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N
° 2861

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 14 octobre 2010.

AVIS

PRÉSENTÉ

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES

SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2011 (n° 2824),

TOME V

ÉCOLOGIE, DÉVELOPPEMENT ET AMÉNAGEMENT DURABLES

par M. Jean-Jacques GUILLET,

Député

Voir le numéro 2857 (annexes n°s 13 et 14).

INTRODUCTION 5

I – LES GRANDS AXES DE LA DIPLOMATIE FRANÇAISE POUR LA PROTECTION DE L’ENVIRONNEMENT 7

A – LES NÉGOCIATIONS MULTILATÉRALES INTERNATIONALES ET COMMUNAUTAIRES 7

1) Les suites de la conférence de Copenhague 7

2) La biodiversité, l’eau et les négociations communautaires 8

B – LES NÉGOCIATIONS AU SEIN DE L’UNION POUR LA MÉDITERRANÉE 9

C – UN DISPOSITIF ADMINISTRATIF BIEN EN PLACE 10

1) un pilotage conjoint du ministère des affaires étrangères et du ministère de l’écologie 10

2) La montée en puissance du réseau des correspondants 12

3) Des crédits qui permettent à la France d’assurer sa présence dans les grandes négociations internationales 13

4) Le soutien aux organisations non gouvernementales 14

5) Le rôle complémentaire de l’ADEME 16

II – L’ACTION INTERNATIONALE SUR L’ÉNERGIE ET LE CLIMAT 19

A – LES TRAVAUX DE L’UNION EUROPÉENNE SUR L’ÉNERGIE ET LE CLIMAT 19

1) La révision de la fiscalité sur le carbone en discussion 19

2) Les nouvelles réductions d’émission de carbone en question 21

3) Les projets de coopération avec la Russie 21

4) Les enjeux de l'amélioration de l'efficacité énergétique en Russie 23

a) La coopération russo-allemande: bilan de l'agence RUDEA 24

b) La création du centre franco-russe sur l'efficacité énergétique: enjeux et bénéfices attendus 24

B – LES SUITES DE LA CONFÉRENCE DE COPENHAGUE 25

1) Le soutien de la France au groupe intergouvernemental des experts sur le climat 25

2) Les incertitudes sur le résultat de la conférence de Cancun 27

III – LA POLITIQUE EN FAVEUR DE LA BIODIVERSITÉ, ENTRE ESPOIR ET ÉCHEC 31

A –LA PROCHAINE CONFÉRENCE DE NAGOYA, UN SUCCÈS INCERTAIN 32

1) L’affichage de nouveaux objectifs internationaux et européens ou le risque d’une politique illusoire 32

2) Les enjeux de la conférence de Nagoya 32

3) La protection des espèces menacées : aller au-delà de la simple prise de conscience 34

a) Une politique nationale rigoureuse 34

b) Poursuivre le soutien à la CITES 35

4) Une stratégie nationale qui soutient l’action internationale 36

B – UN NOUVEL ENJEU : LA GESTION DE LA BIODIVERSITÉ EN HAUTE MER 39

1) Des régimes juridiques de protection, mais peu de moyens de contrôle 40

2) De nombreux forums, mais aucune décision 41

CONCLUSION 43

EXAMEN EN COMMISSION 45

ANNEXE - Liste des personnalités rencontrées par le rapporteur 115

Mesdames, Messieurs,

L’analyse de l’action internationale de la France en matière d’environnement peut être opérée à tout moment de l’année, car elle relève plus d’un exercice diplomatique quotidien que du montant des crédits –fort modestes – inscrits en loi de finances. Notre pays défend tout au long de l’année dans les forums internationaux la vision d’un monde multilatéral avec l’espoir que chaque puissance ou groupe de puissance accepte un compromis permettant la gestion la plus sobre possible des ressources naturelles et des biens publics mondiaux. Cette politique est de longue haleine, le relatif échec de certains sommets comme celui de Copenhague en décembre 2009 obligeant à réviser les stratégies de négociations.

La période d’examen du projet de loi de finances est par ailleurs plus propice à l’analyse d’évènements passés qu’à un travail de prospective. Elle intervient en effet quelques semaines avant les grands sommets internationaux qui ponctuent la fin de l’année. L’examen en commission élargie des programmes sur l’environnement se déroulera avant le sommet de Nagoya sur la biodiversité et le sommet de Cancun sur l’énergie et le climat, réduisant l’analyse à quelques conjectures, à la position affichée par la France et aux espoirs que nourrit notre pays quant aux résultats de ces négociations. Il est heureux, dans ce contexte, que l’Assemblée nationale dispose d’autres instruments que le projet de loi de finances pour connaître de la politique du Gouvernement et des lignes de force qui sous-tendent les négociations sur le climat et la biodiversité.

Après deux années de réforme de son outil diplomatique, la France a utilisé à plein en 2010 les moyens dont elle s’est dotée pour participer aux multiples réunions internationales sur l’environnement. La préparation des deux sommets précités ne doit pas occulter la diversité des sujets en discussion, de la protection du thon rouge à la réglementation européenne sur les véhicules légers en passant par l’élaboration de projets au sein de l’Union pour la Méditerranée.

L’année 2010 peut incontestablement être qualifiée d’année de transition. Aucune décision notable pour l’avenir de la planète n’a encore été prise, les deux principales conférences se tenant en fin d’année. Les difficultés qui sont apparues lors de leur préparation ne laissent guère présager d’un résultat à la hauteur de la situation. Il est vrai que la crise financière et économique relègue au second rang les préoccupations environnementales dans de nombreux pays et qu’elle conduit à la diminution des dotations que les Etats pourraient consacrer à l’aide aux pays en développement, notamment pour la réduction des émissions de gaz à effet de serre.

I – LES GRANDS AXES DE LA DIPLOMATIE FRANÇAISE POUR LA PROTECTION DE L’ENVIRONNEMENT

Deux axes majeurs guident la politique française internationale en matière d'environnement pour les années 2010 et 2011: les négociations multilatérales relatives au climat et la poursuite des négociations communautaires. On relèvera en outre que l’Union pour la Méditerranée commence à jouer son rôle comme enceinte de coopération sur des projets concrets au bénéfice des Etats riverains.

A – Les négociations multilatérales internationales et communautaires

1) Les suites de la conférence de Copenhague

L’année 2010 est dominée par les suites de la conférence de Copenhague sur le climat. Après deux ans de préparation, cette conférence s’est achevée sur un bilan mitigé. Certes, pour la première fois dans l’histoire, tous les pays du monde se sont engagés sous l’égide de l’ONU dans un processus commun de lutte contre le changement climatique. Mais le manque de préparation de la conférence a débouché sur un accord réduit au minimum.

L'accord signé à Copenhague, conclu par 28 chefs d'États et de gouvernements – dont le Président de la République française – et auquel une large majorité d’Etats parties à la convention sur le climat se sont déclarés prêts à se rallier, enregistre des progrès essentiels pour la France. La limitation à 2°C de la hausse des températures est désormais un objectif collectif. Pour la première fois, les grands pays émergents se sont engagés dans le sens d'une réduction de leurs émissions.

En outre, grâce à l’action de la France, la conférence de Copenhague a permis de poser les bases d’une véritable solidarité climatique internationale en faveur des pays vulnérables. Elle s’appuie notamment sur des engagements financiers concrets, à court, moyen et long termes : 10 milliards de dollars par an d’ici 2012, puis une montée en puissance progressive pour atteindre 100 milliards de dollars par an à compter de 2020. La priorité de la France est de mettre en œuvre concrètement l'accord de Copenhague sur lequel il conviendra en outre de s'appuyer pour obtenir des avancées significatives lors des conférences de Cancun en décembre 2010 et en Afrique du Sud, à la fin de 2011. Mais votre Rapporteur relève qu’à ce jour, dix mois après la fin de la conférence, aucune aide n’a été allouée aux pays qui en sont destinataires.

2) La biodiversité, l’eau et les négociations communautaires

Les principales rencontres de niveau ministériel concernant la biodiversité durant l’année 2010 ont commencé à l’Unesco par le lancement de « l’année internationale de la biodiversité » en janvier 2010, et se sont poursuivies en février au conseil d'administration du programme des Nations Unies pour l’environnement sur cette thématique, puis en septembre par une session spéciale de l’Assemblée générale des Nations Unies. Les discussions s’achèveront à Nagoya au Japon par la dixième conférence des parties (COP) à la convention sur la diversité biologique (CDB) en octobre 2010. Trois thématiques, qui constituent des priorités françaises, seront abordées dans les différents forums : le bilan des objectifs 2010 et la détermination de nouvelles cibles, l’établissement d’un régime international sur les ressources génétiques, la création d’un panel d’experts de la biodiversité (IPBES) dont le rôle sera analogue à celui du groupe interministériel des experts sur le climat (GIEC).

S’agissant de l’eau, le sixième forum mondial se tiendra en mars 2012 à Marseille. Ces forums, organisés tous les trois ans par le Conseil mondial de l’eau et le pays hôte réunissent l’ensemble des acteurs impliqués dans le domaine de l’eau et de l’assainissement (30.000 personnes environ par forum) et constituent une occasion unique de partager expériences et réflexions afin d’influencer les politiques de l’eau. Le sixième forum permettra à la France et à Marseille de devenir la capitale mondiale de l'eau pendant plusieurs années, la semaine du Forum faisant l'objet d'un processus préparatoire long qui dure plus de trois ans.

Enfin, les négociations communautaires ont eu principalement pour objet le changement climatique, la préservation de la biodiversité et la gestion durable des ressources. S’il n’y a pas eu adoption de textes législatifs par le Conseil environnement sous la présidence espagnole, les discussions sur les dossiers politiques les plus emblématiques ont bien progressé, alors même que l’année 2010 commençait avec le souvenir –si ce n’est le malaise – de l’effacement de l’Europe lors de la conférence de Copenhague sur le climat. Plusieurs négociations législatives ont connu des avancées substantielles, notamment sur les émissions industrielles (directive IED), sur les équipements électriques et électroniques (directives DEEE et RoHS), sur les biocides et sur les émissions des véhicules utilitaires légers. Il appartient désormais à la présidence belge de prolonger ces discussions.

Dans le domaine du changement climatique, l’essentiel des débats se concentrera sur la préparation de la conférence de Cancun. La présidence belge organisera au Conseil environnement d’octobre un débat sur la communication sur le passage à 30% de réduction des émissions de gaz à effets de serre, qui ne remporte pas l’unanimité au sein de l’Union européenne (cf infra). Le Conseil de décembre, pour sa part, débattra sur la stratégie européenne « biodiversité post-2010 », sur la gestion durable des ressources (thème retenu par le conseil informel de juillet) et sur le renforcement des instruments de la gestion par les Etats de l’environnement.

B – Les négociations au sein de l’Union pour la Méditerranée

Le Sommet de Paris (13 juillet 2008) organisé dans le cadre du « Processus de Barcelone : Union pour la Méditerranée » a imprimé une nouvelle dynamique politique aux relations euro-méditerranéennes, à l’initiative du Président de la République. Parmi les six priorités retenues figurent la dépollution de la Méditerranée, les transports, et les énergies de substitution avec le Plan solaire méditerranéen. Le programme de travail initial prévoyait notamment la troisième réunion ministérielle euro-méditerranéenne sur l'eau, la première réunion sur le développement durable ou encore la quatrième réunion sur l'environnement. Depuis lors, de nombreux événements ont été conduits par l’Union pour la Méditerranée (UPM), telle la réunion sur la gestion intégrée des zones côtières du 19 décembre 2008, à Nice. La troisième réunion ministérielle sur l'eau, en Jordanie, le 22 décembre 2008, a permis d'établir des orientations et un calendrier de travail pour 2009 en vue de l'adoption d'une « stratégie de l'eau en Méditerranée » pour 2010. Les ministres y ont également pris note d'une première liste indicative d'une trentaine de projets.

Si les événements de Gaza en janvier 2009 ont bouleversé le calendrier, les réunions de travail se sont néanmoins poursuivies. Ainsi, le 20 mars 2009, le forum mondial de l'eau à Istanbul a permis une réunion informelle des directeurs chargés de ce dossier ; de même, la question des financements étant cruciale, l'Égypte a organisé une conférence sur ce thème le 30 avril 2009 à Alexandrie, rassemblant les principaux bailleurs de fonds.

En dépit de ces difficultés politiques, la première réunion ministérielle sur les projets de développement durable s'est tenue le 25 juin 2009, à Paris. Cette réunion a été un réel succès au regard de la très forte mobilisation des participants et des annonces nouvelles des bailleurs de fonds. Ce nouveau départ de l'UPM s'est confirmé lors de la réunion des hauts fonctionnaires le 7 juillet 2009. Dans le domaine de l'eau, la réunion de Paris a permis la sélection de plus d'une centaine de projets. A la suite de plusieurs réunions techniques à la fin de 2009 et au début de 2010, les experts dans le domaine de l'eau  des 43 pays ont abouti à la rédaction de la « stratégie de l'eau en Méditerranée » ; ceux du « plan solaire méditerranéen » ont examiné, le 10 février 2010, le document stratégique en vue d'une adoption par les ministres ;

Un calendrier très dense de réunions ministérielles a été programmé par les hauts fonctionnaires, qui prévoyait notamment la tenue en 2010 de conférences ministérielles sur l'environnement (Dubrovnik), sur l'eau (Barcelone), sur l'énergie (Le Caire), sur le développement urbain durable (qui pourrait se tenir à Nice à la fin de 2010). La France a en outre demandé la tenue d'une réunion ministérielle sur la politique maritime intégrée.

Certaines des réunions ministérielles programmées se sont tenues mais le processus s'est trouvé de nouveau freiné, un désaccord politique entre Israël et le groupe des pays arabes sur la mention des « territoires occupés » empêchant l'adoption de la « stratégie de l'eau en Méditerranée ». L'intervention israélienne contre la flottille se rendant à Gaza, le 31 mai dernier, n'a pas contribué à la reprise du dialogue et certaines conférences ministérielles prévues au second semestre 2010 ont été reportées. La France espère que deuxième sommet des chefs d’Etat et de gouvernement des pays de l'UPM, prévu en novembre 2010, marquera la volonté des Etats membres de poursuivre leurs engagements malgré les vicissitudes diplomatiques.

C – Un dispositif administratif bien en place

1) un pilotage conjoint du ministère des affaires étrangères et du ministère de l’écologie

Le programme 217 du ministère « Conduite et pilotage des politiques de l’écologie, de l’énergie, du développement durable et de la mer » comporte une action spécifique (action 6) entièrement consacrée à l'action européenne et internationale. Suivie par la direction des affaires européennes et internationales, cette action couvre l’ensemble des domaines d’activité du ministère de l’écologie et vise notamment à développer l’influence française, à faire partager sa conception du développement durable et à promouvoir le savoir-faire des entreprises françaises. Les moyens prévus au projet de loi de finances pour 2011 s'élèvent à 10,18 millions d’euros.

Ces crédits recouvrent notamment les contributions obligatoires versées aux organisations internationales entrant dans le champ de compétence du ministère et transférées par le ministère des affaires étrangères et européennes dans le cadre de la rationalisation de la gestion des contributions internationales et conformément aux recommandations du Parlement, les contributions volontaires aux organisations internationales entrant dans le périmètre du ministère, ainsi enfin que le renforcement de l'association de la société civile à l'action européenne et internationale du ministère.

On rappellera que le Gouvernement a institué au sein du ministère des affaires étrangères le 16 mars 2009 une direction générale de la mondialisation, du développement et des partenariats. En son sein figure la direction des biens publics mondiaux, chargée de définir et de mettre en œuvre la politique de la France, cette mission étant plus particulièrement assurée par la sous-direction énergie climat et la sous-direction de la gestion des ressources naturelles. En outre, l'ambassadeur délégué à l'environnement, qui bénéficie de l'appui des services du ministère des affaires étrangères et de ceux du ministère chargé de l’environnement, est appelé à jouer un rôle important.

Le ministère des affaires étrangères n’a pas compétence exclusive en matière d’environnement. Le développement durable nécessite une approche transversale et intégrée. Aussi le ministère de l’écologie, de l’énergie, du développement durable et de la mer a compétence sur les négociations internationales, afin qu’il y ait une synergie entre la politique nationale et l’action internationale de la France. Afin de remplir cet objectif, la direction des affaires européennes et internationales (DAEI), rattachée au secrétariat général, a été bâtie en regroupant les services internationaux des pôles ministériels ayant constitué le ministère du développement durable et en les renforçant sur les thèmes prioritaires du nouveau ministère. Elle est aujourd’hui constituée d’une centaine d’agents ayant à la fois une compétence technique dans les domaines d’actions du ministère et une large expérience des activités européennes et internationales. En outre, 75 personnes sont mises à disposition par la direction dans les ambassades, les organisations européennes et internationales ou sur des fonctions liées à l’action européenne et internationale du ministère. Enfin, la DAEI anime un réseau de plus de 200 agents détachés dans des fonctions diverses à l’échelle internationale.

Dès sa création, la DAEI a été mobilisée pour piloter l’action européenne et internationale du ministère et, tout particulièrement, coordonner la présidence française de l’Union européenne en 2008. Elle pilote en conséquence les négociations internationales sur le climat et la biodiversité ainsi que les réflexions en cours sur la gouvernance mondiale de l'environnement. Elle travaille de manière étroite avec les directions générales du ministère de l’écologie et avec le ministère des affaires étrangères et européennes. Elle s’appuie en particulier sur le réseau des ambassades et des services économiques dont le suivi des dossiers liés au développement durable constitue maintenant une priorité majeure.

La DAEI a particulièrement pour missions :

– d’assurer la coordination générale des affaires européennes et internationales du ministère et des établissements publics placés sous la tutelle du ministère ;

– de préparer et piloter la politique européenne et internationale du ministère ;

– de coordonner les positions du ministère dans les instances chargées d’élaborer la position de la France sur les questions européennes et internationales et d’organiser la représentation du ministère auprès des organisations internationales et des institutions européennes ;

– d’être associée au suivi de la mise en œuvre par le ministère des engagements souscrits par le Gouvernement dans le cadre des institutions européennes et internationales et à la transposition de la législation européenne.

Elle comporte trois sous-directions et une mission qui lui est directement rattachée, ainsi qu’une mission mise à disposition par la direction générale des infrastructures, des transports et de la mer.

– la sous-direction du changement climatique et du développement durable traite les questions communautaires et multilatérales relatives au changement climatique, à la maîtrise de l’énergie, à la biodiversité, aux milieux et au développement durable, ainsi que le volet international du Grenelle Environnement ;

– la sous-direction de la régulation européenne est chargée des questions relatives à la politique commune des transports, au marché de l’énergie, aux risques, à la pollution, à l’environnement, au marché intérieur et aux financements communautaires. Dans ces domaines, elle est responsable des relations bilatérales avec les États membres de l’Union européenne, l’Islande, la Norvège et la Suisse et des négociations multilatérales. Elle assure la cohérence de l’action européenne du ministère et le suivi de ses engagements européens ;

– la sous-direction des échanges internationaux est chargée de l’animation des relations bilatérales dans le monde entier, hors Union européenne, Islande, Norvège et Suisse, des jumelages, des relations avec les banques de développement, du soutien des entreprises à l’exportation et de la gestion du personnel à l’international ;

– la mission internationale de l’urbanisme et du logement est chargée d’animer, coordonner et évaluer des actions internationales dans les domaines de l’aménagement et du logement. Elle est mise à disposition de la direction générale de l’aménagement, du logement et de la nature ;

– la mission des Alpes et des Pyrénées, mise à disposition par la direction générale des infrastructures, des transports et de la mer, suit les projets de transport dans ces massifs.

En outre, est placé auprès du directeur le chef de l’équipe de négociation sur le climat composée d’agents de la direction et du ministère. En lien avec l’ambassadeur pour le climat, il coordonne la délégation française interministérielle lors des négociations.

2) La montée en puissance du réseau des correspondants

Le réseau des correspondants a été sollicité en 2010 par un double travail (en plus des nombreuses demandes de démarches dans le cadre des négociations environnementales en cours) : d’une part, la rédaction d’une fiche technique récapitulant un certain nombre de données environnementales relatives au pays de résidence (et destinée à être ensuite actualisée sur une base annuelle) ; ce premier travail était notamment destiné à faciliter la préparation des déplacements ministériels ; d’autre part, la rédaction d’un document sur la manière dont était préparée l’année internationale de la biodiversité dans leur pays de résidence ; ce second travail avait vocation à aider le gouvernement dans sa propre préparation de cette année et notamment à l’aider à mieux apprécier sa marge de manœuvre dans le cadre des grandes négociations internationales en cours.

Par ailleurs, rappelons que la journée des correspondants environnement a été organisée cette année à Paris, au muséum national d’histoire naturelle, le 19 juillet dernier. Elle associait également les agents du ministère de l’écologie en poste à l’étranger et les assistants techniques environnementaux du ministère des affaires étrangères. La matinée était consacrée à la biodiversité, l’après-midi aux autres grands rendez-vous de l’agenda environnemental international (Rio+20, climat, forum mondial de l’eau de Marseille).

L’année 2010 a été marquée par la montée en puissance, en nombre comme en efficacité du réseau des correspondants environnement. Celui-ci est devenu l’un des principaux atouts de notre diplomatie environnementale.

3) Des crédits qui permettent à la France d’assurer sa présence dans les grandes négociations internationales

Les crédits de l’action internationale sont inscrits au programme 217 conduite et pilotage des politiques de l’écologie, de l’énergie, du développement durable et de la mer, à l’action n° 6 action européenne et internationale. Ils s’élèvent à 10, 186 909 millions d’euros, à raison de 1,255 527 millions en dépenses de fonctionnement et 8,931 382 millions en dépenses d’intervention. L’action n° 6 regroupe 0,27 % des crédits du programme. Cette modestie, gage d’une bonne gestion, ne doit pas donner l’impression que l’action internationale est marginale, dans la mesure où il s’agit surtout de l’exercice d’une diplomatie d’influence, où la confrontation des idées a plus d’importance que le montant des crédits. Les crédits ouverts par la loi de finances pour 2010 s’élevaient à 9, 865 303 millions d’euros.

Les crédits ont pour objectif de permettre aux agents des deux ministères de défendre la doctrine française d’une gouvernance mondiale sur les questions environnementales et d’expliquer les objectifs du Grenelle de l’environnement. Les dépenses de fonctionnement financent principalement le pilotage de l’action communautaire du ministère, les relations avec la Suisse, l’Islande et la Norvège et la participation aux frais de la Représentation permanente de la France auprès de l’Union européenne. Dans le domaine de l’action multilatérale, elles permettent le suivi des négociations sur le climat, la biodiversité, ainsi que l’appui aux positions de la France sur la gouvernance internationale de l’environnement.

Les dépenses d’intervention comprennent les contributions obligatoires versées aux organisations internationales, les contributions volontaires à ces organisations et le renforcement de l’aide à la société civile et aux ONG d’environnement. Les contributions obligatoires assurent le financement de la France à une vingtaine de conventions internationales ; celles qui sont volontaires participent à des actions dans les domaines de la biodiversité, de la lutte contre la désertification, du tourisme durable, du développement durable ou encore de la lutte contre les substances chimiques.

4) Le soutien aux organisations non gouvernementales

Dans la mesure où les associations et organisations non gouvernementales (ONG) jouent un rôle important pour sensibiliser l’opinion, mettre en œuvre des projets et pour certaines, assister le Gouvernement lors des négociations internationales, les relations de travail entre le ministère de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer et les principales ONG (françaises et étrangères) de défense de l'environnement sont de plus en plus denses. Il est donc logique que le Gouvernement verse des subventions à certaines d’entre elles.

Il convient à ce titre de rappeler que le principe n°10 de la déclaration de Rio de 1992 sur l'environnement et le développement dispose que « la meilleure façon de traiter les questions d'environnement est d'assurer la participation de tous les citoyens concernés, au niveau qui convient (...) ».

La Convention d'Aarhus est directement inspirée par ce principe. Elle a été signée en juin 1998 sous l'égide de la commission économique pour l'Europe des Nations Unies et ratifiée par la France en juillet 2002. Elle encadre le droit d'accès du public à l'information ainsi que la participation du public au processus décisionnel et l'accès à la justice en matière d'environnement.

En France la gouvernance en matière environnementale est également influencée par les travaux du Grenelle de l'environnement. Le groupe de travail n°5 « Construire une démocratie écologique : institutions et gouvernance » prévoit en premier lieu la reconnaissance des partenaires environnementaux en travaillant à la définition d'un statut pour les acteurs représentatifs et légitimes de la protection de l'environnement.

Pour le compte de la DAEI, de nombreuses ONG françaises et étrangères de protection de l'environnement ont bénéficié en 2009 et 2010 de subventions de fonctionnement.

Il convient de préciser que la DAEI ne confie aucune étude à des associations. Elle octroie seulement des subventions sur la base de demandes que lui font parvenir les ONG afin de mener des actions d'information, de sensibilisation (séminaires, publications, tables rondes), voire des actions de formations de membres de leurs réseaux sur les politiques européennes et les conventions internationales en matière d'environnement et de développement durable.

Les thématiques prioritaires qui ont été établies par la DAEI afin d'allouer ces subventions sont les suivantes : le climat, la biodiversité, l'Union européenne, la Convention d'Aarhus ainsi que le développement durable.

En ce qui concerne les organisations françaises, les subventions accordées s'insèrent pour certaines dans le cadre de conventions pluriannuelles d'objectifs de 3 ans conclues entre les associations concernées et le ministère. Les actions relatives aux politiques européennes sont soumises pour avis à la sous-direction de la régulation européenne tandis que les actions relatives aux conventions internationales sont soumises pour avis à la sous-direction du changement climatique et du développement durable.

Une douzaine d'organisations ont été concernées en 2010 pour un montant de 561 000 euros. Dans un contexte budgétaire tendu, il est à noter que ce montant était en diminution par rapport au montant de l'année précédente (828 038 euros en 2009).

SUBVENTIONS MINISTÉRIELLES AUX PRINCIPALES ONG

(en euros)

ONG françaises

Subvention

2009

Subvention 2010

France Nature Environnement (FNE)

37 000

36 000

Ligue pour la Protection des Oiseaux (LPO)

45 000

25 000

Amis de la Terre

72 500

 

4D

30 000

 

Réseau Action Climat (RAC)

40 000

50 000

IDDRI

100 000

85 000

Fédération des parcs naturels régionaux

20 000

20 000

CARI (lutte contre la désertification)

70 000

70 000

Agropolis – CSFD (lutte contre la désertification)

70 000

40 000

GRET

18 538

 

Fondation Nicolas Hulot

30 000

 

CIPRA-France (Alpes)

20 000

20 000

ONG internationales

   

UICN

145 000

100 000

OSS (Tunis)

45 000

45 000

Stakeholders Forum (Grande-Bretagne)

5 000

 

Bureau européen de l'environnement

50 000

45 000

Partenaires européens pour l'environnement (ou EPE en anglais), association de droit belge.

25 000

25 000

Forum Ökologisch-Soziale Marktwirtschaft

5 000

*

Il est envisagé pour 2011 de continuer à garder comme axes prioritaires dans le soutien aux ONG les actions concernant le climat, la biodiversité, la Convention d'Aarhus ainsi que le développement durable.

5) Le rôle complémentaire de l’ADEME

L’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (ADEME), connue pour son action auprès de l’Etat, des collectivités territoriales et des entreprises, conduit également une action internationale, en appui du Gouvernement. Sa direction de l’action internationale regroupe 27 agents et 3 experts en mission de long terme à l’étranger et dispose depuis quelques années d’un budget d’intervention de 3,36 millions d’euros. Avec cette enveloppe financière relativement modeste, représentant 0,3% du budget de l’agence, à laquelle s’ajoutent des financements communautaires complémentaires, l’ADEME participe à une soixantaine de projets par an en France et dans l’Union européenne.

Outre cette action de financement, les missions de l’ADEME à l’échelle internationale prolongent les activités qu’elle mène au niveau national :

– développer et partager les connaissances en animant la participation française à des programmes communautaires et en s’associant à des travaux de normalisation, de prospective et de veille internationale ;

– réaliser des études comparatives et valoriser les bonnes pratiques ;

– apporter une expertise aux représentants de l’Etat dans les négociations communautaires et internationales ;

– mobiliser les partenariats et valoriser les entreprises françaises détentrices de compétences technologiques.

Si l’ADEME travaille principalement à l’échelon européen, elle accompagne les démarches du Gouvernement français dans les négociations sur le climat et le développement durable. Elle a participé à l’élaboration du plan « justice-climat » en Afrique subsaharienne et à la mise en œuvre du plan solaire méditerranéen dans le cadre de l’UPM. Elle réalise des projets définis dans le cadre d’accords bilatéraux, souvent en étroite coopération avec l’Agence française de développement, participe à des programmes d’échange avec ses homologues américains et assure la présence française au sein d’instances multilatérales sur l’énergie, comme l’International partnership for energy efficiency cooperation (IPEEC).

L’expertise de l’ADEME est de plus en plus souvent sollicitée à l’étranger. L’agence constitue un élément de l’influence de notre pays dans le monde mais ne dispose pas des moyens suffisants pour assurer le rôle important qui devrait être le sien au sein de l’action diplomatique de la France dans le domaine environnemental. Il serait en conséquence pertinent de créer, sur le modèle allemand, une ADEME internationale, détenue à 50% par l’ADEME et à 50% par des entreprises du secteur privé. Votre Rapporteur rappelle que nos entreprises sont souvent leaders mondiaux dans les métiers liés à l’environnement. Seraient ainsi associés l’outil diplomatique, l’expertise et la compétence technique au service de notre politique comme de nos entreprises.

II – L’ACTION INTERNATIONALE SUR L’ÉNERGIE ET LE CLIMAT

L’action de la France sur l’énergie et le climat s’inscrit dans un double cadre européen et mondial. Notre pays négocie avec ses partenaires la position européenne défendue lors des grands sommets mondiaux, ce qui n’exclut pas de conduire une politique bilatérale afin de soutenir nos entreprises sur les marchés de l’énergie, comme celle qui se dessine avec la Russie.

A l’échelle internationale, il est incontestable que la conférence de Copenhague sur le climat, en décembre 2009, a constitué un échec politique au regard des attentes que cette conférence constituait. Depuis dix mois, de nombreux analystes ont décrit les raisons de cet échec : incapacité de la délégation américaine à s’engager dans un accord contraignant en raison de l’opposition prévisible du Congrès, difficulté à satisfaire la demande des pays en voie de développement sur le financement des actions environnementales et de la protection des forêts tropicales, etc… La qualité des travaux préparatoires et la compétence de la présidence danoise ont également été mises en question. Dans un tel contexte, aboutir à un accord réduit au plus petit commun dénominateur était le seul résultat possible compte tenu des lignes rouges fixées par les Etats.

L’accord signé à Copenhague a retenu comme objectif de limiter à deux degrés la hausse des températures, sans fixer les moyens d’y parvenir. Il revient aux négociations préparatoires à la conférence de Cancun de trouver un accord sur ce point, ainsi que sur le financement et le sauvetage des forêts tropicales.

L’Union européenne, qui avait réussi à s’exprimer d’une seule voix à Copenhague, en fera de même lors de la conférence de Cancun tout en poursuivant parallèlement ses travaux sur la fiscalité assise sur les émissions de carbone.

A – Les travaux de l’Union européenne sur l’énergie et le climat

1) La révision de la fiscalité sur le carbone en discussion

Dans la mesure où l’Union européenne parle d’une seule voix au sein des forums internationaux sur le climat, il convient de rappeler que celle-ci a engagé depuis 2009 une réflexion sur la fiscalité de l’énergie. Cette démarche est soutenue par la France.

Le débat d’orientation du 23 juin dernier s’est appuyé sur un document soumis par le commissaire chargé de la fiscalité, partant du constat que la taxation minimale actuelle de l’énergie proposée par la directive 2003/96/CE n’incitait pas à économiser l’énergie et à développer des énergies alternatives. Un développement non harmonisé de la fiscalité carbone dans l’UE peut par ailleurs créer des distorsions de compétitivité au sein du marché intérieur européen.

L’objectif de la révision de la directive 2003/96/CE serait de corriger les prix de l'énergie afin qu'ils reflètent à la fois les émissions de gaz carbonique (CO2) et le contenu des produits énergétiques. Le document propose ainsi la création pour les 27 pays de l’Union européenne d'un minimum de taxation des produits énergétiques structuré en deux composantes :

– une part fondée sur leur contenu en émissions de CO2 du produit, permettant en particulier de différencier les produits neutres en CO2 ;

– une part fondée sur le contenu énergétique des produits, (comme c’est le cas avec la directive actuelle), de manière notamment à favoriser les consommations d’énergies efficaces.

Le nouveau dispositif communautaire concernerait les produits énergétiques utilisés comme carburants pour les moteurs ainsi que pour le chauffage ou la production d’électricité, et toucherait tous les secteurs consommateurs d’énergie (bâtiment, transports, agriculture, industrie). Les secteurs d’activité concernés par le système de plafonnement et d’échange de quotas, comme l’industrie lourde, l’aviation ou la production d’électricité ne seraient pas concernés par la taxation du contenu CO2 des produits énergétiques, déjà traités par ailleurs par le système de plafonnement et d’échange de quotas (ETS).

Ce document prend pour base de travail un montant plancher de la taxe à 20 euros par tonne de CO2. Le point de départ pour le niveau total de taxation des produits énergétiques correspondrait par ailleurs aux minima actuels de la directive 2003/96/CE.

Le projet communautaire permettrait en particulier, pour les carburants, d’aligner le traitement du diesel sur celui de l’essence, en prenant en compte son plus fort contenu en énergie et en CO2 par litre. Pour les biocarburants, considérés comme non émetteurs de CO2, la possibilité actuelle d’exemption de taxation pourrait être maintenue de façon transitoire, mais aurait vocation à laisser progressivement place à une taxation minimale du contenu énergétique.

Les installations industrielles non couvertes par le système ETS mais appartenant à des secteurs considérés comme exposés au risque de fuites de carbone pourraient recevoir une compensation de la taxation du carbone pour refléter le principe des allocations gratuites de quotas aux installations sous le système ETS parmi ces secteurs exposés.

Pour le secteur agricole, une réduction de la taxation pourrait être envisagée par les Etats membres à condition que le secteur présente des contreparties via des mesures d’efficacité énergétique. L’utilisation du produit de cette taxe serait laissée à la discrétion de chaque Etat, en fonction de ses besoins financiers, mais chacun pourrait aussi choisir de le redistribuer aux contribuables afin de compenser les effets de la taxe sur les prix à la consommation.

Il n’existe pas pour l’instant de calendrier pour une éventuelle proposition de la Commission en matière de fiscalité carbone.

A l’issue du débat d’orientation du 23 juin précité, la Commission européenne a reporté son projet de révision de la directive taxation de l’énergie, souhaitant des analyses complémentaires, à la demande de plusieurs Etats membres. En matière fiscale, chaque Etat dispose en effet d’un droit de veto. Ce report illustre les divergences qui subsistent entre Etats disposant d’une économie relativement sobre en carbone et ceux devant consentir de lourds investissements.

2) Les nouvelles réductions d’émission de carbone en question

Si l’Union européenne a voté un ambitieux plan de réduction de 20% de ses émissions à l’horizon de 2020, le débat sur la possibilité de porter cette réduction à 30%, à Bruxelles, en mai dernier, a révélé la fragilité de ce résultat au regard des impératifs économiques et financiers. Certains pays, comme l’Allemagne, souhaitent une pause dans ce type de négociation pour préserver le redressement de leurs finances publiques, bien que la commission européenne, par la voix de sa commissaire au climat Connie Hedegaard, ait considéré que la crise économique, qui a ralenti les émissions de CO2, rendait une nouvelle réduction moins coûteuse. En 2008, la diminution de la production industrielle aurait fait chuter les émissions de 11,6% en Europe et de 7% aux Etats-Unis. Le débat sur cette question s’est poursuivi tout au long de 2010, avec les prises de position de parlementaires européens craignant que la reprise économique fasse à nouveau tourner à plein régime les centrales nucléaires et thermiques et provoque même une pénurie, notamment en Europe centrale.

3) Les projets de coopération avec la Russie

La crise russo-ukrainienne de 2009 a une fois de plus rappelé la dépendance de l’Union européenne à l’égard de Moscou pour son approvisionnement en hydrocarbures… Une dépendance toute relative pour les analystes du marché pétrolier et gazier, qui rappellent que la Russie a de son côté un besoin vital de vendre ses produits énergétiques sur le marché européen qui constitue 90% de ses recettes. Moscou n’a pas pour l’heure diversifié ses exportations, malgré la présence du marché chinois à ses frontières orientales.

Bien que pouvant s’approvisionner en gaz au Qatar, en Algérie ou en Norvège, l’Union européenne considère son partenariat avec la Russie comme un axe central de sa politique énergétique extérieure de l'Union. La Russie représente environ 40% des importations européennes pour le gaz naturel, 30 à 35% pour le pétrole, 30% pour l'uranium enrichi et 25% pour le charbon. D’après les prévisions de la Commission européenne, la Russie restera encore longtemps le premier fournisseur énergétique de l’Union. Or les ruptures d'approvisionnement survenues ces dernières années en raison de tensions bilatérales avec l’Ukraine et le Belarus, en particulier pour le gaz naturel, ont démontré les dangers d'une telle dépendance.

La sécurité des approvisionnements énergétiques en provenance de Russie constitue donc une priorité. Cet objectif se décline toutefois en plusieurs axes distincts :

– le renforcement du dialogue énergétique avec la Russie. Ce dialogue se déroule au sein de trois groupes de travail. Il permet non seulement des échanges d'information et de bonne pratique au niveau des experts, mais également une transparence accrue entre les deux partenaires. Le mécanisme d'alerte précoce, mis en place en 2007 et renforcé fin 2009, doit notamment permettre un échange d'information en temps réel en cas d'événement susceptible de déboucher sur une crise énergétique. Ce mécanisme est orienté vers la prévention des crises énergétiques mais prévoit également des mécanismes de résolution et d'arbitrage en cas de conflit ;

– la diversification des voies d'approvisionnement : afin de disposer de voies d'approvisionnement supplémentaires, l'Union européenne soutient de manière générale la construction de nouvelles infrastructures de transport. Deux nouveaux gazoducs doivent à terme relier directement la Russie à l'Union: Nordstream, débouchant en Allemagne via la Mer Baltique; et Southstream, débouchant en Bulgarie via la Mer Noire. L'Union n'est pas directement impliquée dans la réalisation de ces deux projets, ces derniers ayant été autorisés par les Etats membres concernés et devant être financés par le secteur privé ;

– la diversification des sources d'approvisionnement : afin de diminuer le risque inhérent à l'importance excessive de la Russie dans les importations européennes, l'Union européenne s'efforce de promouvoir des sources d'approvisionnement alternatives. La Commission s'est ainsi directement impliquée dans la réalisation du futur gazoduc Nabucco, notamment en obtenant l'accord des pays de transit comme la Turquie. Selon la Commission, ce gazoduc doit permettre la constitution d'une liaison directe entre l'Asie centrale, le Moyen-Orient et l'Europe. Ce projet paraît cependant de moins en moins pertinent. De même, la Commission souhaite promouvoir l'usage du gaz naturel liquéfié comme alternative aux gazoducs, ainsi que le renforcement des capacités de stockage des Etats membres ;

– la diplomatie énergétique : depuis plusieurs années, l'Union européenne s'efforce de convaincre la Russie d'ouvrir son secteur énergétique aux investisseurs privés étrangers et de protéger efficacement les droits de ces derniers. Elle exprime en particulier le souhait de voir la Russie ratifier le traité de la Charte de l'Energie et son protocole sur le transit; ces deux textes assurent en effet une protection légale aux investissements privés dans l'énergie, reconnaissent la liberté et la sécurité du transit et établissent un mécanisme de résolution des conflits. A défaut d'une telle ratification, l'Union souhaite inclure des dispositions similaires dans un nouveau traité de partenariat avec la Russie, en négociation depuis 2008.

4) Les enjeux de l'amélioration de l'efficacité énergétique en Russie

L'amélioration de l'efficacité énergétique de l’économie russe joue un rôle direct, encore trop méconnu, dans la sécurité énergétique de l'Union européenne. Compte tenu des incertitudes sur le niveau de production des hydrocarbures russes à moyen et long terme, la maîtrise de la consommation intérieure russe apparaît comme une variable essentielle afin de s'assurer que la Russie continuera de disposer de volumes suffisants pour ses exportations vers l'Europe.

Dans un classement de 120 pays, la Russie apparaît au 12ème rang de l’inefficacité énergétique alors que la Chine est 55ème et l’Inde 87ème. Par manque d’investissements, elle consomme dix fois plus d’énergie par unité de PIB que le Royaume-Uni et la France, quatre fois plus que l’Inde et deux fois plus que la Chine.

Si la taille du pays et le climat rigoureux qui y règne constituent des explications logiques, l’héritage d’infrastructures obsolètes datant de l’époque soviétique et un cadre fiscal, juridique et tarifaire inadapté expliquent les médiocres performances du secteur énergétique russe. Les Russes en sont parfaitement conscients. Le pays a lancé depuis 2008 une politique ambitieuse d’amélioration de l'efficacité énergétique. Le Président Medvedev a cité cette politique parmi les cinq domaines d’action prioritaire et a fait récemment voter une loi à cette fin. La France et l’Europe peuvent apporter leurs compétences et contribuer à relever ce défi majeur.

Cette contribution européenne est d’autant plus pertinente qu’elle est rentable. Les investissements sur l’ensemble du territoire russe sont évalués à 320 milliards de dollars, mais ils permettraient des économies de 80 milliards par an, rendant rapide le retour sur investissement. Le pays sauvegarderait chaque année environ 240 milliards de mètres cubes de gaz naturel, 340 milliards de kWh d’électricité, 89 millions de tonnes de charbon et 43 millions de tonnes de pétrole, prolongeant ainsi dans le temps son indépendance énergétique comme ses recettes d’exportation.

a) La coopération russo-allemande: bilan de l'agence RUDEA

Une agence russo-allemande pour l'énergie (Russisch-Deutsche Energie-Agentur, RUDEA) a été instituée en 2009. Cette agence semble bénéficier de moyens publics importants (apparemment 3 millions d'euros – le montant exact n'a pas été rendu public – et 30 collaborateurs), financés par un apport initial du gouvernement allemand et des entreprises, et un système de financement permanent (affectation d'une partie des recettes liées à la vente des crédits carbone liés aux projets CDM inclus dans le portefeuille de la DENA, l'agence allemande pour l'énergie). Cette agence constitue à l’évidence un outil pour promouvoir les technologies allemandes en Russie. La présence en son sein de Siemens, qui dispose déjà d’un partenariat avec ROSATOM, et l’intérêt que les autorités russes ont marqué publiquement pour les sociétés allemandes de l’énergie en témoignent.

Pour l'heure, le bilan que l’on peut établir de la première année d'activité de cette agence n’est que partiel. Les experts allemands semblent bénéficier d'une entière liberté pour identifier les projets en région et proposer, dans le cadre des audits qu’ils mènent, leurs solutions. Il leur faut toutefois convaincre les autorités locales, ce qui constitue le principal obstacle auquel ils se heurtent.

b) La création du centre franco-russe sur l'efficacité énergétique: enjeux et bénéfices attendus

La création d'un centre franco-russe pour l'efficacité énergétique a été annoncée en juin dernier, lors du Forum économique de Saint-Pétersbourg. Il était logique que Paris et Moscou s’entendent sur ce terrain, ayant en partage l’objectif d’une meilleure efficacité énergétique pour leurs économies respectives.

Sa création a été préparée par des discussions menées, au cours du premier semestre, par les ministères chargés de l’énergie, les agences nationales (l'ADEME et l'Agence russe de l'Energie / REA), et l’association des entreprises françaises présentes en Russie dans le secteur de l'efficacité énergétique. Deux personnes – M. Timour Ivanov, directeur général de REA et votre Rapporteur, qui préside le syndicat national pour le gaz et l’électricité en Ile de France – ont été désignées afin de mener ces négociations à leur terme, au début du mois d'octobre.

La mise en route de ce centre est attendue pour la fin de l'année. Pour la France, les bénéfices potentiels sont considérables. En février 2010, a été créée une association des entreprises françaises présentes en Russie dans le secteur de l'efficacité énergétique; qui réunit 11 entreprises parmi lesquelles Alstom, BNP Paribas, Dalkia, EDF, GDF Suez, Lafarge, Saint-Gobain, Schneider Electric, Total. Cette initiative marque l’intérêt de nombreuses entreprises françaises pour les activités liées à l'efficacité énergétique en Russie ainsi que leur implication croissante sur ce marché en plein développement, à l’instar des sociétés allemandes. Il est également prévu que le centre s’appuie sur les agences gouvernementales que sont l’ADEME et la REA.

L'activité de ces entreprises françaises en Russie se heurte toutefois à un certain nombre d'obstacles, fort classiques au demeurant: législations et réglementations inadaptées; différences de pratiques et de savoir-faire entre partenaires français et russes; difficultés de financement; et nécessité d'obtenir l'accord des pouvoirs publics au niveau national et local. C’est la création du centre franco-russe précité qui doit permettre de résoudre ou d'atténuer ces difficultés, en mettant en contact l'ensemble des acteurs intéressés par le processus. Les principes de son fonctionnement ont été arrêtés lors du conseil économique, financier, industriel et commercial (CEFIC) franco-russe de Moscou, le 5 octobre 2010, sous la coprésidence de Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie, de l’industrie et de l’emploi et de M. Alexandre Joukov, vice-premier ministre de la Fédération de Russie. Ce centre, qui constitue une structure non commerciale installée dans les locaux de l’Agence russe de l’énergie, servira de plate-forme d’échange sur le cadre institutionnel et économique prévalant en Russie. Il contribuera à identifier les secteurs où des projets de meilleure efficacité énergétique pourront être mis en place. Il constituera également une vitrine pour les entreprises françaises, qui seront ainsi à même de démontrer leurs savoir-faire et de faire valoir leurs projets et leurs propositions auprès des bons interlocuteurs. Il sera donc un outil essentiel de promotion des intérêts économiques de la France.

B – Les suites de la conférence de Copenhague

L’échec relatif de la conférence de Copenhague n’a évidemment pas arrêté les négociations internationales sur le climat. Il existe en effet une prise de conscience mondiale sur la nécessité de trouver des solutions au réchauffement climatique.

Les réunions de Bonn, en avril dernier et de Tianjin, dans la première semaine d’octobre, ont constitué les principales étapes de la préparation de la conférence de Cancun, en décembre prochain. L’année 2010 a en outre été ponctuée par la polémique sur la compétence du groupe intergouvernemental des experts sur le climat (GIEC).

1) Le soutien de la France au groupe intergouvernemental des experts sur le climat

Les études du GIEC ont récemment fait l'objet de débats, certains experts les remettant en cause. La France considère toujours que les études de ce groupement font autorité et qu'il convient de s'appuyer sur elles pour mettre en place les politiques de lutte contre le réchauffement climatique.

On rappellera que le GIEC, groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat, a été créé en 1989 sous l'égide de deux organisations des Nations-Unies : l'Organisation Météorologique Mondiale et le Programme des Nations-Unies pour l'Environnement. Il a produit successivement 4 rapports d'évaluation, dont le plus récent est paru en 2007. Ces rapports rendent compte de l'état des connaissances dans les sciences du climat. Ils sont destinés principalement aux gouvernements. Ils constituent un socle scientifique considéré comme neutre, servant de base aux négociations climatiques mondiales.

Les rapports du GIEC ne produisent pas de recommandations. Ils présentent des scénarii, des projections, et des possibilités de mesures techniques. En revanche, les conséquences à en tirer, les choix et décisions relèvent des décideurs politiques.

Rédigés par plusieurs centaines de scientifiques issus de plusieurs dizaines de pays, relus en plusieurs étapes par des milliers de relecteurs issus de nombreux pays, approuvés par une assemblée générale où tous les gouvernements sont représentés, les rapports d'évaluation du GIEC sont considérés comme solides scientifiquement.

Depuis novembre 2009, le GIEC a fait l’objet de plusieurs critiques. Le gouvernement français en a pris acte et demeure attentif à l’évolution de la situation.

Le « climategate » associé à la diffusion de courriels piratés dans les serveurs de l'Université d'East-Anglia (Royaume-Uni) au début du mois de novembre 2009 a donné lieu à une vaste campagne médiatique. Il a entraîné trois enquêtes indépendantes au Royaume-Uni, dont une conduite par un comité du Parlement britannique, une deuxième sous la responsabilité de Lord Oxburgh, et une troisième menée par Sir Muir Russell. Les résultats sont parus respectivement en mars, avril et juillet 2010. De manière synthétique, ces enquêtes disculpent les chercheurs de toute fraude et valident leurs conclusions scientifiques.

D'autres critiques ont porté sur des erreurs contenues dans les rapports du GIEC. Seules deux de ces nombreuses critiques se sont avérées fondées. Une erreur porte sur la fonte des glaciers himalayens. La phrase incriminée figure dans le Volume 2 (935 p.) du 4ème Rapport. Cette erreur résulte d'un non-respect de certaines procédures internes. La deuxième erreur porte sur un chiffre relatif au territoire d'un pays européen, et résulte de la copie d'une source officielle, mais erronée. Il s'agit donc de deux erreurs dans un rapport de 3000 pages, qui n'affectent en rien les principales conclusions du GIEC.

Néanmoins, afin d’éviter à l’avenir ce type d’erreur, le GIEC a entrepris d’améliorer les procédures et les contrôles de qualité. L'importance de l'outil qu'est le GIEC, et la nécessité d'en conforter la crédibilité, ont conduit le président du GIEC et le secrétaire général des Nations Unies à lancer, le 10 mars dernier, un audit externe.

Le GIEC a commencé à préparer son 5ème Rapport d'évaluation, qui sera publié en 2014. Parmi les 831 auteurs et éditeurs sélectionnés, 34 sont des chercheurs français ou travaillant en France. Le Gouvernement continuera à soutenir activement le fonctionnement du GIEC, la contribution française au 5ème rapport d'évaluation et les chercheurs qui s'y sont engagés.

Plus largement, les trois conventions internationales qui furent adoptées lors du Sommet de Rio en 1992 visent l'action coordonnée des gouvernements pour la préservation de l'environnement mondial  par la lutte contre le réchauffement climatique, la préservation de la biodiversité, la lutte contre la désertification. Ces démarches mondiales nécessitent, à l'évidence, de disposer d'évaluations scientifiques élaborées et agréées au niveau intergouvernemental. Alors que s'accentuent les efforts de mise en oeuvre de ces conventions, il importe de défendre les organes scientifiques dont l'existence conditionne la possibilité même d'une action politique concertée au niveau mondial. Sur ce point, votre Rapporteur approuve la position du Gouvernement.

2) Les incertitudes sur le résultat de la conférence de Cancun

L’atmosphère qui règnera à la conférence de Cancun risque d’être radicalement différente de celle de Copenhague, où prévalait une impression d’urgence à trouver un accord à tout prix. La crise économique et financière et les dettes souveraines ont relégué au second plan les trois objectifs de la conférence : limiter à 2% la hausse des températures, en se donnant les moyens d’y parvenir ; dégager 22 milliards d’euros entre 2010 et 2012, puis 74 milliards par an à partir de 2020 en faveur des pays en développement ; enfin, sauver les forêts tropicales, considérées comme des puits à carbone.

Avant la conférence de Copenhague, il était légitime d’espérer la conclusion d’un accord complet et universel faisant directement un lien entre les préconisations des scientifiques et les actions et objectifs à court et à moyen terme des pays et groupes de pays. Si, au fur et à mesure que se rapprochait l'échéance, personne ne croyait plus à la traduction d’un tel accord en instrument juridique international, cette traduction restait pour la plupart des pays la prochaine étape naturelle.

Ce régime juridique devait comporter :

– un paquet atténuant les réductions d’émission de gaz à effet de serre :

pour les pays développés : un engagement contraignant sur des objectifs de l’ordre de 30% de réduction de leurs émissions en 2020 par rapport à 1990, cohérent avec un objectif de réduction de 80% de leurs émissions en 2050 ;

pour les pays en développement et émergents : un engagement sur une réduction significative (dans une fourchette comprise entre -15 et -30%) de leurs émissions par rapport à la tendance actuelle, ainsi que la mise en place de stratégies nationales de développement peu consommatrices de carbone.

pour les pays moins avancés, notamment en Afrique, et les petits États insulaires en développement : la mise en place de mesures spécifiques d’accompagnement et la prise en compte des problématiques de développement, y compris l'accès à l'énergie ;

pour l’ensemble des Etats: l’inclusion d’un dispositif de mesure communication et vérification des actions engagées ; l'inclusion de la déforestation et de la gestion durable des forêts (REDD+) ainsi que des émissions du secteur maritime et aérien ;

– un paquet «adaptation» permettant de répondre rapidement aux besoins des pays en développement ;

– un accord sur le financement des actions ;

– des dispositions sur la coopération technologique permettant d’en faciliter la diffusion, notamment en matière d’efficacité énergétique, de captage et stockage du carbone et d’énergies renouvelables.

La France s'est rapidement interrogée sur cet objectif qui aurait supposé une gouvernance multilatérale hors de portée de la communauté internationale à ce stade. Les chefs d'État et de gouvernement ont commencé à proposer une autre approche, moins ambitieuse : la fixation de l'objectif collectif sur la limitation à 2° de l’élévation des températures et la définition d’objectifs et actions au plan national, couplées à un système international de suivi et d’analyse et comportant enfin un mécanisme de solidarité internationale (« fast start », fonds vert, objectif de 100 milliards de dollars d’aide en 2020, mécanismes technologiques, REDD+…).

Copenhague n’a pas constitué le tournant historique que certains Etats espéraient dans les négociations sur le climat. L’accord final a plutôt été le constat d’une divergence de vues entre les négociateurs qui se sont accordés sur le plus petit commun dénominateur. Il marque néanmoins une prise de conscience collective qui peut constituer un point de départ pour stimuler les actions de lutte contre le changement climatique de tous les pays et augmenter les actions de solidarité envers les pays les plus vulnérables.

L'Union européenne s'est ralliée rapidement à l'accord de Copenhague en présentant une offre conditionnelle de réduction des émissions de gaz à effet de serre de 30% entre 1990 et 2020 (par rapport à 1990) « si les autres pays industrialisés s’engagent à réaliser des efforts comparables et que les pays en développement apportent une contribution adaptée à leurs responsabilités et à leurs capacités».

Les États Unis avaient affiché un objectif de -17% entre 2005 et 2020 (soit environ 15, 7 % entre 1990 et 2020) dans leur projet de législation sur l’énergie et le climat. Cet objectif de –17 % en 2020 était complété par des objectifs de – 30% en 2025, de – 42% en 2030 et de – 83% en 2050. L’annonce, le 22 juillet dernier, de l’abandon de l’examen du projet de loi sur le climat avant les vacances parlementaires, a soulevé de vives interrogations sur l’avenir d’une loi climat aux États-Unis. Même si un projet de loi énergie, marée noire et efficacité énergétique pourrait être examinée à l'automne, il restera très en deçà des attentes de la communauté internationale.

La Fédération de Russie a affiché son intention de réduire d’ici à 2020 ses émissions dans une fourchette de 15 à 25 % par rapport à 1990 à condition que :

– le potentiel des forêts russes soit pris en compte dans l’accomplissement de ses obligations en matière de réduction des émissions issues de l’activité humaine ;

– des obligations juridiquement contraignantes pour la réduction des gaz à effet de serre soient adoptées par les principaux pays émetteurs.

L'Inde s’efforcera de réduire ses émissions par unité de PIB de 20 à 25% en 2020 par rapport à 2005. Les émissions du secteur agricole ne sont toutefois pas prises en compte dans cet engagement.

La Chine a proposé de réduire ses émissions de dioxyde de carbone par unité de PIB de 40 à 45% en 2020 par rapport à 2005, d'augmenter la part des combustibles non fossiles dans la consommation d’énergie primaire à environ 15% d’ici 2020, d'augmenter la couverture forestière de 40 millions d’hectares et le volume du stock forestier de 1,3 milliard de mètres cubes d’ici 2020 par rapport à 2005.

Le Mexique, qui assurera la présidence de la prochaine conférence des parties à Cancun en décembre 2010 a affiché un objectif de réduction -30% de ses émissions en 2020. L'Afrique du Sud, qui assurera la présidence de la conférence des parties en 2011, a également affiché un objectif de - 34% par rapport au scénario de référence de ses émissions en 2020 et -42% de déviation en 2025.

Toutes ces annonces figurent désormais dans les appendices de l’accord de Copenhague. Elles constituent une timide avancée car leur analyse souligne que les objectifs affichés ne sont pas encore suffisants pour limiter le réchauffement en dessous de 2°C.

L’un des problèmes principaux qui grève par avance le résultat de la conférence de Cancun provient de l’incapacité des Etats-Unis à accepter un objectif chiffré. Le poids des groupes de pression au Congrès est tel que l’objectif du Président Obama de convaincre les Représentants et les Sénateurs apparaît vain, surtout à moins d’un mois des élections de mi-mandat. Or, sans législation interne, les Etats-Unis ne pourront jamais signer d’accord international prenant le relais du Protocole de Kyoto. Cette inertie américaine met à mal le compromis si fragile péniblement trouvé à Copenhague. Tout pays peut le contester en arguant de l’absence de tout engagement ferme de Washington. L’Arabie saoudite vient récemment de contester des points sur l’agriculture et la forêt, qui faisaient quasiment l’unanimité.

Grande émettrice de CO2, la Chine a déclaré vouloir investir en faveur d’une économie plus sobre en carbone. Mais elle ne peut que logiquement constater que la réticence américaine à tout engagement fait peser un risque sur la compétitivité de sa propre économie. En conséquence, elle ne souhaite pas qu’un objectif chiffré de réduction de Co2 figure dans le texte qui sortira de la conférence de Cancun, considérant que les pays industrialisés font peser des « exigences déraisonnables », comme l’a indiqué l’agence Chine nouvelle, sur des pays comme l’Inde, le Brésil, l’Afrique du Sud et la Chine.

Il est trop tôt pour préjuger d’un accord à Cancun, mais à moins de sérieuses capacités de compromis, la conférence est placée sous le sceau de l’incertitude. Un nouvel échec ne serait pas définitif, mais il risquerait d’invalider un processus qui s’est déroulé jusqu’à présent dans un cadre multilatéral (ONU) au profit de quelques engagements régionaux, au demeurant non contraignants. En d’autres termes, les réductions d’émissions s’effectueraient en fonction des capacités financières et technologiques des Etats. Une telle issue fragiliserait davantage les pays les plus pauvres qui n’auraient ainsi pas accès à des aides spécifiquement allouées à la protection de l’environnement.

III – LA POLITIQUE EN FAVEUR DE LA BIODIVERSITÉ, ENTRE ESPOIR ET ÉCHEC

La défense de la nature est un concept qui recouvre de nombreux thèmes. Les travaux de l’ONU ont mis en lumière deux d’entre eux, la biodiversité et l’écosystème. La biodiversité renvoie à l’ensemble des manifestations du vivant (espèces, gènes qui contribuent à leur variété) tandis que l’écosystème englobe des complexes dynamiques qui regroupent des espèces animales et végétales, ainsi que des micro-organismes qui interagissent entre eux et avec leur milieu. La protection de la nature exige que nous agissions à la fois sur la quantité d’espèces vivantes comme sur leur variété, car la disparition d’une espèce animale ou végétale peut en entraîner d’autres. Le concept de biodiversité s’est donc graduellement imposé car l’amplification des menaces sur la variété des espèces met à terme en danger la survie de l’être humain.

La diversité biologique est reconnue comme préoccupation commune de l’humanité et a été affirmée comme ressource naturelle par la résolution 1803 (XVII) de l’Assemblée générale des Nations Unies, en décembre 1962. Il a fallu attendre vingt ans, en 1982, pour qu’un premier instrument juridique, la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer, régisse la protection de la biodiversité dans les océans, puis 1992, avec la Convention sur la diversité biologique. Le concept de biodiversité avait en effet pris toute sa portée en 1992 lors du Sommet de la terre, qui s’était tenu à Rio de Janeiro. L’article 2 de la Convention sur la diversité biologique le définit comme « la variabilité des êtres vivants de toute origine, y compris, entre autres, les écosystèmes aquatiques et les complexes écologiques dont ils font partie : cela comprend la diversité au sein des espèces ainsi que celle des écosystèmes ». En résumé, ce concept décrit la variété de la vie sur terre et reflète la façon dont cette diversité change géographiquement et temporellement.

La disparition d’espèces vivantes à grande échelle n’est pas un phénomène nouveau. Les biologistes ont identifié cinq phases de disparitions dans l’histoire de la terre, la plus notable étant sous la période géologique du Permien, 250 millions d’années avant notre ère, lorsque 70 % des espèces terrestres et 95 % des espèces marines ont disparu pour des raisons encore inexpliquées (anoxie des océans, impact d’une météorite en Sibérie…). Mais ces phénomènes se sont déroulés naturellement, sur une longue période, alors que la menace qui pèse actuellement sur les espèces vivantes est due à notre activité et constitue un processus en cours d’accélération.

A –La prochaine conférence de Nagoya, un succès incertain

L’année 2010 a été nommée année de la biodiversité. Elle est dominée par la préparation de la conférence de Nagoya sur la biodiversité, dont l’importance égale celle de Cancun sur le climat et l’énergie.

Cette conférence a été préparée par un intense travail diplomatique. Plusieurs conférences (Bonn et Putrajaya en 2008, Berlin, Paris et Madrid en 2010). La réunion des parties à la convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore menacées d’extinction (CITES), du 13 au 25 mars 2010 à Doha, a toutefois donné un signe avant-coureur des difficultés à aboutir à un accord puisque sur une espèce emblématique comme le thon rouge de Méditerranée, les intérêts économiques de court terme ont fini par l’emporter sur l’évidence scientifique.

1) L’affichage de nouveaux objectifs internationaux et européens ou le risque d’une politique illusoire

Les avis convergent, au niveau national, européen et international sur le fait que la politique actuelle en faveur de la biodiversité est un échec. La disparition des espèces se poursuit en effet à un rythme inégalé dans l’histoire. De nouveaux objectifs internationaux et européens pour la biodiversité seront en conséquence définis d’ici la fin de l’année. 2010 est en effet une année dense quant au nombre de débats internationaux dans ce domaine: lancement de l’année internationale de la biodiversité en janvier 2010 à Berlin, Paris et Madrid, conseil d’administration du Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE) en février, commission du développement durable des Nations Unies en mai, session spéciale de l’Assemblée générale des Nations Unies en septembre, et surtout la dixième Conférence des Parties (COP10) à la Convention sur la diversité biologique (CDB) en octobre à Nagoya. Cette dernière devrait fixer les objectifs mondiaux en faveur de la biodiversité pour les années à venir, mais son succès est loin d’être garanti tant les intérêts des nations négociatrices sont contradictoires (cf infra).

Parallèlement, les réflexions sont en cours sur les objectifs de l'Union Européenne : ceux-ci seront définitivement validés par le conseil environnement à la fin de 2010.

2) Les enjeux de la conférence de Nagoya

Les deux enjeux de la conférence de Nagoya résident dans la mise en place d’une plate-forme scientifique indépendante, chargée d’éclairer les gouvernements dans leurs politiques de protection de la nature, et dans la préparation d’un futur traité international sur l’accès et le partage des ressources génétiques. La plate-forme scientifique s’inspire du groupe des experts sur le climat (GIEC). Appelée plate-forme intergouvernementale sur la biodiversité et les services écosystémiques (IPBES en Anglais), elle fait l’objet depuis 2005 (l’idée en fut lancée lors d’une conférence à Paris) d’intenses négociations qui, à l’instar du climat, mettent à jour les conceptions divergentes de la protection de l’environnement au sein de la communauté internationale.

Dans son principe, l’IPBES souhaite répondre à quatre objectifs :

– réaliser des évaluations de la biodiversité à l’échelle globale et sub régionale ;

– traiter des questions émergentes en se servant des moyens existants d’expertise ;

– identifier les questions de recherche importantes pour la biodiversité et répondre aux interrogations des décideurs publics comme des organisations internationales en charge de l’environnement ;

– renforcer les capacités d’évaluation scientifique de la biodiversité dans les pays en voie de développement.

En résumé, il s’agit de donner aux experts de la biodiversité une légitimité et surtout une visibilité qui leur manque cruellement. L’atteinte à la biodiversité est souvent qualifiée de crise silencieuse au sens où elle n’est pas discernée par une humanité de plus en plus urbanisée. Sa protection n’est que récemment devenue un débat politique, grâce notamment aux négociations au sein de la CITES sur quelques espèces emblématiques comme le thon rouge ou l’ours blanc.

La mise en place de l’IPBES se heurte à plusieurs obstacles. A l’accoutumée, les Etats-Unis sont réticents à l’idée d’une nouvelle structure internationale à laquelle il leur faudra contribuer financièrement. La Chine, très soucieuse de sa souveraineté et consciente des dégâts environnementaux que son modèle économique provoque, ne souhaite pas faire l’objet d’un contrôle international. Le Brésil, porte-parole de nombreux pays en voie de développement, accepte la plate-forme d’experts à la condition que les Etats développés aident les plus pauvres à progresser sur l’expertise dans le domaine de la biodiversité et que leurs scientifiques fassent partie du panel qui sera constitué.

Ce ne sera pas la moindre des difficultés car plusieurs dizaines de milliers de scientifiques à travers le monde peuvent être considérés comme des experts de la biodiversité…

Le futur traité sur l’accès et le partage des ressources génétiques constitue l’autre enjeu, et non le moindre, de la conférence de Nagoya. Ces ressources intéressent vivement les industries pharmaceutiques et cosmétiques. Il s’agit de mettre en place un mécanisme qui détermine juridiquement les propriétaires de ces ressources et de prévoir des versements financiers au profit des Etats qui les détiennent sur leur sol ou dans leurs eaux.

3) La protection des espèces menacées : aller au-delà de la simple prise de conscience

Le trafic d’animaux vivants et morts a pris une ampleur considérable. Il est classé au quatrième rang des trafics illégaux. Il a pour origine des intérêts commerciaux et des pratiques culturelles qui sont bien connues. Le commerce n’est toutefois pas la seule menace qui pèse sur les espèces animales et végétales. L’extension des activités humaines, qui réduit les habitats naturels, et des pratiques économiques qui empêchent la reproduction des espèces animales, comme la surpêche ou l’épandage de produits chimiques, sont également responsables de cette menace.

a) Une politique nationale rigoureuse

Autant votre Rapporteur est parfois critique à l’encontre du manque de volontarisme de notre pays sur certaines questions comme la biodiversité ou la pêche, autant il est heureux de souligner l’engagement français en faveur des espèces menacées. La France est en premier lieu partie à la convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d’extinction (CITES) depuis 1978. Cette convention a pour objectif de garantir que le commerce international des espèces inscrites dans ses annexes, ainsi que des parties et produits qui en sont issus, ne nuit pas à la conservation de la biodiversité et repose sur une utilisation durable des espèces sauvages.

Du fait de sa responsabilité particulière en tant que second marché mondial après les Etats-Unis, l’Union européenne a mis en place des règlements plus stricts que la CITES et couvrant davantage d’espèces, afin de mieux maîtriser ses importations et le commerce interne des espèces les plus menacées. Au titre de ces règlements, la France délivre chaque année près de 64 000 permis certifiant que les spécimens qu’ils accompagnent ont été obtenus légalement et de façon non préjudiciable à l’espèce considérée.

Les douanes françaises contrôlent et visent annuellement aux frontières plus de 57 000 de ces permis. Elles recherchent également les infractions de manière ciblée en fonction des courants de fraude qui leur sont signalés. Ces contrôles ont conduit en 2009 à la saisie de plus de 6 000 spécimens, dont 758 animaux vivants, ainsi que de 1 443 kilogrammes de coquillages, coraux et caviar.

En complément de l’action des douanes, d’autres services effectuent des contrôles sur le territoire national : les directions départementales de la protection des populations assurent le suivi et le contrôle des établissements ou élevages d’agrément hébergeant de la faune sauvage captive, l’Office national de la chasse et de la faune sauvage dispose d’une brigade nationale mobile spécialisée disposant d’une grande capacité d’expertise et d’au moins un correspondant CITES dans chaque département. Enfin, les brigades de gendarmerie sont habilitées à procéder à des contrôles, à relever des infractions et à effectuer des saisies.

Il existe en outre depuis juin 2004 un Office central de lutte contre les atteintes à l’environnement et à la santé publique, chargé de constater les infractions (si l'importance le justifie), d'animer et de coordonner l'action des services répressifs sur le plan national, de les assister, de centraliser l’information et d'en assurer la diffusion à l'ensemble des services, d'observer et d'étudier les comportements les plus caractéristiques des auteurs et complices et de participer à des actions de formation et d'information.

Enfin, pour sensibiliser davantage nos concitoyens, le ministère chargé de l’écologie a mené une vaste campagne d’information des voyageurs, notamment via la diffusion d’un court métrage de sensibilisation des touristes à bord des avions longs-courriers d’Air France et par la large diffusion d’une plaquette d’information sur la CITES mettant l’accent sur la responsabilité qui incombe aux voyageurs lorsqu’ils achètent des animaux, plantes ou produits dérivés issus de la faune ou de la flore sauvages.

b) Poursuivre le soutien à la CITES

En décrétant que 2010 serait l’année de la biodiversité, les Nations unies ont placé la protection des espèces menacées sous le feu de l’actualité. La conférence de la CITES, à Doha, du 13 au 25 mars 2010 a ainsi bénéficié d’un retentissement mondial, d’autant que le sort du thon rouge y était débattu.

La conférence de Doha peut être qualifiée de succès relatif. Certaines espèces de requins ont été inscrites à l’annexe II de la CITES, mais le thon rouge, dont l’exploitation commerciale est source de grands profits, n’a pas été classé en annexe I (animaux en voie de disparition imminente). Son exploitation demeure en conséquence autorisée.

La CITES présente l’immense qualité de s’appuyer sur le contrôle du commerce international pour préserver la biodiversité. Malgré quelques échecs, elle constitue l’un des rares organismes internationaux dont les objectifs ont été respectés, au point que d’autres systèmes de contrôle se tournent vers elle lorsque leur action est sans résultat. Ainsi la CITES a été saisie du dossier du thon rouge après que les Etats membres de la commission internationale pour les thonidés de l’Atlantique aient échoué à parvenir à un accord sur la gestion de l’espèce. De ce fait, ses décisions sont concrètes et d’application rapide alors que les conventions sur la biodiversité fixent des objectifs généraux dont la mise en œuvre dépend du bon vouloir ou des possibilités humaines et budgétaires des Etats.

Les décisions de la CITES se prennent à la majorité, ce qui empêche un seul Etat de les bloquer. Elle est donc en mesure de peser sur la communauté internationale dès lors qu’une prise de conscience prend de l’envergure. Un bon millier d’espèces, dont certaines très emblématiques – tigres, tortues marines, grands singes, éléphants, cactées, orchidées, bois rose – doivent leur survie à ce mécanisme, mais la tâche demeure de grande ampleur lorsque l’on se rappelle que 32 000 espèces exigent une protection.

La CITES ne couvre pas malheureusement l’ensemble des menaces à l’encontre de la biodiversité. Elle ne traite ni de la réduction des habitats, ni des espèces invasives, ni encore du réchauffement climatique. Son objet limité explique d’une certaine manière son succès, mais l’ampleur de la réduction du vivant exige une mobilisation plus large de la communauté internationale.

4) Une stratégie nationale qui soutient l’action internationale

La politique de protection de la biodiversité est par nature transversale. Toute action, qu’il s’agisse des transports, de la construction et de l’aménagement urbain, de l’agriculture, peut entraîner des conséquences sur la biodiversité.

La France fonde son action internationale sur la stratégie nationale pour la biodiversité (SNB) adoptée en 2004. Elle a pour objectif d’enrayer la perte de biodiversité en renforçant la politique du patrimoine naturel et en intervenant sur l’ensemble des politiques et activités sectorielles.

Notre pays porte une responsabilité forte et se doit d’être exemplaire. Il est en effet le seul pays présent dans cinq des 25 "points chauds" de la biodiversité mondiale (Méditerranée, Caraïbes, Océan Indien, Nouvelle Calédonie, Polynésie) et dans une des trois zones forestières majeures de la planète (Guyane / Amazonie). Son domaine maritime est le deuxième du monde. Sur son territoire métropolitain, elle accueille 4 des 5 zones biogéographiques de l’Europe occidentale et centrale. Elle doit donc moderniser sa politique du patrimoine naturel et plus largement de préservation et gestion durables de la biodiversité, en conservant les acquis, afin de mobiliser davantage les acteurs privés, les citoyens et les collectivités territoriales.

La stratégie nationale pour la biodiversité (SNB) constitue le principal instrument de mobilisation nationale en faveur de la protection du patrimoine vivant. Ses deux objectifs sont :

– contribuer à inverser l’érosion de la biodiversité d’ici 2010, objectif fixé au Sommet de la Terre à Johannesburg, repris par l’Union européenne, et réaffirmé par le Président de la République en janvier 2005.

– valoriser les territoires par une gestion concertée et contractualisée du patrimoine naturel.

La SNB est mise en œuvre à travers des plans d’actions sectoriels, élaborés puis mis en œuvre par les ministères concernés, et complétés par un programme d’actions transversales. Ces plans d’action constituent un programme de travail pour les années à venir, et sont révisables tous les deux ans. Dix plans d’action sectoriels sont en cours de mise en œuvre pour la période 2009-2010 et intègrent les engagements du Grenelle de l’environnement : patrimoine naturel, agriculture, des transports, de l’urbanisme, de la mer, et actions internationales outre-mer, recherche, forêt, tourisme. Le plan d’action général outre-mer s’accompagne de stratégies élaborées par chacun des départements et collectivités d’outre-mer, détenteurs d’une biodiversité exceptionnelle.

La mise en place de la SNB résulte en grande partie des engagements internationaux de la France qui est signataire de nombreuses conventions internationales relatives à la protection des espèces ainsi que des obligations communautaires issues des directives européennes relatives à la protection des espèces. Les principaux textes internationaux signés par notre pays sont retracés ci-après :

– Convention pour la protection du patrimoine mondial, culturel et naturel : la convention a pour finalité de préserver les biens culturels et naturels, de valeur universelle exceptionnelle qui, par inscription à la demande des Etats parties sur la liste du patrimoine mondial, sont reconnus par la communauté internationale comme patrimoine mondial de l’humanité.

– Convention sur la diversité Biologique (CDB) : il s’agit du premier accord mondial sur la conservation et l’utilisation durable de la diversité biologique. Cette convention se fixe trois objectifs principaux : la conservation de la diversité biologique, l'utilisation durable de ses éléments constitutifs, et le partage juste et équitable des avantages qui découlent de l'utilisation des ressources génétiques, à des fins commerciales et autres. Elle reconnaît, pour la première fois, que la conservation de la diversité biologique est "une préoccupation commune à l'humanité" et qu'elle fait partie intégrante du processus de développement. La convention couvre tous les écosystèmes, toutes les espèces, et toutes les ressources génétiques. Elle s'étend également au domaine de la biotechnologie, en expansion rapide, puisqu'elle traite des questions du transfert et du développement des biotechnologies, du partage des avantages qui en découlent et de la bio-sécurité. Bien qu’intervenant sur des sujets complexes, la Convention possède un caractère juridiquement contraignant.

– Protocole de Carthagène sur la prévention des risques biotechnologiques: jusqu’à présent seul protocole pris en application de la Convention sur la diversité biologique, le Protocole de Carthagène est aussi le premier texte international sur la prévention des risques biotechnologiques. C’est à la fois un texte de base et un texte novateur. Conformément au principe de précaution, il a pour objectif de contribuer à la protection de l'environnement, celui-ci étant entendu dans un sens très large (incluant la santé humaine) lorsqu’il y a transfert, manipulation et utilisation des organismes génétiquement modifiés (OGM). Son champ d'application couvre tous ces organismes, à l'exception des médicaments humains. Le Protocole réglemente plus particulièrement les échanges internationaux d’OGM susceptibles d'avoir des effets défavorables sur la conservation et l'utilisation durable de la diversité biologique.

– Traité international sur les ressources phytogénétiques pour l'alimentation et l'agriculture : négocié dans le cadre de l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture, ce traité, qui a été récemment révisé, est intéressant car il applique à un secteur particulier, les ressources phytogénétiques (1) pour l’agriculture et pour l’alimentation, les principes proclamés par la convention sur la diversité biologique.

– Convention relative aux zones humides : son objectif est la conservation et la gestion naturelle des zones humides et de leurs ressources. Le choix de ces zones est effectué sur la base de critères parmi lesquels figurent  la présence d’espèces rares, d’espèces en danger ou encore d’espèces, qui sont, au contraire, en nombre significatif à l’échelle mondiale (oiseaux d’eau notamment) ; le rôle que jouent les zones humides dans le maintien d’activités économiques durables, qui, elles mêmes, conditionnent le maintien sur place des populations locales. Fondée à l’origine sur la préservation des habitats d’oiseaux d’eau, cette convention a maintenant élargi son champ de compétence à la protection de tous les aspects de la biodiversité et va même jusqu’à la protection des valeurs sociales et culturelles présentes sur le territoire des zones humides.

– Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d’extinction (dite « CITES ») : la CITES repose sur le principe selon lequel en contrôlant et en limitant le commerce des espèces menacées d’extinction, on peut également contrôler les prélèvements de spécimens. Elle régule donc le contrôle du commerce international, ce dernier étant défini de manière à y inclure toutes les situations dans lesquelles une plante ou un animal d’une espèce inscrite dans les annexes de cette Convention vivant ou mort, entier ou pas ainsi que ses parties et produits dérivés, traversent des frontières internationales. La CITES réglemente ainsi l’importation, l’exportation, la réexportation et le transit des différents spécimens. Les espèces sont réparties dans les annexes I (espèces menacées d’extinction), II (espèces qui risquent de devenir menacées d’extinction si le commerce international de leurs spécimens n’est pas réglementé) et III (espèces qu’un pays soumet à une réglementation locale visant à restreindre l’exploitation, le contrôle de ces mesures nécessitant la coopération des autres Etats parties).

– Convention internationale pour la protection des végétaux: cette convention organise l’action commune pour empêcher la dissémination et l’introduction d’organismes nuisibles aux végétaux et aux produits végétaux, et promouvoir des mesures en matière de lutte contre les espèces exotiques envahissantes végétales, animales ou autres. Elle joue un rôle de premier plan dans le commerce.

– Convention sur la conservation des espèces migratrices appartenant à la faune sauvage (dite «convention de Bonn ») : L’objectif de cette convention est d'assurer la conservation des espèces migratrices terrestres, marines et aériennes sur l'ensemble de leur aire de répartition.

A côté des textes internationaux, notre pays est également signataire de textes européens.

– Convention européenne du paysage : la convention vise à encourager les autorités publiques à adopter aux niveaux local, régional, national et international, des politiques et mesures de protection, de gestion et d’aménagement des paysages européens, dans une perspective de développement durable. Elle concerne tous les paysages, remarquables ou ordinaires qui déterminent la qualité du cadre de vie des populations, quel que soit leur état, dégradé ou non.

– Convention sur la protection des Alpes: cette convention porte sur la protection des Alpes et a pour objet l’harmonisation des politiques des parties en vue de concilier les intérêts économiques en jeu dans le massif alpin avec les exigences de la protection d’un patrimoine naturel menacé.

– Convention relative à la conservation de la vie sauvage et du milieu naturel en Europe (dite « Convention de Berne ») : cette convention a pour objet d'assurer la conservation de la flore et de la faune sauvage ainsi que de leurs habitats naturels. Elle insiste, notamment sur les espèces et les habitats dont la conservation nécessite la coopération de plusieurs Etats. Une attention particulière est accordée aux espèces, y compris les espèces migratrices, menacées d'extinction et vulnérables. Les parties contractantes prennent les mesures nécessaires pour maintenir ou adapter la population de la flore et de la faune sauvage à un niveau qui correspond notamment aux exigences écologiques, scientifiques et culturelles.

– Accord relatif à la conservation des chauves-souris en Europe : cet accord protège toutes les espèces de chauves-souris d’Europe. Les obligations pour les Etats signataires sont les suivantes: interdire la destruction, la détention et la capture de chauves-souris, inventorier et protéger les sites les plus importants particulièrement les zones de chasse et s’efforcer de remplacer les pesticides et les produits chimiques de traitement du bois hautement toxiques par des substituts moins dangereux.

– Accord sur la conservation des oiseaux d'eau migrateurs d'Afrique et Eurasie : l’accord couvre 235 espèces d’oiseaux, qui dépendent écologiquement des marécages pour au moins une partie de leur cycle annuel ; parmi ces espèces se trouvent de nombreuses espèces de pélicans, de cigognes, de flamands roses, de cygnes, d’oies, de canards, d’échassiers, de mouettes, et d’hirondelles de mer.

B – Un nouvel enjeu : la gestion de la biodiversité en haute mer

La gestion de la biodiversité en haute mer devient un enjeu crucial en raison de la menace que l’activité humaine fait peser sur les espèces. Les mers et océans forment 72% de la surface du globe, et les deux tiers des eaux marines sont en haute mer, où vivent de nombreuses espèces pélagiques.

Cet espace subit de nombreux risques : pollution d’hydrocarbures et autres produits chimiques, soupes plastiques notamment (résidus non biodégradables qui flottent entre la surface et 3 mètres de fond et qui suivent les sens des courants, que les poissons ingèrent parfois) et enfin surpêche.

Le problème principal provient de ce que cet espace n’est pas géré par la communauté internationale. Il relève de la res communes et de la res nullius.

1) Des régimes juridiques de protection, mais peu de moyens de contrôle

Les régimes juridiques de non-appropriation s’appliquent à des choses qui, en raison de leur nature et de leurs caractéristiques physiques, ne peuvent pas faire l’objet d’une appropriation. C’est le cas de la mer, de l’espace ou de l’atmosphère (res communes) ou des choses qui, compte tenu de leur abondance, ne rendent pas nécessaire des règles en régissant la propriété (res nullius telle que la ressource halieutique, par exemple). Le statut de res nullius caractérise une chose qui, au moment envisagé, se trouve être sans propriétaire. Contrairement à la res communis qui est une chose ou un bien, corporel ou incorporel, appartenant à l’ensemble d’une communauté, la res nullius peut devenir la propriété de celui qui, le premier, l’occupe, l’utilise ou la ramasse.

En droit de la mer, dans le cadre de la Convention des Nations Unies de 1982 (CNUDM), le régime de res nullius s’applique aux ressources situées en haute mer, c'est-à-dire au-delà des zones soumises à la juridiction des Etats, la haute mer elle-même étant considérée comme res communis. Le statut de res nullius ne caractérise toutefois que les seules ressources de la colonne d’eau, les fonds marins situés au-delà des limites de la juridiction nationale (y compris leur sous-sol) ayant, quant à eux, le statut de « patrimoine commun de l’humanité ».

Le statut de res nullius n’empêche toutefois pas de soumettre les ressources auxquelles il s’applique à des règles de gestion visant à en garantir la protection et la conservation. Ainsi, tout en rappelant que c’est la liberté qui prévaut pour la pêche en haute-mer, la CNUDM souligne que les Etats ont le devoir de prendre les mesures nécessaires pour assurer la conservation des ressources biologiques ou de coopérer entre eux à cette fin. C’est dans cet esprit que la communauté internationale a adopté l’Accord des Nations Unies relatif à la conservation et à la gestion des stocks de poissons chevauchants et de poissons grands migrateurs (1995) ou encore le Code de conduite pour une pêche responsable de l’Organisation pour l’Alimentation et l’Agriculture (1993). C’est également dans cet esprit qu’ont été institués des modes de gestion collective des ressources halieutiques dans des zones comprenant des parties de haute mer, dans le cadre de diverses organisations régionales de pêche. La France, qui est membre de plusieurs de ces organisations régionales de pêche, participe à ces travaux et veille à l’application des règles qui en découlent par ses ressortissants et les navires battant son pavillon.

Par ailleurs, au-delà des seules affaires de pêche, la CNUDM met à la charge des Etats une obligation générale de protection du milieu marin (article 192 de la convention). Cette obligation concerne aussi bien les zones placées sous la juridiction des Etats que la haute mer. Dans cette perspective, les Etats se mobilisent, depuis plusieurs années, au sein de différentes instances internationales, pour explorer les voies d’une gestion durable de la haute mer et de ses ressources. Ce processus repose, en particulier, sur les réflexions d’ordre juridique et institutionnel menées au sein du groupe de travail ad hoc des Nations Unies chargé d’étudier les questions relatives à la conservation et à l’exploitation durable de la biodiversité marine dans les zones situées au-delà des limites de la juridiction nationale, dont la dernière réunion s’est tenue à New-York du 1er au 5 février 2010.

La France, qui participe à ces travaux aux côtés de ses partenaires de l’Union européenne, met en avant l’importance centrale de la CNUDM, qui doit demeurer le cadre de référence de toute initiative portant sur la haute mer. La France est favorable à la mise en place d’un système de protection et d’exploitation soutenable de la biodiversité dans les zones situées au-delà des limites de la juridiction nationale. A cette fin, elle est disposée à examiner toutes les possibilités, y compris un statut de res communis encore à élaborer.

Au-delà des textes internationaux, qui démontrent que l’humanité a une conscience limitée de l’importance de la haute mer, la question du contrôle des activités humaines est cruciale. Peu de pays disposent de forces navales et de satellites en nombre suffisant pour contrôler l’application de ces textes. La haute mer est en pratique une zone de non-droit. Or son importance exige que soit mise en place un mode de gestion commun (gouvernance) de cet espace.

2) De nombreux forums, mais aucune décision

A l’initiative de nombreux instituts, think tanks et autres organisations internationales, la protection de la biodiversité en haute mer a pris toute sa place dans le débat général sur la préservation de l’environnement. En France, l’Institut de développement durable et des relations internationales (Iddri) a animé plusieurs séminaires, notamment à Monaco, en liaison avec le Fonds français pour l’environnement mondial. D’autres enceintes – congrès mondial de la nature à Singapour, forum global sur les océans, les côtes et les îles à Hanoï, colloque international de Brest – ont permis de bien identifier l’ensemble des problèmes. L’avenir de la haute mer demeure néanmoins indécis, ce qui en matière d’environnement est lourd de menaces. Les Etats peinent à remettre en question une tradition séculaire de totale liberté dans cet espace. Mobilisés par les négociations sur le climat et l’énergie, analysant la biodiversité sous l’angle de la vie terrestre, ils ne montrent guère de volonté à ouvrir un nouveau dossier sur lequel la communauté internationale a, une nouvelle fois, de fortes chances d’être divisée.

CONCLUSION

L’action internationale de la France en matière d’environnement est l’exact reflet de l’état des négociations à l’échelle internationale : l’affichage d’une volonté politique, mais peu de résultats.

2010 apparaît comme une année de transition. Après le relatif échec de la conférence de Copenhague, la préparation de la conférence de Cancun ne permet pas à ce stade de se prononcer sur l’accord qui pourrait être trouvé au Mexique. Les lignes de force de la négociation, avec des Etats-Unis attentistes et des pays en voie de développement qui ne souhaitent pas d’engagements qui deviendraient des contraintes laissent plutôt présager un accord minimal, comme à Copenhague, bien en deçà des efforts exigés pour limiter les émissions de CO2.

Parallèlement, la biodiversité subit chaque année des atteintes alors que les parties à la prochaine conférence de Nagoya ne parviennent pas à s’accorder sur les mécanismes d’expertise qui aideraient les Gouvernements à prendre leurs décisions.

Le cadre multilatéral des négociations, indispensable en raison du caractère global des problèmes, se révèle d’un maniement difficile dès lors que les pays qui négocient partent de situations nettement différentes et ont des objectifs souvent divergents.

Dans ce contexte, la France agit selon sa vision d’un monde multipolaire. Notre pays a activement contribué aux timides avancées de la politique européenne et au compromis trouvé à Copenhague, mais lorsque deux puissances – les Etats-Unis et la Chine – s’opposent et bloquent toute évolution majeure, la France comme l’Europe ne peuvent que constater leur incapacité à peser sur les processus multilatéraux. « Ils voulaient changer le monde mais ils ne savaient pas comme c’est lourd et mou, le monde » (Paul Nizan). La diplomatie multilatérale exige une infinie patience et la construction pas à pas de nouveaux équilibres. Il faut juste espérer que cette construction ne sera pas trop lente, face aux exigences environnementales de notre époque.

Les crédits que consacre notre pays à l’action internationale pour la protection de l’environnement peuvent apparaître modestes au regard des enjeux pour notre planète. La nécessaire politique de rigueur budgétaire s’applique à cette action comme à d’autres… Mais une politique ne se résume pas à des montants financiers. Votre Rapporteur, lors des auditions qu’il a tenues, a pu constater la mobilisation des fonctionnaires des ministères du budget, des affaires étrangères et de l’écologie en faveur de l’environnement, ainsi que leur excellente capacité d’expertise. Depuis 2007, la France a pleinement participé à l’ensemble des négociations multilatérales grâce à la réorganisation de son outil administratif. Aussi est-il logique de donner un avis favorable aux crédits proposés pour 2011.

EXAMEN EN COMMISSION

La commission des affaires étrangères a entendu, en commission élargie à l’ensemble des députés, Mme Chantal Jouanno, secrétaire d’État chargée de l’écologie, le mardi 12 octobre 2010.

M. le président Jérôme Cahuzac. Madame la secrétaire d’État chargée de l’écologie, je suis heureux de vous accueillir avec Patrick Ollier, président de la Commission des affaires économiques, Christian Jacob, président de la Commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, et Axel Poniatowski, président de la Commission des affaires étrangères.

Nous sommes réunis en commission élargie afin de vous entendre sur les crédits consacrés, dans le projet de loi de finances pour 2011, à la mission « Écologie, développement et aménagement durables », ainsi qu’aux comptes spéciaux qui lui sont associés.

La procédure de la commission élargie, destinée à privilégier les échanges entre ministres et députés, donne toute la place aux questions et à vos réponses.

La mission dont nous débattons regroupe des crédits multiples et considérables, suivis par onze rapporteurs de quatre commissions.

Pour organiser nos débats, et en accord avec mes collègues, nous proposons, comme l’an dernier, de les séparer en deux thématiques distinctes. Nous traiterons d’abord des politiques de l’écologie et du développement durable, en commençant par des questions des rapporteurs concernés, adressées à Mme Chantal Jouanno. Dans un deuxième temps, à seize heures quinze, la discussion s’engagera sur les transports, en présence de M. Dominique Bussereau, secrétaire d’État chargé des transports. Nous entendrons alors les questions des rapporteurs concernés, puis de nos autres collègues, ainsi que les réponses du secrétaire d’État chargé des transports.

Les commissions se réuniront aussitôt après afin de procéder au vote sur les crédits de la mission et les articles rattachés.

Sur le thème des politiques de l’écologie et du développement durable, nous entendrons successivement les questions de M. Yves Censi, qui suppléera Jacques Pélissard, rapporteur spécial de la Commission des finances pour les crédits relatifs à la prévention des risques, conduite et pilotage des politiques de l’écologie, de l’énergie, du développement durable et de la mer, et celles de M. Marc Goua, rapporteur spécial pour les crédits relatifs à l’énergie. La Commission des finances ayant confié à M. Hervé Mariton une mission sur l’eau, noter collègue interviendra également.

M. le président Axel Poniatowski. Comme les années précédentes, la Commission des affaires étrangères a souhaité rendre un avis sur les crédits consacrés à l’écologie, au développement et à l’aménagement durables.

La dimension internationale des questions liées à l’écologie, au climat, à la biodiversité et au développement durable s’impose aujourd’hui comme une évidence, au point que la protection de l’environnement fait désormais partie intégrante de notre diplomatie. C’est cette approche que Jean-Jacques Guillet, rapporteur pour avis au nom de la Commission des affaires étrangères, va privilégier.

Pour ma part, je souhaiterais vous interroger sur deux points.

D’une part, la création au ministère des affaires étrangères et européennes d’un service de la mondialisation, doté notamment d’une direction des biens publics mondiaux, ne risque-t-elle pas d’occasionner des doublons avec certains de vos services ? Comment se passe la coordination entre vos deux ministères ?

D’autre part, le marché européen du CO2, mis en place en 2005, est soumis à une série de critiques en raison d’incidents, avec notamment en 2009 la découverte d’une fraude massive à la TVA, puis en février 2010 la tentative de piratage des registres nationaux de quotas européens, et enfin en mars 2010 la décision du gouvernement hongrois de mettre en vente des crédits, qui étaient déjà restitués par des entreprises de ce pays. L’ensemble de ces incidents de nature diverse a nourri la suspicion à l’égard des mécanismes du marché européen du CO2, dont le rôle est d’assurer la sauvegarde d’un bien public, le climat.

M. Yves Censi, rapporteur suppléant de M. Jacques Pélissard, rapporteur spécial de la Commission des finances sur les crédits Prévention des risques, conduite et pilotage des politiques de l’écologie, de l’énergie, du développement durable et de la mer. Madame la secrétaire d’Etat, chers collègues, Jacques Pélissard, rapporteur spécial des crédits des programmes 181  – « Prévention des risques et du programme » et 217  – « Conduite et pilotage des politiques de l’écologie, de l’énergie, du développement durable et de la mer » – ne peut être là aujourd’hui et m’a demandé de bien vouloir le remplacer.

Le projet de loi de finances pour 2011 prévoit de porter les crédits du programme « Prévention des risques » à 373,6 millions d’euros en autorisations d’engagement, et à 303,6 millions d’euros en crédits de paiement. Si les crédits de paiement sont stables, les autorisations d’engagement sont en forte augmentation –  plus 8 % –  pour répondre à trois priorités : la réalisation des plans de prévention des risques technologiques ; la mise en œuvre du plan « digues » ; l’application des mesures du Grenelle de l’environnement

En matière de prévention des risques, l’année 2010 a été une année difficile puisqu’elle a été marquée par deux événements dramatiques : la tempête Xynthia, qui a causé la mort de 51 personnes, et les inondations du Var dont le bilan est de 25 morts.

La première question du rapporteur spécial portera sur le plan « digues ». Le Président de République a annoncé en mars dernier le lancement d’un plan ambitieux de prévention des submersions marines et des risques de crues pour un montant de 500 millions d’euros. Pourrait-on avoir des précisions sur le financement de ce plan ?

La deuxième question portera sur le Fonds Barnier. Les recettes du Fonds pour 2011 sont de 157,5 millions d’euros. Il devra à la fois financer une partie du plan « digues » et le programme de délocalisation mené à la suite de la tempête Xynthia. Ce fonds sera donc sollicité très au-delà de ses ressources et devra recevoir des avances ou des subventions de l’État. Quels sont les dispositifs prévus ? Les procédures dans le cadre du Fonds Barnier sont souvent considérées comme rigides et longues. Des améliorations ont-elles été apportées ? Ses résultats sont-ils évalués ?

La troisième question portera sur la réalisation des 420 plans de prévention des risques technologiques, dont l’objectif est de protéger les riverains des sites industriels à risques. Au 30 septembre dernier, seuls 54 d’entre eux étaient approuvés. Un retard très important a été pris. L’un des points de blocage semble être la signature de conventions de financement entre l’État, la collectivité territoriale et l’industriel lorsque les plans prévoient des mesures foncières. Quelles mesures entend prendre le Gouvernement pour accélérer la réalisation des plans de prévention des risques et, en particulier, débloquer la mise en place de PPRT en cas d’absence d’accord financier ?

Le programme « Conduite et pilotage des politiques de l’écologie, de l’énergie, du développement durable et de la mer » constitue le programme support de la mission dont il regroupe la quasi-totalité des emplois et des dépenses de personnel.

Les crédits du programme 217, avec 3,8 milliards en autorisations d’engagement et 3,6 milliards en crédits de paiement, sont en légère diminution  – 2 % pour les autorisations d’engagement et 7 % pour les crédits de paiement.

Les questions porteront sur le regroupement de l’administration centrale à la Défense. Ce regroupement, qui répond à une démarche de rationalisation, s’est fait sur cinq implantations et semble présenter des inconvénients : dispersion physique des services, situation immobilière coûteuse qui ne permet pas de rationaliser toutes les fonctions support, pérennité de l’installation qui n’est pas assurée.

Le ministère a en particulier décidé que la tranche ferme du bail de la tour Pascal A serait prolongée de trois ans, et a renoncé à la possibilité de mettre fin au bail de cette tour à l’échéance de la période de six ans figurant au bail initial. Pour procéder à la couverture en autorisations d’engagement des tranches fermes de l’ensemble de ces baux, une enveloppe exceptionnelle de 203 millions d’euros d’autorisations d’engagement est demandée dans le projet de loi de finances pour 2011. Pourquoi ce choix a-t-il été fait ?

Pourquoi l’indicateur « Dépenses liées à la fonction immobilière par mètre carré rapportées à l’indice de référence de loyers en administration centrale » a-t-il été supprimé ?

Où en est le projet de regroupement de tous les services centraux dans un immeuble neuf à la Défense ?

M. Hervé Mariton. Madame la secrétaire d’État, le financement des subventions des agences de l’eau par emprunt vous paraît-il raisonnable dans la durée ? Ou, au contraire, l’évolution des dépenses de l’Agence de l’eau ne doit-elle pas être contrôlée afin que cesse cette pratique, peu orthodoxe en termes de financement public ?

En vingt ans, la prévalence du saturnisme en France est passée de 2,1 % à 0,1 %. La question est donc aujourd’hui de savoir comment améliorer les qualités de l’eau consommée, afin que cette prévalence baisse encore. Si l’on poursuit la stratégie d’éradication du plomb, le coût serait de l’ordre de 20 milliards entre les dépenses engagées sur la partie publique – branchements – et les dépenses à réaliser par les particuliers. Existe-t-il d’autres moyens pour limiter les effets du plomb ? Ne serait-il pas plus raisonnable de demander à nos concitoyens potentiellement exposés de faire couler un peu d’eau du robinet avant de la consommer, ce qui coûterait nettement moins cher et serait tout aussi respectueux de l’environnement ? En d’autres termes, la France entend-elle demander à Bruxelles, dans le cadre des rendez-vous des mois à venir, une révision de la directive de 1998, afin d’éviter cette dépense de 20 milliards d’euros ?

Enfin, chaque loup coûte aux contribuables français environ 40 000 euros par an. Sachant que notre pays compte un peu moins de 200 loups, cette dépense est-elle raisonnable dans la situation actuelle de nos finances publiques ?

M. Marc Goua, rapporteur spécial de la Commission des finances pour les crédits Énergie. Madame la secrétaire d’État, chers collègues, le programme n° 174 – Énergie et après-mines – a peu évolué depuis l’an dernier. La plupart de ses crédits  – qui sont en baisse substantielle – recouvrent en effet les dépenses obligatoires que sont les prestations servies aux anciens mineurs. Ils sont en baisse tendancielle.

Cependant, une évolution – attendue depuis longtemps – aurait pu avoir lieu. La réforme des retraites minières de 2001 pénalise les mineurs ayant fait valoir leurs droits avant 1987. Alors que les représentants de cette classe d’âge sont de moins en moins nombreux, ce ne serait que justice de faire un geste dans leur direction. Cette évolution avait d’ailleurs fait l’objet d’une promesse du candidat Sarkozy lors de la campagne pour l’élection présidentielle.

Au vu de la baisse régulière des coûts sur l’ensemble du programme, est-il envisageable de réévaluer la pension des mineurs, en particulier des mineurs ardoisiers, et dans quelle proportion ?

Le montant relativement modeste des crédits budgétaires inscrits au programme 174 ne doit pas faire oublier l’effort financier consenti par l’État dans le domaine de l’énergie par le biais des réductions et crédits d’impôts, tel le crédit d’impôt développement durable. L’article 13 du projet de loi de finances pour 2011 prévoit seulement de réduire ce crédit d’impôt.

À plus long terme, ne semble-t-il pas nécessaire de concevoir un autre système de soutien, intégrant davantage les coûts et les avantages respectifs des différentes énergies renouvelables ? Quelles pourraient être les grandes lignes de ce système ?

Enfin, EDF aura accumulé à la fin de l’année 2010 des impayés d’un montant total de 2,7 milliards d’euros, si l’on mesure l’écart entre le produit de la contribution au service public de l’électricité et une vraie compensation intégrale des charges supportées par l’entreprise, du fait de ses achats à prix garanti d’énergie renouvelable, notamment d’origine photovoltaïque. Comment l’État compte-t-il garantir à EDF la compensation intégrale de ses charges, telle que l’a prévue et voulue le législateur.

Mme Chantal Jouanno, secrétaire d’État chargée de l’écologie. La complémentarité entre le ministère de l’écologie, chargé des négociations sur le climat, et le nouveau service Mondialisation, dirigé par Christian Masset, ne pose pas de difficultés. Ce service s’occupe essentiellement des négociations multilatérales sur des questions qui relèvent de notre compétence. Lorsque nous avons négocié à Copenhague sur le climat, par exemple, Brice Lalonde était le négociateur pour la partie technique, lequel était appuyé par Christian Masset et Laurence Tubiana. De même, en ce qui concerne la biodiversité, nous avons défini les positions ensemble.

Sur le marché européen, plusieurs fraudes ont été découvertes, notamment au premier semestre 2009, pour un montant de 5 à 10 milliards d’euros selon Europol. Le ministre d’État et le ministre de l’économie en ont fait une priorité politique, notamment lors de l’installation du nouveau « Comité de Place France carbone » en décembre 2009. Ils ont installé une commission pilotée par Michel Prada, afin qu’elle fasse des propositions pour une meilleure régulation de ce marché – série de propositions que la France a porté au niveau européen. Sans attendre les débats européens, la France a pris des mesures conservatoires au niveau national pour s’assurer que son marché  – le marché Bluenext – puisse opérer dans des conditions plus sécurisées et selon les meilleurs standards disponibles. Il s’agit donc d’un marché réglementé, avec une double supervision de l’Autorité des marchés financiers et de la Commission de régulation de l’énergie.

S’agissant du plan « digues », nous avons prévu une enveloppe globale de 500 millions d’euros sur la période 2011-2016, soit 1 million d’euros par kilomètre de digue. Nous prévoyons un partage du financement, soit 150 millions d’euros pour les digues domaniales, et le reste pour les digues des collectivités, sachant qu’est prévu un plafond de 200 millions. L’essentiel des « financements Xynthia », qu’ils concernent l’achat des maisons dans les zones de solidarité ou les digues, sera supporté par le Fonds Barnier.

Nous avons un pic à passer en 2010 et en 2011, puisque nous prenons en charge le rachat des maisons. Pour la partie 2010, nous réutilisons une partie de la trésorerie qui était disponible sur ce fonds – environ 80 millions d’euros de trésorerie y sont disponibles chaque année. En outre, nous avons récupéré une partie des fonds qui avaient été déconcentrés et non utilisés. Pour 2011, un abondement du fonds de 100 millions d’euros sera réalisé par un prélèvement de la Caisse centrale de réassurance.

En ce qui concerne la réalisation des 423 plans de prévention des risques technologiques, notre retard est ancien. Fin 2007, 35 étaient prescrits, ils sont aujourd’hui au nombre de 335, et l’objectif de 100 % de plans prescrits d’ici à la fin de l’année sera atteint. Nous avons pris du retard car il a fallu réaliser des études de danger beaucoup plus poussées sur l’ensemble des sites afin d’éviter de prendre des mesures immobilières sur le périmètre autour des sites : soit des travaux sur les maisons autour des sites, soit des délocalisations. Aujourd’hui, le rythme des prescriptions est plutôt bon. Parmi les points de blocage identifiés lors de la table ronde sur les risques industriels, s’est effectivement posée la question du financement et du délai trop important pour conclure des conventions de financement tripartites  – collectivités, État, industriels  – autour de ces sites. D’où la proposition qu’en cas d’absence d’accord entre les partenaires au-delà d’un certain délai, le principe du financement tripartite devienne obligatoire.

Le regroupement des administrations centrales à la Défense a représenté un gros effort dans un temps record. Nous avons limité le nombre de sites, auparavant éparpillés entre la DGEC et l’avenue de Ségur, et avons regroupé les personnels dans trois tours, ce qui limite les déplacements.

La baisse des crédits du programme support contribue à l’effort de productivité dans le cadre de la RGPP. Ils sont de 5 % pour le fonctionnement en 2011 et de 10 % sur l’ensemble de la période triennale.

L’inscription d’une enveloppe de 203 millions d’euros en AE correspond à la couverture de l’engagement des baux des tours Pascal A et B pour la totalité de leur tranche ferme. Cette enveloppe supplémentaire est inscrite dès cette année, car on est passé du principe d’égalité entre les AE et les CP au nouveau dispositif qui concerne l’ensemble des baux nouvellement souscrits en 2010, ainsi que ceux à venir au titre de l’année 2011.

Un immeuble neuf n’est pas d’actualité, et irait d’ailleurs à contre-courant de l’effort budgétaire global.

Monsieur Mariton, vous m’avez interrogée sur le caractère peu orthodoxe du recours par les agences de l’eau à l’emprunt. Ce dispositif exceptionnel a été instauré ponctuellement afin de rattraper un retard concernant les plus grosses stations d’épuration, dans le cadre des quatre précontentieux ouverts par la Commission européenne. Compte tenu de leur caractère très onéreux, prévoyant non seulement une amende mais une astreinte, l’engagement que tous les travaux de la première tranche soient engagés avant la fin de l’année représente une importante économie. En outre, seules trois agences ont eu recours à l’emprunt, ce qui est loin d’être abusif.

Aucune modification de la directive sur l’éradication du plomb n’est à l’ordre du jour, nos collègues de la santé n’entendant pas baisser la garde ni intervenir devant la commission pour entamer une nouvelle négociation.

M. Hervé Mariton. Ce n’est pas ce dit le directeur général de la santé !

Mme Chantal Jouanno, secrétaire d’État chargée de l’écologie. Jusqu’à preuve du contraire, le ministère de la santé ne souhaite pas changer de position. Nous verrons quelle décision prendra le Premier ministre. Cela dit, beaucoup d’investissements entrepris jadis au titre de la lutte contre le plomb, mais qui bénéficient à l’ensemble du réseau, s’inscrivent désormais dans l’objectif collectif de réduction des fuites sur le réseau, que vous avez voté dans le cadre du Grenelle de l'environnement.

M. Hervé Mariton. Je rappelle qu’on parle de dépenser 18 milliards d’euros pour un progrès de santé public très aléatoire.

Mme Chantal Jouanno, secrétaire d’État chargée de l’écologie. Sur le principe, je ne suis pas hostile à une modification de la directive, surtout si elle permet une meilleure utilisation des moyens financiers, mais, puisqu’il s’agit d’une réglementation sanitaire, la décision relève d’abord du ministère de la santé.

Votre dernière question porte sur les loups et plus généralement sur grands prédateurs.

M. Hervé Mariton. Appelons un chat un chat et un loup un loup !

Mme Chantal Jouanno, secrétaire d’État chargée de l’écologie. Le ministère consacre 5,2 millions d’euros à la protection des troupeaux contre les prédateurs, dépense qui contribue globalement à l’aide à l’agriculture. Par ailleurs, il indemnise les éleveurs qui ont subi des dommages, pour un total d’un million d’euros en 2011, dont 90 % concernent le loup et 10 % l’ours. Il affecte enfin 1,2 million d’euros au suivi et à l’animation du plan de communication, au suivi biologique et aux recherches, domaines qui ont trait principalement à l’ours. Globalement, l’enveloppe de 5,2 millions visant à la protection des troupeaux contribue aussi à soutenir le pastoralisme.

Bien que la question du loup soit posée de manière récurrente, celui-ci appartient comme l’ours aux espèces protégées par la convention de Berne, reprise dans la directive « Habitat », que la France ne souhaite pas remettre en cause. Elle a donc essayé d’améliorer les dispositions concernant les loups afin d’éviter les tensions qui résulteraient de prédations intenses, lesquelles sont en augmentation, tandis que la population des loups se stabilise. Nous soutenons aussi le pastoralisme, qui est déterminant pour maintenir des paysages ouverts et préserver la vie et la biodiversité dans la montagne.

M. Hervé Mariton. La révision de la convention de Berne ne vous paraît-elle pas indispensable ?

Mme Chantal Jouanno, secrétaire d’État chargée de l’écologie. Nous sommes tenus non seulement par cette convention mais aussi par la directive « Habitat ».

Monsieur Goua, bien que la retraite des mineurs ne relève pas du programme 174, je vous précise que les prestations servies par l’ANGDM, l’Agence nationale pour la garantie des droits des mineurs, seront préservés pour la période 2011-2013.

La contribution au service public de l’électricité est financée à 41 % au titre de la solidarité avec les territoires insulaires et les territoires d’outre-mer. Cela dit, l’augmentation des charges au titre de la CSPE n’est pas totalement couverte par celle des tarifs. C’est pourquoi nous avons proposé de réviser les tarifs de rachat du photovoltaïque, afin de les rendre plus cohérents avec l’évolution du prix des matériaux, et d’abaisser progressivement le soutien aux cogénérations à base de gaz naturel, pour le réorienter vers le soutien aux cogénérations à base de biomasse, qui passe par d’autres dispositifs que la CSPE.

La réduction du crédit d’impôt développement durable sur l’installation des panneaux photovoltaïques s’explique par le fait que la diminution de 50 % en deux ans du coût de fabrication de ces panneaux n’a pas été répercutée sur le prix des installations sur le marché, pour le plus grand bénéfice des installateurs. D’autre part, pour les particuliers, nous n’avons pas baissé le tarif de rachat des petites installations, qui se trouve être le plus élevé au monde et n’a pas été touché par la baisse de tarifs décidés par le ministre d’État. Pour ces deux raisons, nous avons souhaité réduire ce crédit d’impôt développement durable qui correspondait à une véritable aubaine pour certains installateurs.

M. Marc Goua, rapporteur spécial. On prétend parfois que la taxe serait insuffisante. Une convention aurait-elle été passée par EDF en vue d’opérer un abandon de créance ?

Mme Chantal Jouanno, secrétaire d’État chargée de l’écologie. Je ne suis pas en mesure de vous répondre oralement, mais je ne manquerai pas de le faire par écrit.

M. Jean-Jacques Guillet, rapporteur pour avis de la Commission des affaires étrangères pour la mission « Écologie, développement et aménagement durables ». Madame la ministre, vous avez déjà répondu au président de la Commission des affaires étrangères sur la complémentarité du ministère des affaires étrangères et celui de l’écologie et du développement durable. Cette complémentarité, qui s’exerce à propos des négociations climatiques, se met également en place progressivement en matière environnementale et énergétique, notamment avec les quelque 80 à 90 correspondants environnement des ambassades. C’est d’autant plus important que la politique internationale du Gouvernement en matière d’environnement est infiniment plus importante que ne le laisse apparaître la modicité des crédits à votre disposition dans ce domaine. Ceux-ci se montent à 10,18 millions pour 2011, soit un budget en stabilisation, ce qui n’a rien d’étonnant dans le contexte actuel. Ils sont affectés pour la quasi-totalité au seul financement des délégations françaises dans les nombreuses enceintes internationales consacrées aux négociations sur le climat, l’énergie et la biodiversité. La France plaide incontestablement pour une gestion internationale de problèmes dont l’analyse montre qu’ils dépassent le cadre national. Au-delà du climat, de l’énergie et de la biodiversité, il faut évoquer des sujets comme la gestion de la pêche ou le statut de l’espace marin en haute mer, qui mêlent protection de l’environnement, intérêts économiques et risques sociaux.

Mes questions porteront sur les négociations internationales et le rôle de l’Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie, l’ADEME, en ce domaine

La fin de l’année 2010 sera marquée par la tenue de deux conférences internationales : celle de Cancun, sur l’énergie et le climat, et celle de Nagoya, sur la biodiversité. La première inspire des inquiétudes que nous partageons tous, car aucune véritable évolution ne semble être intervenue dans la position des États depuis le sommet de Copenhague. Le gouvernement américain n’entend toujours pas prendre l’engagement d’une réduction chiffrée de la production de gaz à effet de serre, et je ne suis pas sûr qu’il le fera après les élections de novembre, faute d’avoir réduit la représentation de l’opposition au Congrès. Quant à la Chine, si elle accepte de s’engager dans la voie de la réduction, c’est sans doute un progrès très spécifique, qui tient plus à un problème interne qu’à une position internationale. Qu’attend la France de la conférence de Cancun ? L’Europe dispose-t-elle d’atouts sérieux pour influer sur la négociation ou risque-t-elle de se retrouver réduite au rôle de spectatrice, comme elle a donné l’impression de l’être à Copenhague ?

Quant à la conférence de Nagoya, même si 2010 a été déclarée année de la biodiversité, ne s’agit-il pas d’une négociation en forme de paravent ? La mise en place d’une plate-forme intergouvernementale scientifique dédiée à la diversité, pendant du GIEC, groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat. Pendant ce temps, les atteintes à la biodiversité se multiplient, sans que, sur ce sujet plus complexe encore que le climat, on ne parvienne à un consensus. Dans ces conditions, quelles seront les conséquences de Nagoya, que la plate-forme soit adoptée, ou qu’elle ne le soit pas ?

La conférence de Copenhague a prévu une aide aux pays en voie de développement, domaine dans lequel la France s’est fortement engagée. Cependant, aucun financement n’avait été octroyé en juin dernier. Notre pays a-t-il effectué des versements et à quelle hauteur ? Si ce n’est pas le cas, comment expliquer un tel blocage ?

L’ADEME, dont le rôle est essentiellement national, dispose d’un budget important qui se monte globalement à un milliard d’euros. Quant à sa direction de l’action internationale, qui regroupe 27 agents et 3 experts en mission à long terme à l’étranger, elle bénéficie d’un budget d’intervention d’environ 3,3 millions d’euros, soit 0,3 % de son budget global. Malgré sa faible dotation, cette direction est de plus en plus souvent sollicitée à l’étranger sur tous les continents, non seulement par les pays étrangers mais aussi par notre propre réseau diplomatique. Les quelque 90 correspondants environnement de nos ambassades doivent pouvoir s’appuyer sur son expertise en matière d’environnement. L’ADEME sera ainsi membre fondateur du centre franco-russe pour l’efficacité énergétique.

Cette agence constitue un élément de l’influence de notre pays dans le monde, dans un domaine où nous nous efforçons d’être exemplaires et d’inciter de nombreux États, en particulier émergents, à nous imiter. Nos entreprises sont particulièrement performantes dans le secteur du développement durable et de l’énergie, où elles se placent parmi les premières dans le monde. Ne serait-il pas pertinent d’envisager, sur le modèle allemand, la création d’une ADEME internationale, qui pourrait être une filiale à 50 % de la nôtre et à 50 % des entreprises privées ? C’est un modèle de ce type qui a été retenu pour créer le centre franco-russe de Moscou, sur le plan binational. Cette solution nous permettrait d’associer notre outil diplomatique, notre expertise et notre compétence, dans un secteur stratégique et économiquement très porteur.

M. Philippe Plisson, rapporteur pour avis de la Commission du développement durable pour les politiques de développement durable. Je suis heureux d'avoir été désigné par notre commission pour occuper, pour la quatrième année consécutive la fonction de rapporteur pour avis des programmes 217 – « Conduite et pilotage des politiques de l'écologie, du développement et de l'aménagement durables » – et 113 – « Urbanismes, paysages, eau et biodiversité ».

Je remercie pour leur disponibilité et la qualité de leurs informations tous les fonctionnaires du ministère que j'ai pu auditionner, notamment les responsables des deux programmes, M. Jean-François Monteils, secrétaire général, et M. Jean-Marc Michel, directeur général de l'aménagement, du logement et de la nature, ainsi que Mme Michèle Pappalardo, commissaire générale au développement durable et déléguée interministérielle au développement durable.

J’émets toutefois une protestation concernant la méthode. Comme l’a relevé M. Jean-Paul Chanteguet lors de la réunion de notre commission du 5 octobre, les documents budgétaires ne nous ont été communiqués que fort tard, il y a moins d'une semaine. Ces délais ne permettent pas un examen sérieux et détaillé du budget, d'autant plus que les auditions budgétaires que nous organisons ont eu lieu bien en amont.

J’en viens à l’examen du programme 217, en commençant par les directions interdépartementales interministérielles. Le 1er janvier 2007, une expérimentation de fusion entre les directions départementales de l'équipement et les directions départementales de l'agriculture et de la forêt a été lancée, apparemment de manière concluante, dans huit départements. À la suite de la circulaire du Premier ministre du 23 janvier 2008, le ministère de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat et le ministère de l'agriculture et de la pêche ont généralisé cette fusion dans 47 départements, sous la forme de directions départementales de l'équipement et de l'agriculture (DDEA), et, sur la façade littorale, de directions départementales des affaires maritimes. On trouve aujourd'hui dans chaque département soit des directions départementales des territoires soit des directions départementales des territoires et de la mer

Alors que les crédits de fonctionnement de ces directions départementales interministérielles et les crédits immobiliers des services déconcentrés figuraient jusqu'à présent dans le périmètre de la mission « Écologie, développement et aménagement durables », ils relèvent désormais du nouveau programme interministériel « Fonctionnement des directions départementales interministérielles », dont le responsable est le Secrétaire général du Gouvernement. Du point de vue de la clarté de l'examen du budget, ne pensez-vous pas que cette modification de périmètre plus que substantielle fait obstacle à la comparaison ? Sachant que, dans l'action 3 « Politique de programmation et de l'immobilier et des moyens de fonctionnement », sont également demandés 1,7 million en autorisations d’engagement et 3,6 millions en crédits de paiement, au titre des dépenses immobilières des services déconcentrés, n'y a-t-il pas eu, à la faveur de cette modification de périmètre, une réduction des crédits de l'ordre de 30 millions d'euros ?

Du point de vue de fonctionnel, pensez-vous que le Secrétariat général du Gouvernement, qui est d'abord l'organe administratif chargé d'assurer le bon fonctionnement et la régularité de l'action gouvernementale, soit l'autorité la mieux à même d'assurer cette nouvelle mission qui porte sur des services par définition répartis sur l'ensemble du territoire national ?

Concrètement, quel service au sein du secrétariat général du Gouvernement sera chargé du suivi budgétaire de ces nouvelles directions ? S'il s'agit de la direction des services administratifs et financiers  – DSAF –, quels moyens budgétaires supplémentaires ont été prévus pour lui permettre de faire face à cette très lourde charge ? Les postes offerts dans ces nouvelles directions seront-ils également accessibles aux fonctionnaires du ministère de l’écologie et de celui de l’agriculture ? Enfin, dans le cadre de la mise en œuvre des mesures issues des deux Grenelle, n'avez-vous pas le sentiment de vous priver d'un levier d'action essentiel, sur le terrain ?

J’en viens aux négociations sur le climat. Lors de la commission élargie du 28 octobre 2009, je vous avais interrogée sur les crédits permettant la rémunération de l'ambassadeur en charge des négociations sur le climat, M. Brice Lalonde, que notre commission avait auditionné le 14 octobre 2009 ; En effet, ces crédits ne figuraient pas dans l'action 6 « Action européenne et internationale » du programme 217. Vous m'aviez répondu que M. Lalonde avait été recruté en 2007, dans le cadre d'un contrat de trois mois, comme ambassadeur chargé des négociations sur le changement climatique, et que sa rémunération était imputée sur les crédits du cabinet et ses frais de logement sur ceux du ministère des affaires étrangères. Pourquoi ces crédits n'ont-ils pas fait l'objet d'une intégration dans ladite action, à partir de quand et jusqu'à quelle date M. Lalonde, dont vous avez dit lors de votre audition qu'il avait été désigné par les Nations unies pour organiser le sommet de la Terre dit « Rio + 20 » de 2012, a effectivement été rémunéré par votre cabinet ?

Plus généralement, ne pensez-vous pas que les crédits demandés au titre de l'action 6 sont faibles – 10,186 millions en AE et en CP –, eu égard à l'importance des négociations internationales en cours sur le changement climatique ?

Enfin, la grande stabilité des crédits consommés par cette action laisse craindre que le ministère ne compte pas s'investir dans la préparation des conférences internationales sur le changement climatique qui seront organisées en 2011. Pouvez-vous donc me rassurer sur les moyens que vous comptez mettre à la disposition de la diplomatie environnementale française au cours de l'année prochaine, qui verra la France prendre la présidence du G 20, un an avant l'arrivée à échéance du protocole de Kyoto ?

En ce qui concerne les personnels du ministère, les schémas d'emploi du ministère font apparaître une baisse régulière des effectifs, exprimés en équivalent temps plein. On relève une diminution de 1 400 ETP en 2009, de 1 294 en 2010 et de 1 287 en 2011, certaines organisations syndicales craignant du reste que le dernier chiffre soit sous-évalué. Cette baisse, due aux mesures de la RGPP 2, a lieu dans un contexte de fortes restructurations administratives, notamment au plan départemental. Quelles sont les mesures prévues pour accompagner les personnels concernés dans la conduite du changement tant en administration centrale qu’au niveau départemental, où les fonctionnaires des ex-directions départementales de l'équipement ont vu, en quatre ans, leurs collègues des parcs de l'équipement être transférés vers les départements, puis leur direction devenir une direction départementale de l'équipement et de l'agriculture en 2008-2009, puis une direction départementale des territoires ou une direction départementale des territoires et de la mer ? N’y a-t-il pas là de quoi leur donner le tournis ?

Quelles mesures comptez-vous prendre pour répondre aux appréhensions des personnels déplacés, parfois poussés vers des postes où ils perdent leurs compétences et leurs repères ? Confirmez-vous le chiffre de quatorze suicides en 2010 avancé par les syndicats ? Par ailleurs, pourriez-vous dresser un bilan chiffré du nombre de fonctionnaires effectivement aidés, des jours de formation et des qualifications dispensées, ainsi que de l'action des centres de valorisation des ressources humaines – cellules GUEPARH et centres interrégionaux de formation professionnelle, dont le CFP de Brest – et indiquer comment ces organes vont être intégrés dans le « verdissement » des compétences des personnels du MEEDDM ?

Pour le programme 113 – « Urbanismes, paysages, eau et biodiversité » –, je poserai d’abord un problème de méthodologie. Le logiciel d'information financière et comptable CHORUS est désormais utilisé par les services de ce programme depuis juillet 2010, date à laquelle s'est effectuée la bascule, c'est-à-dire la reprise de tous les engagements budgétaires en cours. Cela a causé un important surcroît de travail pour les fonctionnaires concernés, qui ont basculé 65 % des dossiers. Il semblerait que l'ajout de nouveaux modules ait entraîné l'indisponibilité du logiciel pendant une partie du mois de septembre, en pleine période budgétaire. Quelle a été la durée de cette indisponibilité et quelles mesures envisagez-vous pour éviter à l’avenir ce type de dysfonctionnement ?

La suppression de l'ingénierie publique concurrentielle va conduire à la suppression de 3 300 ETP, dont 788 inscrits au titre des crédits demandés pour 2011. Pourriez-vous détailler les mesures prises pour la reconversion des personnels concernés, dont les compétences peuvent sans nul doute être utilisées à profit pour remplir les objectifs du Grenelle, puisqu'elles concernent notamment les domaines de l'assainissement et de l'aménagement des espaces publics ? Quelles actions spécifiques comptez-vous prendre dans cette optique pour les dessinateurs ?

Enfin, en ce qui concerne la politique de l’eau et la formation, le « verdissement » des formations dispensées par certains établissements d'enseignement dont le MEEDDM a la tutelle, comme l'école nationale des ponts et chaussée, est en cours, même si les changements restent pour l'instant limités dans ce domaine. Il semble que la réflexion autour des métiers « verts » doive passer par une réflexion sur l'ensemble des établissements d'enseignement publics entrant dans le champ du développement durable, dont certains sont sous tutelle d'autres ministères. Dans cette optique, avez-vous entamé un travail interministériel sur d'éventuels changements de tutelle de ces établissements, par exemple pour l'école nationale du génie de l'eau et de l'environnement de Strasbourg, qui, depuis sa création en 1952, est sous tutelle du ministère de l'agriculture et de la pêche, et qui formera à l'avenir des ingénieurs qui travailleront pour l'essentiel dans l'économie verte ?

M. le président Christian Jacob. Compte tenu d e la précision de ces questions, peut-être Mme la secrétaire d’État répondra-t-elle en partie par écrit.

M. Philippe Plisson, rapporteur pour avis. Dans le cadre des programmes « Information géographique et cartographie, météo France et prévention des risques », je poserai quatre questions à Mme la secrétaire d’État.

La première porte sur le projet de centre de stockage profond censé accueillir les déchets nucléaires issus des centrales d’EDF à Bure. Il résulte des auditions intervenues en commission, notamment de celle de M. François Roussely, qu’on observe des dysfonctionnements entre les différents acteurs : Agence nationale pour les déchets radioactifs, Commissariat à l’énergie atomique, EDF et Areva. Il est important que nous connaissions la position du Gouvernement sur la répartition des différentes missions afin que les principaux opérateurs soient mieux associés au processus décisionnel.

Une mauvaise adéquation a été constatée entre l’autorité de sûreté nucléaire et ses homologues européens, les règles, les coûts et l’équilibre économique divergeant d’un pays à l’autre. Quelle est la position du Gouvernement à cet égard ? A-t-il été envisagé de réexaminer les pouvoirs et les méthodes de travail de l’Autorité de sûreté nucléaire ? Si tel n’est pas le cas, ne serait-il pas opportun d’œuvrer à la définition de référentiels techniques communs aux régulateurs européens ? Des démarches ont-elles été d’ores et déjà accomplies en ce sens ?

Les dispositions de la loi Bachelot relative à la prévention des risques technologiques prévoyaient la mise en place de 420 plans. Malgré des travaux importants et l’énergie déployée par vos services, nous sommes toujours loin de cet objectif, puisque 335 plans étaient prescrits le 15 septembre 2000 et 50 approuvés. Pourquoi le dispositif de prévention des risques technologique rencontre-t-il un succès très inférieur aux espérances ? Quels moyens comptez-vous mobiliser pour remédier aux difficultés ? Le Gouvernement serait-il ouvert à une révision du dispositif fiscal existant, afin de prendre en compte certaines situations non couvertes, notamment chez les populations habitant à côté des territoires couverts par les plans mais disposant de ressources trop modestes pour être éligibles au crédit d’impôt offert aux propriétaires bailleurs ?

Enfin, des cartes de bruit devaient être établies dans les vingt-cinq agglomérations de plus de 250 000 habitants. Les services de l’État ont fait leur part du travail, mais les cartes incombant aux collectivités territoriales ne seraient aujourd’hui achevées que pour 27 % d’entre elles, et en cours pour 58 %. Pourriez-vous nous dire quelles actions le Gouvernement compte entreprendre pour hâter la finalisation de l’ensemble de ces documents ? Dans le cadre du suivi du Grenelle, va-t-il prendre de nouvelles initiatives en matière de lutte contre les nuisances sonores ?

Mme Geneviève Fioraso, rapporteure pour avis de la Commission des affaires économiques pour l’industrie et l’énergie. Un constat, pour commencer : le budget présenté est en baisse de 2 %, hors inflation, par rapport à l’année dernière. Nous le déplorons.

Le Grenelle de l’environnement I ouvrait des perspectives de croissance verte et de création d’emplois dans les nouvelles filières. Nous avons partagé, et soutenu, ces objectifs. Le ministre d’État évaluait alors à 500 000 le nombre de nouveaux emplois potentiels. Trois ans après, le bilan est non seulement décevant, mais incompréhensible : il semble que tout ait été fait à l’envers.

Je me concentrerai sur le secteur des énergies renouvelables, notamment sur le photovoltaïque, particulièrement révélateur de la distance constatée entre les déclarations d’intention – que nous approuvons – et la réalité du terrain.

À la suite du Grenelle I, il a été décidé d’investir dans la recherche, en favorisant le développement de l’Institut national de l’énergie solaire – INES – à Chambéry, adossé au Laboratoire d’innovation pour les technologies des énergies nouvelles du Commissariat à l’énergie atomique (CEA-LITEN), implanté à Grenoble. Nous ne pouvons qu’approuver cette démarche tant notre retard en R & D était important.

Parallèlement, vous avez mis en place un tarif d’achat de l’électricité très – trop ? – avantageux, ainsi qu’un important dispositif d’exonérations fiscales. Ce n’était pas une mauvaise chose, même si la barre avait été placée peut-être un peu haut, d’autant que l’on ne disposait d’aucune indication concernant l’évolution possible de ces tarifs.

Stimuler l’aval et l’amont pour faire démarrer une nouvelle filière, c’est bien ; mais encore faut-il s’occuper de l’industrie elle-même.

Malheureusement, celle-ci, qui demeure en France à l’état embryonnaire en dépit de la présence dans notre pays de réelles compétences, a été oubliée. C’est là que le bât blesse.

Le résultat, que nous avons condamné l’an passé, c’est une spéculation effrénée, et l’installation dans 90 % des cas de panneaux chinois dont on ne considère ni le bilan carbone ni la qualité. Le rapport Charpin a constaté la débâcle, tout en oubliant l’aspect industriel, donc les conséquences sur l’emploi.

Pendant ce temps, les PME et PMI de la filière attendent. Photowatt, le premier fabricant de systèmes solaires photovoltaïques français, qui emploie plus de 700  salariés, attend ainsi depuis deux ans les réponses de l’ADEME et du Fonds stratégique d’investissement à ses demandes de renforcement en fonds propres et de financement de partenariats avec les laboratoires du CEA et avec la filiale d’un grand opérateur public.

Tout cela donne l’impression d’un grand désordre, à l’image de la gouvernance de la filière, à laquelle participent, outre votre ministère, Bercy, la direction générale des finances publiques, l’ADEME, le Commissariat général à l’investissement, EDF Énergies nouvelles, le CEA-LITEM et d’autres acteurs encore, dont les points de vue et les stratégies sont bien peu convergents – et je passe sur les accords d’AREVA avec une société allemande ou de Total avec une société belge !

Nous avons aujourd’hui perdu la première manche de la bataille de l’électricité solaire photovoltaïque. Les services, l’ingénierie et même la recherche français ne résisteront pas longtemps à la délocalisation s’il n’y a pas une production industrielle locale forte. Notre chance, c’est que la technologie n’est pas encore mature : nous pouvons encore gagner la seconde manche, qui verra l’apparition d’une nouvelle génération de panneaux, plus durables, plus efficaces et recyclables.

Le Gouvernement est-il décidé à mettre fin à la navigation à vue qui a prévalu jusqu’à présent ? Va-t-il définir une stratégie cohérente et stable permettant la mise en place d’une véritable filière industrielle et redonnant confiance à la fois aux investisseurs publics – aménageurs et collectivités – et aux particuliers ?

Mme Chantal Jouanno, secrétaire d’État chargée de l’écologie. Monsieur Guillet, vu la situation des États-Unis, où le projet de loi sur le climat a été repoussé, et celle de la Chine, on visera au sommet de Cancùn un accord purement technique sur la mise en œuvre des décisions de Copenhague. Quelques voix ont pu s’élever, notamment à Bonn, pour remettre en cause les objectifs même de Copenhague, mais la dernière réunion s’est un peu mieux passée.

On n’attend cependant pas à Cancùn d’évolution fondamentale par rapport à Copenhague. La situation politique globale ne s’y prête pas. En revanche, la position de l’Europe reste inchangée. Il sera probablement moins difficile de la faire entendre qu’à Copenhague, où il ne fallait pas mettre en difficulté la présidence danoise – ce que nous avons regretté.

À Nagoya s’ouvrira à la fin du mois d’octobre une négociation très importante. Les discussions porteront, d’une part, sur les objectifs 2020-2050 sur la biodiversité, d’autre part, sur un protocole d’accord sur l’accès aux ressources génétiques et le partage des avantages.

Ce protocole, quoique méconnu, est fondamental. Il vise à ce que les recettes générées par l’exploitation de ressources génétiques puissent être restituées aux pays où elles sont prélevées afin de préserver leur propre biodiversité. Il s’agit donc d’un système de financement privé pour la protection de la biodiversité. Les recettes tirées des secteurs de la cosmétique, de la chimie ou de la pharmacie pourraient ainsi participer au développement de ces pays.

Les négociations sur ce protocole spécifique ont débuté en 2003. Aujourd’hui, la quasi-totalité des pays se retrouvent sur un projet de texte. La France a adopté une position ouverte pour parvenir à ce résultat, avec la conviction qu’il ne s’agit plus d’une discussion technique, aujourd’hui achevée, mais d’un débat politique. Nous avons rencontré tous nos partenaires africains, qui soutiennent le dispositif. Il reste à vaincre les réticences de l’Australie et du Canada. Hier, les Australiens semblaient plus favorables ; nous rencontrerons cet après-midi les Canadiens.

Quant à la plateforme IPBES, sa création ne sera pas examinée à Nagoya, mais en novembre, dans le cadre de la prochaine Assemblée générale des Nations unies, suivant la volonté des pays du G77 de séparer les deux négociations. L’ensemble des pays, à part quelques exceptions comme le Venezuela, sont aujourd’hui d’accord sur le principe. Nous sommes donc optimistes quant à la possibilité de créer cette plateforme avant la fin de l’année.

À Copenhague ont été prises des décisions importantes concernant le financement du « fast start » et les financements à long terme en matière d’atténuation des effets du changement climatique et de lutte contre la déforestation. La France a pris des engagements très clairs dans ce domaine. Le Gouvernement propose la création dès 2011 d’un compte d’affectation spéciale doté de 150 millions d’euros ainsi qu’un financement, sur l’ensemble de la période, de 420 millions d’euros, s’ajoutant aux crédits existants, notamment ceux de l’Agence Française de Développement, estimés à 2,8 milliards d’euros par an pour le seul volet climat. À terme, nous comptons abonder ce nouveau fonds par la vente de fractions de la quantité attribuée par le protocole de Kyoto – FQA –, la France ayant fait mieux que remplir ses obligations dans ce domaine.

S’agissant de l’ADEME, son rôle international est apparu spontanément, en aidant les PME innovantes à prospecter des marchés à l’international. Le Club ADEME international apporte un appui souvent intéressant pour monter des partenariats entre des PME et de grandes entreprises ; des agents de l’ADEME sont par ailleurs présents dans quelques pays : en Inde, par exemple, certains conseillent le ministère de l’énergie pour tout ce qui concerne l’efficacité énergétique.

Ce serait en effet une bonne idée que l’ADEME puisse intervenir plus activement en tant qu’expert dans quelques pays cibles. L’Allemagne et l’Italie envoient d’ailleurs des agents publics dans des ministères pour les conseiller sur les technologies, par exemple en matière de traitement des déchets ou d’assainissement. Toutefois, l’ADEME est un petit établissement, qui compte 958 agents – thésards non inclus –, déployés sur l’ensemble des régions françaises, outre-mer compris. Une activité internationale supplémentaire supposerait d’accroître ses effectifs.

Monsieur Plisson, si mes réponses vous paraissent trop imprécises, je les compléterai par écrit.

La mise en place des nouvelles directions départementales des territoires – DDT –, désormais interministérielles, est du ressort du Secrétariat général du Gouvernement, qui est en train de se doter des compétences nécessaires. À ma connaissance, elle sera suivie par le service de gestion et de modernisation de l’État. Et, oui, les postes offerts dans ces nouvelles directions seront accessibles aux agents du ministère de l’écologie et du ministère de l’agriculture.

Quant à savoir si l’on se prive d’un levier d’action sur le terrain, je vous rappelle que le niveau d’action privilégié par le Grenelle est le niveau régional, par l’intermédiaire des directions régionales de l’environnement, de l’aménagement et du logement, avec la mise en place des schémas régionaux de cohérence écologique, des schémas régionaux climat air énergie et des plans régionaux de santé-environnement. Ensuite, il existe une déclinaison départementale interministérielle.

Brice Lalonde a été nommé ambassadeur chargé des négociations sur le changement climatique par un décret du 27 septembre 2007, pour trois ans. Il n’a pas encore pris ses fonctions au titre de la préparation du sommet « Rio plus 20 ». Un avenant a été fait à son contrat, qui courra jusqu’à la fin du mois de décembre 2010. Le budget correspondant à son action est inscrit au titre du programme 217.

Quant aux crédits consacrés à la négociation internationale, ils nous servent essentiellement à la préparation des conférences des parties, soit lorsque nous les organisons nous-même, soit lorsque nous organisons des événements en marge des sommets.

Dans bien des cas, nous participons aux négociations conjointement avec l’Union européenne ; par exemple, au sommet de Nagoya, l’Europe négociera au nom des États membres. Jusqu’à présent, nous n’avons pas rencontré de difficultés pour faire face à nos obligations internationales. En général, on nous reproche plutôt d’être trop présents que pas assez !

S’agissant du ministère, il y a eu en effet quatorze cas de suicide, sur un effectif total d’environ 70 000 agents. Cela a alerté le secrétaire général et le ministre d’État qui ont décidé, il y a un an, d’élaborer un plan de prévention du risque suicidaire, en étroite liaison avec le comité central d’hygiène et de sécurité. Cela a abouti à la mise en place d’un service de soutien psychologique et à l’organisation de formations avec les assistantes sociales.

La qualité de ce plan a été soulignée par l’ensemble de la fonction publique. Toutefois, il est toujours difficile pour une organisation de constater des suicides.

Nous avons également mis en place un système d’accompagnement du changement. Le nombre d’emplois issus du Grenelle est préservé au sein du ministère, voire augmenté chez certains opérateurs qui ne se voient pas appliquer la règle du non-remplacement d’un départ à la retraite sur deux, comme l’ADEME. Le principe retenu est de proposer ces nouveaux postes en priorité aux agents du ministère, en particulier à ceux de l’ingénierie concurrentielle, avant de faire appel à un recrutement extérieur.

Quant au logiciel Chorus, il a été mis en place le 1er juillet. Des retards ont été constatés, qui ont été estimés à un mois. A priori, ils sont aujourd’hui résolus.

Concernant les changements de tutelle d’établissements, je vous adresserai ultérieurement une réponse écrite.

Monsieur Priou, concernant le projet de stockage des déchets à Bure, je vous rappelle que les travaux ne débuteront pas avant 2017 et que le site n’ouvrira pas avant 2025. Nous n’en sommes qu’à l’évaluation des coûts. Un groupe de travail a été réuni à cette fin ; il doit également identifier les principaux enjeux industriels.

Le partage des rôles nous semble très clair : EDF définit quels déchets doivent être transférés à Bure, tandis que l’Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs – ANDRA – est maître d’ouvrage du futur site de stockage. Bien entendu, les différents acteurs de la filière sont étroitement associés au projet.

Nous ne souhaitons pas réexaminer les pouvoirs et les méthodes de travail de l’Autorité de sûreté nucléaire, parce qu’il n’est pas question, pour l’instant, de revenir sur le principe de confier la sûreté nucléaire à une autorité indépendante. En revanche, nous nous félicitons de la bonne coordination entre les trois autorités européennes. Il n’est pas envisagé de créer un service de contrôle européen commun, mais nous réfléchissons à une normalisation des règles et des exigences en matière de sûreté et de contrôle.

S’agissant des plans de prévention des risques, les retards accumulés sont bien antérieurs à 2007. Une partie était due à la nécessité de réaliser des études de dangers plus poussées afin d’éviter les opérations immobilières.

L’un des blocages actuels, c’est de faire accepter par les populations locales l’obligation de réaliser des travaux de renforcement dans leur habitation. Nous avons proposé que le crédit d’impôt puisse prendre en charge 40 % de ces travaux. Il reste à obtenir la conclusion de conventions bipartites entre l’industriel et les collectivités pour prendre en charge le reste.

Autre blocage, le financement tripartite des PPRT. Cette question est cruciale pour une vingtaine d’entre eux, et cela porte sur plusieurs centaines de millions d’euros. L’État pourra débloquer des crédits pour certains, mais pas pour tous.

S’agissant de la prévention du bruit, l’État a finalisé l’ensemble des cartes dont il avait la responsabilité ; par contre, seulement 27 % des agglomérations de plus de 250 000 habitants les ont réalisées. Nous ne sommes pas opposés à étudier comment l’État pourrait aider à leur confection, car nos obligations européennes risquent de se rappeler à notre bon souvenir.

Madame Fioraso, de grands projets de production d’électricité solaire voltaïque se développent aujourd’hui dans plusieurs pays ; le Maroc va ainsi ouvrir la plus grande centrale solaire au monde. Il serait dommage que la France, qui a inventé cette énergie, soit absente du mouvement.

Nous avons accordé des aides à l’amont et à l’aval ; se pose désormais la question de la filière industrielle, qui était à l’origine de la création du Comité d’orientation stratégique des éco-industries. Pour clarifier les choses, nous avons pris l’initiative de faire un rapport sur les dix-huit filières industrielles stratégiques de l’économie verte, pour lesquelles il existe un fort taux de croissance à l’international et sur lesquelles la France est bien positionnée. Les acteurs du secteur ont acté les priorités retenues. On est aujourd’hui en train de définir, avec eux, les plans d’action, filière par filière, qui doivent être présentés début 2011. Ce projet est en phase avec l’initiative du ministère de l’industrie.

Je suis d’accord avec vous : il eût été préférable que cela soit fait plus tôt. Mais l’essentiel est de ne pas rater le train de cette croissance internationale majeure. D’ailleurs, le ministre d’État veut lancer une analyse de cycle de vie sur l’ensemble des panneaux solaires, afin de leur imposer un bilan carbone positif, ce qui favorisera la construction de panneaux plus efficaces que ceux que l’on voit actuellement sur le marché français.

M. Yves Cochet. À la suite de son élection, le président Sarkozy avait entrepris d’être le champion d’Europe de l’écologie – il avait été très impressionné par le Pacte écologique de Nicolas Hulot – et d’attirer quelques socialistes plus ou moins notoires dans son gouvernement. Cette double stratégie n’ayant pas payé électoralement, 2010 a mis fin à l’ouverture comme à l’engagement écologique ; j’en veux pour preuve les propos tenus par le Président de la République, il y a six mois, au salon de l’agriculture : « L’environnement, ça commence à bien faire ».

Alors que le ministère de l’écologie devrait être transversal et doté de moyens en forte augmentation dans cette période financièrement difficile, le budget présenté est en baisse de 2 % par rapport à l’an dernier – en partie due à la diminution de 6 % des dépenses de fonctionnement. Cela nous inquiète, car c’est de l’écologie que proviendra un éventuel renouveau économique et social en France.

Je me souviens que, le 25 octobre 2007, c’était une véritable révolution que proposait le Président de la République. Non seulement l’écologie devait influencer les ministères et toute la politique française, mais les parties prenantes – entreprises, associations, organisations syndicales et collectivités territoriales – étaient appelées à participer à une sorte de cogestion avec l’État. Tout cela est bien fini.

Les niches fiscales subissent une réduction globale de 9,4 milliards d’euros. L’écologie n’échappe à ce coup de rabot. Pour ce qui concerne le crédit d’impôts relatif aux travaux de rénovation, la réduction est ainsi de 10 %, alors que ce programme était l’un des plus intéressant des deux Grenelle de l’environnement.

Pouvez-vous, madame la secrétaire d’État, nous communiquer la liste actualisée des travaux éligibles ? Il semble par exemple que l’installation par un particulier d’une pompe à chaleur ne serait subventionnée qu’à 36 % – contre 40 % auparavant –, que le financement de la pose d’un double vitrage passerait de 25 % à 22,5 %, et que, contrairement à vos dires, le crédit d’impôt pour l’installation de panneaux photovoltaïques serait réduit de 50 à 25 %, ce qui vous permettrait d’économiser 150 millions d’euros en 2011.

C’est d’autant plus regrettable que les tarifs de rachat ont également connu une baisse de 12 % le 1er septembre dernier. « La politique de CSPE sera révisée », aviez-vous alors affirmé. Cet usage du futur m’inquiète. Doit-on s’attendre à un nouvel arrêté tarifaire concernant le photovoltaïque ? Si tel est le cas, les industriels ne sauront plus à quel saint se vouer !

L’article 13 du PLF, « Aménagement des avantages fiscaux à l’investissement dans la production d’énergie photovoltaïque », prévoit que les dépenses de parement ne seront plus éligibles au crédit d’impôt. Or celles-ci font partie intégrante du dispositif d’isolation, dont elles représentent une part importante  –  20  à 60 % selon le type de matériau.

« On ne fera pas une mutation écologique avec du soutien fiscal permanent », a dit le ministre d’État. Nous en sommes d’accord : l’objectif est d’avantager une filière afin qu’elle monte en puissance et acquière une dimension économique importante. Cela dit, avec un budget en diminution, comment comptez-vous atteindre l’objectif du 3 x 20  en 2020 ?

Je note par ailleurs que d’autres niches fiscales sont maintenues, en particulier la baisse de la TVA dans l’hôtellerie-restauration, qui coûte 3 milliards d’euros, ne crée guère d’emplois et n’est pas répercutée sur les prix par la moitié des restaurateurs.

S’agissant enfin des agrocarburants – dénomination que je préfère à celle de « biocarburants » –, il y a lieu de s’inquiéter. Certes, vous prorogez de deux ans le crédit d’impôt destiné à atteindre 6 % de surface agricole bio en 2012, contre 2,6 % actuellement. Mais votre soutien à l’agriculture écologique s’arrête là, puisque vous continuez à promouvoir les agrocarburants. Nous défendrons donc un amendement visant à mettre un terme anticipé à la réduction de taxe intérieure de consommation dont bénéficient ces produits.

En 2003 déjà, l’ADEME avait commis une erreur méthodologique au sujet du rendement thermodynamique des agrocarburants, que l’étude menée par l’Agence avec Price Waterhouse and Coopers plaçait au-dessus du pétrole ou de tout autre liquide hydrocarboné. En 2010, elle prétend de nouveau, à tort, que les agrocarburants sont meilleurs que les hydrocarbures classiques

Les agrocarburants ont contribué à la forte augmentation des prix mondiaux des denrées agricoles. Les 420 millions d’euros que représente la réduction de taxe pourraient trouver des débouchés plus conformes aux priorités du Grenelle de l’environnement.

M. Bertrand Pancher. Les lois « Grenelle » apparaissent comme les textes fondateurs de l’action gouvernementale. La mission « Écologie, développement et aménagement durables » du projet de loi de finances pour 2011 leur donne une traduction concrète.

Je souhaite mettre en exergue non seulement l’atteinte des objectifs mesurables que nous nous sommes donnés, mais aussi le regard que tous les experts du monde portent sur l’action environnementale de la France. N’en déplaise à M. Cochet,...

M. Yves Cochet. Ce n’est guère que le rattrapage d’un retard !

M. Bertrand Pancher. ...notre pays occupe le premier rang dans ce domaine.

Le budget de la mission se stabilise après deux années de dotations exceptionnelles, notamment au titre du plan de relance. Ce plan n’est pas reconduit pour 2011 et, en 2012 et 2013, les crédits seront stables, à hauteur respectivement de 9,5 et 9,48 milliards d’euros.

Il serait regrettable d’oublier l’ensemble des sommes mobilisées par le Gouvernement dans le domaine de l’environnement au cours des dernières années. La programmation de 2008 prévoyait un engagement financier de 19 milliards pour la période 2009-2011. Par ailleurs, le plan de relance a donné une formidable accélération à notre politique en matière de développement durable, dans lequel l’État et les entreprises publiques ont investi 5 milliards en deux ans. Le grand emprunt amplifie encore cet effort en apportant 10 milliards de financements concourant aux politiques de développement durable.

Dans ce contexte, madame la secrétaire d'État, je souhaite vous poser quelques questions.

L’effort en faveur de la biodiversité est considérable. Après avoir connu d’importantes augmentations – 30 % en 2008, 10 % en 2009 et 12 % 2010 –, les crédits sont maintenus. Je m’interroge cependant sur la capacité de l’État et des collectivités locales à mettre en œuvre les projets de trame verte et bleue et d’Agence de la nature. Les montants de crédits actuels sont-ils compatibles avec ces objectifs ?

De même, le financement consacré aux parcs nationaux reste constant alors que le nombre de parcs augmente. Estime-t-on que le gel des crédits est compatible avec cette stratégie d’augmentation ? Envisage-t-on, à terme, des ressources supplémentaires ?

Les ressources des agences de l’eau sont aujourd'hui largement suffisantes pour mener à bien les projets présentés par les collectivités, mais elles ne le sont plus si l’on souhaite respecter les calendriers de généralisation de l’assainissement individuel et collectif dans notre pays. Les échéances semblent inatteignables. Au demeurant, elles ont été repoussées à plusieurs reprises dans le passé. N’est-il pas temps de fixer, à l’intention des agences et des collectivités, des règles plus précises en fonction des priorités de préservation des milieux naturels et dans un cadre économiquement acceptable ?

S’agissant maintenant des déchets, la TGAP constitue en quelque sorte l’arme absolue pour réduire la quantité de déchets ultimes produits. Le produit de cette taxe sur les déchets mis en décharge ou incinérés est censé être entièrement reversé aux collectivités pour les aider à atteindre les objectifs fixés. Le nouveau réseau de transfert des fonds ainsi collectés est-il totalement étanche ou observe-t-on déjà des fuites ?

Le monde de demain se caractérisera par de puissantes règles appuyées sur des valeurs. Ces règles sont très nombreuses en matière environnementale. Il est nécessaire, non seulement de les adopter, mais aussi de les faire appliquer. À cet égard, il semblerait que les emplois liés au contrôle des installations classées ne soient pas à la hauteur de la demande. Qu’en est-il ?

Enfin, permettez au député de Bure d’aborder la question des déchets nucléaires. Pouvez-vous nous garantir, madame la secrétaire d'État, que l’on n’exercera plus de pressions sur l’ANDRA à l’avenir ? Certains producteurs français de déchets nucléaires n’ont pas encore compris combien nous étions attachés à l’indépendance de cette agence créée par la loi de 1991 et semblent vouloir lui dicter sa conduite, ce qui est très inquiétant.

M. Jean Dionis du Séjour. La France a signé un engagement européen précis : atteindre 23 % d’énergies renouvelables dans sa consommation totale en 2020. Au nom du groupe Nouveau Centre, je veux saluer l’effort considérable que l’on a consenti pour faire décoller ces filières. Alors que l’on partait de très bas en début de législature, la cohérence de l’action menée, tant au niveau tarifaire qu’au niveau fiscal, mérite d’être soulignée.

Reste qu’il existe une tension entre les objectifs du Grenelle et ceux de réduction des dépenses publiques. Je prendrai l’exemple de deux filières très différentes.

Premièrement, le rachat de l’électricité solaire photovoltaïque coûte cher à la collectivité, que ce soit par le biais de la CSPE ou par celui des impôts. La filière, qui est récente et fragile, aimerait avoir une visibilité tarifaire. En dépit de l’annualité de l’exercice budgétaire, pensez-vous pouvoir lui fournir cette visibilité, quand bien même il s’agirait d’une stabilisation à la baisse ?

S’agissant des panneaux photovoltaïques chinois, j’ai assisté à une rencontre au cours de laquelle le ministre d’État Jean-Louis Borloo, en visite à Agen, et Yann Moss, président-directeur général de Fonroche, ont passé en revue toutes les pistes pour contrer cette concurrence. Selon moi, le bilan carbone n’est sans doute pas la bonne solution cas les Chinois disposent eux aussi d’électricité provenant du nucléaire. En revanche, le ministre d’État a évoqué l’idée d’une labellisation qualité des panneaux, qui me semble bien plus intéressante. A-t-on progressé sur cette piste ?

Deuxièmement, la filière micro-hydraulique est souvent ignorée alors que sa production est pratiquement au niveau d’une tranche nucléaire. C’est une filière vertueuse qui ne pèse pratiquement pas sur la CSPE et qui participe au décompte de notre production d’énergie renouvelable. Pourtant, il est manifeste que l’on s’acharne sur elle en imposant un niveau d’investissement exorbitant au moment du renouvellement de l’obligation d’achat. Pourquoi ? Que comptez-vous faire pour libérer le potentiel de cette filière ?

M. Jean-Paul Chanteguet. Pour sortir du piège climatique et énergétique dans lequel nous nous sommes enfermés depuis la révolution industrielle, nous devons réduire notre consommation d’énergie et développer les énergies renouvelables. C’est en adressant des « signaux prix » forts aux consommateurs qu’on les poussera à modifier leurs comportements.

Le crédit d’impôt au titre du développement durable est un de ces signaux. Il a démontré son efficacité en permettant à 1,3 million de ménages d’investir en 2009 dans l’isolation de leur appartement ou dans l’installation d’équipements de chauffage plus écologiques, voire de petites installations photovoltaïques, d’une puissance inférieure à 3 kilowatts-crête.

Nous ne comprenons pas ce qui vous pousse à réduire ce crédit d’impôt de 10 %  – et même de 50 % pour le solaire – , si ce n’est une logique financière et comptable. En réalité, nous avons affaire à une véritable manipulation. Pour justifier cette baisse généralisée, vous arguez que, au rythme actuel de développement de l’énergie photovoltaïque, les objectifs fixés par le Grenelle pour 2020 seraient atteints dès 2013. Quand bien même ce serait vrai – ce qui reste à démontrer –, nous pensons qu’il faut dépasser les engagements pris au niveau européen dans le cadre du paquet climat-énergie en nous fixant des objectifs plus ambitieux. En 2008, la part des énergies renouvelables dans la consommation énergétique finale n’était que de 11 % pour un objectif de 23 % en 2020, alors qu’elle s’élevait déjà à 30 % en Suède et en Finlande et que, dernièrement, l’Allemagne s’est fixé un objectif de 60 % en 2050.

Madame la secrétaire d'État, je souhaite vous poser deux questions.

Tout d’abord, je trouve surprenant que la chasse aux niches vertes ne soit pas assortie d’une chasse aux niches grises. Le coût de ces encouragements à polluer pour le budget de l’État avoisinait pourtant 5,3 milliards d’euros en 2009. Pourquoi ne proposez-vous pas de mettre fin à l’exonération de taxe intérieure de consommation sur le kérosène, qui prive le budget de l’État de 3,5 milliards d’euros alors que, par rapport à la voiture, le transport aérien émet deux fois plus de gaz à effet de serre par kilomètre et par personne transportée ? Cette disposition désavantage le transport ferroviaire et va à l’encontre du report modal, qui est un des objectifs du Grenelle de l’environnement.

Ensuite, alors que vous cessez de vanter les résultats du bonus-malus automobile – les émissions moyennes des véhicules neufs sont passées de 149 grammes de CO2 par kilomètre en 2007 à 133 grammes en août 2009 –, pourquoi ne pas proposer une augmentation du malus pour les voitures particulièrement énergivores et émettrices de CO2, comme les véhicules de classe E, ainsi qu’une extension de l’annualisation aux véhicules de classe E et de classe F ?

Monsieur le président, dans la mesure où certains programmes de la mission « Écologie, développement et aménagement durables » relèvent de la Commission des affaires économiques, il serait souhaitable qu’un représentant du groupe SRC membre de cette commission puisse aussi s’exprimer.

M. Serge Poignant. Les crédits de l’industrie et de l’énergie, pour lesquels la Commission des affaires économiques est compétente, sont dispersés entre trois missions : les programmes 174 – « Énergie, climat et après-mines » –  et 217 – « Conduite et pilotage des politiques de l’écologie, de l’énergie, du développement durable et de la mer » –  de la mission que nous examinons à présent – d’où l’intervention de Mme Geneviève Fioraso en tant que rapporteur pour avis; deux actions, « Budget de la CRE » et « Soutien au développement des entreprises » du programme 134, qui seront examinées lors de la commission élargie consacrée à la mission « Économie » le 25 octobre ; enfin, le programme 190, « Recherche dans les domaines de l’énergie, du développement et de l’aménagement durables », dont la discussion aura lieu dans le cadre la commission élargie consacrée à mission « Recherche et enseignement supérieur » le 26 octobre. C’est lors de cette troisième réunion que Mme Fioraso rendra son avis sur l’ensemble des crédits de l’industrie et de la recherche.

Je précise donc, à l’intention de mes collègues de la Commission du développement durable, que le vote de la Commission des affaires économiques aura lieu le 26 octobre et non aujourd'hui.

Notre commission, madame la secrétaire d'État, est très attentive à la dimension industrielle du développement des technologies vertes, ainsi qu’aux enjeux de compétitivité de notre économie. Certaines questions posées aujourd'hui trouveront un prolongement lors des commissions élargies consacrées à l’économie et à la recherche. Nous examinerons alors certains des moyens que nous nous donnons pour atteindre non seulement les objectifs consacrés par les lois « Grenelle », mais aussi l’objectif de croissance du PIB.

Je souhaite rappeler, comme Bertrand Pancher, l’importance des crédits du grand emprunt affectés au développement durable : énergies renouvelables, transport et urbanisme durables, rénovation énergétique des bâtiments, énergie nucléaire.

J’en viens à mes questions

La direction générale de l’énergie et du climat – DGEC – étant chargée du suivi des sociétés EDF, GDF-Suez et Areva, comment le MEEDDM met-il en œuvre les conclusions du rapport Roussely sur la filière nucléaire ?

Par ailleurs, l’énergie ne devrait-elle pas occuper une place plus grande parmi les comités stratégiques de filières ?

Parmi les filières EnR, je suis particulièrement attaché à l’éolien offshore. Nous disposons à Saint-Nazaire d’un savoir-faire en la matière et nous souhaitons avancer sur ces questions.

En matière de biomasse, vous avez évoqué le soutien à la filière bois par rapport à la cogénération au gaz.

En ce qui concerne le solaire photovoltaïque, l’abaissement du crédit d’impôt – comme ce fut le cas pour les pompes à chaleur – était annoncé. Dès lors que de nouvelles politiques se font jour, il est nécessaire d’équilibrer les budgets. En outre, on a assisté l’année dernière à la formation d’une bulle spéculative sur le photovoltaïque.

Cela étant, il est souhaitable que les particuliers qui se sont déjà engagés conservent le bénéfice du crédit d’impôt à 50 %. Le projet de loi de finances le prévoit pour les contribuables justifiant, avant cette date, de l’acceptation d’un devis et du versement d’un acompte avant le 29 septembre 2010. Certains amendements proposent de prendre en compte la déclaration de travaux. Mais peut-être serait-il bon de repousser le délai en ce qui concerne le versement de l’acompte. En effet, il arrive que les artisans ne demandent pas d’acompte au moment de la signature du devis et l’on risque de pénaliser des particuliers qui se sont engagés. Pour ceux qui ont signé un devis avant le 29 septembre, on pourrait arrêter la date du 15 ou du 20 octobre pour le versement de l’acompte.

Je rappelle à M. Chanteguet que le tarif de rachat aux particuliers – 58 centimes par kilowattheure – reste le plus élevé au monde. C’est le crédit d’impôt qui est abaissé.

Je partage l’avis de Jean Dionis du Séjour concernant la visibilité dont la filière doit bénéficier. Dans un rapport, j’avais préconisé une dégressivité, mais j’avais souhaité que celle-ci soit annoncée en toute visibilité aux entreprises et aux particuliers.

Je suis moi aussi favorable à la délivrance d’un label, voire d’une assurance, avant de bien positionner les filières françaises sur le savoir-faire, la qualité et la garantie apportée aux particuliers.

Le Grenelle 2 prévoit des mesures exigeant une implication locale forte dans la mise en œuvre des politiques de maîtrise des politiques de maîtrise des consommations énergétiques et de développement des EnR. Comment les DREAL – directions régionales de l’environnement, de l’aménagement et du logement – se mobiliseront-elles pour aider les collectivités.

Enfin, la France s’est beaucoup impliquée dans les négociations internationales concernant le réchauffement climatique. Vous avez déjà évoqué le financement du fast start. Pourriez-vous dire un mot au sujet de l’engagement de notre pays dans la COP 16 qui se tiendra à Mexico à la fin de l’année ?

M. François Brottes. Je vous remercie de donner droit à la supplique de Jean-Paul Chanteguet, monsieur le président !

La cohérence que l’on invoque n’existe pas. À preuve, la bulle spéculative ou encore le rapport Roussely qui dénonce l’absence de pilote en matière d’énergie. Madame la secrétaire d'État, vous représentez seule le Gouvernement devant nous et nous le prenons comme un signe. Nous supposons donc que vous serez le pilote de l’énergie dans le prochain gouvernement. À ce titre, pourriez-vous nous donner la position du Gouvernement face aux critiques de ce rapport aux termes duquel, pour résumer, c’est le bazar à tous les étages, chacun jouant sa partition sans écouter l’autre ?

Le secteur des énergies renouvelables a subi de nombreux à-coups. Il s’est créé des appels d’air sans régulation, des effets d’aubaine sont apparus sans que les filières s’y retrouvent, et maintenant la panique oblige le Gouvernement à faire machine arrière. C’est un très mauvais signal pour ceux qui ont investi. Même les consommateurs sont mis en difficulté.

Pensez-vous, à cet égard, qu’il faille continuer à financer les énergies renouvelables uniquement par la CSPE, que tous paient y compris ceux qui n’auront jamais le bénéfice de ces énergies, et par le TURPE – tarif d’utilisation des réseaux de transport d’électricité ? Ce sont toujours les mêmes consommateurs que l’on sollicite. Ne conviendrait-il pas de changer d’assiette ? Les rapports consacrés à ces sujets prévoient des augmentations très significatives de la CSPE, donc du prix de l’électricité. Les conséquences sur le pouvoir d’achat des ménages risquent d’être considérables.

Nous avons par ailleurs assisté cet été à une hausse sans précédent des tarifs de l’électricité, qui a même touché la tarification des heures creuses. Or la consommation en heure creuse est vertueuse sur le plan écologique puisqu’elle permet de limiter les effets des pointes de consommation, qui obligent de recourir aux énergies polluantes, notamment thermiques. Ne serait-ce pas le signe que, après avoir renoncé à l’isolation des bâtiments, on renoncerait également aux tarifs incitant à consommer en période basse, ce qui serait en contradiction avec le Grenelle de l’environnement comme avec nos engagements européens ?

Enfin, en ce qui concerne les rapports entre télécommunications et santé, le Grenelle des ondes s’est engagé à promouvoir la recherche indépendante sur les effets des radiofréquences sur la santé. Or le projet de budget ne respecte pas cet engagement. Il suffit d’observer la manière dont l’imposition forfaitaire sur les entreprises du réseau est actuellement cadrée pour comprendre que l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail – l’ANSES –, qui a succédé à l’AFSSET, ne profitera pas d’un financement dédié. Qu’en est-il des moyens destinés à ce secteur ?

Mme Françoise Branget. Les conclusions du Grenelle de l’environnement au titre du programme de la qualité écologique des eaux fixent quatre objectifs prioritaires : renforcement de l’association des partenaires à la gestion intégrée de l’eau, atteinte de l’objectif de la bonne qualité écologique de l’eau, assurée à terme à 100 %, mise aux normes des stations d’épuration et mise en œuvre d’une gestion quantitative de l’eau ajustée aux ressources disponibles.

Bien que l’assainissement collectif soit une compétence obligatoire des collectivités territoriales, le Gouvernement a lancé un plan d’action pour aider les collectivités retardataires à contractualiser les agences de l’eau dans le cadre d’un échéancier de mise en conformité et des aides y afférent. Que se passera-t-il en 2011 ? En effet, avec la mutualisation des fonctions supports des agences de l’eau, une baisse anticipée des budgets de fonctionnement des agences est prévue.

Qu’en sera-t-il donc de la finalisation des schémas directeurs d’aménagement et de gestion des eaux et des mesures de rattrapage de l’ensemble des assainissements pour remplir les objectifs de bon état écologique, de maintien de la biodiversité et d’une meilleure protection des aires d’alimentation de captage ?

M. Daniel Paul. Je tiens tout d’abord à regretter que nos travaux se déroulent dans le cadre d’une commission élargie et non dans celui d’une réunion ouverte au public, même si je note la présence de la presse, qui pourra répercuter les sujets qui auront été abordés.

Madame la secrétaire d’État, vous avez déclaré que toutes les dispositions prévues par le Grenelle de l’environnement se mettraient progressivement en place. En ce qui concerne le bruit, il conviendrait de modifier les règles en matière de motorisation des deux-roues. Cette modification concernerait le secteur industriel. Le bruit des moteurs des deux-roues pose en effet de graves problèmes dans certaines cités – je reçois à ce sujet un nombre considérable de doléances.

Par ailleurs, chacun sait qu’EDF est en pleine aventure américaine, et que cette aventure concerne également l’EPR. Il y a quelques années la commission Roulet avait eu pour objectif de recentrer les missions nationales et européennes d’EDF en limitant ses aventures extérieures. Or il semble que nous soyons retombés dans le même travers que celui qui avait motivé la création de cette commission. Qu’en pense le Gouvernement ?

On ne peut, en outre, que regretter l’augmentation des tarifs de l’électricité. Sans doute l’ouverture à la concurrence du secteur de l’énergie a-t-elle poussé en ce sens. Mais on doit également souligner le développement débridé des énergies renouvelables, qui n’a rassuré ni les fournisseurs et les industriels concernés ni les consommateurs intéressés – l’évolution du photovoltaïque, notamment, a traduit un manque préoccupant de lisibilité.

La presse de ce matin s’est fait l’écho d’éventuelles augmentations de tarifs qui pourraient faire l’objet de discussions dans les prochains jours au Parlement comme au Gouvernement. M. Gadonneix, avant son départ, avait évoqué une augmentation des tarifs de l’électricité supérieure à 20 % : nous poursuivons dans cette voie. Quelle est la position du Gouvernement ?

Enfin, je suis favorable à l’établissement d’un lien entre le développement des énergies renouvelables et le développement industriel, à l’instar de celui qui existait en France dans les années soixante et soixante-dix de l’autre siècle. Des sources de développement sont à rechercher de ce côté. L’absence d’un tel lien ajoute à l’incohérence de la situation en matière d’aides fiscales et d’augmentation des tarifs.

M. le président Christian Jacob. M. Poignant a évoqué la baisse des crédits d’impôts de 50 % à 25 %, plaidant pour l’augmentation du délai des acomptes.

Un autre cas doit être pris en compte : celui des personnes qui n’ont pas cherché à spéculer mais attendent d’obtenir leur permis de construire pour acheter le matériel. Une base juridique existe déjà pour les tarifs de rachat.

Mme Chantal Jouanno, secrétaire d’État chargée de l’écologie. Je rappellerai à M. Yves Cochet que le Grenelle n’implique pas la cogestion de la France. Les acteurs de terrain font des propositions et ce sont les représentants démocratiquement élus qui décident, même si les concertations à cinq sont généralisées, notamment dans le cadre de la prévention du risque industriel.

Par ailleurs, les budgets et les emplois Grenelle sont préservés dans le projet de budget, voire augmentés, notamment pour les opérateurs, qu’il s’agisse de l’ADEME ou de l’Agence des aires marines protégées.

Je tiens également à rappeler que la réduction de 10 % s’applique à tous les crédits d’impôts concernant le développement durable. S’agissant du photovoltaïque, rien ne change pour les particuliers : le crédit d’impôt passe bien de 50 % à 25 % du fait que nous atteindrons à la fin de l’année 2011 les objectifs fixés pour 2020. L’étalement des objectifs a permis de créer une filière industrielle française répondant à la demande tout en évitant de recourir à des installations ou à des systèmes très coûteux, alors que, nous l’observons, les prix sur le marché baissent fortement.

Les tarifs de rachat sont maintenus à leur niveau le plus élevé – 58 centimes d’euro.

En matière de délais, je vous propose de travailler ensemble, comme nous l’avons déjà fait, pour trouver un accord visant à éviter les effets de rétroactivité préjudiciables aux particuliers.

S’agissant de la stabilisation du système de décision des évolutions des tarifs, notamment pour le photovoltaïque – question abordée par M. Serge Poignant –, je rappellerai que nous avions déjà été confrontés à des évolutions erratiques lors de la mise en place des tarifs. De telles évolutions sont liées à la forte accélération du marché. Nous travaillons à un système plus stable, reposant non pas sur le rachat au cas par cas, mais sur la prise en compte des marges. C’est une demande des acteurs du système industriel.

Quant au bilan de l’ADEME, critiqué par M. Cochet, on ne saurait le trouver parfait lorsqu’on y est favorable et imparfait lorsqu’on est en désaccord. L’ADEME est une agence indépendante, dont les rapports reposent sur une méthode reconnue par ses pairs. Son bilan est positif, sous réserve de l’absence de changement de l’affection des soldes – il convient de se montrer vigilant sur le sujet, mais nous disposons de règles, lesquelles ont été révisées l’année dernière pour les biocarburants. Nous allons atteindre les 7 % de taux d’incorporation : il n’y a donc aucune raison de les changer.

Monsieur Pancher, vous vous êtes interrogé sur nos capacités budgétaires à mettre en place la trame verte et bleue, l’Agence de la nature et les parcs nationaux.

La trame verte et bleue est directement liée à l’Agence de la nature. Nous n’avons à l’heure actuelle aucune idée précise de son coût : c’est sur le fondement des schémas régionaux que nous pourrons connaître les ruptures de continuité écologique entraînant des travaux.

Des emplois sont déjà budgétés pour l’Agence de la nature, qui ressemblera à une holding ayant pour mission de regrouper les fonctions supports des différents grands établissements qui sont directement chargés de la biodiversité. Elle devra également assurer quelques missions communes, comme la trame verte et bleue, qui ne relève aujourd'hui d’aucun établissement.

Il conviendra également de travailler sur la compensation, prévue dans la loi depuis très longtemps mais rarement appliquée sur le terrain parce que les acteurs ne savent pas comment la mettre en œuvre. Or le système de compensation pourrait financer la trame verte et bleue.

Il faut par ailleurs savoir que, depuis 2008, 10 % d’emplois supplémentaires ont été créés dans l’ensemble des parcs nationaux et que les moyens budgétaires ont été substantiellement augmentés. Leur redéploiement interne autorisera le lancement du Parc national des Calanques en 2011, ainsi que le groupement d’intérêt public sur le parc forestier, tout en nous permettant de faire face à nos engagements de renforcement des moyens sur les parcs de la Guadeloupe et de Port-Cros et à l’aboutissement des parcs de Guyane et de la Réunion.

Concernant les agences de l’eau et leurs priorités, les stages décidés à la fin de l’année 2009 ont pour objet de clarifier le rôle et les orientations des financements : 25 % des aides pour le bon état écologique des eaux, 60 % pour l’assainissement et 12 % pour l’alimentation en eau potable. Il faudra améliorer la hiérarchie des priorités en travaillant le plus en amont possible.

La TGAP déchets, pour ce qui est relatif à l’incinération, est directement affectée à l’ADEME. S’agissant des décharges, on calcule a priori le résultat de l’augmentation de la TGAP. Pour 2011, le budget est estimé entre 170 et 180 millions d’euros, qui se rajoutent aux 50 millions d’euros de base de l’ADEME sur la politique des déchets.

En 2009, il y a eu équilibre entre la création-augmentation de la TGAP et le plan déchets de l’ADEME, qui a su mettre en place celui-ci très rapidement.

J’en viens aux emplois dédiés au contrôle des installations classées. Je tiens à souligner que la partie « risques » a augmenté de 8 % – l’augmentation sera de 18 % pour le triennal – : c’est dans ce secteur que les plus grands retards sont à rattraper, qu’il s’agisse des risques technologiques ou des risques naturels. Un rapport parlementaire a fixé pour objectif 1 500 inspecteurs d’installations classées en 2012. Nous en avons aujourd'hui 1 433 : il en manque donc encore quelques-uns pour que nos engagements soient tenus.

Nous veillons à ce que l’ANDRA (Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs), située à Bure, ne fasse aucune pression : chacun doit jouer son rôle et personne n’a à se substituer à quiconque en donnant ses propres orientations selon ses intérêts propres.

Concernant les panneaux, M. Dionis du Séjour cherche à améliorer le dispositif par un système de labellisation plutôt qu’en recourant à un bilan carbone global. Il convient de nous rappeler que nous sommes tenus par les règles européennes. Un système de labellisation propre à la France nous vaudrait un contentieux, surtout s’il n’est pas fondé sur des arguments totalement objectifs. Le bilan carbone des panneaux est objectif et fiable : on peut le promouvoir sur le plan européen.

Monsieur Chanteguet, vous m’avez interrogée sur la chasse aux niches grises. L’année dernière, on en avait déjà organisé une en écoconditionnant des aides fiscales. Le ministre d’État avait souhaité cinquante-quatre mesures fiscales pour améliorer la situation.

L’exonération de la TIPP dans le secteur aéronautique est en partie liée à nos obligations internationales. Nous avons un rapport en cours de rédaction sur les niches grises qui vous sera remis dans les prochaines semaines. Nous espérons faire des propositions dans le cadre du prochain projet de loi de finances rectificative.

Le Gouvernement a décidé de renforcer le bonus-malus automobile non plus tous les deux ans, mais tous les ans, à raison de cinq grammes par an puisque nous avons dépassé les objectifs que nous nous étions fixés, l’objectif pour 2020 étant de 95 grammes de CO2.

Monsieur Poignant, en ce qui concerne le rapport Roussely qui a été remis au Président de la République, je ne peux pas encore vous donner le détail de ses conclusions. Je puis toutefois vous assurer que, pour nous, l’Autorité de sûreté nucléaire doit rester une autorité indépendante.

L’appel d’offre relatif à l’éolien off shore sera lancé pour une première tranche de 3 000 mégawatts avant la fin du mois. Les zones ont été finalisées – les propositions de la Bretagne nous manquaient.

Il faut toutefois se rappeler que le plus gros de l’objectif de 23 % d’énergies renouvelables concerne la biomasse, notamment la chaleur, ce qui suppose le renforcement de la filière industrielle. Sur le bois-énergie, entre 2007 et 2009, l’augmentation a été de 9,5 %. Le soutien à la biomasse passe notamment par le fonds chaleur de l’ADEME et par les différents appels d’offre de la CRE.

Les DREAL aideront les collectivités à élaborer les différents schémas régionaux air, énergie, climat ou de cohérence écologique. Elles renforcent leur compétence énergie et travaillent avec les directions régionales de l’ADEME.

La France s’implique à Cancun tout d’abord en termes de représentation. Le ministre d’État se rendra bien évidemment au sommet. La France est très impliquée notamment dans les négociations sur les financements innovants – c’est un des points forts du futur G20 –, et sur tous les programmes de lutte contre la déforestation : nous avons promu REDD-plus et avons pris l’initiative des conférences à Paris et à Oslo sur la lutte contre la déforestation, sur laquelle se penchera le sommet de Nagoya dès le 26 octobre, c'est-à-dire avant Cancun.

Monsieur Brottes, le développement des nouvelles énergies renouvelables constitue en partie un service public. La CSPE est constituée pour 41 % par la solidarité avec les zones insulaires dans le cadre de la péréquation tarifaire. En matière de développement des filières renouvelables, la cogénération gaz représente 30 % de la CSPE. Nous travaillons sur le sujet.

Des hausses sont prévues, le principe étant de couvrir les charges tarifaires. Pour le premier décile de la population, les charges énergétiques globales, y compris le carburant, peuvent atteindre 15 % des revenus. Il convient donc d’accroître les économies d’énergie dans le logement. C’est pourquoi le ministre d’État a lancé l’éco-prêt à taux zéro et demandé à EDF de revoir sa politique en matière de tarification sociale.

On ne peut que regretter la hausse des tarifs de l’électricité visant les heures creuses puisque ce sont les pointes de consommation qui nous posent problème. Il conviendrait d’augmenter les tarifs aux heures de pointe pour les lisser aux heures creuses.

Je ne doute pas que, dans le cadre du débat budgétaire, des amendements seront déposés visant à créer une taxe sur l’installation d’antennes relais.

Je crois, madame Branget, avoir déjà répondu à votre question.

Quant à la motorisation des deux roues, monsieur Paul, le problème vient surtout des difficultés qu’il y a à contrôler le bruit qu’émettent ces véhicules en circulation. J’ai présenté avant l’été, un plan « bruit » dont l’objectif est de cibler les financements sur les 20 000 points noirs recensés.

En ce qui concerne les aventures extérieures d’EDF, des négociations sont en cours – je rappelle au passage que je ne suis pas directement en charge de l’énergie – pour trouver un accord entre EDF et son partenaire américain. Aucune décision définitive n’a été prise à ce stade.

Pour mettre un terme aux incohérences que vous évoquiez à propos des liens entre l’ANR et les filières industrielles, je préciserai que nous avons un projet concernant dix-huit filières vertes pour développer une offre industrielle parallèlement à l’évolution de la demande. Les mesures prises en matière d’énergie photovoltaïque sont précisément destinées à favoriser une offre industrielle française. Ce plan sera présenté au cours du premier trimestre de 2011.

M. Louis Guédon. Je voudrais attirer l’attention du Gouvernement sur les difficultés que nous rencontrons dans les ports de pêche pour financer la formation de nos équipages. Avec la crise, celle-ci est primordiale pour maintenir des activités maritimes sur notre littoral.

La loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche qui réorganise la profession est susceptible de redonner à nos jeunes, inquiets de leur entrée dans la vie active, l’espoir de trouver dans la carrière de marin pêcheur un profil d’avenir, espoir que partagent leurs familles, soucieuses de l’avenir de leurs enfants, et les professionnels qui envisagent la reprise de leur entreprise de pêche par une relève compétente. La formation des jeunes marins est, avec les compétences technologiques, déterminante pour maîtriser les lois de la mer. La crise de la pêche a entraîné un vieillissement de nos équipages.

Nos écoles de pêche de statut privé soutenues par les professionnels forment des élèves dans le cadre de la formation initiale classique et offrent une seconde chance à ceux qui suivent une formation continue et qui reçoivent les aides matérielles qui leur sont indispensables. Les écoles de pêche de statut privé, financées par l’État, la profession et les collectivités territoriales, sont organisées en associations et reçoivent un agrément de l’État qui verse aux élèves une rémunération par le biais de l’Agence de services et de paiement. Or celle-ci n’est pas intervenue, si bien que les stagiaires risquent d’abandonner une formation pourtant indispensable.

Madame la secrétaire d’État, pouvez-vous nous assurer que les fonds nécessaires à la survie de nos écoles seront débloqués à l’occasion de ce budget et versés dans les meilleurs délais ? Cet argent doit rester la priorité dans le budget de la formation des futurs marins !

M. Philippe Tourtelier. Quelques remarques avant de vous interroger, madame la secrétaire d’État.

Dans le débat sur les niches fiscales, il faut distinguer le solaire, où il s’agit de production, et l’isolation, dont je regrette beaucoup que les niches la concernant soient révisées à la baisse. En effet, changer les comportements prend toujours beaucoup de temps, et c’est là le principal gisement d’économies d’énergie.

Concernant EDF, dont le PDG a fait des déclarations ambiguës sur le développement des énergies renouvelables, il faut se souvenir que l’État est l’actionnaire majoritaire et qu’il aurait tout intérêt à clarifier la situation.

À propos d’EDF toujours, vous avez répondu, madame la secrétaire d’État, à François Brottes, qui a souligné l’incohérence qu’il y à augmenter les abonnements des clients – entreprises ou particuliers – qui ont accepté des délestages aux heures de pointe. Vous avez dit également que le ministre d’État avait demandé à EDF de revoir les tarifs sociaux. Dans le même ordre d’idée, à l’occasion de l’expérimentation des compteurs intelligents qui a donné lieu à quelques « cafouillages », il est apparu que la première génération avait été optimisée pour les producteurs, mais non pour les consommateurs. EDF maintient donc sa politique de l’offre qui n’empêche pas toujours les gaspillages au lieu d’envisager une politique de la demande. Peut-on lui demander que le compteur Linky devienne un moyen pour les consommateurs de gérer leur facture ? En somme, comment l’État peut-il s’y prendre pour réorienter certaines politiques d’EDF et les mettre en cohérence avec le budget qu’il défend ?

J’en viens aux financements précoces décidés à Copenhague. Vous avez précisé, madame la secrétaire d’État, qu’un compte d’affectation spéciale serait alimenté « à terme » par la vente d’UQA. Or il s’agit de financements précoces. Êtes-vous sûre que financements il y aura puisque le prix risque de ne pas être très élevé compte tenu des droits qu’il reste à la Russie ? Que se passera-t-il si l’argent n’est pas au rendez-vous ? Peut-on avoir un calendrier car les ONG se plaignent de ne pas obtenir de Bercy d’autre information que ce compte d’affectation spéciale dont on n’est pas sûr qu’il sera alimenté ? Nous aurions tout intérêt à comparer l’aide au développement en 2010 et 2011, les financements supplémentaires prévus que vous avez annoncés, le calendrier et, éventuellement, la destination des fonds.

M. André Schneider. Vous avez déjà répondu à Françoise Branget à propos de l’eau et des voies navigables, mais qu’en est-il de la liaison Rhin-Rhône ? Quand Strasbourg sera-t-elle reliée à Marseille par voie fluviale ?

Je voudrais également vous interroger à propos d’un petit rongeur bien sympathique mais qui nous pose, en Alsace, beaucoup de problèmes : le grand hamster. Beaucoup de chantiers sont bloqués à cause de lui. Certains chefs d’entreprise envisagent, l’âme en peine, de quitter la région. Nous sommes très attachés à cet animal, mais il suffit, madame la secrétaire d’État, de découvrir des traces de son éventuel séjour sur un chantier qui doit démarrer pour tout arrêter. Cela fait perdre parfois plusieurs millions d’euros aux collectivités alsaciennes. Les trous laissés dans le sol par ces petites bêtes sont-ils plus graves que ceux faits à l’économie de notre région, et à l’emploi ? Et ne peut-on les inviter à aller séjourner ailleurs ?

Quelle est la « potabilité » – si vous me pardonnez ce terme barbare – de l’eau du robinet sur l’ensemble de notre territoire ? Et si, d’aventure, les gens ne buvaient que cette eau-là, qu’arriverait-il à nos collectivités et à la filière des eaux minérales ?

Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont. Depuis de nombreuses années, et avant même la concertation et la loi Grenelle 1, les collectivités territoriales se sont engagées dans une politique offensive en faveur du développement durable de leurs territoires, et vous avez fort opportunément souligné, madame la secrétaire d’État, le rôle des élus locaux en la matière.

Le nouveau contexte financier qui leur est imposé, au motif de réduire la dette publique, dont ils ne sont pas responsables puisque la dette des collectivités représente moins de 10 % de la dette publique, conjugue le gel des dotations de l’État pour trois ans et le transfert de multiples compétences sans les compensations financières correspondantes. Dès lors, lesdites collectivités seront inéluctablement contraintes à se limiter strictement à leurs compétences obligatoires au détriment des politiques choisies, notamment de leurs nombreuses actions en faveur de l’environnement et du développement durable.

Au moment où les nombreuses mesures, notamment fiscales, prises par le Gouvernement vont donner un coup fatal au développement durable, et où votre budget, madame la secrétaire d’État, accuse une baisse inquiétante, comment comptez-vous tenir les engagements du Grenelle ?

Devons-nous en conclure qu’il s’agissait largement d’une posture incantatoire et d’une politique purement conjoncturelle, ce qui serait extrêmement inquiétant ?

De quels éléments disposez-vous pour rassurer les acteurs locaux qui s’impliquent depuis des années dans le développement durable de leurs territoires ?

M. Yves Nicolin. Je reviens ce matin d’une mission en Haïti où j’ai pu constater l’immensité des besoins en alimentation en eau et en assainissement, l’importance des financements internationaux, et les attentes des responsables envers les entreprises françaises. Votre ministère peut-il, madame la secrétaire d’État, sensibiliser l’ensemble des acteurs économiques qui sont parmi les plus réputés au monde et les motiver ? Il n’y a pas d’argent à perdre, là-bas, bien au contraire !

Par ailleurs, je suis l’élu d’un territoire qui a l’immense privilège d’être traversé par le canal de Roanne à Digoin. Destiné à l’industrie, il est devenu exclusivement touristique et Voies navigables de France, établissement davantage préoccupé par des voies d’un plus grand intérêt économique, risque de le négliger quelque peu. Les collectivités territoriales ne sont pas opposées à l’idée d’en reprendre la gestion, mais il faudrait autoriser VNF à verser, au moment du transfert, une soulte correspondant à l’entretien qu’elle y consacre aujourd'hui. Si la somme était réglée en une fois, elle permettrait de remettre à niveau ces canaux qui sont extrêmement dégradés.

S’agissant de la production d’électricité à partir de la biomasse, en particulier le bois, par des unités de petite puissance, vous avez rappelé, madame la secrétaire d’État, les appels d’offre de la CRE. Mais ils sont quelquefois « encalminés » et les projets, d’ampleur certaine, ont du mal à aboutir. Pourtant, nombreux sont, dans nos territoires, les petits projets – un mégawatt en crête – qui ne bénéficient pas jusqu’à présent de tarifs spécifiques. Un projet de décret, ou d’arrêté, est, paraît-il, dans les cartons. Quand sera-t-il publié ?

Enfin, je joins ma voix à celle des collègues, nombreux apparemment, qui s’inquiètent des modalités de la réduction du crédit d’impôt photovoltaïque. Nous sommes bien conscients qu’il faut le revoir, mais la rétroactivité est un procédé détestable. On piège le contribuable, les entreprises qui ont des plans d’emploi et qui ont recruté, bref, toute une filière. Faire prendre effet à cette réduction dès le 29 septembre n’est pas une bonne chose. Il faudrait attendre un peu, le 1er novembre par exemple, et, à tout le moins, prendre en compte soit le versement d’un acompte avant la date fatidique, soit l’accord sur le devis, soit le dépôt d’une déclaration de travaux sans jamais cumuler plusieurs de ces conditions. Les sommes en jeu, de l’ordre de 15 000 euros, ne sont pas négligeables pour des particuliers qui doivent parfois emprunter auprès des banques, dont les décisions ne se prennent pas en quarante-huit heures. Je vous demande donc d’attendre le 1er novembre, pour que les Français ne soient pas totalement piégés.

M. Joël Giraud. Madame la secrétaire d’État, la loi de 2006 sur les parcs nationaux prévoit qu’ils contractualisent avec les communes sur lesquelles ils s’étendent, sous la forme d’une charte valable pendant quinze ans. En 2011, nous entrerons dans une phase cruciale d’élaboration. Les élus comme les personnels s’inquiètent de la réduction envisagée des moyens de fonctionnement de ces parcs. C’est un signal très négatif adressé aux territoires concernés, et en contradiction totale avec les ambitions que l’État demande aux parcs de se donner, de même qu’avec les exigences affichées dans les projets de charte. En outre, la baisse des crédits n’empêche pas d’envisager la création du Parc national des Calanques, le lancement des études de préfiguration du parc forestier entre la Champagne et la Bourgogne, une vaste extension des périmètres d’étude des parcs de Port-Cros et de la Guadeloupe. Autant de projets qui demanderont de mobiliser des moyens.

Il n’est pas question d’exonérer les parcs nationaux des efforts demandés à la nation, mais il faudrait un peu de mesure pour ne pas compromettre ni décrédibiliser le processus des chartes, et encore moins hypothéquer l’avenir même des parcs nationaux. Je suis conscient que les effectifs des personnels ont augmenté au cours des années précédentes, mais il fallait tenir les échéances. Les projets nouveaux suffiraient à justifier un abondement des lignes budgétaires. Faisons en sorte, à tout le moins, qu’elles soient stabilisées, création et extensions comprises. Cela correspondrait déjà à un effort significatif sans qu’il soit rédhibitoire pour la réussite des chartes.

Je précise que j’interviens à ce sujet en plein accord avec le président des parcs nationaux de France, même s’il n’appartient pas au même groupe politique que moi.

M. Arnaud Richard. À l’occasion de l’examen des crédits du ministère de l’écologie et du développement durable, je voulais, madame la secrétaire d’État, vous interroger sur la problématique des catastrophes naturelles.

Depuis plusieurs années, un travail préparatoire à une réforme du régime des assurances contre les catastrophes naturelles a été engagé, en particulier après la sécheresse de 2003 et les inondations de 2005. Plusieurs rapports ont été rédigés, à l’Assemblée, au Sénat, et au sein de l’administration. La nécessité de réformer la législation de 1982 a été rappelée par la Président de la République à la suite de la tempête Xynthia. Il s’agirait de mieux responsabiliser les assurés et de modifier la procédure de reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle. Les assurés, qui sont les principales victimes, craignent surtout une modulation de la prime additionnelle, qui mettrait à mal la notion de solidarité nationale, ou de la franchise en fonction des zones d’habitat.

Le fond de la réforme transformerait fondamentalement le processus réglementaire en donnant un rôle plus important aux assureurs, ce qui aboutirait forcément à des différences de prise en charge importante ou à une vive progression des primes au détriment des plus faibles. Cela est d’autant plus vrai qu’en raison de la multiplication des catastrophes, la Caisse centrale de réassurance a vu ses réserves se réduire, ce qui risque de mettre en péril le système bâti en 1982, et aménagé à plusieurs reprises.

Si le système actuel pose certes des problèmes et nécessite des adaptations, dans quels délais, madame la secrétaire d’État, un projet pourra-t-il être soumis à concertation, et un avant-projet déposé ?

Quelles garanties l’État entend-il donner pour que la réforme ne sanctionne pas les personnes qui vivent dans les zones à risque ou ayant été déclarées en état de catastrophe naturelle ?

Mme Claude Darciaux. En cinq ans, tout a changé : plus personne ne conteste l’importance des préoccupations environnementales. Au niveau local, tous les maires ont épousé la cause écologique, mais pas toujours la cause du développement durable, équitable et solidaire. Aussi, les élus locaux s’interrogent-ils sur leurs capacités à mettre en œuvre les mesures efficaces prévues par le Grenelle de l’environnement – le plan climat territorial, une meilleure gestion des eaux pluviales, la mise en place des trames verte et bleue – sans incitation ni accompagnement financiers.

Aujourd'hui, les moyens octroyés par l’État manquent pour financer les mécanismes d’adaptation aux effets du changement climatique.

En matière d’économies d’énergie, le plus facile a été fait, et il reste désormais les mesures les plus coûteuses, comme la réhabilitation thermique des bâtiments existants, dont le coût ne sera pas amorti par les économies induites. Le gel des dotations de l’État aux collectivités inquiète beaucoup les élus.

Ne pensez-vous pas, madame la secrétaire d’État, que l’application du Grenelle dans ce domaine soit largement compromise ?

Le coût d’augmentation de l’électricité peut être amorti par des économies d’énergie, par exemple grâce à l’isolation, mais la baisse des crédits d’impôt en faveur du développement durable risque de compromettre le mouvement.

L’élaboration des plans de prévention des risques naturels est souvent l’occasion d’affrontements puisqu’il s’agit d’identifier le risque ainsi que son intensité, et d’en tirer les conséquences sur l’aménagement du territoire. Votre objectif en termes de taux d’approbation est ambitieux puisque vous envisagez, l’année prochaine, de multiplier par deux celui de 2010. Mais ne l’est-il pas trop, madame la secrétaire d’État, compte tenu des difficultés ?

Par ailleurs, il importe d’accélérer les plans de prévention des risques technologiques et industriels. Comment comptez-vous intégrer cette problématique ? Au vu du nombre d’inspecteurs disponibles, j’insiste sur la nécessité de contrôler les sites industriels sensibles. Si nous voulons que, demain, la population accepte la relance de la politique industrielle, un contrôle strict et fréquent des sites est absolument impératif. Je le sais car les sites classés Seveso se multiplient dans ma circonscription.

M. Yves Vandewalle. Dans un récent rapport, un expert propose, pour relancer les négociations sur le climat, de modifier la démarche mondiale de réduction de la production de CO2. Plutôt qu’une approche globale par pays, ce qui, on l’a vu à Copenhague, attise le conflit entre les pays développés et les pays émergents, il suggère de fixer des objectifs communs par grand secteur, notamment pour l’énergie et les transports. Selon lui, les moyens techniques existent et cette piste permettrait de stabiliser la production à l’horizon 2030-2035 sans pour autant freiner la croissance. Il s’agit donc de mettre en place une régulation permettant aux acteurs économiques et aux États d’ajuster progressivement leur stratégie industrielle. Une telle méthode permettrait-elle, madame la secrétaire d’État, de surmonter les conflits d’intérêt nationaux et d’atteindre les objectifs ?

Le développement des zones urbaines impose d’étendre les réseaux enterrés : eaux usées, électricité, gaz, notamment. Il faut gérer à la fois l’extraction des matériaux, leur transport en décharge et la livraison des nouveaux matériaux pour le remblai. Le coût de ces travaux est élevé et l’impact écologique important – émission de CO2 lors du transport, mise en décharge, exploitation des carrières. Or les matériaux qui sont extraits peuvent être recyclés sur place en remblai, j’en ai fait l’expérience dans ma commune. On réduit donc le trafic des poids lourds, on économise les ressources naturelles, on diminue le volume des mises en décharge et la durée du chantier. Le Gouvernement peut-il encourager cette technique et prendre modèle sur le Japon, où elle est utilisée, selon mes informations, pour 80 % des chantiers de voirie ? Les finances des collectivités et la protection des espaces naturels y gagneraient beaucoup.

Je soutiens les remarques qui ont été faites sur la labellisation et la stabilisation des règles du jeu fiscal.

Enfin, je m’inquiète du financement des syndicats mixtes des parcs naturels régionaux à cause de la rédaction actuelle de la loi portant réforme territoriale. Il est prévu qu’ils puissent s’autofinancer à hauteur de 30 %. Or ils n’ont pas de ressources propres. Des sonnettes d’alarme ont été tirées mais, si la commission mixte paritaire ne règle pas le problème, il faudra probablement trouver une solution dans les mois qui viennent.

Mme Frédérique Massat. Dans le cadre du plan contre le bruit, madame la secrétaire d’État, vous aviez annoncé au mois de juillet pour le transport routier des engagements financiers à hauteur de 550 millions d’euros pour la route non concédée et de 110 millions d’euros pour la route concédée. Quelles seront les priorités retenues par le plan, notamment en termes budgétaires ?

En 2010, le budget du médiateur de l’énergie était de 6 725 000 euros. D’après le rapport qu’il a rédigé, les saisines sont de plus en plus nombreuses, et les contentieux se multiplient également. En outre, M. Borloo lui a demandé un rapport sur les modalités de facturation et de traitement des réclamations par les fournisseurs d’électricité et de gaz. Dans ce contexte, à combien se montera le budget du médiateur en 2011, financé aujourd'hui entièrement par la CSPE (contribution au service public de l’électricité) ? Ne serait-il pas logique que les fournisseurs apportent leur contribution, dans la mesure où il s’agit de réclamations à propos de leur système de facturation et où des abus sont souvent constatés ?

À propos du photovoltaïque, vous nous avez annoncé une politique de plus long terme pour éviter les décisions intempestives, du type de celles concernant les rachats. Il faudrait inclure dans la réflexion la question du raccordement aux réseaux de transport et de distribution. Tous les producteurs rencontrent d’énormes problèmes, y compris les particuliers, puisqu’il y a un conflit d’usage et d’intérêt quand il faut raccorder des producteurs d’énergie renouvelable, et tout particulièrement les habitations principales, au réseau de distribution. Il faut agir vite et aucune réflexion prospective n’a été menée, ce qui suscite la colère de nombreux producteurs. Que comptez-vous faire ?

Le rapport Charpin dresse un constat sévère sur la filière photovoltaïque, qui représente moins de 0,4 % en regard d’un objectif de 23 % de la consommation d’énergie obtenue à partir de sources renouvelables, qui est celui de la directive. Des pistes d’action sont envisagées pour remédier aux dérives constatées. Qu’en pensez-vous ?

M. Christian Vanneste. Ma question porte sur l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN), qui est une autorité administrative indépendante.

Le budget de l’ASN est, tout d’abord, éclaté en quatre parties distinctes : y contribuent deux programmes dépendant de la mission « Écologie, développement et aménagement durables » – les programmes 181 « Prévention des risques » et 217 « Conduite et pilotage des politiques de l’écologie, de l’énergie, du développement durable et de la mer » –, un programme de la mission « Recherche et enseignement supérieur », au titre de l’appui technique fourni par l’IRSN à l’ASN, ainsi que le programme « Conduite et pilotage des politiques économiques et financières » au titre des services centraux de l’ASN. Cette situation nuit, bien sûr, à la lisibilité du budget global de l’institution.

Un second problème résulte des liens tissés entre l’ASN et l’IRSN. L’ASN utilise certains services de l’IRSN pour réaliser des études techniques qu’elle n’a pas les moyens de réaliser elle-même. Près de cent agents issus de l’IRSN sont ainsi mis à la disposition de l’ASN. Ils sont comptés dans le plafond d’emploi de l’IRSN, et leur rémunération est ensuite remboursée par l’ASN. Près de 400 autres agents de l’IRSN travaillent également pour l’ASN à temps plein sur un total de 850 équivalents temps plein travaillés. Cette dualité est censée permettre à l’ASN de faire appel à d’autres opérateurs, mais elle n’y a jamais recours en réalité. On pourrait donc créer un seul organisme regroupant l’ASN et l’IRSN.

Un Haut comité pour la transparence et l’information sur la sécurité nucléaire est, par ailleurs, chargé d’émettre des avis. A-t-on vraiment besoin d’une troisième instance en ce domaine ?

La loi du 13 juin 2006 a confié à l’ASN des responsabilités en matière de gestion des situations d’urgence radiologique. Afin d’être en mesure d’exercer cette mission à tout moment, l’ASN a souhaité la mise en place d’un système de mobilisation de ses agents, reposant sur un dispositif d’alerte générale et sur des astreintes. Malgré des démarches répétées auprès de différents ministères, notamment ceux de l’économie, du budget et de l’écologie, l’ASN s’est trouvée dans l’impossibilité d’instaurer un tel dispositif, les rigidités du système de rémunération de la fonction publique ne permettant de prendre en compte les contraintes spécifiques des astreintes.

L’étude réalisée avec René Dosière sur l’ensemble des autorités administratives indépendantes nous a permis de prendre conscience de ces difficultés, qui entravent l’action, pourtant essentielle, de l’ASN. Nous proposerons, dans notre rapport, de la fusionner avec l’IRSN et le Haut comité.

M. Michel Terrot. Lors de la visite qu’il a effectuée en République démocratique du Congo (RDC), en mai 2008, Jean-Louis Borloo, a appelé l’attention sur le danger menaçant les forêts du bassin du Congo, qui constituent, après l’Amazonie, la deuxième plus grande forêt tropicale au monde. C’est un enjeu majeur pour la biodiversité et le climat au niveau planétaire. Les deux tiers des forêts concernées se situent en RDC, qui recèle une biodiversité d’une richesse exceptionnelle.

Le Gouvernement français a indiqué qu’il souhaitait jouer un rôle moteur dans la lutte contre le commerce du bois illégal, pour la protection de la biodiversité et pour la protection des populations forestières – 40 millions de personnes dépendent, par exemple, de ces forêts en RDC. Quels moyens le Gouvernement est-il prêt à engager pour lutter concrètement contre la déforestation ?

M. Frédéric Reiss. Dans le droit fil des engagements du Grenelle de l’environnement, le Gouvernement a développé une politique offensive en matière de prévention et de recyclage des déchets. De nombreuses collectivités se sont engagées dans des actions volontaristes pour amplifier l’action des usagers en organisant et encourageant des collectes sélectives. Les résultats sont plutôt probants : on arrive, grâce aux collectes sélectives de porte à porte, à réduire les refus de tri à 7 ou 8 %, et parfois moins.

L’ADEME joue un rôle essentiel dans la mise en œuvre du plan « déchets ». L’estimation du soutien apporté aux collectivités, qui pourrait s’élever à 630 millions d’euros sous réserve que l’objectif de 75 % de recyclage soit atteint en 2012 au niveau national, suscite aujourd’hui des inquiétudes. La fluctuation des contributions d’Éco-Emballages, qui représentent une recette non négligeable des collectivités, n’incite pas à la généralisation des redevances ou taxes incitatives.

Pouvez-vous, madame la secrétaire d’État, rassurer les collectivités en garantissant, pour l’ADEME et pour Éco-Emballages, les moyens financiers issus de l’augmentation de la TGAP, taxe parfois jugée punitive malgré les efforts des collectivités ?

M. Robert Lecou. Grâce à l’action volontariste du Gouvernement et du Parlement, la France est désormais considérée comme une référence en matière environnementale. En organisant des « Grenelle » successifs, notre pays a favorisé la prise de conscience et le développement d’un certain nombre de réflexes, notamment au niveau des collectivités territoriales. Elle a également donné une impulsion à l’innovation au service d’une croissance respectueuse du développement durable. C’est dans ce contexte que l’objectif des « trois fois vingt » a été fixé : 20 % d’économies d’énergie, 20 % de gaz à effet de serre en moins, et 20 % d’énergies renouvelables.

Pour atteindre cet objectif, nous aurons besoin du soutien de toutes les filières. J’aimerais donc connaître votre avis, madame la ministre, sur deux filières en particulier, et d’abord sur celle des micro-centrales au fil de l’eau : les ressources disponibles dans ce domaine sont-elles évaluées ? Quel est leur poids ? Les aides sont-elles suffisantes pour que l’on parvienne à une exploitation maximale de cette ressource ? J’aimerais également revenir sur la gazéification des déchets, procédé dans lequel de nombreuses sociétés investissent beaucoup d’argent dans le monde entier : on avance dans le domaine de la recherche, mais aussi au plan opérationnel. Quel soutien peut-on apporter à ce procédé qui permet d’éliminer des déchets ménagers sans émettre des fumées potentiellement dangereuses pour la santé ? C’est une innovation qui permet de traiter intelligemment les déchets en produisant de l’énergie propre, et donc de nous rapprocher de l’objectif des « trois fois vingt ».

M. Yannick Favennec. La déclaration d’utilité publique de la ligne à très haute tension – THT – Cotentin-Maine, destinée à connecter au réseau le réacteur de type EPR qui est en cours de construction à Flamanville, a été annoncée le 27 juin dernier. La ligne traversera une grande partie du Nord-Ouest mayennais – sur 59 kilomètres – et elle affectera 16 communes de mon département. Malgré la mise en place d’un ambitieux dispositif d’évaluation sanitaire, à la demande des parlementaires, les populations et les élus concernés demeurent très inquiets. C’est un élément que nous devons prendre en compte.

À l’issue de la procédure d’enquête publique, les commissaires enquêteurs ont émis des réserves sur les conséquences des lignes THT sur la santé, et ils ont recommandé la réalisation d’une enquête épidémiologique avant toute décision définitive. Des expertises, notamment celles de l’AFSSET, ont établi une corrélation entre l’exposition aux champs électromagnétiques et les leucémies infantiles. À ce jour, aucune étude biologique n’a démontré l’existence d’un mécanisme susceptible d’expliquer la survenue de telles leucémies, mais l’AFSSET a publié, en avril dernier, un avis préconisant qu’il n’y ait pas de ligne THT à proximité des écoles, des crèches et des hôpitaux. De fortes présomptions de risque existent, mais il manque toujours une étude sérieuse et indépendante permettant de confirmer ou d’infirmer définitivement ces dangers. Or, on compte déjà 350 000 personnes vivant à proximité des quelque 13 000 kilomètres de lignes qui parcourent notre pays.

Afin de rassurer les populations concernées par la ligne THT Cotentin-Maine, ne pourrait-on pas réaliser une étude épidémiologique sur les lignes existantes ? Il s’agirait de déterminer si l’exposition aux champs électromagnétiques a des conséquences sur la santé humaine et sur la santé animale. Le retard de 24 mois prévu dans la mise en service du réacteur nucléaire pourrait être utilisé pour réaliser cette étude. Pouvez-vous nous faire connaître vos intentions à cet égard ?

M. Jean-Claude Flory. La loi sur l’eau et les milieux aquatiques a prévu qu’un milliard d’euros serait affecté aux programmes des agences de l’eau au titre de la solidarité rurale. Ces financements accompagnent les communes rurales dans les investissements considérables qu’elles doivent réaliser, en particulier dans le domaine de l’assainissement. J’aimerais savoir si cette enveloppe est sanctuarisée en 2011, et si un bilan du dispositif est envisagé à mi-parcours.

M. André Chassaigne. Ma première question porte sur l’extension des compétences des comités d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail – CHSCT –, qui avait été prévue dans le cadre du Grenelle en matière de pollution industrielle. Dans une réponse à une question parlementaire, Jean-Louis Borloo avait évoqué des pourparlers avec les organisations syndicales, que vous qualifiez de « partenaires sociaux ». Où en sommes-nous ?

L’importance de la biomasse a déjà été évoquée par certains collègues sous l’angle de la production d’énergie grâce à la combustion et au développement des biocarburants. Notre pays offre des perspectives considérables dans ce domaine grâce à la bonne gestion de ses forêts, grâce à l’importance de son agriculture et grâce à sa politique des déchets. Or, nous avons pris du retard dans le domaine du biogaz, qui consiste à produire du méthane à partir de matières organiques d’origine végétale.

Nous ne sommes qu’au cinquième rang européen. Attribue-t-on suffisamment de moyens à l’ADEME pour accompagner le développement du biogaz ? Notre retard semble rattrapé en ce qui concerne la définition des conditions d’injection, mais il reste à traiter le problème posé par les lourdeurs administratives, dont se plaignent les fournisseurs potentiels de biogaz, notamment les agriculteurs, et il faudrait également régler la question du tarif de rachat, aussi bien pour le milieu agricole ou les scieries que pour les filières industrielles. Ces dernières sont dans l’impossibilité de se développer, nous dit-on, en l’absence d’un tarif leur permettant d’amortir les investissements.

Mme Chantal Jouanno, secrétaire d’État chargée de l’écologie. En réponse à M. Louis Guédon, je rappellerai seulement que des financements sont prévus dans le cadre de la sécurité des affaires maritimes. Dominique Bussereau répondra sur le fond, car la question entre dans son champ de compétences.

Monsieur Tourtelier, le crédit d’impôt « développement durable » pour l’ensemble des mesures de maîtrise des dépenses énergétiques représentait 1,2 milliard d’euros l’an dernier. On ne peut donc pas dire qu’aucun moyen n’est prévu dans le cadre du Grenelle. L’éco-prêt à taux zéro – PTZ – fonctionne très bien : 140 000 éco-PTZ ont été conclus l’an dernier pour l’isolation.

S’agissant du rôle d’EDF dans le domaine des énergies renouvelables, et plus généralement du rôle de l’État au sein d’EDF, je crois que partageons tous un même constat. Les conclusions du rapport Roussely nous permettront sans doute d’apporter des réponses.

Quant aux compteurs Linky, dits « intelligents », nous sommes en phase d’expérimentation. C’est précisément pour répondre à certaines interrogations – il semble que ces compteurs soient plus utiles aux fournisseurs qu’aux consommateurs, alors que leur but devrait être d’aider ces derniers à lisser leur consommation, et qu’ils ne soient pas toujours communicants – que nous réalisons une expérimentation. Le déploiement de ces compteurs sera ensuite très progressif : il devrait s’étaler sur plusieurs années.

Le financement précoce fast start sera disponible dès l’année prochaine dans le cadre d’un compte d’affectation spéciale – CAS –, pour un montant de 150 millions d’euros. L’objectif est d’atteindre 420 millions sur l’ensemble de la période. Même s’il faut rester prudent tant que rien n’est conclu, nous sommes très confiants pour la vente des UQA. Le CAS sera créé par cette loi de finances, et les fonds prévus viendront en complément de ceux que nous consacrons déjà à l’action en faveur du climat au plan international, notamment de ceux qui sont versés par l’AFD – pour un montant de 2,4 milliards d’euros.

Dominique Bussereau répondra cet après-midi aux interrogations portant sur le canal Rhin-Rhône.

J’en viens à la question portant sur le grand hamster, protégé au titre de la directive Habitats. La France défend ses positions dans le contentieux en cours. Il reste que nous n’avons pas réussi à enrayer la baisse de la population de grands hamsters. Or, c’est le critère pris en compte par la Commission. Compte tenu de la date fixée pour la plaidoirie – le 21 octobre – et des enjeux financiers de cette affaire, vous comprendrez que je demeure très prudente. L’amende pourrait dépasser 10 millions d’euros, et les astreintes pourraient être comprises entre 13 000 et 780 000 euros par jour de retard dans l’exécution de la décision.

L’eau est potable en France dans 98 % des cas – les rares exceptions concernent surtout les milieux ruraux. La consommation de l’eau du robinet n’exclut pas celle de l’eau de source en bouteille dans certaines conditions.

Je le répète : les crédits « Grenelle » sont préservés dans ce budget. Ils sont stabilisés pour la biodiversité, et ils augmentent pour les risques, la recherche, l’énergie et le climat – la hausse est de 43 % dans ce domaine. Il en va de même pour les effectifs. Nous avons sanctuarisé le budget « Grenelle ». C’est aussi une question d’indépendance énergétique : il y a un intérêt industriel, un intérêt social et un intérêt environnemental. Manquer le Grenelle reviendrait à manquer un tournant considérable pour l’ensemble de notre économie.

Yves Nicolin m’a posé une question sur Haïti. Nous avons réuni les acteurs de l’eau dès le mois de mars. Il s’agissait, tout d’abord, de fournir des moyens immédiats et temporaires, tels que des citernes. Je rappelle également que la France a envoyé 250 personnes sur le terrain dans le cadre du service civique volontaire. Nous travaillons maintenant sur des investissements de plus long terme, en particulier la reconstruction du réseau. Elle dépendra de l’organisation de l’urbanisation, qui n’a pas encore été entièrement décidée. Je tiens, par ailleurs, à dire que nous avons un ambassadeur tout à fait remarquable sur place.

J’en viens à la question portant sur les petits projets de production d’électricité grâce à la biomasse. Ces projets ne relèvent pas aujourd’hui de la CRE. Un tarif devrait être publié à la fin du mois d’octobre ou au début du mois de novembre.

Le budget des parcs nationaux, évoqué par Joël Giraud, sera stabilisé : il n’y aura pas de baisse des crédits de paiement. En trois ans, ce budget est passé de 59 à 74 millions d’euros afin de tenir compte de la loi de 2006, qui impose la renégociation des chartes. J’ajoute que 70 emplois supplémentaires ont été créés, ce qui représente une hausse de 10 % des effectifs. Le débat porte désormais sur l’organisation du système, que nous devons améliorer – je pense en particulier aux missions exercées par l’établissement public Parcs nationaux de France : il faut éviter les doublons avec les parcs nationaux eux-mêmes.

Un rapport nous a été remis sur les catastrophes naturelles après la tempête Xynthia. Le régime actuel est globalement satisfaisant, mais il pourrait être amélioré afin de prévenir les situations de risque. Instaurer une surprime dans les zones à risque me paraîtrait totalement contreproductif : cela pourrait conduire certains acteurs à éviter tout classement dans le cadre d’un plan d’un périmètre de prévention des risques naturels. D’autres voies peuvent, en revanche, être explorées, notamment dans l’hypothèse où les prescriptions du plan de prévention ne sont respectées.

Claude Darciaux a raison : les économies d’énergie sont la priorité ; c’est là que se situent les gains les plus importants ; le développement des énergies renouvelables vient ensuite. Toutefois, contrairement à ce qu’elle a affirmé, un amortissement par les économies induites est envisageable. La difficulté réside dans l’investissement initial pour un certain nombre de foyers. C’est pourquoi nous avons instauré l’éco-prêt à taux zéro.

À cela s’ajoute le verdissement de l’ensemble des prêts décidé l’an dernier par Jean-Louis Borloo, ainsi que les mesures d’économies d’énergie arrêtées dans le cadre du CIDD pour un montant de 1,2 milliard d’euros en 2010. Des moyens sont donc disponibles, même s’il reste beaucoup à faire. Il faudra en particulier travailler sur les économies d’énergie à l’intérieur des maisons : on isole les maisons, mais les appareils domestiques ne sont pas suffisamment normés. Un travail est en cours sur le plan européen.

Sommes-nous trop ambitieux pour les objectifs des plans de prévention des risques naturels ? Afin de cibler les actions engagées, nous avons demandé aux préfets d’identifier des zones pour lesquelles un plan de prévention des risques devra être élaboré dans les trois années à venir. Nous attendons les résultats de ces travaux au mois de décembre. Quand on songe aux victimes des catastrophes naturelles, mais aussi à leurs conséquences matérielles, on peut penser que nous ne sommes pas trop ambitieux.

Je ne reviendrai pas sur les plans de prévention des risques technologiques (PPRT), car je les ai déjà évoqués.

En ce qui concerne les déchets, notamment ceux qui sont issus du BTP, le Japon a pris de l’avance sur nous en imposant une obligation de récupération à 100 %. L’obligation d’un diagnostic préalable à toute démolition a été posée dans le cadre du Grenelle, avec l’établissement d’un principe de « déconstruction », et une filière devrait voir le jour. Il y a là un immense potentiel.

Sur la question des parcs naturels régionaux, nous allons travailler ensemble pour faire des propositions, qui pourront éventuellement prendre la forme d’amendements. Les parcs sont très actifs. Il faut éviter de les mettre dans une impasse financière.

L’essentiel du financement du plan « bruit », sur lequel Frédérique Massat m’a interrogée, est assuré par l’ADEME, par la direction générale des infrastructures, des transports et de la mer (DGITM) et par Réseau ferré de France en matière d’infrastructures. Nous avons les moyens nécessaires pour financer ce plan, qui concentre d’abord les efforts sur les 20 000 « super points noirs bruit ». Cela fait des années qu’il est question de la nuisance causée par le bruit, mais les financements restent, pour le moment, trop dispersés. Concrètement, l’ADEME abonde les ressources des gestionnaires d’infrastructures. Un total de 120 millions d’euros a été prévu dans le cadre du Grenelle pour la période 2009-2011, et nous poursuivrons les efforts au même rythme de 2011 à 2013.

S’agissant du médiateur de l’énergie, nous vous ferons parvenir une réponse écrite si vous le permettez.

Je suis beaucoup plus optimiste que le rapport Charpin en ce qui concerne la filière solaire en général, et la filière photovoltaïque en particulier. Nous n’avons pas tiré de conclusions particulières de ce rapport dans l’immédiat.

Nous sommes opposés à une fusion entre l’ASN et l’IRSN, car les missions de ces instances ne coïncident pas. Nous sommes en train de travailler sur la question des astreintes sur le plan interministériel.

M. Terrot m’a interrogée sur la situation des forêts du bassin du Congo et m’a demandé, d’une manière plus générale, ce que fait notre pays en matière de lutte contre la déforestation.

Environ 20 % des crédits des fonds fast start prévus à Copenhague pour la lutte contre les changements climatiques seront consacrés à des aides à l’adaptation et 20 % à la lutte contre la déforestation – nous avons prévu 420 millions d’euros sur la première période. La France soutient fermement la position REDD-plus, désormais défendue par l’Union européenne, qui vise non seulement à la réduction des émissions issues de la déforestation et de la dégradation des forêts, mais aussi à l’amélioration des stocks de carbone forestier.

Enfin, nous avons pris l’initiative d’un partenariat mondial pour la forêt en organisant une première conférence sur le sujet à Paris, une autre devant se tenir prochainement à Oslo. La préservation de la forêt est un domaine dans lequel nous sommes très actifs et où l’on progresse, mais une pression considérable s’exerce sur les ressources, notamment dans les pays à fort développement, comme la Chine.

M. Reiss s’inquiète au sujet de l’ADEME et d’Éco-Emballages. Nous nous sommes engagés à ce que 80 % des coûts soient couverts par Éco-Emballages. Les discussions sont sur le point de se terminer. Nous défendons une position médiane : un montant de 600 à 640 millions d’euros nous paraît raisonnable, compte tenu des chiffres fournis par l’ADEME. Il n’y a pas d’inquiétude à avoir : à ce stade, les financements, aussi bien de l’ADEME que d’Éco-Emballages, sont garantis. La mise en place des différentes filières REP (responsabilité élargie du producteur) a permis d’augmenter le produit des éco-contributions, qui s’établit aujourd’hui à 800 millions d’euros, approchera bientôt le milliard et devrait atteindre 1,2 milliard d’ici à trois ans.

M. Lecou a abordé le sujet de la micro-hydraulique et de la gazéification des déchets. Comme vous le savez, une table ronde sur l’hydro-électricité a été organisée à l’initiative du ministre d’État. L’engagement a été pris d’augmenter de 3 térawatts-heure notre production électrique d’origine hydraulique. Le potentiel de développement des micro-centrales n’est bien évidemment pas du même ordre, d’autant qu’il se heurte à l’objectif de restauration de la continuité écologique des cours d’eau. Des projets se développent mais, en tout état de cause, l’accent a plutôt été mis sur les équipements de plus grande puissance. Pour ce qui est du procédé, tout à fait innovant, de gazéification des déchets par torche à plasma, nous avons demandé une nouvelle expertise à l’ADEME avant de décider d’éventuelles mesures de soutien, le premier avis rendu par l’Agence en 2008 étant assez réservé, notamment sur le bilan énergétique d’ensemble.

M. Favennec a évoqué la question des lignes à très haute tension. À la suite d’un avis de l’AFSSET, nous nous sommes engagés à mettre en place un vaste dispositif d’évaluation sanitaire, lequel sera coordonné par la nouvelle ANSES. Un organisme indépendant sera chargé d’un contrôle régulier et approfondi des champs électromagnétiques émis par ces équipements et la population vivant à proximité sera mieux informée des résultats. Tout riverain pourra faire réaliser gratuitement des mesures de champ électromagnétique en environnement résidentiel avant et après mise en service d’une ligne et un suivi sanitaire de ces riverains sera assuré sur la base du volontariat.

M. Chassaigne m’a interrogée sur le renforcement des pouvoirs des CHSCT dans les entreprises qui était, avec une plus grande implication des salariés dans la prévention, l’une des recommandations de la table ronde consacrée aux risques industriels. Le groupe de travail, piloté par le ministère du travail, mis en place début 2010, doit rendre ses conclusions. Le principe d’une meilleure diffusion des bonnes pratiques a d’ores et déjà été acté. Pour ce qui concerne le biogaz, l’arrêté tarifaire, annoncé l’an dernier, devrait – enfin ! – pouvoir être publié fin octobre. Nous sommes dans l’attente d’un dernier avis.

M. le président Christian Jacob. Je vous remercie, madame la ministre, d’avoir répondu aussi précisément à l’ensemble des questions qui vous ont été posées et de vous être engagée à apporter des réponses complémentaires par écrit sur certains points.

La réunion de la commission élargie s’achève à treize heures dix
et reprend à seize heures vingt.

M. le président Christian Jacob. Nous abordons l’examen des crédits consacrés, au sein de la mission « Écologie, développement et aménagement durables », aux transports. Je donne immédiatement la parole à nos rapporteurs.

M. Hervé Mariton, rapporteur spécial de la Commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire pour les transports routiers, ferroviaires, fluviaux et maritimes. Quelques questions, monsieur le secrétaire d’État. L’actuel projet de schéma national des infrastructures de transport (SNIT) sera débattu devant le Parlement avant d’être entériné. Ne conviendrait-il pas, pour la validité même de ce schéma, que le Parlement dispose de davantage d’informations sur le financement des infrastructures qui y sont retenues ? Le projet mentionne ainsi des infrastructures prévues à l’horizon 2020 dont il est indiqué que le financement « n’a même pas été étudié ». Pouvons-nous nous en satisfaire ? Quel est d’ailleurs à vos yeux l’intérêt que le futur schéma soit voté par le Parlement ? S’il n’a pas été inutile, celui de 2003 ressemblait tout de même un peu à une lettre au Père Noël, recensant les demandes des élus auxquels le ministre avait indiqué en fin de débat les avoir « tous entendus ». Il faut être plus précis sur les financements. Il en va de la nature même de la délibération parlementaire.

Je note d’ailleurs au passage qu’alors que le SNIT annonce une augmentation des crédits d’entretien routier, ce dont chacun se félicite, les autorisations d’engagement pour l’entretien et l’exploitation du réseau routier tombent de 414 millions d’euros en 2010 à 302 millions dans le budget pour 2011 et les crédits de paiement de 390 millions d’euros à 312 millions. Est-ce là une préfiguration de la mise en œuvre du schéma ?

Un contrat de performance a été signé avec Réseau Ferré de France (RFF). Après le projet de loi relatif à l’organisation et à la régulation des transports ferroviaires, on pensait y voir plus clair sur l’avenir de la dette de RFF. Or, le Gouvernement a décidé que l’augmentation des péages acquittés par la SNCF serait inférieure de 60 millions d’euros à celle initialement programmée. Ce qui est sans doute heureux pour la SNCF pose toutefois problème à RFF. Estimez-vous que le contrat de performance est respecté et que RFF a une visibilité financière suffisante ? Cette décision de l’État n’est-elle pas de nature à remettre en question le programme de régénération des infrastructures sur lequel RFF s’était engagé ?

Dans les perspectives pluriannuelles de financement de l’Agence de financement des infrastructures de transport de France – AFITF –, figure encore assez étrangement une dotation budgétaire maintenue à 974 millions d’euros. J’avais cru comprendre que cette dotation anticipait le versement à l’Agence du produit de la taxe poids lourds. Alors que celle-ci doit être instituée à la mi-2012, la dotation reste inchangée. Tant mieux pour l’AFITF mais cela manque de cohérence avec les prévisions ! Est-on d’ailleurs assuré du montant de cette dotation ? L’AFITF devrait de même bénéficier à terme d’une augmentation de la redevance autoroutière de 100 millions d’euros. Si l’idée n’est pas nouvelle, sa mise en œuvre n’est pas sans soulever quelques difficultés, tant juridiques qu’économiques. Quel sens y a-t-il dès lors à inscrire cette somme parmi les financements de l’Agence ?

Force est de constater que, quel qu’en soit l’intérêt des points de vue industriel et environnemental, le dispositif de bonus-malus n’est pas équilibré, contrairement aux prévisions initiales. Pourquoi s’impute-t-il sur un compte d’affectation spéciale qui, de fait, ne peut être équilibré ? Pourquoi ne pas le rebudgétiser, en assumant qu’il coûte au budget de l’État, mais aussi le durcir afin d’une part d’en amoindrir le coût, d’autre part de le rendre plus incitatif sur le plan environnemental ? Que penseriez-vous d’un tel durcissement ?

Enfin, sous la précédente législature, à la demande du Parlement, le Gouvernement avait proposé de créer un compte d’affectation spéciale « Contrôle et sanction automatisés des infractions au code de la route ». Il s’agissait de garantir que le produit des amendes issues des radars automatiques bénéficierait bien à la sécurité routière. Des débats ont eu lieu sur le respect de cet engagement, sur la lisibilité des affectations financières, sur l’efficacité en matière de sécurité routière de telle ou telle dépense de l’AFITF, mais le caractère de compte d’affectation spéciale était en gros respecté. Il en va tout différemment avec ce qui nous est aujourd’hui proposé. En effet, dans les recettes de ce compte, aux amendes issues des contrôles effectués par les radars automatiques, viendront s’ajouter les amendes ordinaires. Et les fonds pourront être utilisés au profit par exemple de l’Agence nationale pour la cohésion sociale et l’égalité des chances, dont la compétence en matière de sécurité routière n’a rien d’évident. À vrai dire, je m’interroge sur la constitutionnalité même d’un compte d’affectation spéciale aux recettes d’origine aussi variée et aux dépenses elles-mêmes si disparates. Je me demande par ailleurs si cette évolution, inopportune pour la sécurité routière, n’est pas de surcroît de nature à faire obstacle à la dépénalisation des amendes de stationnement, à laquelle j’avais cru comprendre, monsieur le secrétaire d’État, que vous n’étiez pas défavorable, même si ce dossier n’a pas beaucoup avancé jusqu’à présent. Enfin, il est dommage que la création de ce nouveau compte ne règle pas le problème de l’affectation du produit des amendes majorées, aujourd’hui très fragile sur le plan juridique, puisque celles-ci sont intégrées au budget de l’État sans être reversées aux collectivités locales.

M. Charles de Courson, rapporteur spécial de la Commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire pour les transports aériens et la météorologie. Je commencerai, monsieur le secrétaire d’État, par une question d’ordre financier. Dans un référé du 8 juin dernier sur les perspectives du budget annexe Contrôle et exploitation aériens – BACEA –, la Cour des comptes notait que celui-ci « est confronté à un déficit structurel qui a longtemps été masqué. » Les résultats budgétaires des exercices 2006, 2007 et 2008 ont en effet tous été négatifs, le déficit s’établissant successivement à 54, 35 et 44 millions d’euros. Les résultats comptables étaient encore plus dégradés, avec des déficits de 116, 115  et 67 millions d’euros, respectivement. Pour 2009, le recours massif à l’emprunt, avec 281 millions d’euros exécutés pour une autorisation en loi de finances initiale de 116 millions d’euros, a permis de dégager un excédent budgétaire – si tant est que l’on puisse parler d’excédent lorsque celui-ci provient de l’endettement ! –, mais le résultat d’exploitation a encore été déficitaire de 57,6 millions d’euros. Dans ce budget annexe, comme dans le budget de l’État, on s’endette désormais pour couvrir les dépenses de fonctionnement !

Ma question est triple. Comment expliquer la différence constatée par la Cour des comptes entre les résultats budgétaires et les résultats comptables ? Les exercices 2010 et 2011 permettront-ils de dégager un excédent de fonctionnement, ou au moins de parvenir à une réduction du déficit ? Quelles mesures structurelles envisage-t-on afin de mettre un terme à ce que la Cour des comptes a qualifié de « spirale de l’endettement » ?

Anticipant sans doute votre réponse à cette première série de questions, monsieur le secrétaire d’État, la suivante portera sur la gestion des ressources humaines de la Direction générale de l’aviation civile. En effet, se trouvent peut-être là certaines pistes en vue d’économies. J’ai eu l’occasion à plusieurs reprises, en cohérence avec la Cour des comptes, de critiquer les fameux « protocoles sociaux », négociations triennales qui permettent à certaines catégories de personnels de la DGAC de s’abstraire partiellement du cadre statutaire de la fonction publique. Lors de votre audition par la Commission des finances le 1er juin dernier, vous nous avez indiqué que le prochain protocole ne comporterait pas de volet rémunération. Or, il semblerait que 7,8 millions d’euros soient prévus dans le budget 2011 au titre de mesures catégorielles. La Cour des comptes nous a excellemment démontré la semaine dernière qu’il était impossible de « tenir » une enveloppe en euros courants en continuant d’appliquer des mesures catégorielles. Pourriez-vous nous en dire davantage sur la nature de ces mesures ?

Lors de la même audition, vous nous avez dit avoir mis fin à la pratique dite des « clairances » qui permettait aux contrôleurs aériens de se dispenser de certaines des vacations qu’ils étaient pourtant censés assurer. Selon la Cour des comptes, ces « clairances » aboutissaient à ce qu’un contrôleur aérien travaille en moyenne 99 jours par an, la DGAC expliquant que la situation était variable selon les sites et que l’on pouvait même, de manière exceptionnelle, tomber à 90 ou 93 jours. Quelles mesures concrètes avez-vous prises pour vous assurer de la présence des contrôleurs à leur poste ? L’identification des personnels grâce à des badges permettra-t-elle de contrôler le service effectué ?

La spécificité de cette gestion des ressources humaines, conjuguée à l’inadaptation du régime des budgets annexes aux activités quasi-commerciales de la DGAC, milite pour la transformation de cette direction d’administration centrale en établissement public administratif. Le principal aiguillon en ce sens n’en reste pas moins l’intégration croissante de la navigation aérienne au niveau européen, dans le cadre du bloc fonctionnel d’Europe centrale – FABEC – pour la France. Dans ce contexte, j’avais fait adopter un amendement au projet de loi de finances pour 2009 demandant qu’un rapport nous soit remis sur les pistes d’évolution statutaire de la DGAC. Celui-ci évoquait cinq scénarios, mais privilégiait la transformation en EPA. J’avais cru comprendre que vous étiez favorable à une telle modification. Mais lors de votre audition du 1er juin dernier, vous nous avez laissé entendre que cette solution, préalable pourtant indispensable à l’intégration européenne, était abandonnée. Pouvez-vous nous le confirmer aujourd’hui et si tel est le cas, nous dire pourquoi ?

Après ces questions prospectives, je reviens au budget pour 2011 proprement dit. Ce budget annexe, vous le savez tous, est financé essentiellement par voie de redevances, dont les principales sont la redevance de route et la redevance pour services terminaux de la circulation aérienne – RSTCA. En 2011, il est prévu que la première augmente de 3,8 % et la seconde de 4,9 %. Mais en 2012, elles devraient respectivement baisser de 1,7 % et 4,4 %, puis en 2013 de 2 % et 1,4 %. Je m’étonne de cet arbitrage. N’aurait-il pas été préférable, afin de ne pas obérer la reprise du trafic aérien en 2011, de lisser l’évolution du taux de ces redevances sur trois ans, plutôt que d’en prévoir une évolution en dents de scie ?

Je terminerai par une question connexe au budget, mais importante pour l’équilibre du transport aérien dans notre pays, celle de l’avenir des aéroports de province. La presse a récemment fait état de l’ouverture possible du capital de cinq ou six plates-formes aéroportuaires. Pourriez-vous, monsieur le secrétaire d’État, nous indiquer quels aéroports seraient concernés et, plus généralement, faire le point sur les modalités et les enjeux de cette ouverture de capital ?

M. Martial Saddier, rapporteur pour avis de la Commission du développement durable et de l’aménagement du territoire pour les transports terrestres. Un avant-projet du schéma national des infrastructures de transport a été présenté en juillet dernier. Pouvez-nous nous dire, monsieur le secrétaire d’État, dans quelles conditions ce schéma sera définitivement arrêté et quelle part les élus pourront prendre à cette procédure ? Comment sera assurée la cohérence avec l’engagement national pour le fret ferroviaire, avec le contrat de performance entre l’État et RFF ou bien encore avec le plan de modernisation des itinéraires routiers 2009-2014 ? Confirmez-vous enfin que le SNIT fera l’objet d’un débat au Parlement avant la fin de l’année, comme vous vous y étiez engagé ?

Depuis la création de l’AFITF il y a cinq ans, la question de son financement se pose de manière récurrente. Pouvez-vous faire le point sur ses ressources ? Qu’en est-il de l’affectation à son profit de l’éco-redevance poids lourds instaurée par la loi de finances pour 2009 ? Comment l’Agence compensera-t-elle la fin des abondements exceptionnels liés au plan de relance ?

L’engagement national pour le fret ferroviaire, décidé par le Gouvernement en septembre 2009, représentait un investissement public global de plus de 7 milliards d’euros d’ici à 2020. Pouvez-vous faire le point un an après, tant pour ce qui est des réalisations concrètes que de la programmation des opérations ? Où en est-on de la mise en place d’opérateurs ferroviaires de proximité ? Quelles suites entendez-vous donner aux propositions faites par notre collègue Yanick Paternotte dans son rapport sur la relance du fret ferroviaire, en particulier à sa suggestion de permettre l’acheminement de fret, notamment de nuit, sur les lignes à grande vitesse ?

Les ministres chargés des transports et de l’aménagement du territoire devaient présenter avant la fin de l’année un plan de renouvellement du matériel roulant des lignes ferroviaires dites d’équilibre du territoire. Pouvez-vous nous dire où on en est, rappeler les engagements pris et le calendrier de leur réalisation ? Rétablira-t-on certaines lignes ferroviaires ou au contraire remplacera-t-on certains TER par des autocars, afin notamment de libérer des sillons pour le fret ?

Le transport fluvial connaît un essor certain et, en tout cas, résiste mieux que d’autres modes de transport à la crise actuelle. Pouvez-vous nous le confirmer et faire le point sur l’évolution de ce trafic ? Quels ont été les principaux investissements réalisés sur les voies navigables au cours des dernières années ? Pouvez-vous nous dire quelques mots des programmes Seine-Oise et Saône-Rhin, ainsi que des opérations de restauration du réseau ?

Dans le cadre du plan Véhicules propres, le volet Transports de la loi Grenelle II sollicitait un effort particulier des collectivités territoriales et les invitait à généraliser l’implantation de bornes de recharge sur la voie publique. Une aide financière est-elle prévue pour ce faire ? Le Gouvernement peut-il peser sur les constructeurs automobiles afin que les dispositifs de recharge soient harmonisés ?

Enfin, quel premier bilan tirez-vous de la réforme du permis de conduire engagée en 2009 et qui doit s’achever en 2012 ?

M. Jean-Yves Besselat, rapporteur pour avis de la Commission du développement durable et de l’aménagement du territoire pour les transports maritimes. Monsieur le secrétaire d’État, vous avez mené avec beaucoup de diligence la réforme portuaire, adoptée par le Parlement en juillet 2008 et dont j’avais eu l’honneur d’être le rapporteur à l’Assemblée. Toutes les étapes ont été franchies avec succès. Ne reste que la dernière, à savoir l’acceptation par les portiqueurs de leur transfert à des entreprises privées. Les intéressés ont, je le pense, obtenu des garanties solides, qu’il était légitime de leur donner. Ne pensez-vous pas que l’heure est venue de signer un bon accord ? Dans le même ordre d’idées, je fais observer qu’à Marseille, les salariés du port bloquent toujours les terminaux pétroliers, au motif que la loi les briderait, ce qui est totalement faux.

Tous les chiffres en attestent : avec le redémarrage de l’économie mondiale, le transport maritime croît à nouveau de quelque 10 % par an, comme avant la crise. C’est là une excellente nouvelle pour les grands ports à terminaux de conteneurs comme Le Havre, qui assure les deux tiers du trafic de conteneurs en France, ou Marseille. C’est dans ce contexte que vous avez inauguré, monsieur le secrétaire d’État, une autoroute de la mer entre Saint-Nazaire et Gijón en Espagne, en coopération avec les armements Louis-Dreyfus et Grimaldi. Vous envisagez la création d’une nouvelle ligne Vigo/Saint-Nazaire/Le Havre. Dans quelles conditions la mettriez-vous en place et avec quels armateurs ?

Comme vous, monsieur le secrétaire d’État, je me réjouis que le décret en Conseil d’État qui crée l’École unique supérieure de la Marine marchande ait été pris par le Premier ministre, sous votre impulsion, le 29 septembre dernier. Les institutions nécessaires peuvent désormais se mettre en place. Au Havre, nous avons un projet qui avance bien – discrètement – de construction d’une nouvelle école : celle de Sainte-Adresse étant devenue obsolète, nous la transférons sur les docks, dans les hangars 26 et 27. Pour poursuivre les études, nous avons besoin d’un million d’euros sur le budget 2011. Pouvez-vous confirmer que cette somme est bien inscrite, comme j’en ai eu la garantie ?

Si la construction d’éoliennes en mer constitue un investissement utile pour le pays, il convient de prendre en compte mieux qu’on ne l’a fait jusqu’ici les problèmes de sécurité liés à ces installations, qui peuvent perturber les échos radar et donc la navigation maritime. Ce sont en effet 250 000 navires par an – 800 par jour ! – qui empruntent la Manche et la Mer d’Iroise, sujettes aux tempêtes. Quelle est, monsieur le secrétaire d’État, votre position sur un sujet qui requiert la plus grande vigilance ?

Enfin, toujours en matière de sécurité maritime, où en sommes-nous dans la transposition des directives européennes du paquet Erika III ?

M. Jean-Claude Fruteau, rapporteur pour avis de la Commission du développement durable et de l’aménagement du territoire pour les transports aériens. Après une crise très violente – sans doute la plus violente de toute l’histoire de l’aéronautique marchande, entraînant une réduction de 15 % du trafic mondial –, le secteur du transport aérien pourrait connaître un redémarrage en 2010. Qu’en est-il précisément ? Ce mouvement de reprise paraît-il durable ? Bénéficie-t-il également à l’Europe qui a été la région la plus durement touchée par cette crise économique ?

Le mouvement impulsé par le Grenelle de l’environnement a poussé à la mise en œuvre de nouvelles pratiques environnementales dans le secteur du transport aérien – qui, au reste, semble avoir stabilisé aujourd’hui ses émissions de CO2. Pouvez-vous faire le point sur ces changements ? Quelles réflexions sont menées sur les aéronefs de demain, alors que toutes les analyses prospectives laissent présager un développement spectaculaire de ce type de transport à l’horizon de 2025 ?

Par ailleurs, au cours de nos auditions, certains interlocuteurs ont évoqué le projet de construction d’un démonstrateur « Biomass to Liquid » (BtL) permettant la production de biocarburant de deuxième génération sur le site de Bure-Saudron. Pouvez-vous détailler ce projet, ses objectifs, son coût ? Dans ce secteur prioritaire, quel est l’état de la recherche en France par rapport aux autres pays ? À quelle échéance peut-on envisager de généraliser l’utilisation de ce nouveau carburant dans le secteur du transport aérien ?

Des progrès ont été enregistrés dans la lutte contre les nuisances sonores aéroportuaires, notamment grâce au dispositif d’aide à l’insonorisation des logements des riverains de plateformes aéroportuaires. Il convient de poursuivre les efforts dans ce domaine, même s’il est vrai que, pour ce qui est de la prévention, la France ne peut agir seule.

L’année 2010 a été marquée pour l’Autorité de contrôle des nuisances sonores aéroportuaires, l’ACNUSA, par l’adoption de deux textes modifiant son fonctionnement : la loi relative à l’organisation et à la régulation des transports ferroviaires et portant diverses dispositions relatives aux transports, et la loi « Grenelle II ». Cependant, l’élargissement des compétences de cette Autorité n’a pas été suivi de l’augmentation de ses crédits de fonctionnement. Pour donner à l’ACNUSA les moyens d’accomplir ses missions, je voudrais suggérer une réévaluation de sa dotation, réévaluation dont le montant n’est d’ailleurs pas considérable puisqu’il s’établirait à un peu plus de 43 000 euros.

En ce qui concerne maintenant la sécurité et la sûreté aériennes, je souhaiterais savoir quels enseignements les pouvoirs publics et les compagnies aériennes tirent de l’accident du vol AF 447 Rio-Paris, de juin 2009. L’an passé, je vous avais interrogé sur la nécessaire mise en œuvre, dans le cadre de l’OACI, de la transmission permanente des données de vol, via des liaisons satellitaires, pour mettre fin aux ruptures actuelles des liaisons radar. Qu’en est-il aujourd’hui ? Si la mise en place de ce système devait prendre du temps, ne peut-on envisager une solution alternative ?

S’agissant de la catastrophe du vol 636 de la compagnie Yemenia – qui a fait de nombreux morts de nationalité française –, quelles démarches le Gouvernement a-t-il entreprises pour une publication rapide du rapport d’enquête ?

Le nuage de cendres provoqué par l’éruption du volcan islandais en avril 2010 a paralysé le trafic aérien en Europe pendant plusieurs jours. Il a engendré des difficultés pour les passagers et occasionné de lourdes pertes tant pour le BACEA, le budget annexe « contrôle et exploitation aériens » – 20 millions – que pour les compagnies aériennes – 150 millions pour la seule compagnie Air France-KLM. Avec le recul, ne pensez-vous pas que le principe de précaution a été appliqué de manière trop rigoureuse ? Quels enseignements tirons-nous aujourd’hui de cet événement, notamment en ce qui concerne la coordination européenne ? Si cela devait se reproduire, quelle serait notre attitude ?

Autre sujet touchant la sûreté : la France, comme d’autres pays, s’est engagée dans une phase d’expérimentation des scanners corporels. Récemment, la presse a fait état de la décision de l’Italie de mettre fin à cette expérimentation en raison des faibles résultats obtenus en termes d’efficacité. Quels retours avons-nous pour les appareils installés dans nos aéroports ? L’expérimentation va-t-elle continuer ?

Enfin, si l’on ne peut que se féliciter de la signature prochaine – d’ici à décembre, semble-t-il – du traité constitutif du bloc fonctionnel d’espace aérien d’Europe centrale, le FABEC, il convient néanmoins de s’interroger sur les divergences quant à la forme juridique et organisationnelle de cette future coopération à six pays, ainsi que sur les polémiques suscitées au sein de la DGAC. Vous avez confié une mission de médiation à Gilles Savary, qui a rendu son rapport le 6 septembre dernier. En est-il résulté une évolution de la position de la France ? Et où en sont les négociations avec nos partenaires, notamment avec nos voisins allemands ?

M. Charles de Courson remplace M. Jérôme Cahuzac à la coprésidence.

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État chargé des transports. Pour ma part, je ne vois que des avantages à ce que le SNIT, le schéma national des infrastructures de transport, soit voté. Lorsqu’il vous sera présenté avant la fin de cette année, nous vous indiquerons les financements connus et les principes posés sur les financements à venir. En l’état, il est très difficile de donner de telles précisions sur les nombreux projets impliquant des cofinancements avec des collectivités, et donc des négociations – si certaines de celles-ci sont déjà quasiment achevées, comme sur le projet Sud-Europe-Atlantique, d’autres sont encore à venir. Cela étant, la réalisation de tous les projets contenus dans le SNIT représenterait un investissement de l’ordre de 170 milliards d’euros : 52 % pour le ferroviaire, 32 % pour les transports collectifs, 9 % pour le fluvial et 4,5 % pour la route. L’autorité environnementale est saisie d’une demande d’avis ; une fois qu’il sera mis en place et aura élu ses instances, le nouveau Conseil économique, social et environnemental sera consulté. Ensuite, un débat sans vote aura lieu au Parlement – à moins que celui-ci ne demande un vote, auquel cas il appartiendra au prochain gouvernement de se prononcer sur ce point.

Le financement de l’AFITF provient principalement du secteur autoroutier. Une fois consommée la dotation tirée de la privatisation des sociétés d’autoroutes, d’autres ressources pérennes ont été affectées à l’Agence : la redevance domaniale des sociétés autoroutières, la taxe d’aménagement du territoire, prélevée sur les concessionnaires d’autoroutes, et une partie du produit des amendes du dispositif de contrôle et de sanction – respectivement de 180, de 528 et de 115 millions l’an passé. La ressource attendue de l’éco-redevance payée par les poids lourds, que vous avez votée et qui sera disponible vers 2012, sera comprise entre 800 millions et 1 milliard d’euros. Le coût de gestion du système sera, je l’espère, le plus bas possible. En 2011, une ressource exceptionnelle viendra de la mise en concession de l’autoroute À 63 – du prolongement au sud de Bordeaux –, avec une recette supplémentaire ponctuelle que nous estimons à 400 millions d’euros. Ainsi, le financement de l’Agence par voie budgétaire sur la période triennale 2009-2011 s’élèverait à 974 millions d’euros. Si le maintien de cette subvention d’État se justifie en attendant l’écotaxe poids lourds, il faudra bien sûr réfléchir aux dispositions à prendre ensuite. D’autre part, contrairement à ce qu’a indiqué récemment un hebdomadaire spécialisé, cette recette est affectée, en vertu d’une disposition du code général des impôts.

En ce qui concerne Réseau Ferré de France (RFF), dans le cadre du contrat de performance, les péages connaîtront une moindre hausse que prévu en 2012 – la différence sera de 60 millions d’euros –, mais la progression atteindra tout de même 140 millions d’euros, ce qui permettra de poursuivre les actions de régénération en liaison avec les collectivités régionales et, parfois, départementales. Cette régénération a d’ailleurs progressé plus vite que prévu, puisqu’elle a concerné près de 900 kilomètres de lignes l’an passé. Ainsi, RFF respecte à cet égard le contrat de performance tout en répondant à ce que lui demande l’État par ailleurs.

Sur le bonus-malus, l’abaissement du seuil de consommation est conforme à ce qui a été annoncé, l’état du parc s’améliorant très rapidement.

En ce qui concerne le stationnement, nous avons décidé d’installer un groupe de travail sur la dépénalisation des amendes. Présidé par le sénateur Louis Nègre, il associe notre ministère aux ministères de la justice et de l’intérieur, et nous en attendons des réponses rapides car il est très important de savoir si nous pourrons ou non disposer de cette ressource.

La modification apportée au compte d’affectation spéciale « contrôle et sanction automatisés des infractions au code de la route » concerne les compétences du ministère de l’intérieur. La partie concernant le ministère de l’écologie et du développement durable reste inchangée.

S’agissant de l’entretien routier, M. Mariton a relevé à juste titre une baisse des moyens mais, si le budget pour 2011 ne prévoit pas d’augmentation des crédits, c’est que nous avons tenu compte en partie de l’accélération très importante enregistrée en 2009 et en 2010, sous l’effet notamment du plan de relance.

En ce qui concerne la DGAC, monsieur de Courson, la différence constatée entre les résultats budgétaires et les résultats comptables s’explique par des opérations passées hors budget par l’agence comptable ; les données de la comptabilité budgétaire annuelle sont intégralement reprises dans la comptabilité de l’agent comptable. L’insuffisance de financement par les redevances est structurelle et provient de l’activité de la navigation aérienne outre-mer – dont le coût n’est que partiellement couvert par les redevances – et du faible rendement des redevances de surveillance et de certification. On peut combler l’écart en agissant sur les coûts de fonctionnement, de la masse salariale et de l’investissement, ainsi que par une affectation de la TAC pour compenser la couverture incomplète des coûts par les redevances, et par une hausse maîtrisée des taux. De fait, la création des redevances océaniques permettra de couvrir 40 % des coûts outre-mer, au lieu de 30 % aujourd’hui.

Les exercices 2010 et 2011 permettront-ils de dégager un excédent de fonctionnement ? La loi de finances pour 2010 affichait un déficit de la section exploitation. Pour 2011, le PLF prévoit un excédent d’exploitation de l’ordre de 14 millions d’euros grâce à la reprise du trafic aérien et à une maîtrise des dépenses d’exploitation. La DGAC est une bonne élève de la RGPP : elle réduit ses emplois, elle a gelé l’évolution du barème des primes de ses personnels, et défini une trajectoire opérationnelle de modernisation et de mutualisation des fonctions supports.

Elle doit certes maintenir un niveau important d’investissement, mais la stabilisation de l’endettement est recherchée par un rééchelonnement de la dette pour obtenir une synchronisation de l’amortissement des investissements et du remboursement des emprunts, puis un plan de réduction de la dette sera engagé à partir de 2014.

Dans leur majorité, les syndicats refusent de signer le protocole, ce que je regrette car même si celui-ci est considéré comme un carcan du point de vue budgétaire, il est aussi un symbole de paix sociale. Il y aura donc simplement discussion avec les organisations syndicales de mesures dans l’esprit du protocole, et un ajustement en 2011 en fonction des besoins et de ces discussions. En tout cas, j’espère que les négociations pourront se poursuivre, car ce système avait plutôt donné satisfaction jusqu’à présent.

En ce qui concerne les « clairances », il a été mis à fin à cette tolérance. Des systèmes de contrôle des accès aux locaux par badge de sécurité sont en place depuis le mois de juin, assortis de vérifications régulières. Pour l’instant, le directeur général de l’aviation civile juge l’efficacité de ce dispositif satisfaisante.

Un établissement public permettrait certainement un meilleur pilotage financier de la DGAC, comme l’a souligné la Cour des comptes. Nous poursuivons la concertation avec les partenaires sociaux et aurons à faire évoluer l’opinion des personnels qui, pour l’instant, voient plutôt dans cet établissement public une menace sans percevoir les avantages qu’il présenterait pour la sécurité aérienne comme pour la bonne gestion de notre espace aérien.

La hausse des taux de la redevance 2011 résulte de la facturation du sous-recouvrement de 2009. Des baisses de la masse salariale sont envisagées.

M. Charles de Courson, rapporteur spécial et président. Dans votre département, vous n’augmentez pas les impôts une année pour les baisser ensuite !

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État chargé des transports. Pour ma part, j’essaie d’éviter de les augmenter certaines années, comme tout bon président de conseil général !

Nous avons partiellement privatisé un certain nombre d’aéroports pour constituer des sociétés aéroportuaires, à Lyon, à Nice, à Toulouse, à Bordeaux et à Montpellier. Pour l’instant, la situation à Nice et à Montpellier exclut une ouverture supplémentaire du capital, mais nous pouvons envisager une ouverture progressive dans les trois autres cas. S’agissant de Lyon, deuxième hub d’Air France après Paris, Aéroports de Paris a manifesté son intérêt pour l’opération. Celle-ci doit bien entendu être compatible avec les règles européennes et de concurrence, mais nous y sommes favorables. Nous nous occuperons plus tard de Montpellier et de Nice, où les sociétés aéroportuaires ont été mises en place plus récemment.

Alors que le fret ferroviaire a fortement baissé en 2009, l’engagement national pris en sa faveur dans la suite du Grenelle de l’environnement n’allait pas de soi. Actuellement, les autoroutes ferroviaires se développent. S’agissant de celle qui relie Bettembourg au Boulou, un troisième aller et retour quotidien a été mis en service, et un quatrième va l’être ce mois-ci. Nous avons lancé des appels d’offres pour augmenter les fréquences sur l’autoroute ferroviaire entre Aiton et Orbassano, avec éventuellement un allongement du parcours pour se rapprocher de l’agglomération lyonnaise à l’ouest. Un appel d’offres est également en cours pour l’autoroute ferroviaire Atlantique : il s’agit d’avoir une liaison qui parte du nord de la France ou de la région parisienne, ou du nord de la France en transitant par la région parisienne, et qui rejoigne la frontière espagnole à Hendaye. Dans la mesure où il faut mettre les tunnels au gabarit B1 pour transporter les semi-remorques, cette autoroute n’utilisera pas, dans un premier temps, la voie ferrée au sud de Poitiers – qui comporte de nombreux tunnels –, mais la voie ferrée passant par Niort et l’ancienne ligne de l’État reliant Niort à Bordeaux par Saint-Jean-d’Angély, Saintes et Saint-Mariens, ce qui permettra de mettre en service cette autoroute dès 2012, avant même que tous les tunnels soient mis au gabarit entre Poitiers et Bordeaux.

Nous avons fait le point récemment sur le projet proposé par Yanick Paternotte. Les choses avancent correctement, malgré certaines réticences qui s’expliquent quand on songe qu’il s’agit de transférer sur des TGV, au départ de Roissy, un fret express transporté actuellement par de grandes sociétés comme DHL ou FedEx.

S’agissant des opérateurs ferroviaires de proximité, j’ai de bonnes nouvelles. Le premier est entré en service dans le Languedoc-Roussillon : il s’agit d’un chemin de fer touristique qui a augmenté son activité pour transporter du fret. En outre, avec Brice Hortefeux, nous avons assisté, il y a quinze jours, à la mise en place d’un premier opérateur ferroviaire de proximité en Auvergne : un transporteur routier élargit ses activités sur une série de lignes du réseau régional, avec l’appui de la chambre de commerce et de l’ensemble des collectivités locales. Cet opérateur, je l’espère, entrera en service au mois de novembre. L’opérateur ferroviaire de proximité du Grand port maritime de La Rochelle, lui, a été mis en service la semaine dernière, avec le départ pour Guéret d’un premier train, de wagons-citernes d’essence. Après l’échec des discussions avec la SNCF, c’est finalement Euro Cargo Rail (ECR), la filiale française de la Deutsche Bahn (DB), qui est devenu partenaire du Grand port maritime.

De plus, l’opérateur ferroviaire de Dunkerque commencera son activité sous peu : Europort, la filiale de transport ferroviaire d’Eurotunnel, a repris la gestion des voies du port du Dunkerque et sera certainement l’opérateur ferroviaire de proximité. Enfin, les choses avancent également dans les autres ports, dont Le Havre. D’autres projets sont prévus dans le Morvan, le Centre et en Midi-Pyrénées.

Les trains Téoz et Corail et les grandes transversales Quimper-Nantes et Bordeaux-Lyon sont en déséquilibre financier. Nous préparons une convention avec la SNCF, qui sera soumise à son prochain conseil d’administration. Pour assurer le financement de la compensation que l’État versera à la SNCF, nous envisageons de créer un compte d’affectation spéciale, afin que le dispositif soit transparent pour le Parlement. L’abondement de ce CAS se fera par une taxe supplémentaire sur les autoroutes et par une augmentation du prix des billets TGV – principalement de première classe – de l’ordre de 175 millions d’euros, compensée par une augmentation du nombre des billets Prem’s. Je pense que la SNCF devra commander le plus rapidement possible du nouveau matériel roulant car les Téoz, malgré leur modernisation avant la mise en service sur Paris-Clermont, et les Corail rénovés – les premières voitures Corail ont été mises en service dans les années 1975 – ne sont plus attractifs pour la clientèle. Je pense également que la SNCF devrait mettre en place de nouvelles liaisons, par exemple Nantes-Hendaye. En diversifiant les points de départ et les destinations de ces trains, elle pourrait attirer de nouveaux clients. Sur le réseau allemand, les nouveaux opérateurs de trains de type aménagement du territoire ont ouvert des liaisons totalement nouvelles, comme Lübeck-Leipzig ou Lübeck-Dresde : en apportant un nouveau service, ils ont réussi à gagner de l’argent.

Monsieur Saddier, la progression du trafic est bonne en volume sur notre réseau fluvial, tant sur l’axe de la Seine que sur celui de la Saône et du Rhône. Nous continuons d’avancer dans ce domaine. Peut-être reviendrons-nous sur le projet très attendu Seine-Nord, que le Gouvernement voudrait voir engagé définitivement avant la fin du quinquennat.

Dans le Grand emprunt, nous avons prévu 500 millions d’euros pour les bornes de recharge sur la voie publique.

J’ai déjà fait le point sur la réforme des ports. Je répète que tous les projets stratégiques ont été adoptés et que les nouveaux organes de gouvernance – conseil de surveillance, conseil de développement – ont été mis en place. Nous avons également bouclé le transfert des outils de production. Reste à organiser le départ en détachement des grutiers et des portiqueurs, lié à une négociation sur la pénibilité qui a été engagée avec l’Union des ports de France, l’Union nationale des industries de la manutention et les syndicats. Nous espérons qu’elle permettra le transfert des personnels et, partant, l’achèvement de la réforme, même si elle est freinée par la discussion du projet de loi sur les retraites, qui a lieu actuellement. La situation est particulièrement délicate à Marseille, du fait d’un conflit avec la société chargée de gérer les installations pétrolières. Le compromis qui avait été trouvé entre le port, les opérateurs pétroliers et les personnels, est sans arrêt remis en cause. J’espère qu’une solution interviendra rapidement.

Nous avons eu la satisfaction d’ouvrir l’autoroute de la mer Nantes-Gijón, en attendant celle qui reliera Le Havre à Vigo à la mi-2011. Je souhaite que la fréquence augmente entre Saint-Nazaire et Gijón pour atteindre bientôt un rythme hebdomadaire de trois à sept bateaux. Un projet La Rochelle-Bayonne concerne les produits pétroliers. Des accords se précisent avec le Portugal. D’autres concernent la façade méditerranéenne.

L’École nationale supérieure maritime regroupe les quatre écoles du Havre, de Saint-Malo, de Nantes et de Marseille. Tous les décrets relatifs à sa création ont été pris en septembre. L’ancien président d’Armateurs de France a été choisi pour préfigurer la présidence de l’école, et M. Poisson sa direction générale. Le financement figure au budget. En ce qui concerne le choix du siège, je connais les préférences des Marseillais et des Havrais, mais je sais aussi qu’une implantation à Saint-Malo ou à Paris serait une solution de sagesse. Le Premier ministre tranchera.

Sur les éoliennes en mer, je suis extrêmement prudent. Je me réjouis d’ailleurs que le département dont je suis élu soit exclu du plan qui prévoit leur mise en place. Je pense également que leur installation sur terre n’est pas sans conséquences sur le paysage, mais je ne suis pas certain que le ministre d’État partage mes réticences.

Pour prévenir d’autres désastres comparables à celui de l’Erika, nous proposerons bientôt au Parlement un nouveau projet de loi.

Monsieur Fruteau, j’en viens au transport aérien. Après la période de crise dont nous sortons, l’année 2010 s’annonce meilleure, notamment pour la vente des places avant. La première classe et la classe affaires se remplissent à nouveau, ce qui est précieux pour les compagnies. En dépit de quelques difficultés sur l’activité cargo, et des différences que l’on constate entre les zones, nous sommes donc dans une bonne année, comme l’attestent les importantes commandes enregistrées au salon aéronautique de Farnborough.

Nous avons augmenté les pouvoirs de sanction et les compétences de l’Autorité de contrôle des nuisances sonores aéroportuaires (ACNUSA), dont j’ai rencontré récemment la présidente. Des postes supplémentaires ont été mis à la disposition de cet organisme pour lui permettre d’assurer ses nouvelles missions.

Le verdissement du transport aérien est mené dans le cadre du comité de recherche sur l’aviation civile (CORAC), que préside Fabrice Brégier, directeur général d’Airbus. Lors de sa dernière assemblée générale à Montréal, l’Organisation de l'aviation civile internationale (OACI) a pris elle aussi de bonnes mesures dans ce domaine.

Concernant l’accident de l’AF 447, j’ai mis en place, à l’intention des familles et sur leur demande, un comité d’information permanent qui reçoit les associations de toute nationalité. Il s’est réuni la semaine dernière. Le Bureau d’enquêtes et d’analyses (BEA) fait actuellement le point sur les dernières recherches menées au printemps. Nous déciderons ensuite si nous finançons une nouvelle phase d’investigation, qui n’est pas encore à l’ordre du jour.

Quant à l’accident du vol Yemenia, et même si nous pensons savoir ce qui s’est produit, nous menons des efforts diplomatiques importants en vue de la diffusion du rapport d’enquête – une démarche est effectuée cet après-midi même en direction du président du Yémen.

L’affaire du volcan islandais a permis de constater un certain « manque d’Europe ». Dès le vendredi, j’avais demandé la réunion du conseil des ministres des transports européens, qui n’a eu lieu que le lundi, et par téléconférence. Il est vrai qu’à cette époque, l’Allemagne se préoccupait davantage des élections de Rhénanie-Palatinat et la Grande-Bretagne des élections législatives, ce qui a allongé le délai de réponse. Cependant, nous avons pris des mesures afin d’alléger la charge supplémentaire qui a pesé sur les compagnies. Ainsi, M. Borloo et moi-même leur avons demandé d’organiser des vols supplémentaires que nous prendrons en charge.

Ce manque d’Europe justifie les efforts que nous effectuons pour mettre en place le nouveau système SESAR – Single European Sky Air traffic management Research –, qui permettra d’améliorer les routes aériennes, de réduire la consommation de CO2, de raccourcir le temps de vol et de garantir la sécurité. Le FABEC en est une pièce importante. Nous avançons sur ce dossier. Je rencontrerai la semaine prochaine mon homologue allemand, auquel j’ai rendu visite à Berlin le 31 août. Tandis que nous poursuivons les négociations avec les organisations syndicales de la DGAC, j’ai demandé à Gilles Savary, ancien député européen, de nous éclairer sur la mise en œuvre du FABEC, qui nous aidera à avancer vers le ciel unique européen.

Une démonstration de body scanners a été organisée à Roissy, mais nous différons le recours à cette technologie, dans l’attente d’une amélioration des logiciels de détection.

M. le président Christian Jacob. Je vous remercie de ces réponses si précises.

Je donne à présent la parole aux représentants des groupes, en commençant par M. Yanick Paternotte, pour le groupe UMP.

M. Yanick Paternotte. Je vous prie tout d’abord d’excuser mon retard : il est difficile d’assister à une commission élargie quand on doit participer à un vote solennel en séance publique.

Monsieur le secrétaire d’État, je vous interrogerai sur quatre points.

Le schéma national des infrastructures de transport, dont il a déjà été question, traduit une vision d’ensemble, qui me paraît enrichissante. On peut cependant s’interroger sur l’agenda retenu. En théorie, un débat parlementaire devrait intervenir avant la fin de l’année. Mais, alors que la loi sur le grand Paris influera fortement sur l’organisation du réseau, la discussion sur la société du grand Paris, sur le métro automatique et sur Arc Express s’achèvera fin janvier. Comment gérer les interfaces si l’on ne connaît pas le réseau central ?

J’ai entendu vos réponses sur l’éco-redevance et l’AFITF, dont le financement et la capacité à intervenir préoccupent à juste titre les parlementaires. Il faudra y revenir. Le chiffre de 170 milliards que vous avez avancé traduit un sous-investissement. Voilà qui montre au moins que la pérennité du poste de ministre des transports ou de celui de président de l’AFITF, elle, est assurée !

Où figurent les mesures de réparation des atteintes à l’environnement, comme la couverture d’autoroutes ? Je n’ai pas pu en trouver trace dans le schéma national des infrastructures de transport, qui semble avoir vocation à remplacer le programme de modernisation des itinéraires (PDMI).

À propos du transport aérien, je constate qu’après trois ans d’effort, la charte du développement durable de Roissy a du mal à émerger. Le code de bonne conduite des pilotes aériens paraît très théorique. Les syndicats de pilotes observent qu’aucune charte n’a été signée et qu’aucune obligation formelle n’est prévue. Puisque l’heure est au verdissement des politiques publiques, le temps me semble venu de faire verdir aussi la DGAC !

L’insonorisation des habitations riveraines est un sujet qui m’est cher. L’an dernier, vous aviez accepté d’élever le taux de financement à 90 %. Par ailleurs, j’avais proposé par voie d’amendement d’assimiler Le Bourget à une dépendance de Roissy, ce qui aurait permis d’indemniser les riverains, par le biais du plan de gêne sonore (PGS). Pour une fois, grâce à la taxe sur les nuisances sonores aériennes (TNSA), nous disposons d’une ligne créditrice de 25 millions d’euros. Autant dire que nous avons l’occasion de réparer une injustice pour tous les riverains de la Seine-Saint-Denis, du Val-d’Oise et de la Seine-et-Marne. N’oublions pas que l’aéroport du Bourget est la cinquième piste de Roissy.

Quelle est votre position sur l’éclairage des autoroutes en zone urbaine ? On entend dire parfois qu’un éclairage moins fort, évidemment moins onéreux, peut améliorer la sécurité. Disposez-vous d’informations à ce sujet ?

Je terminerai par le ferroviaire. Dès lors que la dette structurelle de RFF continue d’augmenter, les péages permettront-ils d’assurer la modernisation et l’extension du réseau, sachant que l’électrification des lignes de fret ou de certaines lignes empruntées par des missions TER est un enjeu majeur du développement durable ? Sur le fret, que pensez-vous du rôle que joue la SNCF dans la chaîne logistique, notamment à travers ses filiales Geodis et Fret SNCF ? Sur la ligne de La Rochelle, ne voulant pas se consacrer uniquement au transport, elles refusent d’entrer au capital d’un opérateur ferroviaire de proximité. Quel peut être l’avenir d’un établissement public dont la dette a frôlé l’an dernier 500 millions d’euros ? Si un redressement s’amorce, sa situation reste très préoccupante pour les finances publiques.

M. le président Christian Jacob. La parole est à M. Maxime Bono, pour le groupe SRC.

M. Maxime Bono. Monsieur le secrétaire d’État, dès lors que 28 % des émissions de gaz à effet de serre proviennent du transport, votre budget est sans doute un des leviers les plus efficaces pour mettre en œuvre le Grenelle de l'environnement. Sachant cela, comment expliquer le retard avec lequel les chiffres nous sont parvenus ? Faut-il l’imputer à des arbitrages difficiles, aux conséquences de la RGPP ou à la désorganisation de l’Imprimerie nationale ? Quoi qu’il en soit, il est fort désagréable d’examiner les mesures budgétaires dans une telle urgence.

Voyons d’abord si ce budget augmente ou s’il stagne. Un calcul rapide permet de conclure qu’il croît de 0,4 %, mais, si l’on en extrait le budget de l’opérateur particulier qu’est l’AFITF, on observe qu’il diminue de 6 %. Quoi qu’il en soit, même si l’on accepte d’inclure les recettes de cette agence, qui, pour une grande partie, ne sont pas budgétaires, une augmentation de 0,4 % ne semble pas à la hauteur des ambitions affichées lors du Grenelle de l'environnement.

Le développement du transport public, notamment urbain, est probablement la meilleure manière d’atteindre notre objectif de réduire de 20 % avant 2020 la production de gaz à effet de serre. Le premier appel à projets, qui concernait cinquante-deux projets, a permis la création de 365 kilomètres de lignes, grâce à une contribution de l’État s’élevant à 800 millions d’euros. Le deuxième, qui s’est clos le 8 octobre, devrait concerner soixante-cinq projets, pour un total de 397 kilomètres de lignes. Il nécessite 978 millions d’euros de l’État, à supposer que celui-ci intervienne à hauteur de 20 %. Quel montant envisage-t-il de verser ? Au vu des documents que vous nous avez transmis, il semble qu’il consacrera seulement 400 millions à la réalisation des transports en commun en site propre.

Un troisième appel à projets est prévu en 2011, pour des projets à réaliser en 2013 et 2014, ce qui semble peu probable compte tenu des échéances municipales de 2014. On peut penser que le résultat de l’appel sera squelettique, car il serait très hasardeux pour une municipalité de se lancer dans des travaux aussi importants que la construction d’un tramway dans un tel contexte. Souvenons-nous de la jurisprudence Chenard à Nantes ! Mieux vaudrait globaliser le premier et le deuxième appel à projets, en additionnant leurs montants.

Une nouvelle fois, nous déposerons un amendement tendant à ne pas plafonner le versement transport à 0,6 % dans les villes de moins de 100 000 habitants, alors qu’il peut monter jusqu’à 1,8 % dans les villes plus peuplées qui se sont dotées d’un transport en commun en site propre. Donnons aux villes moyennes et aux petites agglomérations la possibilité d’organiser de manière cohérente des transports publics et des transports en commun.

J’en viens au ferroviaire et à la régénération. Depuis 2009, les modes de présentation ont changé. S’il était possible jusqu’à présent de mesurer l’effort consenti par l’État pour accompagner RFF dans ses mesures de régénération, ce n’est plus le cas désormais. Cette année, on peut seulement constater que l’État consacrera 50 millions de subvention de moins à RFF. On a peine à croire qu’un tel montant sera compensé par les péages. D’une part, nous sommes loin des 500 millions supplémentaires demandés dans l’audit de l’école polytechnique de Lausanne pour maintenir l’intégralité du réseau en l’état. D’autre part, la hausse des péages est insupportable tant pour les régions qui font rouler le TER, et pour la SNCF, à laquelle elle ne permet plus d’assurer l’équilibre économique du TGV, que pour les industriels du ferroviaire. Dès lors que la SNCF n’a pas pu renouveler son parc de TGV et qu’Alstom n’a pas reçu la commande d’Eurostar, les conséquences de l’augmentation des péages sur cette industrie sont en effet inquiétantes. Dans ce contexte, compter sur le péage pour assurer la régénération du réseau et l’entretien semble hasardeux, sinon dangereux.

Quant aux trains d’équilibre du territoire, je suis très réservé sur les 75 millions d’euros qui seront prélevés sur les TGV et le transport international pour combler le déficit de 210 millions. Mieux vaudrait permettre à la SNCF de renouveler son parc. Sinon, comment parviendra-t-elle à réaliser les 40 millions de gains de productivité qu’elle annonce : en réduisant l’offre, ou le périmètre du service public ? Il paraît que ses dirigeants doutent de l’intérêt de faire rouler des TGV sur des lignes qui ne sont plus à grande vitesse. De tels gains de productivité seraient très pénalisants pour les territoires. J’espère que vous nous rassurerez à ce sujet.

Par ailleurs, les 35 millions issus de la taxe d’aménagement du territoire qui viendront financer ces trains proviendront-ils d’une surtaxe ou représentent-ils une fraction de la taxe déjà perçue ? Dans la seconde hypothèse, ils viendront obérer une partie des recettes de l’AFITF, qui n’est toujours pas dotée de ressources pérennes. Je rappelle que l’écotaxe sur les poids lourds ne peut intervenir, dans le meilleur des cas, qu’au deuxième trimestre de 2012.

Il est prévu que les 400 millions d’euros provenant de la mise en service de l’A63 soient affectés au budget pour 2011. Or ils figuraient déjà dans le budget de l’AFITF pour 2010. Cela signifie-t-il que, celle-ci n’ayant pas réalisé l’ensemble de son programme en 2010, cette somme est reportée ? Quand on regarde son programme pour les cinq ans à venir et les ressources qui lui sont affectées, il est manifeste que les projets ne sont pas financés. Lesquels devra-t-on différer, sinon abandonner ?

Puisqu’il faudra trouver de nouvelles sources de financement, je pense qu’un livret d’épargne populaire destiné à financer les infrastructures de transport ne serait pas une mauvaise idée.

Les effectifs du ministère ont été considérablement réduits, ce qui limite les capacités d’évaluation de l’État et du service public. On a pu en mesurer les effets à l’occasion de la tempête Xynthia !

Enfin, pour utiliser un véhicule électrique depuis une quinzaine d’années, je peux témoigner qu’une prise de seize ampères suffit à cet effet. Si certains vantent des boîtiers sécurisés qui valent plusieurs centaines d’euros, c’est manifestement du lobbying.

M. Charles de Courson, rapporteur spécial et président. Monsieur le secrétaire d’État, s’il a été question de l’écotaxe poids lourds, nous n’avons pas évoqué la voirie départementale sur laquelle les conseils généraux devaient délibérer. Pensez-vous que le caractère optionnel de cette écotaxe puisse être maintenu pour les départementales ? Si tel est le cas, certains départements ne la créeront pas et il en résultera un report du trafic sur ces routes, et même sur les voiries communales, qui risque de les détruire. Quelle position le Gouvernement entend-il prendre pour parvenir à un dispositif cohérent pour ces deux catégories de voies ?

Sur le ferroviaire, êtes-vous favorable à la filialisation de l’activité fret de la SNCF, qui est probablement le seul moyen de redynamiser celle-ci, de réorganiser le régime de travail et de regagner des parts de marché ?

Seriez-vous favorable à l’adossement de la Caisse de retraite des personnels navigants techniques au régime général ? En effet, on court actuellement le risque que la dégradation démographique n’entraîne une très forte augmentation des cotisations, ce qui réduirait davantage encore la compétitivité d’Air France. Il s’agit d’un enjeu considérable dans le cadre de la réforme des retraites.

Enfin, un nombre croissant de Français utilisent leur véhicule alors qu’ils n’ont plus de permis de conduire – avec les risques que cela comporte en cas d’accident. On estime à environ 1 % la proportion de conducteurs sans permis. Seriez-vous favorable au rétablissement du permis blanc dans un but social, de façon que les personnes qui n’ont pas d’autres moyens de transport, notamment dans les zones rurales et les petites villes, puissent se déplacer ?

M. Daniel Paul. Vous écrivez dans votre projet de budget : « La construction d’un budget est tout à la fois l’expression d’un contexte économique, de choix politiques et d’un projet d’avenir ».

Le contexte économique est connu. C’est un capitalisme financier mondialisé, dans lequel se sont coulées l’Europe et la France, avec des milliards d’exonérations fiscales et d’aides incontrôlées aux entreprises, la fuite en avant libérale, l’austérité budgétaire, la casse du secteur public et de l’emploi.

Les choix politiques sont également connus.

C’est d’abord le report inacceptable de l’écotaxe sur les poids lourds, qui représente un manque à gagner de 1,3 milliard d’euros pour les finances publiques. Cette redevance était pourtant le seul instrument, issu des vingt-quatre mois de marathon parlementaire du Grenelle, de nature à favoriser le report modal, enjeu de société majeur.

C’est ensuite la privatisation des autoroutes, qui prive l’Agence de financement des infrastructures de transport de France de près de 2 milliards d’euros par an, au profit des actionnaires.

C’est encore une diminution de 241 millions d’euros des crédits du programme « Infrastructures et services de transport ». Priorité devait être donnée à la régénération du réseau ferroviaire, mais l’heure semble être à la fin de la péréquation des tarifs et, surtout, à une augmentation des péages répercutée sur les usagers.

C’est la poursuite d’une politique qui, dans le domaine de la sécurité et des affaires maritimes, fait la part belle au privé, avec une diminution de 132 millions d’euros des crédits et la disparition de 96 emplois en 2011 – venant après la suppression de 190 en 2010. La réforme portuaire est toujours rejetée, tant elle s’identifie à l’abandon de la maîtrise publique. Et quel paradoxe de voir inaugurer la première « autoroute de la mer » sous pavillon bis anglais, sachant que les aides publiques sont françaises !

C’est enfin le plan fret, intitulé « schéma directeur pour un nouveau transport écologique de marchandises », qui se traduira par la réduction du trafic, par l’abandon de la desserte de plusieurs territoires et par la suppression de moyens humains et matériels, et dont les conséquences seront encore accentuées par l’abandon programmé de 60 % du transport en wagons isolés.

Alors, les luttes se multiplient : celles des cheminots, celles des bateliers qui, au moment où le Parlement débattait du Grenelle II, demandaient le simple droit de vivre décemment de leur travail, celles du personnel du remorquage, au Havre, pour obtenir le simple respect de la loi, celles des dockers et des agents portuaires…

Les élus locaux soutiennent ces luttes. L’Association des régions de France, réunie en assemblée générale le 15 septembre dernier, a décidé de ne pas donner suite aux demandes de compensation présentées par la SNCF. Elle estime, à juste titre, que la situation financière de l’entreprise publique est autant la conséquence des désengagements étatiques que celle de la crise économique. Pourtant, l’État a une mission essentielle d’aménagement du territoire et devrait soutenir les politiques favorisant la mobilité durable. C’est pourquoi je souscris à la proposition du Groupement des autorités responsables de transport – GART –, évoquée par Maxime Bono, de majorer de 0,3 % le taux du versement transport pour les agglomérations de moins de 100 000 habitants.

Les élus locaux réclament également un moratoire sur le plan fret.

Monsieur le secrétaire d’État, pourquoi avoir dissimulé l’étude réalisée par le cabinet Carbone 4, qui propose un scénario différent, sans casse du wagon isolé, mais écologiquement viable, socialement acceptable et économiquement efficace ? Il s’agirait de « maintenir un portefeuille d’offres de fret prémuni d’évolutions socio-économiques imprévisibles » et de « garder la messagerie et de bénéficier de la spécificité du réseau ferré français maillé fin ». Ce scénario permettrait de diminuer très rapidement les émissions de gaz à effet de serre et de rester cohérent avec le contrat de performance 2008-2012 signé entre l’État et Réseau ferré de France.

Par ailleurs, pourquoi la SNCF n’a-t-elle pas rejoint le projet X-rail, alors qu’elle était au nombre de ses initiateurs ? L’idée est pourtant bonne : il s’agit de regrouper les entreprises ferroviaires européennes, prétendument concurrentes, afin d’améliorer le transport des marchandises sur notre continent.

Quant à la réforme de la tarification intervenue en 2010, elle se traduit par une augmentation significative des tarifs des péages, qui ne fait que conforter la concurrence déloyale existant aujourd’hui entre le rail et la route.

À la lumière de ces éléments, votre « projet d’avenir » paraît bien sombre ! Tout justifierait pourtant de mener, dans une perspective européenne, une politique volontariste des transports, secteur déterminant pour l’avenir de notre pays. Mais cela passerait par de nouveaux financements, reposant sur l’octroi d’une part de richesse pérenne. Or, chaque année, nous devons batailler pour conserver les crédits.

Votre avant-projet de schéma national d’infrastructures de transport est d’ailleurs très éloigné de ces considérations. Sur fond de RGPP, on n’y trouve que des mesures d’affichage, aux objectifs inatteignables, n’ayant rien à voir avec la mise en œuvre effective d’une politique multimodale intégrée des transports.

Je poserai pour terminer trois questions.

Tout d’abord, j’avais déposé un amendement visant à étendre le bénéfice de l’article 73 du projet de loi de finances aux personnels ayant navigué sur les anciennes vedettes des affaires maritimes. La direction des affaires maritimes avait reconnu que ces embarcations comportaient de l’amiante et le ministère lui-même semble admettre qu’il y a eu un oubli. Pourquoi, monsieur le président, avoir refusé cet amendement au titre de l’article 40, alors qu’il ne concerne que quelques personnes ? Je trouve cela complètement déplacé et je suis sûr que les personnels concernés partageront mon étonnement.

Ensuite, le projet POLT représente une vraie solution d’aménagement de notre territoire. Notre pays a besoin de radiales ; or c’en est une, qui s’ajoute aux deux autres, vers le sud-ouest d’une part, vers le sud-est d’autre part. Dans ce secteur, le transport routier représente 80 % du transport logistique. La ligne actuelle, bénéficiaire, a besoin d’être progressivement améliorée, pour un coût qui restera très raisonnable. Monsieur le secrétaire d’État, êtes-vous prêt à prendre des engagements en ce sens ?

Afin de remédier à l’impossibilité où l’on a mis la SNCF de compenser le déficit de certaines de ses lignes, l’article 33 du projet de loi de finances crée une nouvelle taxe au profit de l’État, appelée « contribution de solidarité territoriale » – CST –, qui devrait rapporter 175 millions d’euros, auxquels s’ajouteraient 35 millions correspondant au report d’une fraction du produit de la taxe d’aménagement du territoire. Faut-il en déduire qu’il ne s’agit pas de recettes supplémentaires, mais d’une ponction sur les recettes de l’AFITF ?

Enfin, j’ai noté avec intérêt ce que vous avez dit concernant la sécurité maritime. En l’espace de quelques jours, la Manche a connu deux accidents : le premier, dans le rail d’Ouessant, était heureusement sans gravité, mais l’autre, au large du Nord-Pas-de-Calais, a entraîné des fuites de produit dangereux. Prenons garde à ne pas faire courir de nouveaux risques à la Manche, l’une des mers les plus fréquentées au monde, en soutenant la construction de parcs éoliens offshore démesurés ! Je souhaite que votre prise de position favorise les projets consensuels et rappelle à la raison les promoteurs des autres.

M. le président Christian Jacob. Pour répondre à votre première question, la décision d’irrecevabilité a été prise en commun avec le président de la Commission des finances. Votre amendement proposant une augmentation des charges, il tombait nécessairement sous le coup de l’article 40. S’il visait à réparer un oubli, le Gouvernement y remédiera certainement.

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État chargé des transports. Monsieur Paternotte, vous avez raison sur le SNIT : peut-être faudra-t-il prévoir un délai supplémentaire pour tenir compte des conclusions des débats publics non seulement sur le Grand Paris, mais aussi sur les projets de ligne grande vitesse en Basse ou Haute-Normandie ainsi que sur l’interconnexion des LGV entre Massy-Palaiseau et Villeneuve-Saint-Georges. Ces sujets intéressent en effet tous les Français.

S’agissant de l’aéroport du Bourget, nous avons pris la décision de faire profiter les riverains des dispositifs d’aide à l’insonorisation. Sur ce sujet, je vous transmettrai le rapport Environnement de la Direction générale de l'aviation civile pour 2009.

S’agissant de la diminution de l’éclairage des autoroutes en zone urbaine, je confirme que l’économie d’énergie est réelle et que, paradoxalement, cela diminue le nombre d’accidents.

En matière de transport ferroviaire, l’augmentation du tarif des péages est une nécessité, d’abord parce que des opérateurs étrangers vont désormais intervenir sur nos voies ferrées – qui sont, je le rappelle, financées par les contribuables français –, ensuite parce qu’il faut se donner les moyens de poursuivre la modernisation du réseau ancien et l’électrification de tronçons comme la ligne Bourges-Saincaize, ou encore de tronçons au pourtour des grands ports, dans le sillon alpin ou sur l’axe Nantes-Bordeaux.

Monsieur Bono, je confirme que la différence entre les pourcentages d’évolution que vous avez cités correspond bien au budget de l’AFITF.

S’agissant des transports urbains, rassurez-vous, j’ai pris bonne note des échéances municipales de 2014 ! Je souhaite qu’environ 500 millions d’euros soient affectés au deuxième appel à projets, ce qui permettrait de faire avancer les projets aussi bien de tramways que de bus à haut niveau de service ou de métros.

S’agissant de RFF, je pense qu’il faut continuer à augmenter intelligemment le tarif des péages. Contrairement à ce que prétend l’Association des régions de France, cela ne concerne pas les régions, pour qui la tarification est intégralement compensée ; cela concerne, en revanche, la SNCF – pour l’instant – et les opérateurs de fret privés.

Il faut également que la SNCF examine comment elle peut réaliser des économies dans le cadre de sa gestion déléguée de l’infrastructure pour le compte de RFF. J’en ai d’ailleurs discuté avec M. Pépy ce matin.

Le feuilleton Eurostar-Alstom n’est pas terminé, dans la mesure où le Gouvernement a indiqué très clairement à Eurostar que, dans les conditions actuelles de sécurité, le choix des rames Siemens n’était pas acceptable. C’est aussi pour faire le point sur cette question que j’ai reçu ce matin le président de la SNCF.

En ce qui concerne l’obligation d’aménagement du territoire, je trouve que les modalités de financement sont saines, avec une part apportée par la SNCF via le réseau TGV, grâce notamment à la première classe, souvent utilisée par les collaborateurs d’entreprises, et une part prélevée sur le réseau autoroutier. Il ne serait pas absurde d’utiliser aussi d’autres trains sur des lignes traditionnelles. La SNCF possède actuellement cinq ou six anciennes rames de la ligne Sud-Est qui sont inutilisées. Pourquoi ne pas apporter le confort du TGV sur certaines lignes électrifiées qui ne sont pas à grande vitesse, comme Paris-Clermont-Ferrand ? Personnellement, je ne suis pas opposé à la proposition faite par M. Hortefeux et les parlementaires auvergnats.

Monsieur de Courson, l’écotaxe concernera les autoroutes et les routes nationales gratuites ; avec six mois d’avance, démarrera l’expérimentation alsacienne, conséquence de l’adoption sous la précédente législature d’un amendement de M. Yves Bur visant à contrecarrer le contournement du toll collect allemand.

Les départements se sont montrés gourmands ; les demandes de péage ont été largement supérieures à nos attentes, notamment pour les voies faisant l’objet d’un trafic de compensation. Je rappelle aux présidents de conseils généraux que le produit de l’écotaxe viendra abonder le budget départemental, après déduction des frais de gestion de l’État.

J’en profite pour dire à M. Paul qu’il n’y a pas de report de la mesure. Simplement le système est très compliqué à mettre en œuvre : il faut pouvoir contrôler par GPS, sur des distances parfois très courtes, tous les camions français et étrangers circulant sur notre réseau. Les Allemands, malgré leurs qualités organisationnelles, ont pris des années de retard sur leur propre projet. Nous sommes en train de dépouiller l’appel d’offres. Si l’on arrive à choisir l’adjudicataire au début de 2011, il faudra qu’il soit très bon pour installer le système en l’espace d’un an et demi !

Je ne suis pas favorable à la filialisation de l’activité fret de la SNCF. Cela déclencherait une grève longue ! Cependant, la SNCF utilise au mieux les possibilités qui lui sont offertes par la loi afin de diversifier son offre en France et en Europe, en créant notamment ses propres filiales, comme Naviland Cargo ou VFLI.

Les personnels navigants sont très attachés à leur caisse de retraite, qui ne connaît pas de difficultés financières, bien au contraire. Un projet de réforme est en cours de discussion au ministère des affaires sociales, responsable du régime. Il consisterait à modifier les paramètres de cotisation et de versement afin de rétablir l’équilibre entre les personnels navigants techniques et les personnels navigants commerciaux. Je ne me prononcerai pas sur le fond.

En revanche, je ne suis pas favorable au rétablissement du permis blanc. J’ai déjà eu l’occasion d’exprimer l’avis du Gouvernement sur les amendements adoptés par le Sénat et par la Commission des lois de l’Assemblée nationale. Nous avons obtenu en septembre d’excellents résultats en matière de sécurité routière, ce qui signifie que notre politique porte ses fruits ; on s’achemine vers l’objectif fixé par le Président de la République de descendre sous la barre des 3 000 décès annuels. Le seul aménagement que le Gouvernement pourrait accepter, dans le cadre de l’examen du projet de loi d'orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure, serait le rattrapage automatique d’un point par an en l’absence d’une nouvelle infraction.

Monsieur Paul, le pavillon des navires utilisant l’autoroute de la mer m’indiffère ; ce que je souhaite, c’est qu’il y ait moins de camions sur les routes. Par ailleurs, je vous rappelle que la Grande-Bretagne fait partie de l’Union européenne et qu’à bord de ce navire se trouvaient trente travailleurs français.

Le wagon isolé étant à l’origine de 70 % des pertes du trafic fret, je comprends que la SNCF ait souhaité faire évoluer le système vers une offre multi-lots/multi-clients. D’ailleurs, 85 % de ses clients ont donné leur accord. Pour ma part, je crois que l’avenir du wagon isolé passe par les opérateurs ferroviaires de proximité.

Quant au POLT, vous connaissez la position du Gouvernement sur ce point : nous ne souhaitons pas reprendre le projet de M. Gayssot, qui était techniquement difficile et n’était pas satisfaisant pour la région de Limoges.

Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont. Très bien !

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État chargé des transports. La bonne réponse, c’est le TGV Poitiers-Limoges. Je profite de l’occasion pour remercier la région Limousin, le département que vous présidez, madame Pérol-Dumont, et l’agglomération limougeaude pour leur participation au financement du projet Sud Europe Atlantique au titre de l’ouverture du tronc commun Tours-Poitiers.

Enfin, je partage votre avis, monsieur Paul : il ne faut pas faire courir de risque supplémentaire à la sécurité maritime. S’il convient de chercher un juste équilibre entre le développement de l’éolien offshore et la sécurité maritime, la priorité doit rester à cette dernière, notamment dans les secteurs dangereux.

M. Bertrand Pancher. Monsieur le secrétaire d’État, j’ai trois séries de questions à vous poser.

Vous accordez au secteur automobile une aide de 2 milliards d’euros, afin notamment de promouvoir les véhicules électriques. Certains acteurs s’interrogent sur la pertinence d’une telle mesure, car l’évolution de l’ensemble du parc automobile vers le véhicule électrique serait selon eux impossible en termes de ressources, à cause du manque de lithium, et en termes d’environnement, à cause des batteries usagées et de la production d’énergie électrique nécessaire. Qu’en pensez-vous ?

Concernant l’écotaxe poids lourds, ne pourriez-vous organiser une réunion de travail entre vos services et ceux de nos collègues qui pestent contre son prétendu retard, de façon à prouver que tout se passe normalement compte tenu de la complexité de la mise en œuvre d’une telle mesure ? Je rappelle qu’il s’agit de la pierre angulaire de notre politique de transport et que nous y sommes particulièrement attachés.

Concernant enfin les transports collectifs en Île-de-France, nous avons pris bonne note des crédits affectés au Grand Paris, mais la mauvaise synchronisation des stratégies des différents acteurs publics ne laisse pas de m’inquiéter. Le débat public, tel qu’il s’est engagé il y a quelques semaines, ne montrait aucune cohérence entre les réflexions de la région Île-de-France et celles de l’État. Qu’en est-il ?

Au-delà se posent également des problèmes de cohérence des transports régionaux entre eux et avec la politique d’aménagement du territoire de l’État. Je prends acte de votre position sur les trains Corail et sur leur financement. Toutefois, votre réponse ne règle pas toutes les questions ; trop de trains s’arrêtent aux frontières des régions et trop d’espaces ne sont pas reliés entre eux.

À défaut de nous indiquer ce qui pourrait être fait dans le cadre budgétaire et législatif actuel, et eu égard à votre départ annoncé du Gouvernement, pourriez-vous nous exposer ce que serait selon vous l’organisation idéale des services de transports en France ?

Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont. On ne peut que se féliciter de la recapitalisation de l’AFITF. Cependant, cette augmentation conjoncturelle ne règle en rien la question de la pérennité de l’Agence. Dès la cession des autoroutes en 2006, nous avions donné l’alerte sur les graves risques que comportait ce processus. En tout état de cause, la hausse ne sera pas de nature à couvrir les besoins en investissement, que ce soit pour le réseau ferroviaire ou pour le réseau routier.

En matière de routes, M. Mariton a mis en exergue, non sans humour, la distance entre les annonces faites dans le cadre du SNIT et la réalité du budget que vous êtes contraint de défendre, monsieur le secrétaire d'État. Or cette situation budgétaire aura inéluctablement des conséquences sur la dégradation du réseau routier. Vous le savez bien, toute année blanche dans l’entretien du réseau engendre des surcoûts considérables l’année suivante.

Cette situation aura aussi des conséquences non seulement en matière de sécurité – laquelle passe par la répression, certes, mais également par la qualité du réseau routier –, mais aussi sur l’économie des territoires et, finalement, du pays tout entier. En dépit du plan de relance, les entreprises de travaux publics ont été très malmenées l’année passée. Aujourd'hui encore, leurs carnets de commandes se réduisent comme peau de chagrin. Elles surveillent avec beaucoup d’attention les donneurs d’ordres que sont l’État et les collectivités territoriales. Or, au sous-investissement du premier s’ajoutera immanquablement le sous-investissement des secondes – en particulier des départements pour ce qui est des routes.

Vous n’ignorez pas l’effet de ciseau auquel les finances de ces derniers sont soumises : d’une part, le Gouvernement supprime la taxe professionnelle et gèle pendant trois ans les dotations aux collectivités locales ; d’autre part, il opère des transferts de compétences sans les compenser suffisamment.

En Haute-Vienne, on compte plus de 4 000 kilomètres de routes départementales et moins de 300 kilomètres de routes nationales. Si les collectivités locales ne sont plus en situation d’investir, le réseau routier se trouvera en grand danger, y compris le réseau communal, dont le premier financeur est le département.

Bref, comment sortir de cette spirale infernale qui mettra à mal tout le réseau routier français, du chemin vicinal aux routes nationales ?

Puisque vous avez déjà répondu à la question, je n’évoquerai pas l’écotaxe et sa répartition entre le niveau départemental et le niveau national.

Je ne parlerai pas non plus de la LGV car vous avez répondu à M. Daniel Paul. Je tiens cependant à vous remercier de votre soutien dans ce dossier essentiel au désenclavement de l’espace central de la région Limousin. Ce territoire se trouvera ainsi interconnecté au réseau TGV européen, ce qui n’aurait pas été le cas avec le projet POLT. Au moment où les collectivités affirment clairement qu’elles appliquent le décroisement voulu par l’État, nous continuons à nous mobiliser sur ce sujet vital entre tous.

Permettez-moi d’insister pour finir sur l’importance des aéroports desservant des territoires encore enclavés sur le plan autoroutier et ferroviaire. Je vous invite à plaider pour que l’engagement de l’État dans le cadre des obligations de service public ne soit pas seulement conjoncturel, mais s’inscrive au contraire dans la durée. On ne peut laisser les aéroports à la merci de la pression permanente des compagnies low cost et de leurs seuls financements.

M. Serge Grouard. Premièrement, je me réjouis des engagements de l’État dans ce projet de budget en matière de transport en commun en site propre – TCSP. À côté des 103 millions d’euros destinés aux contrats de projet État-Région – CPER –, quelle somme prévoit-on d’allouer dès 2011 aux cinquante-deux projets qui ont fait l’objet d’appels à projets pour un montant global de 810 millions d’euros ?

Deuxièmement, l’équation des LGV semble bien complexe pour RFF, dont la dette s’élevait à environ 28 milliards d’euros à la fin de 2009. Alors que le contrat de performance signé en novembre 2008 fixe une trajectoire de retour à l’équilibre progressive mais aléatoire, le besoin d’investissement pour les LGV est, si mon calcul est exact, de l’ordre de 85 milliards d’euros. Les projets avancent bien, qu’il s’agisse de Tours-Bordeaux, de Bordeaux-Toulouse, de Bretagne-Pays de la Loire, ou encore de Paris – Orléans – Clermont-Ferrand – Lyon pour lequel le débat public débutera prochainement. Quelles sont les variables d’ajustement pour permettre leur financement dans des délais peut-être un peu plus courts qu’on ne le prévoyait initialement ?

Enfin, il serait souhaitable que l’on rappelle à Réseau ferré de France son obligation de respecter toute la loi en indiquant, dans la description des projets de lignes en vue du débat public, non seulement les points de départ et d’arrivée, mais aussi les villes intermédiaires.

M. Jean-Paul Chanteguet. Des agglomérations se sont-elles montrées intéressées par l’expérimentation en matière de péage urbain instituée par la loi Grenelle 2 ?

Par ailleurs, la LGV Paris – Orléans – Clermont-Ferrand – Lyon verra-t-elle le jour avant 2020, comme on l’entend dire, ou seulement en 2025 ou 2030 ?

En ce qui concerne l’AFITF, le besoin de financement serait de l’ordre de 4 milliards d’euros à partir de 2010. Puisque vous avez évoqué le « verdissement » du transport aérien, je vous suggère de supprimer l’exonération de taxe intérieure de consommation dont bénéficie le kérosène et de financer l’Agence avec les 3,5 milliards d’euros ainsi économisés.

M. Jean-Luc Reitzer. L’état trop souvent déplorable des bords de nos routes et autoroutes est un sujet qui peut paraître anodin. J’y attache pourtant beaucoup d’importance, sans doute parce que l’Alsacien que je suis peut faire la comparaison avec l’Allemagne et la Suisse. Détritus de toutes natures, tags, graffitis, mauvaises herbes, arbustes non taillés, affichage sauvage. : il n’est que de regarder les entrées de Paris en venant de Charles-de-Gaulle ou d’Orly pour s’en rendre compte. Chaque semaine, j’ai honte pour mon pays !

Quelles mesures votre ministère compte-t-il prendre pour lutter contre cette pollution visuelle qui dégrade l’image de la France, notamment aux yeux des touristes qui arrivent dans notre capitale ?

Mme Catherine Quéré. La déclaration d’utilité publique du projet d’autoroute A831 Rochefort – Fontenay-le-Comte, destiné notamment à faciliter la liaison Saintes-Nantes, est signée depuis longtemps. Alors que l’Europe a confirmé que cet équipement ne pénalisait pas l’environnement, que la Ligue de protection des oiseaux a formulé dans une étude complémentaire des propositions très raisonnables et a émis les mêmes conclusions, et que tous les parlementaires du département, de même que les maires de Rochefort et de La Rochelle, soutiennent ce dossier, seule manque la signature du ministre pour le lancement des travaux. Quelles sont les raisons de ce retard ?

M. Arnaud Richard. Le renforcement du transport de marchandises par voie fluviale est une des priorités du Grenelle et du projet de schéma national des infrastructures de transport. Le plan de relance a accompagné Voies navigables de France dans ses projets de modernisation, l’objectif étant d’obtenir une progression importante d’un mode de transport resté trop marginal en France.

Si le projet de canal Seine-Nord Europe, déjà bien engagé, demeure un enjeu important pour les prochaines années, tout comme d’autres projets d’envergure, qu’en est-il de l’entretien et de la remise en état des autres voies fluviales, en particulier de la Seine ?

Élu de Conflans, capitale de la batellerie, j’ai fait récemment le parcours entre Conflans et Rouen à bord d’une péniche et j’ai pu constater in situ combien la voie est en mauvais état. De nombreuses écluses sont mal entretenues, voire en panne depuis des années, et les bras secondaires sont souvent laissés à l’abandon.

Au vu des taxes qui leur sont demandées, le bon sens voudrait que les acteurs de la batellerie aient droit à une certaine qualité de service. De même, les riverains de la Seine sont confrontés à des difficultés croissantes bien que leur rôle dans l’entretien du fleuve est primordial.

Alors que le rapport Saint-Pulgent, remis en juillet 2009, a montré l’importance des retards accumulés au cours des dernières décennies, quelles mesures le Gouvernement entend-il prendre et quels moyens seront-ils donnés à VNF, au-delà des grands projets d’infrastructures, pour redonner toute sa place à un mode de transport économique et écologique ?

Mme Catherine Coutelle. Je comprends l’inquiétude des départements au sujet de l’écotaxe. L’utilisation du GPS permet déjà aux poids lourds d’emprunter des itinéraires transversaux ou de contournement. Pour passer de l’A10 à l’A11, des camions se retrouvent non seulement sur des routes départementales, mais sur des chemins vicinaux !

Concernant la LGV Poitiers-Limoges, pourriez-vous confirmer le calendrier et la recherche de ressources complémentaires à celles des collectivités locales ? Cet axe, primordial pour le désenclavement de Limoges, constitue-t-il bien le début de la liaison transversale est-ouest qui fait cruellement défaut à la France ?

La SNCF proposera-t-elle un jour des tarifs LGV clairs ? Aujourd'hui, comme dans les avions, plus personne ne sait combien son voisin a payé. Et je crains que l’augmentation des péages n’entraîne celle des billets de TGV, déjà fort chers pour les familles et les jeunes.

Je pense comme vous qu’il ne faut envoyer aucun signal de modération en matière de sécurité routière. Mais cette sévérité doit s’accompagner d’une amélioration des routes. Le SNIT ne prévoit rien, et les programmes de modernisation des itinéraires routiers – PDMI – très peu, s’agissant des axes Poitiers-Limoges et Nantes-Poitiers.

M. Robert Lecou. Le Grenelle autorise les projets autoroutiers répondant à des exigences de sécurité, à de légitimes préoccupations de désenclavement et d’équité territoriale, ou à l’effacement de quelques points sérieux de congestion du trafic.

En 1975, le Président de la République Valéry Giscard d’Estaing avait lancé son grand projet de désenclavement du Massif central : la voie autoroutière destinée à relier l’Europe du Nord à l’Europe du Sud tout en décongestionnant la vallée du Rhône. Cet été, monsieur le secrétaire d'État, vous avez inauguré la liaison entre l’A75 et l’A9, qui permet la liaison vers l’Espagne via Perpignan et vers l’Atlantique via Toulouse. Il est maintenant nécessaire d’achever le barreau de l’A750 qui permet de rejoindre Nîmes, Marseille et l’Italie via Montpellier. Votre collègue Patrick Devedjian a inauguré quelques kilomètres de ce tronçon qui continue néanmoins de buter sur un feu rouge à la hauteur de Montpellier. Pour achever le projet de 1975, il faut absolument réaliser les six derniers kilomètres.

L’État s’est engagé – des études ont été faites –, les collectivités territoriales offrent leur partenariat, la société ASF est également prête. L’État doit maintenir son engagement et piloter le projet. Comme celui-ci n’est pas inscrit au SNIT, je souhaite connaître la position du Gouvernement. Est-il envisagé de l’inscrire au PDMI ?

Pour en venir à des transports plus écologiques, dont je suis un ardent partisan, pourriez-vous donner un calendrier pour le projet de LGV Nîmes-Montpellier-Perpignan, qui permettra de relier enfin la France à l’Espagne ?

M. Francis Saint-Léger. Je souscris aux propos de Robert Lecou concernant la poursuite de l’A750 autour de Montpellier.

Toujours au sujet du désenclavement du Massif central, la mise à deux fois deux voies de la RN88 entre Lyon et Toulouse ne figure pas au SNIT alors que plusieurs CIADT ont réaffirmé que les fuseaux sont arrêtés. Le projet semble avoir disparu de toute programmation, bien qu’il réponde aux critères – exigence de sécurité et légitime préoccupation de désenclavement et d’équité territoriale – énoncés par le schéma. Quel est votre sentiment sur l’avenir de ce projet important pour le désenclavement du sud du massif central et pour la décongestion de l’autoroute du sud ?

M. Charles de Courson, rapporteur spécial et président. Le Gouvernement est-il favorable à l’amendement, déposé en Commission des finances, visant à exonérer de taxe intérieure de consommation sur les produits pétroliers – TIC – le transport fluvial à l’instar du transport terrestre ? La correction de l’anomalie actuelle représenterait une petite dépense – 3 ou 4 millions d’euros – et égaliserait les conditions de la concurrence en matière fiscale.

S’agissant du biocarburant, quelle est la position du Gouvernement quant à l’éventualité d’une accentuation des obligations d’incorporation dans le transport terrestre et le transport ferroviaire – où, comme l’a montré la Cour des Comptes, la traction diesel est une catastrophe écologique, surtout en cas de faible occupation ? En matière de transport aérien, pourriez-vous également faire le point sur l’intégration du biocarburant dans le kérosène ?

M. Frédéric Reiss. Concernant le fret SNCF en wagon isolé, la direction fret Nord et l’agence commerciale fret PCM Est viennent de décider l’arrêt des services de livraison et d’expédition d’ici à la fin de 2010.

Certes, la crise a entraîné une baisse des volumes acheminés par fer, mais de telles décisions ne sont pas sans conséquences sur nos entreprises. Lorsqu’une société réceptionne par rail toutes les quatre semaines des matières premières classifiées dangereuses, cet arrêt se traduit par le recours à un approvisionnement depuis l’étranger en camions de 24 tonnes et par la multiplication par trois du nombre de chargements et de déchargements.

Pour l’entreprise dont je parle, implantée sur un site SEVESO, le développement durable n’est pas une formule creuse ! L’obligation de remplacer le rail par la route est la négation de tous les efforts engagés pour un contrôle optimal de la livraison de produits dangereux. C’est une question de sécurité publique.

Ce cas est loin d’être unique. Aussi la décision de Fret SNCF me semble-t-elle hâtive et contraire aux intérêts de nos entreprises et à l’emploi. L’équilibre entre les impératifs économiques, les enjeux environnementaux et les mesures de maîtrise des dangers est rompu.

Je n’ignore pas que le fret SNCF a un coût mais, avant d’entériner l’arrêt de ses prestations, il faut en mesurer les conséquences.

M. Daniel Paul. Très bien !

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État chargé des transports. Monsieur Pancher, nous sommes tout à fait favorables à une réunion de travail avec les parlementaires intéressés s’agissant de la mise en œuvre de l’écotaxe sur les poids lourds.

Quant aux stratégies publiques de transports en commun en Île-de-France, le Gouvernement a tenu à ce que l’on débatte conjointement des projets Arc express et Grand Paris. Il faut également évoquer la mise en œuvre des contrats de projet, tels le prolongement de la ligne E vers La Défense, la mise en place des transversales, l’achat de voitures à étage que le Président de la République a décidé pour le RER A... Toute une politique se poursuit à côté du débat sur le Grand Paris.

Pour ce qui est des TER, je souhaite que les régions se parlent plus pour éviter que les trains s’arrêtent à leurs frontières. De nombreux TER pourraient être prolongés moyennant des accords financiers entre régions. Dans certains cas, on résoudrait ainsi la problématique des trains d’aménagement du territoire puisque l’on répondrait aux besoins de cabotage.

Madame Pérol-Dumont, je ne partage pas votre inquiétude au sujet des travaux publics. S’agissant des grands chantiers de l’État, notre pays réalisera l’année prochaine une série d’ouvrages comme on n’en a jamais vu depuis la Seconde Guerre mondiale : lancement de Tours-Bordeaux, qui représente 8 milliards d’euros et qui sera le plus grand chantier d’Europe, de Le Mans-Rennes, de Nîmes-Montpellier, achèvement de Baudrecourt-Strasbourg et de la ligne Rhin-Rhône, qui sera mise en service en décembre.

Alors que les constructions de LGV se faisaient jusqu’à présent au coup par coup, on passe à une autre dimension. Le dirigeant d’une entreprise de travaux publics candidate au chantier Tours-Bordeaux me confiait que, s’il gagnait, il devrait mettre sur ce chantier tous les moyens dont il dispose sur l’ensemble du territoire européen.

Ces grands chantiers représentent des opportunités extraordinaires non seulement pour les majors, mais aussi pour tous les sous-traitants et pour toutes les entreprises locales de transport, d’hébergement, etc.

Je vous remercie par ailleurs de votre participation active à l’avancement du dossier de la ligne Poitiers-Limoges.

S’agissant des obligations de service public – OSP –, nous avons poursuivi pendant la crise le soutien à des lignes qui connaissaient des difficultés. Il faut que ces soutiens soient durables. Cela dit, nous recevons de plus en plus de demandes. Un aéroport a ouvert aux confins du Lot et de la Corrèze, des élus appellent mon attention sur la ligne de Lannion, très importante pour l’industrie des télécommunications... Nous devrons maintenir le soutien aux lignes correspondant à des soucis d’aménagement du territoire, tout en veillant, dans certains cas, à faire des économies budgétaires. Aucune des OSP existantes n’est remise en cause.

Monsieur Grouard, l’enveloppe affectée aux transports en commun en site propre n’est pas encore fixée. Elle sera comprise entre 300 et 500 millions et je souhaite, comme Jean-Louis Borloo, qu’elle s’élève à 500 millions d’euros.

En ce qui concerne les LGV, je trouve dommage qu’une région, où je me suis rendu hier, ne souhaite pas participer au financement du débat public. Ce n’est pourtant pas ce qui est le plus onéreux !

En outre, l’État devra donner rapidement son idée du financement des lignes pour lesquelles cet aspect n’a pas encore été débattu. Je le dis tout net : je ne vois pas comment la France pourra réaliser le programme historique du Grenelle autrement qu’en ayant recours, d’une part, à des concessions et des partenariats public-privé, d’autre part, à la participation des collectivités locale.

Monsieur Chanteguet, vous évoquez l’expérimentation des péages urbains, qui résulte de l’adoption au Sénat, après beaucoup de débats, d’un amendement de M. Louis Nègre. On ne constate pas encore beaucoup d’intérêt de la part des agglomérations. J’aurais aimé que la ville de Paris se manifeste, mais elle ne le souhaite pas. Reste que, conformément à ce que demandait le GART depuis longtemps, l’instrument est maintenant à la disposition des élus. Il appartient à ceux-ci de s’en saisir.

S’agissant du kérosène utilisé par l’aviation internationale, nous respectons la décision de l’OACI de ne pas le taxer. En contrepartie, le transport aérien sera soumis dès 2012 au permis d’émission de CO2 dans le cadre du système européen d'échange de quotas, ou ETS, ce qui constitue donc une taxe supplémentaire. L’OACI en a globalement accepté à Montréal ces jours derniers le principe pour les zones situées en dehors de l’aire européenne, ce qui constitue un progrès à l’échelle mondiale.

Monsieur Reitzer, je partage votre analyse sur l’entretien des bords des routes et des autoroutes, notamment la présence de tags, pollution visuelle qui, du reste, ne touche pas que la région parisienne. Sur le terrain, les agents travaillent dans des conditions parfois difficiles puisque personne, en Île-de-France, ne souhaite voir fermer le réseau autoroutier pour son entretien. Il faut tenir compte, par ailleurs, des nouvelles normes relatives aux herbicides. À la suite de votre intervention, j’ai déjà appelé l’attention sur le sujet du directeur interdépartemental des routes d’Île-de-France.

Mme Quéré a évoqué le projet d’autoroute A 831 : située au nord de Rochefort, elle permettra aux automobilistes empruntant la liaison entre Nantes et Bordeaux d’éviter Niort. Le projet a été retardé en raison du Grenelle de l’environnement qui a imposé de réexaminer tous les projets autoroutiers : certains, comme vous le savez, ont déjà été annulés ou le seront bientôt, comme en témoigne le SNIT. Tel n’est pas le cas de l’A 831, qui a déjà fait l’objet d’une déclaration d’utilité publique – à une exception près, seuls les projets n’ayant pas fait l’objet d’une DUP figurent dans le SNIT.

M. Jean-Louis Borloo a demandé un rapport environnemental à la Ligue pour la protection des oiseaux – LPO. Un premier est arrivé au mois de juillet ; un second, définitif, est sur le bureau du ministre d’État, qui écrira dans les jours prochains aux deux présidents des conseils généraux de Vendée et de Charente-Maritime pour leur indiquer les surcoûts éventuels consécutifs aux préconisations de la LPO retenues par le ministère. Notre objectif reste le lancement de l’appel à candidature avant la fin de l’année, ce qui nous permettrait de trouver l’entreprise délégataire l’année prochaine et d’engager les travaux sans retard supplémentaire. Comme le projet concerne une traversée des marais, il convient de prévoir, afin de le rendre « Grenello-compatible », des compensations et des aménagements complémentaires. Je me réjouis de l’accord unanime qu’il rencontre auprès des collectivités locales et départementales et de la région Pays-de-la-Loire – à l’exception d’une collectivité.

M. Richard a évoqué l’entretien des bords de la Seine. L’année prochaine l’établissement Voies navigables de France – VNF – sera doté de 70 millions d’euros supplémentaires : j’espère qu’une partie de cette somme pourra être affectée à l’opération à laquelle il a fait allusion.

Mme Coutelle a abordé la question du financement de la LGV Poitiers-Limoge, financement qui n’a pas encore fait l’objet d’un débat. Toutefois, l’opération n’est pas très chère puisqu’elle porte sur une courte distance et concerne une voie unique et quelques points de croisement. Elle fera l’objet d’une concertation entre les départements et les régions concernés et l’État, dans un cadre – celui, par exemple, d’un partenariat public-privé – qui n’a pas encore été décidé.

Je reconnais volontiers qu’il conviendrait de clarifier la tarification des billets TGV, dont la complexité est grande. La SNCF applique les mêmes règles que les compagnies aériennes : plus le billet est acheté tôt, moins il est cher. Son prix augmente au fur et à mesure que la date de départ approche, avant de baisser de nouveau au tout dernier moment si le TGV n’est pas plein. Le client a cependant bien du mal parfois à se reconnaître dans l’enchevêtrement des tarifs – billets loisirs ou week-end, tarification sociale,... Le mieux est d’acheter son billet le plus longtemps à l’avance. Sur une compagnie low cost, le prix d’un même vol peut varier entre un et dix !

M. Mariton avait à juste titre demandé l’an passé à la SNCF de clarifier la présentation de sa tarification, d’autant que la clientèle âgée est désarçonnée par sa complexité.

M. Hervé Mariton. Monsieur le secrétaire d'État, la négociation sur la libéralisation des tarifs ferroviaires pourrait être l’occasion de clarifier la structure tarifaire de la SNCF en exigeant d’elle qu’elle livre les informations nécessaires. Par ailleurs, entre les billets Prem’s et les billets de première classe ou Premium, la SNCF se doit de proposer une offre centrale qui ne soit pas anecdotique. Or il me semble – c’est pourquoi je me suis permis de vous interrompre – que nous sommes à un moment où une telle clarification pourrait justement intervenir.

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État chargé des transports. M. Lecou a évoqué la question des liaisons autoroutières autour de Montpellier. La nécessité d’améliorer les liaisons entre l’A 750 et l’A 9 ne fait pas consensus, d’autant que nos études montrent que la part du trafic de transit au sein de l’agglomération montpelliéraine s’élève à seulement 10 % – mais peut-être M. Lecou, député de la circonscription, porte-t-il un autre regard ? L’A 750 est une antenne de l’A 75 vers Montpellier et nous avons inauguré ensemble la liaison entre l’A 75 et l’A 9 au niveau de Béziers. Les services du MEDAD sont donc peu enclins à envisager la création d’une nouvelle interconnexion entre l’A 75 et l’A 9 au niveau de Montpellier. De plus, le doublement de cette dernière – dont la décision a été prise – au sud de l’agglomération permettra d’améliorer la situation au sein de celle-ci.

Mais peut-être est-ce moi qui ai tort et vous qui avez raison car vous êtes sur le terrain. Il vous faudra donc, monsieur Lecou, convaincre mon successeur que le trafic est tel qu’il nécessite une nouvelle interconnexion.

M. Saint-Léger a évoqué la liaison entre Lyon et Toulouse : il est normal que la RN 88 ne figure pas dans le SNIT, puisque, à l’ouest de l’A 75, le projet a fait l’objet d’une DUP, et que nous nous situons, à l’est, dans le cadre PDMI. L’État confirmera ses engagements sur cet axe, mais je comprends l’impatience de M. Saint-Léger.

M. de Courson a évoqué l’exonération de TIC en matière de transport fluvial : j’y suis favorable. En revanche, en tant qu’ancien ministre du budget, je me doute que Bercy ne partage pas mon sentiment. L’arbitrage est en cours et le soutien du Parlement au ministère chargé des transports sera le bienvenu.

En ce qui concerne le mélange de biocarburants et de kérosène en matière de transport aérien, de nombreuses recherches sont financées et des tests seront pratiqués. À l’heure actuelle, aucun biocarburant n’a été certifié pour une utilisation commerciale. Pour franchir cette étape, il convient évidemment de tenir compte des caractéristiques des aéronefs. C’est un dossier difficile.

Quant à la SNCF, elle a commencé des expérimentations encore insuffisantes par rapport aux besoins.

Monsieur Reiss, je vous propose d’examiner avec vous le cas de l’entreprise que vous avez cité en vue de trouver une solution éventuelle et de la présenter à la SCNF.

M. Christophe Priou. Monsieur le secrétaire d’État, pourriez-vous évoquer le projet d’aéroport de Notre-Dame-des-Landes, qui est très important pour le Grand-Ouest ?

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État chargé des transports. Jean-Louis Borloo et moi-même avons examiné le dossier avec grand intérêt. Il est fortement combattu par certaines forces politiques – je pense aux Verts – et très appuyé par les deux régions, la région Pays-de-la-Loire, présidée par Jacques Auxiette, et la région Bretagne, présidée par Jean-Yves Le Driant, ainsi que par le maire de Rennes, Daniel Delaveau, par celui de Nantes, Jean-Marc Ayrault, par le conseil général de Loire-Atlantique présidé par M. Maréchal comme par la plupart des élus de votre département, dont vous-même, monsieur Priou.

Le dossier a été tranché positivement. Jean-Louis Borloo et moi-même estimons en effet que maintenir l’aéroport Nantes-Atlantique au cœur de l’agglomération est une aberration. Il convient donc de réaliser ce projet, à condition, toutefois, qu’on ne commette pas la même erreur qu’à Roissy ou à Orly où il a fallu attendre plus d’une décennie, voire deux, pour réaliser les dessertes ferroviaires ou les lignes d’accès RER. À Notre-Dame-des-Landes, nous devons construire en même temps l’aéroport et la liaison ferrée. Les collectivités débattent de la meilleure solution : une liaison ferrée dédiée, ce qui supposerait de prolonger le tram train de Châteaubriant vers Notre-Dame-des-Landes sur le modèle de ce qui existe entre Lyon-Part-Dieu et Lyon-Saint-Exupéry ; une ligne nouvelle réalisant la jonction entre les deux LGV ; ou l’adaptation de la ligne ferrée existante. Nous avons en tout cas pris l’engagement auprès des élus d’assurer en même temps l’ouverture de la liaison ferrée et de l’aéroport. Je remercie les collectivités qui viennent de s’engager sur un plan de financement garantissant l’avancement du dossier. Ce sera certainement le dernier aéroport de cette importance qui sera construit en France métropolitaine.

Reste le dossier de l’aéroport de Mamoudzou, pour assurer la desserte de Mayotte. Dans un premier temps, les nouveaux Boeing 777 de la compagnie intéressée pourront, s’ils respectent certaines conditions de charge, assurer des liaisons directes entre la métropole et Mayotte. Quant au projet d’agrandissement, sur lequel nous travaillons, il nécessite de réaliser une avancée sur le lagon, ce qui pose des problèmes d’ordre environnemental.

M. le président Christian Jacob. Monsieur le secrétaire d’État, je vous remercie.

*

La commission des affaires étrangères procède au vote sur les crédits de la mission « Ecologie, développement et aménagement durables» du projet de loi de finances pour 2011 au cours de sa réunion du mercredi 3 novembre 2010.

M. le président Axel Poniatowski. Je vous rappelle que les crédits de la mission Ecologie ont été examinés en commission élargie, avec la Commission du développement durable, le mardi 12 octobre dernier.

Je donne la parole à Monsieur Jean-Jacques Guillet pour quelques rappels.

M. Jean-Jacques Guillet, rapporteur pour avis. J’évoquerai un premier point d’actualité.

Tout d’abord, au sujet de la Conférence de Nagoya sur la biodiversité, les résultats sont plus positifs que ce à quoi on s’attendait. Néanmoins, les résultats des élections américaines font peser des incertitudes sur l’avenir. La période de cohabitation qui s’ouvre aux Etats-Unis va certainement avoir un impact sur les négociations climatiques, et notamment sur les résultats de la prochaine Conférence de Cancun. L’opposition américaine à des avancées en matière de lutte contre le réchauffement climatique est appelée à se renforcer avec une majorité républicaine à la Chambre des représentants, et une minorité démocrate qui n’est pas toujours convaincue.

Les crédits alloués à l’action européenne et internationale en matière de développement durable (action n°6 du programme n°217 du projet de loi de finances pour 2011) sont d’environ dix millions d’euros. Cette somme est exclusivement consacrée d’une part, à la participation de nos délégations aux négociations multilatérales, et, d’autre part, aux contributions de la France aux organismes multilatéraux de protection de l’environnement.

Quant à notre participation aux négociations multilatérales, elle est importante. La secrétaire d’Etat chargée de l’Ecologie, Mme Chantal Jouanno, a joué un rôle de médiatrice lors de la Conférence de Nagoya, qui a contribué à son succès. Certes, il y a eu quelques déconvenues, comme à Copenhague, l’an dernier. Mais, globalement, avant la création en 2007 du MEEDDM (Ministère de l’Ecologie, de l’Energie, du Développement Durable et de la Mer), notre pays était peu représenté dans les négociations multilatérales, si ce n’est souvent par des experts. Depuis 2007, la France est mieux représentée.

Quant aux contributions de la France aux organismes multilatéraux de protection de l’environnement, comme ceux qui sont rattachés à l’Organisation des Nations Unies, on doit distinguer entre contributions obligatoires et contributions volontaires. Mais globalement le montant de ces contributions est plutôt faible. Notre action de promotion du développement durable au niveau international repose de plus en plus sur un réseau. Il y a en effet, dans nos ambassades, près de cent correspondants du Ministère des Affaires étrangères et européennes et du Ministère de l’Ecologie, de l’Energie, du Développement Durable et de la Mer. Leur travail est de plus en plus reconnu. A ce réseau s’ajoutent des partenariats public-privé et une forte implication d’organisations non gouvernementales, formes de coopération dont les travaux convergent dans les forums internationaux. C’est une bonne chose.

Je n’insisterai pas davantage sur les différents points qui sont abordés dans mon rapport. Néanmoins, sur la biodiversité, j’avais présenté un avis évoquant une certaine inquiétude quant à l’issue de la Conférence de Nagoya. Cette inquiétude n’est plus de mise au regard des résultats positifs de cette Conférence : deux accords ont été conclus. Le premier a pour objectif de lutter contre la perte de biodiversité d’ici à 2020, à travers l’augmentation de la superficie mondiale des terres protégées et des parcs nationaux. Le second est un protocole additionnel à la Convention sur la diversité biologique, qui, lui, régit l’accès aux ressources génétiques et le partage des bénéfices de leur exploitation.

La Conférence de Nagoya a également abouti à une décision invitant l’Assemblée générale des Nations Unies à voter d’ici la fin de l’année 2010 une décision en faveur de la création de l’IPBES, qui est l’acronyme anglais pour « Plateforme Intergouvernementale science-politique sur la biodiversité et les services écosystémiques », et qui est une sorte de « GIEC de la biodiversité ». La France est à l’initiative de la création de cette plateforme depuis 2005.

Le succès de la Conférence de Nagoya nous amène à constater des avancées en matière de biodiversité qui contrastent avec les retards pris sur les questions climatiques qui seront évoquées lors de la prochaine conférence de Cancun.

Quant au financement français de l’aide publique au développement, il est au même niveau que le financement allemand. Environ cinq cents millions d’euros seront alloués d’ici 2014 aux actions relevant des aspects environnementaux de l’aide publique au développement.

Je donne un avis favorable aux crédits de l’action européenne et internationale en matière de développement durable.

M. le président Axel Poniatowski. Comme je vous l’ai dit, il n’y aura pas de discussion générale. Y a-t-il des explications de vote ?

M. Alain Néri. Je souhaite émettre une protestation solennelle contre le mode d’examen des crédits de nombreuses missions budgétaires en commission élargie : sont concernées cette année 18 discussions sur 28 ! Or les débats n’y sont pas organisés, à la différence de l’ordonnancement minutieux de la séance publique. Monsieur le Président, je vous demande d’évoquer cette question en Conférence des présidents et dans cette attente, je refuse de prendre part au vote sur ces crédits.

M. le Président Axel Poniatowski. Monsieur Néri, vous avez participé aux travaux sur le Règlement de notre Assemblée, qui sont à la source du problème que vous évoquez. Sur le fond, je crois que nous sommes tous d’accord pour regretter ce mode de travail d’examen du budget en commission élargie. Cette pratique, je le rappelle, a été largement développée – fort logiquement d’ailleurs de son propre point de vue – par le précédent président de la commission des Finances. Mettons donc à profit la « clause de revoyure » prévue lors de la dernière modification de notre Règlement pour rouvrir ce sujet, de même que celui de la prise en compte de l’assiduité aux réunions de commission sur la base du seul mercredi matin ce qui, de mon point de vue, n’est pas du tout satisfaisant.

Conformément à l’avis du rapporteur pour avis, la commission émet alors un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission Écologie, développement et aménagement durables pour 2011.

ANNEXE

Liste des personnalités rencontrées par le rapporteur

– M. Emmanuel Guérin, directeur de programme Climat à l’Institut du développement durable et des relations internationales - IDDRI (22 septembre 2010)

– M. Jean-Jacques Barberis, adjoint au chef de bureau Epargne et Marchés financiers à la direction générale du Trésor, et M. Aurélien Tignol direction générale de l’énergie et du climat, co-rédacteurs du rapport de M. Michel Prada sur la régulation des marchés du CO2, et M. Xavier Bonnet, sous-directeur du Trésor (22 septembre 2010)

– M. Robert Barbault, directeur de la biodiversité au museum d'histoire naturelle (29 septembre 2010)

– Mme Dominique Campana, directrice des affaires internationales de l'ADEME (29 septembre 2010)

– Mme Marine de Cranet, sous directrice pour le changement climatique, accompagnée de M. Benoit Piguet, conseiller au cabinet du ministre (29 septembre 2010)

© Assemblée nationale

1 () Les ressources phytogénétiques peuvent se définir comme les ressources génétiques d'origine végétale, ce qui inclut le matériel de reproduction et de multiplication végétative. Elles sont le plus souvent obtenues par la sélection des semences ou par l'hybridation. Dans la période la plus récente, ces techniques ont été enrichies par les biotechnologies qui permettent de manipuler le vivant en agissant directement sur les gènes d'une espèce.