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Assemblée nationale

Commission élargie

commission Élargie

Commission des finances,
de l’économie générale
et du contrôle budgétaire

Commission des affaires sociales

(Application de l’article 120 du Règlement)

Jeudi 3 novembre 2011

Présidence de M. Dominique Baert,
secrétaire de la Commission des finances,
et de M. Pierre Méhaignerie,
président de la Commission des affaires sociales

La réunion de la commission élargie commence à vingt et une heures cinq.

projet de loi de finances pour 2012

Santé

M. Dominique Baert, président. Madame la secrétaire d'État chargée de la santé, le président de la Commission des affaires sociales, Pierre Méhaignerie, et moi-même sommes heureux de vous accueillir.

Le président de la Commission des finances, Jérôme Cahuzac, retenu, m'a prié de l'excuser auprès de vous.

Nous sommes réunis en commission élargie afin de vous entendre sur les crédits consacrés à la mission « Santé » dans le projet de loi de finances pour 2012.

Cette année, les débats seront chronométrés afin de respecter la durée maximale de trois heures préalablement fixée par la Conférence des présidents. Cette dernière a également décidé que le temps de parole serait limité à cinq minutes pour les questions des rapporteurs et à deux minutes pour les questions des autres députés. Les auteurs de questions disposeront, le cas échéant, d'un droit de suite en cas de réponse incomplète

M. Gérard Bapt, rapporteur spécial. La modestie du temps de parole qui m’est imparti m’évitera de m’attarder sur les chiffres. En effet, si le budget de la mission « Santé » augmente en apparence, il est en fait en stagnation, et même en baisse, à périmètre constant. L’augmentation est due au nouveau mode de financement de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM), que la future loi relative au renforcement de la sécurité sanitaire du médicament et des produits de santé substituera à l’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (AFSSAPS).

J’en viens à mes questions, qui seront forcément elliptiques.

Alors que l’on finit d’incinérer les quelque 19 millions de doses de vaccin inutilisées, je souhaite évoquer en premier lieu les suites de la campagne de vaccination contre la pandémie de grippe À H1N1. La commission d’enquête de l’Assemblée nationale, dont le président était M. Jean-Christophe Lagarde et le rapporteur M. Jean-Pierre Door, avait recommandé une réforme du comité de lutte contre la grippe. Le fonctionnement de ce comité, inclus dans la direction générale de la santé, est particulièrement obscur : il ne rapporte qu’au ministre et il a été mis en place dans des conditions certes régaliennes, mais sans que l’on se préoccupe de la gestion des liens d’intérêt.

La réforme de l’aide médicale d’État (AME) est pour nous un sujet de grande préoccupation. Les crédits pour 2012 sont maintenus au même niveau qu’en 2011. Cela signifie sans doute que l’on escompte tirer un grand bénéfice de la réforme de la tarification hospitalière. Il n’empêche : on constate une diminution du nombre des ayants droit, probablement en raison du droit d’entrée de 30 euros désormais exigé. Disposez-vous, madame la secrétaire d'État, d’une évaluation de l’impact que ce « péage » peut avoir sur les bénéficiaires de cette aide ?

L’aide à l’accès à une mutuelle, ou aide pour l’acquisition d’une assurance complémentaire santé (ACS), a fait l’objet de longs débats lors de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2012. Il me semble qu’un aspect de la question peut trouver une solution simple : ne pourrait-on envisager que tous les étudiants boursiers, sans condition de domicile, bénéficient automatiquement du dispositif ? Actuellement, il leur faut effectuer un parcours administratif très compliqué pour obtenir cette aide.

Ce budget comprend également une petite partie de la dotation de l’Agence pour le développement des systèmes d’information partagés (ASIP), qui a pour tâche principale la mise en place du dossier médical partagé (DMP). On parle de ce dispositif depuis 2004 et la dépense s’élève, à l’heure actuelle, à plus de 100 millions d’euros. Or nous remarquons qu’il vient d’être abandonné en Grande-Bretagne et aux Pays-Bas tandis que l’Allemagne s’interroge. D’autre part, l’expérimentation, souhaitée par le Parlement, d’un dossier médical mobile sur clé USB est en cours. Ne serait-il pas bon que vous demandiez à la Cour des comptes – à moins que la Commission des finances ne s’en charge – d’examiner la question à la lumière de ce qui s’est passé en Grande-Bretagne, où l’on a dépensé plus d’un milliard de livres pour aboutir à un fiasco ?

Alors que l’on s’apprête à lancer auprès des femmes enceintes la campagne d’information sur le bisphénol A, qu’en est-il, plus généralement, des moyens accordés pour la constitution d’un réseau de bio-surveillance qui permettrait d’élargir l’action à l’ensemble des perturbateurs endocriniens ?

Notre collègue de la Commission des affaires sociales Yves Bur a évoqué dans un rapport la perspective d’un démantèlement de l’Institut national du cancer (INCa). Quelle est la décision du Gouvernement quant à cette mesure qui s’inscrit, semble-t-il, dans le cadre de la RGPP ?

Enfin, l’article 60 du projet de loi de finances tend à créer un fonds de garantie pour couvrir les dommages liés à des actes médicaux au-delà du seuil, très élevé, de 8 millions d’euros. Le Conseil constitutionnel avait censuré cette disposition de la proposition de loi Fourcade. Vous la reprenez avec des modifications. Pouvez-vous, madame la secrétaire d'État, préciser ce qui vous a amenée au choix de ce seuil, eu égard au nombre de contentieux engagés chaque année et au montant des indemnisations prononcées ? Compte tenu des incertitudes sur l’ampleur des interventions auxquelles aura à faire face le fonds, ne conviendrait-il pas de revoir régulièrement le montant de la contribution demandée aux professionnels de santé, en fonction des réserves qu’il pourrait constituer ? Je présenterai des amendements visant à améliorer le dispositif. En particulier, la date d’entrée en vigueur prévue, le 1er janvier 2012, semble difficile à tenir pour les assureurs, qui devront modifier les contrats dans un délai très bref.

Mme Anny Poursinoff, rapporteure pour avis de la Commission des affaires sociales pour la prévention et la sécurité sanitaire. J’ai examiné les crédits du programme « Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins » en étudiant précisément les dossiers et en menant plusieurs auditions. À première vue, ces crédits progressent par rapport à 2011. Mais, à y regarder de plus près, l'Agence du médicament et l’Établissement de prévention et de réponse à l'urgence sanitaire (EPRUS) sont seuls à bénéficier de cette augmentation.

Après l'affaire du Mediator, il est prévu une nouvelle Agence du médicament dont le financement, profondément réformé, sera indépendant des laboratoires. Cette Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) recevra en effet une contribution de l'État de 134 millions d'euros. Nous nous félicitons de cette grande avancée de nature à réduire certains liens directs avec les laboratoires. Cependant, madame la secrétaire d'État, afin d'éviter toute nouvelle affaire du Mediator, ne croyez-vous pas nécessaire que le comité économique des produits de santé (CEPS) motive publiquement ses décisions dès lors qu'il ne suit pas l'avis de la Haute autorité de santé (HAS) ?

Pour en revenir aux crédits, en dehors de l'EPRUS et de l'ANSM, les dotations des autres opérateurs de l'État sont en net recul. Or ces opérateurs, telles les agences sanitaires, jouent un rôle de premier plan dans la mise en œuvre de la politique de santé publique et 90 % des crédits du programme « Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins » leur sont consacrés. Les effets de la politique de restriction budgétaire en sont d'autant plus regrettables : les crédits de l'Institut de veille sanitaire baissent de 3 %, ceux de l'Institut national du cancer de 5 %, et j’apprends que vous venez de déposer un amendement tendant à une économie prévisionnelle d’un million d’euros sur les crédits de l’Institut national de prévention et d’éducation pour la santé (INPES). Ces évolutions sont préoccupantes car elles auront des conséquences certaines sur les missions de santé publique assurées par ces opérateurs.

Ainsi, le directeur général de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSES) m'a indiqué que celle-ci serait, comme les autres agences, soumise à une diminution des crédits de l'ordre de 10 % sur trois ans. Elle va certes porter en priorité ses efforts d’économie sur les fonctions dites de support mais je vois mal comment, sur le long terme, ces diminutions n'affecteraient pas ses missions.

Que penseriez-vous de réserver chaque année des crédits pour des projets d'expertise ou de recherche proposés par les parties prenantes, notamment par les structures associatives qui se retrouvent parfois dans des impasses faute de financement ?

Les représentants de l'ANSES ont également insisté sur les difficultés qu’ils rencontrent pour recruter des experts à la fois volontaires et indépendants. Pour susciter des candidatures plus nombreuses, il est indispensable de mieux valoriser la fonction d'expertise dans la carrière des chercheurs. Pour recruter des experts indépendants, il est tout aussi impératif de renforcer les crédits de la recherche publique.

Qu'entendez-vous faire pour répondre à ces demandes ?

Les crédits de l'action 14 « Prévention des maladies chroniques et qualité de vie des malades » sont en diminution de 4 %. Je trouve tout à fait regrettable, et même grave, que les maladies chroniques fassent elles aussi les frais de la rigueur budgétaire. Leur prévention est une grande source d'économies sur le long terme et elle ne peut pas être confondue avec la politique de dépistage.

À ce propos, comment allez-vous répondre à la nécessité de dissocier, y compris du point de vue budgétaire, les actions menées dans les trois domaines très distincts de la précaution, de la prévention et du dépistage, qui sont trop souvent mélangés aussi bien dans les lignes de crédits que dans l’esprit de beaucoup d’entre nous ?

Je souhaite enfin, madame la secrétaire d'État, que vous répondiez favorablement à notre demande d'augmentation des crédits du plan cancer, de manière à conduire une véritable politique de santé environnementale et à mener des actions concrètes d'éducation pour la santé et de prévention.

M. Vincent Descoeur, rapporteur pour avis de la Commission des affaires sociales pour la santé et le système de soins. L'évolution des moyens dédiés à la modernisation de l'offre de soins peut être jugée globalement satisfaisante, puisque ces crédits augmenteront de 7 %. On observe ainsi un net renforcement des moyens consacrés à la formation initiale pour financer les stages des étudiants en médecine, notamment en médecine générale. Je me réjouis de cette évolution qui incitera les jeunes à se tourner en plus grand nombre vers une spécialité essentielle mais qui les attire insuffisamment aujourd'hui.

Après une forte progression en 2011, les crédits du programme « Protection maladie » sont stabilisés dans ce projet de budget. Les mesures adoptées l'an dernier semblent avoir permis de maîtriser le risque de dérive financière de l'aide médicale d'État, sans pour autant restreindre l'accès à cette prestation. Quant à l'accès à la protection maladie complémentaire, il sera facilité grâce au relèvement du plafond de ressources décidé dans le cadre du PLFSS pour 2012.

Enfin, le Gouvernement propose de régler la question de la responsabilité civile professionnelle des professionnels de santé, ce dont je me réjouis également.

J'en viens maintenant à quelques questions.

Comme beaucoup de mes collègues, je suis particulièrement sensible à la question de la démographie médicale. Pour inciter les jeunes médecins à s'installer dans les zones dites « sous-denses », on a créé les contrats d'engagement de service public. Pourriez-vous, madame la secrétaire d'État, faire le point sur leur mise en œuvre ?

S'agissant de la formation continue, nous avons, dans le cadre de la loi HPST, institué le « développement professionnel continu ». Le Gouvernement a décidé de mener une large concertation avec l’ensemble des intéressés avant d’arrêter les modalités d'application de ce dispositif. Où en est-on aujourd'hui ?

Concernant le Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante, le délai de traitement des dossiers a longtemps pénalisé les victimes. La situation semble s'améliorer. Cette tendance se confirme-t-elle et peut-on espérer que le fonds respectera bientôt les délais réglementaires pour présenter ses offres d'indemnisation ?

J'en viens au sujet que j'ai plus particulièrement étudié dans mon rapport : la Haute Autorité de santé (HAS). Ses missions seront sensiblement étendues avec l’adoption du projet de loi relatif au renforcement de la sécurité sanitaire du médicament et de la loi de financement pour 2012. Le Gouvernement a accepté que le montant des taxes d'inscription qui lui sont affectées soit revalorisé. C'est une bonne chose. Néanmoins, pouvez-vous nous assurer qu’elle disposera des moyens d’assumer toutes ses missions ?

Sous l'impulsion du professeur Jean-Luc Harousseau, la HAS a entamé une sérieuse réforme de son fonctionnement interne, notamment pour en accroître la transparence. Cette action a été saluée, mais la composition de deux commissions spécialisées a parfois fait l’objet de critiques : la commission de la transparence et la commission nationale d’évaluation des dispositifs médicaux et des technologies de santé (CNEDIMTS) sont jugées insuffisamment ouvertes aux praticiens non hospitaliers et aux usagers du système de santé. Leur composition est à l’heure actuelle fixée par voie réglementaire. Le Gouvernement pourrait-il envisager que la HAS fixe elle-même la composition de ces commissions, ou, à défaut, pourrait-il la modifier ?

M. le président Pierre Méhaignerie. La période actuelle, et singulièrement la journée d’aujourd'hui, nous montrent que le meilleur service que l’on puisse rendre au pays est de gérer mieux. Plutôt que de réclamer davantage de moyens, on doit s’attacher à ce qui concourt à responsabiliser. Or, dans un article récent, le professeur Deloche, qui a réalisé 24 000 opérations du cœur, rapportait sa surprise à constater que le patient ne connaissait jamais le coût de son hospitalisation. De même les pharmaciens observent que les patients n’ont aucune idée du coût des médicaments. L’heure n’est-elle pas à un effort de pédagogie afin que les citoyens sachent ce que coûte leur santé ?

Quels que soient les forfaits, les maisons de garde et les maisons de santé pluridisciplinaires éprouvent des difficultés grandissantes à recruter des médecins libéraux, qui préfèrent de plus en plus se tourner vers le salariat. Le ministère de la santé réfléchit-il aux solutions alternatives qui permettraient, pour un coût maîtrisé, de répondre à ce besoin de nombreux territoires qui se désespèrent, étant entendu que ce ne sont pas des mesures coercitives qui changeront la donne ?

J’y insiste : la situation actuelle des pays européens doit nous inciter à nous engager dans la voie du « gérer mieux » plutôt que dans celle du « dépenser plus ».

Mme Nora Berra, secrétaire d’État chargée de la santé. Monsieur le rapporteur spécial, le ministère de la santé a pris acte des recommandations de la commission d’enquête de l’Assemblée sur la campagne de vaccination contre la grippe A, en particulier de la proposition d’intégrer le comité de lutte contre la grippe dans une commission spécialisée du Haut Conseil de la santé publique (HCSP). Le principe étant acquis, il reste à réfléchir aux modalités de cette intégration.

Nos services tiennent tous les trois mois des comités de pilotage spécifiques sur l’AME et rencontrent régulièrement les associations qui œuvrent auprès des publics concernés. Ces acteurs de terrain ne les ont pas alertés à propos de difficultés dans l’admission à cette aide qui résulteraient de l’adoption du droit de timbre de 30 euros. On observe certes une diminution de 1,8 % des effectifs au cours du premier trimestre – les chiffres du premier semestre ne sont pas encore disponibles –, mais on ne peut considérer cette variation comme indicative d’une tendance et, en tout cas, on ne peut l’imputer au droit de timbre, celui-ci n’étant entré en vigueur que le 1er mars 2011.

Si les effets de cette mesure sont encore difficiles à apprécier, la Caisse nationale de l’assurance maladie des travailleurs salariés a pris des dispositions pour un suivi du nombre de titres délivrés en contrepartie du timbre et de l’impact éventuel de la disposition. Nous pourrons ainsi établir le nombre de dossiers remplissant les conditions de ressources et de résidence mais refusés en raison du non-paiement du timbre.

En tout état de cause, on n’a pas constaté de « trou d’air » dans la dépense au premier semestre 2011 par rapport à l’année précédente, et rien ne laisse donc supposer un renoncement aux soins.

Concernant l’aide à l’acquisition d’une complémentaire santé, l’ACS, le Gouvernement est très attentif aux publics dont les ressources sont légèrement supérieures au plafond de la couverture maladie universelle complémentaire (CMUc). Depuis le début du quinquennat, le Gouvernement a renforcé cette aide : il l’a doublée pour les 16-25 ans, la portant à 200 euros par an. Les conditions de ressources ont également été élargies : le plafond actuel est situé autour de 26 % au-dessus du plafond de ressources de la CMUc. L’Assemblée nationale a adopté un amendement du Gouvernement portant ce plafond à 35 % au-dessus du même plafond de la CMUc. Ainsi, les étudiants de moins de vingt-cinq ans dont les ressources sont inférieures à 875 euros par mois seront éligibles à l’ACS.

Pour ce qui est du dossier médical personnalisé, monsieur Bapt, vous établissez un parallèle avec des systèmes qui, selon vous, ont conduit à des fiascos. Il faut comparer ce qui est comparable ! Le DMP développé puis abandonné en Grande-Bretagne était très différent du nôtre, puisqu’il concernait exclusivement les systèmes hospitaliers. En revanche, l’Australie, la Finlande, Singapour et le Canada, sont en train de développer une solution comparable à celle de la France. Des contacts ont d’ailleurs été pris entre l’ASIP-Santé et ces pays en vue de partager nos expériences.

Entre 2005 et 2012, la somme des dépenses engagées pour le DMP s’élève à 135 millions d’euros. Je vous en communiquerai le détail par écrit.

À l’occasion de l’examen de votre proposition de loi concernant les risques liés aux perturbateurs endocriniens, le Gouvernement s’est engagé à interdire les contenants alimentaires fabriqués avec du bisphénol A et à diffuser très largement une plaquette visant à promouvoir des gestes de précaution simples. Celle-ci vous a été soumise, ainsi qu’à Mme Delaunay, et elle sera diffusée très prochainement.

Le plan national santé-environnement 2009-2013 comprend un programme national de bio-surveillance humaine, dont l’objectif est de mesurer dans les liquides et les tissus biologiques les biomarqueurs pouvant témoigner d’une imprégnation par des substances toxiques pour la santé humaine et de détecter leurs effets précoces sur le corps humain et leur impact sur la santé. Ce programme prévoit une étude longitudinale depuis l’enfance et une étude transversale portant sur un échantillon représentatif d’adultes et d’enfants.

Le projet de loi sur la sécurité sanitaire du médicament ne nous a pas semblé constituer le cadre adéquat pour une réforme de toutes nos agences sanitaires. Même si des rapprochements avaient été envisagés dans le cadre de la révision générale des politiques publiques, nous avons préféré concentrer nos efforts sur la refonte des procédures. En tout état de cause, il n’est pas question de faire disparaître cette instance essentielle qu’est l’INCa, maître d’œuvre du plan cancer.

S’agissant de la responsabilité civile des professionnels de santé, le seuil de couverture de huit millions d’euros a été déterminé en fonction des couvertures proposées actuellement par les assureurs, la réglementation communautaire ne permettant pas à un fonds de mutualisation public d’empiéter sur le marché existant.

Je ne pense pas qu’un déclenchement de la garantie au 1er janvier 2012 soit trop précoce. Le Gouvernement a déposé un amendement qui prévoit une montée en charge du dispositif en fonction des renouvellements de contrats. Dès le 1er janvier 2012, les assureurs seront capables de proposer des niveaux de couverture à hauteur de huit millions d’euros, les contrats de réassurance étant finalisés. La Fédération française des sociétés d’assurance a indiqué que la cotisation au fonds ne pourrait pas être appelée avant avril 2012.

Les crédits de la mission « Santé », madame Poursinoff, s’élèveront à 1 380 millions d’euros en 2012, contre 1 220 millions en 2011. Le projet de loi de finances pour 2012 a été élaboré dans le cadre défini par la loi de programmation des finances publiques pour la période 2011-2014. Cependant, les crédits augmentent de plus de 150 millions d’euros par rapport au montant initialement prévu, cette augmentation traduisant l’engagement du Gouvernement de procéder à la rebudgétisation intégrale des moyens dévolus à l’AFSSAPS.

Pour le reste, ce budget est conforme à la loi de programmation et participe à l’effort de maîtrise de nos finances publiques. À ce titre, les agences sanitaires devront, comme tous les opérateurs de l’État, faire des efforts de rationalisation et réaliser des gains de productivité, sachant que ces agences disposent de fonds de roulement et de réserves. L’amendement par lequel le Gouvernement retranche un million d’euros au budget de l’INPES est la contribution de la mission à l’objectif d’économie d’un milliard d’euros sur les dépenses de l’État. Là encore, nous avons tenu compte de l’importance du fonds de roulement de cet opérateur.

Il est vrai que les crédits de l’ANSES diminuent globalement, mais ils sont stabilisés sur la mission « Santé » à hauteur de 13,7 millions d’euros.

Je suis évidemment favorable à ce que, comme vous le demandez, le Comité économique des produits de santé, le CEPS, motive ses décisions quand celles-ci sont contraires à l’avis de la HAS. Je rappelle que le CEPS publie chaque année un rapport d’activité, consultable sur le site Internet du ministère. Par ailleurs, le comité s’est engagé dans une collaboration accrue avec la HAS.

Le renforcement des ressources de la future Agence nationale de sécurité des médicaments permettra de développer ses capacités d’expertise indépendante. Valoriser le temps consacré à l’expertise publique est un des objectifs du projet de loi renforçant la sécurité sanitaire du médicament.

Monsieur Descoeur, 400 contrats d’engagement de service public (CESP) ont été proposés aux étudiants et internes à la rentrée 2010, et plus de 150 contrats ont été signés au terme de cette année universitaire. Je peux vous dire d’ores et déjà que, parmi ces 150 signataires, deux diplômés s’installeront dès la fin de cette année.

Pour assurer la montée en charge du dispositif, 400 nouveaux contrats ont été proposés à la rentrée 2011. Au début du mois de mars, les 6 000 réponses que nous avons reçues à une enquête menée auprès d’internes, d’étudiants, de doyens et des ARS nous ont permis de dégager des pistes d’amélioration, notamment la nécessité d’une meilleure information sur le dispositif et d’une plus grande souplesse dans sa gestion par les universités. Les étudiants et les internes attendent en outre un choix plus simple dans la spécialité concernée.

Je rappelle que le développement professionnel continu, le DPC, concerne les deux types d’exercice professionnel, l’exercice libéral et l’exercice hospitalier. Il reviendra au professionnel libéral d’établir lui-même, en fonction de ses besoins propres, son parcours de développement professionnel. Il aura à sa disposition une offre variée, du point de vue des thèmes comme des méthodes pédagogiques. S’agissant des professionnels hospitaliers, le DPC permettra enfin la reconnaissance du travail continu d’évaluation des pratiques, au cœur des améliorations des compétences de santé. Le DPC permet en outre un décloisonnement entre les compétences des médecins et celles des autres professionnels de santé, ce qui favorisera la coopération et l’exercice transversal entre ces professions.

La publication des décrets permettant la mise en place du dispositif est imminente, puisqu’ils ont été soumis à la section sociale du Conseil d’État le 18 octobre, à l’issue de nouvelles concertations menées pendant plusieurs semaines.

L’indemnisation des victimes de l’amiante est une préoccupation constante du Gouvernement. Il est vrai que le FIVA a rencontré des difficultés pour traiter les dossiers dans les délais. Le rapport de la mission d’audit confiée en 2008 à l’inspection générale des affaires sociales et à l’inspection générale des finances avait notamment fait état du nombre excessif de dossiers en instance et préconisé la création d’une cellule d’urgence. Nous avions en conséquence inscrit dans le budget 2009 les moyens en personnels nécessaires. Cette mesure a été intégralement reconduite dans les budgets 2010 et 2011.

Les délais de traitement des dossiers ont été effectivement réduits, conformément aux termes du contrat de performance cosigné en 2010 par Xavier Darcos et Éric Woerth. Mais la situation reste fragile, et a tendance à se dégrader à nouveau depuis la fin du mois de juin. Les raisons en sont clairement identifiées et les problèmes sont en cours de résolution, notamment grâce à la dématérialisation du traitement des dossiers.

La révision du barème des taxes d’inscription affectées à la HAS témoigne de notre souci de lui garantir les moyens nécessaires à l’accomplissement de ses missions. Ainsi l’article 33 du PLFSS pour 2012 accompagne le renforcement de sa mission d’évaluation médico-économique des produits de santé de la création d’une taxe due par les industriels sur chaque dépôt de dossier donnant lieu à une telle évaluation.

Comme vous, le ministère de la santé souhaite hiérarchiser les saisines de la HAS, mais tout n’est pas planifiable dans ce domaine.

Les expertises effectuées par les commissions de la HAS ont un impact considérable sur la sécurité sanitaire et sur les dépenses d’assurance maladie, en ce qu’elles fondent directement les décisions ministérielles en matière de remboursement des produits de santé. Ces enjeux justifient pleinement que leur composition et leur mode de fonctionnement soient fixés par voie réglementaire. Cela n’enlève rien à l’indépendance des avis rendus par ces instances, dans la mesure où leurs membres sont désignés par la HAS. Mais vous comprenez bien que le politique ne peut pas se désintéresser complètement des modalités de ces évaluations, en particulier de la composition des commissions d’experts.

La question de la représentation des praticiens non hospitaliers et des usagers du système de santé au sein des commissions peut être réglée par voie réglementaire. J’y suis prête.

Je pense comme vous, monsieur le président Méhaignerie, que nous devons faire preuve de pédagogie envers nos concitoyens : ils ne prendront pas conscience de la nécessité de maîtriser les dépenses de santé tant qu’ils ne connaîtront pas le coût des soins. C’est déjà l’objectif de diverses campagnes de sensibilisation conduites par le ministère. Celles-ci visent à sensibiliser l’opinion, non seulement à la question des dépenses, mais aussi à des questions de santé publique telles que la pertinence de la prescription d’antibiotiques.

S’agissant du recrutement des médecins, les dispositifs que nous instaurons contribuent à un meilleur maillage du territoire. Ainsi, celui des maisons de santé pluridisciplinaires, lancé cette année avec l’objectif de 250 ouvertures avant la fin de l’année 2012, a connu une montée en charge significative, puisque l’ouverture de 230 maisons sera autorisée dès cette année sur l’ensemble du territoire. Ce dispositif me semble être favorablement accueilli, tant par les professionnels, notamment depuis l’adoption de la nouvelle forme juridique et fiscale de la société interprofessionnelle de soins ambulatoires, que par les collectivités locales, qui ont le souci constant que la permanence des soins soit assurée sur leur territoire.

Mme Anny Poursinoff, rapporteure pour avis. Vous ne m’avez pas dit ce que vous pensiez de ma proposition de réserver chaque année des crédits pour les associations qui proposent des recherches. Vous n’avez pas non plus répondu à ma demande d’augmentation des crédits du plan cancer pour mettre en œuvre une véritable politique de santé environnementale.

Je vous avais aussi demandé comment il serait possible de dissocier dans le budget les actions de précaution, de prévention et de dépistage.

Mme Nora Berra, secrétaire d’État chargée de la santé. Comme vous le savez, en matière de projets de recherche, la procédure utilisée est celle de l’appel d’offres. Ces appels d’offres sont ouverts aux associations, et les projets finalement retenus le sont en fonction de leur pertinence au regard des priorités arrêtées.

Je ne peux pas vous laisser dire que les crédits du plan cancer ne suffisent pas à mettre en œuvre cette politique de santé publique, alors que 2,2 milliards sont alloués à ce plan, qui bénéficie, pour cette année, de 800 millions de mesures nouvelles.

Je suis tout à fait d’accord avec vous quant à la nécessité de mieux distinguer précaution, prévention et dépistage. Les différents axes de travail autour desquels les plans de santé publique sont construits permettent déjà de distinguer des démarches différentes, qu’il s’agisse de prévention ou de dépistage, et les projets proposés par les associations dans le cadre d’appels à projets s’inscrivent dans ces différents cadres.

M. le président Pierre Méhaignerie. Comment permettre au patient de connaître le coût de sa consommation de santé ?

Mme Nora Berra, secrétaire d’État chargée de la santé. L’assurance maladie envoie au patient un relevé détaillant sa consommation individuelle, qui lui permet de mesurer excatement ses dépenses en matière de soins.

M. Jean-Luc Préel. Ce n’est pas le cas pour les actes hospitaliers.

M. Denis Jacquat. Où en est la mise en œuvre de l’éducation thérapeutique du patient, l’ETP, prévue par la loi HPST ?

D’autre part, le Gouvernement vient d’annoncer une formation initiale des orthophonistes à deux niveaux, alors que la profession demandait que le master 2 soit reconnu comme le niveau de formation de tous les orthophonistes. J’ai du mal à comprendre cette décision, qui implique une formation à deux vitesses et la distinction de deux métiers différents. J’aimerais savoir ce qui l’a motivée et si elle est définitive.

Mme Michèle Delaunay. L’analyse des crédits alloués à la politique de santé est une fois encore rendue très difficile par le transfert de certains d’entre eux vers l’action 18, « Projets régionaux de santé ». Étant donné le peu de temps qui nous est imparti, je limiterai mon intervention aux actions 12 à 15, soit les actions spécifiquement orientées vers la prévention.

Si on constate une stabilité des crédits des actions de prévention proprement dites, les crédits alloués au projets régionaux de santé ont baissé de 3,64 %. Potentiellement, les crédits de prévention des ARS ont donc baissé. Pouvez-vous m’éclairer sur ce point ?

Le dépistage du cancer du sein figure dans l’action 14 « Prévention des maladies chroniques et qualité de vie des malades », alors que le dépistage ne relève pas de la prévention. Cette confusion est propre à égarer nos concitoyens.

Les crédits de l’action 14 enregistrent une baisse de près de 4 %. Le PLF prévoit 56 millions d’euros pour l’INCa, soit une baisse de 5 %, et précise que, sur ces crédits, 16 millions sont alloués à la poursuite du financement du plan cancer. Aucun détail ne nous est donné sur les actions relatives au dépistage du cancer du sein. Pouvez-vous nous en donner une évaluation ?

Les données de l’Institut de veille sanitaire montrent que, pour la première fois, le taux de participation au programme de dépistage organisé du cancer du sein baisse, puisqu’il est passé de 53 % en 2009 à 52 % en 2010. Dans vingt-cinq départements, il ne dépasse pas les 50 % : nous sommes très loin du taux de référence de 70 % préconisé au niveau européen. Sachant que ce taux a une incidence significative sur la courbe de survie des patients, j’aimerais savoir quel montant est alloué à ce dépistage. Que comptez-vous faire pour améliorer ce taux, qu’on peut considérer comme médiocre, en dépit des efforts des associations ?

Le dépistage du sida devrait également constituer pour nous une priorité, d’autant qu’on sait qu’aujourd’hui, une personne traitée n’est plus contaminante. Ainsi, une politique de dépistage systématisé nous permettrait, sans attendre un éventuel vaccin, d’éradiquer l’épidémie. Or, malgré une baisse relativement limitée des crédits destinés aux associations – elle est de 1,5 % –, celles que nous avons pu rencontrer sur le terrain ou auditionner font état d’une baisse significative de leurs crédits. Ainsi AIDES Aquitaine a vu ses crédits en provenance des ARS diminuer de 35 %, ce que ne pourra compenser l’allocation de 159 000 euros attribuée dans le cadre d’un appel d’offres lancé par la direction générale de la santé pour développer le dépistage.

Pouvez-vous nous dire, madame la secrétaire d’État, quels efforts sont consentis dans ce budget pour systématiser le dépistage du sida, conformément aux objectifs fixés par Mme Bachelot ?

M. Jean-Luc Préel. Les quelque 1 380 millions d’euros de cette mission « Santé » paraissent bien modestes au regard des 220 milliards de dépenses de santé et des 167 milliards de l’ONDAM, de sorte que, venant après celle du projet de loi de financement de la sécurité sociale, la discussion de ce budget a un effet surréaliste. Elle permet cependant d’examiner les priorités du Gouvernement en matière de santé et d’insister sur la prévention – qui fait l’objet d’un cycle de travaux au sein de la MECSS – et sur la sécurité sanitaire.

La volonté du Gouvernement est d’assurer l’accès de tous à des soins de qualité, et nous adhérons à cet objectif. Encore faudrait-il que ce soit possible sur l’ensemble du territoire, et ce au tarif conventionné. Or c’est loin d’être le cas.

Le ministre Xavier Bertrand a déclaré qu’il n’y aurait pas de dépassements d’honoraires si les actes étaient réévalués régulièrement. Avez-vous comme objectif de mettre en œuvre la CCAM – classification commune des actes médicaux – clinique, et de réévaluer régulièrement la CCAM technique ? Des consignes seront-elles données à la CNAM en ce sens ?

Même si le secteur optionnel n’est pas la panacée, le dispositif proposé dans la loi de financement de la sécurité sociale n’est qu’un ersatz de secteur optionnel, limité au secteur 2 et aux spécialités à plateau technique, pourtant les plus favorisées. Que devient le secteur 1 ? Et les spécialités cliniques ? Les médecins exerçant dans ce secteur devront effectuer au moins 30 % de leurs actes au tarif conventionné. Quels actes sont concernés ? Pour le reste, le montant des dépassements sera limité à 50 % du tarif remboursable et sera pris en charge par les complémentaires. Qu’en est-il des dépassements de 300 % ou 400 % pratiqués par certains établissements ?

Avec la question de la répartition des professionnels sur le territoire, le problème des dépassements d’honoraires est le principal obstacle à l’accès aux soins. Comment le surmonter ?

D’autre part, alors que la loi Fourcade devait contribuer à résoudre un certain nombre de problèmes concernant essentiellement la médecine de ville, le Conseil constitutionnel a censuré de nombreux articles importants.

Un d’eux concernait la biologie médicale, et plus particulièrement la propriété du laboratoire, le capital et l’accréditation. Résultat de nombreuses discussions, la disposition faisait l’objet d’un quasi-consensus. La décision du Conseil constitutionnel a donc plongé les biologistes dans l’incertitude.

Un autre article annulé, moins consensuel, avait trait aux réseaux de soins. Il est permis d’en organiser aux assurances et aux institutions de prévoyance, mais non aux mutuelles. De tels réseaux sont pourtant intéressants dès lors qu’ils sont ouverts et visent la qualité des soins.

De même que l’article relatif à la responsabilité civile des professions de santé mutualisées a été repris dans les mêmes termes au sein du projet de loi de finances, les dispositions relatives à la biologie médicale et aux réseaux de soins ne pourraient-elles être intégrées à un texte susceptible d’être adopté définitivement avant la fin du mois de février ? L’adoption d’un projet de loi portant diverses dispositions d’ordre social est-elle envisageable ?

Le Comité d’évaluation de la réforme de la gouvernance des établissements publics de santé, présidé par Jean-Pierre Fourcade, avait été chargé d’évaluer ce volet de la loi HPST. Dans son deuxième rapport, il a notamment proposé la mise en œuvre d’objectifs régionaux de dépenses d’assurance maladie – ORDAM. En autorisant la fongibilité des enveloppes, une telle initiative donnerait tout son sens à la création des ARS, qui revenait à désigner un responsable unique de la santé au niveau régional, et permettrait en outre de supprimer les frontières absurdes entre la prévention et le soin, la ville et l’hôpital, le sanitaire et le médico-social.

Jean-Pierre Fourcade a également préconisé de redonner un peu de pouvoir et de compétences aux conseils de surveillance et aux commissions médicales d’établissement – CME – publiques et privées, en les autorisant notamment à se prononcer sur le projet médical et sur le budget.

Que comptez-vous faire de ces propositions, susceptibles de remotiver et de responsabiliser les professionnels de santé ?

Ma dernière question concerne un sujet auquel s’intéresse également François Rochebloine : l’agénésie dentaire, une maladie génétique qui prive les enfants de dents définitives. Elle est heureusement rare, mais ses conséquences psychologiques et financières sont sérieuses. Le traitement est en effet long, complexe et particulièrement coûteux : il implique un suivi d’orthodontie au cours de l’enfance et de l’adolescence, puis, lorsque la croissance est terminée, la pose d’implants dentaires très onéreux, surtout lorsqu’il en faut 16 ou 18 ! Le coût peut ainsi facilement atteindre 10 000 euros et certains parents en sont réduits à faire appel à la générosité publique. C’est pourquoi nous sommes intervenus à de multiples reprises pour obtenir la prise en charge de ces soins par la Caisse nationale d’assurance maladie.

L’Union nationale des caisses d’assurance maladie a décidé le 3 avril 2007 d’inscrire l’agénésie dentaire des enfants sur la liste des actes remboursables : je croyais donc le problème résolu. Mais la CNAM a appliqué un protocole de soins restrictif et complexe. Conformément à un avis de 2004 de l’Agence nationale d’accréditation et d’évaluation en santé – ANAES –, elle ne prend en charge, entre six ans et la fin de la croissance, que deux ou au maximum quatre implants, et uniquement dans la région mandibulaire. Or il est souhaitable d’attendre la fin de la croissance pour poser ces implants.

Sollicitée par la CNAM, la Haute autorité de santé s’est prononcée, le 28 septembre 2010, en faveur du remboursement des traitements des agénésies dentaires de l’adulte. Le directeur de la Caisse m’indiquait en mars 2011 que les actes avaient été présentés début février à la Commission de hiérarchisation des actes et des prestations – CHAP –, et qu’après validation par les ministres de tutelle, la prise en charge pourrait être effective dès le premier semestre 2011. Or nous sommes déjà à la fin du deuxième semestre. Que comptez-vous faire ?

M. Dominique Baert, président. L’application de la tarification à l’activité suscite un grand découragement dans les hôpitaux. Les tarifs unitaires des activités étant régulièrement réajustés à la baisse, certains établissements ne parviennent pas à équilibrer leur budget. Quelle est la politique du Gouvernement en matière de tarification hospitalière ?

L’affectation des moyens nécessaires à la dispensation de soins palliatifs pose un grave problème. La lecture de la grille de tarification de ces soins montre par exemple que le taux horaire applicable à l’accompagnement d’un malade en fin de vie est sans commune mesure avec les moyens qui seraient nécessaires pour offrir une prestation digne. Une tarification spécifique des soins palliatifs est-elle envisageable pour renforcer les moyens dont disposent les unités concernées ?

Enfin, nous sommes en attente du déblocage de la seconde tranche de financement du plan Hôpital 2012. Je n’ignore pas les problèmes budgétaires auxquels notre pays est confronté mais, en raison de ce retard, de nombreux projets d’investissement restent en suspens depuis plusieurs mois, voire plusieurs années. Quand la décision de débloquer les fonds sera-t-elle prise ?

Mme Nora Berra, secrétaire d’État chargée de la santé. Pour éviter toute confusion, madame Delaunay, je rappelle que le dépistage du cancer du sein est financé sur le budget de l’assurance maladie et ne concerne donc pas le projet de loi de finances. Une campagne de sensibilisation, dans laquelle je me suis particulièrement investie, a eu lieu au mois d’octobre afin de convaincre les femmes de l’intérêt de se faire dépister entre 50 et 74 ans. Il est vrai que le taux de dépistage dans cette tranche d’âge n’est que de 52 %, mais ce chiffre ne concerne que le dépistage organisé. Or on peut évaluer à 12 ou 13 % la proportion des femmes ayant subi un examen de leur propre initiative. Au total, le taux est donc plutôt de 65 %. Cela étant, le dépistage organisé est préférable au dépistage individuel : nous devons donc continuer à nous mobiliser.

En ce qui concerne le suivi de ce dépistage, les contrats d’objectifs signés entre l’État et les agences régionales de santé ont retenu un indicateur précis qui nous permet une vision fine des actions menées sur le territoire.

À propos du VIH, vous avez parlé de patients traités non contaminants. Mais, à ma connaissance, le virus n’est pas éradiqué. Dans ces conditions, on ne peut pas considérer les patients comme guéris.

Mme Michèle Delaunay. Ils sont malades, mais pas contaminants.

Mme Nora Berra, secrétaire d’État chargée de la santé. Il faut faire attention aux mots que l’on emploie.

Vous affirmez que certaines associations ont vu leurs crédits baisser de 50 %. En réalité, si nous avons effectivement réclamé un effort aux associations bénéficiant d’une subvention, cet effort s’est concentré sur les mieux dotées : celles dont la subvention était supérieure à 130 000 euros ont subi une réduction de 14 %, mais pour les autres, la baisse n’a été que de 2 %.

Par ailleurs, pour la première fois, le lancement d’un appel à projets national d’un montant de 265 000 euros, destiné à promouvoir des actions en direction des femmes les plus exposées au risque du VIH et des hépatites, vient s’ajouter aux subventions perçues par les associations. Cette initiative peut pallier la baisse des financements : les associations ont en effet toute liberté de répondre à cet appel à projets.

En ce qui concerne les projets régionaux de santé, un budget de 182 millions d’euros est prévu pour les agences régionales de santé au titre des dépenses relevant de la prévention et de la sécurité sanitaire, qui font l’objet d’une exécution budgétaire majoritairement réalisée sous forme de dépenses d’intervention territorialisée. Cette subvention concourt à l’ensemble des actions territoriales menées par les ARS, afin en particulier d’atteindre les objectifs de santé publique, de prévention, de veille et de sécurité sanitaires. La dotation de l’État est complétée par une contribution des régimes obligatoires d’assurance maladie qui s’élèvera en 2012 à 40 millions d’euros.

Comme les autres dépenses de l’État, les dépenses d’intervention des ARS subissent une légère baisse, mais la masse critique reste très importante.

M. Préel a évoqué à nouveau la notion d’ORDAM, un sujet qui lui est cher et qui est régulièrement débattu – et cette année encore – lors de l’examen du PLFSS. Je le redis : il est trop tôt pour instituer des objectifs régionaux. Une première étape a toutefois été franchie cette année avec la création d’un fonds d’intervention régional. Il faut laisser à ce dispositif le temps de se mettre en place avant de réfléchir aux évolutions à apporter.

En ce qui concerne la biologie, Valérie Boyer a déposé cette semaine une proposition de loi tendant à ratifier l’ordonnance de biologie médicale qui reprend les amendements adoptés dans le cadre de la proposition de loi Fourcade.

Quant aux dépassements d’honoraires, le Gouvernement a déposé un amendement visant à les encadrer pour les médecins des trois spécialités de bloc opératoire exerçant en secteur 2. En parallèle, l’UNCAM travaille sur la revalorisation des tarifs du secteur 1. Enfin, la convention médicale a fixé comme priorité la revalorisation des spécialités cliniques.

En ce qui concerne l’éducation thérapeutique du patient, prévue par la loi Hôpital, patients, santé et territoire, je vous remercie, monsieur Jacquat, pour le rapport que vous avez remis en juillet 2010. Au 1er octobre 2011, les agences régionales de santé avaient autorisé 2 355 programmes d’éducation thérapeutique, ce chiffre incluant les programmes antérieurs à la loi HPST. Ces programmes sont effectués à 69 % en court séjour hospitalier, les pathologies les plus représentées étant le diabète – 28,7 % des programmes – et les maladies cardiovasculaires en dehors des accidents vasculaires cérébraux – 14,6 %.

Vous souhaitez mettre l’agence régionale de santé au cœur du dispositif de pilotage. C’est le cas, puisque c’est elle qui par définition autorise les programmes.

S’agissant du développement des programmes d’éducation thérapeutique en ambulatoire, des expérimentations sont en cours. Leur prolongation jusqu’à la fin de 2013 permettra de tirer tous les enseignements nécessaires. De son côté, la Haute autorité de santé est chargée de l’évaluation des programmes eux-mêmes, quel que soit le lieu de leur déroulement. Elle achève la mise au point d’un projet de guide pour l’auto-évaluation annuelle des programmes et travaille sur les conditions d’évaluation à quatre ans, soit la durée de leur autorisation.

L’amélioration de la formation des intervenants en éducation thérapeutique se poursuit, puisque ces programmes sont intégrés à la formation initiale des professionnels paramédicaux. De son côté, l’INPES va élaborer avant la fin de l’année un référentiel de compétences sur le sujet.

En ce qui concerne la reconnaissance du niveau universitaire des orthophonistes, je comprends la déception de ces derniers qui souhaitaient une équivalence en master 2. Mais nous voulons que la profession d’orthophoniste, à l’instar de celle de kinésithérapeute, puisse être exercée après quatre années d’études. Nous suivons en cela les conclusions du rapport Hénart qui proposait de définir, pour toutes les professions paramédicales, un socle de compétences nécessaires pour exercer le métier de base – pour les orthophonistes, le niveau qui a été proposé est donc celui du master 1 –, quitte à poursuivre la formation par la suite afin d’obtenir un master 2, correspondant à une spécialité particulière.

Monsieur le président Baert, le programme engagé en matière de soins palliatifs pour les années 2008 à 2012 tend d’abord à développer encore l’offre hospitalière et à favoriser l’essor des dispositifs extrahospitaliers. L’objectif est d’installer une unité de soins palliatifs dans chaque région et de trouver, dans les départements, des solutions adaptées aux besoins, par exemple au moyen d’équipes mobiles. Après une période d’élaboration et d’expérimentation, nous en sommes désormais à la généralisation d’un dispositif qui monte en charge de façon à mieux couvrir le territoire. Une deuxième priorité est de développer une politique de formation et de recherche. Il est aujourd’hui nécessaire d’assurer la connaissance des soins palliatifs dès la formation initiale, afin que l’ensemble des professionnels soit en mesure d’accompagner les patients en fin de vie.

Quant aux moyens budgétaires alloués au programme, ils s’élèvent à 229 millions d’euros sur cinq ans. Au-delà de la mise en œuvre de nouveaux dispositifs, l’objectif essentiel est de contribuer au développement et au partage de compétences au service d’une offre de soins fluidifiée.

S’agissant de la T2A, les tarifs ont déjà été revalorisés. Ils sont supérieurs aux coûts, justement pour favoriser le développement de l’activité de soins palliatifs.

En ce qui concerne notre politique en matière de tarification hospitalière, le modèle est stabilisé en médecine, en chirurgie et en obstétrique. Chaque année, une étape de convergence est franchie entre le secteur public et le secteur privé. Cent millions d’euros y seront consacrés en 2012.

En matière de soins de suite et dans les hôpitaux locaux, la tarification à l’activité sera mise en œuvre à partir de 2013, et non de 2012.

Les arbitrages ne sont pas encore rendus en matière de tarifs, non plus que sur le déblocage de la deuxième tranche de financement du plan Hôpital 2012. Ils le seront dans les prochaines semaines.

M. Jean-Luc Préel. Vous ne m’avez pas répondu sur les propositions du comité Fourcade relatives aux conseils de surveillance et aux commissions médicales d’établissement publiques et privées, ni au sujet de l’agénésie dentaire.

Mme Nora Berra, secrétaire d’État chargée de la santé. Sur ce dernier point, nous allons entamer un travail de fond avec les professionnels.

S’agissant des présidents de CME ou de conseil de surveillance, un projet de décret est soumis à concertation avec les personnes concernées.

(M. Jean-Luc Préel, vice-président de la Commission des affaires sociales, remplace M. le président Pierre Méhaignerie à la coprésidence de la commission élargie).

Mme Catherine Lemorton. À propos des auxiliaires médicaux, vous avez fait allusion, madame la secrétaire d’État, au rapport Hénart. Ne s’agit-il pas plutôt du rapport Domergue ?

Mme Nora Berra, secrétaire d’État chargée de la santé. Pour les professions de santé et les activités paramédicales, le rapport Hénart a émis des recommandations en faveur de formations de base, transversales, garantissant un socle de compétences susceptible d’identifier le métier. Il prévoit la possibilité de se spécialiser et d’accéder, selon la profession, à un master 1 ou 2.

Mme Catherine Lemorton. Dans ce cas, je vous conseille de vous reporter au rapport Domergue.

La responsabilité civile professionnelle consiste à faire payer tout le monde de la même façon, au nom d’un principe de solidarité conçu de manière pour le moins curieuse. En effet, aucun orthophoniste, par exemple, ne court le risque de se voir réclamer par un malade des dommages et intérêts à hauteur de 8 millions d’euros. J’ai contacté plusieurs fédérations et syndicats d’auxiliaires médicaux : je peux vous assurer qu’ils sont mécontents de la mesure proposée à l’article 60 de la loi de finances.

Ma première question concerne l’action 14 du programme 204, consacrée à la prévention des maladies chroniques et à la qualité de vie des malades, plus particulièrement de ceux qui sont atteints de la maladie d’Alzheimer.

On se demande à quoi servent la Haute autorité de santé et la Commission de transparence. En raison de leur faible service médical rendu, le taux de remboursement des médicaments anti-Alzheimer n’est que de 15 %, ce qui est normal. Mais dans la mesure où ces médicaments sont essentiellement prescrits dans le cadre d’une affection de longue durée, ils sont tout de même intégralement remboursés. Tant que l’on ne touchera pas au prix, les industries pharmaceutiques peuvent donc continuer de dormir tranquilles.

Chaque année, ce secteur représente une dépense de 260 à 300 millions d’euros. Cet argent ne pourrait-il pas être mieux employé, par exemple à combler le manque d’équipements médico-sociaux ? Allez-vous décider une réduction drastique du prix de ces médicaments ?

Le rapport de M. Bapt évalue à 400, voire à 600 millions d’euros le coût du développement professionnel continu – DPC. Or la taxe sur l’industrie pharmaceutique ne rapporte que 150 millions d’euros. Comment, dans ces conditions, parvenir à rendre le DPC indépendant de l’industrie ?

En matière d’addictions, je trouve regrettable de séparer systématiquement le licite – alcool et tabac – de l’illicite – drogues. Les chiffres montrent pourtant que l’alcool cause plus de dégâts à la santé publique que le cannabis, par exemple – ce qui ne signifie pas, bien entendu, que j’en encourage la consommation.

Enfin, j’estime qu’il serait nécessaire de supprimer le dispositif transitoire destiné à délivrer les premières autorisations pour l’ouverture des CSAPA – centres de soins, d’accompagnement et de prévention en addictologie – et des CAARUD – centres d’accueil et d’accompagnement à la réduction de risques pour usagers de drogues. Ces centres sont en effet en situation de grande insécurité et ne peuvent donc mener à bien leurs missions de santé publique auprès de publics par définition précaires, qui présentent des problèmes à la fois sociaux, psychologiques et sanitaires. Quand mettrez-vous fin à ce système qui déroge aux règles de fonctionnement des établissements et services sociaux et médico-sociaux ?

M. Jean-Luc Reitzer. Depuis 2004, les établissements publics de santé sont principalement financés par la tarification à l'activité. Ce système est malheureusement bancal, car les établissements manquent de visibilité du fait de la baisse des tarifs – de 2 % cette année sur les actes – et de celle du financement des missions d'intérêt général et d'aide à la contractualisation (MIGAC). Le Gouvernement a-t-il l'intention de s’attaquer à ces deux problèmes ?

Des efforts considérables ont été accomplis ces dernières années pour la prise en charge des personnes âgées grâce au plan « Solidarité grand âge », lancé en 2008. Cependant, alors que le taux d'encadrement prévu était de 0,8 agent pour un résident, il n'est encore que de 0,6. Des mesures sont-elles prévues pour tenter de rattraper ce retard ?

Pour les médecins à diplôme étranger – hors Communauté européenne –, deux articles du code de la santé publique prévoient deux modalités d'intégration : un examen pour ceux qui ont exercé des fonctions hospitalières avant 2004 et un concours pour les autres. Il se trouve que l’examen est en principe organisé pour la dernière fois en 2011. Qu’est-il prévu pour ceux qui n'y auront pas réussi alors que beaucoup occupent un poste resté vacant durant de nombreuses années et sont donc indispensables au fonctionnement des établissements ? Quant à ceux qui échoueront au concours, qui offre très peu de postes, qu’adviendra-t-il d’eux ? Pourront-ils rester en France sur des postes vacants pour lesquels il n’existe pas de candidats nationaux ? Quel sera leur statut et quelles seront leurs perspectives de carrière et d'avenir dans notre pays ?

Mme Annick Girardin. La télémédecine est aujourd'hui un moyen indispensable de réduire les difficultés d'accès au diagnostic et aux soins dont souffrent de nombreuses régions isolées de notre territoire national, notamment outre-mer. J'ai pu constater récemment, lors d'un déplacement en Guyane, le bénéfice et le confort qu'elle apporte à des populations disséminées sur des territoires très vastes, même si ces techniques n’y sont encore qu'au stade expérimental.

Pour la petite collectivité de Saint-Pierre-et-Miquelon, cette solution semble aussi très adaptée afin d’améliorer la qualité et la sécurité des soins et de réduire la dépendance envers les missions ponctuelles de spécialistes ainsi que le coût, pour la collectivité comme pour les malades et leurs familles, des évacuations sanitaires vers le Canada ou vers la métropole.

Le centre hospitalier de Saint-Pierre-et-Miquelon défend ainsi depuis des années un projet complet de déploiement de la télémédecine dans notre archipel, notamment en matière de téléradiologie, de télédialyse ou de télé-AVC, mais il peine à trouver, notamment auprès de l'État, les 2 millions d’euros qui seraient nécessaires sur trois ans pour l'ensemble des installations médicales – matériel et connexions à haut débit. Toutefois, il espère, légitimement, pouvoir bénéficier en 2012 du soutien du Fonds pour la modernisation des établissements de santé publics et privés.

Je sais que le Gouvernement a la volonté de développer cette offre supplémentaire de santé pour permettre plus d'équité dans l'accès aux soins. La télémédecine est d’ailleurs considérée à raison dans le cadre du grand emprunt comme un investissement d'avenir. Et c’est bien le cas pour les territoires isolés qui, tant en métropole qu’outre-mer, sont très défavorisés quant à l'accès à des soins de qualité. Prévoyez-vous un dispositif d'accompagnement de leurs projets de télémédecine, pour prendre en compte leurs spécificités et les aider à mobiliser les nombreux financements existants ? Je ne vois pas en effet de dispositions précises à cet effet dans le projet de loi de finances qui nous est soumis.

M. Rémi Delatte. Le système d’information e-Santé est un levier puissant pour transformer les pratiques médicales par la mutualisation et la rationalisation des moyens et pour améliorer ainsi les soins. L'élément clé du dispositif de partage de données médicales est la carte professionnelle santé, dont la diffusion n'est pas pleinement aboutie, en particulier dans les établissements hospitaliers. Où en est la diffusion de cette carte et à quel échéance celle-ci sera-t-elle généralisée ?

La création d'une structure unique de pilotage, l'Agence des systèmes d'information de santé (ASIP) laissait entrevoir un espoir d'accélération de la mise en place du dossier médical personnel (DMP). À la suite du rapport que j'ai remis en novembre 2009 sur le sujet, Mme Roselyne Bachelot, qui était alors ministre de la santé, avait situé l'échéance d'une entrée en vigueur effective du DMP à la fin de 2010 et il semble donc que nous ayons pris beaucoup de retard en la matière. Qu'en est-il exactement ? Quelles sont les causes de ce retard et quel terme fixez-vous aujourd'hui pour la généralisation du DMP ?

M. Louis-Joseph Manscour. Ma question porte sur les difficultés que rencontre la fusion de trois hôpitaux de médecine, chirurgie et obstétrique (MCO) de la Martinique.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail, de l'emploi et de la santé, m’a confirmé par courrier les engagements qu'il avait pris lors de son passage en Martinique, à savoir l'attribution de 93 millions d'euros pour la reconstruction du plateau technique du CHU de Fort-de-France et de 40 millions d'euros pour la reconstruction du centre hospitalier de Trinité. Je tiens à l’en remercier. Je reste toutefois prudent tant que l’ARS n’aura pas reçu la notification faisant foi.

Depuis l'adoption, en 2009, de la loi Bachelot, les hôpitaux de la Martinique sont en pleine réorganisation. L’ARS pilote ce processus avec pour objectif affiché la rationalisation de l'offre de soins sur l'ensemble du territoire par la fusion des trois hôpitaux MCO. Nous approuvons cette démarche. Cependant, les personnels s'inquiètent des conséquences sur l'emploi, et ce d'autant plus que le Gouvernement n'a pas tenu ses engagements sur deux questions essentielles pour lesquelles je souhaite avoir une réponse.

Il est indispensable, tout d'abord, que soit revalorisé le coefficient géographique destiné à compenser les surcoûts auxquels sont confrontés les hôpitaux de Martinique. M. Bertrand avait du reste promis, lors de son passage en Martinique, une réponse au plus tard en novembre.

Deuxièmement, un montant de plus de 28 millions d'euros de créances irrécouvrables participe très lourdement au déficit des hôpitaux de Martinique. Ce montant s'explique par la grande précarité de notre population. Comme Mme Bachelot, M. Bertrand s'était engagé à élaborer un plan pluriannuel d'apurement de ces créances. Qu'en est-il ?

Compte tenu du déficit d'exploitation cumulé de 70 millions d'euros que présentent les hôpitaux de Martinique, comment réussir une fusion qui serait déjà difficile dans l’Hexagone sans le respect de ces deux engagements ?

Enfin, les CHU des Antilles – Martinique et Guadeloupe – ont mis sur pied un cursus complet de formation afin de répondre aux défis de la démographie médicale dans nos régions. Cependant, au rythme actuel des créations d’emplois hospitalo-universitaires, il faudrait quarante ans pour obtenir autant de personnel enseignant que le plus petit CHU de l'Hexagone. Quelles initiatives comptez-vous prendre pour permettre à ces deux CHU de rattraper leur retard ?

M. Guy Malherbe. Depuis septembre 2010 est entrée en application la réforme instituant la première année commune des études de santé (PACES), qui remplace les premières années séparées de médecine et de pharmacie. Son objectif, louable, était de faciliter les réorientations et de rapprocher les filières de santé pour éviter le gâchis humain lié à un taux d’échec de plus de 80 % en première année de médecine.

Un an après, le premier bilan semble mitigé, notamment pour la filière pharmacie. En effet, plus de 70 % des enseignements de la PACES étant calqués sur l'ancienne première année du premier cycle d'études de médecine (PCEM1), les aspirants au concours de pharmacie se voient souvent désavantagés, et donc moins bien classés que les redoublants en médecine. Par ailleurs, si des possibilités de réorientation ont été développées, elles ont néanmoins fait de la filière pharmacie une porte de sortie ou une orientation par défaut, la filière médecine, plus prestigieuse, tendant à être choisie prioritairement et la pharmacie apparaissant à certains redoublants comme un dernier recours.

Alors que la filière pharmacie souffre d'être mal connue dans un contexte de dégradation de l'économie officinale, quel bilan tirez-vous de la mise en œuvre de la première année d'études communes et que comptez-vous faire pour les étudiants qui visent d'emblée les études de pharmacie ?

Ma deuxième question porte sur les mutuelles, qui constituent des réserves financières importantes. Si la loi leur impose d’y consacrer un minimum de 17 % des cotisations annuelles, nombreuses sont celles qui affectent leurs bénéfices annuels à leurs réserves libres. Au-delà d'une marge de solvabilité de 300 %, il semble que ces réserves puissent être qualifiées d’excessives : les adhérents pourraient profiter d'une part de cet excédent.

À qui appartiennent ces réserves – à la mutuelle ou aux mutualistes ? Par extension, lorsqu'un adhérent change de mutuelle, peut-il demander qu'on lui reverse sa part de réserves ?

Mme Michèle Delaunay. Madame la secrétaire d’État, en déclarant tout à l’heure que les malades du sida traités par antirétroviraux n'étaient pas contaminants, je me fondais sur l’étude HPTN05 du HIV Prevention Trials Network, qui montre que c’est le cas pour 98 % de ces patients. Cette étude doit désormais fonder toutes les politiques de lutte contre le sida, comme l’a indiqué récemment M. Michel Sidibé, qui dirige l’ONUSIDA.

M. Jean Mallot. Comme l’a rappelé M. Jean-Luc Préel, la Mission d'évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale (MECSS) travaille sur la prévention santé. Il convient en effet de s'interroger sur la mesure de l'efficience des politiques de prévention et sur la rémunération de ces actions, ainsi que sur l'articulation des évaluations menées en la matière à l'échelle nationale et au niveau local – où la question porte plus sur les méthodes et les moyens que sur l'évaluation des résultats proprement dite.

La prévention est aussi, dans une large mesure, une affaire de volonté politique. Quelle est la vôtre dans ce domaine, notamment pour lutter contre ce que la Cour des comptes décrit comme des conflits d’intérêts ? La lutte contre l'obésité, par exemple, pose la question de la publicité pour les produits alimentaires, dirigée notamment vers les jeunes enfants, publicité que le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) considère comme une ressource indispensable pour l'audiovisuel public. Que veut-on privilégier ?

La Cour des comptes a par ailleurs souligné le caractère à la fois dispersé et cloisonné de la prévention. Au-delà de la médecine scolaire et de la médecine du travail, qui dépendent d’autres administrations que la vôtre, se posent par exemple des problèmes d'articulation entre les ARS et les caisses primaires d’assurance maladie. Que pensez-vous de la proposition de la Cour de confier à la direction générale de la santé (DGS) une mission particulière de coordination en la matière ?

Mme Nora Berra, secrétaire d’État chargée de la santé. La cotisation prévue pour l’assurance responsabilité civile professionnelle sera modulée, variant entre 15 et 25 euros par an en fonction de la rémunération des professionnels et du niveau de risque. Les orthophonistes se situeront donc au tarif le plus faible.

Le service rendu par les médicaments anti-Alzheimer ayant été évalué comme faible, leur taux de remboursement est de 15 % mais, dans le mesure où il y a encore remboursement, celui-ci continue de se faire à 100 % pour les patients inscrits en affection de longue durée. Cependant, l’évaluation implique une renégociation des prix des princeps. Conjuguée avec l'arrivée des génériques sur le marché, prévue pour l'année prochaine, celle-ci se traduira par une baisse des dépenses liées à ces traitements.

Le développement personnel continu sera financé par une taxe de 150 millions d’euros prélevée sur l’industrie pharmaceutique, qui s'ajoute aux 80 millions de fonds conventionnels et aux 30 à 40 millions d’euros de fonds hospitaliers. Notre objectif est donc de mobiliser au mieux les fonds actuels, qui seront renforcés afin d’assurer, avec ce programme de développement continu, une parfaite transparence en matière de formation.

Les CSAPA et CAARUD sont financés sur des crédits médico-sociaux pérennes. Il n'est pas question de remettre en cause cette offre de service essentielle.

Mme Catherine Lemorton. Ce n’était pas ma question !

Mme Nora Berra, secrétaire d’État chargée de la santé. Monsieur Malherbe, 56 000 étudiants se sont inscrits en 2010 en PACES, dont 12 000° en pharmacie. Le nombre d'inscriptions dans cette discipline était de 9 000 en 2009 et on ne constate donc pas de désaffection pour cette profession de santé. Le pourcentage de reçus dans la filière pharmacie reste stable, à 26 %.

Vous avez rappelé que le dispositif applicable aux médecins étrangers prenait fin cette année, laissant sans statut reconnu des praticiens qui assurent le fonctionnement de nos services hospitaliers. Cette question m'a préoccupée dès ma prise de fonction et nous avons travaillé à un dispositif relais. D’où l’adoption d’un amendement au PLFSS qui prolonge le dispositif transitoire jusqu'en 2014 en l’appuyant sur un examen professionnel tenant mieux compte des acquis de l'expérience.

Monsieur Delatte, la distribution des premières cartes de professionnel de santé a débuté à la fin du premier trimestre 2011. L'ensemble des professionnels et secrétariats médicaux devraient être dotés de la CPS 3 à la fin de 2012.

La télémédecine est une priorité, car elle permet d’assurer la permanence des soins, particulièrement dans les zones sous-médicalisées. Nous construisons actuellement le dispositif qui en permettra le déploiement. Une première étape consistera à élaborer un cadrage national et un guide destiné aux agences régionales de santé afin de définir les programmes régionaux en la matière. La deuxième étape est celle de la mise en place des moyens alloués au développement de ces outils. En 2011, une enveloppe de 26 millions d’euros a été octroyée aux ARS pour financer des projets de télémédecine autour de quelques priorités – soit, pour le moment, les AVC et l’imagerie.

Je tiens à ce propos à souligner la qualité du projet réunionnais. La télémédecine gagnera à s'appuyer sur des projets aussi exemplaires. Les enseignements de ces expériences pourront être tirés d'ici à la fin de 2011, ce qui permettra de mettre au point le programme national au début de 2012.

Pour ce qui concerne les hôpitaux de la Martinique, les travaux relatifs au coefficient géographique ont été engagés à la rentrée, en tenant compte de ceux qui ont été réalisés pour la région de Corse. Les résultats en seront connus à la fin de l'année. Quant à l'apurement des créances, l'Agence nationale d’appui à la performance des établissements de santé et médico-sociaux (ANAP) a été missionnée pour élaborer un plan d’action type et accompagner les établissements hospitaliers.

Monsieur Mallot, la coordination des actions de prévention doit se faire au niveau de l'État, en cohérence avec les axes stratégiques de santé publique. Il me paraît à ce titre intéressant que le directeur général de la santé soit titulaire de cette mission.

M. Louis-Joseph Manscour. Pouvez-vous également répondre sur le recrutement des enseignants hospitalo-universitaires en Martinique ?

M. Jean-Luc Reitzer. Je rappelle mes questions relatives à la T2A et à la diminution des crédits des MIGAC, ainsi qu’au taux d’encadrement pour les personnes âgées.

M. Guy Malherbe. Pouvez-vous également préciser à qui appartiennent les excédents de placements des mutuelles ?

M. Dominique Baert, président. Il semble qu’une réponse vous sera apportée ultérieurement par écrit, cher collègue.

Mme Nora Berra, secrétaire d’État chargée de la santé. Monsieur Reitzer, l'ONDAM connaît d'année en année une progression continue, avec une augmentation substantielle des dépenses dans le secteur médico-social, en particulier pour la prise en charge des personnes âgées. Pour 2012, nous avons proposé une augmentation de 4,2 % de l’ONDAM médico-social. Pour ce qui concerne les personnes âgées, l'augmentation sera, me semble-t-il, supérieure à 5 %.

Pour ce qui est de la tarification à l'acte, nous sommes contraints par l'ONDAM et il s’impose dès lors de procéder à des ajustements pour rester dans le cadre de l’enveloppe votée.

M. Dominique Baert, président. M. Reitzer voulait souligner la perversité de l’exercice : en milieu hospitalier, l’enveloppe étant contrainte, le fait de développer son activité ne produira jamais aucun retour.

M. Jean-Luc Reitzer. C’est bien cela.

Mme Nora Berra, secrétaire d’État chargée de la santé. Une mission de l’Inspection générale des affaires sociales (IGAS) et de l’Inspection générale des finances (IGF) a été lancée sur les modalités de régulation de la tarification compte tenu du respect de l’ONDAM. Nous devrions donc pouvoir disposer d'un diagnostic précis et, peut-être, de propositions.

Pour ce qui est de l'enseignement post-universitaire, je transmettrai la question à mon collègue chargé de l'enseignement supérieur et la recherche, de qui elle relève.

M. Jean Mallot. Sur l’aide médicale d’État, votre réponse ne m’a pas totalement satisfait. Dans le cadre de la discussion de la première partie du projet de loi de finances, j’ai eu l’honneur de défendre un amendement visant à supprimer le fameux droit d’accès de 30 euros que vous avez instauré – de façon tout à fait inacceptable de mon point de vue – l’an dernier. Sollicités pour donner leur avis, la commission et le Gouvernement s’en sont tenus à un simple « défavorable ». L’explication m’a paru un peu courte, c’est pourquoi je reviens sur le sujet ce soir.

Lorsque vous avez pris cette mesure, voilà un an, vous disposiez pourtant d’un rapport de l’IGAS et de l’IGF soulignant que l’AME était utile, qu’elle ne faisait pas l’objet de fraudes particulières et qu’il n’était pas opportun d’instaurer un droit d’accès. Je le rappelle, cette aide est réservée aux personnes étrangères ayant un revenu mensuel inférieur à 634 euros : il ne s’agit donc en rien de profiteurs !

Une étude récente de Médecins du monde montre que l’instauration de ce droit est une mesure injuste, coûteuse et dangereuse – 55 % des bénéficiaires potentiels indiquent que cette taxe leur pose un problème financier. Ces personnes, disposant d’un revenu médian de 100 euros environ après paiement de leur loyer et de leur nourriture, restreignent l’utilisation de l’AME à l’adulte malade, faute de pouvoir payer le droit pour tous les membres de la famille. Il y a là un obstacle à l’accès aux soins, droit pourtant fondamental, reconnu par tous les textes internationaux.

Cette mesure, dont je viens de souligner les effets délétères, est le fait d’un gouvernement qui n’a rien trouvé de mieux que de faire voter à sa majorité, la semaine dernière, un PLFSS dans lequel l’article 40 demande aux établissements hospitaliers publics de faire de l’argent sur le dos des patients étrangers fortunés.

Madame la secrétaire d’État, comptez-vous un jour tenir compte des conclusions des rapports que vous avez commandés et, ainsi, revenir sur ce droit d’accès à 30 euros, qui est une mauvaise mesure ?

Mme Nora Berra, secrétaire d’État chargée de la santé. Je me suis déjà exprimée sur l’AME. En outre, nous avons déjà eu ce débat l’année dernière au moment de l’instauration du droit d’accès. Vous l’avez rappelé, le Gouvernement est contre sa suppression d’autant qu’il n’y a pas d’alerte particulière. Selon les comités de pilotage spécifiques mis en place, il n’y a pas de renoncement aux soins dû à l’instauration du droit d’entrée et, je le redis, la baisse de 1,8 % des effectifs est loin d’indiquer une tendance.

M. Dominique Baert, président. Je vous remercie, madame la secrétaire d’État, d’avoir participé à cette commission élargie.

La réunion de la commission élargie s’achève à vingt-trois heures dix.

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