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Edition J.O. - débats de la séance
Articles, amendements, annexes

Assemblée nationale
XIIIe législature
Session ordinaire de 2011-2012

Compte rendu
intégral

Deuxième séance du jeudi 20 octobre 2011

SOMMAIRE ÉLECTRONIQUE

SOMMAIRE


Présidence de M. Louis Giscard d’Estaing

1. Projet de loi de finances pour 2012 Première partie (suite)

Après l’article 3 (suite)

Amendement no 232

M. Gilles Carrez, rapporteur général de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire

Amendements nos 345, 157 rectifié, 166, 280, 11, 211 rectifié, 183, 405, 215, 287 rectifié, 17, 258, 281, 242, 128, 282, 353, 319, 155, 241, 13, 289, 244, 124, 302, 223, 186, 127, 295, 296, 123, 300, 299, 333, 393, 125, 334, 214

Article 4

Amendement no 63 rectifié

Après l’article 4

Amendements nos 207, 52, 175, 420 (sous-amendement), 44 rectifié, 255, 368, 50 rectifié, 176, 51, 14 rectifié, 243 rectifié, 164

2. Modification de l’ordre du jour prioritaire

3. Ordre du jour de la prochaine séance

Présidence de M. Louis Giscard d’Estaing

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

M. le président. Mes chers collègues, j’ai été informé que la commission mixte paritaire, qui se réunit actuellement au Sénat, n’a pas achevé ses travaux sur le projet de loi de finances rectificative pour 2011.

Je suis donc conduit à suspendre la séance. Elle reprendra dès que la réunion de la commission mixte paritaire sera terminée.

Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue, est reprise à quinze heures cinquante.)

M. le président. La séance est reprise.

1

Projet de loi de finances pour 2012
Première partie (suite)

M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2012 (n°s 3775, 3805).

Ce matin, l’Assemblée a poursuivi l’examen de la première partie du projet de loi, s’arrêtant à l’amendement n° 232 portant article additionnel après l’article 3.

Après l’article 3 (suite)

M. le président. La parole est à M. Michel Vergnier, pour soutenir l’amendement n° 232.

M. Michel Vergnier. Je crois que cet amendement a été considéré avec beaucoup d’attention par la commission et par le Gouvernement. Il concerne les personnes dont les logements sont soumis aux plans de prévention des risques technologiques, les PPRT, et qui sont obligées d’y réaliser des travaux, d’autant qu’elles n’ont pas la possibilité de quitter leur résidence principale.

La réduction du crédit d’impôt qui leur est accordé à ce titre étant un contresens économique, nous proposons d’en doubler les plafonds en les portant de 5 000 à 10 000 et de 10 000 à 20 000 euros. Cela permettrait aux intéressés de réaliser des travaux auxquels ils renonceraient à défaut ? et l’effet économique serait indéniable.

M. le président. La parole est à M. Gilles Carrez, rapporteur général de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire.

M. Gilles Carrez, rapporteur général de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire. Avis défavorable dans la mesure où la rédaction de cet amendement n’est pas ciblée sur les PPRT.

En revanche, et je l’ai évoqué il y a quelques jours avec M. Habib et M. Muet, notre collègue Jacques Pélissard a déposé un amendement qui double les plafonds tout en conservant le taux, que nous avions déjà remonté l’an dernier de 15 à 30 %. Mais il trouve évidemment sa place en seconde partie de ce projet puisqu’il ne saurait s’appliquer rétroactivement. J’espère que la ministre voudra bien alors l’accepter car, j’y insiste, il s’agit uniquement de doubler les plafonds et pour les seuls PPRT, notre commission étant unanime sur ce point. (« Très bien » ! » sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à Mme Valérie Pécresse, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l’État, porte-parole du Gouvernement.

Mme Valérie Pécresse, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l’État, porte-parole du Gouvernement. Monsieur le vice-président de l’Association des maires de France, monsieur le rapporteur général, certes, le coût de cette mesure est faible, mais elle apparaît plutôt en contradiction avec la logique de réduction des niches fiscales dans laquelle s’inscrit ce budget. Nous aurons cette discussion en seconde partie ; laissez-moi le temps d’y réfléchir.

M. le président. La parole est à M. Pierre-Alain Muet.

M. Pierre-Alain Muet. Je me réjouis que nous soyons appelés à en discuter à nouveau en seconde partie.

On ne peut pas considérer qu’il s’agisse d’une niche fiscale. Dans les zones soumises à un PPRT, les logements sont très difficiles à vendre et les obligations de travaux incombent souvent à des gens modestes qui ne disposent pas des moyens nécessaires. Il est donc important de relever le plafond et il serait même bienvenu d’augmenter le taux, comme s’apprête à le proposer notre collègue David Habib.

M. le président. Peut-on considérer que vous vous ralliez à la proposition que cette disposition soit examinée en seconde partie ?

M. Pierre-Alain Muet. Oui.

(L’amendement n° 232 est retiré.)

M. le président. La parole est à M. David Habib pour présenter l’amendement n° 345.

M. David Habib. Cet amendement porte également sur les PPRT : après avoir évoqué les plafonds, nous nous intéressons cette fois au taux du crédit d’impôt, dont le rapporteur général vient de rappeler qu’il est actuellement de 30 % et que nous proposons de porter à 40 %. Quatre cent cinquante territoires sont concernés. Aucune spéculation foncière n’y est à craindre puisque le PPRT interdit toute évolution de l’habitat en question, ne serait-ce que par l’adjonction d’un garage ou d’une chambre. Le développement économique a eu de lourds effets sur ces territoires ; les habitants sont pour la plupart salariés des entreprises en question. Ils souhaitent simplement pouvoir se mettre en conformité avec les prescriptions fixées par l’autorité préfectorale dans le cadre du PPRT, à la suite d’un processus extrêmement compliqué qui a duré dix ans entre la loi Bachelot et aujourd’hui.

La dépense fiscale s’élève à quelques centaines de milliers d’euros pour l’ensemble de ces sites. La solidarité nationale commande que nous apportions notre concours à nos concitoyens concernés.

J’ajoute que la loi Bachelot comporte un deuxième dispositif, relatif au délaissement, qui n’est pas évoqué dans cet amendement. À ce propos, nous avons pu vérifier, avec Jacques Pélissard, Michel Vergnier et d’autres élus, que les collectivités locales et les industriels supportaient jusqu’à présent une part qui devrait plutôt incomber à l’État. Il serait donc juste que, dans ce dossier sur lequel nul autre que l’État ne peut intervenir, il soit fait appel à la solidarité nationale.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Avis défavorable à l’augmentation du taux : M. Habib le sait fort bien, on l’avait diminué de façon excessive et nous l’avons déjà remonté à 30 %.

En revanche, j’insiste à nouveau sur le doublement du plafond, qui me paraît une bonne mesure. Mme la ministre considère qu’il s’agit d’une dépense fiscale. En fait, c’est le type même d’intervention qui devrait prendre la forme d’une subvention puisqu’il s’agit indiscutablement d’une mesure de solidarité.

M. Pierre-Alain Muet. Absolument !

M. Michel Vergnier. Pour le logement, c’est mal parti…

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Valérie Pécresse, ministre. Monsieur le député, j’ai entendu vos arguments, mais nous avons refait passer le taux à 30 %, ce qui constitue un bon équilibre. Et l’on ne peut pas changer de point d’équilibre à chaque projet de loi de finances. Je vous propose donc de nous en tenir à ce taux et de discuter de l’assiette en deuxième partie.

M. le président. La parole est à M. Christian Eckert.

M. Christian Eckert. Je profite de l’occasion pour évoquer les PPRM, c’est-à-dire les plans de prévention des risques miniers. Je n’ai pas trouvé l’amendement les concernant à cet endroit du texte ; il est sans doute placé ailleurs.

On m’a objecté que les PPRT s’appliquaient à des risques très particuliers et on les a opposés aux PPRI – les plans de prévention des risques d’inondation. Mais les plans de prévention des risques miniers ne font pas référence à des risques naturels car, par essence, les risques miniers ont été créés par l’activité industrielle et le sont encore parfois aujourd’hui, même si c’est très rare.

Je souhaite que nous ayons une réflexion à ce sujet, peut-être en deuxième partie du budget. Si nous adoptons des dispositions à propos des PPRT, j’aimerais que nous ayons la même attention pour les PPRM. Je ne suis pas opposé à ce que l’on traite la question sous la forme d’une subvention au lieu d’un crédit d’impôt.

M. le président. La parole est à M. Michel Vergnier.

M. Michel Vergnier. Madame la ministre, monsieur le rapporteur général, nous ne pouvons pas être opposés à l’idée de subvention. Toutefois, si nous optons pour une subvention, il faudra trouver à quelle ligne l’inscrire. En outre, cet ajout ne peut pas se faire à enveloppe constante. Je ne veux pas engager une polémique mais, pour ce qui est des collectivités territoriales, avec le gel des crédits, si vous appliquez cette mesure à enveloppe constante, ce qui se fait dans un domaine ne pourra pas se faire dans l’autre.

Par conséquent, si nous voulons opter pour une subvention, il faudra abonder, d’une façon ou d’une autre, une certaine forme d’aide. Faute de quoi, nous n’y arriverons pas.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Valérie Pécresse, ministre. Pour lever toute ambiguïté, je précise que l’idée n’est pas de transformer le crédit d’impôt en subvention. Le rapporteur général a simplement souligné qu’il ne fallait pas adresser à ce crédit d’impôt, qui s’apparente à un subventionnement de travaux, la critique de la dépense fiscale. N’adoptons pas une position de principe sur ce point spécifique ! Nous voulons conserver un crédit d’impôt, maintenir son taux et discuter du plafond en deuxième partie.

(L’amendement n° 345 est retiré.)

M. le président. Je suis saisi de trois amendements, nos 157 rectifié, 166 et 280, pouvant être soumis à une discussion commune.

Les deux premiers sont identiques.

La parole est à Mme Annick Girardin, pour soutenir l’amendement n° 157 rectifié.

Mme Annick Girardin. Madame la ministre, vous évoquez la réduction des niches fiscales. Notre amendement vise précisément à abaisser le niveau de plafonnement global des niches fiscales à 10 000 euros au lieu de 18 000, sans ajout d’une fraction de revenu imposable.

Une telle mesure permettrait de limiter les effets d’aubaine liés à la multiplication des niches fiscales et ne concernerait que les contribuables les plus aisés.

M. le président. La parole est à M. Pierre-Alain Muet.

M. Pierre-Alain Muet. Notre amendement n°166 est identique.

Cela fait longtemps que la commission des finances discute du plafonnement des niches fiscales. Certaines mesures ont d’ailleurs été prises. En 2009, le plafonnement a été fixé à 25 000 euros plus 10 % du revenu imposable et, en 2011, à 18 000 euros plus 6 % du revenu imposable. Si nous voulons limiter l’optimisation fiscale et rendre véritablement incitatifs les quelques dispositifs qu’il faudrait garder sans conduire à contourner l’impôt, il faut instaurer un plafonnement beaucoup plus strict. J’estime qu’un plafond de 10 000 euros sans ajout d’une fraction de revenu imposable garantirait que l’impôt commun soit payé par tout le monde en fonction de ses revenus. C’est la seule façon de supprimer progressivement les niches fiscales. Un plafonnement global plus strict rendra inefficaces beaucoup de niches permettant de faire de l’optimisation fiscale.

M. le président. La parole est à Mme Martine Billard, pour soutenir l’amendement n°280.

Mme Martine Billard. Cet amendement a le même objet que le précédent. Il vise à réduire le plafonnement de 18 000 à 10 000 euros.

Pour pouvoir déduire de son impôt 18 000 euros, il faut déjà être imposable à plus de 18 000 euros. Je vous laisse imaginer le nombre de contribuables qui doivent payer plus de 18 000 euros d’impôt sur le revenu, compte tenu de tous les dispositifs fiscaux qui permettent, par des moyens divers et variés, de réduire la note…

Je l’ai dit lorsque nous débattions des réductions d’impôt pour dons aux partis politiques, il faut tout remettre à plat. Nous, députés du Front de gauche, souhaitons limiter strictement les niches fiscales à quelques cas qui permettent de créer de l’emploi ou ont un objectif social précis, comme la dépendance ; les personnes dépendantes ont effectivement besoin de quelqu’un pour les aider. Je pense également aux dispositifs environnementaux.

L’immense majorité des dispositifs existants sont coûteux pour les finances publiques et, dans la majorité des cas, profitent aux mêmes contribuables. En attendant une grande réforme, pour laquelle nous proposerons plusieurs pistes et un texte dans le cadre du débat budgétaire, nous voulons réduire cet avantage en le plafonnant à 10 000 euros, ce qui laisse encore beaucoup de marge pour réduire l’imposition. Lorsqu’ils entendront parler de la possibilité de réduire son impôt de 10 000 euros, nombre de nos concitoyens se demanderont sur quelle planète ils vivent, car leurs problèmes sont très éloignés de cela !

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur ces trois amendements ?

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Si vous me le permettez, monsieur le président, j’émettrai également un avis sur les deux amendements suivants, nos 11 et 211 rectifié, qui traitent du même sujet.

Le plafonnement global est une création de la commission des finances. C’est nous qui l’avons mis en place dans le cadre de la loi de finances pour 2009. Nous l’avons fait jouer à partir des revenus de 2009, avec un dispositif plafonné à 25 000 euros plus 10 % du revenu imposable. Mais j’avais indiqué dès cette époque, avec Didier Migaud, alors président de la commission des finances, que nous ajusterions sans doute ce plafond à la baisse, car il s’agit d’un outil très puissant pour réduire les niches fiscales.

La raison pour laquelle j’émets un avis négatif sur ces cinq amendements, c’est qu’avec un plafond de 18 000 euros plus 6 % du revenu imposable en 2011, nous sommes à la limite de l’aide fiscale à l’investissement industriel outre-mer. Si nous descendons en deçà, nous risquons de ne plus pouvoir la maintenir.

Nos collègues de l’outre-mer ne sont pas présents aujourd’hui, à l’exception de Mme Girardin. Cette aide fiscale s’applique, bien sûr, à Saint-Pierre-et-Miquelon, mais aussi aux Antilles et à la Réunion. Il est donc impossible de descendre en deçà.

Je vais citer un exemple pour montrer à quel point ce plafonnement est puissant : l’an dernier, outre-mer, la dépense fiscale était d’environ 600 millions, alors que, cette année, elle n’est évaluée qu’à un peu plus de 400 millions. La réduction est forte et je pense qu’il faut en rester là.

Nous avons modifié ce plafonnement à la baisse au cours des deux dernières années. Aujourd’hui, nous ne pouvons plus continuer, car ce serait prendre un gros risque. Je ne suis pas inquiet quand il s’agit de dispositifs du type Malraux.

M. Michel Bouvard. Il a été divisé par 10 ! Il est passé de 50 millions à 5 millions !

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Je suis inquiet dès lors que l’investissement outre-mer est en cause.

M. le président. La parole est à M. Henri Emmanuelli.

M. Henri Emmanuelli. Monsieur le rapporteur général, n’évoquez pas trop l’argument de l’outre-mer parce que nous savons tous que cette niche fiscale ne bénéficie pas aux gens de l’outre-mer. Elle bénéficie à des contribuables de l’hexagone qui, eux-mêmes, bénéficient des conseils éclairés de cabinets d’optimisation fiscale. Ce soutien à l’investissement n’a donc que les apparences du fonctionnement.

Malheureusement, pour avoir été il y a fort longtemps à l’origine de ce dispositif pour l’outre-mer, j’ai pu constater que l’activité économique ne s’y développait pas beaucoup et qu’en revanche nombre de nos compatriotes hexagonaux avaient su en tirer le plus grand profit.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Valérie Pécresse, ministre. Monsieur Emmanuelli, si certains de vos collègues d’outre-mer étaient dans cet hémicycle…

M. Michel Vergnier. Il y a Mme Girardin.

Mme Valérie Pécresse, ministre. C’est juste. Vous avez peut-être, madame la députée, une vision un peu différente de celle de M. Emmanuelli.

Pour ma part, j’ai reçu nombre de délégations ultramarines de parlementaires et d’élus qui sont très attachés à maintenir la défiscalisation des investissements productifs, et en faveur du logement social.

Mme Martine Billard. Bien sûr, ce sont eux qui en profitent !

Mme Valérie Pécresse, ministre. Tous ces élus affirment que si nous ne maintenons pas ces défiscalisations, l’investissement productif et le logement social –deux composantes importantes du développement de l’outre-mer – plongeraient.

M. Henri Emmanuelli. Je vous suggérerai d’autres méthodes, madame la ministre.

Mme Valérie Pécresse, ministre. Je ne veux pas polémiquer à ce sujet, monsieur Emmanuelli. Le Gouvernement est conscient de la situation. Nous avons été les premiers à plafonner les niches fiscales : en 2009 à 25 000 euros plus 10 % du revenu imposable, en 2010 à 20 000 euros plus 8 % et en 2011 à 18 000 euros plus 6 %.

Aujourd’hui, les deux principales lignes de fuite de l’impôt sur le revenu sont, d’une part, le mécénat, qui est hors plafonnement global – les dons à la recherche, aux associations d’utilité publique, aux œuvres culturelles –, d’autre part, la part variable du plafonnement, c’est-à-dire les 6 % du revenu imposable.

Pour ces raisons, j’émets un avis défavorable aux trois premiers amendements qui visent à fixer un plafond en volume. En revanche, j’accueillerai avec beaucoup plus de bienveillance l’amendement du Nouveau Centre et celui de M. de Rugy, même si ce dernier descend le taux un peu bas à mon sens. Cela étant, l’amendement du groupe NC va nous permettre de trouver, comme d’habitude, une voie moyenne, la voie de la raison, bref, le bon compromis…

M. Charles de Courson. La voie de la sagesse !

Mme Valérie Pécresse, ministre. …et la sagesse. Le Gouvernement proposera donc d’abaisser une nouvelle fois le plafond global des niches en le fixant à 4 % mais, comme l’a rappelé fort judicieusement le rapporteur général, nous demanderons aux auteurs des deux amendements suivants de bien vouloir les redéposer en seconde partie, de façon que cette disposition ne s’applique que sur les revenus de 2012. Nous voulons éviter qu’elle ne soit rétroactive et ne change les règles du jeu pour les contribuables qui ont fait des dons cette année.

M. le président. La parole est à Mme Annick Girardin.

Mme Annick Girardin. Concernant la loi Girardin sur l’investissement industriel, c’est effectivement une perte de 160 millions d’euros pour l’outre-mer que nous avons enregistrée, et nous n’avons pas eu beaucoup d’explications à ce sujet.

Pour pousser la réflexion plus avant s’agissant de l’outre-mer, nous devons nous demander ce qu’il faut retenir en niches fiscales et en subventions. Par exemple, madame la ministre, vous parlez du logement social. Pour ma part, je prône depuis longtemps le retour à la ligne budgétaire unique et le soutien de l’État par ce moyen plutôt que par la défiscalisation.

C’est une réflexion qu’il faudra mener avec tous les élus de l’outre-mer, comme vous souhaitez le faire sur d’autres sujets avec les élus de la métropole. Pour ce qui me concerne, je reste très ouverte à la discussion. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. le président. Je suis donc saisi de deux amendements, nos 11 et 211 rectifié, pouvant être soumis à une discussion commune, que M. le rapporteur général nous suggère d’examiner avec les trois amendements précédents.

La parole est à M. François de Rugy, pour défendre l’amendement n° 11.

M. François de Rugy. L’approche est en effet la même. Il s’agit à la fois de réduire le coût des niches fiscales pour le budget général de l’État et de remettre progressivement de la justice dans notre fiscalité.

Hier, nous avons beaucoup parlé des seuils de 250 000 et 500 000 euros, ceux retenus pour la contribution sur les très hauts revenus. En l’occurrence, le taux de 6 % s’appliquant à un revenu de 500 000 euros donnera droit à une réduction d’impôt de 30 000 euros. Ainsi, certaines personnes pourront bénéficier d’un avantage fiscal cumulé de 48 000 euros, soit 4 000 euros par mois, l’équivalent de quatre SMIC ! Je pense donc, monsieur le rapporteur général, qu’il nous reste des progrès à accomplir et que nous ne devons pas nous contenter du plafonnement actuel.

Votre réponse m’a, de plus, quelque peu surpris. En effet, vous ne nous avez pas répondu sur le coût pour le budget de l’État, alors que vous nous avez habitués dans les débats précédents à parler de votre objectif : le coup de rabot sur les niches fiscales, le fameux rabot dont certains avaient dit que c’était plutôt une lime à ongles ! Si vous aviez vraiment la volonté de raboter, année après année, les niches fiscales afin de réduire le déficit, vous ne nous auriez pas fait une telle réponse. Vous vous êtes en effet placé sur le terrain du contribuable fortuné qui réalise des investissements très importants – et que ce soit outre-mer ou ailleurs ne change pas grand-chose – ce contribuable bénéficiant, de ce fait, d’une ristourne considérable.

Mme la ministre a évoqué l’amendement de nos collègues du Nouveau Centre, qui n’intègre pas, dans le mode de calcul, les investissements Scellier. Nous estimons pour notre part nécessaire une approche globale des niches fiscales. Les avantages fiscaux dans l’immobilier ont beaucoup d’effets pervers. Ils tirent les prix vers le haut et rendent, de ce fait, l’accès au logement encore plus difficile, alors qu’ils n’ont pas fait la démonstration de leur utilité s’agissant de l’offre locative à loyer intermédiaire. Donc, nous voulons intégrer ces avantages dans le mode de calcul et les soumettre à ce coup de rabot que nous voulons plus franc.

M. le président. La parole est à M. Charles de Courson, pour soutenir l’amendement n° 211 rectifié.

M. Charles de Courson. Le groupe Nouveau Centre a été le premier à être convaincu de la nécessité d’un plafonnement. Tout le monde a fini par reconnaître ensuite que c’était une bonne idée. Seuls les gouvernements de l’époque nous répondaient encore, comme toujours, que c’était impossible. Puis, avec le rapporteur général, nous avons progressivement réussi à mettre en place un plafonnement des niches.

Ce dispositif n’est pas parfait, tout d’abord parce que de nombreuses niches, dont certaines très importantes, en sont exclues. Je rappelle que, sur les 360 niches applicables à l’impôt sur le revenu – autant que de jours de l’année – nous n’en plafonnons qu’une vingtaine. Comme nous ne sommes pas des sauvages, nous avons commencé à un niveau peu élevé, comme le rappelle souvent M. le rapporteur général. En effet, on estime que la mesure n’a rapporté guère plus de 20 à 30 millions la première année, ce faible résultat étant naturellement dû à un effet de substitution entre les niches sous plafond et hors plafond. Mais nous avons progressé peu à peu. Comme l’a rappelé Mme la ministre, nous avons, en deux ans, abaissé le plafond de 25 000 à 18 000 euros et ramené le taux de 10 % à 6 %. Nous proposons de consentir un petit effort supplémentaire de 2 % en le fixant à 4 %.

Comme nous sommes, au groupe Nouveau Centre, des gens modérés, nous avons exclu de ce plafonnement les investissements Scellier, les investissements locatifs non professionnels et les investissements outre-mer, pour satisfaire notamment Mme Girardin, bien que Saint-Pierre-et-Miquelon ne coûte pas bien cher puisqu’il n’y a, là-bas, presque aucun investissement. C’est d’ailleurs pour cela qu’elle les défend avec beaucoup de vigueur ! (Sourires.)

Nous devrons aussi augmenter, dans les années à venir, le nombre de niches sous plafond. Cela prendra du temps, mais nous devons progresser dans cette direction.

Je vous remercie, madame la ministre, d’avoir précisé que le Gouvernement était favorable à cet amendement.

M. le président. La parole est à Mme Martine Billard.

Mme Martine Billard. Quand on vous écoute, monsieur de Courson, on a l’impression que tout est calme, que tout va bien et qu’il n’y a pas de crise. Les modifications proposées sont donc totalement homéopathiques – modérées, diriez-vous.

Le Gouvernement et le groupe Nouveau Centre nous tiennent un discours sur la crise et sur la nécessité de contrôler les dépenses publiques. Or les dépenses publiques, ce sont aussi les non-recettes par choix politique, au moyen des mesures fiscales mises en œuvre depuis 2002 notamment. Ce n’est pas très sérieux.

Vous excluez, de plus, les investissements Scellier, lesquels s’élèvent aujourd’hui à 2,4 milliards pour 60 000 logements, ce qui représente un coût moyen pour le budget de l’État de 40 000 euros par logement. Cette mesure s’applique, de plus, à des constructions dans des zones qui ne sont pas tendues s’agissant du marché immobilier. Ainsi, des personnes sensibles à la publicité massive des investisseurs immobiliers et pensant réaliser une bonne affaire, ont opté pour l’investissement Scellier. Mais, alors qu’elles espéraient percevoir un loyer régulier leur permettant de vivre mieux une fois à la retraite, elles ne parviennent pas, faute d’avoir trouvé un locataire, à rembourser leur emprunt et se retrouvent dans une situation difficile. L’investissement Scellier est de plus en plus une arnaque. Ne pas l’inclure, quand on connaît ses effets pervers, dans la liste des niches concernées par l’abaissement du plafond signifie que vous comptez continuer à développer cet avantage, qui coûtera encore une fortune au budget de l’État et ne donnera que très peu de résultats en termes de logement. Aujourd’hui, en effet, la majorité de la population ne peut louer que des logements sociaux de type PLAI ou PLUS. Or vous lui proposez dans le cadre du Scellier des locations à des prix trop élevés.

Modérez un tout petit plus fort, monsieur de Courson ! (Sourires.) Intégrez au moins l’investissement Scellier !

M. le président. La parole est à M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson. Il semble qu’il y ait un débat, au sein du parti socialiste, entre la gauche prétendument dure et la gauche prétendument molle. J’ai, pour ma part, toujours été modéré, mais fermement modéré ! (Sourires.)

Je suis d’accord, madame la ministre, pour retirer cet amendement et le représenter lors de l’examen de la seconde partie, afin qu’il ne soit pas rétroactif.

M. le président. La parole est à Mme Fabienne Labrette-Ménager.

Mme Fabienne Labrette-Ménager. Madame Billard, s’agissant des investissements Scellier, un contrat de bail est désormais forcément signé pour neuf ans avec l’investisseur.

Mme Martine Billard. Mais beaucoup se sont fait avoir !

Mme Fabienne Labrette-Ménager. Le propriétaire trouvera donc forcément un locataire. Il ne s’agit plus des premiers investissements. Je tenais à le spécifier.

M. François de Rugy. Il reste que cela tire les prix vers le haut !

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Valérie Pécresse, ministre. Je rappelle notre proposition. Nous demandons au groupe Nouveau Centre de retirer son amendement pour l’examiner en seconde partie. Il conviendra, de plus, de le réécrire, parce que le Gouvernement est favorable à ce que le dispositif Scellier soit inclus dans le plafonnement global des niches. Je tenais à le préciser à M. de Rugy.

(Les amendements n°s 157 rectifié, 166, 280, 11 et 211 rectifié sont retirés.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 183.

La parole est à M. Pierre-Alain Muet.

M. Pierre-Alain Muet. Un bon impôt doit avoir une assiette large et un bon plafonnement porter sur une assiette large.

Nous proposons, dans le cadre de ce plafonnement, de réintégrer les nombreuses niches, soit une cinquantaine, qui n’y sont pas soumises. Toutes les niches doivent être plafonnées. Nous discutions tout à l’heure du financement des partis politiques. Il n’y a pas de raison que cette niche échappe au plafonnement.

J’apporterai, enfin, une rectification à cet amendement. Je souhaite exclure de cette réintégration l’article 200 sexies relatif à la prime pour l’emploi, laquelle est typiquement une modalité de réalisation de l’impôt. Ce n’est pas une niche, mais un impôt négatif corrigeant le caractère proportionnel de la CSG, laquelle touche les revenus les plus modestes dès le premier euro.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Lorsque nous avons introduit le plafonnement global, nous avons distingué entre les avantages fiscaux choisis et les avantages fiscaux subis, par exemple celui lié aux PPRT, qui ne figure pas dans le plafonnement. En revanche, les emplois familiaux ne subiront pas le coup de rabot, si je ne me trompe, mais seront concernés par le plafonnement global. Il ne faut pas confondre le rabot, dont l’assiette est assez restreinte, avec le plafonnement global, qui concerne de nombreuses réductions d’impôt, sans pour autant qu’y soit intégré ce qui a un lien avec le handicap ou le mécénat, ou encore les investissements du type Restos du cœur. L’assiette du plafonnement global est donc beaucoup plus large que celle du rabot.

M. le président. La parole est à M. Christian Eckert.

M. Christian Eckert. Cet amendement a été merveilleusement défendu par Charles de Courson. Il a en effet précisé qu’il serait judicieux de plafonner toutes les niches. Cher Charles de Courson, vous devriez, en toute cohérence, voter cette mesure.

Le sujet est si important que nous avons relevé dans le rapport de Gilles Carrez que, parmi les ménages imposés à la dernière tranche – 41 % – disposant donc d’un revenu imposable de plus de 70 830 euros par part, près de 4 800 ont annulé totalement leur impôt, cette année, par le jeu des niches fiscales. Cerise sur le gâteau, un peu plus de 9 000 l’ont réduit dans une fourchette comprise entre 70 et 100 %. Je ne l’invente pas, je ne l’ai pas appris rue de Solferino, je ne l’ai pas lu dans un journal d’extrême gauche : c’est extrait du rapport de Gilles Carrez !

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Ai-je un droit de réponse, monsieur le président ?

M. le président. En tant qu’auteur de ce rapport, certainement.

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Je vous remercie, monsieur Eckert, de lire aussi attentivement mes rapports. Vous n’avez toutefois pas cité l’essentiel.

Lorsque nous avons introduit le plafonnement global, nous avons bien expliqué qu’il produirait ses effets progressivement. En effet, des dispositifs fiscaux de type Malraux s’étalent sur plusieurs années et donnent droit à des reports. Vous qui êtes mathématicien savez qu’il y a une différence entre les stocks et les flux. Vous avez raison, l’an dernier, on comptait encore 4 000 foyers en termes de stock et 6 000 en termes de flux. L’an prochain, il n’y en aura plus que 2 000. Quand Didier Migaud et moi-même avons fait notre contrôle sur pièces et sur place en 2008, je peux vous dire qu’ils étaient beaucoup plus nombreux. Nous avons mis en place un système qui produit ses effets progressivement. Je ne vous cache pas que le jour, qui n’est pas si lointain, où l’on parviendra à zéro, nous aurons vraiment atteint notre objectif. Un peu de patience, monsieur Eckert !

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Valérie Pécresse, ministre. Je répondrai à l’interrogation tout à fait justifiée de M. Eckert. Je rappelle les chiffres : on recensait, en 2009, 6 500 foyers et, en 2010, 4 800 foyers annulant leur impôt. Nous ne possédons pas les chiffres pour 2011, mais ils seront évidemment inférieurs puisque le plafond a encore été abaissé. Nous acceptons de l’abaisser une nouvelle fois, ce qui entraînera une nouvelle baisse du nombre de ces foyers.

Il est intéressant de connaître les causes de cette annulation de fiscalité : la principale est le mécénat. Ce sont des personnalités qui décident de faire des dons soit à la recherche, soit à la culture, soit au social…

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Soit à une fondation universitaire !

Mme Valérie Pécresse, ministre. …voire à une fondation universitaire, ce que je souhaiterais, mais je crains malheureusement que ce ne soit pas le premier réceptacle de dons. L’université pourra le devenir quand les Français comprendront à quel point il est fondamental d’investir aussi dans l’enseignement supérieur.

J’ai regardé il y a peu une émission à laquelle participait M. Pierre Bergé, un proche du parti socialiste. Il expliquait qu’il préférait faire du mécénat…

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Y compris au profit du parti socialiste !

Mme Valérie Pécresse, ministre. J’imagine que les plafonds de déduction pour les dons au parti socialiste l’intéressent aussi. (Sourires.)

Bref, le mécénat est la principale ligne de fuite. La deuxième, c’est la partie variable, celle dont nous acceptons aujourd’hui d’abaisser le plafond. Nous sommes donc vraiment en train de réduire les lignes de fuite.

M. le président. La parole est à M. Henri Emmanuelli.

M. Henri Emmanuelli. Madame la ministre, cela ne se fait pas tellement d’évoquer le nom d’une personne dans l’hémicycle.

Cela dit, je comprends que cette personne préfère se consacrer au mécénat que payer des impôts. Il y a longtemps que nous avons compris que les gens ayant des moyens importants préféraient choisir l’affectation d’un prélèvement plutôt que de se le voir imposer par l’État. Cela tombe sous le sens, mais c’est ainsi que l’on arrive à de mauvais résultats.

Il en a été de même pour les niches fiscales dans les DOM, où l’on a substitué de la dépense fiscale à des subventions. Tout le monde y a contribué, j’en conviens, mais certains plus que d’autres. Au départ, en effet, la défiscalisation devait alimenter uniquement des activités de production, et puis un certain M. Pons l’a étendue à l’immobilier, aux bateaux et à d’autres biens. Je comprends que les élus d’outre-mer défendent un tel système, mais ce n’est pas la bonne méthode. Qu’il s’agisse du mécénat ou des dépenses fiscales, l’État doit prélever ce qui lui revient et, ensuite, faire des choix en octroyant des subventions.

(L’amendement n° 183 n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 405.

La parole est à M. Pierre-Alain Muet.

M. Pierre-Alain Muet. Il y a, monsieur le rapporteur général, bon nombre de niches choisies. Vous avez raison de souligner que, lorsqu’une niche est une subvention de nature forfaitaire, cela a un sens de ne pas en tenir compte dans le plafonnement. Mais quand on regarde en détail les niches hors plafonnement, il apparaît qu’un grand nombre d’entre elles ont indéniablement le statut de niche fiscale.

L’amendement n° 405 vise à réintroduire les plus-values de cessions mobilières et immobilières dans le droit commun, c’est-à-dire dans le barème, comme c’était le cas avant 2004. Je persiste à dire que les plus-values de cessions mobilières ou immobilières sont des revenus et qu’il n’y a aucune raison de ne pas les imposer au barème de l’impôt sur le revenu. La justice fiscale, c’est contribuer selon ses moyens.

Je me souviens du débat sur le projet de loi de finances rectificative au début de septembre. On nous a expliqué qu’il était choquant de soumettre les plus-values immobilières réalisées par certains contribuables lors de la revente de leur résidence secondaire à un prélèvement de 19 % lorsqu’ils avaient de petits revenus. Il y a une façon très simple de résoudre ce problème soulevé sur certains bancs, c’est de soumettre ces plus-values au barème de l’impôt comme nous le proposons.

(L’amendement n° 405, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de quatre amendements, nos 215, 287 rectifié, 17 et 258, pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à M. Charles de Courson, pour défendre l’amendement n° 215.

M. Charles de Courson. Nous avons déposé cet amendement pour rappeler que nous avons un problème avec les plus-values intragroupes, que ce soient des titres de participation ou des titres de placement.

Le dispositif actuel, c’est l’exonération des plus-values de cession de parts d’entreprise. Il est en effet très facile de contourner une taxation au sein d’un groupe : il suffit de remonter les participations à prix coûtant ou à valeur nette comptable au niveau de la holding située par exemple aux Pays-Bas ou en Belgique, pays où il n’y a pas de taxation, et d’y réaliser la plus-value. Le coût de cette exonération a explosé ; selon les documents budgétaires, il est passé de 3,4 milliards en 2007 à 12,5 en 2008 pour revenir à 6,1 en 2009. Cela dit, il est dû pour partie à la réalisation de plus-values qui, de toute façon, auraient été perçues via les têtes de groupe situées à l’extérieur de la France, et cela ne représente donc pas du tout le véritable coût.

L’inconvénient de la mesure proposée, c’est qu’elle risque de taxer essentiellement les PME, les grands groupes internationalisés étant capables, j’y insiste, de contourner la taxation.

La sagesse, une nouvelle fois, serait d’essayer d’aboutir en Europe à un accord qui soit le plus large possible sur la taxation de ces plus-values. On voit bien, en effet, qu’à chaque fois que l’on fixe une nouvelle règle, elle est contournée, notamment par les moyens et grands groupes.

Il s’agit donc d’un amendement de réflexion. Comment taxer ces plus-values ? Il nous semble que ce doit être dans un cadre européen. C’est en fait une question que nous vous posons, madame la ministre : est-on capable d’avancer au sein de l’Union vers un début d’harmonisation de l’IS, comme le Président de la République en avait lancé l’idée ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Valérie Pécresse, ministre. Monsieur de Courson, vous avez bien vu le couple franco-allemand prendre le leadership de ce mouvement. François Baroin vous fera des propositions en lien avec Wolfgang Schäuble en tout début d’année prochaine.

M. Henri Emmanuelli. Ce sera trop tard !

(L’amendement n° 215 est retiré.)

M. le président. La parole est à M. Pierre-Alain Muet.

M. Pierre-Alain Muet. Je trouve cet amendement très intéressant. Je le reprends.

M. le président. La parole est à Mme Martine Billard, pour défendre l’amendement n° 287 rectifié.

Mme Martine Billard. L’objectif est le même : en finir avec cette exonération qui favorise très fortement les grands groupes et pèse très lourdement sur nos finances publiques, 20 milliards en quelques années, alors que nous avons absolument besoin de reconstituer les recettes de l’État.

En plus, on ne peut pas dire qu’elle ait favorisé l’investissement en France. C’est en général l’argument invoqué : il faut alléger la fiscalité sur les entreprises afin qu’elles ne délocalisent pas et réalisent au contraire des investissements productifs dans notre pays.

Dans ces conditions, et ce n’est pas la première année, nous proposons de revenir sur cette exonération de manière à récupérer les sommes abusivement perdues pour le budget de l’État.

M. le président. La parole est à M. François de Rugy, pour défendre l’amendement n° 17.

M. François de Rugy. On parle beaucoup des niches fiscales pour les ménages, et c’est vrai que des mesures ont été prises pour les raboter, mais assez peu de celles qui concernent les entreprises. Or il faut bien parler aussi de la fiscalité des entreprises, à moins de considérer qu’elle a vocation à se réduire année après année parce que la compétition internationale oblige à l’alléger toujours plus et que, si l’on veut s’aligner sur les taux de fiscalité les plus bas, les niches n’y suffiront pas.

En l’occurrence, la niche Copé a vu son coût exploser. On peut dire, il est vrai, que c’est un coût théorique parce que, sans ce dispositif, on aurait eu une évasion fiscale par d’autres biais. Mais, très franchement et très amicalement, monsieur de Courson, déposer un amendement juste pour obtenir des réponses sur l’harmonisation fiscale, ce n’est pas très offensif. La modération dont vous vous réclamiez tout à l’heure bascule vers la mollesse ! (Sourires.)

Je suis d’ailleurs étonné, monsieur le président, que Mme la ministre ait répondu immédiatement à M. de Courson alors que les amendements sont en discussion commune, mais cela me permet de vous répondre, madame la ministre, car je ne suis pas du tout convaincu.

Que M. Baroin vienne nous faire des propositions parce qu’il a rencontré M. Schäuble, ce n’est pas ça l’harmonisation fiscale européenne. Vous savez très bien qu’on nous balade à ce sujet depuis cinq ans. Le Président de la République a déclaré après la crise que rien ne serait plus jamais comme avant, qu’on allait moraliser le capitalisme, et, sommet européen après sommet européen, nous en sommes encore à des non-décisions.

La vraie solution durable, solide, c’est en effet l’harmonisation fiscale européenne. Alors pourquoi, par exemple, n’avez-vous rien demandé à l’Irlande ? Ce pays est en difficulté. On pourrait l’aider en contrepartie d’un relèvement, progressif, de son taux d’imposition sur les sociétés. Que faites-vous de concret pour harmoniser la fiscalité des entreprises, mais aussi pour lutter contre la délocalisation fiscale, parce que nous savons très bien qu’il y a des artifices juridiques et comptables qui permettent d’être imposé dans un pays où l’on n’a pas d’activité. On a parlé ici de Google ou de sociétés de ce genre qui réussissent à avoir leur activité en France et leur fiscalité au Luxembourg !

J’attends des réponses beaucoup plus précises de votre part, madame la ministre, sur la façon de lutter contre ces délocalisations fiscales.

M. le président. La parole est à M. Pierre-Alain Muet, pour défendre l’amendement n° 258.

M. Pierre-Alain Muet. Cet amendement vise à supprimer l’exonération des plus-values sur titres de participation quand elles concernent la cession de titres de sociétés détenues via des fonds communs de placement à risque, les FCPR, car ces opérations non seulement profitent de la niche Copé mais ne supportent même pas la quote-part pour frais et charges.

Je regrette que M. de Courson ait retiré son amendement n° 215 et c’est pourquoi je l’ai repris. Nous avons eu de nombreux débats sur la réduction du coût de la niche Copé. Le Conseil des prélèvements obligatoires a en effet rappelé que ce dispositif était l’un des plus favorables des pays européens et qu’il était donc propice à des économies. Pour M. de Courson comme pour M. Borloo ou M. Hénart, il ne fallait surtout pas y toucher. J’observe qu’ils sont prêts aujourd’hui à avancer. C’est très bien et je ne fais que les encourager en reprenant cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur ces quatre amendements ?

M. Gilles Carrez, rapporteur général. La commission les a rejetés en faisant observer que relever la quote-part de 5 à 10 % était la bonne mesure.

M. Henri Emmanuelli. Non !

M. Gilles Carrez, rapporteur général. En renvoyant ainsi, de fait, à un taux d’imposition à 3,33 %, nous avons trouvé le bon équilibre par rapport à la fiscalité des pays environnants.

Par ailleurs, monsieur Muet, si vous instauriez la fiscalisation de ces plus-values, vous seriez obligés, en symétrie, d’admettre l’imputation des moins-values, et je ne suis pas sûr qu’en ce moment vous seriez gagnant budgétairement. Réfléchissez bien à cet aspect de la question, qui est, je l’espère, conjoncturel, mais qui n’est pas négligeable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Valérie Pécresse, ministre. Défavorable.

Monsieur de Rugy, il y a une forme de paradoxe à exiger, à juste titre, plus de convergence fiscale en Europe, et à proposer une augmentation de la taxation des plus-values de cession alors que dix-sept pays européens les ont défiscalisées quasi totalement.

M. Henri Emmanuelli. Voilà qui montre que tout va bien budgétairement en Europe !

Mme Valérie Pécresse, ministre. Nous parlons de convergence, monsieur Emmanuelli, ne mélangez pas tout ! Pour une fois, laissez-moi répondre tranquillement à M. de Rugy sans faire de l’obstruction.

Effectivement, monsieur de Rugy, il y aura du concret dans la convergence fiscale franco-allemande, mais le concret, cela ne consiste pas à annoncer à nos amis allemands que nous allons diverger aujourd’hui massivement et taxer à 19 % un produit qu’ils détaxent.

Nous avons détaxé ces plus-values parce qu’un monsieur qui s’appelait Michel Charzat et n’était pas député de l’UMP, avait rédigé un rapport selon lequel trop de holdings d’entreprises se créaient à l’étranger en vue d’obtenir une défiscalisation. Un amendement, non de M. Copé mais de M. le sénateur Marini, a donc été adopté pour rendre cette défiscalisation possible en France.

Aujourd’hui, vous appelez cela la « niche Copé » ; je ne m’attarderai pas sur cette appellation mais je rappellerai plusieurs choses.

Dans le projet de loi de finances rectificative, nous avons doublé la quote-part pour frais et charges qui s’applique à ces ventes de valeurs mobilières, et qui est donc à présent de 10 %. C’est un frottement fiscal important, qui nous éloigne de la moyenne européenne : nous fiscalisons davantage ces cessions d’actifs que dix-sept de nos voisins. Par conséquent, monsieur Emmanuelli, monsieur de Rugy, si vous voulez taxer plus, c’est simple, vous n’aurez plus d’assiette !

M. Henri Emmanuelli. On connaît la rengaine !

Mme Valérie Pécresse, ministre. L’assiette va faire « pschitt », selon la formule consacrée, parce que, en Espagne, en Belgique, en Suisse, en Italie, en Allemagne, au Luxembourg, dans tous les pays qui nous entourent, les entreprises installeront des filiales et défiscaliseront.

Dans le plan anti-déficit de François Fillon, 4 milliards d’effort supplémentaire sont demandés aux grands groupes, avec l’impôt sur les sociétés minimal, le doublement de la quote-part, la suppression, à la demande de la commission des finances, du bénéfice mondial consolidé, l’augmentation de la C3S pour les banques et celle de la taxe sur les industries électriques et gazières… Ne nous dites, mesdames et messieurs les députés, que les entreprises sont moins taxées aujourd’hui qu’hier !

Mme Martine Billard. Les grands groupes, si !

Mme Valérie Pécresse, ministre. Nous harmonisons la fiscalité avec l’impôt sur les sociétés minimal, mais il faut désormais que nous travaillions la main dans la main avec l’Allemagne, et non que nous divergions. Pour ces raisons, le Gouvernement donne un avis défavorable aux amendements.

M. le président. M. Charzat n’étant pas en mesure de répondre lui-même (Sourires), la parole est à M. Henri Emmanuelli.

M. Henri Emmanuelli. Comme cela fait au moins trois fois que Mme la ministre nous ressort la rengaine,…

Mme Valérie Pécresse, ministre. Parce que c’est vrai !

M. Henri Emmanuelli. …je vais mettre les choses au point une fois pour toutes. Le rapport Charzat a été rendu en 2001. Le président de la commission des finances de l’époque a fait alors savoir publiquement que ce rapport avait vocation à finir à la poubelle. Si je comprends bien, c’est là que M. Copé est allé le ramasser ! (Rires sur les bancs des groupes SRC et GDR.) N’allez pas chercher M. Charzat et demandez-vous plutôt pourquoi M. Copé fouillait dans les poubelles !

M. le président. La parole est à M. François de Rugy.

M. François de Rugy. Je ne gloserai pas sur la question de savoir si M. Copé est allé fouiller dans les poubelles de M. Emmanuelli, d’autant que des arrêtés interdisent ces pratiques. (Sourires.)

Plus sérieusement, madame la ministre, quand nous vous parlons d’harmonisation fiscale européenne, vous répondez : « France-Allemagne ». C’est un choix, mais qui ne représente pas la totalité de l’Union européenne à vingt-sept, dont dix-sept pays membres de la zone euro.

Mme Valérie Pécresse, ministre. C’est un début !

M. Michel Bouvard. Nous pouvons aussi comparer avec la Lituanie !

M. François de Rugy. De même, les Français ont le droit de savoir que l’impôt sur les sociétés représente une bien moindre recette, 12 milliards de moins exactement – ce sont vos chiffres –, que l’impôt sur le revenu. Il s’agit d’un transfert progressif que vous opérez d’année en année – je l’ai dit hier au sujet de la taxe professionnelle –, de la fiscalité des entreprises vers celle des ménages. C’est un choix ; encore faut-il l’assumer.

Enfin, je voudrais que vous nous répondiez sur le fond : pensez-vous que toute cette politique dont vous justifiez aujourd’hui encore l’objectif, qui consiste à tirer vers le bas la fiscalité des entreprises en invoquant tout à tour la concurrence européenne et la concurrence mondiale, ait été bénéfique à l’Union européenne ? Pensez-vous qu’ait été bénéfique cette mise en concurrence des États européens sur leur fiscalité ? Ne croyez-vous pas que la crise a un tout petit rapport avec cette politique menée depuis des années ? M. Sarkozy lui-même a dit qu’un monde nouveau sortirait de la crise ; il est temps de passer à l’acte. Ce n’est peut-être pas en le faisant à l’échelle d’un budget comme celui de la France, mais c’est en prenant des mesures concrètes et en mettant sur la table des propositions, et non en confiant à M. Juncker, Premier ministre du Luxembourg, paradis fiscal numéro un au cœur de l’Europe, la présidence de l’Eurogroupe !

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Voilà !

M. Henri Emmanuelli. Ils ne se rendent même pas compte !

M. le président. La parole est à M. Pierre-Alain Muet.

M. Pierre-Alain Muet. Le président de la commission des finances de l’époque a conseillé de mettre le rapport Charzat à la poubelle, et certains conseillers du Premier ministre de le laisser sur un rayon à la critique rongeuse des souris. C’est là qu’il est resté jusqu’à ce que M. Copé l’y découvre et le ressorte.

M. le sénateur Marini disait alors : « Ne vous inquiétez pas, nous allons gagner de l’argent avec ce dispositif fiscal. Il coûtera un peu d’argent au début mais il rapportera tellement à l’avenir qu’au final son coût sera nul. » Je crois même que ces propos ont été repris par M. Copé. Le coût de cette niche était évalué à un petit milliard au début et zéro au bout d’un certain temps. Mais le Conseil des prélèvements obligatoires estimait qu’il pourrait atteindre une dizaine de milliards d’euros. Il s’agit d’une niche extrêmement favorable.

M. le rapporteur général nous indique que la loi de finances rectificative a relevé la quote-part de 5 à 10 %. Mais le Conseil des prélèvements obligatoires conseille de la porter à 20 %. L’un de nos amendements, qui sera présenté un peu plus loin, reprend cette proposition. Nous parlons de convergence entre pays européens ; eh bien, la question a été soigneusement étudiée par le Conseil des prélèvements obligatoires et la convergence plaide pour que la niche Copé soit ramenée dans la moyenne européenne, étant entendu qu’elle est aujourd’hui beaucoup trop favorable.

(Les amendements nos 215, 287 rectifié, 17 et 258, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)

M. le président. La parole est à Mme Martine Billard, pour soutenir l’amendement n° 281.

Mme Martine Billard. Il s’agit de supprimer le dispositif ayant reçu le nom de « pacte Dutreil ».

(L’amendement n° 281, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à Mme Martine Billard, pour soutenir l’amendement n° 242.

Mme Martine Billard. Cet amendement porte sur la question de l’intégration ou non des œuvres d’art et objets d’antiquité et de collection dans l’assiette de l’ISF. Aujourd’hui, ces biens ne sont pas compris dans le calcul de cet impôt. Nous proposons de maintenir l’exonération dans seulement trois cas : pour les biens meubles qui constituent le complément artistique des immeubles classés ou inscrits à l’inventaire supplémentaire des monuments historiques, pour les œuvres présentées au public – car, dans ce cas, elles participent au rayonnement de notre pays et à la diffusion du savoir –enfin, pour les œuvres des artistes contemporains encore en vie.

Les propriétaires d’œuvres d’art sont les gardiens d’un patrimoine universel, qu’ils ont en général obtenu grâce à leur fortune, mais il peut très bien arriver qu’ils les gardent pour eux-mêmes. Dans ce cas, rien ne justifie qu’elles leur permettent de s’exonérer de l’impôt. Il convient de distinguer entre ceux qui, de manière permanente ou ponctuelle, permettent que ces œuvres du patrimoine culturel national ou mondial soient accessibles, et les autres.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Défavorable.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Valérie Pécresse, ministre. Défavorable.

M. le président. La parole est à M. Daniel Garrigue.

M. Daniel Garrigue. L’amendement est intéressant dans son principe. Si nous sommes attachés à une imposition sur la fortune, reste le problème d’assiette lié aux œuvres d’art. Toutefois, la notion d’artiste contemporain vivant me gêne. Certains artistes très âgés ont une œuvre depuis longtemps stabilisée, qui représente un élément de patrimoine dont la valeur ne se modifiera pas. De plus, lorsque ces artistes se trouveront en mauvaise santé ou en fin de vie, nous risquons d’assister à certaines manœuvres spéculatives étranges. Je pose donc la question. Je ne sais pas ce qui justifie ce critère qui me semble poser problème.

(L’amendement n° 242 n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques, nos 128, 282 et 353.

La parole est à M. François de Rugy, pour soutenir l’amendement n° 128.

M. François de Rugy. Il est défendu.

Mme Martine Billard. De même que l’amendement n° 282.

M. Christian Eckert. Et l’amendement n° 353.

(Les amendements identiques nos 128, 282 et 353, repoussés par le Gouvernement et la commission, ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de quatre amendements, nos 319, 155, 241 et 13, pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à M. Pierre-Alain Muet, pour soutenir l’amendement n° 319.

M. Pierre-Alain Muet. Cet amendement vise à rétablir l’ISF dans sa formule originelle. Non que nous pensions que l’ISF, avec les taux qui existaient, ait été le meilleur impôt possible : nous considérons plutôt qu’il faut revenir au même montant d’ISF, mais avec une assiette plus large et des taux ajustés.

Ce n’est pas ce que nous proposons dans cet amendement, qui est simplement destiné à vous adresser le signal suivant : si vous souhaitez de la justice fiscale, il existe un moyen très simple pour y parvenir, c’est de revenir sur la réforme que vous avez conduite. Nous reviendrons, quant à nous, sur ces mesures, pour avoir le même montant d’ISF mais avec une assiette plus large, notamment par une définition plus rigoureuse de l’outil de travail : on peut aujourd’hui mettre dans ce concept le fait d’avoir travaillé ou possédé une entreprise alors qu’on est retraité, ce qui n’a pas grand sens.

Dès lors que l’assiette est plus large, il est possible de réajuster les taux, mais vous avez, vous, réduit l’assiette et les taux, c’est-à-dire que vous avez démantelé cet impôt.

M. le président. La parole est à Mme Annick Girardin.

Mme Annick Girardin. Nous sommes sur la même position. Il s’agit de rétablir l’ISF tel qu’il était avant la réforme de juillet 2011. Même si ce n’est pas l’idéal, cela recrée un peu de cohérence. En instaurant, dans ce projet de loi de finances, une contribution temporaire, le Gouvernement reconnaît lui-même qu’il faut revenir à l’idée d’imposer les revenus élevés. Au moment où la France est sous contrôle, où les agences de notation s’apprêtent à regarder de près le résultat de cette loi de finances, la France enverrait un signal fort en revenant sur cette mesure injuste.

M. le président. La parole est à Mme Martine Billard, pour défendre amendement n° 241.

Mme Martine Billard. Cet amendement suit la même idée que les deux précédents. S’il était juste de supprimer le bouclier fiscal, il aurait été plus juste de ne jamais le créer,…

M. Charles de Courson. Il existait déjà !

Mme Martine Billard. …et en plus, en échange, vous avez modifié l’ISF, ce qui a fait perdre des recettes à l’État. Nous proposons donc de rétablir le barème précédent. Cette mesure modérée rapporterait 2 milliards d’euros supplémentaires à l’État. Il faut tout de même rappeler que le nombre de millionnaires en France a augmenté de 18 % en un an, et que le pouvoir d’achat des millionnaires a augmenté de 340 % en trente ans.

M. Christian Eckert. Seulement ?

Mme Martine Billard. Je pense donc qu’il est assez difficile de pleurer sur le sort de ces concitoyens. Je rappelle aussi qu’avec la première tranche du barème que nous proposons, à partir de 800 000 euros avec décote sur la résidence principale, même à Paris, il n’y aura pas énormément d’habitants qui seront soumis dans ces conditions à l’impôt sur la fortune pour une somme conséquente.

M. François de Rugy. Même dans le XVe !

Mme Martine Billard. Étant députée du centre de Paris, je connais les prix de l’immobilier.

Il serait donc de bonne politique fiscale et de bonne justice sociale et fiscale d’adopter cet amendement.

M. le président. La parole est à M. François de Rugy, pour défendre l’amendement n° 13.

M. François de Rugy. Il y a quelque chose d’étrange concernant l’impôt de solidarité sur la fortune, que j’ai déjà évoquée lors des débats sur le projet de loi de finances rectificative de juin 2011 : madame la ministre, vous avez entre les mains une recette dynamique, ce dont vous devriez vous réjouir, surtout en cette période où les finances de l’État sont très mal en point à cause du déficit que vous et vos prédécesseurs avez creusé, et pourtant cette recette vous fait peur. « Oh là là, un impôt qui rapporte trop… Vite, il faut le baisser, surtout si ce sont les patrimoines les plus importants qui sont concernés », pensez-vous. Il est dommage que M. Lamour ne soit plus là parce que lui, c’est le spécialiste de la France vue du XVe de Paris,…

M. Michel Bouvard. Pas de querelle personnelle !

M. François de Rugy. …il aurait encore essayé de nous faire croire que notre mesure toucherait les petits accédants à la propriété. Non, nous ne parlons pas des gens qui se constituent un petit patrimoine au fil de leur vie, mais de ceux qui en ont un très important. La France est le numéro un en Europe des millionnaires en euros. Ce n’est donc pas un pays sans gros patrimoines.

Le dynamisme de cet impôt vient d’ailleurs démentir l’idée selon laquelle l’ISF ferait fuir le patrimoine vers l’étranger. Ce n’est pas le cas puisque, du fait de l’exclusion des biens professionnels, il porte essentiellement sur le patrimoine immobilier, par conséquent sur des biens difficilement délocalisables.

Mon amendement ne propose pas uniquement le retour à la situation antérieure, il ne s’agit pas seulement de revenir au seuil de 800 000 euros pour le déclenchement de l’ISF du fait qu’il y a un abattement pour la résidence principale, il introduit des taux modérés et progressifs. Il est important que cet impôt soit progressif en fonction de la valeur du patrimoine.

Pour conclure, je préfère que l’on taxe du point de vue de l’intérêt économique de notre pays, c’est-à-dire de l’intérêt général. À cet égard, les revenus du patrimoine doivent être taxés comme ceux du travail, pas plus comme le proposent certains. Mais le patrimoine dormant, celui dont seuls jouissent ses détenteurs, celui qui ne sert en rien à l’économie générale de notre pays, je trouve logique qu’on le taxe un peu plus. Les détenteurs de ce patrimoine auraient alors un choix à faire : soit l’investir dans l’économie, ce qui leur rapportera de l’argent, soit le garder pour eux, et ils devront alors payer une petite taxe, 1 % maximum.

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur les quatre amendements en discussion commune ?

M. Gilles Carrez, rapporteur. La commission a rejeté ces amendements. La réforme de la fiscalité du patrimoine qui a été votée au mois de juin est profondément juste. (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

M. François de Rugy. N’en rajoutez pas !

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Il y avait jusque-là trois cas de figure : soit le contribuable, généralement très aisé, était soumis à l’ISF et bénéficiait du bouclier fiscal, et, depuis sa suppression, il paye davantage qu’avant ; soit le contribuable n’était pas éligible au bouclier fiscal mais son barème d’ISF était trop élevé et, depuis la réforme, il est vrai qu’il en paye moins ; soit il s’agissait d’un petit contribuable qui n’était concerné par l’ISF qu’à cause de sa résidence principale, et nous avons supprimé la tranche correspondante, qui représentait pratiquement la moitié des contribuables à cet impôt.

M. François de Rugy. Croyez-vous que ce troisième cas de figure fasse une toute petite somme ?

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Nous avons vraiment fait œuvre de justice.

Ensuite se posait la question de la compensation. La réforme a été compensée à l’euro près en augmentant, et vous le savez, chers collègues de l’opposition, les droits de mutation sur les successions et sur les donations, en allongeant le délai de rappel. C’est donc une bonne réforme. Il n’y a pas lieu, alors que l’on vient de la mettre en œuvre, d’y revenir aujourd’hui.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Valérie Pécresse, ministre. Je rappelle à tous les députés que nous avons eu des heures et des heures de discussions sur ce sujet pour arriver à une réforme qui a été adoptée. Il ne faut pas y revenir, et le rapporteur général a excellemment expliqué pourquoi.

M. François de Rugy. On peut toujours corriger une erreur, madame la ministre !

M. le président. La parole est à M. François de Rugy, puis nous passerons aux votes.

M. François de Rugy. Monsieur le rapporteur général, je veux vous répondre sur un point qui, à la longue, finit par être énervant : c’est cette histoire de compensation. Encore ce matin, vous avez fait un cadeau fiscal de 150 millions d’euros aux personnes qui ont une résidence secondaire, en nous disant que ce n’était pas grave puisqu’on le compensait en supprimant une niche qui n’était pas acceptable. Mais nous sommes en train de rechercher des recettes pour boucher les trous et rééquilibrer le budget et les comptes de la nation : supprimons les niches que vous trouvez vous-même choquantes, cela fera une recette nette !

Vous savez très bien que ce que vous avez dit à l’instant sur la taxation du patrimoine est particulièrement choquant parce qu’on pouvait supprimer le bouclier fiscal sans compenser par une autre mesure en faveur des contribuables les plus fortunés. Quant aux droits de succession, il était possible de les réformer sans faire en parallèle un cadeau sur l’impôt de solidarité sur la fortune. Croyez-le : nos concitoyens comprennent bien que ce ne sont que des tours de passe-passe sémantiques que vous essayez de leur faire avaler ; au bout de quatre ans et demi, ils ont bien compris que votre ligne de conduite constante, c’est de faire des cadeaux à ceux qui en ont le moins besoin.

M. le président. La parole est à M. Jean Launay.

M. Jean Launay. Madame la ministre, on peut passer des heures à mettre au point une mesure qui, in fine, est injuste, et prendre quelques minutes pour essayer de la remplacer par quelque chose d’un peu plus juste.

M. Pierre-Alain Muet. Voilà !

M. François de Rugy. Très bien résumé !

M. Christian Eckert. C’est envoyé !

(Les amendements nos 319, 155, 241 et 13 ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de d’un amendement no 289.

La parole est à Mme Martine Billard.

Mme Martine Billard. Je vais défendre en même temps l’amendement n° 244, monsieur le président, parce qu’ils portent tous deux sur l’ISF.

M. le président. Je vous en prie, ma chère collègue.

Mme Martine Billard. Madame la ministre, vous avez dit qu’il ne fallait pas revenir sur cette réforme, mais je vous fais remarquer que votre majorité a voté avec enthousiasme le bouclier fiscal en juillet 2007 et que le Gouvernement a fini par y revenir. Vous n’aviez pas le choix : vous étiez obligés d’y revenir en raison de l’exaspération et du scandale que cela provoquait dans le pays. Vous l’avez amoindri avec la réforme de l’ISF, contentant une fraction de votre électorat à qui vous aviez tellement promis ce bouclier fiscal qu’elle ne voulait pas admettre que vous le supprimiez. Vous lui avez donc fait un cadeau d’une autre façon.

Monsieur le rapporteur général, vous dites que c’est une réforme profondément juste, compensée à l’euro près, mais il ne faut tout de même pas exagérer. Tout d’abord, mon collègue de Rugy vient de le rappeler : on a besoin de recettes supplémentaires. Or, depuis 2002, l’UMP diminue les recettes. Le problème du déficit, ce n’est pas que les dépenses publiques ont explosé, mais que les recettes publiques ont systématiquement été diminuées par vos politiques fiscales. Ainsi, une fraction ultraminoritaire de nos concitoyens passent leur temps à s’enrichir sans rien faire. Je rappelle tout de même que le Président de la République avait fait toute sa campagne de 2007 sur le thème du travail, sur ceux qui se lèvent tôt. Or, à l’heure actuelle, c’est plutôt ceux qui se couchent tard qui s’en mettent plein les poches, en ne faisant quelquefois pas grand-chose.

M. Charles de Courson. Ils travaillent, madame !

Mme Martine Billard. Le salaire moyen de l’immense majorité des salariés a progressé hors inflation de 0,82 % par an ; le revenu moyen des 0,01 % les mieux rémunérés a été multiplié par 3,4. Chacun voit la différence entre ceux qui sont à la pointe de la richesse dans notre pays et l’immense majorité du peuple français. Une étude de la division Économie de l’École des hautes études en sciences sociales a démontré qu’en plus, l’essentiel de la progression des hauts revenus provenait du secteur de la finance. Il arrive un moment où tout cela devient indécent.

Il faut aujourd’hui taxer le capital comme le travail parce qu’il est inadmissible qu’on paye plus d’impôts en travaillant qu’en étant dans la rente. Il faut aussi taxer les grandes entreprises comme les petites, parce qu’il est également inadmissible que les PME payent en pourcentage plus d’impôts que les groupes du CAC 40. En effet, ceux-ci ont les moyens de se payer des sociétés capables d’optimiser toutes les niches fiscales existantes, tandis que le patron de PME ou l’artisan, lui, n’en a pas la possibilité et paye l’impôt maximum. Nous sommes dans une situation d’injustice fiscale totale. En attendant une réforme fiscale plus générale qu’évidemment nous souhaitons, nous avons déposé ces amendements de repli pour essayer de limiter les gains provoqués par la réforme de l’ISF que vous avez mise en œuvre l’été dernier.

(Les amendements nos 289 et 244, repoussés par la commission et le Gouvernement, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 124 et 302.

La parole est à M. François de Rugy, pour défendre l’amendement n° 124.

M. François de Rugy. Cet amendement vise à mettre un coup de projecteur sur une mesure symbolique particulièrement choquante, une de plus ! Lors de la réforme de l’impôt de solidarité sur la fortune, que je qualifie de quasi-suppression puisque presque la moitié de cet impôt a été supprimée, la majorité a même ajouté une petite prime de 300 euros par enfant à charge, déductible de l’ISF, à l’initiative entre autres de notre collègue Marc Le Fur.

Mme Valérie Pécresse, ministre. De M. Mariton.

M. François de Rugy. Quand on possède un patrimoine supérieur à 1 300 000 euros, le fisc attribue dorénavant chaque année plusieurs fois 300 euros quand on a des enfants. À chaque rentrée scolaire, des députés de la majorité disent qu’il faudrait envisager de supprimer l’allocation de rentrée scolaire « parce que, dans les HLM, il y a des gens qui achètent des télés à écran plat avec cette allocation au lieu d’acheter des fournitures ». Dans le même temps, votre gouvernement, madame la ministre, fiscalise les indemnités sur les arrêts de travail dont bénéficient les personnes accidentées car, dans ce cas, vous êtes particulièrement durs. Mais quand il s’agit des redevables de l’ISF, ma foi, une petite prime de 300 euros par enfant, c’est toujours cela d’accordé et c’est toujours bon à prendre. Un petit conseil, madame la ministre : nous avons en effet déjà débattu de ces mesures pendant des heures, mais il n’est pas interdit de reconnaître de temps en temps qu’on a fait une erreur, d’y revenir et de proposer de supprimer au moins cette prime symboliquement choquante.

M. le président. La parole est à M. Christian Eckert, pour défendre l’amendement n° 302.

M. Christian Eckert. Madame la ministre, il n’est pas interdit de faire repentance. En commission des finances, M. le rapporteur général nous a confié que l’amendement évoqué par M. de Rugy n’était pas celui dont il avait été le plus fier. Je l’invite donc, lui aussi, à participer à cet acte collectif de repentance !

M. Hervé Mariton. Vous plaisantez !

M. Christian Eckert. La mesure que l’amendement vise à supprimer est évaluée à 50 millions d’euros de dépenses fiscales.

Mme Valérie Pécresse, ministre. 30 millions !

M. Christian Eckert. Va pour 30 millions, madame la ministre, nous restons dans le même ordre de grandeur. Si c’est 30 millions, cela représente environ le cinquième de ce que vous grappillez sur les accidentés du travail.

Mes chers collègues, vous n’êtes pas obligés de revêtir la robe de bure et de réciter des chapelets,…

M. Michel Bouvard. Nous sommes dans un État laïc !

M. Christian Eckert. …mais ayez le courage de reconnaître que vous avez commis une erreur ! C’en est tellement une qu’elle a réussi à brouiller votre bricolage sur l’ISF et le bouclier fiscal. À l’époque, j’ai un peu stigmatisé cette mesure et je ne le regrette pas. Je me souviens d’être passé en boucle sur des chaînes de télévision…

M. Jérôme Chartier. Quelle star !

M. Christian Eckert. …qui ont donné une image absolument déplorable de ce que vous venez de faire. La comparaison avec l’allocation de rentrée scolaire faite par notre collègue de Rugy est éclatante de vérité.

Nous pouvons reprendre le débat sur la familialisation, la progressivité et l’uniformité de l’impôt. Je vous sens bouillir, monsieur Mariton, car vous avez trouvé là un sujet. Mais enfin, tout de même ! Compte tenu des montants de l’ISF, ces affaires de 300 euros sont insoutenables.

Mme Valérie Pécresse, ministre. Il y a la droite sociale et la droite familiale.

M. le président. La parole est à M. Hervé Mariton.

M. Hervé Mariton. Rappelons des choses simples : cet abattement de 150 euros qui, à ma connaissance, a été créé par les socialistes en même temps que l’ISF,...

Mme Fabienne Labrette-Ménager. Exactement !

M. Hervé Mariton. …n’avait jamais été actualisé. C’est tout de même assez dommage que les socialistes qui, en 1988, avaient encore un peu de bon sens pour considérer que, certes, l’ISF n’était pas familialisme, mais qu’il fallait tenir compte un tant soit peu de la structure de la famille, aient complètement oublié cela.

Actualiser un abattement qui ne l’a jamais été depuis sa création en 1988, ce n’est pas absurde. Améliorer ainsi le lissage de l’ISF, qui n’est pas parfait au moment de l’entrée dans le barème notamment, c’est intelligent.

M. Christian Eckert. C’est pain bénit pour nous !

M. Hervé Mariton. Au fond, après avoir entendu vos propos et le débat d’hier soir, je me dis : si par malheur les socialistes gagnent l’an prochain, qu’ils suppriment le quotient familial et qu’ils créent un crédit d’impôt, je vous fiche mon billet qu’ils nous feront ensuite une superbe démonstration pour expliquer que ce chèque adressé aux Français les plus favorisés et bénéficiant encore d’un crédit d’impôt est totalement inacceptable, et qu’il faut le supprimer à partir d’un certain niveau de revenu.

Désolé, mais il est normal, y compris dans le cadre de l’ISF, que l’on tienne compte de la faculté contributive du contribuable et qu’il y ait, du fait des charges d’enfants, un abattement, au demeurant modeste, même s’il est réévalué par rapport à son niveau de 1988.

Vous avez eu une bonne idée en 1998. Quand les socialistes sont bien inspirés, il est plutôt de bonne pratique de persévérer dans cette veine.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gilles Carrez, rapporteur général, rapporteur. La commission a constaté avec tristesse que la valeur famille avait progressivement déserté le camp socialiste.

Si on fait de l’archéologie fiscale, on découvre que les socialistes ont défendu à deux reprises l’intérêt des familles : en 1982 quand ils ont créé l’impôt sur les grandes fortunes, ils avaient déjà prévu un petit quelque chose pour les familles ; lorsqu’ils ont recréé cet impôt qui avait été supprimé en 1986, les socialistes ont encore mis en place une réduction pour montrer leur attachement à la famille.

M. Christian Eckert. C’est pain bénit pour nous ! Si vous pouviez nous faire une mesure comme ça par semaine, ce serait génial !

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Nous constatons avec une grande tristesse que tous les projets socialistes n’ont désormais qu’une finalité : abandonner les familles.

M. Christian Eckert. Celles qui sont soumises à l’ISF !

M. François de Rugy. Versailles !

Mme Valérie Pécresse, ministre. Ne me montrez pas du doigt, monsieur de Rugy ! (Sourires.)

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Bien sûr, 150 euros ou 300 euros, c’est symbolique.

D’ailleurs, monsieur Eckert, le coût de cet abattement est bien réduit depuis la suppression de la première tranche de l’ISF, celle qui comptait les familles les plus nombreuses. Avoir une famille coûte cher et il faut choisir : élever les enfants ou se constituer un patrimoine. En supprimant la première tranche, constituée de familles qui n’avaient pas un gros patrimoine, on a rencontré des familles nombreuses.

Ce qui reste n’est pas très coûteux et la commission émet un avis défavorable à ces deux amendements.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Valérie Pécresse, ministre. Avis défavorable pour des raisons déjà invoquées : nous en avons déjà débattu et l’amendement de réactualisation du dispositif socialiste a été adopté.

(Les amendements identiques nos 124 et 302 ne sont pas adoptés.)

M. le président. La parole est à M. Pierre-Alain Muet pour défendre l’amendement n° 223.

M. Pierre-Alain Muet. Il s’agit d’aligner le taux de l’incitation à l’investissement en fonds propres dans les PME au titre de l’ISF sur le taux qui est retenu pour l’incitation existante au titre de l’impôt sur le revenu – le fameux dispositif Madelin – comme proposé dans le rapport du Conseil des prélèvements obligatoires.

Lors d’un précédent projet de loi de finances, vous avez abaissé ce taux de 75 % à 50 %, à un moment où toutes les études montaient que des taux d’exonération aussi élevés conduisaient à des investissements complètement absurdes, non efficaces, en grande partie motivés par l’exonération fiscale.

Même s’ils sont moins absurdes depuis l’abaissement du taux à 50 %, les investissements continuent à être guidés par l’exonération fiscale. Cela dénature complètement le calcul économique qui devrait être fait par le chef d’entreprise ou l’agent économique en situation d’investir.

Revenir à 25 %, un taux identique pour l’ISF et l’impôt sur le revenu, c’est déjà beaucoup et c’est en tout cas très largement suffisant. Il faut que le choix d’investissement se fasse en fonction d’un vrai calcul d’efficacité économique et non pas pour des raisons d’optimisation fiscale.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gilles Carrez, rapporteur général, rapporteur. Avis défavorable dans la mesure où le taux de 75 % – manifestement excessif – a été réduit à 50 % dans le cadre de la loi de finances pour 2011. Monsieur Muet, je pense qu’il faut faire un bilan, voir les types d’investissements qui auront été effectués sur la base d’un taux à 50 %, avant de le modifier à nouveau. De grâce, un peu de stabilité fiscale !

M. Marc Le Fur. Tout à fait !

(L’amendement n° 223, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)

Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-sept heures vingt, est reprise à dix-sept heures quarante.)

M. le président. La séance est reprise.

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 186.

La parole est à M. Jean Launay.

M. Jean Launay. L’amendement est défendu.

(L’amendement n° 186, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 127 et 295.

La parole est à M. François de Rugy, pour soutenir l’amendement n° 127.

M. François de Rugy. Il s’agit de souligner à nouveau que, contrairement à ce que l’on dit parfois un peu vite – on voit bien pourquoi, à l’approche des élections –, le bouclier fiscal n’a pas été purement et simplement supprimé, du moins pas immédiatement. En cette matière, on procède avec beaucoup de précautions.

Nous proposons pour notre part, comme nous l’avions déjà fait lors de l’instauration du bouclier fiscal, de prendre en compte, dans le calcul du revenu pris en compte pour la détermination du droit à restitution, les revenus du patrimoine et les produits de placements avant déduction de la CSG, et non pas après. Nous avions en effet dénoncé, à l’époque, le fait que les bénéficiaires du bouclier fiscal pouvaient se soustraire à cette contribution à la protection sociale. De même, vous aviez fait en sorte qu’ils puissent se soustraire à la cotisation instaurée pour financer le RSA ; de cela aussi nous avions débattu.

Même si le bouclier fiscal n’a plus beaucoup de temps à vivre – près de trois ans tout de même –, nous proposons à nouveau cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Christian Eckert, pour soutenir l’amendement n° 295.

M. Christian Eckert. Je compléterai l’argumentation de M. de Rugy, signataire d’un amendement identique, et, surtout, je répéterai à tous ceux qui nous regardent que le bouclier fiscal n’a pas disparu. Il continue à produire ses effets, puisque vous avez tellement bien bricolé votre texte lorsque vous avez prétendu supprimer le bouclier fiscal qu’il continue encore à coûter cette année au budget de l’État et qu’il en ira de même l’an prochain, pour des montants supérieurs au coût supporté par les malheureux accidentés du travail dont vous avez décidé de fiscaliser les indemnités, avant d’aggraver, cette année, cette fiscalisation.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gilles Carrez, rapporteur général, rapporteur. Monsieur Eckert, vous le savez parfaitement : le fonctionnement du bouclier fait que les restitutions continueront en 2012, nous l’avons expliqué.

Qu’est-ce que le bouclier ? Au numérateur figure, si je prends cette année pour exemple, l’ISF acquitté en 2011, qui devait être payé avant le 30 septembre dernier. Figurent aussi la taxe d’habitation et l’impôt foncier de la résidence principale payés en 2011, ainsi que la CSG payée en 2011, et l’impôt sur le revenu payé en 2011 au titre des revenus de l’année 2010. Au dénominateur figurent les revenus de l’année 2010. Nous sommes donc obligés d’attendre la fin de l’année.

Connaissez-vous déjà le montant de votre taxe d’habitation, monsieur Eckert ? Vous n’avez pas encore reçu votre avis d’imposition, donc vous ne pourriez pas faire votre déclaration de bouclier fiscal. Il faut par conséquent attendre, car nous n’aurons toutes les informations qu’à la fin de l’année 2011. C’est au début de l’année 2012 que le contribuable demandera le remboursement du montant de son droit à restitution : il est donc normal que le bouclier soit applicable en 2012.

Je rappelle en effet que, hormis la suppression de sa première tranche, l’ISF, élément prépondérant du numérateur, n’a pas été modifié et continue de fonctionner avec les taux anciens. Les contribuables qui se situent au-dessus de cette première tranche acquittent donc leur impôt selon les anciens barèmes et peuvent, en contrepartie, faire jouer le bouclier. En revanche, à partir de l’an prochain, le bouclier ne jouera plus pour l’ISF payé au titre de 2012.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Valérie Pécresse, ministre. Même avis.

M. le président. La parole est à M. Christian Eckert.

M. Christian Eckert. Le rapporteur général peut se livrer à toutes les arguties qu’il veut, nos concitoyens doivent comprendre que figureront encore dans le budget 2012 des dépenses significatives – dont il serait d’ailleurs intéressant que la représentation nationale sache à quelle hauteur elles ont été budgétées –, au titre des remboursements induits par le bouclier fiscal. Que nos concitoyens n’aillent pas s’imaginer, ainsi que vous le prétendez faussement, que le bouclier fiscal aurait disparu !

Vous tenez donc, avec notre amendement, une occasion de faire repentance, au moins partiellement, en sortant la CSG du bouclier fiscal.

(Les amendements identiques nos 127 et 295 ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 296.

La parole est à M. Christian Eckert.

M. Christian Eckert. Cet amendement commence à être connu. Nous ne le tirons pas de notre chapeau mais de l’expérience. Les restitutions au titre du bouclier fiscal – dont je ne cesserai de dire qu’elles continueront au moins pour partie en 2012 et en 2013 – fonctionnent selon un système déclaratif, et plusieurs affaires célèbres, dont certaines sont encore en cours, ont mis au jour des pratiques de fraude fiscale reposant sur des déclarations sinon mensongères, du moins incomplètes. Nous souhaiterions donc qu’avant toute restitution ou autoliquidation au titre du bouclier fiscal soit diligenté un contrôle fiscal approfondi.

Si M. le rapporteur général estime que Bercy n’a pas les moyens de conduire l’ensemble des contrôles, il lui est loisible de sous-amender notre proposition en instaurant ces contrôles à partir d’une certaine somme. Quoi qu’il en soit, dès lors qu’il s’agit de montants significatifs, il me semble normal que l’on procède à un contrôle fiscal approfondi.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Avis défavorable. Ce n’est pas que Bercy n’ait pas les moyens, monsieur Eckert ; c’est que Bercy est plus intelligent que vous ne le pensez ! (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Un inspecteur qui travaille sur ces cas m’a expliqué que, s’agissant de l’ISF, les contrôles étaient souvent déclenchés sur des contribuables ne faisant pas usage du bouclier alors que, manifestement, ils devraient y avoir recours…

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Valérie Pécresse, ministre. La subtilité des services fiscaux est grande ! Donc avis défavorable.

M. Jérôme Chartier. Il faudrait procéder à des contrôles fiscaux sur les agrégés de mathématiques !

M. le président. La parole est à M. Henri Emmanuelli.

M. Henri Emmanuelli. Monsieur Chartier, le jour où il y aura des contrôles fiscaux sur les agrégés de mathématiques, cela ne vous concernera pas !

Madame la ministre, je voudrais vous faire observer qu’en trente ans, le nombre de sociétés a dû être multiplié par trois ou quatre et le nombre de personnes physiques assujetties à l’impôt par deux, mais qu’il y a toujours le même nombre de contrôleurs fiscaux, voire un peu moins, et toujours le même nombre de contrôles, entre quarante mille et quarante-deux mille par an.

Ne venez donc pas nous dire aujourd’hui que le contrôle fiscal est à la hauteur de ce qu’il devrait être, parce que ce n’est pas vrai ! C’est d’ailleurs sans doute une des raisons pour lesquelles on peut estimer que la fraude fiscale atteint le niveau de déficit que connaissait notre pays avant la crise.

M. le président. La parole est à M. François de Rugy.

M. François de Rugy. Monsieur le rapporteur général, vous n’êtes pas allé au bout de votre pensée en nous expliquant que certains contribuables, susceptibles de bénéficier du bouclier fiscal, n’en faisaient pas la demande. La réalité qui se trouve au bout de votre raisonnement, c’est que ces contribuables qui n’utilisent pas le bouclier fiscal ont peur que l’administration vienne mettre son nez dans leurs comptes ! Cela signifie que depuis des années ils fraudent le fisc en sous-évaluant leur patrimoine. J’aurais donc aimé que vous terminiez votre propos.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Valérie Pécresse, ministre. L’administration fiscale dispose naturellement de moyens modernes et adaptés pour mener à bien son action. Je pense notamment à TRACFIN, qui permet de tracer les mouvements de capitaux. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

M. Henri Emmanuelli. Ce n’est pas le même sujet !

Mme Valérie Pécresse, ministre. La fraude utilise aujourd’hui des détours bien plus sophistiqués qu’auparavant. Il nous faut donc travailler sur des montages subtils, comme les carrousels de TVA. La fraude évolue et l’administration fiscale s’adapte, c’est sa grande force.

M. le président. La parole est à M. Christian Eckert.

M. Christian Eckert. Madame la ministre, vous évoquez TRACFIN, mais comment travaille cette cellule ? Je connais un peu la réponse à la question que je pose ; c’est pourquoi que je la pose. J’aimerais que vous nous disiez en effet quels sont ses effectifs et comment ils ont évolué ces dernières années, que vous nous disiez également comment il se fait que TRACFIN n’ait pas donné suite à des affaires dans lesquelles lui avaient été signalés de substantiels dépôts en liquide, effectués dans des banques.

(L’amendement n° 296 n’est pas adopté.)

M. Christian Eckert. Je note que vous ne me répondez pas !

Mme Valérie Pécresse, ministre. Ce n’est pas la peine !

M. Henri Emmanuelli. Mieux vaut qu’elle ne réponde pas !

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 123 et 300.

La parole est à M. François de Rugy, pour défendre l’amendement n° 123

M. François de Rugy. J’ignore pourquoi nos amendements n’ont pas été mis en discussion commune avec ceux de notre collègue Marc Le Fur, examinés ce matin, car ils portent, comme eux, sur les dons aux partis politiques et, plus particulièrement, sur l’avantage fiscal auquel ils donnent droit. La ministre et le rapporteur général ont fait à juste titre observer que le débat dépassait la question fiscale ; c’est pourquoi nous déposerons pour en débattre, le 1er décembre prochain, une proposition de loi visant à mettre un terme aux abus et aux contournements de la loi sur le financement des partis politiques.

Concernant néanmoins l’avantage fiscal, il doit être bien clair pour nos concitoyens que le plafond de 7 500 euros est purement théorique, d’abord à cause des micropartis, ensuite parce qu’il ne s’applique pas aux adhérents des partis, qui acquittent des cotisations. Ainsi, un riche industriel, adhérent voire élu d’un parti, peut lui verser une somme très conséquente, sans aucune arrière-pensée concernant son retour sur investissement, bien évidemment…

C’est extrêmement choquant car non seulement il peut ainsi, davantage qu’un militant moins fortuné, influer sur la ligne politique de son parti mais, de surcroît, c’est l’État qui financera 66 % de son don ! Sur 100 000 euros versés, si cette somme représente moins de 20 % de ses revenus, 66 000 euros seront en réalité payés par l’État.

Parlons clair : cela signifie que les riches, dans notre pays, peuvent orienter le financement public vers certains partis plutôt que vers d’autres. Il serait donc intéressant de savoir comment cet argent se répartit selon les partis, car il est fort probable que l’UMP est le premier bénéficiaire de ce système, ce qui explique votre prudence sur la question, ce matin.

Mme Valérie Pécresse, ministre. J’ai donné un avis favorable !

M. le président. La parole est à M. Jean Launay, pour défendre l’amendement n° 300.

M. Jean Launay. Nous tenons à la liberté de création des partis politiques, nous tenons également à ce que nos concitoyens puissent librement procéder à des dons ; mais nous tenons surtout au respect de l’esprit de la loi de 1988 sur le financement des partis politiques. Voilà pourquoi, afin d’éviter les dérives, notre amendement limite les dons consentis par les personnes physiques à 7 500 euros pour un ou plusieurs partis politiques.

La Commission nationale des comptes de campagne confirme d’ailleurs dans son rapport annuel que « la liberté de création des partis politiques a pour conséquence de faciliter le détournement de la loi en favorisant la création de partis satellites : une même personne physique peut ainsi financer plusieurs partis en versant à chacun le montant plafond des dons autorisés, les partis bénéficiaires reversant ensuite l’argent récolté au parti central ». C’est exactement le mécanisme que François de Rugy dénonçait tout à l’heure.

Par ailleurs, la multiplication des dons de 7 500 euros autant de fois que le souhaite le donateur constitue une véritable niche fiscale. C’est la raison pour laquelle nous souhaitons limiter les dons à 7 500 euros par an et par personne physique.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Avis défavorable. Nous avons eu ce matin une discussion approfondie sur le sujet, discussion qui s’est conclue par la proposition de créer un groupe de travail pour réfléchir à une question qui ne se limite pas à son seul aspect fiscal.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Valérie Pécresse, ministre. Je rappelle à M. de Rugy que j’avais donné un avis favorable à l’amendement de M. Le Fur. J’ai par ailleurs, à la demande du rapporteur, souhaité que nous travaillions sur la question du financement de la vie politique, qui ne se résume pas à de la fiscalité.

M. Christian Eckert. On aurait au moins pu régler la partie fiscale !

M. le président. La parole est à M. Jérôme Chartier.

M. Jérôme Chartier. Je ne voudrais pas prolonger les débats inutilement mais les propos de M. de Rugy m’obligent à apporter quelques éclaircissements.

M. de Rugy a dû l’oublier mais, d’un point de vue fiscal, la commission de contrôle des comptes de campagne comptabilise de la même façon les dons et les cotisations.

M. François de Rugy. Pas du tout.

M. Jérôme Chartier. Mais si. Il est donc interdit de verser une cotisation de 100 000 euros.

M. François de Rugy. Non.

M. Jérôme Chartier. Appelez donc la CCFP si vous voulez vérifier.

M. François de Rugy. C’est dans les textes !

M. Jérôme Chartier. J’ai l’honneur de les connaître, justement, car j’ai animé pendant cinq ans, avec beaucoup de nos collègues, en particulier de l’opposition, le groupe d’études sur la modernisation de la vie politique française.

Nous nous sommes penchés sur ces questions et nous sommes à l’origine d’un principe nécessaire : réunir au moins 1 % des voix aux élections législatives…

M. François de Rugy. C’est autre chose !

M. Jérôme Chartier. …pour se voir attribuer la deuxième part des contributions des parlementaires pour le financement de la vie politique.

Cette disposition a limité les effets de la dispersion du financement et la création de micro partis destinés à devenir des structures de financement ad hoc. Les seules exceptions qui demeurent sont ultramarines, car il faut financer la vie politique outre-mer. Le critère tenant au nombre de députés inscrits au parti concerné n’a ainsi pas été imposé. Les règles ont été aménagées pour permettre aux députés ultramarins de constituer des mouvements politiques qui correspondent aux particularités ultramarines.

Cette organisation, très bien pensée, date des années 1990.

M. François de Rugy. Cela n’a rien à voir !

M. Jérôme Chartier. Elle a bien évolué et met en relief deux aspects importants. Nous devons rester attentifs pour veiller à ce que ne se créent pas de nouveaux micro-partis de circonstance qui ne correspondent pas à une réalité, fût-elle locale, mais qui ne serait qu’une simple boîte aux lettres. Ce ne serait pas acceptable. Nous devons réfléchir à la manière de conserver toute son efficacité à cette loi de financement des partis politiques qui est sans doute l’une des plus performantes au monde.

Nous les avons toutes étudiées, monsieur de Rugy : notre loi est fantastique et permet de garantir l’indépendance financière de l’ensemble des candidats. Je ne vous citerai qu’un exemple : tout candidat légitime qui réunirait suffisamment de suffrages peut se présenter à une élection législative avec suffisamment de moyens pour faire campagne. Cette situation est exceptionnelle et il faut l’encourager.

J’en reviens aux dons. Vous proposez de mettre en place un système par lequel une personne soutiendrait un seul candidat, mais si cette personne veut soutenir plusieurs candidats, on ne peut pas le lui interdire.

M. François de Rugy. Pourquoi ne voulez-vous pas plafonner ?

M. Jérôme Chartier. Si j’ai bien compris votre amendement, demain l’on ne pourrait plus soutenir qu’un seul candidat.

M. Christian Eckert. Ce n’est pas ce qui est écrit dans l’amendement.

M. François de Rugy. Relisez-le.

M. Jérôme Chartier. Ce serait une erreur. Nous devons au contraire continuer à encourager le financement des activités politiques. À la limite, rediscutons du barème des exonérations, mais en envisageant de la même façon les activités d’intérêt général et celles d’utilité publique. Je suis prêt à en discuter avec vous, dans d’autres endroits si vous le souhaitez.

Le modèle français de financement de la vie politique est un exemple que nous avons mis vingt ans à construire. Vous en souvenez-vous, monsieur de Rugy ? L’affaire Urba-Gracco vous dit-elle quelque chose ? Elle est à l’origine de la législation actuelle qui a mis en place des règles de financement des activités politiques transparentes, claires et démocratiques.

Nous devons respecter la jurisprudence qui s’est construite avec le temps. Y réfléchir, c’est très bien, mais à condition d’y réfléchir sereinement.

M. le président. La parole est à M. François de Rugy.

M. François de Rugy. Vous étiez hors sujet, monsieur Chartier, et je vous soupçonne de ne pas avoir lu l’amendement car je remplace « un parti » par « un ou plusieurs », avec des dons ne pouvant dépasser, au total, 7 500 euros, tous partis confondus.

Relisez nos textes avant de les critiquer.

Je suis par ailleurs très choqué de voir que vous voulez plafonner les dons aux partis politiques mais aussi tous les autres, par exemple aux œuvres caritatives !

M. Jérôme Chartier. Mais pas du tout !

M. François de Rugy. Si quelqu’un veut donner un million au Secours populaire, qu’il le lui donne plutôt qu’à l’UMP, ce sera beaucoup plus utile !

Monsieur le rapporteur général, vous nous parlez d’un groupe de travail. Pourriez-vous nous apporter des précisions ? Où ? À la commission des finances ? Qui en serait membre ? Quelle serait l’échéance ? Avant ou après les élections présidentielle et législatives de 2012 que vous êtes sans doute déjà en train de financer ?

M. Jérôme Chartier. C’est ridicule !

(Les amendements identiques nos 123 et 300 ne sont pas adoptés.)

M. le président. La parole est à M. Christian Eckert pour soutenir l’amendement n°299.

M. Christian Eckert. Cet amendement vise à inclure le crédit d’impôt pour l’emploi d’un salarié à domicile et le crédit d’impôt pour frais de garde des jeunes enfants dans le périmètre de la réduction globale de 10 % appliquée aux réductions et crédits d’impôts compris dans le champ du plafonnement global des niches fiscales à l’impôt sur le revenu.

En effet, ces crédits d’impôts ne sont pas compris dans le périmètre du plafonnement global des niches fiscales actuellement à 18 000 euros plus 6 % du revenu imposable et qu’il faudrait abaisser à 10 000 euros.

Nous ne sommes pas opposés à une politique familiale, comme cela a été dit à plusieurs reprises depuis le début de ce débat, mais reconnaissez que 18 000 euros, auxquels s’ajoutent 6 % du revenu imposable devraient largement suffire pour faire garder les enfants.

(L’amendement n° 299, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 333 et 393.

La parole est à M. Christian Eckert pour soutenir l’amendement n° 333.

M. Christian Eckert. Il est défendu.

M. le président. La parole est à M. Jacques Desallangre pour soutenir l’amendement n° 393.

M. Jacques Desallangre. Il est défendu.

(Les amendements identiques nos 333 et 393, repoussés par la commission et le Gouvernement, ne sont pas adoptés.)

M. le président. La parole est à M. François de Rugy pour soutenir l’amendement n°125.

M. François de Rugy. Il est défendu.

(L’amendement n° 125, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Christian Eckert pour soutenir l’amendement n°334.

M. Christian Eckert. Cet amendement tend à instituer sur le modèle du crédit d’impôt pour les travaux obligatoires de renforcement des habitations situées dans le périmètre d’un plan de prévention des risques technologiques – PPRT –, mis en place suite à l’accident d’AZF, un crédit d’impôt similaire pour les travaux à réaliser dans les habitations situées dans le périmètre des plans de prévention des risques miniers – PPRM.

En Lorraine, à proximité du village dont je suis le maire, plus d’une centaine de familles ont dû évacuer leur logement en raison des risques d’effondrement de leur maison. Les maisons ne seraient pas détruites aussi vite que celles qui l’ont été par l’explosion d’AZF, mais elles pourraient l’être en quelques heures ou quelques jours et il faut en éloigner leurs habitants, ce qui est toujours un drame.

Le code minier a posé des règles relatives à la construction mais il ne résout pas le problème de l’indemnisation. Je ne vais pas faire du Zola mais, eu égard au passé minier de ces régions qui ont apporté beaucoup de richesses à notre pays avant de souffrir de la fermeture de ces industries, source de tant de drames sociaux, nous devons réparer les séquelles de l’exploitation minière des sites. Il s’agirait d’une mesure de solidarité et de justice dont le coût ne serait sans doute pas très élevé. Seules quelques centaines de maisons sont en effet concernées dans les zones les plus sensibles. Les risques sont plus ou moins élevés selon la nature des travaux miniers réalisés, parfois malheureusement sous les maisons d’habitation.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Avis défavorable. Nous avons eu ce débat en commission : les travaux ne sont pas de même nature que ceux réalisés dans le cadre des PPRT. Par ailleurs, ce problème se pose de la même manière pour d’autres sites de carrières. Ainsi, en région parisienne, le plateau d’Avron a été exploité en carrières du XVe au XIXe siècle. Le sous-sol est entièrement miné et, assez régulièrement, des maisons sont sinistrées.

M. Charles de Courson. Et Montmartre ?

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Nous ne voulons pas faire preuve de mauvaise volonté mais nous ne pouvons ouvrir excessivement le dispositif.

Il existe par ailleurs des fonds, mis en place à la suite de la fermeture des mines. Vous m’avez dit qu’ils n’étaient pas bien utilisés et qu’ils fonctionnaient mal. Je crois malgré tout que c’est plutôt de ce côté-là qu’il faudrait trouver la solution.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Valérie Pécresse, ministre. Même avis.

M. le président. La parole est à M. Christian Eckert.

M. Christian Eckert. Cette assemblée, malheureusement, ne connaît pas suffisamment bien le problème.

Monsieur le rapporteur général, il s’agit là de travaux industriels réalisés sous la surveillance de l’État qui, à l’époque, par l’intermédiaire de ce que l’on appelait la DRIRE, contrôlait l’exploitant et ses méthodes afin de préserver l’environnement. L’État a une part de responsabilité en la matière car il n’a pas tiré la sonnette d’alarme à temps. C’est pour cette raison qu’il conviendrait de faire appel à la solidarité nationale.

Par ailleurs, des mesures d’indemnisation sont actuellement préfinancées par le FGAO – le Fonds de garantie des assurances obligatoires. Ce n’est pas sa vocation, mais c’est le seul véhicule que l’on a trouvé pour remplir cette mission. Ce dispositif fonctionne mal et devrait être revu.

Enfin, Mme Kosciusko-Morizet, à la demande de M. Borloo, a été destinataire d’un rapport pour pouvoir avancer sur ces questions. Nous en attendons les conclusions depuis plus de six mois malgré les relances des uns et des autres. Il serait urgent d’aboutir car les gens vieillissent, certains même sont décédés. Vous imaginez bien que les procédures judiciaires lancées contre des filiales d’ArcelorMittal sont aujourd’hui interminables pour ces pauvres gens souvent âgés.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Valérie Pécresse, ministre. Monsieur Eckert, comptez sur moi pour transmettre votre cri du cœur à Mme Kosciusko-Morizet.

(L’amendement n° 334 n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 214.

La parole est à M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson. Nous sommes nombreux, dans la majorité comme dans l’opposition, à nous poser des questions sur ceux de nos concitoyens – une infime minorité – qui tirent des revenus considérables de la pure spéculation. Notre système fiscal ne traite pas en effet cette question, au-delà du barème de l’impôt sur le revenu et des prélèvements forfaitaires. Il semblerait donc utile, madame la ministre, qu’une réflexion s’engage sur l’opportunité et les modalités de création d’une taxe sur les revenus et rémunérations, parts variables incluses, issus de transactions financières et boursières, destinée à lutter contre la spéculation.

Des essais ont bien été réalisés, notamment lorsque, en liaison avec le Medef, un code de bonne conduite a été mis en place, censé encadrer parachutes dorés, stock-options et autres retraites-chapeau, mais tout cela, il faut le reconnaître, s’est soldé par un échec. Il conviendrait donc vraiment de lutter contre l’inadaptation de notre système fiscal devant ce type de revenus liés à la spéculation. Telle est la raison de notre demande d’un rapport d’information en la matière.

Il serait bon, toutes tendances confondues, de réfléchir à des solutions car, je le répète, aucune n’a été trouvée pour essayer de limiter et d’encadrer ces revenus de pure spéculation.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Avis défavorable dans la mesure où, contrairement aux rapports que nous propose habituellement M. de Courson, le contenu de celui qui est demandé est très flou puisqu’il traiterait de comportements spéculatifs.

Vous avez en revanche, monsieur de Courson, demandé un rapport très précis sur le système dit Rubik, dont nous disposerons dans deux mois. Il serait préférable de s’en tenir là.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Valérie Pécresse, ministre. Défavorable.

M. le président. La parole est à M. Christian Eckert.

M. Christian Eckert. Ce n’était pas grand-chose pourtant d’accorder à nos collègues le rapport qu’ils demandent. Mais puisque le sujet est d’actualité, j’en profite pour m’adresser à vous, madame la ministre. En effet, vous savez probablement qu’au Sénat cet après-midi la commission mixte paritaire sur le projet de loi de finances rectificative mettant en place la garantie publique apportée à la banque Dexia est parvenue à une conclusion positive.

M. Michel Bouvard. Nous y étions !

M. Christian Eckert. Or le texte en question répond en partie aux préoccupations exprimées par Charles de Courson. Un alinéa,...

M. Charles de Courson. De moralisation.

M. Christian Eckert. ...que l’on peut en effet qualifier de moralisation, a été voté, concernant au moins une catégorie d’établissements financiers et une catégorie de revenus variables. Une longue discussion a notamment porté sur les dividendes, mais il y avait en tout cas consensus s’agissant des stock-options et de certaines rémunérations variables.

Vos services, madame la ministre, ont dû vous informer des conclusions de la commission mixte paritaire, sachant que nous aurons pour notre part à nous prononcer mardi prochain sur le texte qui en est issu. Aussi est-il dans les intentions du Gouvernement de suivre la commission mixte paritaire qui, à l’unanimité, c’est-à-dire sénateurs et députés toutes tendances confondues, a adopté cet alinéa ?

M. Michel Bouvard. Sauf les communistes !

M. Christian Eckert. Vous parlez, mon cher collègue, de l’ensemble du texte. S’agissant de l’amendement portant sur l’alinéa en question, il y avait en tout état de cause une très large unanimité.

Alors que les rémunérations des patrons des grandes banques ont, ainsi que le président Cahuzac l’a souligné ce matin fort opportunément – comme d’habitude –, augmenté de 44 % en 2010, il serait intéressant de connaître la position du Gouvernement en la matière, surtout après que la première CMP depuis que le Sénat est passé à gauche s’est conclue sur une quasi-unanimité.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Valérie Pécresse, ministre. Vous le savez, monsieur Eckert, la situation de Dexia est, heureusement allais-je dire, extrêmement singulière.

M. Michel Bouvard. C’est le moins que l’on puisse dire !

M. Christian Eckert. Il ne s’agit pas que de Dexia en l’occurrence.

Mme Valérie Pécresse, ministre. La CMP ayant porté sur Dexia, vous me demandez donc de généraliser ce qui a été voté la concernant ?

M. Christian Eckert. Ce qui a été voté en la matière ne l’a pas été uniquement pour Dexia, mais pour l’ensemble des établissements bancaires.

Mme Valérie Pécresse, ministre. Vous me parlez alors d’un accord que je ne connais pas.

Peut-être, monsieur le président, M. Eckert pourrait-il préciser la nature de cet accord ?

M. le président. Bien volontiers, madame la ministre, mais le rapporteur général pourra également nous éclairer sur l’accord trouvé en CMP.

La parole est à M. Christian Eckert.

M. Christian Eckert. Je vous remercie, monsieur le président, de me permettre d’éclairer pour une fois Mme la ministre.

M. Henri Emmanuelli. Sur l’état des travaux parlementaires !

M. Christian Eckert. Il s’agit d’interdire aux établissements bancaires qui ont bénéficié soit de prises de participation sous la forme de souscriptions de titres soit de cautionnement bancaire – cela dans le cadre de l’autorisation européenne, de façon à éliminer notamment Oséo – la distribution de stock-options, d’actions gratuites et de dividendes payés en numéraire, afin d’inciter à la recapitalisation plutôt qu’à la distribution de dividendes.

C’est là une mesure...

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Géniale !

M. Christian Eckert. ...extrêmement importante, et je m’étonne, madame la ministre, que l’information ne vous soit pas parvenue.

J’ai parlé de mémoire et peut-être M. le rapporteur général pourra-t-il compléter votre information mais, comme nous serons appelés à rediscuter de la question puisque je défendrai un amendement allant dans le même sens, il serait intéressant de connaître la position du Gouvernement en la matière.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.

M. Gilles Carrez, rapporteur général. L’accord intervenu en commission mixte paritaire, et dont je me félicite, pose le principe que tout établissement de crédit en situation difficile du point de vue soit de la solvabilité, soit de la liquidité qui aura été soutenu par l’État directement ou indirectement, ne pourra verser de dividendes tant que sa situation restera, toujours selon ces deux critères de la liquidité et de la solvabilité, objectivement difficile. C’est d’ailleurs un principe qui tombe sous le sens commun : on ne va pas verser des dividendes alors qu’il faut renforcer les fonds propres. Tous les résultats ne doivent avoir qu’un seul objectif : remonter le niveau des fonds propres. Cela dit, monsieur Eckert, nous n’avons pas été plus loin.

M. Michel Bouvard. C’est ce qui a été fait en 2008 sans qu’il y ait eu d’ailleurs besoin d’une loi !

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Valérie Pécresse, ministre. Nous avons déjà eu ce débat ce matin et je m’étonne donc, monsieur Eckert, que vous souleviez à nouveau la question. Concernant en effet les banques françaises et leur solidité, leurs liquidités et leur solvabilité, j’ai rappelé que le Gouvernement souhaitait qu’elles augmentent leurs fonds propres, et qu’elles le fassent d’abord à partir de leurs capitaux, ce qui avait des conséquences sur les bonus et les dividendes. Si, l’année dernière, les banques sont redevenues bénéficiaires, la priorité doit être donnée cette année à la reconstitution des fonds propres.

Quant à Dexia, il est évident, sachant qu’il s’agit du cas extrêmement particulier d’une entreprise qui sera très aidée, que le Gouvernement et le Parlement peuvent avoir des exigences supplémentaires.

(L’amendement n° 214 n’est pas adopté.)

Article 4

M. le président. Sur l’article 4, je suis saisi d’un amendement n° 63 rectifié.

M. Hervé Mariton. Il est défendu.

(L’amendement n° 63 rectifié, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

(L’article 4 est adopté.)

Après l’article 4

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 52 et 207, portant article additionnel après l’article 4.

La parole est à M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson. Le présent amendement a pour objet de mettre fin à la rupture d’égalité devant l’impôt des entreprises du paysage par rapport aux autres entreprises, cette inégalité résultant d’une divergence entre les régimes fiscaux et sociaux de ces entrepreneurs.

En effet, l’entrepreneur du paysage relève de deux régimes différents : d’une part, du régime des professionnels non salariés agricoles au regard du droit social, en application du code rural – et à ce titre, il cotise obligatoirement auprès de la MSA ; d’autre part, du régime des bénéfices industriels et commerciaux – BIC – sur le plan fiscal, en application du code général des impôts.

La loi Madelin a permis aux exploitants individuels de renforcer leur protection sociale par le versement de cotisations déductibles des résultats imposables avec trois volets : prévoyance complémentaire, assurance perte d’emploi subie et assurance retraite. Il en résulte qu’en principe les contribuables non salariés dont les revenus relèvent de la catégorie des BIC peuvent déduire de leurs résultats imposables ces trois cotisations.

Or l’article L. 144-1-1 du code des assurances admet la faculté pour des groupements constitués entre des contribuables exerçant une activité non salariée non agricole de souscrire des contrats d’assurance de groupe qui permettent aux adhérents de bénéficier en particulier de prestations de prévoyance complémentaire.

Cette situation bizarre a pour conséquence que l’entrepreneur du paysage ne peut bénéficier du dispositif de l’article 154 bis du code général des impôts car en tant que professionnel imposé dans la catégorie des BIC, mais cotisant à la MSA ou au régime général salariés pour le risque vieillesse, il ne peut adhérer à des contrats d’assurance groupe.

L’objet du présent amendement est de mettre fin à cette inégalité de traitement fiscal pour des entreprises qui en réalité sont soumises à des régimes d’imposition identiques et de permettre aux entreprises du paysage de souscrire des contrats d’assurance groupe au même titre que les non salariés non agricoles relevant des BIC.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gilles Carrez, rapporteur général. J’ai indiqué en commission que cet amendement – dont chacun d’entre nous a pu apprécier la limpidité et la simplicité ! – suscitait des interrogations car il instaure un système hybride entre le régime fiscal agricole et celui appliqué au titre des BIC – du RSI en fait.

Ne comprenant pas l’amendement,...

M. Patrice Martin-Lalande. C’est plutôt rare !

M. Gilles Carrez, rapporteur général. ...j’y suis a priori défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Valérie Pécresse, ministre. Je ne vois pas pourquoi nous changerions un dispositif qui fonctionne depuis toujours. Certes, il est très compliqué puisqu’il met en jeu, s’agissant d’un système de retraite complémentaire, les dispositifs Madelin et Madelin agricole. Toutefois, les entrepreneurs du paysage qui cotisent à la Mutualité sociale agricole bénéficient logiquement de la retraite complémentaire du Madelin agricole.

Ces principes très clairs étant posés, je ne vois pas bien pourquoi nous devrions hybrider le dispositif Madelin avec celui des professionnels qui cotisent à la Mutualité sociale agricole. Même si les plafonds sont différents, il faut de la clarté et de la logique, et partir du principe que la Mutualité sociale agricole est égale à la complémentaire Madelin agricole. Je suis donc défavorable à l’amendement.

M. le président. La parole est à M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson. Je reconnais qu’il y a quelque chose d’un peu aberrant dans cette affaire. Le caractère hybride du statut des entrepreneurs du paysage est lié au fait qu’ils dépendent de la mutualité sociale agricole sur le plan social alors que, sur le plan fiscal, ils ne relèvent pas du régime des bénéfices agricoles, mais de celui des bénéfices industriels et commerciaux. Il en résulte qu’ils ne peuvent pas souscrire de contrats d’assurance groupe, ce qui constitue indéniablement une anomalie et crée une rupture d’égalité avec les autres entreprises relevant du régime des BIC.

En adoptant ces amendements, nous ne ferions que rétablir l’égalité en matière d’assurance complémentaire. C’est le bon sens.

(Les amendements identiques nos 52 et 207 ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 175, qui fait l’objet d’un sous-amendement n° 420.

La parole est à M. Michel Bouvard, pour soutenir l’amendement.

M. Michel Bouvard. Le nouveau prêt à taux zéro a un impact budgétaire non négligeable, évalué à 2 milliards d’euros en 2011 avant une montée en puissance progressive. Cette nouvelle mesure est parfaitement légitime, d’autant que nous avons supprimé les déductions au titre des intérêts d’emprunt. Cependant, en examinant son fonctionnement avec attention, nous pouvons constater qu’elle concerne toutes les personnes assujetties à l’impôt sur le revenu, quel que soit le niveau de leurs revenus, y compris celles appartenant au dernier décile. Cela m’a un peu surpris, mais, dans cette tranche de revenu, un certain nombre de dossiers sont éligibles pour un montant qui représenterait au total 58 millions d’euros par génération de prêts, somme significative – sans être massive – au regard de la dépense fiscale induite par le PTZ.

Les moyens qui pourraient être dégagés en excluant ces contribuables de l’accès au PTZ permettraient peut-être permettre de résoudre progressivement le problème du caractère discriminatoire du niveau de l’aide selon les zones d’habitat. Des problèmes se posaient déjà en termes de classification de l’habitat pour le financement du logement social ; ils ont été transposés au PTZ. Dans un même bassin de vie, vous pouvez être plus ou moins aidé suivant la zone où vous achetez – même s’il s’agit de biens identiques.

Je suis élu d’une zone métropolitaine, classée comme telle par la DATAR, qui s’étend des portes de Genève à Grenoble. Entre Chambéry et Grenoble, on trouve des communes situées sur le territoire du principal parc d’activités, en dehors de la ZIRST de Meylan, pour lesquelles le PTZ n’est pas équivalent à celui consenti quelques kilomètres plus loin, pour des logements identiques.

Par mon amendement, je m’efforce donc aussi de dégager des ressources pour régler le problème de la discrimination entre zones, puisque le ministère du logement a décidé de s’inspirer en la matière de la situation du logement social – c’est dire à quel point il doit en être satisfait. (Sourires.)

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Je rappelle d’abord que c’est à notre initiative qu’a été proposée, il y a deux ans, la fusion du dispositif TEPA dans le PTZ. Nous étions tous d’accord : le PTZ fonctionnant bien, cette solution avait le mérite de la simplicité.

M. Michel Bouvard. C’est vrai !

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Nous nous sommes heurtés à une difficulté de principe, car le dispositif de crédit d’impôt sur les intérêts au titre de l’acquisition de la résidence principale ne dépendait pas du niveau de ressources de l’acquéreur. À l’époque nous nous sommes demandés s’il fallait conserver cette universalité, et nous avions répondu : « Oui, mais on verra. »

Aujourd’hui, nous disposons d’un certain recul puisque environ 250 000 PTZ « plus » ont été distribués. Nous nous sommes rendus compte que 10 % des ménages bénéficiaires appartenaient au dernier décile évoqué par M. Bouvard. Ils ne bénéficient toutefois que de 2,5 % des montants engagés.

Comme nous le craignions il y a deux ans, nous pouvons en conclure…

M. Michel Bouvard. …qu’il y a un effet d’aubaine !

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Je ne veux pas parler d’effet d’aubaine…

M. Michel Bouvard. …mais cela y ressemble !

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Ces ménages utilisent le dispositif pour des montants extrêmement limités. Si le dispositif ne leur était plus accessible, cela remettrait-il en cause leur faculté d’acquisition ? Je ne le crois pas, d’autant que leur niveau de revenu ne leur donne accès qu’à un prêt réduit sur une durée brève, ce qui n’est pas nécessairement très intéressant par rapport à ce qui leur est proposé par les établissements privés – le taux du PTZ est certes nul mais les mensualités sont élevées.

L’amendement de M. Bouvard me paraît pragmatique au regard de nos observations sur les premiers PTZ « plus ». Il permettra de dégager un peu de marge de manœuvre. Quant à l’usage de ces économies, comme je le disais précédemment : « On verra. » (Sourires.)

M. Michel Bouvard. Ce n’était qu’une suggestion !

M. Gilles Carrez, rapporteur général. La commission est favorable à l’amendement.

M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Le Bouillonnec, pour présenter le sous-amendement.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Ce débat anticipe sur celui que nous aurons lors de l’examen des articles non rattachés sur le dispositif Scellier et d’autres sujets.

Dans la loi de finances pour 2012, l’ensemble des montants consacrés aux prêts à taux zéro – PTZ « plus » et anciens PTZ – s’élève à 1,38 milliard d’euros. Par rapport au milliard d’euros dépensé en 2011, nous enregistrons donc une progression d’un tiers : excusez du peu ! Ce montant supplémentaire représente 80 % des sommes versées par l’État pour la construction de logements sociaux.

Le « Scellier » coûtera 430 millions d’euros en 2012. Pour la même période, le « Robien » reviendra à 415 millions d’euros – soit le coût exact de la contribution de l’État à la construction du logement social –, alors que cette joyeuseté datant de 2003 ne sert plus en rien une stratégie tournée vers la construction et vers l’amélioration de l’accession à la propriété.

Dans le budget pour 2012, le coût total de l’investissement fiscal locatif est de 13 milliards d’euros. Nous considérons que, sur ce total, 2,5 milliards sont accordés dans des conditions qui doivent être réexaminées par notre assemblée.

Lors de sa création, nous avions demandé le plafonnement du PTZ, qui n’aurait dû, selon nous, être accessible qu’en dessous d’un certain niveau de revenu. En effet, nous estimons que le prêt à taux zéro doit permettre l’accession à la propriété de ceux qui ne peuvent y parvenir par leurs seuls revenus, sans quoi il y a le risque d’un effet d’aubaine.

Aujourd’hui, il est difficile de faire un point précis de la situation, puisque les PTZ « plus » ne sont en place que depuis le 1er janvier dernier. Un délai d’environ trois mois étant nécessaire pour que les banques fassent remonter l’information, nos chiffres sont donc quelque peu incertains. Au premier semestre 2011, il semble toutefois que 200 000 PTZ aient été signés. Ces données sont encore imprécises et difficiles à analyser. Il apparaît cependant que 20 % des bénéficiaires, ceux qui disposent des revenus les plus modestes, reçoivent 37 % des montants engagés. C’est une bonne chose, mais cela signifie aussi que 80 % des bénéficiaires, ceux qui disposent des revenus les plus élevés, se partagent les 63 % qui restent, dans des conditions qui constituent un effet d’aubaine.

Par ailleurs, nous savons que 73 % des PTZ servis concernent des maisons individuelles et que seulement 24 % servent à l’achat de logements neufs. Autrement dit, pour l’instant, ce dispositif n’a aucun intérêt au regard de la stratégie, que nous pouvons défendre tous ensemble, visant à développer la construction et à entraîner ainsi l’économie. Finalement, ce dispositif coûtera une fortune, il créera un effet d’aubaine et il ne sera pas utile.

Au passage, je note que l’on a tort d’utiliser le terme de primo-accédant. Il faut seulement n’être pas propriétaire depuis plus de trois ans lorsque l’on entre dans le dispositif. Il est donc possible d’être déjà propriétaire, d’autant qu’il existe différents cas particuliers, et de bénéficier du prêt à taux zéro. Si ce dernier était vraiment réservé aux primo-accédants, il ne concernerait que ceux qu’il faut aider à devenir propriétaire pour la première fois et qui n’en ont pas les moyens.

Dans ces conditions, notre groupe a souhaité prolonger la démarche de notre collègue Michel Bouvard en plafonnant le montant des ressources qui permet l’accès au PTZ. Le plafond retenu correspond à celui fixé pour l’accès au logement locatif intermédiaire de type PLUS.

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur le sous-amendement ?

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Défavorable, car il présente l’inconvénient de sanctionner les familles. En effet, il conduirait à rendre inéligible au PTZ les ménages du neuvième décile – alors que pour eux ce prêt a tout son sens – s’ils ont trois enfants ou plus.

M. Michel Bouvard. C’est vrai !

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Le PTZ a été calibré par rapport aux ressources et par rapport à la famille.

La démarche de M. Bouvard me semble bien meilleure. Elle permet de rendre inéligible le dernier décile, quelle que soit la taille de la famille, celle-ci disposant, en tout état de cause, de revenus très élevés. Même si la famille compte dix enfants…

M. Michel Bouvard. Quatorze !

M. Gilles Carrez, rapporteur général. …quatorze enfants, monsieur Mariton, elle bénéficiera, si elle se trouve dans le dixième décile, d’un prêt à taux zéro extrêmement réduit compte tenu du calibrage du PTZ « plus ».

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Valérie Pécresse, ministre. Je partage l’avis du rapporteur général concernant le sous-amendement.

Je comprends le souci de M. Bouvard que le PTZ soit délivré sous conditions de ressources. Je remarque cependant que le rendement de la mesure qu’il propose est très faible, puisqu’elle dégagerait 12 millions d’euros en 2013. En fait, je ne reproche qu’une chose à son amendement : il complexifie le PTZ. C’est ce qui amène le Gouvernement à émettre à son sujet un avis défavorable.

Le PTZ sert à aider les primo-accédants à franchir le pas de l’accession à la propriété. Il est au cœur de notre projet politique : nous voulons une France de propriétaires.

Sur le fond, je suis entièrement d’accord avec vous, monsieur Bouvard. Mais nous savons que le problème du PTZ tient au fait que les banques ont tendance à ne pas le proposer. Or, si nous le complexifions dans le sens que vous souhaitez, il ne sera même plus présenté au public dans la liste des prêts universellement proposés, mais figurera parmi ceux qui sont accordés sous condition de ressources, et l’offre de PTZ diminuera très sensiblement. Peut-être est-ce d’ailleurs l’objectif de M. Le Bouillonnec...

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Pas du tout !

M. Jean-Louis Dumont. Au contraire, nous voulons le renforcer pour les ménages modestes !

Mme Valérie Pécresse, ministre. Quant à nous, nous ne le souhaitons pas, car il s’agit d’un dispositif qui soutient de manière importante l’accession à la propriété. Le Gouvernement est donc plutôt défavorable à cet amendement.

Nous souhaitons encourager les ménages à acquérir leur résidence principale et soutenir les primo-accédants. C’est pourquoi nous voulons un PTZ simple et universel, afin qu’il soit proposé à tous. Je crains qu’une complexification du dispositif n’entrave son bon fonctionnement.

M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Le Bouillonnec.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Tout d’abord, si nous proposons de fixer un plafond de ressources identique à celui qui est pris en compte pour l’accession à un logement de type « plus », c’est parce que ce plafond a été abaissé par la loi Boutin. Je tenais à le rappeler.

Ensuite, madame la ministre, vous ne pouvez pas affirmer que nous sommes contre le PTZ. Nous estimons que, dans ce domaine, les fonds de l’État doivent permettre l’accession sociale à la propriété, et donc bénéficier aux ménages modestes, plutôt que favoriser un effet d’aubaine. Lorsque M. de Robien a créé le dispositif qui porte son nom, nous avions déjà discuté de ce point. Depuis, on a remplacé le « Robien » par le « Scellier », et nous nous trimballons chaque année une ardoise de 480 millions d’euros qui ne servent à rien du tout !

Par ailleurs, l’accession à la propriété n’a pas progressé au cours des dix dernières années. Selon l’OCDE, l’INSEE et, très récemment, le Centre d’analyse stratégique, qui dépend du Gouvernement, le nombre des propriétaires n’a pas plus augmenté qu’au cours des décennies précédentes. Cette situation s’explique en réalité par le fait que l’ensemble des instruments censés favoriser l’accession à la propriété ont profité, non pas aux plus modestes, mais à des personnes qui n’ont pas besoin d’être aidées et qui profitent d’un effet d’aubaine.

Certes, il est nécessaire que le dispositif soit simple, mais les mesures que nous proposons, que ce soit celle de M. Bouvard ou la nôtre, me paraissent assez claires. En revanche, madame la ministre, lorsque vous affirmez que les banques risquent de ne plus proposer le PTZ, vous soulevez un véritable problème. Du reste, nous nous étions opposés à ce que les banques soient chargées de servir le PTZ, dont elles assurent le paiement par le biais d’un crédit d’impôt sur les sociétés. Votre argument est donc pertinent, et pour cause : il n’existe aucun moyen d’évaluer la manière dont les banques proposent le PTZ. Et nous ne pouvons pas davantage savoir si elles ne tirent pas avantage du PTZ, par exemple, en facturant des frais de dossier légèrement supérieurs, voire – mais j’exagère – en proposant, pour le reste du prêt, un taux d’intérêt supérieur à l’offre qu’elles feraient à ceux de leurs clients qui ne souscrivent pas de PTZ. Le contrôle que nous avions réclamé n’existe pas, hélas ! Nous espérons bien qu’il sera mis en œuvre un jour.

Pour l’instant, le problème est simple : le bénéfice de ce dispositif, qui coûtera 1,2 milliard, doit-il ou non être soumis à condition de ressources ?

M. le président. La parole est à M. le président de la commission.

M. Jérôme Cahuzac, président de la commission des finances. L’amendement de notre collègue Michel Bouvard est un bon amendement et, à titre personnel, je juge le sous-amendement de M. Le Bouillonnec excellent, même si j’ai entendu les réticences exprimées par le rapporteur général et la ministre. Toutefois, ni M. Bouvard ni M. Le Bouillonnec n’ont besoin de moi pour défendre leurs idées. Je m’exprimerai donc en tant que président de la commission des finances, pour rappeler que l’amendement de Michel Bouvard a été adopté à l’unanimité par la commission.

Ce débat est récurrent, et je crois qu’il y a un an ou deux ce vote n’aurait pas été acquis de la même manière. Nous voyons bien ce qui se fait sur le terrain et, compte tenu du coût du dispositif, nous sommes en droit de nous demander si les moyens ne devraient pas être concentrés sur certains déciles, plutôt que dispersés. Je peux être sensible au principe d’universalité, mais l’objectif du PTZ est tout de même de permettre l’accession à la propriété de celles et ceux de nos concitoyens qui n’ont pas les revenus les plus élevés.

C’est la raison pour laquelle je souhaiterais que la commission des finances, qui a adopté cet amendement à l’unanimité, soit suivie par l’Assemblée. Ce faisant, elle marquera une inflexion nécessaire de la politique du logement. L’universalité est un concept extrêmement généreux, mais je ne suis pas certain que l’État ait actuellement les moyens de cette générosité. Il faut savoir réduire la voilure. C’est ce que propose Michel Bouvard, et je pense qu’il a raison.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Je souhaiterais insister sur le point que j’évoquais tout à l’heure. La fusion du dispositif TEPA et du PTZ est née ici : nous l’avons bâtie ensemble, dans l’hémicycle, de façon très consensuelle. À l’époque, nous avions posé le principe de l’universalité du dispositif, mais je me souviens parfaitement avoir alors indiqué que nous examinerions les conditions dans lesquelles il est utilisé par le décile le plus élevé, afin de décider si cette universalité doit être maintenue. Aujourd’hui, au vu des résultats – le décile le plus élevé représentant 10 % des ménages bénéficiaires et 2,6 % du coût du dispositif –, j’estime qu’il n’y a plus lieu de conserver ce principe. En le supprimant, nous ferions donc du bon travail, dans la lignée de la réflexion que nous avons menée il y a deux ans.

En revanche, je ne suis pas d’accord avec M. Le Bouillonnec. Le neuvième décile concentre, de mémoire, 20 à 25 % des ménages pour 14 % à 15 % du coût. Si l’on adoptait son sous-amendement, la mesure aurait un impact direct sur les familles à partir de trois enfants, notamment en zone tendue.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Sauf que 75 % des acquisitions réalisées grâce au PTZ se font en zone rurale !

M. le président. La parole est à M. Jérôme Chartier.

M. Jérôme Chartier. Je souhaiterais rappeler la position de la majorité. J’ai bien entendu les arguments de Michel Bouvard, qui, je le reconnais, sont extrêmement intéressants.

M. Michel Bouvard. C’est pourquoi la commission des finances a adopté mon amendement à l’unanimité !

M. Jérôme Chartier. Néanmoins, cher collègue, on peut toujours développer d’excellents arguments, quelles que soient les dispositions fiscales dont nous débattons, et l’opposition ne s’en prive pas. C’est pourquoi il me semble que nous devons rester rivés au principe que nous avons fixé et qui est celui d’un PTZ sans condition. Si, pour d’autres raisons, cela peut poser des problèmes en termes de volume, augmentons le volume du PTZ ou modifions la répartition. Nous avons des véhicules adaptés ; nous examinerons un projet de loi de finances rectificative dans trois semaines. Travaillons avec le secrétaire d’État au logement, s’il le faut, mais tenons-nous en à la position de principe que nous avons arrêtée.

Le groupe UMP ne pourra pas soutenir l’amendement présenté par Michel Bouvard ni, bien entendu, le sous-amendement de M. Le Bouillonnec.

M. le président. La parole est à M. Michel Bouvard.

M. Michel Bouvard. J’ai bien entendu l’argument de Mme la ministre selon lequel les banques ne présenteraient plus le PTZ ainsi modifié en « tête de gondole », si je puis dire. Toutefois, la popularité de ce dispositif est telle aujourd’hui que ceux de nos concitoyens qui ont un projet d’accession à la propriété en ont connaissance, notamment s’ils se renseignent auprès du réseau d’information sur l’habitat, financé par les collectivités territoriales et par l’État. Ce type de projet, en effet, est souvent longuement mûri, car il nécessite beaucoup d’efforts, en particulier de la part des classes moyennes. L’argument d’une absence de publicité des banques, s’il correspond à une réalité, ne me paraît donc pas valable pour ce type de projets.

Surtout, nous traversons une période de difficultés budgétaires…

M. Jérôme Cahuzac, président de la commission des finances. Eh oui !

M. Michel Bouvard. …et une niche fiscale doit avoir un effet incitatif. Or, en l’espèce, le PTZ n’incite pas la catégorie de population dont nous parlons à accéder à la propriété ; l’aide apportée par l’État n’est pas le facteur déclenchant.

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Exactement !

M. Michel Bouvard. J’ajoute qu’à l’autre bout de la chaîne – et c’est un sujet que nous avons régulièrement abordé avec Pierre Méhaignerie – nous avons écorné l’universalité du PTZ en le territorialisant. Les ouvriers et les classes moyennes n’ayant plus les moyens d’habiter dans les centres villes, ils s’en éloignent. Or, dans ce cas, ils reçoivent une aide moins importante, parce qu’ils sont en zone C.

M. Jean-Louis Dumont. Très juste !

M. Jérôme Chartier. Eh bien, modifions le zonage !

M. Michel Bouvard. Tant que la question de la zone C ne sera pas réglée, je ne vois pas pourquoi on diminuerait l’aide accordée à ceux qui doivent s’éloigner des centres-villes – et donc supporter les frais de transports et bénéficier de services moins nombreux – et on la maintiendrait pour ceux qui ont les revenus les plus élevés. Je maintiens donc l’amendement. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes UMP et SRC.)

M. le président. La parole est à M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson. Michel Bouvard a raison ! Nous avons eu sur ce sujet un débat passionné, auquel Pierre Méhaignerie avait participé, et une bonne partie de la majorité partageait nos vues. Lorsqu’une personne fait construire en zone C alors qu’elle est originaire de la zone A ou B, le problème du logement n’est pas résolu. Il faut respecter l’unité du territoire. Avec Michel Bouvard, nous avions développé tous ces arguments. Nous n’avons pas été entendus, mais de justesse, car il y a eu une seconde délibération. Or, je crois que nous avons fondamentalement raison.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Valérie Pécresse, ministre. Je suis très sensible à la question du zonage. Elle est cruciale, car, ainsi que l’a indiqué Michel Bouvard, les ménages les plus populaires s’éloignent des centres villes parce que l’immobilier y est hors de prix. Cette question doit donc être retravaillée.

M. Jean-Louis Dumont. On nous dit cela chaque année !

Mme Valérie Pécresse, ministre. Aussi souhaiterais-je que M. Bouvard retire son amendement, afin que l’on ait le temps de réfléchir, avec le secrétaire d’État au logement, à la manière dont nous devons agir : faut-il modifier le zonage, les catégories ? Nous verrons.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Apparu ne veut pas y toucher !

Mme Valérie Pécresse, ministre. Quoi qu’il en soit, je souhaiterais que vous nous donniez le temps de travailler et je m’engage à saisir Benoist Apparu de cette question. Je demande donc le retrait de l’amendement. Sinon, je maintiendrai l’avis défavorable du Gouvernement.

M. le président. La parole est à M. Michel Bouvard.

M. Michel Bouvard. J’entends bien ce que nous dit Mme la ministre et je ne me fais guère d’illusions au sujet des délais. Toutefois, il se trouve que nous aurons encore un collectif en fin d’année. Je vais donc retirer mon amendement, pour le redéposer dans le cadre de ce collectif. Si rien ne s’est passé entre-temps – et je doute de la capacité du secrétariat d’État du logement à faire évoluer rapidement sa politique, tant le secrétaire d’État est prisonnier d’une administration conservatrice…

M. Jean-Louis Dumont. Tout à fait ! Rétrograde et réactionnaire !

M. Michel Bouvard. …infoutue de faire bouger un tant soit peu la politique du logement, quelles qu’aient été les majorités en place.

Bref, je me fais peu d’illusions, mais je veux tout de même prendre le Gouvernement au mot et retirer mon amendement.

M. Jean Launay. Ne le retirez pas, nous allons perdre six mois !

M. Michel Bouvard. Si rien ne s’est passé avant le collectif, je le redéposerai et cette fois, bien évidemment, je ne le retirerai pas. (« Très bien ! » et applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Le Bouillonnec.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Je reprends l’amendement de notre collègue Bouvard, monsieur le président. Je rappelle que nous avons eu le même débat au sujet du dispositif Scellier, avec les mêmes intervenants dans l’hémicycle et, pour résultat, une disposition votée par notre assemblée mais repoussée au Sénat.

Je persiste à considérer que vous ne pourrez pas laisser les processus d’accompagnement de l’investissement locatif par l’État subir une telle dérive. Si nous en sommes déjà à plus de 1,2 milliard d’euros pour l’année 2012, c’est-à-dire dès la deuxième année du dispositif, je n’ose imaginer dans quelle situation nous allons nous trouver dans les quatre ou cinq années à venir. L’état actuel des finances publiques nous impose de réagir rapidement.

M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Dumont.

M. Jean-Louis Dumont. Sans refaire toute l’histoire, mes chers collègues, il faut tout de même se rappeler les conditions dans lesquelles le PTZ a été créé par Pierre-André Périssol, et combien d’années il a fallu pour affiner les critères de définition d’un produit qui, aujourd’hui, semble faire l’unanimité au sein de notre assemblée.

Toutefois, notre collègue Michel Bouvard vient de souligner que cette universalité est, à présent, quelque peu écornée. Le PTZ a évolué au détriment des ménages populaires, des ménages les plus modestes.

M. Charles de Courson. Exactement !

M. Jean-Louis Dumont. Ces ménages ont envie d’accéder à la propriété, de se constituer un patrimoine, de se donner une chance de vivre dans de meilleures conditions : c’est un projet de vie, un projet de famille. Or, on ignore cet aspect-là pour laisser quelques ménages situés dans le haut du décile profiter d’un éventuel PTZ – je suis d’ailleurs persuadé qu’un certain nombre d’entre eux ne vont même pas faire de demande, de crainte de se faire repérer par une administration ! Dans ces conditions, l’amendement de Michel Bouvard, basé sur un simple constat, est le bienvenu. Quant au sous-amendement, il nous permet de considérer que l’aide à l’accession à la propriété doit s’effectuer sous conditions de ressources.

À l’heure où nous discutons du logement – tant du locatif social que de l’accession à la propriété –, nous devrions veiller à bien cibler les ménages susceptibles d’utiliser le dispositif à bon escient, c’est-à-dire pour eux-mêmes, leurs enfants, leur famille. Pour ce qui est du zonage, nous réclamons depuis très longtemps une révision qui ne vient jamais, la seule chose que nous obtenons se résumant aux promesses dont on nous abreuve régulièrement.

J’appelle nos collègues à dépasser le débat idéologique sur l’universalité afin que nous puissions nous montrer efficaces et permettre, grâce au vote de l’amendement de Michel Bouvard et du sous-amendement de Jean-Yves Le Bouillonnec, la mise en œuvre d’une véritable accession sociale à la propriété.

(Le sous-amendement n° 420 n’est pas adopté.)

(L’amendement n° 175 n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir l’amendement n° 44 rectifié.

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Cet amendement, adopté en commission avec mon avis défavorable, vise à assouplir les conditions d’utilisation des sommes versées sur un compte assurance pour la forêt.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Valérie Pécresse, ministre. Le Gouvernement est nettement défavorable à cet amendement. Nous parlons, en effet, d’un compte assurance pour les risques de tempête ou d’inondation – je dis bien les risques ! Or, il est ici proposé d’utiliser ces comptes d’assurance-risque pour faire de l’investissement forestier.

Si je suis, comme vous, sensible à la problématique de la défiscalisation de l’investissement forestier, la loi de finances ne me paraît pas être le véhicule adapté à une mesure relative à ce sujet. J’insiste sur le fait qu’il s’agit de comptes d’épargne à vocation assurantielle : en cas de tempête ou d’inondation, comment feront les propriétaires de forêts si ces comptes sont vides ?

M. le président. La parole est à M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson. Je n’ai pas voté cet amendement en commission, mais je voudrais poser une petite question à Mme la ministre : pourriez-vous nous dire combien il y a de comptes d’épargne assurance pour la forêt ?

M. Michel Bouvard. Peu !

Mme Valérie Pécresse, ministre. C’est une bonne question…

M. Charles de Courson. J’aimerais vraiment que Mme la ministre nous donne une réponse sur ce point, car cela permettrait sans doute de relativiser la portée de notre débat.

M. le président. Vous avez la parole, madame la ministre.

Mme Valérie Pécresse, ministre. Comme vous le savez, monsieur de Courson, ces comptes ont été créés par la loi de modernisation agricole de l’année dernière, ce qui explique qu’il y en ait très peu.

M. Charles de Courson. Mais encore ?

Mme Valérie Pécresse, ministre. N’étant pas ministre de l’agriculture, je ne saurais vous répondre avec précision sur ce point. En revanche, je peux vous dire que l’objectif ayant présidé à leur création était de mettre en œuvre une assurance contre les risques naturels. S’il était logique de défiscaliser cette assurance, il ne s’agit toutefois pas d’un mécanisme de défiscalisation de l’investissement forestier. N’allons pas emprunter des chemins détournés pour défiscaliser subrepticement l’investissement forestier, qui possède ses propres dispositifs !

Je le répète, outre le caractère inapproprié de la démarche proposée, celle-ci aurait des conséquences terribles en cas de réalisation d’un risque telle une inondation ou une tempête : les personnes ayant investi sur un compte épargne d’assurance n’auraient alors plus que leurs yeux pour pleurer !

M. le président. La parole est à M. Michel Bouvard.

M. Michel Bouvard. Il semble effectivement que le débat relatif à cette question ait vocation à se tenir dans un autre cadre, de préférence l’examen de textes relatifs à l’agriculture – même s’il est souhaitable que les mesures fiscales soient examinées en loi de finances.

Je fais néanmoins observer à Mme la ministre qu’il n’y a pas d’automaticité : ce n’est qu’au bout d’un délai de six ans que les sommes déposées peuvent être retirées, notamment pour financer des travaux de prévention.

Mme Valérie Pécresse, ministre. Tout ça, c’est un peu tiré par les cheveux !

M. Michel Bouvard. C’est pourtant bien ce qui est proposé : les sommes dont nous parlons ne peuvent être retirées qu’au bout de six ans pour financer des travaux de reconstitution forestière à la suite de la survenance de sinistres naturels, ou pour financer des travaux de prévention de tels sinistres. À mon sens, nous restons donc bien dans une logique d’intégration du risque de l’exploitation forestière.

Mme Valérie Pécresse, ministre. Je ne suis pas vraiment convaincue !

(L’amendement n° 44 rectifié n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Pierre-Alain Muet, pour soutenir l’amendement n° 255.

M. Pierre-Alain Muet. Cet amendement, que nous avons déjà présenté, consiste à aligner notre fiscalité sur la fiscalité de nos voisins allemands et à plafonner à 30 % la déductibilité des charges d’intérêts. On sait que la déductibilité totale des charges d’intérêts a un effet pervers, celui de permettre à des entreprises de s’endetter, par exemple pour acheter d’autres entreprises en prévoyant de se rémunérer ultérieurement sur les dividendes qui s’ensuivront.

Nous gagnerions beaucoup à retenir cet amendement, comme le suggère le Conseil des prélèvements obligatoires. D’abord en termes financiers, la recette pour l’État étant assez importante, mais aussi en termes d’efficacité économique.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gilles Carrez, rapporteur général. La commission est défavorable à cet amendement. Cela étant, dans la mesure où nous allons examiner prochainement plusieurs amendements portant sur le même sujet, à savoir la déductibilité des charges financières, il me paraît préférable d’attendre, pour développer ma position, que nous en arrivions à ces amendements, en particulier à celui que doit présenter le président de la commission.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Valérie Pécresse, ministre. Même avis.

M. le président. La parole est à M. Pierre-Alain Muet.

M. Pierre-Alain Muet. Je pourrais retrouver, dans les comptes rendus de nos débats, plusieurs cas où le rapporteur général a émis un avis défavorable à des amendements issus du Conseil des prélèvements obligatoires – je pense notamment à l’amendement relatif au bénéfice mondial consolidé, que nous avons présenté plusieurs fois et qui a fini par être accepté. Il me semble que lorsque nous sommes saisis d’une proposition résultant d’un travail aussi sérieux que celui effectué par le CPO, une telle proposition devrait faire l’objet d’un consensus.

(L’amendement n° 255 n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Jean Launay, pour présenter l’amendement n° 368.

M. Jean Launay. J’ai déjà posé, il y a quelques années, une question d’actualité au sujet des LBO – les financements d’acquisitions par emprunt. Les effets néfastes causés aux entreprises par ces montages financiers sont bien connus. On peut citer l’exemple de la société Télédiffusion de France, qui a été confrontée à d’énormes difficultés en termes d’implantation territoriale et d’emploi.

La crise du capitalisme financier a encore renforcé le caractère périlleux des opérations de rachat au moyen de cette technique de levier. Avec la dégradation de la conjoncture, de nombreuses sociétés, rachetées par des fonds d’investissement au moyen d’un recours massif à l’emprunt, se trouvent en situation de surendettement.

Si les LBO ne sont pas forcément à l’origine des difficultés des entreprises, elles en constituent, en tout état de cause, un facteur aggravant, et ont un effet déstabilisateur sur les entreprises. Quand les banques octroient à un fonds d’investissement des crédits pouvant aller jusqu’à 80 % de la valeur de la société, l’entreprise rachetée est censée rembourser la dette grâce aux résultats qu’elle génère, ce qui se révèle souvent impossible du fait de la situation économique.

Par notre amendement, nous proposons de désinciter ces opérations de rachat par effet de levier – au moins les plus risquées d’entre elles – en supprimant l’avantage fiscal dû à la déductibilité des intérêts d’emprunt, en particulier lorsque le rapport entre les capitaux propres et la dette financière est inférieur à 66 %.

(L’amendement n° 368, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur général, pour présenter l’amendement n° 50 rectifié.

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Cet amendement s’inscrit dans le cadre du travail que nous avons conduit sur l’impôt sur les sociétés, qui a d’ailleurs donné lieu à des mesures dès le collectif de septembre, dont la limitation des reports déficitaires.

Je souhaiterais d’abord vous remercier, madame la ministre, ainsi que vos collaborateurs, car le sujet était assez délicat et vous nous avez beaucoup aidés. J’ai déjà dit de quoi il retourne dans mon rapport du mois de juillet. Il y a aujourd’hui des risques d’optimisation fiscale liés à une disposition récente – adoptée il y a un an, elle n’est pas encore vraiment entrée en application – qui porte sur les sous-concessions de brevets.

De quoi s’agit-il ? Lorsqu’une entreprise détient un brevet qu’elle loue à une autre société, celle-ci, qui devient concessionnaire du brevet, peut déduire de ses résultats imposables à l’impôt sur les sociétés le loyer qu’elle paye à l’entreprise propriétaire. La déduction est de 33 %. Mais, pour encourager l’élaboration et le maintien de brevets en France, nous avons depuis longtemps déjà mis en place un dispositif selon lequel la redevance dont bénéficie l’entreprise louant un brevet est, quant à elle, imposée à un taux de 15 %.

Il y a donc une dissymétrie : on peut déduire la charge du brevet à 33 %, tandis que la recette tirée de la location est à 15 %. Or dans le régime de sous-concession, on peut avoir la situation suivante : l’entreprise qui loue le brevet déduit la redevance à 33 % et peut servir de boîte aux lettres pour sous-concéder à une autre entreprise. À ce moment, celle-ci bénéficiera du taux de 15 %. Vous voyez l’avantage : si je sers simplement de boîte aux lettres, je déduis à 33 % et ne suis imposé, au titre de la sous-concession, qu’à 15 %. Dès qu’il existe de telles dissymétries entre le taux de réduction des charges et l’imposition des recettes, on risque d’avoir des comportements d’optimisation.

L’amendement vise donc à n’accepter l’application du taux réduit de la recette à 15 % qu’au titre de la valeur ajoutée apportée par le concessionnaire qui sous-loue. Par exemple, dans l’industrie pharmaceutique, un brevet d’une entreprise peut être concédé à une autre entreprise, qui va à son tour concéder le principe actif. L’entreprise concessionnaire va apporter une innovation, par exemple dans le conditionnement. Dès lors, elle sous-concédera ce brevet. Au titre de son innovation, la redevance de la sous-concession restera bien imposée à 15 %, mais le principe actif, qui relevait de la première entreprise, reste, lui, imposé à 33 %. Ai-je été clair ? (Sourires.)

M. Jérôme Chartier. Très clair !

M. Patrice Martin-Lalande. Comme toujours !

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Je l’espère.

Un autre sujet, sans rapport avec la sous-concession, est également traité dans cet amendement. Il s’agit d’harmoniser les conditions qui permettent à l’entreprise de déduire au taux normal lorsque c’est une entreprise liée.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Valérie Pécresse, ministre. Le Gouvernement s’en remettra à la sagesse du rapporteur général.

M. Charles de Courson. Qui est grande !

Mme Valérie Pécresse, ministre. Il s’agit d’un régime qui a été modifié dans le cadre de la loi de finances pour 2011.

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Voilà !

Mme Valérie Pécresse, ministre. Vous savez que le Gouvernement a voulu donner une impulsion très forte en faveur de l’exploitation des brevets en France.

Il reste aujourd’hui des zones d’ombre, que le rapporteur général a très bien identifiées, s’agissant notamment des concessions de brevets entre entreprises liées et des sous-concessions.

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Je vous propose une adaptation du dispositif.

Mme Valérie Pécresse, ministre. L’objectif du rapporteur général est de faire en sorte que l’exploitation des brevets soit réalisée en France. Le Gouvernement s’en remettra donc à sa sagesse pour l’amélioration du dispositif voté en 2011.

(L’amendement n° 50 rectifié est adopté.)

M. le président. La parole est à M. Michel Bouvard, pour soutenir l’amendement n° 176.

M. Michel Bouvard. Il m’arrive souvent d’être critique à l’égard du coût de la fiscalité environnementale et des mesures du Grenelle.

M. François de Rugy. Vous avez bien tort : rien n’a été fait !

M. Michel Bouvard. Toutefois, je propose ici de reconduire un dispositif qui avait été adopté afin d’accélérer l’amortissement des travaux que réalisent les entreprises pour faire des économies d’énergie, pour lutter contre le bruit et les pollutions atmosphériques et pour épurer les eaux industrielles.

Ce dispositif avait été reconduit une première fois en 2009 jusqu’au 1er janvier 2013, mais le Sénat avait alors réduit cette prorogation au 1er janvier 2011, dans l’attente d’une évaluation des effets. Celle-ci étant arrivée au travers du rapport de l’Inspection générale des finances sur l’évaluation de la dépense fiscale, j’ai regardé comment le dispositif était évalué. Or, il a reçu la meilleure note possible, c’est-à-dire trois. L’IGF le considère comme « parfaitement adapté à son objectif ».

Le coût est relativement faible : entre 3 et 10 millions en année pleine. Sa non-reconduction a mis en difficulté de nombreux projets qui peuvent contribuer aux objectifs du Grenelle de l’environnement. Ils sont également importants pour maintenir la compétitivité de nos entreprises vis-à-vis de leurs concurrentes étrangères. On s’aperçoit en effet, à la lecture du rapport de l’inspection générale, qu’un tel dispositif existe au Royaume-Uni, en Irlande, en Italie ou encore au Luxembourg. Plusieurs autres pays se sont donc inscrits dans cette démarche. C’est pourquoi je propose que nous adoptions cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Je serais pour ma part favorable à un morceau de l’amendement. (Sourires.)

En effet, monsieur Bouvard, il est vrai que l’on peut envisager de maintenir l’avantage au titre de l’amortissement exceptionnel sur l’impôt sur les sociétés, mais il y a un point que vous n’avez peut-être pas vu : on opère ainsi une sorte de résurrection d’un avantage qui portait sur l’ancienne taxe professionnelle et qu’il n’y a, à mon avis, aucune raison de reconduire.

M. Michel Bouvard. En effet. Il y a une faiblesse de ce point de vue.

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Il y avait, au titre de l’ancienne taxe professionnelle, un abattement de 50 % sur la valeur locative foncière, parce qu’une partie relevait du caractère d’immobilisation de la taxe professionnelle. On a supprimé, dans la taxe professionnelle, la partie équipements et biens mobiliers. Pas de problème, donc, pour les EBM. Mais on a gardé la partie immobilière. Vous maintenez donc cet abattement de 50 % qui, en plus, n’est pas compensé aux collectivités locales.

M. Michel Bouvard. Tout à fait !

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Je préférerais que l’on reprenne l’idée, en ce qui concerne la partie sur l’impôt sur les sociétés, à l’occasion du collectif –si la ministre en est d’accord, naturellement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Valérie Pécresse, ministre. Malheureusement, monsieur le rapporteur général, je suis extrêmement réticente envers cet amendement.

Non que le dispositif n’ait pas pleinement rempli sa mission : comme l’a rappelé Michel Bouvard, il a été parfaitement efficace. Tous les observateurs s’accordent sur ce point. Mais il s’agissait d’une niche qui avait une durée de vingt ans : elle a été votée en 1991 et se terminait en 2010. C’était donc un dispositif temporaire, qui a d’ailleurs été évalué comme tel, pour permettre aux entreprises de se mettre à l’heure du développement durable. Ne recréons pas cette niche. J’ai d’autant moins envie que vous le fassiez, mesdames et messieurs les députés, que nous avons désormais plusieurs dispositifs de financement direct – je le signale en réponse aux demandes de plusieurs députés socialistes.

En effet, plusieurs régimes d’aides non fiscales directes ont été créés depuis 1991 pour encourager les économies d’énergie. Michel Bouvard a parlé du formidable progrès du Grenelle de l’environnement. Il existe aussi les aides de l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie, sans oublier le recours au Fonds de garantie des investissements de maîtrise de l’énergie.

Dans le contexte budgétaire que nous connaissons, et compte tenu du fait que le comité d’évaluation des dépenses fiscales et des niches sociales insiste sur le caractère temporaire de cette mesure, je crois qu’il ne faut pas la ranimer. C’est terminé ; tournons la page et passons à autre chose ! Nous sommes à l’heure du Grenelle.

M. le président. La parole est à M. François de Rugy.

M. François de Rugy. Je souhaite répondre à la ministre en reprenant ses propos. Elle a dit : « Tournons la page ». Comme disait le Président de la République, l’environnement « ça commence à bien faire ». Il vaut donc mieux tourner la page du Grenelle. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Mme Fabienne Labrette-Ménager. La ministre vient de vous dire le contraire !

Mme Valérie Pécresse, ministre. Nous sommes à l’heure du Grenelle !

M. François de Rugy. Mon cher collègue Bouvard, vous avez dit vous-même que vous étiez très critique sur les financements du Grenelle. Mais ce n’est pas la peine : il n’y en a plus ! Toutes les ambitions écologiques ont été définitivement abandonnées.

Mme Valérie Pécresse, ministre. Je ne peux pas vous laisser dire ça ! Et les investissements d’avenir ?

M. François de Rugy. Les entreprises du secteur des énergies renouvelables ont d’abord été étranglées par vos dispositions législatives, notamment fiscales.

Je serais tout prêt, pour ma part, à soutenir l’amendement de M. Bouvard. Oui, il faut trouver des mécanismes de financement, y compris sur le temps long, et on a là un dispositif qui peut être intéressant pour les entreprises.

Je m’étonne tout de même un peu, mon cher collègue, de votre sollicitude à l’égard des entreprises. On ne vous a pas entendu lorsque le Gouvernement, l’année dernière, a donné plus qu’un coup de rabot : un véritable coup de hache dans le crédit d’impôt en faveur du développement durable, qui a été divisé par deux. Or c’était, non pas une niche fiscale, mais un crédit d’impôt.

Mme Fabienne Labrette-Ménager. Ce n’est pas la même chose ?

Mme Valérie Pécresse, ministre. Ce dispositif, nous le prorogeons, monsieur de Rugy !

M. François de Rugy. Alors ne parlez pas de vos ambitions sur le Grenelle ! Tout est dit quand on voit le sort que vous avez réservé à la fois aux dispositifs financiers de ce type et, plus largement, au secteur des énergies renouvelables et de la performance énergétique – puisque tel était l’objet de l’amendement de notre collègue M. Bouvard.

M. le président. La parole est à M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson. Mes chers collègues, un tel dispositif se justifie quand le prix de l’énergie est bas. Plus le prix de l’énergie est élevé, plus la rentabilité est forte, et ce sans aucune aide. Or nous avons connu une forte remontée du prix de l’énergie. Et ce n’est pas fini.

M. François de Rugy. Cela varie !

M. Charles de Courson. Je pense qu’il faut avoir le courage de le dire : économiquement, la rentabilité est automatique. Ce n’est pas la peine d’avoir en plus une aide de ce type, qui n’est d’ailleurs, s’agissant de l’impôt sur les sociétés, qu’un décalage dans le temps.

M. le président. La parole est à M. Michel Bouvard.

M. Michel Bouvard. Je voudrais dire à Mme la ministre qu’elle m’a convaincu.

M. François de Rugy. Ben voyons !

M. Michel Bouvard. J’ajoute toutefois que, dès lors qu’un travail d’évaluation de la dépense fiscale a été fait, il faut en tirer les conséquences.

Il m’avait échappé que le dispositif était calé dans la durée. Cela n’interdit d’ailleurs pas qu’il puisse être reconduit, s’il est jugé efficace. Mais, dans la période actuelle, compte tenu du fait qu’il était instauré pour vingt ans et des autres dispositions qui existent, il ne faut pas multiplier les mécanismes.

M. François de Rugy. C’est très faible !

M. Michel Bouvard. Monsieur de Rugy, si je suis critique vis-à-vis de la dépense fiscale liée à la politique environnementale, c’est pour deux raisons.

La première, c’est que, souvent, cette dépense est mal évaluée. On en a eu un exemple, pas plus tard que lundi, avec le bonus-malus automobile.

M. François de Rugy. Il était mal ficelé !

M. Michel Bouvard. La seconde raison est que, parfois, la fiscalité écologique va à l’encontre des objectifs poursuivis. Par exemple, pour l’équipement en panneaux photovoltaïques, on importe l’ensemble des matériaux d’Allemagne et de Chine, alors que, dans le même temps, on s’efforce de développer une filière française !

M. François de Rugy. Vous l’avez empêché pendant des années !

M. Michel Bouvard. J’ai la faiblesse de connaître un peu cette filière, puisque les outils de recherche sont installés là où je suis élu.

Si tout l’équipement se fait avec du matériel étranger, le temps que notre filière soit au point, il ne restera rien à équiper. Ce n’est donc pas forcément de bonne politique industrielle.

M. François de Rugy. Vous faites le contraire !

M. Michel Bouvard. Il convient donc, sur la dépense fiscale en matière environnementale, d’être attentif à cet aspect des choses, de bonne évaluation de dépenses et de bonne logique industrielle…

M. Charles de Courson. De bonne finance !

M. Michel Bouvard. …puisqu’il s’agit de créer de l’économie verte et pas seulement d’améliorer l’environnement.

(L’amendement n° 176 est retiré.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 51, présenté par M. le rapporteur général, à moins que ce ne soit son auteur, M. Martin-Lalande, qui le défende.

M. Michel Bouvard. Personne ne le fera mieux que lui !

M. le président. La parole est donc à M. Patrice Martin-Lalande.

M. Patrice Martin-Lalande. Il s’agit de proroger d’un an le régime spécial des provisions pour investissements dont bénéficiaient jusqu’à présent pour l’essentiel les entreprises de presse écrite et dont bénéficient aujourd’hui les services de presse en ligne.

Je tiens à insister sur l’utilité de ce dispositif, qui a obtenu l’accord de la commission des finances : au moment où la presse doit passer du papier au numérique, un véritable investissement est nécessaire pour franchir cette étape indispensable pour assurer son avenir. Il faut, par ce dispositif, continuer d’aider cette mutation qui n’a que trop tardé, et ne pas priver la presse des moyens qui lui permettront de l’accomplir rapidement.

M. Charles de Courson. D’autant plus que cela ne coûte rien !

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Valérie Pécresse, ministre. Ce dispositif n’a pas encore atteint pleinement son objectif. La prorogation nous paraît justifiée. Avis favorable, donc.

Mme Fabienne Labrette-Ménager. Très bien !

M. Patrice Martin-Lalande. Merci, madame la ministre.

(L’amendement n° 51 est adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements, nos 14 rectifié et 243 rectifié, pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à M. François de Rugy pour présenter l’amendement n° 14 rectifié.

M. François de Rugy. C’est un amendement que nous avions déjà déposé l’an dernier. Les collègues socialistes en ont déposé également un qui va dans ce sens. Il concerne un prélèvement exceptionnel sur les bénéfices des compagnies pétrolières.

L’on nous objectera que cela ne peut pas se faire dans un seul pays, que le groupe Total, puisque c’est essentiellement de lui qu’il s’agit, trouvera moyen d’y échapper, et que sais-je encore ? Mais, en réalité, il faut nous arrêter quelques instants sur la difficulté que nous avons à obtenir des recettes fiscales pérennes en usant d’instruments qui datent d’une époque où les objectifs politiques n’étaient pas les mêmes, notamment en matière d’écologie, et où nous n’avions pas une économie aussi ouverte que maintenant.

Je voudrais appeler votre attention sur un point que j’avais déjà développé l’an dernier : les compagnies pétrolières, ou les distributeurs de carburants d’ailleurs, réalisent des bénéfices très élevés. Pour le groupe Total, ceux-ci dépassent les 10 milliards d’euros par an, et ce depuis plusieurs années – même en cette période de crise !

Ces entreprises, contrairement à d’autres, vont enregistrer des bénéfices. C’est assez étrange, car on pourrait penser que, les prix augmentant, cela ferait baisser la consommation et qu’elles se retrouveraient en difficulté. On constate, au contraire, que le prix de la matière première augmente et que cela les enrichit considérablement. Mais les prix de la matière première augmentent parce que la demande mondiale croît, y compris dans notre pays, où la consommation de carburant est très forte. Cela tient principalement, malgré ce que l’on raconte souvent, à des investissements publics, notamment au fait que la circulation routière est très développée, à la hauteur des importants investissements publics réalisés en matière d’équipements routiers.

Je voulais, à l’occasion de cet amendement, remettre ces questions en débat, débat auquel nous ne pourrons pas échapper éternellement. On voit bien que les bénéfices de ces majors pétrolières, comme on les appelle, ne peuvent échapper complètement aux États, alors qu’en fait elles vivent grâce aux politiques des États.

M. le président. La parole est à M. Christian Eckert, pour soutenir l’amendement n° 243 rectifié.

M. Christian Eckert. Ces amendements sont comparables, à ceci près que nous proposons un taux de 20 % et non de 25 %.

Je ne reprends les arguments de notre collègue de Rugy, qui a très bien montré l’intérêt environnemental de cet amendement instaurant une contribution exceptionnelle lorsque les bénéfices sont en augmentation. Mais il permet aussi à la société, si elle engage les actions environnementales qui ont été décrites, de déduire une provision de sa contribution à l’impôt sur les sociétés, dans la limite de 20 %.

Mais ce que je souhaiterais vraiment savoir un jour, c’est à combien revient le coût d’extraction d’un baril de pétrole, et j’aimerais que nous ayons une réflexion sur l’ensemble de la chaîne –recherche, extraction, transport, raffinage, distribution. J’aimerais connaître toute l’évolution qui permet d’arriver au prix à la pompe, en incluant bien sûr l’étape de la taxation, afin que l’on sache l’ensemble des prix segment par segment. Nous aurions, je pense, de grandes surprises car si, conformément à ses dires, Total ne réalise pas de bénéfice en France, il est évident que cette société, dès lors qu’elle contrôle l’ensemble des maillons de la chaîne, réalise, en se vendant à elle-même les produits en cascade au travers de filiales localisées ici ou là, les bénéfices à l’endroit qu’elle souhaite. Quant à l’usager, malheureusement pour lui, l’usager est au bout de la chaîne.

Nous serions probablement surpris si l’on arrivait à mener à bien cette étude.

Nous avons fait valoir nos arguments. Nous avions déjà déposé et défendu cet amendement. Nous recommençons aujourd’hui, en compagnie de nos collègues du groupe GDR. Nous pensons que vous allez l’adopter, car je rappelle que, si Total ne paie manifestement pas d’impôt sur les sociétés en France, elle réalise tout de même des bénéfices annuels compris entre 10 et 15 milliards d’euros.

(Les amendements nos 14 rectifié et 243 rectifié, repoussés par la commission et le Gouvernement, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)

M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances, pour soutenir l’amendement n° 164.

M. Jérôme Cahuzac, président de la commission des finances. Cet amendement a déjà été présenté à l’assemblée sous une autre forme, et trouve sa justification dans plusieurs arguments.

Le premier est celui de la convergence avec la fiscalité allemande. Il se propose en effet de plafonner la déductibilité des intérêts d’emprunts. Dans notre pays, cette déductibilité est intégrale et sans limite ; en Allemagne, elle est plafonnée à 30 %. Je vous propose donc d’imiter nos amis allemands en la plafonnant nous aussi à 30 %.

Le deuxième argument est que nos entreprises, on le sait, sont sous-capitalisées et que, nonobstant la crise, la distribution de dividendes n’a pas cessé et est restée la même. L’investissement a été la variable d’ajustement et, puisque la crise était là, le surplus de ressources nécessaires a été trouvé dans le secteur bancaire autant que celui-ci pouvait en fournir. Tout l’intérêt pour les entreprises de procéder ainsi tient à ce qu’ensuite elles peuvent déduire sans limites les frais financiers. Je ne pense pas que ce soit une bonne chose, d’abord parce qu’il faut les inciter à réinvestir une part plus importante de leurs bénéfices, ensuite parce que, ce faisant, elles se mettent dans la main du secteur bancaire, dont on sait qu’il peut se retourner de manière assez brutale et précipiter la fin.

Le troisième argument est un argument de justice, car les entreprises qui bénéficient à plein de cette déductibilité intégrale des intérêts d’emprunt sont les grandes entreprises. Cela explique, pas exclusivement mais en grande partie, le fait que la contribution des entreprises du CAC 40 à l’impôt sur les sociétés soit relativement faible, puisque, sur une cinquantaine de milliards d’euros de recettes l’année dernière, elles n’ont contribué qu’à hauteur de 3,5 milliards, et encore s’agissait-il, pour les deux tiers, de la contribution d’entreprises publiques – je vous renvoie au rapport de notre rapporteur général sur l’application de la loi fiscale. L’une des raisons de cette faiblesse de la contribution des grandes entreprises à l’impôt sur les sociétés est précisément que celles-ci bénéficient à plein de l’optimisation fiscale que permet cette déductibilité illimitée.

Le quatrième argument est, me semble-t-il, qu’en limitant cette évasion, on restaurer… comment dit-on, monsieur le rapporteur général ? On protège…

M. Gilles Carrez, rapporteur général. On consolide.

M. Jérôme Cahuzac, président de la commission. …et l’on restaure nos finances publiques puisque, naturellement, on n’augmente pas les impôts.

Il ne s’agit d’ailleurs pas d’une augmentation, mais d’une baisse de dépense fiscale, dirai-je pour me référer à la terminologie en vigueur !

J’avais déjà présenté cet amendement. Il avait été rejeté pour des arguments qui, à la réflexion, étaient fondés.

Le premier argument qu’avait invoqué notre rapporteur général était que sa mise en œuvre était trop brutale et risquait de ne pas permettre aux entreprises de s’adapter. Vouloir le bien au prix d’un mal immédiat n’est sans doute pas la meilleure des solutions ; c’est pourquoi je propose une application progressive sur trois ans.

Le deuxième argument du rapporteur général – et c’était, en effet, une faiblesse de la disposition que j’avais soumis à l’assemblée – était que, ne prévoyant pas de franchise, elle pouvait s’avérer pénalisante pour les PME. Voici donc prévue une franchise de 3 millions d’euros, légèrement supérieure à celle existant en Allemagne, car il a été estimé, à juste titre et en accord avec les personnes qui m’ont permis de comprendre la finalité et l’utilité de ces dispositions, qu’il fallait mettre la franchise à ce niveau pour qu’à aucun moment les PME ni les entreprises de taille intermédiaire ne soient pénalisées.

Enfin, un troisième élément ennuyait le rapporteur général : c’était la rétroactivité. Dans ce nouvel amendement, il est prévu qu’elle ne s’applique pas.

Dès lors que les trois objections qui avaient été soulevées pour rejeter cet encadrement d’une niche fiscale n’ont plus lieu d’être, il me semble que les quatre arguments que j’ai développés – la convergence, la justice, la nécessité d’investir et la prudence qui commande à ces entreprises de ne pas se mettre intégralement dans les mains du secteur bancaire – devraient, mes chers collègues, emporter votre conviction, et d’abord celle du rapporteur général que je sens bien ennuyé, car je ne le crois pas fondamentalement hostile à l’amendement. Et puisque vous aussi le connaissez bien, vous devinez que, lorsqu’il il se gratte les cheveux de la sorte, c’est qu’il cherche un argument pour justifier son refus ! (Rires.)

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gilles Carrez, rapporteur général. L’amendement du président aborde un sujet très important, la déductibilité des charges financières qui, dans notre pays, se trouve être totale, c’est-à-dire qu’une entreprise peut déduire sans limite les charges financières liées à des emprunts, lesquels emprunts peuvent avoir été souscrits pour faire des investissements, mais aussi pour acheter d’autres entreprises ou des titres de participation.

Pour être précis, il existe une limite ; c’est la notion de sous-capitalisation pour des entreprises liées – dispositif que nous avons d’ailleurs durci en loi de finances rectificative fin 2010.

Dans le rapport que j’ai rédigé début juillet sur l’application de la loi fiscale, j’ai insisté sur cet enjeu de déductibilité des charges financières. Je serai bref, mais je voudrais que nous réfléchissions ensemble aux deux aspects de la question.

La première réponse possible, celle que propose le président Cahuzac, c’est de considérer qu’au-delà d’un certain montant les charges financières ne peuvent plus être déductibles. C’est la solution qui a été retenue en Allemagne depuis un certain temps. Lorsque nous sommes allés, le président de la commission et moi-même, en Allemagne, et lorsque nous avons reçu nos collègues du Bundestag – Charles de Courson s’en souvient car il était présent –, ils nous ont bien dit que le dispositif changeait pratiquement tous les deux ans – l’instabilité fiscale existe aussi en Allemagne – parce qu’il était difficile à calibrer.

Certes, l’amendement du président Cahuzac est bien meilleur que celui qu’il nous avait présenté il y a quelques mois, parce qu’il prévoit une franchise, une progressivité et des seuils de déclenchement assez raisonnables. Mais il s’inscrit quand même dans l’idée générale selon laquelle le plafonnement des charges financières est la solution.

M. Jérôme Cahuzac, président de la commission des finances. Le plafonnement de la déductibilité des charges financières.

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Tout à fait.

Or les entreprises sont diverses et variées. Une entreprise peut avoir beaucoup investi, dans des achats de matériels de travaux publics ou de locaux par exemple, et avoir, pendant quelque temps, des frais financiers très importants. Si nous adoptions une règle aveugle qui s’applique à tout le monde, cette entreprise serait pénalisée.

M. Jérôme Cahuzac, président de la commission des finances. Ce n’est pas un bon argument.

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Cela étant, un travail de convergence franco-allemande est engagé, et je crois, je parle sous votre contrôle, madame la ministre, que la Direction de la législation fiscale et son équivalent allemand ont déjà commencé à travailler ensemble.

M. Christian Eckert. Bref, il faut attendre…

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Pas du tout, l’objectif est d’aboutir dès l’année prochaine, donc à court terme.

Notre collègue Cahuzac nous propose un bel amendement, sachant qu’il est plus facile de limiter la déductibilité des charges financières quand le taux de l’impôt sur les sociétés est de 25 % – 15 % plus 10% parce qu’il faut prendre en compte le taux des Länder – que lorsqu’il est d’un peu plus de 33 %. C’est toujours le même problème : on ne peut pas, en matière d’impôt, parler seulement de l’assiette ou seulement du taux, il faut toujours prendre en considération les deux éléments. Un impôt, c’est une assiette multipliée par un taux.

Si nous appliquions la règle allemande stricto sensu, comme le propose le président, sans nous poser la question du taux, alors que celui-ci est beaucoup plus bas en Allemagne, nous aurions des problèmes. C’est tout l’intérêt du travail de convergence qui est actuellement conduit.

Au-delà, je me demande si une règle normalisée pour toutes les entreprises est la bonne solution.

M. Charles de Courson. Non !

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Je me demande s’il ne faudrait pas plutôt regarder du côté de la nature des charges financières.

M. Jérôme Chartier. En effet.

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Je proposerai tout à l’heure un amendement qui a été adopté par la commission des finances. Le régime de déductibilité des charges financières appliqué en France étant favorable, il peut être tentant, pour un groupe américain qui veut acheter ou développer une filiale en Allemagne, de passer par sa filiale française pour réaliser son opération. Le financement de celle-ci sera ainsi complètement déduit en France, alors que le montant de la déduction aurait été plafonné en Allemagne. Même si, en termes de décisions, de chaîne hiérarchique, de commandement, d’organigramme, la filiale française n’a rien à voir avec l’opération et qu’elle sert exclusivement à relier les États-Unis et l’Allemagne, on risque de voir la déductibilité jouer au détriment des recettes de l’impôt sur les sociétés français. Dans le même esprit, notre collègue Marc Goua a fait en commission des finances une observation extrêmement intéressante, en demandant s’il était normal de pouvoir emprunter et déduire les charges financières correspondantes pour racheter ses propres actions.

Je me demande donc, madame la ministre, s’il ne faudrait pas, à côté du plafonnement global, s’intéresser à la nature des charges financières.

En tout cas, pour notre part, compte tenu du travail de convergence qui est actuellement conduit, nous n’avons pas suivi le président, même si, je le reconnais, il a bien amélioré sa réflexion. Il peut encore progresser.

M. Charles de Courson. Peut mieux faire… (Sourires.)

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Et je me suis borné, avec l’accord de mes collègues, à traiter le risque d’optimisation fiscale au titre de l’acquisition par des groupes internationaux de filiales à l’étranger.

Il reste que le sujet est passionnant et que j’aurais un suggestion à vous faire, madame la ministre, qui serait de constituer non pas seulement un groupe franco-allemand mais un groupe franco-germano-britannique, une sorte de « triple entente » revue et corrigée. En effet, les Anglais, qui ont beaucoup de groupes multinationaux, sont en train de réfléchir dans une autre direction. Ils comparent l’endettement de leurs filiales en Angleterre avec l’endettement global du groupe et, s’ils se rendent compte que l’endettement desdites filiales est très supérieur à l’endettement global du groupe, ils toisent le premier en fonction du second. Cette approche me semble très intéressante.

Bref, puisque nous avons la chance d’avoir un président de commission très créatif, très inventif, je lui suggère d’utiliser son intelligence aiguë à essayer de trouver la bonne solution dans les prochains mois, si ce n’est dans les prochaines années.

M. Jérôme Cahuzac, président de la commission des finances. Je vais déjà essayer de vous répondre…

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Valérie Pécresse, ministre. Maintenant que nous avons pu évaluer l’estime réciproque que se portent le rapporteur général et le président de la commission, permettez-moi de donner la position du Gouvernement sur cette disposition.

Cette disposition nous intéresse car, ayant lu l’excellent rapport de Gilles Carrez sur les différentiels de fiscalité entre PME et grands groupes, nous avons tous constaté qu’une des explications de ce différentiel résidait dans cette possibilité de défiscaliser indéfiniment les intérêts d’emprunt.

Néanmoins, comme l’a indiqué le rapporteur général, nous avons entrepris une démarche d’harmonisation et de convergence franco-allemande. Le président Cahuzac invoque justement ce travail en cours pour justifier le vote immédiat de son amendement. Je ne serai pas aussi pressée, pour deux raisons.

D’abord, parce que la règle allemande que vous souhaitez reprendre, monsieur le président, est assez récente – elle date de 2008 – et qu’elle a donné lieu, en contrepartie, à une baisse très forte, de dix points, du taux de l’impôt sur les sociétés. Comme le disait ce matin un député de la majorité, s’il est bon de parler de convergence franco-allemande, il ne faut pas parler systématiquement de convergence à la hausse. En effet, le principe de la convergence franco-allemande, c’est de rendre nos entreprises aussi compétitives que les entreprises allemandes : ce n’est pas de leur mettre aux pieds les boulets français en plus des boulets allemands. Il faut que nous soyons attentifs à ne pas augmenter la fiscalité des entreprises françaises sous prétexte d’appliquer l’impôt allemand et, inversement, à ne pas baisser la fiscalité française quand l’impôt allemand est plus favorable.

Cette question du pouvoir et du contre-pouvoir, de la balance entre la déduction fiscale et la fiscalité, doit être prise en compte. C’est pour cela que nous avons une démarche globale. Nous comptons progresser sur la limitation de la déductibilité des intérêts d’emprunt – et vous avez raison, monsieur le président, de soulever cette question – mais également sur la baisse du taux de l’impôt sur les sociétés.

Je précise, parce qu’il est important que vous le sachiez, que la direction de la législation fiscale a été contactée par son homologue allemande, car qu’il semble que le dispositif que les Allemands ont adopté en 2008 leur paraît trop rigoureux. Aujourd’hui, les Allemands multiplient les exonérations pour faire sortir le maximum d’entreprises du dispositif : il n’y aurait plus que 500 entreprises soumises à ce plafond de déductibilité. Les Allemands veulent assouplir ce dispositif rigide de non-déductibilité des intérêts d’emprunt. Il ne faudrait pas que nous convergions vers les Allemands à un moment où ils veulent converger vers nous, au risque de nous croiser sur la route et de finalement diverger. Ce serait dommage.

En tout cas, la direction de la législation fiscale allemande est intéressée par la déductibilité telle qu’elle se pratique en France. Convergeons, continuons à travailler, et retrouvons-nous, monsieur le président, à l’occasion du collectif de fin d’année, mais surtout à l’occasion des conclusions du rapport sur la convergence fiscale franco-allemande qui sera rendu à François Baroin d’ici à la fin de l’année.

M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.

M. Jérôme Cahuzac, président de la commission des finances. J’ai recensé cinq arguments dans les propos du rapporteur général pour convaincre nos collègues de ne pas voter cet amendement.

Premier argument, le cas d’espèce. On peut toujours trouver un cas d’espèce qui serait pénalisé mais, la loi étant de portée générale, je suggère qu’on ne légifère pas pour des cas d’espèce. Même si acheter des machines ou des bâtiments peut être une nécessité pour une entreprise, cela reste un cas d’espèce.

Deuxième argument, la convergence. Je suggère que le Parlement prenne, de temps en temps, l’initiative de cette convergence et qu’il n’attende pas, en tout cas sa majorité, le bon vouloir de l’exécutif – mais je laisse à chacun le droit de régler cela avec lui-même ou avec son groupe et je comprendrai la loyauté de la majorité à l’égard du Gouvernement qu’elle soutient.

Troisième argument, le taux de l’impôt sur les sociétés. C’est un argument qui peut paraître plus sérieux mais que je considère vraiment mal venu.

D’abord, parce que, même si le rapporteur général l’a corrigé dans un deuxième temps, le taux allemand de l’impôt sur les sociétés n’est évidemment pas de 15 %, puisqu’il faut ajouter les taux des États fédérés, mais plus souvent de 30 %, et non de 25 % comme l’a dit le rapporteur général.

Ensuite, parce que le taux d’impôt sur les sociétés acquitté par les entreprises allemandes est à comparer, non pas au taux facial qu’acquittent les grandes entreprises de notre pays, mais au taux réel, ce que l’on appelle le taux implicite. Car – et c’est un autre enseignement du rapport de Gilles Carrez sur l’application de la loi fiscale – les entreprises en question ne paient pas 33,33%, comme l’a dit le rapporteur général, ni même 30%, 25 % ou 20%. Le taux se situe entre 10 % et 15 %, aux alentours de 12 %. L’argument selon lequel le taux de l’impôt sur les sociétés serait trop élevé en France, ce qui justifierait toutes ces niches fiscales et ces dérogations, ne tient pas pour les entreprises visées, qui paient un taux implicite d’impôt sur les sociétés compris entre 10 et 15 % – je vous renvoie au rapport de Gilles Carrez sur l’application de la loi fiscale.

Les Allemands ont certes baissé leur taux d’impôt sur les sociétés, mais ne comparons pas les taux faciaux : comparons les taux effectifs et nous constaterons que, pour les entreprises concernées, ces taux non seulement ne sont pas supérieurs en France à ce qu’ils sont en Allemagne, mais leur sont plutôt inférieurs. Cet argument ne me paraît donc pas recevable.

Quatrième argument : l’emprunt devrait être observé au regard de la nature des investissements qu’il finance. Je ne crois pas que ce soit une bonne piste, monsieur le rapporteur général, car s’il faut un accord de l’administration, de deux choses l’une : soit cet accord est délivré a priori, et c’est paralysant, soit il l’est a posteriori, et c’est inquiétant. A priori, c’est paralysant parce qu’on attend un accord de l’administration qui, en dépit de la diligence du pouvoir politique, va toujours tarder, l’administration n’ayant pas le même temps de réactivité qu’un chef d’entreprise. A posteriori, c’est le contraire de la sécurité juridique à laquelle les chefs d’entreprise aspirent : imaginez un chef d’entreprise qui croit pouvoir bénéficier de cette déductibilité et à qui on apprend, une fois qu’il a lancé l’opération, qu’en définitive ce ne sera pas le cas. Donc, je ne crois pas qu’on puisse envisager de contrôle, ni a priori ni a posteriori.

Le cinquième argument concerne le nombre d’entreprises allemandes qui bénéficieraient de la déductibilité illimitée. Sur ce point, la situation semble vraiment évoluer très vite, car le chiffre que vous avez indiqué, madame la ministre – à savoir 500 entreprises – est très inférieur à celui dont j’ai eu connaissance la semaine dernière, et qui émanait de votre administration. Manifestement, les Allemands sont très réactifs. Peut-être avaient-ils eu connaissance de cet amendement…

M. le président. La parole est à M. Jérôme Chartier.

M. Jérôme Chartier. J’opposerai quelques arguments à ceux du président de la commission.

Il s’agit des structures de financement des entreprises françaises et allemandes. M. Cahuzac sait très bien qu’elles ne sont pas identiques, car la fiscalité est radicalement différente dans ces deux pays.

Je prendrai l’exemple très simple du régime « mère-fille » de remontée des bénéfices. En France, l’imposition est de 5 %, en Allemagne de 0 %. Cela signifie qu’en Allemagne on encourage la remontée des bénéfices, ce qui veut dire de la trésorerie et des fonds propres supplémentaires.

Le mode de financement allemand est donc radicalement différent du nôtre. Il fait davantage appel aux fonds propres et à la trésorerie. En cela, il est très différent du mode de financement français, qui est très largement intermédié et qui, par conséquent, a besoin de la déductibilité des intérêts d’emprunt.

Avant de modifier le régime, il convient, d’abord, d’étudier la structure de financement des entreprises, avant même de considérer l’intérêt de la convergence. Ensuite, comme le dit très justement Gilles Carrez, étudions chaque activité, c’est-à-dire la typologie du financement et du recours à l’emprunt pour le financement des différentes activités, que ce soit l’acquisition d’un bâtiment, d’une entreprise, ou la trésorerie de court terme pour faire tourner l’entreprise. Enfin, interrogeons-nous sur les moyens pour mettre en place la convergence.

Se fixer la convergence comme simple objectif, alors même que la nature et la culture de financement de nos entreprises sont radicalement différentes, ce serait, me semble-t-il, mettre la charrue avant les bœufs.

Surtout dans l’époque actuelle, où nous craignons une raréfaction du crédit aux entreprises françaises, il serait préférable de commencer par observer nos modes de construction et de financement, de les comparer à ceux de l’Allemagne et d’en tirer des leçons.

Ensuite, rapprochons nos fiscalités, faisons-les converger de la façon la plus astucieuse possible, mais en respectant notre culture économique. Ne cherchons pas à fixer un taux commun ni une structure commune indépendamment de nos différences sur le plan économique.

M. le président. La parole est à M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson. J’étais passionné, du temps de ma jeunesse folle (Sourires), par ces questions. Ne faut-il pas fixer un seuil au-delà duquel il n’y aurait plus de déductibilité ? Il me semble qu’il serait bon d’adopter l’approche anglaise en accordant la déductibilité tant que le rapport entre la dette à long et moyen terme et les capitaux permanents reste raisonnable – par exemple jusqu’à 0,4, en la refusant au-delà de 0,5. Cela encouragerait les entreprises à avoir une structure financière forte.

Si, en revanche, on plafonne à l’allemande, cela ne fonctionnera jamais. À cela s’ajoute le problème des groupes, pour lesquels le calcul doit se faire au niveau des comptes consolidés, sans quoi cela n’a pas de sens. Ainsi beaucoup de maisons mères, y compris internationales, donnent des garanties, mais leurs bilans s’avèrent affreux, avec 80 %, voire 90 % de dettes.

La voie anglaise, qui consiste à raisonner à partir de la structure du financement, ne serait-elle pas la bonne ? Appliquer une règle à l’allemande à des entreprises très capitalistiques aura des conséquences épouvantables ! Il me semble que les Allemands se sont trompés de voie. C’est pourquoi je propose de travailler sur la voie anglaise qui privilégie la structure du financement.

(L’amendement n° 164 n’est pas adopté.)

2

Modification de l’ordre du jour prioritaire

M. le président. M. le président a reçu de M. le ministre chargé des relations avec le Parlement une lettre l’informant que la lecture des conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi de finances rectificative pour 2011 aura lieu mardi 25 octobre, après le vote solennel sur la première partie du projet de loi de finances pour 2012.

3

Ordre du jour de la prochaine séance

M. le président. Prochaine séance, ce soir, à vingt et une heures trente :

Suite de la discussion de la première partie du projet de loi de finances pour 2012.

La séance est levée.

(La séance est levée à vingt heures cinq.)