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Assemblée nationale

Commission élargie

commission Élargie

Commission des finances,
de l’économie générale
et du contrôle budgétaire

Commission des affaires culturelles
et de l’éducation

(Application de l’article 120 du Règlement)

Jeudi 27 octobre 2011

Présidence de M. Yves Censi,
vice-président de la Commission des finances,
et de Mme Michèle Tabarot,
présidente de la Commission des affaires culturelles

La réunion de la commission élargie commence à quinze heures.

projet de loi de finances pour 2012

Sport, jeunesse et vie associative

M. Yves Censi, président. Madame et messieurs les ministres, Michèle Tabarot, présidente de la Commission des affaires culturelles et de l'éducation, et moi-même sommes heureux de vous accueillir.

Sur proposition de l’ensemble des groupes politiques, les débats dans les commissions élargies sont désormais chronométrés afin de respecter la durée préalablement arrêtée par la conférence des Présidents ; le temps de parole total a été fixé à trois heures pour cette mission. Les rapporteurs disposeront de cinq minutes pour poser leurs questions, contre deux minutes pour nos autres collègues. Cependant, en accord avec la coprésidente, je proposerai que les porte-parole des groupes puissent également s’exprimer pendant cinq minutes, étant rappelé que les auteurs de questions bénéficient en tout état de cause d'un droit de suite en cas de réponse jugée incomplète.

Afin de libérer Mme Bougrab et M. Chatel dès que possible, je suggère que nous commencions, après les interventions des rapporteurs et les réponses des ministres, par les questions relatives à la jeunesse et à la vie associative. Je remercie nos collègues dont les questions concernent seulement le ministre des sports de les réserver à la seconde partie de nos échanges.

Mme la présidente Michèle Tabarot. Je souhaite également la bienvenue à madame et messieurs les ministres. Nous sommes ravis de retrouver Luc Chatel, que nous avons déjà entendu hier, et d’accueillir, pour la première fois devant notre commission le nouveau ministre des sports, David Douillet.

Je précise que les travaux de notre rapporteur pour avis sur le sport, Bernard Depierre, ont tout particulièrement porté sur les voies de financement. Quant au rapporteur pour avis sur la jeunesse et la vie associative, Jean-Philippe Maurer, il a souhaité faire le point sur le service civique.

M. Henri Nayrou, rapporteur spécial pour la mission « Sport, jeunesse et vie associative ». Le temps qui m’est imparti est aussi contraint que ce budget des sports, de la jeunesse et de la vie associative !

Sur un plan purement financier, ce budget n’appelle pas beaucoup de commentaires : d’un point de vue relatif, il n’est pas mauvais, mais il n’est pas bon dans l’absolu, comme ceux qui l’ont précédé. Il témoigne du peu d’intérêt du Gouvernement pour ce secteur qui peut pourtant aider à dépasser de nombreux clivages et procurer du bonheur au peuple de France. M. Douillet, que j’ai auditionné mardi à son retour d’Auckland, est au demeurant le neuvième ministre des sports depuis 2007. Quant au périmètre budgétaire de cette mission, il ressemble à un bulletin météo qui ne changerait certes pas tous les jours, mais tous les ans certainement.

Les crédits relatifs à la jeunesse et à la vie associative augmentent certes de manière sensible, du fait de la montée en régime du service civique, pour un montant de 134 millions d’euros, mais je ne crois pas que les jeunes de notre pays feront joyeusement la ola en apprenant les mesures budgétaires qui nous sont proposées là, fût-ce en découvrant le fonds d’expérimentation pour la jeunesse.

En ce qui concerne le sport, c’est sur le Centre national du développement du sport (CNDS) que les mouvements budgétaires les plus significatifs se concentrent. En quinze jours, le produit qui en est attendu est ainsi passé de 276,6 à 272,9 millions d’euros alors que des parlementaires de tous bords voulaient au contraire l’augmenter. Il est regrettable que, nonobstant le grignotage au profit des stades de l’EuroNations 2016, le plafonnement annoncé et les ponctions de Bercy sur les fonds libres et les fonds de concours, le vrai budget du sport soit sanctuarisé dans sa seule médiocrité comptable et que son unique variable d’ajustement soit le gisement extrabudgétaire que constitue le CNDS, source d’ailleurs appelée à se tarir rapidement au rythme actuel.

Le bilan est encore plus accablant si l’on considère les cinq dernières années. Celui qui est aujourd’hui le président de la République avait annoncé en 2007 que le budget du sport serait porté à 3 % du budget de l’État à la fin de son mandat. Or le seul programme 219, « Sport », représentera l’an prochain 0,08 % du budget de l’État et 0,2 % si l’on prend en compte les moyens du programme 124. Si l’on y ajoute les 273 millions d’euros du CNDS, on arrive péniblement à un taux de 0,29 %, ce qui est très loin des mirages de 2007.

À côté des montants financiers, il y a la réalité du terrain, source à laquelle tous les élus devraient puiser leur réflexion. Force est de constater que les associations du sport et de la jeunesse souffrent d’un manque de moyens, de bénévoles et de perspectives. Les commentaires et les chiffres ne suffiront pas à leur redonner une espérance digne de ce nom.

S’agissant du service civique, l’objectif du Président de la République est d’y faire entrer 10 % d’une classe d’âge, soit 75 000 jeunes, d’ici à 2014. Le coût d’un jeune en année pleine étant de 9 000 euros, ce qui représente un coût global corrigé de 500 millions euros, j’aimerais savoir comment vous comptez procéder. La loi de programmation des finances publiques 2011-2014 prévoit, en effet, une augmentation des crédits de la mission, à périmètre constant, d’à peine 50 millions d’euros. Quels sont donc les objectifs réellement assignés à l’Agence du service civique ?

Ce budget n’est bien sûr pas le vôtre, monsieur le ministre, mais j’ai été très intéressé par votre audition du 25 octobre dernier. J’aimerais maintenant vous entendre sur les points suivants.

Comment comptez-vous faire pour respecter la mission sacrée du CNDS, qui est de financer le sport pour tous, et non les travaux relatifs aux stades de football professionnel pour l’EuroNations 2016 ? Sans contester le principe d’une aide publique en la matière, je déplore qu’on pioche dans les fonds du CNDS.

Comment comptez-vous, par ailleurs, limiter les compensations financières au titre du contrat passé avec le Stade de France, compensations qui viennent réduire d’autant les crédits du sport ?

Quel est l’avenir de l’Assemblée du sport ? Quelle gouvernance envisagez-vous pour elle ?

Quelles leçons tirez-vous de l’échec de la candidature d’Annecy ? Que faire pour que la France conserve des chances d’organiser de grands événements ?

Quelle est votre analyse de l’état financier du football français ?

Quel regard portez-vous sur les dérives constatées en matière de dopage et de paris sportifs ?

En cas de transfert de joueurs, admettez-vous que les agents soient rétribués par les clubs et non par leurs clients ?

Enfin, que pensez-vous de la disparition dommageable et même inacceptable des missions de l’État dans nos territoires à cause de la sinistre révision générale des politiques publiques (RGPP) ?

M. Jean-Philippe Maurer, rapporteur pour avis de la Commission des affaires culturelles et de l'éducation pour la jeunesse et la vie associative. Doté de 230 millions d'euros en crédits de paiement et en autorisations d'engagement, le programme 163 « Jeunesse et vie associative » constitue une exception notable dans le contexte budgétaire contraint qui est le nôtre : ses crédits progressent, en effet, d’environ 8 %.

Les crédits affectés au périmètre historique de ce programme, à savoir les actions en faveur de la jeunesse, de l'éducation populaire et du développement de la vie associative, se stabilisent à hauteur de 90 millions d'euros. Les perspectives pour 2012 sont avant tout marquées par la montée en charge du service civique. Voté en 2010 et lancé cette même année, le dispositif a pris sa pleine portée sur une année complète en 2011. S’agissant de 2012, les objectifs sont ambitieux : 25 000 contrats sont prévus pour un total de 134 millions d'euros.

Le programme bénéficie d'une montée en charge régulière dont témoignent les moyens budgétaires mobilisés à l'Agence du service civique (ASC) et à l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS) au titre des cotisations sociales.

Cela étant, les avis divergent : le directeur de l'ASC estime que les moyens sont insuffisants pour atteindre les objectifs quantitatifs, à savoir de 200 à 250 millions d'euros pour 25 000 postes en 2012 et 528 millions d'euros pour 75 000 postes en 2014, quand le ministre considère, pour sa part, que le taux de consommation des crédits ne provoque pas de tension et que les moyens peuvent être reportés d’une année sur l'autre pour mobiliser les sommes prévues.

Je tiens à préciser que le dispositif est géré selon les règles budgétaires en vigueur, en particulier selon le principe de l'annualité, alors que son fonctionnement se caractérise par des entrées massives pendant les quatre derniers mois de l'année. L’analyse que l’on peut faire de son fonctionnement en 2011 est donc très incomplète, les chiffres disponibles – d’ailleurs en deçà des prévisions – étant ceux de l’année scolaire, de septembre 2010 à août 2011. Pendant cette période de l’année, les jeunes s’interrogent en général sur leur orientation avant de s’engager éventuellement dans le service civil, étape dans leur vie qui doit leur permettre de faire le point.

Au demeurant, le directeur de la jeunesse et des sports a annoncé que le financement des 5 000 postes supplémentaires proposés en 2012 résulterait du report de crédits non consommés en 2011.

J’ajoute que les aspects physico-financiers de la montée en puissance du dispositif devront être évalués par rapport à la qualité des missions proposées et que tout dépendra de la capacité des associations et des collectivités à accueillir un nombre croissant de jeunes. Le service civique n’est pas une variable d'ajustement du service public de l’emploi : son objet n’est pas de consommer des crédits de contrats aidés en fonction des statistiques du chômage.

La montée en charge du service civique est incontestablement l'action phare du programme 163 du fait de la mobilisation des structures locales qu’elle implique et du pilotage central de l'indemnité versée aux volontaires, qu’il faudra assurer sans compromettre la réactivité du dispositif ni la qualité des projets.

En ce qui concerne les délégués départementaux à la vie associative, j’aimerais savoir si la réduction des frais de fonctionnement risque d’entraver leur capacité d’action.

S’agissant du Haut conseil à la vie associative, le décret prévu a été publié et les membres de cette instance ont été désignés. Pouvez-vous nous dire quand elle sera opérationnelle et quelles seront ses priorités ?

En troisième lieu, pouvez-vous dresser un bilan du fonds d’expérimentation pour la jeunesse et préciser quelles expériences mériteraient d’être poursuivies ?

Quant au service civique, comment en assurer la montée en puissance tout en veillant à la qualité des missions concernées ? Ne peut-on redouter un essoufflement des structures d'accueil des jeunes volontaires ?

M. Bernard Depierre, rapporteur pour avis de la Commission des affaires culturelles et de l'éducation pour le sport. L’évolution des crédits dévolus au sport est globalement satisfaisante dans le contexte actuel : une fois neutralisé l'effet de divers transferts, à périmètre budgétaire constant donc, les crédits de paiement fléchissent de 1,8 % quand les autorisations d'engagement progressent de 2,3 %. L'essentiel paraît donc préservé.

Néanmoins, je voudrais faire part d’un certain nombre d’interrogations concernant le CNDS. D'après le bleu budgétaire, ses dépenses pour la préparation des stades en vue de l'Euro 2016 devraient finalement s'élever à 168 millions d'euros, et non plus à 150 millions. Par ailleurs, un amendement du Gouvernement, adopté en première partie du projet de loi de finances, a plafonné à 31 millions d'euros le montant du prélèvement sur les paris sportifs en ligne affecté au CNDS.

Dans ces conditions, pouvez-vous nous assurer que ce centre pourra assurer correctement sa mission de soutien au mouvement sportif et aux projets locaux des collectivités ? Je ne vous cache pas ma relative inquiétude sur ce point. J'ai d’ailleurs déposé un amendement visant à accroître les ressources du CNDS grâce au relèvement du plafond du prélèvement complémentaire opéré sur les mises de la Française des Jeux pour financer les stades de l'Euro 2016. Le Gouvernement y est-il favorable ?

Il me paraît également nécessaire de dynamiser les recettes du CNDS qui sont issues des paris sportifs en ligne. Elles sont, en effet, très décevantes, notamment à cause de la concurrence exercée par des sociétés illicites, qui proposent des gains plus élevés aux joueurs, ce qui conduit les sociétés agréées par l’Autorité de régulation des jeux en ligne (ARJEL) à voir leur chiffre d’affaires et le nombre de leurs joueurs se réduire. Le Gouvernement serait-il favorable à une mise à niveau de l'offre de pari des sociétés agréées grâce à une révision à la hausse du taux maximum de retour aux joueurs, aujourd'hui limité à 85 % ? Je rappelle que les sociétés illégales vont, pour leur part, jusqu’à 93 ou 95 %. En rendant plus attractive l’offre des sociétés agréées, on accroîtrait leurs recettes et donc le produit affecté, par l’intermédiaire du CNDS, au mouvement sportif.

Il me semble, en outre, que la France ne pourra continuer à être une grande nation sportive – elle a récemment prouvé à quel point elle le demeure – que si elle s'en donne les moyens matériels : nous devons nous doter d'équipements modernes pour entraîner nos sportifs, pour attirer de grandes manifestations internationales et pour loger dans de meilleures conditions les clubs résidents. Notre retard en la matière est criant par rapport à nos voisins européens – l'Allemagne, l'Espagne ou encore l'Italie. Je pense en particulier aux équipements couverts tels que les piscines et les patinoires. Nous avons certes débloqué la situation pour les stades de l’Euro 2016, mais le travail reste à faire pour les autres équipements. Le budget de l'État et ceux des collectivités territoriales ne pouvant, à l'évidence, supporter seuls un tel effort, je préconise de recourir davantage aux partenariats public-privé, comme nous le faisons pour les stades. Le Gouvernement partage-t-il cette analyse ?

De plus, il me semble nécessaire d'impliquer davantage les entreprises dans le soutien au mouvement sportif. Deux voies ont ainsi été envisagées par l'Assemblée du sport, en particulier dans le cadre de l’atelier « Économie du sport » que j’ai eu l’honneur de présider : porter de 5 pour mille à 5 % du chiffre d'affaires le plafond de dépenses de mécénat ouvrant droit à réduction d'impôt ; promouvoir un « chèque sport », qui serait similaire au chèque-vacances ou au chèque-repas et bénéficierait d’un financement des entreprises, cela afin d’abaisser le coût de la pratique dans les structures sportives – je rappelle que le coût d'une licence peut varier de 50 à 150 euros selon les disciplines. Le Gouvernement est-il prêt à étudier ces deux options ?

En dernier lieu, j’aimerais savoir quel sera l’avenir de l’Assemblée du sport, formidable lieu de travail qui a été une source exceptionnelle de propositions.

M. Luc Chatel, ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative. En dépit d’une situation budgétaire très tendue, le budget du programme « Jeunesse et vie associative » augmentera encore l’année prochaine – de près de 8 % –, ce qui démontre l’attachement du Gouvernement au développement de la politique de la jeunesse et plus généralement à la vie associative dans notre pays.

S’agissant des associations, le maintien du niveau d’intervention de l’État dans le domaine de la formation des bénévoles correspond, dans le contexte actuel, à un engagement fort – je rappelle que le Premier ministre avait souhaité augmenter de 30 % ces crédits il y a deux ans. Le maintien du niveau d’intervention en faveur du réseau associatif qui travaille en partenariat avec le ministère, notamment dans le cadre de l’éducation populaire, est aussi un engagement très fort que nous tenons. Il en est de même pour les postes FONJEP (fonds de coopération de la jeunesse et de l'éducation populaire), dont le niveau ne varie pas – il sera de 25 millions d’euros en 2012. Étant des élus locaux, nous mesurons tous l’importance du maillage territorial réalisé grâce à ces emplois.

J’en viens au service civique, qui est un succès dont nous devons nous féliciter. Environ 15 000 missions devraient être réalisées cette année, soit autant que depuis la création du dispositif. Sa montée en puissance s’est accélérée grâce aux efforts réalisés par l’agence, à la demande du Gouvernement, pour augmenter le nombre des agréments, pour diversifier les missions et pour veiller à leur qualité. Jeannette Bougrab pourra vous en dire plus sur le travail d’accompagnement qui est réalisé, mais je tiens à rappeler dès maintenant que le service civique doit être une véritable expérience, susceptible d’être valorisée dans les parcours d’insertion professionnelle.

En ce qui concerne l’année prochaine, nous avons fixé un objectif audacieux, mais à notre portée : arriver à 25 000 missions réalisées. L’objectif fixé lors de la création du dispositif – accueillir 10 % d’une classe d’âge en 2014 – reste donc d’actualité, même si la loi de finances triennale s’arrête en 2013. Nous faisons une priorité du développement de ce service civique, comme en témoigne l’augmentation du budget consacré à la jeunesse et à la vie associative. Et comme, à la fin d’août dernier, trente-cinq seulement des quatre-vingt-dix millions d’euros inscrits au budget au titre du service civique avaient été consommés : on voit qu’il reste des marges pour assurer une montée en puissance progressive du dispositif.

Le fonds d’expérimentation pour la jeunesse, le FEJ, a connu des débuts favorables, avec 381 expérimentations lancées sur l’ensemble du territoire dans le cadre de onze appels à projet. Ces expérimentations doivent maintenant être évaluées, afin que nous puissions retenir et reproduire celles qui se seront révélées positives. Après cette phase initiale, marqué par un foisonnement fécond des projets, nous avons tenu, avec Mme Bougrab, à fixer un nouveau cap au conseil de gestion du FEJ : celui de la consolidation du dispositif. Il s’agira dans cette deuxième phase de se concentrer sur certains objectifs et de juger le potentiel de généralisation des projets, en tenant compte de leur caractère innovant et de leur coût, évaluation comprise.

L’institution d’un Haut conseil à la vie associative correspond, elle aussi, à un engagement pris par le Premier ministre à l’occasion de la Conférence nationale sur la vie associative. Le décret portant création de ce Haut conseil a été publié le 28 juillet, et j’ai eu le plaisir d’installer cet organisme le 20 octobre. À la différence du Conseil national de la vie associative, sa vocation n’est pas de représentation, mais d’expertise. Il sera saisi de tous les projets de textes, qu’ils soient législatifs ou réglementaires, relatifs aux associations. Il proposera par ailleurs toutes mesures utiles au développement de la vie associative. Il se compose de vingt-cinq membres issus du monde associatif et reconnus pour leur expertise, dans des domaines aussi divers que le droit, la fiscalité des associations, les relations avec les décideurs publics ou privés, la gestion comptable, la gestion des ressources humaines, etc., ainsi que de cinq personnalités qualifiées et de représentants des collectivités locales et du Parlement. Il fixera son programme de travail lors de sa prochaine réunion.

Vous m’avez interrogé sur la réduction des frais de fonctionnement des délégués départementaux à la vie associative, soit 300 000 euros répartis entre les 104 directions départementales pour financer le fonctionnement de chaque mission d’accueil et d’information des associations. Le Gouvernement a en effet fait le choix de faire porter sur ce poste la réduction des dépenses de fonctionnement, afin de maintenir au même niveau qu’en 2011 les moyens dédiés aux 160 centres de ressources et d’information des bénévoles, les CRIB, ainsi que ceux qui sont consacrés à la formation des bénévoles. Cette réduction ne devrait pas porter atteinte à la capacité d’agir des délégués départementaux, dans la mesure où ils travaillent en réseau avec les autres organisations.

Mme Jeannette Bougrab, secrétaire d’État chargée de la jeunesse et de la vie associative. Nous essayons systématiquement de faire le lien entre jeunesse et vie associative, et ce de deux manières. Premièrement, le texte sur la pré-majorité associative, que vous avez voté, permet aux jeunes de s’engager dès seize ans dans le monde associatif. Il est regrettable en effet que les quelque quatorze millions de bénévoles que compte notre pays se recrutent surtout dans le vivier des personnes de plus de cinquante ans. Deuxièmement, le service civique, issu de la loi adoptée par le Parlement le 10 mars 2010, permet aux jeunes qui y entrent de s’engager, durant six à douze mois, au sein du monde associatif. Plus de 80 % ont suivi cette voie, démentant le cliché qui voudrait que les jeunes soient incapables de solidarité.

Avec Luc Chatel, avec l’Agence du service civique et avec les délégués territoriaux, nous veillons à la qualité des missions, notamment au moment de l’agrément, afin d’assurer l’attractivité du dispositif. C’est dans ce but que nous nous efforçons de proposer les missions les plus diverses, la majorité ayant trait à la solidarité, à l’éducation, à la culture, au sport, à la santé, au développement international. Nous nous efforçons également de les déployer sur l’ensemble du territoire. Alors que l’an passé, deux tiers des missions étaient au bénéfice des têtes de réseau nationales, cette année, 50 % des agréments auront été accordés à des associations locales. Notre objectif est de favoriser les associations de terrain, qui contribuent fortement, comme le savent les élus que vous êtes, au maillage territorial et à la cohésion sociale.

M. David Douillet, ministre des sports. C’est un honneur, mais aussi une grande responsabilité, de défendre devant vous ce budget des sports, car, comme vous le savez, le sport est un élément essentiel, voire vital, de notre vie sociale. C’est aussi un des rares domaines susceptibles de nous rassembler, au-delà de nos oppositions politiques.

Avec 861 millions d’euros, ce budget est plutôt stable, ce qui, surtout dans le contexte actuel, prouve l’importance que le Gouvernement et le Président de la République accordent au sport. Il faut savoir que le budget du CNDS a augmenté de 58 % entre 2006 et 2012, et le budget des sports de 56 % entre 2002 et 2012.

S’agissant des effectifs, ce budget a pris sa part de l’effort imposé par la RGPP. Cependant, nous avons veillé à préserver la qualité des personnels, grâce à une réorganisation intelligente et à une constante remise en question. C’est cette qualité qui permet au ministère de continuer à assurer ses missions régaliennes.

Le CNDS ne devrait pas souffrir du financement des stades destinés à accueillir l’Euro 2016. Le budget nécessaire est passé de 150 à 168 millions d’euros, en raison d’une augmentation de huit millions d’euros du coût prévisionnel de la préparation des stades et parce qu’il a fallu prendre en compte la rénovation du Parc des Princes, qui n’était pas prévue à l’origine. Les 150 millions d’euros initiaux proviendront pour 120 millions du prélèvement de 0,3 % sur les jeux que vous avez voté – soit 24 millions par an pendant cinq ans – et pour 30 millions du fonds de roulement du CNDS. Les 18 millions d’euros de différence seront également pris sur le fonds de roulement du CNDS, à raison de 4,5 millions par an pendant quatre ans. Croyez bien que je veillerai scrupuleusement à ce que ce prélèvement supplémentaire ne porte pas atteinte aux prérogatives du CNDS dans le domaine du sport pour tous. Je ne suis pas le ministre du football : je suis le ministre de tous les sports.

Nous n’avons donc pas besoin de déplafonner le montant des recettes attendues de la taxe sur les jeux, d’autant qu’un tel déplafonnement risquerait au contraire de nous faire perdre cette manne indispensable dans ces temps de restrictions budgétaires.

Comme vous le savez, l’État propriétaire a concédé l’exploitation du Stade de France pour trente ans à un consortium. Le problème est qu’il n’y a pas de club résident et que, de ce fait, le budget des sports sera ponctionné de quelque huit millions d’euros en 2011, et très probablement de douze millions en 2012.

Actuellement la convention liant la Fédération française de rugby au consortium du stade de France est en cours de renégociation, et les dirigeants de la FFR m’ont appris que les discussions étaient au point mort. Je pense que le modèle économique qui justifiait les termes de la convention à l’époque où elle a été signée ne convient plus aujourd’hui au club ni à la Fédération, et doit faire l’objet d’une révision radicale : l’État n’a pas à combler des déficits qui sont appelés à se creuser encore. En effet, la FFR ne veut plus que ses matchs se tiennent au Stade de France et projette aujourd’hui de se lancer dans la construction de son propre stade, afin de bénéficier intégralement des retombées financières de ces rencontres. Je suis actuellement en discussion sur ce point avec la FFR, la question étant de savoir si la construction d’un stade de 82 000 places est pertinente en Île-de-France, région qui compte déjà le Stade de France, le Parc des Princes, un stade de 45 000 places en voie de construction à Nanterre, pour ne pas parler de Jean-Bouin, en cours de rénovation. Nous allons étudier soigneusement la viabilité d’un tel projet, dont je doute qu’il soit pertinent, la coexistence de tous ces grands équipements pouvant même s’avérer catastrophique. On comprend aisément que le Stade de France, vieux de trente ans et donc dépourvu de tous les équipements modernes qui assurent des recettes annexes, pâtirait immédiatement de cette nouvelle concurrence. Il est donc urgent de rechercher, avec la FFR et avec le consortium, une issue honorable pour tout le monde.

La gouvernance de l’Assemblée du sport m’ayant semblé à la réflexion d’une complexité excessive pour une instance purement consultative, j’ai décidé d’en réduire la voilure. Elle sera donc assurée par vingt-trois personnes, dont un député et un sénateur, cinq représentants de l’État, cinq représentants des collectivités locales, cinq représentants du monde sportif et autant du monde de l’entreprise.

Connaissant bien le fonctionnement du CIO, je peux vous dire que l’échec de la candidature d’Annecy était prévisible, faute d’un recul et d’une réflexion suffisants. Aujourd’hui, la question est de savoir si la France a les capacités financières de s’engager dans une autre candidature aux jeux Olympiques, quand on sait que Pyeongchang a dépensé plus de cent millions d’euros avant d’obtenir les jeux au bout de trois candidatures. Je réponds qu’elle le doit, en dépit du coût et des difficultés prévisibles dans la conjoncture actuelle, car le retour sur investissement en termes d’images et de flux économiques est incontestable, qu’il s’agisse des jeux d’hiver ou des jeux d’été. Mais cela suppose une décision prise au plus haut niveau de l’État et l’élaboration d’une stratégie sur quinze ou vingt ans. C’est ce à quoi je compte m’atteler, une fois obtenu l’aval du mouvement sportif et du Président de la République. Il faudra alors étudier les raisons pour lesquelles nos candidatures pour 2008, 2012 ou 2018 ont échoué, notamment en auditionnant les membres du CIO. La France a prouvé qu’elle était capable d’organiser de grands événements sportifs. Je soutiens d’ailleurs sa candidature à l’organisation des championnats du monde de basket et de handball. Il est vrai que certaines considérations géostratégiques favorisent les pays émergents, et il semble que les pays développés soient aujourd’hui contraints de se porter plusieurs fois candidats pour espérer emporter les jeux.

La situation financière du football français est marquée, comme celle du football européen, par les déficits abyssaux des clubs professionnels. L’année dernière, le déficit cumulé des clubs de Ligue 1 et de Ligue 2 atteignait 130 millions d’euros, leurs recettes provenant pour l’essentiel des droits de retransmission télévisuelle. À ce propos, Frédéric Thiriez m’a expliqué que certains lots n’avaient toujours pas trouvé preneurs et que s’il ne trouvait pas 160 millions d’euros d’ici la fin de l’année, les clubs professionnels allaient être sérieusement en danger. Quant au déficit de l’ensemble des clubs européens, il s’élève aujourd’hui à 1,2 milliard d’euros. C’est le principal souci de Michel Platini. Il est urgent que les clubs professionnels mettent fin à cette fuite en avant et cessent de se livrer à une spéculation effrénée autour des transferts de joueurs. Il faut qu’ils investissent dans leur outil de travail en développant d’autres sources de revenus afin de se libérer de leur dépendance aux droits télévisuels. Le monde du rugby prouve que c’est possible, puisque ces droits ne représentent que 30 % des ressources de ses clubs, les 70 % restants provenant de partenariats, des sponsors, de la billetterie et du marketing sportif.

Pour lutter contre les dérives auxquelles peuvent donner lieu les paris sportifs, la France a déjà créé l’Autorité de régulation des jeux en ligne, l’ARJEL. Ce combat se rapproche à mes yeux de la lutte contre le dopage : il s’agit dans les deux cas de tricherie. Comme la tricherie aux paris sportifs, le dopage est un vol : on vole sa victoire à un athlète. C’est la raison pour laquelle je souhaite que l’Assemblée adopte rapidement la proposition de loi du Sénat visant à pénaliser la corruption sportive. C’est une demande instante de Michel Platini, car c’est à ses yeux le seul moyen de lutter contre ce fléau.

J’ai proposé, lors de la réunion des ministres européens, de mutualiser la lutte contre le dopage et la corruption. Le milieu des paris sportifs et des jeux en ligne souhaite être assaini, car il pâtit de la situation actuelle. Peut-être soutiendrait-il financièrement une action dans ce sens. Pour être efficace, celle-ci doit être menée dans des termes identiques dans tous les pays. Il faut sans doute créer, sur le modèle de l’Agence mondiale anti-dopage, une Autorité de régulation mondiale pour les paris et les jeux en ligne. En tout cas, le combat doit être mené sur les deux fronts. Le CIO pourrait y aider, en adressant aux États un cahier des charges et en leur demandant de se doter d’outils législatifs. Le sport mondial en a besoin.

Enfin, je pense, comme la commission des athlètes du CIO, que le dopage n’est pas sanctionné assez sévèrement. Un délit pénal responsabiliserait davantage les sportifs.

La loi de 2010, qui autorise les clubs à rétribuer les agents sportifs, tout en limitant leur commission à 10 %, tend manifestement à faire cesser un abus, mais je trouve tout de même inadmissible qu’un club rémunère un agent qui défend les intérêts d’un sportif.

M. Marcel Rogemont. Bien sûr ! C’est intolérable ! Pourquoi avez-vous voté la loi ?

Mme Marie-George Buffet. Nous sommes aussi choqués que vous.

M. David Douillet, ministre des sports. Je vous avais bien dit que le sport rassemblait !

M. Marcel Rogemont. L’essentiel serait que nous soyons d’accord dans l’action. Il faut revoir la loi !

M. David Douillet, ministre des sports. À présent, vous connaissez ma position sur le sujet.

Comme je l’ai souligné lorsque j’étais secrétaire national chargé des sports, le chèque sport est adapté aux besoins de nos concitoyens, qui passent beaucoup de temps sur leur lieu de travail, et il sert l’intérêt des entreprises, dont les salariés travailleront mieux s’ils sont en bonne forme physique et mentale. Quand une entreprise n’a pas de CE assez puissant pour disposer de salles de sports et organiser la pratique sportive dans ses locaux, elle doit recourir à d’autres moyens. Certaines ont réalisé un audit des associations sportives actives dans leur voisinage pour déterminer avec lesquelles elles pourraient passer contrat. Une autre solution consisterait à proposer un ticket-sport, sur le modèle du ticket-restaurant. Pourquoi, d’ailleurs, ne pas en faire profiter les seniors ? Aider les retraités qui n’en ont pas les moyens à s’abonner à un club de fitness réduirait certaines pathologies, et donc le déficit de la sécurité sociale.

À mon sens, le sport, qui a joué le jeu de la RGPP, n’a pas eu à en souffrir. J’ai fixé une orientation et des objectifs aux directeurs régionaux que j’ai rencontrés hier et avec lesquels j’ai longuement discuté. Certes, les effectifs diminuent, du fait du non-remplacement d’une personne sur deux partant à la retraite, mais la RGPP offre l’opportunité de remettre en question nos modes de fonctionnement. Bien que le nombre de nos agents ait été réduit de 7 200 à 4 265, nous continuons à assurer nos missions. Si la quantité diminue, la qualité est au rendez-vous.

M. Yves Censi, président. Je poserai trois questions avant de donner la parole à mes collègues.

L’an dernier, la suppression du programme support de la mission « Sport, jeunesse et vie associative », fusionné au sein du programme 124 et intégré à la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances », a bouleversé l’architecture budgétaire. Avec 0,47 % des autorisations d’engagement et 0,48 % des crédits de paiement du budget général, c’est la mission la plus faible du budget de l’État. Elle n’a plus d’emplois, puisqu’ils ont été transférés vers une autre mission. Dès lors, est-il pertinent de la maintenir, même si, paradoxalement, elle fait l’objet d’une véritable politique publique ?

Les recettes du fonds d’expérimentation jeunesse (FEJ) proviennent essentiellement de l’État : pour la période 2009-2013, 118 millions sont inscrits dans le programme 163, plus d’un million provient du ministère de l’outre-mer, et 52,85 millions du plan de relance. Si les deux premières années ont été consacrées à construire le fonds, l’objectif est désormais de capitaliser les résultats par le biais d’une évaluation, dans une perspective d’essaimage et de généralisation. Le FEJ a-t-il vocation à perdurer ? Que deviendront les expérimentations dont l’évaluation aura été concluante ? Ce dispositif sera-t-il créateur de dépense publique ?

Plus généralement, je m’interroge sur les spécificités du service public dans le secteur du sport.

Nous en venons aux questions des porte-parole des groupes sur les crédits de la jeunesse et de la vie associative.

M. Éric Berdoati.Comment apparaît dans ce budget l’expérimentation menée par l’éducation nationale, qui a consisté à aménager pour 15 000 jeunes le temps scolaire entre temps consacré aux disciplines classiques et temps consacré à la pratique sportive ? Est-il prévu de l’étendre au-delà de cet effectif déjà considérable ?

De même, comment se matérialise dans ce budget le projet de formation des bénévoles ? Prévoyez-vous des postes détachés ou des programmes spécifiques ? Les bénévoles ne manquent pas dans les collectivités, où ils se montrent enthousiastes et engagés, mais ils ont exposés à la judiciarisation qui gagne notre société. S’ils ne réclament pas un statut qui serait peu compatible avec la nature de leur engagement, ils demandent à être protégés, notamment ceux qui, exerçant des fonctions de trésorier ou de président, sont, aux termes de la loi de 1901, responsables sur leurs deniers. Abordez-vous ce point ?

M. Régis Juanico. En tant qu’élus locaux, nous constatons chaque jour sur le terrain la lassitude des bénévoles, en proie au doute et au découragement. Ils tirent la sonnette d’alarme, le désengagement financier de l’État ayant des conséquences dramatiques. À périmètre constant, hors service civique et hors fonds d’expérimentation pour la jeunesse, les crédits pour la jeunesse et la vie associative auront baissé de 37 % entre janvier 2008 et décembre 2012.

Une étude récente de l’institut Recherches et solidarités révèle qu’il se crée de moins en moins d’associations et que celles-ci emploient de moins en moins de personnel. Le tissu associatif se fragilise don, mais rien n’est fait pour inverser cette tendance. Les crédits de l’action « Soutien au développement de la vie associative », en diminution de 11 %, se montent en tout et pour tout à 12,7 millions d’euros pour 16 millions de bénévoles, soit moins d’un euro par personne.

Vous vous réjouissez que les crédits réservés à la formation des bénévoles se maintiennent à 10,8 millions, alors que le monde associatif réclame depuis des années qu’on les porte à 15 millions. En 2008, dans un rapport que nous avons réalisé pour la Commission des affaires culturelles, Pierre Morange et moi avons même proposé de les doubler, ce qui serait la moindre des marques de reconnaissance.

Le soutien aux associations d’éducation populaire a également diminué, passant de 12 à 9 millions en quatre ans, soit une baisse de 25 %. Que faites-vous pour sécuriser les emplois associatifs et simplifier les dispositions administratives et financières ? Qu’en est-il du dossier unique de subvention ? Comment reconnaissez-vous l’engagement associatif ? Je n’aurai pas la cruauté de rappeler que le Président de la République avait promis aux bénévoles qu’ils bénéficieraient d’un trimestre de cotisation supplémentaire par tranche de dix ans quand ils prendraient leur retraite : tenons-nous en seulement à la validation des acquis de l’expérience, au crédit formation et au livret d’épargne civique. Où en êtes-vous à cet égard ?

Il me faut enfin insister sur le problème qui se pose aujourd’hui à propos de l’accueil collectif des mineurs. Les centres et colonies de vacances sont fragilisés par la décision du Conseil d’État du 10 octobre sur le contrat d’accompagnement éducatif. L’amendement déposé par M. Pierre-Christophe Baguet sur la proposition de loi du président Warsmann n’étant guère plus qu’une rustine, allez-vous enfin prendre des mesures législatives pour sécuriser le volontariat de l’animation et assurer l’avenir des centres et colonies de vacances ?

Mme Marie-George Buffet. Les politiques en faveur de la jeunesse ou de l’éducation populaire ne peuvent se résumer au service civique. Or, abstraction faite de celui-ci et du FEJ, bien loin de croître, le budget pour la jeunesse et la vie associative a baissé de plus de 30 % depuis 2009 et nous voyons disparaître tout ce qui faisait la force et l’originalité de ces politiques. Les subventions aux associations diminuent, ce qui met en péril bien des réseaux. Ainsi Peuple et Culture a perdu la moitié de ses salariés depuis 2004 et voit son fonctionnement démocratique menacé dans la mesure où il lui est désormais impossible de couvrir les frais de déplacement de ses élus bénévoles quand ils se réunissent. Comment accueillir les jeunes qui effectuent leur service civique si les grands réseaux associatifs se délitent ainsi ?

Est-il normal que les crédits de rénovation des centres de vacances accueillant enfants et adolescents aient fortement diminué, compromettant les travaux en cours ?

Quelles dispositions législatives prévoyez-vous pour assurer un véritable statut du volontariat, et permettre aux jeunes titulaires du brevet d’aptitude aux fonctions d’animateur de continuer à encadrer les enfants dans les centres de vacances ?

Enfin, quel avenir réservez-vous aux politiques éducatives locales, qui jouent un rôle important dans l’accompagnement des jeunes enfants ?

M. Yannick Favennec. Les accords récemment signés avec la SACEM, qui simplifient les démarches administratives pour les associations, et l’extension de la procédure de forfaitisation des redevances, qui tient compte de leur spécificité économique, marquent de réels progrès dans le combat que nous menons pour alléger leurs contraintes. Vous y avez largement contribué, madame la secrétaire d’État, et je vous en remercie. Je forme le voeu que vous poursuivez ce soutien à l’avenir.

Cependant, je veux aujourd’hui appeler votre attention sur une autre contrainte qui risque de décourager les bénévoles. Les exigences de sécurité imposées aux établissements recevant du public pèse lourdement sur l’organisation de manifestations : est désormais requise la présence de personnes désignées par les organisateurs, formées par un cabinet agréé, et d’un ou plusieurs services de sécurité incendie et d’assistance à personnes. Le coût élevé des dispositions à prendre compromet la pérennité et le développement de la vie associative, notamment en milieu rural. Ces normes exigeantes et inadaptées aux réalités risquent de tuer la capacité d’initiative des acteurs locaux. Si, dans les petites communes, les responsables associatifs doivent être mieux formés pour assumer leur engagement, ils n’ont que faire de nouvelles normes aussi coûteuses que difficiles à respecter. Il faut assouplir ce dispositif et développer une politique de formation volontariste.

M. André Schneider. Le bénévolat associatif est le socle de notre vie sociale. Que serait en effet notre société sans ces 14 millions de fantassins qui œuvrent quotidiennement dans plus d’un million d’associations ? Mais si la vie associative est un formidable vecteur de démocratie participative, les contraintes réglementaires, de plus en plus lourdes, risquent de décourager les bénévoles, qui s’engagent souvent au détriment de leur carrière professionnelle. Nombre d’entre eux se sentent oubliés de la nation. Il est urgent de réagir en organisant des formations et une reconnaissance des acquis, de manière à favoriser le progrès de leur carrière professionnelle. Il conviendrait aussi de valider un certain nombre de trimestres quand ils partent à la retraite. Beaucoup souhaiteraient enfin qu’on crée un ordre spécifique du bénévolat, inspiré de l’ordre national du mérite. Quelles sont les grandes lignes de l’action que vous allez mener pour leur assurer la reconnaissance à laquelle ils aspirent ?

M. Bernard Lesterlin. Le service civique ne saurait tenir lieu à lui seul de politique publique en faveur de la jeunesse et de l’éducation populaire, c’est évident.

Jean-Philippe Maurer et moi rendrons compte de notre évaluation à la Commission des affaires culturelles et de l’éducation dans quelques jours Ma première question concerne la promesse principale, qui n’a pas été tenue. Par un courriel du 24 mai dernier, madame la secrétaire d’État, votre directeur de cabinet m’a informé de son arbitrage sur le financement de la formation civique et citoyenne. Deux options étaient possibles : celle préconisée par l’Agence du service civique et celle, plus conforme à l’esprit de la loi, qui revient à confier cette formation aux organismes d’accueil, à condition bien sûr qu’on les aide. Or cette seconde option nécessite un décret, lequel fut donc annoncé en mai. Qu’en est-il, cinq mois plus tard ? Je ne l’ai pas trouvé dans le Journal officiel.

Par ailleurs, la situation très préoccupante de la jeunesse est au cœur des difficultés à Mayotte. Mais la mission « Outre-mer » ne prévoit pas de moyens spécifiques pour y remédier. Quel signal êtes-vous en mesure de donner ? Chacun s’accorde sur l’analyse ; encore faut-il agir.

M. Marcel Rogemont. Nous sommes tous favorables au développement du service civique ; mais, aux dires de certains, il serait réservé aux mineurs ayant affaire à la justice. Je n’ai entendu aucun membre du Gouvernement démentir ces propos qui sèment une regrettable confusion.

Mme Marie-Odile Bouillé. Nous connaissons les pressions qui pèsent sur la jeunesse. Le service civique est une excellente chose, mais il ne concerne pas tous les jeunes. En ce domaine, notre pays a besoin du travail réalisé par les associations spécialisées dans la jeunesse et l’éducation populaire. Pourtant, le Gouvernement semble privilégier les programmes directement gérés par l’État, retirant son soutien aux politiques d’accompagnement et de développement d’une vie associative vraiment autonome. Cette situation est d’autant plus paradoxale que les besoins en matière de formation et d’accompagnement ne cessent de croître avec la montée en puissance du service civique. D’où viennent ces choix ?

M. Michel Ménard. Ce budget, comme celui de 2011, est en trompe-l’œil. Certes, les crédits liés à la montée en puissance du service civique augmentent sensiblement, mais les moyens de l’action 1 – « Développement de la vie associative » – et de l’action 2 – « Actions en faveur de la jeunesse et de l’éducation populaire » – ont respectivement diminué de 30 % et de 33 % depuis la loi de finances pour 2008. De ce fait, pour les associations d’éducation populaire, qui jouent un rôle essentiel sur le terrain, les difficultés se multiplient. Quels engagements pouvez-vous prendre pour leur redonner de la sérénité ?

Quant au fonds d’expérimentation pour la jeunesse, dont les crédits sont en baisse de 75 %, nous constatons une réelle opacité dans le choix des projets, et nous nous interrogeons sur le bilan des expérimentations. Pouvez-vous nous donner des précisions à ce sujet ?

M. Luc Chatel, ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative. Vous m’avez interrogé, monsieur le vice-président de la Commission des finances, sur l’avenir de la mission. Je répondrai que le montant financier compte moins que le fait qu’il s’agisse d’une politique publique : que, par exemple, le budget de l’éducation nationale soit trente fois supérieur à celui de la culture ne remet pas en cause l’importance de cette dernière. On peut toujours revoir la maquette budgétaire, mais la présente mission a sa cohérence.

Le fonds d’expérimentation pour la jeunesse avait vocation, comme son nom l’indique, à permettre l’expérimentation de projets dans des secteurs précis, sur la base d’appels à projets incluant des cahiers des charges. Les expérimentations font l’objet d’évaluations assurées par un cabinet spécialisé ou par des experts indépendants ; c’est sur cette base que nous déciderons s’il convient de les prolonger, de les étendre ou de les arrêter. Certaines des quelque quatre cents expérimentations actuellement en cours seront évaluées dès 2012, puisqu’elles arriveront au terme de leur troisième année. Nous pourrons alors définir une politique accompagnée de moyens budgétaires.

L’expérimentation « Cours le matin, sport l’après-midi », monsieur Berdoati, a été lancée par le ministère de l’éducation nationale : elle est donc imputée sur son budget. Néanmoins, une soixantaine de projets sont financés par le fonds d’expérimentation pour la jeunesse. Cette expérimentation concerne, cette année, 250 collèges – soit deux fois plus que l’an dernier – et 15 000 élèves, dont l’emploi du temps comprend des cours le matin et des cours d’éducation physique et sportive l’après-midi, ainsi que des activités sportives en partenariat avec une quinzaine de fédérations, avec lesquelles j’ai signé des conventions portant sur la mise à disposition d’animateurs ou sur le travail en commun au niveau local. L’expérimentation permet aux collégiens de pratiquer environ cinq heures de sport supplémentaires par semaine ; selon les enquêtes réalisées auprès des chefs d’établissement et des parents, elle a un impact très positif sur le climat scolaire. La moitié des chefs d’établissement interrogés ont même relevé des effets positifs sur les résultats scolaires.

Il existe aujourd’hui, au niveau national, plus de 1 600 projets de formation des bénévoles, dans 218 associations. Cet accompagnement, lié à l’activité de l’association, est assuré par d’autres associations ou par des experts extérieurs. Au niveau déconcentré, plus de 4 800 projets ont été mis en œuvre en ce domaine. Ces chiffres témoignent de l’engagement du Gouvernement, sous l’impulsion du Premier ministre, en faveur de la formation des bénévoles.

Monsieur Juanico, votre vision de la vie associative est comptable, la nôtre est sociétale. Par définition, il n’y a jamais assez d’argent ; mais le financement n’est pas la clé universelle. Vous semblez ignorer que, dans le contexte de la crise, l’ensemble de la ressource publique s’est raréfiée. Écoutez donc les associations se plaindre du désengagement des régions ou des départements ! Qu’est-ce qui est préférable ? S’indigner de cette situation ou trouver des relais de financement et répondre aux besoins réels des associations ? Plutôt que de mettre les associations sous perfusion, accompagnons-les dans la formation des bénévoles et simplifions les démarches administratives, ce qui est précisément l’objet du site www.associations.gouv.fr, désormais guichet unique pour tous les acteurs.

Le budget d’une association se compose aujourd’hui à 34 % de subventions, à 56 % de ses activités propres, à 12 % de cotisations de ses membres et à 5 % de dons et de recettes de mécénat. En d’autres termes, nous devons aider les associations à trouver de nouvelles sources de financement. Le CSA nous a remis un rapport sur l’accès aux médias, grâce auxquels des financements peuvent être ponctuellement trouvés. De même, notre pays dispose de la législation la plus intéressante au monde en matière de mécénat ; or les entreprises souhaitent s’impliquer davantage dans le monde associatif, car leurs salariés le demandent : chacun doit avoir la possibilité de s’engager dans une association en rapport avec son projet de vie. De fait, un nombre croissant d’entreprises investissent à travers des dotations et des actions de mécénat. Notre rôle est d’affecter ces fonds là où ils sont nécessaires ; à cet égard, la manifestation organisée aujourd’hui au Palais des congrès a été exemplaire.

Vous avez raison, madame Buffet, de souligner l’importance des grands réseaux associatifs ; aussi le Gouvernement a-t-il décidé, dans un contexte budgétaire contraint, de maintenir les 10 millions d’euros qui leur sont alloués dans le cadre des conventions pluriannuelles relatives à l’éducation populaire.

S’agissant du contrat d’engagement éducatif, Jeannette Bougrab et moi nous sommes saisis du problème bien avant que le Conseil d’État ne rende sa décision. Un amendement permet de gérer la période transitoire et de rassurer les parents sur le déroulement des prochaines colonies de vacances. Néanmoins, le problème doit être réglé dans la durée. Aussi avons-nous installé un groupe de travail présidé par M. Nutte, ancien inspecteur général de l’IGAS. Son objectif est de trouver, d’ici à la fin de l’année, une solution qui concilie évolution du droit du travail et attentes des salariés, tout en préservant la spécificité des animateurs de colonies de vacances, dont l’action est essentielle à la vitalité du tissu social dans les territoires.

Pour ce qui concerne la jeunesse mahoraise, monsieur Lesterlin, le ministère de l’éducation nationale dispose de moyens avec l’accompagnement éducatif, qui permet d’accueillir les enfants entre 16 et 18 heures, avec le plan de lutte contre l’illettrisme et avec des budgets pour la construction de nouveaux bâtiments scolaires – puisque la démographie mahoraise est en plein essor.

Monsieur Rogemont, le « service civique pour les mineurs » a été rebaptisé « service citoyen pour les mineurs » dans le titre de la proposition de loi : il n’y a donc pas de confusion possible.

Mme Jeannette Bougrab, secrétaire d’État chargée de la jeunesse et de la vie associative. Le problème soulevé par M. Lesterlin au sujet de la formation citoyenne dans le cadre du service civique est désormais résolu : en vertu d’un accord passé avec les sapeurs-pompiers, tous les jeunes volontaires reçoivent désormais une formation au secourisme, et un référentiel a été adopté par le comité stratégique de l’Agence du service civique. La question était de savoir si la formation citoyenne tombait sous le coup de la directive Services, ce qui aurait pu mettre l’Agence dans une situation juridiquement délicate. Après avis du secrétariat général des affaires sociales, nous avons tranché. J’ajoute que les associations concernées ont d’ores et déjà assuré, en 2010, la formation de 55 % des jeunes volontaires ; un décret publié dans les prochains jours au Journal officiel permettra de leur verser 150 euros par jeune. Certaines d’entre elles souhaitent que la mesure s’applique avec effet rétroactif ; mais, comme vous le savez, la non-rétroactivité est un principe intangible de notre droit. Nous préférons sécuriser le dispositif du point de vue juridique afin d’éviter les problèmes constatés avec le contrat d’engagement éducatif.

Monsieur Favennec, suite à mon audition avec M. Chatel par votre groupe d’études sur la vie associative, le Gouvernement s’est saisi de la question des droits d’auteur reversés par les associations, droits qui peuvent excéder les recettes engrangées à l’occasion de certaines manifestations. Une convention a donc été signée avec M. Frédéric Mitterrand, l’Association des maires de France, la SACEM et un certain nombre d’associations.

Notre politique vise donc à simplifier les actions associatives en les sécurisant juridiquement. Pour les deux tiers, les subventions touchées par les associations sont stabilisées sur trois ans puisqu’elles proviennent de conventions pluriannuelles d’objectifs : les associations qui en bénéficient n’ont pas à craindre de voir leurs subventions supprimées d’une année sur l’autre, et leurs démarches administratives s’en trouvent simplifiées. Le site Internet et la dématérialisation contribuent aussi à l’amélioration de la vie associative, sans oublier le chèque emploi associatif, la formation des bénévoles, nécessaire pour leur éviter d’éventuelles poursuites judiciaires – l’exemple de l’accueil du public et des obligations afférentes à l’article R. 123-2 du code de la construction et de l’habitation l’illustre bien –, et la mise en place du tronc commun pour les agréments. Chacun se souvient de l’incendie de l’hôtel Paris-Opéra, qui causa vingt morts : en cas d’accident, les responsabilités engagées sont très lourdes. Certains crédits du Conseil du développement de la vie associative (CDVA) pourraient ainsi être employés pour former les bénévoles à l’accueil du public. Conformément à notre tradition jacobine, les associations dialoguent surtout avec les autorités publiques ; mais il faut développer entre elles des échanges horizontaux, qui favorisent la synergie des expertises et des compétences, sans bien entendu transiger sur la sécurité.

La lutte contre la solitude est cette année une grande cause nationale ; dans ce cadre, monsieur Schneider, j’ai été reçue par la société Saint-Vincent-de-Paul à Strasbourg. Pour les bénévoles, qui sont trop souvent dans l’ombre, la reconnaissance est essentielle. Cependant, dans son principe, le bénévolat implique la gratuité : dès lors qu’une activité est rémunérée, elle ne peut plus être dite bénévole. Dans ces conditions, une meilleure reconnaissance du bénévolat passe notamment par sa valorisation professionnelle mais, en l’absence d’écritures comptables, cette reconnaissance n’est pas facile. C’est pourquoi le site www.associations.gouv.fr contient désormais un portfolio des capacités acquises.

Selon l’engagement pris par le Premier ministre lors de la deuxième conférence de la vie associative, des chartes de valorisation du bénévolat ont été signées avec plusieurs grandes entreprises – Orange, Axa, Casino et bientôt EDF et la CGPME. Celles-ci se sont financièrement engagées à former leurs DRH et recruteurs à la prise en compte du bénévolat et du service civique dans les parcours professionnels. Comble du paradoxe, selon une étude réalisée par Entreprises & carrières pour l’Île-de-France, le bénévolat est en effet pénalisé par les recruteurs, qui craignent que les bénévoles ne s’impliquent moins dans l’entreprise.

Il est temps de valoriser le bénévolat autrement que par les discours. En Seine-Saint-Denis, beaucoup de jeunes sans emploi, parfois en échec scolaire, s’engagent bénévolement pour aider d’autres jeunes ; c’est par exemple le cas de l’Association pour la promotion culturelle intercommunale stanoise (APCIS), à laquelle je veux rendre hommage. Or beaucoup d’entreprises considèrent qu’une activité n’est pas un travail dès lors qu’elle est bénévole. Les chartes de valorisation du bénévolat devraient améliorer les choses sur ce point.

M. Marcel Rogemont. Je remercie M. le ministre de l’éducation nationale de nous avoir précisé que la proposition de loi de M. Ciotti avait été rebaptisée : dans son esprit, le service civique n’est donc pas un service citoyen.

M. Yves Censi. président. Nous en venons aux questions concernant les crédits du programme « Sport ».

Mme Valérie Fourneyron. Les crédits du sport pour 2012 sont des crédits de misère, indignes des performances de nos sportifs comme des 16 millions de licenciés et des 35 millions de pratiquants que compte notre pays. Je vous plains, monsieur le ministre, vous qui n’avez pu participer à l’élaboration de ce budget, d’en avoir hérité et d’être aujourd’hui contraint de le défendre. Car sa part dans le budget de l’État n’a jamais été aussi faible : 0,15 %. À périmètre constant, il est en régression de 4,7 % par rapport à 2011, compte tenu du transfert des crédits des personnels des centres de ressources, d’expertise et de performance sportives (CREPS) et du Musée national du sport.

Heureusement, vous êtes sauvé de la grande précarité par le Centre national de développement du sport, dont la dotation passe de 247 à 276,6 millions d’euros. Cela signifie cependant que 53 % des crédits du programme sont de nature extrabudgétaire. Pour un ministère de plein exercice, c’est une réalité bien triste.

Avec un total de 8,1 millions d’euros, les crédits de l’action « Promotion du sport pour le plus grand nombre » ont diminué de 320 % depuis 2009 – même si, là encore, vous voudrez sans doute y ajouter les 19,5 millions d’euros transférés par l’intermédiaire du CNDS aux fédérations.

En ce qui concerne le sport de haut niveau, on observe, à périmètre constant, une stagnation des crédits, alors que nous entrons dans une année olympique. Nous savons donc déjà qu’une loi de finances rectificative devra prendre en compte les dépenses liées aux jeux de Londres.

J’insiste par ailleurs sur l’augmentation importante de l’enveloppe consacrée au loyer de fonctionnement de l’INSEP. En effet, un partenariat public-privé implique un loyer pour l’investissement, un loyer pour la maintenance, un loyer pour le fonctionnement et un loyer pour les frais financiers.

Les crédits de l’Agence française de lutte contre le dopage et de la prévention santé restent constants, à 7,8 millions d’euros. L’Agence aura donc le choix entre mettre de côté les moyens destinés au maintien de l’accréditation, abandonner le développement du passeport biologique ou les missions de recherche, ou encore réduire le nombre de contrôles, bien que ce soit plutôt à exclure lors d’une année olympique.

Le CNDS est devenu le « pompier du sport », alors qu’il s’agissait, au départ, avec ces crédits cogérés avec le mouvement sportif, de financer le sport amateur, le sport pour tous, le soutien aux territoires – même si cela ne voulait pas dire exclure le sport de haut niveau.

Entre 16 et 19,5 millions d’euros sont destinés aux fédérations. Pour la réalisation des stades nécessaires à l’organisation de l’Euro 2016, la contribution publique est passée cette année à 168 millions d’euros. L’an dernier, elle était de 150 millions d’euros, dont 120 millions provenant du prélèvement de 0,3 % sur les mises de la Française des jeux, et 30 millions du fonds du roulement du CNDS. Or, Mme Jouanno avait annoncé ici même que la part issue du fonds de roulement ne dépasserait pas 10 à 15 millions d’euros.

Aujourd’hui, il manque donc 18 millions pour financer la construction des stades de l’Euro 2016. C’est pourquoi Bernard Depierre et Henri Nayrou ont proposé de porter à 0,36 % le prélèvement sur les mises, afin d’augmenter à due concurrence les ressources du CNDS. J’ai compris que vous n’étiez pas prêt à soutenir leurs amendements, préférant faire une nouvelle fois appel au fonds de roulement. En tout état de cause, même si cette augmentation était acquise, le Gouvernement a plafonné à 31 millions la part attribuée au CNDS du produit de la taxe sur les jeux « en dur ». C’est la double peine !

Vous avez parlé de consensus, monsieur le ministre. Celui-ci ne peut pas porter sur le budget lui-même, ni sur la décision de financer l’Euro 2016 – et, en particulier, sur, la construction d’un stade pour le PSG, qui appartient aux Qataris – avec les fonds du CNDS, ni sur les agents sportifs, ni sur les paris en ligne. Il n’y a donc pas de consensus, même si j’en suis désolée pour le mouvement sportif.

Mme Marie-George Buffet. Monsieur le ministre, lors d’un échange que nous avions eu avant votre nomination, nous avions tous les deux jugé nécessaire de redonner à ce ministère toute sa puissance d’action et toute sa visibilité. Mais cet objectif se heurte à plusieurs problèmes.

Il y a tout d’abord celui du niveau global du budget, insuffisant, mais aussi de sa structure : 53 % du financement provient du CNDS. On en est même à modifier la loi sur les paris en ligne, afin que ces derniers marchent mieux, voire à augmenter le montant des taxes dont le produit sert à financer le Centre.

Vient ensuite le problème de la révision générale des politiques publiques. Vous affirmez que 4 200 agents font aussi bien le travail que 7 200 auparavant : je suis un peu sceptique. Ce n’est pas ce que nous disent les clubs et les collectivités territoriales.

Mais surtout, nous n’avons plus la visibilité que donnaient les directions départementales et régionales de la jeunesse et des sports. Grâce à elles, ce ministère avait une existence propre. Quels sont vos projets pour lui redonner son autonomie et sa capacité d’initiative ?

Si nous voulons développer la pratique sportive à tous les niveaux – y compris le haut niveau –, nous avons besoin qu’un nombre toujours plus important d’enfants ou de jeunes deviennent licenciés. Cela demande des infrastructures de proximité, mais aussi des subventions pour les clubs. On ne peut pas tout attendre des collectivités territoriales, qui perdent des moyens de financement et ne peuvent pas faire face aux demandes du mouvement sportif. C’est pourquoi la baisse très importante des crédits destinés au sport pour tous est inquiétante.

J’aimerais savoir en particulier quels seront les moyens attribués au développement du sport féminin. Je note qu’outre le rugby, nous avons obtenu un autre très bon résultat sportif, celui de l’équipe de France de football féminin.

L’Assemblée des sports avait travaillé sur la question de la gouvernance. Quelle suite allez-vous donner à ces réflexions ? Nous avons besoin de construire un nouveau partenariat avec le mouvement sportif ; il est donc important de développer des conventions et des contrats d’objectifs sur quatre ans. Dans ce cadre, j’aimerais obtenir des explications sur la demande de communication des fichiers des adhérents. Avez-vous pu recevoir la Fédération sportive et gymnique du travail pour régler le problème qu’elle connaît aujourd’hui ?

En matière de lutte contre le dopage, en raison de la baisse des moyens, notamment pour le financement de la recherche sur les possibilités de détection, ne risquons-nous pas d’être à nouveau dépassés par les tricheurs ?

Vous vous êtes déclaré opposé – et je vous en félicite – à la disposition légale autorisant les clubs à rémunérer les agents sportifs. J’espère que nous pourrons rapidement la modifier, mais je pense qu’il faudrait également revenir sur tous les dispositifs ayant permis aux clubs professionnels de se lancer dans la course à l’argent : constitution de sociétés anonymes, cotation en bourse, etc.

Enfin, êtes-vous favorable à l’augmentation, réclamée par une grande partie des intéressés, du nombre de trimestres pour la retraite des sportifs de haut niveau ?

M. Éric Berdoati. L’État pourrait en effet financer les cotisations de retraite des athlètes de haut niveau dans la limite de 16 trimestres. Les effets de ce dispositif sont-ils pris en compte dans votre budget ? Quelle en sera l’organisation ?

Le rapport publié par Daniel Costantini sur les grandes salles de sport proposait un plan de financement des « Arenas », à hauteur de 50 millions d’euros, en plusieurs tranches et sous la forme d’appels à projets. Mais je n’en trouve pas trace dans les documents budgétaires. J’ai cru comprendre qu’un comité ad hoc devait être constitué pour labelliser les projets. Ne vaudrait-il pas mieux confier ce rôle au CNDS ?

M. Michel Françaix. Je sais, monsieur le ministre, que vos compétences ne s’étendent pas au domaine de l’audiovisuel. Mais ne pourriez-vous travailler avec le ministre de la culture pour faire en sorte que la télévision ne mette pas toujours en avant les mêmes deux ou trois sports ? Un investissement à moyen et long termes doit être réalisé pour assurer la diffusion des épreuves d’autres disciplines – comme celles dont on n’entend parler qu’au moment des jeux Olympiques – ou des sports féminins.

Vous me direz que les chaînes privées sont libres de leur programmation. Mais qu’en est-il du service public ? En outre, c’est une question de donnant, donnant : les télévisions privées gagnent beaucoup d’argent en diffusant certains sports ; pourquoi nous privent-elles de handball ou de basket féminins, ou de badminton ? J’ai conscience qu’une évolution dans ce domaine ne peut pas être rapide, mais nous devons avancer.

Mme Monique Boulestin. En raison de l’éparpillement des crédits relatifs au sport entre plusieurs missions, il est difficile d’évaluer le budget de votre ministère. Pour autant, certains points doivent être soulignés avec insistance.

Tout d’abord, la promotion du sport pour le plus grand nombre est l’action la moins bien dotée de votre programme, en raison d’une baisse des crédits de 320 % depuis 2009. Ce désengagement spectaculaire de l’État est la négation même d’une véritable politique d’intérêt général en direction de tous les Français. Nous pouvons craindre qu’à terme, elle n’aboutisse à priver le sport de haut niveau d’éléments de qualité qui n’auront pas pu être recrutés.

Ensuite, la lutte contre le dopage et sa prévention sont désormais reléguées au second plan, avec une baisse de 4,4 % sur trois exercices budgétaires. Au-delà des effets d’annonce, monsieur le ministre, et même si je ne doute pas de votre sincérité, le Gouvernement ne donne pas à l’Agence française de lutte contre le dopage les moyens de prévenir et combattre efficacement le dopage et ses formes nouvelles, toujours plus difficiles à détecter. Ce vrai problème de santé publique, qui concerne aujourd’hui le sport professionnel comme le sport amateur, n’est pas pris en compte de façon volontariste par votre ministère.

Ces deux exemples montrent que le Gouvernement a oublié la notion de mission d’éducation populaire, avec tout ce qu’elle implique en termes d’éducation à la citoyenneté, de goût de l’effort, de respect de l’autre et d’apprentissage de règles de vie en société, valeurs fondatrices de l’esprit sportif.

M. Marcel Rogemont. Je reprends entièrement à mon compte les propos de ma collègue sur le dopage, et j’en profite pour interroger M. le ministre sur ses propos relatifs à la pénalisation des sportifs dopés. Les sportifs font figure de lampistes. Il existe tout un système derrière le dopage, et il faut frapper avec la même vigueur les sportifs qui se dopent et ceux qui les ont amenés à se doper.

J’en viens aux 168 millions prélevés sur les fonds du CNDS pour financer le sport spectacle, et en particulier le football. Des collègues ont proposé de trouver une source spécifique de financement afin de préserver le sport amateur et les collectivités territoriales. Que pensez-vous de cette excellente suggestion ?

En ce qui concerne le football, vous avez dit que les clubs de la Ligue étaient en déficit de 130 millions d’euros, et qu’il manquerait encore 160 millions en cas de mauvais accord sur les droits de retransmission. Pour accroître leurs recettes, dites-vous, les clubs devraient augmenter le montant de ces droits.

M. David Douillet, ministre. Non, je n’ai pas dit cela.

M. Marcel Rogemont. Dans ce cas, je retire ma question.

Le Président de la République avait proposé de porter à 3 % du budget national la part des crédits consacrés à la jeunesse et au sport. Nous en sommes loin. Que vous inspire l’écart entre cette promesse et sa réalisation ?

M. Jean-François Lamour. Quel bilan peut-on tirer de l’adoption de la deuxième version du code mondial antidopage ainsi que de l’installation de l’Agence mondiale antidopage et de l’Agence française de lutte contre le dopage ? La France est traditionnellement en pointe dans ce domaine : une première loi avait été adoptée au milieu des années 1960, Mme Buffet a fait évoluer le dispositif après les affaires ayant entaché le Tour de France de 1998, et les ministres successifs ont poursuivi cette politique.

On le sait, la proportion de contrôles positifs est très faible – de l’ordre de 2 ou 3 %. Nous avons toujours l’impression de rechercher une aiguille dans une botte de foin, si bien que l’Agence mondiale antidopage comme l’ensemble des fédérations partagent la même analyse : plutôt que d’augmenter sans cesse le volume des contrôles, il est préférable de mieux cibler ces derniers. Grâce au suivi longitudinal ou au dispositif ADAMS, il est possible d’effectuer des contrôles plus efficaces, de mieux dépenser en matière de lutte contre le dopage.

Par ailleurs, que devient le projet de construire, parmi une série d’équipements de haut niveau, une piscine olympique à Aubervilliers ? Alors que le président de la Fédération française de cyclisme a réussi à trouver les financements nécessaires pour la construction d’un vélodrome à Saint-Quentin-en-Yvelines, il semble que le choix d’un nouveau siège fédéral par la Fédération française de natation ait eu pour effet de remettre en question l’implantation à Plaine Commune du centre aquatique olympique.

M. Patrick Bloche. Comme mon collègue Michel Françaix, je souhaite que le plus grand nombre possible de sports différents soient diffusés à la télévision. Dans la mesure où des questions d’audience entrent en jeu, on peut estimer qu’une telle mission revient prioritairement au service public.

Un contrat d’objectifs et de moyens – COM – vient d’être signé entre l’État et France Télévisions, après avoir reçu l’aval des assemblées parlementaires – même si le groupe socialiste a voté contre. Le ministère des sports a-t-il été associé à son élaboration ? Un COM est valable cinq ans : le moment de sa signature est donc le plus adéquat pour promouvoir la diffusion des sports les plus confidentiels, à moins de réclamer au ministre de la culture la signature d’un avenant.

On nous annonce par ailleurs le lancement, avant les élections – et sans doute un peu précipitamment –, de six nouvelles chaînes gratuites, dont une sportive. L’appel d’offres a été lancé par le CSA. Au vu du dossier, pensez-vous que la création de cette chaîne contribuera à la diffusion d’autres sports, ou bien servira-t-elle à diffuser toujours les mêmes épreuves ?

M. Jean-Luc Pérat. Chaque année, depuis mon élection, j’interviens sur le budget du CNDS, ses objectifs, ses orientations, parce que je pense que l’on pourrait faire autrement avec une réelle volonté politique. Chaque année, j’enfonce le clou en espérant…

Vous souhaitez, monsieur le ministre, recentrer l’action du CNDS sur le développement du sport pour tous sur le plan territorial. Votre ministère conserve des fonctions d’observation, d’analyse et de prospective pour assurer le pilotage national des pratiques sportives pour tous. Le CNDS est devenu l’opérateur exclusif pour plusieurs missions, dont le soutien financier à la construction et à la rénovation des équipements sportifs. Et c’est sur ce point que je souhaite intervenir.

J’ai entendu plusieurs ministres des sports, dont vous-même, cautionner le principe de la quatrième maîtrise : après le savoir lire, écrire et compter, il s’agit du savoir nager. Mais je suis inquiet de l’état des lieux en matière de piscines. La maîtrise de la natation devrait être affichée comme une grande cause nationale, et le CNDS pourrait alors jouer tout son rôle. N’est-il pas de notre responsabilité, à nous les élus, de prendre les bonnes décisions et d’impulser une dynamique d’aménagement pertinente et cohérente ?

Chaque année, nous faisons le triste constat d’un nombre trop important de noyades, notamment chez les jeunes. En outre, trop de jeunes quittent le cursus scolaire sans une maîtrise minimale des fondamentaux en natation, alors que les instructions officielles sur ce point sont précises. Cela leur interdit de fait toute activité aquatique, sportive ou ludique. Il existe en France des zones blanches, qui pénalisent notre jeunesse et ne lui donnent pas les mêmes chances qu’ailleurs. L’État a donc toute légitimité pour agir après avoir élaboré un véritable plan de bataille avec les territoires dépourvus d’équipements. Il faut attribuer au CNDS, sur une période de trois à cinq ans, des crédits destinés spécifiquement à la pratique de la natation, ainsi qu’à la construction et à la rénovation des bassins. Ce serait adresser un message fort à nos concitoyens, comme lors de l’opération des « mille-clubs ».

M. Henri Nayrou, rapporteur spécial. Je note que le Gouvernement fait enfin preuve de lucidité sur certains dossiers. Ainsi, s’agissant du Stade de France, il aura fallu attendre le projet de la Fédération de rugby pour qu’il admette l’évidence : le contrat de concession est en coma dépassé. De même, le ministre a su tirer les leçons de l’échec de la candidature d’Annecy. Il est également assez rare qu’au niveau ministériel, on admette la gravité de l’état financier du football français ou la nécessité de taper fort afin d’éradiquer le dopage. Quant aux paris sportifs, les problèmes qu’ils posent semblent se circonscrire, pour la majorité, à la question du changement d’assiette.

Si j’ai bien entendu vos propos, monsieur le ministre, vous seriez d’accord pour revenir sur la loi issue de la proposition du sénateur Humbert, et dont l’article 1er a permis aux agents sportifs d’être rémunérés par les clubs. C’est à mes yeux une disposition scélérate : après avoir reconnu qu’une pratique était illégale, le Gouvernement et la majorité n’avaient en effet rien trouvé de mieux pour l’éradiquer que de la légaliser. Où est le bon sens ? Il est temps de moraliser un monde où la profusion d’argent a laissé une odeur de soufre, et donc de supprimer l’article 1er de la loi du 9 juin 2010.

En ce qui concerne le CNDS, je ne suis pas satisfait de votre réponse. Le problème n’est pas dans le fait de financer la construction de stades pour le championnat des nations ni dans le fait de plonger des doigts crochus dans les fonds du centre pour y parvenir ; il est d’éviter que cela ne remette en cause la politique du sport pour tous. Des solutions existent : pour ce qui concerne les stades, elles résident dans les amendements de M. Depierre et de Mme Fourneyron ; s’agissant des fonds du CNDS, j’en proposerai un autre visant à modifier le taux du prélèvement sur le chiffre d’affaires de la Française des jeux – qui devrait s’élever à 11 milliards d’euros à la fin de l’année –, pour le porter de 1,8 à 2,1 %.

Comment ne pas remarquer l’évaporation des missions d’État ? C’est du reste une évidence pour les mouvements sportifs départementaux, pour les élus et pour les acteurs de terrain que le sport a disparu des écrans radars de l’État sur les territoires. Quand les acteurs départementaux sont obligés de se rendre à la préfecture de région pour résoudre leurs problèmes, c’est que l’État ne remplit plus sa mission de solidarité territoriale.

Je finis en notant que la prochaine organisation des commissions élargies devrait comporter un temps de parole plus long pour les rapporteurs.

M. Yves Censi, président. Je vous suggère d’en faire la proposition à Jean-Marc Ayrault qui pourra la soumettre à la prochaine conférence des présidents.

M. Michel Diefenbacher. Nous en sommes tous conscients, il convient d’améliorer la qualité de l’encadrement des clubs sportifs amateurs : toutefois, à force de vouloir le professionnaliser, ne risque-t-on pas de tuer le bénévolat ?

Je prendrai l’exemple du cyclisme. L’encadrement des jeunes coureurs est nécessaire en raison du risque du dopage : aussi chacun peut-il comprendre que la fédération française de cyclisme ait eu à cœur d’édicter des mesures très contraignantes à l’égard des clubs.

Aujourd'hui un club, pour pouvoir monter en division nationale 1 ou 2 doit disposer d’un budget minimal et son encadrement doit être assuré par un entraîneur et par un directeur sportif salariés. Or, dans les petits clubs sportifs, qui atteignent parfois un bon niveau de compétition, l’encadrement est assuré par des bénévoles qui ont toutes les qualifications nécessaires sans rien coûter au club.

Personne ne proteste contre l’obligation de recourir à des salariés : les bénévoles sont satisfaits de devenir salariés et les dirigeants des clubs, qui ne peuvent pas s’y opposer, se retournent vers la collectivité. Or, comme le ministre de l’éducation nationale l’a rappelé tout à l’heure, nous sommes entrés dans une période de grande rareté de la ressource publique. Ou bien le club est adossé à une commune riche et il conserve son classement, ou il ne l’est pas, et il est déclassé.

Certes, cette réglementation dépend non de l’administration mais des fédérations sportives. Toutefois, n’est-il pas possible d’intervenir ? Le mieux est l’ennemi du bien : or nous confondons actuellement la qualification de l’encadrement avec sa professionnalisation. Dès lors que les conditions de qualification sont remplies, pourquoi recourir à des salariés ? Ne vaudrait-il pas mieux préserver le bénévolat chaque fois que c’est possible ?

M. Bernard Depierre, rapporteur pour avis. Si la France a encore beaucoup de progrès à accomplir pour le sport, elle a atteint, dans un grand nombre de disciplines, des résultats exceptionnels qu’il convient de saluer et qui sont le fruit de la politique mise en œuvre avec les centres de formation des clubs, avec les pôles régionaux et nationaux et avec l’INSEP, par lequel, on l’ignore trop souvent, est passée la moitié des athlètes français médaillés.

Il faut souhaiter, par ailleurs, que l’appel d’offres du CSA fasse sa place à une chaîne sportive ouverte à tous les sports, notamment féminins, les moins médiatisés, afin que ceux-ci puissent trouver des moyens supplémentaires.

Je souhaite aussi que les clubs utilisent davantage les ressources du mécénat sportif : il y a là des possibilités importantes, même dans une période difficile.

Il faut absolument s’appuyer, pour la réalisation de grands équipements tels que les stades, sur le partenariat public-privé, les collectivités locales ne pouvant pas à elles seules effectuer de tels investissements. Mais je suis convaincu que la ligne budgétaire de 50 millions d’euros dédiée au plan « Arena » permettra à la France de rattraper son retard en matière de grandes salles.

Je tiens enfin à saluer l’Agence française de lutte contre le dopage, qui est probablement la plus performante du monde. Vous continuez de la soutenir, c’est bien car il faut absolument que l’AFLD remplisse ses obligations et la lutte contre le dopage est une des actions essentielles que doit mener le ministère des sports.

Le sport est un moyen de rencontre : ne cassons pas ce qui est en train de se construire en dépit de moyens parfois insuffisants !

M. David Douillet, ministre des sports. La mission « Sport, jeunesse et vie associative » intègre bien le programme 219 dédié au sport. Ce programme doit évidemment être conservé. La politique sportive est importante pour notre pays : elle concerne des millions de personnes. C’est pourquoi elle mérite une vraie lisibilité budgétaire. On retrouve de fait dans cette mission tous les crédits d’intervention, les crédits de prestations, toutes les conventions d’objectifs avec les fédérations qui bénéficient d’un agrément, les crédits de fonctionnement, notamment ceux qui sont destinés à la lutte contre le dopage, etc.

Lorsque les fédérations sont agréées par le ministère, vous le savez, la loi leur reconnaît une mission de service public. Celles qui reçoivent une délégation pour organiser la pratique d'une discipline sportive passent avec l'État un contrat, qui justifie le soutien financier qui leur est accordé, l’enjeu demeurant le sport.

Madame Fourneyron, votre critique du budget est sévère alors même que j’ai fourni deux chiffres qui auraient dû adoucir quelque peu votre jugement : le budget du CNDS a augmenté de 58 % de 2006 à 2012 ; quant au budget du sport, il a progressé de 56 % depuis 2002. J’aimerais évidemment que les chiffres soient plus élevés encore !

Mme Valérie Fourneyron. Je vous ai plaint.

M. David Douillet, ministre des sports. L’an prochain, ce budget restera stable, ce qui est une belle victoire. De plus, la part des ménages et des collectivités territoriales représente 36 milliards d’euros. Nous aurions évidemment tous aimé que le Président de la République puisse réaliser sa promesse de porter la part du budget du sport à 3 % du budget de l’État, mais avez-vous oublié la crise que nous traversons, qui est la plus terrible de notre histoire ?

Je tiens également à rectifier un chiffre : la part du CNDS dans le budget consolidé des sports ne s’élève pas à 53 %, comme vous l’avez affirmé, mais à 33 %. En effet, sur 861 millions de budget consolidé, avec le programme support, le CNDS s’élève à 283,6 millions,.

Vous avez également évoqué l’augmentation du loyer de l’INSEP : elle est due au nouveau modèle économique de l’institut, fondé sur un partenariat public-privé. Cela étant, M. Thierry Maudet m’a confirmé que ce loyer restait dans la moyenne française pour ce type d’établissements. Il n’est pas passé du simple au double. Je tiens du reste à saluer l’action de l’ex-ministre des sports Jean-François Lamour, ici présent, qui est à l’origine de ce partenariat public-privé. J’ai vécu quinze ans comme athlète au sein de l’INSEP : Dieu sait si l’institut avait un besoin vital de cette rénovation car il était en danger de mort. Or, comme l’a rappelé M. le rapporteur pour avis, 50 % de nos médaillés en sont issus.

Le directeur de l’AFLD m’a assuré qu’il pouvait remplir sa mission avec les moyens dont l’agence était dotée. Certes, il souhaiterait bénéficier de crédits plus importants pour développer son action, mais il n’est pas le seul dans son cas. Encore une fois, nos budgets sont contraints et chacun doit faire avec ce qu’il a. Nous pourrons continuer de mener une lutte contre le dopage digne de ce nom.

M. Jean-François Lamour. Qu’en est-il du changement de stratégie ?

M. David Douillet, ministre des sports. Je tiens à vous rassurer sur ce point, monsieur Lamour. C’est une des questions que j’ai posées au directeur de l’AFLD : plutôt que de « saupoudrer » les contrôles, il vaut mieux affiner l’expertise en ciblant les sports, les personnes et les secteurs. Tous les athlètes qui iront aux jeux Olympiques devront être exemplaires. Nous n’en enverrons aucun sur lequel pèserait le moindre soupçon.

Il existe déjà une incrimination pénale à l’encontre des systèmes mafieux liés au dopage. Instaurer un délit pénal à l’encontre des athlètes qui se dopent ne ferait que compléter le dispositif.

Je tiens à saluer l’action menée par Mme Buffet lorsqu’elle était ministre des sports : ce n’est pas sans raison que nous bénéficions en la matière d’une reconnaissance internationale – ce qui constitue une raison de plus de nous montrer également exemplaires en ce qui concerne l'Autorité de régulation des jeux en ligne, car on suit de près ce que nous faisons et, en tant que pays pionnier, nous sommes en mesure d’influencer les décisions que prendra l’Europe sur le sujet.

Madame Buffet, seule une amélioration de la situation économique permettra de doter le ministère d’une plus large autonomie.

Mme Marie-George BuffetFaites rentrer des recettes !

M. David Douillet, ministre des sports. Cela suppose pour notre pays de produire des richesses. Je salue la politique du Président de la République en la matière : les 35 milliards du fonds souverain d’investissement concourront à la production de ces richesses et permettront de relancer notre industrie qui en a bien besoin. Nous commençons déjà à voir les effets de cette action. Je connais l’intérêt du Président de la République et du Gouvernement pour le sport et je ne doute pas que, dès que ce sera possible, ce ministère aura un budget à la mesure de nos ambitions.

M. le rapporteur pour avis a raison : il est important d’associer à la construction et à la gestion des grandes structures sportives le secteur privé. Les partenariats public-privé sont gages d’une politique plus efficace alors que les projets portés par les seules collectivités locales – et c’est normal, élus et administration n’étant pas spécialistes de ces sujets techniques – reviennent entre 20 et 30 % plus cher que les projets réalisés par le privé.

Mme Marie-George Buffet. Ce n’est pas la réalité.

M. David Douillet, ministre des sports. Si. C’est pourquoi je veux créer, au sein du ministère, une cellule dont le rôle sera de conseiller les collectivités locales. Cette cellule référent, véritable source d’informations et d’expertise, les aiguillera dans le choix du projet, du montage financier et de ceux qui réaliseront l’équipement.

Monsieur Berdoati, les 50 millions d’euros dédiés à l’équipement des grandes salles n’ont pas disparu ! Une commission de labellisation aidera les collectivités à porter les projets. Elle vérifiera la pertinence du modèle économique et du choix architectural, tant dans sa jauge que dans sa conception. Et c’est elle qui autorisera le versement de ces crédits.

J’ai déjà rencontré Patrick Braouezec au sujet de la piscine d’Aubervilliers. Il a malheureusement vu partir la Fédération française de natation mais continue de défendre ce projet. Compte tenu de la décision de la fédération – que je vérifierai tout de même auprès de son président, M. Francis Luyce –, les dimensions de cette piscine seront revues à la baisse mais le Grand Paris a besoin de cette structure dont l’emplacement, à côté du Stade de France, est judicieux.

Il faut toutefois se rappeler que les piscines coûtent très cher : il convient donc d’étudier avec beaucoup de soin leur modèle économique. M. Braouezec est très ouvert sur la question : il est favorable à des activités annexes procurant des ressources supplémentaires pour compenser des coûts d’exploitation forcément élevés.

Nous procédons actuellement à l’audit d’un schéma de cohérence territoriale qui prend en compte les programmes d’équipement : nous avons trop souvent assisté à une répartition aléatoire d’équipements qui coûtent très cher à construire comme à entretenir. Cet éparpillement va à l’encontre du bon sens. Il est temps de procéder à une rationalisation : la réforme territoriale devrait nous y aider. L’ère de l’élu qui se fait plaisir en construisant telle ou telle structure est finie ! Il faut mutualiser les efforts et ne plus construire chacun de son côté de petites installations qui ne répondent même pas à la demande des citoyens. Le savoir-nager est obligatoire au collège : nous devons tout mettre en œuvre pour mener à bien le plan piscine, engagé à l’échelle nationale et rendu nécessaire par le vieillissement des structures existantes. La réforme de la construction et celle des méthodes d’exploitation permettent aujourd'hui de baisser le coût de piscines ; 26 % des subventions d’équipement du CNDS y seront consacrés.

Je suis évidemment favorable à une télévision sportive dans le cadre de l’ouverture des canaux de la TNT : cela fait des années que je me bats en ce sens. Chacun connaît ici la discipline dont je suis issu. Je sais ce qu’est la prééminence de certains sports sur les autres : j’en ai moi-même souffert comme consultant ou commentateur. Cette situation est anormale.

J’ai commencé à expliquer au ministre de la culture que le monde sportif français ne se limite pas à deux ou trois disciplines. Le milieu de la télévision doit s’ouvrir, d’autant que les Français s’intéressent à toutes sortes de disciplines dès lors que le maillot de l’équipe de France est présent. Il est vrai que, culturellement, le milieu de la télévision demeure imperméable à ce fait. Nous luttons donc. La multiplication des chaînes a certes amélioré la situation mais insuffisamment, d’autant que le comportement des téléspectateurs peut conforter cette timidité : le moindre match de football fait trois fois plus d’audience que le championnat du monde d’une de nos disciplines olympiques. Même le modèle économique de l’audiovisuel public demeure trop dépendant de la publicité : tant qu’il sera contraint d’assurer un certain niveau d’audience pour garantir ses ressources publicitaires, ses choix resteront malheureusement les mêmes que ceux de l’audiovisuel privé.

Il faut savoir également que le coût d’une chaîne sportive s’élèvera au moins à 15 millions l’an : son modèle économique devra tenir la route ! Il ne faudrait pas que ce projet se retourne contre le monde du sport, notamment contre le Comité national olympique et sportif français Il s’agit donc d’être prudent.

Voilà quinze ans que je me bats également pour la retraite des sportifs de haut niveau : comment n’y serais-je pas favorable ? Le nombre de trimestres prévu – 16 – ne me satisfait pas, mais il faut savoir que le dispositif sera révisé dans quatre ans : en attendant, il faut évaluer le coût de la mesure, ce qui implique de connaître le nombre de sportifs concernés. Mon souhait est de parvenir à six années, la durée moyenne de la carrière d’un athlète. Le projet actuel constitue toutefois une avancée majeure car, jusqu’à présent, tous les sportifs qui n’ont pas cotisé devront travailler très tard alors même que la pratique intensive du sport les a parfois abîmés. Lorsque Jean-François Lamour était ministre, nous étions parvenus à une très bonne solution qui, malheureusement, n’a pas été retenue par son successeur. Nous y arrivons enfin !

S’agissant de la professionnalisation de l’encadrement des clubs amateurs et de la réglementation mise en place par la Fédération française de cyclisme, peut-être pourrait-on trouver une solution intermédiaire. Je comprends la position du président de la fédération, David Lappartient, que je rencontrerai prochainement : lorsqu’un club amateur, fonctionnant avec des bénévoles, se met à engranger les bons résultats, il peut rapidement se retrouver aux portes du professionnalisme, confronté à de nouvelles exigences, avec l’intervention de partenaires privés et l’apparition de contraintes en termes d’image. Je sais que le président Lappartient aspire à favoriser la montée en excellence de ces clubs. Toutefois – et même si le ministre n’a pas à s’ingérer dans les affaires d’une fédération –, je lui conseillerais de prévoir une phase transitoire entre le statut de club amateur et celui de club professionnel, par exemple en ne rendant pas obligatoire le statut de salarié pour l’ensemble du personnel d’encadrement.

Monsieur Nayrou, vous estimez que le sport a disparu des écrans radars de l’État dans nos territoires.

M. Henri Nayrou, rapporteur spécial. C’est une évidence !

M. David Douillet, ministre des sports. Hier, les directeurs régionaux m’ont tenu un autre discours. « Évidemment, m’ont-ils dit, nous devons désormais nous partager entre plusieurs missions : la cohésion sociale, la santé,...

M. Henri Nayrou, rapporteur spécial. ...les services vétérinaires,…

M. David Douillet, ministre des sports. …mais quel bonheur nous avons de travailler pour le sport ! Nous avons affaire à des gens passionnés, intéressants, qui nous écoutent et ont envie d’agir. »

Je vous garantis que c’est ce qu’ils m’ont dit ! Bien sûr, ils sont victimes de réductions d’effectifs, mais ils ont le mérite de se remettre en question, de se remobiliser, de revoir leurs schémas de fonctionnement et de trouver de nouvelles solutions. Je vous assure que les revendications qui m’ont été transmises hier n’étaient pas à propos d’une disparition du sport, bien au contraire.

M. Henri Nayrou, rapporteur spécial. Monsieur le ministre, je ne partage pas votre point de vue. Pour ma part, je suis sur le terrain, et j’y entends des doléances. Certes, on n’en parle pas au 20 heures, mais elles alimentent les conversations autour des terrains de sport.

M. David Douillet, ministre des sports. C’est normal : les références sont à ce qu’on connaît ; l’avenir nous préoccupe, c’est un saut dans l’inconnu. Il s’agit d’une réaction humaine. Il n’empêche que les directeurs régionaux et départementaux et leurs équipes ont entrepris de relever le nouveau défi qui s’offre à eux.

M. Henri Nayrou, rapporteur spécial. Quand l’État a abandonné les routes nationales, une loi a donné aux départements compétence sur celles-ci. Aujourd’hui, l’État abandonne le sport dans les territoires sans aucun transfert de compétence. Je regrette d’ailleurs que les grandes lois de décentralisation aient oublié le secteur sportif.

M. David Douillet, ministre des sports. Monsieur Nayrou, si l’État abandonnait vraiment le sport, je ne serais pas ministre des sports ! Par ailleurs, les collectivités locales ont une expertise dans ce domaine ; ce sont elles qui sont au contact direct de nos concitoyens et qui peuvent évaluer les besoins. Il est donc normal qu’elles aient cette compétence. Nous, nous intervenons au niveau des fédérations, qui agissent elles-mêmes sur les clubs.

Je le répète à tous les présidents de fédération : ayez une politique de clubs. Ne dissocions pas le sport de haut niveau et le sport pour le plus grand nombre ; ce serait aussi absurde que de vouloir dissocier la tête du corps ! L’un alimente l’autre, et réciproquement. C’est ce cercle vertueux que nos dirigeants sportifs doivent comprendre et mettre en pratique, à tous les niveaux.

On a beaucoup parlé de « sport santé », de « sport éducation », de « sport valeur » ; peut-être serait-il temps de revenir à l’essence de la pratique sportive, à savoir le plaisir et la passion. Oublions un peu les impératifs de la compétition, notamment pour les adolescents, de manière à retenir ces générations qui ont tendance à zapper et à sortir trop vite du milieu sportif. Remettons l’accent sur les notions de plaisir et de qualité.

Mme Marie-George Buffet. Monsieur le ministre, pourriez-vous répondre à ma question sur le développement du sport féminin ?

M. David Douillet, ministre des sports. Nous y consacrerons tous les moyens possibles. Le sport féminin se porte bien si l’on en juge par le nombre des médailles, mais il est vrai que du point de vue du sport de masse, son potentiel n’est pas assez exploité.

Pour y remédier, il faut travailler avec les fédérations. On note une forte déperdition au moment de l’adolescence ; j’en discutais hier avec une jeune femme qui m’expliquait qu’elle avait décidé d’arrêter le sport parce que, son corps changeant, elle ne se sentait plus en adéquation avec sa pratique antérieure, et qu’elle craignait les effets que pourrait avoir le sport sur son corps. Il faut faire œuvre de pédagogie, et les fédérations sont nos meilleurs interlocuteurs en la matière, dans la mesure où les associations, les clubs peuvent aussi faire du prosélytisme.

S’agissant de la Fédération sportive et gymnique du travail, nous avons demandé le fichier des licences pour réaliser des études. Nous allons débloquer la situation et tout rentrera dans l’ordre.

M. Yves Censi, président. Monsieur le ministre, j’ai été particulièrement sensible à votre attachement à nous faire partager votre vision et vos convictions. Nous vous remercions de mettre votre pugnacité et votre énergie au service de ce beau ministère.

La réunion de la commission élargie s’achève à dix-huit heures dix.

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