PROJET DE LOI DE FINANCES POUR 2000
Rapport général.— Tome II
Examen de la première partie

Pour en faciliter la consultation, ce rapport a été découpé en 8 fichiers

Articles 1er
à après 3

Articles 4
à après 7

Articles 8 à 11

Articles 12
à après 14

Articles 15 à 21

Article 22

Articles 23 à 29

Articles 30 à 36

Article 23 Alignement à 4,5% du taux de la taxe forfaitaire sur les bijoux, objets d’art, de collection ou d’antiquité

Article 24 : Taxe sur les installations nucléaires de base

Article 25 : Recettes des missions d’ingénierie publique

Article 26 : Contribution des organismes collecteurs du 1% logement

Article 27 : Dispositions relatives aux affectations

Article 28 : Actualisation des taux de la taxe sur les huiles perçue au profit du budget annexe des prestations sociales agricoles

Article 29 : Affectation du droit de consommation sur les tabacs manufacturés

Retour au sommaire du rapport

Article 23

Alignement à 4,5 % du taux de la taxe forfaitaire sur les bijoux, objets d'art, de collection ou d'antiquité.

Texte du projet de loi :

I. Le I de l’article 150 V bis du code général des impôts est ainsi modifié :

1° au deuxième alinéa, le taux de " 7 % " est remplacé par le taux de " 4,5 % " ;

2° le troisième alinéa est supprimé.

II. Les dispositions du I s’appliquent aux cessions réalisées à compter du 1er janvier 2000.

Exposé des motifs du projet de loi :

Le taux de la taxe sur les ventes de bijoux, objets d’art, de collection ou d’antiquité effectuées par les particuliers est de 4,5 % lorsque les objets précieux sont vendus aux enchères publiques en France ou dans un autre Etat membre de la Communauté européenne et de 7 % lorsqu’ils sont vendus autrement qu’aux enchères publiques ou exportés.

Il est proposé d’appliquer un taux unique de 4,5 % à toutes les ventes portant sur ces biens quel que soit le mode de vente.

Observations et décision de la Commission :

Le présent article vise à unifier le taux de la taxe perçue lors des cessions de bijoux, objets d’art, de collection ou d’antiquité, en prévoyant d’appliquer, quel que soit le mode de cession, un taux unique de 4,5%.

I.- Un régime actuellement différencié

· La loi n° 76-660 () du 19 juillet 1976 portant imposition des plus-values et création d’une base forfaitaire sur les métaux précieux, les bijoux, les objets d’art, de collection ou d’antiquité, a introduit un régime spécifique d’imposition des plus-values réalisées lors de la cession de bijoux, objets d’art, de collection ou d’antiquité.

Posant le principe d’une taxation généralisée des plus-values réalisées par les particuliers dans le cadre de la gestion de leur patrimoine privé, la loi du 19 juillet 1976 s’est, en effet, traduite par la création d’une taxe forfaitaire, libératoire de l’impôt sur le revenu, sur les plus-values portant sur ce type de biens.

L’instauration de cette taxe a été inspirée, à l’origine, par des motifs de commodité. Dans la majorité des cas, en effet, des éléments essentiels au calcul de la plus-value selon les règles de droit commun au titre de l’impôt sur le revenu, tels que le prix d’acquisition ou la durée de possession, ne sont pas connus. Aussi était-il plus simple d’introduire une taxe forfaitaire.

· Le régime de cette taxe est relativement simple dans son mécanisme.

â Sont soumis à une taxe forfaitaire les cessions de bijoux, objets d’art, de collection ou d’antiquité, réalisées par des particuliers, dont le prix de vente est supérieur à 20.00 francs. Ce seuil introduit en 1976 et jamais modifié depuis cette date, s’applique à chaque vente. En pratique, cette vente s’apprécie objet par objet, sauf lorsque les objets vendus ou exportés forment un ensemble ou lorsque les cessions séparées ont pour but d’éluder la taxation.

â Les biens concernés sont définis par référence à la nomenclature du tarif extérieur commun. Il s’agit, en pratique, des rubriques suivantes :

57-01, 57-02, 57-03, 57-05, 58-05 : Tapis et tapisseries ;

71-01 : Perles fines ou de culture, ni montées, ni serties ;

71-02 : Diamants ni montés ni sertis (à l’exclusion des biens à usage industriel) ;

71-03 : Pierres gemmes, ni montées, ni serties (à l’exclusion des biens à usage industriel) ;

71-04 : Pierres synthétiques ou reconstituées, ni montées, ni serties (à l’exclusion des biens à usage industriel) ;

71-13 : Articles de bijouterie ou de joaillerie et leurs parties en métaux précieux (y compris les ébauches et articles incomplets, à moins qu’ils ne soient destinés à la fonte) ;

71-14 : Articles d’orfèvrerie et leurs parties en métaux précieux (y compris les ébauches et articles incomplets, à moins qu’ils ne soient destinés à la fonte) ;

71-15 : Autres ouvrages en métaux précieux ;

71-16 : Ouvrages en perles fines ou de culture, en pierre gemme ou en pierre synthétique (à l’exclusion des biens à usage industriel) ;

71-17 : Bijouterie de fantaisie ;

91-01 : Montres-bracelets, montres de poche et similaires en métaux précieux ;

91-13 : Bracelets de montres et leurs parties en métaux précieux ;

97-01 : Tableaux, peintures (y compris les aquarelles, gouaches, pastels et dessins à la main) ;

97-02 : Gravures, estampes, lithographies originales ;

97-03 : Statues et sculptures originales, émaux et céramiques originaux ;

97-04 : Timbres-poste et assimilés ;

97-05 : Objets de collection (zoologiques, botaniques, minéralogiques, historiques, archéologiques, paléontologiques, ethnographiques, numismatiques, etc.) ;

97-06 : Objets d’antiquité ayant plus de cent ans d’âge.

Cette nomenclature appelle, toutefois, cinq remarques :

– L’or et l’argent travaillés (71-14, 71-15) sont classés dans la catégorie des bijoux, et non dans celle des métaux précieux. Cette règle comporte une exception : les monnaies d’or et d’argent (71-18), que le législateur a assimilées expressément aux métaux précieux. Sont toutefois considérées comme objets de collection, pour l’application de la loi, les monnaies datant d’avant 1800, et celles qui sont vendues aux enchères publiques.

– Les meubles meublants entrent dans la rubrique 97-06 s’ils ont plus de cent ans d’âge. En présence d’un meuble âgé de moins de cent ans et dont le prix excède 20.000 francs, la taxe n’est due que si le bien revêt le caractère d’objet de collection.

– Sont également considérés comme objets de collection, les livres et manuscrits de moins de cent ans d’âge, mais dont la valeur unitaire est supérieure à 20.000 francs.

– D’une manière générale, le point de savoir si un bien constitue un objet de collection est une question de fait qui est appréciée par l’administration au cas par cas, sous le contrôle du juge de l’impôt.

A cet égard, divers éléments peuvent être pris en considération, à savoir : l’ancienneté ; la rareté ; l’importance de son prix, qui doit excéder sensiblement la valeur du même bien destiné à un usage courant ; l’arrêt de la fabrication du bien ; la provenance ou la destination ; l’intérêt historique qu’il présente ; le fait qu’il ait appartenu à un personnage célèbre.

La qualification d’objet de collection découle de l’application d’un ou plusieurs des critères ainsi définis.

– Ces mêmes critères doivent également être retenus pour caractériser un véhicule de collection. Ainsi, l’ancienneté du véhicule vendu est un caractère suffisant sans être un élément nécessaire. De même, un véhicule même récent, peut être considéré comme un objet de collection dès lors qu’il présente l’une ou l’autre des caractéristiques susvisées.

Soulignons que, lorsqu’elles ne constituent pas des véhicules de collection, les voitures automobiles sont expressément exclues de l’imposition des plus-values sur biens meubles (code général des impôts, article 150 D 1°).

â L’opération imposable est la vente, en France ou dans un Etat membre de l’Union européenne, de l’objet précieux, c’est-à-dire toute transaction, y compris la cession de gré à gré entre particuliers, portant sur les objets visés à l’article 150 V bis du code général des impôts.

Sont assimilées à des ventes :

– conformément aux principes généraux du droit et de la jurisprudence, les échanges (à considérer comme des ventes croisées) et les apports ;

– conformément à une disposition expresse de la loi, les exportations () autres que temporaires (article 150 V du code général des impôts).

Sont, en revanche, exonérées de la taxe (code général des impôts, articles 150 V bis II et 150 V quater) :

– les cessions aux musées nationaux français, aux musées classés ou contrôlés par l’Etat français ou une collectivité locale française, aux bibliothèques de l’Etat, des collectivités locales et des établissements publics français, ainsi que les dations d’œuvres d’art en paiement de droits de succession, sur agrément (code général des impôts, article 1716 bis) ;

– les cessions, réalisées à compter du 15 octobre 1993, faites à un service d’archives de l’Etat, d’une collectivité locale ou d’une autre collectivité publique française ;

– les exportations temporaires d’objets précieux d’une valeur unitaire supérieure à 20.000 francs ou, quelle que soit leur valeur, de métaux précieux.

â Les personnes imposables sont les particuliers résidant en France, les associations, ainsi que toute personne morale, quelle que soit sa forme, qui procède à des cessions d’objets précieux et dont la plus-value ne peut être assujettie à l’impôt sur le revenu ou à l’impôt sur les sociétés. Echappent à la taxe, sous réserve d’exception, les professionnels, les entreprises et les non-résidents.

Sont, en effet, exonérées :

– les entreprises industrielles ou commerciales qui vendent des objets précieux, même si la vente de ces biens ne constitue pas l’activité essentielle de l’entreprise ;

– les personnes qui n’ont pas leur résidence habituelle en France, au sens de la réglementation douanière, et qui, soit exportent un objet précieux, soit cèdent un objet précieux lors d’une vente, en France, aux enchères publiques ;

– les artistes qui vendent, en France ou dans un Etat membre de l’Union européenne, ou exportent leurs propres œuvres, à condition d’en avoir conservé la propriété depuis leur création. Le profit réalisé constitue un bénéfice professionnel imposable au titre des bénéfices non commerciaux.

Il convient de souligner que les particuliers domiciliés fiscalement en France voient donc leurs cessions d’objets précieux réalisées en France ou dans l’Union européenne soumises, dans les mêmes conditions, à une taxe forfaitaire, et ce, qu’elles aient lieu en France ou dans les autres Etats membres de l’Union européenne.

En revanche, les personnes n’ayant pas leur domicile fiscal en France ne voient leurs cessions, sur le territoire national, imposées que s’il s’agit d’une vente privée. Les cessions d’objets précieux réalisées par une personne n’ayant pas son domicile fiscal en France par le biais d’une enchère publique en France, sont, en revanche, exonérées.

Compte tenu du fait que les exportations de biens régulièrement acquis par des non-résidents sont exonérées de toute taxation et qu’aucune imposition ne pèse sur les opérations dénouées, par des non-résidents, dans un Etat membre de l’Union européenne, l’ensemble des ventes opérées par des non-résidents en dehors du territoire national ne sont soumises à aucune taxation au titre des plus-values réalisées.

Ces différents éléments sont regroupés dans le tableau ci-après.

         

TAXATION DE LA PLUS-VALUE RÉALISÉE SUR LES VENTES DE BIJOUX, OBJETS D’ART, DE COLLECTION OU D’ANTIQUITÉ

 

Vente aux enchères publiques

Ventes privées



Exportations

 

en France

Dans un Etat membre de l’UE

en France

Dans un Etat membre de l’UE

 

Résident fiscal en France

4,5%

4,5%

7%

7%

7%

Non-résident fiscal en France

Non taxé

Pas de taxe française

7%

Pas de taxe française

Pas de taxe pour les biens régu-lièrement acquis

â La taxe est calculée sur le prix de vente (), en France et, depuis le 1er janvier 1993, dans un autre Etat membre de l’Union européenne, ou sur la valeur en douane, éventuellement redressée, s’il s’agit d’une exportation.

Toutefois, une décote est prévue pour les cessions de bijoux, objets d’art, de collection ou d’antiquité, lorsque le prix de vente ou la valeur est comprise entre 20.000 et 30.000 francs. La décote est alors égale à la différence entre 30.000 francs et le prix de vente (ou la valeur en douane).

â Le taux de la taxe, fixé par l’article 150 V bis du code général des impôts, est différent selon qu’il s’agit d’une vente réalisée par enchère publique ou d’une autre catégorie de vente. Il s’élève à :

– 4,5% pour les ventes, en France ou dans un Etat membre de l’Union européenne, par enchère publique ;

– 7% pour les ventes, en France ou dans un Etat membre de l’Union européenne, privées ;

– 7% pour les exportations vers un pays tiers.

Il convient également d’indiquer que, depuis le 1er février 1996 et jusqu’au 31 janvier 2004, la contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS ()) s’ajoute à cette imposition, à hauteur de 0,5% (dispositions reprises aux articles 1600-0K et 1660-0L du code général des impôts).

L’existence de deux taux distincts, selon qu’il s’agit d’une vente par enchères publiques ou d’une autre catégorie de vente, se justifiait à l’origine par la volonté des pouvoirs publics de privilégier les ventes publiques : aussi un taux réduit leur a-t-il été appliqué. Il semble également que les possibilités de fraude étant considérées comme plus importantes pour les ventes privées, le législateur de 1976 a souhaité compenser ce risque par un taux d’imposition plus élevé.

Compte tenu de ces tarifs, le produit de la taxe s’est élevé, comme le montre le tableau ci-dessous, à plus de 100 millions de francs en 1998. Plus de 55% des recouvrements sont générés par les ventes aux enchères publiques.

                 

PRODUITS DE LA TAXE FORFAITAIRE

(en millions de francs)

 

1990

1991

1992

1993

1994

1995

1996

1997

1998

Recouvrement DGI

176

131

95,5

98,8

95,9

96

101

98

114

dont :

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Ventes aux enchères publiques (4,5%)

117

82

58

56,8

56,4

65,7

78

68

79

Autres ventes d’objets précieux (7%)

59

49

37,5

42

39,5

30,3

23

30

35

Recouvrement Douanes (exportations)(a)

52

25

24

21

21,7

14,7

21

17

29

Montant total

228

156

119,5

119,8

117,6

110,7

122

115

143

(a) Ce chiffre recouvre également la taxe perçue sur les plus-values réalisées lors des exportations de métaux précieux.

Source : Ministère de l’économie, des finances et de l’industrie.

â Indiquons, enfin, que le vendeur ou l’exportateur ont la possibilité d’opter pour le régime d’imposition de droit commun des plus-values.

Les personnes physiques ou sociétés de personnes qui résident en France peuvent, en effet, opter pour le régime de droit commun des plus-values sur biens meubles lorsqu’elles cèdent ou exportent des bijoux, objets d’art, de collection ou d’antiquité et qu’elles sont en mesure d’établir de manière certaine les dates et prix d’acquisition (code général des impôts, article 150 V sexies).

La plus-value est alors déterminée suivant les règles prévues aux articles 150 A et suivants du code général des impôts. Elle est calculée par différence entre le prix de cession et le prix d’acquisition. Pour les biens cédés au-delà d’un an de détention, il est tenu compte de l’érosion monétaire et de la durée de détention (abattement de 5% par année de détention au-delà de la première). La plus-value est ainsi exonérée à l’expiration d’un délai de détention de vingt-et-un ans.

· En l’état actuel des informations dont dispose votre Rapporteur général, il ne semble pas que le régime français d’imposition des plus-values soit fiscalement pénalisant pour le marché national de l’art.

Le régime français serait même plutôt favorable au regard des taux appliqués par les deux pays leaders dans le domaine des enchères publiques, à savoir le Royaume-Uni et les Etats-Unis.

RÉGIME D’IMPOSITION DES PLUS-VALUES RÉALISÉES PAR UN PARTICULIER, À TITRE NON PROFESSIONNEL, LORS DE LA VENTE DE MÉTAUX PRÉCIEUX, BIJOUX, OBJETS D’ART, DE COLLECTION ET D’ANTIQUITÉ, DANS LES PRINCIPAUX ETATS MEMBRES DE L’UNION EUROPÉENNE ET AUX ETATS-UNIS

Aucun des Etats susvisés n’applique un régime comparable à celui de la taxe sur les ventes de métaux précieux, de bijoux, d’objets d’art, de collection et d’antiquité, prévu à l’article 150 V du code général des impôts, qui tient lieu d’imposition de la plus-value réalisée par le cédant.

Chacun des huit Etats applique le régime de droit commun des plus-values sur biens meubles réalisées par les particuliers.

Allemagne

Seuls les gains provenant de la cession de biens meubles et notamment de métaux précieux, de bijoux, d’objets d’art, de collection et d’antiquité détenus depuis moins d’un an sont imposables. Dans ce cas, la plus-value est soumise au barème de l’impôt comme un revenu ordinaire.

…/…

Belgique

Les plus-values ne sont pas considérées comme des revenus et ne sont donc pas imposables en principe.

L’imposition ne vise que les opérations considérées comme spéculatives. Le caractère spéculatif s’apprécie en fonction des éléments de fait (gains ne provenant pas de la gestion normale d’un patrimoine privé ; caractère répétitif des opérations par exemple). Si cette qualification est retenue, la plus-value est imposable hors barème, au taux proportionnel de 33%.

En revanche, lorsque la cession s’inscrit dans le cadre de la gestion normale d’un patrimoine privé, aucune imposition n’est effectuée.

Danemark

Les gains (et les pertes) provenant de la cession de biens meubles, autres que les valeurs mobilières, les instruments financiers et certaines créances, réalisés par un particulier à titre non professionnel ne sont pas pris en compte au plan fiscal.

Espagne

La plus-value réalisée lors de la vente de métaux précieux, bijoux, objets d’art, de collection et d’antiquité relève du régime fiscal de droit commun applicable aux plus-values sur biens meubles.

Lorsque la durée de détention du bien n’a pas excédé deux ans, la plus-value est soumise au barème de l’impôt sur le revenu. A l’inverse, en cas de détention supérieure à deux ans, la plus-value est imposable au taux proportionnel de 20%.

Toutefois, une exonération de la plus-value est accordée lorsqu’un élément du patrimoine privé fait l’objet d’une donation au profit d’une association reconnue d’utilité publique ou d’une fondation légalement reconnue.

Par ailleurs, l’impôt dû à raison de la plus-value peut faire l’objet d’une dation en paiement portant sur des biens faisant partie du " patrimoine historique " espagnol.

Etats-Unis

La plus-value réalisée lors de la cession de métaux précieux, de bijoux, d’objet d’art, de collection et d’antiquité relève du régime de droit commun des plus-values sur biens meubles.

Celle-ci est soumise au barème normal de l’impôt lorsque la durée de détention n’excède pas douze mois.

En revanche, lorsque la durée de détention excède douze mois, la plus-value est imposée au taux maximum de 20% (ou au taux de 10% lorsque son montant annuel n’excède pas 25.350 dollars, soit 152.000 francs).

…/…

Italie

D’une manière générale, les plus-values relatives aux cessions de biens meubles, réalisées par des particuliers à titre non professionnel ne sont pas imposables.

Par exception, les gains provenant de la cession de métaux précieux font l’objet d’une imposition hors barème au taux proportionnel de 12,5%.

Lorsque le prix d’acquisition ne peut pas être justifié, la plus-value est censée correspondre à 25% du prix de cession.

En revanche, les plus-values relatives aux bijoux, objets d’art, de collection et d’antiquité ne sont pas visées par cette imposition. Elles demeurent donc exonérées.

Pays-Bas

Les plus-values relatives aux cessions de biens meubles (autres que les valeurs mobilières) réalisées par un particulier à titre non professionnel ne sont pas imposables.

Royaume-Uni

Les plus-values sur cession de métaux précieux, de bijoux, d’objets d’art, de collection et d’antiquité détenus depuis moins de cinquante ans ne sont pas imposables. Ce régime s’applique à toute plus-value sur biens meubles (mais non aux valeurs mobilières).

Au-delà de cinquante ans de détention, la plus-value n’est taxable que lorsque le prix de cession excède 6.000 livres (60.000 francs).

Le montant net de la plus-value est obtenu après l’application de coefficients d’indexation monétaire. Toutefois, l’indexation n’est pas prise en compte lorsque le bien a été acquis avant le mois de mars 1982. Dès lors, le prix d’acquisition à retenir est constitué de la valeur du bien au 31 mars 1982 (ce qui revient à exonérer de fait la fraction de plus-value antérieure à cette date).

Le montant de la plus-value nette imposable ne peut pas excéder 5/3 de la différence entre le prix de cession et 6.000 livres. En outre, un abattement général annuel de 7.100 livres (71.000 francs) est accordé pour l’ensemble des plus-values imposables.

Le gain net est ensuite soumis au barème de l’impôt.

Source : Ministère de l’économie, des finances et de l’industrie.

II.- Une mesure de simplification

· Le 1° du I du présent article vise à ramener le taux de la taxe forfaitaire perçue lors de la vente privée ou de l’exportation de bijoux, objets d’art, de collection ou d’antiquité de 7 à 4,5%, c’est-à-dire au niveau du taux applicable pour les ventes aux enchères publiques.

Cette mesure se justifie pour les raisons suivantes :

– elle met un terme au traitement discriminatoire dont faisaient l’objet les ventes privées d’objets précieux ;

Rappelons, à cet égard, que le différentiel d’imposition est, en effet, de 2,5% si le vendeur réside fiscalement en France et de 7% s’il n’est pas résident.

Ce traitement discriminatoire a pu trouver une justification dans le passé en raison de la concurrence internationale à laquelle étaient confrontées les ventes publiques, mais tel ne semble plus être le cas aujourd’hui, les galeries d’art étant également soumises à une forte concurrence étrangère.

– le soupçon de fraude et de moindre transparence qui pesait sur les ventes privées a perdu de sa pertinence : les professions d’antiquaire et de galeriste se sont organisées au cours des dernières années, si bien que le marché français est devenu plus transparent ;

– une baisse du taux de la taxe applicable aux ventes privées devrait permettre aux galeries de jouer leur rôle de soutien à la création. Rappelons, en effet, que les galeries exercent, en la matière, un rôle de premier plan grâce aux excédents de trésorerie qu’elles dégagent de la vente d’œuvres d’artistes reconnus acquises de seconde main.

Cette mesure représente, selon le ministère de l’économie, des finances et de l’industrie, un coût de 10 millions de francs. Ce coût a été évalué à partir des recouvrements effectués en 1998.

· Le 2° du I du présent article est une mesure de coordination, destinée à supprimer les dispositions relatives au taux de la taxe dans l’hypothèse d’une vente aux enchères publiques.

· Le II du présent article prévoit l’entrée en vigueur, à compter du 1er janvier 2000, de la diminution du taux de la taxe.

III.- Un dispositif qui pourrait éventuellement être complété

Le dispositif proposé par le Gouvernement pour aménager le régime forfaitaire d’imposition des plus-values pourrait sans doute être complété.

Deux mesures complémentaires seraient, en effet, susceptibles de faciliter le fonctionnement du marché de l’art.

· Il s’agit, en premier lieu, du relèvement du seuil d’imposition.

Rappelons, en effet, que le seuil d’imposition de 20.000 francs n’a jamais été relevé depuis 1976. Une simple actualisation de ce seuil, avec un coefficient d’érosion monétaire de 3,16, le porterait à 63.200 francs. La décote devrait alors être portée de 30.000 à 94.800 francs. Une telle mesure stimulerait les plus petites opérations et faciliterait le recouvrement de la taxe. Soulignons, cependant, qu’aucune évaluation de son coût n’est disponible, les données statistiques ne permettant pas d’isoler les transactions d’un montant inférieur à 60.000 francs.

Ce dispositif a été suggéré notamment par M. Yann Gaillard, sénateur, Rapporteur au titre de la Commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation du Sénat, sur le " Marché de l’art : les chances de la France " ().

Indiquons, cependant, que le seuil applicable, d’une part, aux plus-values immobilières () (30.000 francs) et, d’autre part, aux plus-values sur biens meubles (2) (20.000 francs) n’a pas, non plus, été relevé depuis 1976. Une initiative concernant le marché de l’art pourrait conduire à des demandes relatives aux marchés immobiliers et mobiliers, dès lors que les trois seuils en cause ont été introduits simultanément.

· Il s’agit, en second lieu, de l’extension aux ventes privées de l’exemption de taxe dont bénéficient les vendeurs étrangers effectuant une vente publique.

Rappelons, en effet, que les ventes privées réalisées en France par des non-résidents se voient actuellement soumises à une taxe de 7%, qui devrait passer à 4,5% une fois la mesure proposée par le Gouvernement adoptée.

En revanche, les ventes publiques de vendeurs étrangers sont exemptées de toute taxation, sans doute en raison de la volonté des pouvoirs publics de faciliter leur venue sur le marché national.

La mobilité croissante du marché de l’art semble, cependant, désormais appeler une extension du champ d’application de cette exonération, au profit des ventes privées.

En l’état actuel des informations de votre Rapporteur général, le ministère de l’économie, des finances et de l’industrie ne dispose d’aucune évaluation du coût de cette mesure.

Ces deux mesures pourraient utilement faire l’objet d’une évaluation et d’une réflexion. Elles n’apparaissent cependant pas actuellement comme prioritaires.

*

* *

La Commission a adopté l’article 23 sans modification.

*

* *

Article 24

Taxe sur les installations nucléaires de base.

Texte du projet de loi :

I. L’article 17 de la loi de finances rectificative pour 1975 (n° 75-1242 du 27 décembre 1975) et l’article 121 de la loi de finances pour 1985 (n° 84-1208 du 29 décembre 1984) sont abrogés.

II. Les installations nucléaires de base soumises à autorisation et contrôle en application de l’article 8 de la loi n° 61-842 du 2 août 1961 relative à la lutte contre les pollutions atmosphériques et les odeurs sont assujetties, à compter du 1er janvier 2000, à une taxe annuelle.

Cette taxe est due par l’exploitant à compter de l’autorisation de création de l’installation et jusqu’à la décision de radiation de la liste des installations nucléaires de base.

III. Le montant de la taxe par installation est égal au produit d’une imposition forfaitaire par un coefficient multiplicateur. L’imposition forfaitaire est fixée dans le tableau ci-dessous. Les coefficients multiplicateurs sont fixés par décret en Conseil d’État en fonction du type et de l’importance des installations dans les limites fixées pour chaque catégorie dans le tableau ci-dessous. Pour la catégorie des réacteurs nucléaires de production d’énergie, la taxe est due pour chaque tranche de l’installation.

Catégorie

Imposition forfaitaire

Coefficient multiplicateur

Réacteurs nucléaires de production d’énergie (par tranche)

4.000.000 F

1 à 4

Autres réacteurs nucléaires

1.700.000 F

1 à 3

Installations de séparation des isotopes des combustibles nucléaires

Usines de fabrication de combustibles nucléaires

4.000.000 F

1 à 3

Usines de traitement de combustibles nucléaires usés

12.000.000 F

1 à 3

Installations de traitements d’effluents liquides radioactifs et/ou de traitement de déchets solides radioactifs

Usines de conversion en hexafluore d’uranium

Autres usines de préparation et de transformation des substances radioactives

1.800.000 F

1 à 4

Installations destinées au stockage définitif de substances radioactives

14.000.000 F

1 à 3

Installations destinées à l’entreposage temporaire de substances radioactives

Accélérateurs de particules et installations destinées à l’irradiation

Laboratoires et autres installations nucléaires de base destinées à l’utilisation de substances radioactives

160.000 F

1 à 4

IV. Le recouvrement et le contentieux de la taxe sont suivis par les comptables du Trésor selon les modalités fixées aux articles 80 à 95 du décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962 portant règlement général sur la comptabilité publique, dans leur rédaction en vigueur à la date de promulgation de la présente loi.

Le défaut de paiement de la taxe donne lieu à perception d’une majoration de dix pour cent des sommes restant dues à l’expiration de la période d’exigibilité.

Le décret mentionné au III ci-dessus fixe également les conditions d’application du présent paragraphe.

Exposé des motifs du projet de loi :

L’article 17 de la loi de finances rectificative n° 75-1242 du 27 décembre 1975 a assujetti les exploitants d’installations nucléaires de base à un système de taxes, en raison des contrôles approfondis et des inspections sur les sites à tous les stades de la construction ou de l’exploitation que requièrent leurs activités. Ainsi, ces exploitants doivent acquitter des taxes liées aux actes de procédure encadrant la création d’une installation nucléaire de base, ainsi qu’une taxe annuelle. Le produit de ces taxes est actuellement rattaché au budget de l’industrie par voie de fonds de concours, afin de financer le fonctionnement de la direction de la sûreté des installations nucléaires.

Il est proposé de refondre et de simplifier le système existant, en supprimant les taxes liées aux actes de procédures. Les taux sont revus à la hausse afin de tenir compte, notamment, des coûts que représentent, pour le budget de l’État, le changement de statut de l’IPSN, transformé en établissement public administratif indépendant du CEA, ainsi que la dotation accordée à l’Office de protection contre les rayonnements ionisants (OPRI).

Il est par ailleurs signalé que, dans le cadre de l’opération engagée par le Gouvernement de régularisation des procédures des fonds de concours, il sera mis fin en 2000 à la procédure de rattachement par voie de fonds de concours de la recette correspondante, compte tenu du caractère fiscal du prélèvement. Elle est ainsi retracée, en PLF 2000, comme recette du budget général, pour un montant estimé de 829 MF.

Observations et décision de la Commission :

Le présent article propose, dans un souci légitime de simplification administrative, de redéfinir le système de taxation auquel sont soumises les installations nucléaires de base (INB). Il met fin, par ailleurs, à une application trop extensive de la notion de fonds de concours en consacrant le caractère fiscal des redevances annuelles auxquelles sont assujetties les INB et l’impossibilité de recourir, de ce fait, à une procédure d’affectation de recettes au sein du budget général.

I.- La normalisation du régime juridique des " redevances " auxquelles sont soumises les installations nucléaires de base

A.- Le régime de la loi du 27 décembre 1975 : une application trop extensive de la procédure du fonds de concours

· L’article 17 de la loi de finances rectificative pour 1975 (n° 75-1242 du 27 décembre 1975) dispose qu’" à compter du 1er janvier 1976 les exploitants des installations nucléaires de base sont assujettis au paiement de redevances perçues au titre des demandes d’autorisation de création et des autorisations réglementaires subséquentes ainsi qu’au paiement de redevances annuelles ".

Les INB sont réglementées par le décret n° 63-1228 du 11 décembre 1963 pris en application de l’article 8 de la loi n° 61-842 du 2 août 1961 modifiée relative à la lutte contre les pollutions atmosphériques et les odeurs (). Ce décret a été modifié par les décrets n° 73-405 du 27 mars 1973, n° 85-449 du 23 avril 1985 et n° 90-78 du 19 janvier 1990. Il interdit l’exploitation d’une installation nucléaire de base sans autorisation et définit la procédure de l’autorisation de création et des autorisations nécessaires à tous les stades de la vie de l’installation.

La loi du 27 décembre 1975 précitée n’a fait que prévoir le dispositif permettant de financer les dépenses exposées par l’administration au titre des actes administratifs relatifs aux INB et des actions de surveillance et de contrôle exercées sur celles-ci. Elle a défini un barème de " redevances ", en fonction de la nature des installations – réparties en 18 catégories – et des étapes réglementaires concernées : dépôt de la demande d’autorisation de création, publication du décret d’autorisation de création, mise en exploitation de l’installation. Pour chacune des 18 catégories d’installations, le barème des " redevances " dues au titre de ces trois étapes de procédure est complété par une " redevance " due " par année civile à compter de l’année de la mise en exploitation ". In fine, le barème des " redevances " est constitué d’un tableau de 18 lignes sur 4 colonnes.

· Le sixième alinéa de l’article 17 de la loi du 27 décembre 1975 a défini la nature juridique desdites " redevances ". Il dispose qu’" un décret déterminera les conditions de recouvrement de la redevance et notamment la procédure de mise en recouvrement, les dates d’exigibilité du principal ou des majorations, ainsi que la procédure de rattachement du produit de la redevance par voie de fonds de concours, au budget du Ministère de l’Industrie et de la Recherche ".

Le décret n° 76-480 du 24 mai 1976 pris pour l’application de l’article 17 de la loi du 27 décembre 1975 comporte quatre articles :

– l’article premier dispose que le ministre chargé de l’industrie est l’ordonnateur des recettes que constituent les " redevances " dues par les exploitants d’INB ; il définit les modalités de notification des ordres de recettes aux personnes intéressés, détermine la date d’exigibilité, le régime des éventuelles majorations et diverses mesures relatives à la mise en recouvrement des sommes dues ; il précise également que la taxe est due au 1er janvier de chaque année ou dès la mise en service de l’installation et qu’elle est due, dans tous les cas, pour l’année entière ;

– l’article 2 définit les dépenses qui pourront être remboursées par le produit des " redevances " (exécution des analyses de sûreté, frais de déplacement des inspecteurs des installations nucléaires de base, vacations allouées à ces inspecteurs, frais divers de secrétariat et de gestion) ; il renvoie à un arrêté du ministre chargé du budget et du ministre chargé de l’industrie la détermination des pourcentages selon lesquels le produit des redevances sera réparti sur les chapitres budgétaires concernés du budget de l’Industrie ;

– l’article 3 précise certaines dispositions relatives aux frais de déplacement des inspecteurs des installations nucléaires de base ;

– l’article 4 précise certaines dispositions relatives aux vacations éventuellement allouées aux inspecteurs des installations nucléaires de base.

Le décret n° 77-1059 du 14 septembre 1977 a modifié le décret précité en ce qu’il indique que l’encaissement de la " redevance " et, le cas échéant, des pénalités, est effectué par l’intermédiaire de la régie de recettes instituée à l’administration centrale du ministère chargé de l’industrie.

Le décret n° 82-577 du 29 juin 1982 a complété la liste des dépenses remboursées sur produit des " redevances " par les " dépenses occasionnées par la réalisation d’études techniques en matière de sûreté nucléaire " et a étendu aux " charges de personnel et de fonctionnement du service central de sûreté des installations nucléaires, tant à Paris que dans les directions interdépartementales de l’industrie () " la catégorie de dépenses auparavant limitée aux frais divers de secrétariat et de gestion.

Les principes généraux de répartition du produit des " redevances " versées par les exploitants d’INB ont été fixés par un arrêté du 5 mai 1980, abrogé et remplacé par un arrêté du 29 juin 1982. Celui-ci instaure un financement prioritaire des dépenses relatives aux moyens de fonctionnement de l’administration (rémunérations, indemnités, cotisations sociales, prestations sociales, frais de déplacement, loyers, matériels divers, etc.) et à des interventions dans le domaine de l’énergie, sous la forme de subventions d’investissement. L’arrêté fixe la liste des chapitres et articles sur lesquels seront effectués les rattachements de crédits, par le biais d’un arrêté annuel des ministres chargés du budget et de l’industrie (article 2). Les sommes disponibles après application de ces dispositions doivent être rattachées au titre des analyses de sûreté à l’article consacré à ces actions d’un chapitre portant des crédits de dépenses en capital (article 3).

Publié au Journal officiel du 24 avril 1999, l’arrêté du 14 avril 1999 " fixant pour 1999 les modalités de rattachement par voie de fonds de concours au budget des services communs et finances et au budget de l’industrie de la part des contributions à la charge des exploitants des installations nucléaires de base affectées à la direction de la sûreté des installations nucléaires " procède pour l’année 1999, en application de l’article 2 de l’arrêté du 29 juin 1982, à la fixation des plafonds de crédits susceptibles d’être ouverts au profit des moyens des services (116.779.385 francs sur divers chapitres du titre III du budget des Services communs et finances) et des études (500.000 francs sur le chapitre 54-93. Études du budget de l’Industrie).

Les ouvertures effectives de crédits par voie de fonds de concours ne sont connues que par le biais des tableaux mensuels récapitulatifs publiés au Journal officiel. Le suivi des ouvertures consécutives à l’encaissement des " redevances " perçues sur les exploitants d’INB est, de ce fait, difficile.

· D’emblée, la décision du législateur de 1975 relative au rattachement du produit par voie de fonds de concours, a conféré un caractère ambigu aux " redevances " dues par les exploitants d’INB. En effet, l’article 19 de l’ordonnance organique du 2 janvier 1959 relative aux lois de finances confie à un décret pris sur le rapport du ministre chargé des finances le soin d’assimiler le produit de certaines recettes de caractère non fiscal à des fonds de concours pour dépenses d’intérêt public. Dans l’ordre juridique normal, il revient au Gouvernement, et non au Parlement, d’évaluer l’opportunité d’effectuer une affectation de recettes au sein du budget général, par la mise en œuvre d’une procédure de fonds de concours.

Cela étant, cette incursion de la loi dans le domaine du règlement ne saurait être considérée en tant que telle comme entachant d’irrégularité le système de recouvrement des " redevances " due par les exploitants d’INB. En revanche, on a pu s’interroger, dans le passé, sur le bien-fondé du dispositif d’affectation au budget de l’Industrie des " redevances " dues par les exploitants d’INB, en lieu et place d’une intégration de droit commun au budget général.

Sans doute, la partie du barème relative à la tarification des actes de procédure peut prétendre relever de la " rémunération des services rendus par l’Etat " au sens des articles 3 et 5 de l’ordonnance organique de 1959. Elle constitue donc une recette non fiscale susceptible de faire l’objet, au sein du budget général, d’une affectation à des dépenses déterminées par la mise en œuvre de la procédure du fonds de concours.

En revanche, la partie du barème relative à la perception de " redevances " annuelles due par l’exploitant au seul titre de l’existence de l’installation concernée est, formellement, dénuée de tout lien avec des actes administratifs. L’assimilation de ces " redevances " à une recette non fiscale relevait donc d’une interprétation, au mieux extensive, au pire erronée, de la notion de rémunération pour services rendus.

B.- La transformation des " redevances " en taxe : un rattachement bienvenu au droit commun des impositions

L’article 24 du projet de loi de finances pour 2000 supprime les ambiguïtés entourant la nature juridique des " redevances " perçues sur les INB et consacre leur caractère fiscal.

Le I du présent article abroge l’ensemble des dispositions légales relatives aux " redevances " dues par les exploitants d’INB. Il vise, naturellement, le texte " fondateur " que constitue l’article 17 de la loi de finances rectificative pour 1975 (n° 75-1242 du 27 décembre 1975). Il vise également l’article 121 de la loi de finances pour 1985 (n° 84-1208 du 29 décembre 1995), qui procédait à une profonde refonte du barème.

Votre Rapporteur général précise que l’abrogation de l’article 121 de la loi de finances pour 1985 prive d’effet l’article 30 de la loi de finances rectificative pour 1987 (n° 87-1061 du 30 décembre 1987), qui procédait à une refonte partielle du barème et instaurait un abattement de 80% sur le montant des redevances dues à compter de l’année suivant l’arrêt définitif d’une INB. Ce dernier article ne nécessite pas d’abrogation formelle puisqu’il se limitait à une modification du texte de l’article 121 de la loi de finances pour 1985.

Le II du présent article définit l’assiette de la taxe sur les installations nucléaires de base ainsi que les redevables de cette taxe.

Les installations assujetties à la taxe sont les " installations nucléaires de base soumises à autorisation et contrôle en application de l’article 8 de la loi n° 61-842 du 2 août 1961 relative à la lutte contre les pollutions atmosphériques et les odeurs ". Les INB sont définies à l’article 2 du décret du 11 décembre 1963 ; il s’agit :

– des réacteurs nucléaires, à l’exception de ceux qui font partie d’un moyen de transport. La restriction ainsi édictée ne conduit à placer hors du champ des INB que les réacteurs nucléaires embarqués à bord des " sous-marins nucléaires d’attaque " (SNA), des " sous-marins nucléaires lanceurs d’engins " (SNLE) et du porte-avions Charles de Gaulle ;

– certains accélérateurs de particules ;

– les usines de préparation, de fabrication ou de transformation de substances radioactives. Il s’agit, notamment, des usines de préparation de combustibles nucléaires, de séparation des isotopes des combustibles nucléaires, de traitement des combustibles nucléaires irradiés ou de traitement des déchets radioactifs ;

– les installations destinées au stockage, au dépôt ou à l’utilisation de substances radioactives, y compris les déchets, notamment celles qui sont destinées à l’irradiation.

Les usines et installations visées aux deux paragraphes ci-avant sont des INB lorsque les quantités de matières radioactives qui peuvent y être détenues sont supérieures à des seuils fixés par arrêté interministériel. En deçà de ces plafonds, les installations concernées relèvent de la législation sur les installations classées, notamment la loi n° 76-663 du 19 juillet 1976 relative aux installations classées pour la protection de l’environnement.

Votre Rapporteur général s’est interrogé sur la portée de la précision " soumises à autorisation et contrôle " incluse dans la rédaction proposée pour le II du présent article. En effet, certaines installations nucléaires, mises en service avant l’entrée en vigueur du décret du 11 décembre 1963, n’ont pas fait l’objet d’une autorisation, mais ont été assujetties à une déclaration a posteriori, en vertu des dispositions de l’article 14 du décret du 11 décembre 1963.

La liste des installations nucléaires de base au 31 décembre 1998, tenue à jour par la direction de la sûreté des installations nucléaires, par délégation du ministre chargé de l’industrie, indique que subsistent à cette date 33 installations nucléaires de base ayant fait l’objet d’une déclaration : les trois INB constituant la centrale nucléaire des Ardennes (déclarées le 15 janvier 1964), divers réacteurs de recherche, laboratoires et autres installations du Commissariat à l’énergie atomique (CEA) (déclarés le 27 mai 1964 ou le 8 janvier 1968), l’usine de traitement de combustibles irradiés UP1 et l’atelier AT1 de Cogema situés à La Hague (Manche) (déclarés le 27 mai 1964), cinq stations de traitement de déchets solides et / ou d’effluents liquides du CEA et de Cogema (déclarées le 27 mai 1964), le synchrotron Saturne du CEA à Saclay (Essonne) (déclaré le 17 février 1967), les usines de fabrication de combustibles de FBFC à Romans-sur-Isère (Drôme) et de SICN à Veurey-Voroize (Isère) (déclarées respectivement le 9 mai et le 27 octobre 1967), l’Atelier des matériaux irradiés d’EDF à Chinon (Loire) (déclaré le 29 janvier 1964), le synchrotron du Laboratoire pour l’utilisation du rayonnement électromagnétique (LURE) du CNRS à Orsay (Essonne) (déclaré le 22 mars 1979).

Ces installations simplement déclarées font l’objet d’une surveillance identique à celle exercée sur les autres INB. De plus, les modifications substantielles apportées, parfois, à certaines d’entre elles ont amené le service central de sûreté des installations nucléaires ou, à partir de 1991, la direction de la sûreté des installations nucléaires, à autoriser ces modifications par le biais d’un décret, donc dans le cadre des procédures de droit commun prévues par le décret du 11 décembre 1963.

Pour autant, la question restait posée de savoir si la précision " soumises à autorisation et contrôle " signifiait l’exigence d’une réalisation simultanée de deux conditions indépendantes.

Après analyse de la lettre et de l’esprit des textes, il apparaît à votre Rapporteur général que cette solution doit être rejetée. La mention de l’autorisation et du contrôle doit s’entendre comme un rappel des principes fondamentaux qui régissent les conditions d’existence des INB et caractérisent leur nature en tant qu’objet de procédures administratives. Elle ne renvoie pas à des critères auxquels il conviendrait de rapporter, dans chaque cas d’espèce, une installation nucléaire de base particulière pour savoir si elle entre ou non dans le champ d’application de la taxe sur les INB.

Enfin, certaines installations nucléaires de base intéressant la défense nationale peuvent être classées secrètes par le Premier ministre, sur proposition du ministre de la défense et du ministre chargé de l’énergie atomique. En vertu de l’article 17 du décret du 11 décembre 1963, ces installations nucléaires de base classées secrètes (INBS) " cessent d’être soumises, à compter de la décision de classement, aux dispositions du présent décret ". Il s’ensuit qu’elles ne sont plus soumises aux conditions d’application de l’article 8 de la loi du 2 août 1961, donc échappent au champ d’application de la taxe proposée par le présent article.

L’" exploitant " est la personne (morale) nommément désignée dans le décret d’autorisation de création pour exploiter l’installation faisant l’objet de la procédure ().

La taxe est due à compter de l’autorisation de création de l’installation et jusqu’à la décision de radiation de la liste des installations nucléaires de base, déjà évoquée ci-avant. Ces dispositions appellent deux commentaires :

– la taxe étant annuelle, il ne serait pratiqué aucune proratisation en fonction du temps écoulé entre le 1er janvier et la date de signature du décret de création ou la date de radiation de la liste des INB ;

– la radiation de la liste des installations nucléaires de base est l’étape ultime de la vie administrative d’une INB. Dans la plupart des cas, elle ne se confond pas avec la mise à l’arrêt définitif de l’installation mais intervient, plusieurs années après, lorsque les quantités de substances radioactives contenues à l’intérieur de l’installation sont inférieures aux seuils requis pour donner à celle-ci la qualification juridique d’INB ().

Le III du présent article procède à la refonte du barème de la taxe. Il est analysé en détail dans la partie II ci-après.

Le IV du présent article précise les modalités de recouvrement de la taxe sur les INB. Il confie aux comptables du Trésor la responsabilité du recouvrement de la taxe et la gestion du contentieux qui pourrait naître entre l’administration et les redevables.

Il précise, par ailleurs, que les modalités de recouvrement et de gestion du contentieux sont celles fixées aux articles 80 à 95 du décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962 portant règlement général sur la comptabilité publique, relatifs aux " autres créances ", et non celles de l’article 74 du même décret, relatif aux " impôts et recettes assimilées ". Ce choix résulte de la volonté de " modifier le moins possible un système de recouvrement qui a fait ses preuves ", selon la réponse adressée par les services du ministère de l’économie, des finances et de l’industrie à une question de votre Rapporteur général.

En effet, dans le cadre des possibilités offertes par l’article 18 du décret du 29 décembre 1962 précité, l’encaissement des " redevances " sur les INB a, jusqu’à présent, été assuré par la régie de recettes instituée auprès de l’administration centrale du ministère de l’économie, des finances et de l’industrie. L’arrêté du 15 décembre 1998 portant organisation d’une régie de recettes et d’avances auprès de la direction du personnel, de la modernisation et de l’administration du ministère de l’économie, des finances et de l’industrie constitue le cadre juridique actuel de cette régie de recettes.

Selon la réponse du ministère de l’économie, des finances et de l’industrie adressée à votre Rapporteur général, " il importe que le ministre chargé de l’industrie, compte tenu des compétences particulières requises, puisse rester ordonnateur de la recette, et que la recette soit encaissée, comme c’est le cas actuellement, par la régie de recettes instituée auprès de la direction du personnel, de la modernisation et de l’administration (DPMA) du ministère de l’économie, des finances et de l’industrie. Or il apparaît que la référence aux modalités de recouvrement des contributions directes, où l’ordonnateur est le directeur des services fiscaux, était incompatible avec la pérennisation du système actuellement en vigueur ".

Ce souci de pérennisation est poussé à l’extrême, puisque le premier alinéa du IV du présent article s’achève en précisant que les modalités de recouvrement et de contentieux applicables à la taxe sur les INB sont définies " dans leur rédaction en vigueur à la date de promulgation de la présente loi ".

Le ministère de l’économie, des finances et de l’industrie justifie cette proposition par le fait que " dans la mesure où il est fait référence à des dispositions réglementaires, donc modifiables par décret, il est apparu nécessaire, pour éviter une modification incidente de la loi par un décret, de " cristalliser " les dispositions réglementaires visées " dans leur rédaction en vigueur à la date de promulgation de la présente loi ".

Effectivement, l’article 34 de la Constitution dispose que " la loi fixe les règles concernant […] les modalités de recouvrement des impositions de toutes natures ". Si le législateur s’était contenté de renvoyer aux dispositions des articles 80 et suivants du décret portant règlement général sur la comptabilité publique, il aurait, en fait, laissé au pouvoir réglementaire toute latitude pour modifier à son gré les modalités de recouvrement de la taxe sur les INB, sans avoir encadré ce pouvoir réglementaire de façon suffisamment précise par le réseau nécessaire de " règles " auxquelles fait référence le texte constitutionnel.

En ce sens, le Parlement n’aurait pas épuisé sa compétence en matière fiscale et aurait exposé le présent article à une censure du Conseil constitutionnel.

Le deuxième alinéa du IV du présent article fait " remonter " au niveau de la loi une disposition précédemment inscrite dans le décret n° 76-480 du 24 mai 1976 pris pour l’application de l’article 17 de la loi de finances rectificative pour 1975. Il pose le principe d’une majoration de 10% des sommes dues à l’expiration de la période d’exigibilité, en cas de défaut de paiement de la taxe.

Le dernier alinéa renvoie à un décret en Conseil d’Etat les conditions d’application du IV du présent article. Selon les informations recueillies par votre Rapporteur général, les conditions d’application du paragraphe IV sont :

– les conditions de liquidation du montant de la taxe due par l’exploitant et les conditions de prescription de l’exécution de la recette par le ministre chargé de l’industrie, au vu des renseignements transmis par le directeur de la sûreté des installations nucléaires ;

– les conditions de notification de la taxe à l’assujetti : montant, date limite de paiement, date d’application de la majoration ;

– la possibilité de recouvrement amiable effectué à la régie de recettes instituée auprès de la DPMA ;

– la date d’exigibilité : le dernier jour du mois suivant celui de la mise en recouvrement ;

– la date d’application de la majoration : le 15 du mois qui suit celui au cours duquel la redevance est exigible ;

– le régime de recouvrement à défaut de paiement dans les délais, assuré dans les conditions prévues aux articles 80 et suivants du décret du 29 décembre 1962, au vu des titres de perception exécutoires émis par la direction de la sûreté des installations nucléaires et recouvrés par le comptable du Trésor.

II.- Le remodelage du barème : implications juridiques et conséquences financières

A.- La refonte proposée du barème demande au pouvoir législatif de déléguer au pouvoir réglementaire une partie de sa compétence en matière fiscale

La refonte de la structure du barème repose sur trois principes : la réorganisation de la " nomenclature fiscale " des INB ; la suppression des redevances liées à l’accomplissement des actes de procédure ; un calcul de la taxe fondé sur l’application d’un coefficient multiplicateur à une imposition forfaitaire.

· Dans le barème en vigueur à l’heure actuelle, les INB sont réparties en 9 catégories principales dont certaines sont subdivisées en sous-catégories. Au total, la " nomenclature fiscale " des INB comprend 18 items. Le barème proposé à l’approbation du Parlement procède à une simplification de cette nomenclature et ramène à 12 le nombre d’items la composant.

COMPARAISON DES NOMENCLATURES

Nomenclature actuelle

Nomenclature proposée (a)

1.- Réacteurs nucléaires de production d’énergie :

– premier réacteur d’un type donné

– premier réacteur installé sur un nouveau site, mais semblable à un réacteur déjà analysé

– réacteur semblable à un réacteur déjà installé sur un même site

Réacteurs nucléaires de production d’énergie (par tranche)

2.- Autres réacteurs nucléaires :

– puissance supérieure à 10 mégawatts

– puissance comprise entre 10 kilowatts et 10 mégawatts

– puissance inférieure à 10 kilowatts

Autres réacteurs nucléaires

3.- Usines de séparation des isotopes des combustibles nucléaires

Installations de séparation des isotopes des combustibles nucléaires

4.- Usines de traitement de combustibles nucléaires irradiés et usines de fabrication de combustibles nucléaires :

Usines de fabrication de combustibles nucléaires

– substances contenant du plutonium

– substances ne contenant pas de plutonium

Usines de traitement de combustibles nucléaires irradiés

5.1- Usines de conversion en hexafluorure d’uranium

Usines de conversion en hexafluorure d’uranium

5.2- Autres usines de préparation et de transformation des substances radioactives, ateliers pilotes industriels

Autres usines de préparation et de transformation des substances radioactives

6.- Installations de traitement d’effluents et de déchets radioactifs :

– substances contenant du plutonium

– substances ne contenant pas de plutonium

Installations de traitement d’effluents liquides radioactifs et / ou de déchets solides radioactifs

7.- Installations destinées au stockage ou au dépôt de substances radioactives (combustibles nucléaires neufs ou irradiés, déchets ou autres substances radioactives) :

– installations destinées au stockage de déchets de faible et moyenne activité ou d’autres substances radioactives

– installations destinées au stockage de déchets de haute activité ou contenant des émetteurs alpha en quantité notable

– installations destinées à l’entreposage de déchets

Installations destinées au stockage définitif de substances radioactives

de haute activité ou contenant des émetteurs alpha en quantité notable

Installations destinées à l’entreposage temporaire de substances radioactives

8.- Accélérateurs de particules et installations destinées à l’irradiation

Accélérateurs de particules et installations destinées à l’irradiation

9.- Installations destinées à l’utilisation de substances radioactives autres que celles visées en 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7 et 8 (laboratoires notamment)

Laboratoires et autres installations nucléaires de base destinées à l’utilisation de substances radioactives

(a) Afin de faire correspondre ligne à ligne les items des deux nomenclatures, la colonne " Nomenclature proposée " n’est pas présentée dans l’ordre du tableau inclus dans l’article 24 du présent projet

La réduction du nombre d’items relatifs aux réacteurs nucléaires est la traduction directe de la suppression des redevances pour actes de procédure : dans le barème actuel, elles seules diffèrent entre les trois types de réacteurs mentionnés, alors que les redevances annuelles sont identiques.

La distinction proposée entre usines de fabrication de combustibles et usines de traitement de combustibles irradiés correspond mieux à la réalité industrielle du secteur nucléaire. Elle remplace avantageusement la distinction précédente, fondée, non sur les fonctions respectives des deux installations concernées, mais sur la présence ou l’absence de plutonium dans les substances radioactives qu’elles abritent. D’ailleurs, les perspectives de généralisation du combustible Mox () dans le parc nucléaire d’EDF rendent caduc, dans les faits, la distinction effectuée dans le barème actuel.

La modification apportée à la nomenclature des installations de stockage et d’entreposage de substances radioactives met un accent légitime sur la finalité de ces installations et non sur la nature des substances radioactives qu’elles abritent.

· La suppression des " redevances " perçues au titre des actes de procédure élimine définitivement toute ambiguïté sur la nature fiscale du prélèvement effectué sur les INB. Elle contribue également à simplifier notoirement la structure du barème.

Votre Rapporteur général note d’ailleurs que, dans les années récentes, la part des redevances perçues au titre des actes de procédure ne représentait plus que 10 à 15% du produit total des redevances.

Par ailleurs, le dispositif proposé par le présent article supprime l’abattement de 80% applicable, dans le régime actuel, à compter de l’année qui suit l’arrêt définitif d’une installation.

· Pour chaque catégorie de la nomenclature proposée par le présent article, le montant de la taxe par installation est égal au produit d’une imposition forfaitaire par un coefficient multiplicateur. L’imposition forfaitaire est fixée dans le tableau inclus dans le paragraphe III du présent article. Les coefficients multiplicateurs sont fixés par décret en Conseil d’Etat à l’intérieur de fourchettes définies, pour chaque catégorie, dans le tableau précité.

Dans le barème actuel, le montant de la taxe annuelle est fixé par référence à des éléments déterminés par la loi : (éventuellement) une part fixe ; (éventuellement) une part proportionnelle calculée en fonction de critères objectifs relatifs, selon le cas, à la puissance thermique de l’installation, à la capacité de traitement de l’installation, aux volumes ou tonnages de matières, etc. ; (éventuellement) un montant minimum.

Animé par le souci d’améliorer la lisibilité de la loi, le Gouvernement a souhaité renvoyer au décret le soin de préciser, " en fonction du type et de l’importance des installations " les coefficients multiplicateurs applicables aux impositions forfaitaires. Cette délégation partielle du pouvoir du Parlement en matière fiscale appelle les commentaires suivants :

– en soi, le principe d’une telle délégation n’est pas inconstitutionnel. En effet, l’article 34 de la Constitution dispose que " la loi fixe les règles concernant […] l’assiette, le taux et les modalités de recouvrement des impositions de toutes natures " sans pour autant exiger que la loi détermine les taux eux-mêmes. L’exigence constitutionnelle est respectée dès lors que la latitude laissée au pouvoir réglementaire est strictement encadrée ;

– la référence au " type " et à l’" importance " des installations semble, aux yeux du ministère de l’économie, des finances et de l’industrie, limiter suffisamment la liberté d’appréciation laissée au pouvoir réglementaire. Le type de l’installation doit s’entendre des caractéristiques techniques affectant substantiellement la nature de l’installation et les équipements qui la composent ; à ce titre, il est possible que la nature des substances radioactives admises dans l’INB () constitue l’un des éléments permettant de définir, dans l’une des douze catégories légales, le type de l’installation. L’importance de l’installation doit être appréciée sur la base de critères numériques fondés, comme dans le barème actuel, sur des éléments objectifs tels que la puissance de l’installation, le volume ou le tonnage des substances radioactives autorisées, etc.

– le dispositif proposé par le présent article est similaire à celui en vigueur pour les installations classées pour la protection de l’environnement au sens de la loi du 19 juillet 1976 précitée. Celle-ci, dans son article 17, définit une taxation fondée sur un " taux de base ", dont la valeur en francs est fixée dans la loi, valable pour l’ensemble des installations classées soumises à taxation. A ce taux de base est appliqué un coefficient multiplicateur compris entre 1 et 10. La loi renvoie à un décret le soin de fixer, pour chaque catégorie d’installation soumise à taxation, le coefficient multiplicateur effectivement applicable.

Il est clair qu’au cœur de la simplification de la loi voulue par le Gouvernement, se trouve un arbitrage délicat entre l’ampleur des fourchettes autorisées pour la détermination des coefficients multiplicateurs et le degré de détail de la nomenclature retenue dans le tableau ayant valeur législative. Une nomenclature trop resserrée aurait conduit à un élargissement des fourchettes autorisées afin de couvrir tout l’éventail souhaité des niveaux finaux de taxation.

Au demeurant, votre Rapporteur général tient à souligner que le barème définitif, tel qu’il sera déterminé après intervention du décret en Conseil d’Etat prévu au III du présent article, ne sera pas moins complexe a priori que le barème actuel. Au regard de l’impératif de lisibilité, il est même permis de se demander si l’amélioration de la lisibilité de la loi
– incontestable dans le dispositif proposé – ne s’accompagnera pas d’une dégradation de la lisibilité de l’ordre juridique global. Le partage des compétences entre loi et règlement conduira, si le présent article est adopté par le Parlement, à une dispersion entre deux textes différents, de portée juridique différente, des éléments constitutifs du barème.

Enfin, votre Rapporteur général s’est inquiété de la méthode qui pourrait être employée pour revaloriser, dans les années à venir, le barème de la taxe sur les INB. En effet, l’intervention partagée du Parlement et de l’administration dans la détermination de l’impôt effectivement applicable offre à chacun une certaine marge de manœuvre.

Aux yeux de votre Rapporteur général, il doit être clair que l’intention du législateur n’est pas d’autoriser l’administration à procéder, par le jeu des coefficients multiplicateurs, à une revalorisation périodique du barème de la taxe sur les INB. La réévaluation des bases du barème ressort de la compétence naturelle du Parlement. La délégation de compétence consentie au profit du pouvoir réglementaire ne vaut que pour la détermination de la structure du barème, à un degré de détail supérieur à celui qui est inscrit dans la loi.

D’ailleurs, les éléments de structure du barème déjà élaborés par l’administration amènent dès l’année 2000 à une forte revalorisation du produit de la taxe.

B.- La refonte du barème augmente fortement le rendement de la taxe

L’exposé des motifs du présent article indique que le produit de la taxe attendu en 2000 s’élève à 829 millions de francs environ, montant inscrit sur la ligne 0089 " taxe sur les installations nucléaires de base " des ressources non fiscales dans le fascicule des Voies et moyens annexé au projet de loi de finances pour 2000.

Ceci représente une augmentation de près de 55% par rapport au montant attendu du produit des " redevances " en 1999, dans le cadre du barème actuel.

En l’absence d’informations précises sur la configuration effective du futur barème, via la détermination des coefficients multiplicateurs, il est difficile d’évaluer les éventuels effets " redistributifs " du dispositif de taxation proposé par le présent article entre les différents exploitants nucléaires. Il semble que le Commissariat à l’énergie atomique soit particulièrement sensible à la suppression de l’abattement de 80% sur le montant de la taxe due sur les installations arrêtées.

A titre d’illustration des incertitudes qui subsistent aujourd’hui, le tableau suivant, établi par la direction financière du Commissariat à l’énergie atomique fait un bilan des niveaux de taxation envisageables selon que l’on retient le chiffre bas ou le chiffre haut des fourchettes proposées pour les coefficients multiplicateurs.

TAXE APPLICABLE AUX INB SITUÉES DANS LES CENTRES DU CEA

(en millions de francs)

Service exploitant

Taxation 1999

Hypothèse 2000 minimale

Hypothèse 2000 maximale

Direction du cycle du combustible

2,1

4,1

14,9

CEN DIR

6,1

6,4

25,4

Direction des réacteurs nucléaires

12,6

22,1

69,7

Direction des sciences de la matière

0,3

0,3

1,3

Institut national des sciences et techniques nucléaires

0,8

1,7

5,1

Institut de protection et de sûreté nucléaire

3,3

3,4

10,2

Total CEA

25,2

38,0

126,6

dont installations arrêtées

1,4

8,6

27,6

Installations exploitées par la Cogema

6,6

5,8

19,2

Installations exploitées par ORIS

2,7

2,0

7,8

La refonte du barème s’inscrit à la fois dans une logique de simplification, une logique de rendement et une logique d’incitation vis-à-vis des exploitants d’installations nucléaires. A cet égard, il est clair que le choix fait par le Gouvernement de supprimer l’abattement de 80% dont bénéficient, sous le régime actuellement en vigueur, les installations arrêtées, participe d’une volonté politique de favoriser l’engagement rapide des travaux de démantèlement de ces installations.

Le démantèlement effectif des installations arrêtées, dans les conditions approuvées par l’autorité de sûreté pour ses modalités techniques et industrielles, est en effet la condition sine qua non d’une modification du statut des INB concernées et de leur transformation en " installation destinée à l’entreposage temporaire de substances radioactives ", soumise à une taxation modeste dans le nouveau barème.

En faisant ce choix, le Gouvernement montre sans ambiguïté son engagement pour un mode de croissance plus respectueux de l’environnement et pour une gestion responsable des risques contemporains hérités du passé.

*

* *

La Commision a adopté l’article 24 sans modification.

*

* *

C.- Mesures diverses

Article 25

Recettes des missions d'ingénierie publique.

Texte du projet de loi :

I. La loi n° 48-1530 du 29 septembre 1948 réglementant l’intervention des fonctionnaires des ponts et chaussées dans les affaires intéressant les collectivités locales et divers organismes et la loi n° 55-985 du 26 juillet 1955 réglementant l’intervention des fonctionnaires du génie rural dans les affaires intéressant les collectivités locales et divers organismes, sont abrogées à compter du 1er janvier 2000.

II. Les recettes inscrites sur les comptes 466-221 " Rémunérations accessoires de certains agents de l’équipement " et 466-225 " Rémunérations accessoires de certains agents du génie rural " à la date du 31 décembre 1999 et celles qui seront perçues ultérieurement au titre des interventions autorisées par le préfet jusqu’à cette même date sur le fondement des lois visées à l’alinéa I sont affectées au budget général à compter du 1er janvier 2000.

Exposé des motifs du projet de loi :

Les rémunérations accessoires versées à certains agents des ministères de l’équipement et de l’agriculture sont alimentées par les recettes tirées des prestations d’ingénierie effectuées par certains agents au profit d’organismes privés ou publics, autres que l’État, et centralisées sur les comptes de tiers n° 466-221 et n° 466-225. Leur régime est fondé sur les dispositions de la loi du 29 septembre 1948 qui réglemente l’intervention des fonctionnaires des ponts et chaussées prêtant leurs concours aux collectivités locales et à des tiers, et dont les dispositions ont été rendues applicables à certains agents du génie rural par la loi du 26 juillet 1955.

Il est proposé d’intégrer au budget de l’État les rémunérations accessoires et les recettes afférentes.

Le premier alinéa du présent article abroge les lois du 29 septembre 1948 et du 26 juillet 1955. Il permet de supprimer tout lien entre la rémunération des agents concernés et les prestations effectuées au profit de tiers.

Le deuxième alinéa procède à la budgétisation des recettes des comptes de tiers, qui seront converties au 1er janvier 2000 en rémunérations pour services rendus. Simultanément, un nouveau régime indemnitaire se substituera, pour la rémunération des services accomplis, aux rémunérations accessoires, dont il constituera l’exacte transposition. A cet effet, le présent projet de loi de finances prévoit l’inscription, sur les deux sections budgétaires concernées, des crédits nécessaires : 948,16 MF sur le budget du ministère de l’équipement et 481 MF sur celui de l’agriculture.

Observations et décision de la Commission :

L’objet de cet article est de réintégrer au sein du budget de l’Etat les recettes et les dépenses au titre des prestations d’ingénierie publique effectuées par les agents des corps techniques des services déconcentrés des ministères de l’équipement et de l’agriculture.

Cette rebudgétisation s’inscrit dans le cadre d’un mouvement de rapatriement au sein du budget de l’Etat de dépenses permanentes de l’Etat, entrepris depuis la décision n° 94-351 du 29 décembre 1994 du Conseil constitutionnel et le rapport de la Cour des comptes sur l’exécution du budget de 1994.

Deux opérations importantes de budgétisation ont été réalisées en 1998.

Le compte 466-24 " Masse des douanes ", qui était utilisé pour financer le logement social des agents des douanes, a été clos, à l’occasion de la création de l’établissement public du même nom, le 1er janvier 1998. Cet établissement reçoit désormais une subvention du budget des Services financiers.

Une opération de même nature a été effectuée, par l’article 112 de la loi de finances pour 1998 (n° 97-1269 du 30 décembre 1997), pour des rémunérations correspondant aux services rendus aux usagers par certains agents des conservations des hypothèques et des services du cadastre. Les recettes de trois comptes extrabudgétaires à partir desquels étaient versées les rémunérations accessoires de certains agents de la DGI, ont été réintégrées au sein du budget général.

I.- Une partie des rémunérations versées par l’Etat à certains de ses agents ne figure pas dans les lois de finances

A.- Les comptes de rémunérations accessoires des ministères de l’équipement et de l’agriculture

Le régime des rémunérations accessoires de certains agents des ministères de l’équipement et de l’agriculture est fondé sur les dispositions de la loi n° 48-1530 du 29 septembre 1948 réglementant l’intervention des fonctionnaires des ponts et chaussées prêtant leur concours aux collectivités locales et à divers organismes, qui ont été étendues à certains agents du génie rural par l’article 1er de la loi n° 55-985 du 26 juillet 1955.

L’arrêté du 10 novembre 1980, pris en application de la loi du 26 juillet 1955 et de deux arrêtés interministériels du 7 décembre 1979, fixe les conditions dans lesquelles les fonctionnaires concernés peuvent apporter leur concours aux collectivités locales et à divers organismes, ainsi que la façon dont sont gérées les contributions y afférentes.

Les contributions des bénéficiaires de ces prestations sont versées au crédit d’un compte local ouvert dans les trésoreries générales départementales, puis centralisées sur un compte de classe 4 (compte de tiers) de la comptabilité générale de l’Etat, en l’espèce le compte n° 466-22 " rémunérations accessoires de certains agents de l’Etat ".

Les débits effectués sur ce compte sont fractionnés entre le paiement de frais de fonctionnement et de bureau de l’administration centrale, les taxes sur salaires, les dotations aux ordonnateurs locaux et les rémunérations accessoires de l’administration centrale.

Les dépenses de rémunérations des agents concernés du ministère de l’équipement et du ministère de l’agriculture sont effectuées à partir des sous-comptes 466–221 " Equipement " et 466–225 " Génie rural, eaux et forêts ".

Les opérations annuelles de ces sous-comptes relatives à ces rémunérations ont porté, depuis 1993, sur des montants retracés dans le tableau suivant :

             

(en millions de francs)

 

1993

1994

1995

1996

1997

1998

1999 (a)

Equipement

828,41

776,29

785,10

889,42

852,47

880,00

994,00

Agriculture

372

388

392

374

388

392

405

(a) Prévision.

Source : Ministère de l’économie des finances et de l’industrie.

B.- Les comptes de rémunérations accessoires sont en voie d’extinction

A ce jour, le compte de tiers 466.22 " Rémunérations accessoires de certains agents de l’Etat " est subdivisé comme suit :

466.221 Equipement

466.2211 Comptes de l’Administration centrale.

466.2212 Encaissements des contributions.

466.2213 Répartition des dotations versées par l’Administration centrale.

466.222 Ponts-et-Chaussées (circonscriptions électriques).

466.223 Cadastre. Service départemental.

466.224 Cadastre. Service central.

466.225 Génie rural, eaux et forêts

466.2251 Comptes de l’Administration centrale.

466.2252 Encaissements des contributions.

466.2253 Répartition des dotations versées par l’Administration centrale.

466.226 Hypothèques.

466.227 Mission de contrôle financier des transports.

466.228 Divers.

Les sous-comptes cadastres et hypothèques, dont les recettes ont été réintégrées dans le budget par la loi de finances pour 1998, devraient disparaître d’ici la fin de l’année 1999, leur régularisation étant en voie d’achèvement.

Le compte 466-222 présentait, selon les informations recueillies par votre Rapporteur général auprès de la direction générale de la comptabilité publique, un solde créditeur de 22.199,15 francs au 31 décembre 1998. Ce solde concerne la Trésorerie générale du Loiret (1.379,30 francs) et la Paierie générale du Trésor (20.819,85 francs). Toutefois, ce compte n’a connu aucun mouvement depuis 1988. Il a vocation à disparaître.

Le compte 466-227 est alimenté par une dotation de la RATP et servirait à verser des rémunérations accessoires à trois agents appartenant à la Mission de contrôle économique et financier des transports. Le solde créditeur au 31 décembre 1998 était de 135.199,77 francs. Une écriture a été enregistrée, le 24 septembre 1999, au crédit du compte, pour un montant de 250.000 francs.

Enfin, le compte 466-228 " divers " présentait un solde créditeur de 6.760.000 francs au 31 décembre 1997 et un solde nul au 31 décembre 1998. Aucune écriture n’a été passée en 1999. En fait, en 1997 et 1998, ce compte a servi de compte transitoire dans le cadre de la budgétisation des excédents des comptes de rémunérations accessoires des hypothèques (466-226) et a ensuite été régularisé.

Il semble donc, sous réserve d’investigations plus approfondies, que la présente mesure permette d’éteindre les différents systèmes de rémunérations accessoires de certains agents de l’Etat, qui transitaient par comptes de tiers et ne relevaient donc pas du contrôle parlementaire, à l’exception du compte 466-227, dont la régularisation ne semble pas envisagée.

Il subsiste néanmoins un reliquat des fonds extrabudgétaires de la comptabilité publique, dont la régularisation n’est pas entreprise dans la présente loi de finances.

Il s’agit des fonds gérés sur les comptes de tiers 451 et 466-171, alimentés principalement par le produit de l’activité bancaire et de gestion d’épargne du Trésor public. Ces fonds, qui s’élèveraient à environ 1,2 milliard de francs, financent en majorité des dépenses de rémunération accessoires et des dépenses de fonctionnement des services financiers.

Le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie s’est engagé, à plusieurs reprises, à régulariser les imputations de ces comptes au plus tard en 2001.

II.- La régularisation par la budgétisation

A.- La budgétisation des recettes

·  Le II du présent article propose d’affecter les recettes comptabilisées sur les sous-comptes 466-221 et 466-225, au budget général à compter du 1er janvier 2000.

Ces recettes prendraient désormais la forme de rémunérations de services rendus instituées par décret en Conseil d’Etat, conformément à l’article 5 de l’ordonnance du 2 janvier 1959. Elles devront figurer et être évaluées dans la loi de finances de l’année.

Les prestations d’ingénierie donnant lieu à rémunérations sont effectuées, pour les neuf dixièmes, au profit des collectivités locales et, pour le reste, au profit d’établissements publics. Dans les trois quarts des cas, il s’agit d’aides à la maîtrise d’œuvre et à la gestion de service public. Les autres prestations habituellement fournies sont de type " aides techniques à la gestion communale " et " aides à la conduite d’opérations ".

Le tableau ci-dessous fait apparaître la totalité des opérations, en particulier de crédit, effectuées au cours de l’année 1998 sur les comptes Equipement et Génie rural.

         

ÉTAT DES OPÉRATIONS DE L’ANNÉE 1998

Numéros et désignations

Balances d’entrée crédit au 1er janvier

Opérations de l’année

Balances de sortie crédit au 31 décembre

Compte

Désignation

 

Débit

Crédit

 

466.221

Equipement

392.788.728,78

2.715.556.359,54

2.721.873.062,62

399.105.431,86

466.225

Génie rural, eaux et forêts


459.677.691,58


1.134.274.948,53


1.123.574.280,06


448.977.023,11

Source : Direction générale de la comptabilité publique.

B.- Le nouveau régime indemnitaire des agents concernés

Le I du présent article propose l’abrogation de la loi n° 48-1530 du 29 septembre 1948 et de la loi n° 55-985 du 26 juillet 1955 à compter du 1er janvier 2000, afin de supprimer tout lien entre la rémunération des agents concernés et les prestations effectuées au profit de tiers.

En fait, ce lien est inexistant depuis 1979, date à laquelle il y a eu déconnexion entre les recettes perçues et les primes versées, afin de rompre avec une sorte " d’intéressement au chiffre d’affaires " des agents.

Un système de rémunérations accessoires indépendantes des prestations, puisque perçues par des fonctionnaires n’intervenant pas directement dans les missions elles-mêmes (personnels administratifs de l’administration centrale par exemple), s’est instauré, assis sur des recettes extra-budgétaires de l’Etat.

Ainsi, 10.000 agents du ministère de l’agriculture (au niveau central et déconcentré), sur un total de 30.000 agents, et 25.000 agents du ministère de l’équipement, sur un total de 100.000 agents, perçoivent ces rémunérations accessoires, qui n’ont aucun lien effectif avec le volume des prestations.

L’enveloppe de ces rémunérations accessoires, dont le montant était, en 1998, de 880 millions de francs pour le ministère de l’équipement et de 392 millions pour le ministère de l’agriculture, est répartie entre les agents appartenant à certains corps en fonction du grade et de la fonction et avec une modulation géographique en partie liée à la fréquence des prestations.

Cette enveloppe représente l’un des plus importants régimes indemnitaires de l’Etat. En 1999, l’indemnité moyenne versée par le ministère de l’agriculture est de 40.000 francs par agent ; elle est de 36.400 francs pour le ministère de l’équipement.

·  Le I du présent article entérine la déconnexion entre les primes et les prestations et permet l’édification d’un régime indemnitaire accordé à divers corps de fonctionnaires des ministères de l’équipement et de l’agriculture, qui transpose rigoureusement les modalités et les montants des rémunérations accessoires.

Ce régime sera désormais garanti par des crédits inscrits en loi de finances.

Le présent projet de loi de finances prévoit les crédits correspondant à la rebudgétisation de l’opération à hauteur de 910,56 millions de francs pour le ministère de l’équipement (chapitre 31-94) et 431,9 millions de francs pour celui de l’agriculture (chapitre 31-02 et 31-96).

En outre, ces deux ministères bénéficient de l’ouverture des crédits correspondant à ceux actuellement prélevés sur les comptes de tiers au titre des frais de bureau et de la couverture civile et correspondant aux dépenses constatées en 1999 pour les missions d’ingénierie. Les ouvertures pour le ministère de l’équipement se montent à 28,2 millions de francs de crédits de fonctionnement (chapitres 34-97 et 34-98) et 9,4 millions de francs de frais judiciaires (chapitre 37-72) et, pour le ministère de l’agriculture, à 41,8 millions de francs de crédits de fonctionnement (chapitre 34-97 et 35-92) et 4,4 millions de francs de frais judiciaires (chapitre 37-91).

Enfin, des décrets, en cours de rédaction dans chacun des ministères, viendront, à compter du 1er janvier 2000, constituer le fondement juridique de ce régime d’indemnités, en reprenant les anciennes modalités d’attribution et d’évaluation des rémunérations accessoires.

Il en résultera, pour les agents concernés, la garantie de la neutralité de la mesure de budgétisation, qui n’affectera en rien les situations individuelles.

Cette mesure débouchera sur un régime indemnitaire plus solide, mais aussi plus transparent.

*

* *

La Commission a adopté l’article 25 sans modification.

*

* *

Article 26

Contribution des organismes collecteurs du 1% logement.

Texte du projet de loi :

Le II de l’article 56 de la loi de finances pour 1999 (n° 98-1266 du 30 décembre 1998) est modifié de la façon suivante :

1° Après le premier alinéa, est inséré un alinéa rédigé comme suit : " Pour 2000, cette fraction est égale à 32,5 %. ".

2° Le deuxième alinéa est complété par les dispositions suivantes : " Ils sont libérés des versements leur incombant pour 2000, dans les mêmes conditions, dès que le versement de cette union à l’État atteint 5.000 millions de francs. Lorsque l’application de ce plafond conduit à une contribution des associés collecteurs de l’Union d’économie sociale pour le logement telle que la fraction visée au I est inférieure à 32,5 %, la même fraction est alors appliquée pour le calcul de la contribution des organismes non associés de cette union. Sa valeur est établie et publiée au Journal officiel au plus tard le 31 juillet 2000. ".

Exposé des motifs du projet de loi :

L’article 56 de la loi de finances pour 1999 a reconduit la contribution des organismes collecteurs de la participation des employeurs à l’effort de construction (PEEC ou 1 % logement). Le taux de cette contribution et les conditions de son versement par les associés collecteurs de l’Union d’économie sociale pour le logement (UESL) ont été définis pour l’année 1999 en conformité avec la convention signée entre l’État et l’UESL le 3 août 1998, qui prévoit le versement à l’État pendant quatre ans d’une contribution dégressive.

Pour 2000, la contribution est fixée à 32,5% de la collecte et des remboursements de prêts de plus de trois ans. Le montant du versement de l’UESL qui libère les associés collecteurs des versements qui leur incombent est fixé à 5.000 MF. Le deuxième alinéa introduit un mécanisme garantissant que tous les organismes collecteurs, membres ou non de l’UESL, soient assujettis au même taux de contribution. Le montant total attendu de la contribution est de 5.180 MF.

Observations et décision de la Commission :

Le présent article fixe le mode de calcul du versement en 2000 de la contribution au budget général des organismes collecteurs de la participation des employeurs à l’effort de construction, autrement appelée " 1% logement ". Dans le cadre de la convention passée par l’Etat avec l’Union d’économie sociale du logement (UESL) le 3 août 1998, cette contribution serait fixée, en 2000, à 32,5% d’une assiette constituée par la collecte et les remboursements de prêts à plus de trois ans de l’année précédente. Elle serait plafonnée à 5.000 millions de francs pour les associés collecteurs de l’UESL et, pour les collecteurs non associés, par l’application du taux effectif constaté pour les associés membres de l’UESL, compte tenu du plafond de 5.000 millions de francs.

I.- L’extinction progressive des prélèvements sur le 1% logement

Le présent article organise, pour la deuxième année, l’application de la convention du 3 août 1998 précitée en matière de prélèvement d’une contribution sur les associés collecteurs du 1% logement. Le dernier prélèvement doit intervenir en 2002.

A.- Le 1% logement

La participation des employeurs à l’effort de construction (PEEC) est obligatoire pour ceux qui occupent au minimum 10 salariés, à l’exception de l’Etat, des collectivités locales et de leurs établissements publics administratifs assujettis à la taxe sur les salaires, autres que ceux qui appartiennent à des professions relevant du régime agricole de sécurité sociale.

Depuis le 1er janvier 1992, le taux de la PEEC est fixé à 0,45% du montant des salaires payés au cours de l’exercice écoulé.

Ce taux, encore égal à 1% en 1971, a été réduit par étapes, en contrepartie d’une contribution supplémentaire au Fonds national d’aide au logement (FNAL), qui finance l’allocation de logement sociale (ALS).

La dernière mesure de réduction du taux, prise en application de l’article 26 de la loi n° 91-716 du 26 juillet 1991, a ramené le taux de cotisation des employeurs de 0,65% à 0,45%, réduction compensée par l’augmentation du taux de la contribution au FNAL de 0,2% à 0,4% de la masse salariale plafonnée.

1.- Les organismes collecteurs

Les organismes collecteurs comprennent :

– les 142 comités interprofessionnels du logement (CIL), associations à caractère professionnel ou interprofessionnel, ayant pour objet exclusif de promouvoir la construction, l’acquisition, l’amélioration, la remise en état de logements, qui collectent environ 91% des ressources ;

– 37 chambres de commerce et d’industrie, au deuxième rang des organismes collecteurs, avec moins de 6% de la collecte ;

– la société immobilière filiale de la SNCF, les sociétés anonymes de crédit immobilier, les caisses d’allocations familiales et les organismes constructeurs HLM-SEM. Chacune de ces catégories assure moins de 2% de la collecte.

Les CIL et les chambres de commerce sont regroupés, depuis 1997, dans l’Union d’économie sociale du logement (UESL), qui fédère et représente ces collecteurs.

2.- Les ressources à long terme

Le total des ressources à long terme résulte, pour chaque exercice, de l’addition de trois éléments :

– la collecte de l’exercice précédent, réalisée en décembre, qui est utilisable avec un exercice de décalage ;

– les remboursements des prêts à long terme ;

– les sommes incorporées, correspondant à la part du résultat des collecteurs financiers affectée au fonds 1%.

       

RESSOURCES STABLES 1997

(en millions de francs)

 

 


Collecte

Remboursements de prêts à long terme


Total

Comités interprofessionnels du logement

6.218

7.647

13.865

Chambres de commerce et d’industrie

349

501

850

Sociétés anonymes de crédit immobilier

58

157

215

Caisses d’allocations familiales

1

1

2

Sociétés immobilières d’entreprises nationales

15

8

23

HLM-SEM

215

0

215

Total

6.856

8.314

15.170

Source : ANPEEC.

 

       

RESSOURCES STABLES 1998

(en millions de francs)

 

 


Collecte

Remboursements de prêts à long terme


Total

Comités interprofessionnels du logement

6.386

8.023

14.409

Chambres de commerce et d’industrie

355

492

847

Sociétés anonymes de crédit immobilier

63

172

235

Caisses d’allocations familiales

0

1

1

Sociétés immobilières d’entreprises nationales

88

8

96

HLM-SEM

221

0

221

Total

7.113

8.696

15.809

Source : ANPEEC, données provisoires.

 

Le total des ressources stables disponibles représente l’assiette de la contribution proposée par le présent article, les " prêts à long terme " étant distingués des " préfinancements ", d’une durée égale ou inférieure à trois ans, qui ne sont pas compris dans l’assiette du prélèvement.

Cette assiette correspond, selon l’Agence nationale pour la participation des employeurs à l’effort de construction (ANPEEC), aux montants indiqués par les tableaux ci-dessus.

B.- Vers l’extinction des prélèvements de l’Etat

1.- La convention du 3 août 1998

Les prélèvements sur les ressources du 1% logement pour participer au financement des aides publiques au logement sont anciens, puisque, depuis 1971, la réduction du taux de la participation des employeurs a été compensée en plusieurs étapes par l’augmentation de leurs contributions au Fonds national d’aide au logement (FNAL).

La loi de finances rectificative du 4 août 1995, l’article 28 de la loi de finances pour 1996 et les articles 47 de la loi de finances pour 1997 et 45 de la loi de finances pour 1998 ont organisé des prélèvements successifs au profit de l’Etat sur les ressources du 1% logement, pour un montant total de près de 18 milliards de francs.

Rompant avec une logique de prélèvement budgétaire, qui empêchait les collecteurs d’avoir une visibilité suffisante sur l’avenir de leurs ressources, la convention du 3 août 1998 s’est inscrite dans la perspective tracée par le Conseil économique et social dans son rapport du 25 mars 1998, qui préconisait le renforcement de l’efficacité du 1% logement et l’établissement d’une véritable contractualisation Etat-partenaires sociaux.

Conclue entre l’Etat et l’UESL, elle permet, comme l’expose son préambule, de :

– clarifier les relations entre l’UESL et l’Etat en remplaçant progressivement la contribution financière de l’UESL à une politique d’Etat par le développement d’actions complémentaires à celles de l’Etat notamment en matière de sécurisation ;

– poursuivre la modernisation du fonctionnement interne du réseau des collecteurs par un renforcement du paritarisme, une rénovation des structures et une amélioration de la productivité. "

La convention prévoit, indépendamment du volet concernant la modernisation des interventions et des structures de l’UESL, la programmation quinquennale de l’extinction des contributions à l’Etat dans les termes suivants :

L’UESL versera à l’Etat, au titre de sa contribution à la politique du logement, les montants suivants :

– 6,4 milliards de francs en 1999 ;

– 5 milliards de francs en 2000 ;

– 3,4 milliards de francs en 2001 ;

– 1,8 milliard de francs en 2002.

Cette contribution s’éteint en 2003.

Les modalités de calcul de la contribution à verser à l’UESL par chacun de ses associés collecteurs sont déterminées par le conseil d’administration de l’UESL. Une convention annuelle entre l’Etat et l’UESL fixe les modalités de versement de ces contributions.

L’Etat s’engage sur la durée de la convention à maintenir le taux de la participation à 0,45% des salaires et à n’effectuer aucun prélèvement sur les associés collecteurs de l’UESL en sus de la contribution prévue au présent article. "

[...]

La présente convention sera mise en oeuvre à compter du 1er janvier 1999 et expirera le 31 décembre 2003.

Elle fait l’objet d’une évaluation annuelle. "

2.- La contribution prélevée en 1999

L’article 56 de la loi de finances pour 1999 a institué la contribution des organismes collecteurs du 1% en 1999, avec l’affectation du produit en recettes du compte d’affectation spéciale n° 902-30 " Fonds pour le financement de l’accession à la propriété ".

L’article 74 de la loi de finances pour 1999 a procédé à la clôture de ce compte au 31 décembre 1999. Il en résulte un solde net positif d’environ 3.500 millions de francs sur le compte.

L’article 56 prévoyait également que la fraction des ressources stables servant au calcul du prélèvement soit fixée à 42,6% en 1999.

Ce taux procédait d’une estimation des ressources de 1998 sur la base des résultats (provisoires) de 1997, et devait permettre d’obtenir le prélèvement prévu par la convention sur les associés membres de l’UESL, soit 6.400 millions de francs.

Pour ce calcul, avait été prise en compte la somme des ressources stables, en 1997, des associés collecteurs membres de l’UESL, soit 6.585 millions de francs de collecte et 8.110 millions de francs de remboursements de prêts. Il avait été appliqué un taux de progression de 2% pour la collecte et de 2,25% pour les remboursements, afin de déterminer la base théorique du prélèvement de 1999,

soit (6.585 ´ 1,02) + (8.110 ´ 1,0225) = 15.009 millions de francs.

L’application du taux de 42,6% à cette somme doit permettre d’obtenir la contribution de 6.400 millions de francs due par les associés membres de l’UESL.

15.009 ´ 42,6% = 6.394 millions de francs.

A toutes fins utiles, le versement des associés collecteurs de l’UESL a été plafonné à 6.400 millions de francs, conformément à la convention du 3 août 1998.

Pour autant, la contribution des associés non membres de l’UESL, estimée à 200 millions de francs, n’a pas été plafonnée. Le même calcul théorique sur les résultats provisoires de 1997 donne le produit suivant :

(284 ´ 1,02) + (161 ´ 1,0225) = 454,30 ´ 42,6% = 193 millions de francs.

En fait, les données provisoires concernant les ressources stables de 1998, servant à l’assiette du prélèvement pour 1999, font apparaître une base supérieure aux prévisions, soit pour les associés membres de l’UESL :

15.256 millions de francs ´ 42,6% = 6.499 millions de francs ;

et pour les collecteurs non membres de l’UESL :

553 millions de francs ´ 42,6% = 235 millions de francs.

Selon ces données, la contribution des premiers devrait donc correspondre au plafond de 6.400 millions de francs et celle des seconds être sensiblement supérieure à l’estimation de 200 millions de francs.

Les recettes effectivement perçues s’élevaient à 5.480 millions de francs à fin août 1999, dont 5.323 millions de francs en provenance de l’UESL et 157 millions de francs versés par les autres collecteurs.

Ces recettes correspondent au versement théorique au 15 août des onze douzièmes de la contribution annuelle, ce qui laisse présumer, comme recettes effectives :

5.323 millions de francs ´ 12/11 = 5.807 millions de francs pour les associés membres de l’UESL ;

157 millions de francs ´ 12/11 = 171 millions de francs pour les collecteurs non membres de l’UESL.

Comme certains versements sont comptabilisés avec retard, ces données n’infirment pas les prévisions indiquées ci-dessus.

II.- Le dispositif prévu par le présent article

Il s’inscrit, comme l’an dernier, dans le cadre de la convention du 4 août 1998, puisqu’il prévoit, pour les organismes collecteurs membres de l’UESL, des versements plafonnés à 5.000 millions de francs. La rédaction de l’article 26 du présent projet prend le parti de modifier l’article 56 de la loi de finances pour 1999 : cette orientation n’est pas juridiquement erronée, mais on peut s’interroger sur sa pertinence, compte tenu du caractère annuel du prélèvement opéré. Enfin, avec une contribution attendue de 180 millions de francs des collecteurs non membres de l’UESL, la contribution totale est estimée à 5.180 millions de francs affectés en recettes du budget général.

Le taux de prélèvement est fixé à 32,5% par le 1° du présent article compte tenu des estimations suivantes de ressources stables pour 1999 :

       

BASE PRÉVISIONNELLE PLF 2000

 

Collecte 1999

Retours sur prêts 1999

Assiette 1999

Contribution 2000

UESL

6.909

8.685

15.594

5.068
plafonné à 5.000

NON-UESL

381

185

566

184
(susceptible d’être modifié en fonction du taux qui sera recalculé sur la base de la cotisation plafonnée de l’UESL)

TOTAL

7.290

8.870

16.160

5.184


Source : Ministère de l’économie, des finances et de l’industrie.

On observe que la base retenue (1999) est estimée en progression de 2,4% pour la collecte et de 2% pour les retours sur prêts par rapport aux ressources de 1998, ce qui est modéré au regard de la progression constatée de 1998 sur 1997 (+3,7% pour la collecte et +4,6% pour les remboursements de prêts à long terme).

On peut en déduire que le plafond devrait être atteint pour les collecteurs membres de l’UESL, ce qui aurait pour effet de diminuer le taux applicable aux collecteurs non membres de l’UESL.

Le 2° du présent article plafonne le prélèvement pour les contributeurs membres de l’UESL à 5.000 millions de francs, conformément à la convention du 4 août 1998. Il prévoit que ces contributeurs sont libérés des versements leur incombant " dans les mêmes conditions " que celles prévues par l’alinéa précédent, c’est-à-dire la substitution de l’UESL aux associés collecteurs.

Enfin, alors que la contribution attendue des collecteurs non membres de l’UESL est estimée à 200 millions de francs, le présent article prévoit que, lorsque l’application du plafond de 5.000 millions de francs conduit à une contribution des associés collecteurs de l’Union d’économie sociale pour le logement telle que le taux de prélèvement (" fraction " des ressources stables) s’avère inférieur à 32,5%, le même taux est alors appliqué pour le calcul de la contribution des organismes non associés de cette union.

Cette disposition, nouvelle par rapport au régime en vigueur en 1999, a pour effet de plafonner la contribution des collecteurs du 1% non membres de l’UESL à raison du taux effectivement constaté, compte tenu du plafond de 5.000 millions de francs, pour les contributeurs associés de cet organisme.

L’article prévoit enfin que la valeur de la fraction des ressources stables (constituant le taux de prélèvement) est établie et publiée au Journal officiel au plus tard le 31 juillet 2000.

Cette dernière précision s’analyse comme servant à l’information du Parlement et des collecteurs, l’absence de publication ne faisant pas obstacle à la diminution de la fraction des ressources stables des collecteurs non membres de l’UESL. En effet, compte tenu du fait que l’ANPEEC ne disposait, en septembre 1999, que de données provisoires sur les ressources stables de 1998, on peut s’interroger sur le caractère prématuré ou non d’une telle publication.

Au total, le présent article s’inscrit dans le cadre de l’application de la convention du 4 août 1998 sans introduire d’innovation par rapport aux perspectives qu’elle a tracées.

*

* *

La Commission a adopté un amendement rédactionnel présenté par votre Rapporteur général (amendement n° I-61) et l’article 26 ainsi modifié.

*

* *

Après l’article 26

La Commission a examiné un amendement présenté par M. Pierre Méhaignerie, tendant à permettre l’application du " dispositif Besson " d’amortissement des logements locatifs aux ascendants et aux descendants.

M. Pierre Méhaignerie a rappelé que le " dispositif Périssol " prévoyait cette possibilité et qu’il était important de favoriser la solidarité intergénérationnelle.

Votre Rapporteur général a rappelé que le dispositif adopté l’année dernière était le résultat d’un arbitrage et qu’il convenait d’observer son fonctionnement avant de réexaminer ses modalités. Par ailleurs, le " dispositif Besson " présente d’autres avantages : ainsi, il est pérenne, à la différence de " l’amortissement Périssol " qui avait un caractère provisoire.

M. Pierre Méhaignerie a réaffirmé l’utilité de cette mesure et a par ailleurs invité la Commission à réfléchir à une éventuelle réévaluation des montants du " prêt à taux zéro ", afin de favoriser l’accession sociale à la propriété.

La Commission a rejeté cet amendement.

Elle a ensuite examiné un amendement de M. Gilbert Gantier, tendant à retirer les locaux de stockage de l’assiette de la taxe sur les locaux à usage de bureaux en Ile-de-France.

M. Francis Delattre a considéré que l’intégration des locaux de stockage dans l’assiette de la taxe était un non-sens économique. En effet, ces locaux sont liés à des activités industrielles et non pas à des bureaux. Cette imposition nuit à l’attractivité de la région Ile-de-France par rapport aux autres métropoles européennes. A cet égard, il a attiré l’attention de la Commission sur les résultats du dernier recensement, qui ont révélé une érosion de la population de la région Ile-de-France.

Votre Rapporteur général a considéré que le dispositif mis en place avait été sensiblement amélioré par le Parlement et qu’il était désormais équilibré.

La Commission a rejeté cet amendement.

Elle a ensuite examiné un amendement présenté par M. Jean-Jacques Jégou excluant de l’assiette de la taxe les locaux appartenant aux collectivités locales.

M. Jean-Jacques Jégou a jugé choquant que les bureaux des mairies, notamment, soient assujettis à cette taxe, alors qu’ils participaient du bon fonctionnement de la démocratie locale.

Votre Rapporteur général a observé que l’Assemblée nationale payait également cette taxe, mais que, comme les mairies, elle bénéficiait d’un taux réduit d’imposition.

La Commission a rejeté cet amendement.

La Commission a examiné deux amendements présentés par M. Gilbert Gantier visant, pour le premier, à exonérer de la taxe sur les locaux de stockage perçue dans la région d’Ile-de-France les plates-formes logistiques multimodales, pour le second, à réduire le taux applicable à ces mêmes plates-formes. Il a précisé que cette taxe avait été considérablement augmentée dans le projet de loi de finances pour 1999 et que le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie avait récemment eu l’occasion de déclarer qu’il n’était pas hostile à son réexamen. Il a considéré qu’une telle révision était nécessaire, afin de donner à la région les moyens de faire face à une concurrence toujours plus vive des autres métropoles européennes.

Votre Rapporteur général a reconnu que la taxe sur les locaux commerciaux et de stockage avait certes des défauts. Toutefois, le Gouvernement a engagé un effort sans précédent de suppression des taxes diverses et de taxes parafiscales.

La Commission a rejeté ces deux amendements.

La Commission a examiné un amendement présenté par M. Christian Cuvilliez, visant à créer une taxe sur toutes les opérations d’achat et de vente de devises étrangères effectuées sur le territoire national.

Votre Rapporteur général s’est déclaré défavorable à cet amendement, en indiquant qu’il présenterait un amendement sur un sujet similaire avec des objectifs qui rejoignaient ceux de M. Christian Cuvilliez.

La Commission a rejeté cet amendement.

Elle a ensuite examiné un amendement présenté par M. Gilbert Gantier visant à autoriser les exploitants agricoles à modifier la date de clôture de leur exercice une fois tous les dix ans.

La Commission a rejeté cet amendement.

*

* *

II.- RESSOURCES AFFECTÉES

Article 27

Dispositions relatives aux affectations.

Texte du projet de loi :

Sous réserve des dispositions de la présente loi, les affectations résultant de budgets annexes et comptes spéciaux ouverts à la date du dépôt de la présente loi sont confirmées pour l’année 2000.

Exposé des motifs du projet de loi :

L’article 18 de l’ordonnance n°59-2 du 2 janvier 1959 portant loi organique relative aux lois de finances dispose que " certaines recettes peuvent être directement affectées à certaines dépenses. Ces affectations spéciales prennent la forme de budgets annexes ou de comptes spéciaux du Trésor ou de procédures comptables particulières au sein du budget général ou d’un budget annexe ".

Il est en outre précisé qu’à l’exception des opérations de prêts ou d’avances et des procédures comptables particulières, " l’affectation est exceptionnelle et ne peut résulter que d’une disposition de loi de finances, d’initiative gouvernementale ".

L’objet de cet article est de confirmer pour 2000 les affectations résultant des lois de finances antérieures.

Observations et décision de la Commission :

L’article 2 de l’ordonnance organique n° 59-2 du 2 janvier 1959 dispose que " seules les dispositions relatives à l’approbation des conventions financières, aux garanties accordées par l’Etat, à la gestion de la dette publique ainsi que de la dette viagère, aux autorisations d’engagements par anticipation ou aux autorisations de programme peuvent engager l’équilibre financier des années ultérieures ".

Cette disposition restrictive, qui vise à limiter les engagements pluriannuels, ne mentionne pas les affectations de recettes.

Or, l’article 18 de l’ordonnance organique admet, par exception au principe d’universalité, que certaines recettes soient affectées à certaines dépenses. Ces affectations prennent la forme de budgets annexes, de comptes spéciaux du Trésor, ou, au sein du budget général ou d’un budget annexe, de procédures comptables particulières décidées par voie réglementaire (fonds de concours ou rétablissement de crédits).

Il est admis que les affectations à un compte spécial ou un budget annexe engagent l’équilibre financier des années ultérieures. Elles pèsent en effet sur les différentes composantes du tableau d’équilibre : budget général, comptes spéciaux et budgets annexes ; opérations définitives et opérations temporaires.

C’est pourquoi le présent article propose, comme il est d’usage, de les confirmer pour l’année 2000. Cette confirmation doit s’entendre sous réserve des dispositions particulières qui pourraient être prises dans le présent projet.

*

* *

La Commission a adopté l’article 27 sans modification.

*

* *

Après l’article 27

La Commission a examiné un amendement de M. Charles de Courson visant à supprimer la cotisation de solidarité à la charge des personnes qui dirigent une exploitation ou une entreprise agricole, alors qu’elles sont déjà assujetties à la CSG, à la CRDS et au prélèvement social.

Votre Rapporteur général a considéré que ce type de problème pourrait être utilement examiné dans le cadre de la mission sur les cotisations sociales agricoles qui a été confiée à M. Jérôme Cahuzac. Il a ajouté de surcroît que la mesure proposée avait un coût de 250 millions de francs. M. Charles de Courson a retiré son amendement.

*

* *

Article 28

Actualisation des taux de la taxe sur les huiles perçue au profit du budget annexe des prestations sociales agricoles.

Texte du projet de loi :

I. La première phrase du II de l’article 1609 vicies du code général des impôts est ainsi rédigée :

" Les taux de la taxe sont révisés chaque année au mois de décembre, par arrêté du ministre chargé du budget publié au Journal officiel, en fonction de l’évolution prévisionnelle en moyenne annuelle pour l’année suivante des prix à la consommation de tous les ménages hors les prix du tabac. Cette révision comporte, le cas échéant, une correction au titre de l’année en cours. Les évolutions prévisionnelles prises en compte sont celles qui figurent au rapport économique et financier annexé au dernier projet de loi de finances. " 

II. Pour les taux applicables en 2000, l’arrêté mentionné au I du présent article sera publié en janvier 2000.

Exposé des motifs du projet de loi :

L’article 8 de la loi de finances n° 62-1259 du 22 décembre 1962 a créé, au profit du budget annexe des prestations sociales agricoles, une taxe sur les huiles végétales, fluides ou concrètes, fabriquées, importées ou qui font l’objet d’une acquisition intra-communautaire et destinées à l’alimentation humaine. Un article de la loi de finances fixait jusqu’à présent les taux de la taxe en loi de finances initiale, en fonction des évolutions prévisibles de l’indice des prix à la consommation hors tabac.

Il est proposé, à partir de 2000, de rendre automatique cette actualisation par l’application d’un mécanisme d’indexation sur l’indice des prix à la consommation. Le barème ainsi revalorisé sera publié chaque année, au mois de décembre, par arrêté du ministre du budget.

Observations et décision de la Commission :

Le présent article propose d’instaurer un mécanisme d’indexation automatique des taux de la taxe sur les huiles perçues au profit du budget annexe des prestations sociales agricoles (BAPSA), en vue de mettre à fin à la présentation rituelle, dans chaque projet de loi de finances, d’un article portant revalorisation de ces taux.

· La taxe sur les huiles constitue une recette du BAPSA. Son régime est fixé par l’article 1609 vicies du code général des impôts. Cette taxe sur les huiles végétales, fluides ou concrètes, effectivement destinées, en l’état ou après incorporation dans tous produits alimentaires, à l’alimentation humaine, est due sur les huiles fabriquées, importées ou qui font l’objet d’une acquisition intra-communautaire.

Les taux sont fixés par la loi, en francs par kilogramme et par litre. Le tableau ci-après présente le barème applicable à l’année 1999, défini par l’article 55 de la loi de finances pour 1999. L’absence de mécanisme d’indexation conduisait à demander périodiquement au Parlement de procéder à la révision du barème, pour tenir compte de l’érosion monétaire.

BARÈME POUR 1999 DE LA TAXE SUR LES HUILES
PERÇUE AU PROFIT DU BAPSA

 

Franc par kilogramme

Franc par litre

Huile d’olive

0,972

0,875

Huiles d’arachide et de maïs

0,875

0,797

Huiles de colza et de pépins de raisin

0,449

0,408

Autres huiles végétales fluides et huiles d’animaux marins dont le commerce et l’utilisation ne sont pas soumis aux règles internationales ou nationales relatives aux espèces protégées

0,764

0,666

Huiles de coprah et de palmiste

0,583

Huile de palme

0,534

Huiles d’animaux marins dont le commerce et l’utilisation sont soumis aux règles internationales ou nationales relatives aux espèces protégées

0,972

Le produit de la taxe figure à la ligne 70-46 " Taxe sur les corps gras alimentaires " du BAPSA, dont l’évolution est retracée dans le tableau ci-après :

ÉVOLUTION DU PRODUIT DE LA TAXE SUR LES CORPS GRAS ALIMENTAIRES AFFECTÉE AU BAPSA

(en millions de francs)

 

1991

1992

1993

1994

1995

1996

1997

1998

1999

PLF 2000

LFI

505

571

600

639

610

567

577

621

659

664

Exécution

547

572

542

545

570

606

630

624

659 (a)

(a) L’évaluation pour 1999 n’a pas été révisée.

On peut noter une forte variabilité, d’environ ±10%, du produit constaté autour de sa tendance de moyen terme, qui doit inciter à considérer la prévision de recettes en loi de finances initiale comme un ordre de grandeur plutôt que comme une évaluation très " fine ".

· Le I du présent article propose d’intégrer dans le texte de l’article 1609 vicies du code général des impôts un mécanisme d’indexation annuelle. Les taux de la taxe seraient ainsi révisés chaque année, au mois de décembre, par arrêté du ministre chargé du budget publié au Journal officiel. La valeur du coefficient d’indexation serait fondée sur deux éléments :

– l’évolution prévisionnelle de l’indice des prix à la consommation de l’ensemble des ménages, hors prix du tabac, telle qu’inscrite dans le rapport économique et financier annexé au dernier projet de loi de finances ;

– une correction éventuelle au titre de l’année en cours.

Ces deux éléments nécessitent quelques précisions.

En premier lieu, l’INSEE publie actuellement plusieurs indices de prix à la consommation. Sans déterminer précisément la nature de l’indice utilisé pour l’indexation du barème – ce qui serait manifestement extérieur au domaine de la loi défini par la Constitution – la rédaction du présent article indique qu’il faut écarter le déflateur de la consommation des ménages – lié à l’élaboration des comptes nationaux – au profit d’un indice fondé sur un panier de biens et services.

Plusieurs options restent encore envisageables : l’" indice des prix à la consommation harmonisé " est calculé afin d’établir des comparaisons valables avec les pays membres de la Communauté européenne. L’indice national des prix à la consommation distingue entre l’indice relatif à " l’ensemble des ménages France entière (métropole et DOM) " et l’indice relatif aux " ménages urbains dont le chef est ouvrier ou employé France entière (métropole et DOM) ".

La mention expresse de " l’ensemble des ménages " dans le texte même de la loi réduit donc le champ des possibles et définit clairement la nature de l’indice souhaité par le législateur (), sans pour autant fermer la porte aux nécessaires évolutions susceptibles d’en affecter la détermination et le mode de calcul, sous l’égide de l’INSEE.

En second lieu, la possibilité d’introduire, au cours de la révision annuelle, une correction au titre de l’année précédente constitue une innovation. Dans les propositions de revalorisation annuelle soumises antérieurement au Parlement, seul était pris en compte l’indice prévisionnel d’évolution des prix associé au projet de loi de finances.

La modification proposée dans le présent article apparaît purement circonstancielle, motivée par le décalage entre la prévision d’inflation associée au projet de loi de finances pour 1999 (1,2%) et l’évaluation actuelle de l’inflation hors tabac en 1999, soit 0,5%.

Il est vrai que l’ampleur de la désinflation constatée en 1999 a déjoué les anticipations les plus optimistes des conjoncturistes. D’ailleurs, en sens inverse, on ne peut exclure que l’inflation effective soit supérieure une année à l’inflation prévue dans le rapport économique et financier associé au projet de loi de finances de l’année considérée.

Faut-il pour autant considérer qu’un mécanisme correcteur est indispensable, alors même que le succès historique de la lutte contre l’inflation repose sur l’utilisation, comme référence des mécanismes d’indexation de divers prix et salaires, du niveau prévisionnel d’inflation et sur la suppression de toute référence à l’inflation constatée ex post ?

La remise en cause du " principe " d’indexation sur l’inflation prévisionnelle, même dans une disposition législative de portée limitée et dont les effets de contagion sur l’économie paraissent faibles, ne paraît pas souhaitable.

On pourrait même se demander si, en prévoyant seulement que " la révision comporte, le cas échéant, une correction au titre de l’année en cours ", le législateur ne méconnaîtrait pas, en matière de fixation du taux de l’impôt, l’étendue des compétences qu’il tient de l’article 34 de la Constitution.

Votre Rapporteur général vous propose, à ce titre, d’amender le texte du présent article pour supprimer toute référence à une correction ex post alignée sur le niveau effectif d’inflation.

Le II du présent article propose, pour des raisons évidentes liées au calendrier probable d’adoption et de promulgation de la loi de finances pour 2000, de fixer au mois de janvier 2000 la date de publication de l’arrêté relatif au barème applicable à l’année 2000.

La Commission a adopté un amendement présenté par votre Rapporteur général, visant à supprimer la possibilité de correction des taux de la taxe au titre de l’année en cours, son auteur ayant insisté sur l’intérêt de supprimer une référence à l’indexation (amendement n° I-62).

Elle a ensuite adopté l’article 28 ainsi modifié.

*

* *

Article 29

Affectation du droit de consommation sur les tabacs manufacturés.

Texte du projet de loi :

Le produit du droit de consommation sur les tabacs manufacturés prévu à l’article 575 du code général des impôts et liquidé par le fournisseur à compter du mois de novembre 1999 est affecté selon les modalités suivantes après prélèvement prévu par l’article 49 de la loi de finances pour 1997 (n° 96-1181 du 30 décembre 1996) modifié :

- une fraction égale à 85,50 %, dans la limite de 39,5 milliards de francs, est affectée au Fonds de compensation des allégements de cotisations sociales créé par l’article …. de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2000 (n°99-… du .. décembre 1999) ;

- une fraction égale à 7,58 %, dans la limite de 3,5 milliards de francs, est affectée à la Caisse nationale d’assurance maladie ;

- une fraction égale à 0,43 %, dans la limite de 200 millions de francs, est affectée au Fonds de cessation anticipée d’activité des travailleurs de l’amiante, créé par l’article 41 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 1999 (n° 98-1194 du 23 décembre 1998).

Exposé des motifs du projet de loi :

L’article vise à affecter le produit du droit de consommation sur les tabacs manufacturés au financement de diverses dépenses sociales : 

- l’allégement des cotisations à la charge de l’employeur sur les bas salaires prévu par l’article L. 241-13 du code de la sécurité sociale, actuellement compensé par l’État et qui, à partir de 2000, sera pris en charge par le fonds créé par le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2000 ;

- la compensation par la CNAM de la perte des cotisations d’assurance personnelle précédemment versées par les départements et l’État et supprimées dans le cadre de la loi n° 99-641 du 27 juillet 1999 portant création d’une couverture maladie universelle ;

- la participation de l’État au dispositif de préretraite pour les salariés et anciens salariés des établissements de fabrication de matériaux contenant de l’amiante.

Observations et décision de la Commission :

Le présent article vise à affecter des parts déterminées du produit du droit de consommation sur les tabacs à trois organismes assurant le financement de certaines dépenses de sécurité sociale.

En elle-même, la mise en œuvre d’une procédure d’affectation relative au droit de consommation sur les tabacs n’a rien d’une nouveauté. L’article 48 de la loi de finances initiale pour 1990 (n° 89-935 du 29 décembre 1989) avait affecté le produit du droit de consommation à la Caisse nationale des allocations familiales (CNAF), à hauteur de 3,98 centimes par cigarette vendue dans les départements de France continentale. Cette mesure était valable pour la seule année 1990.

L’article 33 de la loi de finances initiale pour 1993 (n° 92-1376 du 30 décembre 1992) a renouvelé cette opération, à hauteur de 1,5 centime par cigarette vendue dans les départements de France continentale et au profit de la Caisse nationale d’assurance maladie (CNAM), pour la seule année 1993.

Enfin, l’article 49 de la loi de finances initiale pour 1997 (n° 96-1181 du 30 décembre 1996) a procédé à l’affectation pérenne d’une fraction égale à 6,39% du droit de consommation sur les tabacs au profit de la CNAM. Ce pourcentage a été porté à 9,1% par l’article 46 de la loi de finances initiale pour 1998 (n° 97-1269 du 30 décembre 1997), sur la base d’un amendement gouvernemental présenté en séance publique comme étant " de précision " ().

Cependant, le dispositif proposé dans le présent article est innovant. Il fixe les parts du produit du droit de consommation qu’il convient d’affecter à chaque établissement public visé comme un pourcentage du produit du droit, assorti d’un plafond. La légitimité d’une telle méthode s’explique par les objectifs sous-jacents à chacune des affectations, qu’il convient donc d’examiner séparément.

I.- L’affectation d’une partie du droit de consommation sur les tabacs manufacturés au " Fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de sécurité sociale "

Votre Rapporteur général remarquera, tout d’abord, que la dénomination du fonds retenue dans le présent projet de loi de finances est différente de celle retenue dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2000. Le présent article évoque un " Fonds de compensation des allégements de cotisations sociales " ; l’article 2 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2000 fait référence au " Fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de sécurité sociale ". Votre Rapporteur général vous proposera donc d’adopter un amendement rédactionnel destiné à rétablir l’harmonie lexicale des deux textes.

L’affectation qu’il est proposé d’effectuer au profit du Fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de sécurité sociale a pour but de transférer à ce fonds une ressource équivalente au montant des dépenses qu’il aura à effectuer, en 2000, au titre de la " ristourne dégressive " de cotisations sociales sur les bas salaires.

A.- La " ristourne dégressive ", une histoire complexe

· Le dispositif actuel de la " ristourne dégressive " provient de la fusion, effective au 1er octobre 1996, de deux mesures antérieures visant à diminuer certaines cotisations sociales assises sur les rémunérations d’activité.

Dans un premier temps, la loi du 27 juillet 1993 relative au développement de l’emploi et de l’apprentissage a instauré une exonération des cotisations patronales au titre de la branche famille, dite " abattement-famille ", compensée à 100% par l’État, totale pour les salaires compris entre 1 et 1,1 SMIC et partielle (50%) pour les salaires compris entre 1,1 et 1,2 SMIC. La loi quinquennale du 20 décembre 1993 relative au travail, à l’emploi et à la formation professionnelle a porté ces deux seuils respectivement à 1,2 et 1,3 SMIC.

Dans un deuxième temps, la loi du 4 août 1995 portant diverses mesures d’urgence pour l’emploi et la sécurité sociale a instauré une ristourne dégressive de cotisations à la charge des employeurs au titre des assurances sociales, des accidents du travail et des allocations familiales dues pour les salaires versés au cours du mois civil compris entre 1 SMIC et 1,2 SMIC.

Mais la coexistence de deux dispositifs poursuivant le même objectif d’allégement du coût du travail des emplois peu qualifiés ne constituait ni un gage de lisibilité de la politique de l’emploi, ni un facteur de simplification de la vie des entreprises. Par ailleurs, si les plafonds des deux dispositifs coïncidaient en 1995, étant fixés à 1,2 SMIC, ils devaient diverger en 1996, le plafond d’exonération totale dans le cadre de l’abattement-famille devant être relevé chaque année pour être fixé définitivement à 1,5 SMIC en 1998.

Afin d’éliminer ces inconvénients, la loi de finances initiale pour 1996 (n° 95-1346 du 30 décembre 1995) a procédé à la fusion des deux dispositifs, à titre expérimental pendant la période allant du 1er octobre 1996 au 31 décembre 1997. Elle a également relevé à 1,33 SMIC le plafond de salaire ouvrant droit à la réduction des cotisations patronales.

La loi de finances pour 1998 (n° 97-1269 du 30 décembre 1997) a pérennisé la fusion de l’abattement-famille et de la ristourne dégressive. Elle a recentré le bénéfice de ce dispositif fusionné en direction des bas salaires, en réduisant de 1,33 SMIC à 1,3 SMIC le plafond de rémunération ouvrant droit à la réduction de cotisations. Afin d’éviter certains effets négatifs d’un avantage excessif accordé au temps partiel, elle a également proratisé la ristourne dégressive en fonction du temps de travail, revenant ainsi à la philosophie du dispositif antérieur à 1996.

· Le régime juridique de la ristourne dégressive est gouverné par plusieurs articles du code de la sécurité sociale et, au premier chef, par l’article L. 241-13 de ce code, dont les principales dispositions sont rappelées ci-après.

Cet article pose le principe d’une réduction des cotisations à la charge des employeurs, au titre des assurances sociales, des accidents du travail et des maladies professionnelles et des allocations familiales, assises sur des gains et rémunérations versés au cours d’un mois civil et inférieurs à un plafond fixé à 169 fois le salaire minimum de croissance majoré de 30%.

L’article L 241-13 du code de la sécurité sociale dispose également que la réduction de cotisations sociales est soumise à un plafond et calculée en fonction de deux coefficients, selon que les rémunérations mensuelles sont supérieures ou inférieures à 169 fois le SMIC – cette dernière possibilité étant ouverte du fait de l’appréciation mensuelle et non horaire du montant des rémunérations concernées. Il soumet à proratisation le montant de la réduction lorsque le nombre d’heures rémunérées dans le mois est inférieur à la durée légale ou conventionnelle du travail applicable sur le mois civil.

Le même article précise les catégories d’employeurs susceptibles de bénéficier de la ristourne dégressive, en excluant notamment La Poste et France Télécom, ainsi que les employeurs relevant d’un régime spécial de sécurité sociale et les particuliers employeurs.

L’article D 241-8 du code de la sécurité sociale dispose que le montant maximal de la réduction de cotisations sociales est égal au produit de 169 fois la valeur du SMIC applicable à la rémunération versée par un coefficient, fixé à 0,182 par le décret n° 96-835 du 20 septembre 1996. La réduction mensuelle maximale de cotisations sociales est donc égale à 1.252,47 francs depuis le 1er juillet 1999.

L’article D 241-7 du même code fixe le mode de calcul de la réduction de cotisations sociales. Celle-ci est égale au produit des deux éléments suivants :

– la différence entre le plafond de rémunération ouvrant droit à la réduction de cotisations (soit, actuellement, 1,3 SMIC mensuel) et le montant des rémunérations perçues au cours du mois civil ;

– un coefficient égal à 0,607 lorsque les rémunérations sont supérieures à 169 fois le SMIC, égal à 0,182 lorsqu’elles y sont inférieures.

Le graphique présenté ci-après permet de visualiser le mécanisme de ristourne dégressive. Les montants (rémunérations et ristourne) sont exprimés par rapport au SMIC.

Pour des rémunérations inférieures au SMIC mensuel, la ristourne est égale à 18,2% de la rémunération et croît donc en proportion directe de celle-ci. Lorsque la rémunération est égale au SMIC, la ristourne atteint sa valeur maximale définie par décret (article D 241-8 du code de la sécurité sociale). Au-delà, le mécanisme dégressif entre en action et la ristourne diminue pour s’annuler lorsque la rémunération égale 1,3 SMIC mensuel.

Les dispositions de la ristourne ont été adaptées à diverses situations plus spécifiques :

– pour les salariés dont le paiement des indemnités de congés payés et des charges afférentes est effectué par l’intermédiaire de caisses de congé payé, le montant de la ristourne est majoré de 10% tout en restant inférieur au montant maximal précité (article R 241-8 du code de la sécurité sociale) ;

– les articles R 249-9 et R 249-9-1 du même code édictent des dispositions spécifiques aux cotisations sociales perçues sur les rémunérations des salariés d’hôtels, cafés ou restaurants et des salariés des entreprises de transport routier à longue distance ;

– les articles R 241-5 à R 241-7 du même code règlent le cas des salariés dont les rémunérations ne peuvent être déterminées, en application de dispositions réglementaires, conventionnelles ou du contrat de travail, en fonction du nombre d’heures de travail effectuées.

Enfin, le bénéfice de la ristourne a été étendu à d’autres publics que ceux visés dans le cas général :

– l’article L 711-13 du code de la sécurité sociale renvoie à un décret en Conseil d’État le soin de fixer les conditions d’application de la ristourne aux employeurs relevant du régime spécial de sécurité sociale dans les mines ainsi qu’à ceux relevant du régime spécial de sécurité sociale des clercs et employés de notaire. Ces employeurs relèvent du secteur privé mais ne sont pas couverts par l’article L 214-13 du code de la sécurité sociale ;

– l’article 1062-1 du code rural permet d’appliquer la ristourne dégressive aux rémunérations des salariés agricoles ;

– le paragraphe IV de l’article premier de la loi n° 95-882 du 4 août 1995 relative aux mesures d’urgence pour l’emploi et la sécurité sociale étend le bénéfice de la ristourne dégressive aux employeurs relevant du régime spécial de sécurité sociale des marins et renvoie à un décret en Conseil d’État le soin d’effectuer les adaptations nécessaires.

B.- L’absorption programmée de la ristourne dégressive dans le nouveau dispositif gouvernemental d’allégement des cotisations sociales

Le projet de loi relatif à la réduction négociée du temps de travail, actuellement en cours de discussion à l’Assemblée nationale, crée un nouveau dispositif d’allégement des charges sociales lié au processus de réduction du temps de travail.

Une fois adopté par le Parlement, le dispositif nouveau devrait être intégré au code de la sécurité sociale pour en constituer l’article L 241-13-1.

Votre Rapporteur général ne présentera pas ici un commentaire détaillé des dispositions du projet de loi précité relatives à l’allégement des cotisations sociales. Le rapport présenté par M. Gaëtan Gorce, au nom de la Commission des affaires culturelles, familiales et sociales (), fournira, à cet égard, toutes les précisions nécessaires. Tout au plus convient-il de rappeler dans les développements ci-après quelques éléments essentiels plus directement liés à la compétence financière du Parlement et à l’objectif poursuivi par le présent article.

Le bénéfice de l’allégement des cotisations sociales est strictement conditionné à la conclusion d’une convention ou d’un accord de réduction du temps de travail respectant la future durée légale du travail et ayant recueilli un consensus minimal de la part des organisations syndicales représentatives ou des salariés. La seule exception au principe de la réduction négociée du temps de travail concerne les entreprises employant des salariés travaillant de façon permanente en équipes successives selon un cycle continu, à la condition que leur durée de travail n’excède pas en moyenne 35 heures par semaine.

Le droit aux allégements de cotisations sociales est lié au salarié. Comme l’explique M. Gaëtan Gorce, rapporteur du projet de loi, " tous les salariés d’une entreprise n’ouvrent donc pas nécessairement droit à l’allégement, certains pouvant être exclus du champ de la convention ou de l’accord. Le droit à allégement est apprécié au regard de la situation de chaque salarié pris individuellement ".

Le barème de l’allégement, dont, pour l’heure, seuls quelques linéaments sont inscrits dans le projet de loi, renvoyant l’ensemble de la construction à un décret, combine un allégement forfaitaire (dit " aide pérenne ") et un mécanisme dégressif similaire à celui de la ristourne dégressive examinée ci-avant, qui intervient lorsque la rémunération est comprise entre 1 SMIC et 1,8 SMIC. Le graphique ci-après permet de visualiser l’impact du mécanisme sur le montant de l’allégement et de comparer le dispositif lié à la réduction du temps de travail (RTT) à la ristourne dégressive. La partie de la courbe représentative du dispositif " RTT " n’est pas définie pour des rémunérations mensuelles inférieures au SMIC mensuel, car le barème est appliqué à l’équivalent temps plein de la rémunération du salarié.

Par ailleurs, la détermination du montant effectif de l’allégement s’effectue sur la base d’une comparaison entre la durée individuelle de travail et la durée collective de travail dans l’entreprise. En particulier, les salariés employés pour une durée inférieure à la moitié de la durée collective applicable n’ouvrent pas droit à l’allégement RTT.

Enfin, les salariés ouvrant droit à l’allégement de cotisations défini par le nouvel article L 241-13-1 du code de la sécurité sociale ne peuvent ouvrir droit à l’octroi d’autres types d’allégements de cotisations, en particulier la ristourne dégressive. Celle-ci reste seulement applicable aux salariés n’ouvrant pas droit à l’allégement RTT.

Il résulte de ces dispositions que la montée en régime de la réduction du temps de travail, sous l’impulsion de la " seconde loi " sur les 35 heures, devrait peu à peu réduire le nombre de salariés susceptibles de donner lieu à une ristourne dégressive.

Pourtant, les prévisions relatives aux perspectives à long terme du système de financement associé au processus de réduction du temps de travail ne semblent pas mettre en évidence une telle érosion.

C.- L’intégration d’une fraction du droit de consommation sur les tabacs manufacturés dans les sources de financement de la réduction du temps de travail

Conformément aux informations rendues publiques par le Gouvernement dès le printemps 1998, le financement de la réduction du temps de travail associera plusieurs partenaires autour d’un établissement public – le Fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de sécurité sociale – et reposera sur des ressources élargies.

· Au-delà des frais de gestion administrative du Fonds, les dépenses de celui-ci seraient constituées du versement aux régimes de sécurité sociale concernés des montants correspondants :

– à la prise en charge des allégements consentis dans le cadre de la future loi sur la réduction négociée du temps de travail ;

– à la prise en charge des aides incitatives consenties dans le cadre de la loi n° 98-461 du 13 juin 1998 d’orientation et d’incitation à la réduction du temps de travail ;

– à la prise en charge de la ristourne dégressive, dans tous les cas de figure (régime général, régimes spéciaux des mines, des clercs de notaire et des marins, salariés agricoles).

Les allégements de cotisations sociales régis par la loi du 11 juin 1996, dite " loi Robien ", continueraient ainsi d’être supportés directement par le budget de l’État, sur la section Emploi. Il est vrai que le dispositif est destiné à s’éteindre dans quelques années.

· Le financement des dépenses du Fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de sécurité sociale serait assuré par des ressources permanentes et des ressources de trésorerie. Au titre des premières, l’article 2 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2000 recense :

– une fraction du produit du droit de consommation sur les tabacs manufacturés, dans les conditions fixées par la loi de finances pour 2000 ;

– la contribution sociale sur les bénéfices des sociétés, prévue à l’article 3 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2000. Les grandes lignes de cette contribution sociale sur les bénéfices sont déjà bien connues des parlementaires puisqu’elles se calquent très étroitement sur le dispositif de la " contribution temporaire " d’impôt sur les sociétés instaurée par l’article premier de la loi n° 97-1026 du 10 novembre 1997 portant mesures urgentes à caractère fiscal et financier. La contribution sociale se distingue cependant de la précédente sur les points suivants :

w la contribution sociale est pérenne ;

w le taux d’imposition est fixé à 3,3% au lieu de 15% en 1997 et 10% en 1998 et 1999 pour la " contribution temporaire " ; ce taux sera appelé à évoluer, comme le suggèrent les indications relatives au produit attendu, à terme, de la contribution sociale sur les bénéfices ;

w la contribution sociale fait l’objet d’un abattement qui ne peut excéder 5 millions de francs sur une période de douze mois, proratisé en fonction de la durée de l’exercice social ou de la période d’imposition.

– la taxe générale sur les activités polluantes, dont l’inscription au budget général n’aura ainsi été qu’éminemment passagère, limitée au seul exercice 1999 ;

– une contribution versée par plusieurs organismes gérant des régimes de protection sociale, c’est-à-dire l’ensemble des régimes d’assurance maladie, d’assurance vieillesse et d’accidents du travail, ainsi que les organismes chargés de la gestion de l’assurance chômage. La légitimité d’une contribution de ces organismes au financement de la réduction du temps de travail reste aujourd’hui contestée ici ou là. Pourtant, c’est bien un principe de base des finances publiques que chacun participe aux charges publiques à hauteur de ses capacités contributives. Or le fondement de la contribution concernée est bien un " recyclage " des surcroîts de recettes et économies de dépenses induites, pour ces organismes, par la réduction du temps de travail ;

– une contribution de l’État, qui a vocation à être imputée sur le budget de l’Emploi ;

– les produits non consommés de l’exercice précédent.

· Le tableau prévisionnel de financement du Fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de sécurité sociale pour 2000, reproduit ci-après, peut être déduit des prévisions de recettes et de dépenses afférentes à chacun des postes énumérés ci-avant.

ÉQUILIBRE EN 2000 DU FONDS DE FINANCEMENT DE LA RÉFORME DES COTISATIONS PATRONALES DE SÉCURITÉ SOCIALE

(en milliards de francs)

Ressources

 

Emplois

 

w Fraction du droit de consommation sur les tabacs

w Contribution sociale sur les bénéfices

w TGAP étendue

w Contribution de divers organismes sociaux (a)

w Contribution de l’État

w Taxation des heures supplémentaires (b)


39,5


4,3

3,2


7,8

4,3


5,4

w Ristourne dégressive

w Allégement supplémentaire (composante moyenne et bas salaires de l’allégement prévu par le projet de loi n° 1786 rectifié)

w Aides incitatives (loi du 11 juin 1998) et aides pérennes (composante forfaitaire de l’allégement prévu par le projet de loi n° 1786 rectifié)

39,5




7,5





17,5

Total Ressources

64,5

Total Emplois

64,5

(a) Le régime général de la sécurité sociale a déjà provisionné 5,5 milliards de francs au titre de sa contribution au financement de la réduction du temps de travail. Les régimes spéciaux ont provisionné 0,1 milliard de francs. Ces provisions seront prises en compte dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2000.

(b) Ressource de trésorerie.

La montée en charge de la réduction du temps de travail va avoir deux conséquences : l’augmentation des ressources et emplois du fonds, jusqu’à un niveau évalué à 105 milliards de francs environ par le Gouvernement ; une modification profonde de la répartition des emplois entre ristourne dégressive, allégement supplémentaire et allégement forfaitaire prévus dans le projet de loi sur la réduction négociée du temps de travail.

En effet, comme cela a été exposé ci-avant, les salariés actuellement couverts par la ristourne dégressive ont vocation à bénéficier du régime défini par le projet de loi sur la réduction négociée du temps de travail, du fait des règles qui gouvernent, dans ledit projet, les ouvertures de droits à allégement de cotisations sociales. L’évaluation chiffrée de ce phénomène est difficile.

Le Gouvernement a présenté à votre Rapporteur général un tableau faisant apparaître, " à terme ", un montant de dépenses de 39,5 milliards de francs pour la ristourne dégressive, de 25 milliards de francs pour l’allégement " moyens et bas salaires " et de 40 milliards de francs pour l’allégement forfaitaire (" aide pérenne "), calibré à 4.000 francs par an et par salarié concerné.

En fait, le tableau prévisionnel de financement du fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de sécurité sociale au terme de quelques années ne peut être dressé de façon plus précise que ci-après.

ÉQUILIBRE " À TERME " DU FONDS DE FINANCEMENT DE LA RÉFORME DES COTISATIONS PATRONALES DE SÉCURITÉ SOCIALE

(en milliards de francs)

Ressources

 

Emplois

 

w Fraction du droit de consommation sur les tabacs

w Contribution sociale sur les bénéfices

w TGAP étendue

w Contribution de divers organismes sociaux et de l’État


39,5


12,5

12,5


25,0

w Ristourne dégressive

w Allégement supplémentaire (composante moyens et bas salaires de l’allégement prévu par le projet de loi n° 1786 rectifié)

w Aides incitatives (loi du 11 juin 1998) et aides pérennes (composante forfaitaire de l’allégement prévu par le projet de loi n° 1786 rectifié)

104,5

Total Ressources

104,5

Total Emplois

104,5

L’affectation d’une fraction du droit de consommation sur les tabacs, proposée par le présent article, est en fait déconnectée de tout lien avec le financement de la ristourne dégressive, hormis la coïncidence en 2000 du montant du produit transféré et de l’évaluation prévisionnelle des dépenses attendues au titre de la ristourne dégressive cette même année.

Le plafonnement à 39,5 milliards de francs du produit du droit transféré aboutit à donner au financement des allégements de cotisations sociales un socle de ressources stable et calibré pour constituer environ 40% du total des ressources utilisées à terme.

II.- L’affectation d’une partie du droit de consommation sur les tabacs manufacturés à la Caisse nationale d’assurance maladie

A.- La couverture maladie universelle : une réelle avancée sociale

La loi n° 99-641 du 27 juillet 1999 portant création d’une couverture maladie universelle (CMU) a été publiée au Journal officiel du 28 juillet 1999. Le principe d’une telle couverture avait été inscrit dans le programme d’action qui accompagnait la loi n° 98-657 du 29 juillet 1998 d’orientation contre les exclusions.

Par ailleurs, M. Jean-Claude Boulard, député, avait remis au Premier ministre, en août 1998, un rapport examinant trois scénarios pour la mise en place de la CMU. Ce rapport concluait à la nécessité de mettre en place un système partenarial, associant un régime de base centralisé et une participation des organismes de protection complémentaire. Le rapport estimait également que les conditions étaient réunies pour la mise en place rapide d’une couverture maladie universelle.

La CMU vise à offrir une couverture de base aux 150.000 personnes qui n’en bénéficient pas et à instituer une couverture complémentaire applicable à environ 6 à 7 millions de personnes.

· La couverture de base est accessible sur simple critère de résidence, à toute personne qui n’a droit à aucun titre aux prestations en nature d’un régime d’assurance maladie et maternité. Seuls conserveront leur régime spécifique les étudiants, les ministres des cultes et diverses autres catégories de personnes comme, par exemple, les personnels diplomatiques et consulaires, les fonctionnaires d’un Etat étranger, les personnes en séjour sur le territoire national pour suivre un traitement médical ou une cure, les travailleurs frontaliers résidant en France qui ont la faculté d’être affiliés à titre volontaire à un régime d’assurance maladie dans l’État où ils exercent leur activité, etc.

En conséquence, le régime de l’assurance personnelle maladie-maternité est supprimé. L’assurance volontaire vieillesse et invalidité demeure en vigueur.

L’accès aux prestations en nature est " immédiat et automatique ", dès la production par le demandeur d’un document attestant de son identité et de la justification du critère de résidence stable et régulière. Les personnes sans domicile fixe devront faire élection de domicile auprès d’un organisme agréé à cet effet par l’autorité administrative ou auprès d’un centre communal ou intercommunal d’action sociale.

Le droit à la CMU est gratuit pour les personnes les plus démunies. Le principe du versement d’une contribution au régime général est réaffirmé dans la loi mais tempéré par l’institution d’un plafond de ressources en-deçà duquel les personnes affiliées ne sont pas redevables d’une cotisation.

· La protection complémentaire santé est ouverte à toute personne satisfaisant à un critère de résidence – semblable à celui fixé pour la couverture de base – et un critère de ressources fixé par décret. Ainsi, même les personnes affiliées à un régime obligatoire de sécurité sociale (salariés, artisans, etc.) mais disposant de faibles ressources pourront accéder à la protection complémentaire de la CMU.

La protection complémentaire est gratuite et porte sur les prestations en nature : les bénéficiaires ne sont pas redevables du ticket modérateur, du forfait journalier hospitalier, de certains frais exposés, en sus des tarifs de responsabilité, concernant des soins dentaires ou les dispositifs médicaux à usage individuel comme les prothèses auditives, la lunetterie ou les appareillages.

Enfin, les intéressés bénéficient de la dispense d’avance de frais (" tiers payant ") pour toutes les prestations prises en charge par les régimes obligatoires maladie et maternité ainsi que pour les frais évoqués ci-avant.

Les caisses d’assurance maladie ont l’obligation de prendre en charge, pour le compte de l’Etat, la couverture complémentaire des personnes qui en font la demande. Elles bénéficient, en retour, d’un remboursement de ces prestations complémentaires par le Fonds de financement de la protection complémentaire maladie.

Les organismes de protection complémentaire ont la faculté, mais non l’obligation, de participer au dispositif mis en place par la loi relative à la CMU. Les déclarations des organismes permettront de constituer la liste officielle des organismes partie prenante à la CMU.

La loi intègre également des mesures d’accompagnement relatives, par exemple, aux tarifs pratiqués par les médecins ou les chirurgiens-dentistes en faveur des bénéficiaires de la CMU.

· L’aide médicale est réformée en profondeur. L’aide médicale départementale est supprimée, l’aide de l’État subsistant pour les personnes malades qui résideraient en France de façon irrégulière – donc n’entrant pas dans le champ de la CMU.

B.- Les transferts financiers induits par l’instauration
de la couverture maladie universelle

La suppression de l’assurance personnelle, donc de la prise en charge totale ou partielle des cotisations d’assurance personnelle par un tiers () et l’extension du champ des personnes bénéficiant de la couverture de base impliquent une perte de recettes et l’apparition de charges nouvelles pour la Caisse nationale d’assurance maladie (CNAM) au titre de la couverture de base.

La dégradation ex ante de l’équilibre financier de la CNAM a été évaluée à 8,65 milliards de francs. Plusieurs mesures, effectives à compter du 1er janvier 2000, devraient permettre de ramener ce solde à 900 millions de francs :

– la proportion du produit du droit de consommation sur les alcools affectée au fonds de solidarité vieillesse (article L. 135-3 du code de la sécurité sociale) sera ramenée de 60% à 55%. La différence, soit 580 millions de francs, sera affectée à la CNAM. En effet, la suppression de la prise en charge des cotisations d’assurance personnelle pour les titulaires de l’allocation spécifique vieillesse permettra à l’assurance vieillesse de réaliser une économie de 600 millions de francs environ ;

– pour la même raison, la part du produit des prélèvements sociaux opérés sur les revenus du patrimoine et affectée à la Caisse nationale d’allocations familiales (CNAF) (article L. 245-16 du code de la sécurité sociale) sera ramenée de 50% à 22% au profit de la CNAM. Ce transfert de 28% du produit considéré représente 2,5 milliards de francs ;

– l’intégralité du produit de la cotisation sur les véhicules terrestres à moteur (article L. 213-1 du code des assurances) sera affectée à la CNAM, pour un montant de 900 millions de francs ;

– une fraction du droit de consommation sur les tabacs (article 575 du code général des impôts), plafonnée à 3,5 milliards de francs, sera affectée à la CNAM dans les conditions prévues par le présent article.

Par ailleurs, la loi supprime les contingents communaux d’aide sociale, par lesquels les communes participaient aux dépenses d’aide sociale des départements, ces derniers n’ayant plus à supporter les charges de l’aide médicale. La dotation globale de fonctionnement aux communes et aux départements sera ajustée en conséquence.

Enfin, la suppression de l’aide médicale départementale entraînera un abattement de la dotation globale de décentralisation de 9,5 milliards de francs.

La couverture des dépenses de protection complémentaire est assurée par un fonds de financement de la protection complémentaire de la couverture maladie universelle. Les ressources de ce fonds sont constituées en premier lieu par les contributions versées par les organismes de protection complémentaire participant à la CMU. Ces contributions sont assises sur le chiffre d’affaires " santé " hors taxes de ces organismes, au taux de 1,75%. Afin d’inciter les organismes de protection complémentaire à prendre en charge les personnes au titre de la couverture complémentaire, la loi prévoit qu’ils pourront déduire du montant de leur contribution une somme de 1500 francs par an et par personne prise en charge.

La contribution des organismes de protection complémentaire est estimée à 2 milliards de francs environ. L’équilibre du fonds de financement de la protection complémentaire de la couverture maladie universelle est assuré par la contribution de l’Etat, soit 7 milliards de francs inscrits dans le présent projet de loi de finances sur le chapitre 46-82, article 10 " Contribution de l’État au fonds de financement de la protection complémentaire de la couverture universelle du risque maladie " du budget de la Santé et de la solidarité.

III.- L’affectation d’une partie du droit de consommation sur les tabacs manufacturés au " fonds de cessation anticipée d’activité des travailleurs de l’amiante "

L’article 41 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 1999 a instauré un dispositif de cessation anticipée d’activité pour les salariés et anciens salariés de certains établissements de fabrication des matériaux contenant de l’amiante. Introduit par voie d’amendement lors de la nouvelle lecture du projet de loi à l’Assemblée nationale, lors de la séance du 26 novembre 1998, cet amendement a été adopté à l’unanimité.

Peuvent bénéficier de ce dispositif les salariés ou anciens salariés des établissements de fabrication de matériaux contenant de l’amiante, dans les conditions suivantes :

– s’ils sont reconnus atteints au titre du régime général par une maladie professionnelle provoquée par l’amiante et figurant sur une liste établie par arrêté des ministres chargés du travail et de la sécurité sociale, le droit à une allocation anticipée d’activité leur est ouvert dès l’âge de 50 ans ;

– s’ils travaillent ou ont travaillé dans un établissement figurant sur une liste établie par arrêté des ministres chargés du travail, de la sécurité sociale et du budget, pendant la période où y étaient fabriqués des matériaux contenant de l’amiante, le droit à l’allocation précitée leur est ouvert après qu’ils auront atteint un âge déterminé, qui pourra varier en fonction de la durée du travail effectué dans les établissements susvisés sans pouvoir être inférieur à 50 ans.

Lors de la réunion de la Commission des comptes de la sécurité sociale du 21 septembre 1999, Mme Martine Aubry, ministre de l’emploi et de la solidarité, a indiqué que le Gouvernement envisageait d’étendre le bénéfice de ce dispositif à d’autres catégories de salariés.

Effectivement, l’article 26 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2000 propose d’y ajouter les salariés et anciens salariés des établissements de flocage et de calorifugeage à l’amiante ou de construction et de réparation navale. De façon plus générale, les établissements concernés ne seraient plus seulement ceux où étaient " fabriqués " des matériaux contenant de l’amiante, mais aussi ceux où de tels matériaux étaient " traités ".

De même, l’article 26 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2000 propose d’ouvrir aux ouvriers dockers ayant manipulé de l’amiante le droit à percevoir, sous conditions, l’allocation de cessation anticipée d’activité.

Cette allocation est égale à l’allocation de préretraite accordée dans le cadre du Fonds national pour l’emploi. Elle est attribuée et servie par les caisses régionales d’assurance maladie et cesse d’être versée lorsque l’allocataire remplit les conditions pour bénéficier d’une pension de vieillesse à taux plein.

Les textes réglementaires nécessaires à la mise en œuvre du dispositif ont été publiés au Journal officiel du 31 mars 1999 et la mesure est entrée en vigueur le 2 avril 1999.

Le financement du dispositif est assuré par le " fonds de cessation anticipée d’activité des travailleurs de l’amiante ", établissement public administratif placé sous l’autorité d’un conseil de surveillance.

En l’état actuel des textes, les ressources du fonds sont constituées d’une contribution de l’État et d’un versement de la branche accidents du travail et maladies professionnelles du régime général de la sécurité sociale, au titre des charges générales de la branche. Un arrêté des ministres chargés du travail, de la sécurité sociale et du budget fixe chaque année les montants de ces contributions.

Le présent article propose, en outre, d’affecter une fraction plafonnée du produit du droit de consommation sur les tabacs au fonds de cessation anticipée d’activité des travailleurs de l’amiante. Il convient, au préalable, de modifier la définition des ressources du fonds pour y inclure une fraction du produit du droit de consommation sur les tabacs. Le texte du projet de loi de financement de la sécurité sociale de contenant aucune disposition de cette nature, votre Rapporteur général vous propose d’amender le présent article afin de remédier à cette difficulté.

Lors de la présentation de l’amendement gouvernemental en séance publique, le 26 novembre 1998, la ministre de l’emploi et de la solidarité avait indiqué que " plusieurs milliers de personnes seront concernés dès 1999, ce qui devrait se traduire par un besoin de financement de l’ordre de 400 millions de francs. En 1999, et à titre transitoire, l’État prendra en charge la quasi-totalité des besoins de financement ; 200 millions de francs proviendront de l’augmentation du rendement des droits de consommation sur les tabacs. "

Le Gouvernement propose de consolider, à compter du 1er janvier 2000, l’équilibre de financement trouvé en 1999, en transférant 0,43% du produit du droit de consommation sur les tabacs après imputation de la part proportionnelle revenant à la CNAM (cf. article 49 de la loi de finances initiale pour 1997 et article 46 de la loi de finances initiale pour 1998), soit 200 millions de francs en 2000. Le montant de la fraction affectée au fonds est, comme pour les deux affectations précédentes, plafonné au niveau du transfert prévu en 2000, soit 200 millions de francs.

IV.- L’utilisation du produit du droit de consommation sur les tabacs après intervention de l’article 29 du présent article

Le présent article conduit à répartir près de 80% du produit du droit de consommation sur les tabacs au profit du fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de sécurité sociale, dans les conditions économiques et budgétaires prévues pour l’année 2000.

En effet, le fascicule des voies et moyens annexé au projet de loi de finances pour 2000 indique que la part revenant à l’Etat du produit attendu du droit de consommation sur les tabacs, avant effet du présent article, est égal à 46,2 milliards de francs. Ce produit attendu constitue la base à laquelle doivent être appliquées les clefs numériques données par le présent article pour l’affectation des fractions du produit du droit à leurs divers bénéficiaires.

Ainsi, le fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de sécurité sociale recevrait 85,5% de 46,2 milliards de francs, soit 39,5 milliards de francs. Cette somme est égale au plafond fixé par ailleurs dans le présent article.

De même, les paramètres numériques retenus pour l’affectation au profit de la CNAM et l’affectation au profit du fonds de cessation anticipée d’activité des travailleurs de l’amiante font que le montant effectivement recueilli par chacun de ces organismes est strictement égal au montant du plafond déterminé pour chacun d’eux par le présent article.

En miroir, l’État ne recueillerait plus qu’une recette évaluée à 3 milliards de francs dans le fascicule des voies et moyens.

RÉPARTITION DU PRODUIT ATTENDU EN 2000 DU DROIT DE CONSOMMATION SUR LES TABACS AVANT ET APRÈS EFFET DE L’ARTICLE 29 DU PLF 2000

(en millions de francs)

Dispositif actuel

 

Dispositif proposé

 

CNAM (a. 46 LFI 1998)

4.625,1

CNAM (a. 46 LFI 1998)

4.625,1

État

46.200,0

État

3.000,0

 

 

Fonds cotisations sociales

39.500,0

 

 

CNAM (CMU)

3.500,0

 

 

Fonds amiante

200,0

Produit total

50.825,1

 

50.825,1

Cependant, le mécanisme de plafonnement des différentes fractions affectées dans le cadre du présent article fait qu’à l’avenir, toute augmentation du produit du droit sur les tabacs bénéficiera essentiellement à l’État, la CNAM recevant, pour sa part, en tout état de cause, une part purement proportionnelle égale à 9,1% du produit du droit.

Le graphique présenté ci-après illustre la dynamique programmée des recettes de l’État au fur et à mesure que le produit du droit sur les tabacs augmentera. Votre Rapporteur général rappelle, à cette occasion, le résultat d’une étude de l’INSEE portant sur la sensibilité des comportements des fumeurs aux évolutions des prix du tabac (). Cette étude conclut à une élasticité-prix de la consommation égale à – 0,3, c’est-à-dire qu’après une variation de 1% du prix de vente au détail des cigarettes, on observe à échéance de quelques mois une variation en sens contraire de 0,3% du volume de la consommation.

CNAM : Part proportionnelle (9,1%) affectée à la CNAM en vertu de l’article 46 de la loi de finances initiale pour 1998.

FFRCP : fonds de financements de la réforme des cotisations patronales de sécurité sociale

CMU : part affectée à la CNAM au titre de ressource affectée au financement de la couverture de base, dans le cadre de la couverture universelle du risque maladie (CMU).

État : part revenant à l’état (ligne 0081 des recettes non fiscales).

Votre Rapporteur général ne peut que saluer l’ingéniosité du dispositif qui permet d’assurer des ressources stables aux trois bénéficiaires des affectations proposées par le présent article – car il est peu probable que l’on assiste, dans les prochaines années, à une diminution sensible du produit brut du droit de consommation sur les tabacs – tout en préservant la capacité pour l’État d’encaisser des recettes marginales équivalentes à celles qui auraient pu être observées si le régime actuel de répartition avait été maintenu.

*

* *

La Commission a d’abord examiné trois amendements visant à supprimer cet article, le premier de M. Philippe Auberger, le deuxième de M. François d’Aubert et le troisième de M. Pierre Méhaignerie.

M. Michel Bouvard a jugé anormal que l’essentiel des droits sur les tabacs soit affecté au financement de diverses dépenses sociales et non au budget général de l’Etat. Il a jugé indispensable la suppression de cet article.

M. Gilbert Gantier a estimé que le dispositif était contraire aux grands principes de l’universalité et de l’unité budgétaires, selon lesquels le budget de l’Etat doit regrouper l’ensemble des dépenses publiques. Il a qualifié le dispositif proposé par le Gouvernement, marqué par une dispersion de l’action publique entre un budget général et un budget social, de " scandaleux ".

M. Charles de Courson a fait valoir qu’au-delà de l’atteinte aux principes de l’unité et de l’universalité budgétaires, cet article permettait de procéder à une dissimulation de la réalité de l’augmentation des dépenses et des recettes. La prise en compte des trois fonds concernés permet d’aboutir à un constat qui rétablit la vérité des chiffres.

En ce qui concerne le fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de sécurité sociale, a rappelé M. Charles de Courson, le besoin de financement de 66 milliards de francs est en partie couvert grâce à un véritable hold-up, à concurrence de 7,8 milliards de francs, dont 5,5 milliards de francs pour le seul régime général, sur les caisses de sécurité sociale, alors qu’un accord des conseils d’administration serait nécessaire. Le transfert d’une fraction du droit de consommation sur les tabacs représente 39,5 milliards de francs, la contribution sociale sur les bénéfices des sociétés 4,3 milliards de francs et la taxation des heures supplémentaires au-delà des 35 heures 5,4 milliards de francs. Ce transfert d’impôts hors du champ du budget de l’Etat devrait s’établir à 105 ou 110 milliards de francs à terme, ce qui est inacceptable.

En ce qui concerne la couverture maladie universelle, à la charge de la Caisse nationale d’assurance maladie, M. Charles de Courson a rappelé que le basculement représente 3,5 milliards de francs au titre du droit de consommation sur les tabacs, tandis que le fonds de cessation anticipée d’activité des travailleurs de l’amiante représente, quant à lui, un transfert de 200 millions de francs.

Au total, il a indiqué que la consolidation de ces trois fonds avec le budget de l’Etat faisait apparaître, à périmètre constant, une augmentation des dépenses de 3,5%, et non de 0,9% comme l’annonçait le Gouvernement, et une croissance des recettes fiscales de 5,1%.

Concluant son intervention, M. Charles de Courson a déclaré que l’opposition ne pouvait accepter un article qui empêchait le Parlement d’avoir une vision synthétique des recettes et dépenses de l’Etat.

Votre Rapporteur général a indiqué que l’absence de lien entre le droit de consommation sur les tabacs et la réforme des cotisations sociales patronales ne constituait pas un élément dirimant, dans la mesure où, en d’autres temps, les droits sur les alcools avaient fait l’objet d’une affectation au fonds de solidarité vieillesse.

Ce dispositif, a-t-il indiqué, largement expliqué par le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie, M. Dominique Strauss-Kahn, comme par le secrétaire d’Etat au budget, M. Christian Sautter, découle de la volonté gouvernementale de proposer une importante réforme allégeant les charges patronales, afin de réduire le coût du travail pour les emplois non qualifiés. Le montage auquel il est procédé ne saurait être contesté, car il assure une incontestable transparence.

Le terme de hold-up sur les organismes sociaux est inacceptable, puisqu’un accord des conseils d’administration est, dans un premier temps, nécessaire, et que cet accord sera vraisemblablement donné.

M. Michel Inchauspé a demandé des précisions sur les liens entre la création du fonds de financement de la réforme et l’évolution de l’équilibre du régime de l’assurance maladie. il a souhaité connaître le montant de la participation de la caisse nationale d’assurance maladie à ce financement.

M. Gilbert Gantier a jugé qu’il convenait de ne pas méconnaître que les grands principes d’unité et d’universalité budgétaires sont des conditions de l’examen démocratique du budget. Il s’est associé aux observations de M. Charles de Courson montrant que l’architecture retenue par le Gouvernement permettait de masquer une augmentation des recettes et des dépenses budgétaires et a jugé cet article inacceptable, même si votre Rapporteur général avait évoqué le précédent de l’affectation de certains droits sur les alcools. Les turpitudes passées n’excusent pas les turpitudes actuelles ou futures.

M. Jean-Jacques Jégou a estimé qu’en raison de leur importance, les transferts auxquels il était procédé étaient contraires à l’ordonnance du 2 janvier 1959 et a jugé politiciennes les réponses de votre Rapporteur général aux interventions précédentes, qui se situaient sur le plan du droit et de la technique. Il s’est interrogé sur la capacité de la Commission des finances à appréhender désormais l’ensemble de la situation des finances publiques.

Votre Rapporteur général, après avoir préalablement rappelé que les ministres compétents avaient déjà apporté des réponses aux questions des parlementaires, a estimé que le dispositif proposé par le Gouvernement ne manquait pas de transparence. Néanmoins, le Président de la Commission des finances et lui-même ont fait savoir qu’ils n’étaient pas totalement satisfaits de la manière dont étaient présentés les choix financiers, compte tenu de la dichotomie entre projet de loi de finances et projet de loi de financement de la sécurité sociale. Toutefois, les travaux de la Commission des finances sur ce dernier projet de loi, menés parallèlement à l’examen traditionnel du budget, devraient permettre à chacun d’appréhender la globalité des comptes.

Evoquant ensuite l’évolution des dépenses, il a indiqué que le taux de 0,9% était calculé à structure constante.

Enfin, votre Rapporteur général a insisté sur le fait que le Gouvernement avait souhaité constituer un réceptacle destiné à recueillir les contributions destinées aux organismes de sécurité sociale pour procéder à la compensation des allégements de charges sociales. Cette procédure se justifie par l’importance de la réforme, les sommes en jeux devant, à terme, atteindre 110 milliards de francs. Elles sont à la hauteur de l’ambition de la réforme qui répond, dans ses objectifs, aux préoccupations de la majorité.

La Commission a rejeté ces amendements.

Elle a ensuite adopté deux amendements de coordination présentés par votre Rapporteur général (amendements nos I-63 et I-64).

Puis, la Commission a adopté l’article 29 ainsi modifié.

*

* *

Après l’article 29

La Commission a examiné un amendement présenté par M. Jérôme Cahuzac, visant à réduire le délai de reversement à l’Etat des droits perçus par les fournisseurs de tabac. Son auteur a indiqué que le délai de deux mois dont disposent actuellement les fournisseurs constituait un avantage de trésorerie qui n’était nullement justifié et estimé qu’il conviendrait de ramener cette durée à un mois et cinq jours. Les fournisseurs de tabac, et notamment la SEITA, font valoir qu’en contrepartie de ce délai, ils accordent à leur tour des délais de paiement et des délais de livraison aux distributeurs. Les entreprises concernées étant fortement bénéficiaires, avec 7 milliards de francs de bénéfices pour la SEITA, elles sont donc en mesure de consentir des avances ou des avantages aux distributeurs sans priver l’Etat de ses ressources.

Votre Rapporteur général a estimé qu’il serait utile de porter le débat en séance publique. Il a cependant insisté sur le fait que le délai de restitution des droits sur la consommation des tabacs à l’Etat, accordé aux fournisseurs, est la contrepartie des obligations que leur impose le code général des impôts à l’égard des distributeurs. Une éventuelle réduction de ces délais pourrait être répercutée sur les détaillants, qui subiraient à leur tour des difficultés de trésorerie.

M. Michel Bouvard a considéré que l’amendement pourrait poser des problèmes aux petits débitants de tabac implantés dans les communes rurales : leur stock tourne moins vite qu’en ville et leur survie pourrait donc être menacée, alors qu’ils représentent souvent le dernier commerce subsistant dans certaines zones. Il serait important de vérifier l’argument des fournisseurs de tabac sur les contreparties aux débitants avant de se prononcer sur la mesure proposée.

M. Charles de Courson et M. Gérard Saumade ont également considéré que des informations plus approfondies étaient indispensables pour permettre à la Commission de se prononcer.

M. Jérôme Cahuzac a indiqué qu’il lui avait été très difficile d’obtenir les informations nécessaires, car les fournisseurs de tabac font de la rétention d’informations sur ces questions. Si l’on doit prendre en considération les problèmes de trésorerie des petits distributeurs, pourquoi ne pas les répercuter sur les fournisseurs de tabac, dont la situation financière est florissante, plutôt que sur l’Etat ? Il a néanmoins accepté de retirer son amendement.

La Commission a ensuite examiné un amendement de M. Charles de Courson, visant à augmenter les droits sur la consommation de cigarettes en Corse et un sous-amendement de M. Pierre Hériaud visant aux mêmes fins dans les départements de la Guadeloupe, de la Guyane, de la Martinique et de La Réunion.

M. Charles de Courson a précisé que les prix de vente au détail des cigarettes en Corse étaient inférieurs des deux tiers aux prix de vente en France continentale. Non seulement cette situation engendre une surconsommation de 17% de tabac en Corse, mais elle incite de nombreux continentaux à s’approvisionner en cigarettes sur l’île. Il a proposé que le surplus de recettes qui résulterait de ces nouvelles taxes soit affecté à l’amélioration de la réduction des cotisations sociales en Corse.

M. Pierre Hériaud a souligné que la situation était identique pour les départements d’outre-mer.

Votre Rapporteur général a évoqué le régime dérogatoire de la Corse en matière de fiscalité du tabac, pensant notamment que les droits sur la consommation de tabac en Corse sont versés aux collectivités locales et non à l’Etat. Mais il s’est déclaré défavorable à l’amendement, en raison du climat de dialogue qu’il faut s’efforcer de développer avec la Corse.

M. Daniel Feurtet a approuvé cette position, rappelant que de nombreux ajustements et remises à plat seront nécessaires en Corse, mais qu’il faut, dans l’immédiat, privilégier le dialogue.

M. Jérôme Cahuzac, évoquant les arguments avancés à l’encontre de son précédent amendement, a mis en avant le risque d’une fragilisation de la situation des débitants de tabac en Corse.

M. Michel Bouvard a déclaré que le groupe RPR n’était pas favorable à l’amendement, compte tenu de plusieurs considérations : à la question de la manière dont sera perçue une telle mesure en Corse, s’ajoute la réalité d’un environnement économique spécifique, aussi bien pour les départements d’outre-mer que pour la Corse. C’est ainsi que les îles italiennes, telle la Sardaigne, bénéficient également d’un régime fiscal spécifique sur de nombreux produits de consommation.

M. Jacques Barrot, tout en considérant qu’il serait nécessaire de répondre, le moment venu, à la préoccupation exprimée par l’auteur de l’amendement, a estimé qu’une décision inopinée risquerait d’être mal perçue par les Corses et par nos compatriotes d’outre-mer.

La Commission a successivement rejeté le sous-amendement et l’amendement.

- Cliquer ici pour retourner au sommaire général

- Cliquez ici pour retourner à la liste des rapports et avis budgétaires

- Cliquez ici pour retourner à la liste des discussions budgétaires



© Assemblée nationale

() Publiée au Journal officiel du 20 juillet 1976.

() Depuis le 1er janvier 1993, le régime des exportations vise uniquement les expéditions réalisées vers un pays tiers à la Communauté européenne.

() Le prix de vente est converti en francs français s’il s’agit d’une vente réalisée dans un Etat membre de l’Union européenne.

() Article 17 de l’ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996.

() Rapport d’information n° 330 (1998-1999).

() Article 150 F du code général des impôts.

() L’article 8 de cette loi dispose que " les dispositions des articles 1er à 7-1 sont applicables aux pollutions de tous ordres causées par des substances radioactives. Des décrets en Conseil d’Etat détermineront les conditions de création et de surveillance des installations nucléaires ".

() Les " directions interdépartementales de l’industrie " sont devenues aujourd’hui les directions régionales de l’industrie, de la recherche et de l’environnement (DRIRE).

() Pour une illustration de la notion d’exploitant, on pourra utilement examiner les termes du décret n° 96-927 du 16 octobre 1996 qui autorise Électricité de France à exploiter la centrale nucléaire des Ardennes constituée par les installations nucléaires de base n° 1 (réacteur et circuits auxiliaires), n° 2 (station de traitement des effluents radioactifs) et n° 3 (bâtiment de stockage de combustible), située sur le territoire de la commune de Chooz (Ardennes), précédemment exploitée par la Société d'énergie nucléaire franco-belge des Ardennes en vertu des déclarations du 15 janvier 1964 et du 16 février 1965 (Journal officiel du 20 octobre 1996).

() Cf. supra la distinction entre installation nucléaire de base (loi du 2 août 1961) et installation classée pour la protection de l’environnement (loi du 19 juillet 1976).

() Le combustible Mox est un combustible formé d’un mélange d’oxydes d’uranium et d’oxydes de plutonium, celui-ci étant obtenu par le retraitement de combustibles irradiés.

() Déchets ou effluents de faible, moyenne ou haute activité ; substances contenant ou ne contenant pas de plutonium ; substances contenant ou ne contenant pas d’émetteurs alpha, etc.

() Malgré ses qualités intrinsèques, l’indice hors tarifs publics et produits à prix volatils, corrigé des mesures fiscales et des variations saisonnières, n’apparaît pas comme une mesure satisfaisante pour les objectifs recherchés en l’espèce par le législateur. En effet, cet indice a pour vocation essentielle d’évaluer l’inflation dite " sous-jacente " et s’avère donc particulièrement adapté pour la réalisation d’études économiques relatives à l’inflation et, éventuellement, pour la formulation de décisions de politique économique.

() Voir à ce titre Journal officiel, Assemblée nationale – Débats, Compte rendu des séances du 18 décembre 1997, p. 8109.

() M. Gaëtan Gorce, Rapport sur le projet de loi relatif à la réduction négociée du temps de travail, Assemblée nationale, n° 1826, 1er octobre 1999.

() Notamment par le fonds de solidarité vieillesse, les caisses d’allocations familiales, l’aide médicale départementale ou l’aide médicale d’État.

() On pourra se reporter, sur ce point, au commentaire de l’article 25 du projet de loi de finances pour 1999 (dans le rapport sur le projet de loi de finances pour 1999, Assemblée nationale, n° 1111, 8 octobre 1998, tome II, volume 1, pp.460-480).