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(Application de l’article 120 du Règlement)
La réunion de la commission élargie commence à vingt et une heures.
M. le président Didier Migaud. Avec Jean-Luc Warsmann, président de la Commission des lois, nous sommes heureux de vous accueillir, monsieur le ministre de l’intérieur, pour cette réunion en commission élargie consacrée aux crédits de la mission « Sécurité ». Michel Voisin, vice-président de la Commission de la défense, dont le président Guy Teissier est retenu en séance publique par le débat sur les crédits de la mission « Anciens combattants », devrait bientôt nous rejoindre.
La procédure de la « commission élargie » étant destinée à favoriser des échanges directs et vivants avec les ministres, j’invite chacun d’entre nous à faire preuve de concision.
Je tiens, en outre, à saluer le travail accompli par nos rapporteurs : M. Michel Diefenbacher, rapporteur spécial de la Commission des finances, M. Guy Geoffroy, rapporteur pour avis de la Commission des lois, suppléé par le président Jean-Luc Warsmann, et M. Alain Moyne-Bressand, rapporteur pour avis de la Commission de la défense sur les crédits de la gendarmerie. En plus des travaux qu’ils réalisent à l’occasion de la présentation des crédits – leurs projets de rapport ont été mis à votre disposition –, nos collègues accomplissent un travail de suivi, de contrôle et d’évaluation tout au long de l’année.
Après une intervention du président Jean-Luc Warsmann, nous entendrons nos rapporteurs, ainsi que les porte-parole des groupes qui souhaiteront intervenir. Vous pourrez alors vous exprimer, monsieur le ministre, après quoi chacun sera libre de poser les questions qu’il souhaite.
Pour ma part, j’observe que vous nous présentez un budget maîtrisé, notamment en ce qui concerne les charges de personnel, lesquelles représentent l’essentiel des crédits de la mission. En euros constants, le niveau de ces crédits ne variera quasiment pas et les effectifs devraient diminuer : sans dévier de la ligne fixée dans le cadre de la programmation triennale, les plafonds d’emplois seront réduits de 1 300 postes en équivalents temps plein travaillé (ETPT) dans la police nationale et d’autant dans la gendarmerie nationale.
La première loi d’orientation pour la sécurité intérieure, la LOPSI, adoptée au cours de la précédente législature, avait prévu une forte augmentation des effectifs et des moyens de la police et de la gendarmerie. Quelles sont les raisons de fond qui vous conduisent à envisager maintenant une stabilisation des moyens et des effectifs ? Les objectifs de performance ont-ils été atteints en matière de lutte contre la délinquance, premier objectif de cette mission ?
M. le président Jean-Luc Warsmann, suppléant M. Guy Geoffroy, rapporteur pour avis de la Commission des lois. Cette réunion est l’occasion de vous entendre, monsieur le ministre, sur ce budget mais aussi sur la politique que vous entendez mener dans les mois à venir.
Notre collègue Guy Geoffroy, qui est un grand sportif, m’a prié de vous demander de l’excuser. Il participait hier au marathon de New York. Je m’exprimerai donc à la fois en tant que président et rapporteur pour avis suppléant de la Commission des lois.
Ma première question porte sur un sujet qui tient à cœur à la commission et qui a été abordé par la mission d’information sur les centres de rétention administrative et les zones d’attente : la salle d’audience de Roissy, construite en 2001 sur l’emprise de l’aéroport pour un coût actualisé de 1,98 million d’euros, demeure à ce jour inutilisée.
Le 24 juin 2009, j’avais interrogé par écrit la ministre de la justice à ce sujet. Dans une longue réponse en date du 24 juillet dernier, elle a précisé que le projet avait été réétudié par le ministère de l’intérieur, puis arrêté fin 2004, car les agencements architecturaux et le fonctionnement du bâtiment devaient être revus pour être mis en conformité avec les standards judiciaires. Une deuxième salle d’audience, de plus grande capacité et bénéficiant d’un système de visioconférence et de liaisons informatiques directes avec le tribunal de grande instance de Bobigny et la cour d’appel de Paris, était prévue, de même que des locaux pour les magistrats, les avocats et les traducteurs.
Le bâtiment devait être livré à la fin de l’année 2005 ou en cours d’année 2006, mais le ministre de l’intérieur a informé la chancellerie, par une lettre du 6 décembre 2005, que les travaux ne pourraient pas être achevés dans les délais prévus, notamment pour des problèmes juridiques de propriété foncière. En septembre 2006, le projet a été relancé par le ministère de l’intérieur avec le concours du ministère de la justice. Transmis par le ministère de l’intérieur le 26 avril 2007, le programme définitif, qui doit être réalisé selon une procédure de conception-construction, a été approuvé le 15 mai 2007 par la chancellerie sous réserve de quelques observations.
Un jury, réuni le 15 avril 2008 à Bobigny, a arrêté une liste de cinq groupements admis à répondre à l’appel d’offre, mais la procédure n’est pas allée plus loin, de sorte qu’aucun lauréat n’a été désigné. Cette situation m’a conduit à vous adresser un courrier, il y a quelques jours, pour vous demander où en était le dossier. Pourriez-vous profiter de cette réunion pour nous apporter une réponse ?
Ma deuxième question a trait à la police d’agglomération mise en place à Paris : ce dispositif consiste à affecter les forces de police en fonction des « bassins de délinquance », et non des structures administratives préexistantes. Quelle analyse peut-on faire dès à présent de cette première expérience ? Souhaitez-vous l’étendre à d’autres territoires et, le cas échéant, dans quelles limites ? Nous aimerions également savoir quelles conséquences ce type de mesures pourrait avoir sur la délimitation des zones de compétence de la police et de la gendarmerie.
En troisième lieu, pourriez-vous revenir sur le rapprochement – déjà bien engagé – entre la police et la gendarmerie ? Nous nous sommes interrogés, dans le cadre de la mission d’optimisation de la dépense publique qui a été créée au sein de la commission des lois, sur la façon dont nous pourrions encore améliorer l’organisation des forces de sécurité et renforcer les synergies entre elles. Quels éléments pouvez-vous porter à notre connaissance dans ce domaine ?
Nous aimerions également en savoir plus sur l’évolution des effectifs que vous envisagez. Est-il possible de réaliser de nouveaux gains de productivité pour respecter les impératifs budgétaires actuels tout en assurant un bon niveau de sécurité et de présence sur la voie publique ?
Enfin le rapporteur pour avis de la commission, Guy Geoffroy, souhaiterait avoir un bilan de l’action des UTeQ, les unités territoriales de quartier, et des compagnies de sécurisation. Quelles sont les perspectives ouvertes par ces différents dispositifs ? Au vu du contexte budgétaire, est-il envisageable de les étendre à l’ensemble des quartiers sensibles ?
M. Michel Voisin, vice-président de la Commission de la défense. Je me ferai le porte-parole de mes collègues de la Commission de la défense, retenus dans l’hémicycle par l’examen des crédits de la mission « Anciens combattants ».
En cette fin d’année, la gendarmerie nationale fait l’objet de nombreuses interrogations : la loi de programmation militaire a prévu un engagement croissant de cette force armée dans le cadre des opérations extérieures et la loi du 3 août dernier a consacré son rattachement au ministère de l’intérieur tout en préservant son statut militaire. Sans revenir sur les inquiétudes suscitées par ces évolutions, déjà longuement abordées au sein de la Commission de la défense, pourriez-vous nous apporter des précisions sur les mutualisations envisageables et sur les moyens alloués en 2010 à la gendarmerie ? Je pense notamment à l’importante question du parc des blindés.
Pourriez-vous également revenir sur l’objectif de parité globale entre la police et la gendarmerie, fixé par la loi du 3 août 2009 ?
J’aimerais enfin savoir dans quel délai la nouvelle loi d’orientation et de programmation pour la sécurité intérieure viendra en discussion à l’Assemblée.
M. Michel Diefenbacher, rapporteur spécial de la Commission des finances. Je voudrais tout d’abord saluer l’effort de modernisation particulièrement vigoureux engagé dans les services de police et de gendarmerie au cours des dernières années.
Les réformes se sont en effet succédé : modification des structures, rattachement de la gendarmerie au ministère de l’intérieur, mutualisation des moyens, redéploiement des zones de compétence, création des GIR – les groupes d’intervention régionaux – mais aussi des structures d’agglomération et des compagnies de sécurisation, fusion des services de renseignement, restructuration des compagnies républicaines de sécurité, évolution des méthodes, avec notamment un recours systématique à la police scientifique dans le cadre des enquêtes, ou encore réforme du management – au lieu de se contenter d’augmenter les effectifs, on a re-pyramidé les corps, densifié l’information et institué des mécanismes d’intéressement collectif au bénéfice des fonctionnaires en fonction des résultats des services. Parmi les services de l’État, ce sont probablement les services de la police et de la gendarmerie qui ont connu les plus profondes transformations au cours des dernières années.
Les résultats sont là : la délinquance s’est notablement réduite entre 2001 et 2008, le taux d’élucidation des infractions s’est beaucoup amélioré et le nombre des morts sur la route a diminué.
Depuis 2008, la donne a profondément changé du fait de l’application de la révision générale des politiques publiques aux services de police et de gendarmerie comme à l’ensemble des services de l’État : 3 600 emplois ont été supprimés cette année et 2 600 devraient l’être l’an prochain. Dans ces conditions, il devient encore plus nécessaire d’optimiser les moyens mis à disposition des services de sécurité.
Le projet de loi de finances prévoit une dotation de 16,4 milliards d’euros pour 2010, ce qui représente une augmentation de 1,28 % par rapport à l’année précédente. Malgré la diminution des effectifs, la part des rémunérations va continuer à augmenter au sein du budget. Le reste des crédits étant réduit en part relative et en valeur absolue, il faudra faire mieux avec moins d’effectifs et moins de crédits disponibles.
Dans le prolongement des questions posées par le président Warsmann sur le rapprochement de la police et de la gendarmerie, je voudrais vous interroger sur les mutualisations entreprises, notamment en matière de commandes publiques. Ces mutualisations ont-elles permis de réaliser des économies budgétaires significatives et des gains en termes d’efficacité ? Pour l’avenir, quelles sont les pistes envisagées ? Comment concilier la recherche d’une plus grande efficacité dans la gestion des crédits et le maintien d’une identité propre des services de police et de gendarmerie ?
Ma deuxième série de questions porte sur les effectifs et les recrutements. L’année prochaine, les effectifs de la police et de la gendarmerie doivent respectivement diminuer de 1 390 et 1 354 équivalents temps plein. La réforme des retraites a, en outre, permis aux policiers et aux gendarmes de rester plus longtemps en activité. Ces deux évolutions conduisent naturellement à limiter les recrutements. Quelles indications pouvez-vous nous donner pour 2009 et 2010 dans ce domaine ?
Le dispositif de formation est aujourd’hui en voie de resserrement, le nombre des centres de formation de la police passant de 12 à 4 et celui des écoles de gendarmerie de 9 à 5. Est-il possible de mesurer précisément l’impact budgétaire de ces mesures ? Quelle sera leur incidence sur le niveau de formation initiale et permanente des personnels ?
En dernier lieu, pouvez-vous nous dire où en est le développement de la vidéo-surveillance ? Quelles dispositions ont été prises ? Peut-on établir un premier bilan ? Quels résultats peut-on attendre d’une politique vigoureuse en la matière ?
Mme Delphine Batho. Lorsque vous avez pris vos nouvelles fonctions en juin dernier, nous vous avons demandé si vous envisagiez un changement d’orientation compte tenu de l’évolution de l’insécurité : elle est aujourd’hui plus forte, plus violente et plus concentrée géographiquement, notamment du fait des politiques menées depuis 2002.
Vous avez partiellement reconnu que le bilan actuel était mauvais, mais cela ne vous a pas empêché de vous inscrire dans la continuité de l’action engagée par vos prédécesseurs, notamment en ce qui concerne la politique du chiffre, contre laquelle je dois vous mettre en garde.
Au cours des auditions, de nombreux policiers nous ont indiqué que l’on se heurtait à un effet de seuil ou d’étiage : il y a si longtemps que l’on triche qu’il est devenu impossible de faire mieux. Les effets pervers de la politique du chiffre sont unanimement reconnus : le syndicat Alliance police nationale dénonce une « politique contreproductive » qui pourrait conduire, selon le syndicat des commissaires de la police nationale, à un « risque grave de rupture ».
Que faire ? Jusqu’en 2002, on mettait des moyens supplémentaires sur la table quand on demandait des résultats. Or, c’est maintenant la troisième année consécutive que vous réduisez les moyens affectés à la police et à la gendarmerie. Près de 9 121 équivalents temps plein ont été supprimés depuis 2008, ce qui représente 74 % des créations de postes prévues en 2002 par la LOPSI. Plusieurs collègues, dont certains sont issus des rangs de la majorité actuelle, vous ont demandé de mettre un terme à l’application de la révision générale des politiques publiques, la RGPP, afin de maintenir les effectifs des forces de sécurité à leur niveau actuel.
Contrairement à ce qui avait été initialement indiqué, on constate en effet que les suppressions de postes envisagées ne concernent pas seulement les états-majors. Dans mon département, il est notamment envisagé de supprimer la brigade de gendarmerie du canton de La Mothe Saint-Heray.
On a également l’impression que vous jouez au bonneteau lorsque vous annoncez la création de nouveaux services dans la police nationale : qu’il s’agisse de constituer des cellules anti-cambriolage, une police anti-hooligans, des groupes « cités », des unités spécialisées dans la lutte contre les bandes ou encore des brigades contre les violences familiales, vous déshabillez Paul pour habiller Pierre. La création des brigades contre les violences familiales a ainsi eu pour effet de réduire les effectifs des anciennes brigades des mineurs, et la même observation vaut pour la constitution des unités territoriales de quartier, les UTeQ.
Il est temps de mettre un terme à la RGPP au sein des forces de sécurité – 9 000 postes en moins, cela suffit ! Les rapporteurs ont fait état de 4 000 suppressions de postes supplémentaires en ETPT dans la police nationale d’ici à 2012 ou 2013. Le plafond d’emplois du programme « Police » serait même ramené de 146 000 à 138 000 ETPT d’ici à 2014. Confirmez-vous ces informations ?
J’en viens à la possibilité désormais offerte aux fonctionnaires de rester en activité jusqu’à 65 ans, véritable tremblement de terre qui remet en cause la réforme des corps et des carrières. Quel sera l’impact de cette mesure en 2009 et 2010 ?
Une provision pour la réforme de la catégorie B était prévue en 2010, mais nous n’en avons pas trouvé trace dans le « bleu » budgétaire. Quelles indications pouvez-vous nous apporter à ce sujet ?
Je m’interroge également sur le rythme de création des UTeQ et sur leur conception même. Le Président de la République avait demandé que 100 unités voient le jour d’ici à la fin 2010, or nous n’en sommes qu’à 35. Nous avons appris qu’un rapport d’audit avait été commandé. Qu’en est-il ? Nous avons constaté au cours des auditions que les responsables de la sécurité du « Grand Paris » faisaient preuve d’un certain scepticisme à l’égard de ce dispositif. Qu’en pensez-vous ? Il nous semble, pour notre part, que les problèmes ne tiennent pas seulement aux effectifs, mais aussi à une insuffisance en police judiciaire et à la difficulté de reconquérir certains territoires.
J’aimerais également vous entendre sur le rapprochement entre la police et la gendarmerie : on a l’impression que le climat s’est dégradé entre les deux forces.
Enfin, je terminerai en vous demandant quel bilan vous faites de la réforme du renseignement intérieur. La séparation des services d’information générale et de la direction centrale du renseignement intérieur suscite beaucoup de critiques. N’aurait-il pas fallu, comme à Paris, maintenir ce qui relève du milieu ouvert et du milieu fermé dans une même direction du renseignement ? Un audit ou un point d’étape a-t-il été fait à ce sujet ? Ma question porte non seulement sur la police nationale mais aussi sur l’organisation du renseignement entre les deux forces de sécurité, la gendarmerie concourant également à ces missions. Sur le terrain, dans les départements, le flou règne quant à la répartition entre les deux. Je voudrais donc savoir comment sera défini et encadré le travail confié à la gendarmerie. Pourriez-vous également nous indiquer, monsieur le ministre, quel est le service chargé du suivi de ce qu’il est convenu d’appeler l’ultra-gauche ?
M. Jean-Christophe Lagarde. Avant de vous interroger, monsieur le ministre, je m’adresserai à MM. les présidents pour regretter de devoir étudier les crédits de la mission « Sécurité » dans le cadre d’un débat « simplifié ». Elle est suffisamment importante pour relever d’une procédure classique. S’agissant du centre de Roissy dont le président Warsmann vient de parler, je ne pense pas que les retards soient dus à des problèmes de bâtiments, ou de normes, c’est tout simplement que les professions judiciaires ne veulent pas se rendre à Roissy. Elles auraient l’impression de déchoir. Mais cela oblige à consommer énormément de moyens en transports divers et variés, et en maintien de l’ordre. Et c’est bien regrettable.
La création de la police d’agglomération à Paris est une bonne chose, mais la préfecture de police étant en elle-même, au sein de votre ministère, une institution, il faudra en la matière veiller à éviter certains écueils. Le premier réside dans l’éloignement entre la police nationale et les élus locaux, notamment les maires. En cas de difficulté, ceux-ci avaient pour interlocuteurs les directeurs de la sécurité publique ou les préfets, à la rigueur les sous-préfets. Certes, la mutualisation des moyens ira de pair avec une plus grande mobilité des forces. Encore faudrait-il conserver la réactivité et l’emploi judicieux des moyens que permettaient les échanges qui existaient. Je suis d’autant moins assuré que cette souplesse sera préservée que la culture de la préfecture de police est beaucoup plus centralisée que celle des commissariats des départements. Si la préfecture pilote une opération, on risque de perdre en réactivité ce qu’on aura gagné en effectifs ponctuels. Vous avez d’ailleurs pu, monsieur le ministre, vous en rendre compte récemment à Saint-Denis.
En revanche, la police d’agglomération – Paris n’ayant pas vocation à être la seule concernée – apportera beaucoup, à la fois au ministre et aux parlementaires, en facilitant les comparaisons entre les effectifs qui seront affectés à telle ou telle mission, ou à tel ou tel secteur. Le débat qui existe entre Paris et les départements de la Petite couronne ou même entre les départements de la Petite couronne sera clarifié. D’ailleurs, le préfet de police a rencontré les élus à propos de ces écarts que nous jugeons inexplicables, surtout quand on représente comme moi le département le plus criminogène de France.
La réduction progressive des effectifs programmée dans le cadre de la RGPP fait naître des inquiétudes. Mais j’attends beaucoup de la LOPPSI 2. Vous avez eu raison, monsieur le ministre, de retarder les débats pour réexaminer les choses à votre entrée en fonction. Je ne suis pas sûr que tout ce qui était dans les tuyaux était opportun. Mais tous les efforts que vous ferez risquent de se heurter à la multiplication des missions et à la diminution concomitante des effectifs. Votre budget mérite d’être défendu. Les tâches administratives ne doivent plus, en effet, être assumées par des fonctionnaires de police qui ont été formés à la sécurité. Mais vos efforts de rationalisation trouveront leurs limites.
Enfin, la police d’agglomération me semble une formidable opportunité d’utiliser au service de nos départements et de nos commissariats les moyens d’encadrement qui existent aujourd'hui à la préfecture de police de Paris. Ce serait d’une grande utilité. Il est en effet préférable de mobiliser des gens d’expérience dont on manque cruellement sur le terrain.
Vous me pardonnerez d’en revenir à des sujets que j’aborde année après année.
Tout d’abord, je ne comprends pas comment nous ne parvenons pas à gérer les flux de personnels, en entrée et en sortie. Vous êtes, monsieur le ministre, à la tête de la seule administration qui arrive à muter un fonctionnaire au mois de janvier pour ne le remplacer qu’au mois de juillet. Même l’éducation nationale ne le fait pas. Les mutations devraient être organisées en fonction des sorties de l’école. Faute de faire ainsi, l’effectif théorique annuel n’est pas atteint la moitié de l’année.
Ensuite, les forces mobiles, et plus particulièrement les compagnies républicaines de sécurité. Un ancien ministre de la sécurité, Robert Pandraud, indiquait que nous avions aujourd'hui autant de compagnies que dans les années soixante et soixante-dix, pendant lesquelles les conflits sociaux et les mouvements de masse étaient beaucoup plus importants. Je ne suis pas sûr qu’il faille maintenir un effectif aussi important alors que, dans la police, dans les commissariats, des besoins se font sentir. Vos prédécesseurs ont bien décidé d’utiliser les CRS à d’autres missions, mais ils n’y ont pas été formés, leur organisation n’y est pas forcément adaptée, pas plus que leur mode de commandement qui reste totalement extérieur à celui de la police locale. On voit, lorsqu’ils interviennent, la différence avec les forces de gendarmerie. Il y a une réflexion à mener sur les méthodes d’emploi, la souplesse de commandement et le dimensionnement des forces mobiles.
S’agissant des UTeQ, Mme Batho doute de leur efficacité, mais, pour ma part, j’ai trouvé celles que j’ai vues fonctionner utiles et efficaces. Elles parviennent à recréer un lien essentiel avec la population. Sous la dernière législature, on a opposé, de façon à mon avis surréaliste, police de proximité et police d’intervention. En réalité, nous avons besoin d’une police à la fois fidélisée – je salue ici le choix que vous avez fait de mieux valoriser le travail de ceux qui ont décidé de travailler dans les zones difficiles – et adaptée. On ne fait pas la police de la même façon à Clichy-sous-Bois, à Villeneuve-la-Garenne, à Villemomble ou à Drancy. L’UTeQ permet d’adapter les forces d’intervention au terrain grâce au lien qu’elle a su nouer avec la population. Sans ce lien, la police n’a pas de renseignement et, sans renseignement, elle n’a pas les moyens de travailler.
Une question encore sur le Fonds interministériel de prévention de la délinquance.
M. le président Didier Migaud. Soyez gentil de conclure.
M. Jean-Christophe Lagarde. Voilà pourquoi il aurait mieux valu être dans l’hémicycle
M. le président Didier Migaud. L’examen en commission élargie n’est en rien une procédure simplifiée. Nous sommes exactement dans les conditions de la séance publique, notamment de publicité. Le choix a été fait par la conférence des présidents sur proposition des présidents de commission, en accord avec le Gouvernement. Mais nous avons tout notre temps pour échanger avec le ministre et lui poser toutes les questions que nous souhaitons.
M. Jean-Christophe Lagarde. N’avez-vous pas l’impression que l’utilisation du FIPD, au demeurant fort utile, relève du saupoudrage ? Tous les préfets veulent avoir leur part, et l’on peut s’interroger quand on rapporte les dotations au degré de criminalité enregistré dans chaque département.
Il en va de même pour le développement de la vidéoprotection. Vous y attachez une grande importance, monsieur le ministre, et tous ceux qui sont ici aussi, mais je crains que la stratégie du ministère ne facilite guère l’interconnexion avec les réseaux existants. Je pense notamment aux réseaux municipaux. Certaines villes ont déjà fait un effort considérable pour s’équiper, et elles devraient pouvoir se connecter à la direction départementale de la police nationale. Or ce n’est pas le cas. Pourtant, c’est une priorité et nous gagnerions beaucoup en efficacité.
Par ailleurs, avez-vous envisagé d’étendre les capacités d’intervention des polices municipales et de favoriser les coordinations entre les villes et les forces de sécurité, notamment pour ce qui est de leurs moyens matériels ? Il y a quelques années, les villes passaient des conventions avec l’État pour procurer tel ou tel équipement qu’il aurait été trop long d’obtenir en suivant les circuits habituels. Cette pratique n’a plus lieu aujourd'hui et je le regrette car elle offrait une solution simple à un problème qu’il fallait régler rapidement, parfois dans l’intérêt même des forces de l’ordre. Je souhaiterais pouvoir mieux travailler à la fois en élargissant les missions de la police municipale et en facilitant ce type de convention entre les collectivités locales et les forces de police qui travaillent sur le terrain.
M. Thierry Mariani. Monsieur le ministre, je souhaite, au nom du groupe UMP, saluer ce projet de budget pour 2010 qui traduit concrètement les engagements pris par le Gouvernement et le Président de la République. Je ne reviendrai pas sur ce qui a déjà été dit par les rapporteurs et je me contenterai de vous interroger sur trois sujets importants.
Au préalable, je souhaiterais féliciter par votre intermédiaire les forces de sécurité qui sont intervenues à Marseille le 25 octobre dernier après l’annulation du match de foot OM-PSG par la Ligue de football, qui nous a mis ce jour-là dans une position difficile. Je profite de l’occasion pour saluer le professionnalisme des hommes et des femmes engagés sur le terrain ce soir-là ainsi que la gestion de la situation par le préfet de police Philippe Klayman et le préfet de région Michel Sappin.
Je salue également le choix fait en faveur de la vidéoprotection. Au-delà de tout a priori idéologique, il résulte d’un constat pratique. C’est une solution qui a montré son efficacité dans de nombreux pays. Et les mesures qui y sont consacrées dans ce budget vont dans le sens à la fois de l’intérêt général et de la volonté des élus locaux, ainsi que de la population.
Premièrement, la quantité de produits stupéfiants saisis chaque année par les services de police, de gendarmerie et de douanes illustre l’importance des trafics et donne surtout la mesure de ce qu’ils rapportent. On parle pour 2008 de 75 tonnes de cannabis, 8,2 tonnes de cocaïne, et 1,2 tonne d’héroïne. Ce trafic engendre une importante délinquance : celle des usagers qui cherchent de quoi payer leurs doses et celle de tous ceux qui vivent de cette économie souterraine qui infecte bon nombre de quartiers. Monsieur le ministre, de quels moyens disposez-vous pour affronter de tels défis ? Et pensez-vous qu’ils sont adaptés ?
Deuxièmement, dans son discours du 28 mai 2009, le Président de la République a déclaré : « La tranquillité des établissements scolaires, quel que soit leur quartier, quel que soit le type d’enseignement, est une condition absolument fondamentale de l’égalité des chances que la République se doit de garantir. Les établissements scolaires doivent être sanctuarisés, à l’abri de toute forme de violence. C’est une priorité absolue pour les autorités de l’État. » Qu’avez-vous entrepris concrètement en ce sens, monsieur le ministre ? Comment comptez-vous, aujourd'hui et demain, lutter contre les violences scolaires ?
Ma dernière question sera plus prospective. Le vieillissement de la population revêtira une ampleur inédite dans les années à venir. S’il est prévu une augmentation d’au moins 10 % de la population métropolitaine d’ici à 2030, le nombre de personnes âgées de plus de soixante ans devrait augmenter de plus de 2 millions d’ici à 2025. Cette transformation aura nécessairement des répercussions en matière de sécurité. Comment votre ministère peut-il anticiper cette évolution ?
M. Alain Moyne-Bressand, rapporteur pour avis de la Commission de la défense nationale et des forces armées. Messieurs les présidents, monsieur le ministre, je vous prie d’excuser mon retard, mais mon TGV a eu une heure et quart de retard.
Mes questions, monsieur le ministre, porteront sur le programme 152 relatif à la gendarmerie nationale.
En matière de lutte contre la délinquance et la criminalité, le directeur général de la gendarmerie nationale, pendant son audition devant la Commission de la défense, a fait état d’une amélioration des résultats en cette fin d’année et nous vous en félicitons. Mais s’agit-il, selon vous, d’un retournement durable de tendance, après les mauvais chiffres du début de 2009 ? Quels sont les domaines sur lesquels il faut particulièrement faire porter l’effort en 2010 ?
Le même directeur général de la gendarmerie nationale nous a indiqué qu’entre 2009 et 2103, les crédits consacrés à la construction immobilière devraient avoisiner 40 millions d’euros en autorisations d’engagement, alors que le besoin est supérieur à 100 millions et que les loyers augmentent. Comment comptez-vous, monsieur le ministre, répondre à ces besoins ?
Qu’en est-il du remplacement des hélicoptères Écureuil, vieillissants, qui ne disposent pas des bi-turbines imposées par la réglementation communautaire pour le survol des zones urbanisées ?
Le transfèrement judiciaire et administratif mobilise quotidiennement plus de 1 000 gendarmes à temps plein. Malgré les efforts réalisés, ce chiffre demeure très important. Qu’est-il prévu en 2010 pour le réduire ?
Enfin, dans un référé du 18 juin dernier adressé au ministre de l’intérieur, la Cour des comptes a proposé plusieurs pistes pour améliorer la gestion de la gendarmerie : déconcentration de la gestion du programme 152, rationalisation de la gestion immobilière, développement des mutualisations avec la police nationale ou maîtrise du système de l’habillement. Quelles suites entendez-vous, monsieur le ministre, donner à ces préconisations ?
M. Brice Hortefeux, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales. Messieurs les présidents, monsieur le rapporteur spécial, messieurs les rapporteurs pour avis, mesdames et messieurs les députés, merci de me donner l’occasion de m’exprimer pour la première fois devant vous, dans le cadre de mes fonctions actuelles. Et, comme l’a dit le vice-président Voisin, c’est la première fois aussi que cette mission est examinée depuis la loi sur le rapprochement entre la police et la gendarmerie du mois d’août.
Tout d’abord, nous devons tenir compte du contexte budgétaire et financier, comme vous l’avez souligné, les uns et les autres. Quatre considérations me paraissent essentielles.
Premièrement, le cadre fixé par la loi de programmation des finances publiques pour 2009-2011 offre une visibilité sur trois ans et nous oblige à respecter année après année un plafond de dépenses. Pour l’année 2010, il a été fixé à 24 milliards d’euros pour nos cinq missions : sécurité, sécurité civile, administration générale, outre-mer et relations avec les collectivités territoriales. Et c’est exactement la somme qui figure dans le projet de loi de finances. Le Gouvernement a donc respecté le cadre défini dans la loi de programmation.
Deuxièmement, la révision générale des politiques publiques – même si Mme Batho la déplore, le Gouvernement la revendique – en vertu de laquelle le départ d’un fonctionnaire sur deux ne sera pas compensé. Le ministère de l’intérieur n’entend pas déroger à la règle commune. Ce sont donc 2 632 postes qui seront supprimés dans la police et la gendarmerie. Plutôt que de subir cette contrainte, nous avons tout intérêt à mettre en œuvre des mesures de rationalisation afin d’optimiser notre potentiel opérationnel.
Troisième donnée : la LOPPSI 2. Je l’ai reportée quand j’ai pris mes fonctions fin juin-début juillet. Et j’entends, en collaboration très étroite avec la Commission des lois, la muscler dans sa partie normative. Je souhaite qu’elle soit discutée dès le début de l’année devant le Parlement. En réponse au président Warsmann, j’indique que le projet de loi de finances respecte exactement, s’agissant de la police, la tranche 2010 de la LOPPSI, soit 133 millions d’euros de crédits de paiement « fléchés » vers la modernisation technologique, l’équipement et la logistique.
La LOPPSI, c’est aussi le logement et l’action sociale avec un peu plus de 23 millions d’euros qui serviront à la création de 100 places de crèche et à la construction de 1 000 logements supplémentaires pour les fonctionnaires. Pour la gendarmerie, 111 millions d’euros seront destinés en 2010 au développement de la police scientifique et au renforcement des moyens techniques : lecture automatisée des plaques d’immatriculation et moyens de lutte contre la cybercriminalité.
Quatrième donnée : le rattachement de la gendarmerie nationale sous commandement unique au ministère de l’intérieur. Très concrètement, cela signifie, monsieur le vice-président Voisin, que désormais 34 % du personnel du ministère proviennent de la gendarmerie. Mais ce rattachement ne remet en cause ni les missions confiées à la gendarmerie, ni la répartition territoriale des compétences, ni encore le maillage territorial de la gendarmerie. Les élus locaux, que vous êtes quasiment tous, y sont très attentifs car la gendarmerie sait très bien gérer ses relations avec eux. J’ai d’ailleurs senti chez Jean-Christophe Lagarde une pointe de regret… Mais 95 % du territoire national sont couverts par la gendarmerie. Il faut donc rechercher en permanence des rapprochements et des mutualisations, en particulier autour des pôles d’excellence, comme l’a demandé votre rapporteur spécial, dans le respect du fonctionnement de chacune des deux institutions. Ce sera aussi l’occasion, monsieur Moyne-Bressand, de se pencher sur les procédures et d’aller dans le sens de ce que préconise la Cour des comptes.
En ce qui concerne les résultats sur le terrain, la tendance est, il est vrai, à une légère augmentation de la délinquance depuis mars dernier. Cependant, cette évolution a été cassée dès le mois de septembre, qu’il s’agisse de la délinquance générale ou de la délinquance de proximité. Pour autant, les derniers chiffres ne sont pas satisfaisants puisque, en septembre, la tendance ne s’est pas inversée. À titre d’exemple, le nombre de cambriolages qui avait augmenté en août de 7,6 % a augmenté moins vite : de 5 %. Le taux d’élucidation est resté constant, autour de 38 %. Je vous rappelle qu’il était, il y a dix ans, de 25 %. C’est dire les progrès qui ont été accomplis. Les faits de criminalité organisée ont baissé au mois de septembre de 5,5 %. Les vols d’automobiles ont très légèrement diminué – de 0,41 %. On constate donc que la hausse s’est interrompue au mois de septembre et les premières indications concernant le mois d’octobre confirment une évolution positive. Il appartiendra à l’Observatoire national de la délinquance de rendre les chiffres publics et au ministère de l’intérieur d’en tirer toutes les conséquences. En tout état de cause, j’ai la conviction d’une évolution positive dès le mois d’octobre.
Dans un tel contexte, quelle est la politique que j’entends mener ? Le premier objectif, c’est une évidence biblique, est de faire baisser durablement la délinquance. Telle est la mission que j’ai reçue du Président de la République. Face aux nouvelles formes de la délinquance, nous devons nous adapter. Que Mme Batho m’excuse, mais les résultats en la matière ne dépendent pas exclusivement des effectifs. C’est aussi une question d’organisation et de modernisation. Nous prenons donc des mesures immédiates et structurelles.
Ainsi, nous avons mis en place des cellules anti-cambriolage. Nous avons constaté que l’opération Tranquillité vacances durant la période estivale donnait des résultats spectaculaires. Chez les foyers concernés, le taux de cambriolage est de 0,4 % ; autrement dit négligeable. Ces cellules consistent en équipes mixtes police-gendarmerie qui exploitent des données recueillies localement. On en compte aujourd'hui quatre-vingt-seize au niveau départemental, et dix au niveau régional.
Le cambriolage, parce qu’il est une forme de viol de l’intimité personnelle et familiale, frappe à juste titre l’opinion. Aussi avons-nous réagi très rapidement à la hausse, cet été, de 12 % à 13 % du nombre de cambriolages de résidences principales en décidant dès le mois de septembre la mise en place des cellules anti-cambriolages : dès le mois d’octobre la quasi-totalité des départements était couverte.
Pour combattre les bandes violentes, des groupes spéciaux d’investigation ont été mis en place dans les trente-quatre départements les plus touchés par le phénomène de la violence urbaine – essentiellement les départements de la petite et de la grande couronne. Il faut toutefois demeurer vigilant car ce phénomène peut s’étendre. Nous avons constitué, en vue de prévenir les risques d’atteinte à la sécurité publique, une base de données qui, conçue comme un outil anti-bandes, nous permettra de mieux identifier les fauteurs de troubles et donc de mieux interpeller ceux qui agissent notamment dans les transports en commun et les quartiers sensibles.
Quant à la police d’agglomération, monsieur le président Warsmann, nous travaillons à son extension à Lille, Lyon et Marseille, en concertation avec les élus locaux – je me suis rendu récemment à Lyon à cet effet. Nous n’excluons pas du reste d’étendre ce dispositif à d’autres métropoles à partir de 2010. Par ailleurs, la proposition de loi renforçant la lutte contre les violences de groupe et la protection des personnes chargées d’une mission de service public, déjà adoptée par l’Assemblée et qui sera examinée par le Sénat le 18 novembre, renforcera notre arsenal législatif en la matière puisque, désormais, le fait d’appartenir à une bande violente constituera en soi un délit.
S’agissant de la drogue, je rappelle que 40 % des jeunes de dix-sept ans ont vraisemblablement déjà consommé une forme de stupéfiant, ce qui, non seulement, est une source d’inquiétude pour leurs parents, mais alimente, de plus, une économie souterraine très lucrative puisque son chiffre d’affaires est estimé entre 1,7 et 2 milliards d’euros.
C’est la raison pour laquelle j’ai décidé de lutter désormais avec la même vigueur contre les petits et contre les gros trafiquants : il n’y a pas, d’un côté, le combat glorieux contre les grands réseaux et, de l’autre, celui, plus obscur, contre le trafic au quotidien. C’est dans cet esprit que nous avons déjà lancé dans certaines communes du département de la Seine-Saint-Denis, notamment à Drancy, des opérations, que nous allons poursuivre, de déstabilisation et d’insécurisation des petits trafiquants. En partenariat avec les élus locaux, des opérations ciblées, qui seront parfois spectaculaires, auront lieu très régulièrement, non seulement à Saint-Denis, mais également à Saint-Ouen ou à Drancy. Je regrette l’absence, ce soir, de M. Patrick Braouezec, que j’ai reçu, à la suite du décès de deux trafiquants, avec Mme Jacqueline Rouillon, le maire de Saint-Ouen, et M. Bruno Le Roux, car, je tiens à le souligner, je partage totalement son analyse selon laquelle, s’il est vrai qu’on ne saurait éradiquer le trafic de drogue en donnant un coup de pied dans la fourmilière, cela permet en revanche de disperser celle-ci et de gagner du temps avant qu’elle ne se reconstitue, le plus souvent affaiblie. Cette politique permet donc de progresser dans la lutte contre les trafiquants.
Il convient également de ne pas oublier les opérations de contrôle et de sécurisation dans les établissements scolaires, à leurs abords immédiats et sur les voies d’accès. En effet, si le trafic a lieu à la fois à l’intérieur des établissements et à leur proximité immédiate, le deal se fait surtout sur une couronne un peu plus large – à trois ou quatre cents mètres de ces établissements.
Alors que, sur les routes, le nombre des tués avait diminué de manière spectaculaire entre 2002 et 2008 – de 44 % –, il a de nouveau augmenté au mois de septembre, de 17,7 %, ce qui a obligé les ministres chargés de ce dossier, qu’il s’agisse du ministre de l’écologie, du secrétaire d’État chargé des transports ou du ministre de l’intérieur, à « monter au créneau » ce week-end et à mener des opérations ciblées, lesquelles ont eu un effet positif puisque le week-end de la Toussaint a, semble-t-il, été moins meurtrier cette année que l’an passé. Je me suis prêté moi-même à ces opérations, notamment sur les routes départementales, qui totalisent 63 % des tués contre moins de 6 % pour les autoroutes – et cela ne fait que renforcer là le rôle de la gendarmerie, la nuit et en fin de semaine.
Je rappelle pour mémoire le plan départemental de prévention de la délinquance et d’aide aux victimes, présenté par le Premier ministre à Villeneuve-la-Garenne, dans les Hauts-de-Seine. La gendarmerie, de son côté, développera une police des territoires. Quant au budget, stable par rapport à l’année dernière, il s’élèvera à 16,4 milliards d’euros pour la mission « Sécurité », les charges de personnels absorbant, ce qui est normal, 85 % des crédits – soit quelque 14 milliards d’euros pour 242 945 emplois de policiers et de gendarmes.
En raison de la révision générale des politiques publiques, le plafond d’emplois sera géré de manière aussi optimale que possible. Un important effort de recrutement sera réalisé en 2010. S’agissant de la police nationale, après l’agitation du mois d’août consécutive à l’injustice faite à certains futurs cadets qu’on ne souhaitait plus recruter, j’ai obtenu du Président de la République l’autorisation de recruter 900 gardiens, 900 cadets et 600 adjoints de sécurité. En complément de ces recrutements tous achevés à ce jour, 4 240 incorporations seront effectuées en 2010 dans la police nationale : 1 500 gardiens de la paix, 700 adjoints de sécurité et 900 cadets, ainsi que 1 000 personnels administratifs, techniques et scientifiques. Le nombre d’emplois vacants et de départs à la retraite étant plus important dans la gendarmerie que dans la police, j’ai obtenu, toujours au mois d’août, l’autorisation de procéder à des recrutements supplémentaires – de 820 sous-officiers et de 1 080 gendarmes adjoints volontaires. Les recrutements prévus dans la gendarmerie en 2010 s’élèveront donc à quelque 6 500.
Monsieur le président de la Commission des lois, vous avez évoqué la salle d’audience de Roissy : le projet, pour lequel 2 millions d’euros avaient été budgétés, a été, fort heureusement, déprogrammé par le ministère de l’intérieur en 2008 – j’étais alors ministre de l’immigration – en raison de la décision de la Cour de cassation d’avril 2008 déclarant illégale l’installation d’une salle d’audience dans l’enceinte d’un centre de rétention administratif. J’ai demandé la tenue d’une réunion sur le sujet au garde des sceaux et au ministre de l’immigration car je n’ai pas l’intention d’investir de nouveau en vain dans un projet qui semble très mal parti puisqu’il suppose un préalable : que magistrats et avocats acceptent d’utiliser une telle salle. Or nous en sommes loin !
M. le président Jean -Luc Warsmann. L’interrogation est unanime, monsieur le ministre.
M. Brice Hortefeux, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales. Je la partage tout à fait.
En ce qui concerne le rapprochement entre police et gendarmerie, qu’ont évoqué M. le président de la Commission des lois et M. le vice-président de la Commission de la défense nationale, je tiens à souligner que la politique de mutualisation des équipements est déjà très largement engagée : l’armement, les munitions et les effets de protection sont globalement les mêmes dans les deux forces, entre lesquelles un accord-cadre a été passé pour le soutien automobile.
La mutualisation s’applique également à la coopération opérationnelle, le directeur général de la police et le directeur de la gendarmerie devant, à cet effet, notamment relancer les GIR, avec le concours des douanes et des services fiscaux. Un autre cadre de coopération concerne l’international, avec le réseau des attachés de sécurité intérieure. Il ne faut pas non plus oublier le partage des connaissances dans le domaine de la police technique et scientifique. J’ai demandé, en vue de lutter contre les cambriolages, l’envoi systématique de la police technique et scientifique. Certes, en matière de cambriolage, des interpellations peuvent être effectuées dans le cadre de circuits bien identifiés, mais la police technique et scientifique permet d’augmenter le taux de résolution, même si des progrès restent encore à réaliser, notamment dans le traitement des données ADN, peut-être en s’adressant à des laboratoires privés.
Des progrès ont été réalisés dans les systèmes d’information et de communication ainsi que dans le domaine des formations spécialisées – celles des maîtres-chiens, des plongeurs, des secouristes ou des personnels administratifs de la gendarmerie.
Monsieur le rapporteur spécial, les pôles d’excellence au sein de la police et de la gendarmerie sont une chance : il faut privilégier la complémentarité.
Monsieur le président Warsmann, des marges existent pour des gains de productivité. Ainsi, dans un département, la fermeture de bureaux de police excentrés et sans réelle activité a permis de créer un groupe de sécurité de proximité et donc de renforcer de cinq patrouilles la présence policière. Nous n’avons sans doute pas encore tiré tout le parti possible du rapprochement entre la police et la gendarmerie.
M. le président Warsmann, Mme Batho et M. Lagarde ont évoqué les unités territoriales de quartier – UTeQ –, qui étaient en cours de constitution lors de mon arrivée au ministère. Il s’agit d’une initiative importante : trente-cinq unités territoriales sont en fonction depuis le mois d’octobre, chacune dotée de vingt à vingt-quatre policiers assurant des patrouilles à pied ou en véhicule. Elles ont effectué 2 792 interpellations. En cas de besoin, elles peuvent recevoir le renfort de sept compagnies de sécurisation, qui sont des unités spécialement dédiées à la lutte contre la délinquance de voie publique et à la prévention des actes de violence urbaine. Ces compagnies, qui comptabilisent 600 policiers, sont déployées dans les Bouches-du-Rhône, la Haute-Garonne, l’Essonne, le Bas-Rhin, les Yvelines, le Val-d’Oise et la Seine-Saint-Denis. Elles ont procédé à 743 mesures de gardes à vue.
J’ai mandaté une mission conjointe de mes services d’audit et d’inspection, à savoir l’IGA et l’IGPN, afin d’évaluer ce dispositif, qui est coûteux. Mme Batho a fait état de réserves enregistrées au cours de différentes auditions : il convient en effet, compte tenu de l’effort budgétaire demandé, de procéder à une analyse approfondie pour savoir s’il faut persévérer en ce sens. Les conclusions devraient en être connues avant la fin de l’année.
Madame Batho, en évoquant la faillite de la politique gouvernementale en matière de sécurité, vous me mettez dans l’obligation de vous répondre. Vous pouvez toujours accuser l’indicateur – l’état 4001 –, il n’en reste pas moins que, si imparfait soit-il, il est demeuré inchangé, ce qui me permet de vous rappeler que la délinquance avait augmenté de 15 % sous la onzième législature, entre 1997 et 2002, et qu’elle a diminué de 14 % depuis cette dernière date.
Mme Delphine Batho. Cet argument ne fonctionne plus ! Le débat, désormais, porte sur votre bilan.
M. Brice Hortefeux, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales. Vous m’avez invité à rappeler ces chiffres : je l’ai fait.
Du reste, à la mi-novembre, l’observatoire de la délinquance rendra publics les résultats d’octobre : je vous donne dès ce soir rendez-vous pour les commenter.
Sur les effectifs de 2012 et de 2013 dans le cadre de la RGPP, j’ignore d’où vous sortez les chiffres que vous avez cités puisque rien n’est encore décidé à ce stade.
Mme Delphine Batho. Du rapport, qui cite le directeur général !
M. Brice Hortefeux, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales. Je le répète : rien n’est encore décidé. Ce n’est que récemment que j’ai obtenu les arbitrages pour les effectifs de 2010 : je n’ai donc pas encore ceux de 2012 ni de 2013 !
En ce qui concerne les mesures catégorielles, il existe une enveloppe de 162 millions d’euros pour les catégories B. Les discussions, qui doivent se poursuivre jusqu’en 2011 selon le calendrier arrêté pour la fonction publique, ont déjà été engagées avec les organisations syndicales, que j’ai toutes reçues – elles sont très nombreuses.
S’agissant du renseignement, j’ai demandé à l’inspection générale de l’administration, avec le soutien des inspections générales de la police nationale et de la gendarmerie nationale – IGPN et IGGN –, de conduire un audit des services départementaux de l’information générale – SDIG –, que vous avez évoqués. Il faut analyser l’évolution, qui a été lourde, afin d’en améliorer éventuellement les résultats. Quant à l’ultra-gauche, c’est essentiellement la Direction centrale du renseignement intérieur – DCRI – qui la suit.
Et je vous annonce une nouvelle qui devrait illuminer votre soirée : la dissolution de la brigade de La Mothe Saint-Héray n’est nullement à l’ordre du jour !
Monsieur le vice-président Voisin, la gendarmerie dispose d’une flotte de 107 véhicules blindés qui datent, pour la majeure partie d’entre eux, du début des années soixante-dix. J’ai naturellement demandé le maintien de la capacité opérationnelle, la gendarmerie devant étudier avec beaucoup de discernement la rénovation de cette capacité blindée, qui est très coûteuse, dans le cadre de nos possibilités financières : quatre-vingt-deux engins seront rénovés à partir des machines déclassées et six engins du génie d’armement, servant à réduire des barricades ou à dégager des axes, seront achetés entre 2009 et 2012. L’armée de terre a de plus cédé douze véhicules de l’avant blindés, qui ont été transformés par l’établissement central logistique de la police nationale de Limoges, pour permettre à la gendarmerie de remplir ses missions en Afghanistan.
Monsieur le rapporteur spécial, la mutualisation des exercices d’entraînement des CRS, du GIGN et du RAID, ainsi que celle des formations motocyclistes, est prévue, de même qu’une structure commune pour la reconversion des adjoints de sécurité de la police et des gendarmes adjoints volontaires. En revanche, monsieur le vice-président Voisin, la formation initiale des gendarmes ne peut pas être mutualisée en raison de leur statut militaire, et elle continuera donc de dépendre du ministère de la défense.
Monsieur le rapporteur spécial, la vidéosurveillance est, aux yeux du Gouvernement, un outil efficace. Un rapport montre du reste très clairement que, dans les collectivités qui l’utilisent, la délinquance diminue deux fois plus vite que dans celles qui n’y ont pas recours.
Le Gouvernement souhaite développer le partenariat en la matière avec les collectivités, notamment en faisant passer le concours de l’État de 12 millions d’euros à 20 millions. De plus, l’État financera sur les crédits de la police le raccordement de la vidéosurveillance de la police municipale au commissariat ou à la gendarmerie pour une utilisation immédiate – j’ai visité des collectivités où un tel raccordement fonctionne remarquablement bien.
D’aucuns prétendent qu’au Royaume-Uni l’efficacité de la vidéosurveillance ferait désormais l’objet de critiques. Je tiens à préciser que les caméras y ont été installées le plus souvent en dehors de tout plan de coordination avec les services de police et que, de plus, il y a déjà là-bas 4,5 millions de caméras, contre seulement 20 000 en France : la marge de progression est donc réelle dans ce pays et nous sommes encore loin de tout risque d’embouteillage. Il faut simplifier les procédures et prévoir l’assistance technique.
Monsieur Lagarde, vous avez fait de la préfecture de police de Paris un portrait rigide, voire pessimiste, alors qu’elle a obtenu des résultats très encourageants, notamment dans la lutte contre les cambriolages – moins 8 % cet été à Paris quand ils augmentaient de 12 % à 13 % dans le reste du pays. Soyez donc confiant dans son savoir-faire !
Comme vous l’avez souligné, la police d’agglomération est une chance formidable. Le maire de Saint-Ouen s’est plaint des effectifs de la police dans sa ville – 137. C’est un réflexe naturel d’élu local. Toutefois, il ne convient pas d’oublier que, dans le cadre de la police d’agglomération, le préfet de police devient le patron de 33 000 hommes – 26 000 hommes avec la police urbaine de proximité – : il s’agit donc d’une force capable d’agir très rapidement, alors que le système précédent interdisait aux policiers parisiens de poursuivre un délinquant au-delà du périphérique ! La mesure, effective depuis le 14 septembre, donnera à l’action de la police plus de souplesse, ce qui améliorera son efficacité pour la sécurité de Paris et des trois départements de la petite couronne – les Hauts-de-Seine, le Val-de-Marne et la Seine-Saint-Denis. En fonction des résultats obtenus, l’extension de la police d’agglomération sera, ou ne sera pas, proposée à d’autres collectivités. Mais le préfet de police Michel Gaudin, que vous avez rencontré, a certainement su répondre à toutes vos interrogations…
La LOPPSI 2 consacre 244 millions à la modernisation des équipements des forces de sécurité intérieure, dont 133 pour la police, qui serviront notamment à la lutte antiterroriste, aux systèmes de lecture des plaques d’immatriculation et à la radiolocalisation des véhicules. Ils serviront aussi à développer ces petites caméras qui équipent les véhicules ou sont portées par les policiers eux-mêmes et qui ont le triple avantage d’exercer une fonction préventive, parce que les délinquants, même cagoulés, n’aiment pas être filmés, de faciliter l’identification et – et j’y suis très attaché – d’éviter des polémiques. Avec une telle caméra en effet, la police n’aurait pas pu être accusée par trois personnes d’avoir, à Bagnolet, en juillet, causé la mort tragique d’un jeune garçon en percutant la motocross sur laquelle il faisait un rodéo. Il a fallu attendre que l’inspection générale de la police nationale démontre qu’il n’y avait eu aucun contact entre la voiture de police et la moto. J’ai ainsi perdu plusieurs semaines avant de porter plainte, comme je le ferai systématiquement dès lors que l’honneur de la police sera injustement mis en cause.
Pour ce qui est des compagnies républicaines de sécurité, on sait qu’elles sont très occupées, et parfois monopolisées par des tâches permanentes, surtout outre-mer. Le volume disponible pour le maintien de l’ordre au sens strict se monte à une trentaine d’unités par jour, ce qui suffit à couvrir les besoins. Dans le cadre de la RGPP, les effectifs de CRS sont, comme ceux des gendarmes mobiles, en cours de réduction et il faut donc réfléchir à les utiliser de la manière la plus efficace possible.
Il était inévitable, monsieur Mariani, que l’annulation brutale du match OM-PSG donne lieu à des affrontements et je rends moi aussi hommage aux préfets Philippe Klayman et Michel Sappin. Les forces de l’ordre se sont montrées réactives et d’un grand sang-froid. Certes, nous devons renforcer la coopération entre la Ligue et les services opérationnels : c’est engagé depuis le mois de juillet. Mais, comme l’a dit le Premier ministre, on n’annule pas un match 24 heures à l’avance. En attendant, une réunion aura lieu demain pour prendre les mesures nécessaires pour le match reporté.
La LOPPSI consacre 140 millions à la construction immobilière pour 2010 ; 1 234 logements ont été livrés en 2009, 974 le seront en 2010 et 1234 seront encore livrés à la gendarmerie en 2011. Je souhaite redonner tout son intérêt à la construction subventionnée par l’État. Il faut sans doute revaloriser le décret de 1993 pour parvenir à un meilleur équilibre avec le bail emphytéotique administratif, qui est extrêmement utile mais coûte tout de même 30 % plus cher à la gendarmerie.
La flotte de la gendarmerie compte par ailleurs 49 hélicoptères : quinze EC-145, trois EC-135 – dont deux sont équipés d’un radar capable de lire une plaque minéralogique alors que l’appareil est tellement haut qu’on ne l’entend pas depuis la voiture –, et trente et un Ecureuil. Ils ont une dérogation pour le survol des zones habitées. Pour ce qui est de la composante surveillance intervention, douze hélicoptères biturbines EC-135 ont été commandés depuis 2006 pour remplacer des Ecureuil. Ils sont en cours de livraison. Il faudra réfléchir à commander de nouveaux EC-135 après 2009, et donc à la prolongation de la durée de vie des Ecureuil.
M. Claude Bodin. La construction d’un nouvel hôtel de police à Taverny est bloquée, comme d’autres opérations, pour cause de retard de la LOPPSI 2. Le projet est pourtant finalisé. Le conseil régional d’Île-de-France et le conseil général du Val-d’Oise ont accordé leurs subventions. L’État s’est engagé à verser 20 % du montant total des travaux, mais la convention entre la commune et le ministère de l’intérieur prévue par la LOPPSI de 2002 n’est pas encore signée. Ce dispositif devant s’éteindre au 31 décembre 2009, il se crée une incertitude sur la procédure à suivre pour les opérations en cours. Certes, la LOPPSI 2 devrait le pérenniser, mais il faut donc attendre qu’elle soit votée. Comment envisagez-vous de débloquer ce dossier de Taverny et d’autres semblables ?
M. Jean-Jacques Urvoas. L’un des objectifs de la LOPPSI était le remplacement des agents actifs effectuant des tâches de gestion par du personnel administratif, dûment formé à cet effet et moins onéreux. Où en est l’exécution du protocole d’accord de 2004, qui prévoyait la substitution totale ? Par ailleurs, et suite au référé que vous avez reçu de la Cour des comptes, avez-vous engagé une réflexion sur les zones d’implantation des unités de CRS, qui ne sont parfois pas en adéquation avec les zones où elles sont le plus sollicitées ? La même question se pose pour les escadrons de gendarmerie mobile, puisqu’une réduction de quinze unités est envisagée. Quand la décision sera-t-elle prise, et quels seront les critères de choix des unités supprimées ?
Les adjoints de sécurité de la police nationale effectuent souvent le même travail que les gardiens de la paix pour un salaire moins élevé. Les recrutements annoncés compensent-ils ceux qui n’ont pas été faits en 2009 ? Par ailleurs, qu’en est-il de l’immeuble de la Direction centrale du renseignement intérieur de Levallois-Perret, à propos duquel la Cour des comptes vous a demandé l’année dernière de lever l’option d’achat, le coût de l’opération pour l’État étant particulièrement élevé ? Enfin, le transfert de l’Institut national de formation des personnels administratifs, techniques et scientifiques de Gif-sur-Yvette à Lognes est prévu depuis trois ans, mais l’enveloppe n’est jamais consommée. Est-il vrai que vous louiez depuis un an un bâtiment vide à Lognes, pour un million par an ?
M. Jean-Claude Bouchet. Sans sécurité, pas de liberté de se déplacer, de travailler, de se promener en famille. C’est vrai partout, des plus grandes villes aux communes comme la mienne, Cavaillon, 26 000 habitants, à laquelle vous avez affecté à ma demande des moyens très efficaces mais hélas ponctuels. Je ne désespère pas qu’ils soient pérennisés.
La police nationale connaît depuis huit ans une amélioration continue de ses performances mais le premier semestre 2009 a vu un ralentissement : la délinquance générale ne baisse que de 0,47 % et la délinquance de proximité de 1,5 %. Surtout, les cambriolages augmentent de 11,2 %. Quels sont les moyens alloués à la lutte contre l’insécurité ?
Mme Françoise Olivier-Coupeau. Lors du vote de la loi sur le rapprochement entre police et gendarmerie, nous vous avertissions que cette dernière ne devait pas devenir le parent pauvre de l’histoire. Nos craintes étaient fondées. À coup de regroupements, de redéploiements, d’ajustements – bref, de suppressions d’emplois –, la RGPP conduit pour 2010 à une diminution des effectifs de la gendarmerie de 1 303 équivalents temps plein, un chiffre semblable à celui de la police nationale mais pour moitié moins d’effectifs. Vous entendez réduire les postes administratifs mais les gendarmes concernés font aussi, dans la même journée, de la police judiciaire, du renseignement d’opportunité et de la sécurité ! Supprimer un poste administratif dans la gendarmerie, c’est souvent supprimer un poste d’officier de police judiciaire.
Et pour la mutualisation non plus, le compte n’y est pas. Dans la mutualisation des véhicules, qui était effective avant la loi, ce sont les gendarmes qui, la plupart du temps, assurent les formations et qui partagent leurs hélicoptères avec les policiers, qui n’en avaient pas. Comme on n’en a pas commandé de nouveaux, il y en aura moins pour les gendarmes. La mutualisation se fait donc à sens unique et la gendarmerie devient une variable d’ajustement.
Question subsidiaire : quel est l’avenir de l’école de police de Vannes ?
M. Éric Ciotti. Le 10 octobre, Poitiers est devenue le théâtre d’événements d’une grande violence – des événements qui se multiplient, en particulier dans les quartiers. Une proposition de loi pour la lutte contre les violences de groupe est en cours de discussion, qui donnera les armes juridiques adaptées. Mais le budget pour 2010 contient-il les moyens nécessaires ? Le décret du 18 octobre créant une nouvelle base de données s’insère-t-il dans le dispositif ?
M. Gérard Charasse. J’aurais pu vous interroger sur les problèmes d’insécurité routière dans mon département, mais je me contenterai de vous rappeler que nous avons besoin de réponses rapides.
La gendarmerie participe de plus en plus aux opérations extérieures, notamment en matière de formation. Le déploiement en 2008 de 400 à 450 gendarmes sur les différents théâtres d’opération a coûté 15,282 millions, pour une provision de 11 millions. La loi de finances pour 2009 a reconduit cette provision à l’identique, alors que les prévisions de dépenses sont arrêtées à 19,4 millions. Ces prévisions intègrent-elles les dépenses liées aux nouvelles missions ? Sinon, comment celles-ci seront-elles financées ?
M. Michel Grall. Les forces de gendarmerie jouent en effet un rôle extrêmement important dans nos opérations extérieures, au Kosovo, en Afghanistan ou ailleurs. Dans le cadre de son rattachement au ministère de l’intérieur, il est prévu que la gendarmerie garde la totalité de ses missions militaires. Ce rattachement va-t-il modifier cependant ses conditions de déploiement ou le niveau des ressources nécessaires à son intervention à l’extérieur ?
M. Christophe Guilloteau. Dans ma circonscription, trois brigades de gendarmerie sont sur la sellette : Saint-Genis-Laval, Francheville – qui est en construction – et Tassin. Une décision a-t-elle déjà été prise ? Et ces brigades seront-elles remplacées par de nouvelles unités, ou plutôt par un redéploiement de la police ?
Mme Sylvia Pinel. Vous vous êtes donné comme priorité absolue, monsieur le ministre, de faire baisser la délinquance afin d’assurer la sécurité partout et pour tous. Mais la progression de la petite délinquance n’épargne personne, sur aucune partie du territoire. Mon département connaît une augmentation significative de la délinquance organisée et des actes d’incivilité et de violence, qui trouvent souvent leur origine dans le trafic de stupéfiants. Que comptez-vous faire dans nos territoires ruraux, épargnés jusqu’alors, pour lutter contre ces trafics ? Les crédits visant à assurer une présence effective sur l’ensemble du territoire sont en nette diminution. On s’obstine à réduire les moyens de la gendarmerie nationale. Par manque d’effectifs, brigades de gendarmerie et commissariats de police ne peuvent mener à bien leurs missions. Quelles actions de prévention comptez-vous développer afin de lutter contre cette petite délinquance ? Et pourquoi privilégiez-vous la vidéoprotection, dont on sait qu’elle aboutit à délocaliser la délinquance ?
M. Christian Vanneste. Depuis la LOPPSI de 2002, nous étions habitués à penser la sécurité en termes d’effectifs. Le budget pour 2010 nous invite à nous intéresser plutôt aux innovations en matière de méthodes et de technologies. L’accent est enfin mis sur la vidéosurveillance, domaine dans lequel nous avions accumulé beaucoup de retard, mais il faudra aussi insister sur l’importance des communications. Quelques équipes dans des voitures rapides équipées de moyens de communication modernes peuvent accroître de beaucoup l’efficacité de la police. Par ailleurs, notre système de centres d’appel – le 17 – fonctionne mal. On peut devoir entendre plusieurs minutes de réponses enregistrées avant d’obtenir un interlocuteur, qui n’a pas toujours été formé à l’accueil du public et connaît mal le terrain de l’intervention. En comparaison, j’ai vu à Washington un centre d’appels regroupant l’équivalent de Police Secours, des pompiers et du Samu, installé d’ailleurs par une entreprise française, où la réponse s’obtient en cinq secondes, avec visualisation sur écran du secteur de l’appel. Comment envisagez-vous d’améliorer le système d’appel de Police Secours ?
M. Daniel Boisserie. On manque de gendarmes : c’est ce qui ressort de nombreuses interventions, sur tous les bancs. Pour ma part, j’attirerai votre attention sur leurs conditions de logement. La plupart des casernes sont vétustes, et ce sont les collectivités locales qui sont chargées d’en construire de nouvelles. Lorsqu’elles le font, on leur demande d’abord d’aménager les terrains et d’y faire venir les réseaux, certes, mais ensuite aussi de rétrécir les surfaces d’habitation, puis de supprimer les caves et maintenant les garages… C’est vraiment trop. On pinaille au détriment des gendarmes.
M. Philippe Goujon. Un plan de vidéoprotection de 1 200 caméras a été lancé en 2005 à Paris, malgré l’opposition du maire de la ville. Il faut accélérer l’installation, bien trop lente, de ces équipements et envisager d’ores et déjà un deuxième plan de 1 000 caméras – sachant par exemple que 75 000 caméras sont reliées à Scotland Yard ! Par ailleurs, je me réjouis que la police d’agglomération du Grand Paris soit enfin mise en place. Il faudra en tirer toutes les conséquences sur l’organisation de la préfecture de police, qui est un excellent outil mais qui a besoin de certaines réformes : dégraisser les états-majors par exemple, redéfinir les secteurs de la direction départementale de la sécurité publique et la direction de la protection de la jeunesse ou surtout transformer la circulation, quasiment abandonnée aujourd’hui, en une grande direction. Enfin, quel bilan tirez-vous des premières mesures de fidélisation du personnel comme le concours spécifique Île-de-France, l’avancement accéléré ou les aides à la vie personnelle ?
M. Philippe Folliot. Le Tarn est un des pires départements de France en matière de sécurité routière. Je suis sûr que vous saurez convaincre votre collègue ministre de l’aménagement du territoire de la nécessité de l’autoroute Castres-Toulouse.
Les ajustements prévus dans les forces mobiles vont conduire à des disparitions d’escadrons de gendarmerie ou de compagnies de CRS. Un équilibre sera-t-il assuré entre police et gendarmerie ? Par ailleurs, quelle est votre position quant à la force de gendarmerie européenne ? Quels sont les moyens spécifiques dont disposeront les 150 gendarmes qui vont être déployés en Afghanistan, et leurs conditions d’emploi ? Enfin, certains évoquent le retrait de la gendarmerie du Collège interarmées de défense et du Centre des hautes études militaires. Elle ne ferait plus partie que de l’Institut national des hautes études de sécurité. Pouvez-vous nous rassurer à ce propos ?
Mme Sandrine Mazetier. Le but de la police d’agglomération semble être de projeter des forces de maintien de l’ordre dans certaines circonstances bien précises, pas d’occuper le terrain au quotidien. C’est pourtant cela qu’attendent nos concitoyens dans les quartiers où l’insécurité est croissante et la vie de plus en plus difficile. Le directeur de la direction de la sécurité de proximité de l’agglomération parisienne a par ailleurs évoqué, dans son audition, des déplacements qui dépassent très largement la petite couronne, et en particulier une circulation verticale dans toute l’Île-de-France. La police d’agglomération telle qu’elle est conçue pour l’instant ne semble pas devoir parvenir à mettre fin à ces phénomènes, d’autant que son organisation est davantage liée au lieu de dépôt de plainte qu’au lieu de commission des délits. Enfin, sachant que la commune de Port-Saint-Louis-du-Rhône dispose d’un encadrement semblable à celui de Paris – un policier pour 222 habitants, contre 209 à Paris – mais que le taux d’élucidation y est de 54 %, contre 33 % à Paris, que comptez-vous faire pour améliorer le taux d’élucidation dans la capitale ?
M. Didier Quentin. Monsieur le ministre, je tiens à vous remercier pour votre venue lors des incidents que la ville de Royan a connus pendant la saison estivale. Grâce à l’envoi de 45 fonctionnaires de police supplémentaires, l’ordre est revenu très vite dans les rues et dans les esprits.
Des événements peut-être moins médiatisés mais d’une nature semblable se sont déroulés durant l’été dans plusieurs lieux de vacances, en zone de police comme en zone de gendarmerie. Les trafics en tous genres, notamment les trafics de stupéfiants, semblent augmenter d’année en année le long de nos littoraux. Monsieur le ministre, quelles mesures entendez-vous prendre pour conforter la sécurité des personnes et des biens dans nos stations balnéaires ? Envisagez-vous une augmentation des effectifs de policiers et gendarmes pendant la saison 2010 ? J’insiste aussi pour que des instructions soient données aux autorité de police afin qu’elles informent en priorité les maires des éventuels incidents.
Nos communes sont aussi régulièrement l’objet d’occupations illégales de terrains publics et privés par des gens du voyage ou soi-disant tels. Nous sommes souvent démunis devant la multiplication de ces grands passages. Beaucoup de nos concitoyens sont exaspérés par ce qu’ils considèrent comme une forme d’impuissance publique. Notre Commission des lois a créé sur cette question une mission d’information dont je suis le rapporteur. L’État pourrait-il accueillir sur des terrains domaniaux, notamment sur des sites militaires désaffectés, une partie de ces grands rassemblements ?
M. Yves Vandewalle. Monsieur le ministre, je me fais ici l’écho de l’exaspération de nombreux maires ruraux de la circonscription dont je suis l’élu, ainsi que de leurs administrés, devant les droits exorbitants dont semblent bénéficier les gens du voyage : occupation illégale de terrains publics ou privés en toute impunité, violation du droit de l’urbanisme par des constructions sauvages en zone non constructible, dégradations, violences, troubles à l’ordre public sans suites judiciaires, voire en présence de forces de l’ordre. La population sédentaire comprend d’autant moins cette situation que, tout en refusant de payer les services communaux dont ils bénéficient – fourniture d’eau, enlèvement des ordures ménagères, voire frais de location d’emplacements sur les aires d’accueil – les gens du voyage affichent parfois un train de vie étonnant ; j’ai moi-même pu voir tout récemment de très belles voitures de luxe sur un site de grand passage. Je me réjouis de la création d’une mission d’information sur cette question difficile. Quelles évolution le Gouvernement et vous-même envisagez-vous pour garantir l’égalité de chaque citoyen de ce pays devant la loi, en droits comme en devoirs ?
Enfin, monsieur le ministre, quel est l’état d’avancement de la rénovation des logements de gendarmes sur le site de Satory ? Nous souhaiterions voir se conclure un feuilleton qui dure depuis de trop nombreuses années.
M. Robert Lecou. Monsieur le ministre, dans les années 90, l’un de vos prédécesseurs, M. Pierre Joxe, avait souhaité déplacer l’escadron de gendarmerie mobile 12/6 à Montpellier. Mme Michèle Alliot-Marie a décidé le maintien définitif de son implantation à Lodève, ainsi que la réhabilitation de la caserne Fouque, bâtiment certes historique mais inadapté, qui l’abrite.
Les premières tranches des travaux sont achevées, les premiers équipements ont été livrés. Malheureusement, la réhabilitation s’est interrompue en juin dernier. Monsieur le ministre, il faut rendre aux gendarmes des conditions de logement adaptées au sein de la caserne ; aujourd’hui, leurs logements sont disséminés à travers la ville. L’annonce de la reprise du projet rassurerait définitivement la sous-préfecture de Lodève. L’importance des 120 hommes et femmes qui composent l’escadron est considérable pour cette ville de 8 000 habitants. Le plan de relance serait un instrument parfaitement adapté pour financer la reprise des travaux. Serait-il possible de le faire intervenir ?
M. Marc Francina. Monsieur le ministre, je vous interroge en tant que président de l'Association nationale des maires de stations classées et de communes touristiques.
Le nombre de maîtres nageurs CRS employés dans les stations littorales est à la baisse. Or, non seulement les services départementaux d’incendie et de secours ne sont guère enclins à affecter des pompiers à la surveillance des plages, mais ces maîtres nageurs exercent aussi une fonction de représentants de l’ordre.
Nous constatons aussi que des prélèvements sont faits régulièrement, pour des événements tels que le Tour de France, sur les renforts de CRS attribués chaque année aux stations touristiques. Les CRS affectés en Haute-Savoie pour deux mois y sont restés à peine plus d’un mois.
Enfin, pensez-vous accroître les renforts de gendarmerie dans les stations de sports d’hiver ? Le besoin est de plus en plus grand dans les stations des Alpes et des Pyrénées.
Mme Delphine Batho. J’ai posé à M. le ministre une question sur le maintien en activité des policiers jusqu’à 65 ans et sur les conséquences qu’aura cette mesure sur le budget et la gestion des effectifs, et une autre sur le cadre et l’organisation des missions de la gendarmerie en matière de renseignement. Pourrais-je avoir une réponse ?
M. Brice Hortefeux, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales. Monsieur Urvoas, vous avez raison : par substitution les agents administratifs remplacent progressivement les policiers dans leurs fonctions administratives : c’est le sens et l’objectif de la réforme « corps et carrières ». En 2009, 1 002 agents ont été recrutés, et ont rejoint les rangs de la police. Cet effort sera poursuivi en 2010 avec l’incorporation au sein de la police nationale de 1 000 agents administratifs.
La fermeture du site de Gif-sur-Yvette de l'Institut national de la formation des personnels administratifs, techniques et scientifiques (INFPATS) a pour objet le regroupement de la formation des agents administratifs de la police nationale mais aussi du secrétariat général du ministère sur un site unique, à Lognes. Des travaux sont nécessaires dans l’immeuble loué, qui n’est aujourd’hui qu’un plateau de bureaux. Le regroupement devrait se faire au tout début de l’année 2010. Je vous donne rendez-vous à cette date.
Trois principes président à la restructuration des escadrons de gendarmerie. D’abord, en ont été écartés les escadrons implantés sur des sites déjà touchés par des restructurations. Ensuite, sont préservés les escadrons bénéficiant d’une évolution ou d’une restructuration immobilière récente. C’est un choix de rationalisation et de cohérence. Enfin, une étude opérationnelle sera conduite pour adapter l’équilibre géographique aux critères opérationnels. Je veillerai tout particulièrement à ce que les deux premiers points, de bon sens, soient respectés.
Monsieur Bodin, le relogement du commissariat de Taverny est une priorité affichée et revendiquée – j’ai un peu honte à le dire – depuis 2001. Très concrètement, du fait des contraintes qui pèsent sur le budget de la police, seule devrait être retenue l’option de la mise à disposition gracieuse à l’issue de la réalisation de l’ouvrage. J’ai aussi demandé l’engagement d’une étude de faisabilité pour l’installation de ce commissariat, avec d’autres services de police, sur le site de la base aérienne de Taverny, que le ministère de la défense devrait libérer au cours de l’année 2011.
Monsieur Bouchet, vous avez rappelé diverses données sur l’évolution de la délinquance. Je vous ai déjà répondu en partie. Les premiers éléments qui remontent du terrain depuis le mois d’octobre confirment la tendance à l’amélioration.
Madame Olivier-Coupeau, sur l’école de police de Vannes, je ne peux vous répondre aussi positivement qu’à Mme Batho. Cette école a vocation à être fermée du fait de la diminution des effectifs à former. Quatorze écoles et centres de formation sont dans ce cas. Si j’ai réussi à protéger l’école de police de Châtelguyon, ce n’est que provisoirement, pour la durée de mes fonctions ; j’ai souligné ce point devant mes interlocuteurs locaux.
Monsieur Guilloteau, vous vous interrogez sur la police d’agglomération à Lyon. Lors de ma visite, j’ai réuni les préfets, les directeurs départementaux de la sécurité publique et les commandants de groupements des départements concernés. J’ai senti de l’inquiétude de la part de vos collègues. Aujourd’hui, rien n’est décidé. Les préfets font des propositions, je vais les expertiser. Je m’impliquerai personnellement dans la concertation qui suivra.
Monsieur Gérard Charasse, je l’ai indiqué, la flotte des hélicoptères Ecureuil sera progressivement remplacée par des EC-135.
Lors d’un déplacement en Allier, j’ai été très impressionné par les équipements de police qui peuvent être installés sur les hélicoptères. Nous allons les développer. L’implantation des bases sera modifiée.
Je souhaite bien sûr encourager la mutualisation des moyens aériens. Les hélicoptères de la gendarmerie et ceux de la sécurité civile – qui sont des EC 145 – seront concernés.
Depuis 2007, le volume des heures de vol mises à la disposition de la police par la gendarmerie ne cesse d’augmenter. En 2009, il a été de 1 300 heures.
Le transport des militaires du groupe d’intervention de la gendarmerie nationale vient d’être ouvert aux policiers du RAID.
Madame Pinel, il faut en effet mobiliser sur le terrain les gendarmes pour lutter contre la délinquance dans les zones rurales. Comme je l’ai déjà indiqué, il en sera recruté 6 500 en 2010.
Monsieur Boisserie, la procédure du bail emphytéotique administratif (BEA) a été très sollicitée entre 2002 et 2007 pour accélérer la construction de casernes de gendarmerie. J’ai demandé une nouvelle inscription dans la future loi d'orientation et de programmation pour la sécurité intérieure. Cette procédure a permis la livraison de 1 234 logements en 2009 ; 974 le seront en 2010 et encore 1 234 en 2011. Afin de faire aboutir avant la fin de la LOPPSI les dossiers validés, le BEA est prorogé chaque année en loi de finances. Pour la gendarmerie, construire selon cette procédure coûte 30 % plus cher que selon la procédure du décret du 28 janvier 1993.
Monsieur Vanneste, merci de votre compte rendu. Dans le cadre du plan d’action sur les systèmes d’information et de communication, je demanderai à la direction de la police nationale d’expertiser cette expérience américaine.
Nous avons prévu d’inscrire dans la LOPPSI les moyens nécessaires non seulement à la gestion des appels au « 17 police secours » mais aussi à l’intervention en temps réel de fonctionnaires par le moyen de la géolocalisation des véhicules. Un effort doit être consacré à cette action essentielle. En 2010, il est prévu d’équiper 4 400 véhicules pour compléter la modernisation de centres d’information et de commandement.
La formation à la langue anglaise des personnes qui répondent doit aussi être développée. Cet été, à Cannes, dans le département des Alpes-Maritimes, une difficulté d’interprétariat s’est posée.
Monsieur Goujon, les réseaux de la SNCF et de la RATP, à Paris et en banlieue, comportent 9 500 caméras en service. En revanche, la préfecture de police ne gère directement que 300 de ces équipements. Ce faible nombre est à l’origine du projet d’implantation de 1 000 caméras supplémentaires ; début juin, le préfet de police a adressé une cartographie aux élus.
Mme Sandrine Mazetier. Nous n’avons rien reçu.
M. Brice Hortefeux, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales. Je le regrette.
Monsieur Goujon, vous avez vous-même organisé dans le quinzième arrondissement une réunion sur cette question à la rentrée. Un débat devrait avoir lieu au Conseil de Paris. J’ai eu récemment un entretien avec le maire de Paris sur ce projet. Je suis convaincu que les Parisiens se rendront compte de tout l’intérêt qu’il présente et je souhaite que les élus parisiens lui apportent un soutien financier. Je n’ai perçu auprès du maire de Paris aucune hostilité de principe mais simplement une interrogation d’ordre financier.
J’ai déjà présenté quelques éléments sur la fidélisation. 5 millions d’euros seront consacrés à des réservations de places de crèches ; l’objectif est de 200 places nouvelles. Un demi-million d’euros sera consacré à l’aide à la garde d’enfants pour les familles monoparentales. Enfin le parc de logements s’accroîtra de 1 000 nouveaux logements réservés.
Monsieur Folliot, vous avez rappelé la création en 2004 de la Force de gendarmerie européenne. Six pays en font partie, l’Espagne, la France, l’Italie, les Pays-Bas, le Portugal et la Roumanie. Deux pays en sont partenaires, la Pologne et la Lituanie. Enfin, la Turquie y occupe le statut d’observateur. La FGE est apte à un spectre très large d’engagement, de la phase militaire à la stabilisation. Sa présidence en 2009 est assurée par la France. Elle sera très prochainement déployée en Afghanistan au sein de l’OTAN. Le Président de la République l’a annoncé, 150 gendarmes vont participer à cette opération ; je vais demain matin saluer ces militaires qui doivent partir dans les dix jours.
Madame Mazetier, j’ai entendu votre argumentation. Cependant, l’initiative que vous critiquez n’a que deux mois d’existence. Laissez-lui, je vous prie, le temps de prouver ou non son intérêt. Il est trop tôt pour tirer un bilan. Ma conviction est qu’elle réussira et attirera d’autres collectivités.
Si la sécurité dans les transports est normalement à la charge des opérateurs, il est néanmoins logique que le ministère de l’intérieur s’y intéresse ; 2 550 policiers et gendarmes sont exclusivement affectés à cette mission.
La vidéoprotection est une technique d’avenir. La SNCF comme la RATP s’efforcent de la développer. D’ores et déjà, 322 des 389 gares du réseau ferré d’Île-de-France sont équipées de 12 000 caméras. Le climat du partenariat entre le ministère de l’intérieur et les opérateurs est bon. Lors d’une visite que nous avons effectuée à Saint-Denis, le directeur général de la SNCF et moi-même nous sommes mis d’accord en faveur d’un plan renforçant, en rapport avec les besoins, l’équipement des quais en appareils vidéo.
Monsieur Quentin, vous avez rappelé ma venue à Royan cet été. Des commerçants, victimes et excédés, ont organisé une opération punitive contre de jeunes banlieusards originaires de l’Essonne qui avaient quelque peu chapardé et squatté. Ces jeunes un peu turbulents ont dû se réfugier auprès des forces de police ! Pour adresser un signal, nous avons affecté 45 personnes de plus à la sécurité. Ce renfort a contribué à rassurer la population.
Comme monsieur Vandewalle, vous avez évoqué les maîtres nageurs. Aujourd’hui, ils ne sont plus présents sur les lacs et les rivières mais seulement dans les stations balnéaires. Je m’y engage ici, le nombre des communes bénéficiant d’une présence des CRS ne diminuera pas ; l’an prochain, il sera de 100, comme cette année. En revanche, le nombre des CRS, lui, va se réduire. Il faut donc améliorer la capacité de formation de personnels maîtres nageurs.
L’application de la loi du 5 juillet 2000 relative à l’accueil et à l’habitat des gens du voyage continue à poser difficulté. Malgré les subventions proposées, le nombre d’aires d’accueil est insuffisant. Les aires de grand passage demeurent beaucoup trop rares, et sont souvent suroccupées du fait de la capacité insuffisante des aires d’accueil. Au 1er janvier 2009, 358 communes et 172 établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) étaient encore défaillants dans la mise en œuvre des schémas départementaux d’accueil ; 80 % de ceux-ci devant être révisés d’ici à 2010, j’ai demandé l’élaboration d’une circulaire à l’attention des préfets. Nous souhaitons limiter le nombre de stationnements irréguliers. L’excellent rapport du président de la commission consultative des gens du voyage, le sénateur Pierre Hérisson, montre que l’utilisation des terrains de l’Etat n’est pas une solution pérenne. Celle-ci ne sera trouvée que par la mobilisation de tous les protagonistes : gens du voyage, collectivités locales et État. Il faudra aller au-delà de la loi de 2000.
Monsieur Lecou, le plan de relance ne comporte aucun crédit pour les installations immobilières des forces de sécurité intérieure.
J’ai répondu à M. Francina.
Les dispositions prises la saison dernière pour la sécurité des massifs montagneux – la constitution d’équipe mixtes de gendarmes départementaux et de gendarmes mobiles – seront reconduites cet hiver.
Madame Batho, le maintien de l’activité des policiers au-delà de la limite d’âge actuelle, de 55 ans, prendra effet à compter de l’année prochaine. En 2010, nous pourrons mieux évaluer les réactions des policiers à cette mesure.
Il faut distinguer information et renseignement. Tout fonctionnaire de police ou militaire de la gendarmerie est chargé de recueillir de l’information. La mission de renseignement, elle, incombe, pour l’information ouverte, aux services départementaux de l’information générale (SDIG) et, pour l’information fermée, à la direction centrale du renseignement intérieur (DCRI). La gendarmerie collaborant avec les SDIG, j’attends le rapport de l’inspection générale de l’administration pour définir les périmètres de chacun.
Monsieur Ciotti, les bases de données sont en effet nécessaires à l’efficacité de l’action policière. Vous avez d’ailleurs observé que la mise en place des deux bases de données destinées respectivement à la surveillance des bandes de hooligans et des groupuscules et aux informations sur les personnes désirant intégrer la police, la gendarmerie ou des secteurs sensibles comme le nucléaire ou les aéroports, n’a soulevé aucune polémique. Toutes les précautions ont en effet été prises à cet effet. Ainsi, j’ai refusé de signer les textes correspondants au début de juillet, car je venais de prendre mes fonctions et tenais d’abord à savoir de quoi il s’agissait et, surtout, quelle serait la méthode employée. J’ai ensuite voulu obtenir l’avis du Conseil d’État et de la CNIL, ainsi que celui d’associations telles que SOS-Racisme ou la LICRA – en sachant bien d’ailleurs qu’elles pourraient fort bien ne pas être d’accord. Nous nous sommes donc entourés de toutes les garanties et avons supprimé de ces bases tout ce qui pouvait poser problème et ne présentait aucun intérêt, comme l’orientation sexuelle pour le recrutement dans les forces de sécurité.
La solution à laquelle nous sommes parvenus est très équilibrée et sera très efficace. Le matin même où je me suis rendu à Poitiers, l’ancien Premier ministre Laurent Fabius a d’ailleurs regretté que les services de renseignement intérieur ne disposent pas d’éléments suffisants et le député-maire de Poitiers a lui-même évoqué cette question d’une manière très cordiale et très républicaine. La réponse est venue : nous allons remédier à l’insuffisance de renseignements.
Toutefois, je le répète, je ne transige pas avec le respect des libertés individuelles, et c’est bien le cas dans cette affaire. Il reste que la police et la gendarmerie ont besoin de ces sources de renseignement, et il n’est pas un seul Français qui ne puisse comprendre que quelques éléments d’information sont nécessaires sur les candidats à l’entrée dans ces corps.
Mme Delphine Batho. Lorsque je vous ai demandé tout à l’heure quel était le service chargé du suivi de l’ultra-gauche, vous m’avez répondu qu’il s’agissait de la DCRI. Il y a donc une certaine « habileté » intellectuelle à utiliser les incidents de Poitiers pour évoquer le manque d’information d’un service privé de fichiers depuis le retrait des décrets sur Edwige et l’absence de suivi de la recommandation 53 du rapport parlementaire que nous avons rendu. Je crois d’ailleurs savoir que la SDIGE avait fait remonter des informations, mais que celles-ci n’ont pas bien circulé.
Je n’en dirai pas plus ce soir sur les fichiers, dont nous débattrons en séance publique le 19 novembre, puisque le groupe socialiste a fait inscrire à l’ordre du jour la proposition de loi qui avait été votée par la Commission des lois.
M. Gérard Charasse. Je souhaite corriger une méprise : ma question portait essentiellement sur le financement de la participation de la gendarmerie nationale aux opérations extérieures – ou OPEX – et sur l’écart, constaté notamment dans le budget 2008, entre les provisions et le coût réel. En 2009 également, les prévisions ont été arrêtées à 19,4 millions d’euros, pour 11 millions inscrits en loi de finances. Comment pensez-vous financer ces dépenses supérieures aux prévisions ?
M. Michel Grall. Comme M. Charasse, je m’interrogeais sur la pérennité du rôle et de l’emploi des forces de gendarmerie dans les opérations extérieures. Ces forces sont en effet très sollicitées sur les différents théâtres d’opérations et jouent un rôle important, qui dépasse de loin les considérations budgétaires.
M. Philippe Folliot. Monsieur le ministre, je vous avais interrogé sur le maintien de la gendarmerie dans le cadre du Collège interarmées de défense et du Centre des hautes études militaires.
M. Robert Lecou. Ma question très brève vous a permis, monsieur le ministre, de me faire la réponse la plus rapide : c’était « non ». Cependant, compte tenu des vicissitudes qu’a connues l’escadron 12/6, je vous interrogerai par écrit pour recevoir une réponse rassurante quant à la volonté de l’État de poursuivre la réhabilitation de cette caserne.
M. Jean-Christophe Lagarde. Monsieur le ministre, je partage votre volonté de généraliser les moyens vidéo embarqués ou portés. Ces dispositifs pourraient également être ouverts aux policiers municipaux, afin d’éviter les problèmes auxquels peuvent parfois donner lieu leurs interventions. Je souhaiterais que vous précisiez aux élus locaux le cadre réglementaire dans lequel peut s’organiser l’utilisation de ces moyens – je suis en effet confronté actuellement à cette difficulté.
M. Jean-Jacques Urvoas. Monsieur le ministre, je vous rappelle que je vous ai demandé si, à propos de la levée d’option d’achat de l’immeuble de la DCRI à Levallois-Perret, vous aviez suivi le conseil de la Cour des comptes.
M. Brice Hortefeux, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales. Monsieur Urvoas, l’option n’a pas été levée.
Madame Batho, le cas d’école de Poitiers est particulièrement intéressant et j’aurai sans doute l’occasion de le préciser lors du débat que vous évoquez.
Monsieur Charasse, on compte aujourd’hui 432 gendarmes en opérations extérieures, principalement dans les Balkans et en Afrique. Depuis 2007, 15 millions d’euros sont identifiés au sein du programme 152 de la gendarmerie nationale. Pour 2009, les dépenses prévisionnelles sont estimées à 36,7 millions d’euros, soit un surcoût de 21,7 millions, qui correspond à l’engagement actuel de plus de 500 gendarmes en OPEX. L’engagement de 150 gendarmes, que j’évoquais tout à l’heure en réponse à M. Folliot, entraîne de nouvelles dépenses pour 2009 et 2010, évaluées à 15,2 millions d’euros en 2009 et 12,2 millions en 2010. La question du financement des OPEX doit donc être mieux prise en compte dans la construction budgétaire et le ministre du budget, Éric Woerth, a déclaré que les dépassements à ce titre feraient l’objet d’un prélèvement sur la réserve interministérielle. J’ai demandé à mes services de rechercher avec ceux de M. Woerth une solution qui pourrait être rapidement mise en œuvre.
Monsieur Folliot, je vous rassure : la gendarmerie se maintient tant dans le cadre du Collège des hautes études militaires que dans celui de l’École de guerre. En outre, il est officiel depuis samedi que l’Institut national des hautes études de sécurité, l’INHES, se réorganise sous l’autorité du Premier ministre et devient l’Institut des hautes études de sécurité et de justice, qui sera implanté à l’École militaire.
M. le président Didier Migaud. Monsieur le ministre, nous vous remercions, ainsi que les hauts fonctionnaires et les collaborateurs qui vous accompagnaient.
La réunion de la commission élargie s’achève à vingt-trois heures quarante-cinq.
Le Directeur du service
des comptes rendus des commissions,
Michel Kerautret