ouverte.
On observera cependant quen 1997, les importations ont représenté 27,5% du PIB
marchand et les exportations 32,2% (23).
La forte progression des flux dinvestissement entre la France et
létranger constitue un autre indicateur de linternationalisation des
entreprises françaises. Depuis 1985, sauf en 1995 à cause des pertes dune filiale
à létranger, la France a été constamment exportatrice nette de capitaux au titre
des investissements directs. Les stocks des investissements directs étrangers en France
et des investissements directs de la France à létranger au 31 décembre 1996 ont
été recensés par la Banque de France (24).
Ils portent sur toutes les entreprises résidentes détenant au moins 10% du capital
dun non résident et recensent les capitaux propres, y compris les bénéfices
réinvestis sur place par un non résident et les prêts à long terme, les prêts à
court terme nétant pas pris en compte.
Sur ces bases, au 31 décembre 1996, la France était le cinquième investisseur à
létranger du monde, avec 1.010,6 milliards de francs dinvestissements,
à comparer avec ceux des Etats-Unis (4.171,2 milliards de francs), du Royaume-Uni
(1.861,1 milliards de francs), du Japon (1.354,3 milliards de francs) et de
lAllemagne (1.149,4 milliards de francs).
La France occupait le troisième rang pour laccueil des investissements directs
étrangers avec 753,8 milliards de francs, derrière les Etats-Unis
(3.299,5 milliards de francs) et le Royaume-Uni (1.370,7 milliards de francs).
En 1997, les investissements directs de la France à létranger ont atteint 181,2
milliards de francs et ceux des étrangers en France 122,5 milliards de francs, le
solde net des investissements directs sélevant à 58,7 milliards (25). Ces montants, à la différence de ceux relatifs aux
stocks dinvestissements, comprennent les prêts à court terme et les flux de
trésorerie, conformément aux recommandations du FMI. Au-delà de la rupture statistique
qui en résulte, on peut considérer que les flux intra-groupes à court terme, qui ont
fortement progressé depuis 1989 par la localisation de sièges de holdings et de
centrales de trésorerie dans des pays offrant une fiscalité avantageuse, traduisent,
certes, le développement de transactions financières mais sont éloignés de la notion
dinvestissement direct (26). Sans ces
mouvements à court terme, le montant des investissements français à létranger
sest élevé en 1997 à 113,7 milliards de francs et celui des investissements
étrangers en France à 74,4 milliards de francs (solde positif de
39,3 milliards de francs).
LOFCE observe à juste titre que le fort développement des investissements
français à létranger traduit linternationalisation des firmes françaises,
rendue nécessaire par la captation de certains marchés ou par la volonté de
bénéficier de conditions de production plus favorables. La simultanéité des
fluctuations de linvestissement étranger en France et français à létranger
illustre cette internationalisation, alors que le déficit structurel du solde des
investissements avec létranger est la règle générale pour les pays développés.
Sur 175,2 milliards de francs investis (hors bénéfices réinvestis) par la France à
létranger en 1997, 152,5 lont été dans dix pays, dont neuf développés, le
Brésil faisant exception pour 6,9 milliards. Contrairement à une idée reçue, les
destinataires des investissements français à létranger restent majoritairement
des pays développés : le coût de production nest donc quune variable
expliquant la localisation des investissements.
|
|
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|
|
FLUX DINVESTISSEMENTS
DIRECTS DE LA FRANCE AVEC LÉTRANGER de 1988 à 1997 *
(en milliards de francs) |
|
1988 |
1989 |
1990 |
1991 |
1992 |
1993 |
1994 |
1995 |
1996 |
1997 |
Flux dinvestissements directs français à
létranger |
- 99,2 |
- 132,1 |
- 197,3 |
- 141,8 |
- 161,0 |
- 111,8 |
- 135,3 |
- 78,6 |
- 155,6 |
- 181,2 |
|
- 61,8 |
- 100,9 |
- 131,1 |
- 104,6 |
- 89,4 |
- 58,2 |
- 55,5 |
- 40,0 |
- 78,0 |
- 95,9 |
|
- 12,2 |
- 7,9 |
- 6,2 |
- 6,6 |
4,8 |
5,8 |
- 8,1 |
15,3 |
- 7,0 |
- 6,0 |
|
- 25,2 |
- 23,3 |
- 60,0 |
- 30,6 |
- 76,4 |
- 59,4 |
- 71,7 |
- 53,9 |
- 70,6 |
- 79,3 |
|
- 14,7 |
- 14,9 |
- 16,3 |
- 11,8 |
- 12,3 |
- 11,6 |
- 5,9 |
- 13,9 |
- 15,2 |
- 11,8 |
|
- 10,5 |
- 8,4 |
- 43,7 |
- 18,8 |
- 64,1 |
- 47,8 |
- 65,8 |
- 40,0 |
- 55,4 |
- 67,5 |
Flux dinvestissements directs français en
pourcentage du PIB |
1,73 |
2,14 |
3,03 |
2,09 |
2,30 |
1,58 |
1,83 |
1,02 |
2,03 |
2,23 |
Flux dinvestissements directs étrangers en France
|
50,8 |
83,3 |
85,0 |
85,6 |
94,5 |
93,1 |
86,5 |
118,2 |
112,3 |
122,5 |
|
40,1 |
53,5 |
38,0 |
55,4 |
75,4 |
65,1 |
51,0 |
59,1 |
51,1 |
73,9 |
|
nd |
18,6 |
14,1 |
1,0 |
- 21,7 |
- 25,1 |
- 4,6 |
- 3,6 |
- 5,4 |
- 7,9 |
|
10,7 |
11,2 |
32,9 |
29,2 |
40,8 |
53,1 |
40,1 |
62,7 |
66,6 |
56,6 |
|
2,8 |
7,4 |
11,2 |
7,1 |
8,9 |
3,7 |
7,1 |
11,2 |
2,7 |
8,5 |
|
7,9 |
3,8 |
21,7 |
22,1 |
31,9 |
49,4 |
33,0 |
51,5 |
63,9 |
48,1 |
Flux dinvestissements directs étrangers en
pourcentage du PIB |
0,89 |
1,35 |
1,31 |
1,26 |
1,35 |
1,32 |
1,17 |
1,54 |
1,43 |
1,51 |
Solde net des investissements directs |
- 48,4 |
- 48,8 |
- 112,3 |
- 56,2 |
- 66,5 |
- 18,7 |
- 48,8 |
39,6 |
- 43,3 |
- 58,7 |
Signe négatif : Investissements nets des
entreprises résidentes à létranger ou désinvestissements nets des non-résidents
en France. Sans signe : Investissements nets des entreprises non résidentes en
France ou désinvestissements nets français à létranger.
* Chiffres provisoires pour 1997. |
Source : Banque de France. |
Linternationalisation de léconomie française témoigne de
ladaptation des entreprises à un système mondial déchange de biens et
services et de capitaux plus libre quil y a un demi-siècle, compte tenu des accords
internationaux sur le commerce, et également de lapprofondissement de lunion
économique dans le cadre européen.
Pour autant, lOFCE considère (27)
quen matière de flux dinvestissements, les résultats de 1997 traduisent une
stabilisation des investissements français à létranger et un accroissement des
investissements étrangers en France, ce quelle analyse comme une
« dégradation française ». Rexecode (28)
constate, pour sa part, un affaiblissement de la position française sur les marchés
dexportation (part des exportations de la France dans les exportations totales des
25 principaux pays exportateurs) avec la perte de deux points de parts de marché depuis
les années 1970 (de 9% à 7%). Cette évolution confirme lobservation selon
laquelle les succès commerciaux de notre pays résultent davantage de la faiblesse de la
croissance que dune amélioration des positions françaises sur les marchés
dexportation. La contrainte de compétitivité reste donc significative, même si la
création de la zone euro permettra déviter les manipulations de taux de change
qui, au sein du système monétaire européen, avaient empêché la France
daméliorer sa compétitivité après le milieu de 1992 et jusquen 1995.
2.- La nécessaire amélioration de la
compétitivité de nos entreprises
Lentrée de la France dans la zone euro doit être accompagnée du maintien,
voire de lamélioration de la compétitivité de ses entreprises.
a) Compétitivité prix et compétitivité coût
Si la compétitivité est « la capacité dune entreprise, dune
région ou dune nation à conserver ou à améliorer sa position face à la
concurrence des autres unités comparables [...] son aptitude à produire des biens
et des services qui satisfont au test de la concurrence sur les marchés internationaux,
et à augmenter simultanément et de façon durable le niveau de vie de la
population » (29), ce concept est
dune telle richesse quil est malaisément réductible à des agrégats
statistiques, puisquil fait intervenir des éléments difficilement quantifiables,
comme les choix des entreprises en termes de stratégie commerciale, les pratiques de
crédit interentreprises ou les comportements des administrations. Pour autant, on
distingue habituellement, comme le fait le rapport sur les comptes de la Nation, qui
utilise les travaux de la direction de la prévision, la compétitivité-prix et la
compétitivité-coût.
INDICATEURS : COMPÉTITIVITÉ-PRIX ET
COMPÉTITIVITÉ-COÛT
|
La compétitivité-prix à lexportation des produits manufacturés est
égale au rapport du prix à lexportation des étrangers et du prix à
lexportation en France. Le prix à lexportation des étrangers est une moyenne
pondérée des prix, convertis en francs, des principaux partenaires commerciaux de la
France, la pondération dépendant elle-même de la part de chacun deux dans les
importations des pays où les industriels français réalisaient leurs ventes en 1990.
On calcule deux indicateurs de compétitivité-prix à lexportation :
lun par rapport aux six principaux partenaires européens (Allemagne, Royaume-Uni,
Italie, Pays-Bas, Belgique et Espagne), lautre par rapport aux huit principaux
partenaires mondiaux (les six européens, les Etats-Unis et le Japon).
Toutefois, cest le second indicateur quil faut prendre en compte pour
mesurer lincidence de lévolution des prix sur le commerce extérieur. Si le
prix français progresse moins vite que le prix étranger en raison dune inflation
moindre, ou dune dépréciation du change, ou dune combinaison des deux, alors
la compétitivité de la France saméliore.
La compétitivité-coût est calculée avec les mêmes pondérations. Par coût,
on désigne ici le coût salarial unitaire (CSU) pour lequel on dispose de sources
dinformation statistiques qui permettent des comparaisons internationales. A court
terme, les compétitivités-coût et prix peuvent diverger. Par exemple, une situation où
la compétitivité-coût se détériore et la compétitivité-prix reste stable traduit un
effort de compression des marges.
|
Source : Rapport sur les comptes de la
Nation annexé
au projet de loi de finances pour 1999. |
Il existe des indicateurs de compétitivité plus élaborés. Ainsi les
organismes internationaux procèdent à des calculs de parités de pouvoirs dachat
et à une appréciation de la dynamique concurrentielle qui repose sur le calcul du taux
de change nominal pondéré par la part de chaque marché où sexerce la concurrence
et du poids de chaque concurrent sur chacun des marchés. Le croisement des deux approches
(parités de pouvoirs dachat donc « prix de PIB » et dynamique
concurrentielle) suppose des travaux lourds qui ne permettent pas de disposer dune
information à jour au moment de la mise en place de leuro. Dans une étude
récente, lOFCE (30) présente une
série dindicateurs élaborés à partir des statistiques de la direction générale
des affaires économiques et financières de la Commission européenne. Ce travail a
permis détablir, pour les quatorze zones économiques communautaires (31), trois catégories destimations :
des prix relatifs des PIB nationaux en 1997, compte tenu des taux de
change, des parités de pouvoir dachat et de la dynamique concurrentielle
précédemment évoquée. Il sagit donc de la position compétitive de chaque zone
en 1997 ;
de lévolution des taux de change réels depuis 1987, calculés sur
la base du taux de change nominal déflaté par les prix du PIB, les prix
dexportation ou les coûts salariaux unitaires de lensemble de
léconomie (une élévation du taux de change réel correspond à
lappréciation de la monnaie nationale et à la détérioration de la
compétitivité) ;
de lévolution des taux de change réels depuis 1987, en retenant
comme déflateur les coûts salariaux unitaires de lindustrie manufacturière.
b) La situation française : des progrès encore insuffisants
Le tableau ci-après synthétise ces estimations pour 1997. La première colonne mesure
les écarts de compétitivité par rapport à la moyenne communautaire en termes de prix
de PIB et les deux autres colonnes présentent lévolution depuis 1987 pour chaque
pays selon le déflateur appliqué au taux de change nominal. A titre dexemple, le
Portugal apparaît comme le pays le plus compétitif, alors que laugmentation de son
taux de change réel a entraîné une dégradation de sa compétitivité depuis 1987.
|
|
|
|
CLASSEMENT DES PAYS DE
LUNION EUROPÉENNE SELON LE NIVEAU ET LÉVOLUTION DE LEURS TAUX DE CHANGE
RÉELS |
|
Niveau relatif du prix du PIB
|
Taux de change réel selon
les coûts salariaux unitaires en 1997, base 100 en 1987 (b) |
|
en 1997 (a) |
Ensemble de léconomie |
Industrie manufacturière |
Portugal |
65 |
148 |
142 |
Grèce |
78 |
143 |
137 |
Espagne |
81 |
104 |
113 |
Italie |
88 |
92 |
90 |
Irlande |
89 |
80 |
68 |
Belgique/Lux. |
95 |
105 |
101 |
Pays-Bas |
96 |
92 |
88 |
Finlande |
102 |
78 |
76 |
Royaume-Uni |
103 |
126 |
118 |
France |
104 |
95 |
91 |
Autriche |
105 |
99 |
101 |
Allemagne |
110 |
95 |
105 |
Suède |
113 |
100 |
89 |
Danemark |
121 |
98 |
112 |
(a) Estimés à partir des parités de pouvoir
dachat 1995 et des évolutions des déflateurs du PIB. Pour chaque pays, la
référence 100 correspond à la moyenne pondérée des autres membres de lUnion
européenne. Le niveau de prix relatif du PIB ainsi obtenu pour chaque pays a été
utilisé pour classer les pays dans ce tableau, du moins cher vers le plus cher. (b) La
compétitivité des coûts salariaux unitaires, de chaque pays par rapport à ses
partenaires de lUnion, est ici appréciée par lévolution, entre 1987 et
1997, du taux de change réel correspondant. Elle sest détériorée lorsque ce taux
de change sest élevé. |
Source : Commission
européenne, OCDE, calculs OFCE. |
La situation de la France sest améliorée avec
laffaiblissement de son taux de change réel, donc un renforcement de sa
compétitivité, depuis 1987, létude estimant le prix du PIB français à 104% du
PIB moyen communautaire. Cependant, les progrès nont pas été continus : selon la
formule de lOFCE, « la France est larchétype de la désinflation
compétitive ». De 1987, jusquaux dévaluations de la mi-1992, elle
améliore sa compétitivité mais la crise du SME de 1992-1993 affaiblit sa position face
aux concurrents dont les devises ont été dévaluées (principalement le Royaume-Uni et
lItalie). A partir de 1995, la hausse du dollar facilite lamélioration
densemble de la compétitivité européenne et la perspective de leuro oblige
les pays du sud destinés à entrer finalement dans la zone (Italie, Espagne, Portugal) à
des efforts de convergence. En 1996-1997, la normalisation monétaire en Europe et la
poursuite de la désinflation compétitive en France redonnent à notre pays un avantage
modéré de compétitivité et le placent, selon lOFCE « à mi-chemin du
point de départ de 1987 et de la position avantageuse de la mi-1992 ».
On observe cependant que la position compétitive de la France est affectée par deux
éléments négatifs. Dabord, comme le met en évidence le tableau ci-avant, les
pays du sud européen (Italie, Espagne, Portugal) entrent dans lunion monétaire
avec un avantage compétitif substantiel. Ensuite, alors que, sur lensemble de
lannée 1997, la relative maîtrise des coûts salariaux unitaires en France a
contribué à la progression de sa compétitivité-coût par rapport aux concurrents de
lOCDE, on relève que cette compétitivité sest dégradée avec
lAllemagne, qui, depuis 1995, a restauré la compétitivité de ses coûts salariaux
unitaires, fortement dégradée entre 1991 et 1995.
Faut-il en conclure, comme Rexecode (32),
que « la France est dans le groupe des économies industrialisées aux coûts
salariaux les plus élevés » et donc souhaiter une correction dans ce
domaine ? On peut ne pas en être convaincu, compte tenu de la modération salariale
déjà évoquée, qui a permis aux exportateurs une reconstitution de leurs marges en
1997. En outre, une telle affirmation pêche manifestement par son caractère trop
général. Quil existe un problème de coût du travail pour les bas salaires est
indéniable. Encore faut-il préserver la rémunération nette des salariés peu
qualifiés, sauf à se résigner à glisser vers un type de société manifestement
rejeté par la majorité des salariés et, sans doute aussi, des entrepreneurs.
Pour autant, la dépréciation des devises de la plupart des pays émergents
dAsie et celle, plus récente, du dollar, montrent que la France, en dépit de la
zone euro, nest pas à labri de dévaluations compétitives opérées hors de
cette zone. Les mesures annoncées dans le cadre du projet de loi de finances pour 1999,
avec notamment des dispositions fiscales en faveur de linnovation et la suppression
progressive de la part salariale incluse dans la base dimposition de la taxe
professionnelle, participent de la volonté du Gouvernement de favoriser
lamélioration de la compétitivité des entreprises françaises.
D.- LA POURSUITE DE LASSAINISSEMENT DE
NOS FINANCES PUBLIQUES
Votre Rapporteur général ne reviendra pas longuement sur les observations quil
a déjà pu formuler à de nombreuses reprises, et tout dernièrement lors du débat
dorientation budgétaire de juin dernier, sur la nécessité de poursuivre dans la
durée leffort dassainissement des finances publiques.
Le rétablissement engagé à la suite de laudit des finances publiques réalisé
en juillet 1997 a dailleurs très largement porté ses fruits, puisque la
France a pu se « qualifier » dans la première vague des onze Etats membres
participant à leuro. Le dynamisme des recettes en 1998, qui traduit avant tout une
croissance davantage tirée par la consommation, et donc porteuse de recettes de TVA plus
importantes que prévu, a de surcroît permis de réviser très légèrement la prévision
initiale des déficits publics au sens du traité de Maastricht. Ceux-ci passeraient ainsi
de 3% à 2,9%, principalement sous leffet dune diminution du besoin de
financement de lEtat.
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CAPACITÉ (+) OU BESOIN (-)
DE FINANCEMENT DES SOUS-SECTEURS DES ADMINISTRATIONS PUBLIQUES AU SENS DE LA COMPTABILITÉ
EUROPÉENNE
(en % du PIB) |
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1996 (a) |
1997 (a) |
1998 (b) |
1999 (b) |
Etat |
- 3,7% |
- 3,3% |
- 3,05 % |
- 2,7% |
Administrations de sécurité sociale |
- 0,6% |
- 0,6% |
- 0,15% |
0,15% |
Autres administrations : |
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- Organismes divers dadministration centrale (y
compris soulte France-Télécom) |
0,1% |
0,65% |
0,15% |
0,1 % |
- Administrations publiques locales |
0% |
0,2% |
0,15% |
0,15% |
Total des administrations publiques |
- 4,1% |
- 3,0% |
- 2,9 %(c) |
- 2,3% |
(a) Exécution. (b) Prévision.
(c) Prévision initiale : 3%.
Source : Ministère de léconomie, des finances et de
lindustrie. |
Avoir atteint lobjectif fixé pour 1998 ne signifie pas pour
autant que les déficits publics peuvent désormais rester au niveau de 3%. Un tel statu
quo nest pas tenable pour plusieurs raisons.
Tout dabord, il faut prendre en compte le caractère cyclique de
lévolution économique. Les économies ne sont pas à labri déventuels
retournements de conjoncture. Ceux-ci se traduisent par une dégradation presque
instantanée des rentrées fiscales, par une progression des dépenses (indemnisation du
chômage...) et donc des déficits publics. Sans lexistence dune marge
suffisante, le risque serait grand de dépasser rapidement la limite de 3% de déficits
publics, de connaître à nouveau un cycle dendettement et de sexposer aux
mesures prévues par le pacte de stabilité et de croissance. Ce dernier est en quelque
sorte un code de bonne conduite, nécessaire au bon fonctionnement de lUEM, qui
incite à gérer de façon saine les finances publiques en mettant à profit les phases de
croissance pour reconstituer des marges de manoeuvre.
Par ailleurs, retrouver la possibilité de financer de nouvelles actions utiles à la
croissance et à lemploi implique la maîtrise du besoin de financement des
administrations publiques. Les déficits publics nourrissent, en effet, la plus
improductive des dépenses, la dette, laquelle nest pas acceptable si elle
intervient pour financer des dépenses courantes, et non pour reporter, conformément à
ce qui est traditionnellement admis, sur les générations futures la charge
dinvestissements dont elles vont directement bénéficier.
Or, la dette publique a beaucoup progressé ces dernières années, passant de 45,3% du
PIB en 1993, à 58% en 1997. Cette croissance ne peut être entravée que si un excédent
primaire est dégagé (33).
Comme lindique le tableau ci-après, le projet de loi de finances pour 1999
représente une étape importante dans lassainissement des finances publiques,
puisque pour la première fois depuis bien longtemps, le solde primaire nest plus
négatif.
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ÉVOLUTION DU DÉFICIT
PRIMAIRE DE LETAT
(en milliards de francs) |
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1992 |
1993 |
1994 |
1995 |
1996 |
1997 |
Prévisions
1998 |
PLF 1999 |
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LFI |
Exécution |
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Solde total du budget de lEtat |
- 234,7 |
- 346 |
- 349,1 |
- 322,9 |
- 295,4 |
- 284,8 |
- 267,7 |
- 257,8 |
- 236,5 |
Charges nettes de la dette (hors FSC) |
157,1 |
162,9 |
186,0 |
208,6 |
220,2 |
232,6 |
222,8 |
234,8 |
237,2 |
Solde primaire |
- 77,6 |
- 183,1 |
- 163,1 |
- 114,3 |
- 75,2 |
- 52,2 |
- 44,9 |
- 23 |
0,7 |
(en % du PIB) |
- 1,1 |
- 2,6 |
- 2,1 |
- 1,5 |
- 1 |
- 0,6 |
- 0,6 |
- 0,3 |
0 |
Source : Cour des comptes. |
Pourtant, la charge de la dette devrait encore progresser lan
prochain : elle atteindrait 237,2 milliards de francs, mais sa croissance est
réduite à 1%, au lieu de 2,2% en 1998. En effet, si le solde primaire est lun des
déterminants de lévolution de la dette, il nest pas le seul. Ainsi, même en
présence dun solde primaire nul, le ratio dette/PIB saccroît dès lors que
le taux apparent de la dette est supérieur au taux de croissance du PIB en valeur. En
tout état de cause, le bon résultat en matière de solde primaire et la baisse des taux
dintérêt contribueront à limiter la progression de la part de la dette par
rapport au PIB, qui devrait atteindre 58,7% en 1999 contre 58,2% en 1998. Le but reste de
stabiliser le poids de la dette publique en lan 2000.
Lobjectif en matière de besoin de financement des administrations publiques
na, quant à lui, pas varié au regard de ce qui avait été annoncé lors du débat
dorientation budgétaire. Il devrait atteindre 2,3% en 1999.
Ainsi, sur les marges de manoeuvre offertes par la croissance retrouvée,
21 milliards de francs sont affectés à la réduction du besoin de financement.
Une des variables déterminantes de cette prévision densemble de 2,3% concerne
les administrations de sécurité sociale, lobjectif visé supposant un retour à
léquilibre du régime général en 1999. Son déficit pour 1998 devrait
sétablir à environ 13 milliards de francs selon les dernières estimations
disponibles. Pour 1999, ce régime serait légèrement excédentaire, à hauteur de
500 millions de francs. Ainsi, grâce à une amélioration de la situation de
lemploi, le Gouvernement a légèrement modifié sa prévision de juin
sagissant du besoin de financement des administrations de sécurité sociale, en
portant lexcédent prévu de 0,1 à 0,15%. Si la croissance des recettes permet de
prévoir de tels résultats, il nen reste pas moins que leffort pour
maîtriser la progression de la dépense ne doit pas se relâcher.
Certains ont pu déplorer que lintégralité des « fruits de la
croissance » ne soit pas affectée à la réduction des déficits. On remarquera
quà trop vouloir comprimer la dépense publique, certains ressorts de la croissance
peuvent se détendre, comme le montre lexemple du Japon, et, au bout du compte,
lon aboutirait à une aggravation de la situation des finances publiques. La voie
choisie est donc équilibrée, car elle concilie un assainissement à un rythme
soutenable, un financement de priorités du Gouvernement, notamment en matière
demploi, et la diminution de certains impôts.
CHAPITRE IV
LE BUDGET DOIT ÉGALEMENT FAVORISER LE RENFORCEMENT DE LA COHÉSION
SOCIALE, ENCORE TROP FRAGILE
Si, grâce à la croissance retrouvée, la situation de lemploi connaît une
première amélioration significative, lon ne saurait se satisfaire dune
situation où un français sur neuf est tenu à lécart du marché du travail :
un jeune actif sur quatre connaît le chômage, tandis que nombre dhommes et de
femmes plus âgés subissent un chômage de longue durée, qui exclut.
Il convient donc denrichir le contenu en emploi de cette croissance, par une
politique de lemploi ambitieuse, ce qui a été entrepris dès lan passé,
avec dabord le programme « nouvelles activités, nouveaux emplois » pour
les jeunes, avec ensuite la réduction du temps de travail qui, par-delà les textes,
repose sur un dialogue renouvelé entre les partenaires sociaux, avec, enfin, la recherche
dune meilleure prise en compte des impératifs de la reconquête de lemploi
dans notre système de charges sociales.
Par ailleurs, la croissance économique retrouvée doit contribuer à développer une
solidarité plus active et plus forte. Trop de nos compatriotes se trouvent exposés à
des situations dexclusion sociale, et des inégalités multiformes perdurent dans
notre société, qui appellent une double action. Action par la dépense dabord, en
portant à un niveau plus satisfaisant les dotations qui peuvent concourir à une
meilleure justice sociale, à une plus grande égalité des chances et à
lamélioration des conditions de vie quotidienne : santé, ville, logement,
éducation. Action par la fiscalité ensuite, en accentuant leffort de
rééquilibrage entre celle pesant sur le travail et celle affectant le capital et en
allégeant les impôts indirects, qui, proportionnellement, affectent plus lourdement les
ménages les moins favorisés.
A.- LE MARCHÉ ET LA POLITIQUE DE
LEMPLOI : DES PROGRÈS QUI RESTENT À AMPLIFIER
En 1997 et 1998, les créations nettes demplois auront été significatives, y
compris dans le secteur manufacturier. Il devrait en être de même en 1999.
Dans sa note de conjoncture de juin 1998, lINSEE a estimé à 385.000 postes
de travail supplémentaires, les créations nettes qui devraient être réalisées en
1998, soit une progression de 1,7% en glissement annuel.
1.- La contribution des différents secteurs
dactivité à lamélioration de lemploi
Le fait marquant de lannée 1998 est en effet quune telle amélioration
concerne désormais les différents secteurs dactivité, y compris ceux qui, comme
lindustrie manufacturière et le bâtiment, ont connu auparavant les évolutions les
plus défavorables.
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EVOLUTION DE LEMPLOI
PAR SECTEUR DACTIVITÉ
DE LA FIN DE 1996 À LA FIN DE 1998
TAUX DÉVOLUTION EN GLISSEMENT |
|
1996
(en %) |
1997
(en %) |
1998
(en %) |
Effectifs
occupés au
31 déc. 1998
(en milliers) |
Salariés des secteurs marchands non agricoles |
0,0 |
1,2 |
2,0 |
15.035 |
Industrie (y compris bâtiment) |
- 2,1 |
- 0,8 |
0,6 |
5.267 |
Industries agro-alimentaires |
- 0,4 |
1,1 |
0,7 |
533 |
Energie |
- 0,9 |
- 1,1 |
- 1,4 |
238 |
Bâtiment-génie civil et agricole |
- 3,7 |
-1,8 |
0,3 |
1.104 |
Industries manufacturières |
- 2,0 |
- 0,8 |
0,8 |
3.392 |
dont :
biens intermédiaires
|
- 1,5 |
- 0,7 |
- |
- |
|
- 1,6 |
- 0,7 |
- |
- |
Automobile |
- 2,0 |
- 1,0 |
|
- |
Biens de consommation |
- 2,9 |
- 0,9 |
|
- |
|
1,2 |
2,2 |
2,8 |
9.768 |
|
|
|
|
|
|
1,0 |
1,7 |
- |
- |
|
- 0,5 |
0,5 |
- |
- |
|
2,1 |
3,4 |
- |
- |
|
- 1,1 |
- 2,1 |
- |
- |
|
0,4 |
1,0 |
2,4 |
5.026 |
EMPLOI TOTAL (y compris salariés agricoles et non
salariés) |
- 0,1 |
0,8 |
1,7 |
22.746 |
Source : INSEE, Note de
conjoncture, juin 1998. |
En 1997, la reprise de lactivité économique avait déjà
entraîné une amélioration de lemploi salarié dans le secteur privé, en
progression de 1,2%, cest-à-dire de 160.000 emplois supplémentaires.
La note de conjoncture de lINSEE du mois de juin 1998 montre que le secteur
tertiaire marchand a enregistré un gain net de plus du double du volume observé en 1996
(2,2%, soit 200.000 créations nettes). Si les pertes demplois ont diminué dans
lindustrie et le bâtiment, ce dernier secteur a encore perdu 5.000 emplois chaque
trimestre en 1997, soit une baisse annuelle de 1,8%. Les branches industrielles ont, de
même, globalement détruit plus demplois quelles nen ont créés, 1%
environ dans chaque secteur, sauf pour les industries agricoles et alimentaires où le
volume net des créations a progressé de 1,1%.
La progression a atteint 3,4% dans les services marchands, cette évolution étant
surtout due à lactivité du travail temporaire. Les commerces et les transports ont
également été créateurs nets demplois en 1997, avec des taux de croissance de
respectivement 1,7% et 0,5%. Lemploi salarié dans le secteur tertiaire non
marchand (administration, éducation, santé et action sociale) a crû de 0,8% en raison
du démarrage des « emplois jeunes » et de la prolongation de nombreux
contrats emploi-solidarité par des contrats emplois consolidés.
Ces résultats sont corroborés par ceux de lenquête annuelle sur lemploi
menée par lINSEE sur la période allant de mars 1997 à mars 1998. Il en ressort
que le nombre de personnes ayant un emploi a augmenté de 275.000 pour atteindre un niveau
de population active occupée de 22,7 millions.
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POPULATION ACTIVE ET STATUT
DES EMPLOIS
(en milliers) |
|
Mars 1996 |
Mars 1997 |
Mars 1998 |
Population active |
Ensemble |
25.590 |
25.582 |
25.755 |
Hommes |
14.070 |
14.075 |
14.088 |
Femmes |
11.520 |
11.507 |
11.667 |
Population active occupée |
Ensemble |
22.492 |
22.430 |
22.705 |
Hommes |
12.611 |
12.552 |
12.651 |
Femmes |
9.881 |
9.878 |
10.054 |
Proportion dactifs
occupés à temps partiel (%) |
Ensemble |
15,8 |
16,6 |
17,1 |
Hommes |
5,2 |
5,4 |
5,6 |
Femmes |
29,5 |
30,9 |
31,6 |
Statut des emplois |
Non salariés |
2.932 |
2.864 |
2.802 |
Salariés |
19.561 |
19.566 |
19.904 |
|
|
|
|
|
273 |
330 |
413 |
|
790 |
849 |
906 |
|
219 |
234 |
257 |
|
451 |
417 |
405 |
Source : INSEE Première,
n° 593, juin 1998. |
Comme les enquêtes précédentes, cette enquête annuelle a mis en
évidence une poursuite de la progression des formes particulières demploi
salarié. Plus de la moitié de la hausse de lemploi est due à des emplois à
durée limitée. Entre mars 1997 et mars 1998, le nombre de personnes occupant une telle
forme demploi a augmenté de 151.000 pour atteindre un niveau proche des
2 millions. 44% des jeunes ayant un emploi sont, par exemple, intérimaires,
apprentis, en contrat à durée déterminée ou en contrat aidé.
Les services marchands aux entreprises, qui constituent la composante la plus dynamique
de lemploi, comportent une forte part de travail intérimaire. En mars 1998, le
nombre de salariés intérimaires a été estimé à 83.000, soit une augmentation de 25%
en un an et de 51% depuis le mois de mars 1996. A la même date, le nombre des apprentis
avait augmenté de plus de 23.000 (soit + 10% en un an) pour atteindre
257.000 personnes, et celui des contrats à durée déterminée avait progressé de
57.000 (+ 7%).
Ces données devraient conduire à relativiser les discours, quelque peu convenus, sur
linsuffisante « flexibilité » du marché français du travail par
rapport à celui de certains de ses concurrents. Pour autant, ces résultats devraient
être appréciés en distinguant les « stocks » et les « flux ».
Autant il serait dommageable que puisse durablement se créer une situation dans laquelle
certains travailleurs ne pourraient bénéficier demplois à durée indéterminée,
autant il est préférable quentre lactivité traditionnelle et le non-emploi,
une forme de transition existe, qui contribue à éviter que certains soient trop
longtemps écartés du marché du travail.
Lamélioration de lemploi sest poursuivie en 1998, comme il ressort
des estimations réalisées par lINSEE daprès les résultats des enquêtes
trimestrielles ACEMO qui portent sur lensemble des salariés des établissements de
10 salariés et plus des secteurs concurrentiels.
On observe quelques évolutions encourageantes. Ainsi, lindustrie aura créé
des emplois pour la première fois depuis trois ans (8.000 emplois, soit une
progression de 0,2%). Le bâtiment, secteur dans lequel les suppressions nettes
demplois lemportent, depuis 1995, suivant un rythme de suppressions de
10.000 emplois par trimestre en 1996 et de 5.000 emplois par trimestre en 1997,
a clos le premier trimestre 1998 avec la création de 1.200 emplois supplémentaires.
Le secteur tertiaire marchand a vu une progression de ses emplois de lordre de
86.000 (+ 1%), soit son meilleur chiffre depuis dix ans.
Au total, le secteur privé a créé 95.200 emplois supplémentaires (+ 0,7%) au
premier trimestre 1998, ce qui marque une accélération par rapport au dernier trimestre
de 1997.
Au deuxième trimestre de 1998, lemploi salarié a augmenté de
64.000 postes (+ 0,5%) dans les secteurs privé et semi-public (hors
agriculture, administrations et santé). Sur un an, le secteur privé aura ainsi créé
279.000 emplois (+ 2,1%).
Un ralentissement important observé dans le secteur de lintérim est analysé
comme lindice que le secteur de lindustrie embaucherait désormais
directement, cest-à-dire que se réaliserait un commencement de transfert des
emplois de courte durée vers des emplois de plus longue durée. Plus de 90% des emplois
supplémentaires créés au deuxième trimestre lont été dans le secteur tertiaire
(58.900). Il convient de relever que la hausse des effectifs du secteur de la construction
sest interrompue au deuxième trimestre (- 0,5%).
Selon les chiffres de lUNEDIC, 168.600 emplois ont été créés au premier
semestre de 1998, soit presque autant que pour toute lannée 1997 (188.200).
Ces créations demplois ont permis de faire reculer le taux de chômage après
deux années consécutives de hausse. Après avoir fortement augmenté en 1993 et au
début de lannée 1994, le chômage a décru au cours du deuxième semestre de 1994
et au premier semestre de 1995. Il navait cessé de progresser depuis le troisième
trimestre de 1995 (11,3% en mars 1993, 12,5% en mars 1994, 11,7% en mars 1995, 12,3%
en mars 1996, 12,5% en mars 1997 et 11,8% en mars 1998).
2.- Une diminution globale du nombre des
chômeurs en 1998
Le chômage correspond à la différence entre la population active totale et la
population active occupée. Selon lenquête annuelle sur lemploi, le nombre
des chômeurs a diminué de 102.000 entre mars 1997 et mars 1998. Le taux de chômage au
sens du BIT a ainsi décru de 0,5 point en un an pour revenir à 11,8% de la
population active, ce qui correspond à 3.050.000 demandeurs demplois inscrits
à lANPE. Une telle diminution fait suite à deux années daugmentation
(3.099.000 en 1996 et 3.152.000 en 1997).
La note de conjoncture de lINSEE de juin 1998 prévoit que le taux de chômage
devrait continuer à fléchir, pour sétablir à 11,5% de la population active à la
fin de lannée.
Si lon considère les demandeurs demplois inscrits à lANPE au titre
de la catégorie 1 (34), leur nombre a
été ramené à 2.889.800 au mois de mars 1998, alors quil avait à nouveau franchi
la barre des 3 millions en 1996 et 1997.
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EVOLUTION MENSUELLE DES
DEMANDES DEMPLOI EN FIN DE MOIS (CATÉGORIE 1)
(en milliers) |
|
1996 |
1997 |
1998 |
Janvier |
+ 10,5 |
+ 4,4 |
- 11,9 |
Février |
+ 20,5 |
- 6,2 |
- 8 |
Mars |
+ 7,4 |
+8,1 |
- 25,3 |
Avril |
- 1,4 |
- 3,3 |
- 11,4 |
Mai |
+ 17,8 |
+ 18,3 |
- 14,9 |
Juin |
+ 16,5 |
+10,1 |
- 27,2 |
Juillet |
- 0,7 |
- 13 |
- 0,8 |
Août |
+ 19 |
+4,9 |
+ 33 |
Septembre |
+ 18,9 |
- 9,8 |
- |
Octobre |
- 8,8 |
- 7,5 |
- |
Novembre |
+ 6,7 |
- 11,4 |
- |
Décembre |
- 5,8 |
- 39,6 |
- |
Source : INSEE-DARES, Premières
informations, 30 juin 1998. |
En une année, daoût 1997 à août 1998, 130.000 chômeurs de
moins ont été comptabilisés dans la catégorie 1.
Lamélioration doit être saluée, autant par ses résultats que par les
promesses quelle contient, car le recul du chômage contribue fortement à
lamélioration des anticipations des ménages. La remontée du nombre de demandeurs
demploi de catégorie 1 au mois daoût semble beaucoup tenir au poids de
lintérim sur le marché de lemploi. Le mois daoût est
traditionnellement un mois de fins de mission dintérim. Il nen demeure pas
moins quen termes de comparaisons internationales, la France reste dans une
situation toujours défavorable par rapport à la moyenne de lUnion européenne
(10,9% soit un point de moins que le résultat français), des pays européens de
lOCDE (9,9%, soit deux points de moins que le résultat français) ou de lOCDE
(7,1%, soit 4,8 points au-dessous du résultat français).
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COMPARAISON INTERNATIONALE
DES TAUX DE CHÔMAGE
(en % de la population active) |
|
1996 |
1997 |
1998 (a) |
1999 (a) |
France |
12,3 |
12,4 |
11,9 |
11,3 |
Allemagne |
11,4 |
11,4 |
11,5 |
11,1 |
Royaume-Uni |
8,0 |
6,9 |
6,8 |
7,2 |
Pays-Bas |
6,7 |
5,6 |
5,1 |
4,8 |
Italie |
12,1 |
12,3 |
12,0 |
11,8 |
Suède |
8,1 |
8,0 |
6,7 |
6,2 |
Union européenne |
11,4 |
11,2 |
10,9 |
10,5 |
OCDE Europe |
10,5 |
10,2 |
9,9 |
9,5 |
Etats-Unis |
5,4 |
4,9 |
4,8 |
5,0 |
Japon |
3,4 |
3,4 |
3,5 |
3,6 |
OCDE |
7,5 |
7,2 |
7,1 |
7,0 |
(a) Prévisions. Source :
OCDE, Perspectives de lemploi, 1998. |
3.- Une amélioration encore
trop inégale selon les catégories de demandeurs demploi
Au premier trimestre de 1998, lamélioration de la situation du marché du
travail a principalement bénéficié aux chômeurs de moins de 25 ans (- 3,9%
pour les demandes demploi de catégorie 1), la situation sétant à
nouveau dégradée pour les demandeurs demplois âgés de 50 ans et plus
(+ 4,7%). Les inscriptions résultant dun licenciement économique ont, elles,
continué de baisser (- 21,5%).
Le chômage de longue durée nest donc pas encore touché par le
fléchissement du niveau du chômage.
Lancienneté moyenne dans le chômage sest accrue, passant de 15 à
16 mois, et la proportion des personnes en chômage de longue durée a continué de
progresser : 41,1% des demandeurs demploi après 38,9% en 1997 et 36,9% en
1996.
Or, le chômage de longue durée est le facteur le plus générateur dexclusion
sociale. Dès lors quun fléchissement des niveaux du chômage ne saccompagne
pas immédiatement dun recul du chômage de longue durée, il convient de maintenir
et dadapter les politiques spécifiques ciblées sur les catégories de chômeurs
qui sont le plus écartées du marché du travail en raison de son fonctionnement de plus
en plus sélectif.
4.- La nécessité daccroître
lefficacité des politiques spécifiques de lemploi
Ces dispositifs ont pour objectif la création demplois pour des publics
particulièrement vulnérables ou la diminution directe du chômage par le biais de
retraits dactivité définitifs (pré-retraites) ou transitoires (stages de
formation professionnelle).
En 1997, 10% des salariés étaient employés au titre dun des dispositifs
demploi aidé. Le nombre de bénéficiaires présents en fin dannée
sélevait à 2,4 millions, soit un chiffre quasiment stable par rapport à
1996. Lannée 1997 a toutefois été marquée par un nouveau recul des entrées dans
les dispositifs spécifiques de la politique de lemploi, ce qui témoigne de leur
« recentrage » au bénéfice des personnes ayant le plus de difficultés à
accéder au marché du travail. En 1997 enfin, les dispositifs généraux
dallégement du coût salarial ont eu une place importante dans la politique de
lemploi. Mais leur coût important (43 milliards de francs pour le dispositif
dallégement des charges sociales sur les bas salaires) doit inciter à rechercher
les moyens par lesquels leurs conditions de financement pourraient être améliorées en
termes économiques et budgétaires (35)
Si le nombre des jeunes recrutés dans le cadre des mesures dalternance a
sensiblement augmenté, le lancement du programme « nouveaux services, nouveaux
emplois » (emplois jeunes) a permis de stabiliser les entrées dans les dispositifs
des emplois aidés du secteur non marchand, malgré le recul du nombre des contrats
emploi-solidarité.
Les chiffres globaux recouvrent des évolutions différentes selon les catégories
demplois en cause. Une progression de lemploi aidé dans le secteur marchand
(+ 4,2%) a accompagné une quasi-stabilité des emplois non marchands (0,1%).
Si lon considère les entrées dans les dispositifs spécifiques, les mesures
daide à lemploi marchand ont reculé de 4,7%. Cette diminution résulte de la
contraction des contrats initiative emploi. Ces contrats visent à faciliter
linsertion professionnelle des personnes les plus éloignées de lemploi,
comme les chômeurs de longue durée ou les allocataires du revenu minimum
dinsertion. Laide à laquelle ils ouvrent droit est modulée en fonction de la
situation des personnes embauchées. Si cette modulation, instituée au milieu de
lannée 1996, a fait diminuer le nombre global des entrées dans le dispositif, elle
a contribué à augmenter la part des bénéficiaires inscrits à lANPE depuis plus
de trois ans ou des allocataires du RMI.
Pour leur part, les embauches ou transformations demploi ouvrant droit à
labattement de charges sociales pour lemploi à temps partiel ont progressé
en relation avec les fortes créations demplois intervenues dans le secteur
tertiaire.
Lexonération de charges sociales pour lembauche dun premier salarié
a également progressé. Environ 77.000 salariés ont été recrutés à ce titre, la
très grande majorité dentre eux sous contrat à durée indéterminée (96,5%) et,
pour les trois quarts des embauches, à temps plein. Les demandeurs demploi au
moment de lembauche occupent 51% des emplois offerts.
Il convient de relever également limportante progression des entrées en
conventions de coopération, qui assurent une aide à lembauche des demandeurs
demploi inscrits depuis plus de huit mois à lANPE (+ 46,5%, soit 24.580
personnes).
Les embauches aidées dans le secteur non marchand ont été marquées par un
redéploiement, des contrats emploi-solidarité vers les contrats emplois consolidés et
le programme « nouveaux services, nouveaux emplois ».
Selon les estimations de la Direction de lanimation de la recherche et des
études statistiques du ministère de lemploi et de la solidarité (DARES), au
total, près de 20.000 emplois supplémentaires ont été créés en 1997 grâce aux
politiques spécifiques à lemploi.
La ristourne unique dégressive a concerné près de 5 millions de salariés, et
toujours selon la DARES, aurait, sans prise en compte du financement de la mesure, créé
ou préservé 40.000 emplois.
|
|
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|
NOMBRE DENTRÉES ET
DE PERSONNES PRÉSENTES
DANS LES DISPOSITIFS SPÉCIFIQUES |
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1995 |
1996 |
1997 |
|
Entrées |
Effectifs au 31/12 |
Entrées |
Varia-tion 96/95 (%) |
Effectifs au 31/12 |
Varia-tions 96/95 (%) |
Entrées |
Varia-tions 97/96
(%) |
Effectifs au 31/12 |
Varia-tions 97/96 (%) |
Emploi marchand aidé |
1.053.332 |
1.399.573 |
1.026.912 |
- 2,5 |
1.525.300 |
9,5 |
978.541 |
- 4,7 |
1.596.900 |
4,2 |
Emploi marchand non aidé |
699.907 |
444.860 |
627.429 |
- 10,4 |
410.455 |
- 7,7 |
629.145 |
- 0,3 |
410.729 |
0,1 |
Actions de formation |
443.944 |
116.200 |
432.046 |
- 2,7 |
117.800 |
1,4 |
404.448 |
- 6,4 |
119.700 |
1,6 |
Actions de restructurations et préretraites (avec ARPE) |
208.499 |
277.607 |
278.784 |
33,7 |
339.759 |
22,4 |
250.879 |
- 10,0 |
323.209 |
- 4,9 |
Ensemble |
2.405.682 |
2.238.240 |
2.364.871 |
- 1,7 |
2.400.314 |
7,2 |
2.263.013 |
- 4,3 |
2.450.538 |
2,1 |
Source : Ministère de
lemploi et de la solidarité. |
Selon les données provisoires établies par la DARES, pour le premier
trimestre de 1998, en ce qui concerne les entrées dans les dispositifs spécifiques de la
politique de lemploi, les nouveaux bénéficiaires augmentent pour le deuxième
trimestre consécutif (+ 2,5% au premier trimestre 1998, après 4,8% au quatrième
trimestre de 1997). Un tel résultat résulte dabord des entrées dans les
dispositifs daide à lemploi dans le secteur marchand (+ 7,8% au premier
trimestre de 1998 par rapport au premier trimestre de 1997).
5.- Le choix dune politique de
lemploi ambitieuse
Laction du Gouvernement sest exercée à la fois à léchelon
européen et sur le plan national.
Au niveau communautaire, il a fortement contribué au choix fait, lors du Conseil
européen extraordinaire de Luxembourg sur lemploi des 20 et 21 novembre 1997,
dappliquer, par anticipation, les stipulations du traité dAmsterdam sur
lemploi, en particulier le nouvel article 128 du Traité CE.
Ces dispositions tendent à organiser une surveillance, par les instances
communautaires, du respect, par chaque Etat membre, dengagements pris au regard
dobjectifs fixés en commun, au niveau communautaire, et qualifiés de
« lignes directrices ». Ces engagements ne constituent pas des obligations de
résultat, sanctionnées comme le sont celles fixées, en matière monétaire, dans la
surveillance multilatérale organisée par le traité de Maastricht. Une réelle
surveillance résulte néanmoins de lexamen annuel du plan national pour
lemploi transmis, chaque année également, à la Commission et au Conseil par
chaque Etat membre avec un rapport sur les conditions de sa mise en uvre. Des
recommandations individuelles pourront être adoptées, à lunanimité,
jusquà lentrée en vigueur du Traité dAmsterdam, à la majorité du
Conseil après celle-ci.
Comme ces « lignes directrices » sinspireront des « bonnes
pratiques », cest-à-dire des mesures considérées, dans un rapport conjoint
de la Commission et du Conseil, comme ayant fait la preuve de leur efficacité pour
améliorer lemploi dans les pays où elles ont été appliquées, il devrait en
résulter une amélioration progressive du marché de lemploi en Europe.
Les lignes directrices pour 1998 fixent quatre objectifs généraux :
- lamélioration de la capacité dinsertion professionnelle,
- le développement de lesprit dentreprise,
- lencouragement de la capacité dadaptation des travailleurs et des
entreprises,
- le renforcement des politiques visant à légalité des chances.
Au niveau national, la stratégie suivie par le Gouvernement et sa majorité a été
exprimée ainsi dans le plan national daction pour lemploi présenté en
application des lignes directrices européennes précitées : « la stratégie
française pour lemploi se développe autour de trois axes : une croissance
plus forte, une croissance plus riche en emplois, une croissance qui puisse profiter à
tous ».
Par ses choix de politique économique, le Gouvernement a contribué à garantir la
croissance la plus élevée possible et sest attaché à engager un ensemble
cohérent de réformes qui, dans le domaine budgétaire, fiscal et social, apparaissent de
nature à contribuer au maintien dune croissance durable.
La politique de lemploi est un élément fondamental de cet ensemble. Ses
objectifs sont :
- la négociation par les entreprises et les représentants des salariés des formes
novatrices dorganisation du travail et de la production qui permettront à ces
entreprises de sadapter plus facilement aux changements qui affectent leurs
marchés, tout en préservant lemploi de leurs salariés. Cest le sens de la
loi dorientation et dincitation à la réduction du temps de travail ;
- lincitation à la reprise dun emploi par ceux qui sont le plus
désavantagés par la sélectivité du marché du travail. Cest le sens de la loi
dorientation relative à la lutte contre les exclusions, en particulier par la
création du programme TRACE (Trajectoire daccès à lemploi) et la
possibilité de cumuler, dans certaines conditions, les minima sociaux avec les revenus
tirés dune activité professionnelle ;
- lallégement du coût du travail, en particulier pour les salaires les moins
élevés. Dores et déjà, la loi de finances pour 1998 a reconduit le dispositif
dallégement des charges sociales sur les bas salaires dit « ristourne
dégressive ». La loi de financement de la sécurité sociale pour 1998 a remplacé
la part salariale des cotisations sociales dassurance maladie par une augmentation
de la contribution sociale généralisée. Dautres dispositions vont dans le même
sens, comme, par exemple, le caractère forfaitaire de labattement de charges
patronales prévu par larticle 3 de la loi dorientation et dincitation
à la réduction du temps de travail.
Le projet budget de lemploi pour 1999 traduit lui-même cette volonté de
modifier lapproche traditionnelle du traitement social du chômage. Compte tenu des
acquis dune croissance économique consolidée, il sagit daider la
création demplois et daffecter prioritairement les moyens publics à
laccompagnement vers lemploi des personnes qui en sont aujourdhui le
plus éloignées. Le montant global du budget de lemploi sélèvera à
161,85 milliards de francs en 1999, hors dépenses pour les emplois-jeunes dans les
DOM, soit une augmentation de 4% par rapport à 1998 (+ 6,26 milliards de francs), ce
qui traduit son caractère prioritaire.
Le développement de lemploi, au-delà des effets de la croissance économique,
passe par la réduction du temps de travail, le programme « nouveaux services,
nouveaux emplois » et lallégement des charges sociales sur les bas salaires.
Le niveau excessif de celles-ci doit être corrigé. Mais il convient de trouver une
formule qui nait pas deffets pervers. Le système de la « ristourne
dégressive » montre dailleurs un certain nombre derreurs à ne pas
commettre : inciter au maintien de bas salaires et casser la reprise par un
financement inadapté.
Laide incitative à la réduction du temps de travail est prévue pour un montant
de 3,7 milliards de francs, à laquelle sajouteront les reports sur la provision
inscrite, en 1998, au budget des charges communes. Ce montant pourra faire lobjet
dajustements en fonction du rythme davancement des négociations qui
organiseront le passage anticipé aux 35 heures.
Le programme « nouveaux services, nouveaux emplois » (emplois jeunes) a
dores et déjà permis le développement de nouveaux services. Les engagements de
recrutements ont atteint environ 120.000 personnes au début du mois de septembre 1998.
14,3 milliards de francs sont inscrits dans le projet de budget pour 1999, dont 13,9
milliards au titre de celui de lemploi. 20% des emplois créés en 1999 et en 2000
concerneront les jeunes des quartiers en difficulté.
Le dispositif dallégement des charges sociales sur les bas salaires, dit
« ristourne dégressive », serait reconduit pour un montant de 43 milliards de
francs. Par ailleurs, les réflexions sur la réforme de lassiette des cotisations
sociales patronales, pour les rendre plus favorables à lemploi, ont été
relancées. Enfin, larticle 29 du présent projet prévoit de supprimer la fraction
des salaires incluse dans la base dimposition de la taxe professionnelle.
Le renforcement de laide apportée pour lemploi et linsertion des
catégories de chômeurs dont « lemployabilité » apparaît faible ou
qui risquent de demeurer à lécart des effets de la reprise économique, chômeurs
de longue durée, demandeurs demploi sans diplôme ou titulaires de minima sociaux,
se traduira par la mise en uvre de lengagement, qui figure dans le plan
national daction pour lemploi, doffrir un « nouveau
départ » aux jeunes, avant leur sixième mois de chômage, et aux autres demandeurs
demplois, avant leur douzième mois de chômage. Ce « nouveau départ »
se traduira par des entretiens de diagnostic et de suivi permettant des propositions
individualisées soit doffres demplois, soit de formation qualifiante, soit
daccompagnement personnalisé, au moyen dactions de formation pour une durée
de six mois contractualisée avec lANPE ou lAFPA, soit, enfin,
daccompagnement social individualisé en cas de problèmes personnels ou de
handicaps sociaux faisant lourdement obstacle à lemploi.
6.- Un dialogue social renforcé
Il est exact que le besoin de compétitivité indispensable dans un marché unifié aux
dimensions dun continent, lui même soumis aux effets de la mondialisation, impose
aux entreprises une continuelle modernisation.
Rien nimpose, en revanche, que ce nouvel état du marché soit nécessairement
cruel au salarié, passé lépisode des « Trente Glorieuses », comme
sil lui revenait, par essence, de prendre sur soi pour supporter, désormais, tout
le poids des efforts dadaptation, et que le propre de cette bonne
« gouvernance », tant invoquée dans le langage à la mode, consiste à
répartir cette charge en donnant les chances de dividendes à quelques-uns et les risques
de licenciements à tous les autres.
Au contraire, la compétitivité comportera une dimension sociale croissante. Dès lors
quune meilleure organisation du travail devient un impératif même de cette
compétitivité, il est impensable que les salariés, quelle implique au premier
chef, puissent demeurer plus longtemps en dehors du processus de décision qui la
concerne.
Il fallait donc tendre à changer les pratiques françaises de concertation sociale
pour que les conditions de cette modernisation indispensable soient généralement
discutées, et pas seulement lorsque ses conséquences se font sentir, et pour que la
considération croissante exigée des dirigeants dentreprises par les actionnaires
et les clients ne les dispense pas de maintenir celle due aux salariés.
Au reste, rien nempêche de souhaiter que les actionnaires eux-mêmes
considèrent mieux que la bonne marche sociale de la société dont ils ont la
propriété, est de nature à rendre celle-ci plus compétitive et quils en fassent
un élément supplémentaire dans la mise en uvre de la responsabilité des
dirigeants qui leur appartient statutairement. Pour le salarié lui-même, la
réorganisation du travail peut, dailleurs, aller de pair avec lenrichissement
de son contenu, enrichissement qui peut, lui-même, être légitimement considéré comme
un progrès social.
Cest pourquoi il faut se réjouir que la loi dorientation et
dincitation à la réduction du temps de travail aboutisse à généraliser une
négociation effective sur lorganisation du travail et que, passé le temps des
déclarations péremptoires, ces négociations se soient ouvertes dans de nombreuses
branches professionnelles et dans de nombreuses entreprises.
De la même façon que le marché et la monnaie uniques ne doivent pas impliquer une
régression sociale dans lentreprise, ils nimposent aucune paupérisation de
laction et de la fonction publiques, du fait de la mise en compétition des
systèmes de prélèvements obligatoires.
Autant les réformes de lEtat et des modes daction publique sont
indispensables, autant il est évident que cet effort dadaptation sera facilité si
les agents des trois fonctions publiques ont le sentiment dêtre considérés et
dy être encouragés plutôt que « punis ». Il faut dailleurs
relever, contrairement à certaines analyses sommaires, que le propre dune fonction
publique de carrière, telle quelle a été organisée, en France, en 1946, notion
réaffirmée en 1983, 1984 et 1986, est bien de favoriser la progression des individus et
leur adaptation, par rapport à une fonction publique demploi qui se bornerait à
pourvoir, au jour le jour, les postes disponibles.
Cest pourquoi laccord sur le relevé de conclusions concernant le
dispositif salarié 1998-1999 dans les trois fonctions publiques, qui prévoit une mesure
générale de revalorisation salariale de 2,6% sur deux ans et des mesures en faveur des
bas salaires, peut être considéré comme le préalable nécessaire au développement
dune stratégie de plus grande adaptation aux besoins des usagers et aux changements
qui affectent lenvironnement dans lequel se déploie laction des
collectivités publiques. En ce qui concerne le temps de travail, ce relevé prévoit
ainsi que lapproche en la matière sera « liée à lorganisation
administrative et à la qualité des services rendus à lusager ». Une
mission de recensement de ces pratiques et de la réglementation, secteur par secteur, est
dores et déjà engagée.
B.- LA LUTTE CONTRE LES INÉGALITÉS
DANS LA SOCIÉTÉ FRANÇAISE : UN CHANTIER TOUJOURS RENOUVELÉ
Alors que nous nous apprêtons à célébrer le cinquantième anniversaire de la
Déclaration universelle des droits de lhomme, adoptée le 10 décembre 1948
par lAssemblée générale des Nations Unies, il faut bien constater que, si notre
pays garantit de façon satisfaisante légalité juridique et légalité
politique de tous les citoyens, des progrès sensibles sont encore à accomplir pour
réaliser la troisième étape discernée par Tocqueville dans la marche des sociétés
vers une plus grande égalité : celle qui touche aux conditions matérielles de
lexistence. On ne saurait affirmer, en effet, que la France - comme les autres
Etats dailleurs - ait totalement atteint « lidéal commun »
fixé par larticle 25 de la Déclaration précitée : « Toute
personne a droit à un niveau de vie suffisant pour assurer sa santé, son bien-être et
ceux de sa famille, notamment pour lalimentation, lhabillement, le logement,
les soins médicaux, ainsi que pour les services sociaux nécessaires ».
Il nous appartient donc de mettre à profit le retour de la croissance pour lutter
contre la précarité, veiller au respect des droits fondamentaux et favoriser
légalité des chances. On peut, à cet égard, se réjouir que les crédits
consacrés à la lutte contre lexclusion passent de 2,4 milliards de francs en
1998 à 7,7 milliards de francs dans le projet de loi de finances pour 1999.
1.- Lutter contre la précarité
Lindicateur le plus net des inégalités est celui des écarts de revenus. Or,
tous emplois confondus, la dispersion des salaires a augmenté dans des proportions
importantes entre 1983 et 1997 : lécart de salaires entre les 10% de salariés
les mieux rémunérés et les 10% les moins bien payés est ainsi passé de 2,8 à 4 entre
ces deux dates (36). Cette évolution est
surtout imputable à laccroissement du nombre des salariés percevant des bas
salaires, puisque, durant cette période, la proportion des salariés occupant des emplois
à bas salaires (salaires inférieurs ou égaux aux deux tiers du salaire médian, soit,
en 1997, 4.867 francs net) est passée de 11,4% à 15,1%.
Cet accroissement des inégalités salariales, nest pas sans conséquences sur le
développement de la pauvreté qui touche moins désormais les ménages de retraités,
mais qui affecte de plus en plus les ménages dactifs, en particulier les jeunes,
dont le taux de pauvreté a doublé entre 1984 et 1994, passant de 9,3% à 18,5%.
Dans mon précédent rapport général sur le projet de loi de finances pour 1998,
jai déjà eu loccasion de consacrer un développement aux populations en
situation de précarité (37). Je me
contenterai donc de rappeler que, selon diverses enquêtes menées par lINSEE (38) ou par linstitut statistique européen
EUROSTAT (39), 10% des ménages français,
soit près de 6 millions de personnes, vivraient en dessous du seuil de pauvreté,
fixé par convention à 50% de la valeur médiane des revenus en France, soit
3.800 francs pour une personne seule. Les individus menacés par la pauvreté sont
cependant bien plus nombreux et, dans un rapport, publié en 1993, « Précarité
et risque dexclusion en France », le Centre détude des revenus et
des coûts (CERC) affirmait : « Au total, le nombre de personnes qui
échappent à la pauvreté ou à une précarité financière grâce aux différents
mécanismes de notre protection sociale est probablement de lordre de douze à
treize millions ».
La loi dorientation du 29 juillet 1998 relative à la lutte contre les exclusions
contient plusieurs dispositions destinées à garantir les moyens dexistence des
plus démunis. Elle prévoit, en particulier, une interdiction de la saisie des revenus
assurant un niveau de vie minimal (fixation dun minimum de revenu salarial
insaisissable, caractère insaisissable de lallocation de solidarité spécifique,
de lallocation dinsertion, ainsi que des prestations dassurance maladie
en nature...) et des mesures pour les ménages durablement insolvables.
Le chômage ne saurait être confondu avec la pauvreté, mais les chômeurs forment le
groupe de la population le plus exposé. Entre 1984 et 1994, la part des pauvres chez les
ménages de chômeurs est ainsi passée de 32 à 39% et ceux-ci représentent désormais
un quart des personnes pauvres.
De même, la pauvreté liée aux emplois peu stables (contrats à durée déterminée,
intérim, stages, temps partiel subi...) est de plus en plus fréquente. Plus de
300.000 ménages seraient concernés.
Dans ces conditions, on ne peut quapprouver les mesures pour lemploi
contenues dans la loi dorientation du 29 juillet 1998 précitée, prévoyant
notamment un accompagnement personnalisé en faveur des jeunes de 16 à 25 ans
confrontés à un risque dexclusion professionnelle (le dispositif TRACE) ou encore
la possibilité de cumuler certains minima sociaux avec les revenus procurés par la
reprise dune activité professionnelle, afin que, globalement, notre dispositif
reste incitatif.
Les mesures prévues par le présent projet de loi de finances (lutte contre
lévasion fiscale des grandes fortunes, intégration de la majoration de 10% dans le
barème de cet impôt, relèvement du taux maximum dimposition) apparaissent
également très opportunes pour contribuer à leffort de solidarité nationale.
Dans son récent rapport dinformation sur la fiscalité du patrimoine et de
lépargne (40), votre Rapporteur
général a déjà insisté sur la persistante concentration des patrimoines. Il ressort,
en effet, du seizième rapport du Conseil des impôts que plus de la moitié du patrimoine
est détenu par 10% des ménages. Cette concentration bénéficie, en outre, aux ménages
disposant, par ailleurs, des plus hauts revenus, puisque les 10% de ménages aux plus
hauts revenus détiennent plus du tiers du patrimoine. Même si on observe une baisse
- relative - de la concentration et une diminution des inégalités de
patrimoine depuis la fin des années quatre-vingt, votre Rapporteur général tient à
réaffirmer qu« il nest pas besoin dêtre un
partageux, pour estimer nécessaire la poursuite de ce mouvement »,
dautant que dimportants moyens financiers sont nécessaires pour veiller au
respect des droits fondamentaux.
2.- Veiller au respect des droits
fondamentaux
Les inégalités ne se traduisent pas uniquement en termes dinsuffisance de
ressources. Des personnes que les statistiques situent au-dessus du seuil de pauvreté
peuvent malheureusement souffrir dinégalités dans des domaines aussi vitaux que
laccès aux soins, lalimentation et/ou le logement.
a) Laccès aux soins
Selon une récente enquête du Centre de recherche, détude et de documentation
en économie de la santé (CREDES), linégalité dans laccès aux soins
sest aggravée au cours des années quatre-vingt, alors que la progression du niveau
de couverture dassurance maladie de la population progressait sensiblement sur la
même période (toutefois 100.000 à 200.000 personnes ne bénéficieraient
daucune couverture sociale). Cette étude montre également quun quart des
Français renoncent régulièrement à des soins de santé pour des motifs financiers. Il
est également significatif que la mortalité des bénéficiaires du RMI soit deux à
trois fois plus élevée que celle de lensemble de la population, à âge égal.
La loi dorientation relative à la lutte contre les exclusions a déjà prévu la
mise en place, dans tous les hôpitaux, de permanences daccès aux soins de santé
(PASS) et leur a imposé un devoir de suivi des traitements. Sappuyant sur les
conclusions du rapport de notre collègue Jean-Claude Boulard, « Pour une couverture
maladie universelle base et complémentaire », un projet de loi sur le droit
à un égal accès à la prévention et aux soins devrait être soumis prochainement au
Parlement, afin doffrir une couverture maladie universelle et une couverture
complémentaire, sous condition de ressources, visant à éviter les avances de frais pour
les plus démunis. Le présent projet de loi de finances favorise également laccès
aux soins en prévoyant une baisse de la TVA sur les appareillages très onéreux
destinés aux diabétiques et à certains handicapés.
b) Les problèmes alimentaires
On assiste, depuis les années quatre-vingt, à une résurgence des problèmes
alimentaires dans lensemble des pays développés occidentaux. En France, selon les
derniers chiffres rendus publics, la valeur des denrées alimentaires distribuées par
plus de 3.000 associations a atteint 490 millions de francs en 1994, soit
léquivalent de 63,6 millions de repas.
A cet égard, après que le décret davance du 9 juillet 1997 eut ouvert
145 millions de francs au profit du budget de lenseignement scolaire, afin de
faciliter laccès des enfants défavorisés aux cantines scolaires, la loi
dorientation relative à la lutte contre les exclusions a rétabli les bourses des
collèges, prévoyant un mécanisme de précompte automatique des frais de cantine.
c) Le droit au logement
La notion de droit au logement est apparue pour la première fois dans notre
législation dans larticle premier de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989
tendant à améliorer les rapports locatifs. Dans sa décision relative à la loi
n° 95-74 du 2 janvier 1995 relative à la diversité de lhabitat, le
Conseil constitutionnel a même considéré « que la possibilité pour toute
personne de disposer dun logement décent est un objectif de valeur
constitutionnelle ».
Pourtant, le Haut comité pour le logement des personnes défavorisées évalue à
environ 200.000 le nombre de personnes exclues du logement.
En outre, même si ces quinze dernières années le confort des logements sest
nettement amélioré (en 1996, 89% des ménages pauvres disposent dans leur logement des
équipements sanitaires de base, contre 69% en 1984), plus dun ménage pauvre sur
quatre vit dans un logement que lon peut considérer comme surpeuplé (41). Cette situation est liée notamment à la diminution
régulière des logements à bas loyer, imputable, entre autres, à la modernisation et à
la réhabilitation du parc HLM ou du parc privé.
En ce domaine également, la loi relative à la lutte contre les exclusions a prévu
des mesures importantes : création, dans chaque département, dun dispositif
de veille sociale chargé de gérer les capacités dhébergement disponibles pour
les personnes en difficulté ; prévention des expulsions ; modernisation du
régime de réquisition des logements ; institution dune taxe sur les logements
vacants ; réforme du système dattribution des logements locatifs sociaux...
Plusieurs autres dispositions pourraient figurer dans le prochain projet de loi sur
lhabitat, mais, dores et déjà, le présent projet de loi de finances propose
de baisser la TVA sur les travaux damélioration réalisés par les bailleurs
privés de logements sociaux et de mettre en place un statut du bailleur conventionné,
accessible aux propriétaires bailleurs acceptant une contrepartie sociale.
3.- Favoriser légalité des
chances
La société des Égaux préconisée par Gracchus Babeuf est illusoire, mais du moins
faut-il que tout individu, quelles que soient ses origines sociales ou géographiques,
puisse faire valoir ses mérites. Il convient donc de promouvoir légalité des
chances en permettant à tous laccès à léducation et à la culture, ainsi
que le plein exercice de la citoyenneté, et en réduisant les inégalités territoriales.
a) Laccès à léducation et à la culture
Dans son introduction au rapport dinformation décrivant les dispositifs de la
loi relative à la lutte contre les exclusions, M. Jean Le Garrec précise
que « 53.000 jeunes sortent toujours chaque année du système scolaire sans
qualification » et qu« un enfant de cadre a trois fois plus de
chances dobtenir le baccalauréat quun enfant douvrier » (42). On peut ajouter quen 1996, plus dun
jeune homme sur dix se présentant à la sélection dans le cadre du service national
avait des problèmes de lecture (43).
La « charte pour bâtir lécole du XXIe siècle » présentée
récemment par le ministre de léducation nationale, de la recherche et de la
technologie, de même que la hausse de 29,1% des crédits daction sociale du budget
de lenseignement scolaire dans le projet de loi de finances pour 1999 constituent
une première réponse à ces défis. Par ailleurs, comme lobserve notre collègue
sénateur Franck Sérusclat, dans son rapport sur les techniques des apprentissages
essentiels pour une bonne insertion dans la société de linformation (44), la mise à disposition dordinateurs dans les
écoles est un « impérieux devoir du système éducatif » pour
permettre à tous les enfants daccéder à cet outil.
b) Le plein exercice de la citoyenneté
En la matière, la loi sur lexclusion a déjà simplifié linscription des
personnes sans domicile fixe sur les listes électorales. Il convient également de
garantir légalité des droits des hommes et des femmes. Même si la part des femmes
parmi les cadres et professions intellectuelles supérieures est passée de 27% à 34%
entre 1986 et 1996, des mesures devront être prises pour assurer une répartition plus
équilibrée des responsabilités (rappelons dailleurs quen 1995, une femme
cadre gagnait 24% de moins que son collègue masculin (45)).
Ce rééquilibrage pourra sappliquer aussi à lexercice des mandats électifs,
grâce au projet de loi constitutionnelle relatif à légalité entre les femmes et
les hommes.
c) La réduction des inégalités territoriales
Comme lindique lexposé des motifs du projet de loi dorientation pour
laménagement et le développement durable du territoire, « lacuité
des inégalités entre les régions ou en leur sein sest renforcée dans les
dernières décennies ». Le niveau de vie des Parisiens et, dans une moindre
mesure, des habitants du reste de lagglomération parisienne est ainsi largement
supérieur à celui des autres Français (46).
Le projet de loi précité devrait pouvoir permettre de compenser les handicaps
territoriaux des zones défavorisées, zones rurales et de montagne notamment, et
favoriser lémergence de nouveaux pôles de développement.
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volume 1 du rapport
() Outre la France, les pays de la zone euro sont
lAllemagne, lAutriche, la Belgique, lEspagne, la Finlande,
lIrlande, lItalie, le Luxembourg, les PaysBas et le Portugal.
() Perspectives économiques, n° 63, juin
1998.
() NDLR : 0,75%.
() Perspectives économiques, n° 63, juin
1998.
() Allemagne (Deutsche Bundesbank), Belgique, Canada,
Etats-Unis, France, Italie, Japon, Pays-Bas, Royaume-Uni, Suède (Sveriges Rikzbank),
Suisse (Banque nationale suisse).
() Entretien accordé à lhebdomadaire Le Nouvel
Observateur (n° 1766, semaine du 10 au 16 septembre 1998).
() On observera que la décision des autorités japonaises
dinclure les portefeuilles boursiers dans les fonds propres, au sens du Comité de
Bâle, constituait en elle-même un facteur profondément pro-cyclique.
() Perspectives économiques, n° 63, juin
1998.
() Enquête sur le comportement des entreprises en 1997, Bulletin
de la Banque de France, n°52, avril 1998.
() INSEE, Informations rapides, n°229, 17 août
1998.
() En moyenne annelle.
() Selon les termes employés par les représentants de
la direction de la prévision au cours de la réunion du groupe technique.
() Lanalyse keynésienne de la monnaie distingue
deux motivations pour la demande de monnaie émanant des agents économiques : la
demande de monnaie à des fins de « transaction », qui vise à permettre les
échanges courants de la vie économique ; la demande de monnaie à des fins de
« spéculation », qui traduit les termes de larbitrage entre actifs
financiers et actifs purement monétaires comme réserve de valeur. Dans une conjoncture
très déprimée, la demande de monnaie à des fins de « transaction » est
quasi nulle. Dans ce cas, la monnaie est demandée aux seules fins de la
« spéculation ». Or, si la politique monétaire est très accommodante, le
taux dintérêt peut devenir si faible que chacun sattend à son augmentation
prochaine, donc à la baisse du prix des actifs financiers. Le taux dintérêt est
insuffisant pour rémunérer correctement limmobilisation de la valeur dans des
actifs financiers et compenser le risque de perte en capital que cette immobilisation
représente. Les agents économiques sont alors incités à thésauriser, et tout
supplément de monnaie apporté par les autorités à léconomie est immédiatement
absorbé dans les encaisses oisives des agents. La politique monétaire est totalement
inefficace : léconomie est prise dans une « trappe à
liquidité ».
() A lexception, peut-être du Brésil, qui a
été touché par la mise en uvre dune politique restrictive.
() Hors États-Unis et Europe occidentale.
() Même si le tableau récapitulant les prévisions de
lensemble des membres du groupe technique ne porte pas dindication sur ces
prévisions de taux dans la colonne relative aux budgets économiques.
() Les données relatives au commerce extérieur
proviennent de la direction générale des douanes et droits indirects. Elles sont
établies sur une base FAB-FAB (franco à bord) pour les synthèses, ce qui signifie
quelles comprennent le coût départ-usine et le coût du transport du lieu de
production au poste frontière. Les résultats par produits et par pays sont calculés CAF
(coût, assurance, fret : la valeur FAB des marchandises est majorée du coût du
transport et des assurances) à limportation et FAB à lexportation. On
rappellera par ailleurs que, depuis le 1er janvier 1997, la balance commerciale ne
comprend plus les échanges de la métropole avec les DOM, mais intègre les opérations
de ces derniers avec le reste du monde : les données antérieures à cette réforme
ont été mises en conformité avec la nouvelle présentation.
() Certaines opérations sans paiement et une partie des
échanges liés à lactivité spatiale de la base de Kourou en Guyane sont
reclassés en échanges de services dans la balance des paiements, conformément à la
méthodologie internationale.
() Les transferts avec les institutions de lUnion
européenne représentent la majeure partie des transferts courants des administrations
publiques et plus de la moitié des recettes et des dépenses imputées à la rubrique des
transactions courantes.
() La part de marché mondiale en valeur de la France
était de 5,4% en 1997, contre 5,5% en 1996, cette quasi-stabilité constituant une bonne
performance dans la mesure où la hausse du dollar réduit mécaniquement la part des
échanges intra-européens dans le commerce mondial. Dans lensemble des pays
industrialisés, la part de marché en valeur de la France était de 8,3%, contre 8,2% en
1996 (Source : FMI).
() Direction de la prévision, Note de conjoncture
internationale, juin 1998. LOCDE prévoit pour sa part une contraction du
commerce mondial plus importante, de lordre de 2,7 points. Voir Perspectives
économiques, n° 63, juin 1998.
() Plus rarement, lobjectif est inverse dans le
cadre dune réévaluation, lorsquil sagit de limiter lexcédent de
la balance commerciale.
() Rapport sur les comptes de la Nation de lannée
1997, tome II, tableau 01.03.
() Bulletins de la Banque de France, n°51, mars
1998 et 52, avril 1998.
() Bulletin de la Banque de France, n°53, mai
1998.
() Lettre de lOFCE, n°173, du 26 mars
1998.
() Lettre de lOFCE, n°173, du 26 mars
1998.
() « La compétitivité industrielle de la
France à la veille de leuro », juin 1998.
() Rexecode, op. cit.
() Lettre de lOFCE, n°176, du 22 juin
1998 : « Les positions compétitives en Europe à la veille de lUnion
monétaire ».
() LUnion monétaire belgo-luxembourgeoise est
traitée comme un seul pays.
() « La compétitivité industrielle de la
France à la veille de leuro », op. cit.
() Le solde primaire du budget de lEtat est le
résultat de la différence entre le solde total de ce budget et la charge nette de la
dette.
() La catégorie 1 correspond aux personnes déclarant
être à la recherche dun emploi à temps plein et à durée déterminée et
nayant pas exercé une activité de plus de 78 heures dans le mois.
() A cette masse, il convient dajouter les
exonérations de cotisations sociales accompagnant les dispositifs dinsertion
professionnelle des publics prioritaires, tels que les contrats initiatives-emplois
(10,7 milliards de francs en 1997).
() Pierre Concialdi et Sophie Ponthieux,
« Les bas salaires : quels changements depuis 15 ans ? », reproduit
in Problèmes économiques, 11 février 1998, pages 1 à 7.
() Rapport général n° 305, tome I,
volume 1, page 83.
() Economie et statistique, « Mesurer la
pauvreté aujourdhui », 1997.
() Statistics in focus, n° 6, 1997.
() Rapport dinformation n° 1065 sur la
fiscalité du patrimoine et de lépargne.
() INSEE Première, « Le logement des
ménages pauvres en 1996 », juin 1998.
() Rapport dinformation n° 1062 sur la loi
dorientation relative à la lutte contre les exclusions, page 12.
() INSEE Première, septembre 1997.
() Rapport de lOffice parlementaire
dévaluation des choix scientifiques et technologiques, Sénat n° 383,
1996/1997.
() INSEE Résultats, « Séries longues sur
les salaires », avril 1998, page 12.
() INSEE Première, « La géographie du
niveau de vie : évolutions récentes », septembre 1997.
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