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Assemblée nationale

Commission élargie

Commission des finances,
de l’économie générale
et du contrôle budgétaire

Commission des affaires économiques

(Application de l’article 120 du Règlement)

Jeudi 28 octobre 2010

Présidence de M. Jérôme Cahuzac,
président de la Commission des finances,
et de M. Patrick Ollier,
président de la Commission
des affaires économiques

La réunion de la commission élargie commence à neuf heures.

projet de loi de finances pour 2011

Agriculture, pêche, alimentation,
forêt et affaires rurales

M. le président Jérôme Cahuzac. Monsieur le ministre de l’alimentation, de l’agriculture et de la pêche, je suis heureux de vous accueillir, avec M. Patrick Ollier, président de la Commission des affaires économiques, en commission élargie, pour vous entendre sur les crédits de la mission « Agriculture, pêche, alimentation, forêt et affaires rurales » pour 2011.

M. le président Patrick Ollier. Nous sommes heureux, monsieur le ministre, de vous souhaiter la bienvenue. La Commission des affaires économiques, qui considère l’agriculture comme un de ses domaines d’intervention privilégiés, s’intéresse au plus haut point à la mise en œuvre de la loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche. Nous allons d’ailleurs bientôt contrôler l’exécution de ce texte, qui a défini les outils indispensables au renforcement de la compétitivité des exploitations agricoles françaises. Mais le ministère de l’agriculture, comme les autres, est soumis à l’obligation de réduction de la dépense publique ; dans ce cadre, de quelle marge de manœuvre disposez-vous, monsieur le ministre, pour accompagner les mutations qui s’imposent ?

M. Michel Raison, rapporteur pour avis de la Commission des affaires économiques, pour l’agriculture, la pêche, l’alimentation, la forêt et les affaires rurales. Les crédits en faveur de l'agriculture inscrits dans la loi de finances initiale pour 2010 et la loi de finances rectificative pour 2009 traduisaient la volonté du Gouvernement de mettre en œuvre le plan de soutien exceptionnel en faveur de l'agriculture, le PSEA, annoncé par le Président de la République en Franche-Comté afin d'aider les exploitants à faire face à l'une des plus graves crises qu'ait connues le monde agricole dans l'histoire récente. Le projet de loi de finances pour 2011 s'inscrit dans la lignée de la loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche, la LMAP, adoptée en juillet dernier. Il marque aussi un tournant vers des actions structurelles, par le biais de plans de développement de filières.

Pourrez-vous, monsieur le ministre, dresser un premier bilan de l'application du PSEA ? Quelles sommes ont été engagées ? Reste-t-il des paiements à honorer ? Qu’a permis ce plan ?

Pour financer les plans de développement des filières, 60 millions d’euros en autorisations d’engagement et 24 millions en crédits de paiement sont inscrits au titre du programme 154 pour 2011. Un communiqué de presse de votre ministère annonce 300 millions d'euros sur trois ans, dont 160 millions de crédits budgétaires complétés par 120 millions issus du produit de la taxe sur les terrains rendus constructibles. Outre le fait que 20 millions d’euros manquent dans ce décompte, je rappelle que l'article 1605 nonies du code général des impôts précise que le produit de la taxe est affecté à un fonds pour l'installation des jeunes agriculteurs inscrit au budget de l'Agence de services et de paiement. , et que ce fonds est destiné à financer « des mesures en faveur des jeunes agriculteurs visant à faciliter l'accès au foncier et à développer des projets innovants ». Quelle est l'estimation exacte du produit de la taxe pour 2011 ? Sera-t-il intégralement affecté au plan de développement des filières ? Comment pouvons-nous être sûrs que, conformément à son objet, le produit de la taxe servira bien à financer l’installation des jeunes agriculteurs ?

J’en viens aux dépenses fiscales rattachées à la mission « Agriculture ». Dans la LMAP, l'outil fiscal a été relativement peu utilisé, afin de ne pas favoriser le développement de dispositifs qualifiés de « niches ». On constate néanmoins que le Gouvernement propose, dans le projet de loi de finances pour 2011, de proroger une seule des mesures inscrites au nombre des dispositifs fiscaux de la loi d'orientation agricole de 2006 : le crédit d’impôt en faveur des entreprises utilisant le mode de production biologique. Il s'agit, je le précise, d'un crédit d'impôt en faveur du maintien en agriculture biologique : il s'appliquera donc au-delà de la période de conversion, et ce crédit d'impôt pourra désormais se cumuler avec l'aide européenne prévue à cette fin financée sur le premier pilier de la politique agricole commune.

Des objectifs ont certes été fixés dans le cadre du Grenelle de l’environnement en matière d'agriculture biologique mais, alors que l'on n'a de cesse d'enjoindre les agriculteurs à s'adapter au marché, il me paraît difficilement justifiable d'aider autant une filière dont la situation est aujourd'hui très différente de ce qu’elle était en 2006 et qui doit maintenant se suffire à elle-même. Pourquoi prolonger ce dispositif de préférence au crédit d'impôt remplacement, qui concerne toutes les exploitations ?

Par ailleurs, lors du débat sur la LMAP, vous aviez, monsieur le ministre, évoqué d'éventuelles incompatibilités entre « le crédit d’impôt bio » et le droit communautaire. Qu’en est-il ?

L'application d'un taux de taxation réduit sur le fioul domestique utilisé comme carburant agricole a entraîné une dépense fiscale estimée pour 2011 à 1,1 milliard d’euros, et les exonérations partielles ou totales de taxe foncière sur les propriétés non bâties, la TFNB, s’élèveront en 2010 à un montant estimé à 371 millions. Projetez-vous de réformer le champ et la portée de ces exonérations ?

Enfin, le montant des dépenses fiscales semble parfois sujet à caution. On l'a vu l'an dernier avec l'inscription dans le projet annuel de performance d'une dépense fiscale de 100 millions d'euros pour la déduction pour aléas – une dépense aujourd'hui évaluée à 2 millions d'euros, soit cinquante fois moins ! Les parlementaires doivent impérativement disposer d'une information plus sincère et plus fiable de ces dépenses.

Quel sera par ailleurs le coût, en 2011, des quelques dispositifs fiscaux prévus par la LMAP ? Le projet annuel de performance fait notamment état d'une prévision de dépense fiscale de 2 millions d'euros pour le « compte épargne forestière » en 2011, mais la mise en œuvre de ce compte reste suspendue à la publication de plusieurs textes d'application. Pourriez-vous en préciser le calendrier ?

Plus largement, pourriez-vous faire le point sur le calendrier de mise en œuvre de la LMAP et sur les moyens qui y seront consacrés en 2011 ? Je pense en particulier à l'Observatoire de la formation des prix et des marges, dont le président vient d’être nommé, et qui est financé sur les crédits de FranceAgriMer. Cinq postes supplémentaires avaient été affectés à cette mission l'an dernier ; envisagez-vous de renforcer l'équipe existante, les études de l'Observatoire étant très attendues dans un contexte de tensions sur les prix à la production, et de relations commerciales parfois houleuses entre les fournisseurs et les distributeurs ?

Enfin, la loi a prévu un mécanisme de réassurance publique dans les six mois suivant sa promulgation. Ce dispositif doit en principe être examiné en loi de finances. Quel sera, selon vous, le véhicule législatif adapté ?

M. Nicolas Forissier, rapporteur spécial, pour les politiques de l’agriculture et le développement agricole et rural. Notre agriculture a connu deux années particulièrement difficiles, qui ont conduit le Gouvernement à mettre au point un plan de soutien d’une ampleur considérable puisque, crédits budgétaires et effet de levier cumulés, ce sont 2,3 milliards qui ont été mobilisés pour les agriculteurs français.

Les crédits de la mission « Agriculture, pêche, alimentation, forêt et affaires rurales » que vous nous présentez, monsieur le ministre, est remarquable en ce qu’il maintient le soutien à l’agriculture tout en restructurant la nature de la dépense. Dans un budget en augmentation globale de 1,8 %, l’effort de réduction des dépenses du programme 251, c’est-à-dire du fonctionnement du ministère, permet des dépenses d’intervention plus importantes, les dépenses relatives aux charges patronales sur les salaires des employés saisonniers incluses. Le projet de budget, dans la continuité de celui de l’an dernier, soutient la Ferme France dans un contexte de rationalisation obligée de la dépense publique.

Mais quelques questions demeurent, outre celles que vous a posées M. Michel Raison.

J’évoquerai en premier lieu la situation des chambres d'agriculture. Alors qu’elles consentent depuis plusieurs années de grands efforts pour se réformer et mutualiser leurs missions et leurs moyens, notamment en s’appuyant sur les chambres régionales, elles n’ont pas bénéficié, l’an dernier, d’une augmentation de la taxe pour frais de chambres d'agriculture. Cette année, nous attendons une augmentation, qui devrait à tout le moins permettre de compenser l’inflation. En effet, les chambres d'agriculture devront assurer le soutien à l'installation des jeunes agriculteurs jusqu'alors assumé par les associations départementales pour l'aménagement des structures des exploitations agricoles, les ADASEA. De plus, le compte d'affectation spéciale sur les crédits duquel sont financés leurs projets de recherche appliquée sera mis à contribution pour prendre également en charge la génétique animale et la sélection végétale, actions traditionnellement financées par la mission « Agriculture ».

Dans ce contexte, que prévoit le Gouvernement ? J’ai entendu parler d’une augmentation de 1,5 % de la taxe pour frais de chambres d'agriculture. Mais les chambres souhaitent la fixation d’un taux pivot qu’elles auraient la liberté d’augmenter en cas de nécessité. Je citerai l’exemple de la vertueuse chambre d’agriculture de l’Indre, bien gérée, et qui est loin d’être seule dans ce cas : pour ce qui la concerne, l’augmentation devrait être de 2,42 % simplement pour rattraper l’effet, l’an prochain, de l’intégration en son sein du personnel de l’ADASEA – sachant que l’ADASEA elle-même avait réalisé des efforts méritoires de réorganisation et de constriction de personnel. D’évidence, le taux d’augmentation de la taxe devrait être au minimum celui-là. Toutes les chambres consulaires doivent poursuivre leurs efforts de rationalisation mais, dans le même temps, elles doivent être bien accompagnées. Des précisions sur ce point nous seraient utiles.

D’autre part, les crédits alloués à FranceAgriMer pour promouvoir les filières agricoles françaises à l’étranger sont resserrés. Est-il vraiment opportun de réduire des crédits destinés à soutenir les produits de la Ferme France à l’international quand nos entreprises doivent faire face à une concurrence mondiale toujours plus féroce, dont vous n’ignorez rien ?

Dans un autre domaine, la loi de modernisation de l’agriculture du 27 juillet 2010 a institué une taxe sur les transactions foncières. Son produit, de quelque 120 millions d'euros cette année, devait pour l’essentiel abonder un fonds pour l'installation des jeunes agriculteurs, mais l’on voit bien qu’il sera en réalité affecté à d’autres objets. Qu’en sera-t-il exactement ?

La loi de modernisation agricole a aussi défini un indice national des fermages uniforme. Vous vous étiez engagé, monsieur le ministre, à ce qu’il ne baisse pas. Or le mode de calcul retenu dans votre arrêté du 28 septembre 2010 aboutit à ce que l’indice, à partir d’une base 100 en 2009, passe à 98,37. Pourtant, les charges des propriétaires ruraux continuent d’augmenter, et la population dont il s’agit est pour beaucoup composée de petits agriculteurs âgés qui ont mis leurs terres en fermage afin de permettre l’installation de jeunes, et de se constituer un complément de retraite, leur pension étant très faible. Cette tendance ne laisse pas d’inquiéter. Quelles mesures, budgétaires ou non budgétaires, entendez-vous prendre à ce sujet ?

Quelle suite sera donnée au rapport que M. Hervé Gaymard a consacré à l'avenir de l'Office national des forêts ? Ses conclusions se traduiront-elles par une évolution du budget ?

Enfin, prendrez-vous en considération les très vives inquiétudes des propriétaires forestiers privés, qui ont le sentiment que les mesures prises dans la LMAP ne sont pas au point et qui voient se profiler des années difficiles si l’État ne soutient plus les forêts qui ne seront pas assurées en 2017 ?

M. Yves Censi, suppléant M. Philippe Vigier, rapporteur spécial, pour la sécurité alimentaire. Je supplée M. Philippe Vigier, rapporteur spécial sur le programme n° 206 « Sécurité et qualité sanitaires de l'alimentation ».

Comme cela est reconnu dans la loi de modernisation de l'agriculture de juillet dernier, la nutrition et l'alimentation sont des enjeux majeurs de santé publique. En dix ans, la traçabilité des aliments est devenue une exigence pour tous les consommateurs. La direction générale de l'alimentation, qui met en œuvre le programme, contrôle chaque maillon de la chaîne sanitaire. Au vu des missions remplies, les crédits demandés pour 2011 – un peu plus de 500 millions d'euros – semblent tout à fait raisonnables au rapporteur spécial, qui a axé ses investigations sur la traçabilité des produits importés.

L'année 2010 a été celle de la fusion de l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments et de l'Agence française de sécurité sanitaire de l'environnement et du travail, par la création de l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail, l’ANSES. Quel est l’avantage de cette fusion ?

Alors que les contrôles pratiqués en France sont particulièrement stricts, les résultats des contrôles des denrées alimentaires importées ont parfois défrayé la chronique, à tort ou à raison. Les services de la direction générale de l'alimentation envisagent-ils des actions portant spécifiquement sur certains produits en 2011 ?

Le rattachement de la sous-direction des produits agricoles et alimentaires, aujourd'hui placée sous l'autorité du directeur général de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, au sein d'une direction unique de la sécurité sanitaire des aliments, ne rendrait-il plus efficace l'action des services ?

M. le président Jérôme Cahuzac. La loi du 4 mars 2002 a institué un régime de retraite complémentaire obligatoire par répartition pour les chefs d’exploitation agricole, qui a notablement amélioré leurs pensions de retraite. Les conjoints et aides familiaux souhaitaient également bénéficier de ce régime. Si, dans le cadre de l’examen de la réforme des retraites, le Parlement vient de leur en donner la possibilité, il apparaît que n’en bénéficieront pas les retraités actuels mais seulement les cotisants à venir. Pouvez-vous confirmer, monsieur le ministre, que la disposition, à ce jour, n’améliorera pas la pension des conjoints et aides familiaux actuellement à la retraite, tout en imposant une nouvelle charge aux exploitations – le produit de cette nouvelle cotisation rapportant en revanche une vingtaine de millions au régime ?

M. Bruno Le Maire, ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche. Je commencerai par préciser les orientations politiques que traduit ce budget. Elles sont simples : le Gouvernement voulant continuer de soutenir l’agriculture et la pêche dans un contexte de forte contrainte budgétaire, il importait de réorienter les dépenses du ministère en faveur des dépenses d’intervention et, pour cela, de réduire autant que faire se pouvait les dépenses de fonctionnement.

Par ailleurs, depuis mon arrivée au ministère, il y a seize mois, j’ai voulu orienter notre politique agricole vers la compétitivité des exploitations. Lorsque les contraintes budgétaires sont fortes,  nous devons impérativement non seulement abaisser nos coûts de production en réduisant la consommation d’énergie et d’intrants et en mettant les exploitations aux normes, mais aussi définir une taille d’exploitation optimale qui, selon moi, est la taille moyenne. C’est de cette manière que l’on soutiendra une agriculture française confrontée à des concurrents de plus en plus agressifs – ce disant, je pense, sans la critiquer, à l’Allemagne.

Nos choix politiques se traduisent par le maintien de diverses primes : prime herbagère agri-environnementale ou encore indemnités compensatoires de handicaps naturels.

Je partage l’appréciation portée par M. Michel Raison sur la crise qu’a connue l’agriculture française en 2009. Un budget n’a de sens que s’il s’appuie sur une analyse lucide ; or, la crise de 2009 n’était pas une énième crise sectorielle, mais une crise structurelle grave qui s’est traduite par une perte de revenus de plus de 30 % pour l’ensemble des exploitations, et de 50 % pour certaines. Or le revenu des agriculteurs était, avant la crise, de 15 % inférieur au revenu moyen des autres ménages français. C’est dire qu’en 2009, ce sont les plus pauvres qui ont perdu le plus. Il fallait donc apporter à notre agriculture un soutien fort ; cette exigence s’est traduite par l’élaboration et la mise en œuvre du plan de soutien exceptionnel en faveur de l'agriculture, et cette mise en œuvre a été un succès.

À ce jour, les services de l’État ont traité 233 000 dossiers, ce qui représente près de la moitié des exploitations françaises ; 83 000 prêts de trésorerie ont été payés et l’encours des prêts est aujourd’hui de 1,7 milliard, avec 90 millions de bonifications par l’État. Je saisis l’occasion qui m’est donnée de remercier M. Nicolas Forissier, remarquable médiateur auprès du réseau bancaire.

La prise en charge de cotisations sociales a concerné 22 000 bénéficiaires ; 50 millions d’euros ont été payés à ce titre.

S’agissant de la taxe foncière sur les propriétés non bâties, 18 000 délais de paiement ont été accordés, et 29 000 remises de paiement, pour 17 millions en tout. Dans le cadre du fonds d’allégement des charges des intérêts d’emprunt, nous avons reçu 65 000 dossiers et 150 millions ont été payés ces dernières semaines. Le seul point qui reste à améliorer, c’est le dispositif d’accompagnement spécifique – 36 000 dossiers pour 100 millions d’euros – en cours d’instruction et qui devrait donner lieu à paiement d’ici à la fin de l’année.

Voilà pour la mise en œuvre du PSEA, qui a été une bouée de sauvetage indispensable pour le monde agricole français.

M. Michel Raison a relevé à juste titre une erreur dans le communiqué de presse du ministère : ce sont 180 millions de crédits budgétaires qui seront affectés, en trois ans, au plan de développement des filières. À ce montant s’ajouteront 120 millions issus, pendant la même période, du produit de la taxe sur les terrains rendus constructibles. Ce sont donc bien 300 millions qui seront, en tout, alloués à ce plan.

Le produit de cette taxe est donc estimé à 40 millions en année pleine. Nous veillerons, par le biais de FranceAgriMer, qui fera office d’organisme collecteur, à ce que cette somme serve dans son intégralité à soutenir l’installation des jeunes agriculteurs, notamment en les aidant à accéder à la propriété foncière.

Je sais, monsieur Raison, votre critique de la prorogation du crédit d’impôt en faveur des entreprises utilisant le mode de production biologique. Certes, ce marché fonctionne bien, et certains agriculteurs se demandent en conséquence pourquoi l’État devrait continuer de soutenir cette filière. Mais nous avons pris du retard en matière de production biologique, si bien que la demande induit de très nombreuses importations, d’Italie notamment. Il me semble assez peu constructif que nous nous privions d’un marché en forte croissance, qui restera cependant un marché de niche longtemps encore. J’ai donc choisi de maintenir ce crédit spécifique. Nous visons à porter à 6 % de la surface agricole française la surface de production biologique en 2012, et à 20 % en 2020. Pour y parvenir, un dispositif incitatif doit être maintenu.

Toutefois, nous avons rationalisé le dispositif car, dans sa version actuelle, le montant total de l’aide, qui est de 12 000 euros sur trois ans, excède le plafond communautaire autorisé, dit de minimis, fixé à 7 500 euros en trois ans. Pour cette raison, j’ai décidé de ramener le montant de l’aide annuelle de 4 000 euros à 2 000 euros, soit 6 000 euros sur trois ans. Les agriculteurs n’y perdront pas, car ils pourront cumuler cette aide nationale et les aides européennes destinées à promouvoir la production biologique. En résumé, nous maintenons le soutien tout en le réajustant, pour aboutir aux objectifs fixés, dans l’intérêt des agriculteurs et de la filière, et nous souhaitons ainsi mettre un terme à des importations inutiles.

Le crédit d’impôt au titre des dépenses engagées par les exploitants agricoles pour assurer leur remplacement et leur permettre ainsi de partir en vacances a été créé en 2006. Il concerne tous les chefs d’exploitation tenus d’être sur place tous les jours. Son coût est évalué à 10 millions pour 21 700 agriculteurs, soit un coût moyen de 460 euros par exploitation. Je confirme que le dispositif sera prolongé trois années, mais il devra respecter le plafond communautaire de minimis.

D’une manière générale, je m’emploie à remettre de l’ordre dans les crédits à l’agriculture française, pour respecter systématiquement les règles communautaires ; je considère anormal que la France, première bénéficiaire de la politique agricole commune, ne respecte pas rigoureusement les règles européennes, notamment le plafond de minimis.

J’ai besoin de votre soutien pour poursuivre la défiscalisation des biocarburants. Une étude de l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie, l’ADEME, l’année dernière, montre que l’utilisation des biocarburants permet des gains nets en émission de gaz à effet de serre de 50 % à 70 % par rapport à l’utilisation de carburants fossiles. Comme, contrairement à ce qui se produit au Brésil, par exemple, il n’y a pas de déforestation massive en France, cette politique n’a pas d’impact négatif. Outre cela, l’utilisation des biocarburants permet de diversifier les débouchés et de développer la chimie verte.

La défiscalisation a été votée en 2008 pour trois ans. Je souhaite que l’on ne revienne pas sur ce choix et que l’on maintienne les niveaux de soutien fiscal prévus pour 2011 – 14 euros l’hectolitre pour l’éthanol et 8 euros l’hectolitre pour le biogazole – mais aussi pour les années suivantes, car les producteurs ont besoin de stabilité fiscale.

J’en viens au calendrier d’application de la LMAP.

Les ordonnances qui concernent l’outre-mer seront prêtes en janvier, toutes les autres au printemps prochain. Soixante-dix décrets d’application devaient être pris, dont 24 en Conseil d’État ; 90 % seront pris d’ici à janvier 2011. Deux ont déjà été publiés : le décret n° 2010-260, qui a trait aux collecteurs de céréales et d’oléagineux, et le décret n° 2010-1126, déterminant les modalités de calcul de l’indice national de fermage conformément à l’article 62 de la LMAP.

Il y a évidemment dans la loi des mesures phares, auxquelles je travaille avec constance pour que les choses avancent rapidement. Ainsi, le décret relatif à l’Observatoire de la formation des prix et des marges est en cours de signature au ministère de l’économie. L’économiste Philippe Chalmin vient d’être installé dans ses fonctions de président de l’Observatoire. Il disposera de cinq agents à temps plein et de 1 million de crédits de fonctionnement, ce qui n’est pas négligeable.

La priorité accordée à la compétitivité des filières n’interdit pas de regarder ce qui fonctionne moins bien dans la répartition de la valeur ajoutée à l’intérieur des filières. Quand on compare avec précision les situations en Allemagne et en France – j’ai commandé un certain nombre d’études sur le sujet –, on s’aperçoit que nous avons un effort à accomplir en faveur de la rémunération des producteurs. La réalité économique fait que ceux-ci constituent trop souvent la variable d’ajustement de la filière alimentaire française. Il faut donc corriger cela et faire en sorte que la valeur soit plus équitablement répartie au bénéfice des producteurs tout au long de la filière. Conserver une agriculture forte exige une rémunération juste des producteurs. Aujourd’hui, en France, nous n’en sommes pas là.

Comment faire ? Il nous faut d’abord disposer d’un diagnostic lucide et impartial afin de ne plus connaître cette situation dans laquelle chacun se renvoie la balle : les producteurs incriminent les industriels, ceux-ci accusent la grande distribution, laquelle prétend ne pas pouvoir agir autrement vis-à-vis des consommateurs. La formation des prix est effroyablement complexe dans la filière alimentaire. C’est pourquoi j’ai demandé à M. Philippe Chalmin de nous remettre, dès la fin de cette année, une première évaluation portant sur la filière animale, qui est aujourd’hui celle qui souffre le plus. Elle vous sera adressée au printemps de 2011. Comme le prévoit la loi, vous aurez alors toute latitude pour en tirer des conséquences législatives. C’est un des points clés de l’agriculture française : si les producteurs n’ont pas le sentiment d’être défendus, en échange des efforts de compétitivité qu’on leur demande, on n’arrivera à rien.

J’ai multiplié les réunions concernant les contrats. Le Conseil supérieur d’orientation de l’agriculture en a tenu une à ce sujet lundi dernier. Deux décrets relatifs au secteur des fruits et légumes et à celui du lait ont été transmis à l’Autorité de la concurrence et au Conseil d’État. Ils devront être disponibles en janvier 2011 pour une entrée en vigueur au 1er mars, date correspondant au début de la campagne laitière. Nous devons prendre nos responsabilités en la matière car, le jour où le prix du lait s’effondrera de nouveau, pour une raison imprévisible, imputable à un problème sanitaire en Chine ou à une surproduction en Nouvelle-Zélande, le seul à se retrouver sur le banc des accusés sera le ministre de l’agriculture, à qui on reprochera de n’avoir pas préparé les contrats plus tôt pour sécuriser le revenu des producteurs. Je n’ai aucune indication sur l’évolution du prix de lait en 2011, mais la volatilité de celui-ci est tellement imprévisible qu’il vaut mieux anticiper et avoir ces contrats à disposition.

Voilà donc pour les principaux sujets relatifs à la loi de modernisation.

Concernant la réassurance publique, nous travaillons avec les services de Bercy à un rapport qui devrait être disponible à la fin de l’année.

Je sais que la question de l’assurance fourrage vous tient à cœur. Avec Groupama, nous travaillons à définir un produit assurantiel destiné aux éleveurs, ce qui sera une première en France. Nous nous sommes tous battus, notamment avec le président Patrick Ollier et M. Nicolas Forissier, pour qu’existe un tel dispositif.

Je partage l’appréciation de M. Nicolas Forissier sur la nécessité d’orienter les crédits vers les dépenses d’avenir en réduisant celles de fonctionnement : ce projet de budget s’y efforce.

J’assume parfaitement le transfert des missions des ADASEA aux chambres d’agriculture. Il était prévu par la loi de modernisation de l’agriculture et nous en avons suffisamment discuté pour ne pas y revenir encore. Il s’agit d’un dispositif de rationalisation devant permettre de mieux faire fonctionner les mécanismes d’aide à l’installation ainsi que les chambres d’agriculture. Le montant total de leurs crédits s’élèvera à 620 millions d’euros en 2011, ce qui n’est pas une peccadille. Dans la mesure où l’on demande un effort de réorganisation aux services du ministère, il est également légitime de demander aux ADASEA et aux chambres d’agriculture d’éviter les doublons et de mieux s’organiser. En les rapprochant, en transférant des missions des unes aux autres, ce qui s’est déjà fait sans difficultés dans trente-six départements, nous faisons baisser, raisonnablement, les subventions de l’État, qui passeront de 14,7 millions d’euros en 2010, à 8 millions en 2011, et à 3 millions en 2012, soit près de 12 millions d’économies. Cette diminution sera en partie compensée par l’augmentation de la taxe prévue par un amendement que je présenterai, et qui rapportera 4,3 millions de recettes supplémentaires en 2011. Son principe consiste à fixer, comme l’avait proposé M. Nicolas Forissier, un taux pivot de 1,5 % et un plafond de 3 % au niveau départemental, ce qui permettra d’assurer un rattrapage en faveur des chambres d’agriculture ayant le plus besoin d’une évolution dynamique de leurs ressources, ce qui est notamment le cas de celle de l’Indre. Ce mécanisme devrait répondre de façon satisfaisante aux interrogations des uns et des autres.

Vous m’avez ensuite interrogé sur la compétition internationale et les crédits de soutien au secteur agro-alimentaire. La SOPEXA bénéficie aujourd’hui de 15 millions d’euros d’aides de l’État. Nous sommes en discussion avec elle sur le prochain montant de celles-ci, probablement en diminution. Là encore, réaliser des économies implique d’assumer que, sur certains postes budgétaires, on dépense moins. Mais cette baisse sera compensée par un certain nombre de décisions que j’ai déjà annoncées touchant l’industrie agro-alimentaire française. Il en va ainsi du plan de développement doté de 300 millions d’euros sur trois ans, qui comportera un certain nombre de mesures de soutien à l’exportation. Nous bénéficions aussi à ce titre de crédits européens importants : à titre d’exemple, 227 millions d’euros en année pleine soutiennent l’exportation des vins français. Le secteur viticole a raisonnablement choisi de regrouper ces crédits afin de valoriser ses produits à l’exportation plutôt que de les redistribuer exploitation par exploitation. Ils seront, pour la première fois cette année, entièrement dépensés. Nous apportons un troisième type de soutien à la filière agro-alimentaire dans le cadre du grand emprunt : un certain nombre de crédits sont prévus pour financer l’innovation et la recherche dans ce secteur. L’exportation des produits exige en effet d’être capable de moderniser et d’innover. Par exemple, dans le domaine des fruits, il faut arriver à réaliser une quatrième gamme, celle des fruits sous sachet, plus facilement consommables par les enfants et de présentation plus attirante : ne pas avoir à peler la pomme, que la banane soit protégée contre les chocs, etc.

La France n’a pas vocation à dégringoler d’une ou deux places mondiales par an dans le domaine de l’industrie agro-alimentaire. Nous occupions la première il y a encore quelques années, puis nous avons été dépassés par les Pays-Bas, par l’Allemagne et par les États-Unis : nous occupons maintenant la quatrième place. Il nous faut parvenir à remonter sur l’une des deux premières marches du podium. Nous avons vocation, en matière d’exportations agro-alimentaires, à nous situer à un niveau très proche de celui des Américains, mais cela exige une valorisation des produits, un soutien à l’exportation, le regroupement d’un certain nombre de petites entreprises, au nombre de 10 000 actuellement dans ce secteur. Je souhaite également que nous créions un label France aisément reconnaissable afin de valoriser nos produits.

Au dernier Salon de l’alimentation de Villepinte, l’Italie occupait un stand impressionnant de 150 mètres de long. Sous la marque « Italie », reconnaissable dans le monde entier, se déclinait les différentes régions valorisant leurs produits. Le label italien est puissant, ayant conquis des parts de marché année après année. Le stand français se présentait quant à lui sans label « France ». Nos régions apparaissaient sous leurs propres bannières, ce qui ne suffit pas. Ce serait une erreur de considérer aujourd’hui que la marque « Normandie », « Languedoc-Roussillon » ou « Bordeaux », permet d’exporter seule. Il faut une marque « France ». Les Italiens ont compris cette exigence pour ce qui les concerne et se sont mieux organisés que nous pour prendre des parts de marché. La situation est la même pour les vins d’AOC.

Le produit de la taxe en faveur des jeunes agriculteurs est estimé à 40 millions d’euros, soit 120 millions sur trois ans, intégralement affectés à l’installation et à l’achat de terres agricoles.

La réforme de l’indexation des prix des fermages a fait l’objet d’une large concertation avec le syndicat de la propriété rurale. L’objectif consiste à simplifier le dispositif par la définition d’un indice national annuel remplaçant les anciens indices départementaux. Nous en avions longuement débattu lors de l’examen de la LMAP. Cela aboutit à retenir pour le calcul du prix du fermage un indice composite, intégrant pour 60 % le revenu agricole à l’hectare et pour 40 % le niveau général des prix. Le nouvel indice est à la fois plus juste et plus précis que le précédent, qui se calculait uniquement sur la base du résultat brut d’exploitation à l’hectare. La prise en compte de l’inflation dans le nouvel indice constitue aussi un moyen supplémentaire pour les bailleurs d’amortir la baisse des prix des fermages et d’éviter la chute de revenus des exploitations agricoles. La réforme permet de diviser quasiment par deux la baisse de l’indice des prix des fermages entre 2009 et 2010 : elle sera de 1,63 % au lieu de 3 %.

L’Office national des forêts (ONF) pose un problème difficile. Sa situation financière est déséquilibrée depuis 2009, résultant d’un effet de ciseaux entre la chute du cours du bois, sujet majeur pour l’ensemble de la filière sylvicole française, et la hausse du taux du CAS « Pensions », question mise au cœur du débat par le président de l’office, M. Hervé Gaymard, et représentant 48 millions d’euros. À la suite de discussions avec le Premier ministre, nous espérons parvenir à une solution pour le milieu de l’année 2011, notamment sur la base des recommandations du rapport remis dernièrement par M. Hervé Gaymard au Président de la République.

Les voies de l’équilibre financier sont connues, mais nous n’avons pas encore décidé quelle formule nous retiendrons. La première solution, recommandée par l’ONF, consiste à aménager le taux du CAS « Pensions ». Cela permettrait de résoudre rapidement l’équation financière mais comporte le risque d’être perçu par les agents de l’Office comme un alignement sur les pratiques du secteur privé. Il faut donc évaluer, ce qui explique que je ne puisse trancher dès maintenant. La deuxième solution consisterait à revoir le financement du régime forestier, ce qui soulève des questions sur lesquelles il est encore trop tôt pour se prononcer. La dernière solution consisterait à augmenter la subvention de l’État, mais elle me paraît difficile à envisager dans l’actuel contexte budgétaire. En 2011, nous accroîtrons certes la subvention du ministère de 5 millions d’euros, mais il ne s’agit pas d’une solution pérenne. Trancher entre les trois formules que je viens de présenter exige de dialoguer avec les agents de l’ONF et de mettre préalablement en place la réforme de la gouvernance de l’Office telle qu’elle a été proposée par M. Hervé Gaymard, et qui nous convient.

M. Yves Censi m’a interrogé sur la réorganisation des agences sanitaires autour de l'ANSES, l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail. Nous avons procédé au rapprochement de l’AFSSA, l’Agence française de sécurité sanitaire des aliments, et de l’AFSSET, l’Agence française de sécurité sanitaire de l’environnement et du travail, afin de pourvoir l’ANSES d’une dimension internationale : elle sera la plus grande agence de sécurité sanitaire en Europe, avec 1 200 agents et un budget de 125 millions d’euros. Il est vital pour la France de maintenir son degré d’exigence en matière de sécurité sanitaire car c’est aussi un atout pour notre agriculture que de proposer des produits dont la sécurité sanitaire est totale. L’Agence est placée sous la tutelle de cinq ministères. Son conseil d’administration comprend cinq collèges : collège public, celui des partenaires sociaux, celui des organisations professionnelles, celui des ONG et celui des élus. Un comité de déontologie garantira la prévention des conflits d’intérêts et le suivi des avis scientifiques. Celui-ci représente d’ailleurs, par sa rigueur et son exigence, un modèle digne d’inspirer d’autres pratiques. Le financement de l’ANSES sera assuré aux deux tiers par le ministère de l’agriculture et de la pêche, qui lui allouera 3,7 millions d’euros en 2011.

À la suite des états généraux du sanitaire, le laboratoire national de la protection des végétaux sera également transféré à l’ANSES afin de séparer l’évaluation de la gestion des risques pour la santé des végétaux. Il s’agit là d’un sujet majeur, notamment en période de développement international des OGM, afin de conserver un regard très précis sur la santé des végétaux.

M. le président Jérôme Cahuzac. Je voudrais formuler deux remarques.

Vous proposez un taux pivot pour la taxe destinée au financement des chambres d’agriculture, au niveau suggéré par le président de leur assemblée permanente. Mais il me semble que 1,8 % serait plus raisonnable que 1,5 %. Mais le choix vous appartient.

Nous sommes nombreux à adhérer aux arguments que vous avez développés en faveur des biocarburants, notamment à celui d’une nécessaire lisibilité de la politique menée en la matière. La loi relative à la taxe générale sur les activités polluantes prévoit un taux majoré dans l’hypothèse de non-incorporation de biocarburants. Or une circulaire récente, dont la valeur juridique est donc inférieure à la loi, exonère de ce taux majoré les compagnies pétrolières qui n’incorporent pas de biocarburants. En conséquence, un groupe comme Sofiprotéol a arrêté la production de biocarburants dans six de ses sept usines.

Qu’en est-il exactement ?

M. Louis Guédon. Pour ce qui concerne la pêche, le projet de budget pour 2010 repose sur deux constats : d’abord, depuis le premier plan Mellick, la moitié de nos navires, de nos marins et de notre production a disparu ; ensuite, après analyse de la situation, notre volonté de réagir reste intacte, car la pêche emploie encore 24 000 marins, et 7 400 navires, dont 5 000 en métropole, qui ont débarqué 560 000 tonnes de poisson en une année.

La conchyliculture est en crise et l’aquaculture n’a que des espérances limitées. Les réactions qu’elles suscitent apparaissent à travers les dispositions de la LMAP et du projet de budget que vous présentez. La loi devrait mettre un terme aux conflits récurrents entre scientifiques, marins et élus par le biais du Conseil supérieur d’orientation des politiques halieutiques et du Comité de liaison scientifique et technique. La réorganisation des structures de la profession devrait s’équilibrer grâce au potentiel de nos ports, c’est-à-dire par le biais du Comité national des pêches maritimes, des comités des pêches régionaux, de la naissance ou de la confirmation des comités départementaux, enfin de la représentation locale privilégiant l’accueil de nos marins.

La répartition des quotas de pêche attribués par Bruxelles sera effectuée par les organisations de producteurs. Les espèces dépourvues de quotas seront placées sous le contrôle du Conseil supérieur d’orientation des politiques halieutiques et les autorisations seront délivrées par le Comité national ou par les comités régionaux.

Enfin, la volonté d’affecter au monde de la pêche, touché de plein fouet par la diminution constante de ses ressources, un nouvel apport financier issu de la mer trouvera sa source dans l’évolution de l’éolien.

Le cadre budgétaire pour 2011 maintient les efforts accomplis lors des exercices précédents. Avec 65,7 millions d’euros contre 57,8 millions en 2010, il s’accroît de près de 10 % en réponse aux volontés affichées dans la LMAP. Il prend en compte l’achèvement, en 2010, des programmes du plan pour une pêche durable et responsable, dont certaines actions ne se termineront toutefois qu’en 2011. Les contrats « bleus », efficaces pour développer une pêche durable et responsable, seront pérennisés pour un montant de 10 millions ; 4,5 millions seront affectés à la ressource halieutique ; 12 millions seront consacrés au plan de sortie de flotte avec une priorité donnée à la pêche au thon rouge et à l’anguille.

L’ostréiculture, qui traverse une crise considérable, bénéficiera, en 2011, de 30 millions d’euros, et 20 millions d’euros sont prévus pour la recherche et le navire du futur.

Cependant, certaines préoccupations exprimées par nos professionnels doivent trouver des réponses.

Ainsi, les armements, lourdement affectés par le remboursement des aides accordées par le fonds de prévention des aléas de la pêche (FPAP) entendent respecter leurs obligations, mais réclament des délais de paiement. Ils espèrent – et ce serait justice – que les sommes issues des plateformes off shore et affectées à la pêche permettront de répondre aux contraintes financières qui leur sont imposées. Nos équipages naviguent sur des bateaux dont la moyenne d’âge est de vingt-cinq ans. Leur sécurité, comme l’attrait de la profession pour nos jeunes, exige un plan précis et des échéances connues pour le renouvellement des flottilles. L’espérance née de la perspective du navire du futur ne doit pas porter atteinte, dans le cadre de la sécurité évoquée, à la poursuite des rénovations nécessaires que le tarissement des SOFIPECHE a rendu problématique.

Ce projet de budget possède, par ailleurs, le mérite de prendre en compte l’actuel drame de la conchyliculture. Ainsi les trois directions choisies sont-elles prometteuses puisqu’elles ont vocation à mettre en culture des souches résistantes, sélectionnées dans les actuelles souches triploïdes, ou bien issues de nos écloseries de naissains résistants, ou encore de sélections génétiques d’espèces résistantes provenant d’élevages français ou étrangers. Les professionnels attendent, dans un climat d’inquiétude, que leur coopération avec l’IFREMER donne naissance à un calendrier compatible avec leur survie.

La pérennisation de la formation de nos équipages est fondamentale. Nos écoles des pêches offrent une deuxième chance dans le cadre des formations continues. Il n’est pas acceptable que cette irremplaçable formation souffre d’incertitudes, voire d’interruptions, dans son financement.

Quelle réponse apporter à l’aquaculture française, pionnière en termes d’établissement de process pour de nombreuses espèces, reconnue et convoitée pour sa fourniture d’alevins dans le monde entier et qui, pourtant, voit son avenir compromis, non seulement par les conditions climatiques que nous ne pouvons maîtriser, mais aussi par l’absence d’espace nécessaire à son expansion ?

La filière pêche constitue un tout : la construction des navires, la formation des équipages, la rénovation des bateaux, la qualité des produits sur laquelle repose la responsabilité économique de toute filière. Comment sécuriser l’indispensable mariage de nos criées et les circuits incontournables de la grande distribution, majoritaire sur le marché ?

La naissance de France Filière Pêche, heureuse initiative basée sur le volontariat, fournira-t-elle la réponse attendue ?

Notre détermination doit correspondre aux choix les mieux appropriés à la situation. Nous devrons aussi veiller à leur bonne application.

M. Germinal Peiro. Personne ne saurait considérer comme terminée la crise agricole de 2009. Chacun peut le vérifier sur son territoire : la crise s’ancre durablement. Elle ne date pas, d’ailleurs, de 2009, comme le prouve la diminution drastique du nombre d’exploitations depuis quelques années. Dans mon département, entre 2000 et 2007, ce nombre a diminué de 24 %, soit 1 500 exploitations perdues. Cette évolution s’accompagne forcément de pertes d’emplois, comme de pertes économiques et sociales.

La crise du lait existe toujours. Avec un prix annuel moyen de 330 euros la tonne, bon nombre d’exploitations ne parviendront pas à équilibrer leurs comptes à la fin de l’année. La crise de l’élevage sévit encore et les fluctuations, totalement incontrôlées sur le plan mondial, du prix des céréales, ne font que l’aggraver. S’ajoute à cela la menace d’accords avec les pays du MERCOSUR, qui auraient pour effet d’augmenter fortement les importations de viande bovine en Europe au cours des prochaines années, ou même des prochains mois. Dans ces conditions, tout un pan de l’élevage national risque de se trouver en grand danger.

Si, globalement, le projet de budget progresse de 1,8 %, nous savons qu’il ne s’agit que d’un effet d’optique en raison de la réintégration de mesures jusqu’ici financées par des taxes affectées : je pense notamment à l’exonération de la part patronale pour l’emploi des salariés occasionnels. Dans presque tous les domaines, les crédits de l’agriculture diminuent fortement, comme le ministre nous l’a confirmé.

Pour la gestion des crises et des aléas à la production, le recul est très net : de 73,49 %, ce qui confirme notre entrée dans l’ère de l’auto-assurance, et donc que la solidarité nationale à l’égard des agriculteurs en cas de calamités disparaît peu à peu.

L’action 13 « Appui au renouvellement et à la modernisation des exploitations agricoles », permet de repérer les crédits alloués aux jeunes agriculteurs. Qu’en est-il de l’engagement pris par le Président de la République de sanctuariser, dans le budget de 2011, 350 millions d’euros pour aider à leur installation ? Cette somme n’apparaît nulle part dans les documents budgétaires. En dépit des effets d’annonce, l’action accuse une baisse de 21,46 %. Le syndicat majoritaire relève que la diminution des crédits d’accompagnement de la politique d’installation, de plus de 42 % entre 2010 et 2011, suscite des interrogations sur les réelles intentions de l’État. Je ne mets pas, monsieur le ministre, votre bonne foi en doute, mais je vous demande de nous éclairer sur ce point.

La gestion équilibrée des territoires fait également apparaître une diminution de moyens, même si l’action se trouve relevée sur le plan budgétaire par l’intégration des taxes qui étaient déjà affectées.

Je voudrais enfin lancer un cri d’alarme sur la situation de la filière tabacole, qui concerne 2 500 exploitations dans notre pays. Dix mille emplois sont en jeu. Le Gouvernement a prévu de relever le prix des cigarettes de 6 % dans quelques jours, ce qui rapportera 820 millions d’euros dont 750 entreront dans les caisses de l’État et 120 dans celles des industriels et des distributeurs. Mais rien, en revanche, n’ira aux producteurs. L’Union européenne a, de fait, baissé de moitié l’aide à la tabaculture.

Cette filière va disparaître si nous ne trouvons pas les moyens d’affecter une partie de la fiscalité sur les tabacs à leur production.

M. André Chassaigne. Il me faut d’abord souligner le décalage entre la situation de notre agriculture et de nos agriculteurs et l’évolution budgétaire confirmant l’absence de prise en compte des problèmes réels, absence comparable à celle du ministre lors du sommet de l’élevage de Clermont-Ferrand.

Le projet de budget diminue de 1,77 % en autorisations d’engagement, ce qui représente 3,5 milliards de baisse effective. Deux programmes sont en forte diminution : le 206, « Sécurité et qualité sanitaires de l’alimentation », avec 51 millions d’euros de moins qu’en 2010, et le 215, « Conduite et pilotage des politiques de l’agriculture », regroupant les moyens budgétaires de fonctionnement de l’administration centrale et des directions déconcentrées, avec une baisse vertigineuse des crédits de paiement de 87 millions d’euros, même si une partie de la baisse est imputable à la fin de la gestion des farines animales. Cette baisse consiste principalement en des coupes sombres dans les dépenses des directions départementales.

La stratégie que vous revendiquez vise à démanteler tous les moyens d’application de la politique publique agricole sur le terrain afin de concentrer les subsides restant sur les dépenses d’interventions et d’investissement en vue d’adapter le monde agricole aux exigences du marché. Il en résulte, à terme, un affaiblissement considérable des leviers de la puissance publique pour impulser toutes les politiques agricoles, agro-environnementales, de formation et de contrôle sanitaire. Vous répondez ainsi aux attentes de la Commission européenne et du triumvirat OMC-FMI-Banque mondiale. Vous appliquez une politique d’ajustements structurels que tous les pays du Sud ont connue et qui a fait plonger leurs secteurs agricole et alimentaire.

La très forte baisse, au sein du programme 154, des crédits de l’action « Appui au renouvellement et à la modernisation des exploitations agricole », pour 65 millions d’euros, ne signale-t-elle pas, une nouvelle fois, que vous avez choisi d’accélérer la délocalisation de l’agriculture de notre pays tout en poussant à la concentration afin que seules les exploitations s’ajustant aux cours du marché mondial puissent se maintenir ?

Comment comprendre que vous vous félicitiez de la sanctuarisation des financements pour l’installation des jeunes agriculteurs en 2011 alors que ceux-ci ne couvrent pas les besoins, face à la très forte progression des coûts d’installation et des prix dérisoires des productions, qui entraînent les jeunes agriculteurs dans de graves difficultés ?

Le programme 206, « Sécurité et qualité sanitaires de l’alimentation », subit une baisse de ses crédits de paiement de 51 millions d’euros par rapport à 2010, soit une diminution de 9 %, dont une réduction de 35 millions d’euros pour la seule action « Mise en œuvre de la politique de sécurité et de qualité sanitaires de l’alimentation ». Est-ce là une bonne façon d’envisager une grande politique de l’alimentation, telle que présentée dans la LMAP, quand, dans le même temps, la part des produits importés, avec des exigences sanitaires douteuses, ne cesse de croître ?

Les dépenses de personnel connaissent une coupe de 48 millions d’euros. Or les agents du ministère mettent en place les politiques publiques, sont au service des agriculteurs, des pêcheurs et des forestiers, et forment les futurs entrants dans ces métiers. Votre seule motivation est-elle la discipline budgétaire ?

Vous voyez dans la rénovation de la voie professionnelle de l’enseignement technique et agricole, avec le baccalauréat professionnel en trois ans, un moyen « de générer un gain de 280 emplois à temps plein entre 2011 et 2012 », suivi d’un second plan équivalent pour 2014. Votre logique budgétaire est-elle de former mieux ou de former moins en supprimant du personnel enseignant et non-enseignant ? Alors que l’enseignement agricole souffre depuis longtemps de budgets insuffisants, avec des contractuels par milliers, est-ce votre seule réponse pour l’avenir ?

L’inconnu pesant sur l’avenir des groupements d’intérêt public (GIP) dans la filière cheval, notamment du cheval de trait, traduit une perte de la maîtrise publique sur toute la filière équine, pourtant déjà mal en point. Dans ces conditions, quelles garanties proposez-vous aux personnels des haras et aux éleveurs ?

La France rurale de 2030 doit-elle, selon vous, se composer de 100 000 « agri-managers » agissant dans des bassins hyper-spécialisés et dépendant des importations pour l’alimentation animale ?

Où se trouve donc l’agriculture durable annoncée par le Grenelle de l’environnement ?

M. Thierry Benoit. Je tiens d’abord à saluer, monsieur le ministre, votre connaissance parfaite des sujets dont vous avez la responsabilité.

Le précédent orateur n’a rien vu de bon dans votre projet de budget, même si, dans un contexte financier très difficile, vous parvenez à augmenter vos crédits, qui dépassent les 5 milliards d’euros, ce qui est considérable, comprenant notamment un plan de soutien à l’agriculture de plus de 1 milliard, ainsi que des plans stratégiques de développement des filières.

Notre principale préoccupation concerne le revenu des agriculteurs. Il n’y que cela qui vaille, pour 2011 et pour les années suivantes. Dans la droite ligne de votre prédécesseur, vous n’avez eu de cesse de travailler et d’interpeller les différents acteurs sur la question. À ce titre, j’attends beaucoup du rôle de l’Observatoire des marges et des prix. Je tiens à dénoncer ici le manque de transparence dans la répartition de la valeur, qui devrait être plus équitable pour les producteurs. On ne peut plus accepter cette disparité entre les prix d’achat des produits et des matières premières aux agriculteurs, aux éleveurs et aux arboriculteurs, et les prix pratiqués auprès du consommateur. C’est inadmissible !

Je rappelle aussi la nécessité de réunir, comme vous l’avez déjà fait, les différents acteurs du circuit que sont les producteurs, les transformateurs et les distributeurs. Il faudra sans doute, pour cela, tordre le bras à certains de ces derniers, avec une pensée particulière pour le système bancaire.

L’année 2011 sera une grande année pour la France. Avec les agriculteurs, j’attends beaucoup de la présidence française, dans quelques jours, du G8 et du G20. Le Président de la République présidera ces deux groupes et nous avons un Français à la direction du Fonds monétaire international. J’espère donc que seront traités la spéculation relative aux matières premières, la régulation et la transparence financière, le secret bancaire et les paradis fiscaux.

Tout cela pourrait nous sembler bien loin des questions agricoles, mais les agriculteurs et leurs revenus sont directement impactés par des décisions pouvant intervenir dans le cadre du G8 et du G20.

Pensez-vous, monsieur le ministre, que nous pourrions faire un cas à part de l’agriculture dans l’Organisation mondiale du commerce ?

Je voudrais aussi vous interroger sur votre vision de l’avenir du secteur du cheval. Je ne parle ni de l’équitation, ni des chevaux de cirque ou de course, mais de la filière de l’élevage, plus particulièrement des chevaux de trait.

Les haras font partie de l’histoire. Nous ne pouvons plus fonctionner comme du temps de Napoléon. Comment voyez-vous l’organisation des haras ? Les stud books jouent un rôle important : j’ai cru comprendre que vous alliez procéder à des réductions draconiennes de leur financement. Comment va-t-on assurer la pérennité de la filière pour certaines races ? Je pense à celles du cheval de trait breton, de l’auxois, du boulonnais, du percheron, du cob breton, dont certaines sont parfois en voie de disparition ?

M. Bruno Le Maire, ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche. Monsieur Forissier, quand j’ai reçu un des représentants de la forêt privée, nous sommes convenus que nous ferions le point dans six mois sur les dispositifs assuranciels. S’ils ne fonctionnent pas, je suis prêt à les améliorer, mais, la loi ayant été adoptée en juillet, je pense que nous pouvons nous laisser encore un peu de temps avant d’intervenir.

Monsieur le président, le dispositif prévu dans la loi sur les retraites en matière de régime complémentaire obligatoire (RCO) ne concerne effectivement que les futurs partants, c’est-à-dire qu’il porte sur le flux et non sur le stock. En revanche, les retraités actuels qui ont cotisé moins de dix-sept ans au régime de chef d’exploitation, ce qui est le cas de beaucoup de conjoints, bénéficieront d’une valorisation, mesure qui représente pour l’État un coût de 19 millions.

Quant aux carburants – sujet dont s’est inquiété M. Xavier Beulin, au nom de Sofiprotéol –, la décision ne relève pas du ministère de l’agriculture. J’espère que les mesures que vous avez citées ont été prises à titre temporaire, pour résoudre les problèmes d’approvisionnement qui se posent actuellement.

Monsieur Guédon, je ne reviens pas sur la nécessité de mieux organiser le secteur de la pêche. Il est également indispensable de mettre en place une meilleure collaboration entre scientifiques et pêcheurs. Mardi dernier, à Luxembourg, quand le Conseil de l’Union européenne des ministres de l’agriculture et de la pêche a examiné le problème du thon rouge, j’ai défendu la position du Gouvernement français, qui souhaite suivre à la lettre les prescriptions des scientifiques de la Commission internationale de la conservation des thonidés de l’Atlantique (CICTA). Pourquoi, alors qu’on écoute les scientifiques quand ils plaident pour la réduction des quotas, serait-on moins attentif quand ils annoncent que les stocks ont partiellement commencé à se reconstituer et qu’un quota de 16 500 tonnes serait tout à fait envisageable ? Il est raisonnable de s’en remettre à leur expertise pour assurer le renouvellement de la ressource halieutique.

Je suis très attentif à la filière conchylicole. Je me suis d’ailleurs battu pour remplacer le test de la souris par le test physicochimique. À présent que j’ai eu gain de cause, je veux aider la filière à sortir de la crise liée à la surmortalité des jeunes huîtres. Dans certaines d’exploitation, 75 % des jeunes huîtres ne parviennent plus à grandir, ce qui interdit de les commercialiser. Le manque à gagner est considérable. Les années précédentes, nous avons déjà dépensé 85 millions pour soutenir la filière. Sur la décision du Premier ministre, nous procéderons pour l’année 2009 au classement en calamité agricole au titre de la surmortalité des jeunes huîtres.

Outre ce geste de soutien à la filière, j’ai conclu les assises de la conchyliculture, il y a quelques jours, en retenant certaines mesures qui aideront à reconstituer les stocks et à créer une souche plus résistante, à moins que l’on n’importe une autre souche du Japon. Il faut se battre d’arrache-pied si l’on veut éviter la disparition de certaines activités. Parce que je n’envisage pas le territoire français sans une filière conchylicole forte, je recourrai à tous les moyens nécessaires pour la maintenir à niveau : création d’une souche plus résistante, amélioration de la qualité de l’eau, aide en trésorerie pour passer les moments difficiles et maintenir des exploitations qui ne sont ponctuellement plus rentables.

Monsieur Peiro, qu’il n’y ait pas d’ambiguïté sur le programme 154 « Économie et développement durable de l’agriculture, de la pêche et des territoires » : l’augmentation des crédits du ministère, qui s’effectue au bénéfice des agriculteurs, résulte à la fois d’une augmentation de crédits et d’économies réalisées sur le programme. Les unes proviennent de l’arrivée à échéance de dispositifs antérieurs ; les autres, de la réduction des effectifs ou des crédits de fonctionnement. Le plan de soutien exceptionnel à l’agriculture n’a pas été reconduit, ce qui a permis d’économiser 150 millions d’euros. Par ailleurs, sur le plan agro-environnemental, je n’ai pas prolongé la mesure rotationnelle, laquelle représentait 135 millions en autorisations d’engagement, ce qui représente une autre économie.

En revanche, nous avons consacré les moyens nécessaires au maintien de la prime herbagère agro-environnementale (PHAE) et des indemnités compensatoires de handicaps naturels (ICHN), ainsi qu’au maintien et au renouvellement de tous les contrats PHAE. Nous avons même reconduit par anticipation ceux qui devaient arriver plus tôt à échéance, afin qu’ils se prolongent jusqu’en 2013, date à laquelle la PAC renouvellera ses perspectives financières. Nous avons ainsi garanti à chaque exploitant le bénéfice la PHAE.

M. André Chassaigne. C’est la moindre des choses !

M. Bruno Le Maire, ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche. Certes, mais la mesure était assez lourde sur le plan budgétaire. J’ajoute – ce qui me donne l’occasion de rendre hommage à mes services – qu’elle a demandé une organisation très particulière.

J’en viens à vos remarques sur le domaine international. Je le répète : je ne suis pas favorable à la conclusion d’accords entre l’Union européenne et le MERCOSUR tant que le France ne disposera d’aucune garantie de réciprocité pour les productions agricoles avec les pays qui le composent. Je refuse par ailleurs que l’agriculture soit systématiquement la variable d’ajustement des accords commerciaux européens. On ne peut pas échanger agriculture contre services. Je trouve excellent que l’on demande à nos agriculteurs de respecter des règles environnementales, d’organiser la rotation de prairies, permanentes ou non, d’intégrer à leurs exploitations des contraintes d’alimentation ou de ne pas donner d’antibiotiques à leurs bêtes, bref de se contraindre en matière de production animale, mais on doit leur garantir en échange que les produits importés proviendront d’exploitations soumises aux mêmes règles. Le bien-être animal que prennent en compte nos agriculteurs –  notamment les éleveurs de porcs de Normandie, de Bretagne ou du Nord, qui devront remettre toutes leurs exploitations à niveau avant 2013 pour que les truies gestantes disposent de 2,5 mètres carrés –  n’est pas respecté dans tous les pays. Or la réciprocité doit être intangible en matière agricole.

Je vous confirme qu’il n’y aura pas de baisse des crédits consacrés à l’installation des jeunes agriculteurs, qui, conformément à l’engagement du Président de la République, seront sanctuarisés à hauteur de 350 millions. La dotation aux jeunes agriculteurs s’élève à 55 millions, les prêts bonifiés à 88,5 millions, les crédits du fonds de communication pour l’installation à 11,5 millions, ceux des parcours de formation des jeunes agriculteurs à 3 millions. Si l’on ajoute les sommes versées aux associations départementales pour l’aménagement des structures des exploitations agricoles et les exonérations fiscales liées à certaines dépenses, on atteint un total de 342,6 millions.

L’agriculture française est faite d’une multiplicité de petites filières qui ne doivent pas disparaître. La filière tabacole en fait partie. C’est pourquoi, monsieur Chassaigne, je vous propose, ainsi qu’à M. Herth, de vous recevoir le 3 novembre, jour prévu pour la manifestation. Le dossier n’est pas simple, le tabac n’étant pas un produit particulièrement porteur, mais la filière représente beaucoup d’emplois, notamment dans le Sud-Ouest.

Par ailleurs, avec le sens de la mesure qui vous caractérise, vous avez fait de mon budget une description épique, sur laquelle je ne reviendrai pas. Si je ne me suis pas rendu à Cournon, j’irai prochainement dans le Massif central afin de discuter à nouveau avec les éleveurs de la situation de la filière, qui représente pour moi une priorité absolue. Les agriculteurs qui ont ironisé parce que je me suis rendu en Inde doivent comprendre que leurs intérêts se défendent aussi bien à Bruxelles que dans les grands pays émergents. L’Inde est le seul membre du G20 qui ait adopté à l’OMC la même position que la France pour les accords agricoles. Cet allié précieux nous permet d’éviter la signature d’un accord qui serait défavorable à notre agriculture. Le rendez-vous avec son vice-premier ministre ne pouvait donc pas être remis.

Je reconnais volontiers que je souhaite adapter l’agriculture française aux exigences du marché. J’assume ce point de divergence entre nous, car in fine c’est toujours le consommateur qui décide, et non le pouvoir politique. Aucun ministre de l’agriculture n’est en mesure de s’exonérer des règles du marché ni de garantir un prix de 400 euros à la tonne de lait. Une telle mesure ruinerait d’ailleurs aussitôt toutes les exploitations laitières françaises, puisque les industriels laitiers achèteraient à l’Allemagne du lait à 280 euros la tonne. L’agriculture française doit être capable de résister au marché, à condition que celui-ci soit régulé et encadré.

(M. Serge Poignant, vice-président de la Commission des affaires économiques, remplace M. le président Patrick Ollier.)

M. Bruno Le Maire, ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche. Au cours des derniers mois, nous avons réussi à faire évoluer la Commission européenne, qui était d’abord favorable à une totale libéralisation du marché agricole, et à la ramener à la raison, qui plaide pour une régulation du marché. Celle-ci suppose transparence, maintien de l’outil d’intervention et capacité d’intervenir quand le marché ne fonctionne pas et que les prix s’effondrent. S’il est un ministre de l’agriculture qui s’est battu en 2009 et qui a fait le tour de tous les pays européens pour obtenir un large soutien obligeant la Commission à intervenir, c’est moi. Je ne crois pas aux seules forces du marché, pas plus qu’à la main invisible qui répartirait justement les revenus, mais je suis sûr qu’un marché régulé et encadré est la meilleure solution pour notre agriculture.

Si les crédits du programme 206 « Sécurité et qualité sanitaires de l’alimentation » baissent fortement en crédits de paiement par rapport à 2010, c’est sous l’effet du transfert du financement et de la gestion de l’équarrissage vers les filières professionnelles, de la fin de l’élimination des farines animales, et du transfert vers les services du Premier ministre des crédits mutualisés des directions départementales interministérielles, désormais regroupées. Pour autant, nous ne renonçons pas à la sécurité et à la qualité sanitaires de l’alimentation. À cet égard, j’ai déjà fait allusion au rôle de l’ANSES.

La rénovation de la voie professionnelle répond, à mon sens, à la préoccupation des jeunes, puisqu’elle leur permettra d’accéder plus rapidement à un diplôme professionnel et revalorisera le bac professionnel par rapport au bac général, ce qui est essentiel.

Monsieur Benoit, les choix agricoles ne s’effectuent pas uniquement au niveau français. Il faut, en la matière, une cohérence entre les décisions nationales, européennes et mondiales. J’ai fait le choix d’un marché régulé en sachant que le secteur agricole est le moins régulé qui soit au niveau mondial, mais je trouve inacceptable qu’on se donne tant de mal dans le domaine financier, pour définir des ratios prudentiels en matière bancaire et signer des accords de Bâle I, II ou III, alors qu’aucune décision comparable n’a été prise pour l’agriculture, qui concerne des millions de paysans à travers le monde. Je me félicite que le Président de la République ait placé la régulation des marchés agricoles des matières premières au cœur des débats du G20, car on ne peut continuer ainsi, sans qu’un encadrement vienne mettre fin à une spéculation scandaleuse. En juillet, le prix de la tonne de blé était de 115 euros. Il a suffi d’une sécheresse massive en Russie, suivie d’une décision unilatérale de la part des autorités russes d’interdire l’exportation de blé –  dont ce pays est le premier producteur mondial –  pour le faire monter à 225, voire à 240 euros.

Une telle situation oblige à réagir. J’ai donc formulé plusieurs propositions concrètes aux autorités américaines, indiennes et chinoises. Je me rendrai bientôt en Russie pour les présenter.

La première consiste à demander davantage de transparence en matière de production et de stocks. Actuellement, les outils statistiques de calcul des stocks des matières premières agricoles diffèrent d’un pays à l’autre, ce qui interdit toute évaluation précise.

La seconde proposition vise à créer une coordination entre les États du G20 sur les grandes décisions agricoles. Il n’est pas admissible que la Russie ait pu prendre l’an dernier une décision unilatérale. D’ailleurs, les BRIC –  Brésil, Russie, Inde, Chine –  ont décidé à leur niveau de coordonner leurs actions en matière agricole. Pourquoi ne pas agir ainsi au niveau mondial ?

La troisième proposition a trait à une meilleure organisation du marché des matières premières agricoles, afin de limiter la spéculation. Ayant assisté récemment à une séance de la bourse aux échanges de Chicago, j’ai pu constater que, pour deux échanges concrets de matières premières, on en compte 2 000 purement virtuels. Le Gouvernement souhaite encadrer les opérateurs sur le marché des matières premières agricoles. Si nous les connaissons mieux, il sera plus facile de réguler leurs actions et d’encadrer les marchés de contrats de gré à gré, particulièrement spéculatifs, qui favorisent aujourd’hui l’envolée du cours des matières premières agricoles. La stabilisation de leur prix est une priorité absolue, dans un monde où la volatilité des cours est un drame pour les paysans du monde entier.

J’espère que les consultations que je conduis, puis la réunion au printemps, à Paris, des ministres de l’agriculture du G20 et, enfin, la décision des chefs d’État, qui s’ensuivra, fin 2011, déboucheront sur des réponses concrètes.

M. le président Jérôme Cahuzac. Puisque vous avez fait référence à l’encadrement des marchés, je rappelle que l’Autorité des marchés financiers, l’AMF, a pour responsabilité de veiller à l’absence de spéculation sur les marchés agricoles, notamment alimentaires. Elle a aussi pour tâche de surveiller les agences de notation, mission à laquelle un équivalent temps plein avait été affecté. Ce poste vient de lui être retiré, ce qui lui interdit d’effectuer cette tâche, puisqu’elle ne dispose pas de personnel supplémentaire. Pouvez-vous alerter Mme Lagarde sur la situation ? Je pense que nous sommes tous d’accord pour que l’AMF puisse jouer son rôle.

M. Serge Poignant, vice-président de la Commission des affaires économiques. Je rappelle, monsieur le ministre, que vous avez obtenu le soutien de la Commission des affaires économiques sur la régulation et sur l’organisation du marché des matières premières.

Par ailleurs, vous avez insisté sur le partage de la valeur avec le producteur, ce qui me semble essentiel. Vous avez d’ailleurs commandé un rapport à ce sujet à M. Philippe Chalmin. Vous savez que l’urgence est partout, non seulement dans la filière viande mais aussi dans la viticulture, à laquelle je suis particulièrement attaché.

Enfin, dès lors que nous voulons une agriculture compétitive et engagée dans le développement durable, le soutien à la recherche, notamment à l’INRA, me semble essentiel.

M. Jean Gaubert. Étant donné la situation actuelle de l’agriculture, si la gauche était au pouvoir, il n’y aurait plus de permanence de députés ! C’est une observation que je fais sans plaisir, car nous n’aimons pas la violence.

Pour l’action « Mise en œuvre de la politique de sécurité et de qualité sanitaires de l’alimentation », on constate la disparition de 80 ETPT, qui, jointe à la diminution des effectifs dans les abattoirs, où l’on pratique apparemment plus d’autocontrôle que de contrôle, remet en cause non seulement la sécurité de nos produits mais aussi nos exportations, surtout si l’on songe à la manière dont sont effectués les audits à l’étranger. Les Russes, par exemple, sont beaucoup plus exigeants chez nous que chez eux.

J’entends également des propos très inquiétants concernant l’effet de la RGPP sur la fongibilité des personnels. Ceux du ministère de l’agriculture peuvent-ils être utilisés à d’autres tâches dans les départements ? Des lettres de mission ont-elles été adressées aux préfets au titre des actions qui dépendent de votre ministère ?

Les crédits en faveur des jeunes agriculteurs sont-ils réellement sanctuarisés ? Vous avez avancé le chiffre de 350 millions, mais j’ai beau compter et recompter, je n’en trouve que 310,8. Où sont les 40 millions qui manquent ?

Enfin, je fais mienne la question de M. Benoit sur la filière équine, à laquelle vous appliquez manifestement le « régime jockey ».

M. Yannick Favennec. La loi de modernisation de l’agriculture votée en juillet a transféré vers les chambres d’agriculture les compétences des ADASEA en matière d’installation et de transmission. Bien qu’admise dans son principe par les personnels des chambres d’agriculture et des ADASEA, cette disposition, qui entraîne une réorganisation des missions et des services, s’accompagne de l’annonce d’une diminution importante et rapide des crédits de l’État. L’enveloppe passerait de 14,7 millions d’euros à 8 millions en 2011, puis à 2 millions en 2012, pour disparaître tout à fait en 2013. Si, durant les dernières années, les services d’installation des différents départements, intégrés ou non aux chambres d’agriculture, ont fait face à la diminution des crédits de l’État, cette nouvelle baisse ne leur permettra plus de s’acquitter de leurs missions.

La diminution drastique des moyens affaiblit le soutien à l’installation. Or la reprise et la création d’entreprise sont le fer de lance de la dynamique agricole, et représentent un axe stratégique pour préserver et renforcer notre agriculture. Lors de son déplacement dans l’Aveyron, le 6 juillet, le Président de la République a annoncé que les financements de l’État en faveur de l’installation des jeunes agriculteurs seraient sanctuarisés en 2011 et que l’État maintiendrait son effort, mais les marges de manœuvre des services d’installation sont aujourd’hui limitées et la mise en œuvre de leurs missions n’est plus garantie, quand bien même seraient-elles transférées vers les chambres d’agriculture. Dans mon département de la Mayenne, le financement de l’État représentait 330 000 euros en 2010, enveloppe qui permettait de mobiliser 170 000 euros auprès de l’Union européenne. Globalement, c’est donc 500 000 euros qu’il faudra compenser. C’est pourquoi il est indispensable de maintenir un financement permettant de garantir l’accompagnement de la politique d’installation et de transmission.

Enfin, dans le projet de loi portant réforme des retraites, les aménagements concernant le régime des agriculteurs constituent une véritable avancée, mais il y manque une disposition sur le calcul de la retraite. Celui-ci prend en compte, dans le régime général, les vingt-cinq meilleures années, mais il s’effectue sur l’ensemble de la carrière des agriculteurs. En juin, vous vous étiez montré ouvert à la demande légitime du monde agricole. Où en est-on aujourd’hui ?

M. François Brottes. M. Gaymard a rédigé un excellent rapport qui appelle à davantage de sérénité en ce qui concerne la forêt, même si, sur le plan financier, ce secteur ne semble pas complètement stabilisé. Certaines questions demeurent pourtant.

Quel est l’avenir des missions régaliennes du service de restauration des terrains de montagne, qui n’aura sans doute plus les moyens d’entretenir les ouvrages qui nous protègent des risques naturels ?

J’en viens à une question technique : la nomination du prochain directeur général de l’Office national des forêts s’effectuera-t-elle selon le cinquième alinéa de l’article 13 de la Constitution ? Autrement dit, l’avis des Commissions permanentes compétentes de chaque assemblée sera-t-il sollicité ?

Je terminerai par des questions éthiques et financières.

Le 29 octobre 2009, le ministre du budget a donné son accord pour que soit aliénée une partie du domaine forestier national. Le montant de cette transaction – 2,5 millions pour 58 hectares – a-t-il été versé à la caisse de l’Office national des forêts ou dans celle de l’État ? Le Gouvernement entend-il continuer d’aliéner le domaine forestier national pour améliorer l’ordinaire de l’Office ? Sur quelle base légale a-t-on pu ainsi aliéner la forêt de Compiègne ?

M. Robert Lecou. Je vous remercie, monsieur le ministre, pour la clarté de votre propos, pour votre discours de vérité et pour votre engagement en faveur d’une agriculture qui place les producteurs au cœur de ses préoccupations. Ceux-ci ne devant pas être la variable d’ajustement des acteurs du circuit, c’est en leur faveur qu’il faut rééquilibrer les prix. Agriculteurs et pêcheurs doivent être justement rémunérés pour un travail qui, au-delà de l’autosuffisance alimentaire, est essentiel, non seulement au commerce extérieur, mais à l’entretien et à l’aménagement de nos territoires. Au cours des incendies survenus cet été dans l’Hérault, qui ont détruit plus de 3 000 hectares, on a observé que, si les friches favorisent la propagation de l’incendie, la culture de la vigne et de l’olive arrête le feu. Faut-il rappeler que des villages ont été sauvés in extremis ?

Je vous remercie de l’action que vous menez en faveur de la filière conchylicole, qui subit une terrible crise due à la surmortalité des naissains. Au-delà de ce soutien, la solution viendra sûrement des chercheurs, qui trouveront une souche résistante. J’apprécie que vous reconnaissiez leur travail, particulièrement sur le thon rouge. Le dialogue entre pêcheurs et écologistes sera plus facile s’il s’appuie sur des conclusions scientifiques, comme le montre le rapport que je vous ai transmis récemment.

Enfin, quand je me rends de Lodève à Montpellier, je vois de plus de terrains en friche et de moins en moins de vignes, et, dans mon département, je rencontre de moins en moins de jeunes qui ont envie de s’engager, alors même que la viticulture, surtout dans le Languedoc-Roussillon, a connu des progrès extraordinaires. Comment peut-on soutenir la filière ?

Je me souviens de la réponse que m’avait faite le Président du Chili dans cette même salle Lamartine, où nous siégeons actuellement : « Notre vin est bon, et nous le vendrons avec toute notre dynamique commerciale. » Face à une telle agressivité, les Français doivent être accompagnés.

La taxe foncière sur le non-bâti pour les surfaces en vignes sera-t-elle à nouveau dégrevée ? La filière a besoin de ce soutien.

Enfin, en matière de lutte contre le stress hydrique, l’irrigation est une solution, mais les aides, notamment celles de FranceAgriMer, sont parfois bien complexes. Pouvez-vous nous apporter quelques précisions à ce sujet ?

Mme Frédérique Massat. Il est dommage que les indemnités compensatoires de handicaps naturels (ICHN), qui sont structurantes pour l’agriculture de montagne, ne connaissent aucune augmentation. D’autre part, leurs règles d’éligibilité méritent d’être revues. Elles créent en effet une difficulté technique aux éleveurs de montagne transhumants, puisqu’elles prévoient, durant les épizooties, le confinement des cheptels, parfois pendant plusieurs saisons. Est-il possible de trouver une solution à ce problème ?

Les crédits du programme de maîtrise des pollutions d’origine agricole (PMPOA) passent de 12 à 7 millions d’euros, alors que des investissements importants ont été réalisés par les agriculteurs ou sont en cours. Cette révision compromet la survie de notre agriculture et de notre environnement.

J’appelle votre attention sur le développement économique de la forêt. Les crédits de la filière sont en baisse, alors que des efforts importants sont consentis sur les territoires par des acteurs tant privés que publics. Les efforts ont cependant besoin d’être structurés. L’organisation est loin d’être finalisée. Il importe par conséquent de maintenir les crédits de la filière, qui offre d’importantes perspectives de développement.

Je ne reviendrai pas sur la baisse des crédits du programme 206 « Sécurité et qualité sanitaires de l’alimentation », si choquante dans le contexte que nous connaissons, mais je vous alerte sur le financement des travaux d’amélioration pastorale. Depuis avril 2010, une circulaire impose de retirer des dépenses éligibles les dépenses TTC. Les associations foncières pastorales auront dans ces conditions du mal à poursuivre leurs investissements, ce qui risque de créer des problèmes aux éleveurs en montagne.

M. Jacques Remiller. Dans l’introduction du livre Regards sur l’avenir de l’agriculture, qui est de grande qualité, vous vous demandez si notre agriculture a un avenir. En ma qualité de président du groupe d’études « Fruits et légumes » de l’Assemblée nationale, je vous interroge sur l’avenir de cette filière fruits et légumes, qui a particulièrement souffert en 2009 : quelles mesures allez-vous prendre en sa faveur ?

M. Kléber Mesquida. Vous nous affirmez que votre budget augmente de 1,8 %, mais le changement de périmètre empêche de comparer les chiffres de cette année et ceux de l’an dernier. M. Gaubert et M. Peiro l’ont signalé : vous avez budgété des mesures auparavant financées par des taxes affectées ; or, du fait de la RGPP, les moyens sont en baisse.

Ma première question portera sur l’action n° 12 « Gestion des crises et des aléas de production », qui accuse un fort recul de 73 % et ne représente plus que deux tiers du total du programme 154. L’appui au développement de l’assurance privée est en recul. Autant dire que l’on entre dans l’ère de l’auto-assurance et, par conséquent, de la fin des solidarités, notamment avec les agriculteurs en cas de calamité.

La notion de crise et d’aléa de production concerne à la fois la production et les prix. Dans la viticulture, l’État accompagnera-t-il la régulation de la production par l’irrigation raisonnée, pour faire face au stress hydrique ? Par ailleurs, pensez-vous organiser une table ronde avec les metteurs en marché pour établir des prix planchers, ce qui n’aurait aucune incidence budgétaire ?

J’en viens à l’action 13, « Appui au renouvellement et à la modernisation des exploitations agricoles ». Le Président de la République avait annoncé la sanctuarisation de 350 millions d’euros. À vous entendre, c’est chose faite. Cependant, dans le « bleu » budgétaire, le total des chiffres atteint 216,8 millions, auxquels s’ajoutent les 94 millions de crédits communautaires, soit un total de 310 millions. Autant dire que nous sommes loin de la somme annoncée.

Dans un contexte où il importe de soutenir l’agriculture, alors que la baisse constatée en 2009 et en 2010 – de 17,1 % – est sans précédent, que comptez-vous faire ?

Je terminerai par une question sur le programme 206, « Sécurité et qualité sanitaires de l’alimentation ». Face à la baisse des moyens humains, comment comptez-vous conduire une politique de contrôle sanitaire aux frontières, alors que les importations contiennent des produits interdits en France ?

M. Philippe Armand Martin. Vous envisagez de transférer, à compter de 2011, le programme « Enseignement technique et agricole » de la mission « Enseignement scolaire » vers la mission « Agriculture, pêche, alimentation, forêt et affaires rurales ». Les représentants du monde rural s’inquiètent des conséquences de ce transfert budgétaire sur le financement de l’enseignement technique et agricole, et sur son positionnement au sein du service public de l’éducation. Pouvez-vous rassurer professeurs et élèves de cette filière ? De quels crédits disposera-t-elle et quelle sera sa gouvernance ?

Par ailleurs, vous avez avancé le chiffre de 227 millions de crédits à l’export pour la viticulture. De quelle façon seront-ils répartis, et qui les gérera ? Quelles mesures comptez-vous prendre pour faire reconnaître la qualité des produits français à l’étranger et combattre la contrefaçon ?

Mme Marie-Lou Marcel. Le grand plan de soutien aux filières d’élevage, pourtant annoncé, n’apparaît pas dans le budget, où ne figurent que des aides conjoncturelles et de crise. Aucune réponse n’est faite à la nécessité de consolider la compétitivité des bassins de production. La diminution des crédits de paiement planifiée sur trois ans confirme la sévère restriction budgétaire. L’enveloppe du plan de modernisation des bâtiments agricoles consacrée à l’investissement est en baisse et le montant financier par dossier est faible. Une partie de l’enveloppe est réservée à certains éleveurs. Croyez-vous qu’elle puisse être un levier suffisant ?

Comment justifiez-vous la baisse drastique des autorisations d’engagement du plan de performance énergétique, qui passe de 22,9 millions d’euros en 2010 à 12 millions en 2011, ce qui est contradictoire avec l’objectif fixé par le Grenelle de l’environnement des 30 % d’exploitations à faible dépendance énergétique à l’horizon de 2013 ?

Pensez-vous que le maintien de l’enveloppe consacrée à la filière « bio » suffise pour développer celle-ci ?

Le recul de l’État est également sensible sur l’environnement des organisations professionnelles agricoles, en application de la LMA et de la RGPP. Le transfert de la mission d’accompagnement de l’installation des ADASEA vers les chambres de l’agriculture entraîne une perte de moyens, ce qui revient à les condamner.

Le secteur de la santé animale est un autre exemple de désengagement. Après le transfert des coûts d’équarrissage, les organisations professionnelles sont incitées à prendre en charge les plans d’éradication des grandes maladies. Ne pensez-vous pas qu’elles se tourneront de plus en plus vers les collectivités locales pour conduire les programmes ?

L’enseignement agricole diminue de 8,9 %. Est-ce la réponse de l’État au renouveau constaté dans l’enseignement agricole et à l’augmentation de ses effectifs ? Chacun salue en effet sa qualité, son taux de réussite et son ancrage territorial.

M. Gérard Menuel. Compte tenu de la grande diversité des missions qui vous sont confiées, comment votre ministère a-t-il réparti les réductions d’emplois entre les directions qui le composent ?

Comment, au sein de l’enseignement agricole, la répartition s’effectue-t-elle entre le personnel enseignant et le personnel administratif ? Les indications qui nous sont fournies ne permettent pas une lecture précise de la répartition à laquelle vous avez procédé. Une trop grande ponction des effectifs enseignants rendrait difficile pour les établissements scolaires l’exécution des cinq missions que leur assigne la loi de 1984.

Vous avez évoqué à juste titre la volatilité des cours agricoles, qui affecte également ceux des biocarburants. En un an, le prix du colza a pratiquement doublé, passant de moins de 200 euros par tonne à plus de 350 actuellement. La filière des biocarburants a besoin d’une fiscalité visible et pérenne, mais aussi d’une véritable politique contractuelle avec les agriculteurs. Quelle est votre position à cet égard ?

Mme Sylvia Pinel. Pour sortir l’agriculture de la crise, il faut moderniser les exploitations, assurer la compétitivité de l’ensemble des filières et revaloriser les revenus agricoles. Un an après l’annonce du plan de soutien exceptionnel à l’agriculture dédié aux filières les plus en difficulté –  lait, fruits, bovins – , les aides n’apportent pas de réponse durable à la crise. Là où l’État propose des prêts bonifiés et la prise en charge des intérêts d’emprunt, les agriculteurs réclament des prix rémunérateurs et la mise en place de coefficients multiplicateurs. Quelles décisions allez-vous prendre ?

C’est pour agir sur la détermination des prix, qui est le véritable enjeu, que l’emblématique filière laitière se bat pour le pluralisme syndical au sein des interprofessions. Pourquoi ne pas l’accompagner dans cette voie ? Quelles seront les grandes orientations de votre plan triennal de développement des filières annoncé le 14 septembre à Rennes, dont le montant total représentera 300 millions ? Quelles filières allez-vous privilégier, dans quelles proportions et selon quelles modalités ?

N’oublions pas que l’essentiel du budget agricole de la France se décide, non à Bercy, mais à Bruxelles. Un acompte des aides de la PAC vient d’être versé, mais qu’en sera-t-il des crédits européens à l’horizon de 2014 ? Abandonnée aujourd’hui, la filière « fruits », qui représente une part déterminante de l’économie locale de mon département, pourra-t-elle en bénéficier ?

Plus que jamais, l’agriculture a besoin de régulation pour résister aux fluctuations du marché. Face à la grande distribution, aux centrales d’achat et aux industriels, quelles mesures comptez-vous prendre pour encadrer les prix et permettre aux agriculteurs de vivre dignement de leur travail ?

M. Jean Proriol. La France est le pays qui a su conserver le plus grand nombre de races bovines. Cette diversité est une force. Pourtant, nous traversons une période de mévente pour les races à viande bovine, et les stocks sur pied devront passer l’hiver. Cette situation dure depuis trois ans, les prix restant inférieurs de 20 % à ceux qui garantiraient un revenu aux agriculteurs. D’après l’INSEE cependant, le prix de vente à la consommation aurait augmenté de 40 % entre 1997 et 2011. Quand l’Observatoire des prix et des marges fera-t-il connaître ses conclusions ? Pourquoi l’élevage bovin se porte-t-il si mal, alors que nous importons de la viande ?

Par ailleurs, on ne sait si nous parviendrons à sauver l’élevage ovin, même si, d’après l’Institut français de l’élevage, le recul de la production se limiterait à 1 % en 2010.

Allez-vous adresser le message fort qu’attendent les filières bovine et ovine ?

Mme Annick Girardin. Il y a un an, dans le même cadre, je vous faisais part de l’inquiétude des acteurs du secteur halieutique de Saint-Pierre-et-Miquelon, privés du bénéfice aussi bien du plan « pêche » national que, au niveau de l’Union, de l’instrument financier d’orientation de la pêche (IFOP) et du dispositif en faveur des régions ultrapériphériques. Vous m’aviez alors répondu que cette question méritait un débat... que j’attends toujours !

La loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche aurait pu fournir l’occasion de doter l’archipel du plan structurel dont ce fleuron historique de la pêche française a si désespérément besoin, mais l’article 40 a été opposé à mes amendements en faveur d’un label commercial et le Gouvernement n’a pris aucune initiative. Quand allons-nous enfin pouvoir travailler ensemble à l’élaboration d’une stratégie pour cette filière ?

Par ailleurs, vos services ont-ils évalué les conséquences que l’accord Union européenne-Canada, en cours de négociation, ne manquera pas d’avoir sur la pêche française ?

M. Louis Cosyns. J’ai bien noté ce que vous avez dit, monsieur le ministre, à propos du transfert des ADASEA aux chambres d’agriculture, et je ne saurais trop insister sur la nécessité de veiller aux équilibres, au sein de ces dernières.

Je me réjouis que le crédit d’impôt-remplacement, institué par la loi d’orientation agricole de janvier 2006 et qui a permis de financer 38 000 journées, soit maintenu pour trois ans, pour un coût annuel de 10 millions d’euros. Cependant, la mesure ne va-t-elle pas se heurter à la règle de minimis ?

Enfin, il est important que les producteurs, les responsables d’abattoirs et les distributeurs se mettent autour d’une table, pour que la transparence soit faite sur les prix de la viande.

Mme Annick Le Loch. Un tel budget permettra-t-il de relever les défis de la pêche, de l’aquaculture, de la conchyliculture – renouvellement et modernisation de la flottille, sécurité à bord des navires, formation aux métiers, attractivité du secteur, valorisation des produits de la mer, vitalité des économies littorales ? Certains efforts sont notables, comme le renforcement des moyens affectés au contrôle des pêches, indispensable, ainsi qu’à la connaissance des ressources. D’autre part, dix millions d’euros sont alloués aux contrats bleus, une mesure-phare validée par Bruxelles. Mais n’y aurait-il pas encore quelques retards dans les paiements au titre de 2008 et de 2009 ? Par ailleurs, selon une coopérative bretonne, les crédits de ces contrats devraient se monter non à dix, mais à quinze millions d’euros.

Ce budget prévoit aussi les « moyens nécessaires pour ajuster les capacités de la flotte à la ressource » – sans doute une nouvelle appellation pour les plans de sortie de flotte ! –, soit 12 millions d’euros en autorisations d’engagement pour 2011, une somme encore trop importante. Nous savons tous que cet argent ne revient pas aux secteurs d’activité de l’économie maritime. Cette ligne budgétaire concerne surtout la pêche au thon rouge, mais elle est aussi, et c’est inquiétant, ouverte à d’autres pêches. En l’absence de renouvellement de notre flotte, quelle sera demain notre production, et comment seront alimentés nos ateliers de mareyage ? Trop peu d’argent est consacré à la modernisation des navires – 700 000 euros –, alors que nous savons que les fonds provenant du Grand emprunt ne sont pas pour demain.

Par ailleurs, il est regrettable que les deux pages qui auraient dû être consacrées, dans le projet de rapport, à la gestion durable de la pêche et de l’aquaculture aient été laissées vierges.

La construction de l’interprofession se poursuit, avec le regroupement en association des professionnels français sous l’appellation France Filière Pêche et avec la mise en place de la marque collective « Pêcheur responsable ». Mais comment ce label sera-t-il financé demain ? La disparition de la « taxe poisson » est-elle effective ?

À la veille de l’entrée en vigueur du décret portant changement de statut et déménagement à la Rochelle de l’Etablissement national des invalides de la marine (ENIM), je ne trouve pas trace, dans le budget, de la dépense correspondante, estimée à environ 11 millions d’euros.

M. Pierre Morel-A-L'Huissier. L’État consacre 620 millions d’euros aux chambres d’agriculture, au moment où celles-ci doivent absorber les ADASEA. Si ce transfert est déjà acquis dans trente-six départements, il a donné lieu dans le mien, la Lozère, à un conflit qui s’exacerbe. Êtes-vous en mesure de contribuer à une solution ?

Le ministère a-t-il analysé les conséquences, notamment sur les maisons familiales rurales, de la suppression de l’exonération des cotisations sociales dans les zones de revitalisation rurale ?

Enfin, la nécessité de procéder à la révision des zonages retenus pour l’indemnisation de la sécheresse de 2009 a été reconnue. Où en sommes-nous aujourd’hui ?

M. William Dumas. La délégation d’agriculteurs gardois, reçue lundi à Matignon pour négocier l’étalement sur sept ans de leur dette sociale, regrette de ne pas avoir été entendue. Pourtant, la légère augmentation des cours du vin ne suffira pas à compenser les pertes subies ces dernières années et à sauver de nombreux exploitants de la faillite.

L’agriculture « bio » se porte mieux que l’agriculture traditionnelle. En 2009, 187 exploitations étaient en cours de conversion dans le Gard. De son côté, le conseil général encourage la restauration collective à servir du « bio » pour inciter à la consommation de ces produits, avec l’idée de démontrer la viabilité de circuits courts grâce aux débouchés locaux. Dans cette perspective, il est nécessaire de maintenir les crédits en faveur du « bio », non de les diminuer.

Face à la disparition du foncier agricole, cinq fois plus rapide dans le Gard que dans le reste du territoire, l’association des maires du département, en partenariat avec la chambre d’agriculture, se mobilise. Les pouvoirs publics doivent prendre position, notamment sur l’extension des installations photovoltaïques, qui risque de transformer nos paysages en vastes étendues de panneaux solaires, au détriment du tourisme.

Quels sont les crédits que vous comptez consacrer à la promotion de la marque « France » ? Je me souviens qu’il y a quelques années, le ministère avait dépensé 12 millions d’euros pour promouvoir la viticulture de notre pays, soit pas plus que le budget consacré par la région Languedoc-Roussillon à une campagne en faveur du seul vignoble languedocien !

M. Richard Mallié. Chaque année, une liste des commissions et instances placées directement auprès du Premier ministre ou des ministres est annexée au projet de loi de finances. Le budget du Conseil national de l’alimentation, rattaché à votre ministère et qui s’est réuni quinze fois en 2006, mais seulement quatre ou cinq fois les trois années suivantes, semble augmenter. Pourriez-vous indiquer les montants qui lui ont été alloués en 2009 et en 2010, les « jaunes » étant peu précis sur ce point, la localisation, la superficie et le coût des locaux ainsi que le nombre d’emplois en équivalents temps plein mis à sa disposition ?

Le rapporteur spécial pour l’immobilier de l’État, M. Yves Deniau, remarquait en 2009 que l’INAO consacrait près de 900 m² de son siège parisien, loué à l’année 1,3 million d’euros, à de l’archivage. L’éventualité d’un transfert à Montreuil dans des locaux voisins de ceux de France AgriMer a été évoquée. Qu’en est-il exactement et quelles économies ce déménagement est-il supposé entraîner pour un organisme dont le budget, il faut le noter, est en augmentation ?

M. Louis-Joseph Manscour. La pollution des terres agricoles antillaises par le chlordécone a eu de graves conséquences sanitaires et économiques. Les producteurs de bananes, accusés de tous les maux, se sont engagés dans une politique volontariste afin de réduire l’utilisation des produits phytosanitaires et travaillent désormais dans un esprit de développement durable et socialement responsable.

Toutefois, les accords commerciaux entre l’Europe et les producteurs concurrents d’Amérique latine et de la zone dollar, qui prévoient notamment une diminution des droits de douane, risquent de ruiner ces efforts, ainsi que ceux déployés par les producteurs de sucre, antillais et réunionnais. Leur mise en application a déjà entraîné dans les dernières semaines d’octobre une baisse de 25 à 30 % des recettes commerciales, par rapport à la même époque de l’an dernier. Quelles mesures compensatoires comptez-vous prendre pour sauvegarder ces filières ?

Mme Isabelle Vasseur. Combien de temps encore l’agriculture contribuera-t-elle à l’équilibre de la balance commerciale française ? Les motifs de distorsion de concurrence persistent. Ainsi, les producteurs de grandes cultures et les arboriculteurs doivent observer des normes environnementales et réduire leur usage de produits phytosanitaires, obligation qui ne pèse pas sur les Espagnols, dont nous importons les productions. Qu’est-il prévu dans le projet de loi de finances pour compenser cette distorsion ?

Autre source de distorsion : le poids des charges sociales. Certes, 492 millions d’euros sont consacrés au nouveau dispositif d’exonération des cotisations patronales de sécurité sociale pour l’emploi de travailleurs occasionnels, mais ce ne sera pas suffisant pour compenser l’écart constaté avec l’Allemagne, par exemple, où le SMIC horaire est bien inférieur pour des durées de travail plus longues.

Je présenterai à nouveau l’amendement que j’avais défendu avec Christian Jacob et visant à défiscaliser les biocarburants.

M. Yves Vandewalle. La loi de 2005 sur le développement des territoires ruraux a étendu le statut d’agriculteur aux personnes exerçant une activité en lien avec le cheval. Si cette disposition se révèle fort utile en province, elle est largement détournée de son objectif dans les régions Île-de-France et Provence-Alpes-Côte d’Azur, où quiconque s’improvise éleveur – un producteur de télévision par exemple – peut ensuite acquérir des terres agricoles à bon prix et y construire sa résidence principale, en contournant les règles d’urbanisme.

La chambre régionale d’agriculture d’Île-de-France et les élus locaux, qui s’efforcent de protéger du mitage les terres agricoles, se sont saisis de cette question. Le Gouvernement compte-t-il mettre fin à ces dérives ?

L’émiettement de la forêt privée freine le développement de la filière bois. Quelles mesures envisagez-vous pour stimuler les regroupements ?

M. Henri Nayrou. En ce qui concerne la montagne, je n’ai rien à dire sur la prime herbagère et sur l’indemnité compensatoire de handicaps naturels (ICHN) et j’appuie sans réserve la recherche de solutions pour réduire l’écart entre le prix payé au producteur et le prix acquitté par le consommateur.

Je n’insisterai pas davantage sur les problèmes liés au transfert des moyens des ADASEA aux chambres d’agriculture, qui s’est soldé par la disparition de la ligne de financement.

La cagnotte constituée grâce à la taxe instituée par la loi de modernisation agricole a permis d’aider les éleveurs lors de la crise, alors que ces fonds étaient censés favoriser l’installation de jeunes agriculteurs. Parallèlement, les crédits pour l’enseignement agricole diminuent et le nombre de professeurs baisse : or, moins on forme, moins on installe – et moins on consomme de crédits. Ce n’est pas le modèle recherché en Ariège !

Enfin, le compte d’affectation spéciale « développement agricole et rural » (CASDAR), jadis cogéré et qui devait servir à mettre en place un mécanisme de solidarité et de péréquation, a été repris en main par l’État et semble désormais destiné à financer la génétique. À quoi sert de préparer la production de vaches « Ferrari » quand nos élevages ont besoin de vaches « 4x4 » ? La profession agricole roule au diesel ; vous voulez remplir nos réservoirs de super. On va trop vite !

M. Philippe Folliot. Il est des territoires où l’élevage ne procède pas d’un choix mais d’une nécessité : c’est le cas des monts de Lacaune, où 40 % des actifs sont agriculteurs. Ceux-ci, désespérés, attendent plus des prix rémunérateurs que des aides.

Trois questions : quelle sera l’évolution de l’ICHN dans les années à venir ? Quelles mesures spécifiques le Gouvernement entend-il prendre pour l’installation des jeunes en moyenne montagne ? Quand et comment sera-t-il mis fin à l’injuste et scandaleuse surtaxation du roi des fromages, le roquefort, aux États-Unis ?

M. Patrice Martin-Lalande. Quand les premiers travaux de l’observatoire des distorsions permettront-ils de corriger les plus insupportables de celles-ci ? En quoi le projet de loi de finances prend-il en compte cette préoccupation dans l’agriculture ?

Les produits à base d’arsenic de sodium qui ont été interdits en 2001 n’ont pas été remplacés, ce qui laisse la maladie du bois s’étendre dangereusement dans le vignoble français. Un million et demi d’euros ont été consacrés à la recherche, mais celle-ci progresse moins vite que le fléau. Ne serait-il pas possible de mutualiser les recherches dans le cadre de l’Union ? A-t-on mis en regard l’impact positif de cette interdiction et l’effet délétère de la maladie du bois ?

M. Jean-Claude Flory. Quand le décret de classement en AOP de la châtaigne d’Ardèche sera-t-il publié ?

En complément des mesures prioritaires de soutien aux producteurs, prendrez-vous des mesures en faveur des PME de collecte et de transformation du lait ?

M. Philippe Boënnec. Il est tout de même remarquable, dans le deuxième pays maritime du monde, que les deux pages consacrées à la gestion durable de la pêche et de l’aquaculture soient restées blanches ! Tabarly avait raison lorsqu’il disait que les Français ont tourné le dos à la mer.

Curieusement, l’exception relative aux fonds de proximité n’a pas été reprise dans l’instruction administrative concernant le dispositif de réduction de l’ISF en faveur de l’investissement dans les PME. Pourtant, ce dispositif serait utile pour renouveler une flotte de pêche qui accuse une moyenne d’âge de 24 ans.

Les contrats bleus permettent d’assurer la protection et le suivi scientifique de l’environnement, en rémunérant l’effort consenti par les professionnels. Quel est le bilan de ce dispositif, et quel est le montant exact des versements déjà effectués ?

M. Jean-Yves Cousin. La crise du lait a entraîné une baisse de revenus notable, notamment en Normandie. Les agriculteurs ont besoin de prix qui leur permettent de vivre, et qui soient « lisibles ». Quelle est la définition exacte de la « contractualisation », au-delà même des systèmes assurantiels ?

M. Nicolas Forissier, rapporteur spécial. Des problèmes techniques ont empêché la publication des pages consacrées au développement durable de la pêche et de l’aquaculture. Il n’y a donc pas motif à penser que la pêche aurait été exclue sciemment du rapport. Je vous prie toutefois d’accepter mes excuses, tout en rappelant que ce projet de rapport est un document de travail, susceptible d’évoluer.

M. Bruno Le Maire, ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche. L’avenir de la viticulture française dépend de sa capacité à gagner des parts de marché à l’exportation et d’une meilleure organisation de la filière. Le secteur s’est engagé dans ces deux voies, mais il faut désormais accélérer la cadence.

Le succès ne sera assuré que si tous les acteurs de la filière – en particulier les producteurs et les négociants –travaillent main dans la main. Aucune des parties prenantes ne peut espérer tirer seule son épingle du jeu.

S’agissant des exportations, je ne crains pas de dire que trop d’AOC tue l’AOC. Les chiffres sont sans appel : en 2009, 47 millions d’hectolitres ont été produits, dont 24 millions en AOC. Si nous ne répartissons pas mieux les productions, nous ne parviendrons pas à exporter nos vins. Pour le reste, seule l’organisation nous manque : la qualité et le volume de notre production pourraient faire de la France le premier pays exportateur de vin.

Monsieur Gaubert, j’ai demandé qu’un audit soit mené sur la question complexe des abattoirs ; ses conclusions me seront remises à la fin de l’année. L’enjeu est majeur pour notre compétitivité : 90 % des employés du principal abattoir allemand ont un contrat de service à six ou sept euros de l’heure !

Le Président de la République a écrit à M. Dmitri Medvedev pour lui demander de lever l’embargo sur la viande bovine française, qui n’a plus lieu d’être. Je me rendrai en Russie dans les semaines qui viennent pour, je l’espère, clore les discussions sur ce sujet.

Plusieurs députés m’ont interrogé sur les crédits destinés à l’installation des jeunes agriculteurs. Comme l’a souhaité le Président de la République, ils seront sanctuarisés à hauteur de 350 millions d’euros. Cette enveloppe regroupe à la fois les 169 millions d’euros de crédits de l’État – 55 millions pour la dotation jeunes agriculteurs, 88 pour les prêts bonifiés, 11,5 pour le soutien à la communication, 6 pour les parcours de formation et 8 au titre du maintien d’un budget pour les aides ADASEA –, les 87 millions d’euros de dépenses fiscales – 35 au titre des exonérations fiscales et 52 à celui des exonérations sociales – et les 94 millions d’euros de fonds européens – 48 millions pour la dotation jeunes agriculteurs et 46 pour les prêts bonifiés.

Nous travaillons à la mise en place de l’Institut français du cheval et de l’équitation (IFCE) et à la création du GIP France Haras. J’entends l’inquiétude des Haras nationaux et j’ai demandé à ce que du temps soit laissé pour la mise en œuvre de cette réforme compliquée.

Monsieur Favennec, je pense avoir répondu sur les aides ADASEA. Le taux pourra être ajusté en fonction de la situation dans les chambres d’agriculture afin que les choses se passent le mieux possible.

Monsieur Brottes, je souhaite que la nomination du futur directeur général de l’ONF soit soumise à la commission, comme toutes les nominations aux postes de direction des établissements publics.

Le compte d’affectation spéciale de l’immobilier de l’État recevra le produit de la vente de l’hippodrome de Compiègne, soit 2,5 millions d’euros. En application de la règle de retour, 65 % de ces recettes, soit 1,625 million, iront au ministère de l’agriculture et seront consacrés à l’achat de forêts. Ma seule responsabilité en la matière est de m’assurer que la superficie boisée reste inchangée à l’issue de cette opération.

Monsieur Lecou, je suis favorable à ce que l’on étudie la replantation, dans les parcelles incendiées, d’essences qui soient moins combustibles.

S’agissant du thon rouge, la position du gouvernement français est de suivre à la lettre les recommandations des scientifiques de la Commission internationale pour la conservation des thonidés de l’Atlantique (CICTA) : pour atteindre l’objectif, fixé à Recife par les Vingt-Sept, d’un « rendement maximum durable » du stock avec une probabilité supérieure à 60 %, nous devons respecter en 2011 un quota de 13 500 tonnes. L’Espagne, le Portugal, Malte, la Grèce, Chypre et l’Italie ont soutenu la même position à Luxembourg. Seul un pays a fait état de divergences, mais en termes mesurés.

J’ai écrit à François Baroin pour lui demander de donner suite à la demande de dégrèvement de taxe sur le foncier non bâti. Je n’ai pas encore la réponse.

Madame Massat, comme en 2010, nous ferons le nécessaire pour soutenir les associations de défense du pastoralisme.

Monsieur Remiller, le travail occasionnel dans l’agriculture est exonéré depuis le 1er janvier 2010 de toute charge sociale et patronale. Cela permet de répondre aux critiques de la Commission européenne sur la légalité du dispositif précédent et d’abaisser le coût du travail horaire de 11,30 à 9,26 euros, ce qui nous rapproche des normes européennes. Malheureusement, le travail occasionnel ne représente que 40 à 45 % de la masse salariale agricole en France. Il est urgent de trouver des solutions pour abaisser le coût du travail, particulièrement dans la filière des fruits et légumes où sa part, dans le coût final, atteint 60 %. J’étudierai donc avec beaucoup d’attention les propositions que me soumettra Bernard Reynès. Il y va de la survie de cette filière.

Monsieur Mesquida, les dispositifs de soutien en cas de calamité agricole sont maintenus : la solidarité continuera de jouer, dans le cadre d’une meilleure organisation.

Les agriculteurs veulent percevoir un revenu stable, sur plusieurs années, et demandent que leur travail soit correctement rémunéré. Je crains que des prix planchers n’aient un effet pervers, en devenant la norme sur laquelle s’aligneraient tous les prix. Je préfère, de loin, qu’un indicateur, fixé par l’interprofession, reflète une tendance de marché et serve de référence.

Monsieur Philippe Armand Martin, le programme 143 reste bien au sein de la mission « Enseignement scolaire ». Je me suis battu dans ce sens, soutenu par vous tous, et le Premier ministre en a ainsi décidé. L’enseignement agricole, qui est un enseignement de qualité, aurait tout à perdre à se trouver dépendre du seul ministère de l’agriculture, sans lien avec celui de l’éducation nationale. Ce serait en outre contraire à ma démarche, qui consiste à remettre l’agriculture au cœur de la société française et des débats nationaux.

Madame Marcel, les crédits affectés au plan de performance énergétique sont en diminution, mais ils seraient réajustés si les demandes devaient être plus nombreuses en 2012.

En revanche, dans le cadre des plans de développement des filières, nous soutiendrons la mise aux normes des exploitations, qui exige un effort important. Je pense notamment à la filière porcine, qui devra y consacrer pas moins de 370 millions au seul titre du bien-être animal et uniquement pour les truies gestantes ! Nous avons d’ailleurs étudié la possibilité d’élever le plafond des aides à 50 000 euros par exploitation.

Dans le cadre du décret sur le regroupement des installations classées, nous respecterons désormais le délai d’instruction d’un an, et nous faciliterons ce regroupement. Le décret vous sera soumis : il ménage un bon équilibre entre respect de l’environnement et souci de préserver la compétitivité de la filière porcine.

Monsieur Menuel, la baisse des effectifs, dans le programme 143, sera de 120 équivalents temps plein (ETP) et de 25 vacataires. C’est sur ce programme que j’ai souhaité limiter autant que faire se pouvait les réductions d’emplois, dans le souci de soutenir l’enseignement agricole. L’arbitrage n’a pas encore été rendu concernant la répartition de l’effort entre public et privé.

En revanche, s’agissant du programme 206, la baisse sera de 80 postes ETP et 25 vacataires, et, pour les missions de contrôle des directions départementales du territoire (DDT) du programme 215, de 250 ETP et 150 vacataires. L’objectif de 650 suppressions de postes, fixé par le Premier ministre dans la lettre-plafond, sera donc atteint.

Je suis d’accord, madame Pinel : la seule réponse durable à la crise, ce sont des prix rémunérateurs. Quant au coefficient multiplicateur, l’accord signé le 17 mai avec la grande distribution, sous l’autorité du Président de la République, prévoit la réduction automatique des marges, en période de crise, pour les fruits et légumes. Ce système a bien fonctionné cet été, apportant la preuve que des mesures contraignantes peuvent être efficaces en matière agricole.

Pour ce qui concerne les interprofessions, mon vœu est que s’ouvre un dialogue responsable entre toutes les organisations syndicales représentatives – nous avons ainsi résolu la crise de la Maison du lait en réunissant l’ensemble des acteurs autour de la table, en fixant un calendrier et en proposant des mesures sur les prix, sur l’organisation du marché et sur les quotas. Je souhaite que cette discussion se poursuive de façon constructive, afin que les organisations représentatives remettent leurs conclusions au printemps de 2011.

Après que la Commission eut proposé, en octobre dernier, de diminuer de 30 à 40 % le budget de la PAC, nous avons travaillé pendant un an à la recherche d’une position commune avec nos voisins allemands. L’accord auquel nous sommes parvenus, le premier en son genre, demande que le budget de la PAC soit maintenu, afin de répondre aux ambitions agricoles européennes. Nous n’accepterons donc pas de réduction budgétaire significative. La Commission a d’ailleurs évolué ; ses dernières propositions sont plus acceptables. L’une d’entre elles, qui est de ponctionner le budget de la PAC pour financer d’autres politiques, nous semble toutefois critiquable à deux titres : d’une part, elle consisterait à prélever sur une politique qui existe au profit de politiques qui restent à élaborer ; de l’autre, elle ferait perdre de vue que l’agriculture est un enjeu stratégique pour l’Europe, ce que la Chine, les États-Unis ou le Brésil ont, de leur côté, parfaitement compris. J’ajoute que déshabiller Pierre pour habiller Paul n’a jamais fait une bonne politique.

La situation de l’élevage ovin, monsieur Proriol, est en nette amélioration, et ce grâce aux efforts de la filière pour obtenir un accord sur la commercialisation de leurs produits dans les grandes et moyennes surfaces. Quant à l’élevage bovin, il reste un sujet de préoccupation majeure ; je reçois les représentants de la filière très régulièrement. Au-delà des soutiens financiers, il faut s’interroger sur les choix d’élevage et l’adaptation à la demande des consommateurs. La plupart des éleveurs veulent, comme c’est compréhensible, les bêtes les plus belles et les plus imposantes ; mais est-il rentable, compte tenu des coûts d’alimentation et des possibilités de valorisation, d’élever des bêtes de 650 kilos plutôt que de 450 ou 470 kilos ? Cependant, je le répète, seule une remontée des prix, dans les prochaines semaines, permettra de parvenir à des solutions structurelles : on ne peut discuter dans de bonnes conditions que lorsque l’on n’est pas sous la pression de prix trop bas – l’exemple de la filière laitière le montre.

Des mesures ont été prises en faveur de Saint-Pierre-et-Miquelon, madame Girardin, notamment pour la coquille Saint-Jacques – à hauteur de 300 000 euros par an – et pour la modernisation des entreprises de transformation, à laquelle 1,7 million d’euros seront consacrés en 2009-2010 ; au surplus, des projets innovants pourront être financés grâce à l’enveloppe de 40 millions annoncée par le Président de la République. Je suis évidemment prêt à rediscuter de tout cela, en liaison avec le ministère de l’outre-mer.

S’agissant de la négociation entre l’Union européenne et le Canada, j’ai lancé une mission interministérielle et exposé nos préoccupations à la Commission, laquelle s’est engagée à prendre en compte les spécificités de l’archipel en ce qui concerne les régimes tarifaires et sanitaires, ainsi que l’utilisation des produits phytosanitaires. Nous resterons vigilants sur ce sujet.

Le crédit de remplacement, monsieur Cosyns, est conforme aux règles européennes puisqu’il s’élève en moyenne à 460 euros par exploitation, soit bien en deçà de la limite du de minimis.

Madame Le Loch, toutes les coopératives ont reçu les crédits prévus au titre des contrats bleus, sauf, il est vrai, la plus importante d’entre elles, Ar Mor Glaz : 50 % des sommes lui ont été versées sous forme d’avances ; le reliquat est en cours de liquidation. Quant aux bateaux du futur, qui permettront de diminuer la consommation de carburant, 20 millions leur sont consacrés dans le Grand emprunt. Je rappelle que la moitié du prix d’un poisson à l’étal correspond au coût du carburant ; c’est dire l’importance du sujet pour la valorisation de notre pêche.

Je vous confirme, monsieur Morel-A-L’Huissier, que la révision que vous souhaitiez pour la Lozère est en cours, sur la base des conclusions du médiateur.

Nous devons en effet veiller, monsieur Dumas, à ce que nos terres viticoles, notamment dans le Sud, ne soient pas recouvertes de panneaux photovoltaïques. Quant à la promotion de la marque « France », nous y consacrerons les crédits nécessaires ; mais il revient également aux interprofessions d’y œuvrer.

La dette sociale dans le Gard s’élève à 60 millions d’euros ; nous cherchons des solutions pour chaque agriculteur, dans le cadre des dispositifs existants. Un médiateur a ainsi été installé. Je profite également de votre question pour rappeler que nous travaillons depuis plusieurs mois sur le problème, grave, de la sharka.

M. Mallié m’a interrogé sur l’INAO, dont j’ai visité les superbes locaux rue d’Anjou, dans le VIIIe arrondissement : locaux tellement superbes que nous avons décidé de reloger les personnels à Montreuil, ce qui permettra d’économiser 500 000 euros par an.

Les producteurs de la filière banane, monsieur Manscour, ont fait le bon choix, celui d’une production durable. Si vous le souhaitez, je vous entretiendrai personnellement des négociations en cours avec la Commission.

Madame Vasseur, 170 millions d’euros ont été ajoutés cette année pour les exonérations relatives aux TO/DE – travailleurs occasionnels/demandeurs d’emploi. Au total, le financement de ces allégements représente, je le rappelle, presque un demi-milliard d’euros par an. Nous consentons donc un effort majeur pour soutenir la compétitivité de nos filières agricoles. Cela dit, vous avez raison : cela ne règle pas la question du travail permanent. Toutes vos propositions sont donc les bienvenues.

S’agissant des indemnités compensatoires de handicaps naturels (ICHN), monsieur Nayrou, les choix budgétaires que nous avons faits permettent de sanctuariser leur versement à hauteur de 248 millions d’euros. Je n’ai pu me rendre au congrès de l’Association nationale des élus de la montagne, mais je serai heureux de vous recevoir et de discuter du sujet avec vous. Je crois à l’avenir de l’agriculture de montagne ; nous maintiendrons donc les primes nécessaires, tout en poursuivant la redéfinition des zones défavorisées simples à partir des propositions de la Commission, propositions qui ne nous satisfont pas puisqu’elles conduiraient à supprimer la moitié de ces zones dans notre pays.

Le roquefort, monsieur Folliot, est un excellent produit mais je vous laisse la responsabilité du jugement selon lequel il serait le roi des fromages. (Sourires.) Quoi qu’il en soit, nous continuerons d’intervenir auprès des autorités américaines pour qu’elles baissent les droits de douane. Je ne vous cache pas que la tâche est difficile.

L’effort de recherche sur la maladie du bois sera poursuivi, monsieur Martin-Lalande. Quant au décret portant reconnaissance de l’AOC pour les châtaignes, il sera publié demain : vous pouvez donc annoncer cette bonne nouvelle dès aujourd’hui.

Je suis favorable, si la chose est possible, à l’application à la filière pêche de la réduction d’ISF consentie pour les investissements dans les PME et TPE, monsieur Boënnec. S’agissant des contrats bleus, leur dotation globale a atteint 37,5 millions d’euros en 2008-2009. Ils seront reconduits jusqu’en 2013, sur la base d’une enveloppe de 10 millions d’euros abondée par les fonds communautaires. Je crois encore possible de les développer, notamment sur les façades de la Manche, de la mer du Nord et de la Méditerranée. J’espère donc que les pêcheurs les regarderont comme une chance à saisir.

Je pense avoir déjà répondu à votre question, monsieur Jean-Yves Cousin.

Je terminerai par quelques remarques d’ordre général. En premier lieu, j’ai le sentiment d’une prise de conscience, au sein des pays européens, du caractère stratégique de l’agriculture : l’idée, au demeurant idiote, selon laquelle cette dernière appartiendrait au passé est désormais battue en brèche. L’agriculture est un secteur d’avenir, comme l’ont compris le Brésil, l’Inde, les États-Unis ou la Chine.

Dans ces conditions, il est impératif d’organiser le marché agricole mondial. On ne peut accepter que ce marché soit le dernier à être régulé, qu’il s’agisse du contrôle des intervenants, de la spéculation, de la volatilité des prix ou de l’achat de terres agricoles, lesquelles peuvent de surcroît faire l’objet de spéculations, comme en Afrique. En ces domaines, les palabres doivent laisser la place aux décisions concrètes.

Enfin, le modèle agricole français a des spécificités – production sur l’ensemble du territoire, valorisation des produits – qu’il nous faut absolument défendre. Mais, à l’exception éventuelle de l’Italie, ce modèle est unique en Europe. Comme je l’ai vérifié lors des négociations avec les Allemands, nous devons, pour le préserver, montrer que nous sommes prêts à évoluer. Certes, l’abandon des quotas laitiers a été difficile à expliquer sur le terrain, mais il nous a offert une marge de négociation considérable, dans la mesure où il a prouvé à nos partenaires que nous étions prêts à affronter la concurrence internationale, moyennant une organisation plus stricte du marché. Si nous voulons préserver notre identité agricole, il nous faudra faire quelques concessions à nos partenaires et développer des projets innovants : nous pouvons, je crois, y parvenir tous ensemble.

(M. Louis Giscard d’Estaing, vice-président de la Commission des finances, remplace M. Jérôme Cahuzac à la présidence.)

M. Yves Censi, rapporteur spécial pour la mission « Enseignement scolaire ». Je veux exprimer mes inquiétudes, pour ne pas dire mon profond mécontentement, au sujet du programme 143.

Lors de l’examen du projet de loi de règlement, je le rappelle, vous avez été le seul ministre, avec votre collègue de l’éducation nationale, à être auditionné par la Commission des finances au sujet de l’enseignement scolaire. Pour des raisons obscures, il était alors envisagé de sortir le programme 143 de la mission interministérielle : il a fallu une forte mobilisation, cet été, pour l’y maintenir.

En volume budgétaire, soit dit en passant, l’enseignement technique agricole ne représente pas plus de 2 % de la mission. Le ministère de l’agriculture, non plus que celui de l’éducation nationale, ne peut travailler seul : une véritable coordination est indispensable. La Cour des comptes avait proposé de mettre en place une vraie fonction interministérielle, car, si les personnels des deux ministères sont nombreux à se mobiliser, rares sont les recherches de solutions « gagnant-gagnant ». Bref, les ministres de l’agriculture et de l’éducation nationale doivent traiter cette question budgétaire ensemble et en concertation avec Bercy.

Par ailleurs, lors de la commission élargie consacrée à la mission « Recherche en enseignement supérieur », nous avons voté un amendement tendant à valoriser la recherche appliquée dans le domaine agricole. Les remarquables travaux de l’Association de coordination technique agricole (ACTA) ont en effet profité à l’ensemble de l’économie agricole. Notre amendement, dans cette optique, prévoit le transfert de 3,5 millions d’euros du programme 187 vers le programme 142. Contrairement à ce que l’on a pu dire, cette somme n’est pas soustraite à l’INRA, mais allouée à la recherche appliquée. Qu’en pensez-vous ?

M. Louis Giscard d'Estaing, vice-président de la Commission des finances. Quid du financement des maisons familiales rurales ?

M. Bruno Le Maire, ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche. Je suis tout à fait d’accord, monsieur Censi, avec ce que vous avez dit au sujet de l’INRA et de la recherche appliquée.

Quant à votre premier point, il faut procéder par étapes : la première a consisté à sanctuariser le programme 143 au sein de la mission « Enseignement scolaire », ce qui n’a pas été chose facile.

Par ailleurs, compte tenu de la politique de la majorité qui consiste à ne pas remplacer un fonctionnaire sur deux partant à la retraite, j’ai choisi de faire supporter l’essentiel de l’effort par d’autres directions que celle de l’enseignement agricole, où je souhaite maintenir le maximum d’emplois. Après le moratoire de 2010 et le rétablissement de soixante ETP, les suppressions de postes – 120 ETP – sont particulièrement faibles au regard de l’effort demandé à d’autres directions de mon ministère. On peut bien sûr désapprouver la politique globale de la majorité, mais je suis sûr que ce n’est pas votre cas.

S’agissant des maisons familiales rurales, je n’ai pas rendu mes arbitrages sur la répartition entre l’enseignement public et l’enseignement privé, mais je sais que ces établissements effectuent un travail remarquable ; nous veillerons donc à ce qu’ils puissent continuer de le faire.

La réunion de la commission élargie s’achève à douze heures vingt-cinq.

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