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ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
SEIZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 8 décembre 2022.
RAPPORT
FAIT
AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE
ET DU CONTRÔLE BUDGÉTAIRE, EN NOUVELLE LECTURE,
SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2023
(n° 598),
Volume 1 |
Commentaires d’articles |
Par M. Jean-René CAZENEUVE
Rapporteur général,
Député
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Voir les numéros :
Assemblée nationale : 1ère lecture : 273, 292 et T.A. 26.
Commission mixte paritaire : 599.
Sénat : 1ère lecture : 114, 115 et T.A. 30 (2022-2023).
Commission mixte paritaire : 184 et 185 (2022-2023).
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SOMMAIRE
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Pages
premiÈre partie : conditions gÉNÉrales de l’Équilibre financier
titre premier dispositions relatives aux ressources
I – Impôts et ressources autorisés
Article 3 Aménagement du prélèvement à la source de l’impôt sur le revenu
Article 3 ter Coordinations liées au régime de transition résultant de l’abrogation des minibons
Article 3 quinquies A (nouveau) Réforme de l’imposition des plus-values de cessions immobilières
Article 3 septies Prolongation des dispositifs de défiscalisation outre-mer
Article 3 octies D (nouveau) Exclusion de l’octroi de mer de la base d’imposition à la TVA
Article 3 decies Prorogation en 2023 du taux majoré de la réduction d’impôt IR-PME
Article 3 quaterdecies Extinction du crédit d’impôt pour un premier abonnement à un titre de presse
Article 4 bis B (nouveau) Aménagements de la taxe sur les services numériques
Article 4 sexies A (nouveau) Suppression de quatre dépenses fiscales inefficientes
Article 4 quindecies Prorogation du crédit d’impôt formation des dirigeants d’entreprises
Article 4 sexdecies Extension de l’exonération de taxe poids lourds pour les agriculteurs
Article 4 vicies Prorogation du crédit d’impôt « sortie du glyphosate » et évaluation
Article 4 duovicies Contribution sur la rente inframarginale des producteurs d’électricité
Article 5 (supprimé) Suppression de la CVAE
Article 5 bis E (nouveau) Taux réduit de TVA de 5,5 % pour la margarine
Article 5 bis F (nouveau) Taux réduit de TVA de 5,5 % pour le transport ferroviaire de personnes
Article 5 sexies Compléments à la réforme de la facturation électronique
Article 5 octies (nouveau) Imposition à la TVA des locations de meublés de tourisme
Article 6 Prolongation de la réduction des tarifs d’accise sur l’électricité
Article 6 bis (nouveau) Exonération d’accise du gaz naturel véhicule composé de biométhane
Article 7 Adaptation du système fiscal aux exigences de la transition énergétique
Article 7 quater (nouveau) Suramortissement pour les achats d’avions propres
Article 8 Renforcement des incitations à l’utilisation d’énergie renouvelable dans les transports
Article 8 bis Autorisation de l’utilisation des huiles alimentaires usagées comme carburant
Article 8 quater B (nouveau) Gel du tarif de TGAP en 2023
Article 8 quater C (nouveau) Gel du tarif et de la réfaction de TGAP outre-mer
Article 8 quinquies C (nouveau) Exonération d’accise pour le biogaz non injecté dans le réseau
Article 9 Suppression de dépenses fiscales inefficientes
Article 9 ter B (nouveau) Exonération de THRS pour la résidence d’attache des Français non‑résidents
Article 9 quater E (nouveau) Relèvement du plafond du PTZ
Article 9 quater F (nouveau) Prolongation du PTZ jusqu’en 2025
Article 10 Mise en œuvre du transfert du recouvrement de certaines impositions et amendes à la DGFiP
Article 11 octies A (nouveau) Réévaluation de la valeur locative lors de chaque mutation
Article 11 nonies B (nouveau) Possibilité de recalculer le coefficient correcteur en cas d’erreur
Article 11 decies (nouveau) Augmentation du tarif de l’IFER sur les centrales géothermiques
A – Dispositions relatives aux collectivités territoriales
Article 14 bis A (nouveau) Intégration dans le FCTVA des investissements réalisés en régie
B – Impositions et autres ressources affectées à des tiers
C – Dispositions relatives aux budgets annexes et aux comptes spéciaux
Article 23 Relations financières entre l’État et la sécurité sociale
TITRE II DISPOSITIONS RELATIVES À L’ÉQUILIBRE DES RESSOURCES ET DES CHARGES
Article 26 Équilibre général du budget, trésorerie et plafond d’autorisation des emplois
SECONDE PARTIE : MOYENS DES POLITIQUES PUBLIQUES ET DISPOSITIONS SPÉCIALES
titre premier dispositions pour 2023
I. – Autorisation des crédits des missions et performance
Article 27 et état B Crédits du budget général
Article 30 Objectifs et indicateurs de performance
III. – Plafonds des autorisations d’emplois
Article 32 Plafonds des autorisations d’emplois de l’État
Article 33 Plafonds des emplois des opérateurs de l’État
titre II dispositions permanentes
I. – Mesures budgétaires non rattachées
Article 37 A (supprimé) Répartition du produit de la taxe d’aménagement au sein du bloc communal
Article 37 C Allongement du délai pour candidater à l’expérimentation du compte financier unique
Article 40 quater (supprimé) Encadrement de l’évolution des finances publiques locales
Article 40 octies B (nouveau) Demande de rapport sur le dispositif de l’indemnité de résidence
Article 40 decies Création et suppression d’annexes générales au projet de loi de finances
Administration générale et territoriale de l’État
Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales
Aide publique au développement
Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation
Article 41 ter Non indexation des paramètres de la réduction de loyer de solidarité (RLS)
Écologie, développement et mobilité durables
Gestion des finances publiques
Article 43 quater (nouveau) Réduction du nombre de membres de la commission des infractions fiscales
Recherche et enseignement supérieur
Relations avec les collectivités territoriales
Article 45 Répartition de la dotation globale de fonctionnement
Article 45 bis B (nouveau) Modification du régime des dotations des communes nouvelles
Article 45 bis D (nouveau) Modification du potentiel financier de la Ville de Paris
Article 45 ter F (nouveau) Motivation des décisions de rejet des demandes de subvention de DETR
Solidarité, insertion et égalité des chances
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Dans sa version initiale, le présent projet de loi de finances, adopté en conseil des ministres le 26 septembre 2022, comportait 48 articles. Le déficit budgétaire pour l’État pour 2023 était prévu à 158,5 milliards d’euros et le déficit public à 5 % du produit intérieur brut (PIB).
En première lecture à l’Assemblée nationale, le Gouvernement a engagé sa responsabilité sur le fondement de l’article 49, alinéa 3, de la Constitution, sur un texte comprenant 179 articles, qui a été considéré comme adopté le 4 novembre 2022. La prévision de déficit budgétaire de l’État a été revue à 158,6 milliards d’euros, sans effet sur le niveau du déficit public.
En première lecture, le Sénat a adopté conformes 88 articles, en a modifié 70, en a supprimé 21 et a également introduit 146 nouveaux articles.
Certes, il a amélioré les prélèvements sur les profits exceptionnels et a complété le bouclier tarifaire et l’amortisseur électricité.
Néanmoins, le Sénat est revenu sur une réforme majeure qui, portée par le Gouvernement et sa majorité, est à même de favoriser l’investissement, l’activité et l’emploi : la suppression en deux ans de la contribution sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE). Il a, par ailleurs, allégé la fiscalité du patrimoine au détour de la création d’un impôt sur la fortune improductive et a adopté un nombre considérable de dépenses fiscales ou a renforcé la portée de niches fiscales existantes, réduisant ainsi les recettes de l’État.
Il a, enfin, rejeté les crédits des missions Administration générale et territoriale de l’État ; Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales ; Cohésion des territoires ; Immigration, asile et intégration – conduisant à une impasse de 28 milliards d’euros – et a coupé dans les crédits destinés à l’aide médicale de l’État – à hauteur de 350 millions –, au verdissement du parc automobile – 500 millions – ou encore à l’aide publique au développement – 200 millions.
Au total, le déficit budgétaire de l’État a été revu à 122,9 milliards d’euros et le déficit public à 3,7 %.
Une commission mixte paritaire s’est réunie le 6 décembre 2022 pour examiner les dispositions restant en discussion, soit au total 237 articles supprimés, modifiés ou insérés par le Sénat. La commission mixte paritaire a rapidement constaté qu’elle ne pouvait aboutir à un accord sur l’ensemble des dispositions restant en discussion et a conclu à l’échec de ses travaux.
La commission des finances s’est réunie le 7 décembre 2022 pour examiner, en nouvelle lecture, les 237 articles encore en discussion.
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* *
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Article liminaire
Prévisions de solde structurel et de solde effectif de l’ensemble
des administrations publiques de l’année 2023,
prévision d’exécution 2022 et exécution 2021
I. Les dispositions adoptÉes par l’AssemblÉe nationale
Le projet de loi de finances pour 2023 est le premier budget soumis aux nouvelles dispositions de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF) – dans sa rédaction issue de la loi organique du 28 décembre 2021 relative à la modernisation de la gestion des finances publiques – qui enrichissent le contenu de l’article liminaire.
Le présent article mentionne, sous forme d’un tableau, les prévisions de soldes, de dette, de taux de prélèvements obligatoires et les principales dépenses d’investissement en milliards d’euros pour l’ensemble des administrations publiques pour 2023 et 2022, ainsi que les données correspondantes d’exécution pour 2021. S’y ajoutent l’objectif d’évolution en volume et la prévision en milliards d’euros de la dépense publique, qui font l’objet dans le même tableau d’une déclinaison par sous-secteur d’administration.
L’article liminaire adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la responsabilité du Gouvernement établissait, pour 2022, une prévision de déficit public à – 4,9 % du PIB, décomposé en une part structurelle de 4,2 %, une part conjoncturelle de 0,6 % et l’impact des mesures exceptionnelles à 0,1 % du PIB.
Pour 2023, la prévision de solde et sa décomposition demeuraient inchangées par rapport au projet initial du Gouvernement. Cependant, la dette était révisée à la baisse de 0,1 point de PIB (111,1 %), les taux de prélèvements obligatoires et de dépense publique dans le PIB augmentant chacun de 0,2 point.
L’objectif d’évolution de la dépense publique en volume est désormais ramené à – 1,0 %, sous l’effet notamment de la moindre baisse de la dépense des administrations publiques centrales (– 2,6 % dans le projet initial du Gouvernement, ratio ramené à – 1,5 %). Au cours de l’examen du projet de loi de finances, les mesures de protection face à la hausse des tarifs de l’énergie ont été étendues par un dispositif dit « amortisseur électricité » s’adressant aux petites et moyennes entreprises, aux associations, aux établissements publics et aux collectivités (article 42 ter nouveau).
Le solde demeurait constant grâce aux 7 milliards d’euros de recettes supplémentaires issues de la contribution sur les rentes infra-marginales des producteurs d’électricité, du fait de l’intégration dans le texte d’un amendement du Gouvernement en première partie (article 4 duovicies nouveau).
II. Les modifications apportÉes par le SÉnat
A. PremiÈre dÉlibÉration
En première délibération au Sénat, l’article liminaire a d’emblée fait l’objet d’une première modification du fait de l’adoption d’un amendement du Gouvernement, sans incidence sur le solde public pour 2023. Le solde public pour 2022 est légèrement dégradé à – 5,0 % du PIB, en cohérence avec sa révision dans le cadre de la discussion concomitante sur le second projet de loi de finances rectificative pour 2022 (PLFR).
Il a notamment intégré la baisse des recettes attendues de contribution au service public de l’électricité (CSPE, – 4,4 milliards d’euros), en grande partie compensée par l’élargissement du dispositif européen de captation de la rente infra-marginale (+ 4 milliards d’euros de recettes attendues). L’extension du bouclier tarifaire entraîne 1,2 milliard d’euros de dépenses supplémentaires.
B. Secondes dÉlibÉrations
Le 24 novembre 2022, en seconde délibération, le Sénat a adopté une actualisation des prévisions qui tire les conséquences des modifications qu’il a apportées à la première partie du projet de loi de finances.
La suppression de l’article 5 du présent projet de loi, qui prévoyait la suppression progressive de la contribution sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE), améliore le solde de 4 milliards d’euros.
En parallèle, le Sénat avait adopté plusieurs amendements entraînant de moindres recettes, parmi lesquels :
– le relèvement de l’abattement de l’impôt sur les successions (2 milliards d’euros) ;
– des baisses de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) sur la margarine, la filière équine et le transport de voyageurs (700 millions d’euros) ;
– le relèvement du crédit d’impôt pour la garde d’enfants (250 millions d’euros) ;
– le relèvement du plafond de l’IS-PME (320 millions d’euros).
Au demeurant, par la voie d’une seconde délibération et sur proposition du rapporteur général M. Jean-François Husson, le Sénat a supprimé trois des mesures qu’il avait adoptées :
– l’alourdissement de la fiscalité de l’assurance-vie à l’article 3 octodecies E, qui aurait rapporté 1,3 milliard d’euros ;
– le relèvement précité de l’abattement de l’impôt sur les successions par l’article novodecies A, qui entraînait de moindres recettes de 2 milliards d’euros ;
– un sous-amendement n° 1727 de Mme Christine Lavarde portant sur un amendement n° I-1706 du Gouvernement à l’article 4 duovicies, relatif à l’instauration de la contribution sur la rente inframarginale de la production d’électricité, dont le coût pour les finances publiques a été estimé à 6 milliards d’euros par le Gouvernement.
Cette seconde délibération a entraîné 6,7 milliards d’euros de recettes supplémentaires par rapport à l’équilibre des finances publiques résultant de la première délibération du Sénat. L’article liminaire qui en résultait maintenait le déficit pour 2022 à – 5,0 % du PIB mais porte le déficit pour 2023 à – 4,9 %. L’écart avec la trajectoire adoptée par le Sénat dans le projet de loi de programmation des finances publiques est de 0,3 point de PIB pour 2023.
Le 6 décembre 2022, au terme de l’examen de la seconde partie du présent projet de loi, le Sénat a adopté un amendement de coordination du Gouvernement tenant compte des modifications apportées au texte adopté par l’Assemblée nationale.
Le déficit public pour l’année 2023 est ramené à 3,7 % du PIB, soit une amélioration de 1,2 point par rapport à la précédente version de l’article liminaire. Cette importante amélioration reflète essentiellement le rejet, par le Sénat, des crédits des missions Cohésion des territoires, Engagements financiers de l’État, Administration générale et territoriale de l’État, Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales et Immigration, asile et intégration.
Évolutions des prÉvisions pour 2023 prÉvues À l’article liminaire
En % du PIB sauf mention contraire |
2023 |
|||
Loi de finances initiale pour 2023 |
Version adoptée AN |
Version Sénat (1ère délibération) |
Version Sénat (2nde délibération en fin de 1ère partie) |
Version Sénat (2nde délibération en fin de 2nde partie) |
Solde structurel (1) (en points de PIB potentiel) |
– 4,0 |
– 4,0 |
– 3,9 |
– 2,8 |
Solde conjoncturel (2) |
– 0,8 |
– 0,8 |
– 0,8 |
– 0,8 |
Solde des mesures ponctuelles et temporaires (3) (en points de PIB potentiel) |
– 0,2 |
– 0,2 |
– 0,2 |
– 0,2 |
Solde effectif (1+2+3) |
– 5,0 |
– 5,0 |
– 4,9 |
– 3,7 |
Dette au sens de Maastricht |
111,1 |
111,2 |
111,1 |
111,1 |
Taux de prélèvements obligatoires (y.c UE, nets des CI) |
44,9 |
44,9 |
45,0 |
45,0 |
Dépense publique (hors CI) |
56,8 |
56,9 |
56,9 |
55,7 |
Dépense publique (hors CI, en Md€) |
1 571 |
1 572 |
1 572 |
1 540 |
Évolution de la dépense publique hors CI en volume (%) 1 |
– 1,0 |
– 1,0 |
– 1,1 |
– 3,1 |
Principales dépenses d’investissement (en Md€) 2 |
25 |
25 |
25 |
25 |
Administrations publiques centrales |
|
|||
Solde |
– 5,7 |
– 5,8 |
– 5,9 |
– 4,7 |
Dépense publique (hors CI, en Md€) |
645 |
647 |
305 |
619 |
Évolution de la dépense publique en volume (%) 3 |
– 1,5 |
– 1,2 |
– 0,6 |
– 6,9 |
Administrations publiques locales |
|
|||
Solde |
0,0 |
0,0 |
– 0,1 |
0,2 |
Dépense publique (hors CI, en Md€) |
305 |
305 |
305 |
305 |
Évolution de la dépense publique en volume (%) 3 |
– 0,6 |
– 0,6 |
– 0,6 |
– 0,6 |
Administrations de sécurité sociales |
|
|||
Solde |
0,8 |
0,8 |
0,8 |
0,8 |
Dépense publique (hors CI, en Md€) |
721 |
721 |
721 |
721 |
Évolution de la dépense publique en volume (%) 3 |
– 1,0 |
– 1,0 |
– 1,0 |
– 1,0 |
1 à champ constant.
2 au sens du projet de loi de programmation des finances publiques pour 2023-2027.
3 à champ constant, hors transferts entre administrations publiques.
Source : versions successives de l’article liminaire du présent projet de loi.
III. La position du rapporteur gÉnÉral
Dans l’attente de la réintroduction de mesures centrales du projet de loi de finances pour 2023, à l’instar de la baisse des impôts de production initialement prévue à l’article 5, ainsi des crédits des nombreuses missions rejetées par le Sénat, le Rapporteur général propose de laisser inchangé le présent article au stade de l’examen du texte par la commission des finances.
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premiÈre partie :
conditions gÉNÉrales de l’Équilibre financier
titre premier
dispositions relatives aux ressources
I – Impôts et ressources autorisés
Article 3
Aménagement du prélèvement à la source de l’impôt sur le revenu
I. Les dispositions adoptées par l’AssemblÉe nationale
L’article 3 procède à deux aménagements de la procédure du prélèvement à la source de l’impôt sur le revenu.
● En premier lieu, il abaisse de 10 % à 5 % l’écart minimum requis entre le montant du prélèvement estimé et le montant du prélèvement supporté en l’absence de modulation, pour moduler à bon droit à la baisse son taux de prélèvement à la source.
Le retour d’expérience depuis la mise en place du prélèvement à la source permet d’envisager une telle baisse de l’écart minimum requis, mesure favorable au contribuable, sans augmenter les coûts de gestion pour l’administration fiscale.
● En second lieu, il substitue au régime de retenue à la source le régime de l’acompte pour le prélèvement des traitements et salaires de source française versés par des débiteurs situés hors de France, dès lors que les salariés ne sont pas à la charge d’un régime obligatoire français de sécurité sociale, et que l’État étranger où se situe le débiteur a conclu avec la France une convention d’assistance administrative en vue de lutter contre la fraude et l’évasion fiscales ainsi qu’une convention d’assistance mutuelle en matière de recouvrement. Un régime de sanctions en cas de manquement de l’employeur à ses obligations déclaratives en la matière est également institué.
La modification du mode de recouvrement de ces revenus vient simplifier les obligations déclaratives des employeurs situés à l’étranger qui emploient des personnes exerçant ponctuellement leur activité en France, notamment les travailleurs frontaliers qui exercent une partie de leur activité en télétravail depuis leur domicile en France.
II. Les modifications apportÉes par le Sénat
Le Sénat a adopté un amendement du Gouvernement, avec un avis favorable de sa commission des finances, qui précise que le mode de prélèvement par l’acompte s’applique aux revenus des seuls salariés n’étant pas à la charge du régime de sécurité sociale français en application de l’article 13 du règlement (CE) n° 883/2004 du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 portant sur la coordination des systèmes de sécurité sociale, c’est-à-dire lorsqu’une part substantielle de l’activité n’est pas réalisée en France. Il exclut ainsi du nouveau dispositif les travailleurs détachés en France par une entreprise étrangère qui ne sont pas affiliés à la sécurité sociale française bien qu’ils exercent en France une part substantielle de leur activité. Il confirme que cette réforme vient répondre à la situation spécifique des travailleurs frontaliers qui exercent ponctuellement une partie de leur activité en télétravail depuis leur domicile en France.
III. La position du Rapporteur général
La précision apportée par le Gouvernement est bienvenue pour restreindre la simplification des obligations déclaratives aux seuls employeurs des salariés frontaliers initialement visés. Le Rapporteur général propose d’adopter cet article sans modification.
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Article 3 bis A (nouveau)
Déduction des prestations compensatoires du revenu imposable
des contribuables non-résidents imposés au taux moyen
I. Les dispositions adoptÉes par le SÉnat
A. État du droit
1. Un régime d’imposition pluriel de la prestation compensatoire pour les résidents fiscaux
L’article 270 du Code civil prévoit que lors d’un divorce, l’un des époux peut être tenu de verser à l’autre une prestation compensatoire afin de compenser la disparité de niveau de vie créée par la rupture du mariage. Cette prestation, dont le montant est fixé par le juge, prend la forme d’un capital (versement d’une somme d’argent ou attribution de biens en propriété). En l’absence de disponibilités immédiates, la prestation compensatoire peut s’exécuter sous la forme de versements périodiques sur une durée maximale de huit ans.
Par ailleurs, à titre exceptionnel et lorsque la situation particulière du créancier l’empêche de subvenir à ses besoins, l’article 276 du Code civil autorise le débiteur à s’acquitter de la prestation compensatoire par le versement de rentes viagères.
Le régime fiscal de la prestation compensatoire dépend des modalités d’exécution retenues :
– les versements en capital effectués dans les douze mois à compter du divorce ouvrent droit, pour le débiteur, à une réduction d’impôt égale à 25 % des versements effectués dans la limite de 30 500 euros (I de l’article 199 octodecies du CGI). Cette réduction d’impôt est également ouverte pour les versements en capital complétés par une rente (pension compensatoire dite « mixte ») ([1]). Les sommes perçues par le bénéficiaire ne sont pas soumises à l’impôt sur le revenu mais donnent lieu à un droit fixe de 125 euros lorsque le versement est effectué au moyen d’immeubles ou de droits réels immobiliers ;
– la prestation compensatoire allouée sous forme de rentes ou de versements en capital effectués au-delà de douze mois à compter du divorce, est, comme la pension alimentaire, déductible du revenu global (2 du II de l’article 156 du CGI) du débiteur. Les sommes perçues par le bénéficiaire sont imposables à l’impôt sur le revenu.
2. Une éligibilité restreinte des contribuables non-résidents aux avantages fiscaux
Les contribuables non-résidents font l’objet d’une obligation fiscale restreinte qui emporte des conséquences sur leur éligibilité aux avantages fiscaux existants.
Ainsi, le bénéfice de la plupart des réductions et crédits d’impôt est conditionné à un critère de domiciliation fiscale, qui exclut de jure les contribuables non-résidents. De plus, les contribuables non-résidents ne peuvent en principe bénéficier d’aucune déductibilité des charges du revenu global. Il s’agit d’éviter un cumul des avantages fiscaux puisque le non-résident peut en bénéficier dans son pays de résidence fiscale. Cette différence de traitement se justifie par les différences objectives de situation entre les contribuables résidents soumis à une obligation fiscale illimitée et les contribuables non-résidents, soumis à une obligation fiscale restreinte. C’est en effet à l’État de résidence d’accorder des avantages fiscaux qui découlent de la situation et des charges du contribuable, dont il a pleine connaissance.
Une exception générale à ce principe de non-application des avantages fiscaux accordés aux résidents s’applique aux contribuables non-résidents domiciliés dans un État membre de l’UE ou dans un pays de l’Espace Économique Européen ayant conclu une convention fiscale avec la France et qui tirent de la France la majorité ou la quasi-totalité de leurs revenus. En application de l’arrêt Schumacker de la Cour de Justice de l’Union européenne ([2]), ces contribuables sont assimilés à des personnes fiscalement domiciliées en France tout en restant soumis à une obligation fiscale limitée.
Dans le cadre de la réforme de la fiscalité des non-résidents de 2019, le législateur a permis l’éligibilité des non-résidents à certains avantages fiscaux. Ainsi, à compter de l’imposition des revenus de l’année 2018, les non-résidents peuvent bénéficier de la déductibilité des pensions alimentaires lorsqu’ils ont opté pour le taux moyen d’imposition, dans les mêmes conditions et limites que celles prévues par le 2° du II de l’article 156 du CGI pour les contribuables résidents. En outre, les pensions versées doivent être imposables entre les mains de leurs bénéficiaires en France et ne pas avoir déjà donné lieu, pour le contribuable, à un avantage fiscal dans son État de résidence (b de l’article 197 A du CGI).
B. Dispositif proposÉ
Le présent article adopté par le Sénat a été introduit par deux amendements identiques de M. Yan Chantrel et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain et de Mme Évelyne Renaud-Garabedian (Les Républicains) et plusieurs de ses collègues, ayant recueilli un avis de sagesse de la commission des finances et défavorable du Gouvernement.
De façon similaire à ce qui existe pour les pensions alimentaires, il prévoit que les contribuables non-résidents ayant opté pour le taux moyen d’imposition peuvent déduire de leur revenu mondial les prestations compensatoires versées en cas de divorce, lorsque ces prestations sont imposables entre les mains de leur bénéficiaire en France et que leur prise en compte n’est pas de nature à minorer l’impôt dû par le contribuable dans son État de résidence.
Cela signifie donc que seules les prestations allouées sous forme de rentes ou de versements en capital au-delà de douze mois à compter du divorce sont concernées, les prestations versées sous la forme de capital dans les douze mois après le divorce ouvrant droit non pas à la déductibilité de cette charge du revenu global mais à une réduction d’impôt pour les seuls contribuables résidents et n’étant pas imposables entre les mains de leur bénéficiaire.
II. La position du Rapporteur gÉNÉral
Le Rapporteur général propose de supprimer cet article pour plusieurs raisons.
D’une part, il considère que le maintien de la retenue à la source partiellement libératoire, prévu par l’article 3 de la loi de finances pour 2021, est venu clore la réforme de la fiscalité des non-résidents. Une certaine stabilité fiscale étant désormais nécessaire, il n’apparaît pas opportun d’élargir davantage l’éligibilité des non-résidents aux avantages fiscaux prévus par le système fiscal français pour les résidents. Le rapport remis par le Gouvernement au Parlement sur la réforme de la fiscalité des non-résidents ([3]) écartait d’ailleurs cette piste, considérant qu’elle conduirait à accorder un avantage disproportionné aux contribuables non-résidents.
D’autre part, la forme de l’avantage fiscal relatif à la prestation compensatoire étant dépendante des modalités d’exécution retenues, la déductibilité du revenu mondial des non-résidents ne pourrait s’appliquer qu’aux prestations allouées sous forme de rentes ou de versement en capital au-delà de douze mois à compter du divorce. L’ouverture de cet avantage fiscal aux contribuables non-résidents créerait donc une différence de traitement importante entre les contribuables non-résidents selon la forme retenue de la prestation compensatoire, qui irait probablement à l’encontre de l’objectif des auteurs de l’amendement et poserait des problèmes d’équité, sinon de constitutionnalité, évidents.
*
* *
Article 3 bis B (nouveau)
Ouverture de la réduction d’impôt au titre des dons des particuliers
aux contribuables non-résidents
I. Les dispositions adoptÉes par le SÉnat
A. État du droit
1. Une réduction d’impôt au titre des dons effectués par des particuliers ouverte aux résidents fiscaux
En application de l’article 200 du code général des impôts (CGI), les dons faits par les particuliers à certains organismes d’intérêt général ouvrent droit à une réduction d’impôt égale à 66 % de leur montant, dans la limite de 20 % du revenu imposable du donateur.
Ce taux est majoré à 75 % pour les dons faits au profit d’organisme sans but lucratif fournissant gratuitement des repas à des personnes en difficulté, favorisant leur logement ou leur fournissant, à titre principal, des soins, dans la limite de 546 euros pour l’imposition des revenus de l’année 2019, ce plafond étant relevé chaque année dans la même proportion que la limite supérieure de la première tranche du barème de l’impôt sur le revenu de l’année précédant celle des versements. Afin de tenir compte du contexte exceptionnel dû à la crise sanitaire, cette limite a été portée temporairement à 1 000 euros pour l’imposition des revenus des années 2020 à 2023. Les versements qui dépassent ce plafond ouvrent ensuite droit à la réduction d’impôt à 66 %, dans la limite de 20 % du revenu global du donateur.
Le bénéfice de cette réduction d’impôt est, comme pour la plupart des réductions et crédits d’impôt, conditionné à un critère de domiciliation fiscale ([4]), qui exclut de jure les contribuables non-résidents.
2. Une éligibilité restreinte des contribuables non-résidents aux avantages fiscaux
En principe, les contribuables non-résidents ne peuvent pas bénéficier des avantages fiscaux ouverts aux contribuables résidents. Cette éligibilité restreinte aux avantages fiscaux découle de leur obligation fiscale restreinte. Les contribuables non-résidents n’étant imposés que sur leurs revenus de source française et non sur l’ensemble de leurs revenus comme les contribuables résidents, cette différence de traitement en matière fiscale est pleinement justifiée au regard du principe d’égalité devant l’impôt pour éviter une distorsion dans les contributions des uns et des autres aux charges publiques.
Une exception générale à ce principe de non-application des avantages fiscaux accordés aux résidents s’applique aux contribuables non-résidents domiciliés dans un État membre de l’UE ou dans un pays de l’Espace Économique Européen ayant conclu une convention fiscale avec la France et qui tirent de la France la majorité ou la quasi-totalité de leurs revenus. En application de l’arrêt Schumacker de la Cour de Justice de l’Union européenne ([5]), ces contribuables sont assimilés à des personnes fiscalement domiciliées en France tout en restant soumis à une obligation fiscale limitée.
Par exception à ces règles, les contribuables non-résidents sont en outre éligibles à certains avantages fiscaux ([6]) dont la liste a été élargie dans le cadre de la réforme de la fiscalité des non-résidents inscrite en loi de finances pour 2019 ([7]) :
– le crédit d’impôt prévu pour les travaux de protection contre les risques technologiques (article 200 quater A du CGI) ;
– le crédit d’impôt prévu pour les versements de cotisations syndicales (article 199 quater C) ;
– la réduction d’impôt prévue pour les versements de cotisations pour la prévention des incendies de forêt (article 200 decies A) ;
– la réduction d’impôt prévue pour les frais de comptabilité et de gestion (article 199 quater B du CGI) ;
– depuis la loi de finances pour 2019, ils peuvent bénéficier de la réduction d’impôt prévue pour les investissements « Pinel » réalisés à compter du 1er janvier 2019 à condition que le contribuable ait été résident fiscal au moment de l’investissement initial (article 199 novovicies du CGI) ([8]) ;
– pour les cessions intervenant à compter du 1er janvier 2019, les contribuables qui transfèrent leur résidence fiscale hors de France bénéficient d’une exonération de la plus-value de l’immeuble qui constituait leur résidence principale en France à la date du transfert, à condition que la cession intervienne au plus tard le 31 décembre de l’année qui suit celle du départ à l’étranger et que l’immeuble soit resté effectivement inoccupé pendant ce délai ([9]) ;
– à compter de l’imposition des revenus de l’année 2018, les non-résidents peuvent bénéficier de la déductibilité des pensions alimentaires lorsqu’ils ont opté pour le taux moyen d’imposition, que les pensions versées sont imposables entre les mains de leurs bénéficiaires en France et qu’elles n’ont pas déjà donné lieu, pour le contribuable, à un avantage fiscal dans son État de résidence ([10]).
B. Dispositif proposÉ
Le Sénat a adopté un amendement de M. Jean-Yves Leconte et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain avec des avis de sagesse de la commission des finances et défavorable du Gouvernement.
Cet amendement ouvre la possibilité pour les contribuables non-résidents de bénéficier de la réduction d’impôt pour les dons effectués par des particuliers, prévue à l’article 200 du CGI, à condition que la prise en compte de ces dons et versements ne soit pas de nature à minorer l’impôt dû par le contribuable dans son État de résidence.
II. La position du Rapporteur gÉNÉral
Le Rapporteur général considère qu’il n’est pas opportun, de manière générale, d’élargir le champ des avantages fiscaux ouverts aux contribuables non-résidents.
Cette piste a été étudiée et écartée par le rapport remis par le Gouvernement au Parlement sur la réforme de la fiscalité des non-résidents ([11]) considérant qu’elle conduirait à accorder un avantage disproportionné aux contribuables non-résidents. De plus, en dehors de l’exception relative aux contribuables « Schumacker » (voir supra), il revient à l’État de résidence d’accorder des avantages fiscaux qui découlent de la situation et des charges du contribuable, puisqu’il a pleine connaissance de la capacité contributive du contribuable.
Par ailleurs, le Rapporteur général rappelle que l’ouverture encadrée de certains avantages fiscaux aux contribuables non-résidents par la loi de finances pour 2019 s’inscrit dans une réforme globale de la fiscalité des non-résidents, achevée dans la loi de finances pour 2021. Soucieux de préserver une certaine stabilité fiscale pour les années à venir, il considère qu’il n’est pas souhaitable de revenir sur les paramètres du régime d’imposition applicable aux non-résidents.
Le Rapporteur général propose donc de supprimer cet article.
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Article 3 bis C (nouveau)
Enregistrement gratuit des promesses unilatérales ou synallagmatiques
de vente reçues par acte notarié
I. Les dispositions adoptÉes par le SÉnat
A. L’État du droit
● L’article 680 du code général des impôts (CGI) soumet à un droit fixe d’enregistrement de 125 euros les actes non exonérés par un autre article du CGI et qui ne peuvent donner lieu à imposition proportionnelle progressive.
● L’article 245 de l’annexe III du CGI dispose que les actes notariés dont la liste est fixée par arrêté du ministre de l’économie et des finances, ainsi que les testaments olographes déposés en l’étude d’un notaire, sont dispensés de la formalité de l’enregistrement. Parmi les actes dispensés de cette formalité, l’article 60 de l’annexe IV du CGI mentionne, les « promesses unilatérales de ventes ».
En revanche, les promesses de ventes immobilières « synallagmatiques » ou « bilatérales », c’est-à-dire les « compromis de vente », dès lors qu’ils doivent être présentés à la formalité de la publicité foncière, se voient appliquer le droit fixe de 125 euros.
Contrat synallagmatique et contrat unilatéral
L’article 1106 du Code civil distingue le contrat dit « synallagmatique », « lorsque les contractants s’obligent réciproquement les uns envers les autres » et le contrat unilatéral, « lorsqu’une ou plusieurs personnes s’obligent envers une ou plusieurs autres sans qu’il y ait d’engagement réciproque de celles-ci ».
En matière de ventes immobilières, la promesse unilatérale de vente est l’acte par lequel le vendeur s’engage à la vente d’un bien pendant un certain délai.
La promesse synallagmatique de vente, ou compromis de vente, engage réciproquement l’acheteur et le vendeur : cet « avant-contrat » vaut vente dans la mesure où il y a consentement réciproque des deux parties sur la chose et sur le prix. La cession est ainsi réputée avoir lieu dès la signature de la promesse synallagmatique ([12]).
B. Le dispositif proposÉ
Le présent article, issu d’un amendement([13]) de Mme Bellurot et de plusieurs sénateurs du groupe Les Républicains, adopté sur avis de sagesse de la commission et sur avis défavorable du Gouvernement, vise à dispenser les promesses synallagmatiques de ventes immobilières du droit fixe de 125 euros.
Au motif d’alléger la fiscalité de la promesse de vente reçue par acte notarié, il complète l’article 847 du CGI, relatif à l’enregistrement gratuit de certains contrats de mariage, par un alinéa qui exonère expressément l’ensemble des « promesses unilatérales ou synallagmatiques de vente reçues par acte notarié afférentes à un immeuble ou à un droit immobilier. »
II. La position du rapporteur gÉnÉral
Le fait que la promesse unilatérale de vente enregistrée par acte notarié soit dispensée du droit fixe d’enregistrement de 125 euros ne fournit pas un motif suffisant pour exonérer également de ce droit la promesse synallagmatique de vente, puisque celle-ci donne lieu à présentation obligatoire à la formalité de la publicité foncière.
L’exonération proposée par le Sénat aurait un coût budgétaire élevé, assurément de plusieurs dizaines de millions d’euros : on comptait en effet près d’1,2 million de ventes immobilières en 2021, dont une part très importante a donné lieu à promesse bilatérale de vente par acte notarié.
En conséquence, le rapporteur général propose de supprimer cet article.
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Article 3 bis D (nouveau)
Renforcement des dispositifs permettant aux employeurs, aux collectivités territoriales et à Pôle emploi
de participer aux frais de carburants des travailleurs
I. Les dispositions adoptÉes par le SÉnat
A. État du droit
1. Les dispositifs de prise en charge des frais de transport par l’employeur
● Plusieurs dispositifs permettent aujourd’hui à un employeur de prendre en charge tout ou partie des frais de transport supportés par ses salariés pour se rendre sur leur lieu de travail :
– l’article L. 3261-2 du Code du travail oblige l’employeur à prendre en charge au moins 50 % « du prix des titres d’abonnements souscrits par ses salariés pour leurs déplacements entre leur résidence habituelle et leur lieu de travail accomplis au moyen de transport publics de personnes ou de services publics de location de vélos » ;
– l’article L. 3261-3 du Code du travail donne à l’employeur la possibilité de prendre en charge, sous conditions ([14]), « tout ou partie des frais de carburant et des frais exposés [par ses salariés] pour l’alimentation de véhicules électriques, hybrides rechargeables ou hydrogène engagés pour leurs déplacements entre leur résidence habituelle et leur lieu de travail » (« prime transport ») ;
– enfin, l’article L. 3261-3-1 du Code du travail permet à l’employeur, également sur la base du volontariat, de prendre en charge « tout ou partie des frais engagés par ses salariés se déplaçant entre leur résidence habituelle et leur lieu de travail avec leur cycle ou cycle à pédalage assisté personnel ou leur engin de déplacement personnel motorisé ou en tant que conducteur ou passager en covoiturage, ou en transports publics de personnes à l’exception des frais d’abonnement mentionnés à l’article L. 3261-2, ou à l’aide d’autres services de mobilité partagée définis par décret » (« forfait mobilités durables »).
Le montant, les modalités et les critères d’attribution de la prime transport et du forfait mobilités durables doivent être déterminées dans le cadre d’un accord d’entreprise, d’un accord interentreprises ou d’un accord de branche. Faute d’accord collectif, l’employeur peut néanmoins mettre en œuvre ces prises en charge par une décision unilatérale, après consultation du comité social et économique (CSE) s’il existe.
De façon dérogatoire et temporaire, l’article 2 de la loi du 16 août 2022 de finances rectificative pour 2022 (LFR 2 pour 2022) prévoit que la prise en charge obligatoire de l’employeur au titre des frais de transport publics est cumulable avec la prime transport pour les années 2022 et 2023. Par ailleurs, sur cette période, les conditions applicables pour bénéficier de la prime de transport sont suspendues.
● Ces dispositifs font l’objet de traitements dérogatoires sur les plans fiscal et social.
Ainsi, une exonération d’impôt sur le revenu est prévue par le 19 ter de l’article 81 du CGI pour le salarié bénéficiaire de ces dispositifs :
– le 19 ter a de l’article 81 du CGI prévoit que le salarié bénéficie d’une exonération d’impôt sur le revenu sur les frais de transports publics ou de location de vélos pris en charge par l’employeur, dans la limite de 50 % du prix de l’abonnement. L’article 2 de la LFR 2 pour 2022 a prévu que, de façon dérogatoire et temporaire, cette exonération fiscale et l’exonération sociale mentionnée infra est appliquée pour une prise en charge allant jusqu’à 75 % du prix de l’abonnement pour l’imposition des revenus 2022 et 2023 ;
– le premier alinéa du 19 ter b prévoit que l’avantage résultant des deux autres dispositifs, à savoir la « prime transport » et le « forfait mobilités durables », ouvre droit à une exonération d’impôt sur le revenu jusqu’à un plafond global de 500 euros avec un sous-plafond de 200 euros s’agissant de la prise en charge des frais de carburant. L’article 2 de LFR 2 pour 2022 a prévu que ce plafond soit relevé à 700 euros dont 400 euros pour les frais de carburant, pour l’imposition des revenus des années 2022 et 2023. Des dispositions dérogatoires supplémentaires ont été prévues par ce même article pour les départements d’outre-mer (seuil d’exonération porté à 900 euros dont 600 euros au titre des frais de carburant).
– le deuxième alinéa du 19°ter b prévoit qu’en cas de cumul du « forfait mobilités durables » avec la prise en charge des frais d’abonnement de transport en commun ou de vélos, l’avantage global résultant de ces deux dispositifs ouvrant droit à une exonération d’impôt sur le revenu est plafonné à 800 euros. Ce plafond, initialement fixé à 500 euros, a été relevé à 600 euros en 2021 ([15]) avant d’être porté à 800 euros par l’article 2 de LFR 2 pour 2022.
Conformément aux dispositions des articles L. 136-1-1 et L. 242-1 du Code de la sécurité sociale, les avantages résultant de ces dispositifs sont exclus du calcul de l’assiette des cotisations sociales, de la contribution sociale généralisée (CSG) et de la contribution pour le remboursement de la dette sociale (CRDS) dans les mêmes conditions et limites que celles prévues au 19°ter de l’article 81 du CGI.
2. La prise en charge des frais de déplacements domicile-travail de leurs employés par les collectivités publiques
Le c du 19 ter de l’article 81 du code général des impôts (CGI) prévoit l’exonération d’impôt sur le revenu, dans la limite de 310 euros par an depuis le 1er janvier 2022 ([16]), de la prise en charge par une collectivité territoriale, un établissement public de coopération intercommunale (EPCI) ou Pôle emploi, des frais de carburant ou d’alimentation de véhicules électriques engagés par ses salariés pour leurs déplacements entre leur résidence habituelle et leur lieu de travail. Cette prise en charge est également exonérée de prélèvements sociaux et de cotisations sociales, pour la collectivité et le salarié, dans la même limite que celle retenue pour l’exonération d’impôt sur le revenu.
Cet avantage, instauré par l’article 3 de la loi de finances pour 2019, s’applique dans le respect des conditions suivantes :
– la résidence habituelle du salarié doit être distante de son lieu de travail d’au moins 30 kilomètres. Toutefois, aucune condition de distance n’est requise lorsque le salarié effectue ses déplacements entre sa résidence habituelle et son lieu de travail en tant que conducteur en covoiturage ;
– le salarié concerné ne bénéficie pas de la prise en charge, prévue à l’article L. 3261-2 du Code du travail, des titres d’abonnements souscrits pour ses déplacements entre sa résidence habituelle et son lieu de travail, accomplis au moyen de transport publics de personnes ou de services publics de location de vélos.
Cette exonération est entièrement cumulable avec le forfait mobilités durables prévu au b du 19 ter de l’article 81 du CGI, sans limitation de l’exonération fiscale et sociale résultant de ces deux prises en charge.
B. Dispositif proposÉ
Le présent article adopté par le Sénat a été introduit par un amendement de Mme Sylvie Vermeillet (Union Centriste) et plusieurs de ses collègues, après avoir recueilli un avis de sagesse de la commission des finances et défavorable du Gouvernement.
Cet amendement prévoit, d’une part, la possibilité de mettre en place pour les années 2022 et 2023 une aide complémentaire, facultative et ciblée sous condition de ressources et de lieu de domicile, à la prime transport et au forfait mobilités durables, dont les modalités sont déterminées par décret.
D’autre part, il relève le plafond d’exonération sur le revenu de la prise en charge des frais de déplacements domicile-travail de leurs employés par les collectivités publiques à 500 euros par an pour l’imposition des revenus de l’année 2022 et 2023. Il ouvre, pour ces deux années, la possibilité de cumuler cette prise en charge avec la prise en charge de l’abonnement de transports publics et de location de vélos prévue à l’article L. 3261-2 du Code du travail. Enfin, il prévoit que cette exonération fiscale s’accompagne d’une exonération de cotisations sociales, de CSG et de CRDS.
II. La position du Rapporteur gÉNÉral
En sus de la mesure de remise à la pompe ([17]) pour soutenir le pouvoir d’achat des ménages utilisant un véhicule, le Gouvernement a mis en place en 2022 des mesures de soutien plus ciblées, notamment en incitant fortement les employeurs à augmenter la prise en charge des frais de transport de leurs salariés.
Ainsi, tel qu’évoqué supra, les articles 2 et 3 de la LFR 2 pour 2022 ont prévu :
– le relèvement de la part de la prise en charge de l’employeur aux frais d’abonnement aux transports publics exonérée d’impôt sur le revenu, de cotisations sociales, de CSG et de CRDS à 75 % en 2022 et 2023 ;
– le relèvement du plafond d’exonération d’impôt sur le revenu, de cotisations sociales, de CSG et de CRDS – en cas de cumul de la prime transport et du forfait mobilités durables – de 500 euros à 700 euros en 2022 et 2023. Le sous-plafond de prise en charge des frais de carburant a quant à lui été doublé sur cette même période, passant à 400 euros ;
– le relèvement pérenne du plafond d’exonération d’impôt sur le revenu, de cotisations sociales, de CSG et de CRDS, en cas de cumul de la prise en charge de l’abonnement aux transports publics et du forfait mobilités durables à 800 euros ;
– la possibilité, pour 2022 et 2023, du cumul de la prise en charge obligatoire de l’employeur au titre des frais de transport publics et de la prime transport et la suspension, sur cette période, des conditions applicables pour bénéficier de la prime transport.
Par ailleurs, l’article 4 de la loi de finances pour 2022 a prévu le relèvement du plafond d’exonération d’impôt sur le revenu, de cotisations sociales, de CSG et de CRDS, de la prise en charge par une collectivité territoriale, d’un EPCI ou Pôle Emploi des frais de carburant de ses salariés de 240 euros à 310 euros à compter du 1er janvier 2022.
Le Rapporteur général considère qu’il est nécessaire que les employeurs se saisissent pleinement des outils en place, dont le caractère incitatif a été renforcé cette année, avant d’imaginer la mise en place de nouveaux dispositifs à la main des employeurs.
Par ailleurs, la Première ministre a annoncé la mise en place, à compter du 1er janvier 2023, d’une indemnité carburant pour les travailleurs des ménages situés dans les cinq premiers déciles de revenus. Cette aide, qui se substituera à la remise à la pompe en vigueur depuis le 1er avril 2022, a vocation à accompagner les travailleurs français, sous conditions de ressources.
Le Rapporteur général propose donc de supprimer cet article.
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Article 3 ter A (nouveau)
Remplacement de l’impôt sur la fortune immobilière
par un impôt sur la fortune improductive
I. Les dispositions adoptÉes par le SÉnat
A. L’État du droit
● Les personnes physiques ayant leur domicile fiscal en France sont soumises à l’impôt sur la fortune immobilière (IFI) dès lors que leurs actifs immobiliers taxables ont une valeur supérieure à 1 300 000 euros.
L’IFI est liquidé selon le barème progressif suivant.
BarÈme de l’IFI
Patrimoine taxable |
Taux |
N’excédant pas 800 000 euros |
0 |
Supérieur à 800 000 et inférieur ou égal à 1 300 000 euros |
0,5 |
Supérieur à 1 300 000 et inférieur ou égal à 2 570 000 euros |
0,7 |
Supérieur à 2 570 000 et inférieur ou égal à 5 000 000 euros |
1,0 |
Supérieur à 5 000 000 et inférieur ou égal à 10 000 000 euros |
1,25 |
Supérieur à 10 000 000 euros |
1,50 |
Source : article 977 du code général des impôts.
● Le rendement attendu de l’IFI en 2023 selon le projet de loi de finances 2023 s’élève à 2,2 milliards d’euros.
B. Le dispositif proposÉ
Cet article résulte de l’adoption par le Sénat d’un amendement ([18]) de M. Delcros et de sénateurs du groupe Union centriste, ayant reçu un avis de sagesse de la commission et un avis défavorable du Gouvernement.
Au motif de ne pas désinciter les contribuables à investir dans la production et la location immobilières, cet article remplace l’IFI par un « impôt sur la fortune improductive » qui aurait pour assiette :
– les résidences principales (après abattement de 30 %) et secondaires, ainsi que les logements laissés vacants ;
– les immeubles non bâtis lorsqu’ils ne sont pas affectés à une activité économique ;
– les liquidités et placements financiers assimilés tels que les livrets d’épargne ;
– les biens meubles corporels (objets précieux, voitures, yachts, avions, meubles meublants, etc.) ;
– les actifs numériques ;
– et les droits de la propriété littéraire, artistique et industrielle, lorsque le redevable n’en est ni l’auteur, ni l’inventeur.
Le seuil d’assujettissement à l’impôt serait relevé à 2,57 millions d’euros.
II. La position du rapporteur gÉnÉral
Cette proposition du Sénat revient sur les équilibres définis lors de la réforme de la fiscalité du patrimoine par la loi de finances pour 2018 ([19]), avec la création de l’IFI et la suppression de l’impôt sur la fortune (ISF).
Le seuil d’assujettissement de 2,7 millions d’euros serait supérieur au patrimoine moyen taxable des contribuables à l’IFI (2,4 millions d’euros en 2020). Cela aurait pour effet d’exonérer d’impôt les deux tiers des redevables actuels à l’IFI. La perte de recettes résultant du relèvement de ce seuil dépasserait le supplément de rendement résultant des modifications d’assiette puisque, contrairement à l’ancien ISF, le nouvel impôt ne frapperait pas les placements financiers à moyen et long termes, qui constituent l’essentiel du patrimoine des personnes très fortunées.
En outre le caractère imprécis du critère retenu pour fonder le nouvel impôt l’expose à une censure du Conseil constitutionnel : le caractère « improductif » d’un élément du patrimoine du contribuable est un critère particulièrement vague, alors que le législateur doit se fonder sur un critère objectif et rationnel. C’est au demeurant le cas avec l’IFI, le patrimoine immobilier du contribuable étant un critère rationnel dont la simplicité fait la robustesse.
Enfin, pour soutenir les particuliers qui investissent dans l’immobilier, il paraît plus juste et plus efficace d’intervenir sur la fiscalité des revenus fonciers : plus juste car cela permet de toucher également les petits propriétaires, alors que l’IFI ne frappe que les plus fortunés ; plus efficace, car cela permet d’introduire des incitations vertueuses, à l’exemple du doublement du seuil d’imputation du déficit foncier sur le revenu global pour des dépenses de rénovation énergétique, opéré par l’article 12 de la deuxième loi de finances rectificative pour 2022 ([20]).
Le rapporteur général propose dès lors de supprimer cet article.
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Article 3 ter
Coordinations liées au régime de transition résultant
de l’abrogation des minibons
I. Les dispositions adoptÉes par l’AssemblÉe nationale en premiÈre lecture
● Le règlement européen relatif aux prestataires européens de services de financement participatif ([21]) a harmonisé les régimes applicables afin de faciliter la prestation transfrontalière de services de financement participatif et de prévenir le risque d’arbitrage réglementaire.
Dans le contexte de la mise en œuvre de ce règlement, l’ordonnance du 22 décembre 2021 modernisant le cadre relatif au financement participatif ([22]) a abrogé, à l’article L. 223-6 du code monétaire et financier et au 7 bis de l’article L. 511-6 du même code, le régime des minibons, bons de caisse spécifiques pouvant être souscrits sur des plateformes dites de crowdfunding.
L’entrée en vigueur du règlement européen était assortie d’une période transitoire, dont le terme était initialement fixé au 10 novembre 2022 : cette échéance a été reprise par l’ordonnance du 22 décembre 2021.
Cependant, sur avis de l’Autorité européenne des marchés financiers (ESMA), la Commission européenne a adopté, le 12 juillet 2022, un acte délégué prolongeant la période transitoire de douze mois et portant ainsi l’échéance de la période de transition au 10 novembre 2023.
● Le présent article, qui résulte d’un amendement du Gouvernement ([23]), adopté en séance publique par l’Assemblée nationale, sur avis favorable du rapporteur général, opère deux coordinations.
En premier lieu, il supprime, à l’article 125-00 A du code général des impôts, relatif aux imputations de pertes en capital subies sur des prêts de financement participatif, une référence désormais obsolète aux minibons.
En second lieu, afin de tenir compte de la perspective du décalage de la fin de la période transitoire, il remplace, à l’article 38 de l’ordonnance du 22 décembre 2021, une référence à l’échéance du 10 novembre 2022 par un renvoi à la date prévue par l’acte délégué relevant de la compétence de la Commission européenne.
II. Les modifications apportÉes par le SÉnat
Sur avis favorable du Gouvernement, le Sénat a adopté un amendement de précision de la commission ([24]) qui mentionne directement l’échéance du 10 novembre 2023, plutôt que de renvoyer aux dispositions de l’acte délégué de la Commission européenne.
III. La position du Rapporteur gÉnÉral
Le Parlement européen et le Conseil ne s’étant pas opposés, dans le délai de trois mois, soit jusqu’au 12 octobre 2022, à l’entrée en vigueur de l’acte délégué de la Commission européenne, l’échéance de la période de transition est désormais définitivement fixée au 10 novembre 2023.
Le rapporteur général considère donc que la mention directe de cette date rend la loi plus intelligible, et propose d’adopter cet article sans modification.
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Article 3 quater A (nouveau)
Création d’une provision déductible du résultat fiscal des entreprises
pour la constitution de captives de réassurance
I. Les dispositions adoptées
A. état du droit
Une captive est une société d’assurance ou de réassurance détenue par une entreprise et qui a pour unique objet de fournir une couverture d’assurance sur les risques de l’entreprise. Il s’agit donc d’une auto-assurance à l’échelle d’un groupe, destinée à couvrir les risques de l’entreprise en complément de l’offre assurantielle classique, soit parce qu’il n’existe pas de propositions concernant les risques que le groupe souhaite couvrir, soit pour en atténuer les coûts particulièrement élevés ; c’est par exemple le cas des risques systémiques comme les pandémies ou le risque « cyber ». Dans tous les cas, l’existence d’une captive implique l’intervention d’un assureur « traditionnel » en premier rang.
La France ne connaît pas de dispositif fiscal spécifiquement dédié au fonctionnement d’une captive, qui doit constituer des réserves afin de lisser les risques dans le temps.
De fait, les entreprises françaises constituent des captives dans les territoires européens fiscalement adaptés à la constitution de telles provisions – comme le Luxembourg, les Pays-Bas ou la Suisse – déductibles du résultat et réintégrables en cas de survenance du sinistre.
B. Dispositif adoptÉ par le SÉNAT
Le Sénat a adopté, à l’initiative de Didier Rambaud (Rassemblement des démocrates progressistes et indépendants – RDPI) et de Michel Canevet (Union centriste – UC), deux amendements identiques ayant recueilli des avis favorables tant de la commission des finances que du Gouvernement, visant à intégrer dans le système juridique national une faculté d’établir une provision déductible destinée à faire face aux charges afférentes aux opérations de réassurance.
Ces amendements portant article additionnel ont été sous-amendés par le rapporteur général de la commission des finances de sorte que le plafond de déductibilité des dotations annuelles ne puisse excéder un tiers des bénéfices techniques ([25]) . Le Gouvernement s’en est remis à la sagesse du Sénat quant à cette proposition.
La provision ainsi créée à l’article 39 quinquies G du code général des impôts (CGI) est destinée à faire face aux charges afférentes aux opérations de réassurance, dont les risques d’assurance relèvent des catégories des dommages aux biens professionnels et agricoles, des catastrophes naturelles, de la responsabilité civile générale, des pertes pécuniaires, des dommages et des pertes pécuniaires consécutifs aux atteintes aux systèmes d’information et de communication et des transports.
Cette provision est affectée à la compensation globale du solde négatif du compte de résultat technique [26] de l’exercice. Les dotations annuelles qui, dans un délai de quinze ans, n’ont pu être utilisées conformément à leur objet sont rapportées au bénéfice imposable de la seizième année suivant celle de leur comptabilisation.
II. La position du Rapporteur général
Le rapporteur général juge intéressante la création d’une provision pour captive de réassurance. Une telle provision est en effet de nature à développer ce secteur économique en France et, ainsi, à rapatrier les captives de nos entreprises nationales situées à l’étranger. La localisation sur le territoire national de la couverture des risques de nos entreprises apparaît comme un élément de souveraineté à saluer.
Dès lors, il est proposé de conserver cet article tout en ne retenant pas la proposition du rapporteur général du Sénat qui, après expertise, aboutit à réduire de manière trop importante l’intérêt d’une telle provision.
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Article 3 quater
Exonérations sur les plus-values immobilières réalisées directement
ou indirectement au profit d’organismes de logement social
ou pour la réalisation de logements
I. Les dispositions adoptÉes par l’AssemblÉe nationale en premiÈre lecture
A. L’État du droit
● Le II de l’article 150 U du code général des impôts (CGI) prévoit différents cas d’exonération de l’imposition des plus-values immobilières :
– son 7°, introduit en 2005 ([27]), vise les cessions à un organisme de logement social ou assimilé, qui s’engage à réaliser dans les dix ans des logements sociaux, ainsi que les cessions à tout autre cessionnaire qui prend le même engagement dans un délai de quatre ans ;
– son 8°, introduit en 2006 ([28]), vise les cessions à des collectivités locales ou à un établissement public foncier, en vue d’une cession ultérieure selon les modalités prévues au 7°, réalisée dans l’année qui suit l’acquisition, ou dans les trois ans pour un établissement public foncier ;
– son 9°, introduit en 2011 ([29]), vise la cession d’un droit de surélévation, à condition que le cessionnaire s’engage à réaliser, dans un délai de quatre années, des locaux destinés à l’habitation.
Établies de façon temporaire depuis l’origine et continûment prorogées au fil des lois de finances, ces trois exonérations sont actuellement bornées au 31 décembre 2022.
Le tome II de l’annexe Voies et Moyens jointe au présent projet de loi de finances évalue la dépense fiscale résultant des 7° et 8° à un ordre de grandeur de 10 millions d’euros. La dépense fiscale résultant du 9° n’est pas évaluée.
● Par ailleurs, l’article 150 VE du CGI, introduit par la loi de finances pour 2021 ([30]), instaure un abattement exceptionnel applicable aux plus-values immobilières dans le périmètre des opérations de revitalisation du territoire (ORT) des villes moyennes et des grandes opérations d’urbanisme (GOU) : le taux de cet abattement est de 70 %, porté à 85 % lorsque le cessionnaire s’engage à réaliser des logements sociaux.
La cession doit être précédée d’une promesse de vente antérieure au 31 décembre 2023, et doit être réalisée au plus tard le 31 décembre de la deuxième année suivante. Le coût de cette dépense fiscale n’est pas connu.
B. Le dispositif proposÉ
● Le présent article résulte d’un amendement de Mme Nadia Hai et de plusieurs de ses collègues, et d’un sous-amendement du rapporteur général ([31]), retenus par le Gouvernement dans le texte sur lequel il a engagé sa responsabilité sur le fondement de l’article 49-3 de la Constitution.
Dans son I, il proroge jusqu’au 31 décembre 2023 les exonérations temporaires de plus-values immobilières en faveur du logement social prévues aux 7° et 8° du II de l’article 150 U du CGI, et jusqu’au 31 décembre 2024 celle prévue pour la cession d’un droit de surélévation par le 9° du même article.
Dans son II, il prévoit que le Gouvernement remettra au Parlement, avant le 30 septembre 2023 un rapport d’évaluation de ces trois dispositifs, ainsi que de celui prévu par l’article 150 VE.
II. Les modifications apportÉes par le SÉnat
● Sur avis favorable de la commission et sur avis défavorable du Gouvernement, le Sénat a adopté trois amendements identiques ([32]) de Mme Estrosi Sassone et de membres du groupe les Républicains, de M. Breuiller et de membres du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires, ainsi que de Mme Lienemann et de membres du groupe communiste, républicain, citoyen et écologiste, qui modifient, au 7° du II de l’article 150 U du CGI, les conditions d’éligibilité à l’exonération des cessions aux organismes de logement social.
D’une part, il assouplit la condition d’engagement du cessionnaire à construire des logements sociaux : au lieu d’être strictement conditionnée à l’engagement « par une mention dans l’acte authentique d’acquisition, à réaliser et à achever des logements sociaux dans un délai de dix ans », l’exonération pourrait en outre s’appliquer à la cession d’un immeuble bâti « que l’acquéreur s’engage à affecter à une opération de logement social dans les cinq ans ».
D’autre part, il supprime la référence à la « surface totale des constructions mentionnées sur le permis de construire du programme immobilier » retenue aujourd’hui pour calculer l’exonération au prorata de la surface des logements sociaux que le cessionnaire s’engage à construire.
III. La position du Rapporteur gÉnÉral
En première lecture, l’Assemblée nationale a rejeté en séance publique des amendements procédant aux mêmes ajouts que le Sénat, en considérant qu’ils ont pour effet de revenir sur des modifications opérées par la loi de finances pour 2021 ([33]) visant à réserver le bénéfice de l’exonération aux opérations qui aboutissent effectivement à la construction de logements sociaux.
En effet, l’affectation par un organisme HLM d’un immeuble bâti à une « opération de logement social » est d’ores et déjà possible, mais la notion d’opération est imprécise et peut avoir une échéance lointaine : cela ne justifie donc pas d’assouplir la condition stricte de délai de dix ans pour la réalisation effective du logement au titre duquel l’exonération a été obtenue.
Par ailleurs, supprimer la référence à la surface totale des constructions mentionnée dans le permis de construire expose au risque de ne plus pouvoir contrôler les superficies effectivement consacrées au logement social et les exonérations afférentes.
Le rapporteur général relève en outre que si des modifications doivent être apportées aux conditions d’éligibilité à l’exonération des plus-values de cessions à des organismes HLM, le Parlement pourra y procéder, lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2024, sur la base de l’évaluation prévue par le présent article, et qui sera la première jamais réalisée de ce dispositif depuis sa création en 2005.
En conséquence, le rapporteur général propose de rétablir cet article dans la rédaction adoptée par l’Assemblée nationale en première lecture.
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Article 3 quinquies A (nouveau)
Réforme de l’imposition des plus-values de cessions immobilières
I. Les dispositions adoptÉes par le SÉnat
A. L’État du droit
● Les plus-values réalisées par une personne physique à l’occasion d’une cession immobilière sont soumises à l’impôt sur le revenu (IR).
Depuis la loi de finances pour 2004 ([34]), elles ne sont pas soumises au barème progressif, mais à un taux forfaitaire, fixé à 19 % par l’article 200 B du code général des impôts (CGI). S’y ajoutent 17,2 % au titre des prélèvements sociaux sur le patrimoine ([35]), ce qui porte le taux global d’imposition à 36,2 %.
Il existe toutefois de nombreux cas d’exonération, notamment au titre de la résidence principale du cédant.
● La plus-value imposable est calculée après application d’un abattement progressif après 5 ans de détention du bien. Les taux d’abattement, non modifiés depuis la loi de finances pour 2014 ([36]), sont présentés dans le tableau ci-après: ils conduisent à une exonération complète de la plus-value imposable après vingt-deux ans au titre de l’IR, et après trente ans au titre des prélèvements sociaux.
Taux d’abattements pour durÉe de dÉtention
sur plus-values immobiliÈres
Durée de détention |
Taux d’abattement par année de détention |
|
Assiette pour l’impôt sur le revenu |
Assiette pour les prélèvements sociaux |
|
Moins de 6 ans |
0 % |
0 % |
De la 6e à la 21e année |
6 % |
1,65 % |
22e année révolue |
4 % |
1,6 % |
Au-delà de la 22e année |
Exonération |
9 % |
Au-delà de la 30e année |
Exonération |
Source : Article 150 VC du CGI et le 2 du VI de l’article L. 136-7 du code de la sécurité sociale.
En déclarant contraire à la Constitution une disposition de la loi de finances pour 2014 qui supprimait les abattements pour durée de détention sur les plus-values de cession de terrains à bâtir ([37]), le Conseil constitutionnel, a considéré que l’exigence de prise en compte des facultés contributives des contribuables nécessite de tenir compte du délai écoulé depuis la date d’acquisition des biens cédés, ou, à tout le moins, de l’érosion de la valeur de la monnaie.
● Par ailleurs, la loi de finances pour 2013 ([38]) a établi, à l’article 1609 nonies G du CGI, une surtaxe pour les plus-values immobilières élevées. Il s’agit d’une surtaxe au taux de 2 %, lorsque le montant net de la plus-value est supérieur à 50 000 euros, puis qui s’échelonne progressivement jusqu’à 6 % au-delà de 250 000 euros de plus-value.
B. Le dispositif proposÉ
Le présent article, qui réforme le régime d’imposition des plus-values immobilières, résulte de l’adoption par le Sénat d’un amendement ([39]) de M. Delahaye et de sénateurs du groupe Union centriste, ayant reçu un avis de sagesse de la commission et un avis défavorable du Gouvernement.
En premier lieu, il abaisse fortement les taux d’imposition :
- le taux d’imposition global est ramené à 15 %, dont 9 % au titre de l’IR et 6 % au titre des prélèvements sociaux - les taux d’imposition actuels sont cependant maintenus pour les cessions après moins de deux années de détention ;
- la surtaxe pour les plus-values immobilières élevées est abrogée.
En second lieu, il supprime le régime d’abattement pour durée de détention, à l’IR comme aux prélèvements sociaux, et le remplace par la prise en compte de « l’effet de l’érosion de la valeur de la monnaie pendant la durée de détention du bien ».
L’entrée en vigueur est différée au 1er janvier 2024, pour permettre aux propriétaires de s’adapter à cette modification du cadre fiscal.
La réforme est motivée par le fait que régime fiscal actuel, qui vise à favoriser les détentions longues, ne serait plus suffisamment justifié par l’objectif de lutte contre la spéculation : en encourageant la rétention foncière, il freinerait les cessions et aggraverait donc les difficultés d’accès au logement.
II. La position du rapporteur gÉnÉral
En première lecture, l’Assemblée nationale a rejeté en séance publique des amendements proposant une réforme similaire de la fiscalité des plus-values immobilières.
Le rapporteur général invite à la plus grande prudence avant de modifier les paramètres de la fiscalité du marché immobilier, qui a au demeurant besoin de stabilité.
L’effet d’une telle réforme sur le comportement des acteurs serait des plus incertain, et les pertes et gains seraient inégalement répartis.
Parmi les gagnants évidents, figureraient les acteurs du secteur de l’immobilier qui achètent dans une perspective de revente afin de profiter d’un marché haussier. Dans ce cas, après seulement deux années de détention, leur plus-value serait nettement moins taxée qu’actuellement, et diminuée en outre par la prise en compte des effets de l’inflation, alors que ces cessions ne sont aujourd’hui éligibles à aucun abattement avant cinq ans de détention.
La suppression de la surtaxe pour les plus-values immobilières élevées favoriserait disproportionnellement les contribuables les plus aisés.
Surtout, cette réforme aurait un coût élevé pour le budget de l’État, auquel la fiscalité des plus-values immobilières procurera 1,3 milliard d’euros en 2023 selon la prévision établie par le présent projet de loi de finances.
Manifestement, la baisse des taux ne serait pas compensée par un élargissement de l’assiette résultant de la suppression des abattements pour durée de détention, puisque l’assiette de l’impôt serait tout de même réduite par la prise en compte de l’inflation dans le calcul de la plus-value imposable.
En conséquence, le rapporteur général propose de supprimer cet article.
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Article 3 quinquies
Élargissement du bénéfice de la demi-part supplémentaire
pour les conjoints survivants d’anciens combattants
I. Les dispositions adoptÉes par l’AssemblÉe nationale
A. État du droit
En France, l’impôt sur le revenu est calculé à partir du revenu imposable des contribuables, sur lequel est préalablement appliqué un système de quotient familial qui divise ce revenu imposable en un certain nombre de parts, fixé en fonction de la situation et des charges de famille du contribuable.
Le f du 1 de l’article 195 du code général des impôts (CGI) prévoit l’octroi d’une demi-part supplémentaire de quotient familial pour les anciens combattants, titulaires de la carte du combattant ou d’une pension du combattant et âgés de plus de 74 ans – et pour leurs conjoints survivants âgés de plus de 74 ans, à condition que l’époux ancien combattant soit décédé après avoir bénéficié de la retraite du combattant.
Cette dernière condition, relative à l’obtention de la demi-part par le conjoint survivant dès lors que le conjoint décédé a bénéficié de la retraite du combattant, appliquée à partir du 1er janvier 2021, résulte de l’adoption à l’unanimité de l’article 158 de la loi de finances pour 2020 ([40]). L’objectif affiché était de supprimer les injustices relatives à l’âge du décès du mari.
En pratique, dans la majorité des cas, cette condition équivaut à ce que le décès de l’ancien combattant soit survenu après ses 65 ans, âge auquel la retraite du combattant est versée au titulaire de la carte du combattant ([41]).
Le coût du présent dispositif fiscal est estimé à 520 millions d’euros par an.
B. Dispositif proposÉ
Le présent article a été introduit par un amendement de la commission des finances, initialement porté par M. Dino Cinieri (Les Républicains), et cinq amendements identiques portés par différents membres des groupes Rassemblement national, Liberté, Indépendants, Outre-mer et Territoires (LIOT) et Gauche démocrate et républicaine (NUPES) Adopté en séance à l’Assemblée nationale malgré un avis défavorable du Gouvernement, il a été retenu dans le texte sur lequel le Gouvernement a engagé sa responsabilité en application de l’article 49, alinéa 3, de la Constitution.
Cet article modifie les conditions d’obtention de la demi-part pour les conjoints survivants des anciens combattants en prévoyant que les conjoints survivants âgés de plus de 74 ans bénéficient de cette demi-part, à condition que leur époux, titulaire de la carte du combattant, soit décédé après 60 ans. Ainsi, l’article a pour effet d’élargir le bénéfice de la demi-part fiscale aux conjoints survivants dont l’époux, ancien combattant, est décédé entre 60 et 65 ans.
Le coût de la mesure est estimé à 133 millions d’euros en 2023.
II. Les modifications apportÉes par le Sénat
Le Sénat a adopté quatre amendements identiques, portés par le Gouvernement, les membres des groupes Les Républicains et le Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants, ainsi que par la commission des affaires sociales, après avoir reçu un avis favorable de la commission des finances, qui suppriment toute condition d’âge de décès de l’ancien combattant pour ouvrir droit au bénéfice de la demi-part fiscale pour les conjoints survivants âgés de plus de 74 ans.
Ainsi, la seule condition retenue pour ouvrir le bénéfice de la demi-part fiscale supplémentaire aux conjoints survivants de leur époux ancien combattant tient à ce que l’ancien combattant ait été titulaire de la carte du combattant au moment de son décès, celle-ci étant attribuée, sur demande, sans condition d’âge.
III. La position du Rapporteur gÉnÉral
Le Rapporteur général salue l’extension du bénéfice de la demi-part supplémentaire accordée aux conjoints survivants à partir de leurs 74 ans quel que soit l’âge de décès de l’ancien combattant, qui vient traduire, dans le droit, l’intention initiale des auteurs des amendements adoptés en séance à l’Assemblée nationale.
En effet, si la rédaction proposée par la commission des finances de l’Assemblée nationale permettait un élargissement du bénéfice de la demi-part fiscale aux conjoints survivants dont l’époux est décédé entre 60 et 65 ans, elle conduisait toutefois à réintroduire une condition expresse d’âge de décès de l’ancien combattant.
Il propose donc d’adopter cet article, dans sa version issue du Sénat.
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Article 3 sexies A (nouveau)
Mise en place d’une base légale à l’exonération d’impôts dont bénéficient
les allocations versées aux orphelins de victimes d’actes antisémites
ou d’actes de barbarie durant la Seconde Guerre mondiale
I. L’ÉTAT DU DROIT
L’article 81 du code général des impôts (CGI) établit la liste des revenus bénéficiant d’une exonération d’impôt sur le revenu. En particulier, à son 4°, il est précisé que sont affranchies de l’impôt sur le revenu :
– les pensions servies en vertu des dispositions du code des pensions militaires d’invalidité et des victimes de guerre ainsi que la retraite du combattant ;
– l’allocation de reconnaissance prévue à l’article 6 de la loi du 23 février 2005 portant reconnaissance de la Nation et contribution nationale en faveur des Français rapatriés ([42]) ;
– l’allocation viagère au profit des conjoints et ex-conjoints survivants d’anciens harkis, moghaznis et personnels des diverses formations supplétives et assimilés de statut civil de droit local ayant servi en Algérie ([43]) ;
– la somme forfaitaire valant réparation prévue à l’article 3 de la loi du 23 février 2022 portant reconnaissance de la Nation envers les harkis et les autres personnes rapatriées d’Algérie anciennement de statut civil de droit local et valant réparation des préjudices subis par ceux-ci et leurs familles du fait de l’indignité de leurs conditions d’accueil et de vie dans certaines structures sur le territoire français ([44]).
Ces différentes allocations sont financées par les crédits de la mission Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation.
En pratique, sont également exonérées de l’imposition sur le revenu, les allocations prévues :
– par le décret du 13 juillet 2000 ([45]) instituant une mesure de réparation pour les orphelins dont les parents ont été victimes de persécutions antisémites ;
– par le décret du 27 juillet 2004 ([46]) instituant une aide financière en reconnaissance des souffrances endurées par les orphelins dont les parents ont été victimes d’actes de barbarie durant la Deuxième Guerre mondiale.
II. Le DISPOSITIF ADOPTÉ par le SÉnat
Le Sénat a adopté, avec des avis favorables du Gouvernement et de la commission des finances, un amendement de M. Marc Laménie (Les Républicains), qui ajoute au 4° de l’article 81 du code général des impôts la mention explicite des rentes ou capitaux versés en application du décret du 13 juillet 2000 et du décret du 27 juillet 2004, afin de sécuriser l’exonération d’impôt sur le revenu des allocations versées aux orphelins de victimes d’actes antisémites ou d’actes de barbarie durant la Seconde Guerre mondiale, en la dotant d’une base légale.
III. La position du Rapporteur gÉnÉral
Se félicitant de l’inscription dans la loi d’une règle constante, le Rapporteur général recommande l’adoption de cet article sans modification.
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Article 3 septies A (nouveau)
Extension de la réduction d’impôt sur le revenu pour dons des particuliers
au profit de communes et organismes locaux de gestion forestière
pour l’entretien, le renouvellement et la reconstitution des forêts
I. Les dispositions adoptÉes par le SÉnat
A. L’État du droit
● Une commune française sur trois est propriétaire d’une forêt, ce qui représente 2,8 millions d’hectares (ha) répartis entre 14 000 forêts communales, soit 15 % de la surface totale de la forêt française ([47]).
Ces communes décident des grandes orientations de gestion de leurs forêts mais sont soumises aux principes définis par le régime forestier – qui visent à assurer la conservation et la mise en valeur du patrimoine forestier – mis en œuvre depuis 1966 par l’Office national des forêts (ONF) ([48]).
● Les communes peuvent transférer leur compétence d’application du régime forestier, y compris la perception des produits des ventes de bois, et la conception, le financement et la réalisation des investissements forestiers à :
– un syndicat intercommunal de gestion forestière (SIGF) ([49]),
– un syndicat mixte de gestion forestière (SMGF) ([50]), qui regroupe des communes et d’autres personnes morales propriétaires de bois et forêts ;
– un groupement syndical forestier (GSF) ([51]), établissement public au profit duquel est transférée la propriété de la forêt.
En 2021, on dénombrait en France 53 SIGF pour une surface totale de 43 000 ha, 41 SMGF pour une surface de 11 000 ha et 36 GSF pour une surface de 12 000 ha ([52]).
● En 2021, les dépenses du bloc communal pour l’entretien des forêts s’élevaient à environ 110 millions d’euros, dont 81 millions d’euros de fonctionnement et 29 millions d’euros d’investissement.
Par ailleurs, en raison notamment de la crise des scolytes et de la récurrence des incendies, les recettes forestières des communes diminuent, passant de 178 à 152 millions d’euros entre 2019 et 2020. Une partie des forêts communales nécessite plus de dépenses qu’elles n’apportent de recettes, en particulier celles dont les essences sont peu productives mais doivent être protégées, comme dans le Sud de la France.
La loi de finances pour 2022 a établi un mécanisme de soutien exceptionnel, par subventions attribuées par le préfet « aux communes pour lesquelles des circonstances anormales affectent les conditions de gestion des forêts et entraînent des difficultés financières particulières » ([53]).
● En application du b du 1 de l’article 200 du code général des impôts (CGI), les dons faits par les particuliers à des « organismes d’intérêt général (...) concourant (...) à la défense de l’environnement naturel » ouvrent droit à une réduction d’impôt égale à 66 % de leur montant.
La réduction d’impôt est plafonnée à 20 % du revenu imposable du donateur, mais, si ce plafond est dépassé, l’excédent est reporté successivement sur les cinq années suivantes.
Selon la doctrine fiscale ([54]), un organisme est d’intérêt général au sens du b du 1 de l’article 200 du CGI dès lors qu’il remplit cumulativement trois conditions : il n’exerce pas d’activité lucrative, il ne fait pas l’objet d’une gestion intéressée et il ne fonctionne pas au profit d’un cercle restreint de personnes.
La doctrine fiscale ([55]) précise également que la notion d’environnement naturel inclut notamment la prévention des risques naturels et technologiques, la préservation de la faune, de la flore et des sites, ainsi que la préservation des milieux et des équilibres naturels et l’amélioration du cadre de vie en milieu urbain et rural.
Dès lors qu’il est affecté strictement à l’entretien, au renouvellement, à la reconstitution ou à l’acquisition d’un domaine forestier, que ces actions n’ont pas de visée lucrative, et qu’elles n’ont pas vocation à profiter à un cercle restreint de personnes, le don versé à une commune a donc toutes les chances de faire l’objet de la réduction d’impôt prévue à l’article 200 CGI.
Cependant, cette possibilité paraît peu connue tant des particuliers que des communes et rarement utilisée.
B. Le dispositif proposÉ
Le présent article résulte d’un amendement ([56]) de Mme Paoli-Gagin ([57]) et de plusieurs sénateurs du groupe Les Indépendants - République et Territoires, adopté sur double avis favorable de la commission des finances et du Gouvernement.
Il rétablit un 4 à l’article 200 du CGI, qui prévoit expressément qu’ouvrent droit à la réduction d’impôt, les dons des particuliers « effectués au profit de communes, de syndicats intercommunaux de gestion forestière, de syndicats mixtes de gestion forestière et de groupements syndicaux forestiers ».
Ces dons doivent être destinés à l’entretien, au renouvellement ou à la reconstitution de bois et forêts présentant des garanties de gestion durable ([58]) mais peuvent également viser l’acquisition de bois et forêts qui ne seraient pas gérés durablement, par exemple lorsqu’ils sont laissés à l’abandon, dès lors que cette acquisition vise à les soumettre à une gestion durable.
Enfin, il est expressément indiqué que « ces dons ne peuvent avoir pour effet de financer des activités lucratives ou bénéficiant à un cercle restreint de personnes ». Cette précision vise à transposer, dans le nouveau 4 de l’article 200 du CGI, les exigences applicables aux dons aux organismes d’intérêt général, régis par le b du 1 du même article.
II. La position du rapporteur gÉnÉral
Le rapporteur général relève que l’intention du Sénat est satisfaite sur le fond puisque les actions de gestion forestière des communes et de leurs syndicats forestiers peuvent déjà être financées par des dons éligibles la réduction d’impôt.
Cependant, les dispositions actuelles ne semblent pas suffisamment lisibles, ni pour les donateurs qui souhaiteraient aider des communes au titre de leurs activités forestières, ni pour les communes qui souhaiteraient faire appel à ces dons.
Cet enjeu de visibilité peut justifier que ce cas soit expressément mentionné à l’article 200 du CGI.
En conséquence, le rapporteur général propose d’adopter cet article moyennant une modification de précision.
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Article 3 septies B (nouveau)
Extension du régime fiscal du mécénat aux dons des entreprises
au profit de communes et organismes locaux de gestion forestière
pour l’entretien, le renouvellement et la reconstitution des forêts
I. Les dispositions adoptÉes par le SÉnat
Le présent article résulte d’un amendement ([59]) de Mme Paoli-Gagin et de plusieurs sénateurs du groupe Les Indépendants – République et Territoires, adopté sur double avis favorable de la commission des finances et du Gouvernement.
Il constitue l’exacte réplique, concernant la réduction d’impôt pour mécénat des entreprises, du dispositif relatif à la réduction d’impôt pour dons des particuliers établi par l’article 3 septies A du présent projet de loi de finances (voir supra).
Il insère un nouveau paragraphe après le 4 de l’article 238 bis du code général des impôts (CGI) afin de rendre expressément éligibles à la réduction d’impôt les dons des entreprises destinés aux activités forestières des communes, syndicats intercommunaux de gestion forestière, syndicats mixtes de gestion forestière et groupements syndicaux forestiers, qui présentent des garanties de gestion durable.
La réduction d’impôt pour le mécénat des entreprises
L’article 238 bis du CGI établit une réduction d’impôt sur les sociétés pour les entreprises au titre de leurs dons. Les dons sont retenus dans la limite de cinq pour mille du chiffre d’affaires de l’entreprise mécène ou, si ce second montant est plus élevé, dans la limite de 20 000 euros, avec report des excédents éventuels sur les cinq exercices suivants. La loi de finances pour 2020 ([60]) a modulé l’intensité du taux de la réduction d’impôt : 60 % pour la fraction des dons qui n’excède pas 2 millions d’euros, ramenés à 40 % pour la fraction des dons qui excède ce montant.
II. La position du rapporteur gÉnÉral
L’intention du Sénat paraît, à nouveau, satisfaite sur le fond, puisque les actions de gestion forestière des communes et de leurs syndicats forestiers peuvent déjà être financées par des dons des entreprises éligibles à la réduction d’impôt : en effet, le a du 1 de l’article 238 bis du CGI mentionne les dons en faveur « d’organismes d’intérêt général (…) pour des actions concourant à la défense de l’environnement naturel ».
Cependant, en ajoutant une mention expresse dans le CGI, le présent article répond, au même titre que l’article 3 septies A, à un enjeu de visibilité de l’action des communes pour préserver les forêts.
En conséquence, le rapporteur général propose d’adopter cet article moyennant une modification de précision.
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Article 3 septies
Prolongation des dispositifs de défiscalisation outre-mer
I. Les dispositions adoptées
A. état du droit
1. La réduction d’impôt sur le revenu pour les contribuables domiciliés en France qui investissements dans les logements en outre-mer
L’article 199 undecies A du code général des impôts (CGI) prévoit une réduction d’impôt sur le revenu pour les contribuables domiciliés en France qui investissent en Guadeloupe, en Guyane, en Martinique, à Mayotte, à La Réunion, à Saint-Pierre-et-Miquelon, en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, à Saint-Martin, à Saint-Barthélemy, dans les îles Wallis et Futuna et les terres australes et antarctiques françaises.
Cette réduction d’impôt s’applique au montant des travaux de réhabilitation immobiliers réalisés par une entreprise, à l’exclusion de ceux qui constituent des charges déductibles des revenus fonciers et portant sur des logements achevés depuis plus de vingt ans, situés dans les départements ou collectivités susmentionnés. Cette réduction est également applicable au montant des travaux de confortation de logements contre le risque sismique ou cyclonique.
La base de la réduction est égale à 20 % des sommes effectivement payées au 31 décembre de l’année au cours de laquelle le droit à réduction d’impôt est né.
À partir de cette base, la réduction d’impôt est ensuite égale à 18 % de la base. Pour les investissements réalisés en Guadeloupe, en Guyane, en Martinique, à Mayotte et à La Réunion, le taux de 18 % est majoré à 26 % lorsque le logement est situé dans un quartier prioritaire de la politique de la ville.
La réduction est possible pour les investissements réalisés entre la date de promulgation de la loi du 21 juillet 2003 de programme pour l’outre-mer [61] et le 31 décembre 2023.
2. La réduction d’impôt sur le revenu à raison des investissements productifs neufs en outre-mer
L’article 199 undecies B du CGI prévoit une réduction d’impôt sur le revenu pour les contribuables domiciliés en France à raison des investissements productifs neufs qu’ils réalisent dans les départements d’outre-mer, à Saint-Pierre-et-Miquelon, en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, à Saint-Martin, à Saint-Barthélemy, dans les îles Wallis et Futuna et les Terres australes et antarctiques françaises, dans le cadre d’une entreprise exerçant une activité agricole ou une activité industrielle, commerciale ou artisanale.
Lorsque l’activité est exercée dans un département d’outre-mer, l’entreprise doit avoir réalisé un chiffre d’affaires, au titre de son dernier exercice clos, inférieur à 20 millions d’euros. Ce seuil de chiffre d’affaires est ramené à 15 millions d’euros et à 10 millions d’euros pour les investissements que l’entreprise réalise au cours des exercices ouverts à compter, respectivement, du 1er janvier 2019 et du 1er janvier 2020. Lorsque l’entreprise n’a clôturé aucun exercice, son chiffre d’affaires est réputé être nul.
Cette réduction d’impôt s’applique également aux travaux de rénovation et de réhabilitation d’hôtels, de résidences de tourisme et de villages de vacances classés, lorsque ces travaux constituent des éléments de l’actif immobilisé ainsi qu’aux investissements affectés plus de cinq ans par le concessionnaire à l’exploitation d’une concession de service public local à caractère industriel et commercial réalisés dans des secteurs éligibles.
La réduction d’impôt est de 38,25 % du montant, hors taxes et hors frais de toute nature, notamment les commissions d’acquisition, à l’exception des frais de transport, d’installation et de mise en service amortissables, des investissements productifs, diminué de la fraction de leur prix de revient financée par une aide publique et, lorsque l’investissement a pour objet de remplacer un investissement ayant bénéficié de l’un des dispositifs définis au présent article ou aux articles 217 undecies ou 244 quater W du CGI, de la valeur réelle de l’investissement remplacé.
Le taux de la réduction d’impôt est porté à 45,9 % pour les investissements réalisés en Guyane et à Mayotte dans les limites définies par les règles communautaires relatives aux aides d’État, à Saint-Pierre-et-Miquelon ou dans les îles Wallis et Futuna.
Les taux de 38,25 % et 45,9 % susmentionnés sont respectivement portés à 45,9 % et 53,55 % pour les investissements réalisés dans le secteur de la production d’énergie renouvelable.
Le taux de la réduction d’impôt est également porté à 45,9 % pour les travaux de rénovation et de réhabilitation d’hôtels, de résidences de tourisme et de villages de vacances classés réalisés à Saint-Martin, en Polynésie française, dans les îles Wallis-et-Futuna, dans les Terres australes et antarctiques françaises, à Saint-Pierre-et-Miquelon et en Nouvelle-Calédonie.
Enfin, le taux de la réduction d’impôt est porté à 53,55 % pour ces mêmes travaux de rénovation et de réhabilitation d’hôtel, de résidence de tourisme et de village de vacances classés dans les départements d’outre-mer. Le bénéfice de cette mesure est accordé à l’exploitant lorsqu’il prend en charge ces travaux.
Les réductions d’impôt sur le revenu mentionnées à l’article 199 undecies B du CGI sont applicables aux investissements mis en service jusqu’au 31 décembre 2025, aux travaux de réhabilitation hôtelière achevés au plus tard à cette date et aux acquisitions d’immeubles à construire et aux constructions d’immeubles dont les fondations sont achevées au plus tard à cette date.
3. La réduction d’impôt au titre de l’acquisition ou de la construction de logements sociaux outre-mer
L’article 199 undecies C du code général des impôts (CGI) – également appelé « Girardin logement social » – instauré par la loi pour l’ouverture et le développement économique pour l’outre-mer (LODEOM) [62] a pour objectif de pallier la pénurie de logements sociaux dans les territoires d’outre-mer, en permettant le financement de programmes immobiliers sociaux.
Cette réduction d’impôt sur le revenu bénéficie aux contribuables domiciliés en France à raison de l’acquisition ou de la construction de logements neufs dans les départements d’outre-mer, à Saint-Pierre-et-Miquelon, en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, à Saint-Martin, à Saint-Barthélemy, dans les îles Wallis et Futuna, sous certaines conditions. Le logement doit notamment être donné en location nue, dans les douze moins de son achèvement ou de son acquisition et pour une durée au moins égale à cinq ans, à un organisme de logement social, qui sous-loue, pour au moins cinq ans et dans le respect de plafonds de ressources et de loyers, à des personnes physiques qui en font leur résidence principale.
La réduction d’impôt est de 50 % d’un montant égal au prix de revient des logements minorés des taxes et commissions d’acquisition versées et des subventions publiques reçues. Cette réduction d’impôt est accordée au titre de l’année d’achèvement du logement ou de l’acquisition.
4. La déduction des résultats imposables des entreprises soumises à l’impôt sur le revenu d’une partie des investissements productifs réalisés dans les départements d’outre-mer
L’article 217 undecies du CGI prévoit que les entreprises soumises à l’impôt sur les sociétés réalisant, au titre de leur dernier exercice clos, un chiffre d’affaires inférieur à 20 millions d’euros peuvent déduire de leurs résultats imposables une somme égale au montant, hors taxes et hors frais de toute nature, notamment les commissions d’acquisition, à l’exception des frais de transport, d’installation et de mise en service amortissables, des investissements productifs qu’elles réalisent dans les départements de la Guadeloupe, de la Guyane, de la Martinique, de Mayotte et de la Réunion pour l’exercice d’une activité éligible en application du I de l’article 199 undecies B du CGI.
Cette somme doit être diminuée de la fraction de leur prix de revient financée par une aide publique ainsi que, lorsque l’investissement a pour objet de remplacer un investissement ayant bénéficié de l’un des dispositifs définis au présent article ou aux articles 199 undecies B ou 244 quater W du CGI, de la valeur réelle de l’investissement remplacé.
La déduction prévue par l’article 217 undecies du CGI s’applique aux travaux de rénovation et de réhabilitation d’hôtels, de résidences de tourisme et de villages de vacances classés, lorsque ces travaux constituent des éléments de l’actif immobilisé.
Elle s’applique également à la réalisation d’investissements affectés plus de cinq ans par le concessionnaire à l’exploitation d’une concession de service public local à caractère industriel et commercial et réalisés dans des secteurs éligibles définis par l’article 199 undecies B du CGI.
Comme les réductions d’impôt prévues à l’article 199 undecies B du CGI, elle s’applique aux équipements et opérations de pose de câbles sous-marins de communication desservant pour la première fois la Guadeloupe, la Guyane, la Martinique, La Réunion, Mayotte, la Polynésie française, Saint-Barthélemy, Saint-Martin, Saint-Pierre-et-Miquelon, les îles Wallis et Futuna, la Nouvelle-Calédonie ou les Terres australes et antarctiques françaises lorsque, parmi les options techniques disponibles pour développer les systèmes de communication outre-mer, le choix de cette technologie apparaît le plus pertinent.
La possibilité est également ouverte de déduire le montant des souscriptions au capital de sociétés qui réalisent de tels investissements.
La déduction prévue s’applique, par ailleurs, aux acquisitions ou constructions de logements neufs à usage locatif ou non, situés dans les départements d’outre-mer.
Ce dispositif est applicable aux investissements neufs mis en service jusqu’au 31 décembre 2025, aux travaux de rénovation et de réhabilitation d’hôtels, de résidences de tourisme et de villages de vacances classés achevés au plus tard à cette date, aux acquisitions d’immeubles à construire et aux constructions d’immeubles dont les fondations sont achevées au plus tard à cette date et aux souscriptions versées jusqu’au 31 décembre 2025.
5. Le crédit d’impôt pour les entreprises à raison des investissements productifs neufs qu’elles réalisent dans un département d’outre-mer
L’article 244 quater W du CGI prévoit que les entreprises imposées d’après leur bénéfice réel ou exonérées, exerçant une activité agricole ou une activité industrielle, commerciale ou artisanale, peuvent bénéficier d’un crédit d’impôt à raison des investissements productifs neufs qu’elles réalisent dans un département d’outre-mer pour l’exercice d’une activité ne relevant pas de l’un des secteurs énumérés aux a à l du I de l’article 199 undecies B du CGI, à l’exception des activités mentionnées au I quater. Ainsi, sont éligibles l’acquisition ou la construction d’une immobilisation corporelle, amortissable ou neuve, l’acquisition ou la construction d’un immeuble d’exploitation ou d’un immeuble à usage locatif, un investissement réalisé en crédit-bail et la réhabilitation ou la rénovation d’immeuble.
Le crédit d’impôt s’applique également aux travaux de rénovation et de réhabilitation d’hôtels, de résidences de tourisme et de villages de vacances classés lorsque ces travaux constituent des éléments de l’actif immobilisé ainsi qu’aux investissements affectés plus de cinq ans par le concessionnaire à l’exploitation d’une concession de service public local à caractère industriel et commercial et réalisés dans des secteurs éligibles.
Par ailleurs, pour les entreprises soumises à l’impôt sur les sociétés qui exercent leur activité dans le département dans lequel l’investissement est réalisé ou pour les organismes mentionnés au 1 du I de l’article 244 quater X du CGI, le crédit d’impôt s’applique également aux acquisitions ou constructions de logements neufs à usage locatif ou non situés dans les départements d’outre-mer dans certaines conditions et aux logements neufs à usage locatif mis à leur disposition.
Le crédit d’impôt est assis sur le montant, hors taxes et hors frais de toute nature, notamment les commissions d’acquisition, à l’exception des frais de transport, d’installation et de mise en service amortissables, des investissements productifs, diminué de la fraction de leur prix de revient financée par une aide publique.
Le taux du crédit d’impôt est fixé à :
– 38,25 % pour les entreprises soumises à l’impôt sur le revenu ;
– 35 % pour les entreprises et les organismes soumis à l’impôt sur les sociétés.
Le taux mentionné de 38,25 % est porté à 45,9 % pour les investissements réalisés en Guyane et à Mayotte, dans les limites définies par les règles européennes relatives aux aides d’État.
Le bénéfice du crédit d’impôt accordé au titre de l’année au cours de laquelle l’investissement est mis en service.
Ce dispositif est applicable aux investissements mis en service à compter du 1er janvier 2015 et jusqu’au 31 décembre 2025, aux travaux de réhabilitation hôtelière achevés au plus tard à cette date et aux acquisitions d’immeubles à construire et constructions d’immeubles dont les fondations sont achevées au plus tard à cette date.
6. Le crédit d’impôt à raison de l’acquisition ou de la construction de logements neufs dans les départements d’outre-mer, pour les organismes d’habitations à loyer modéré
L’article 244 quater X du CGI prévoit que les organismes d’habitations à loyer modéré et les sociétés d’économie mixte exerçant une activité immobilière outre-mer peuvent bénéficier d’un crédit d’impôt à raison de l’acquisition ou de la construction de logements neufs dans les départements d’outre-mer, lorsqu’ils respectent certaines conditions et notamment les suivantes :
– les logements sont donnés en location nue ou meublée dans les douze mois de leur achèvement ou de leur acquisition et pour une durée au moins égale à cinq ans, à des personnes physiques qui en font leur résidence principale ;
– les bénéficiaires de la location sont des personnes physiques dont les ressources n’excèdent pas des plafonds fixés par décret ;
– le montant des loyers à la charge des personnes physiques ne peut excéder des limites fixées par décret et déterminées en fonction notamment de la localisation du logement.
Le taux du crédit d’impôt est fixé à 40 %.
Ce dispositif est applicable aux acquisitions, constructions ou réhabilitations d’immeubles effectuées à compter du 1er juillet 2014 et jusqu’au 31 décembre 2025.
7. La réduction d’impôt en faveur des investissements réalisés dans les collectivités d’outre-mer et en Nouvelle-Calédonie
La réduction d’impôt de l’article 244 quater Y du CGI est ouverte aux entreprises assujetties à l’IS au titre des investissements réalisés en Nouvelle‑Calédonie, en Polynésie française, à Saint‑Pierre‑et‑Miquelon, à Wallis et Futuna, à Saint‑Martin, à Saint‑Barthélemy et dans les TAAF, sous réserve :
– que ces investissements ne relèvent pas de ceux inclus dans le champ d’application de la réduction d’impôt pour investissements productifs prévue à l’article 199 undecies B du CGI ;
– que ces investissements soient mis à la disposition d’une entreprise dans le cadre d’un contrat de location et qu’ils soient exploités par cette entreprise locataire ;
– que 80 % de l’avantage fiscal retiré de la réduction d’impôt par l’entreprise propriétaire soit rétrocédé à l’entreprise locataire sous la forme d’une diminution du loyer et du prix de cession du bien faisant l’objet de l’investissement.
L’acquisition de véhicules de tourisme qui ne sont pas strictement indispensables à l’activité de l’entreprise locataire et les installations de production d’électricité utilisant l’énergie radiative du soleil sont exclues du champ de cet article.
En revanche, y sont éligibles les investissements affectés plus de cinq ans à l’exploitation d’une concession de service public à caractère industriel et commercial, aux travaux de rénovation et de réhabilitation d’hôtels et aux investissements locatifs portant sur des logements neufs.
L’exploitation des investissements éligibles par l’entreprise locataire doit porter sur une période d’au moins cinq ans, sauf si la durée normale d’utilisation de l’investissement est inférieure. Des durées supérieures sont prévues pour certains investissements particuliers, tels que ceux portant sur des hôtels – quinze ans – ou sur les navires de croisière – dix ans. Il s’agit ici d’une reprise des modalités qui existent dans le cadre de la réduction d’impôt et du crédit d’impôt prévus respectivement aux articles 199 undecies B et 244 quater W du CGI.
Le non-respect de cette condition de durée d’exploitation entraîne la reprise de la réduction d’impôt, sauf en cas de transmission des investissements dans le cadre d’une opération relevant du régime spécial des fusions ou d’une reprise de ces investissements par une entreprise à la suite de la défaillance de l’entreprise locataire exploitante.
La réduction d’impôt est égale à 35 % du montant hors taxes des investissements productifs éligibles, minoré de la fraction de leur prix de revient financé par une aide publique.
Le fait générateur de la réduction d’impôt est l’exercice au cours duquel l’investissement est mis en service.
B. Dispositif proposÉ
Le présent article, retenu par le Gouvernement dans l’élaboration du texte sur lequel il a engagé sa responsabilité en application de l’article 49, alinéa 3, de la Constitution, reprend un amendement de notre collègue Karine Lebon (Gauche démocrate et républicaine – GDR) prévoyant la prolongation jusqu’au 31 décembre 2029 des dispositifs fiscaux suivants :
– réduction d’impôt sur le revenu pour les contribuables domiciliés en France qui investissent dans les logements outre-mer. Le 1° du I du présent article modifie ainsi la date mentionnée au premier alinéa du 1 de l’article 199 undecies A du CGI ;
– réduction d’impôt sur le revenu à raison des investissements productifs neuf réalisés en outre-mer. Le 2° du I du présent article modifie ainsi la date mentionnée au VI de l’article 199 undecies B du CGI ;
– déduction d’une partie des investissements productifs réalisés en outre-mer du résultat imposable des entreprises soumises à l’impôt sur le revenu. Le 3° du I du présent article modifie ainsi le deuxième alinéa du V de l’article 217 undecies du CGI ;
– crédit d’impôt pour les entreprises à raison des investissements productifs neufs réalisés dans un département d’outre-mer. Le 4° du I du présent article modifie ainsi le 1 du IX de l’article 244 quater W du CGI ;
– crédit d’impôt pour les organismes d’habitation à loyer modéré à raison de l’acquisition ou de la construction de logements neufs dans les départements d’outre-mer. Le 5° du I du présent article modifie ainsi le 1 du VIII de l’article 244 quater X du CGI.
C. Dispositif modifiÉ
Le Sénat a adopté, avec avis favorable du Gouvernement, deux amendements identiques, l’un porté par le rapporteur général de la commission des finances, l’autre par M. Reva Rohfritsch (Rassemblement démocratique et social européen – RDSE). Ces amendements opèrent, d’une part, diverses modifications purement rédactionnelles et, d’autre part, une mise en cohérence de l’ensemble des dispositifs de défiscalisation outre-mer en prolongeant également jusqu’au 31 décembre 2029 les dispositifs portés par les articles 199 undecies C et 244 quater Y du CGI.
II. La position du Rapporteur général
Le rapporteur général juge opportunes les corrections rédactionnelles adoptées par le Sénat. Par ailleurs, il prend acte de la volonté d’harmonisation des différents dispositifs de défiscalisation outre-mer via l’extension des dispositifs de l’article 199 undecies C et 244 quater Y du CGI jusqu’au 31 décembre 2029.
Néanmoins, il souhaite rappeler que la prorogation de ces dispositifs – dont le coût budgétaire annuel est d’environ 650 millions d’euros – ne doit pas permettre de se dispenser de leur évaluation précise et régulière. À ce titre, l’engagement pris par le Gouvernement en séance publique d’opérer une revue partenariale des dépenses fiscales liées à l’outre-mer, au premier semestre 2023, est à saluer.
Cela étant dit, il est proposé de voter le présent article dans sa version issue du Sénat.
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Article 3 octies A (nouveau)
Éligibilité à la réduction d’impôt outre-mer
des installations de production d’électricité solaire
I. Les dispositions adoptÉes
A. État du droit
L’article 199 undecies B du CGI – également appelé « Girardin industriel » – prévoit une réduction d’impôt sur le revenu pour les contribuables domiciliés en France à raison des investissements productifs neufs qu’ils réalisent dans les départements d’outre-mer, à Saint-Pierre-et-Miquelon, en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, à Saint-Martin, à Saint-Barthélemy, dans les îles Wallis et Futuna et les Terres australes et antarctiques françaises, dans le cadre d’une entreprise exerçant une activité agricole ou une activité industrielle, commerciale ou artisanale.
Lorsque l’activité est exercée dans un département d’outre-mer, l’entreprise doit avoir réalisé un chiffre d’affaires, au titre de son dernier exercice clos, inférieur à 20 millions d’euros. Ce seuil de chiffre d’affaires a été ramené à 15 millions d’euros et à 10 millions d’euros pour les investissements que l’entreprise réalise au cours des exercices ouverts à compter, respectivement, du 1er janvier 2019 et du 1er janvier 2020. Lorsque l’entreprise n’a clôturé aucun exercice, son chiffre d’affaires est réputé être nul.
Cette réduction d’impôt s’applique également aux travaux de rénovation et de réhabilitation d’hôtels, de résidences de tourisme et de villages de vacances classés, lorsque ces travaux constituent des éléments de l’actif immobilisé ainsi qu’aux investissements affectés plus de cinq ans par le concessionnaire à l’exploitation d’une concession de service public local à caractère industriel et commercial réalisés dans des secteurs éligibles.
La réduction d’impôt est de 38,25 % du montant, hors taxes et hors frais de toute nature, notamment les commissions d’acquisition, à l’exception des frais de transport, d’installation et de mise en service amortissables, des investissements productifs, diminué de la fraction de leur prix de revient financée par une aide publique et, lorsque l’investissement a pour objet de remplacer un investissement ayant bénéficié de l’un des dispositifs définis à l’article 199 undecies B ou aux articles 217 undecies ou 244 quater W du CGI, de la valeur réelle de l’investissement remplacé.
Le taux de la réduction d’impôt est porté à 45,9 % pour les investissements réalisés en Guyane et à Mayotte dans les limites définies par les règles communautaires relatives aux aides d’État, ainsi qu’à Saint-Pierre-et-Miquelon ou dans les îles Wallis et Futuna.
Les taux de 38,25 % et 45,9 % susmentionnés sont respectivement portés à 45,9 % et 53,55 % pour les investissements réalisés dans le secteur de la production d’énergie renouvelable.
En application de l’article 36 de la loi de finances pour 2011, la réduction d’impôt n’a plus été appliquée, à compter du 29 septembre 2010, aux investissements portant sur des installations de production d’électricité utilisant l’énergie radiative du soleil[63]. Cette exclusion vise toutes les installations générant de l’électricité à partir du rayonnement solaire ; elle ne concerne en revanche pas les installations utilisant directement la chaleur solaire pour produire exclusivement de l’énergie thermique telles que les installations de chauffe-eau solaire utilisant des fluides caloporteurs.
L’exclusion des investissements dans le secteur du solaire photovoltaïque avait été justifiée à l’époque par la bulle spéculative qu’alimentait, dans les territoires ultramarins, une telle dépense fiscale.
B. Dispositif adopté par le SÉNAT
Le Sénat a adopté, à l’initiative du rapporteur général de sa commission des finances ayant recueilli un avis défavorable de la part du Gouvernement, un amendement portant article additionnel visant à inclure de nouveau les installations de production d’électricité solaire au sein du dispositif de l’article 199 undecies B du CGI.
II. La position du Rapporteur gÉnÉral
Le rapporteur général considère, à l’instar du ministre du budget, que la situation qui a justifié il y a plus de 10 ans l’exclusion du solaire de la dépense fiscale du « Girardin industriel » mérite réexamen.
Pour autant, comme évoqué lors des discussions portant sur les dépenses fiscales ultramarines à l’occasion de l’examen de la première partie du présent projet de loi devant l’Assemblée nationale, il a été convenu d’opérer, au cours de l’année 2023, une revue fiscale partenariale de ces dispositifs. Le ministre du budget s’y est encore engagé devant le Sénat, lors de la séance publique du 18 novembre 2022.
Aussi, il est proposé de ne pas préempter ces évaluations et, dans l’intervalle, de supprimer le présent article additionnel.
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Article 3 octies B (nouveau)
Ouverture de la réduction d’impôt au titre de l’acquisition
ou de la construction de logements sociaux outre-mer
aux propriétaires occupants
I. Les dispositions adoptÉes par l’AssemblÉe nationale
A. État du droit
L’article 199 undecies C du code général des impôts (CGI) – également appelé « Girardin logement social » – instauré par la loi pour l’ouverture et le développement économique pour l’outre-mer (LODEOM) [64] a pour objectif de pallier la pénurie de logements sociaux dans les territoires d’outre-mer, en permettant le financement de programmes immobiliers sociaux.
Cette réduction d’impôt sur le revenu bénéficie aux contribuables domiciliés en France à raison de l’acquisition ou de la construction de logements neufs dans les départements d’outre-mer, à Saint-Pierre-et-Miquelon, en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, à Saint-Martin, à Saint-Barthélemy, dans les îles Wallis et Futuna, sous certaines conditions. Le logement doit notamment être donné en location nue, dans les douze mois de son achèvement ou de son acquisition et pour une durée au moins égale à cinq ans, à un organisme de logement social.
La réduction d’impôt est de 50 % d’un montant égal au prix de revient des logements minorés des taxes et commissions d’acquisition versées et des subventions publiques reçues. Cette réduction d’impôt est accordée au titre de l’année d’achèvement du logement ou de l’acquisition.
B. Dispositif adoptÉ par le sÉnat
Le Sénat a adopté trois amendements identiques, à l’initiative de Catherine Conconne (Socialistes & républicains), ayant recueilli des avis défavorables de la commission des finances et du Gouvernement, visant à ouvrir la réduction d’impôt de l’article 199 undecies C du CGI aux propriétaires occupants.
II. La position du Rapporteur gÉnÉral
Sans minorer les difficultés touchant l’habitat social dans les territoires d’outre-mer, le rapporteur général considère que l’outil fiscal de l’article 199 undecies C du CGI n’est pas destiné à l’accession sociale à la propriété de ses bénéficiaires mais au développement de la construction et de la mise sur le marché de tels logements sur les territoires cibles, ensuite destinés à être loués à des ménages modestes.
Au demeurant, le dispositif de l’article 199 undecies C du CGI est une réduction d’impôt et non un crédit d’impôt et qu’il vise donc, en toute hypothèse, des contribuables investisseurs imposables.
S’agissant des propriétaires occupants, des aides budgétaires directes sont plus efficaces. C’est le choix qui a été fait dans le présent texte qui propose des aides à l’amélioration de l’habitat au sein de la mission Outre-mer, à hauteur de 35 millions d’euros en autorisations d’engagement.
Ainsi, il est proposé de supprimer le présent article.
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Article 3 octies C (nouveau)
Suppression du zonage associé au crédit d’impôt outre-mer
en faveur des opérations de rénovation de logements sociaux
I. Les dispositions adoptÉes
A. État du droit
L’article 244 quater X du CGI prévoit que les organismes d’habitations à loyer modéré et les sociétés d’économie mixte exerçant une activité immobilière outre-mer peuvent bénéficier d’un crédit d’impôt à raison de l’acquisition ou de la construction de logements neufs dans les départements d’outre-mer, lorsqu’ils respectent certaines conditions et notamment les suivantes :
– les logements sont donnés en location nue ou meublée dans les douze mois de leur achèvement ou de leur acquisition et pour une durée au moins égale à cinq ans, à des personnes physiques qui en font leur résidence principale ;
– les bénéficiaires de la location sont des personnes physiques dont les ressources n’excèdent pas des plafonds fixés par décret ;
– le montant des loyers à la charge des personnes physiques ne peut excéder des limites fixées par décret et déterminées en fonction notamment de la localisation du logement.
Selon le 4 de l’article 244 quater X du CGI, ouvrent également droit au bénéfice du crédit d’impôt les travaux de rénovation ou de réhabilitation des logements achevés depuis plus de 20 ans et situés dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville mentionnés aux articles 9-1 de la loi d’orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine du 1er août 2003 ([65])et 5 de la loi de programmation pour la ville et la cohésion urbaine du 21 février 2014 ([66]).
Le taux du crédit d’impôt est fixé à 40 %.
Ce dispositif est applicable aux acquisitions, constructions ou réhabilitations d’immeubles effectuées à compter du 1er juillet 2014 et jusqu’au 31 décembre 2025.
B. Dispositif adoptÉ par le sÉnat
Le Sénat a adopté trois amendements identiques portant article additionnel, à l’initiative de Catherine Conconne (Socialistes & républicains), Marie-Noëlle Lienemann (Communiste, républicain, citoyen et écologiste – CRCE) et Dominique Théophile (Rassemblement des démocrates progressistes et indépendants – RDPI), ayant recueilli des avis défavorables de la commission des finances et du Gouvernement, visant à étendre le champ d’application du crédit d’impôt de l’article 244 quater X du CGI à l’ensemble des logements achevés depuis plus de 20 ans en supprimant la condition de localisation dans un quartier prioritaire de la politique de la ville.
II. La position du Rapporteur gÉNÉral
Le rapporteur général constate que l’article 244 quater X du CGI est avant tout un outil visant le développement de programmes locatifs sociaux neufs construits dans les programmes ultra-marins. Le champ d’application du dispositif n’a été étendu pour les logements anciens qu’en 2020 ([67]), considérant la situation tout à fait particulière outre-mer des quartiers prioritaires de la politique de la ville.
L’extension du dispositif de défiscalisation à l’ensemble des territoires ultra-marins, outre son coût budgétaire important, entraînerait une dilution de l’effort des entreprises privées en direction des quartiers où la rénovation des logements est la plus urgente.
Aussi, il est proposé de supprimer cet article.
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Article 3 octies D (nouveau)
Exclusion de l’octroi de mer de la base d’imposition à la TVA
I. les dispositions adoptÉes par le sÉnat
A. L’État du droit
En Guadeloupe, en Guyane, en Martinique, à Mayotte et à La Réunion, sont soumises à une taxe dénommée octroi de mer les importations de biens et les livraisons de biens effectuées à titre onéreux par les personnes qui les ont produits. Cette taxe est régie par la loi n° 2004-639 du 2 juillet 2004 relative à l’octroi de mer. Pour l’application de cette taxe, l’entrée d’un bien sur le territoire d’une de ces collectivités est considérée comme une importation. Les taux de l’octroi de mer sont fixés par délibération du conseil régional.
Dans chacune des régions de Guadeloupe, de Guyane, de Martinique et de La Réunion, le produit de l’octroi de mer fait l’objet, après un prélèvement pour frais d’assiette et de recouvrement de 2,5 %, d’une affectation annuelle à titre principal à une dotation globale garantie répartie entre les communes et, en Guyane, entre le département et les communes.
L’article 37 de cette loi dispose également que les conseils régionaux de Guadeloupe, de Guyane, de Martinique et de La Réunion peuvent instituer, au profit de la région, un octroi de mer régional ayant la même assiette que l’octroi de mer, au taux maximal de 2,5 %.
Par dérogation à la règle prévue par l’article 267 du CGI précisant que sont à comprendre dans la base d’imposition de la TVA les impôts, taxes, droits et prélèvements de toute nature à l’exception de la TVA elle-même ([68]), et à celle prévue par l’article 292 du même code qui inclut dans la base d’imposition de la TVA à l’importation les autres impositions dues en raison de l’importation, l’octroi de mer et l’octroi de mer régional perçus dans ces collectivités d’outre-mer ne sont pas compris dans la base d’imposition de la TVA ([69]) ([70]).
B. Le dispositif proposÉ
Le présent article résulte de l’adoption, par le Sénat, contre l’avis défavorable de la commission et du Gouvernement, d’un amendement de Mme Victoire Jasmin.
Il exclut de la base d’imposition à la TVA l’octroi de mer et l’octroi de mer régional.
II. La position du rapporteur gÉnÉral
Le rapporteur général propose de supprimer cet article, dont les dispositions sont satisfaites par le droit en vigueur.
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Article 3 octies (supprimé)
Prolongation de la réduction d’impôt en faveur
de la rénovation des logements outre-mer
I. Les dispositions adoptées par l’AssemblÉe nationale
A. état du droit
L’article 199 undecies A du code général des impôts (CGI) prévoit une réduction d’impôt sur le revenu pour les contribuables domiciliés en France au titre de certains investissements immobiliers en Guadeloupe, en Guyane, en Martinique, à Mayotte, à La Réunion, à Saint-Pierre-et-Miquelon, en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, à Saint-Martin, à Saint-Barthélemy, dans les îles Wallis et Futuna et les terres australes et antarctiques françaises.
Cette réduction d’impôt s’applique au montant des travaux de réhabilitation réalisés par une entreprise, à l’exclusion de ceux qui constituent des charges déductibles des revenus fonciers et portant sur des logements achevés depuis plus de vingt ans, situés dans les départements ou collectivités susmentionnés. Cette réduction est également applicable au montant des travaux de confortation de logements contre le risque sismique ou cyclonique.
Pour ces deux types d’investissement, chaque année, la base de la réduction est égale à 20 % des sommes effectivement payées au 31 décembre de l’année au cours de laquelle le droit à réduction d’impôt est né.
La réduction d’impôt est ensuite égale à 18 % de la base. Pour les investissements réalisés en Guadeloupe, en Guyane, en Martinique, à Mayotte et à La Réunion, le taux de 18 % est majoré à 26 % lorsque le logement est situé dans un quartier prioritaire de la politique de la ville.
La réduction est possible pour les investissements réalisés entre la date de promulgation de la loi du 21 juillet 2003 de programme pour l’outre-mer ([71]) et le 31 décembre 2023.
B. Dispositif adoptÉ pâr l’assemblÉe nationale
Le présent article, retenu par le Gouvernement dans l’élaboration du texte sur lequel il a engagé sa responsabilité en application de l’article 49, alinéa 3, de la Constitution, reprend un amendement de nos collègues Max Mathiasin et Olivier Serva (Libertés, indépendants, outre-mer et territoires – LIOT) prévoyant la prolongation jusqu’au 31 décembre 2025 du dispositif fiscal de l’article 199 undecies A du CGI.
C. Dispositif modifié par le SÉNAT
Le Sénat, à l’initiative du rapporteur général de sa commission des finances ayant reçu un avis favorable de la part du Gouvernement, a supprimé cet article.
En effet, l’article 3 septies du présent projet de loi porte déjà une prorogation de l’article 199 undecies A du CGI jusqu’au 31 décembre 2029. De fait, le présent article apparaît moins favorable et en contradiction avec la cohérence du projet de loi de finances en navette.
C’est ainsi que la suppression du présent article a été votée par le Sénat.
II. La position du Rapporteur général
Le rapporteur général considère comme opportune cette mise en cohérence du texte et propose de voter la suppression conforme de cet article à la suite du Sénat.
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Article 3 decies A (nouveau)
Dérogation permettant de faire bénéficier du crédit d’impôt outre-mer les investissements productifs dans les entreprises en difficulté
I. Les dispositions adoptÉes
A. État du droit
L’article 244 quater W du CGI prévoit que les entreprises imposées d’après leur bénéfice réel ou exonérées, exerçant une activité agricole ou une activité industrielle, commerciale ou artisanal, peuvent bénéficier d’un crédit d’impôt à raison des investissements productifs neufs qu’elles réalisent dans un département d’outre-mer pour l’exercice d’une activité ne relevant pas de l’un des secteurs énumérés aux a à l du I de l’article 199 undecies B du CGI, à l’exception des activités mentionnées au I quater. Ainsi, sont éligibles l’acquisition ou la construction d’une immobilisation corporelle, amortissable ou neuve, l’acquisition ou la construction d’un immeuble d’exploitation ou d’un immeuble à usage locatif, un investissement réalisé en crédit-bail et la réhabilitation ou la rénovation d’immeuble.
Le crédit d’impôt s’applique également aux travaux de rénovation et de réhabilitation d’hôtels, de résidences de tourisme et de villages de vacances classés lorsque ces travaux constituent des éléments de l’actif immobilisé, ainsi qu’aux investissements affectés plus de cinq ans par le concessionnaire à l’exploitation d’une concession de service public local à caractère industriel et commercial et réalisés dans des secteurs éligibles.
Par ailleurs, pour les entreprises soumises à l’impôt sur les sociétés qui exercent leur activité dans le département dans lequel l’investissement est réalisé ou pour les organismes mentionnés au 1 du I de l’article 244 quater X du CGI – soit les organismes d’habitations à loyer modéré (à l’exception des sociétés anonymes coopératives d’intérêt collectif pour l’accession à la propriété), les sociétés d’économie mixte exerçant une activité immobilière outre-mer et les organismes concourant aux objectifs de la politique d’aide au logement – le crédit d’impôt s’applique également aux acquisitions ou constructions de logements neufs à usage locatif ou non, situés dans les départements d’outre-mer dans certaines conditions – et aux logements neufs à usage locatif mis à leur disposition.
Le crédit d’impôt est assis sur le montant, hors taxes et hors frais de toute nature, notamment les commissions d’acquisition, à l’exception des frais de transport, d’installation et de mise en service amortissables, des investissements productifs, diminué de la fraction de leur prix de revient financée par une aide publique.
Le taux du crédit d’impôt est fixé à :
– 38,25 % pour les entreprises soumises à l’impôt sur le revenu ;
– 35 % pour les entreprises et les organismes soumis à l’impôt sur les sociétés.
Le taux mentionné de 38,25 % est porté à 45,9 % pour les investissements réalisés en Guyane et à Mayotte, dans les limites définies par les règles européennes relatives aux aides d’État.
Le bénéfice du crédit d’impôt est accordé au titre de l’année au cours de laquelle l’investissement est mis en service.
Ce dispositif est applicable aux investissements mis en service à compter du 1er janvier 2015, et jusqu’au 31 décembre 2025, aux travaux de réhabilitation hôtelière achevés au plus tard à cette date et aux acquisitions d’immeubles à construire et constructions d’immeubles dont les fondations sont achevées au plus tard à cette date, selon le IX de l’article 244 quater W du CGI.
B. Dispositif adoptÉ par le sÉnat
Le Sénat a adopté cinq amendements identiques portant article additionnel, à l’initiative de Stéphane Artano (Rassemblement démocratique et social européen – RDSE), Annick Pétrus (Les Républicains), Viviane Malet (Les Républicains), Victoire Jasmin (Socialistes & Républicains) et Dominique Théophile (Rassemblement des démocrates progressistes et indépendants – RDPI), ayant recueilli des avis favorables de la commission des finances et défavorables de la part du Gouvernement, visant à permettre aux entreprises en difficulté de bénéficier du dispositif fiscal de l’article 244 quater W du CGI.
II. La position du Rapporteur gÉNÉral
Le rapporteur général constate que l’absence de placement de l’article 244 quater W du CGI sous le règlement général d’exemption par catégorie du 17 juin 2014 ([72]) a pour effet de rendre impossible la compatibilité européenne, en l’état, de son extension aux entreprises en difficulté.
C’est en ce sens que X de l’article 244 quater W du CGI – auquel le I du présent article propose de déroger – écarte spécifiquement toute application automatique du présent dispositif de défiscalisation aux entreprises en difficulté.
Face au risque de contentieux européen que le présent article additionnel fait courir à la France, il est proposé de le supprimer.
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Article 3 decies B (nouveau)
Prolongation de l’abattement de TFPB dans les départements d’outre‑mer pour les logements sociaux qui font l’objet de travaux d’amélioration
face aux risques naturels
Cet article a été inséré par le Sénat. Le Rapporteur général propose de le supprimer.
I. Les dispositions adoptÉes par le sÉnat
A. État du droit
Dans les départements d’outre‑mer (Guadeloupe, Guyane, Martinique, Mayotte et La Réunion), les logements sociaux font l’objet d’un abattement de 30 % au titre de la taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB), lorsque ces logements font l’objet de travaux d’amélioration, avec le concours financier de l’État (aides publiques en faveur des logements locatifs), qui ont pour objet de les conforter vis-à-vis de certains risques naturels prévisibles (inondations, mouvements de terrain, avalanches, incendies de forêt, séismes, éruptions volcaniques, tempêtes ou cyclones).
L’abattement est applicable sauf délibération contraire de la commune ou de l’EPCI à fiscalité propre. Il est applicable au titre des cinq années suivant celle de l’achèvement des travaux qui doit intervenir au plus tard le 31 décembre 2021.
Cet abattement est compensé par l’État. Pour chaque commune ou EPCI, l’allocation compensatrice est égale à l’abattement appliqué aux bases de l’année concernée et aux taux de TFPB de l’année précédente. En 2020, les montants exonérés sont faibles : 414 702 euros au total.
B. Dispositif proposÉ
Le Sénat a adopté deux amendements identiques de Mme Catherine Conconne et des membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain et de M. Dominique Théophile (Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants – RDPI) ([73]), contre l’avis défavorable du Rapporteur général et du Gouvernement, qui vise à étendre cet abattement aux logements dont l’achèvement des travaux interviendrait jusqu’au 31 décembre 2026.
Les auteurs de ces amendements estiment que l’actualité récente en matière de risques naturels justifie cette prolongation.
II. La position du Rapporteur gÉNÉral
Le Rapporteur général propose de supprimer cet article.
En effet, le dispositif étant éteint pour les logements dont l’achèvement des travaux est intervenu après le 31 décembre 2021, cet article aurait pour conséquence de faire « revivre » cet abattement fiscal de manière rétroactive, créant une difficulté juridique pour les logements dont l’achèvement des travaux est intervenu en 2022 ou, à tout le moins, un effet d’aubaine, alors qu’il s’agit d’un dispositif incitatif.
En outre, au vu des faibles montants en jeu (moins de 500 000 euros), d’autres dispositifs semblent plus efficaces pour soutenir la construction de logements sociaux et la prévention des risques naturels en outre‑mer.
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Article 3 decies C (nouveau)
Prolongation de la majoration à Mayotte des seuils de revenus
pour le bénéfice des allègements de TFPB
I. Les dispositions adoptÉes par le sÉnat
A. État du droit
Plusieurs allègements à la taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB) sont applicables aux redevables dont les revenus n’excèdent pas certains seuils de revenu fiscal de référence :
– exonération des redevables âgés de plus de 75 ans (article 1391 du CGI) ;
– dégrèvement de 100 euros des redevables de plus de 65 ans (article 1391 B du CGI) ou des redevables hébergées dans certains établissements et n’ayant pas leur autonomie de vie (article 1391 B bis du CGI) ;
– dégrèvement égal à la fraction de la cotisation supérieure à 50 % du montant des revenus (article 1391 B ter du CGI).
À noter que, par ailleurs, les titulaires de l’allocation de solidarité aux personnes âgées (ASPA) sont exonérées de TFPB.
Les seuils de revenu fiscal de référence (RFR), qui sont majorés outre-mer, sont fixés à l’article 1417 du CGI et figurent dans les tableaux suivants. Ils sont indexés chaque année, comme la limite supérieure de la première tranche du barème de l’impôt sur le revenu.
Seuils de revenu pour le bénéfice des allègements à la TFPB
(en euros)
Pour l’application des articles 1391, 1391 B et 1391 B bis |
Métropole |
Martinique, Guadeloupe et Réunion |
Guyane |
Mayotte |
Plafond de revenu pour la 1ère part de quotient familial |
11 276 |
13 343 |
13 950 |
20 907 |
Majoration pour la 1ère demi-part supplémentaire |
3 011 |
3 187 |
3 840 |
5 752 |
Majoration pour les demi-parts supplémentaires suivantes |
3 011 |
3 011 |
4 510 |
|
Pour l’application de l’article 1391 B ter |
Métropole |
Martinique, Guadeloupe et Réunion |
Guyane |
Mayotte |
Plafond de revenu pour la 1ère part de quotient familial |
26 515 |
32 044 |
35 117 |
38 591 |
Majoration pour la 1ère demi-part supplémentaire |
6 195 |
6 797 |
6 797 |
7 471 |
Majoration pour la deuxième demi‑part supplémentaire |
4 877 |
6 481 |
||
Majoration pour la troisième demi-part supplémentaire |
4 877 |
5 787 |
6 361 |
|
Majoration pour les demi‑parts supplémentaires suivantes |
4 877 |
5 358 |
Source : commission des finances à partir de l’article 1417 du CGI.
Les seuils de RFR sont ainsi plus élevés dans les collectivités d’outre‑mer, ce qui étend le bénéfice des allègements des TFPB dans ces territoires. S’agissant de Mayotte, les seuils dérogatoires s’appliquent pour les impositions dues au titre de 2017 à 2022 ([74]).
B. Dispositif proposÉ
Le Sénat a adopté un amendement de M. Mohamed Soilihi et de plusieurs de ses collègues du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants (RDPI), avec l’avis favorable du Rapporteur général et du Gouvernement, qui proroge les seuils dérogatoires de RFR à Mayotte pour l’année 2023. Les auteurs de l’amendement rappellent la situation foncière particulière de Mayotte, un « travail d’ampleur » étant en cours sous l’égide de la commission d’urgence foncière.
II. La position du Rapporteur gÉNÉral
Le Rapporteur général propose d’adopter cet article sans modification.
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Article 3 decies D
Relèvement du seuil de la franchise de TVA et d’octroi de mer pour les petits envois non commerciaux importés outre-mer en provenance de l’UE
I. les dispositions adoptÉes par le sÉnat
A. L’État du droit
En Guadeloupe, en Guyane, en Martinique, à Mayotte et à La Réunion, sont soumises à une taxe dénommée octroi de mer :
– les importations de biens ;
– et les livraisons de biens faites à titre onéreux par les personnes qui y exercent des activités de production.
Cette taxe est régie par la loi n° 2004-639 du 2 juillet 2004 relative à l’octroi de mer. Pour l’application de cette taxe, l’entrée d’un bien sur le territoire d’une de ces collectivités est considérée comme une importation.
Dans chacune des régions de Guadeloupe, de Guyane, de Martinique et de La Réunion, le produit de l’octroi de mer fait l’objet, après un prélèvement pour frais d’assiette et de recouvrement de 2,5 %, à titre principal d’une affectation annuelle à une dotation globale garantie répartie entre les communes et, en Guyane, entre le département et les communes.
De plus, ces collectivités sont, au même titre que les pays tiers, considérées comme territoire d’exportation par rapport à la France métropolitaine et par rapport aux autres États membres de l’UE. Il en découle que l’introduction dans l’une de ces collectivités de biens en provenance de la métropole, d’un autre État membre de l’UE ou d’une autre de ces collectivités est soumise à la TVA, pour autant que la TVA soit applicable dans cette collectivité, ce qui n’est pas le cas en Guyane et à Mayotte ([75]). Les taux de TVA applicables dans les départements de la Guadeloupe, de la Martinique et de La Réunion sont de 8,5 % pour le taux normal et de 2,1 % pour le taux réduit ([76]).
Toutefois, les collectivités de Guadeloupe et de la Martinique forment un territoire fiscal unique au regard de la TVA et de l’octroi de mer, dénommé « marché unique antillais ».
De plus, une franchise d’octroi de mer et de TVA est prévue par l’article 8 de la loi du 2 juillet 2004 précitée pour les importations de biens en provenance d’un État membre de l’UE lorsque leur valeur totale n’excède pas 1 000 euros pour les biens transportés par les voyageurs ou 205 euros pour les biens qui font l’objet de petits envois non commerciaux.
B. Le dispositif proposÉ
Le présent article résulte de l’adoption, par le Sénat, avec l’avis favorable de la commission et contre l’avis défavorable du Gouvernement, d’un amendement de M. Dominique Théophile, membre du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants.
Il relève le plafond de la franchise de TVA et d’octroi de mer pour les petits envois non commerciaux importés outre-mer en provenance de l’UE, le portant de 205 à 400 euros.
II. La position du rapporteur gÉnÉral
Le rapporteur général approuve la disposition adoptée par le Sénat.
Il propose cependant de reporter son entrée en vigueur au 1er avril 2023 afin de laisser aux opérateurs un délai suffisant pour adapter leurs procédures.
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Article 3 decies
Prorogation en 2023 du taux majoré de la réduction d’impôt IR-PME
I. Les dispositions adoptÉes par l’AssemblÉe nationale en premiÈre lecture
A. L’État du droit
● Prévu à l’article 199 terdecies-0 A du code général des impôts (CGI), le dispositif « Madelin » ou « IR-PME » ([77]) ouvre droit à une réduction d’impôt sur le revenu au titre de la souscription en numéraire au capital initial ou aux augmentations de capital de certaines petites et moyennes entreprises (PME) non cotées.
La société bénéficiaire doit satisfaire notamment des conditions d’âge (exercer son activité sur un marché depuis moins de 7 ans ou avoir un besoin d’investissement en financement des risques supérieur à 50 % de son chiffre d’affaires annuel moyen des cinq années précédentes).
En cas d’investissements directs, les versements sont retenus dans la limite annuelle de 50 000 euros pour une personne seule (100 000 euros pour un couple) avec possibilité de report de l’excédent pendant quatre ans.
Ces limites sont ramenées à 12 000 et 24 000 euros en cas d’investissement via un fonds d’investissement de proximité (FIP) ou un fonds commun de placement dans l’innovation (FCPI) sans possibilité de report de l’excédent.
Les titres doivent être conservés pendant au moins cinq ans.
L’IR-PME fait partie des dispositifs fiscaux dont le cumul ne peut aboutir à une réduction d’impôt sur le revenu supérieure à 10 000 euros ([78]). Pour les seuls investissements directs, l’éventuel excédent peut cependant être reporté sur l’IR dû au titre des années suivantes, jusqu’à la cinquième année inclusivement.
● Le taux de droit commun de la réduction d’impôt est de 18 % du montant des versements effectués. Cependant, dans le contexte de la suppression de l’impôt sur la fortune (ISF) en 2018 qui a entraîné la suppression des réductions d’ISF pour investissement dans les PME, le taux de la réduction d’impôt a été porté de façon temporaire à 25 % ([79]).
L’entrée en vigueur de ce taux bonifié, conditionnée à la notification par la Commission européenne d’une décision de conformité au droit de l’Union européenne, a été plusieurs fois reportée en l’absence de validation ([80]).
Le taux bonifié a finalement trouvé à s’appliquer une première fois à compter du 10 août 2020 puis a été prorogé, sous les mêmes conditions de validation par la Commission européenne, jusqu’au 31 décembre 2021 ([81]), puis jusqu’au 31 décembre 2022 ([82]).
● La réduction d’impôt et sa bonification s’appliquent également aux investissements dans les entreprises solidaires d’utilité sociale (ESUS), éligibles à l’IR-PME selon un volet spécifique, défini à l’article 199 terdecies-0 AA du CGI qui renvoie à l’article 199 terdecies-0 A du CGI.
Depuis la loi de finances pour 2020, les foncières solidaires chargées d’un service économique d’intérêt général (SIEG) ne sont plus éligibles à l’IR-PME, contrairement aux autres ESUS, mais bénéficient d’un dispositif spécifique établi à l’article 199 terdecies-0 AB du CGI, appliquant le même taux de 18 % que l’IR‑PME, qui fait l’objet de la même bonification temporaire à 25 % ([83]).
B. Le dispositif proposÉ
● Le présent article résulte d’un amendement de M. Paul Midy, sous‑amendé par le rapporteur général ([84]), adopté en séance par l’Assemblée nationale.
Les I et III prorogent jusqu’à la fin de l’année 2023, le taux bonifié de 25 % applicable à l’IR-PME, ainsi qu’aux ESUS. Comme pour les précédentes prorogations du taux majoré, la bonification s’appliquera aux versements effectués à compter d’une date fixée par décret, qui ne peut être postérieure de plus de deux mois à la date de réception par le Gouvernement de la réponse de la Commission européenne permettant de considérer la disposition lui ayant été notifiée comme étant conforme au droit de l’Union européenne.
Le II proroge également jusqu’à la fin de l’année 2023, le taux bonifié de 25 % applicable aux investissements dans les foncières solidaires.
Enfin le IV prévoit que le Gouvernement remettra au Parlement, avant le 30 septembre 2023, un rapport d’évaluation des différents volets de la réduction d’impôt.
II. Les modifications apportÉes par le SÉnat
Sur avis défavorable du Gouvernement, le Sénat a adopté un premier amendement de la commission ([85]) qui porte à 30 % le taux bonifié temporaire de la réduction d’impôt, au motif d’en renforcer le caractère incitatif.
Sur avis favorable du Gouvernement, le Sénat a adopté un second amendement de la commission ([86]) qui prévoit que le rapport d’évaluation « identifie et évalue les pistes d’évolution pour renforcer le soutien aux fonds propres des entreprises visées par ces dispositifs ».
III. La position du Rapporteur gÉnÉral
Des amendements portant à 30 %, de façon temporaire ou permanente, le taux de la réduction d’impôt IR-PME a été rejeté en séance publique par l’Assemblée nationale en première lecture.
Il serait en effet hasardeux de remettre en cause les équilibres actuels, alors que près de trois ans d’échanges avec la Commission européenne ont été nécessaires pour établir la conformité de la réduction d’impôt au régime des aides d’État et pour permettre d’augmenter temporairement son taux à 25 %.
En conséquence, le rapporteur général propose d’adopter cet article dans sa rédaction issue de l’Assemblée nationale, tout en conservant la précision utilement apportée par le Sénat relative au contenu du rapport d’évaluation de la réduction d’impôt IR-PME.
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Article 3 undecies (supprimé)
Précisions sur la déclaration nécessaire au titre du crédit d’impôt
service à la personne
I. Les dispositions adoptÉes par l’AssemblÉe nationale
A. État du droit
L’article 199 sexdecies du code général des impôts (CGI) prévoit que les dépenses exposées par un contribuable domicilié en France au titre de l’emploi d’un salarié à domicile ouvrent droit à un crédit d’impôt égal à 50 % de leur montant. La liste des services concernés est définie aux articles L. 7231-1 et D. 7231-1 du code du travail.
Le montant annuel des dépenses ouvrant droit à cet avantage fiscal est retenu dans la limite de 12 000 euros par foyer, soit un crédit d’impôt d’un montant maximal de 6 000 euros. Ce plafond de dépenses est majoré de 1 500 euros par enfant à charge ou pour tout autre membre du foyer fiscal âgé de plus de 65 ans, sans pouvoir excéder 15 000 euros. Des plafonds spécifiques sont prévus pour certains services ([87]).
Lors de sa déclaration annuelle de revenus, le contribuable renseigne le montant des dépenses engagées pour l’emploi du salarié à domicile, déduction faite des aides reçues pour l’emploi du salarié, ce qui permet à l’administration fiscale de calculer le montant du crédit d’impôt.
Le 6 de l’article 199 sexdecies du CGI prévoit que le contribuable doit être en mesure de présenter, à la demande de l’administration fiscale, les pièces justifiant du paiement des salaires et des cotisations sociales, de l’identité du bénéficiaire, ainsi que de la nature et du montant des prestations réellement effectuées payées à l’association, l’entreprise ou l’organisme mandataire.
B. Dispositif proposÉ
L’Assemblée nationale a adopté en première lecture un amendement de la commission des finances, initialement déposé par notre collègue Christine Pirès-Beaune (Socialistes et apparentés), qui a été retenu par le Gouvernement dans le texte sur lequel il a engagé sa responsabilité au titre de l’article 49, alinéa 3, de la Constitution malgré son avis défavorable au banc.
Cet amendement modifie le 6 de l’article 199 sexdecies du CGI afin de prévoir que le contribuable indique, dans sa déclaration de revenus, les services au titre desquels les sommes ouvrant droit au bénéfice du crédit d’impôt ont été versées. L’objectif poursuivi par Mme Christine Pirès-Beaune depuis plusieurs années est de renforcer les informations disponibles sur la nature des services à la personne pour lesquels les sommes versées ouvrent droit à l’avantage fiscal susmentionné.
II. Les modifications apportÉes par le SÉnat
Le Sénat a adopté, avec un avis défavorable du Gouvernement, deux amendements identiques de sa commission des finances et de M. Emmanuel Capus (Les Indépendants – République et Territoires) et plusieurs de ses collègues, qui suppriment ce nouvel article 3 undecies.
Le Rapporteur général du Sénat justifie cette suppression par l’alourdissement des obligations déclaratives des ménages induit par cette disposition, qui viendrait s’opposer aux efforts de simplification réalisés depuis vingt ans dans ce domaine (dématérialisation de la déclaration de revenus ([88]), généralisation de la déclaration pré-remplie en 2006, allègement des pièces justificatives ([89])et mise en œuvre de la « déclaration automatique » ([90])).
Par ailleurs, il rappelle que depuis le 21 septembre 2021, les particuliers employeurs utilisant le chèque emploi service universel (CESU) des Urssaf pour la déclaration et le paiement de leurs cotisations sociales ou le service « CESU + » pour la prise en charge de l’intégralité du processus de rémunération du salarié, doivent déclarer la nature de l’activité principale réalisée par leur salarié dans une liste déroulante du formulaire de déclaration. Il considère que ces informations constituent une première base de données exploitables relatives à la nature des services à domicile utilisés par les contribuables.
III. La position du Rapporteur gÉNÉral
Le Rapporteur général considère qu’il est nécessaire de renforcer l’information disponible sur la nature des activités de services à la personne qui ouvrent effectivement droit au bénéfice du crédit d’impôt au titre de l’emploi d’un salarié à domicile. En effet, ce crédit d’impôt est, hors effets de périmètre, la deuxième dépense fiscale la plus coûteuse pour nos finances publiques, derrière le crédit d’impôt en faveur de la recherche. Il bénéficiait ainsi à 4,3 millions de ménages en 2021 pour un coût de 4,7 milliards d’euros ([91]).
S’il se félicite de l’existence de la déclaration de la nature de l’activité du salarié par l’employeur dans le cadre des dispositifs CESU et CESU +, le Rapporteur général rappelle toutefois que seule l’activité principale réalisée par le salarié est renseignée dans le formulaire de déclaration, sans qu’il soit possible de préciser, le cas échéant, l’exercice d’autres activités. Il s’interroge cependant sur le rapport « coût/avantage » induit par cette obligation déclarative supplémentaire.
Toutefois, cette disposition ayant été adoptée à l’Assemblée nationale contre l’avis du Gouvernement et retenue par le Gouvernement dans le texte sur lequel il a engagé sa responsabilité au titre de l’article 49, alinéa 3, de la Constitution, le Rapporteur général propose de confirmer cette position et de rétablir cet article dans sa version adoptée par l’Assemblée nationale.
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Article 3 terdecies
Hausse du plafond applicable pour le crédit d’impôt
pour frais de garde d’enfants de moins de six ans
I. Les dispositions adoptÉes par l’AssemblÉe nationale
A. État du droit
L’article 200 quater B du code général des impôts (CGI) prévoit que les dépenses supportées par les contribuables domiciliés en France pour la garde à l’extérieur du domicile des enfants de moins de six ans dont ils ont la charge ouvrent droit à un crédit d’impôt égal à 50 % de leur montant.
Le montant annuel des dépenses ouvrant droit à cet avantage fiscal est retenu dans la limite de 2 300 euros par enfant à charge, soit un crédit d’impôt d’un montant maximal de 1 150 euros. Lorsque les parents sont séparés ou divorcés et que la charge de l’enfant est également répartie entre les deux, le plafond est abaissé à 1 150 euros, soit un montant maximal de crédit d’impôt de 575 euros, pour chaque parent.
Les dépenses retenues s’entendent des sommes versées à un assistant maternel agréé en application des articles L. 421-3 et suivants du code de l’action sociale et des familles, à un établissement de garde répondant aux conditions prévues à l’article L. 2324-1 du code de la santé publique ou à des personnes ou établissements établis dans un autre État membre de la Communauté européenne qui satisfont à des réglementations équivalentes.
En 2021, cette dépense fiscale bénéficiait à 1,8 million de ménages, pour un coût estimé à 1,1 milliard d’euros.
B. Dispositif proposÉ
L’Assemblée nationale a adopté en première lecture un amendement de notre collègue Mathieu Lefèvre et du groupe Renaissance, avec un avis favorable du Gouvernement, qui relève de 2 300 euros à 3 500 euros le plafond du montant des dépenses retenues ouvrant droit au bénéfice du crédit d’impôt pour frais de garde d’enfants de moins de six ans. Le plafond est également relevé, à 1 750 euros, pour les contribuables divorcés ou séparés ayant la charge égale de leur enfant. Cet amendement a été retenu par le Gouvernement dans le texte sur lequel il a engagé sa responsabilité au titre de l’article 49, alinéa 3, de la Constitution.
II. Les modifications apportÉes par le SÉnat
Le Sénat a adopté, avec un avis défavorable du Gouvernement et un avis favorable de sa commission des finances, deux amendements identiques de Mme Christine Lavarde (Les Républicains) et de Mme Catherine Conconne et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, qui prévoit que lorsque les dépenses supportées par les contribuables pour la garde d’enfants de moins de six ans sont inférieures au plafond rehaussé à 3 500 euros, les contribuables peuvent bénéficier du même crédit d’impôt pour leurs dépenses au titre des frais de garde d’enfants âgés de moins de douze ans dont ils ont la charge, jusqu’à ce qu’ils atteignent la limite annuelle de 3 500 euros.
Le Gouvernement a chiffré le coût de cette mesure à 250 millions d’euros dans son amendement visant à traduire, dans le tableau relatif à l’équilibre du budget de l’État, l’incidence des votes du Sénat intervenus au cours de la discussion de la première partie du projet de loi de finances pour 2023.
III. La position du Rapporteur gÉNÉral
Le Rapporteur général se félicite du relèvement à 3 500 euros du plafond de dépenses ouvrant droit au bénéfice du crédit d’impôt pour les frais de garde d’enfants de moins de six ans. Le plafond actuel étant fixé à 2 300 euros depuis 2006, il est en effet justifié de tenir compte de l’évolution du coût des prestations de garde et des revalorisations salariales des personnels, afin de soutenir le pouvoir d’achat des familles de jeunes enfants.
Il rappelle que la hausse de ce plafond, dont le coût est estimé à 200 millions d’euros par le Gouvernement, représente un effort substantiel, dans un contexte où la maîtrise de nos finances publiques devient un enjeu chaque jour plus prégnant.
Si cet effort se concentre de façon logique sur les frais de garde des plus jeunes enfants, les besoins étant plus importants avant l’entrée à l’école primaire, il est nécessaire de rappeler que les contribuables peuvent bénéficier d’un autre avantage fiscal pour la garde de leur enfant de plus de six ans à domicile, dans la limite d’un plafond annuel de 12 000 euros de dépenses, majoré de 1 500 euros par enfant à charge.
Le Rapporteur général considère ainsi que la mesure initialement adoptée par l’Assemblée nationale est à la fois juste et équilibrée et propose de rétablir le présent article dans sa version adoptée par l’Assemblée nationale.
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Article 3 quaterdecies A (nouveau)
Pérennisation et renforcement du crédit d’impôt pour les dépenses
de remplacement de certains agriculteurs pour congé
I. Les dispositions adoptÉes par le SÉnat
A. État du droit
L’article 200 undecies du code général des impôts (CGI) prévoit un crédit d’impôt au titre des dépenses supportées par un agriculteur afin d’assurer son remplacement par un tiers durant une période de congé, entre le 1er janvier 2006 et le 31 décembre 2024. Le bénéfice du crédit d’impôt est accordé à la condition que l’activité exercée par l’agriculteur requière sa présence quotidienne sur l’exploitation et que son remplacement ne fasse pas l’objet d’une prise en charge au titre d’une autre législation.
Le crédit d’impôt est réservé aux exploitants et associés imposés dans la catégorie des bénéfices agricoles mais aucune condition tenant au régime d’imposition (régime micro-BA ou régime réel d’imposition) de l’exploitant n’est exigée.
Le crédit d’impôt est égal à 50 % des dépenses effectivement supportées, dans la limite par an de quatorze jours de remplacement pour congé. Ce taux est porté à 60 % lorsque les dépenses sont engagées pour un congé lié à une maladie ou un accident du travail. Pour ce calcul, le coût d’une journée de remplacement est plafonné à quarante-deux fois le taux horaire du minimum garanti mentionné à l’article L. 3231-12 du Code du travail.
Le bénéfice du crédit d’impôt est subordonné au respect du règlement (UE) n° 1408/2013 de la Commission, du 18 décembre 2013, relatif à l’application des articles 107 et 108 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne aux aides de minimis dans le secteur de l’agriculture. Le paragraphe 2 de l’article 3 de ce règlement précise que le montant total des aides de minimis octroyées par État membre à une entreprise unique dans le secteur de l’agriculture ne peut excéder 15 000 euros sur une période de trois exercices fiscaux.
Ce crédit d’impôt est exclu du champ d’application du plafonnement global des avantages fiscaux prévu par l’article 200-0 A du CGI.
B. Dispositif proposÉ
Le présent article adopté par le Sénat malgré des avis défavorables de sa commission des finances et du Gouvernement, a été introduit par un amendement de M. Laurent Duplomb (Les Républicains) et plusieurs de ses collègues. Cet amendement a pour objectif de renforcer l’avantage fiscal issu du crédit d’impôt au titre des dépenses engagées pour assurer le remplacement de certains agriculteurs pour congés :
– d’une part, il pérennise le dispositif en supprimant sa date d’échéance aujourd’hui fixée au 31 décembre 2024 ;
– d’autre part, il porte à un taux unique de 66 % le crédit d’impôt pour les dépenses supportées en cas de congé et celui pour les dépenses engagées en cas de congé pour maladie ou accident du travail.
Dans son amendement à l’article d’équilibre, le Gouvernement a chiffré cette modification de l’article 200 undecies du CGI à 5 millions d’euros pour l’année 2023.
II. La position du Rapporteur gÉNÉral
Le Rapporteur général rappelle son attachement au bornage dans le temps des dépenses fiscales, qui s’apparente à une bonne pratique en termes de gestion des finances publiques et permet au Parlement de se prononcer, à échéance régulière et après une analyse ou évaluation du dispositif, sur l’opportunité de le conserver. Ainsi, le crédit d’impôt pour les dépenses de remplacement de certains agriculteurs pour congés a été prorogé jusqu’au 31 décembre 2024 par l’article 77 de la loi de finances pour 2022. À cette occasion et suite aux recommandations du rapport écrit par nos collègues sénateurs Henri Cabanel et Françoise Férat ([92]), le taux du crédit d’impôt a été porté à 60 % pour les dépenses engagées pour assurer un remplacement pour congé en raison d’une maladie ou d’un accident du travail.
Soucieux de garantir une certaine stabilité fiscale et dans l’attente de la réalisation d’une évaluation du dispositif d’ici la fin de l’année 2024, le Rapporteur général recommande de supprimer le présent article.
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Article 3 quaterdecies
Extinction du crédit d’impôt pour un premier abonnement
à un titre de presse
I. Les dispositions adoptÉes par l’AssemblÉe nationale
A. État du droit
L’article 200 sexdecies du code général des impôts (CGI), instauré par la troisième loi de finances rectificative pour 2020 ([93]), prévoit un crédit d’impôt sur les dépenses supportées au titre du premier abonnement à une publication ou à un service de presse en ligne qui présente le caractère d’information politique et générale. L’abonnement doit être souscrit pour une année minimum et le crédit d’impôt s’applique aux abonnements aux publications au maximum trimestrielles.
Initialement ouvert à tous les ménages, sans condition de revenu, et d’un taux égal à 30 % des dépenses supportées, ce crédit d’impôt a été soumis à une condition de revenu lors de sa prorogation par la loi de finances pour 2022 jusqu’au 31 décembre 2023 ([94]). Le B du I de l’article 200 sexdecies du code général des impôts prévoit ainsi que le montant des revenus du foyer fiscal ne doit pas excéder 24 000 euros pour une part de quotient familial, ce plafond étant majoré de 25 % par demi-part supplémentaire.
L’application effective de ce dispositif et sa prorogation ont été soumises à une décision de conformité au droit de l’Union européenne en matière d’aides d’État par la Commission européenne, ce qui a conduit à des entrées en vigueur différées ([95]).
Ce recentrage du dispositif a conduit à une diminution significative de son coût estimé, qui est passé de 60 millions d’euros en 2021 à 3 millions d’euros en 2022 et 2023.
B. Dispositif proposÉ
L’Assemblée nationale a adopté en première lecture un amendement de M. Denis Masséglia (Renaissance), avec un avis favorable de la commission des finances et du Gouvernement, qui prévoit d’avancer la date d’extinction du dispositif au 31 décembre 2022 compte tenu de son caractère inefficace. Cet amendement a été retenu par le Gouvernement dans le texte sur lequel il a engagé sa responsabilité au titre de l’article 49, alinéa 3, de la Constitution.
II. Les modifications apportÉes par le SÉnat
Confirmant la position de sa commission des finances, le Sénat a adopté, avec un avis favorable du Gouvernement, un amendement de coordination.
III. La position du Rapporteur gÉNÉral
Le Rapporteur général salue le travail effectué par son collègue Denis Masséglia, rapporteur spécial des crédits de la mission Médias, livre et industries culturelles auxquels est rattaché le crédit d’impôt pour un premier abonnement de presse, qui a repéré et proposé la suppression d’une dépense fiscale inefficace. Cette démarche s’inscrit pleinement dans celle du Gouvernement et de la majorité qui a pour objectif de rationaliser les dépenses fiscales inefficientes.
Le Sénat ayant adopté un amendement de coordination qui améliore la rédaction du présent article, le Rapporteur général propose l’adoption de cet article dans sa version issue du Sénat.
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Article 3 sexdecies (supprimé)
Application du droit d’enregistrement pour cession de droits sociaux
aux opérations d’apport ou de cession des entreprises individuelles
ayant opté pour le régime de l’impôt sur les sociétés
I. Les dispositions adoptÉes par l’AssemblÉe nationale en premiÈre lecture
A. L’État du droit
● Établi à l’article L. 526-22 du Code de commerce par la loi du 14 février 2022 en faveur de l’activité professionnelle indépendante ([96]), le régime de l’entrepreneur individuel vise à permettre à l’entrepreneur de ne plus répondre de ses dettes professionnelles que sur son patrimoine professionnel.
La création de l’entreprise individuelle, qui n’est pas une personne morale et ne possède pas de personnalité juridique, a conduit à mettre fin au régime de l’entrepreneur individuel à responsabilité limitée (EIRL), créé en 2010 ([97]), qui visait le même objectif. Les EIRL qui existaient avant l’entrée en vigueur de la loi peuvent néanmoins continuer leur activité sous ce régime.
● La loi de finances pour 2022 ([98]) a établi, à l’article 1655 sexies du code général des impôts (CGI), la possibilité pour l’entrepreneur individuel, sans modifier son statut juridique, d’être fiscalement assimilé à une société (entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée – EURL – ou entreprise d’exploitation agricole à responsabilité limitée – EARL).
Par application de l’article 206 du CGI, ceci a pour conséquence de permettre à l’entrepreneur individuel d’opter pour un régime d’impôt sur les sociétés (IS), qui prévoit des aménagements qu’on ne retrouve pas dans le cadre de l’impôt sur le revenu auquel ces entrepreneurs sont soumis par défaut, en tant que personnes physiques. Ceci pallie la disparition de l’EIRL qui permettait déjà cette option.
● Si l’article 1655 sexies du CGI précise les autres conséquences fiscales de l’assimilation de l’entrepreneur individuel à une société, par exemple en matière de plus-value réalisée au titre des biens utiles à l’exercice de l’activité professionnelle, ou en cas de liquidation, il existe une incertitude concernant les droits de mutation à titre onéreux (DMTO) applicables en cas de cession de tout ou partie de l’entreprise individuelle.
Pour la perception des DMTO sur les cessions d’entreprises, deux régimes sont en effet applicables.
● D’une part, les cessions de fonds de commerce et de clientèles et conventions assimilées (articles 719 du CGI) dont l’assiette est le prix de la vente ([99]) mais qui n’inclut pas les créances et dettes résultant de l’exploitation, le numéraire en caisse, les immeubles et les valeurs mobilières et droits sociaux en portefeuille – ces éléments ne faisant pas partie du fonds de commerce.
L’article 719 du CGI fixe le barème des tarifs applicables au profit de l’État, auxquels s’ajoutent des taxes additionnelles établies au profit des communes (article 1584 du CGI) et des départements (article 1596 du CGI).
Tarifs des DMTO applicables aux cessions de fonds de commerce
(en pourcentages)
Fraction de la valeur vénale ou du prix d’achat |
État |
Département |
Commune |
Total |
Inférieure à 23 000 euros |
0 |
0 |
0 |
0 |
Entre 23 000 et 107 000 euros |
2 |
0,6 |
0,4 |
3 |
Entre 107 000 et 200 000 euros |
0,6 |
1,4 |
1 |
3 |
Supérieure à 200 000 euros |
2,6 |
1,4 |
1 |
5 |
Source : Commission des finances, d’après les articles 719, 1584 et 1596 du CGI.
● D’autre part, les cessions de droits sociaux (articles 726 du CGI) avec pour assiette la valeur nette des parts cédées, après déduction des emprunts contractés. Les taux d’imposition varient selon la nature de la cession :
– au 1° de l’article 726, 0,1 % pour les cessions d’actions, de parts de fondateurs ou de parts bénéficiaires ;
– au 1° bis, 3 % pour les cessions de parts sociales dans les sociétés dont le capital n’est pas divisé en action ;
– au 2°, 5 % pour les cessions de participations dans des personnes morales à prépondérance immobilière.
B. Le dispositif proposÉ
● Lors de l’examen en première lecture, l’Assemblée nationale a adopté, sur avis favorable du Gouvernement et du rapporteur général, un amendement de M. Jean-Paul Mattéi ([100]) qui vise à clarifier le régime des DMTO applicables à l’entrepreneur individuel.
Il insère, à l’article 726 du CGI, un I bis qui assimile à des cessions de droits sociaux, les cessions d’entreprises individuelles ayant exercé l’option d’imposition à l’IS par application de l’article 1655 sexies. Sont également visées les EIRL encore en activité.
II. Les modifications apportÉes par le SÉnat
Sur proposition de la commission ([101]), et sur avis défavorable du Gouvernement, le Sénat a supprimé le présent article.
Le Sénat a relevé qu’il résulterait de la réforme proposée une perte de recettes pour les communes et les départements qui ne percevraient plus une partie des droits d’enregistrement au titre des cessions de fonds de commerce. Sans pour autant la chiffrer, le Sénat a cependant estimé que cette perte de recettes serait faible.
Considérant qu’il serait difficile d’assimiler, pour l’application des DMTO, la cession d’une entreprise individuelle à celle de droits sociaux, dès lors que l’entreprise individuelle ne dispose pas de capital social mais d’un patrimoine professionnel, le Sénat a estimé qu’il en résulterait des incertitudes quant au mode de calcul de l’assiette des droits et quant au taux applicable parmi ceux mentionnés à l’article 726 du CGI.
III. La position du Rapporteur gÉnÉral
En permettant de soumettre la cession d’une entreprise individuelle ayant opté pour l’imposition à l’IS au régime des DMTO prévu pour les droits sociaux, le présent article tire les conséquences de l’assimilation fiscale à une société prévue par la loi de finances pour 2022.
Cela met fin à une inégalité de traitement entre entreprises individuelles et sociétés, au regard du choix entre la taxation des fonds de commerce et le régime de la cession des droits sociaux.
Les difficultés techniques évoquées par le Sénat paraissent pouvoir être surmontées.
Même en l’absence de « parts sociales », le renvoi à l’article 726 du CGI revient à asseoir les DMTO sur le prix, net des emprunts contractés, de l’entreprise au moment de sa cession, puisque, selon les termes du II de cet article, le droit d’enregistrement est « assis sur le prix exprimé et le capital des charges qui peuvent ajouter au prix ou sur une estimation des parties si la valeur réelle est supérieure au prix augmenté des charges ». L’assiette des droits peut donc être définie sans difficulté.
De même, il en résulte l’application du taux de 3 % puisque l’entreprise individuelle ne dispose pas d’un capital « divisé en actions », ou du taux de 5 % en cas d’activité à prépondérance immobilière.
Au besoin, des clarifications pourront être utilement apportées par la doctrine administrative.
En conséquence, le rapporteur général propose de rétablir cet article adopté par l’Assemblée nationale en première lecture.
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Article 3 septdecies
Relèvement de l’exonération de droit de mutation à titre gratuit sur les biens ruraux donnés à bail sous condition de durée de détention
I. Les dispositions adoptÉes par l’AssemblÉe nationale en premiÈre lecture
● L’article 793 du code général des impôts (CGI) prévoit une exonération partielle de droits de mutation à titre gratuit, c’est-à-dire de droits de donation et de droits de succession, pour :
– les biens donnés à bail à long terme, ou à bail cessible, dans les conditions prévues par le code rural et de la pêche maritime, pour les trois quarts de leur valeur ([102]),
– les parts des groupements fonciers agricoles et celles des groupements agricoles fonciers, à concurrence des trois quarts de la fraction de la valeur nette des biens donnés à bail à long terme ou à bail cessible ([103]).
● L’article 793 bis du CGI subordonne ces exonérations partielles à la condition que le bien reste la propriété du donataire, héritier ou légataire pendant cinq ans à compter de la date de la transmission à titre gratuit. Lorsque cette condition n’est pas respectée, les droits sont rappelés, majorés de l’intérêt de retard.
Le même article prévoit que lorsque la valeur des biens transmis excède 300 000 euros, l’exonération est ramenée à 50 % au-delà de cette limite.
● Le présent article résulte d’un amendement de M. Jean-Paul Mattéi et de membres du groupe MODEM ([104]), adopté sur avis favorable du Gouvernement et du rapporteur général, qui porte à 500 000 euros la limite jusqu’à laquelle s’applique l’exonération de 75 %, sous condition, dans ce cas, de conservation du bien pour une durée supplémentaire de cinq ans, soit dix ans au total.
II. Les modifications apportÉes par le SÉnat
Outre un amendement de coordination ([105]) proposé par la commission, adopté sur avis favorable du Gouvernement, le Sénat a adopté, sur avis défavorable du Gouvernement, un amendement de la commission ([106]) qui réduit à 3 années la durée de conservation supplémentaire permettant de bénéficier du taux maximal d’exonération jusqu’à 500 000 euros.
Pour bénéficier du nouveau seuil majoré d’exonération de 75 %, l’obligation de conservation applicable serait ainsi de 8 ans et non de 10 ans.
III. La position du Rapporteur gÉnÉral
Le rapporteur général souligne que l’Assemblée nationale a procédé à un relèvement sensible du seuil d’exonération de 75 %, trois ans à peine après un premier relèvement de 101 897 à 300 000 euros opéré par la loi de finances pour 2019 ([107]).
Alors que le relèvement de seuil opéré il y a trois ans ne s’était pas accompagné d’un durcissement de la condition de durée de conservation du bien transmis, fixer une condition de conservation de 10 ans paraît aujourd’hui proportionné à l’importance de l’avantage fiscal accordé.
En conséquence, le rapporteur général propose de rétablir la rédaction adoptée par l’Assemblée nationale, tout en conservant la modification de coordination introduite par le Sénat, et moyennant un amendement de coordination supplémentaire.
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Article 3 octodecies A (nouveau)
Possibilité d’accord tacite de l’administration sur une demande de rescrit fiscal portant sur l’appréciation du caractère animateur d’une holding
I. Les dispositions adoptÉes par le sÉnat
A. État du droit
● Le « rescrit fiscal » résulte de l’article L. 80 A du livre des procédures fiscales (LPF), qui prévoit que les prises de position de l’administration fiscale l’engagent envers le contribuable qui les a appliquées, qu’il s’agisse de l’interprétation générale d’un texte fiscal par des instructions ou circulaires de l’administration, ou de réponses de l’administration aux questions du contribuable sur l’application des règles fiscales et sur sa situation à leur égard.
La procédure de rescrit est précisée par l’article L. 80 B du LPF.
Le 1° du L. 80 B vise, de façon générale, les prises de position formelles de l’administration sur « l’appréciation d’une situation de fait au regard d’un texte fiscal » et prévoit que l’administration « se prononce dans un délai de trois mois lorsqu’elle est saisie d’une demande écrite, précise et complète par un redevable de bonne foi ». Dans ce cas, l’absence de réponse de l’administration vaut décision de refus.
Cependant, les items suivants du L. 80 B définissent les situations dans lesquelles l’absence de réponse dans un délai déterminé, de trois mois ou six mois selon les cas, emportent accord tacite de l’administration. C’est le cas, notamment, de questions portant sur l’éligibilité d’un projet de recherche au crédit d’impôt recherche (aux 3° et 3° bis du L. 80 B), de la qualification d’une entreprise comme jeune entreprise innovante (au 4°), de l’assurance que le contribuable ne dispose pas en France d’un établissement stable (au 6°) ou de la qualification des revenus professionnels du contribuable comme bénéfices industriels et commerciaux ou bénéfices des professions libérales (au 8°).
● Une « holding » est la dénomination usuelle d’une société financière par son activité et son actif, qui prend des participations dans d’autres sociétés généralement afin d’en assurer le contrôle et la direction.
Qualifier une holding d’« animatrice » permet de l’assimiler fiscalement aux sociétés « opérationnelles » qu’elle contrôle, pour l’application de mesures fiscales favorables réservées aux sociétés ayant une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale.
Le II de l’article 966 du code général des impôts (CGI) assimile par exemple à l’activité de sociétés commerciales, exclues de l’assiette de l’impôt sur la fortune immobilière (IFI), l’activité de sociétés qui, « outre la gestion d’un portefeuille de participations, participent activement à la conduite de la politique de leur groupe et au contrôle de leurs filiales et rendent, le cas échéant et à titre purement interne, des services spécifiques, administratifs, juridiques, comptables, financiers et immobiliers ».
La notion de holding animatrice trouve à s’appliquer notamment pour le régime de faveur des droits de mutation à titre gratuit pour les transmissions d’entreprises dans le cadre d’un « Pacte Dutreil » (article 787 B du CGI) ou pour l’abattement fixe applicable aux gains de cession de titres de PME réalisés par les dirigeants lors de leur départ à la retraite (article 150-0 D ter du CGI).
Le CGI ne fournit pas de définition générale du caractère animateur d’une holding, son identification précise relevant d’un faisceau d’indices établi le plus souvent au cas par cas, par la doctrine administrative et la jurisprudence.
Exemple de faisceau d’indices utilisé par le juge pour apprécier
l’animation effective de la filiale.
Dans une décision du 13 juin 2018 ([108]) relative à l’élégibilité d’une holding à un abattement sur plus values mobilières alors prévu par l’article 150-0 D bis du CGI, le Conseil d’État a identifié le caractère animateur de la holding en faisant preuve d’un pragmatisme souligné par de nombreux spécialistes du droit.
Le Conseil d’État a en effet reconnu, dans le strict respect de la loi, que la holding pouvait détenir des participations minoritaires non « animées » dès lors que les participations « animées » représentent son activité principale.
En l’espèce, le Conseil d’État a fondé sa décision sur la part dans l’actif total de la participation et non sur les éventuels revenus des différentes filiales.
D’un point de vue pratique, il a par ailleurs relevé que le président-directeur général de la holding présidait également la filiale, que des personnalités indépendantes spécialisées dans l’activité de la filiale siégeaient au conseil d’administration de la holding et qu’une convention d’assistance en matière administrative et en matière de stratégie avait été signée (et non une convention d’animation).
B. Dispositif proposÉ
Le présent article résulte d’un amendement de M. Serge Babary et de membres du groupe Les Républicains ([109]) adopté par le Sénat sur un avis favorable de la commission des finances et un avis défavorable du Gouvernement.
Il instaure, dans un 9° ter inséré à l’article L. 80 B du LPF, une procédure spécifique de rescrit portant sur le fait de savoir « si une société exerce une activité de holding animatrice (…) le cas échéant à titre prépondérant »
L’absence de réponse dans un délai de trois mois vaudrait accord tacite de l’administration.
La rédaction vise l’exercice d’une activité de holding animatrice « au sens de l’article 35 B du CGI », ce qui renvoie à un article qui n’existe pas mais qu’un précédent amendement des mêmes auteurs ([110]), rejeté par le Sénat, proposait d’établir afin de donner une définition générale du caractère animateur d’une holding.
Selon les exposés des motifs des deux amendements, ces propositions conjointes seraient motivées par l’insécurité juridique qui pèserait sur les dirigeants d’entreprises qui les détiennent par l’intermédiaire de holdings, en raison du caractère évolutif de la doctrine administrative et de la jurisprudence, ou de délais de réponse excessifs de l’administration à des demandes de rescrits.
II. La position du Rapporteur gÉNÉral
Outre le caractère peu intelligible du dispositif incomplet adopté par le Sénat, le rapporteur général relève qu’une procédure de rescrit doit porter sur un dispositif fiscal spécifiquement visé.
Le cas échéant, il ne saurait donc s’agir d’un rescrit portant, de façon générale, sur le caractère animateur d’une holding, mais sur l’éligibilité à des mesures fiscales spécifiques qui font appel à cette notion.
De telles demandes de rescrits sont déjà possibles par application du 1° de l’article L. 80 B du LPF.
Par ailleurs, au regard du caractère parfois complexe des faits à apprécier pour qualifier une holding d’animatrice, une procédure de rescrit avec possibilité d’accord tacite de l’administration devrait être assortie de délais adaptés et de garanties quant à la complétude des informations transmises : à défaut, le risque serait grand de permettre à des contribuables de bénéficier de façon indue d’avantages fiscaux importants.
En conséquence, le rapporteur général propose de supprimer cet article.
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Article 3 octodecies B (nouveau)
Conditions du sursis d’imposition lors de transferts de titres
à un fonds de pérennité
I. Les dispositions adoptÉes par le sÉnat
A. État du droit
● Le fonds de pérennité a été créé par l’article 177 de la loi du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises (loi « PACTE ») ([111]). Inspiré d’exemples en Europe du Nord – celui de la société danoise Lego ayant été donné lors des débats à l’Assemblée nationale– le fonds résulte de l’apport gratuit et irrévocable de titres de capital ou de parts sociales de sociétés exerçant directement une activité économique ou détenant des participations dans ces sociétés.
L’apport, réalisé par un ou plusieurs fondateurs, doit permettre au fonds d’exercer une double mission. D’une part, il doit gérer ces titres ou parts, exercer les droits qui y sont attachés et utiliser ses ressources ([112]) dans le but de contribuer à la pérennité économique de ces sociétés. D’autre part, il doit pouvoir réaliser ou financer des œuvres ou des missions d’intérêt général.
Le fonds de pérennité peut donc agir au titre de la participation qu’il détient ce qui le distingue de la fondation reconnue d’utilité publique (FRUP) ou du fonds de dotation, qui n’y sont pas autorisées.
● Afin d’assurer la neutralité fiscale de la constitution du fonds de pérennité, l’article 14 de la loi de finances pour 2020 ([113]) la traite comme une opération intercalaire, en plaçant en sursis d’imposition la plus ou moins-value constatée par la société procédant à l’apport.
Le 7 quater de l’article 38 du code général des impôts (CGI) prévoit ainsi que la plus ou moins-value réalisée par les fondateurs résultant de la dotation initiale du fonds de pérennité est comprise dans le résultat de l’exercice durant lequel les titres transmis sont cédés par le fonds, sous réserve que ce dernier se soit engagé à calculer cette plus ou moins-value en retenant la valeur fiscale que ces titres avaient à la date de leur transmission.
Toutefois, les plus ou moins-values résultant d’apports ultérieurs sont imposées dans les conditions de droit commun.
B. Dispositif proposÉ
Sur un avis favorable de la commission des finances mais un avis défavorable du Gouvernement, le Sénat a adopté un amendement de M. Serge Babary et de membres du groupe Les Républicains ([114]) qui étend le sursis d’imposition aux apports réalisés postérieurement à la constitution du fonds de pérennité.
À cette fin, il supprime, au 7 quater de l’article 38 du CGI, la restriction actuelle du régime fiscal intercalaire aux apports de titres au fonds de pérennité réalisés « lors de sa constitution ».
II. La position du Rapporteur gÉNÉral
Les fonds de pérennité peuvent être constitués depuis le 8 mai 2020, date d’entrée en vigueur du décret d’application de l’article 177 de la loi « PACTE » ([115]).
Dans un rapport ([116]) remis au ministre de l’économie en octobre 2021 sur les effets de la loi « PACTE » concernant la place des entreprises dans la société, M. Bris Rocher a relevé que seuls trois fonds de pérennité, de faible envergure, avaient alors été créés. Le recul n’est donc manifestement pas suffisant pour considérer que l’attractivité des fonds de pérennité pâtirait de la non-application, postérieurement à leur création, d’un sursis à imposition des plus-values d’apport.
Étendre le sursis à imposition au-delà de cette phase initiale pourrait en outre exposer à des risques d’optimisation consistant à apporter au fonds des titres sur lesquels une plus-value serait constatée, afin de bénéficier du sursis, en contrepartie de la cession concomitante par le fonds, de titres faisant l’objet d’une moins-value, opportunément réintégrée dans le résultat de la société apporteuse.
Le cas échéant, un assouplissement de ce mécanisme devra être précisément cadré et pourra s’inscrire dans une réforme d’ensemble du régime fiscal des fonds de pérennité, d’autres freins ayant été identifiés dans le rapport de M. Rocher : la soumission aux impôts commerciaux dans les conditions de droit commun, contrairement aux FRUP et aux fonds de dotation ; la pleine application des droits de mutation à titre gratuit sur les libéralités accordées au fonds, sans taux préférentiel ou abattement spécifique, ni sursis d’imposition ; ou encore les incertitudes quant à l’application, dans ce cas, d’un « Pacte Dutreil » concernant les apports réalisés par des personnes morales.
En conséquence, le rapporteur général propose de supprimer cet article.
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Article 3 octodecies C (nouveau)
Soumission à l’impôt sur le revenu des sommes issues
d’un Plan épargne retraite (PER) perçues par les héritiers du titulaire
I. Les dispositions adoptÉes par le sÉnat
A. État du droit
● Le plan épargne retraite (PER), défini par les articles L. 224-1 à L. 224‑40 du code monétaire et financier, résulte de la réforme des précédents dispositifs d’épargne retraite supplémentaire opérée par la loi « PACTE » ([117]). Distribué depuis novembre 2019, il comprend un PER individuel, accueillant les versements volontaires du titulaire, et, le cas échéant, deux catégories de PER d’entreprise, alimentés notamment par l’intéressement, la participation ou des abondements de l’employeur.
À compter du départ à la retraite, le PER permet d’obtenir, à la liquidation du plan, le versement d’un capital ou une rente viagère, la loi PACTE ayant facilité la combinaison de ces deux modalités.
● L’article 163 quatervicies du code général des impôts (CGI) établit une incitation fiscale à épargner dans un PER en prévoyant que le titulaire du plan peut déduire les versements volontaires de son revenu imposable.
La déduction ne peut pas dépasser un plafond global, pour chaque membre du foyer fiscal, de 10 % des revenus professionnels de l’année précédente, retenus dans la limite de huit plafonds annuels de la Sécurité sociale, soit une déduction maximale de 32 909 euros. En cas de faibles revenus d’activité ou de déficit professionnel, il est appliqué un plancher de déduction correspondant à 10 % du plafond annuel de la sécurité sociale, soit 4 114 euros. La marge de déduction inemployée peut être reportée sur les trois années suivantes. Les versements excédant la limite annuelle ne sont pas reportables.
L’avantage fiscal s’analyse donc comme un sursis à imposition, qui accroît le revenu non imposé et facilite donc la constitution de l’épargne. Cependant, les sommes correspondantes aux versements déduits « à l’entrée » sont imposées à l’IR « en sortie ».
En cas de sortie en capital ([118]), ces sommes sont imposées selon le barème progressif de l’IR, contrairement aux produits du plan (plus-values de l’épargne) imposés au prélèvement forfaitaire unique (PFU).
En cas de sortie en rente ([119]), l’ensemble des sommes sont imposées comme les pensions de retraite, au barème progressif de l’IR après abattement de 10 %, ainsi qu’aux prélèvements sociaux au taux de 17,2 %.
L’épargnant peut néanmoins renoncer au bénéfice de cette déduction « à l’entrée », qui présente moins d’intérêt pour les contribuables à faibles taux marginaux d’imposition à l’IR en phase de constitution de l’épargne.
Dans ce cas, les sommes du capital correspondant aux versements initialement inclus dans le revenu imposable sont exonérées d’IR, seuls les produits de l’épargne restant imposés au PFU ; en rente, la part correspondant aux versements non déduits se voit appliquer le régime favorable des rentes viagères à titre onéreux, qui limite la part imposable à l’IR à 40 % après 60 ans et à 30 % après 70 ans.
● Au décès du titulaire du PER, la transmission des sommes figurant sur le plan se voit appliquer une fiscalité pour successions, distincte selon que le PER a donné lieu à l’adhésion à un contrat d’assurance de groupe ou a été souscrit sous forme de compte-titres.
Si le PER a donné lieu à l’adhésion à un contrat d’assurance de groupe, les sommes épargnées sont reversées aux bénéficiaires désignés dans le contrat :
– en cas de décès après 70 ans, les droits de mutation à titre gratuit (DMTG) sont applicables, après un abattement global de 30 500 euros, partagé, le cas échéant, entre les différents contrats conclus sur la tête d’un même assuré, prévu par le II de l’article 757 B du CGI ;
– en cas de décès avant 70 ans, la fiscalité des transmissions de contrats d’assurance vie est appliquée, conformément au I de l’article 990 I du CGI, avec un abattement de 152 500 euros sur la part revenant à chaque bénéficiaire, puis un prélèvement spécifique de 20 % jusqu’à 700 000 euros et 31,25 % au‑delà.
Le PER souscrit sous forme de compte-titres, qui ne comporte pas de clause bénéficiaire, est directement intégré à l’actif successoral et soumis aux DMTG.
B. Dispositif proposÉ
Malgré un double avis défavorable de la commission des finances et du Gouvernement, le Sénat a adopté un amendement de M. Delcros et des membres du groupe Union Centriste ([120]) qui dispose que lorsque le titulaire d’un plan d’épargne retraite décède, « les sommes perçues au titre de ce plan sous forme de rente ou de capital, par ses héritiers ou par les personnes désignées comme bénéficiaires, sont soumises à l’impôt sur le revenu dans les conditions de droit commun ».
Il s’agit de corriger une conséquence de la possibilité offerte à l’épargnant de déduire les versements volontaires sur un PER de son revenu imposable.
Alors que le mécanisme de déduction des versements initiaux est conçu comme un sursis à imposition, l’assujettissement à l’IR étant différé à la liquidation du plan, ce « rattrapage fiscal » serait mis en échec si le contribuable fait le choix de ne pas liquider le plan mais de le conserver, à la retraite, dans le but de le transmettre à ses héritiers.
L’avantage fiscal procuré au souscripteur lors de la constitution du plan ne serait donc jamais récupéré et pourrait être assimilé, dans ce cas, à une subvention à la transmission d’un capital : en bénéficieraient principalement les contribuables les plus aisés, fortement imposés à l’IR et disposant de revenus et de patrimoines pouvant les dispenser de liquider leur PER à la retraite.
En conséquence, le présent article vise à mettre en œuvre la récupération des sommes non-imposées à l’IR du vivant du titulaire du plan, sous la forme d’une imposition sur le revenu de l’héritier.
II. La position du Rapporteur gÉNÉral
Le Sénat soulève un sujet d’intérêt mais dont la portée reste à vérifier, d’autant que la diffusion des nouveaux PER est récente, bien que dynamique ([121]).
Le cas échéant, l’existence d’une niche fiscale sur les transmissions des PER devrait être mise en balance avec le fait que celles-ci sont soumises aux DMTG de droit commun, alors que l’assurance-vie est assujettie à un prélèvement spécifique aux taux de faveur. Sauf en cas de décès du titulaire avant 70 ans, l’abattement supplémentaire pour les PER assurantiels ne suffit pas à rendre ce régime plus intéressant, pour les ménages fortunés, que la transmission de liquidités via l’assurance-vie.
En tout état de cause, le dispositif proposé paraît inopérant et manque sa cible. D’une part, il institue une double imposition des mêmes sommes, une première fois aux DMTG puis à l’impôt sur le revenu ; d’autre part, son assiette est trop large, puisque l’IR frapperait la totalité du PER transmis aux héritiers au lieu des seules sommes correspondant à des versements déduits du revenu du titulaire lors de la constitution du plan.
Si un prélèvement devait être opéré, peut-être ne devrait-il pas reposer sur l’IR de l’héritier mais intervenir en amont, avant la transmission du plan, sous la forme d’un prélèvement ad hoc : le redevable serait alors l’organisme gérant le plan et le prélèvement devrait être défini au regard d’une estimation de l’impôt que le titulaire aurait acquitté s’il avait effectivement liquidé son PER.
Au demeurant, la définition du taux d’un tel prélèvement serait des plus délicate, puisque le titulaire du plan peut demander le versement de son capital soit en totalité, soit par fractions, ce qui emporte des taux marginaux d’imposition à l’IR différents…
Si une réponse doit être apportée à la question posée par le Sénat, elle doit donc résulter d’un travail de fond qui n’a pas encore été engagé.
En conséquence, le rapporteur général propose de supprimer cet article.
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Article 3 octodecies D (nouveau)
Condition de conservation des titres
pour que les opérations d’apport‑attribution ne soient pas considérées
comme des distributions de revenus mobiliers
I. Les dispositions adoptÉes par le sÉnat
A. État du droit
● Le 1 de l’article 115 du code général des impôts (CGI) définit les conditions de neutralité fiscale, pour les détenteurs de titres, des opérations de fusion et de scission de sociétés ([122]). Il permet que l’attribution des titres, sommes ou valeurs aux membres de la société apporteuse en contrepartie de l’annulation des titres de cette société, ne soit pas considérée comme une distribution de revenus mobiliers, mais comme une opération intercalaire.
● Le 2 du même article prévoit la neutralité fiscale de l’apport partiel d’actif qui se distingue de la scission et de la fusion en ce qu’il suppose le maintien de la société apporteuse ([123]).
Cette opération correspond à l’apport, par une société sans qu’elle soit dissoute, d’une partie de ses éléments d’actif à une société nouvelle ou préexistante, en contrepartie de la remise de titres représentatifs du capital de la société bénéficiaire de l’apport. L’opération d’« apport-attribution » est réalisée par deux opérations distinctes : un apport partiel d’actif, rémunéré par des titres de la société bénéficiaire de l’apport, suivi de l’attribution de ces titres aux associés de la société apporteuse.
La neutralité fiscale de « l’apport-attribution » est de droit lorsque l’apport partiel d’actif porte sur une branche complète d’activité, définie par la doctrine fiscale comme des éléments qui constituent, du point de vue de l’organisation, une exploitation autonome, c’est-à-dire un ensemble capable de fonctionner par ses propres moyens.
● Le 2 bis du même article prévoit qu’en cas d’apport partiel d’actif non représentatif d’une branche complète d’activité, la neutralisation fiscale peut toutefois s’appliquer sur agrément de l’administration ([124]) sous réserve que :
– l’attribution est justifiée par un motif économique, se traduisant notamment par l’exercice par la société apporteuse d’une activité autonome et l’amélioration de ses structures ;
– l’association entre les parties est formalisée par un engagement de conservation des titres de la société apporteuse pendant trois ans à compter de la réalisation de l’apport ;
– cet engagement de conservation n’est toutefois exigé que des associés qui détiennent 5 % au moins des droits de vote de la société apporteuse ([125]).
B. Dispositif proposÉ
Sur un double avis de sagesse de la commission des finances et du Gouvernement, qui a ensuite levé le « gage » de l’amendement, le Sénat a adopté des amendements identiques de MM. Capus et Requier et de membres du groupe Les Républicains ([126])
Il complète le b du 2 bis de l’article 115 du CGI afin de supprimer, pour les associés de la société apporteuse, l’engagement de conservation des titres pendant trois ans à compter de l’opération d’apport-attribution, dès lors que trois conditions cumulatives sont remplies :
– l’apporteuse n’est pas contrôlée par un groupe d’actionnaires agissant de concert ;
– les actions de l’apporteuse sont admises à négociation sur un marché réglementé ;
– l’actionnaire détenant plus de 5 % des droits de vote de l’apporteuse n’exerce pas une influence notable sur sa gestion.
Il s’agit de lever les blocages aux opérations de restructuration par des groupes cotés, résultant du fait que le droit actuel conditionne le traitement fiscal applicable à la totalité des actionnaires de la société à un engagement de conservation pris par des actionnaires minoritaires qui ne contrôle pourtant pas la société apporteuse-attributrice et qui ne prennent pas une part active à l’opération d’apport-attribution.
L’assouplissement des conditions liées à l’engagement de conservation des titres de la société apporteuse par des actionnaires minoritaires permettrait donc de faciliter les opérations de consolidation stratégique de sociétés dont l’actionnariat est atomisé.
II. La position du Rapporteur gÉNÉral
La condition de conservation des titres pendant trois ans peut être inadaptée aux groupes industriels français cotés à l’actionnariat fortement éclaté, et peut, dès lors, être préjudiciable à la mise en œuvre d’opérations de restructuration, aux motifs économiques établis.
L’assouplissement proposé par le Sénat demeure encadré par le fait qu’un agrément administratif préalable restera exigé, permettant de s’assurer des motifs économiques de l’opération.
Lors de l’examen en séance publique au Sénat, le ministre délégué chargé des comptes public a par ailleurs indiqué que l’administration a engagé un travail de redéfinition des critères d’agrément, en vue du prochain projet de loi de finances : l’assouplissement proposé par le Sénat constituerait donc une première étape avant une refonte plus large de l’agrément fiscal des opérations d’apport‑attribution.
En conséquence, le rapporteur général propose d’adopter cet article sans modification.
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Article 3 octodecies E (nouveau)
Relèvement des seuils de recettes des régimes micro et réel simplifié agricoles et du seuil d’exonération de plus-value en cas de cession d’activité agricole
I. Les dispositions adoptées
A. état du droit
L’article 33 de la loi de finances rectificative pour 2015 ([127]) a substitué à l’ancien forfait agricole un nouveau régime fiscal pour les bénéfices agricoles (BA) des micro-exploitations, le « micro-BA ».
Ce régime, codifié à l’article 64 bis du code général des impôts (CGI), prévoit des conditions simplifiées d’imposition pour les exploitants agricoles dont la moyenne des recettes hors taxes des trois dernières années n’excède pas 85 800 euros. Un abattement de 87 % de cette moyenne est ensuite appliqué pour déterminer l’assiette imposable.
Les exploitants agricoles dont la moyenne des recettes réalisées au cours des deux dernières années est comprise entre 85 800 euros et 365 000 euros peuvent bénéficier du régime réel simplifié. Ce régime permet des obligations déclaratives simplifiées par rapport au régime réel normal, à savoir la simple fourniture d’un bilan et d’un compte de résultat simplifiés, accompagnés du relevé de provisions ([128]). Si le niveau de détail déclaratif diffère entre réel et réel simplifié, les régimes d’imposition sont en revanche identiques.
L’article 151 septies du CGI prévoit un abattement sur les plus-values de cession réalisées dans le cadre d’une activité agricole pour les entreprises individuelles ou les sociétés de personnes assujetties à l’impôt sur le revenu. Cette exonération est subordonnée à la condition que l’activité ait été exercée à titre professionnel pendant au moins cinq ans ; ce délai court à compter de la date du début de l’exercice effectif à titre professionnel et s’achève à la date de clôture de l’exercice ou à la fin de la période d’imposition au titre duquel la plus-value nette est déterminée.
L’exonération des plus-values est totale si le chiffre d’affaires moyen hors taxes (HT) est inférieur à 250 000 euros ; elle est partielle si le chiffre d’affaires moyen HT est inférieur à 350 000 euros.
Ce régime est à distinguer du dispositif prévu à l’article 238 quindecies du CGI, qui permet une exonération totale des plus-values professionnelles agricoles jusqu’à 500 000 euros – et partielle jusqu’à un million d’euros – en cas de départ à la retraite.
B. Dispositif adoptÉ par le sÉnat
Le Sénat a adopté, à l’initiative de Laurent Duplomb (Les républicains) ayant recueilli un avis de sagesse de la commission des finances et défavorable de la part du Gouvernement, un amendement portant article additionnel visant, d’une part, à relever les seuils du passage du régime micro-BA au régime réel simplifié – de 85 000 euros à 100 000 euros – et en-dessous duquel s’applique le régime réel normal – de 365 000 euros à 450 000 euros.
Le présent article additionnel propose, d’autre part, de relever le seuil en dessous duquel s’appliquent les exonérations de plus-values agricoles, de 250 000 euros à 350 000 euros pour une exonération totale, et de 350 000 à 450 000 euros pour une exonération partielle.
II. La position du Rapporteur gÉnÉral
Le rapporteur général considère qu’il n’est pas pertinent d’accroître les exonérations liées à des transmissions partielles d’activités, qui peuvent notamment servir au transfert d’actifs immobiliers. Il convient de conserver une différence de traitement substantielle entre les montants de l’article 151 septies et ceux de l’article 238 quindecies du CGI, ce dernier favorisant la constitution d’un capital-retraite et devant être relativement plus favorisé.
De même, il convient de rappeler que le bénéfice du régime micro-BA permet à l’assujetti de bénéficier d’un abattement de 87 % sur ses revenus agricoles. Aussi, augmenter substantiellement le plafond de ce régime très dérogatoire n’apparaît pas équilibré, ce d’autant plus à la lumière des éléments fiscaux favorables votés au bénéfice des agriculteurs, tant au sein des dernières lois de finances que de l’actuel projet en navette. Il sera également rappelé que le plafond du régime micro-BA est indexé tous les trois ans, et qu’il l’a été la dernière fois par la loi de finances pour 2021 ([129]).
Pour l’ensemble de ces raisons, il est proposé de supprimer le présent article.
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Article 3 octodecies F (nouveau)
Exonération de droits de mutations à titre gratuit sur les successions
et donations portant sur les exploitations agricoles
I. Les dispositions adoptÉes par le sÉnat
A. État du droit
● L’article 793 du code général des impôts (CGI) prévoit que les donations et successions de biens agricoles, ainsi que des parts de groupements fonciers agricole, bénéficient d’une exonération partielle de droit de mutations à titre gratuit s’ils sont loués à bail à long terme, ou à bail cessible, dans les conditions prévues par le code rural et de la pêche maritime c’est à dire au moins 18 ans.
L’exonération est de 75 % à hauteur de 300 000 euros de biens transmis, montant porté à 500 000 euros par l’article 3 septdecies du présent projet de loi de finances (voir supra). Au-delà, le taux d’exonération est ramené à 50 %.
● Lorsque les exploitations agricoles sont constituées en sociétés, leurs biens meubles et immeubles sont par ailleurs éligibles aux dispositifs de droit commun de transmission des entreprises :
– dans le cadre d’un « Pacte Dutreil », l’abattement de 75 % pour la transmission d’une entreprise ([130]), y compris d’une entreprise individuelle ([131]), sous condition que l’un des bénéficiaires poursuive effectivement l’exploitation pendant 3 ans et que chacun des bénéficiaires conserve pendant 4 ans des biens affectés à l’exploitation ;
– l’abattement supplémentaire de 50 % dans les cas d’une donation en pleine propriété ([132]) lorsque le donateur est âgé de moins de 70 ans ;
– le paiement des droits différé pendant 5 ans puis fractionné sur 10 ans par paiements semestriels ([133]).
B. Dispositif proposÉ
Le présent article résulte d’un amendement de M. Laurent et de membres du groupe Les Républicains ([134]) et de trois amendements identiques membres du groupe Socialiste, écologiste et républicain, du groupe Les Indépendants – République et Territoires, du groupe Union centriste et du groupe Rassemblement démocratique et social européen, adoptés par le Sénat sur avis de sagesse de la commission des finances et avis défavorable du Gouvernement.
Il insère, à l’article 793 du CGI, un 9° et un 10° afin d’établir une exonération totale de droits de mutation à titre gratuit sur les successions et donations, respectivement, d’immeubles à usage agricole et de parts de groupements fonciers agricoles.
L’exonération serait conditionnée à la reprise de l’exploitation par un des héritiers et sous condition d’engagement de conservation des biens transmis par les différents héritiers ou donataires pendant 25 ans.
Lorsque ces conditions ne seraient pas respectées, les droits seraient rappelés, assortis de l’intérêt de retard et d’une majoration de 40 % des sommes non acquittées au cours des dix premières années et 30 % au cours des années suivantes
II. La position du Rapporteur gÉNÉral
Des amendements identiques ont été rejetés en première lecture par l’Assemblée nationale.
S’il est important d’éviter que les exploitations familiales ne soient menacées de dislocation à l’occasion d’une succession, le rapporteur général souligne que les transmissions de biens à usage agricoles bénéficient de l’ensemble de la fiscalité de droit commun sur les successions et donations, qui est déjà favorable : l’exonération proposée bénéficierait donc disproportionnellement aux propriétaires les plus fortunés.
Une exonération totale, sans limite de montant, constituerait une différence de traitement excessive par rapport aux propriétaires de biens relevant d’autres secteurs de l’économie, en rupture avec le principe d’égalité devant l’impôt.
Tout allègement fiscal supplémentaire doit donc être justifié par des sujétions effectivement constatées pour les contribuables ou un motif d’intérêt général bien identifié, ce qui nécessite d’examiner l’ensemble des paramètres de la fiscalité du foncier et des revenus agricoles.
M. Marc Fesneau, ministre de l’Agriculture et de la souveraineté alimentaire, a annoncé que le Parlement examinera, début 2023, un projet de loi sur le foncier agricole, qui pourra donner lieu le cas échéant à des évolutions fiscales dans un cadre cohérent.
Le rapporteur général propose en conséquence de supprimer cet article.
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Article 3 octodecies G (nouveau)
Autorisation d’un niveau supplémentaire d’interposition dans le cadre
d’un « pacte Dutreil » dans le cas où la première société interposée
héberge une part d’actionnariat salarié
I. Les dispositions adoptÉes par le sÉnat
A. État du droit
● Le « pacte Dutreil », défini à l’article 787 B du code général des impôts (CGI), permet de bénéficier d’une exonération de 75 % de droits de mutation à titre gratuit (DMTG) pour les transmissions de parts ou actions de sociétés exerçant une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale, sous trois conditions principales devant garantir la stabilité de l’actionnariat et de la direction de l’entreprise :
– un engagement collectif de conservation des parts ou actions de deux ans minimum par l’ensemble des signataires du pacte ;
– un engagement individuel de conservation des parts ou actions de quatre ans à compter de l’expiration de l’engagement collectif ;
– l’obligation pour l’un des associés du pacte ou l’un des héritiers, donataires ou légataires d’exercer une fonction de direction au sein de la société durant la phase d’engagement collectif et pendant trois ans à compter de la transmission.
● Le dispositif s’applique aux titres de la société opérationnelle objet du pacte, mais également aux titres des sociétés dites interposées.
Le 3 du a de l’article 787 B dispose en effet que pour le calcul des pourcentages d’engagement de détention, « il est tenu compte des titres détenus par une société possédant directement une participation dans la société dont les parts ou actions font l’objet de l’engagement collectif de conservation auquel elle a souscrit ».
Outre cette interposition simple, une interposition de second niveau est expressément prévue, l’exonération s’appliquant alors « lorsque la société détenue directement par le redevable possède une participation dans une société qui détient les titres de la société dont les parts ou actions font l’objet de l’engagement de conservation ».
Un mécanisme de prorata réserve le bénéfice de l’exonération à la fraction de la valeur des titres de la holding de tête correspondant à la participation détenue dans la société opérationnelle : les autres actifs détenus par la holding ne sont pas pris en compte.
De même, le bénéfice de l’exonération est subordonné à la condition que les participations soient conservées inchangées à chaque niveau d’interposition, pendant toute la durée de l’engagement.
Chaque associé, personne morale ou personne physique, de la chaîne des participations doit donc détenir au minimum les titres qu’il possédait au moment de la signature de l’engagement collectif ou individuel.
● Seuls deux niveaux d’interposition au maximum sont prévus : en conséquence, les parts de la société opérationnelle détenues au moyen de tout niveau d’interposition supplémentaire ne peuvent pas bénéficier de l’exonération partielle de DMTG.
B. Dispositif proposÉ
Le présent article résulte d’un amendement de M. Buffet et de membres du groupe Les Républicains ([135]) adopté sur avis de sagesse de la commission et avis défavorable du Gouvernement.
Il maintient l’exonération partielle de DMTG lorsqu’un troisième niveau d’interposition – entre le détenteur des titres et la société opérationnelle objet du pacte – résulte du fait que la première société interposée est majoritairement détenue par des salariés de la société objet du pacte.
Ce cas supplémentaire d’exonération est conditionné au fait que la première société interposée soit détenue au moins à 50 % par des salariés de la société opérationnelle et que 50 % de la valeur de son actif brut provienne de titres de la société objet du pacte
Le 1° du présent article insère quatre alinéas au 3 du b de l’article 787 B du CGI afin de définir cette possibilité au stade de la conclusion du pacte.
Le 2° complète le f de l’article 787 B du CGI afin de définir cette même possibilité en cas d’apport de titres en cours d’engagement du pacte.
II. La position du Rapporteur gÉNÉral
Le rapporteur général est sensible à l’enjeu de conciliation des dispositifs de transmission des entreprises avec les objectifs de développement de l’actionnariat salarié.
Cependant, il reste à déterminer dans quelle mesure les règles du Pacte Dutreil pourraient avoir l’effet concret de dissuader les dirigeants de PME et d’ETI de développer l’actionnariat salarié, au motif qu’il pourrait en résulter un niveau supplémentaire d’interposition.
Assouplir la limite de deux niveaux d’interposition présente en effet le risque de rendre fictive l’exigence, cruciale pour le pacte Dutreil, que le bénéficiaire de l’exonération détienne les titres de la société opérationnelle de façon effective.
L’addition de sociétés interposées rend en outre le contrôle fiscal plus difficile, ce qui expose aux risques que des patrimoines non professionnels détenus dans les holdings interposées soient retenus pour bénéficier de la réduction de droits, ou que les bénéficiaires ne respectent pas les délais de détention des titres.
Le rapporteur général relève que l’Assemblée nationale a adopté cette année, en première lecture, à l’initiative de notre ancien collègue Patrick Mignola, une proposition de loi visant à mieux allier l’actionnariat salarié et la transmission d’entreprise ([136]) dont le dispositif est proche de celui du présent article.
Il considère donc que cette question pourra, le cas échéant, trouver une réponse dans la poursuite de l’examen de cette proposition de loi, enregistrée à la Présidence du Sénat le 3 février 2022.
Le rapporteur général propose en conséquence de supprimer le présent article.
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Article 4 bis A (nouveau)
Prorogation d’une année de la majoration du bénéfice imposable
pour les professionnels non-adhérents d’un organisme de gestion agréé
I. Les dispositions adoptÉes
A. État du droit
Pour la détermination du résultat des entreprises imposées d’après leur bénéfice réel à l’impôt sur le revenu (IR) dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux (BIC), des bénéfices non-commerciaux (BNC) et des bénéfices agricoles (BA), le bénéfice fait l’objet, depuis 2006, d’une majoration. Cette majoration a longtemps été de 25 % ; elle est actuellement de 10 % et sera supprimée pour les revenus perçus en 2023 ([137]).
Le a du 1° du 7 de l’article 158 du CGI exclut l’application de la majoration pour les redevables adhérents d’un organisme de gestion agréé (OGA), structure créée par la loi de finances rectificative pour 1974 ([138]) et dont la mission est de fournir à ses adhérents une assistance économique, comptable et administrative dans la gestion de leurs activités et dans l’accomplissement de leurs obligations fiscales.
Cette incitation à l’adhésion à un OGA afin de réduire son imposition doit donc disparaître au 1er janvier 2023.
B. Dispositif proposÉ par le sÉnat
Le Sénat a adopté 8 amendements identiques à l’initiative de Vincent Delahaye (Union centriste – UC), Alain Cadec (Les républicains), Françoise Férat (Union centriste – UC), Dominique Estrosi Sassone (Les républicains), Emmanuel Capus (Les indépendants), Catherine Morin-Desailly (Union centriste – UC), André Reichardt (Les républicains) et Jean-François Longeot (Union centriste – UC). L’article additionnel ainsi adopté avec l’avis de sagesse de la commission des finances et défavorable de la part du Gouvernement, vise à proroger d’un an la majoration fiscale de 10 % du bénéfice imposable pour non-adhésion à un OGA.
II. La position du Rapporteur gÉnÉral
Le rapporteur ne souhaite pas revenir sur une réduction d’impôt sur les bénéfices déjà actée. Il rappelle que le décret du 7 octobre 2021 a permis aux centres de gestion agréés de diversifier les missions des OGA dans un contexte de suppression – qui a été progressive – de la majoration fiscale dont sont exemptés leurs adhérents, en leur permettant de proposer à toute entreprise ou tout professionnel, adhérent ou non, des prestations de services facultatives en lien avec leur objet social d’assistance à la gestion des entreprises ([139]).
Dans ce contexte, il est proposé de supprimer cet article.
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Article 4 bis B (nouveau)
Aménagements de la taxe sur les services numériques
I. Les dispositions adoptÉes
A. État du droit
L’article 1er de la loi du 24 juillet 2019 portant création d’une taxe sur les services numériques et modification de la trajectoire de baisse de l’impôt sur les sociétés ([140]) a instauré une taxe sur les services fournis par les grandes entreprises du secteur numérique qui tirent une part significative de leurs revenus de la participation d’internautes localisés sur le territoire national, à savoir au moins 25 millions d’euros taxables au titre des services fournis en France sur un bénéfice mondial supérieur à 750 millions d’euros.
Cette taxe sur les services numériques (TSN), codifiée à l’article 299 du code général des impôts (CGI), frappe les sommes encaissées par les entreprises du secteur du numérique en contrepartie de la mise à disposition en France d’une interface numérique ou de services commercialisés auprès d’annonceurs, au taux de 3 %.
La taxe sur les services numériques a rapporté 474 millions d’euros en 2021, soit une augmentation de 116 millions d’euros par rapport à la prévision en loi de finances initiale. La prévision s’établit à 591 millions d’euros en 2022, en hausse de 73 millions par rapport à la prévision en loi de finances initiales pour 2022, du fait d’acomptes plus dynamiques qu’estimés ([141]) .
B. Dispositif adoptÉ par le sÉnat
Le Sénat a adopté, à l’initiative du rapporteur général de la commission des finances ayant recueilli un avis favorable de la part du Gouvernement, un amendement portant article additionnel visant à apporter plusieurs précisions relatives à l’application de la TSN.
Ainsi, le présent article additionnel précise d’abord que ne doivent être exclus du champ des services taxables que les services de mise à disposition d’une interface numérique pour lesquels les interactions entre utilisateurs ne présentent qu’un caractère accessoire au regard des services qu’ils proposent.
Ensuite, le présent article propose que l’exclusion de certains services taxables soit sans préjudice de l’assujettissement de ces contenus à la taxe lorsqu’ils constituent par eux-mêmes une interface numérique relevant du champ de la TSN.
Enfin, l’exclusion des services fournis entre entreprises appartenant à un même groupe ne porterait plus, en cas de vote de cet article, que sur les services exclusivement rendus aux entreprises du même groupe.
II. La position du Rapporteur général
Le rapporteur général juge opportunes ces modifications qui viennent encadrer les interprétations de la doctrine fiscale – donc renforcer le dispositif – et propose de voter cet article issu du Sénat sans modification.
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Article 4 bis C (nouveau)
Prorogation du crédit d’impôt pour les dépenses d’acquisition
et de pose d’un système de charge pour véhicule électrique jusqu’en 2025
et rapport d’évaluation
I. Les dispositions adoptÉes par le SÉnat
A. État du droit
Dans le contexte de l’extinction du crédit d’impôt pour la transition énergétique (CITE) et de son remplacement par une prime dite « Ma prime rénov’ », l’article 53 de la loi de finances pour 2021 a prévu la mise en place d’un nouveau crédit d’impôt sur le revenu pour les dépenses d’acquisition et de pose de systèmes de charge pour véhicule électrique.
Codifié à l’article 200 quater C, ce crédit d’impôt est ouvert aux contribuables domiciliés en France au titre de leurs dépenses effectivement supportées, entre le 1er janvier 2021 et le 31 décembre 2023, pour l’acquisition et la pose d’un système de charge pour véhicule électrique dans le logement dont ils sont propriétaires, locataires ou occupants à titre gratuit et qu’ils affectent à leur habitation principale et à leur résidence secondaire exclusivement, dans la limite d’une résidence secondaire par contribuable.
Les dépenses doivent fait l’objet d’une facture par l’entreprise qui procède à la fourniture et à l’installation des systèmes de charge ou qui recourt à une autre entreprise, dans le cadre d’un contrat de sous-traitance, pour les réaliser.
Le crédit d’impôt est égal à 75 % du montant des dépenses, dans la limite de 300 euros par système de charge.
Le bénéfice du crédit d’impôt est limité, pour un même logement, à un seul système de charge pour une personne célibataire, veuve ou divorcée et à deux systèmes pour un couple soumis à imposition commune.
Le bénéfice du crédit d’impôt ne peut se cumuler avec celui de la déduction de charges pour la détermination des revenus catégoriels.
Le coût du dispositif est estimé à 7 millions d’euros en 2022 et 13 millions d’euros en 2023.
B. Dispositif proposÉ
Le présent article adopté par le Sénat a été introduit par deux amendements identiques de M. Didier Rambaud et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants et de M. Jean-François Longeot (Union centriste) et plusieurs de ses collègues, ayant recueilli un avis favorable de la commission des finances et du Gouvernement.
Il proroge, d’une part, le crédit d’impôt pour les dépenses d’acquisition et de pose d’un système de charge pour véhicule électrique jusqu’au 31 décembre 2025 et prévoit, d’autre part, la remise d’un rapport d’évaluation du crédit d’impôt avant le 30 septembre 2025.
II. La position du Rapporteur gÉNÉral
Le crédit d’impôt pour les dépenses d’acquisition et de pose d’un système de charge pour véhicule électrique a un impact positif sur le développement des points de charge dans les habitats privés et incite, plus largement, les contribuables français à utiliser des véhicules électriques ou hybrides. Cette mesure s’inscrit ainsi pleinement dans la feuille de route fixée par l’Union européenne pour réduire les émissions de dioxyde de carbone, notamment en prévoyant la fin de la vente des véhicules neufs à moteur thermique à horizon 2035.
Ainsi, le Rapporteur général se félicite de la prorogation de ce dispositif jusqu’à la fin de l’année 2025 et salue la remise d’un rapport d’évaluation avant la date d’échéance du crédit d’impôt, une « bonne pratique » qui permet au Parlement de se prononcer de façon éclairée sur l’opportunité de conserver une telle dépense fiscale. Il propose d’adopter cet article sans modification.
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Article 4 ter
Prolongation du dispositif en faveur des jeunes entreprises innovantes et aménagements de son volet fiscal
I. Les dispositions adoptÉes
A. État du droit
Le dispositif des jeunes entreprises innovantes (JEI) permet à certaines entreprises réalisant des dépenses de recherche et développement de bénéficier d’une exonération d’impôt sur les sociétés ou d’impôt sur le revenu, ainsi que sur délibération des collectivités territoriales, d’impôts directs locaux.
Le principal volet de ce dispositif est social, tel que prévu à l’article 131 de la loi de finances pour 2004 ([142]), et consiste en une exonération de cotisations sociales patronales pour les emplois de recherche, développement et innovation, s’appliquant les sept années suivant la création de l’entreprise.
Conformément à l’article L. 131-7 du code de la sécurité sociale, les exonérations de cotisations sociales du régime de la JEI sont compensées par une dotation budgétaire de l’État à l’ACOSS inscrite au programme 192 Recherche industrielle de la mission Recherche et enseignement supérieur.
Au terme de l’article 44 sexies-0 A du code général des impôts (CGI), une entreprise est qualifiée de « jeune entreprise innovante » lorsqu’elle remplit de façon cumulative les conditions suivantes, à la clôture de son exercice :
– être une petite et moyenne entreprise (PME) au sens du droit de l’Union européenne, c’est-à-dire employer moins de 250 personnes et réaliser un chiffre d’affaires inférieur à 50 millions d’euros par an ou présenter un total de bilan inférieur à 43 millions d’euros ;
– avoir été créée depuis moins de onze ans ;
– réaliser des dépenses de recherche représentant au moins 15 % des charges fiscalement déductibles, à l’exclusion des charges engagées auprès d’autres jeunes entreprises innovantes ou être dirigée ou détenue à hauteur de 10 % par des étudiants, des personnes diplômés d’un master ou d’un doctorat depuis moins de cinq ans et avoir pour activité principale la valorisation de travaux de recherche auxquels ces dirigeants ou associé ont participé ;
– avoir son capital détenu à hauteur de 50 % au moins par une des structures ou personnes listées au 4° de l’article 44 sexies-0 A du CGI ([143]) ;
– ne pas être créée dans le cadre d’une concentration, d’une restructuration, d’une extension d’activités préexistantes ou d’une reprise de telles activités.
Le statut de JEI est applicable à toutes les formes d’entreprises (entreprise individuelle, société commerciale, etc.).
En application de l’article 44 sexies A du CGI, les entreprises qualifiées de JEI sont :
– totalement exonérées d’impôt sur le revenu ou d’impôt sur les sociétés à raison du premier exercice bénéficiaire ;
– exonérées à hauteur de 50 % de l’impôt dû à raison de l’exercice bénéficiaire suivant. Cette seconde exonération peut porter sur un exercice qui ne sera pas consécutif à celui ayant donné lieu à l’exonération totale.
Par ailleurs, aux termes des articles 1383 D et 1466 D du CGI, les jeunes entreprises innovantes peuvent être exonérées de la taxe foncière sur les propriétés bâties et de la cotisation foncière des entreprises sur une période de sept ans, sur délibération des collectivités territoriales, si les entreprises en font la demande.
Si le volet social du dispositif de soutien aux JEI n’est pas limité dans le temps, le dispositif fiscal fait l’objet d’un bornage depuis sa création. Initialement réservé aux entreprises créées jusqu’au 31 décembre 2013, il a été prorogé pour trois ans à trois reprises, par l’article 131 de la loi de finances pour 2014 ([144]), par l’article 73 de la loi de finances pour 2017 ([145]) et enfin par l’article 46 de la loi de finances pour 2020 ([146]), et bénéficie ainsi aux entreprises créées jusqu’au 31 décembre 2022.
B. Dispositif proposÉ par l’assemblÉe nationale
Le présent article, retenu par le Gouvernement dans le texte sur lequel il a engagé sa responsabilité en application de l’article 49, alinéa 3, de la Constitution, reprend un amendement de Paul Midy (Renaissance), adopté avec avis favorable du Gouvernement et de la commission des finances.
Le 1 du I modifie la condition relative à l’âge de l’entreprise fixée par l’article 44 sexies-0 A du CGI, qui passerait ainsi de onze à huit ans. Ne remettant pas en cause la situation des JEI déjà créées, le III de l’article précise que cette modification ne s’applique qu’aux entreprises créées à compter du 1er janvier 2023.
Le 2 du I modifie l’article 1383 D, permettant aux communes et EPCI de prendre une délibération exonérant les jeunes entreprises innovantes de taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB). Cette exonération est ainsi étendue aux entreprises créées jusqu’au 31 décembre 2025.
Le 3 du I modifie l’article 1466 D permettant aux communes et EPCI de prendre une délibération exonérant les jeunes entreprises innovantes de cotisation foncière des entreprises. Cette exonération est ainsi étendue aux entreprises créées jusqu’au 31 décembre 2025.
Le II de l’article proroge de 2022 à 2025 l’article 13 de la loi n° 2003-1311 précitée, qui a créé les articles 44 sexies-0 A et 44 sexies A du CGI qui, respectivement, détermine le régime général des jeunes entreprises innovantes et met en place une exonération d’impôt sur les revenus et d’impôt sur les sociétés, sous conditions, à raison des bénéfices réalisés par ces entreprises.
C. Dispositif modifiÉ par le sÉnat
Le Sénat a adopté deux amendements.
Le premier, à l’initiative du rapporteur général de la commission des finances, qui a recueilli un avis défavorable de la part du Gouvernement, vise à prendre en compte les dépenses d’innovation dans le calcul de l’intensité de la dépense permettant l’éligibilité au dispositif JEI.
Le second, à l’initiative de Vanina Paoli-Gagin (Les indépendants – République et Territoires), qui a recueilli un avis favorable de la commission des finances et défavorable de la part du Gouvernement, vise à conserver la condition relative à l’âge de l’entreprise à 11 ans.
II. La position du Rapporteur gÉNÉral
Le rapporteur général juge que l’intégration des dépenses d’innovation dans le dispositif des jeunes entreprises innovantes aurait pour effet de brouiller les outils d’aide à l’innovation et à la recherche. Le dispositif JEI est dédié à la R&D tandis que les dépenses d’innovation sont liées à la phase qui court entre la R&D et la pré-commercialisation. Ces dépenses bénéficient d’un outil dédié : le crédit d’impôt innovation (CII). Dès lors, il convient de ne pas les retenir dans le dispositif JEI qui se concentre sur la recherche pure.
De même, le choix a été fait de mettre en cohérence les durées fiscales et sociales, à hauteur de 8 ans, pour les entreprises JEI à créer. Cette mise en cohérence est de nature à simplifier le dispositif et donc d’éviter les erreurs déclaratoires et les redressements subséquents.
Pour ces raisons, il est proposé de ne pas retenir les modifications adoptées par le Sénat et de revenir à la version de cet article telle qu’adoptée par l’Assemblée nationale.
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Article 4 quater
Indexation des plafonds applicables au titre de la déduction
pour épargne de précaution
I. Les dispositions adoptÉes
A. État du droit
Les exploitants agricoles soumis à un régime réel d’imposition peuvent pratiquer une déduction pour épargne de précaution (DEP), prévue à l’article 73 du code général des impôts (CGI).
Les sociétés ou groupements agricoles qui relèvent de l’impôt sur le revenu dans la catégorie des bénéfices agricoles, sous réserve d’être imposés d’après un régime réel d’imposition, peuvent utiliser cette déduction. En revanche, les exploitations agricoles soumises aux régimes micro-bénéfices agricoles (micro-BA) ou à l’impôt sur les sociétés en sont exclues.
Cette déduction a été créée par la loi de finances pour 2019 et s’est substituée à la déduction pour investissement (DPI) et à la déduction pour aléas (DPA).
plafonds de la dÉduction
Bénéfice agricole |
Montant de la déduction |
|
Calcul |
Montant maximal |
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De 0 à 27 000 euros |
100 % |
27 000 € |
De 27 000 à 50 000 euros |
27 000 € + 30 % du bénéfice |
33 900 € |
De 50 000 à 75 000 euros |
33 900 € + 20 % du bénéfice |
38 900 € |
De 75 000 à 100 000 euros |
38 900 € + 10 % du bénéfice |
41 400 € |
Plus de 100 000 euros |
41 400 € |
41 400€ |
Source : 1 du I de l’article 73 du CGI.
Afin de bénéficier de cette déduction, l’exploitant doit inscrire sur un compte courant entre 50 % et 100 % du montant de la déduction, dans les six mois suivant la clôture de l’exercice et au plus tard à la date limite de dépôt de la déclaration des résultats se rapportant à l’exercice au titre duquel la déduction est pratiquée. L’épargne professionnelle ainsi constituée doit être inscrite à l’actif du bilan de l’exploitation.
Selon l’article 73 précité, « à tout moment, le montant total de l’épargne professionnelle est au moins égal à 50 % du montant des déductions non encore rapportées. Elle ne peut jamais excéder le montant des déductions non encore rapportées ».
Pour apprécier le respect de cette condition, sont assimilés à de l’épargne monétaire les coûts d’acquisition ou de production des stocks de fourrage destinés à être consommés par les animaux de l’exploitation, les coûts d’acquisition ou de production des stocks de produits ou d’animaux dont le cycle de rotation est supérieur à un an et certaines créances correspondant aux fonds que l’exploitant met à la disposition de la coopérative dont il est associé ou de l’organisation de producteurs ou de l’association d’organisations de producteurs dont il est adhérent.
Un autre critère d’éligibilité requiert que l’épargne de précaution s’élève au maximum à concurrence des coûts qui ont été engagés au cours de l’exercice au titre duquel la déduction est pratiquée.
Enfin, l’utilisation des sommes déduites doit avoir lieu au cours des dix exercices qui suivent celui au cours duquel la déduction a été réalisée pour faire face à des dépenses nécessitées par l’activité professionnelle. Le 2 du II de l’article 73 précise que « ces sommes sont rapportées au résultat de l’exercice au cours duquel leur utilisation est intervenue ou au résultat de l’exercice suivant. » Dans le cas contraire, elles sont rapportées au résultat du dixième exercice suivant celui de la déduction.
B. Dispositif adoptÉ par l’assemblÉe nationale
Le présent article, retenu par le Gouvernement dans l’élaboration du texte sur lequel il a engagé sa responsabilité en application de l’article 49, alinéa 3, de la Constitution, reprend l’amendement adopté par la commission des finances à l’initiative de Marie-Christine Dalloz (Les Républicains), tendant à réévaluer les plafonds de l’article 73 du CGI pour la déduction pour épargne de précaution en fonction de l’indice mensuel des prix à la consommation et à les arrondir à l’euro le plus proche.
Cet amendement portant article additionnel a été adopté en séance à l’Assemblée nationale avant l’engagement de la responsabilité du Gouvernement.
C. Dispositif modifiÉ par le sÉnat
Le Sénat a adopté, avec l’avis favorable de sa commission des finances, un amendement du Gouvernement visant à préciser les modalités d’application du dispositif d’indexation institué par l’Assemblée nationale.
Cette modification prévoit, en premier lieu, que l’actualisation, qui s’applique au titre des exercices clos à compter du 1er janvier de l’année au titre de laquelle elle est opérée, est effectuée à partir de l’évolution de l’inflation constatée au titre de l’année précédente.
Elle précise, en second lieu, que le mécanisme d’actualisation annuelle s’applique aux exercices clos à compter du 1er janvier 2023, en tenant compte de la variation de l’indice des prix à la consommation hors tabac constatée au titre de 2022.
II. La position du Rapporteur gÉnÉral
Le rapporteur général salue cette clarification rédactionnelle qui évite une application rétroactive du mécanisme et le sécurise donc juridiquement.
Il propose de voter cet article ainsi modifié.
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Article 4 sexies A (nouveau)
Suppression de quatre dépenses fiscales inefficientes
I. Les dispositions adoptÉes par le SÉnat
A. État du droit
Au cours du précédent quinquennat, le Gouvernement et le Parlement se sont engagés dans un travail essentiel de rationalisation des dépenses fiscales qui s’est traduit, jusqu’ici, par la suppression de 70 dépenses fiscales et dispositifs dérogatoires inefficients. Depuis 2018, la loi de finances de l’année prévoit un article dédié à la suppression des dépenses fiscales inefficientes ([147]). L’article 9 du présent projet de loi de finances (PLF) prévoit la suppression de huit dépenses fiscales.
● L’article 1131 du code général des impôts (CGI) prévoit une exonération des droits de mutation pour les dons et legs à l’État d’œuvres (œuvres d’art, livres, objets de collection et documents) de haute valeur artistique ou historique, lorsque l’offre de donation est réalisée dans le délai prévu pour la déclaration de mutation par décès ou pour l’enregistrement de l’acte constatant l’acquisition ou la transmission. L’offre de donation doit recevoir un agrément du ministre de l’économie et des finances pour bénéficier de l’exonération. À noter que le donateur peut conserver la jouissance du bien donné et prévoir que cette réserve de jouissance bénéficiera après sa mort à son conjoint.
Le tome 2 de l’Évaluation des voies et moyens, annexé au présent PLF, fait état d’une dépense fiscale n’ayant aucune incidence budgétaire et ne bénéficiant à aucun ménage.
● L’article 1395 B bis du CGI prévoit une exonération de taxe foncière sur les propriétés non bâties (TFPNB) perçue par les communes et leurs établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) pour certains terrains situés dans les zones humides définies au 1° du I de l’article L. 211-1 du code de l’environnement. Cette exonération s’élève à 50 % de la TFNB due. Elle est portée à 100 % lorsque les zones humides sont situées dans certaines zones naturelles définies par le code de l’environnement. Le bénéfice de l’exonération est subordonné à l’inscription des terrains sur une liste arrêtée par le maire sur proposition de la commission communale des impôts directs et à un engagement de gestion souscrit pour cinq ans par le propriétaire, portant notamment sur la préservation de l’avifaune et le non-retournement des parcelles.
Le tome 2 de l’Évaluation des voies et moyens, annexé au présent PLF, fait état d’une dépense fiscale n’ayant aucune incidence budgétaire et ne bénéficiant à aucun ménage.
● L’article 1647 C septies du CGI prévoit un crédit d’impôt, imputé sur le montant des cotisations foncières des entreprises (CFE), égal à 750 euros par salarié employé depuis au moins un an par une micro-entreprise dans un établissement situé dans une zone de restructuration de la défense (ZRD). L’entreprise doit employer au plus onze salariés et réaliser soit un chiffre d’affaire inférieur à deux millions d’euros, soit un bilan inférieur à deux millions d’éros. Elle doit exercer une activité commerciale ou artisanale.
Le tome 2 de l’Évaluation des voies et moyens, annexé au présent PLF, fait état d’une dépense fiscale n’ayant aucune incidence budgétaire et ne bénéficiant à aucun ménage.
● L’article 78 de la loi de finances pour 2020 a modifié l’article 41 septies de la loi du 2 juillet 2004 relative à l’octroi de mer pour prévoir la mise en place d’une expérimentation relative à l’exonération de TVA sur la vente de biens dans certaines communes de Guadeloupe ou de Martinique réalisées auprès des touristes effectuant une croisière maritime. L’entrée en vigueur de ce dispositif est conditionnée à la validation par la Commission européenne de sa conformité au droit de l’Union européenne. Cette entrée en vigueur n’étant toujours pas effective en raison des délais de validation du dispositif par la Commission et de rédaction du décret d’application par le Gouvernement, l’article 11 septies du présent projet de loi de finances prévoit la prorogation de l’expérimentation jusqu’au 1er janvier 2026 et la réalisation d’une évaluation du dispositif avant le 1er juillet 2025.
De façon logique, le tome 2 de l’Évaluation des voies et moyens, annexé au présent PLF, fait état d’une dépense fiscale n’ayant aucune incidence budgétaire jusqu’à 2023, date à laquelle le Gouvernement anticipe l’entrée en vigueur du dispositif. Le coût annuel de cette exonération est alors anticipé à 1 million d’euros.
B. Dispositif proposÉ
Le présent article adopté par le Sénat a été introduit par un amendement de M. Michel Canévet (Union centriste) et plusieurs de ses collègues, après un avis de sagesse de la commission des finances et un avis défavorable du Gouvernement.
Il prévoit la suppression des quatre dépenses fiscales mentionnées supra :
– l’exonération de taxe foncière sur les propriétés non bâties en faveur des zones humides ;
– le crédit d’impôt sur la cotisation foncière des entreprises pour les micro-entreprises implantées en ZRD ;
– l’exonération des mutations à titre gratuit ou onéreux portant sur les œuvres d’art, livres, objets de collection ou documents de haute valeur artistique ou historique, dont le nouveau propriétaire fait don à l’État ;
– l’exonération de TVA des livraisons de biens dans certaines communes de Guadeloupe ou de Martinique réalisées auprès des touristes effectuant une croisière.
II. La position du Rapporteur gÉNÉral
Le Rapporteur général se félicite de la démarche de rationalisation des dépenses fiscales inefficientes, conduite par le Gouvernement et le Parlement.
Il est vrai qu’un coût et un nombre de bénéficiaire nul depuis des années, plaident à première vue pour l’abrogation des dépenses fiscales concernées. Cependant, ces informations peuvent refléter des situations différentes et se trouver justifiées. C’est notamment le cas de :
– l’exonération de TVA pour les biens vendus aux touristes en croisière maritime dans certaines communes de la Guadeloupe et de la Martinique qui n’est pas encore entrée en vigueur ;
– l’exonération de droits de mutation pour don à l’État d’œuvres d’art qui est, par nature, une dépense fiscale utilisée de façon exceptionnelle certaines années. Elle a par exemple été utilisée en 1973 lors du don de cinquante et un tableaux de Pablo Picasso ;
– l’exonération de taxe foncière sur les propriétés non bâties en faveur des zones humides qui est un dispositif nouveau, qui s’inscrit dans la reconnaissance et la valorisation progressive des zones humides.
Ainsi, seule la suppression du crédit d’impôt sur la cotisation foncière des entreprises pour les micro-entreprises implantées en ZRD semble aujourd’hui pertinente.
C’est pourquoi le Rapporteur général propose de modifier l’article 4 sexies A en retenant uniquement l’abrogation du crédit d’impôt sur la cotisation foncière des entreprises pour les micro-entreprises implantées en ZRD prévu à l’article 1647 C septies du CGI.
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Article 4 sexies
Augmentation du plafond applicable au titre du taux réduit d’impôt
ur les sociétés des petites et moyennes entreprises
I. Les dispositions adoptÉes
A. État du droit
L’impôt sur les sociétés est assis sur les bénéfices réalisés par les entreprises, desquels est retranché l’ensemble des charges exposées dans l’intérêt de l’exploitation.
À cette assiette est appliqué un taux normal, qui a fait l’objet de plusieurs trajectoires de baisse successives, prévu au I de l’article 219 du code général des impôts (CGI).
Toutefois, le taux normal s’applique sous réserve de taux réduits concernant certains types d’entreprises ou de revenus.
Un taux réduit de 15 % s’applique ainsi pour les petites et moyennes entreprises (PME) réalisant un chiffre d’affaires inférieur à 10 millions d’euros et dont le capital est détenu à 75 % au moins par des personnes physiques, dans la limite de 38 120 euros de bénéfices (b du I de l’article 219 du CGI).
Le seuil de chiffre d’affaires permettant à une entreprise de bénéficier du taux réduit a été porté à 10 millions d’euros par l’article 18 de la loi de finances pour 2021 [148], il s’élevait à 7,63 millions d’euros auparavant.
Une contribution additionnelle s’ajoute à l’impôt sur les sociétés et augmente la charge fiscale pesant sur les entreprises.
Cette contribution sociale sur les bénéfices (CSB), entrée en vigueur au 1er janvier 2000 et codifiée à l’article 235 ter ZC du CGI, s’applique ainsi aux entreprises réalisant un chiffre d’affaires supérieur à 7,63 millions d’euros, sous réserve d’un abattement de 763 000 euros pour un exercice de douze mois. Ces montants, qui étaient alignés jusqu’en 2021 sur le plafond de chiffre d’affaires permettant de bénéficier du taux réduit d’impôt sur les sociétés, n’ont pas été modifiés.
Fixée au taux de 3,3 % de l’impôt sur les sociétés dû par l’entreprise, cette contribution, hors prise en compte de l’abattement, porte en pratique le taux d’impôt sur les sociétés à 25,825 % et, pour les entreprises dont le chiffre d’affaires est situé entre 7,63 et 10 millions d’euros, à 15,495 %.
La contribution additionnelle devrait représenter un montant de 1,6 milliard d’euros en 2022, d’après les données associées au PLF 2023.
B. Dispositif proposÉ
Le présent article, retenu par le Gouvernement dans le texte sur lequel il a engagé sa responsabilité en application de l’article 49, alinéa 3, de la Constitution reprend un amendement adopté par la commission des finances de l’Assemblée nationale à l’initiative de Jean-Paul Mattei (Démocrate) et sous-amendé par le Gouvernement en séance publique.
L’article modifie le b et le f du I de l’article 219 du Code général des impôts, en augmentant le plafond de bénéfices soumis au taux réduit d’impôt sur les sociétés, qui passerait de 38 120 euros à 42 500 euros.
C. Dispositif modifiÉ
Le Sénat a adopté, à l’initiative du rapporteur général de sa commission des finances ayant recueilli un avis défavorable de la part du Gouvernement, un amendement qui vise, d’une part, à rehausser le plafond des bénéfices soumis au taux réduit de 15 % à hauteur de 51 530 euros et, d’autre part, à aligner le seuil du chiffre d’affaires d’assujettissement à la contribution sociale sur les bénéfices sur le seuil de chiffre d’affaires en-deçà duquel une PME applique le taux réduit d’impôt sur les sociétés, à savoir 10 millions d’euros.
II. La position du Rapporteur gÉnÉral
Face au coût budgétaire entrainé par les ajouts du Sénat, il est proposé de revenir à la version du présent article telle qu’issue de l’Assemblée nationale.
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Article 4 nonies
Instauration d’une contribution temporaire de solidarité
sur les secteurs des combustibles fossiles
I. Les dispositions adoptÉes
A. État du droit
Le 30 septembre 2022, le Conseil de l’Union européenne a approuvé une série de propositions faites par la Commission européenne, l’une d’entre elles visant à instaurer sur le territoire de l’Union européenne (UE) une contribution de solidarité temporaire sur les secteurs des combustibles fossiles. En invoquant de « graves difficultés » dans l’approvisionnement en produits énergétiques au sens du paragraphe 1 de l’article 122 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE), le Conseil a pu adopter de façon accélérée et sans le Parlement européen, les mesures prévues par le règlement (UE) 2022/1854 du Conseil du 6 octobre 2022 ([149]) .
Les considérants du règlement (UE) 2022/1854 établissent le constat que, sans que leur structure de coût soit sensiblement affectée, les entreprises des secteurs des combustibles fossiles ont vu « leurs bénéfices bondir en raison des circonstances soudaines et imprévisibles de la guerre d’agression menée par la Russie contre l’Ukraine, de la réduction de l’approvisionnement en énergie et de l’augmentation de la demande en raison des températures exceptionnellement élevées. » ([150])
L’instauration coordonnée à l’échelle de l’Union européenne d’une contribution temporaire sur ces secteurs a vocation à permettre aux États membres de dégager des marges de manœuvre budgétaires pour soutenir leurs concitoyens et leurs entreprises les plus affectés par la crise des prix de l’énergie. L’objectif poursuivi est aussi que les entreprises du secteur des énergies fossiles qui ont engrangé des bénéfices exceptionnels du fait de cette crise contribuent à financer ces dispositifs de soutien. Le considérant n° 51 du règlement précise ainsi que « la contribution de solidarité temporaire devrait servir de mesure de redistribution et faire en sorte que les entreprises concernées qui ont réalisé des bénéfices excédentaires en raison des circonstances imprévues contribuent proportionnellement à remédier à la crise énergétique sur le marché intérieur. »
L’article 1er du règlement (UE) 2022/1854 prévoit que le règlement en question vise notamment à « établir des règles relatives à une contribution de solidarité temporaire obligatoire de la part des entreprises et des établissements stables de l’Union exerçant leurs activités dans les secteurs du pétrole brut, du gaz naturel, du charbon et du raffinage ».
L’article 2 de ce même règlement prévoit trois définitions importantes quant à la mise en œuvre de cette contribution.
Le 17) de cet article 2 définit ainsi « les entreprises et établissements stables de l’Union exerçant des activités dans les secteurs du pétrole brut, du gaz naturel, du charbon et du raffinage » comme « les entreprises ou les établissements stables de l’Union qui génèrent au moins 75 % de leur chiffre d’affaires dans des activités économiques relevant des secteurs des industries extractives, du raffinage du pétrole ou de la fabrication de produits de cokerie, tels qu’ils figurent dans le règlement (CE) n° 1893/2006 du Parlement européen et du Conseil ».
Le 18) définit les « bénéfices excédentaires » au sens du règlement comme « les bénéfices imposables, déterminés conformément aux règles fiscales nationales, de l’exercice fiscal 2022 et/ou de l’exercice fiscal 2023 et pendant toute leur durée, générés par des activités exercées au niveau d’entreprises et d’établissements stables de l’Union exerçant des activités dans les secteurs du pétrole brut, du gaz naturel, du charbon et du raffinage, qui dépassent de plus de 20 % la moyenne des bénéfices imposables des quatre exercices fiscaux commençant le 1er janvier 2018 ou après cette date ».
Le 19) définit la « contribution de solidarité » comme « une mesure temporaire ciblant les bénéfices excédentaires des entreprises et des établissements stables de l’Union exerçant des activités dans les secteurs du pétrole brut, du gaz naturel, du charbon et du raffinage afin d’atténuer les effets de l’évolution exceptionnelle des prix sur les marchés de l’énergie pour les États membres, les consommateurs et les entreprises ».
Le chapitre III du règlement (UE) 2022/1854 qui porte sur les « mesures concernant les secteurs du pétrole brut, du gaz naturel, du charbon et du raffinage » fixe les modalités d’application de la contribution temporaire de solidarité.
L’article 16 prévoit que le taux applicable à la contribution est de 33 % et que celle-ci « s’applique en plus des impôts et prélèvements réguliers applicables conformément au droit national d’un État membre ».
L’article 18 précise « la nature temporaire » de la contribution qui ne doit s’appliquer qu’aux bénéfices excédentaires dégagés au cours de l’exercice fiscal 2022 et/ou de l’exercice fiscal 2023.
Enfin, l’article 17 impose que les recettes tirées de cette contribution soient utilisées dans le but de générer « une incidence suffisamment rapide » sur l’un des objets suivants :
– des mesures de soutien financier en faveur des clients finals d’énergie ;
– des mesures de soutien financier visant à contribuer à la réduction de la consommation d’énergie ;
– des mesures de soutien financier visant à soutenir les entreprises des secteurs à forte intensité énergétique, à condition qu’elles soient subordonnées à des investissements dans les énergies renouvelables, l’efficacité énergétique ou d’autres technologies de décarbonation ;
– des mesures de soutien financier visant à développer l’autonomie énergétique ;
– le financement commun de mesures visant à réduire les effets néfastes de la crise énergétique, y compris le soutien à la protection de l’emploi ainsi qu’à la reconversion et au perfectionnement de la main-d’œuvre, ou à promouvoir les investissements dans l’efficacité énergétique et les énergies renouvelables.
B. Dispositif adoptÉ par l’assemblÉe nationale
Le présent article additionnel est issu d’un amendement du Gouvernement – déposé mais non examiné en séance publique – retenu dans le cadre du texte sur lequel il a engagé sa responsabilité en application de l’article 49, alinéa 3, de la Constitution. Il vise à transposer en droit national la contribution de solidarité temporaire sur les secteurs des combustibles fossiles décidée au niveau européen et prévue par le règlement (UE) 2022/1854 du Conseil du 6 octobre 2022.
Cette contribution temporaire de solidarité de 33 % est applicable aux entreprises des secteurs du pétrole, du charbon, du raffinage et du gaz pour leurs profits supérieurs de 20 % à la moyenne de leurs profits des quatre années précédentes.
C. Dispositif modifiÉ par le sÉnat
Le Sénat a adopté, à l’initiative du Gouvernement ayant reçu un avis favorable de la commission des finances, un amendement rédactionnel visant à clarifier le champ d’application de la contribution temporaire de solidarité, en renvoyant directement aux dispositions du point 17 de l’article 2 du règlement (UE) 2022/1854 du Conseil du 6 octobre 2022 (v. supra), afin d’assurer une identité de champ entre le règlement et la contribution nationale.
II. La position du Rapporteur gÉnÉral
Le rapporteur général salue cette sécurisation juridique du champ de la contribution temporaire de solidarité et propose de voter le présent article ainsi modifié.
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Article 4 decies
Prorogation de la déduction spéciale en faveur des entreprises qui achètent des œuvres originales d’artistes vivants ou des instruments de musique
I. Les dispositions adoptÉes
A. État du droit
L’article 238 bis AB du code général des impôts (CGI) permet aux entreprises ayant acheté des œuvres originales d’artistes vivants ou des instruments de musique de déduire du résultat de l’exercice d’acquisition et des quatre années suivantes, par fractions égales, une somme correspondant au prix d’acquisition. Ces œuvres ou instruments doivent être inscrits à un compte d’actif immobilisé. Le mécanisme ne bénéficie qu’aux seules entreprises pouvant techniquement créer un compte de réserve spécial au passif du bilan de l’entreprise ; les autres entreprises, dont les professions libérales, en sont exclues.
Afin de bénéficier de l’exonération, l’entreprise concernée doit exposer dans un lieu accessible au public ou aux salariés, à l’exception de leurs bureaux, le bien qu’elle a acquis pour la période correspondant à l’exercice d’acquisition et aux quatre années suivantes. S’agissant de l’instrument de musique, l’entreprise doit s’engager à prêter ces instruments à titre gratuit aux artistes-interprètes qui en font la demande.
Le prix d’acquisition retenu pour le calcul de la déduction fiscale ne peut excéder le plafond prévu par l’article 238 bis du CGI concernant le mécénat d’entreprise, soit 20 000 euros ou 0,5 % du chiffre d’affaires si ce dernier montant est plus élevé.
Ce dispositif, dont le coût annuel est évalué à 3 millions d’euros, a été borné jusqu’au 31 décembre 2022 en loi de finances pour 2020 [151].
B. Dispositif adoptÉ par l’assemblÉe nationale
Le présent article, retenu par le Gouvernement dans l’élaboration du texte sur lequel il a engagé sa responsabilité en application de l’article 49, alinéa 3, de la Constitution, est issu d’un amendement de Mme Marina Ferrari et plusieurs membres du groupe Démocrate. Il proroge la déduction de l’article 238 bis AB du CGI jusqu’au 31 décembre 2025, soit pour trois années supplémentaires.
C. Dispositif modifiÉ par le SÉNAT
Le Sénat a adopté, à l’initiative du rapporteur général de sa commission des finances ayant recueilli un avis défavorable de la part du Gouvernement, un amendement limitant la prorogation de la déduction à l’acquisition des seuls instruments de musique.
II. La position du Rapporteur général
Le rapporteur général considère, contrairement à son homologue du Sénat, que le dispositif n’est pas « trop lâche ». Il en veut pour preuve la modestie de son coût annuel, de trois millions d’euros.
Ce dispositif vient au soutien de la création contemporaine et de l’art en entreprise.
De fait, il est proposé de ne pas retenir les modifications apportées par le Sénat et de revenir à la version de cet article telle qu’adoptée par l’Assemblée nationale.
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Article 4 undecies A (nouveau)
Prorogation du crédit d’impôt pour dépenses de conception de nouveaux produits exposés par les entreprises exerçant des métiers de l’art
I. Les dispositions adoptÉes par l’AssemblÉe nationale
A. État du droit
L’article 244 quater O du code général des impôts (CGI) prévoit un crédit d’impôt égal à 10 % – porté à 15 % pour les entreprises bénéficiant du label « patrimoine vivant » – des sommes dépensées pour la conception de nouveaux produits par les entreprises exerçant des métiers de l’art.
Pour un coût budgétaire prévisionnel de 47 millions d’euros en 2023 ([152])
– contre 30 millions d’euros prévus en 2022 et 25,7 millions d’euros exécutés en 2021 ([153]) – l’avantage fiscal bénéficie à environ 2 400 entreprises artisanales et industrielles du secteur de l’horlogerie, de la bijouterie, de la joaillerie, de l’orfèvrerie, de la lunetterie, des arts de la table, du jouet, de la facture instrumentale et de l’ameublement, ainsi qu’à des entreprises du patrimoine vivant.
Conformément au VIII de l’article 244 quater O du CGI, ce crédit d’impôt bénéficie aux dépenses exposées par les entreprises concernées jusqu’au 31 décembre 2023 ([154]).
B. Dispositif adoptÉ par le sÉnat
Le Sénat a adopté, à l’initiative de Catherine Dumas et de Bruno Retailleau (Les républicains) ayant recueilli un avis favorable de la commission des finances et défavorable de la part du Gouvernement, un amendement portant article additionnel visant à prolonger d’un an le crédit d’impôt pour dépenses de conception de nouveaux produits exposés par les entreprises exerçant des métiers de l’art, jusqu’au 31 décembre 2024.
II. La position du Rapporteur gÉNÉral
Le rapporteur général ne juge pas opportun le fait de prolonger dès à présent, sans évaluation, ce crédit d’impôt qui n’est pas encore arrivé à expiration.
Il est proposé de supprimer le présent article additionnel.
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Article 4 duodecies A (nouveau)
Crédit d’impôt pour les entreprises agricoles
générant des crédits carbone labellisés
I. Les dispositions adoptées
A. état du droit
Le label bas-carbone (LBC), créé en 2019 [155], permet de certifier des projets de réduction d’émissions de gaz à effet de serre et de séquestration carbone. Ce label est attribué par le ministère de la transition écologique et solidaire, mais également des organismes partenaires, comme l’institut de l’économie pour le climat (I4CE).
Ainsi, un agriculteur peut s’engager dans le label bas-carbone en augmentant, par exemple, la matière organique des sols au moyen de diverses techniques agronomiques comme l’agroécologie et l’agriculture de conservation. En élevage et en cultures végétales, il lui est possible d’utiliser l’agroforesterie, notamment en plantant des haies, ou de valoriser les déjections animales. D’une manière générale, ces initiatives ont un impact global positif sur l’environnement.
Afin d’être certifiée, les exploitations peuvent être accompagnées financièrement dans leurs projets par les entreprises ou collectivités territoriales qui souhaitent compenser leurs émissions grâce à des crédits carbones. Cette labellisation peut donc être financée de manière partenariale entre les exploitations et les acteurs publics ou privés.
B. Dispositif adoptÉ par le SÉNAT
Le Sénat a adopté, sur l’initiative de Pierre Louault (Union centriste – UC) et de Franck Ménonville (Les indépendants) ayant recueilli un avis de sagesse de la commission et défavorable du Gouvernement, deux amendements identiques portant article additionnel visant à créer un crédit d’impôt égal à 2 500 euros au titre de la labellisation bas-carbone.
II. La position du Rapporteur général
Le rapporteur général considère que les initiatives soutenant les efforts des exploitants agricoles en matière de neutralité carbone sont à saluer, mais que la création d’une dépense fiscale supplémentaire n’est pas le bon vecteur. Le soutien budgétaire est à privilégier.
Au demeurant, l’incitation économique à rechercher une labellisation LBC est déjà présente puisque la transformation agroécologique de l’exploitation peut être financée par les entreprises souhaitant acheter des crédits carbones à l’occasion de la compensation de leurs émissions.
Aussi, il est proposé de supprimer cet article.
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Article 4 duodecies
Prorogation du crédit d’impôt pour les investissements en Corse
et évaluation du dispositif
I. Les dispositions adoptÉes
A. État du droit
Le crédit d’impôt pour investissements en Corse (CIIC), prévu par l’article 244 quater E du code général des impôts (CGI), bénéficie aux petites et moyennes entreprises ([156]) en Corse.
Le crédit d’impôt concerne les entreprises relevant d’un régime réel d’imposition qui réalisent certains investissements, autres que de remplacement, en Corse pour les besoins d’une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale et qui sont financés sans aide publique pour 25 % au moins de leur montant.
Le bénéfice du crédit d’impôt, égal à 20 % du prix de revient hors taxe ou à 30 % pour les très petites entreprises, est acquis si l’investissement réalisé est conservé pendant une période d’au moins cinq ans ou pendant la durée normale de son utilisation si elle est inférieure.
Le dispositif a été prorogé jusqu’au 31 décembre 2023 par l’article 46 de la troisième loi de finances rectificative pour 2020 ([157]).
B. Dispositif adoptÉ par l’assemblÉe nationale
Le présent article, retenu par le Gouvernement dans l’élaboration du texte sur lequel il a engagé sa responsabilité en application de l’article 49, alinéa 3, de la Constitution, reprend un amendement adopté en commission des finances à l’initiative de Michel Castellani (Libertés, indépendants, outre-mer et territoires – LIOT), qui vise, d’une part, à proroger le CIIC jusqu’au 31 décembre 2025 et, d’autre part, à requérir du Gouvernement un rapport remis au Parlement évaluant le coût, l’efficacité et les pistes d’évolution envisageables du CIIC avant le 1er juillet 2023.
C. Dispositif modifiÉ par le sÉnat
Le Sénat a adopté, à l’initiative de Jean-Jacques Panunzi (Les Républicains) ayant recueilli un avis de sagesse de la commission des finances et défavorable de la part du Gouvernement, un amendement visant à proroger le CIIC jusqu’au 31 décembre 2027.
II. La position du Rapporteur gÉnÉral
Le rapporteur général remarque que le dispositif du CIIC est utile pour le maillage économique Corse, puisqu’il a bénéficié, en 2021, à 5 300 entreprises. Il convient pourtant de ne pas faire l’impasse sur son coût, de 109 millions d’euros.
De fait, il est raisonnable de ne pas proroger le dispositif, dès à présent, pour une durée trop longue, ce d’autant plus qu’a été par ailleurs votée au sein du présent article une évaluation devant être remise au Parlement avant le 1er juillet 2023. Cette évaluation permettra d’en évaluer l’efficacité et mettra en lumière les voies d’amélioration envisageables.
Aussi, la position de l’Assemblée nationale, qui a voté la prolongation de ce dispositif jusqu’au 31 décembre 2025, est équilibrée ; il sera donc proposé d’y revenir et de ne pas retenir la modification adoptée par le Sénat.
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Article 4 terdecies
Précision sur l’exclusion des meublés de tourisme non professionnels du bénéfice du crédit d’impôt pour les investissements en Corse
I. Les dispositions adoptÉes
A. État du droit
Le crédit d’impôt pour investissements en Corse (CIIC), prévu par l’article 244 quater E du code général des impôts (CGI), bénéficie aux petites et moyennes entreprises ([158]) en Corse.
Le crédit d’impôt concerne les entreprises relevant d’un régime réel d’imposition qui réalisent certains investissements, autres que de remplacement, en Corse pour les besoins d’une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale et qui sont financés sans aide publique pour 25 % au moins de leur montant.
À l’initiative des députés de la commission des finances, l’article 22 de la loi de finances pour 2019 a spécifiquement exclu la gestion et la location de meublés situés en Corse du bénéfice du CIIC à compter du 1er janvier 2019 ([159]), afin que les constructeurs de résidences secondaires destinées à la location meublée ne puissent plus bénéficier d’une telle aide fiscale.
Le bénéfice du crédit d’impôt, égal à 20 % du prix de revient hors taxe ou à 30 % de ce prix pour les très petites entreprises, est acquis si l’investissement réalisé est conservé pendant une période d’au moins cinq ans ou pendant la durée normale de son utilisation si elle est inférieure.
Le dispositif a été prorogé jusqu’au 31 décembre 2023 par l’article 46 de la troisième loi de finances rectificative pour 2020 ([160]).
B. Dispositif adoptÉ par l’assemblÉe nationale
Le présent article, retenu par le Gouvernement dans l’élaboration du texte sur lequel il a engagé sa responsabilité en application de l’article 49, alinéa 3, de la Constitution, reprend un amendement adopté en commission des finances à l’initiative de Jean-Félix Acquaviva (Libertés, indépendants, outre-mer et territoires – LIOT) et apportant certaines précisions au CIIC.
Le a du 1° du présent article explicite la possibilité pour l’exploitant unique d’un établissement assimilable à une résidence de tourisme de bénéficier du CIIC.
Le b du 1° prévoit que cette possibilité s’applique indépendamment du nombre minimum de lits caractérisant la définition d’une résidence de tourisme.
Le 2° étend les précisions établies par le 1° pour prévoir que le crédit d’impôt est égal à 20 % du prix de revient hors taxes des établissements assimilables à des résidences de tourisme.
C. Dispositif modifiÉ par le sÉnat
Le Sénat a adopté, à l’initiative de Jean-Jacques Panunzi (Les Républicains) ayant recueilli un avis de sagesse de la commission des finances et favorable de la part du Gouvernement, un amendement visant à clarifier la rédaction du présent article en maintenant l’exclusion des locations meublées qui ne sont pas exercées dans le cadre d’une activité professionnelle, d’une part, et de garantir l’éligibilité au CIIC des établissements de tourisme gérés par un exploitant unique s’ils comportent moins de 50 lits, d’autre part.
II. La position du Rapporteur gÉNÉral
Le rapporteur général prend acte de la clarification rédactionnelle opérée à l’initiative du Sénat et propose de retenir le présent article ainsi modifié.
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Article 4 quindecies
Prorogation du crédit d’impôt formation des dirigeants d’entreprises
I. Les dispositions adoptÉes
A. État du droit
Instauré en 2005 ([161]), l’article 244 quater M du code général des impôts (CGI) permet aux entreprises relevant d’un régime réel d’imposition sur les bénéfices d’être éligibles à un crédit d’impôt au titre des dépenses de formation du dirigeant. Le chef d’entreprise s’entend des exploitants individuels, des gérants, des présidents, des administrateurs, des directeurs généraux et des membres du directoire.
Le montant du crédit d’impôt correspond au nombre d’heures passées en formation multiplié par le taux horaire brut du SMIC, dans la limite d’un plafond de 40 heures de formation par année civile et par entreprise ([162]) . Il est imputé sur l’impôt dû au titre de l’année au cours de laquelle les heures de formation ont été suivies, l’excédent éventuel étant restitué à l’entreprise.
Le montant de ce crédit d’impôt a été doublé – à 885,6 euros – pour les microentreprises au sens du droit européen ([163]) par l’article 19 de la loi de finances pour 2022 ([164]).
Ce crédit d’impôt est réservé aux heures de formation effectuées jusqu’au 31 décembre 2022.
B. Dispositif adoptÉ par l’assemblÉe nationale
Le présent article retenu par le Gouvernement dans le texte sur lequel il a engagé sa responsabilité en application de l’article 49, alinéa 3, de la Constitution, reprend un amendement adopté en commission des finances à l’initiative de Sylvain Maillard (Renaissance). Il vise à étendre le dispositif jusqu’au 31 décembre 2024.
C. Dispositif modifié par le sénat
Le Sénat a adopté, à l’initiative de sa commission des finances ayant reçu un avis favorable de la part du Gouvernement, un amendement visant à obtenir un rapport d’évaluation du crédit d’impôt pour la formation des dirigeants d’entreprises au plus tard le 30 septembre 2023.
II. La position du Rapporteur général
Le rapporteur général salue la volonté d’évaluer les dépenses publiques dont témoigne l’amendement adopté par le Sénat et propose de retenir le présent article dans sa version issue du Sénat.
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Article 4 sexdecies
Extension de l’exonération de taxe poids lourds pour les agriculteurs
I. les dispositions adoptÉes par l’assemblÉe nationale
A. L’État du droit
Dans le cadre de la création du nouveau code des impositions sur les biens et services opérée par l’ordonnance n° 2021-1843 du 22 décembre 2021 ([165]), la taxe à l’essieu a été renommée « taxe annuelle sur les véhicules lourds de transport de marchandises ». Les dispositions la concernant figurent aux articles L. 421-145 à L. 421-156 de ce code.
Le tarif de cette taxe varie en fonction du nombre d’essieux, de la masse en charge maximale techniquement admissible, de la présence ou non d’un système de suspension pneumatique et de la nature du véhicule. Son montant s’échelonne entre 16 et 932 euros, en fonction de ces critères.
Aux termes de l’article L. 421-155 de ce code, les véhicules affectés par les exploitants agricoles au transport de leurs récoltes en sont exonérés.
B. Le dispositif proposÉ
Le présent article a été inséré dans le texte considéré comme adopté par l’Assemblée nationale en application de l’article 49, alinéa 3, de la Constitution.
Il étend l’exonération de taxe annuelle sur les véhicules lourds de transport de marchandises dont bénéficient les véhicules affectés par les exploitants agricoles au transport de leurs récoltes.
Est ainsi prévue l’exonération des véhicules :
– utilisés pour le transport de végétaux, d’animaux, de minéraux ou de marchandises d’origine végétale, animale ou minérale qui sont nécessaires à une activité agricole ou forestière ou qui en sont issues ;
– dont l’entreprise affectataire est soit un exploitant agricole ou forestier, soit une coopérative agréée dont l’objet est la mise à disposition de matériel agricole ou de salariés assurant la conduite de matériel agricole ;
– et dont les trajets « sont effectués au départ ou à destination de l’exploitation agricole ou forestière ».
Le bénéfice de l’exonération demeurerait subordonné au respect des conditions prévues par les règlements européens de minimis. En conséquence, cette exonération n’entrerait effectivement en vigueur qu’à une date fixée par décret au plus tard un mois après la réception par les autorités françaises de l’autorisation de la Commission européenne.
II. Les modifications apportÉes par le sÉnat
Le Sénat a adopté un amendement de précision de M. Pierre-Jean Verzelen, avec l’avis favorable de la commission et du Gouvernement.
Cet amendement complète la liste des affectataires de véhicules exonérés en y ajoutant les entreprises de travaux agricoles et les entreprises de travaux forestiers.
III. La position du rapporteur gÉnÉral
Le rapporteur général propose d’adopter cet article sans autre modification qu’une précision rédactionnelle.
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Article 4 septdecies A (nouveau)
Exonération de malus poids et de malus écologique des véhicules
affectés aux besoins de la protection civile ou de la lutte contre les incendies
I. les dispositions adoptÉes par le sÉnat
A. L’État du droit
Les taxes sur les véhicules à moteur, qu’elles soient perçues lors de l’immatriculation ou sur une base annuelle, ont subi une importante refonte en loi de finances pour 2021 ([166]). Les dispositions les concernant ont, de plus, été recodifiées dans le nouveau code des impositions sur les biens et services, entré en vigueur le 1er janvier 2022 ([167]).
Lors de l’immatriculation d’un véhicule de tourisme, outre un tarif fixe de 11 euros et une taxe régionale, sont notamment dues :
– une taxe sur les émissions de dioxyde de carbone, dite « malus écologique » ([168]) ;
– une taxe sur la masse en ordre de marche, dite « malus poids » ([169]).
Le « malus écologique » s’applique, en fonction des caractéristiques du véhicule, si les émissions en dioxyde de carbone ou la puissance administrative du véhicule dépassent certains seuils. En 2022, pour les véhicules relevant du nouveau dispositif d’immatriculation ([170]), le seuil de déclenchement est de 128 grammes de CO2/km pour une taxe de 50 euros. Un barème progressif est prévu, dont le montant maximal, de 40 000 euros, s’applique aux immatriculations de véhicules dont les émissions de CO2 sont supérieures à 223 g/km. De plus, en tout état de cause, le montant du malus est plafonné à 50 % du prix toutes taxes comprises du véhicule. Un durcissement de ce barème doit entrer en vigueur le 1er janvier 2023.
Le « malus poids », qui s’applique aux véhicules de plus de 1 800 kg, s’élève à 10 euros/kg au-delà de ce seuil.
Le montant cumulé de ces deux malus ne peut excéder 40 000 euros.
Sont exonérés de ces malus :
– les véhicules accessibles en fauteuil roulant et ceux acquis par une personne ayant une carte « mobilité inclusion » ou une carte d’invalidité militaire, ou ayant un enfant mineur ou à charge dans son foyer fiscal détenant une telle carte ;
– les véhicules électriques ou à hydrogène ainsi que les véhicules hybrides rechargeables ayant une autonomie en mode tout électrique en ville supérieure à 50 km.
S’agissant du « malus poids », une réduction de 400 kg s’applique aux véhicules détenus par une personne morale et comportant au moins huit places assises. En outre, un abattement de 200 kg par enfant est appliqué aux véhicules détenus par une famille d’au moins trois enfants.
S’agissant du « malus écologique », une réduction s’applique aux véhicules détenus par une personne morale et comportant au moins huit places assises. Elle s’élève à 80 g/km si la taxe est calculée en fonction des émissions de CO2 ou à quatre chevaux-vapeur si la taxe est calculée en fonction de la puissance administrative du véhicule. Une réduction de 20 grammes par kilomètre ou d’un cheval administratif par enfant est également applicable aux véhicules détenus par une famille d’au moins trois enfants.
B. Le dispositif proposÉ
Le présent article résulte de l’adoption, par le Sénat, avec l’avis favorable de la commission et du Gouvernement, de dix amendements identiques, déposés par le rapporteur général M. Jean‑François Husson au nom de la commission des Finances, ainsi que par M. Arnaud Bazin, Mme Alexandra Borchio Fontimp, Mme Marta de Cidrac, M. Thierry Cozic, M. Hervé Gillé, Mme Nathalie Delattre, M. Olivier Rietmann, Mme Dominique Estrosi Sassone et M. Pierre-Jean Verzelen.
Il exonère de malus écologique et de malus poids les véhicules affectés aux besoins de la protection civile et des services de lutte contre les incendies.
Cette mesure avait été proposée par amendement lors de l’examen en première lecture à l’Assemblée nationale, par Mme Danielle Brulebois et les membres du groupe Renaissance, Mme Sophie Mette et M. Pierre Cordier, et adoptée par la commission des Finances.
II. La position du rapporteur gÉnÉral
Le rapporteur général propose d’adopter cet article avec quelques précisions rédactionnelles. Il propose également de préciser que cette exonération prendra la forme d’un remboursement par l’administration.
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Article 4 octodecies (supprimé)
Prorogation pour un an de l’assouplissement des critères de nombre
et de lieux de représentations pour le crédit d’impôt spectacle vivant
I. Les dispositions adoptÉes par l’AssemblÉe nationale en premiÈre lecture
● La loi de finances pour 2016 ([171]) a établi à l’article 220 quindecies du CGI un crédit d’impôt en faveur des entrepreneurs de spectacles vivants (CISV). Imputé sur l’impôt sur les sociétés, il est calculé sur les dépenses de création, d’exploitation et de numérisation d’un spectacle vivant musical ou de variétés, à condition que l’entrepreneur concerné ait la responsabilité du spectacle, et qu’il supporte le coût de sa création.
Le CISV était ouvert aux entrepreneurs de spectacles vivants musicaux et de variétés jusqu’à la loi de finances pour 2019 ([172]), qui l’a réservé aux spectacles vivants musicaux. La troisième loi de finances rectificative pour 2020 ([173]) a accordé de nouveau le bénéfice de ce crédit d’impôt aux spectacles de variétés et l’a ouvert aux spectacles de théâtre. La loi de finances pour 2021 ([174]) en a ensuite retiré le bénéfice aux spectacles de théâtre en créant parallèlement, dans un nouvel article 220 sexdecies du CGI, un crédit d’impôt distinct réservé aux représentations théâtrales d’œuvres dramatiques, avec les mêmes taux et les mêmes plafonds de dépenses éligibles.
Le taux du crédit d’impôt est de 15 % des dépenses éligibles et de 30 % pour les PME et les micro-entreprises. Les dépenses éligibles sont plafonnées à 500 000 euros par spectacle et à 750 000 euros par entreprise et par exercice.
Alors que le crédit d’impôt était borné aux dépenses réalisées jusqu’au 31 décembre 2022, la loi de finances pour 2021 ([175]) l’a étendu aux dépenses réalisées jusqu’au 31 décembre 2024.
● Le spectacle doit être réalisé par des entreprises établies en France ou dans l’Union européenne, pour des coûts de création majoritairement engagés sur le territoire français avec au moins quatre représentations dans au moins trois lieux différents ; il ne doit pas être présenté dans un lieu dont la jauge est supérieure à 2 500 personnes.
La loi de finances pour 2021 ([176]) a ramené :
– de quatre à deux le nombre de représentations nécessaires,
– et de trois à deux le nombre de lieux de représentation requis.
Cet assouplissement est applicable aux spectacles dont des représentations ont été annulées en application des mesures relatives à la lutte contre la propagation de l’épidémie de covid-19, ainsi qu’aux spectacles appelés à être présentés jusqu’au 31 décembre 2022.
● Le présent article, qui résulte d’un amendement de la commission des finances ([177]), adopté à l’initiative de Mme Aurore Bergé, proroge pour un an, jusqu’au 31 décembre 2023 cet assouplissement des critères de nombre minimal de représentations et de lieux de représentation.
II. Les modifications apportÉes par le SÉnat
Sur proposition de la commission ([178]) et sur avis défavorable du Gouvernement, le Sénat a supprimé le présent article au motif que le coût du maintien des dérogations n’est pas chiffré et que le présent projet de loi de finances porte à 30 millions d’euros, en hausse de 7 millions d’euros, les crédits du Fonds national pour l’emploi pérenne dans le spectacle (FONPEPS) qui finance des aides aux entreprises et établissements publics du spectacle, ainsi qu’aux artistes et techniciens qu’ils emploient.
III. La position du Rapporteur gÉnÉral
Le rapporteur général considère que la prorogation de l’assouplissement des critères de lieux et de nombre de représentations est une réponse proportionnée à la lenteur de la reprise de la fréquentation des salles, particulièrement pour le secteur privé.
D’après le bilan des demandes d’agrément pour le CISV accordées en 2021 ([179]), 257 des 971 agréments accordés (26 %) comportaient des « petites tournées » avec deux à quatre dates de représentations. 129 agréments provisoires comptabilisaient un nombre de représentations inférieur à quatre et ne se seraient donc pas transformés en agréments définitifs si l’assouplissement des critères de lieux ou de nombre de représentations n’avait pas été adopté. 128 projets qui respectaient les conditions de quatre dates auraient pu basculer dans l’inéligibilité si une seule date avait été annulée.
L’assouplissement évite donc de mettre en difficulté les structures les plus fragiles. Par ailleurs, la mesure expose à des effets d’aubaine limités puisque les taux du crédit d’impôt et les montants de dépenses éligibles ne sont pas modifiés.
En conséquence, le rapporteur général propose de rétablir cet article dans la rédaction adoptée par l’Assemblée nationale en première lecture.
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Article 4 novodecies A (nouveau)
Hausse du taux et des plafonds de dépenses éligibles
du crédit d’impôt spectacle vivant
I. Les dispositions adoptÉes par le SÉnat
● Pour une présentation du crédit d’impôt en faveur des entrepreneurs de spectacles vivants (CISV), le rapporteur général renvoi au commentaire de l’article 4 octodecies supra.
● Le présent article résulte d’un amendement ([180]) de M. Levi et de membres du groupe Union centriste, ainsi que de quatre amendements identiques de sénateurs des groupes Les Républicains, Union centriste et Rassemblement démocratique et social européen, adoptés par le Sénat malgré un double avis défavorable de la commission et du Gouvernement.
Il porte le taux de droit commun du CISV de 15 à 20 %, et le taux applicable aux PME de 30 à 40 %. Il porte les plafonds de dépenses éligibles de 500 000 à 750 000 euros par spectacle et de 750 000 à un million d’euros par entreprise et par exercice. Ces modifications s’appliqueraient aux crédits d’impôts sollicités à compter de la publication de la présente loi de finances.
II. La position du Rapporteur gÉnÉral
Contrairement à l’assouplissement des critères de nombre et de lieux de représentations prorogé pour une année supplémentaire par l’article 4 octodecies du présent projet de loi de finances, une modification des taux ou des plafonds de dépenses éligibles du crédit d’impôt ne constitue pas une mesure de soutien du secteur du spectacle vivant adaptée à la lenteur de la reprise de la fréquentation des salles.
Le calibrage du crédit d’impôt doit en effet viser strictement à compenser les surcoûts de création et de diffusion des spectacles et doit être distingué des mesures de soutien budgétaire apportées, le cas échéant, au secteur, à l’exemple des aides mobilisées par l’État à la suite de la crise sanitaire.
Le soutien d’ampleur de l’État au spectacle vivant depuis la crise
Le spectacle vivant a bénéficié de nombreuses aides sectorielles d’urgence en 2020 et 2021, représentant près de 448 millions d’euros.
Le plan de relance, adopté par la loi de finances pour 2021, fléchait 346 millions d’euros vers le spectacle vivant sur le 1,6 milliard d’euros destinés à la culture pour 2021 et 2022.
S’y ajoutent 400 millions d’euros issus du Programme d’investissement d’avenir PIA-4 destinés aux industries culturelles et créatives sur la période 2021-2025 et une partie non encore précisée des 600 millions d’euros de France 2030 destinés à la culture.
Enfin, en 2021, différentes mesures de soutien à l’emploi artistique ont été prises (soutien aux intermittents, aux équipes artistiques indépendantes, aux diffusions alternatives et aux captations, filet de sécurité pour les artistes auteurs), pour près de 50 millions d’euros.
Cour des comptes, Rapport public thématique - Le soutien du ministère de la culture au spectacle vivant, mai 2022. p. 40.
À taux et plafond de dépenses inchangés, la dépense fiscale liée au CISV est déjà dynamique, puisqu’elle est estimée à 15 millions d’euros en 2022 et en 2023 pour 314 entreprises bénéficiaires, contre 10 millions d’euros en 2021 pour 248 entreprises bénéficiaires.
Le rapporteur général propose donc de supprimer cet article.
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Article 4 novodecies
Rétablissement du crédit d’impôt « rénovation énergétique »
des bâtiments à usage tertiaire des PME
I. Les dispositions adoptÉes par l’AssemblÉe nationale
A. État du droit
L’article 27 de la loi de finances pour 2021 ([181]) a instauré un crédit d’impôt pour la rénovation énergétique des bâtiments des petites et moyennes entreprises (PME). Il s’agissait de la concrétisation d’une mesure annoncée par le Gouvernement dans le cadre du plan de relance, visant à proposer un crédit d’impôt réservé aux PME pour les dépenses exposées en faveur de la rénovation énergétique des bâtiments à usage tertiaire dont elles sont propriétaires ou locataires et qu’elles affectent à l’exercice de leur activité économique.
Ce dispositif est temporaire, raison pour laquelle il n’avait pas été inscrit dans le code général des impôts : il s’applique aux dépenses engagées entre le 1er octobre 2020 et le 31 décembre 2021 pour la rénovation énergétique des bâtiments à usage tertiaire, dont les PME sont propriétaires ou locataires, sous deux réserves :
– les bâtiments doivent être affectés à l’exercice de leur activité industrielle, commerciale, artisanale, libérale ou agricole ;
– la construction du bâtiment doit être achevée depuis plus de deux ans à la date du début d’exécution des travaux.
Le 2 du I de l’article 27 de la loi de finances pour 2021 énumère la nature des dépenses qui étaient éligibles au crédit d’impôt, détaillées dans l’encadré ci-après.
Le 3 du I renvoie à un arrêté conjoint des ministres chargés de l’énergie, du logement et du budget le soin de fixer la liste des équipements, matériaux et appareils dont l’acquisition et la pose ouvraient droit au crédit d’impôt, afin de préciser :
– les caractéristiques techniques des équipements et travaux éligibles ;
– les travaux pour lesquels est exigé le respect de critères de qualification de l’entreprise les réalisant.
Le 4 du I de l’article 27 de la loi de finances pour 2021 précise que les dépenses n’ouvrent droit, en principe, au crédit d’impôt que si les travaux sont réalisés directement par les entreprises auxquelles ils ont été confiés. Néanmoins, par dérogation, ces entreprises peuvent recourir à une autre entreprise pour la fourniture, l’installation des équipements, des matériaux ou des appareils dans le cadre d’un contrat de sous-traitance régi par la loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975 relative à la sous-traitance.
Les dépenses éligibles au crédit d’impôt
Au 2 du I de l’article 27 de la loi de finances pour 2021, sont visées les dépenses engagées au titre de l’acquisition et de la pose des éléments suivants :
- un système d’isolation thermique en rampant de toitures ou en plafond de combles ;
- un système d’isolation thermique sur murs, en façade ou pignon, par l’intérieur ou par l’extérieur ;
- un système d’isolation thermique en toiture terrasse ou couverture de pente inférieure à 5 % ;
- un chauffe-eau solaire collectif, ou un dispositif solaire collectif, pour la production d’eau chaude sanitaire ;
- une pompe à chaleur, autre que air/air, dont la finalité essentielle est d’assurer le chauffage des locaux ;
- un système de ventilation mécanique simple flux ou double flux ;
- une chaudière biomasse ;
- un système de régulation ou de programmation du chauffage et de la ventilation.
Est également éligible le raccordement à un réseau de chaleur ou de froid.
Pour les bâtiments situés à La Réunion, en Guyane, en Martinique, en Guadeloupe ou à Mayotte, sont également éligibles les dépenses engagées au titre de l’acquisition et de la pose des éléments suivants :
- une toiture ou des éléments de toiture permettant la réduction des apports solaires ;
- des protections de baies fixes ou mobiles contre le rayonnement solaire ;
- un climatiseur fixe de classe supérieure ou égale à A, en remplacement d’un climatiseur existant.
Source : loi n°2020-1721 du 29 décembre 2020 de finances pour 2021, article 27.
Le 5 du I de l’article 27 de la loi de finances pour 2021 a fixé le crédit d’impôt à 30 % du prix de revient hors taxes applicables sur les dépenses engagées. Un double encadrement est prévu :
– les dépenses comptabilisées sont retranchées des aides perçues au titre des certificats d’économie d’énergie et des aides publiques reçues à raison des opérations éligibles au crédit d’impôt ;
– les dépenses ne peuvent pas avoir été prises en compte dans la base de calcul d’un autre crédit d’impôt.
Le crédit d’impôt est plafonné à 25 000 euros par entreprise pour l’ensemble des dépenses éligibles (6 du I du même article).
B. Dispositif adoptÉ par l’assemblÉe nationale
Le présent article additionnel est issu d’un amendement déposé par Émilie Bonnivard (Les Républicains) et retenu par le Gouvernement dans le cadre du texte sur lequel il a engagé sa responsabilité en application de l’article 49, alinéa 3 de la Constitution
C. Dispositif modifiÉ par le SÉNAT
Le Sénat a adopté, à l’initiative du rapporteur général de sa commission des finances ayant recueilli un avis défavorable de la part du Gouvernement, un amendement visant à :
– prolonger le crédit d’impôt d’une année supplémentaire, jusqu’à 2025 ;
– doubler le plafonnement du crédit d’impôt, à 50 000 euros ;
– conditionner le crédit d’impôt au respect de performances minimales de travaux.
II. La position du Rapporteur gÉnÉral
À l’instar du ministre du budget, le rapporteur général considère qu’il est préférable d’attendre l’évaluation de ce crédit d’impôt prévue en 2024 avant d’en élargir les critères, déjà généreux.
Aussi, il est proposé de revenir à la version de cet article telle qu’issue de l’Assemblée nationale et de supprimer les modifications votées au Sénat.
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* *
Article 4 vicies
Prorogation du crédit d’impôt « sortie du glyphosate » et évaluation
I. Les dispositions adoptÉes
A. État du droit
Aux termes de l’article 140 de la loi de finances pour 2021 ([182]), les entreprises agricoles et les éleveurs n’utilisant plus de produits phytopharmaceutiques contenant la substance active du glyphosate ([183]) au cours des années 2021 et 2022 peuvent bénéficier d’un crédit d’impôt.
Le bénéfice de crédit d’impôt est ouvert sous conditions relatives à l’absence d’utilisation de glyphosate, mais également à la nature de l’activité et aux secteurs concernés.
Le I de l’article 140 de la loi de finances pour 2021 prévoit le bénéfice du crédit d’impôt pour les « entreprises agricoles exerçant leur activité principale dans le secteur des cultures permanentes, à l’exception des pépinières et des taillis à courte rotation, ou sur des terres arables, hors surfaces en jachère ou sous serres […] qui n’utilisent pas de produits phytopharmaceutiques contenant la substance active du glyphosate au cours des années 2021 et 2022. »
Le caractère principal de l’activité dans le secteur des cultures permanentes est apprécié au regard du montant du chiffre d’affaires ou des recettes hors taxe lié à cette activité dès lors qu’il excède celui de chacune des autres activités de l’exploitation de l’entreprise agricole.
Le second alinéa du I de l’article 140 précité dispose également que « les éleveurs exerçant une part significative de leur activité dans les cultures mentionnées [supra] peuvent bénéficier de cette mesure. »
La condition de « part significative » de l’activité de l’éleveur est considérée comme satisfaite dès lors que la surface au sol exploitée pour les cultures éligibles au crédit d’impôt est au moins égale à la surface minimale d’assujettissement (SMA) nationale, soit douze hectares et demi ([184]).
Le montant du crédit d’impôt est fixé à 2 500 euros. Il est utilisé au titre de l’année pendant laquelle ces produits n’ont pas été utilisés.
Lorsque l’activité est exercée dans le cadre d’un groupement agricole d’exploitation en commun, le montant du crédit d’impôt de 2 500 euros est multiplié par le nombre d’associés, dans la limite de quatre.
Ce crédit ne se cumule pas avec les dispositifs de crédit d’impôt « agriculture biologique » et « haute valeur environnementale ».
Ce crédit d’impôt est entré en vigueur le 31 octobre 2021. Son application est limitée dans le temps aux années 2021 et 2022.
B. Dispositif adoptÉ par l’assemblÉe nationale
Le présent article additionnel est issu d’un amendement déposé par le Gouvernement et retenu dans le cadre du texte sur lequel il a engagé sa responsabilité en application de l’article 49-3, alinéa 3, de la Constitution.
Il a pour objet de proroger d’un an le crédit d’impôt de sortie du glyphosate, jusqu’en 2023, tout en prévoyant la remise au Parlement d’un rapport d’évaluation.
C. Dispositif modifiÉ par le sÉnat
Le Sénat a adopté, à l’initiative de Sylvie Vermeillet (Union centriste – UC) ayant recueilli des avis favorables de la part de la commission des finances et du Gouvernement, un amendement visant à ajuster l’encadrement en matière de droit européen des aides d’État du dispositif.
II. La position du Rapporteur gÉNÉral
Le rapporteur général remarque que la Commission européenne a déclaré ce crédit d’impôt conforme au droit européen en matière d’aides d’État pour la seule année 2021, au regard des dispositions relatives à l’encadrement temporaire des mesures d’aides visant à soutenir l’économie dans le contexte de l’épidémie de Covid-19.
Une nouvelle procédure de notification à la Commission européenne est en cours afin de faire reconnaître la conformité de ce dispositif au titre des années 2022 et 2023.
Aussi, l’ajustement opéré par le Sénat est de bon aloi et il est proposé de voter le présent article ainsi modifié.
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Article 4 duovicies
Contribution sur la rente inframarginale des producteurs d’électricité
I. Les dispositions adoptÉes par l’assemblÉe nationale en première lecture
Le présent article résulte d’un amendement déposé à l’Assemblée nationale par le Gouvernement. Il transcrit le dispositif de plafonnement des revenus infra-marginaux de la production d’électricité résultant du règlement européen relatif aux mesures d’urgence pour faire face aux prix élevés de l’énergie ([185]).
Il prévoit une contribution, ou « prélèvement », sur les revenus dégagés par l’exploitation des installations électriques répondant à quatre conditions :
– elles sont situées sur le territoire métropolitain, ce qui exclut celles situées dans les zones non interconnectées que sont la Corse et les outre-mer ;
– elles ne sont pas des ouvrages hydrauliques de production d’énergie stockée dans des réservoirs, y compris lorsqu’ils sont alimentés par des stations de pompage ;
– elles ne sont pas des installations de stockage ;
– elles n’alimentent pas un petit réseau dont la consommation était inférieure à 3 000 GWh en 1996.
Une exemption est prévue pour les installations exploitées par une entreprise pour laquelle la puissance installée cumulée des installations de production d’électricité ne dépasse pas 1 mégawatt.
Le fait générateur de la contribution est constitué par la production d’électricité réalisée entre le 1er décembre 2022 et le 31 décembre 2023, et intervient à l’achèvement de cette période.
Le montant de la contribution est égal à la fraction des revenus de marché de l’exploitant de l’installation excédant un seuil forfaitaire, après application d’un abattement de 10 %. Il est prévu que ce taux puisse être porté à un pourcentage compris entre 10 % et 40 % pour la période comprise entre le 1er juillet 2023 et le 31 décembre 2023 par un décret en Conseil d’État.
La fraction prélevée est, plus précisément, égale à la différence positive entre la somme des revenus de marché perçus par le producteur et le résultat du produit entre les quantités d’électricité produites et un seuil de prix forfaitaire fixé à 180 euros le MWh.
Les revenus de marché pris en compte sont ceux résultant de l’ensemble des contrats de fourniture et des instruments dérivés portant sur de l’électricité fournie entre le 1er juillet 2022 et le 31 décembre 2023, y compris, le cas échéant, les aides publiques reçues en substitution d’une fraction du prix de vente prévu par ces contrats ou ayant pour objet de compenser les pertes de revenus afférentes à ces contrats induites par une décision de l’État portant sur les niveaux des tarifs de vente aux consommateurs finals. Ces aides publiques correspondent aux sommes versées aux fournisseurs au titre de la compensation des pertes de recettes prévues dans le cadre du bouclier tarifaire.
Les revenus, déterminés par arrêté, encaissés à la suite des opérations menées par Réseau de transport d’électricité (RTE) pour assurer la sécurité du système électrique et prévenir la congestion du réseau de distribution de l’électricité, sont assimilés à des revenus de marché.
En revanche, il est prévu que certains revenus soient exclus du champ du prélèvement. C’est le cas des revenus issus de la fourniture d’électricité pour lesquels la loi, le règlement ou une autorité publique détermine soit un niveau de rémunération rapportée à la quantité fournie qui est indépendant des prix des marchés de gros de l’électricité, soit un niveau maximum qui remplit cette condition. Cette exclusion concerne notamment les revenus de cessions réalisées par EDF mais aussi les dispositifs de soutien à la production d’énergie renouvelable sous la forme de l’obligation d’achat et du complément de rémunération.
Sont ajoutés au seuil forfaitaire de 180 euros/MWh les coûts supportés au titre de l’acquisition des produits brûlés pour la production d’électricité, et les coûts représentés par le système européen d’échange de quotas d’émission de gaz à effet de serre.
Le seuil forfaitaire peut connaître une modulation. Il est ainsi prévu qu’un décret pris après avis de la Commission de régulation de l’énergie peut abaisser ou augmenter le seuil pour les installations dont la technologie de production présente des coûts ou sujétions différents de ceux des autres technologies. Cette modulation doit être proportionnée au regard de la différence des coûts et sujétions de chaque technologie et se situer dans un corridor de plus ou moins 80 euros/MWh autour du seuil de 180 euros/MWh.
II. les modifications apportÉes par le sÉnat
Le Sénat a adopté un amendement du Gouvernement ayant reçu un avis de sagesse de la commission. Cet amendement a apporté des modifications substantielles au texte adopté par l’Assemblée nationale.
En particulier :
– il remplace le seuil uniforme de 180 euros par mégawattheure à partir duquel les revenus de marché sont soumis à la contribution, par un seuil déterminé en fonction de la technologie de production et, dans certains cas, par la puissance de l’installation. Il s’agit de fixer ce seuil au plus près des conditions normales de rentabilité de chaque technologie, tout en maintenant une marge raisonnable ;
seuils de revenus au-delà desquels s’applique le prÉLÈvement, en fonction de la technologie de production et de la puissance de l’installation
Technologie de production |
Seuil unitaire (en euros / MWh) |
Nucléaire |
100 |
Éolien |
100 |
Hydraulique |
100 |
Incinération de déchets |
60 |
Incinération de biomasse autre que les déchets |
130 |
Combustion de biogaz |
110 |
Combustion de gaz naturel |
40 |
Production combinée de chaleur et d’électricité au moyen de gaz naturel |
- |
d’une puissance installée (en MWh) : |
|
inférieure à 12 |
125 |
de 12 à 100 |
100 |
supérieure à 100 |
75 |
Autres |
100 |
Source : commission des Finances.
– il étend la période de taxation en la faisant démarrer le 1er juillet 2022 au lieu du 1er décembre 2022, la date de fin de taxation, à savoir le 31 décembre 2023, demeurant inchangée – et il prévoit que la taxe est due au terme de chacune des trois périodes s’étalant, pour la première, du 1er juillet 2022 au 30 novembre 2022, pour la deuxième, du 1er décembre 2022 au 30 juin 2023, et, pour la troisième, du 1er juillet 2023 au 31 décembre 2023 ;
– il précise le champ des installations hydroélectriques exclues de ce prélèvement. Alors que le texte adopté par l’Assemblée nationale prévoyait seulement une exclusion des installations dont la technologie de production repose sur la transformation d’énergie hydraulique stockée dans des réservoirs, l’amendement adopté par le Sénat exclut celles, parmi ces installations, dont la technologie de production repose sur la transformation d’énergie hydraulique stockée dans des réservoirs d’une capacité de stockage supérieure à 18 heures au moyen d’installations situées en aval de ces réservoirs et pour lesquelles la durée de transfert de l’énergie est inférieure à un seuil déterminé par arrêté compte tenu de la faculté de bénéficier de la capacité de stockage qui en résulte ;
– il prévoit des dispositions spécifiques pour les installations de cogénération. La cogénération consiste en la production simultanée de deux formes d’énergie différentes dans la même centrale ; il s’agit, le plus souvent, de la production simultanée d’électricité et de chaleur. Tout d’abord, l’amendement du Gouvernement exclut du champ d’application du prélèvement les plateformes industrielles de cogénération, dont l’objet principal n’est pas la commercialisation d’électricité ni de chaleur. Ensuite, pour les autres installations de cogénération, il appréhende le prélèvement à l’échelle de l’ensemble de la production de chaleur et d’électricité, afin qu’il soit tenu compte de la hausse des coûts de production de chaleur dans le calcul du prélèvement dû par ces installations ;
– il permet de déduire de l’assiette du prélèvement les revenus versés aux collectivités territoriales dans le cadre du service public de la gestion des déchets ;
– il précise le traitement des revenus liés aux mécanismes de bonne gestion des réseaux. Ceux issus du mécanisme de capacité et de l’effacement seraient exclus, tandis que ceux résultant de l’énergie d’équilibrage et du règlement des écarts seraient inclus ;
– il aménage les modalités de calcul du prélèvement pour les acteurs gérant l’ensemble de leurs installations de manière intégrée et pour ceux gérant de manière intégrée leur outil productif et les fournitures aux consommateurs finals.
Le Sénat a adopté plusieurs sous-amendements sur cet amendement :
– un sous-amendement de précision de Mme Christine Lavarde, ayant reçu un avis favorable de la commission et du Gouvernement, sur les installations de cogénération exclues du champ d’application du prélèvement ;
– un sous-amendement de Mme Christine Lavarde, ayant reçu un avis favorable de la commission et un avis défavorable du Gouvernement, excluant des revenus de marché pris en compte pour le calcul du prélèvement ceux résultant de la prime fixe versée dans les conditions du deuxième alinéa de l’article L. 321-11 du code de l’énergie. En effet, le gestionnaire du réseau public de transport d’électricité, à savoir RTE, est chargé de veiller à la disponibilité et à la mise en œuvre des réserves nécessaires au fonctionnement du réseau. Il met en œuvre, à cette fin, un mécanisme de capacité et d’effacement, visant à faire face à la demande lors des pics de consommation d’électricité, en l’absence de possibilité de stockage de l’électricité. Il veille ainsi à l’activation de capacités supplémentaires de production d’électricité et de capacités d’effacement, c’est-à-dire de modération de la consommation d’électricité par certaines installations, lors des pics de demande ;
– deux sous-amendements identiques déposés par M. Claude Kern et par M. Rémi Féraud, portant de 60 à 145 euros, et de 110 à 175 euros, les seuils de revenus au-delà desquels s’applique le prélèvement pour, respectivement, les installations d’incinération de déchets et les installations de combustion de biogaz. Ces sous-amendements ont reçu un avis défavorable de la commission et du Gouvernement ;
– un sous-amendement de Mme Christine Lavarde, ayant reçu un avis défavorable de la commission et du Gouvernement, prévoyant que le seuil de revenus au-delà duquel le prélèvement s’applique est majoré de 60 % pour les installations n’ayant pas bénéficié d’un contrat d’obligation d’achat ou de complément de rémunération. Le coût de cette mesure est de 6 milliards d’euros, selon l’évaluation du Gouvernement.
La disposition introduite par ce sous-amendement a été supprimée par un amendement de M. Jean-François Husson au nom de la commission des Finances, adopté en seconde délibération ;
– un sous-amendement de précision de M. Gérard Longuet, ayant reçu un avis favorable de la commission et du Gouvernement, et prévoyant la prise en compte, dans le calcul du prélèvement, des coûts supportés au titre de l’acquisition de la biomasse brûlée pour la production d’électricité, comme c’est déjà le cas pour ceux supportés au titre de l’acquisition de combustibles fossiles brûlés à la même fin ;
– un sous-amendement de M. Gérard Longuet, ayant également reçu un avis favorable de la commission et du Gouvernement, visant à réduire le montant du prélèvement pour les installations de production d’électricité dont la durée de fonctionnement annuelle est déjà limitée par la loi ou le règlement. Cette réduction serait appliquée à due proportion du ratio entre la durée moyenne annuelle de fonctionnement des installations de production d’électricité dont l’exploitation n’est pas soumise à une telle limitation et la durée de fonctionnement limitée de ces installations.
III. La position du rapporteur gÉnÉral
Le rapporteur général propose de supprimer la précision, ajoutée par le Sénat, excluant des revenus de marché pris en compte pour le calcul du prélèvement ceux résultant de la prime de capacité, dans la mesure où cette disposition est satisfaite par le texte, et le relèvement du seuil forfaitaire pour les installations d’incinération de déchets et les installations de combustion de biogaz, dans la mesure où les seuils proposés ne semblent pas adaptés.
*
* *
Article 5 (supprimé)
Suppression de la CVAE
I. Les dispositions adoptÉes par l’assemblÉe nationale
A. État du droit
La cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) constitue, avec la cotisation foncière des entreprises (CFE), la contribution économique territoriale (CET) qui a partiellement remplacé la taxe professionnelle à compter de 2010. Son produit est aujourd’hui perçu par le bloc communal et les départements. La CVAE est due par les entreprises indépendamment du caractère bénéficiaire ou déficitaire de leur exercice, à l’image de nombreux autres impôts de production.
1. La CVAE est due par les entreprises
La CVAE a été divisée par deux à la suite de la suppression de la part régionale par la loi de finances pour 2021.
SynthÈse de la réforme intervenue
en loi de finances pour 2021
|
Avant 2021 |
Depuis 2021 |
Produit global de CVAE reversé aux collectivités |
19,5 milliards d’euros (2020) |
9,6 milliards d’euros (2021) |
Répartition du produit entre collectivités |
Régions : 50 % Départements : 23,5 % Bloc communal : 26,5 % |
Départements : 47 % Bloc communal : 53 % |
Taux théorique |
1,5 % |
0,75 % |
Seuil d’assujettissement aux acomptes (CVAE due l’année précédente) |
3 000 euros |
1 500 euros |
CVAE minimum |
250 euros |
125 euros |
Plafonnement de la CET en fonction de la valeur ajoutée (PVA) |
3 % |
2 % |
Taux de la TA-CVAE |
1,73 % |
3,46 % |
Source : commission des finances
Note : TA-CVAE : taxe additionnelle à la CVAE.
La CVAE est due par les entreprises situées dans le champ de la CFE et dont le chiffre d’affaires est supérieur à 152 500 euros. L’assiette est la valeur ajoutée fiscale.
Le taux est de 0,75 %, mais les entreprises bénéficient d’un dégrèvement déterminé à partir d’un barème fonction de leur chiffre d’affaires (dégrèvement barémique).
BarÈme du taux effectif de CVAE
Chiffre d’affaires (CA) |
Taux effectif de CVAE (depuis 2021) |
CA < 500 000 |
0 |
500 000 ≤ CA ≤ 3 000 000 |
[0,25 × (CA – 500 000)] / 2 500 000 |
3 000 000 < CA ≤ 10 000 000 |
0,25 + [[0,45 × (CA – 3 000 000)] / 7 000 000] |
10 000 000 < CA ≤ 50 000 000 |
0,7 + [[0,05 × (CA – 10 000 000)] / 40 000 000] |
50 000 000 < CA |
0,75 |
Source : code général des impôts.
Le taux effectif de CVAE est donc progressif en fonction du chiffre d’affaires.
situation des entreprises vis-à-vis de la cvae
en fonction de leur Chiffre d’affaires
Chiffre d’affaires (CA) |
Entreprise |
CA ≤ 152 500 |
Non assujettie |
152 500 ≤ CA ≤ 500 000 |
Assujettie non redevable (totalement dégrevée) |
500 000 < CA ≤ 50 000 000 |
Assujettie redevable bénéficiant d’un dégrèvement barémique dégressif |
CA > 50 000 000 |
Assujettie redevable sans dégrèvement |
Source : code général des impôts.
Le dégrèvement barémique est pris en charge par l’État. En 2021, il s’est élevé à 2 247 millions d’euros. Avec le dégrèvement barémique, l’État acquitte près d’un quart de la CVAE reversée aux collectivités (23 %).
L’assiette de la CVAE, la valeur ajoutée fiscale, fait par ailleurs l’objet d’un plafonnement en fonction du chiffre d’affaires.
Plafonnement de la valeur ajoutÉe au regard du chiffre d’affaires
Chiffre d’affaires |
Plafonnement de la VA |
Inférieur ou égal à 7,6 millions d’euros |
80 % |
Supérieur à 7,6 millions d’euros |
85 % |
Source : article 1586 sexies du code général des impôts.
Le paiement de la CVAE fait l’objet de deux acomptes en année N, assis sur la dernière valeur ajoutée connue (celle de l’année N-1). Les entreprises dont la CVAE due au titre de l’année précédente n’excède pas 1 500 euros sont dispensées du paiement des acomptes. En 2020, 160 000 entreprises ont payé 13,6 milliards d’euros d’acomptes et représentaient 30 % des redevables de la CVAE. La CVAE payée ne peut être inférieure à 125 euros (CVAE minimum).
La CET fait en outre l’objet d’un plafonnement en fonction de la valeur ajoutée (PVA). Il vise à éviter qu’une entreprise dégageant une faible valeur ajoutée mais disposant, pour les besoins de son activité professionnelle, de biens immobiliers à forte valeur locative paie une CET excessive. Le PVA est fixé à 2 % de la valeur ajoutée fiscale. Il s’applique sur la CFE et la CVAE due et s’impute sur la CFE. Le redevable bénéficiaire du PVA doit demander un dégrèvement à l’État. En 2021, le coût pour l’État du dégrèvement qui résulte du plafonnement s’est élevé à 1 466 millions d’euros.
2. La CVAE est répartie entre catégories de collectivités territoriales
Évolution de la rÉpartition de la CVAE entre collectivitÉs
En millions d’euros.
Source : commission des finances.
Depuis 2021, la CVAE est répartie entre le bloc communal et les départements. Au sein du bloc communal, ce sont les EPCI qui perçoivent l’essentiel de la CVAE.
clÉ de rÉpartition du produit national de CVAE
|
Bloc communal |
Départements |
Régions |
Avant 2021 |
26,5 % |
23,5 % |
50 % |
Depuis 2021 |
53 % |
47 % |
– |
Source : commission des finances.
Les régions ont bénéficié en 2021 d’une fraction de TVA égale à la CVAE qu’elles avaient perçue en 2020 et, à compter de 2022, cette fraction de TVA est dynamique.
En 2021, le produit national de CVAE réparti entre collectivités s’est établi à 9 639 millions d’euros (Observatoire des finances et de la gestion publique locales – OFGL). Pour les collectivités dans leur ensemble, c’est une baisse de – 1,08 % par rapport à 2020.
La CVAE due au titre de l’année N est reversée par l’État aux collectivités en année N+1. En effet, la valeur ajoutée n’est connue qu’une fois l’exercice comptable achevé. Ce décalage entraîne un effet de trésorerie positif pour l’État en cas de croissance de l’économie. Comme les acomptes sont calculés en fonction de la CVAE de l’année précédente, la CVAE perçue en N par les entreprises est la valeur ajoutée de l’année N-2.
B. Dispositif proposÉ
Cet article propose de supprimer la CVAE en deux ans.
1. Les modalités de suppression de la CVAE
En 2023, le taux de CVAE due par les entreprises est divisé par deux.
barÈme du taux effectif de la CVAE en 2023
Chiffre d’affaires (CA) |
Taux de CVAE |
CA < 500 000 |
0 |
500 000 ≤ CA ≤ 3 000 000 |
[0,125 × (CA – 500 000)] / 2 500 000 |
3 000 000 < CA ≤ 10 000 000 |
0,125 + [[0,225 × (CA – 3 000 000)] / 7 000 000] |
10 000 000 < CA ≤ 50 000 000 |
0,35 + [[0,025 × (CA – 10 000 000)] / 40 000 000] |
50 000 000 < CA |
0,375 |
Le dégrèvement complémentaire et la CVAE minimum sont également divisés par deux.
En 2024, la CVAE est entièrement supprimée.
Pour éviter de neutraliser en partie la réforme par un ressaut de CFE, le PVA est abaissé de 2 % à 1,625 % en 2023 et à 1,25 % en 2024.
Dès 2023, la CVAE restante est affectée au budget de l’État.
2. Les modalités de compensation aux collectivités territoriales
Les collectivités territoriales sont compensées par une fraction de TVA.
Les collectivités du bloc communal bénéficieront en 2023 d’une fraction « socle » de TVA, augmentée d’une dynamique reversée par le biais d’un fonds national de l’attractivité économique des territoires, dont les modalités doivent être précisées par décret. Le Gouvernement a annoncé que le fonds serait réparti sur le fondement de critères territoriaux de nature économique, tels que les bases de CFE et les effectifs des entreprises, et que le décret serait rédigé par un groupe de travail transpartisan ([186]) .
Les départements bénéficieront d’une fraction de TVA qui reflète exactement la dynamique de cet impôt au niveau national, conformément au souhait exprimé par les associations d’élus locaux représentant ces collectivités ([187]) .
Pour le bloc communal comme les départements, hors dynamique, les fractions de TVA seront calculées sur la moyenne des années 2020 à 2023 ([188]) . Pour l’année 2023, est pris en compte le produit de CVAE collecté par l’État en 2022 et qui aurait dû être perçu en 2023 par les collectivités en l’absence de réforme.
Ces modalités de compensation permettent de reverser aux collectivités une compensation « socle » de 9,93 milliards d’euros. En ajoutant la dynamique de la TVA anticipée en 2023, la compensation s’élève à 10,44 milliards d’euros, ce qui constitue une hausse de 11,7 % par rapport à la CVAE perçue en 2022.
CVAE versÉe aux collectivitÉs de 2020 à 2023 et compensation proposÉe