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le 10 juin 2003

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N° 898

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DOUZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 5 juin 2003.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES, FAMILIALES ET SOCIALES SUR LE PROJET DE LOI (n° 885) portant réforme des retraites,

TOME 1

(1ère partie)
Accès à la deuxième partie : tableau comparatif

Accès à la troisième partie

PAR M. Bernard ACCOYER,

Député.

-

Voir les numéros : 895, 899 et 892

Retraites : généralités.


Sommaire du tome I

INTRODUCTION 11

I.- DU LIVRE BLANC AU DISCOURS DU 3 MARS 2003 13

A. LA SITUATION DES RETRAITES : UN CONSTAT PARTAGÉ 13

1. Le système de retraite français 13

a) Une multiplicité de régime qui n'en a pas moins atteint ses objectifs d'universalité et de solidarité 13

b) Le niveau de vie moyen des retraités est aujourd'hui comparable à celui des actifs 13

c) L'âge de cessation d'activité constitue l'une des variable majeures de l'équilibre financier des régimes de retraites 14

d) Des inégalités persistent entre retraités en fonction des carrières accomplies au cours des périodes d'activité 15

2. Perspectives du système de retraite français 16

a) Le vieillissement de la population compromet l'équilibre des régimes de retraite 16

b) Le financement des régimes de retraite se voit compromis à terme 17

B.  UNE APPROCHE CONSENSUELLE DES SOLUTIONS À APPORTER 19

1. Un accord sur les instruments disponibles 19

2. Perspectives du financement 20

II.- LA RÉFORME PROPOSÉE 23

A. LES OBJECTIFS DE LA RÉFORME 23

B. LES MOYENS DE LA RÉFORME 23

TRAVAUX DE LA COMMISSION 29

I.- AUDITION DES MINISTRES 29

II.- DISCUSSION GÉNÉRALE 69

III.- EXAMEN DES ARTICLES 79

Avant l'article premier 79

TITRE IER : DISPOSITIONS GÉNÉRALES 88

Article 1er : Répartition 88

Après l'article 1er 90

Article 2 : Contributivité 91

Après l'article 2 94

Article 3 : Equité 96

Après l'article 3 99

Avant l'article 4 100

Article 4 : Garantie d'un niveau minimum de pension 103

Après l'article 4 105

Article 5 : Allongement de la durée d'assurance 106

Après l'article 5 116

Accès à la 2ème partie

Avant l'article 6

Article 6 (articles L. 114-1-1, 114-3 et 114-2 du code de la sécurité sociale) : Conseil d'orientation des retraites

Article 7 (article L. 134-1 du code de la sécurité sociale) : Commission de compensation

Article 8 (article L. 161-17 du code de la sécurité sociale) : Droits des assurés à l'information

Article 9 (articles L. 161-22 et L. 634-6 du code de la sécurité sociale) : Cumul emploi-retraite

Article 10 (article L. 122-14-13 du code du travail) : Limite d'âge pour la mise à la retraite d'office des salariés

Article 11 (articles L. 135-6 et L. 137-10 du code de la sécurité sociale) : Assujettissement des allocations de préretraite d'entreprise à une contribution spécifique affectée au Fonds de réserve pour les retraites

Article 12 (articles L. 322-4 et L. 352-3 du code du travail et article L. 131-2 du code de la sécurité sociale) : Suppression de la préretraite progressive et limitation du champ du dispositif de la cessation anticipée d'activité

Article 13 (article L. 321-3 du code du travail) : Accès et maintien dans l'emploi des salariés âgés

Après l'article 13

TITRE II : DISPOSITIONS RELATIVES AU RÉGIME GÉNÉRAL ET AUX RÉGIMES ALIGNÉS

Avant l'article 14

Article 14 (article L. 222-1 du code de la sécurité sociale): Compétences du conseil d'administration de la Caisse nationale d'assurance vieillesse des travailleurs salariés

Article 15 (article L. 351-1 du code de la sécurité sociale) : Alignement de la durée d'assurance de référence sur 160 trimestres

Avant l'article 16

Article 16 (articles L. 351-1-1 et L. 634-3-2 du code de la sécurité sociale) : Départ à la retraite avant l'âge de 60 ans

Après l'article 16

Article 17 (articles L. 351-1-2, L. 351-6 et L. 634-2 du code de la sécurité sociale) : Majoration de pension pour les périodes cotisées après 60 ans au-delà de la durée nécessaire pour bénéficier de la retraite à taux plein

Article 18 (article L. 351-10 du code de la sécurité sociale) : Majoration de la retraite minimum au titre des périodes cotisées

Article additionnel après l'article 18 (art. L. 351-3 du code de la sécurité sociale) : Prise en compte des interventions réalisées hors temps de travail pour les sapeurs pompiers volontaires

Article 19 (articles L. 161-23-1, L. 351-11 et L. 816-2 du code de la sécurité sociale) : Indexation sur les prix des pensions et des salaires portés au compte

Avant l'article 20

Article 20 (articles L. 351-14-1 et L. 634-2-2 du code de la sécurité sociale) : Rachat de cotisations

Après l'article 20

Article 21 (article L. 351-15 du code de la sécurité sociale) : Amélioration du régime de la retraite progressive

Avant l'article 22

Article 22 (articles L. 173-7, L. 173-8, L. 222-2, L. 241-3, L. 241-4, L. 251-6, L. 351-13, L. 353-1, L. 353-3, L. 353-5, L. 356-1 à L. 356-4 et L. 623-3 du code de la sécurité sociale) : Amélioration de la pension de réversion et suppression de l'assurance veuvage

Article additionnel après l'article 22 (art. L. 351-4 du code de la sécurité sociale) : Majoration de la durée d'assurance pour enfant élevé

Article additionnel après l'article 22 (art L. 351-4-1 du code de la sécurité sociale) : Majoration de durée d'assurance pour enfant handicapé

Article additionnel après l'article 22 (art.L. 351-12 du code de la sécurité sociale): Bonification de pension pour enfant handicapé

Article additionnel après l'article 22 (art L. 381-1 et L. 742-1 du code de la sécurité sociale) : Extension du champ de l'assurance vieillesse des parents au foyer pour les parents d'enfants handicapés

Après l'article 22

Article 23 (article L. 241-3-1 du code la sécurité sociale) : Cotisations assises sur les périodes d'emploi à temps partiel

Après l'article 23

TITRE III : DISPOSITIONS RELATIVES AUX RÉGIMES DE LA FONCTION PUBLIQUE

Article 24 : Régime de retraites des fonctionnaires affiliés à la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales et régime des pensions des ouvriers des établissements industriels de l'Etat

Après l'article 24

Article additionnel avant l'article 25 (article L. 75 du code des pensions civiles et militaires de retraite) : Retraites des fonctionnaires exerçant un mandat parlementaire

Article 25 (article L. 3 du code des pensions civiles et militaires de retraite) : Radiation des cadres et liquidation de la pension

Après l'article 25

Article 26 (article L. 5 du code des pensions civiles et militaires de retraite) : Éléments constitutifs du droit à pension

Article 27 (article L. 9 du code des pensions civiles et militaires de retraite) : Services effectifs et validation des périodes d'interruption ou de réduction d'activité

Article 28 (article L. 9 bis du code des pensions civiles et militaires de retraite) : Rachat des années d'études

Avant l'article 29

Article 29 (article L. 10 du code des pensions civiles et militaires de retraite) : Prise en compte dans la constitution de la pension des services accomplis postérieurement à la limite d'âge

Après l'article 29

Article 30 (article L. 11 bis du code des pensions civiles et militaires de retraite) : Possibilité de surcotisation pour les fonctionnaires à temps partiel

Article 31 (article L. 12 du code des pensions civiles et militaires de retraite) : Bonifications

Article additionnel après l'article 31 (article L. 73 du code des pensions civiles et militaires de retraite) : Coordination avec l'introduction de la notion de « catégorie active ».

Article 32 (articles L. 13 à L. 17 du code des pensions civiles et militaires de retraite) : Détermination du montant de la pension

Accès à la troisième partie

Article 33 (article L. 22 du code des pensions civiles et militaires de retraite) : Liquidation de la solde

Article 34 (article L. 24 du code des pensions civiles et militaires de retraite) : Conditions de liquidation immédiate des pensions civiles et militaires

Article 35 (articles L. 25 à L. 26 bis du code des pensions civiles et militaires de retraite) : Conditions de liquidation différée des pensions civiles et militaires

Article 36 (article L. 28 du code des pensions civiles et militaires de retraite) : Modalités de revalorisation de la rente d'invalidité

Article 37 (articles L. 38 et L. 39 du code des pensions civiles et militaires de retraite) : Droit à pension de réversion - Mise en conformité avec le droit communautaire

Article 38 (article L. 40 du code des pensions civiles et militaires de retraite) : Pensions de réversion et orphelins - Mise en conformité avec le droit communautaire

Article 39 (article L. 49 du code des pensions civiles et militaires de retraite) : Droit à pension de réversion et pluralité de conjoints - Mise en conformité avec le droit communautaire

Article 40 (articles L. 47 et L. 48 du code des pensions civiles et militaires de retraite) : Pensions militaires de réversion - Mise en conformité avec le droit communautaire

Article 41 (article L. 57 du code des pensions civiles et militaires de retraite) : Pension ou rente provisoire d'invalidité au profit de la famille d'un fonctionnaire disparu - Mise en conformité avec le droit communautaire

Après l'article 41

Article 42 (article L. 50 du code des pensions civiles et militaires de retraite) : Pensions de réversion en cas de décès d'un fonctionnaire par suite de circonstances particulières

Article 43 (articles L. 84 à L. 86-1 du code des pensions civiles et militaires de retraite) : Cumul emploi-retraite pour les fonctionnaires

Article 44 (articles L. 37 bis, L. 42, L. 68 à L. 72 et L. 87du code des pensions civiles et militaires de retraite) : Abrogation de dispositions du code des pensions civiles et militaires

Article 45 : Dispositions transitoires

Article 46 (article 1er bis de la loi n° 84-834 du 13 septembre 1984 relative à la limite d'âge dans la fonction publique) : Maintien en activité au-delà de la limite d'âge

Article 47 (article 37 bis de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat, article 60 bis de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant diverses dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et article 46-1 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière) : Temps partiel de droit pour l'éducation d'un enfant

Article 48 (article 6 ter de la loi n° 57-444 du 8 avril 1957 modifiée instituant un régime particulier de retraites en faveur des personnels actifs de la police, article 95 de la loi n° 82-1126 du 25 décembre 1982 portant loi de finances pour 1983, article 131-I de la loi n° 83-1173 du 29 décembre 1983 portant loi de finances pour 1984, article 76 de la loi n° 85-1403 du 30 décembre 1985 portant loi de finances pour 1986, article 33 de la loi n° 87-1061 du 30 décembre 1987 portant loi de finances rectificative pour 1987, article 127 de la loi n° 89-935 du 29 décembre 1989 portant loi de finances pour 1990, article 17 de la loi n° 90-1067 du 28 novembre 1990 relative à la fonction publique territoriale et portant modification de certains articles du code des communes, article 68 de la loi n° 93-121 du 21 janvier 1993 portant diverses mesures d'ordre social, articles 22 et 29 de la loi organique n° 95-72 du 20 janvier 1995 relative au financement de la campagne en vue de l'élection du Président de la République, article 88 de la loi n° 2001-1276 du 28 décembre 2001 portant loi de finances rectificative pour 2001) : Abrogation de dispositions législatives

Article 49 (articles 2, 3, 3 bis, 3 ter, 4, 5-1, 5-2, 5-3, 5-4 et 6 de l'ordonnance n° 82-297 du 31 mars 1982 portant modification de certaines dispositions du code des pensions civiles et militaires de retraite et relative à la cessation d'activité des fonctionnaires et des agents de l'Etat et des établissements publics à caractère administratif et articles 1er, 2, 3, 3-1, 3-2, 3-3 et 3-4, 4, 5, 6, 7, 8 et 9 de l'ordonnance n° 82-298 du 31 mars 1982 relative à la cessation progressive d'activité des agents titulaires des collectivités locales et de leurs établissements publics à caractère administratif) : Cessation progressive d'activité

Avant l'article 50

Article 50 : Modalités de liquidation des pensions des agents en congé de fin d'activité

Article 51 : Modalités de liquidation des pensions des fonctionnaires affectés à France Télécom bénéficiaires d'un congé de fin de carrière

Article 52 : Création d'un régime de retraite additionnel obligatoire pour les fonctionnaires

Article 53 : Evolution professionnelle des membres des corps enseignants

Article 54 : Majoration de la durée d'assurance des fonctionnaires hospitaliers en catégorie active

Article 55 : Entrée en vigueur des dispositions du titre III

TITRE IV : DISPOSITIONS RELATIVES AUX REGIMES COMPLEMENTAIRES DES PROFESSIONS ARTISANALES, INDUSTRIELLES ET COMMERCIALES AINSI QU'À L'ASSURANCE VIEILLESSE DES PROFESSIONS LIBERALES ET DES EXPLOITANTS AGRICOLES

Chapitre Ier : Création d'un régime complémentaire obligatoire pour les industriels et les commerçants

Article 56 (articles L. 635-1 à L. 635-11 du code de la sécurité sociale) : Règles de fonctionnement des régimes complémentaires obligatoires des professions artisanales, industrielles et commerciales

Article 57 (article L. 633-3 du code de la sécurité sociale) : Compétence des organisations autonomes pour donner des avis s'agissant des régimes complémentaires obligatoires des professions artisanales, industrielles et commerciales

Article 58 : Modalités d'entrée en vigueur du nouveau régime complémentaire obligatoire des professions industrielles et commerciales

Article 59 : Transformation en mutuelle du régime complémentaire facultatif des professions industrielles et commerciales

Chapitre II : Dispositions relatives à l'assurance vieillesse des professions libérales

Article 60 (article L. 153-1 du code de la sécurité sociale) : Règles de contrôle budgétaire applicables au régime de base des professions libérales

Article 61 (articles L. 622-5 et L. 623-1 du code de la sécurité sociale) : Coordinations

Article 62 (articles L. 641-1 à L. 641-6 du code de la sécurité sociale) : Règles de fonctionnement du régime de base des professions libérales

Article 63 (articles L. 642-1 à L. 642-4 du code de la sécurité sociale) : Cotisations au régime de base des professions libérales

Article 64 (article L. 642-5 du code de la sécurité sociale) : Recouvrement des cotisations au régime de base des professions libérales

Article 65 (articles L. 643-1 à L. 643-6 du code de la sécurité sociale) : Pensions de retraite servies par le régime de base des professions libérales

Article 66 (articles L. 643-7 à L.  643-10 du code de la sécurité sociale) : Pensions de réversion servies par le régime de base des professions libérales

Article 67 (article L. 643-8 du code de la sécurité sociale) : Périodicité du versement des prestations servies par le régime de base des professions libérales

Article additionnel après l'article 67 (articles L. 135-2, L. 615-1, L. 634-6 et L. 723-11 du code de la sécurité sociale et L. 732-39 du code rural) : Coordinations

Article 68 (articles L. 644-1 à L. 644-3 du code de la sécurité sociale) : Possibilité d'extension des régimes complémentaires des professions libérales aux gérants minoritaires et aux dirigeants de sociétés anonymes

Article 69 (article L. 921-1 du code de la sécurité sociale) : Coordination

Article 70 : Modalités d'entrée en vigueur des dispositions relatives au régime de base des professions libérales

Article additionnel après l'article 70 (article L. 723-10 du code de la sécurité sociale) : Age de départ à la retraite des avocats

Chapitre III : Dispositions relatives au régime de base des exploitants agricoles

Article 71 (articles L. 731-42 et L. 732-34 du code rural) : Affiliation des aides familiaux dès l'âge de seize ans au régime de base des exploitants agricoles

Article 72 (articles L. 732-18-1, L. 732-25-1, L. 732-54-1, L. 732-54-5 et L. 732-54-8 du code rural) : Transposition dans le régime de base des exploitants agricoles de nouvelles dispositions applicables dans le régime général

Article 73 (article L. 732-35-1 du code rural) : Possibilité de rachat de périodes d'activité en tant qu'aide familial au titre du régime de base des exploitants agricoles

Article 74 (article L. 732-27-1 du code rural) : Possibilité de rachat de périodes d'études au titre du régime de base des exploitants agricoles

Article 75 (articles L. 722-8, L. 722-16, L. 723-3, L. 731-10, L. 731-43, L. 731-44, L. 732-41, L. 732-50, L. 732-55 et L. 741-9 du code rural) : Pensions de réversion servies par le régime de base des exploitants agricoles

Article 76 (article L. 732-39 du code rural) : Conditions de cessation d'activité pour le service d'une pension par le régime de base des exploitants agricoles

Article additionnel après l'article 76 (article L. 732-54-5 du code rural) : Maintien des revalorisations de pension pour certains conjoints collaborateurs d'exploitants agricoles

Après l'article 76

Article 77 (article L. 732-55 du code rural) : Mensualisation du versement des pensions servies par le régime de base des exploitants agricoles

Article additionnel après l'article 77 (article L. 732-62 du code rural) : Pensions de réversion servies par le régime complémentaire obligatoire des exploitants agricoles

Article additionnel après l'article 77 (articles L. 732-58 et L. 736-62 du code rural) : Prise en compte des droits combinés dans le cadre du régime complémentaire obligatoire des exploitants agricoles

Après l'article 77

Article additionnel après l'article 77 (articles L. 381-1 du code de la sécurité sociale et L. 732-42-1 et L. 741-9 du code rural) : Gestion de l'assurance vieillesse des parents au foyer par la mutualité sociale agricole

TITRE V : DISPOSITIONS RELATIVES À L'ÉPARGNE RETRAITE

Article 78 : Droit à bénéficier de produits d'épargne retraite

Après l'article 78

Article 79 : Création du plan d'épargne pour la retraite (PER)

Article 80 (articles L. 443-1-2 et L. 443-5 du code du travail et L. 214-39 du code monétaire et financier) : Création du plan partenarial d'épargne salariale volontaire pour la retraite (PPESVR)

Article 81 (articles 83, 154 bis, 154 bis-0 A, 158 et 163 quatervicies du code général des impôts) : Déductions fiscales favorisant l'épargne retraite

INTRODUCTION

La parution en avril 1991 du Livre blanc sur les retraites, préfacé par M. Michel Rocard alors Premier ministre, a ouvert le débat sur l'avenir des retraites. De grandes étapes l'ont jalonné jusqu'à aujourd'hui : le rapport de M. Jean-Michel Charpin, en juin 1999, L'avenir de nos retraites ; la déclaration de M. Lionel Jospin, le 20 mars 2000 ; le rapport du Conseil d'orientation des retraites : Retraites : renouveler le contrat social entre les générations, publié le 6 décembre 2001 ; le discours prononcé par M. Jean-Pierre Raffarin devant le Conseil économique et social, le 3 mars dernier.

Un regard porté sur l'ensemble de ces contributions fait apparaître ce qu'il faut appeler un constat partagé. A cet égard, il n'est que de citer la préface au Livre blanc sur les retraites : « L'enjeu est considérable : maintenir l'acquis au profit des générations futures dépend, au-delà de la démographie et de l'économie, de notre capacité à actualiser le pacte de solidarité qui lie les générations entre elles ». Qui pourrait contester cette affirmation ? De fait, tous les éléments du débats sont présents dans cette phrase : solidarité ; démographie ; économie. Dans ces conditions, n'est-il pas surprenant de se trouver, douze ans après le Livre blanc, devant une réforme en profondeur concernant l'ensemble du système, c'est-à-dire pratiquement tous les régimes ? Est-ce à dire que, devant le péril, la France serait restée inerte ?

Cette assertion doit être tempérée. En effet, dans les deux dernières décennies, deux dates marquent l'histoire du système de retraite français : 1982 et 1993.

1982 : l'âge de la retraite est abaissé de 65 à 60 ans. Cependant, cet âge diffère d'un régime à l'autre, et parfois selon les catégories au sein d'un même régime. Cette réforme, certes généreuse, avait à l'époque donné lieu à des débats passionnés entre ses thuriféraires et ceux qui pensait qu'elle conduirait à terme à une impasse financière.

1993 : la loi n° 93-936 du 22 juillet 1993, relative aux pensions de retraite et à la sauvegarde de la protection sociale - dite Balladur - modifie les conditions d'accès à la retraite pour les salariés du régime général et des régimes alignés. A compter du 1er  janvier 1994 et jusqu'au 1er janvier 2003, le nombre des trimestres exigibles pour valider une pension à taux plein passe de 150 à 160 trimestres à raison d'un trimestre supplémentaire par an ; pour mémoire, le Livre blanc préconisait un passage à 168 trimestres. La période de référence pour le calcul des pensions passe des dix aux vingt-cinq meilleures années de revenu d'activité, avec une montée en charge progressive jusqu'au 1er janvier 2008. Le coefficient de revalorisation des pensions est déterminé en fonction de l'évolution des prix hors tabacs, mesure qui ne fait qu'officialiser une pratique en cours depuis une dizaine d'années, qui s'était substituée à l'indexation sur le salaire brut moyen. Enfin, le Fonds de solidarité vieillesse (FSV) est créé dont la mission générale est le service de prestations non contributives, et en particulier pour les chômeurs.

Une décennie seulement nous sépare de cette réforme dont l'intitulé est sans équivoque : il s'agit de la sauvegarde de la protection sociale. Le système de retraite, en France, n'est ni isolé, ni autonome ; la seule existence du mécanisme de compensation démographique entre les divers régimes (qui concerne les quatre branches de la Sécurité sociale) le prouve. La santé de la branche vieillesse dépend de celle de la famille, de la démographie, de la natalité. Le contexte juridique, qui définit les règles régissant les régimes, et le contexte économique sont les éléments constitutifs du cadre dans lequel évolue un système de retraite. Toutes les projections relatives à cette évolution se fondent d'ailleurs sur des hypothèses à caractère économique et social.

Aujourd'hui, le constat relatif au poids de la retraite dans l'économie comme les perspectives de son évolution n'est contesté par personne. C'est sur la base de ce constat partagé qu'a été élaboré le présent projet de loi portant réforme des retraites.

I.- DU LIVRE BLANC AU DISCOURS DU 3 MARS 2003

A. LA SITUATION DES RETRAITES : UN CONSTAT PARTAGÉ

1. Le système de retraite français

a) Une multiplicité de régime qui n'en a pas moins atteint ses objectifs d'universalité et de solidarité

Pour des raisons historiques, on dénombre aujourd'hui en France 26 régimes de retraite. En effet, lors de la création de la sécurité sociale en 1945, certains régimes particuliers de salariés existaient déjà. Par ailleurs, à cette date, certaines catégories de non-salariés n'ont pas souhaité leur intégration au régime général. Nombre de ces régimes bénéficiaient alors d'un équilibre démographique favorable et, dans de nombreux cas, cette situation démographique s'est dégradée dans le temps. La vocation universelle de l'assurance vieillesse s'est réalisée par étape : c'est progressivement qu'on été intégrés au dispositif les non-salariés agricoles, les exploitants agricoles, certaines catégories (artistes, conjoints, collaborateurs, détenus ...) puis que les personnes dépourvues de ressource et ne relevant d'aucun régime ont pu bénéficier d'une allocation minimum.

Cette situation a conduit à la création, en 1974 d'un système de compensation démographique (compensation généralisée). Fondé sur la solidarité, il consiste à faire verser par les régimes dont la démographie est favorable, une participation financière aux régimes démographiquement déprimés. La loi de finances pour 1986 a, en outre, créé une compensation spécifique ou surcompensation propre aux régimes spéciaux. La commission des comptes de la sécurité sociales a chiffré, pour l'exercice 2002, un montant de 5 923,7 millions d'euros au titre de la compensation généralisée vieillesse et de 2 377,2 millions d'euros au titre de la compensation spécifique.

Aujourd'hui, le nombre de régimes en voie d'extinction se situe autour de quatre-vingt-dix et, on assiste à une certaine unification réglementaire puisque les régimes de base des salariés agricoles, des artisans (CANCAVA), des industriels et commerçants (OGANIC) sont alignés sur le régime général.

b) Le niveau de vie moyen des retraités est aujourd'hui comparable à celui des actifs

Le niveau de vie des retraités n'a cessé d'augmenter au cours des dernières décennies. Entre 1988 et 1997, l'avantage principal de droit direct moyen des hommes a augmenté de 38,2 % et celui des femmes de 37 % alors que sur la même période les prix augmentaient de 23,3 %. L'arrivée à maturité des régimes - plus un régime est ancien, plus les assurés ont pu acquérir des droits - et le développement du travail des femmes et des carrières complètes avec 150 trimestres de cotisation expliquent ce phénomène. Ainsi, entre 1970 et 1990, le revenu des retraités a augmenté deux fois plus vite que celui des actifs. De même, le montant du minimum vieillesse a triplé depuis 1970.

Aussi, non seulement les jeunes retraités ont-ils un revenu supérieur à celui des actifs, mais un véritable reversement s'est opéré puisque, aujourd'hui, les plus de 60 ans sont à l'origine de transferts financiers important en direction des jeunes ménages.

c) L'âge de cessation d'activité constitue l'une des variable majeures de l'équilibre financier des régimes de retraites

Le taux d'activité des personnes âgées de plus de 50/55 ans a considérablement baissé en France, il est le plus bas d'Europe. Pour un nombre croissant de personnes, l'âge de la cessation d'activité ne correspond plus à l'âge de la retraite.

Depuis la montée du chômage, au cours des années soixante-dix, l'âge de cessation d'activité est devenu un instrument de la politique de l'emploi. Au cours des années, les dispositifs tendant à garantir aux salariés âgés privés d'emploi ou démissionnaires un revenu de substitution versé jusqu'à l'âge de la retraite se sont multipliés.

Le poids des actifs âgés de plus de 55 ans dans la population active n'a cessé de baisser depuis un quart de siècle ; il a diminué de plus de moitié entre 1968 et 1997, passant de 18, 7 % à 8 %. En vingt-cinq ans, la part des actifs dans la population âgée de plus de 55 ans est passée de 30 % à 15 %. Le taux d'activité des hommes de la classe des 60-64 ans est passé, au cours de la même période, de 60 % à 16 % et celui des femmes de 30 % à 40 %.

Les femmes ont un risque plus fort de terminer leur carrière professionnelle par une période d'inactivité ou d'invalidité surtout lorsqu'elles occupent un emploi à temps partiel. Ainsi, un ouvrier de l'industrie aura 28 % de chances d'être encore en activité en fin de carrière contre 19 % pour une ouvrière de l'industrie.

Situation professionnelle des individus avant le départ à la retraite

(Champ : générations nées entre 1922 et 1936 ayant occupé un remploi après 49 ans) en %

Hommes

Femmes

Emploi 1

45,3

41,8

Chômage

13,5

17,7

dont indemnisé

12,9

16,2

Préretraite

32,0

21,2

Autres formes d'inactivité

9,2

19,3

dont au foyer

0,3,

8,4

dont invalidité, longue maladie

8,9

10,9

Ensemble

100,0

100,0

1 Dans quelques cas, la situation d'emploi avant le départ à la retraite a pu être précédée d'une période d'inactivité après 50 ans

Sources : enquête complémentaire à l'enquête Emploi 1996, Insee, Economie et Statistique n° 335, 2000

Le coût des dispositifs de préretraite est élevé : en 1997, le coût cumulé de l'allocation de remplacement pour l'emploi (ARPE) et de l'allocation spéciale du fonds national pour l'emploi (ASFNE) s'élevait à 47, 26 milliards d'euros. Le coût, en termes de retraite, de la validation de ces périodes d'inactivité a été de 350 millions d'euros.

Une telle situation est fort peu compatible avec la perspective d'un allongement de la duré de cotisation. Au demeurant, une évolution positive est constatée puisque le nombre des préretraités bénéficiant de dispositifs public tend à diminuer : 228 000 en 1997 contre 200 000 à la fin de l'année 2001. Il n'en demeure pas moins qu'il est temps de rompre avec « la culture de la préretraite », incompatible qu'elle est avec le vieillissement de la population et la restauration du taux d'activité des salariés âgés de plus de 50 ans.

d) Des inégalités persistent entre retraités en fonction des carrières accomplies au cours des périodes d'activité

La première inégalité réside dans l'espérance de vie après 60 ans puisque des différences sont constatées en fonction de la catégorie socioprofessionnelle dont relèvent les individus. Pour mémoire, il est rappelé que l'espérance de vie à 60 ans d'un ouvrier est de 17 ans, celle d'un cadre est de 22,5 ans, et celle d'un enseignant de 23,5 ans.

Le montant des prestations vieillesse varie premièrement en fonction du caractère complet ou incomplet de la carrière effectuée et en fonction du niveau de rémunération au cours de la vie active. Enfin, les règles applicables pour le calcul de la pension déterminant le taux de remplacement (rapport entre le montant de la pension liquidée et le dernier revenu d'activité) sont variables selon les régimes.

Dans le régime général et les régimes alignés, la pension au taux plein est, pour une carrière complète dans ce régime, égale à 50 % du salaire annuel moyen, ce dernier étant jusqu'à la réforme de 1993 calculé par rapport aux 10 meilleures années et, à compter de 2008, par rapport aux 25 meilleures années. La pension est proratisée en 150ème en fonction du nombre de trimestres validés. Enfin, les pensions sont, depuis la fin des années 1980, revalorisée selon l'évolution des prix et non plus selon l'évolution des salaires.

En ce qui concerne les fonctionnaires, la pension est égale pour 37,5 annuités de cotisation (portées à 40 annuités en cas de bonifications) à 75 % du traitement indiciaire des six derniers mois, lequel n'inclut pas les primes. Le montant de la pension est proportionnel au nombre d'annuités si le nombre de 37,5 annuités n'est pas atteint. La pension est revalorisée en fonction de l'indice des traitements. Dans la plupart des régimes spéciaux du secteur public, la pension égale à 75 % de la rémunération principale du dernier mois d'activité (y compris gratifications et une partie des primes) est revalorisée en fonction des traitements d'activité.

Le rapport du COR a comparé les taux de remplacement dans le secteur privé et dans la fonction publique pour les retraités nés en 1930 et ayant effectué une carrière complète (37,5 ans). Dans les deux secteurs, les taux de remplacement baissent au fur et à mesure que le montant du dernier salaire s'élève. Dans le secteur privé, c'est en raison notamment du plafonnement de la pension du régime général, de l'existence d'un minimum contributif et parce qu'un grand nombre de personnes qui ont de bas salaires en fin de carrière ont en réalité un dernier salaire inférieur au salaire annuel moyen (leur rémunération ayant baissé en fin de carrière). Dans le secteur public, c'est en raison du poids des primes fréquemment plus important pour les traitements les plus élevés.

À niveau de salaire équivalent, et pour cette génération 1930 non concernée par la réforme de 1993, les taux de remplacement sont proches dans les deux secteurs. Si le taux de remplacement moyen pour l'ensemble des salariés du privé est plus élevé (84 %) que le taux moyen pour l'ensemble des fonctionnaires (77 %), c'est en raison d'un effet de structure (en termes de qualification notamment) : parmi les fonctionnaires ayant 37,5 années de carrière, les bas salaires de fin de carrière, inférieurs à 1524 euros par mois, sont rares alors qu'ils sont fréquents dans le secteur privé. Comme les taux de remplacement sont plus élevés pour les bas salaires, la moyenne globale du secteur privé est ainsi, par rapport au secteur public, tirée vers le haut.

Cette constatation se voit cependant tempérée, pour le régime général, par l'effet de l'indexation du coefficient de revalorisation des avantages de retraite sur les prix depuis 1993 : en effet, ce mode de revalorisation fait tendanciellement chuter le taux de remplacement.

2. Perspectives du système de retraite français

a) Le vieillissement de la population compromet l'équilibre des régimes de retraite

Le vieillissement de la population constitue un phénomène majeur des temps à venir. En 2040, un Français sur trois aura plus de soixante ans et il y aura 7 retraités pour 10 actifs contre 4 pour 10 actuellement.

L'espérance de vie devrait continuer à augmenter dans les prochaines décennies, à un rythme plus lent compte tenu des niveaux élevés atteints aujourd'hui. En 2040, l'espérance de vie à la naissance atteindrait près de 81 ans pour les hommes et 89 ans pour les femmes (contre respectivement 74,2 ans et 82,5 aujourd'hui). A âge légal de la retraite inchangé, les générations nées en 1970 pourraient tabler sur une durée théorique de leur retraite de 23 ans, soit plus du double de la durée passée en retraite par leurs aînés nés en 1910.

Ainsi, les retraités sont de plus en plus nombreux car, dès maintenant, ce sont les générations du « baby-boom » qui partent en retraite. Si aujourd'hui on compte 550 000 départs en retraite, on en comptera plus 800 000 en 2006.

Le ratio de dépendance démographique mesure le rapport entre le nombre de personnes en âge d'être à la retraite et le nombre de personnes d'âge actif, il se dégrade d'ici 2040 sous l'effet de l'arrivée à l'âge de la retraite des générations du baby boom et de l'allongement de la vie comme le montre le graphique ci-dessous.

graphique

b) Le financement des régimes de retraite se voit compromis à terme

En termes de financement, le vieillissement de la population pose un problème crucial avec l'augmentation des dépenses de santé liée à l'allongement de la durée de vie mais aussi du fait de la prise en charge de la dépendance puisqu'il a d'ores et déjà fallu modifier le mode de financement de l'allocation personnalisée à l'autonomie (APA).

De fait, dans son rapport paru en septembre dernier, la Commission des comptes de la sécurité sociale prévoit pour la branche maladie un déficit de 8,2 milliards d'euros. Par ailleurs, dans son rapport déposé en octobre 2002, le Fonds de financement de l'APA (FFAPA) estime que le nombre de bénéficiaires de l'APA en 2003 devrait s'élever à près de 800 000 bénéficiaires. Le coût pour les départements au titre de cet exercice serait alors supérieur à 2,5 milliards d'euros. Il faut enfin garder en mémoire que, d'ici 2020, le nombre de personnes âgées de plus de 65 ans passera de 9,5 millions à 13 millions et le nombre de personnes âgées de plus de 85 ans doublera. A cet égard, il faut rappeler que, lors de sa création en 2001, ce dispositif n'était pas financé à terme comme le prouve d'ailleurs la création d'un nouveau « fonds de financement ». Aussi, la nouvelle majorité a-t-elle dû, par la loi du 28 mars 2003, adopter des mesures fermes propres à pallier les carences de ce financement.

En 2000, la part des dépenses des régimes de retraite représentait 167 milliards d'euros, soit 11,6 % du PIB. Au cours des deux dernières décennies, les dépenses de retraite ont augmenté de l'équivalent de 2,3 points de PIB et de 7 points de PIB au cours des quatre dernières décennies. A réglementation constante, le besoin global de financement des retraites, intégrant les excédents du FSV et de l'association pour la gestion du fonds de financement (AGFF), serait de l'ordre de 50  en 2020 et 100 milliards d'euros en 2040. On passerait ainsi d'un excédent de 0,2 % du PIB en 2000 à un besoin de financement de 1,6 à 1,8 % du PIB en 2020 et de 3,5 à 3,8 % du PIB en 2040, comme le montre le tableau suivant.

Part des dépenses de retraite dans le PIB et besoin de financement en points de PIB

(scénario économique de référence et maintien de la réglementation actuelle)

2000

2010

2020

2040

Part des dépenses de retraite dans le PIB

11,6 %

11,8 à 11,9 *

13,6 à 13,8

15,7 à 16 *

Besoin de financement en points de PIB

- 0,2

0,2

2

4

Sources : COR

* La fourchette présentée correspond à deux hypothèses (H1 et H2) sur l'évolution de la pension du régime général, dues à des incertitudes techniques

Le tableau ci-après est relatif à l'évolution des soldes par régimes à droit constant. Il met notamment en évidence le hiatus existant entre l'évolution des besoins de financement du régime de la fonction publique d'Etat et ceux du régime général. En effet, celle-ci représente 8,86 % des retraités avec un besoin de financement de 35,2 milliards d'euros pour un besoin de financement de 36,5 à 46,7 milliards d'euros pour le régime général qui représente 61,67 % des retraité, ce chiffre comprenant les salariés agricoles, soit un besoin 7 fois plus important par retraité pour le régime de la fonction publique d'Etat.

Évolution des soldes par régime en milliards d'euros 2000

 

Solde technique
(cotisations - prestations)

Solde élargi
(y compris frais de gestion, compensation, subventions, impôts ...)

2000

2010

2020

2040

2000

2010

2020

2040

CNAV H 1

CNAV H 2

CNV H1 * + sal. agricoles

CNV H2 * + sal. agricoles

1,5

1,5

- 0,8

- 0,5

-

15,2

- 39,7

- 49,6

 

 

0,1

0,1

 

 

- 0,2

- 1,6

 

 

- 11,1

- 15,5

 

 

- 36,5 

- 46,7

AGIRC

0,3

1,4

- 1,6

- 3,8

- 0,1

1,0

- 1,9

- 4,1

IRCANTEC

0,2

0,1

- 0,6

- 2,0

0,2

0,0

- 0,6

- 2,1

Fonction publique d'Etat **

0,0

- 9,5

- 20,2

- 36,8

0,0

- 8,2

- 18,7

- 35,2

CNRACL

2,7

- 0,6

-7,5

- 20,5

- 0,3

- 3,3

- 9,3

- 19,9

SNCF

- 2,7

-2,7

- 2,7

- 3,0

0,0

0,1

0,3

0,7

IEG

0,0

- 0,7

-1,7

- 1,1

0,0

- 0,6

- 1,6

- 1,2

RATP

- 0,4

- 0,4

- 0,6

- 0,7

0,0

0,0

- 0,1

0,0

CANCAVA

- 0,7

- 1,0

- 1,2

- 1,8

- 0,2

0,1

0,3

0,1

CNAVPL

- 6,4

- 5,8

- 4,6

- 3,4

- 0,2

- 0,4

- 0,2

0,0

Exploitants agricoles

- 6,4

- 5,8

- 4,6

- 3,4

- 0,2

- 0,4

- 0,2

0,0

Autres régimes ***

- 5,6

- 6,1

- 7,4

- 8,0

- 0,5

- 0,5

- 1,8

- 2,6

* Les deux hypothèses H 1 et H 2 reflètent une incertitude technique sur l'évolution de la pension moyenne de la CNAV

** C'est par convention que ces soldes sont nuls en 2000, en raison du choix retenu pour calculer les cotisations implicites employeur d'équilibre et les subventions

*** Les autres régimes comprennent l'ORGANIC, le régime des mines, des ouvriers de l'Etat, des marins, de la Banque de France, des cultes, des clercs de notaires.

Source : COR, 2001

B.  UNE APPROCHE CONSENSUELLE DES SOLUTIONS À APPORTER

1. Un accord sur les instruments disponibles

Si le constat relatif aux évolutions de la situation de nos régimes de retraite est partagé depuis plus de deux décennies, il faut aussi noter une certaine convergence dans les solutions à apporter afin de sauver la retraite par répartition au sein d'un pacte social préservé.

Dès 1991, le Livre blanc sur les retraites évoquait diverses mesures propres à « garantir dans l'équité les retraites de demain". Tout comme le rapport « Charpin » de 1999, le livre blanc évoquait la nécessité de réduire les inégalités existant entres les divers régimes, d'étendre la période de référence (ce qui fut fait en 1993), de coordonner la durée d'assurance entre les régimes, mais encore d'adapter la durée d'activité nécessaire pour constituer un droit à une retraite complète.

Pour ce qui concerne l'allongement de la durée de cotisation, il n'est pas superflu de citer le Livre blanc :

« Etant entendu que le droit à la retraite reste fixé à 60 ans, une telle évolution n'aurait dans son principe rien de choquant. A titre d'exemple, en supposant que la condition de durée d'assurance exigée pour la génération née en 1950 soit de 42 ans, cela signifierait qu'un actif de cette génération ayant commencé à travailler à 20 ans pourrait bénéficier en 2012 d'une pension à taux plein tout en ayant eu la possibilité dès 60 ans de bénéficier d'une pension un peu plus faible dont le montant serait lié à la durée d'assurance comptabilisée à cet âge ».

Dans sa déclaration du 20 mars 2000, M. Lionel Jospin, alors Premier ministre, affirmait certains principes : la sauvegarde de la retraite par répartition, la concertation dans l'élaboration et la progressivité dans la mise en œuvre des mesures. Sur le plan des moyens de la réforme, il évoquait l'allongement de la durée de cotisation dans la fonction publique avec la possibilité de rachat d'annuités, il ne manquait pas de mentionner la prise en compte de la pénibilité de certaines fonctions ainsi que l'intégration d'une partie des primes dans le calcul des retraites. S'agissant du régime général, il suggérait l'institution de mécanismes de souplesse en pénalisant moins ceux qui souhaitent ou sont contraints de partir plus tôt à la retraite sans avoir totalisé la durée de cotisation nécessaire pour obtenir une retraite à taux plein ; mais aussi d'améliorer la situation de ceux qui partent à la retraite en ayant cotisé plus de 160 trimestres.

Enfin, il était proposé de renforcer le fonds de réserve pour les retraites (FRR), avec un objectif de 1000 milliards de francs en 2020 et d'instaurer un Conseil d'orientation des retraites (COR) afin d'organiser dans la durée la concertation sur l'avenir des retraites.

Si le fonds de réserve pour les retraites ne semble pas, à ce jour, à même d'accomplir sa mission, la création du COR mérite d'être saluée. De par sa composition « paritaire », il a su être une instance d'information et de réflexion, le rapport, rendu public le 6 décembre 2001, comporte une synthèse des questions relatives à la retraites ainsi que toutes les projections et solutions propres à faire évoluer le débat.

Le présent projet de loi s'appuie d'ailleurs sur les hypothèses économiques figurant dans le rapport et met en œuvre certaines des « pistes » de solution qui s'y trouvent évoquées.

Ainsi, le présent projet de loi n'a pas surgi ex nihilo, l'objectif demeure de sauvegarder le système de retraite par répartition auquel les Français sont attachés. Fruit de la concertation avec les partenaires sociaux, il met en action les mesures propres à assurer la préservation du pacte de solidarité. A cet égard, il faut souligner qu'un accord général existe sur le vœu de sauvegarder la répartition ainsi que sur les moyens à mettre en œuvre pour parvenir à cette fin. S'il existe une communauté de vue au sujet de l'action à mener, le temps de cette action est venue.

2. Perspectives du financement

La retraite par répartition est fondée sur un double pacte social : celui de la solidarité entre les générations et celui de la solidarité à l'intérieur d'une même génération, cela dans la mesure où sont organisées de larges redistributions entre les différentes catégories socioprofessionnelles et les sexes.

Dans la plupart des cas, il existe une relation nécessaire entre la contribution et la retraite, la solidarité venant en aide, de façon non contributive cette fois, aux plus démunis. En tout état de cause, le socle de la retraite est et doit demeurer le travail. A cet égard et dans l'intérêt de l'ensemble de la collectivité, le taux d'emploi des personnes au-delà de cinquante ans doit être restauré et le travail des femmes - en tant qu'actives et en tant que mères - doit être mieux reconnu par nos dispositifs sociaux. Aussi, le rapport du COR souligne que « les mesures qui devront être prises n'ont de sens que replacées dans une politique de la croissance, de l'emploi et du travail, de la protection sociale, et même des salaires et de l'épargne ».

Dans un système de retraite, les variables susceptibles d'actions sont au nombre de trois : montant des pensions, rapport entre durée de service des pensions et durée d'activité, ressources des régimes de retraite. Dès lors que l'on a fait du montant des pensions un objectif privilégié, les ajustements éventuels portent nécessairement sur les deux autres facteurs.

Une des variables devant être étudiées est donc celle du décalage de l'âge de cessation d'activité, cela d'autant plus que le régime général français comporte un double critère d'âge et de durée pour l'accès à une retraite à taux plein. Ainsi, l'allongement de la durée d'assurance constitue une mesure à la fois juste et réalise. Juste parce qu'il convient, dans un premier temps qu'à niveau de prestation comparable, la durée d'assurance soit comparable. Réaliste parce que, notre système de retraite s'établissant actuellement sur une proportion de deux tiers de vie active pour un tiers de vie passé à la retraite, le maintien de ce rapport, compte tenu de l'évolution de la longévité, nécessite un ajustement permanent.

Pour ce qui concerne les financements supplémentaires, le Fonds de réserve pour retraites doit être évoqué. Dans son intervention du 21 mars 2001, le Premier ministre de l'époque, évoquait une perspective de réserve de ce fonds de 152 milliards d'euros pour 2020. Il est à craindre que cet objectif ne soit pas réalisable, le rythme d'abondement semblant insuffisant pour atteindre cet objectif. En effet, la création de ce fonds fut tardive au regard de la mission de lissage de la hausse des cotisations résultant des effets de la dégradation démographique, très sensible dès 2020. Par ailleurs, les moyens de l'alimentation du fonds ont été largement surévalués. Selon les estimations réalisées dans le cadre du projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2003, les réserves devraient passer de 7,1 milliards d'euros fin 2001 à 13 milliards fin 2002 et 17 milliards fin 2003.

Le COR évoque quatre autres recettes nouvelles susceptibles de contribuer à l'équilibre des régimes de retraites :

· Le redéploiement de marges de manœuvre dégagées par ailleurs dans le champ des comptes sociaux. Il s'agit d'avoir recours aux excédents de l'assurance chômage et à ceux de la branche famille. Le premier moyen s'appuie sur les perspectives démographiques en estimant que l'arrivée de classes creuses sur le marché du travail entraînera de façon mécanique une réduction du chômage. Cet argument parait contestable à au moins deux titres : le chômage peut, pour partie, résulter de la sous qualification, les classes creuses pourraient amener un moindre niveau de cotisation à l'assurance chômage.

S'agissant de la branche famille de la sécurité sociale, le même argument démographique prévaut. Par ailleurs, il n'est pas souhaitable que cette branche soit ponctionnée tant il est nécessaire de promouvoir une politique familiale efficiente, il est d'ailleurs rappelé que la commission des comptes de la sécurité sociale prévoit, pour 2003, un transfert de 1 890 millions d'euros à la branche vieillesse au titre des bonifications pour enfants. Cette branche finance encore les cotisations d'assurance vieillesse des parents au foyer (environ 1,4 point de PIB en 2000). Ainsi, les mécanismes de compensation et, a fortiori, de surcompensation ne créent aucune richesse supplémentaire.

· L'élargissement de l'assiette des prélèvements qui pourrait peser sur les employeurs ou les ménages par le truchement d'instruments tels la CSG ou la TVA ne semblent guère compatible avec un quelconque dynamisme économique, le taux de prélèvement en France étant déjà fort élevé.

· L'augmentation de la contribution de l'Etat qui, d'après le rapport du COR concourt aujourd'hui de façon importante à la prise en charge des retraites : par le financement comme employeur d'une partie des retraites des fonctionnaires, mais aussi par les multiples subventions d'équilibre aux régimes spéciaux et au régime des exploitants agricoles. La mise en place du Fonds de solidarité vieillesse a permis d'identifier les dépenses de solidarité nationale remboursées aux régimes : minimum vieillesse, validations de périodes de chômage et certains avantages familiaux. Eu égard au déficit du budget de l'Etat ce moyen ne parait pas utilisable.

· L'augmentation du taux des cotisations d'assurance vieillesse présente le double inconvénient de peser à la fois sur les ménages et les employeurs ; comme il a été souligné plus haut, cette voie n'est pas favorable à la croissance économique.

II.- LA RÉFORME PROPOSÉE

A. LES OBJECTIFS DE LA RÉFORME

Dans son discours du 3 mars dernier, M. Jean-Pierre Raffarin, Premier ministre a donné à la fois la méthode et les axes de la réforme immédiate pour 2020 ce qui constitue le premier objectif. Les facteurs sur lesquels il y a lieu de peser sont : le niveau des cotisations, la durée de cotisation et le niveau des pensions. Forte de réalisme la réforme est progressive (elle ne revient pas sur les droits des retraités actuels) et, par une mise en œuvre étalée sur plusieurs années, elle permettra d'assurer toutes les transitions nécessaires. Elle doit, par ailleurs, être ajustable : à cet égard le rôle du COR sera précisé et une rencontre avec les partenaires sociaux organisée tous les cinq ans afin de prendre en compte les évolutions constatées.

Deuxième objectif, le niveau des retraites doit être garanti afin de préserver le pouvoir d'achat des retraités qui sont aussi des consommateurs. Ainsi, s'il faut tenir compte des carrières commencées très jeune et effectuées dans des conditions pénibles, il n'est pas possible d'ouvrir largement la possibilité du départ en retraite avant 60 ans. Bien plus, il faut proposer une bonification pour les années cotisées au-delà.

Le respect du principe d'équité implique que la situation de personnes placées dans des situations comparables soit harmonisée. A cet égard, l'harmonisation des durées d'assurance entre les secteurs public et privé constitue un des moyens d'atteindre ce troisième objectif.

Le quatrième objectif réside dans l'amélioration du taux d'activité en France. Ce principe doit trouver sa traduction dans une politique familiale dynamique, dans une politique favorisant l'emploi mais encore dans une restauration de la valeur du travail, cela notamment en restaurant le taux d'activité des salariés de plus de 55 ans.

Enfin, et pour donner plus de liberté dans les choix personnels relatifs à la retraite, il y a lieu de faciliter l'épargne salariale et d'instituer le droit effectif de chaque assuré à l'information sur sa situation au regard de la retraite.

Sur le plan des moyens, il s'agit de garantir :

- La sécurité par l'assurance d'un haut niveau de retraite ;

- L'équité par l'esprit de justice sociale ;

- La liberté par la personnalisation de la retraite.

B. LES MOYENS DE LA RÉFORME

Le présent projet de loi organise le maintien du système de retraite français dans ses paramètres fondamentaux. L'équilibre est ainsi préservé dans l'ensemble jusqu'en 2020 bien que certaines mesures de sauvegarde produiront leurs effets au-delà de cette date. Au demeurant, il s'agit d'ores et déjà de préparer le deuxième choc de 2040. Aussi, la démarche engagée est-elle responsable et pragmatique puisqu'elle prévoit une surveillance permanente par des institutions paritaires ainsi que des rendez-vous quinquennaux permettant, en temps réel, de procéder aux ajustements nécessaires, cela dans la concertation.

A cet effet, plusieurs moyens sont mis en œuvre à travers les 81 articles qui constituent le texte.

La première préoccupation qui s'exprime à travers cette réforme est celle de la sécurité, il s'agit de maintenir un niveau futur de retraite au moins égal à celui qui prévaut aujourd'hui.

· Un niveau de retraite minimal de 85 % du SMIC au moment de la liquidation est garanti pour les salariés ayant travaillé à temps complet au SMIC et disposant de la durée d'assurance nécessaire au service d'une retraite à taux plein. Dans la fonction publique, la pension sera complétée par un régime obligatoire additionnel permettant la prise en compte des primes et indemnités à hauteur de 20 %. Par ailleurs, le taux de liquidation actuel dans ce régime est maintenu. Enfin, le minimum garanti de retraite est augmenté de 5 % pour les agents ayant effectué une carrière complète. Un régime complémentaire obligatoire est créé pour les industriels et les commerçants.

· La situation des assurés totalisant le nombre de trimestres nécessaires au service d'une pension à taux plein ne sera pas modifiée par la passage de la durée de référence de 150 à 160 trimestres d'ici 2008. Cette évolution concerne les ressortissants du régime général et des régimes alignés, le gain pour le régime général étant estimé à 2 400 millions d'euros à l'horizon 2020.

· Afin d'assurer la prise en charge par la collectivité du coût de l'allongement de la période de retraite liée à celui de la vie, la durée d'assurance est augmentée. En premier lieu le nombre d'annuités exigible dans la fonction publique est porté par paliers de 37,5 à 40 à l'horizon 2008. A compter de 2009, pour tous les régimes, la durée sera élevée de façon étalée à une durée proche de 42 ans en 2040. Cette mesure apportera, en 2020 au régime général, 3,4 milliards d'euros. Sa mise en œuvre est très progressive puisqu'elle représente une augmentation de 7 trimestres en 17 ans alors que la réforme de 1993 avait décidé une augmentation de dix trimestres en dix ans.

· Une hausse de 0,2 point des cotisations vieillesse est programmée (hors texte) pour 2006. 

· Le pilotage du système est garanti par les partenaires sociaux qui, à travers le COR notamment, rediscuteront des paramètres de financement des retraites lors de rendez-vous quinquennaux, le premier étant d'ores et déjà programmé pour 2008.

· Un dispositif stable de revalorisation des retraites indexées sur l'évolution des prix est adopté alors qu'il n'existait plus de règle fixe depuis 1998. Il est étendu aux pensions civiles et militaires.

La deuxième préoccupation est de garantir l'équité, cela notamment en suivant le principe commandant, dans un système fondé sur la solidarité, qu'à effort contributif égal, chacun bénéficie d'une retraite égale.

· Les salariés et non salariés qui ont commencé à travailler très jeunes (14, 15 et 16 ans) et qui totalisent 60 trimestres de cotisation avant l'âge de 60 ans pourront prendre leur retraite avant cet âge. Dans la fonction publique hospitalière, les catégories actives de l'hôpital bénéficient d'une majoration de la durée d'assurance d'un an tous les dix ans afin de permettre à ceux qui ont effectué une carrière dans ce contexte de partir à la retraite entre cinquante-cinq et soixante ans.

· Pour les assurés du régime général qui ont cotisé tout au long de leur carrière sur la base de faibles revenus, le minimum contributif est réformé et réévalué afin de garantir le montant de la retraite. Cette évolution sera de plus 3 % en trois étapes, 1er janvier 2004, 1er janvier 2006 et 1er janvier 2008.

· Les inégalités de traitement entre mono et pluripensionnés sont progressivement aplanies ; aujourd'hui ces derniers sont souvent défavorisés par la double comptabilisation des meilleures années dans chaque régime dont ils relèvent. 

· Les salaires des années n'ayant permis de valider aucun trimestre du fait de la faiblesse des rémunérations sont neutralisés.

· La famille est largement prise en compte à travers, notamment, la réforme de la réversion. Dans le régime général, les conditions d'âge, de durée de mariage et de non-remariage sont supprimées. Ce dispositif est transposé aux professions libérales et agricoles non salariées. Pour la fonction publique, la jurisprudence communautaire est prise en compte et l'égalité entre les hommes et les femmes consacrée dans le régime des bonifications pour enfants applicable aux pensions et dans celui des pensions de réversion.

· Dans la fonction publique, pour les enfants qui naîtront après le 1er janvier 2004, le temps partiel et les interruptions de carrière pour élever un enfant de moins de huit ans seront comptés comme du temps travaillé. Les majorations de pension des parents de trois enfants et la possibilité de départ sans condition d'âge ouverte aux mères de trois enfants ne sont pas remises en cause.

· Dans le régime de base des exploitants agricoles, les aides familiaux sont affiliés dès l'âge de seize ans et les périodes d'activité exercées en tant qu'aide familial peuvent être validées à titre rétroactif par un rachat de cotisation.

· Les exploitants agricoles voient le versement de leurs pensions de retraite de base mensualisée en 2005, à l'instar de ce qui existe déjà dans leur régime complémentaire.

· S'agissant de l'emploi des salariés de plus de 55 ans, le projet de loi ouvre le chantier d'une révolution culturelle :

Les règles relatives au cumul des revenus d'une activité avec ceux d'une retraite ou d'une pension sont harmonisées et simplifiées, mettant par là un terme à certaines injustices ; il s'agit aussi d'un instrument de souplesse dans le domaine des choix individuels au regard de la retraite. Les commerçants et les artisans exerçant en milieu rural, ou en zone urbaine sensible, bénéficieront d'un régime particulier.

- L'âge limite de mise à la retraite d'office du salarié par l'employeur est repoussé à soixante-cinq ans au lieu de soixante aujourd'hui. Par ailleurs, une surcote de 3 % par année effectuée au-delà de l'âge de soixante ans et de la durée d'assurance requise pour la liquidation de la retraite à taux plein est instituée.

- Le dispositif de retraite progressive est réformé, il est désormais ouvert aux personnes ne justifiant pas du taux plein ; un passage progressif entre travail et retraite entre soixante et soixante-cinq ans est ainsi organisé.

- Les préretraites sont recentrées autour de deux dispositifs : CATS (pénibilité) et ASFNE, afin de pouvoir encore répondre à la situation des entreprises dont le redressement rend nécessaires des départs anticipés.

- La mise en œuvre de dispositifs de préretraites, dites « d'entreprise », donne lieu à l'assujettissement à une cotisation acquittée par l'employeur dont le produit est versé au Fonds de réserve pour les retraites.

La troisième préoccupation est de favoriser la liberté dans le choix d'une retraite personnalisée.

· L'information personnelle et continue des assurés au sujet de leur retraite est institué : un groupement d'intérêt public centralisera toutes les informations fournies par les régimes et chacun pourra connaître sa situation et déterminer ses choix en toute connaissance de cause.

· Un taux de surcote est institué, dès 2004 pour permettre à ceux qui le souhaitent de travailler au-delà de soixante ans et d'améliorer leur pension de retraite, lorsqu'ils disposent déjà de la durée d'assurance. Dans la fonction publique, la même surcote est créée.

· Le taux de la décote, aujourd'hui de 10 % par année manquante, diminuera dès 2004 pour atteindre 5 % en 2013. Quelle que soit la durée d'assurance, il n'y a pas de décote à soixante-cinq ans.

· Dans la fonction publique, la possibilité de partir en retraite sans avoir fait le plein de ses années de cotisation est préservée, moyennant l'application d'un coefficient d'abattement de 5% par année manquante dans la limite de cinq ans Ce dispositif entrera en vigueur de façon très progressive à partir de 2006 et ne produira son plein effet qu'à compter de 2020.

· Les fonctionnaires qui souhaitent diminuer leur activité au cours des cinq années qui précèdent leur retraite pourront le faire. La cessation progressive d'activité (CPA) est maintenue et aménagée : elle permettra de travailler au-delà de soixante ans.

· De nouvelles possibilités d'évolution professionnelle sont ouvertes aux enseignants, avec la possibilité d'entreprendre une seconde carrière, cela notamment pour ceux d'entre eux qui souhaitent changer de métier entre quarante et cinquante ans.

· Le régime du rachat de cotisation est amélioré, les années d'études ou les années n'ayant pas donné lieu à cotisation est désormais possible, dans la limite de trois ans. Cette mesure s'applique dans tous les régimes.

· Les salariés du secteur privé pourront bénéficier, comme les fonctionnaires, d'une incitation fiscale pour compléter s'ils le souhaitent, par un mécanisme d'épargne retraite, leur pension issue du système de retraite par répartition.

*

La commission a examiné le projet de loi pendant cinq séances, tenues sur trois jours et totalisant vingt et une heures de réunion. Au cours de ces séances, elle a été saisie de 6 600 amendements sur les 81 articles du projet. Elle a adopté 101 amendements, dont les plus importants sont les suivants :

Sur les dispositions relatives au régime général :

· extension aux non salariés des professions artisanales, industrielles et commerciales de la possibilité de rachat des années faiblement cotisées ;

· relèvement du plafond de ressources pour le service de la pension de réversion, en cas de remariage ;

· suppression, pour l'évaluation des ressources dans le cadre de la réversion, de la prise en compte de la majoration pour enfant ;

· prise en compte des enfants décédés avant l'âge de neuf ans pour la bonification de pension ;

· prise en compte des enfants lourdement handicapés pour la bonification et la majoration de pension ;

· extension de l'assurance vieillesse du parent au foyer aux personnes n'exerçant pas d'activité professionnelle pour s'occuper d'un membre de leur famille dépendant.

Sur les dispositions relatives aux régimes de la fonction publique :

· nouveau dispositif relatif aux avantages familiaux, conforme à la jurisprudence communautaire ;

· non-application de la décote aux pensions de réversion lorsque c'est le décès du fonctionnaire qui l'a empêché de réunir la durée d'assurance requise pour un pourcentage maximal de pension ;

· élargissement de la possibilité de surcotisation pour les fonctionnaires à temps partiel ;

· assouplissement des conditions entourant le rachat des années d'études supérieures.

Sur les dispositions relatives aux régimes des non salariés :

· pour les professions libérales, rattachement des présidents et dirigeants de sociétés par actions simplifiées (SAS) aux régimes complémentaires obligatoires et départ à la retraite à soixante ans pour les avocats ;

· pour les exploitants agricoles, meilleure prise en compte de la situation des conjoints collaborateurs au travers de la pension de réversion, des droits combinés et de la revalorisation des petites retraites, et de la situation des pluripensionnés au regard de l'assurance vieillesse des parents au foyer.

Sur les dispositions relatives à l'épargne retraite :

· caractère individuel des plans d'épargne pour la retraite (PER) ;

· possibilité d'abondement complémentaire de l'employeur dans le cadre des plans partenariaux d'épargne salariale volontaire pour la retraite (PPESVR) ;

· déductibilité fiscale des cotisations au régime additionnel de retraite des fonctionnaires créé par le projet de loi.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

I.- AUDITION DES MINISTRES

La commission a entendu M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité, et M. Jean-Paul Delevoye, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire, sur la réforme des retraites au cours de sa séance du 4 février 2003.

Le président Jean-Michel Dubernard a estimé que le Premier ministre a donné devant le Conseil économique et social le « coup d'envoi » de la réforme des retraites. Le chef du gouvernement a rappelé l'urgence de la situation, avec l'arrivée à la retraite de la génération du baby-boom, l'allongement de l'espérance de vie et la baisse prévisible du nombre d'actifs à compter de 2005. Sur la base de ce diagnostic, il a esquissé sa méthode de travail et les trois axes retenus : « fermeté sur les principes », « ouverture sur les modalités » de la réforme et « détermination sur le calendrier ». La période qui s'ouvre s'achèvera avec l'adoption d'un texte de loi avant cet été.

Evoquant la « tournée européenne » à laquelle le ministre des affaires sociales l'a convié, le président Jean-Michel Dubernard a indiqué avoir été frappé par le fait qu'en Finlande, en Suède ou en Allemagne tous les partenaires sociaux, bien sûr, mais aussi tous les représentants de la précédente majorité sont associés aux réformes engagées par les nouveaux gouvernements. Le plus souvent, la réforme a été faite, par-delà les oppositions partisanes, dans un esprit de consensus. Cela vaut pour nos voisins qui ont une tradition ancienne de dialogue social, comme en Europe du Nord, mais aussi pour ceux dont l'histoire sociale a été plus conflictuelle, comme l'Italie ou l'Espagne. Il faut, en France, engager cette réforme dans le même esprit. En tout cas, comme l'a dit le Premier ministre, il faut « aller aussi loin que possible ensemble » pour dégager des lignes de force communes qui ne seront pas remises en cause sous les prochaines législatures.

Les élus de la majorité comme de l'opposition ont fait part de leur souhait d'être rapidement associés au débat sur cette réforme difficile. C'est pourquoi, il a paru souhaitable de convier les ministres en charge de la réforme à venir s'exprimer devant la commission dès le lendemain des annonces faites par le Premier ministre devant la Conseil économique et social.

La commission des affaires sociales entend assumer pleinement son rôle dans la réforme à venir. Le Parlement se doit, en amont du dépôt d'un projet de loi, d'animer une réflexion et de faire des propositions. C'est dans cet esprit que la commission devrait organiser prochainement, avec la commission des affaires sociales du Sénat, une rencontre avec des parlementaires espagnols et suédois pour évoquer la réforme conduite dans leur pays en concertation avec la majorité et l'opposition.

M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité, a indiqué que le temps de rapports et des reports est révolu sur cette question déterminante pour l'avenir du pacte social.

Il faut maintenant agir avec détermination et prendre ses responsabilités, car tout délai supplémentaire ne ferait que saper davantage ce pilier de l'équilibre social et exposerait au risque d'un affrontement entre générations et à des injustices inacceptables. De même, il faut engager le sauvetage du système par répartition car ce sont les salariés les plus modestes qui souffriraient le plus de son naufrage. Comme l'a dit le Premier ministre : « les Français les plus aisés trouveront toujours les moyens de surmonter les difficultés par leur épargne ».

Sous l'autorité du Président de la République, le gouvernement a désormais engagé la réforme. Le Premier ministre a choisi le Conseil économique et social, assemblée qui rassemble l'ensemble des forces économiques et sociales, pour prononcer un discours sur le constat, la méthode et les grands principes qui guideront l'action du gouvernement.

Le constat sur les retraites commence à être connu et même peut-être partagé par un nombre croissant de nos concitoyens. C'est à partir de ce constat que pourra se bâtir un consensus national sur 1'avenir des retraites. Les syndicats, pour la première fois, se sont réunis autour de principes communs. Plusieurs éléments ressortent de cette prise de position et des récentes manifestations.

D'abord, le mot réforme n'est plus tabou, c'est dire que le constat sur l'urgence et l'action est intégré. C'est le statu quo qui aggraverait aujourd'hui l'inquiétude des Français, alors qu'ils attendent une action déterminée et concertée. Ensuite, l'enjeu de la réforme est clair : il s'agit de sauver le régime par répartition. C'est précisément l'objectif central du gouvernement. Le Premier ministre l'a précisé devant le Conseil économique et social : il ne sera proposé ni de tout chambouler, ni de privatiser. Il convient de s'inscrire dans le respect des principes fondateurs de la sécurité sociale. Enfin, la demande d'un dialogue nourri avec les partenaires sociaux a été entendue. Les ministres écouteront attentivement et, sur certains points, ils négocieront. Il faudra aller aussi loin qu'il est possible dans le rapprochement des différentes propositions.

Un projet de loi devrait être présenté au Parlement avant la fin du premier semestre 2003. Cela laisse le temps à la concertation et à la négociation, sans trop laisser le temps au temps. Il y a donc un calendrier et il sera tenu.

La situation financière sur l'avenir des retraites est connue. Tous régimes confondus, le besoin de financement est de 50 milliards d'euros en 2020, dont 28 pour les régimes de la fonction publique et 15 pour le régime général. Il est de 100 à 120 milliards d'euros en 2040. Le rapport du Conseil d'orientation des retraites l'a montré : si aucune réforme n'est engagée d'ici 2040, soit le montant des retraites est - par rapport au revenu d'activité - quasiment divisé par deux, soit le taux de cotisation est augmenté de 60 %. Il faut sortir la France de cette alternative inacceptable.

On peut toujours objecter que 2040, c'est loin. Mais l'avenir démographique est une certitude : tous les futurs retraités de 2040 sont déjà nés.

On peut toujours objecter qu'il suffit d'affecter d'autres ressources que des cotisations à la branche vieillesse. Mais, ces prélèvements nouveaux ne pèseraient pas moins sur les actifs et sur la compétitivité de notre économie. La réalité, c'est que pour couvrir le déficit prévu des régimes de retraites, il faudrait soit doubler l'impôt sur le revenu d'ici 2020, soit doubler la TVA d'ici 2040. Certains préconisent cette voie. Elle peut être débattue sur le plan intellectuel. Mais elle apparaît comme incompatible avec une politique économique assurant la compétitivité et le développement de l'emploi. Elle ferait peser sur les Français un niveau de prélèvements obligatoires à la fois déraisonnable et inconciliable avec les engagements européens de la France.

On peut toujours objecter que la croissance et le plein emploi viendront au secours du système. Mais, le Conseil d'orientation des retraites l'a montré, une plus grande croissance économique présenterait un impact très modéré pour alléger la charge, même s'il est indéniable que la situation du marché de l'emploi dans les années à venir aura pour conséquence d'accélérer ou de retarder l'imminence des déséquilibres.

Cependant, au delà des chiffres de base sur lesquels tout le monde est d'accord, la réforme ne saurait être limitée à des nécessités financières ou des logiques comptables. La réforme des retraites est véritablement un enjeu de société. A travers elle se pose tout un faisceau de questions qui traversent notre modèle social transformé par le choc démographique.

Comment répondre au vieillissement accéléré de la population active à compter de 2006 lorsque les départs à la retraite atteindront 800 000 personnes contre 550 000 aujourd'hui ? Cela pose la question de la politique de la natalité et de la politique familiale en général mais oblige aussi à s'interroger sur la manière dont la société compte appréhender une situation où une personne sur trois aura plus de soixante ans en 2040, contre une sur cinq actuellement.

Il faut voir dans cette formidable évolution non pas nécessairement un handicap et une crispation, mais un défi positif à relever pourvu qu'on y réfléchisse et qu'on agisse ensemble. Cela obligera à revoir la politique familiale, à réajuster notre regard sur le rôle des seniors, en particulier dans le monde du travail, à revoir la formation des hommes et des femmes tout au long de la vie, sans doute même à porter un autre regard sur une politique d'immigration choisie, maîtrisée et assumée.

Le gouvernement n'a pas la prétention d'embrasser en une seule réforme l'ensemble de ces sujets. Il faut garder à l'esprit que la réforme des retraites constitue un pivot autour duquel toutes ces questions gravitent et s'influencent les unes les autres pour façonner l'avenir du pacte républicain.

Il faut se garder d'avoir une approche trop « franco-française » du problème des retraites. Les défis posés par le vieillissement de la population, l'allongement de la durée de la vie, le travail des salariés expérimentés sont des questions que se posent tous les pays européens.

C'est pourquoi un déplacement dans quatre pays européens a été effectué en compagnie de représentants d'organisations syndicales et des présidents des commissions des affaires sociales des deux assemblées. Il est très instructif d'aller ensemble voir sur place comment les partenaires européens s'y prennent. Pour faire ressortir aux Français que le problème n'est pas seulement hexagonal mais aussi pour constater que partout l'enjeu dépasse les clivages politiques et que les réponses apportées n'obéissent pas à des partis pris idéologiques. C'est bien pour cela que certains de ces pays ont réussi à réformer dans le consensus. L'Allemagne, la Suède et la Finlande sont des pays à forte tradition sociale. Cela montre que l'on peut conjuguer le maintien d'une bonne protection sociale et une réforme des retraites : c'est même la réforme qui est le garant du maintien d'une bonne protection sociale, puisqu'elle permet d'en assurer la pérennité.

Chaque pays a son histoire sociale et ses traditions. Il n'y a pas de modèle à copier, ni de réforme clefs en main à importer. Il y a, en revanche, de bonnes idées qui méritent d'être examinées : le système d'information des assurés retenu dans la réforme suédoise, le plan visant à relever le travail des salariés expérimentés en Finlande, le dispositif permettant aux salariés espagnols de plus de soixante-cinq ans de travailler partiellement.

Ces dispositifs en faveur des salariés âgés montrent combien notre vision malthusienne du marché du travail est dépassée. Même si le taux de chômage espagnol a considérablement reculé, il reste plus élevé qu'en France. Pourtant, les organisations syndicales ne contestent pas l'effort en faveur du travail des salariés âgés sous prétexte qu'il faut laisser la place aux jeunes.

Force également est de constater qu'il n'y a pas d'opposition systématique des partenaires sociaux et des forces politiques aux mécanismes d'épargne retraite, qui peuvent être individuels ou collectifs, obligatoires ou facultatifs.

Dans ces pays, les réformes présentent toutes un caractère continu et progressif. Continu, parce qu'elles font l'objet d'évaluations et d'adaptations à échéance régulière. Progressif, parce qu'il n'y a pas de « grand soir » ou de « big bang » des retraites.

La méthode adoptée par le gouvernement est d'abord fondée sur un dialogue direct avec les Français et leurs représentants.

Dans cet esprit, l'ensemble des formations représentées au Parlement ont été reçues pour un tour d'horizon complet par les ministres chargés des affaires sociales et de la fonction publique et le seront à nouveau au printemps, lorsque le contenu de la réforme sera précisé. On peut espérer que des propositions constructives en ressortiront et, au moins, que chacun s'efforcera d'éviter les critiques en forme d'échappatoire.

Le dialogue avec les partenaires sociaux sera naturellement privilégié. En février, seront discutés les principes fondamentaux de la réforme. En mars, comme l'a indiqué le Premier ministre, le dialogue sera formalisé et approfondi autour des décisions à prendre.

Plusieurs groupes de travail seront constitués : un « groupe confédéral » au niveau des confédérations assurera la synthèse, le ministère de la fonction publique conduira des consultations sur les sujets concernant la fonction publique avec les syndicats de fonctionnaires et d'autres groupes plus spécialisés seront constitués en fonction des besoins que la discussion fera apparaître. La liste reste ouverte à ce stade.

Dans le cadre de ce dialogue avec les partenaires sociaux, le gouvernement fera part ensuite de ses premières propositions courant mars, en laissant suffisamment de temps pour que le projet de loi puisse être discuté avant la fin du premier semestre 2003. En parallèle, des débats seront organisés dans chaque Conseil économique et social régional pour engager et nourrir le dialogue local. Le gouvernement engagera également une campagne nationale d'information directe des Français sur les grands enjeux de l'avenir des retraites.

Le gouvernement souhaite négocier avec les partenaires sociaux. Il entend s'en donner les moyens, ce qui suppose de donner une durée suffisante au débat et au dialogue. Mais il est clair que si ce dialogue n'aboutissait pas, la réforme ne s'arrêterait pas en chemin. C'est la responsabilité du gouvernement et du Parlement devant le pays. Ce sont les représentants de la Nation qui trancheront.

La méthode est ensuite fondée sur un choix : celui de la réforme progressive et continue.

L'horizon de la réforme est fixé à 2020. C'est une échéance raisonnable mais ambitieuse. Raisonnable parce qu'elle fait l'objet d'un consensus parmi les experts et les partenaires sociaux. Ambitieuse parce qu'il s'agit de lancer une étape significative d'un processus de réforme. Il n'y a pas de « grand soir » des retraites qui réglerait le problème à jamais.

Le projet qui sera présenté au Parlement comportera des mesures importantes pour l'équilibre des régimes à l'horizon 2020, mais il enclenchera également un processus d'adaptation et de révision en continu. L'idée de réforme des retraites en France doit être pacifiée et assumée par le corps social au delà des aléas de la vie politique nationale.

Cette méthode est mise au service de trois grands objectifs confirmés par le Premier ministre devant le Conseil économique et social.

- Le premier objectif, c'est la sécurité : la réforme doit garantir le financement de nos régimes de retraite. La sécurité, c'est assurer l'équilibre financier du système par répartition, pour que chacun puisse bénéficier d'une pension aussi satisfaisante que possible.

Il existe trois paramètres principaux : le taux de cotisation, la durée de cotisation et le montant des prestations. Aucun paramètre ne permettra à lui seul de résoudre le problème. L'effort doit être équilibré entre ces paramètres. Bien sûr de nombreux autres éléments interviendront, mais l'essentiel est là.

Un équilibre futur des régimes de retraite ne peut être durablement bâti sur une baisse continue du montant des pensions ou sur la seule augmentation des cotisations. La question que pose 1'allongement de 1'espérance de vie sur le partage entre le travail et la retraite ne peut plus être ignorée. Aujourd'hui, le temps de travail est environ le double du temps de retraite. Toute augmentation de l'espérance de vie bénéficie entièrement à la retraite. Un partage de cette augmentation de l'espérance de vie entre temps de travail et temps de retraite peut contribuer à la maîtrise de l'équilibre général.

Une augmentation de la durée effective d'activité doit être envisagée, indépendamment du débat sur la durée de cotisation. Le monde du travail doit évoluer en donnant une place accrue aux salariés expérimentés. Il n'est plus acceptable et parfaitement contre-productif qu'ils soient poussés vers des départs anticipés.

Le Premier ministre a demandé que soit organisée rapidement avec les partenaires sociaux une conférence consacrée à l'assurance emploi, pour définir des propositions concrètes afin de favoriser l'emploi par un véritable droit à la formation tout au long de la vie. C'est un véritable pacte pour l'emploi des plus de cinquante ans qu'il faut en particulier définir, et c'est d'abord aux partenaires sociaux de s'y engager. Ce pacte doit être l'un des éléments forts qui permettra à la France de réaliser l'objectif prioritaire d'augmentation du taux d'activité des seniors, c'est-à-dire de faire progresser l'âge moyen de cessation d'activité qui est aujourd'hui nettement inférieur à soixante ans.

Réaliser l'objectif de sécurité des retraites passe également par une transparence réelle où chacun serait en mesure de suivre à la fois le bon déroulement et, le cas échéant, les ajustements apportés dans le cadre de la réforme en continu. Dans cet esprit de suivi auquel devraient être associés les partenaires sociaux, deux outils semblent devoir être privilégiés.

Premièrement, le droit à l'information de chacun sur sa retraite doit être concrétisé. En Suède, chaque salarié dispose d'un bilan annuel de ses droits. Il faut inventer un dispositif adapté à nos pratiques qui à la fois sécurisera les Français et leur donnera le pouvoir de choisir, en fonction de données objectives et personnelles, le moment et les conditions de leur départ à la retraite.

Deuxièmement, il faut mettre en place un mécanisme institutionnel original assurant le suivi de la réforme en continu. Pour écarter les inquiétudes, le pilotage des régimes de retraite doit être partagé par tous les Français. Il s'agit d'alimenter et d'éclairer les décisions d'ajustement qui pourraient à l'avenir s'avérer nécessaires dans le cadre de rendez-vous, par exemple tous les cinq ans. Deux questions devront tout particulièrement faire l'objet de ces rendez-vous : celle du suivi de l'évolution des taux de remplacement et celle du partage des gains d'espérance de vie entre temps de retraite et temps de travail.

La sécurité, c'est enfin assurer, pour le long terme, la constitution du Fonds de réserve pour les retraites. Le Fonds de réserve est un investissement pour l'avenir. Il permettra d'assurer une partie du financement des retraites entre 2020 et 2040. Ce n'est pas un remède miracle, mais il contribuera à conforter l'ensemble du système à condition qu'il soit abondé. Aujourd'hui, le rythme d'abondement est insuffisant pour atteindre les 152 milliards d'euros initialement prévus. Il faut préciser l'objectif et surtout définir les moyens d'y parvenir.

- Le deuxième grand objectif de la réforme est l'équité entre les Français face à la retraite.

L'équité, c'est d'abord l'équité entre les régimes. Aujourd'hui, la notion de durée d'assurance et le niveau des taux de cotisations salariales diffèrent. Cette situation s'explique en raison de la conception originelle de la retraite dans les régimes de la fonction publique. Bien d'autres situations sont héritées de l'histoire des régimes, avec des justifications qui leur sont propres et que l'on doit réévaluer. La notion d'équité ne peut conduire à une uniformisation automatique et irréfléchie. C'est pour cette raison que le gouvernement entend respecter les logiques et les calendriers de négociation propres à chaque régime, en particulier pour les régimes spéciaux d'entreprise. Ces régimes s'inscrivent dans des logiques d'entreprise. C'est donc dans le cadre de véritables projets d'entreprises qu'ils devront évoluer.

La prise en compte des spécificités de la fonction publique ne doit pas faire obstacle aux exigences de l'équité qui veulent que la situation de personnes placées dans des situations comparables soit harmonisée. L'intention du gouvernement est d'enclencher une convergence progressive des situations entre le public et le privé dans le souci de l'intérêt général. La question de la durée de cotisation sera donc bien posée. Cette convergence doit partir de la définition d'un « socle commun », en matière de retraite. C'est la définition de ce socle avec les partenaires sociaux qui permettra à la réforme de refonder la solidarité nationale autour des retraites.

L'équité, c'est également se pencher sur les mécanismes de compensation démographique entre les régimes. L'épisode de l'automne dernier, avec la réaction des partenaires sociaux membres du conseil d'administration de la CNAV, en a montré la nécessité. La complexité de ces mécanismes est telle qu'ils ne sont plus compris. La solidarité entre les régimes doit donc être réaffirmée, mais sur la base de garanties de transparence et d'objectivité.

L'équité, c'est garantir l'égalité entre les hommes et les femmes en ce qui concerne les avantages familiaux. Certains de ces avantages, pour les fonctionnaires, ont été remis en cause par la jurisprudence communautaire au nom de l'égalité entre les hommes et les femmes. De manière générale, ils reposent sur des fondements dont une nouvelle évaluation est opportune. Le gouvernement ouvrira cette discussion en liaison notamment avec le mouvement familial.

L'équité entre les générations, c'est assurer aux retraités actuels qu'ils ne seront pas touchés par la réforme. Le gouvernement leur donnera une garantie solennelle sur le maintien de leur pouvoir d'achat par un engagement de la Nation dans la loi.

Mais l'équité entre les générations, c'est également limiter dans la mesure du possible la progression des cotisations. Compte tenu du haut niveau qu'ont atteint les prélèvements obligatoires en France, il apparaît exclu de se contenter de laisser dériver le système, en agissant sur le seul taux de cotisations. Une telle option serait économiquement irresponsable et socialement insoutenable. La solidarité entre les générations doit aussi prendre en considération les droits des actifs futurs.

L'équité entre les Français, c'est enfin l'esprit de justice sociale qui doit animer la réforme. C'est se soucier du sort des plus modestes, ceux qui ont été faiblement rémunérés durant leur vie active. C'est se préoccuper des conjoints survivants, notamment ceux - et le plus souvent celles - qui ne disposent que d'une pension de réversion pour vivre. C'est être attentif à ceux qui ont travaillé dans plusieurs régimes, afin que les modes de calcul ne pénalisent pas leur parcours professionnel.

Sur tous ces points, ainsi que sur la question complexe et évolutive de la pénibilité, la réforme doit pouvoir procéder à des avancées mais avec réalisme et sans surenchère.

- Le troisième objectif de la réforme, c'est une plus grande liberté de chacun dans le choix de sa retraite.

La liberté, c'est améliorer le niveau des pensions de ceux qui souhaitent travailler plus longtemps, mais aussi permettre à ceux qui souhaitent partir plus tôt de le faire dans certaines limites : leur retraite devra alors en tenir compte.

La liberté, c'est mettre fin à cette rupture trop brutale entre activité et retraite. Travail à temps partiel, retraite progressive, cumul emploi retraite : ces mécanismes ont tout leur intérêt et méritent attention. Il est suicidaire d'opposer l'activité des salariés âgés et l'entrée des jeunes dans le monde du travail. La France est dans ce domaine le parfait contre-exemple : elle cumule un des taux d'activité des seniors les plus faibles d'Europe, notamment à cause des départs anticipés et des préretraites, avec un des taux de chômage des jeunes les plus élevés. C'est bien la preuve qu'un senior qui s'en va n'ouvre pas mécaniquement une place à un jeune qui arrive.

La liberté, cela peut signifier également la possibilité de rachat d'annuités par des cotisations volontaires, dans des conditions à définir.

La liberté, c'est également ouvrir un accès facultatif à une épargne retraite et donner le droit de compléter, par un mécanisme d'épargne retraite, la pension du régime par répartition. Cette épargne retraite devrait être disponible, soit à titre individuel, soit à titre collectif, dans le cadre des entreprises ou des branches.

Le débat doit avoir lieu sur ce « troisième étage », même s'il est entendu que les régimes généraux fondés sur la capitalisation sont étrangers à l'histoire sociale du pays. Les Français doivent pouvoir par ce biais améliorer le taux de remplacement à partir duquel s'établira leur niveau de vie après la fin de leur carrière professionnelle. Tous leurs voisins ont ouvert ce débat. Même si l'on choisissait de ne pas le faire, les Français auraient de toute manière recours aux mécanismes existants pour compléter leur retraite. Mais ce seraient les plus aisés et les mieux informés qui y réussiraient le mieux. Offrir à tous les Français une faculté d'épargne retraite volontaire, clairement organisée par la loi en complément des régimes par répartition, est une mesure de justice sociale face à la retraite.

Mais cela ne saurait constituer la solution miracle au problème des retraites. Ce ne peut être qu'un complément accessoire que l'on doit rendre juste, efficace et accessible à tous.

La liberté, c'est enfin réfléchir à la situation de ceux qui ont un grand nombre d'annuité avant soixante ans, parce qu'ils ont commencé à travailler très tôt, et à ceux qui ont exercé des métiers pénibles. Ce débat est ouvert. Une mesure générale, faisant reposer l'équilibre des régimes sur la seule notion de durée d'assurance, serait malheureusement beaucoup trop coûteuse. Une réponse doit cependant être trouvée par un vrai dialogue avec les partenaires sociaux.

Dans ce domaine, tout n'est pas écrit d'avance, comme sur tout le dossier des retraites d'ailleurs. Point par point, il faut travailler sans préjugé, sans esprit partisan, mais avec une détermination qui conduira le gouvernement devant le Parlement avant la fin du premier semestre 2003. Nous avons le devoir d'aboutir à une étape décisive dans la sauvegarde des régimes de retraite par répartition. Cette réforme devra être conduite avec tous les Français : C'est un enjeu collectif car c'est le pacte social qui est en cause mais c'est aussi un défi personnel. Chaque Français doit maintenant se poser une question simple : serai-je capable de dépasser mes intérêts catégoriels ou partisans, professionnels ou politiques ? C'est en regardant leurs enfants dans les yeux que les Français pourront se rassembler.

En complément de la présentation faite par le ministre des affaires sociales des conditions dans lesquelles le Premier ministre souhaite que s'engage la réforme des retraites, M. Jean-Paul Delevoye, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire, a précisé qu'il s'apprête, dans le cadre d'une approche globale, à recevoir avec le ministre des affaires sociales les organisations syndicales puis à rencontrer les syndicats de la fonction publique.

Ayant à cœur de respecter le pacte républicain, dont fait partie le régime de retraites par répartition, cette réforme a également vocation à défendre le service public et les régimes de retraite de la fonction publique. L'inaction engendrerait en réalité des injustices inacceptables.

D'un point de vue économique, il faut savoir que le coût du système actuel des retraites représentera un point de croissance dans les dix à quinze prochaines années et, s'agissant de la fonction publique, à l'horizon de 2010 le coût des traitements de la fonction publique représentera 60 milliards d'euros tandis que l'Etat servira un montant de soixante milliards d'euros de pensions contre 30 milliards aujourd'hui. A l'horizon de 2040, le montant des pensions servies par l'Etat devrait s'élever à 80 milliards d'euros contre 60 milliards pour les traitements. Une telle évolution qui fragiliserait considérablement nos mécanismes de solidarité engagerait en outre notre responsabilité vis-à-vis de nos enfants. C'est pourquoi, ainsi que l'énonçait M. Jacques Delors, pour que la France soit solidaire, elle doit être riche sur le plan économique.

Après l'exposé des ministres, M. Denis Jacquat a tout d'abord souligné qu'il ne saurait y avoir une bonne politique des retraites sans effets sur l'emploi. Il a ensuite posé les questions suivantes :

- La réforme des retraites ne risque-t-elle pas de se heurter à la réalité des problèmes économiques ?

- Quelles dispositions seront arrêtées en faveur des salariés de moins de soixante ans ayant acquis quarante annuités de cotisations et désirant cesser plus tôt leur activité ? Comment, en outre, la pénibilité du travail sera-t-elle prise en compte ?

- S'agissant du secteur privé, une règle pérenne de revalorisation du point de pension, souhaitée depuis plusieurs années, sera-t-elle instaurée ?

- Quelles ressources sont envisagées pour abonder de manière durable le Fonds de réserve des retraites ?

- De quelle manière un niveau de revenu convenable sera-t-il garanti aux pensionnés les plus modestes ?

- Concernant la compensation et la surcompensation entre les régimes, la remise à plat nécessaire sera-t-elle effectuée ?

- De quelle manière la situation spécifique des veuves, et par conséquent des pensions de réversion, sera-t-elle prise en compte ?

- S'agissant des personnes handicapées, quels dispositifs sont envisagés, d'une part, pour les propres retraites de ces personnes et, d'autre part, pour celles des tierces personnes qui les aident, le cas échéant à titre bénévole ?

M. Pascal Terrasse a indiqué que le ministre des affaires sociales, après l'intervention du Premier ministre devant le Conseil économique et social, a mis sur la table l'ensemble des questions relatives à la réforme des retraites et que le menu est à présent connu. En revanche, la représentation nationale attend toujours les plats.

Il a ensuite formulé les observations suivantes :

- Sans mettre en cause le Conseil d'orientation des retraites créé par le gouvernement Jospin, force est de constater que son diagnostic n'est pas partagé par tous les partenaires sociaux.

- Si la présentation du projet de réforme contient quelques éléments d'information, elle comporte néanmoins des lacunes et des contradictions : s'agissant de la méthode, on peut s'interroger sur le souhait effectif d'engager une négociation, au demeurant indispensable, même s'il appartient à la représentation nationale en dernier lieu de légiférer. En ce qui concerne les délais évoqués, on ne peut que souligner une contradiction entre l'intention de « donner du temps au temps » et l'engagement au pas de charge d'une réforme qui devra être achevée avant l'été. A cet égard, il serait particulièrement inopportun de devoir légiférer sur un tel sujet au cœur de l'été.

- Sur le fond, il existe une contradiction entre la volonté de maintenir le principe de la retraite par répartition et l'intention de réfléchir à la création de fonds d'épargne individuelle. On peut toutefois se demander si dans un pays comme la France, dans lequel le taux d'épargne des ménages représente 15 % du PIB, il ne serait pas souhaitable de renforcer les différents outils d'épargne existants plutôt que d'en créer de nouveaux.

- D'un point de vue politique, on ne peut que souligner les limites du courage d'un gouvernement disposé à engager sa responsabilité devant le Parlement sur la question des retraites alors même qu'il dispose d'une très large majorité. Par ailleurs, les propos du ministre des affaires sociales présentent une contradiction avec ceux du Premier ministre s'agissant du problème de l'emploi des salariés de plus de cinquante-cinq ans : ainsi que l'a souligné le ministre des affaires sociales, le problème se pose en réalité dès cinquante ans. La réforme des retraites doit être effectuée en liaison avec une politique globale de l'emploi compte tenu de l'acuité du problème du chômage dans un pays qui compte deux millions et demi de chômeurs. En outre, la réforme annoncée présente une lacune quant à la place des retraités dans la société, qui sont pourtant des acteurs à part entière de la vie économique et sociale. Il convient à cet égard de mettre en œuvre des liens intergénérationnels.

- Le niveau de vie de nombre de retraités, qu'il s'agisse des bénéficiaires du minimum vieillesse, de pensions de réversion ou du conjoint survivant, demeure encore insuffisant. Il convient de lutter contre ces formes de précarité. La dégradation du taux de remplacement issu de la réforme engagée par le gouvernement Balladur entraînera, au terme de cette réforme en 2008, une perte de revenus de l'ordre de 12 % et pénalisera de surcroît les retraités les plus modestes.

- S'agissant des régimes de retraite de la fonction publique, il convient de ne pas confondre équité et égalité. En effet, prévoir une durée de cotisations identique serait une solution contraire à la justice sociale. Il faut en réalité tenir compte davantage de la pénibilité et de l'usure, notamment en ce qui concerne le travail de nuit.

M. Jean-Luc Préel a indiqué que le groupe UDF adhère pour l'essentiel tant au constat qu'à la méthode et aux grands principes contenus dans le projet de réforme. Face à l'avènement du papy-boom, il est en effet urgent de réformer le système des retraites, trop de temps ayant déjà été perdu. Toutefois il convient de ne pas se précipiter : dans une récente édition, le journal Ouest-France a en effet montré que les Français, très attachés au régime par répartition, n'ont pas encore pris toute la mesure des conséquences du maintien du système actuel de retraites.

Puis il a formulé les questions suivantes :

- Ne serait-il pas souhaitable de donner son autonomie au régime général en laissant aux partenaires sociaux le soin de discuter de son évolution ?

- Quelles sont les mesures envisagées pour aller vers une réelle équité entre le régime général et les régimes spéciaux du secteur public ? Une caisse propre à ce régime sera-t-elle créée ?

- S'agissant des mécanismes de solidarité, quelles sont les perspectives envisagées pour le Fonds de solidarité vieillesse ?

- Attaché au principe de libre choix, le groupe UDF est favorable à un système de retraite à la carte : serait-il envisageable, dans cette perspective, d'évoluer vers un mécanisme de retraite par points ?

- Quel est le dispositif prévu pour augmenter les taux des pensions de réversion et tenir compte des faibles revenus des conjoints survivants ainsi que des polypensionnés ?

M. Maxime Gremetz a fait les observations suivantes :

- Les membres du Conseil d'orientation des retraites ont fourni un travail très important pendant de nombreux mois. Il est toutefois étonnant que les informations issues de ce conseil et diffusées par le gouvernement se limitent aux aspects relatifs au diagnostic de la situation sur les retraites alors que toute une partie du travail effectué a consisté à élaborer toutes les pistes de réflexion envisageables. Si la nécessité de mettre en œuvre une réforme fait consensus, le contenu de cette réforme fait, quant à lui, l'objet de divergences importantes.

- De nombreuses voix se sont élevées en 1994 pour combattre la réforme mise en œuvre par le gouvernement Balladur, qui s'est notamment traduite par l'augmentation de la durée de cotisations pour les salariés du secteur privée de trente-sept annuités et demie à quarante et par la prise en compte pour le calcul de la pension de retraite non plus des dix meilleures années mais des vingt-cinq meilleures années en termes de rémunération. En outre, le fait d'avoir indexé les retraites sur les prix, alors que depuis quelques années le taux d'inflation est extrêmement bas, a eu un effet néfaste sur le pouvoir d'achat des retraités dont certains se trouvent dans une situation financière déplorable.

- Le discours le plus répandu consiste aujourd'hui à accréditer l'idée selon laquelle il n'y aurait désormais plus d'argent pour payer les retraites. La réalité est toute différente. Il convient de rappeler que les cotisations des employeurs représentaient en 2001 environ 125 milliards de francs. La même année, le montant des intérêts financiers s'est élevé à 189 milliards de francs. La part des salaires dans le revenu national brut qui était de 74,5 % en 1991 n'était plus que de 64,7 % en 2001, tandis que la part du capital a cru de 25,5 % en 1991 à 35,3 % dix ans plus tard. Il semble évident qu'il existe au sein des systèmes capitalistes une marge de manœuvre considérable qui devrait être actionnée afin de financer les retraites de demain. En d'autres termes, il faudrait mettre en place des mécanismes de prélèvement sur les revenus du capital et les revenus financiers de sorte que l'ensemble des richesses soit mis à contribution en matière de retraites.

- Il est absolument impératif, pour traiter de manière complète le problème des retraites, de lutter contre les phénomènes d'éviction du marché du travail des salariés âgés qui sont, à partir de cinquante ans, particulièrement touchés par les plans de licenciement et les restructurations.

- La question de la pénibilité de certains postes mérite également d'être posée. Il paraît juste de permettre aux ouvriers concernés de partir plus tôt à la retraite tant leur vie professionnelle a été difficile et physiquement éprouvante.

- L'objectif à poursuivre devrait être d'assurer à chaque retraité une pension équivalente à 75 % du revenu d'activité, alors que le taux actuel moyen de remplacement s'élève à seulement 56 % du revenu d'activité. De même, les modes de calcul des pensions devraient permettre de prendre en compte les périodes de chômage et de formation.

En réponse à ces interventions, le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité a apporté les éléments d'information suivants :

- Il est curieux que certains s'étonnent aujourd'hui de ne pas connaître le contenu du projet de loi devant être prochainement déposé au parlement. La méthode de l'actuel gouvernement, qui consiste à faire primer la concertation et le dialogue entre les différents partenaires, est si novatrice que beaucoup n'envisagent même pas que les ministres en charge de ce dossier puissent lancer en amont de larges concertations et établir les bases d'une véritable négociation avant d'élaborer un projet de loi en bonne et due forme. Aucun projet de loi déjà ficelé n'existe pour l'instant, précisément pour permettre l'élaboration du meilleur texte possible.

- La question du taux d'activité aujourd'hui très bas des salariés âgés se pose avec une acuité accrue. Cependant, ce difficile problème ne sera pas réglé grâce à des solutions législatives brutales ; il faut modifier progressivement les attitudes et les mentalités dans le monde du travail. Cette question, comme bien d'autres, ne pourra être résolue que grâce au dialogue entre les partenaires sociaux.

- Il faut avoir conscience des enjeux financiers : s'il était du jour au lendemain permis aux salariés âgés de moins de soixante ans et ayant cotisé pendant au moins quarante ans de faire valoir leur droit à la retraite, cela équivaudrait à un coût supplémentaire de 13 milliards d'euros, ce qui signifie qu'il faudrait trouver au total 63 milliards d'euros à l'horizon 2020. En revanche, il faut étudier de près la situation des salariés ayant accompli un travail particulièrement pénible au cours de nombreuses années. Ces salariés pourraient en effet légitimement bénéficier d'un traitement plus favorable en matière de durée de cotisation nécessaire pour faire valoir des droits à la retraite à taux plein.

- Les différentes règles retenues doivent être clairement connues de tous : il ne serait pas supportable que les salariés restent dans l'ignorance des principes s'appliquant à eux en matière de durée de cotisations, de taux de pension ou de dates du départ à la retraite. Des éléments de repères très clairs paraissent plus que jamais nécessaires.

- Le Fonds de réserve des retraites constitue une sorte de fonds de lissage. Il est abondé par les excédents tant qu'il y en a, comme c'est le cas cette année, et pourrait l'être par le produit des privatisations et éventuellement par une recette fiscale à déterminer.

- Il faut réfléchir aux pistes permettant le maintien et l'amélioration du minimum contributif. Aujourd'hui, ce montant minimal ne dépasse pas de beaucoup le montant du seuil de pauvreté ; il est en tout cas inférieur au minimum vieillesse, ce qui n'est pas sans poser de grandes difficultés.

- Une autre question importante et délicate à trancher est celle des conditions du cumul des rémunérations et des pensions de retraite.

- On peut se réjouir de ce que nul ne conteste aujourd'hui les chiffres établis par le Conseil d'orientation des retraites. Le fait que le travail effectué par cet organisme soit considéré comme valable par tous, même si certaines prévisions peuvent paraître trop optimistes, est de bon augure. Un consensus pourra donc être bâti à partir des mêmes constats, ce qui constitue un élément très positif dans le débat.

- Si le calendrier proposé pour mettre en œuvre la réforme des retraites est aussi serré dans le temps, c'est que le traitement de ce dossier a été trop longtemps différé.

- L'épargne individuelle, dont M. Maxime Gremetz rejette l'idée, existe déjà. Mais le système actuel est injuste puisqu'il ne profite qu'aux personnes les mieux informées et disposant de revenus élevés. L'épargne retraite ne doit donc pas être remise en cause, étant entendu qu'elle ne saurait remplacer une partie de la retraite, mais ses règles doivent être clarifiées.

- La réforme Balladur adoptée en 1993 était nécessaire. Ceux qui, aujourd'hui, la critiquent ont disposé de cinq ans pour la remettre en cause. Ils ne l'ont pas fait, ce qui prouve son bien-fondé. Les dispositions qui vont être adoptées à l'issue de la période de concertation devront également faire l'objet d'un consensus car elles engagent le pays à long terme. Il ne saurait être question de les modifier à nouveau dans quelques années au risque sinon de désorganiser totalement le système des retraites.

- Laisser les partenaires sociaux gérer de manière autonome le régime de base des retraites n'est pas souhaitable. Si la mise en place d'une organisation paritaire et autonome pourrait effectivement permettre d'enclencher, sans crispation, les nouvelles étapes de la réforme des retraites, le contrôle de l'Etat est cependant nécessaire dans la mesure où le régime de base est au centre du pacte social et de la solidarité nationale.

- Le Fonds de solidarité vieillesse doit être maintenu même s'il doit subir de nécessaires adaptations.

- La publication du décret sur les polypensionnés sera retardée afin que le cas de ces personnes soit intégré dans le débat général qui s'ouvre.

- Plus généralement, on ne peut pas fuir la réalité des faits : il n'y a pas de « trésor caché », ainsi que l'a dit un syndicaliste à la suite du discours du Premier ministre au Conseil économique et social.

Après avoir salué la qualité du travail effectué par le Conseil d'orientation des retraites et le consensus dont il fait l'objet, le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire, a fait les remarques suivantes :

- Un débat a été ouvert au sein de la fonction publique concernant le retour à l'activité des personnes âgées de plus de cinquante ans. Il a trouvé sa première traduction dans les faits avec la suppression du congé de cessation d'activité.

- En ce qui concerne l'égalité du droit à la retraite entre les hommes et les femmes, trois problème se posent : celui du conjoint survivant, celui du conjoint ayant une personne handicapée à charge, celui des personnes, hommes ou femmes, ayant des enfants à charge. Une réflexion sur ces trois points a été engagée.

- Le niveau élevé du taux d'épargne des Français témoigne de leur inquiétude pour leur retraite.

- L'analyse de M. Maxime Gremetz est contradictoire : comment sécuriser le financement des retraites en taxant plus lourdement les revenus du capital lesquels sont, par nature, extrêmement volatiles et instables ? En outre, plus on renchérit le coût du travail, plus les entreprises sont amenés à transférer leurs investissements vers le capital. Les propositions énoncées par M. Maxime Gremetz sont donc, à terme, antisociales.

- La réforme des retraites est urgente. En 2016, la moitié des fonctionnaires actuellement en activité seront à la retraite et la catégorie des plus de soixante ans aura cru de plus de dix millions. La réforme s'impose.

M. Yves Bur a jugé satisfaisante la feuille de route tracée par le Premier ministre. L'actuel gouvernement, contrairement au précédent, a saisi à bras le corps le dossier de la réforme des retraites. L'un des enjeux majeurs de cette réforme est la nécessité de permettre un meilleur taux d'emploi des plus de cinquante-cinq ans. Puis il a posé les questions suivantes :

- Des pistes de réflexion sont-elles déjà envisagées ?

- Les citoyens auront-ils la possibilité de cotiser et d'ouvrir ainsi des droits à la retraite une fois leurs quarante annuités de cotisation écoulées ?

- Pourront-ils cumuler leurs revenus du travail et leurs pensions ?

- Quels mécanismes incitatifs seront proposés aux entreprises afin de les convaincre de maintenir à leurs emplois les personnes âgées de plus de cinquante-cinq ans ?

M. Georges Colombier a déclaré qu'il était anormal que les personnes ayant commencé à travailler très jeunes continuent, leurs quarante annuités acquises, à cotiser sans que cela augmente le niveau de leur pension de retraite. D'autre part, du fait des évolutions technologiques, la notion de pénibilité du travail revêt de nouvelles formes qui doivent être mieux prises en considération.

Mme Christine Boutin a indiqué que la réforme des retraites met en cause la pérennité de l'un des piliers fondamentaux du pacte républicain, tel qu'il a été défini au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, et pose la question de savoir comment nous voulons vivre ensemble. Elle a ensuite fait les observations suivantes :

- Le système des retraites comporte plusieurs dizaines de régimes différents. Afin de l'harmoniser et de le simplifier, est-il envisageable de fondre ces régimes en un seul, tout en tenant compte de divers facteurs, comme la pénibilité de certaines activités professionnelles ? Une telle clarification apparaît en effet nécessaire pour que chaque citoyen puisse, à tout instant de sa vie professionnelle, savoir à quelle pension il aura droit une fois à la retraite.

- La dimension démographique, et notamment celle du renouvellement des générations, constitue une des données importantes du système des retraites. Quelles sont les orientations envisagées par le gouvernement en matière de politique de la famille ?

Mme Martine Billard a posé les questions suivantes :

- Le financement du système des retraites est aujourd'hui quasiment exclusivement supporté par les salariés. Le gouvernement envisage-t-il de continuer à exonérer de charges sociales le patronat et dans ce cadre prévoit-il  de distinguer les entreprises nécessitant une main-d'œuvre nombreuse et les autres ?

- La taxation de l'épargne salariale est-elle en projet ?

- Afin d'améliorer le taux d'activité des personnes de plus de cinquante ans, le gouvernement est-il prêt à adopter des mesures coercitives contre les entreprises recourrant de façon massive aux départs anticipés à la retraite ?

- Quelles sont les propositions du gouvernement en matière d'épargne retraite afin que celle-ci ne bénéficie pas uniquement aux personnes les plus aisées ?

M. Georges Tron s'est interrogé sur l'existence possible d'un lien entre la plus faible attractivité des carrières de la fonction publique et la pression moindre exercée sur son régime de retraite.

Après s'être inquiété du caractère durable ou non de l'attachement de la majorité au régime par répartition, M. Alain Néri a demandé si le débat sur les retraites donnera lieu à une véritable négociation ou à une simple concertation. Il a ensuite fait les observations suivantes :

- Il est nécessaire de prendre en compte la pluralité des régimes de retraite dans la carrière de nombreux cotisants.

- Il est légitime que les personnes qui ont cotisé durant quarante ans mais n'ont pas atteint l'âge de soixante ans puissent avancer leur départ à la retraite car elles ont commencé à travailler très jeunes et souvent dans des emplois pénibles. Le précédent gouvernement s'est efforcé de trouver une solution à ce problème en créant l'allocation équivalent retraite mais n'a pu s'engager plus avant en raison des réticences du MEDEF à financer les retraites complémentaires.

- Afin de répondre aux besoins des salariés qui ne sont pas en mesure d'atteindre le nombre d'annuités requis, il apparaît souhaitable de prendre en compte les cotisations durant les périodes de formation et de chômage.

- La garantie d'un niveau de retraite suffisant pour les personnes les plus modestes appelle la mise en place de taux différenciés.

- Il convient de se pencher sur le niveau de cotisation des employeurs.

Mme Chantal Bourragué a souhaité que soient davantage prises en compte les périodes d'arrêt liées à l'éducation des enfants car l'évolution démographique est au cœur du débat sur la réforme des retraites.

En réponse aux intervenants, le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité a apporté les éléments d'information suivants :

- Il est possible d'améliorer la place des salariés de plus de cinquante ans au sein de l'entreprise en ouvrant le champ de la négociation collective à l'aménagement de leurs conditions de travail ainsi qu'au droit à la formation en deuxième partie de carrière.

- Le gouvernement a commencé à réduire les aides aux entreprises en cas de départ anticipé à la retraite afin de ne pas inciter celles-ci à y avoir trop souvent recours. Plus généralement, il est nécessaire de changer le regard que porte la société sur les salariés âgés, ce qui est un préalable au débat qui s'ouvre sur l'allongement de la durée de cotisation.

- Il est souhaitable que la négociation porte aussi sur la question de la pénibilité du travail même si sa grande complexité la rend particulièrement délicate, au point qu'aucun de nos voisins européens n'a réussi à l'intégrer dans sa réforme des retraites.

- Il n'apparaît pas possible, compte tenu notamment de notre histoire sociale, d'aboutir à un régime unique de retraite mais il est nécessaire d'évoluer vers une harmonisation progressive à partir d'un socle de principes communs.

- Des mesures en faveur de la famille seront proposées par M. Christian Jacob, ministre délégué à la famille, dans le cadre de la conférence de la famille.

- Les allègements de cotisation décidés par l'actuel gouvernement donnent lieu à compensation en faveur des régimes sociaux, ce qui n'a pas toujours été le cas.

- Il est nécessaire de garantir les salariés contre les départs imposés.

- L'immobilisme constitue la pire solution pour les régimes de retraite car il génère une inquiétude sur l'avenir se traduisant chez les agents économiques par le recours à des solutions néfastes pour l'emploi et la consommation.

- Il est évident que les partenaires sociaux ne peuvent pas à eux seuls assumer la réforme des retraites dont l'impact s'étend à la société dans son ensemble.

- Une politique familiale dynamique est nécessaire, notamment par le biais d'avantages retraite, tant il est vrai qu'une augmentation minime de 0,3 % de la fécondité par femme permettrait de régler 10 % des difficultés en matière de retraite.

Le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire a apporté les précisions suivantes :

- Il n'est pas nécessaire de créer une caisse de retraite spécifique pour les fonctionnaires de l'Etat, comme cela existe pour les fonctionnaires territoriaux, car la nouvelle loi organique relative aux lois de finances garantit une lisibilité des flux financiers correspondants.

- Le départ massif de fonctionnaires à la retraite dans les prochaines années ( 1 million de fonctionnaires d'ici 2016 ) n'aura pas que des conséquences sur l'équilibre financier et démographique des retraites de la fonction publique. Il aura aussi des lourdes implications économiques avec la perte de compétences induite par le départ de nombreux agents expérimentés qu'il ne sera pas nécessairement possible de compenser par des recrutements sur le marché du travail.

- La réflexion doit se poursuivre quant aux conséquences à tirer de l'arrêt Griesmar relatif à la bonification du montant de la pension pour les femmes fonctionnaires ayant élevé au moins trois enfants, alors que les hommes fonctionnaires ne peuvent en bénéficier. On peut en effet se demander si, au-delà de la récompense accordée aux mères de famille par une validation de droits à pension, il ne faudrait pas accorder davantage d'aides directes au moment où les femmes élèvent leurs enfants pour leur permettre de mieux concilier vie familiale et vie professionnelle.

Le président Jean-Michel Dubernard a indiqué avoir relevé, au cours du débat, soixante points pouvant donner lieu à un débat de fond dans la perspective de la mise en œuvre d'une réforme des retraites acceptable par tous. Il est aujourd'hui de la responsabilité du Parlement et du gouvernement de définir une ligne politique stable pour les années à venir, afin que les retraites des Français soient garanties quelles que soient les majorités successives.

*

La commission a entendu M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité, et M. Jean-Paul Delevoye, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire, sur le présent projet de loi au cours de sa première séance du 3 juin 2003.

Le président Jean-Michel Dubernard a souligné que le projet aujourd'hui soumis au Parlement est l'une des réformes les plus importantes de la législature qui concerne tous les Français. Il s'agit d'une question de société et sur tous les bancs politiques, même si des divergences existent, l'objectif commun est de défendre le système par répartition. Les députés de tous bords préparent ce débat depuis longtemps qui a été ouvert par le discours cadre prononcé par le président de la République le 6 janvier dernier, suivi de la présentation par le Premier ministre des grandes orientations de la réforme devant le Conseil économique et social le 3 février et de l'audition par la commission des ministres en charge des affaires sociales et de la fonction publique le lendemain. Les syndicats ont longuement été consultés pour préparer ce texte dont l'économie générale a été présentée en Conseil des ministres le 7 mai, puis a de nouveau donné lieu à consultation des organisations professionnelles avant d'être adopté par le Conseil des ministres et présenté au Parlement, auquel reviendra la charge d'adopter un projet responsable. Préalablement, les parlementaires ont procédé à de nombreuses auditions et sont désormais prêts pour voter le meilleur texte possible - certains points méritent certainement encore d'être améliorés - c'est-à-dire celui qui arrêtera les solutions les plus justes, les plus sûres, les plus souples.

M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité, a indiqué que, après dix ans de débats, de rapports et d'hésitations, c'est avec une conscience aiguë de l'enjeu et une certaine émotion qu'il présente devant la commission la première réforme globale de notre système de retraite depuis l'après-guerre.

Le temps du débat parlementaire est enfin venu. Il va permettre aux élus d'éclairer les enjeux, de croiser les arguments et de prendre leurs responsabilités devant la nation.

La réforme des retraites a été différée, alors que la plupart de nos partenaires européens s'y sont déjà attelés : il n'est plus possible d'attendre. Le statu quo, chacun en convient, est impossible. Il menacerait gravement notre système de retraites en sanctionnant principalement les Français les plus modestes. Les premières difficultés commenceront à apparaître en 2006 avec une augmentation annuelle de 300 000 départs supplémentaires à la retraite. Ce n'est que le début d'une révolution démographique qui changera le visage de la France. Il y a aujourd'hui douze millions de retraités. En 2040, un Français sur trois aura plus de soixante ans : le nombre des retraités aura quasiment doublé.

Notre nation est-elle définitivement réfractaire à toute réforme d'envergure ? Aucun effort raisonnable pour sécuriser notre modèle social n'est-il désormais plus possible ? Tout gouvernement est-il appelé à renoncer ou à esquiver devant les difficultés de la tâche ? Certainement pas. Certes nos concitoyens éprouvent certaines appréhensions devant le changement, mais au fond d'eux-mêmes ils sentent bien qu'il faut aller de l'avant. Le 21 avril 2002 l'a démontré : ils sont plus sévères vis-à-vis de l'impuissance publique qu'à l'égard du courage politique. C'est bien pourquoi le gouvernement est déterminé. Cette détermination est d'autant plus forte que c'est le modèle social et républicain qui est défié. Or, face à ce défi, l'action est un devoir.

Les crispations et la diversité d'opinions qui s'expriment ces dernières semaines ne peuvent pas être ignorées mais cette réforme devrait nous rassembler : elle n'est pas inspirée par des considérations dogmatiques ; elle est fondée sur un constat partagé et des pistes définies par les travaux du Conseil d'orientation des retraites (COR) mais aussi explorées depuis le Livre Blanc de Michel Rocard ; elle est juste et équitable ; elle est marquée par de véritables avancées sociales ; elle est progressive, rythmée par des rendez-vous réguliers permettant un pilotage et un ajustement continus. Enfin, et surtout, elle s'inscrit dans un choix de société qui nous est commun : celui de la solidarité et de la répartition. Il n'y a pas de changement de système : il est réformé pour continuer à le faire vivre.

Cette réforme fera du système des retraites français l'un des plus généreux et des plus solidaires d'Europe. Ceux qui en doutent devraient examiner de près les options retenues par nos partenaires européens. Le Parlement sera le juge final de ce projet de loi qui est le fruit du dialogue social.

De concertations en négociations, cette phase de dialogue s'est achevée par l'accord du 15 mai 2003, entre le Gouvernement, la CFDT, la CGC et les organisations patronales. Cette phase a été longue et intense. Du début février à la mi-mai, le dialogue aura duré trois mois et demi, marqué par plus de vingt réunions au cours desquelles tous les aspects de la réforme ont été abordés. Il est un peu facile pour ceux qui ont mis le dossier des retraites au placard, faute d'avoir cru possible d'établir un compromis, de donner aujourd'hui des leçons de dialogue social. La vérité, c'est qu'au cours de ces cinq dernières années, jamais le ministère des affaires sociales et du travail n'a vu se nouer un tel dialogue.

Cette méthode du dialogue social a porté ses fruits puisqu'un compromis a été trouvé avec plusieurs organisations syndicales. Au nom de quoi ces organisations seraient stigmatisées, tandis que celles qui ont, en définitive, choisi la voie de la contestation seraient encensées ? Aucun jugement ne doit être porté ni sur les unes ni sur les autres : chacun a pris ses responsabilités.

Contrairement à certains propos désobligeants et démagogiques entendus ces temps-ci, le gouvernement ne cherche à humilier personne, pas plus qu'il ne cherche à opposer les secteurs public et privé. Il est simplement déterminé à avancer et estime être en droit de souligner et de corriger l'inéquité qui existe entre les régimes du public et du privé. Ce droit, certains le contestent au nom d'une étrange défense du service public qui verrait l'Etat et ses fonctionnaires exonérés des efforts demandés à tous les Français. Telle n'est pas la conception du gouvernement de l'égalité républicaine.

Les choix et convictions de chacun doivent être respectés. D'ailleurs, certaines organisations syndicales, aujourd'hui contestataires, ont apporté une contribution importante et utile au projet. Mais le respect n'est pas synonyme de retrait, de report ou de réécriture du projet. La CFTC ayant choisi de rester « neutre », deux des cinq confédérations syndicales ont décidé de s'opposer au projet de réforme. Etait-il possible de les convaincre de nous suivre jusqu'au bout ? Cela est douteux. Leur hostilité porte sur une réforme vieille de dix ans, celle de 1993, que la gauche au pouvoir n'a au demeurant jamais cru utile de remettre en cause. Elle porte également sur l'alignement de la durée de cotisation du public sur le privé, point sur lequel il n'est pas possible - au nom de l'équité - de transiger. D'ailleurs, dans la déclaration intersyndicale du 6 janvier, il n'était à l'époque nullement question d'un retour aux « 37,5 années et demie de cotisations pour tous ». Mais voilà qu'aujourd'hui cette revendication ressurgit. Quel crédit peut être accordé à une revendication qui instille l'idée qu'en proposant à tous les Français de travailler moins nos retraites pourraient y gagner ?

Il est important d'être attentif à ce qui se passe dans la rue et de ne pas être enfermé dans des certitudes. Mais comme l'immense majorité des Français, le gouvernement ne comprend pas que l'on puisse faire grève contre l'équité. En lisant et en entendant les mots d'ordre et les slogans, il est difficile de discerner les axes d'un projet alternatif qui ne compromettrait pas l'avenir de nos retraites ou de notre économie.

Dans toutes les contre-propositions, on voit surtout des dépenses qui conduiraient à un besoin de financement bien supérieur aux quatre points supplémentaires de PIB chiffrés pour 2040 par le Conseil d'orientation des retraites. On ne voit en fait, pour l'essentiel, que des impôts, des cotisations ou des taxes, c'est-à-dire des charges supplémentaires pour les Français d'aujourd'hui et surtout pour les Français de demain. Ces charges seraient dangereuses pour notre économie et pour nos emplois. Dans un monde ouvert et compétitif, la France n'est pas la mieux placée dans le domaine des prélèvements obligatoires. Il serait irresponsable d'alourdir la barque.

D'une certaine façon, cette quête éperdue de prélèvements supplémentaires masque un objectif inavoué : financer à tout prix le statu quo, notamment le statu quo sur la durée de cotisation, et financer en définitive l'absence même de réforme. Cette option n'est pas celle du gouvernement, qui a décidé, au nom de l'intérêt général, de réformer. Cette réforme dépasse, en effet, la question même de l'équilibre comptable des retraites. Ce qui est aujourd'hui en cause c'est notre capacité à consentir sur nous-mêmes l'effort partagé pour garantir et enrichir notre modèle social.

Le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité a ensuite présenté le projet de loi, construit autour de quatre orientations principales.

- La première orientation est le choix majeur de maintenir le niveau des pensions aussi haut que possible par l'allongement de la durée d'activité et de la durée d'assurance.

De plus en plus nombreux à la retraite, les Français aspirent à la sérénité de ce temps de la vie. Ils veulent à juste titre un haut niveau de retraite. Personne ne peut croire sérieusement que cet objectif passe par une forte augmentation des cotisations ou un nouveau mode de financement qui viendrait miraculeusement changer la donne. C'est pourquoi la meilleure garantie, la plus juste et la plus sûre, pour assurer un haut niveau de retraite, sans reporter sur les actifs de demain une charge excessive, est bien d'allonger la durée d'activité et la durée de cotisation. Il n'y a pas d'autre choix si l'on ne veut pas handicaper la croissance et l'emploi.

C'est une nécessité pour l'équilibre et la sécurité de nos retraites par répartition. On ne soulignera jamais assez combien ceux qui suggèrent d'asseoir le financement des retraites sur les flux financiers ou les bénéfices des entreprises - ressources par nature incertaines et volatiles et de surcroît insuffisantes - en lieu et place des revenus stables du travail, font le lit de la capitalisation qu'ils exècrent par ailleurs.

C'est enfin une nécessité au regard de l'équité : la durée d'assurance doit être égale pour tous. Une fois l'étape des quarante ans atteinte dans les régimes de la fonction publique, en 2008, le gouvernement propose que la durée de cotisation augmente de manière très progressive, afin de stabiliser le rapport entre le temps de travail et le temps de retraite. Aujourd'hui, toute l'augmentation de l'espérance de vie après 60 ans bénéficie à la retraite. Le temps de retraite des Français continuera à augmenter et à bénéficier des gains d'espérance de vie. C'est une bonne chose, mais le partage et le gain entre le temps de travail et le temps de retraite est devenu nécessaire pour garantir l'avenir de la répartition.

La stabilisation de ce partage conduit à une durée de cotisation de 41 ans en 2012. Mais cette évolution ne sera pas automatique. Une commission spécialement constituée à cet effet se réunira à échéances régulières pour examiner les données démographiques, économiques et sociales, et tout particulièrement les caractéristiques du marché du travail, et ce sera ensuite au gouvernement de prendre les décisions d'adaptation nécessaires.

L'augmentation de la durée d'assurance serait en effet difficile si aucun progrès n'était constaté quant à l'âge réel de cessation d'activité. C'est pourquoi le gouvernement n'a pas souhaité augmenter, dès 2004, la durée d'assurance du secteur privé. La France a cinq ans pour réussir le premier rendez-vous en 2008. Nous ne pouvons plus nous contenter d'assister à l'exclusion du marché du travail des salariés de plus de 55 ans. Dans le même temps, tout le monde est conscient de l'impossibilité de supprimer, du jour au lendemain, tous les dispositifs de préretraites.

C'est pour cette raison qu'un objectif réaliste a été défini, tendant à faire passer l'âge moyen de cessation d'activité de 57,5 à 59 ans en 2008. C'est pour cette raison qu'il faut recentrer les dispositifs de préretraite sur deux outils :

- les préretraites « pénibilité », les partenaires sociaux étant les mieux à même, au niveau interprofessionnel puis au niveau des branches, de définir les métiers et les secteurs justifiant un départ anticipé ;

- les préretraites « restructuration », qui s'avèrent nécessaires dans le cadre de plans sociaux pour assurer la survie de l'entreprise.

Dans le cadre d'un élargissement du taux d'activité, le travail au-delà de 60 ans, pour ceux qui le souhaitent, doit être favorisé. Plusieurs mesures sont proposées, comme l'assouplissement des règles sur le cumul emploi-retraite ou le report à 65 ans de la possibilité de mise à la retraite d'office à l'initiative de l'employeur.

Mais l'essentiel est dans la formation continue qui doit permettre aux salariés de plus de cinquante ans de valoriser leur expérience, une expérience qui va devenir d'autant plus précieuse que la démographie va peser fortement sur le marché du travail. Les partenaires sociaux ont engagé une négociation sur le sujet et le gouvernement présentera un projet de loi à l'automne.

Au-delà de ces mesures et de ce projet de loi, il faut prendre la mesure du défi : le vieillissement de la France va nous obliger à un changement culturel majeur sur le rôle des seniors dans la société et sur le marché du travail. Il faut ouvrir aux salariés les possibilités d'une seconde carrière, miser sur la transmission des savoirs et des métiers et permettre aux retraités qui ont quelque chose à apporter de le faire en retrouvant un emploi, ne serait-ce qu'à temps partiel. A tout cela la réforme ouvre la porte. Les entreprises doivent comprendre que si elles ne favorisent pas cette mutation des esprits et des pratiques, alors il n'y aura pas d'autre choix que d'augmenter de façon drastique leurs charges pour financer les retraites.

Pour réussir ce changement culturel, chacun devra assumer sa part de responsabilité : l'Etat avec ses agents, les entreprises avec leurs salariés et le législateur en utilisant les leviers et les rendez-vous que cette loi lui offre.

- La deuxième orientation de cette réforme est celle de l'équité et de la justice sociale.

Le projet de loi définit tout d'abord un objectif, associant le régime de base et les régimes complémentaires, en faveur des salariés ayant toujours travaillé au SMIC : leur retraite s'élèverait, pour une carrière complète, à un minimum de 85 % du SMIC net en 2008, contre 81 % aujourd'hui. Cette avancée sociale en faveur des salariés les plus modestes a été définie conjointement avec les organisations syndicales qui ont choisi de soutenir le processus de réforme. C'est une réelle amélioration de la retraite des salariés modestes rendue possible par la revalorisation du minimum contributif, que le gouvernement s'engage à revaloriser de 9 % d'ici 2008 avec une augmentation de 3 % d'ici 2004.

La réforme met également fin aux inégalités de traitement entre monopensionnés et pluripensionnés - ces derniers représentant 40 % de ceux qui prennent leur retraite chaque année - et entre salariés et non-salariés. Les commerçants bénéficieront de la mise en place d'un régime de retraite complémentaire obligatoire, qui permettra à terme d'améliorer leurs pensions, tandis que les professions libérales, à leur demande, connaîtront une réforme profonde de leur régime de base, dans le sens d'une plus grande équité. La mensualisation des retraites des exploitants agricoles ne sera plus quant à elle une éternelle promesse, mais une réalité.

La demande de ceux qui ont travaillé très tôt, et qui doivent attendre l'âge de soixante ans pour partir à la retraite, malgré une très longue durée d'assurance, est inlassablement relayée depuis deux ans par des parlementaires de tous horizons politiques. Au nom de la justice sociale, le gouvernement a décidé de proposer cette disposition.

Dans le cadre de la négociation, ce droit a été ouvert à ceux travaillant depuis l'âge de 14, 15 et 16 ans : ils pourront partir en retraite à taux plein, entre 56 et 59 ans. C'est une avancée considérable et unique en Europe.

La garantie du pouvoir d'achat de tous les retraités, à travers l'indexation sur les prix, est également une importante mesure d'équité. Le projet de loi propose - au-delà de cette garantie - que, tous les trois ans, une conférence réunisse le Gouvernement et les partenaires sociaux, afin qu'ils définissent ensemble, par la négociation, si un « coup de pouce » peut être effectué en fonction de la croissance et de la situation financière des régimes d'assurance vieillesse.

Le projet de loi comprend également une importante réforme de la réversion dans le régime général et les régimes alignés : la pension de réversion sera attribuée désormais sans condition d'âge. Le système sera rendu davantage lisible et équitable, en remplaçant la double condition de ressources et de cumul par un plafond de ressources. Il s'agit d'une très importante simplification au bénéfice des veuves.

Les avantages familiaux seront maintenus, et notamment la majoration de pension pour trois enfants élevés. Dans les régimes de la fonction publique, la prise en compte de la jurisprudence européenne s'avère nécessaire, pour les enfants nés après le 1er janvier 2004. Les bonifications de durée d'assurance seront ainsi ouvertes aux hommes et aux femmes sous condition d'une cessation effective, totale ou partielle, d'activité. Mais elles ne seront plus limitées à un an : elles pourront prendre en compte jusqu'à trois ans par enfant.

Une autre avancée pour les fonctionnaires est l'intégration d'une partie des primes des fonctionnaires dans le calcul de leur retraite par la création d'un régime additionnel obligatoire.

Enfin, la réforme engage les partenaires sociaux à négocier sous trois ans, dans les branches, la définition des métiers relevant de la pénibilité et donnant droit à des départs anticipés.

Toutes ces avancées démontrent que réforme ne signifie pas régression sociale, bien au contraire. C'est l'effort partagé demandé à tous qui permet de dégager des marges de manœuvres pour ceux qui en ont le plus besoin. Il est temps de dire que l'immobilisme creuse l'inégalité sociale et que la réforme la fait reculer.

- La troisième orientation fondamentale de cette réforme est de permettre à chacun de mieux construire sa retraite en donnant davantage de souplesse et de liberté de choix.

Le droit de liquider sa retraite à 60 ans est confirmé. Ceux qui accusent le gouvernement de vouloir remettre en cause ce droit font mine d'oublier que le système de retraite, dans le régime général et les régimes alignés, repose aujourd'hui et depuis très longtemps - à la fois sur l'âge et sur la durée d'assurance nécessaire pour bénéficier du taux plein. Il n'y a jamais eu un droit de liquider sa retraite à 60 ans à taux plein, quelle que soit la durée d'assurance. Ce droit est aujourd'hui donné à 65 ans. Ce sera toujours le cas demain : rien ne change donc sur ce point.

Aujourd'hui, si un salarié souhaite partir à 60 ans alors qu'il ne dispose pas de la durée d'assurance nécessaire, il est soumis à une décote d'un taux de 10 % par année manquante. Pour donner davantage de choix, il est proposé d'alléger considérablement ce taux, pour atteindre progressivement 5 % par année manquante. Cette mesure sera prise par voie réglementaire.

Parallèlement, afin d'instaurer une véritable égalité entre cotisants, le projet de loi crée dans la fonction publique une condition de durée d'assurance tous régimes, ce qui signifie l'introduction à partir de 2006 d'une décote. Elle montera progressivement en charge et respectera les spécificités de la fonction publique, qui comprend des limites d'âge différenciées. En 2015, la décote sera donc la même pour tous, que l'on soit salarié du privé ou fonctionnaire, comme l'exige l'équité.

En ouvrant la possibilité de la retraite progressive aux personnes n'ayant pas à 60 ans la durée d'assurance nécessaire, en ouvrant dans la fonction publique la cessation progressive d'activité, le projet donne une marge supplémentaire de souplesse pour tous ceux qui souhaitent passer de manière moins brutale du « tout travail » au « tout retraite ».

Pour donner du sens à l'idée de la retraite « à la carte », la décote est complétée par un mécanisme de surcote, dont le taux sera de 3 % par an. Ceux qui souhaitent continuer à travailler au-delà de 60 ans et au-delà de la durée d'assurance requise, seront ainsi incités à le faire. La souplesse consiste également à ouvrir le droit au rachat de trimestres, dans des conditions financièrement neutres pour les régimes.

Ces éléments de liberté et de souplesse rendent nécessaire une meilleure information des cotisants. Ce droit à l'information est double. Premièrement, une information collective sur la situation financière des régimes de retraite et sur l'évolution des niveaux de vie entre actifs et retraités : cette mission sera confiée au Conseil d'orientation des retraites. C'est la meilleure réponse à tous ceux qui agitent le spectre d'une « paupérisation » des retraités. Deuxièmement, une information individuelle sur le calcul des droits, complexe aujourd'hui à mettre en œuvre compte tenu de la multiplicité des régimes et des parcours professionnels. A cette fin, le projet de loi crée un groupement d'intérêt public, qui permettra d'assurer la bonne coordination des traitements informatiques nécessaires. L'objectif est de permettre à chaque Français d'avoir accès très tôt à un décompte de ses droits à la retraite et d'avoir une estimation du montant de sa pension.

Enfin, la liberté et la souplesse signifient l'élargissement de l'accès à des outils d'épargne retraite. Le projet de loi crée une garantie forte : quelle que soit la politique sociale menée par son employeur, un salarié du secteur privé bénéficiera d'une incitation fiscale lui permettant de disposer d'une rente à l'âge de la retraite. Par ailleurs, le projet de loi simplifie considérablement la galaxie des différents dispositifs existants et il les sécurise. Il allonge la durée du « plan partenarial d'épargne salariale volontaire », créé par la loi Fabius de 2001, afin de permettre aux salariés de disposer d'une véritable épargne en vue de la retraite, en rente ou en capital.

- La quatrième et dernière orientation de la réforme est de garantir le financement des retraites d'ici 2020.

Les Français sont légitimement attachés à la répartition. Ils souhaitaient conserver un haut niveau de retraite. Mais ils aspirent surtout à la sécurité.

Les mesures d'allongement, pour le régime général, représentent un peu plus du tiers du besoin de financement en 2020, chiffré à 15 milliards d'euros par le COR. Les mesures de justice sociale décidées dans le cadre de la réforme devraient être financées par la hausse de 0,2 point des cotisations vieillesse, prévue en 2006. Ces mesures s'appliqueront par définition au seul flux des retraités, à partir de 2004. Elles n'auront pas fini de monter en charge d'ici 2020.

Le choix étant fait de ne pas baisser le montant des pensions, deux tiers du besoin de financement du régime général seront ainsi financés par une augmentation de la richesse nationale dévolue au paiement des retraites et donc par une augmentation des cotisations vieillesse. C'est un effort partagé. Dire que le gouvernement fait de la durée d'assurance le seul paramètre d'équilibre est un contresens.

En cohérence avec sa volonté de réduire, ou tout au moins de stabiliser, le niveau des prélèvements obligatoires, le gouvernement estime que l'augmentation des cotisations vieillesse pourra, en quelque sorte, être gagée par la diminution des cotisations chômage. Aujourd'hui cette perspective apparaît à certains comme inatteignable, mais notre objectif est 2020. Et dans cet esprit nul ne peut accepter l'idée que le taux de chômage reste identique à celui d'aujourd'hui.

Cette perspective est en partie liée à la croissance, mais elle découle aussi - et en grande partie - des évolutions démographiques. Pour la première fois dans notre histoire, le nombre de ceux qui entrent chaque année sur le marché du travail va, à partir de 2002, diminuer. Si nous améliorons parallèlement notre système de formation, initiale et continue, si nous optimisons nos dépenses publiques, si nous résistons à notre tendance à toujours accroître nos prélèvements, nous devrions raisonnablement atteindre un niveau de chômage en 2020 de 5 à 6 %, chiffre supérieur à celui retenu dans la projection du COR qui est de 4 %. Il sera alors possible de réduire les cotisations chômage et d'augmenter les cotisations vieillesse. Au regard de ces conditions, la réforme est donc financée.

Elle permet enfin de lever les inquiétudes de ceux qui sont déjà à la retraite ou le seront d'ici 2020 et d'écarter les doutes des plus jeunes sur notre système de retraite par répartition. Nous leur montrons que ce système est capable d'évoluer : il suffit d'anticiper, de proposer et de décider.

D'aucuns disent qu'ils remettraient en cause cette réforme en cas d'alternance. En fait, quelle que soit la prochaine majorité - et singulièrement si elle est de gauche - nul ne reviendra sur l'esprit et l'architecture de cette réforme et cela d'autant plus qu'elle instaure des mécanismes de pilotage en continu. Si le Parlement accepte ce principe d'adaptation qui est au cœur de la réforme, le mérite du gouvernement aura été de dissiper enfin la crispation de notre pays autour du problème de l'avenir des retraites.

En conclusion, le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité a estimé que la France n'est pas réfractaire à la réforme, qu'elle est capable de se projeter vers l'avenir en transcendant ses particularismes au nom de l'intérêt général et qu'elle est prête à un effort raisonnable pour sauver son modèle social. Le projet de loi est porté par la détermination qui inspire notre idée de la responsabilité en politique. Cette détermination puise sa source dans le choc du 21 avril 2002. Nos concitoyens souhaitent que ceux qui sont en charge de tracer l'avenir prennent leurs responsabilités et respectent leurs engagements. C'est ce que le gouvernement fait. Il appartient désormais au Parlement de se saisir et de débattre de cette réforme.

M. Jean-Paul Delevoye, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire, a salué le chemin parcouru dans le domaine de la réforme des retraites. Les ministres concernés n'ont eu de cesse de rencontrer les partenaires sociaux sur le terrain comme dans les ministères. Les nombreuses améliorations apportées au texte présenté aujourd'hui témoignent de cet état d'esprit.

Le programme présenté par M. Lionel Jospin le 20 mars 2000 comportait, concernant la fonction publique, quatre axes : ce sont les mêmes axes qui figurent dans le texte présenté aujourd'hui.

On observe, sur le sujet de la retraite, une angoisse chez les Français. La question se pose de savoir si la France est capable de se réformer.

Force est de constater que les Français manquent d'information sur les retraites et des arguments non fondés ont fini de jeter la confusion dans les esprits. Ainsi, les Français imaginent souvent que, pour avoir travaillé une certaine durée, ils ont droit à une retraite équivalente. Là ne réside précisément pas le principe de la répartition.

L'opinion publique ne comprendrait pas que certaines catégories sociales accomplissent un effort tandis que d'autres en seraient exemptées. Le sauvetage de la retraite par répartition exige des efforts partagés et justement répartis. C'est pourquoi il n'était plus possible de laisser de côté le régime de la fonction publique. La réforme que propose le Gouvernement est juste et équitable. Il ne s'agit pas de s'en prendre à la fonction publique ou à toute autre catégorie, mais de faire contribuer les différents milieux professionnels à un sauvetage qui ne peut plus être différé.

Même si le régime des fonctionnaires de l'Etat n'est pas au sens strict un régime par répartition, puisque ses charges sont en grande partie budgétisées, il est évident que l'inaction conduirait rapidement à une rupture de l'équilibre économique sur lequel repose ce système. L'Etat verse aujourd'hui 60 milliards d'euros de traitements et 30 milliards de pensions. En 2020, il versera 60 milliards de traitements et 60 milliards de pensions, en euros valeur 2003. En 2040, les règles actuelles conduiraient à débourser 60 milliards de traitements et 90 milliards de pensions.

Pour l'avenir, le statut des fonctionnaires n'est pas modifié, il demeure fondé sur la carrière. Le besoin de financement de 14 milliards d'euros pour 2020 est assuré. Ainsi, les fonctionnaires conservent les mêmes droits à la condition de travailler plus longtemps qu'aujourd'hui. Le principe retenu consiste à allonger la durée de cotisation pour parvenir au taux plein, le nombre d'annuités correspondant à une carrière complète étant porté de 37,5 à 40 d'ici à 2008.

Des dispositions sont prévues pour inciter les agents à adapter leurs choix de départ à cette nouvelle situation. Tout d'abord, des mesures visent à rendre plus attractives les fins de carrière : il s'agit d'ouvrir pour les enseignants un droit à une deuxième carrière et d'élargir pour tous les fonctionnaires civils les possibilités de bénéficier d'une cessation progressive d'activité à temps partiel.

Pour ne pas pénaliser les fonctionnaires par rapport aux salariés, les règles de validation et d'acquisition des périodes comptant pour la retraite ont été revues :

- Une durée d'assurances « tous régimes » est instituée. Elle permettra à ceux qui ont eu des carrières successives dans la fonction publique et dans d'autres régimes de ne pas être pénalisés pour l'application des règles de décote et de surcote : toutes les années compteront.

- Le temps partiel n'est pas pénalisé pour le calcul de la durée d'assurance : il comptera comme un temps plein, ce qui est particulièrement important pour les femmes mères de famille. Il sera aussi possible de surcotiser sur la base d'un temps plein pour améliorer le niveau de sa pension.

- Une mesure particulière vise les personnels dans les services actifs de la fonction publique hospitalière, qui recevront une année d'assurance supplémentaire tous les 10 ans de carrière.

- Comme dans les autres régimes, il sera possible de racheter jusqu'à trois années d'études, comptant soit pour la durée d'assurance, soit pour la liquidation.

Les avantages familiaux sont maintenus :

- La majoration de 10 % pour les parents d'au moins 3 enfants demeure inchangée, comme dans le régime général.

- La pension de réversion des hommes est alignée à la hausse sur celle des femmes.

- Le droit au départ avec disposition immédiate de la pension après 15 ans de service des femmes ayant élevé trois enfants est conservé. Ce point est particulièrement sensible dans les métiers de la santé et de l'éducation.

- Quant à la bonification pour enfants, la jurisprudence européenne a rendu nécessaire l'adaptation du dispositif antérieur pour pouvoir le conserver : pour le passé, il a été décidé de ne pas diminuer les droits des femmes dont les enfants étaient déjà nés. Certains recommandaient de diviser l'avantage par deux, pour le baisser à 6 mois, et de l'étendre ainsi plus facilement aux hommes. Cette solution, qui ignorait la réalité sociologique, a été écartée : les femmes ont des carrières moins favorables que celles des hommes car elles s'arrêtent souvent pour élever les enfants. Le choix a été fait de traduire la jurisprudence en conservant pour le passé la bonification d'un an par enfant, qui est étendue aux hommes mais est conditionnée par le fait de s'être arrêté de travailler pour la naissance ou l'éducation de l'enfant. Pour le futur, la bonification est remplacée par une validation comme période de service des périodes d'arrêt en relation avec la naissance, l'adoption ou l'éducation de l'enfant, cette validation pouvant atteindre trois ans par enfant. La mesure bénéficiera aux femmes et aux hommes.

Un coefficient de majoration, ou surcote, permettra d'augmenter la pension de ceux qui compteraient 40 annuités après l'âge de 60 ans. Symétriquement, un coefficient de minoration, ou décote, sera appliqué aux années manquantes, dans la limite de 5, pour ceux qui choisiraient de partir à compter de l'ouverture des droits avec une carrière incomplète. Cette décote atteindra 3 % par année en 2011 et sera portée à 5 % en 2015, la décote du régime général étant parallèlement abaissée à ce niveau. Ce mécanisme ne vise pas à baisser le montant de la pension comme l'affirment les adversaires de la réforme, mais incite les agents à différer leur départ pour se rapprocher de la limite d'âge de leur corps, limite à laquelle s'annule la décote.

Ainsi, un agent qui partira avec le nombre d'annuités requis pour le taux plein, soit 40 à compter de 2008, sera garanti de percevoir comme aujourd'hui avec 37,5 annuités une pension égale à 75 % de son dernier traitement, lequel continuera d'être calculé sur les six derniers mois de la carrière. En cas de carrière incomplète, la décote s'annulera à la limite d'âge : 65 ans dans le cas général, 55 ou 60 ans pour les fonctionnaires classés dans ce que l'on appelle les « services actifs » correspondant à des métiers dangereux ou pénibles.

Le projet de loi a prévu des dispositions transitoires très longues, la décote ne commençant à s'appliquer qu'à partir de 2006 et atteignant son intensité maximale en 2020 seulement. Les fonctionnaires proches de la retraite auront ainsi le temps de se préparer et pourront faire évoluer leurs choix de départ sur une longue période.

L'indexation de la revalorisation des pensions sur les prix apporte la garantie du maintien du pouvoir d'achat ; il s'agit là d'un rapprochement du régime général. Par ailleurs, la réforme aborde la délicate question des primes. L'intégration des primes dans la pension proprement dite n'était pas envisageable en raison notamment de son coût très élevé : 5 à 6 milliards d'euros par an en 2020. Cependant, le gouvernement est soucieux d'avancer sur ce point très attendu par les fonctionnaires.

Le projet de loi institue pour tous les fonctionnaires civils et les militaires un nouveau régime, distinct du régime des pensions. Un régime par répartition et par points sera garanti par un mécanisme de provisionnement selon des modalités qui doivent être précisées d'ici à sa création. Il sera obligatoire. Ce point est central pour la répartition et a été affirmé à l'issue des rencontres avec les partenaires sociaux.

Après les exposés des ministres, un débat s'est engagé.

M. Bernard Accoyer, rapporteur, a estimé que la discussion de ce texte est essentielle à la sauvegarde du pacte entre les générations. Des travaux importants ont été menés depuis plusieurs mois ayant permis d'aboutir à un texte contenant des avancées considérables qui honorent les membres du gouvernement comme les partenaires sociaux. Le courage de certains hommes politiques de l'opposition, dont les interventions rappellent chaque jour qu'un large consensus existe, doit être salué.

Le texte présenté comporte de nombreuses mesures de justice relatives aux petites pensions et aux carrières longues. Des négociations relatives à la pénibilité seront engagées. La réforme, en s'appuyant sur les partenaires sociaux, garantit les valeurs de l'échange, de la richesse partagée et de la retraite assise sur la contributivité des actifs. Par ailleurs, le plan famille, développé en parallèle à la réforme des retraites, permettra d'assurer le sauvetage de la sécurité sociale.

Malgré le nombre des amendements, malgré les critiques proférées par ceux qui hier préconisaient ces mêmes réformes, des progrès sont acquis qui concernent la réversion, la famille, les parents d'enfants handicapés ainsi que les handicapés eux-mêmes. Il est donc temps d'ouvrir un vrai dialogue avec l'opposition, cela sans polémique, dans le but commun de sauver le pacte républicain.

Mme Claude Greff, rapporteure au nom de la délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes, a salué la pérennisation du système de retraite par répartition pour les hommes et les femmes. Un effort collectif est demandé à tous, au secteur privé comme au secteur public. La délégation, qui estime positive la place reconnue aux femmes dans cette réforme, tient néanmoins à formuler quelques propositions d'amélioration.

Dans le régime général, pour l'attribution de la pension de réversion, le nouveau plafond des ressources personnelles du conjoint survivant, les siennes propres ou celles du ménage, devra être fixé à un niveau suffisant pour répondre à un double souci : ne pas léser les veufs(ves) ayant encore une activité professionnelle ou bénéficiant d'un avantage personnel vieillesse ; aller dans le sens de l'équité et d'un rapprochement avec le régime de la pension de réversion dans la fonction publique, même si la comparaison est difficile à faire, compte tenu des régimes complémentaires.

Ce plafond devra en outre être modulé pour tenir compte du nombre des enfants encore à la charge du conjoint survivant.

Le gouvernement et les partenaires sociaux devront étudier, à l'occasion des rendez-vous prévus par le projet de loi, les conditions dans lesquelles le taux de la pension de réversion du conjoint survivant, fixé aujourd'hui à 54 %, pourrait être augmenté. L'objectif est d'atteindre, à terme, un niveau de 60 %.

La suppression de la condition d'âge par le projet de loi pour accéder à la pension de réversion dans le régime général devrait être adoptée par les régimes complémentaires (ARRCO et AGIRC), de façon à donner à cette mesure toute sa portée.

Dans le régime de retraite complémentaire obligatoire des non-salariés agricoles, la pension de réversion n'est accessible au conjoint survivant que si le conjoint décédé a déjà liquidé sa retraite. Cette condition très restrictive devrait être supprimée, la pension de réversion étant fixée, dans les autres régimes, en référence à la retraite dont bénéficiait ou aurait bénéficié l'assuré.

En matière de compensations familiales, terme préféré à celui d'avantages familiaux, la délégation a souhaité que, dans le régime de la fonction publique, la bonification d'une année d'assurance attribuée aux femmes et aux hommes pour les enfants nés avant 2004 sous réserve d'une interruption d'activité soit maintenue pour les enfants nés après 2004. Cela permettrait à toutes les femmes fonctionnaires de continuer à en bénéficier, en particulier celles qui assument à la fois les charges des enfants et celles de la vie professionnelle. La mise en œuvre du droit communautaire confère les mêmes droits aux hommes et aux femmes. Après 2004, la bonification pourra aller jusqu'à trois ans par enfant mais pénalisera les femmes qui continuent à travailler.

Outre les périodes de congés liées à l'éducation des enfants ouvrant droit à validation dans le régime de la fonction publique, devraient être également prises en compte des périodes liées à des obligations conjugales ou familiales : congé pour suivre un conjoint, ou congé d'accompagnement d'une personne en fin de vie. Ce sont souvent les femmes qui assurent les soins aux personnes âgées.

Il conviendrait de reporter du 1er janvier 2004 au 1er juillet 2004 la date de prise en compte pour la mise en application du nouveau système de validation des périodes d'interruption de carrière, afin que les mères aient eu connaissance, au préalable, des conditions de leur retraite et en particulier de l'accès à la majoration d'assurance.

Dans le régime général, les conditions d'attribution de la majoration d'assurance de deux années par enfant élevé pendant neuf ans avant son seizième anniversaire devraient être assouplies. La majoration devrait être calculée en fonction de la durée effective de prise en charge de l'enfant, à raison d'un trimestre par année de prise en charge jusqu'à un maximum de huit trimestres. Il conviendrait de reprendre les dispositions envisagées lors de la discussion du PLFSS pour 2002 au bénéfice de toutes les femmes ayant eu des enfants.

En ce qui concerne les artisans et agriculteurs, pour améliorer la situation des femmes d'artisans à la retraite et leur permettre d'acquérir des droits propres, devrait être instituée l'obligation d'adhérer à l'un des trois statuts proposés par la loi du 10 juillet 1982. Pour les agricultrices qui optent pour le statut de conjoint-collaborateur, la possibilité de souscrire à la retraite complémentaire obligatoire des non-salariés agricoles instituée par la loi du 4 mars 2002 devrait leur être ouverte.

Lors des négociations entre les partenaires sociaux au niveau interprofessionnel et au niveau des branches sur les critères de pénibilité permettant un départ anticipé à la retraite, la pénibilité spécifique à certains emplois féminins devra être prise en compte.

En conclusion, cette réforme est positive par ses apports en termes de simplification et s'agissant des divers avantages familiaux.

Avant d'analyser le fond du projet de loi, M. Pascal Terrasse a tout d'abord formulé quelques remarques sur la forme du débat.

Le mardi 4 février 2003, le ministre s'est exprimé devant les membres de la commission pour expliquer les contours de la réforme que le gouvernement souhaitait engager. Il en ressortait qu'il souhaitait sortir de cet exercice par un dialogue social renforcé et que la négociation avec les partenaires sociaux lui donnerait raison. Trois mois après qu'en est-il réellement ?

Premier point, le président de la commission avait proposé que les élus de la majorité comme ceux de l'opposition soient rapidement associés au débat de cette réforme, par deux mesures très concrètes : l'audition de ministres des pays européens concernés par les réformes des retraites et celle de parlementaires d'autres Etats de l'Union européenne (suédois et espagnols), en collaboration avec le Sénat. Ces propositions sont restées lettre morte.

Le président Jean-Michel Dubernard est intervenu pour rappeler que la commission a reçu la commission du travail et de l'égalité professionnelle du Parlement finlandais, réunion qui a donné lieu à un échange de vues très intéressant sur les retraites.

M. Pascal Terrasse a poursuivi en regrettant, dans un deuxième point, que le gouvernement ait décidé de mener cette réforme au pas de charge, sans laisser le temps aux organisations syndicales de négocier, préférant le passage en force. Le résultat est que seules deux organisations de salariés sur huit ont approuvé, partiellement, les propositions du gouvernement.

Selon l'expression du ministre, le temps social est derrière nous, le temps politique s'ouvre à présent. Or, il est à craindre que la manière dont ont été traitées les organisations syndicales ne préfigure le traitement de l'opposition : le projet de loi a été distribué dans la journée d'hier à l'Assemblée nationale, les amendements devant être déposés ce même jour avant 17 heures. L'examen du texte a lieu cette semaine en commission et la semaine prochaine en séance. Il s'agit là aussi d'une véritable course de vitesse sans qu'il soit réellement permis à l'opposition d'engager un débat de fond sur le sujet, comme cela l'a été dans de nombreux pays étrangers. Une réforme est à l'évidence nécessaire mais l'absence de débat et d'un minimum de consensus sur la réforme risque d'obérer l'avenir de ce dossier.

Quelles premières analyses peut-on tirer du projet de loi : premièrement, qu'il s'agit d'un projet qui n'est pas financé ; deuxièmement, qu'il ne garantit en rien la pérennité du régime par répartition ; troisièmement, qu'il met un terme à une avancée sociale majeure, la retraite à 60 ans ; quatrièmement, qu'il va à très court terme appauvrir les retraités et tout particulièrement les femmes.

Sur le financement, le gouvernement a fait le choix d'allonger la durée de cotisation et de baisser les pensions plutôt que d'ouvrir un débat sur les paramètres financiers et la diversification des financements. Il s'agit d'une logique dogmatique et très libérale, encore faut-il l'assumer.

Les travaux du COR ont démontré que l'on peut garantir un très haut niveau de retraite, avec l'assurance d'un départ à 60 ans à taux plein, en s'appuyant sur des nouveaux financements tels que : le redéploiement des marges de manœuvre dégagées, notamment dans le champ des comptes sociaux, la CRDS, l'élargissement de l'assiette des prélèvements par la création d'une contribution assise sur la valeur du patrimoine et des produits financiers, l'augmentation des cotisations sociales, l'abondement non contributif du Fonds de réserve des retraites ou encore la création d'une contribution d'équilibre de 1'Etat assise sur l'impôt sur le revenu. Ce n'est pas le choix opéré par le gouvernement.

La croissance et la productivité devraient doubler ces vingt prochaines années : malgré cela, on choisit de se réfugier dans l'appauvrissement des retraites et, par conséquent, on contribue, encore un peu plus, à casser la croissance et l'emploi. Les retraités sont en effet des acteurs économiques qui contribuent pour une part importante à la croissance économique.

Il est en conséquence difficile de faire confiance au gouvernement sur ce dossier lorsque la seule hypothèse financière crédible du projet repose sur les excédents de l'assurance chômage, alors que la France a perdu 100 000 emplois en un an et que les comptes de l'UNEDIC sont déficitaires. Dans un système par répartition, il est nécessaire de pratiquer une politique tournée vers le plein emploi, ce qui était le cas du précédent gouvernement. Mais on ne peut pas en la matière, faire confiance aux entreprises privées non plus qu'à l'Etat puisque aussi bien une entreprise comme Metaleurop que la Banque de France licencient leurs salariés dès l'âge de cinquante ans.

Le projet n'est absolument pas financé. La seule source de financement consiste en l'affaiblissement des pensions de retraites. L'allongement de la durée de cotisation sera supporté à 90 % par les seuls salariés : où sont les efforts partagés ? Les mesures proposées ne garantissent même pas l'équilibre de la branche vieillesse à l'horizon 2010. Allonger la durée de cotisation des fonctionnaires n'équilibrera pas le régime général puisque la fongibilité n'existe pas. Comment les cotisations patronales de la caisse de retraite complémentaire des fonctions publiques seront-elles financées ? Sur quelles bases financières les exonérations et cadeaux fiscaux accolés aux nouveaux fonds de pension masqués sous le volet « épargne retraite » vont-elles reposer ? Sur quelles ressources le financement des carrières longues s'appuiera-t-il, alors que les négociations avec les caisses complémentaires et l'AGFF ne sont toujours pas ouvertes et relèvent des seuls partenaires sociaux ? Rien ne garantit l'évolution du minimum contributif au-delà de 2008, sauf à accepter de remettre en cause l'indexation sur le SMIC. En vérité, rien ne garantit la pérennité financière des régimes de retraite, dès lors que le gouvernement n'a pas le courage d'ouvrir un débat de fond sur les recettes. Tous les pays s'y sont employés sauf la France.

Le gouvernement fait croire aux Français qu'il n'y a pas d'autres choix. Or, à partir d'une meilleure distribution des richesses produites, de la prise en compte des diversités des emplois, des inégalités de durée de vie, de la pénibilité et des parcours professionnels, un débat volontaire aurait pu s'ouvrir, auquel auraient pris part l'opposition et les organisations syndicales. La Suède y a réussi, pourquoi pas la France ?

Les Français ne sont pas dupes, ils posent des questions simples. Quel sera le montant de la retraite ? A quel âge ? Après combien d'années de cotisation ? Le gouvernement doit avoir le courage de leur envoyer la formule qui leur permettrait de réellement calculer leur retraite après la réforme. La promesse de la baisse de l'impôt sur le revenu pour les plus riches et la suppression programmée de l'impôt de solidarité sur la fortune représentent 30 milliards d'euros sur cinq ans !

Ces baisses d'impôts devraient être affectées à l'amélioration des basses retraites et en particulier au relèvement du minimum contributif à 95 % du SMIC, à la sécurisation du pouvoir d'achat des retraités par la création d'une conférence annuelle sur les retraites et permettre à tous les salariés aux carrières longues de partir avant soixante ans.

Enfin, M. Pascal Terrasse a rappelé que lors de son intervention du 4 février 2003, il avait pris acte du « menu » en attendant les « plats ». En guise de plats, aujourd'hui, il s'agit d'un régime pour tous : « eau et pain sec » pour chacun. Il est évident que le projet affaiblit encore davantage ceux qui n'ont que leur retraite comme patrimoine.

Après avoir indiqué que l'UDF, partenaire de la majorité, soutient le projet qui constitue un pas important pour la sauvegarde de la retraite par répartition, M. Jean-Luc Préel a rappelé que ce système est au cœur du pacte républicain : solidarité entre les actifs qui payent les pensions des retraités, solidarité à l'intérieur d'une même génération et solidarité entre les régimes. Ce système est confronté, d'une part, au « papy-boom » et, d'autre part, à l'allongement de la durée de vie. La réforme est donc nécessaire et urgente. A cet égard, les précédents gouvernements ont perdu trop de temps, si bien que leurs représentants devraient aujourd'hui faire preuve de modestie. Tous les pays européens ont entrepris, et pour la plupart déjà réalisé, ces réformes.

Cette réforme sera également l'occasion de corriger des inégalités qui paraissent aujourd'hui insupportables, qu'il s'agisse de l'âge de départ à la retraite, du taux de cotisation ou des modalités de prise en compte du salaire de référence. Le projet, qui tend vers l'égalité, comprend de nombreuses améliorations.

Pourtant, selon l'UDF, un autre projet était possible. Ce système associerait davantage de démocratie sociale et de justice sociale à une souplesse accrue, grâce à une réelle retraite « à la carte » par points. L'Etat continuerait à assurer, par l'intermédiaire du fonds de solidarité vieillesse (FSV), la solidarité de la nation envers les plus démunis et ceux qui, victimes d'accidents de la vie, n'ont pu cotiser suffisamment.

Le projet du gouvernement tend vers l'égalité en proposant les mesures suivantes : l'harmonisation des durées de cotisation entre les salariés du secteur public et du secteur privé pour aboutir à une durée de 40 ans en 2008, partage du temps gagné entre temps de travail et temps de retraite, mise en œuvre à terme dans le public d'une décote et d'une surcote identiques à celles du privé et indexation des pensions sur les prix. Il affirme la volonté de maintenir un haut niveau de retraite pour permettre à ceux qui ont contribué à la richesse du pays de bénéficier d'un temps de retraite de qualité ; il garantit aux salariés rémunérés au SMIC une pension équivalant à 85 % du SMIC net. En outre, il diminue la décote dans le privé, prend en compte la pénibilité grâce à des négociations par branche et rend possible le rachat de trois années d'études. De plus, la création d'une retraite complémentaire des fonctionnaires intégrera une partie des primes. Les améliorations visant les polypensionnés ainsi que les conjoints survivants, l'amélioration des droits à l'information et enfin l'extension de la Préfon à tous constituent autant d'améliorations notables.

Le projet gouvernemental comporte cependant des lacunes. D'abord, il ne traite pas des régimes spéciaux dont le besoin de financement en 2020 atteindra 13 milliards d'euros par an, besoin laissé à la charge de la solidarité nationale. On ne peut expliquer aux Français que la réforme concerne tout le monde, tout en laissant de côté les retraites les plus favorables financées par la collectivité nationale. La mise en extinction de ces régimes aurait été une solution acceptable, à la condition qu'elle préserve les droits à la retraite déjà acquis. Ensuite, le projet ne réalise pas complètement l'équité puisque les taux de cotisation continuent à différer suivant les salariés. L'âge de départ à la retraite à taux plein demeure plus favorable pour certains ; les salaires de référence pour le calcul de la retraite diffèrent (les six derniers mois pour les uns, vingt-cinq ans pour les autres).

Le projet a surtout deux défauts majeurs. D'une part, il n'assure pas l'équilibre financier, sauf à espérer une très forte croissance économique et une très forte diminution du chômage. Il faudra donc augmenter les cotisations. D'autre part, le projet ne cherche pas à améliorer l'employabilité des plus de 50 ans : actuellement, la société ne valorise pas assez la compétence et l'expérience. Enfin, ce projet devrait s'accompagner d'une mise en perspective de la politique familiale, essentielle pour l'avenir démographique du pays et donc pour les retraites.

L'UDF souhaite davantage de démocratie sociale, davantage de justice sociale et davantage de souplesse. Elle a également proposé une autre méthode. Le système de retraite est au cœur du pacte républicain. Sa sauvegarde concerne donc tous les Français. L'UDF avait proposé qu'ils se prononcent par référendum à l'automne 2002 sur les grands principes d'une réforme qui privilégierait la répartition, l'équité entre tous les Français, l'autonomie de gestion et la retraite à la carte. L'accord aurait dû être obtenu sur ces principes, ce qui aurait rendu la suite plus facile. Le rapporteur a pointé le fait que le référendum aurait remis en cause le rôle des partenaires de la négociation, l'argument n'est pas recevable : si le référendum tranche sur les grands principe, l'UDF souhaite donner un réel pouvoir aux partenaires sociaux en leur confiant la gestion des retraites. L'UDF souhaite donc davantage de démocratie sociale et propose que la caisse du régime général des salariés, qui ne gère aujourd'hui que les fonds sociaux, ait enfin une réelle autonomie et décide des cotisations et des prestations et, le cas échéant, fixe la valeur du point. L'UDF souhaite également la création d'une caisse de retraite des fonctionnaires de l'Etat, gérée paritairement et proposera également le principe d'une retraite à la carte, par points. Le conseil d'administration de la caisse fixera la valeur du point. Ce système ne diminuera pas le montant des pensions, mais permettra des bonifications pour pénibilité et pour les mères de familles.

En conséquence, seront proposés des amendements visant à garantir l'autonomie de gestion des caisses, à assurer l'extinction des régimes spéciaux, la mensualisation du paiement des retraites agricoles, la possibilité de racheter jusqu'à cinq années d'études et, enfin, l'extension du bénéfice de la Préfon à tous. Le projet mérite d'être soutenu. Il demande un effort à chacun et exigera donc de la part du gouvernement courage et intelligence politique.

M. Maxime Gremetz a d'abord indiqué qu'il s'agit d'un grand débat de société et de civilisation. Il faut, en effet, réformer le système, mais sans en changer la nature et surtout pas en passant d'un système de répartition à un système de capitalisation. Il faut rester dans la répartition et la solidarité entre les générations, de la naissance à la mort. En outre, l'histoire de la constitution de la protection sociale en France témoigne de son originalité et ne va pas dans le sens de l'adaptation de modèles étrangers. Il n'y a pas à chercher un modèle ailleurs. Il faut préserver le nôtre, il n'en faut pas moins le moderniser. On ne peut pas assimiler ceux qui s'opposent au projet de loi à des adversaires de la réforme. On ne peut pas nier le problème du financement du système de retraite mais il est d'autres voies que celle retenue.

Il faut assurer à chacun une retraite d'un montant décent. On ne peut donc qu'être en désaccord avec le projet du gouvernement. Les Français ne sont pas des imbéciles. Faire preuve de surdité et d'autisme face à leurs revendications et aspirations a déjà joué des tours aux responsables lors de précédentes confrontations. La démocratie sociale doit avoir un sens. Or, malgré un « pilonnage » médiatique quotidien en faveur du projet, les Français ne sont pas convaincus. Un récent sondage montre que 63 % d'entre eux sont aux côtés des grévistes et des manifestants.

Les députés du groupe communiste et républicain sont favorables à une réforme progressiste. Ce n'est pas le cas du gouvernement, qui en appelle à la démocratie sociale mais veut faire passer une réforme signée par deux organisations syndicales minoritaires, au mépris de la logique des accords majoritaires. Celle-ci devrait conduire à entendre la voix des deux organisations syndicales, majoritaires dans le pays, qui ont rejeté le texte.

Sur le contenu même de la réforme, des amendements, préparés avec différents syndicats et associations, seront présentés afin de proposer une autre solution et de supprimer les nombreuses inégalités créées par le texte. Parmi celles-ci, il faut évoquer :

- Le durcissement des conditions d'acquisition du droit à la retraite à taux plein à soixante ans, qui touchera particulièrement les femmes. La méthode suivie est subtile puisqu'il n'a pas été nécessaire de toucher à l'âge légal de départ ; il a suffi d'agir sur l'allongement des annuités nécessaires et sur la baisse des pensions.

- La pension minimale pour les quatre millions de salariés au SMIC est présentée comme garantie à hauteur de 85 % du SMIC mais, en réalité, l'indexation des pensions ne se faisant plus sur les salaires mais sur les prix, le niveau de garantie ne pourra qu'évoluer à la baisse avec le temps.

- Enfin, les dispositions destinées aux salariés ayant commencé à travailler très tôt ne bénéficieront qu'à 200 000 des 827 000 personnes concernées.

Ce projet de loi revendique un objectif d'égalité en alignant le régime du public sur celui du privé, issu de la réforme de 1993 dite « Balladur », qui a toujours été fermement combattue par les députés communistes. Cette réforme, effectuée par décret, a permis de porter la durée légale de cotisation de 37,5 à 40 annuités, de calculer la pension non plus sur les dix mais sur les vingt-cinq meilleures années et, enfin, de mettre en œuvre une décote. Pour le gouvernement, l'égalité, c'est donc le nivellement par le bas et la régression sociale. Ce texte en appelle également à un « effort partagé » mais, en réalité, 91 % de l'effort de financement supplémentaire sera demandé aux salariés par le biais d'une diminution des pensions, d'une hausse de la durée réelle d'activité et d'un redéploiement des cotisations à leur dépens. Tout cela conduit à une baisse de 12 % des pensions.

Dans le même temps, les employeurs continueront à bénéficier de 17 milliards d'euros d'exonérations de cotisations sociales. Si l'on revenait au principe d'égalité des cotisations entre les salariés et les employeurs - ces derniers n'ont pas vu leur taux de cotisation augmenter depuis vingt-cinq ans - qui prévalait en 1945 et que l'on taxait les revenus financiers, cela pourrait apporter 20 milliards d'euros au système de retraite. Rappelons également qu'un million d'emplois créés génère 20 milliards d'euros de cotisations. Tout cela montre que d'autres choix de financements sont possibles, pour un autre choix de société. Dans cet esprit, les députés communistes proposeront une modification de l'assiette des cotisations afin de prendre en compte les revenus du capital, dont la part dans le PIB a augmenté de 11 % en vingt ans. Le parti communiste a d'ailleurs d'ores et déjà remis au ministre des affaires sociales, ainsi qu'au Premier ministre, une proposition de réforme alternative à ce texte inéquitable, conservateur et dramatique pour les salariés les plus exploités.

Si le gouvernement n'a pas peur de la démocratie, il doit entendre les partenaires sociaux, la voix des organisations majoritaires, le Parlement et le peuple français. C'est pourquoi l'idée d'un référendum sur les grands principes de la réforme des retraites doit être retenue. Seul un référendum permettra aux Français de se prononcer sur ce projet et il ne fait pas de doute que celui-ci ne « passera pas ». La question n'est pas plus compliquée que celle posée lors du référendum sur le Traité de Maastricht : acceptez-vous le texte qui vous est soumis ?

M. Denis Jacquat a considéré que le temps des rapports et des reports est terminé. Le Livre blanc sur les retraites lancé par M. Michel Rocard, Premier ministre à l'époque, a aujourd'hui douze ans et alertait déjà sur l'urgence d'une réforme face aux risques encourus par le système de retraite au-delà de 2006. Le système est aujourd'hui au bord de l'explosion, comme le constate d'ailleurs le Conseil d'orientation des retraites depuis des années.

Il a ensuite formulé plusieurs observations :

- Le projet de loi permet de répondre à l'objectif essentiel de sauvegarde du système de retraite par répartition. Trois clés de modulation étaient envisageables : les cotisations, les prestations, les durées d'activité et d'assurance. C'est cette troisième variable qui a été retenue car elle est la plus à même de préserver un haut niveau de prestations. La plupart des pays étrangers ont d'ailleurs fait ce même choix et, contrairement à leurs prises de positions actuelles, la plupart des responsables politiques de l'opposition avaient dans les années passées préconisé des mesures comparables. Il y a là un phénomène d'« amnésie rétrograde ».

- La suggestion de taxer les plus-values des entreprises pour financer le régime des retraites n'est pas une bonne idée car elle reviendrait à faire reposer le système sur une assiette par définition instable et donc à menacer sa pérennité.

- La réforme se fonde sur un principe d'équité : il s'agit avant tout de ne pas permettre la création de deux catégories de retraités dans le pays, ce qui conduirait à une explosion sociale. Quant à la promesse de l'actuelle opposition de remettre en cause cette réforme lorsqu'elle reviendra au pouvoir, on peut être perplexe à son sujet puisque, en 1995, le gouvernement socialiste n'a pas remis en cause la réforme « Balladur ».

- Plusieurs dispositions très positives de la réforme répondent à des demandes anciennes et récurrentes de l'actuelle majorité : il s'agit notamment des mesures concernant le conjoint survivant, la pénibilité du travail, les handicapés vieillissants, l'alignement du minimum contributif sur le minimum vieillesse et la situation des pluri-pensionnés.

- Les députés du groupe UMP, à l'écoute des Français, ont la certitude que la majorité d'entre eux souhaite que cette réforme soit menée à bien.

Mme Martine Billard a rappelé que les Verts sont favorables à une réforme des retraites fondée sur la défense du système de répartition et la réduction des inégalités actuelles face à la retraite. Ces exigences ne sont pas celles du présent projet de loi. Ainsi, celui-ci introduit de manière, certes discrète mais indiscutable, les fonds de pension avec la mise en place de l'épargne retraite. Soit l'épargne retraite sera individuelle et donc source d'inégalités entre ceux qui ont des ressources financières suffisantes pour épargner et ceux qui n'en ont pas, soit l'épargne retraite sera collective et obligatoire et débouchera sur un système de capitalisation mobilisant des sommes qui seraient mieux placées dans la répartition. Il ne faut pas oublier que le système actuel de répartition a été mis en place à la Libération en raison de la faillite des systèmes précédents fondés sur l'épargne des travailleurs.

L'allongement de l'espérance de vie est présenté comme l'argument principal en faveur d'une augmentation de la durée de cotisation. Premièrement, l'espérance de vie moyenne n'a pas de réelle signification. Deuxièmement, elle s'allonge au-delà de 80 ans, elle n'implique pas pour autant la capacité de travailler jusqu'à 70 ans. La logique est la suivante : « plus on vit vieux, plus on doit travailler longtemps ». Le gouvernement devrait aller jusqu'au bout de cette logique et proposer aux femmes de travailler plus longtemps puisqu'elles ont une plus grande espérance de vie ! Le lien fait entre l'espérance de vie et l'augmentation de la durée du travail est donc douteux.

Par ailleurs, beaucoup de salariés sont licenciés avant de pouvoir bénéficier du nombre d'annuités nécessaires à l'obtention d'une retraite à taux plein. Un tiers seulement des Français entre 55 et 65 ans sont actifs, la majorité des salariés qui liquident leur retraite ne sont plus en activité ; ils sont soit en préretraite, soit en maladie, soit au chômage. Sur ce dernier point, la réforme de l'UNEDIC va encore dégrader la situation financière des travailleurs âgés, notamment ceux des petites et moyennes entreprises.

Par ailleurs, il faut regretter l'absence de cotisation retraite sur les stocks options et de taxation sur les plus-values. Le gouvernement argue de l'instabilité économique pour repousser ces solutions. En réalité, la France est un pays développé dans lequel la richesse financière progresse de manière régulière. Il serait plus judicieux de fonder la réforme sur cet élément plutôt que sur le taux d'activité et la capacité très improbable des entreprises à ne plus licencier les travailleurs de plus de cinquante ans, même s'il faudrait moduler une telle taxation pour ne pas pénaliser les entreprises de main d'œuvre.

En ce qui concerne la pénibilité, le projet de loi ne garantit pas ce principe essentiel, pas même dans les trois premiers articles qui précisent les principes généraux régissant le système de retraite français.

S'agissant des avantages familiaux, les polypensionnés sont oubliés. Par exemple, la situation de certaines femmes fonctionnaires ayant travaillé dans le secteur privé n'est pas prévue.

Enfin, le gouvernement a tenté de dresser le secteur privé contre le secteur public. Or, cette réforme dégrade également la situation des salariés avec, d'une part, l'allongement de la durée d'assurance à 42 ans et la modification du mode de calcul et, d'autre part, le déplafonnement des cotisations salariales.

Les Verts ne peuvent être que défavorables à cette réforme des retraites qui débouchera sur une baisse importante du montant des retraites des salariés tant du public que du privé. Cette réforme vise certes l'harmonisation mais une harmonisation à la baisse.

En réponse aux intervenants, M. François Fillon, ministre du travail, des affaires sociales et de la solidarité, a souhaité souligner la qualité du débat et de l'écoute réciproque. Quels que soient les désaccords entre la majorité et l'opposition, le Parlement doit donner aux Français la vision d'hommes et de femmes qui traitent sérieusement et dignement d'un sujet considérable pour l'avenir de notre société. Rien ne serait pire que de donner l'image d'un débat uniquement polémique. Pendant plusieurs semaines au Parlement, ce débat devra se dérouler dans l'écoute mutuelle et dans le respect des convictions des uns et des autres.

Il a ensuite déploré que de nombreux intervenants aient critiqué la méthode utilisée par le gouvernement dans la préparation du projet de loi en l'accusant d'avancer à « marche forcée » ou de « passer en force ». Le processus a pourtant commencé en janvier par un discours de cadrage du président de la République, précisé ensuite par le Premier ministre. Les ministres ont ensuite reçu les formations politiques et mené vingt et une réunions officielles - sans compter les autres - avec les organisations syndicales, sur tous les sujets liés à la réforme.

On aimerait pouvoir trouver dans l'histoire récente du pays un sujet ayant fait l'objet d'un travail de concertation aussi important et ayant abouti à un accord. Certes, toutes les organisations syndicales n'ont pas validé cet accord. Mais il faut rappeler que certaines d'entre elles se sont d'emblée placées sur un terrain qui ne permettait pas d'aller vers un accord. Par exemple, certaines organisations syndicales refusent l'harmonisation entre les régimes du public et du privé ou remettent en cause la réforme Balladur. Il est très difficile d'aboutir à une négociation réelle et sérieuse dans ces conditions.

Pour ce qui est du dialogue avec les partis politiques, il faut rappeler que l'opposition n'a pas fait de vraies propositions sérieuses et crédibles. Dans ces conditions, là encore, le dialogue est impossible. De toute façon, notre pays n'a pas la culture du consensus, chacun attendant que le gouvernement présente son projet pour faire ensuite des contre-propositions.

En ce qui concerne le référendum proposé notamment par M. Maxime Gremetz, il est assez étonnant que le parti communiste propose d'y recourir alors qu'il l'a longtemps considéré comme un instrument peu démocratique et plébiscitaire ; quant à l'UDF, son appréciation sur l'opportunité d'organiser un référendum varie selon les sujets. Cette décision revient en tout état de cause au Président de la République. Dans la situation politique actuelle de notre pays, s'en remettre au référendum signifierait que la classe politique ne prend pas ses responsabilités, ce qui constituerait un très mauvais signal donné à nos concitoyens.

Pour ce qui est du financement de la réforme, les critiques selon lesquelles celle-ci ne serait pas financée sont infondées. Le pays n'a pas besoin d'un taux de croissance plus élevé que celui retenu par le gouvernement dans son plan de financement. En effet, avec un taux de croissance du PIB de 2 %, ce qui est le taux de la majorité des pays européens depuis plusieurs années et, en même temps, 300 000 départs à la retraite tous les ans, le chômage ne pourra que régresser. Le gouvernement n'a d'ailleurs fait que reprendre les hypothèses du COR, en les minorant sur ce point.

Certains prétendent que les entreprises ne modifieront pas leur comportement, mettant à mal la mise en œuvre de la réforme. Les entreprises affirment à raison que l'augmentation du coût du travail ne pourra que les handicaper. Le gouvernement a donc accepté de ne pas augmenter les prélèvements obligatoires, à condition que les entreprises cessent de licencier les travailleurs de plus de cinquante ans et embauchent plus de jeunes. Si dans cinq ans les entreprises n'ont fait aucun effort dans ce domaine et que ne s'est produit aucune amélioration du taux d'activité des travailleurs âgés, il faudra bien augmenter les cotisations. Il y a donc une responsabilité collective et les entreprises doivent prendre leur part de responsabilité.

Certains ont également déclaré que, l'assiette des cotisations n'étant pas élargie, 90 % de la charge nouvelle sera demandée aux salariés. C'est faux dans la mesure où 60 % des cotisations vieillesse sont payées par les entreprises. Contrairement à ce qu'a déclaré Mme Martine Billard, il n'est évidemment pas question de demander une augmentation des cotisations pour les salariés sans qu'il y ait la même augmentation pour les employeurs.

Il existe bien sûr d'autres ressources possibles mais leur utilisation n'est pas compatible avec la situation économique et monétaire actuelle pour différentes raisons. Premièrement, les trente premiers groupes français ont perdu, en 2001, 4,5 milliards d'euros. Deuxièmement, les dividendes versés par les entreprises cotées en France ne représentent pas 1 % du PIB ; on peut donc vouloir mettre en place une taxe sur les dividendes mais ce ne serait évidemment pas un financement sérieux. Troisièmement, en dix-huit mois, les stocks options ont perdu 50 % de leur valeur. Il n'y a donc pas de trésor caché pour financer les retraites.

Un dernier argument milite en faveur du mode de financement des retraites choisi dans le projet de loi, sans augmentation des prélèvements obligatoires : beaucoup de députés, de droite comme de gauche, ont apporté leur soutien à l'adoption d'une monnaie unique européenne. Et aujourd'hui, certains de ces mêmes députés défendent le maintien voire l'accroissement d'un niveau de prélèvements obligatoires, de manière totalement incompatible avec le système économique et financier communautaire ainsi unifié.

M. Pascal Terrasse a présenté en modèle l'exemple suédois. Sans doute oublie-t-il que la réforme décidée en Suède se traduit par un recours obligatoire à la capitalisation et par un allongement de la durée de cotisation avec pour objectif de fixer l'âge légal de départ à la retraite à soixante-sept voire soixante-huit ans.

Pour conclure, M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité, a exprimé sa satisfaction par rapport à l'accueil fait par les députés de la majorité aux avancées sociales proposées par le texte. Les députés de l'opposition, sans remettre en cause leur bien-fondé, ont simplement estimé qu'elles n'étaient pas suffisantes ou non financées. Le choix du mode de financement de ces avancées - notamment le départ anticipé à la retraite en cas de pénibilité des conditions de travail - par une augmentation, à horizon 2006, de 0,2 % des cotisations vieillesse, résulte d'une demande de certains syndicats. Le financement existe donc. Et sur ce point on ne peut que constater l'absence de propositions alternatives de la part de l'opposition.

M. Jean-Paul Delevoye, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire, a fait les remarques suivantes :

- S'il existait un doute sur le choix du Président de la République et du gouvernement de présenter cette réforme au Parlement plutôt que de la soumettre au référendum, la qualité du débat d'aujourd'hui lève ce doute.

- La nécessité d'une réforme du système des retraites de la fonction publique n'est plus contestée par personne, notamment pas par le parti socialiste.

- Les propositions du rapporteur, visant à améliorer les avantages familiaux de retraite, les pensions des personnes handicapées et les pensions de réversion des conjoints survivants, reçoivent un accord de principe favorable de la part du gouvernement.

- La volonté du gouvernement de faire converger les régimes de retraite du secteur privé et du secteur public, notamment en ce qui concerne l'allongement de la durée de cotisation, est bien accueillie par les fonctionnaires, dans la mesure où elle vise à l'équité et qu'en contrepartie elle se double d'un projet d'épanouissement professionnel.

II.- DISCUSSION GÉNÉRALE

La commission a examiné le présent projet de loi au cours de ses séances des 3, 4 et 5 juin 2003.

Un débat a suivi l'exposé du rapporteur.

M. Alain Néri a tout d'abord exprimé son profond mécontentement à propos du calendrier retenu pour l'examen au Parlement de cette importante réforme. La promesse d'engager un grand débat national au Parlement n'a pas été tenue puisque l'opposition n'a disposé que de quelques jours pour étudier le texte et que la commission ne dispose que de trois jours pour l'examiner. C'est un passage en force et la politique du fait accompli.

Sur le fond, la majorité et le gouvernement se présentent comme les chantres du régime par répartition mais il s'agit d'une conversion tardive : en novembre 2002, on débattait encore au sein de la majorité sur les fonds de pension ; un titre entier du projet de loi est d'ailleurs consacré aux fonds de pension ; il faut rappeler que ceux qui soutiennent le présent projet n'ont pas voté l'abrogation de la loi Thomas sous la précédente législature. La philosophie est toujours la même : réserver des produits d'épargne individuelle défiscalisée à ceux qui ont déjà des moyens et donner plus à ceux qui ont plus et moins à ceux qui ont moins.

En fait de négociation et de dialogue social, on a assisté à un monologue de régression sociale insultant pour les partenaires sociaux, les salariés et la représentation nationale, conforté par l'absence de volonté d'aboutir à un accord ou un consensus. En guise d'information sur le projet du gouvernement, c'est de la propagande qui est diffusée et les tentatives pour opposer le secteur public et le secteur privé se multiplient. Il est difficile également de parler d'équité dans un système où tout le monde doit cotiser pendant la même durée alors que l'espérance de vie n'est pas la même pour tous.

La véritable équité, c'est la possibilité de prendre sa retraite après quarante années de cotisations, quel que soit son âge. C'est ce que voulait faire le précédent gouvernement, qui en a été empêché par l'opposition du MEDEF dans le cadre des régimes de retraite complémentaire. La mise en place de la surcote va aggraver les inégalités car elle ne profitera évidemment pas à ceux qui travaillent dans les métiers les plus pénibles, sans qualification initiale et sans formation professionnelle continue, mais bien plutôt aux plus favorisés des salariés qui ont de bonnes conditions de travail et de bon salaires. Contrairement aux dispositions du projet de loi, l'équité voudrait que les familles ayant élevé trois enfants puissent bénéficier d'une bonification forfaitaire et non pas proportionnelle.

Le droit à la retraite à soixante ans à taux plein pour tous, la prise en compte de la pénibilité du travail et des écarts dans l'espérance de vie auraient dû être les axes majeurs de la réforme. Cette réforme méritait une large négociation et un débat de fond serein et fructueux, alors que la précipitation dont fait preuve le gouvernement risque de casser la cohésion sociale du pays.

Le président Jean-Michel Dubernard a rappelé que les grandes orientations de la réforme des retraites ont été présentées en Conseil des ministres le 7 mai et que, le même jour, l'avant-projet de loi avait été envoyé à tous les parlementaires. Le projet de loi définitif a été présenté en Conseil des ministres le 28 mai et déposé ce même jour sur le bureau de l'Assemblée nationale. Quant au délai de dépôt des amendements en commission, il n'a pas empêché le groupe communiste d'en déposer 6 508.

Mme Catherine Génisson a souhaité revenir sur la situation des femmes face à la retraite, en soulignant l'importance et la qualité du travail réalisé sur le texte par la délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes.

Les femmes sont aujourd'hui dans une situation de grande inégalité par rapport aux hommes. Une étude statistique de la DRESS souligne notamment que, si le montant brut mensuel des pensions est en moyenne de 1 200 euros, cette moyenne est de 1 461 euros pour les hommes et de seulement 848 euros pour les femmes. De même, seules 39 % des femmes bénéficient d'une carrière professionnelle complète contre 85 % des hommes.

L'intervention de la loi ne peut à elle seule rattraper l'inégalité professionnelle entre les hommes et les femmes, mais elle pourrait cependant éviter de l'aggraver. Or, c'est bien l'inverse qui va se passer pour les fonctionnaires avec l'application du système de décote ainsi que la suppression d'une année de bonification par enfant. De plus, en accordant une compensation aux femmes cessant leur activité pour élever leurs enfants, le système proposé est, de fait, pénalisant pour celles qui continuent à travailler.

M. Georges Colombier s'est félicité du caractère positif de nombreuses dispositions du texte et, notamment, des mesures destinées aux salariés ayant commencé à travailler très tôt, ainsi que de la prise en compte de la pénibilité du travail au niveau des branches et de l'amélioration du régime de retraite complémentaire des industriels et commerçants. Il a ensuite posé deux questions : l'une sur la définition du plafond de revenu applicable à l'allocation différentielle venant se substituer à la pension de réversion ; l'autre sur la possibilité d'accorder une compensation plus importante pour l'assurance vieillesse aux parents s'arrêtant de travailler pour s'occuper d'un enfant handicapé, afin de répondre à une des priorités du quinquennat du Président de la République.

Mme Muguette Jacquaint a regretté que le texte définitif du projet de loi ait été déposé aussi tardivement et expliqué que, si le groupe communiste a été en mesure de préparer autant d'amendements, c'est qu'il a travaillé très en amont, dès le mois de février, lorsque un premier aperçu de la réforme a été présenté par le gouvernement. Le groupe communiste a ainsi organisé à l'Assemblée nationale un forum qui a réuni 350 personnes, membres de syndicats et d'associations, et les députés ont procédé à de nombreuses réunions dans leurs circonscriptions. La réforme proposée, essentielle pour la société, comporte des dispositions très graves. Ce n'est pas pour rien que, cet après-midi, un million de personnes ont manifesté dans toute la France pour réclamer au gouvernement le retrait de ce texte et la préparation d'une autre réforme.

Elle a ensuite demandé à la commission de se prononcer :

- Sur le renvoi du texte à une commission spéciale, compte tenu du caractère transversal de la réforme et des enjeux de société qu'elle recouvre, lesquels concernent la commission des affaires culturelles, familiales et sociales mais également la commission des finances, la commission des affaires économiques et la commission de la défense. Cette possibilité a déjà été utilisée sous la précédente législature pour des textes de portée très large comme la lutte contre l'exclusion ou la bioéthique.

- Sur l'audition, par l'ensemble de la commission, des différentes organisations syndicales représentatives, afin qu'elles exposent leur position sur le projet, ainsi que de Mme Yannick Moreau, présidente du Conseil d'orientation des retraites, d'économistes et de spécialistes reconnus de ces questions.

Le président Jean-Michel Dubernard s'est déclaré pleinement satisfait que l'examen au fond de cette réforme ait été confié à la commission des affaires culturelles, familiales et sociales et a rappelé que la commission des finances et la commission de la défense se sont saisies pour avis sur ce texte et qu'il a saisi la délégation aux droits des femmes.

Mme Marie-Françoise Clergeau a évoqué les dispositions du projet de loi relatives au conjoint survivant. La suppression de la condition d'âge pour le versement de la pension de réversion est présentée dans l'exposé des motifs du projet comme un gage d'équité et de lisibilité, mais la suppression de l'assurance veuvage au profit d'une allocation différentielle sous condition de ressources révisable annuellement est inquiétante, car il s'agit de passer d'un mécanisme d'assurance à une logique d'aide sociale. Les droits des conjoints sont donc loin d'être en progression.

Ces dispositions vont concerner près de quatre millions de veufs et de veuves. Actuellement, le cumul entre retraite personnelle et pension de réversion peut équivaloir à 52 % de l'addition des pensions des deux conjoints. Mais désormais, si une personne a le malheur de perdre un conjoint jeune, l'allocation qu'elle pourra recevoir sera quasiment nulle puisque le conjoint aura très peu cotisé et que, par ailleurs, l'assurance veuvage aura été supprimée. Dans les autres cas, les veufs et les veuves seront considérés comme des assistés, alors qu'ils ont droit à une pension de réversion, pour laquelle le conjoint a cotisé. La mise en place de cette allocation différentielle entraînera une baisse importante des revenus des conjoints survivants et les condamnera à la pauvreté. La pension de réversion doit donc être définitive et ne pas être soumise à condition de ressources.

Le texte est aussi très imprécis sur des points pourtant essentiels : quel sera le plafond de revenu ? Quelles seront les ressources retenues ? Le projet prévoit que ces éléments seront fixés par décret, mais cela n'est pas satisfaisant. Aucune garantie n'est en fait donnée à ces personnes qui, au-delà de leur souffrance morale, risquent de se retrouver dans des situations financières très injustes.

Mme Claude Greff, rapporteure au nom de la délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes, a poursuivi la présentation du travail de la délégation sur cette réforme. Les nombreuses auditions qu'elle a réalisées ont directement inspiré les recommandations présentées sur le projet. Elle a ensuite rappelé les deux dernières préconisations de la délégation :

- En cas de divorce, le conjoint qui a interrompu son activité professionnelle pour élever ses enfants se trouve pénalisé dans sa carrière et vis-à-vis de sa retraite. Au nom de la solidarité au sein du couple, une compensation financière de ces désavantages devrait lui être attribuée lors du jugement de divorce. Cette question doit pouvoir être évoquée dès à présent.

- Les inégalités entre hommes et femmes dans les retraites étant le reflet des inégalités dans le déroulement des carrières, tout doit être mis en œuvre pour une application effective des dispositions législatives relatives à l'égalité professionnelles entre les hommes et les femmes, en particulier de la loi du 9 mai 2001, de manière à assurer une meilleure prise en compte par les partenaires sociaux de tous les aspects de la vie professionnelle des femmes.

Le projet de loi est cependant très positif, notamment parce qu'il conserve les avantage familiaux tout en les modernisant, et qu'il supprime la condition d'âge, de durée du mariage et de non-remariage pour le versement de la pension de réversion. Des situations d'inégalités demeurent néanmoins et appellent réflexion : la bonification par enfant est seulement d'une année dans la fonction publique, contre deux ans dans le régime général ; la compensation prévue pour les femmes cessant leur activité pour élever leurs enfants crée de fait une inégalité pour les femmes qui, par choix ou par obligation, continuent de travailler.

M. Gaëtan Gorce a vivement regretté les conditions dans lesquelles s'est engagé le débat sur ce texte, en particulier la brièveté du délai entre le dépôt du projet et la forclusion du délai de dépôt des amendements en commission. Il avait également été envisagé que la commission procède à des auditions - de personnalités étrangères, de syndicalistes - et cet engagement n'a pas été tenu. Plus généralement, la préparation de cette réforme est loin de constituer un modèle de dialogue social puisque le choix a été fait de la division syndicale à l'opposé du consensus recherché dans la majorité des pays européens sur le sujet des retraites.

On peut considérer que la réforme proposée marche sur un seul pied, car une seule des variables sur lesquelles on pouvait jouer est sollicitée, à savoir l'allongement de la durée de cotisation. Socialement déséquilibrée, elle conduira à l'aggravation de la situation des salariés pour les raisons suivantes :

- La question de la pénibilité n'est pas prise en compte. Compte tenu de l'espérance de vie inégale entre catégories de salariés à l'âge du départ à la retraite, l'allongement uniforme de la durée de cotisation aura un effet beaucoup plus régressif s'agissant des ouvriers que pour les cadres.

- Il n'y a pas eu de débat de fond sur le taux de remplacement. Le gouvernement prétend maintenir le niveau des retraites en euros constants mais, compte tenu de l'augmentation des autres revenus, on constatera de ce fait une baisse de leur niveau relatif, donc du taux de remplacement. Et même l'affirmation d'un maintien du niveau absolu des retraites est contestable, car ce maintien ne sera acquis que si les salariés peuvent effectivement cotiser plus longtemps, ce qui n'est pas crédible compte tenu de la situation du marché du travail et des pratiques des entreprises. En outre, la réforme proposée et donc le taux de remplacement qu'elle prétend garantir ne sont financés que pour moitié dans le projet même, et encore en admettant les hypothèses irréalistes, telle la baisse du chômage, qu'il comporte.

- Enfin, ce projet marque de fait la fin de la retraite à soixante ans, car il est aisé de démontrer que bien peu de personnes pourront prétendre à une retraite pleine avant soixante-cinq ans.

En fait, cette réforme résulte de choix idéologiques du gouvernement. A partir du moment où pour des raisons purement idéologiques vu les résultats obtenus les baisses d'impôts ont été privilégiées, le débat est interdit sur les financements nouveaux ou alternatifs qui auraient pu être trouvés pour les retraites, en y faisant participer toutes les catégories de Français, les entreprises et les revenus des capitaux.

La conséquence de la baisse du taux de remplacement sera le développement des formules individuelles d'épargne retraite pour ceux qui en auront les moyens, sans garantie d'ailleurs de bénéficier de rentes suffisantes à la sortie, et surtout corrélativement la perte de confiance dans les régimes par répartition. Faute d'avoir eu un débat sur des modes de financement alternatifs, la seule autre solution pour préserver les taux de remplacement sera l'augmentation des cotisations pesant sur les seuls salariés.

Pour toutes ces raisons, M. Gaëtan Gorce a affirmé sa totale opposition à un projet injuste qui entraînera un décrochage du pouvoir d'achat des retraités par rapport à celui des actifs.

Le président Jean-Michel Dubernard a rappelé que le rapporteur avait procédé depuis plusieurs semaines à des auditions auxquelles tous les membres de la commission étaient conviés.

Mme Hélène Mignon a salué le travail remarquable de la délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes. Elle a soulevé la question des travailleurs handicapés dont les carrières sont le plus souvent très courtes et les salaires soumis à cotisation très faibles : ce problème devra être traité spécifiquement afin que cette population déjà fragile ne soit pas encore plus pénalisée par les dispositions du projet de loi.

M. Bernard Perrut a considéré que certains orateurs de l'opposition font preuve de mauvaise foi en feignant de « découvrir » le projet de réforme alors même que le Premier ministre en a présenté les grandes orientations au Conseil économique et social il y a quatre mois. Les propos tenus par des personnes interrogées par les médias dans la rue montrent bien l'ampleur de la désinformation sur les conséquences de la réforme, orchestrée le plus souvent par syndicats interposés.

En fait, cette réforme renoue avec celle de 1945 en affichant la même volonté d'équité et de justice sociale. Elle comporte des avancées sociales, notamment pour les familles. Cependant, il est vrai que ce texte pourrait être amélioré au profit des travailleurs handicapés, des parents d'enfants handicapés qui abandonnent un temps leur activité professionnelle pour s'occuper de ceux-ci et des personnes qui abandonnent leur travail pour quelques mois au titre du congé d'accompagnement des personnes en fin de vie.

Mme Paulette Guinchard-Kunstler a souhaité que ne soit pas dénié aux députés le droit de faire des propositions concernant l'organisation du travail parlementaire et a jugé excellente la suggestion de Mme Muguette Jacquaint de renvoyer le projet de loi à l'examen d'une commission spéciale.

Sur le fond, il faut souligner l'insuffisance de la réflexion sur la reconnaissance de la pénibilité du travail, que le projet renvoie aux négociations de branches alors que divers rapports, notamment celui du Conseil d'orientation des retraites, et des expériences étrangères montrent qu'il est possible de définir la pénibilité. Au demeurant, le projet de loi ne la prend en compte que dans deux secteurs particuliers : pour les enseignants, auxquels une « seconde carrière » sera proposée, et pour les personnels hospitaliers, qui valideront une année supplémentaire pour dix ans de service. On peut se demander pourquoi cette bonification ne serait pas étendue à l'ensemble des activités pénibles ?

Le président Jean-Michel Dubernard a indiqué qu'à sa connaissance aucune demande de renvoi du projet à une commission spéciale n'avait été présentée par un président de groupe. Il a ajouté, par ailleurs, qu'aucun pays en Europe n'avait su ni pu définir la pénibilité des conditions de travail de manière générale.

Mme Muguette Jacquaint, tout en saluant la qualité de la contribution et des propositions de la délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes, a estimé que le projet de loi ne prend pas en compte les préoccupations exprimées par cette délégation et ne fait qu'accroître les inégalités dont sont déjà victimes les femmes, qui occupent les quatre cinquièmes des emplois précaires. La délégation, qui a auditionné les syndicats et le MEDEF sur les inégalités professionnelles entre les hommes et les femmes, a été stupéfaite de l'ignorance affichée par l'organisation patronale vis-à-vis des textes de loi relatifs à l'égalité professionnelle. Ce constat ne peut conduire qu'à douter de l'existence d'une volonté réelle de réduire ces inégalités.

M. Alain Néri a fait part de sa volonté ainsi que de celle des commissaires membres du groupe socialiste de pratiquer une opposition constructive dans le but d'améliorer un projet de loi qu'ils n'estiment pas bon. Pour l'instant, le climat dans lequel se déroule le débat est regrettable. Il ne faut pas confondre vitesse et précipitation. Si, à l'instar du ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité, tout le monde s'accorde sur la nécessité de réformer les retraites, le gouvernement pouvait raisonnablement attendre la fin de l'année 2003 pour présenter son texte au Parlement et offrir ainsi aux parlementaires le temps nécessaire au débat d'autant que, de l'aveu même du ministre, le régime de retraites ne connaîtra ses premières difficultés de financement qu'à partir de 2006. Le gouvernement est resté sourd à cette demande comme il l'est aux manifestations.

Le rapporteur a d'abord répondu aux critiques formulées quant à la méthode :

- Le droit de manifester constitue un droit fondamental qu'il ne saurait être question de limiter de quelque manière que ce soit. En revanche, le Parlement a toute légitimité à examiner puis à voter ce texte sans que soit nécessairement fait appel au référendum.

- Il n'est pas envisageable de reporter l'examen du texte de six mois. Après la réflexion vient le temps de la nécessaire décision.

- Par ailleurs, le nombre considérable des amendements déposés par les commissaires membres du groupe des député-e-s communistes et républicains prouve à lui seul que le délai d'examen du projet de loi par l'Assemblée nationale est suffisant.

- Quant à la demande de ce groupe de créer une commission spéciale pour l'examen de ce texte, pourquoi la commission se dessaisirait-elle d'un projet de loi qui entre parfaitement dans ses attributions ?

- Enfin, s'agissant des auditions préparatoires, celles-ci étaient, comme à l'accoutumée, ouvertes à l'ensemble des commissaires.

Il a ensuite apporté les précisions suivantes :

- Concernant l'accusation portée contre le gouvernement et sa majorité de ne s'être convertis que récemment à la préservation du système de financement des retraites par répartition, un bref rappel historique s'impose. La sécurité sociale a été créée en 1945, le général de Gaulle n'y est pas étranger. De même, la Caisse nationale d'assurance vieillesse (CNAV) a été créée en 1967 sous le gouvernement de Georges Pompidou. En 1993, la réforme du système de retraites initiée par le gouvernement de M. Edouard Balladur a permis la sauvegarde de l'équilibre du régime général. En 1995, l'opposition à la réforme s'est cristallisée sur une initiative qui n'était qu'une demande d'évaluation du coût des régimes spéciaux et ne visait qu'à conforter le pacte social. A contrario, le gouvernement de M. Lionel Jospin n'a fait qu'accumuler les rapports, sans jamais entreprendre de réformes, au risque de remettre en cause l'existence même du système de financement des retraites par répartition.

- Il est également à rappeler que le refus de ce même gouvernement de soutenir la proposition de loi du groupe communiste visant à ce que les personnes ayant cotisé 40 annuités puissent bénéficier d'une retraite à taux plein avant l'âge de 60 ans n'était pas motivé, comme certains ont voulu le faire croire, par l'attitude des organisations patronales mais en raison d'un coût jugé trop important (12 milliards d'euros). L'actuel gouvernement a pris en considération le cas de ces longues carrières et a formulé des propositions qui constituent une avancée sociale considérable. Le projet de loi prend également en compte les travaux pénibles même si la pénibilité du travail est, par essence, une donnée difficile à quantifier. La France se positionne en ce domaine comme un Etat pionnier puisque aucun autre pays au monde n'a jamais introduit de telles dispositions dans son droit.

- Aujourd'hui, après un an de travail et de réelles négociations - vingt-et-une réunions avec les partenaires sociaux et les partis politiques ont été organisées au terme desquelles deux syndicats représentant les salariés, ainsi que l'ensemble des organisations patronales et des organisations représentant les professions indépendantes, ont apporté leur soutien au projet de loi -, le gouvernement présente une réforme et s'engage sur son financement. Ainsi, ce sont près de deux milliards d'euros par an qui ont été dégagés afin de financer les revendications des syndicats signataires du relevé de décisions du 15 mai.

- L'accusation selon laquelle le projet de loi ouvrirait la porte au financement des retraites par les fonds de pension est dénuée de fondement. Le titre V du texte permet seulement l'évolution du plan partenarial d'épargne salariale volontaire (PPESV), mesure créée par M. Laurent Fabius en 2001, en plan partenarial d'épargne salariale volontaire pour la retraite (PPESVR), afin qu'elle serve à améliorer les retraites. Les plans d'épargne retraite ne sont évoqués que comme une perspective éventuelle. Le cas échéant, dans le cadre d'une autre loi, ils ne constitueraient que le pendant du système « Préfon » dont aujourd'hui les fonctionnaires sont les seuls bénéficiaires. Il s'agirait donc d'une mesure d'équité.

- Le système de surcote doit permettre d'augmenter la pension de retraite de ceux qui ont fait le choix de travailler plus.

- Le principe d'une pension de retraite à taux plein à l'âge de 60 ans est maintenu. Sur ce point, il est intéressant de constater que ce principe n'est mentionné nulle part dans la loi qui a abaissé l'âge légal de la retraite de 65 à 60 ans.

- Il faut en finir avec le spectre des quarante-deux ans de cotisations. Ce n'est pas pour demain : ce n'est qu'une hypothèse liée à l'allongement de la durée de la vie et à la volonté de maintenir le rapport entre temps d'activité et temps de retraite. Il s'agit pour l'instant uniquement d'instaurer plus d'équité en exigeant quarante annuité des fonctionnaires comme c'est - et reste - le cas pour le secteur privé.

- La création d'une retraite complémentaire obligatoire pour les artisans est une mesure positive.

- Il faut souligner l'excellent travail accompli par la délégation aux droits des femmes qui a apporté son soutien à l'adoption du projet de loi. Ces travaux se traduiront à n'en pas douter dans un certain nombre d'amendements. D'ores et déjà, le texte comporte des mesures en faveur des femmes, notamment en ce qui concerne les polypensionnées, le calcul du taux de remplacement, le prise en compte du temps partiel et les avantages familiaux.

- La question de la pension de réversion pour le conjoint survivant est abordée par le texte, notamment par la création d'un mécanisme « d'allocation sécurité », qui renvoie au décret la fixation du plafond de ressources pour être admissible au dispositif. Il importe de veiller à ce que ce niveau soit suffisant.

- Des amendements seront déposés pour permettre aux parents d'enfants handicapés de bénéficier d'un régime adapté.

- Il importe de rappeler la difficulté pour les parlementaires d'amender un tel texte dans la mesure où, en vertu de l'article 40 de la Constitution, ils ne peuvent déposer des amendements augmentant une charge publique, y compris en les gageant, ou diminuant les ressources publiques. A ce titre, on ne peut que se réjouir de l'attitude d'ouverture du président de la commission qui a accepté que soit examiné en commission l'ensemble des amendements déposés sans que leur recevabilité financière ne soit au préalable examinée.

- Pour les perspectives de baisse du chômage, l'hypothèse retenue pour le projet de loi est celle du COR.

- Le ralliement du groupe socialiste à ce projet de loi n'est pas utopique dans la mesure où la plupart des propositions gouvernementales rejoignent celles formulées dans un passé récent par le parti socialiste et aujourd'hui encore, par voie de presse, par un certain nombre de dirigeants socialistes. Il en va par exemple ainsi de l'équité entre le régime général et le régime de la fonction publique. L'opposition ne peut en rester à la solution unique de la hausse des cotisations, qualifiée par ses propres experts de « scénario de l'inacceptable ».

Le dossier des retraites est d'autant plus complexe que beaucoup de contre-vérités ont été énoncées. L'intérêt du débat parlementaire est de rappeler la vérité.

M. Maxime Gremetz a contesté l'interprétation selon laquelle la proposition du groupe communiste de recourir à un référendum constituerait une négation des pouvoirs du Parlement. Lorsque le Parlement aura achevé ses travaux, il sera tout à fait possible de présenter le projet à l'ensemble du peuple français. Il ne s'agit en aucun cas de privilégier la rue au détriment du Parlement.

Par ailleurs, le président du groupe communiste et républicain, en vertu de l'article 31 du Règlement, a demandé la constitution d'une commission spéciale. Selon cet article, la demande doit être présentée dans le délai de deux jours francs suivant la distribution du projet et d'un jour franc en cas de déclaration d'urgence formulée par le gouvernement avant la distribution. La demande est aussitôt affichée et notifiée au gouvernement et aux présidents des groupes et des commissions permanentes. Elle est considérée comme adoptée si le Président de l'Assemblée nationale n'a été saisi d'aucune opposition par le gouvernement, le président d'une commission permanente ou le président d'un groupe avant la deuxième séance qui suit cet affichage.

Le quatrième alinéa du même article précise que, si une opposition à la demande de constitution d'une commission spéciale a été formulée, un débat sur la demande est inscrit d'office à la fin de la première séance suivant l'annonce faite à l'Assemblée nationale de l'opposition. Au cours de ce débat, peuvent seuls prendre la parole le gouvernement et, pour une durée n'excédant pas cinq minutes, l'auteur de l'opposition, l'auteur ou le premier signataire de la demande et les présidents des commissions permanentes intéressées.

Prenant acte de cette demande de constitution d'une commission spéciale, le président Jean-Michel Dubernard a fait part de son intention de s'y opposer.

Il a ensuite précisé que la commission a été saisie de 6 508 amendements : 4 amendements déposés par des commissaires appartenant au groupe UMP, 10 amendements déposés par Mme Martine Billard, 47 amendements déposés par des commissaires appartenant au groupe UDF, 93 amendements déposés par des commissaires appartenant au groupe socialiste et 6 354 amendements déposés par des commissaires appartenant au groupe des député-e-s communistes et républicains.

En fait, ces 6 354 amendements correspondent à 1 059 amendements déposés par six signataires différents : Mme Jacqueline Fraysse, Mme Marie-George Buffet, M. Frédéric Dutoit, M. François Liberti, M. Maxime Gremetz et Mme Muguette Jacquaint. Pour faciliter la manipulation des liasses d'amendements, et en accord avec le groupe communiste, une seule série de ces amendements - sous le timbre de Mme Jacqueline Fraysse, première à les avoir déposés - a été distribuée. Les cinq autres auteurs pourront bien évidemment présenter leurs amendements identiques à ceux de Mme Jacqueline Fraysse.

M. Maxime Gremetz a estimé que la demande formulée par le groupe des député-e-s communistes et républicains doit conduire à suspendre les travaux de la commission permanente dans l'attente de la décision éventuelle de créer la commission spéciale.

Le président Jean-Michel Dubernard ayant rappelé que la commission n'était pas dessaisie dans l'intervalle, celle-ci est ensuite passée à l'examen des articles du projet de loi.

III.- EXAMEN DES ARTICLES

Avant l'article premier

La commission a examiné un amendement de M. Pascal Terrasse portant article additionnel et visant à préciser que la réforme des retraites doit faire l'objet d'une véritable négociation entre les pouvoir publics et les partenaires sociaux afin de garantir le choix du système par répartition, au cœur du pacte social qui unit les générations.

M. Pascal Terrasse a exprimé le souhait que l'actuelle majorité agisse comme l'ancienne qui avait à de nombreuses reprises accepté des amendements de l'opposition d'alors. Aujourd'hui, on essaye de faire passer le texte à la hussarde alors qu'8il faut négocier. En 1997, lors de l'arrivée aux responsabilités de l'ancienne majorité, le climat social était très dégradé. Les organismes syndicaux se souvenaient de la tentative de réforme de 1995. Le gouvernement est alors entré dans une logique d'apaisement et a créé le Conseil d'orientation des retraites (COR). Aujourd'hui, le ministre comme le rapporteur font référence aux travaux du COR qui est composé d'experts et de parlementaires. Le rapport du COR considère qu'est en cause le renouvellement du contrat social entre les générations et souligne l'importance de trouver l'adhésion de tous les acteurs concernés. Le discours du Premier ministre Lionel Jospin précisait bien qu'il fallait engager une logique de négociation. Or, le gouvernement, s'il a lancé des discussions, n'a pas négocié, ce qui explique l'ampleur des grèves et manifestations.

Après que le rapporteur a émis un avis défavorable, la commission a rejeté l'amendement.

La commission a ensuite examiné six amendements identiques présentés par Mme Jacqueline Fraysse, Mme Marie-George Buffet, M. Frédéric Dutoit, M. François Liberti, M. Maxime Gremetz et Mme Muguette Jacquaint posant le principe d'une réforme audacieuse dans l'intérêt du peuple et réaffirmant le principe du système français de retraite par répartition.

M. Maxime Gremetz a souligné qu'il s'agit d'une affirmation de principe : il ne peut y avoir de statu quo. La réforme doit en effet être audacieuse et se fonder sur la retraite par répartition. M. Alain Néri a jugé que le projet du gouvernement ne correspond pas aux souhaits des Français. Il faut donc donner un caractère solennel à la réforme : il faut légiférer dans l'intérêt du peuple et en restant dans le système de répartition, dont les avantages devraient être étendus à toute l'Europe. M. Yves Bur a considéré que certains termes de l'amendement correspondent au projet du gouvernement : il s'agit bien d'une réforme audacieuse visant à préserver la retraite par répartition. Estimant que la rédaction de l'article premier répond à l'objet des amendements, le rapporteur a émis un avis défavorable.

La commission a rejeté les amendements.

La commission a examiné six amendements identiques présentés par Mme Jacqueline Fraysse, Mme Marie-George Buffet, M. Frédéric Dutoit, M. François Liberti, M. Maxime Gremetz et Mme Muguette Jacquaint visant à préciser que la solidarité entre les générations constitue le principe et la fin de toute réforme du système de retraite.

Mme Muguette Jacquaint a souligné que le principe de solidarité doit s'appliquer de plus en plus, alors que les jeunes se trouvent dans des situations de chômage ou d'entrée tardive dans le marché du travail. Or, le texte proposé, s'il évoque le principe de la solidarité, introduit la capitalisation, ce qui est son contraire. Avec le système de décote et de surcote, le dispositif propose une retraite selon les moyens de chacun : comment les retraités pourront être solidaires avec les jeunes dans ces conditions ? Après avoir déclaré partager l'état d'esprit des auteurs de l'amendement, M. Alain Néri a ajouté que la solidarité entre les générations étant la finalité de la réforme, il proposerait d'introduire cette notion dans les amendements.

Le rapporteur a rappelé que la législation doit énoncer clairement des éléments concrets, sous peine de devenir une « loi bavarde ». Si le souhait des auteurs de l'amendement de souligner l'importance de la répartition est louable, de telles dispositions ne peuvent être contenues dans la loi.

Suivant l'avis défavorable du rapporteur, la commission a rejeté le sous-amendement et les amendements.

La commission a examiné six amendements identiques présentés par Mme Jacqueline Fraysse, Mme Marie-George Buffet, M. Frédéric Dutoit, M. François Liberti, M. Maxime Gremetz et Mme Muguette Jacquaint portant article additionnel et visant à préciser que la répartition est le seul moteur efficace de la solidarité intergénérationnelle. Elle seule permet de conforter le principe fondateur de la retraite inscrit dans le fonctionnement de la branche maladie de la sécurité sociale française : assurer à chacun un revenu décent face aux aléas de l'existence.

M. Maxime Gremetz a estimé que si les partisans du projet du gouvernement insistent sur l'absence de remise en cause du principe de répartition, la hausse des cotisations, la transformation prévisible de l'épargne salariale en épargne retraite et le prix élevé du rachat des années de cotisations manquantes sont autant d'atteintes à ce principe. Ces mesures incitent les assurés à compléter leur retraite avec des fonds de pension à la française, ce qui était un des arguments de campagne de l'actuel président de la République. Les amendements proposés visent donc à redéfinir ce principe fondateur. Après avoir rappelé que le texte en discussion est l'un des textes majeurs de la législature, Mme Catherine Génisson a considéré que ces amendements sont très importants. En effet, il existe un consensus sur le principe de répartition. M. Yves Bur a remarqué que le dispositif de ces amendements conduit à la confusion des branches maladie et vieillesse. M. Bernard Perrut a estimé qu'il est difficile de comparer la répartition à un « moteur ». M. Denis Jacquat a indiqué que l'adoption de ces amendements exclurait l'Alsace-Moselle du dispositif.

Le rapporteur, après avoir considéré que l'esprit des amendements est satisfait par la rédaction des trois premiers articles du projet et par l'augmentation du minimum contributif, a émis un avis défavorable.

La commission a rejeté les amendements.

La commission a examiné en discussion commune six amendements identiques présentés par Mme Jacqueline Fraysse, Mme Marie-George Buffet, M. Frédéric Dutoit, M. François Liberti, M. Maxime Gremetz et Mme Muguette Jacquaint disposant que le départ à la retraite est fixés pour tous à soixante ans et six amendements identiques des mêmes auteurs prévoyant que le départ à la retraite à 60 ans s'effectue de droit à taux plein.

M. Maxime Gremetz a constaté que l'extension de la réforme « Balladur » aux fonctionnaires aggravera la situation des retraités et ne permettra pas, même avec une durée de cotisation plus longue, de maintenir le niveau des pensions. M. Alain Néri a estimé qu'il ne s'agit pas d'une réforme juste et légitime mais d'une réforme mensongère qui met fin, sans le dire, à la retraite à soixante ans. Le système d'allongement progressif de la durée de cotisation ainsi que de décote n'a pas d'autre objectif que de pousser les salariés à travailler plus longtemps, sans prendre en compte la plus ou moins grande pénibilité du travail. Les calculs le montrent : le système de décote fait de soixante-cinq ans l'âge de départ pour une retraite à taux plein. M. Pascal Terrasse a souhaité que le mécanisme de calcul de la retraite soit réexaminé en regard des nouvelles modalités de fonctionnement du marché du travail et a dénoncé les conditions de rachat d'annuités prévues par le projet de loi, qui sont très inégalitaires. M. Denis Jacquat a réaffirmé l'objectif principal du projet de loi : assurer une égalité des durées des cotisation applicables dans le public et dans le privé pour l'obtention d'une pension à taux plein.

Après que le rapporteur a donné un avis défavorable, la commission a rejeté les amendements.

La commission a examiné six amendements identiques présentés par Mme Jacqueline Fraysse, Mme Marie-George Buffet, M. Frédéric Dutoit, M. François Liberti, M. Maxime Gremetz et Mme Muguette Jacquaint précisant que la durée maximale de cotisation pour l'ensemble des actifs permettant de bénéficier une retraite à taux plein est de trente sept ans et demi.

M. Maxime Gremetz a rappelé que c'est la réforme « Balladur » qui a créé l'inégalité de durée de cotisation entre le secteur privé et le secteur public que l'on dit aujourd'hui vouloir réduire. C'est une méthode bien connue de déstabilisation d'un système. Il est donc proposé d'en revenir à la situation antérieure.

Le rapporteur s'est opposé aux amendements en soulignant qu'ils entrent en contradiction avec l'objectif d'ajustement de la durée de cotisation des régimes publics qui est un des éléments fondamentaux du dispositif de consolidation du régime. Depuis 1993, personne ne semble avoir contesté la nécessité d'un allongement de la durée de cotisation.

Après que M. Maxime Gremetz a observé que le principe de cet allongement n'est en rien consensuel, notamment chez les travailleurs qui se le sont vu imposer, la commission a rejeté les amendements.

La commission a examiné six amendements identiques de Mme Jacqueline Fraysse, Mme Marie-George Buffet, M. Frédéric Dutoit, M. François Liberti, M. Maxime Gremetz et Mme Muguette Jacquaint visant à instaurer une limite plancher du niveau des retraites fixée à 75 % du dernier salaire brut et à accorder, pour les salariés rémunérés au SMIC, un taux de remplacement de 100 % de leur dernier salaire.

M. Maxime Gremetz a fait observer que cet amendement fait partie des propositions concrètes en vue d'une réforme alternative. Il s'agit du problème du taux de remplacement en baisse constante depuis plusieurs années et qu'il faut fixer à un plancher minimum de 75 % du dernier salaire brut. M. Pascal Terrasse a soutenu l'amendement considérant que le niveau des retraites est un point essentiel et que le taux d'épargne exceptionnellement élevé dans notre pays révèle une profonde inquiétude à ce sujet. Le minimum contributif est porté à 85 % du SMIC dans le projet de loi, mais il faut rappeler qu'il avait été créé sur la base de 95 % par le gouvernement Mauroy et que la baisse constatée est le résultat de la réforme Balladur. De surcroît, l'objectif de 85 % ne fait l'objet d'aucune garantie dans la loi, en raison notamment du décalage entre l'évolution des prix et celle du SMIC. Ce minimum contributif ne pourrait être réellement garanti que dans le cadre des négociations sur les retraites complémentaires : or, le MEDEF y est opposé.

Le rapporteur s'est déclaré défavorable à l'amendement, rappelant qu'à la suite des négociations avec les partenaires sociaux le minimum contributif à été porté de 75 à 85 % et que l'on peut donc faire confiance à la négociation pour garantir le pouvoir d'achat des retraites, même si la situation des retraites complémentaires est difficile. Il ne faut pas oublier non plus que le minimum contributif n'a pas cessé de baisser au cours de la législature précédente.

La commission a rejeté les amendements.

La commission a examiné six amendements identiques présentés par Mme Jacqueline Fraysse, Mme Marie-George Buffet, M. Frédéric Dutoit, M. François Liberti, M. Maxime Gremetz et Mme Muguette Jacquaint visant à ouvrir le droit à liquidation pour les personnes ayant cotisé 40 ans sans avoir atteint l'âge de 60 ans.

M. Maxime Gremetz a indiqué que ces amendements prennent en compte à la fois le problème de la pénibilité du travail et celui de la retraite avant 60 ans pour les longues carrières. Le projet de loi est très vague sur le problème de la pénibilité puisqu'il se contente d'inviter les partenaires sociaux à définir les métiers pénibles. Cela marque un recul par rapport à la première version du texte qui fixait un délai de trois ans pour la négociation. D'où viendra l'incitation si la loi ne crée pas d'obligation ? On peut douter que le patronat se précipite pour négocier sur les métiers pénibles. La régression est réelle si l'on rappelle qu'en 1975 un gouvernement de droite avait introduit le principe d'un départ à la retraite anticipé pour les travailleurs manuels. Un très grand nombre de salariés est concerné par la pénibilité au travail.

Mme Paulette Guinchard-Kunstler a fait observer que la pénibilité a été au cœur de plusieurs grands conflits sociaux au cours des dernières années comme celui des chauffeurs routiers. Prétendre reconstruire le contrat social sans prendre en compte cette notion est aller à l'échec. Le projet de loi prévoit un dispositif spécial pour le personnel hospitalier actif et pour le personnel enseignant, pourquoi ne pas le généraliser aux autres secteurs ? Il faut reprendre la proposition du COR qui recommande l'inscription dans la loi des critères de pénibilité.

M. Pascal Terrasse a approuvé les amendements en considérant que la pénibilité doit être un élément essentiel de la réforme et que la seule incitation à sa prise en compte n'est pas sérieuse. La pénibilité au travail concourt à l'inégalité devant la durée de la vie puisque des écarts de plus de cinq ans sont constatés entre les patrons et les ouvriers. Mais la notion de pénibilité existe également dans certains emplois de fonctionnaires, d'enseignants en zone d'éducation prioritaire ou encore de chauffeurs routiers. La loi doit rendre obligatoire la négociation sur ce problème par branche professionnelle.

Mme Catherine Génisson a rappelé le dépôt par les élus du Nord-Pas-de-Calais, sous la précédente législature, d'une proposition de loi permettant aux personnes ayant quarante annuités de liquider leur retraite avant l'âge de soixante ans, qui n'avait malheureusement pu être adoptée. A l'époque, il s'agissait de prendre en compte la précocité de l'âge de l'entrée dans un métier conjuguée le plus souvent à la pénibilité des tâches. Aujourd'hui, à côté de la pénibilité physique de certains métiers une pénibilité psychologique est apparue depuis plusieurs années avec l'intensification du travail.

M. Alain Néri a approuvé les propos de Mme Catherine Génisson et les amendements proposés. Le droit à partir à la retraite dès quarante ans d'activité quel que soit l'âge est un droit fondamental. En effet, les personnes concernées ont connu des conditions de travail très pénibles et ont commencé à travailler alors qu'elles étaient encore des enfants. Ces travailleurs ont une espérance de vie très inférieure aux professions intellectuelles. Cette inégalité face au travail et à la mort, qui est déjà en soi intolérable, ne doit pas se doubler d'une inégalité face à la retraite. C'est le MEDEF qui, lors que la précédente législature, a fait obstacle à l'adoption de la proposition prévoyant une retraite à taux plein avant soixante ans pour les travailleurs avec de longues carrières, en s'opposant au versement d'une retraite complémentaire à ces personnes qui pour la plupart touchent des retraites de misère de l'ordre de 3 000 francs. De la même façon, le MEDEF s'est opposé à ce que les anciens combattants d'Algérie chômeurs ayant cotisé quarante annuités aient accès à la retraite complémentaire alors que cette mesure avait été adoptée à l'unanimité par l'Assemblée nationale.

Le rapporteur s'est déclaré défavorable aux amendements dans la mesure où la retraite avant 60 ans pour les longues carrières a été accordée au terme de la négociation du 15 mai dernier.

La commission a rejeté les amendements.

La commission a examiné six amendements identiques de Mme Jacqueline Fraysse, Mme Marie-George Buffet, M. Frédéric Dutoit, M. François Liberti, M. Maxime Gremetz et Mme Muguette Jacquaint prenant en compte pour le calcul des pensions de retraite les années de formation initiale ou continue, de recherche d'un premier emploi, de chômage, de maladie, d'invalidité, de service civil ou militaire, de maternité ou de congé parental.

M. Maxime Gremetz a estimé que sans une validation gratuite de ces années dans tous les régimes, de très nombreux Français partiront à la retraite sans bénéficier d'un taux plein. Pour ceux qui n'auront pas de problèmes d'annuités, car ils ont commencé à travailler tôt, il sera néanmoins nécessaire de prendre en compte la pénibilité des tâches accomplies et de le prévoir dans la loi. Evoquant son cas personnel, il a rappelé qu'il a commencé à travailler à quinze ans, en étant à la chaîne et en faisant les trois-huit. Ces conditions de travail déplorables existent toujours malheureusement. Il existe des ouvriers spécialisés modernes, dans les centres d'appel par exemple. Comme l'a montré M. Marcel Trillat dans son très beau documentaire « Les prolos », les conditions de travail peuvent être épouvantables dans des entreprises ultra-modernisées où règnent les robots. M. Pascal Terrasse s'est déclaré favorable à l'amendement et a observé que la validation de certaines annuités se situe au cœur de la réforme des retraites. La validation plutôt que le rachat de ces périodes non travaillées doit être mise en œuvre après de réelles négociations entre les partenaires sociaux. M. Alain Néri a annoncé une chute inévitable du nombre de personnes ayant quarante annuités avant l'âge de soixante ans évalué aujourd'hui à 827 000. En revanche, le nombre des jeunes ayant fait des études longues ne cessera de croître. Les mesures prévues par le projet de loi ne peuvent que déboucher sur des retraites tronquées pour ces populations. Dans ce contexte, la validation des périodes non travaillées s'avère indispensable.

Le rapporteur a précisé qu'aujourd'hui sont prises en charge les périodes de formation continue, de maladie, d'invalidité, de service militaire, de maternité et de congé parental. En matière de chômage indemnisé, une prise en charge existe également ; sous réserve que le fonds de solidarité asséché par le financement incomplet des 35 heures soit crédité. Par ailleurs, le rachat des années d'études sanctionnées par l'obtention d'un examen permettant de passer un concours administratif est désormais possible depuis les négociations du 15 mai. Enfin, il faut rappeler le coût très élevé du financement de tels dispositifs de validation.

La commission a rejeté les amendements.

La commission a examiné six amendements identiques de Mme Jacqueline Fraysse, Mme Marie-George Buffet, M. Frédéric Dutoit, M. François Liberti, M. Maxime Gremetz et Mme Muguette Jacquaint visant à indexer les pensions de retraite du secteur privé et du secteur public sur l'évolution du niveau moyen des salaires bruts.

M. Maxime Gremetz a indiqué qu'il s'agit de réparer les conséquences dramatiques de la loi du 22 juillet 1993, dite « réforme Balladur », comme le seront celles de l'actuel projet de réforme sur le niveau des retraites. Du fait de l'indexation des retraites sur les prix, la part des retraites dans les richesses produites a diminué de 12 %. Par ailleurs, depuis l'époque du gouvernement de M. Raymond Barre, en 1980, de nombreux prélèvements ont été institués sur les retraites, qui représentent annuellement près d'un mois de retraite nette.

Le rapporteur s'est déclaré défavorable à une mesure qui mettrait en péril les comptes du régime général, alors qu'il s'agit de sauvegarder le système des retraites par répartition. Au demeurant, la précédente majorité aurait pu revenir sur les « mesures Balladur » si elle l'avait souhaité.

La commission a rejeté les amendements.

La commission a examiné six amendements identiques de Mme Jacqueline Fraysse, Mme Marie-George Buffet, M. Frédéric Dutoit, M. François Liberti, M. Maxime Gremetz et Mme Muguette Jacquaint visant à asseoir le calcul des pensions de retraite du secteur privé sur les salaires des dix meilleures années cotisées.

M. Maxime Gremetz a déclaré qu'il s'agit là aussi de réparer les dégâts résultant des « mesures Balladur ». M. Alain Néri a souligné que les « mesures Balladur » ont rapproché de nombreux retraités du seuil de pauvreté, d'où son soutien à ces amendements, qui vont dans le sens d'autres propositions du groupe socialiste, telles que l'alignement des plus basses retraites sur le SMIC et la fixation d'un taux minimum de remplacement égal à 75 % du dernier salaire. Revenir sur les « mesures Balladur » sera l'occasion de rouvrir de vraies négociations avec les partenaires sociaux.

Le rapporteur s'est opposé à une mesure qui déséquilibrerait les comptes du régime général.

La commission a rejeté les amendements.

La commission a examiné six amendements identiques présentés par Mme Jacqueline Fraysse, Mme Marie-George Buffet, M. Frédéric Dutoit, M. François Liberti, M. Maxime Gremetz et Mme Muguette Jacquaint tendant à fixer comme base de référence pour le calcul des pensions de retraite du secteur public le dernier traitement perçu.

Après que le rapporteur a rappelé que l'esprit du projet est de prévoir plus d'équité entre le secteur public et le secteur privé, la commission a rejeté les amendements.

La commission a examiné six amendements identiques présentés par Mme Jacqueline Fraysse, Mme Marie-George Buffet, M. Frédéric Dutoit, M. François Liberti, M. Maxime Gremetz et Mme Muguette Jacquaint visant à revaloriser de façon significative les basses pensions.

M. Maxime Gremetz a rappelé que les pensions les plus basses subiront une décote au fil du temps en raison de l'indexation sur les prix. M. Alain Néri a souhaité porter ce plancher au niveau du SMIC net et proposé un sous-amendement en ce sens. Le rapporteur a indiqué que cette demande a été prise en compte sous la négociation et donné un avis défavorable.

La commission a rejeté le sous-amendement ainsi que les amendements.

La commission a examiné six amendements identiques présentés par Mme Jacqueline Fraysse, Mme Marie-George Buffet, M. Frédéric Dutoit, M. François Liberti, M. Maxime Gremetz et Mme Muguette Jacquaint visant à supprimer tout abattement pour carrière incomplète au-delà de la limite d'âge du départ en retraite prévu par le secteur d'activité ou le corps professionnel.

Le rapporteur a indiqué qu'il s'agit d'un système contributif et a émis un avis défavorable.

La commission a rejeté les amendements.

La commission a examiné six amendements identiques présentés par Mme Jacqueline Fraysse, Mme Marie-George Buffet, M. Frédéric Dutoit, M. François Liberti, M. Maxime Gremetz et Mme Muguette Jacquaint visant à pérenniser le régime de retraite des salariés du secteur public.

M. Maxime Gremetz a indiqué qu'il n'y a pas de situation privilégiée des salariés du secteur public et que ces acquis devraient tirer le privé vers le haut.

Après que le rapporteur a indiqué que ces régimes ne sont pas menacés dans leur principe par le projet, la commission a rejeté les amendements.

La commission a examiné six amendements identiques présentés par Mme Jacqueline Fraysse, Mme Marie-George Buffet, M. Frédéric Dutoit, M. François Liberti, M. Maxime Gremetz et Mme Muguette Jacquaint visant à accroître le niveau de pension de retraite des agriculteurs exploitants.

M. Maxime Gremetz a indiqué que cette revalorisation répond à un impératif de justice sociale. M. Alain Néri a souligné que cette progression s'inscrit dans la politique suivie par le précédent gouvernement. Le montant de la pension de retraite a été porté au niveau du minimum vieillesse. La précédente majorité a voté un texte créant une retraite complémentaire des exploitants agricoles qui devrait rentrer en fonction en 2003. Le niveau de 75 % est insuffisant. Il n'y a aucune mesure visant à supprimer les minoration inclues dans le décret pris par M. Philippe Vasseur lorsqu'il était ministre de l'agriculture.

Le rapporteur a indiqué que le texte comprend de nombreuses mesures en faveur des exploitants agricoles et qu'il émettait un avis défavorable.

La commission a rejeté les amendements.

La commission a examiné six amendements identiques de Mme Jacqueline Fraysse, Mme Marie-George Buffet, M. Frédéric Dutoit, M. François Liberti, M. Maxime Gremetz et Mme Muguette Jacquaint visant d'une part à instituer un nouveau mode de calcul du taux de cotisation sociale afin d'abonder le financement des pensions de retraite en encourageant l'emploi et d'autre part à créer une cotisation sociale nouvelle sur les revenus financiers.

M. Maxime Gremetz a estimé que face à la réduction drastique du produit des cotisations sociales, une réforme du financement était urgente. Depuis 25 ans, le niveau des taux des cotisations patronales n'a pas bougé. La taxation devrait concerner les entreprises de spéculation et non les entreprises de main d'œuvre. La financiarisation de l'économie se développe au détriment de l'activité réelle. Le système actuel de financement est fondé sur la répartition des richesses créées principalement par le travail. Le Conseil d'orientation des retraites a estimé que la part des retraites dans le montant total des richesses avait diminué de 10 % en quelques années. Une orientation claire doit maintenant guider le choix de l'assiette des cotisations. Il faut rappeler qu'un million de productifs en plus représente 20 milliards d'euros de recettes en plus. Le montant des exonérations patronales s'accroît régulièrement, comme les profits des grands groupes français ainsi que les rémunérations et indemnités de licenciements de leurs dirigeants. Ces grands groupes investissent à l'étranger et mettent en place des plans de licenciements qui réduisent d'autant le financement de la protection sociale. Les amendements proposent donc d'instaurer une modulation du taux de cotisation sociale en fonction du ratio salaire/valeur ajoutée globale et de créer une cotisation sociale additionnelle sur les revenus financiers des entreprises, des institutions financières et des ménages (hors épargne populaire) à hauteur de la contribution des entreprises. La taxation des produits financiers relève d'un impératif de justice sociale. En effet, le système proposé conduit à faire financer la réforme à 90 % par les salariés et les retraités.

M. Alain Néri a demandé, en application de l'article 43 du Règlement, la vérification du quorum. Le président Jean-Michel Dubernard a indiqué que, compte tenu des dispositions du Règlement, le nombre de commissaires présents demandant le quorum est insuffisant.

Le rapporteur a relevé que les propositions contenues dans les amendements avaient déjà été émises dans le rapport du COR ainsi que dans d'autres ouvrages, notamment celui de M. Michel Rocard. Après avoir indiqué qu'il déposerait un amendement afin que le COR soit chargé d'étudier au fond ces propositions relatives à la création d'« assiettes miraculeuses », il a émis un avis défavorable.

La commission a rejeté les amendements.

La commission a examiné six amendements identiques de Mme Jacqueline Fraysse, Mme Marie-George Buffet, M. Frédéric Dutoit, M. François Liberti, M. Maxime Gremetz et Mme Muguette Jacquaint élargissant l'assiette des cotisations sociales à l'ensemble des éléments de la rémunération du travail.

M. Maxime Gremetz a précisé que ces amendements ont notamment pour objectif de soumettre les stock options à cotisations sociales, afin de contrecarrer la tendance des entreprises à accroître le nombre de primes et avantages financiers qui ne relèvent pas de prélèvements sociaux bénéficiant à la sécurité sociale.

Après que le rapporteur a donné un avis défavorable, la commission a rejeté les amendements.

La commission a rejeté six amendements identiques de Mme Jacqueline Fraysse, Mme Marie-George Buffet, M. Frédéric Dutoit, M. François Liberti, M. Maxime Gremetz et Mme Muguette Jacquaint disposant que la part patronale dans les cotisations sociales est revalorisée, d'un montant fixé par décret, pour rattraper sa parité avec la part salariale sur une base 100 en 1979.

La commission a examiné six amendements identiques de Mme Jacqueline Fraysse, Mme Marie-George Buffet, M. Frédéric Dutoit, M. François Liberti, M. Maxime Gremetz et Mme Muguette Jacquaint proposant d'accompagner la réforme structurelle du système de retraite par une réforme du crédit aux entreprises et une réorientation des aides publiques à l'emploi.

M. Maxime Gremetz a souligné que ces amendements tendent à élaborer les conditions concrètes de mise en œuvre d'une vraie réforme du financement de la sécurité sociale, en favorisant les créations d'emplois et l'activité productive des entreprises.

Après que le rapporteur a donné un avis défavorable, la commission a rejeté les amendements.

Répondant aux protestations de M. Maxime Gremetz sur l'organisation des travaux de la commission, M. Yves Bur a considéré que l'opposition a très largement disposé de la possibilité de s'exprimer puisque elle a défendu vingt-et-un amendements pendant cinq heures. Elle a donc eu tout loisir de développer des propositions, qui sonnent comme autant de regrets par rapport aux réformes qu'elle n'a pas su réaliser lorsqu'elle était au pouvoir. On doit néanmoins souligner qu'un grand nombre des amendements présentés sont irrecevables au regard de l'article 40 de la Constitution.

TITRE IER

DISPOSITIONS GÉNÉRALES

Article 1er

Répartition

Cet article affirme l'attachement de la Nation française à son système de retraite par répartition

Dans la phrase unique qui constitue cet article, trois notions ou valeurs sont évoquées.

- Celle de Nation qui réaffirme, au seuil d'une réforme difficile, que c'est une communauté soudée par des choix communs qui désire demeurer ancrée dans une œuvre bâtie au lendemain de la Seconde Guerre mondiale. De plus, cette réaffirmation est solennelle : cet élément, emprunté à la rhétorique, veut souligner la gravité du moment.

- Celle de répartition, consubstantielle à celle de pacte. De fait, un double pacte de solidarité caractérise les systèmes de retraite par répartition. Un pacte entre les générations, puisque les régimes redistribuent au cours d'une année, sous forme de pensions versées aux retraités, les cotisations encaissées la même année auprès des actifs. Un pacte à l'intérieur d'une même génération, dans la mesure où ils organisent de larges redistributions entre les différentes catégories socioprofessionnelles et les sexes. Ces principes de solidarité s'exercent à la fois au sein des régimes, entre les régimes, et, au-delà des régimes, au niveau national. A cet égard, l'exposé des motifs mentionne l'article L. 111-1 du code de la sécurité sociale dont le premier alinéa dispose que l'organisation de la sécurité sociale est fondée sur le principe de solidarité nationale.

- Celle de pacte, l'article plaçant la répartition « au cœur du pacte social ». Ce choix révèle une certaine prudence rédactionnelle, puisque, nonobstant la gravité du ton, elle se limite à cette notion de pacte. Plus aventureux, le Conseil d'orientation des retraites a intitulé son rapport du 6 décembre 2001 : « Retraites : renouveler le contrat social entre les générations ». Il n'en est pas moins vrai que cette touche rousseauiste aurait pu paraître excessive dans une rédaction qui veut faire appel au sens de la responsabilité des Français, cela au-delà de toute préoccupation politique.

*

La commission a examiné un amendement de suppression de l'article présenté par Mme Jacqueline Fraysse.

Mme Muguette Jacquaint a jugé que le projet, tout en prétendant consolider le régime de répartition, ouvre la porte à la capitalisation. L'amendement vise donc à réaffirmer la volonté du groupe communiste de lutter contre la retraite par capitalisation, ce qui avait déjà été le cas avec l'abrogation de la « loi Thomas ».

Après que le rapporteur a émis un avis défavorable, la commission a rejeté l'amendement.

La commission a ensuite examiné, en discussion commune, dix amendements présentés par M. Pascal Terrasse.

M. Alain Néri a exposé que les amendements examinés visent à réaffirmer avec force le principe de la répartition, qui avait été un choix du Conseil national de la résistance et qui demeure au cœur du pacte social et républicain. Il s'agit d'aménager un haut niveau de pension et de garantir ce niveau, ce dont la capitalisation est incapable, comme le prouve l'effondrement récent des cours de la bourse. Le système français est un système d'assurance collective où les cotisations des salariés financent les retraites d'aujourd'hui et permettent d'acquérir des droits. L'objectif essentiel du système de la retraite par répartition est d'assurer un haut niveau de pension, ce que ne fait pas le projet du gouvernement. Faute d'un engagement précis sur le niveau des retraites, il pousse insidieusement les Français vers des systèmes de financement individuels et privés, où chaque salarié cotise aujourd'hui pour sa retraite de demain, selon ses propres moyens et capacités d'épargne, ce qui est de nature à créer des discriminations.

Après avoir précisé que les trois premiers articles du projet répondent à la priorité de la sauvegarde du régime de retraite par répartition, le rapporteur a émis un avis défavorable.

La commission a rejeté les amendements.

La commission a ensuite examiné un amendement de Mme Jacqueline Fraysse visant à réaffirmer le rejet de la capitalisation comme mode constitutif de pension de retraite.

Mme Jacqueline Fraysse a considéré que le projet est loin de sauver la retraite par répartition. En prévoyant la possibilité de cumuler un emploi et une retraite, il démontre que les pensions ne pourront couvrir les besoins des retraités. Le gouvernement entend développer l'épargne-retraite, ce qui est une porte ouverte aux fonds de pensions. M. Alain Néri s'est associé à l'amendement en déclarant qu'il fallait garantir non seulement un haut niveau de pension mais aussi la possibilité de partir à soixante ans avec une retraite à taux plein.

Après que le rapporteur a émis un avis défavorable, la commission a rejeté l'amendement.

La commission a ensuite rejeté un amendement de Mme Martine Billard visant à souligner l'intérêt du système de retraite par répartition.

La commission a adopté l'article 1er sans modification.

Après l'article 1er

La commission a examiné, en discussion commune, neuf amendements de M. Pascal Terrasse visant à garantir le système de retraite par répartition.

M. Alain Néri a souligné qu'une politique favorisant le plein emploi était indispensable. Une bonne formation initiale et une formation continue tout au long de la vie, même pour les salariés âgés, sont nécessaires.

Mme Danièle Hoffman-Rispal a considéré qu'en tablant sur une amélioration très forte du marché de l'emploi, le ministre fait un pari dangereux. Il a déclaré qu'il se donne un délai de cinq ans avant d'imposer aux entreprises des mesures drastiques afin qu'elles gardent leurs salariés âgés. C'est mal connaître le monde de l'entreprise, et notamment des PME. Actuellement, à cinquante-cinq ans un salarié sur deux est sans emploi. La Finlande, qui a mis en place des mesures incitatives importantes, a plutôt réussi dans ce domaine.

Le président Jean-Michel Dubernard a rappelé que, comme l'ont souligné les membres de la commission des affaires sociales du Parlement finlandais reçus par la commission le 20 mai dernier, l'âge de la retraite a été repoussé à soixante-huit ans en Finlande.

Mme Catherine Génisson a indiqué que les nombreuses créations d'emploi intervenues entre 1997 et 2002 ont permis d'équilibrer les comptes sociaux. Il faut lutter contre l'emploi précaire, qui concerne particulièrement les femmes. Celles-ci perçoivent ensuite des retraites d'un montant réduit. L'important est de créer des embauches de jeunes sur des emplois stables exigeant des salariés qualifiés.

Mme Muguette Jacquaint a souligné que le travail précaire s'est énormément développé ces dernières années. Or le texte encourage la précarité : le cumul de l'emploi et d'un travail à temps partiel permettra de percevoir une retraite décente. L'exemple de l'entreprise Alsthom est significatif : des techniciens ou des ingénieurs de quarante-sept ans, considérés comme insuffisamment qualifiés, sont mis à la retraite anticipée ou licenciés.

La commission a rejeté les amendements.

La commission a examiné un amendement de M. Jean-Luc Préel précisant que le gouvernement déposera au Parlement, avant le 31 décembre 2004, un rapport sur la possibilité de faire évoluer le système de retraite par annuité vers un régime par point et de donner au conseil d'administration de la CNAV la compétence de fixer la valeur du point du régime de base.

M. Jean-Luc Préel a réaffirmé son soutien au projet de loi présenté par le gouvernement. En effet, celui-ci introduit une plus forte démocratie sociale et laisse aux Français le choix de leur retraite. Cet amendement a justement pour but d'augmenter encore la souplesse de la gestion des retraites, en mettant en place un système par points et en recourant à un véritable paritarisme.

En tant que président du conseil de surveillance de la CNAV, M. Denis Jacquat a indiqué que la mise en place d'un système par points n'irait pas sans poser un certain nombre de difficultés notamment pour la partie non contributive du système de retraite. De plus, le gouvernement ne lui semble pas être le mieux habilité pour rédiger un tel rapport, et il conviendrait plutôt de confier cette mission au COR.

Après avoir approuvé les propos de M. Denis Jacquat et rappelé que le système par points ne garantit pas la prise en compte des accidents de carrière, le rapporteur a émis un avis défavorable.

La commission a rejeté l'amendement.

Article 2

Contributivité

Dans les régimes de retraite par répartition, les cotisations versées par les actifs sont transférées simultanément vers les retraités sous forme d'allocations vieillesse. Par comparaison, la capitalisation consiste à placer les cotisations versées par un assuré sur un compte individuel rémunéré. A la clôture du compte, l'assuré perçoit le capital ainsi épargné, augmenté des intérêts, ou bien une rente viagère.

La phrase unique qui compose cet article affirme le droit de tout retraité à percevoir une allocation de retraite en rapport avec les revenus qu'il a tirés de son activité. Cette rédaction ne doit pas être extraite de son contexte, constitué de l'article 1er du projet qui réaffirme le choix de la répartition au cœur du pacte social français et de l'article 3 qui pose le principe de l'équité entre les assurés. Aussi, cette phrase ne revient-elle pas à établir une relation nécessaire entre le montant des revenus tirés de l'activité rémunérée et le montant de l'allocation de retraite : une telle lecture constituerait un faux sens. Il s'agit de rappeler les valeurs de travail et de solidarité. De fait, la répartition a pour socle, à travers le travail, la cotisation. C'est pour cela notamment, que le projet s'inscrit dans une démarche tendant à restaurer le taux d'activité des salariés âgés de plus de cinquante ans. Par ailleurs, ce rappel à la contributivité n'est pas exclusif du principe de solidarité en vertu duquel des allocations non contributives sont servies dans un certain nombre de cas.

*

La commission a examiné six amendements identiques de Mme Jacqueline Fraysse, Mme Marie-George Buffet, M. Frédéric Dutoit, M. François Liberti, M. Maxime Gremetz et Mme Muguette Jacquaint de suppression de l'article.

Mme Jacqueline Fraysse a expliqué que cet article n'a pas lieu d'être puisque le droit qu'il reconnaît à tout retraité d'avoir une allocation en rapport avec ses revenus est contredit par toute la suite du projet de loi.

M. Maxime Gremetz a complété cette argumentation en précisant que l'application du système de décote va conduire, en dix ans, à une baisse considérable du taux de remplacement : le droit affirmé par l'article est donc illusoire.

Après que le rapporteur s'est opposé à la suppression de l'article, qui se contente d'affirmer un droit, la commission a rejeté les amendements.

La commission a examiné en discussion commune deux amendements de M. Pascal Terrasse proposant une nouvelle rédaction de l'article : le premier précisant que le niveau des pensions doit être garanti par un taux élevé de remplacement, le second disposant que la pension doit garantir le pouvoir d'achat des retraités.

M. Pascal Terrasse a suggéré, pour garantir le maintien du pouvoir d'achat des retraites que, à l'image de la conférence annuelle sur les salaires, soit organisée une conférence annuelle sur les retraites qui fera le bilan de la croissance et proposera une revalorisation des pensions en conséquence. Cela permettrait de sortir du débat récurrent de l'indexation.

Le rapporteur s'est opposé à l'amendement en rappelant que la commission de garantie des retraites instituée par le projet de loi est d'ores et déjà destinée à garantir, en toute transparence, le maintien du pouvoir d'achat des retraites. Par ailleurs, on peut quand même rappeler que le pouvoir d'achat du minimum contributif n'a jamais été aussi peu revalorisé que sous la précédente législature.

La commission a rejeté les deux amendements.

La commission a examiné six amendements identiques de Mme Jacqueline Fraysse, Mme Marie-George Buffet, M. Frédéric Dutoit, M. François Liberti, M. Maxime Gremetz et Mme Muguette Jacquaint substituant le mot « pension » au mot « allocation ».

Mme Jacqueline Fraysse a considéré qu'une allocation constitue une aide, une prestation, ce qui est très différent d'une pension de retraite, qui est un droit constitué par le travail, un salaire différé.

Après que le rapporteur a observé que le terme de « pension » n'est utilisé que par le code des pensions civiles et militaires, c'est-à-dire pour les retraites de fonctionnaires, et que le code de la sécurité sociale parle bien quant à lui « d'allocation » pour le régime général, la commission a rejeté les amendements.

La commission a examiné six amendements identiques de Mme Jacqueline Fraysse, Mme Marie-George Buffet, M. Frédéric Dutoit, M. François Liberti, M. Maxime Gremetz et Mme Muguette Jacquaint substituant le mot « proportionnelle » aux mots « en rapport ».

Mme Jacqueline Fraysse a considéré que la retraite est un dû et qu'elle doit être strictement « proportionnelle » et non pas seulement « en rapport » avec les revenus du salarié. M. Alain Néri a approuvé l'amendement en observant que le droit à la retraite doit comprendre non seulement la proportionnalité aux revenus mais également la garantie d'un haut niveau de remplacement. Il ne doit donc pas y avoir de retraite inférieure au SMIC. M. Maxime Gremetz a affirmé que la retraite n'est pas octroyée. Il s'agit d'un dû qui dépend du travail, du salaire et de la formation du salarié. La notion de proportionnalité est donc très importante.

Le rapporteur a donné un avis défavorable, en observant qu'en ce qui concerne le taux de remplacement, l'article 4 du projet, fortement modifié après la négociation sociale du 15 mai, garantie un minimum contributif à 85 % du SMIC.

La commission a rejeté les amendements.

La commission a examiné six amendements identiques de Mme Jacqueline Fraysse, Mme Marie-George Buffet, M. Frédéric Dutoit, M. François Liberti, M. Maxime Gremetz et Mme Muguette Jacquaint validant les périodes de formation initiale ou continue pour le calcul des annuités de cotisation.

Mme Muguette Jacquaint a constaté que tout le monde s'accorde à considérer que la formation, qu'elle soit initiale ou continue, est une nécessité sociale, une plus value pour le salarié et pour l'entreprise. Mais encore faut-il que ces périodes de formation soient prises en compte pour le calcul de la retraite. M. Alain Néri a approuvé l'amendement.

Le rapporteur a rappelé que le texte comporte des avancées importantes en matière de formation professionnelle et de validation de certaines périodes non travaillées, notamment pour les emplois à temps partiel et les assistantes maternelles. Les préoccupations des amendements sont donc d'ores et déjà prises en compte par le texte.

La commission a rejeté les amendements.

Elle a également rejeté six amendements identiques de Mme Jacqueline Fraysse, Mme Marie-George Buffet, M. Frédéric Dutoit, M. François Liberti, M. Maxime Gremetz et Mme Muguette Jacquaint, ayant le même objet que les précédents, à une variante rédactionnelle près.

La commission a examiné un amendement de M. Jean-Luc Préel instituant un système de retraite par points, dont la valeur est définie par les conseils d'administration des caisses de retraite.

M. Jean-Luc Préel a estimé que cet amendement présente deux avantages. Il permet tout d'abord de responsabiliser les partenaires sociaux en leur donnant un vrai rôle en matière de retraite et en instituant un véritable paritarisme, qui n'existe pas aujourd'hui. Il autorise par ailleurs la mise en place d'une retraite à la carte en permettant une bonification pour les personnes qui dépassent l'âge légal, celles ayant exercé des métiers pénibles et les mères de famille. Il s'agit donc d'un système plus simple et plus souple, qui assure le maintien d'un haut niveau de pension puisque ce serait les partenaires sociaux qui détermineraient chaque année la valeur du point. Quant à l'objection du rapporteur au sujet de la moins bonne compensation dans un tel système des « accidents de la vie », celle-ci relève de la solidarité nationale, c'est à dire du Fonds de solidarité vieillesse (FSV). Il n'y a donc pas de différence entre un système par points et un système par annuités.

M. René Couanau a jugé l'amendement intéressant et a souhaité que l'on rediscute de ces propositions dans quelques années. M. Maxime Gremetz s'est félicité que M. Jean-Luc Préel exprime tout haut ce que beaucoup pensent tout bas sur certains bancs, à savoir qu'il faut abandonner l'actuel système de retraite. La retraite par points, cela signifie qu'il n'y a plus d'âge légal et plus de répartition, chacun étant dans une logique de calcul personnel. L'amendement ne va cependant pas au bout de sa logique et devrait normalement prévoir la mise en place de fonds de pensions ! M. Pascal Terrasse s'est également opposé à l'amendement, qui rompt avec le système de retraite par répartition. Il reflète assez clairement les préconisations ultra-libérales du MEDEF.

M. Jean-Luc Préel a regretté que son amendement soit caricaturé. Un système de retraite par points ne remet nullement en cause le principe de la répartition, puisqu'il s'inscrit pleinement dans un mécanisme de solidarité entre les générations et entre les régimes. Le système par points permet simplement plus de liberté et de souplesse et donne un rôle plus important aux partenaires sociaux qui, aujourd'hui, ne sont quasiment responsables de rien au sein de la CNAV. Il est quand même étonnant que les autres commissaires, notamment de l'opposition, ne soient pas d'accord sur ce point. M. Pascal Terrasse s'est dit en accord avec la nécessité de donner un rôle plus important aux partenaires sociaux mais reste résolument opposé à une modification des modalités actuelles de la répartition et au passage à une logique contributive. Cela rompt avec l'esprit de 1945. Par contre, le COR pourrait utilement étudier et chiffrer les conditions de passage d'un système à un autre et, ainsi, éclairer le débat. M. Maxime Gremetz a également approuvé la nécessité de donner un pouvoir plus important aux partenaires sociaux et a appelé à de véritables avancées en matière de démocratie sociale.

Le rapporteur a reconnu que l'amendement ouvre un vrai débat. Le système de retraite à points comporte des avantages et des inconvénients mais peut tout à fait s'intégrer dans un système par répartition. Cependant, le choix du gouvernement de maintenir le système actuel répond manifestement au souhait de la majorité des partenaires sociaux et des partis politiques. En ce qui concerne les « accidents de la vie », le système actuel par annuité permet d'écarter les plus mauvaises années, alors que ce n'est pas le cas dans un système par points : la prise en compte est donc effectivement moins bonne. Quant au rôle des partenaires sociaux au sein du conseil d'administration de la CNAV, l'article 14 du projet prévoit de le renforcer puisqu'ils devront se prononcer sur l'équilibre financier du régime.

La commission a rejeté l'amendement.

Elle a ensuite adopté l'article 2 sans modification.

Après l'article 2

La commission a rejeté deux amendements de Mme Martine Billard, visant l'un à augmenter de 0,34 % par an pendant dix ans le taux de cotisation patronale vieillesse, l'autre à exclure les entreprises de plus de 50 salariés des exonérations de cotisations sociales prévues dans le dispositif « contrat-jeunes ».

La commission a examiné un amendement de M. Pascal Terrasse disposant que la garantie du système de retraite par répartition implique la mise en œuvre d'une politique de valorisation du travail et d'augmentation des salaires directs, notamment des bas salaires.

M. Pascal Terrasse a observé que l'on ne peut réformer le système des retraites sans tenir compte de la situation économique générale. Le gouvernement précédent a su créer 1,7 million d'emplois, mais depuis un an le chômage augmente à nouveau, d'où la nécessité d'une politique vigoureuse de l'emploi, passant en particulier par l'augmentation des moyens consacrés à l'éducation nationale et à la recherche. M. Alain Néri a insisté sur les impératifs de valorisation du travail et de proportionnalité des retraites aux salaires, l'un et l'autre devant permettre aux retraités de vivre dans la dignité et de participer aux fruits de la croissance. M. Maxime Gremetz a indiqué que le salaire médian n'a augmenté que de 0,03 % depuis un an. On voit bien que les profits et les salaires des PDG explosent, tandis que ceux des autres salariés diminuent en valeur constante. L'amendement est donc parfaitement justifié.

Le rapporteur a émis un avis défavorable. La politique du gouvernement actuel prend en compte la nécessité d'améliorer la situation des salariés, en particulier de ceux qui perçoivent de bas salaires. Une augmentation sans précédent du SMIC a été décidée et le présent projet de loi propose une importante revalorisation des plus basses retraites. A contrario, c'est la réduction du temps de travail voulue par le gouvernement précédent qui va à l'encontre de la valorisation du travail en ayant pour conséquence le développement d'une culture de « non-travail » et le blocage des bas salaires.

La commission a rejeté l'amendement ainsi qu'un amendement de Mme Martine Billard tendant à instituer une contribution sociale assise sur la valeur ajoutée.

La commission a examiné un amendement de M. Pascal Terrasse affirmant le principe de solidarité comme l'un des fondements du système de retraite français.

Tout en considérant que les retraites doivent rester principalement financées par les cotisations sociales, afin de maintenir le lien au travail, M. Pascal Terrasse a indiqué que d'autres financements sont envisageables, tels que la CSG ou le produit des baisses d'impôts qui seraient abandonnées. Par ailleurs, il conviendrait de revaloriser les minima de pensions garantis afin de revenir à l'esprit de la retraite à soixante ans instituée par M. Pierre Mauroy.

Rappelant l'attachement du groupe UMP au principe de la répartition, M. Denis Jacquat a estimé que la sauvegarde de ce principe est incompatible avec le développement de ressources non pérennes. S'agissant des minima de pensions, le projet relève considérablement la retraite garantie aux smicards ; le minimum contributif n'a pas été amélioré depuis longtemps, ce qui l'avait amené à être inférieur au minimum vieillesse, situation tout à fait anormale qui va être corrigée. Par ailleurs, la situation spécifique des handicapés vieillissants sera prise en compte grâce à des amendements parlementaires. Enfin, le projet améliore substantiellement la situation des conjoints survivants, même si des problèmes subsistent.

M. Maxime Gremetz a observé que le discours sur les ressources non pérennes régulièrement utilisé par l'ancienne opposition, devenue majorité depuis, à propos du fonds de réserve des retraites et du FOREC est réversible. De son point de vue, les ressources les plus pérennes sont celles qui sont assises sur les richesses produites dans l'entreprise. Mme Muguette Jacquaint a souligné la constance des positions du groupe communiste au sujet de la réforme du financement de la sécurité sociale. Comme toujours, la majorité actuelle refuse de taxer les énormes revenus financiers, alors même que les entreprises passent des provisions pour licenciement gigantesques.

Le rapporteur a considéré que la situation actuelle de la sécurité sociale résulte essentiellement de la politique du gouvernement précédant, lequel a gaspillé les fruits de la croissance, multiplié les réformes non financées, comme l'institution de la couverture maladie universelle (CMU) et de l'allocation personnalisée d'autonomie (APA), et siphonné le fonds de solidarité vieillesse (FSV) au profit du FOREC. Il a donc émis un avis défavorable à l'amendement.

La commission a rejeté l'amendement.

Article 3

Equité

La phrase unique qui compose cet article évoque le principe d'une certaine justice entre les assurés au regard de la retraite. Ce principe de justice doit concerner tous les assurés quelles que soient les activités qu'ils ont occupées au cours de leur vie professionnelle et quel que soit leur régime d'affiliation. L'exposé des motifs indique qu'il s'agit de l'égalité de traitement des assurés ayant relevé de différents régimes.

Cette égalité de traitement peut au moins concerner deux cas de figure : l'égalité au regard de la cotisation et de la durée d'assurance ; l'égalité entre les assurés ayant cotisé dans un seul régime (unipensionnés) et ceux qui ont cotisé dans plusieurs régimes (pluripensionnés). Dans les deux cas, le projet de loi veut répondre à cette exigence. Il organise un certain nombre de convergences entre les règles applicables dans le régime général et celles applicables dans la fonction publique ou d'autres régimes (professions libérales, exploitants agricoles...). Il unifie les règles applicables, dans le domaine du calcul du montant des pensions, notamment pour les assurés unipensionnés et les assurés pluripensionnés.

*

La commission a examiné six amendements identiques de suppression de l'article présentés par Mme Jacqueline Fraysse, Mme Marie-George Buffet, M. Frédéric Dutoit, M. François Liberti, M. Maxime Gremetz et Mme Muguette Jacquaint.

M. Maxime Gremetz a considéré que l'article en question nie la spécificité des régimes en procédant à un « égalitarisme par le bas », loin de la préoccupation d'égalité. Or, les régimes dits « spéciaux » se sont constitués dans des circonstances historiques particulières au sein de corporations exerçant des métiers pénibles. Cette spécificité justifiée par la pénibilité ne doit pas être remise en cause, d'autant plus que ces régimes ne connaissent pas de problèmes démographiques majeurs.

Après que le rapporteur a émis un avis défavorable, la commission a rejeté les amendements.

La commission a ensuite examiné, en discussion commune, cinq amendements de M. Pascal Terrasse.

M. Pascal Terrasse a indiqué que le premier amendement concerne les régimes spéciaux. Il est impératif de tenir compte de la spécificité de ces régimes. Ces régimes n'ont pas une tendance structurelle au déficit, à l'inverse de certains régimes, comme le régime des agriculteurs par exemple. Il est indispensable que le rapporteur précise si ces régimes sont concernés par le projet. Le deuxième amendement propose de renvoyer la réforme à la négociation, en prenant mieux en compte la pénibilité de certains métiers. Le troisième amendement concerne l'iniquité née des différentiels de durée de vie entre les salariés, selon qu'ils sont ouvriers ou cadres supérieurs. L'amendement suivant vise à faire prendre en compte les périodes d'inactivité et de formation. Enfin, le dernier amendement concerne l'égalité entre les hommes et les femmes : en effet, le projet va particulièrement nuire aux femmes, notamment celles qui ont élevé des enfants.

Mme Hélène Mignon a considéré qu'il s'agit de définir ce que la société souhaite réserver aux salariés après leur vie professionnelle. Après avoir exercé un métier souvent pénible, ces salariés devraient se voir offrir la possibilité d'avoir une véritable vie sociale.

Mme Marie-Françoise Clergeau a souligné que la situation des femmes se dégrade considérablement. Ainsi, seules 39 % des femmes disposent du nombre de trimestres suffisant pour prendre leur retraite à taux plein. Le niveau des salaires est souvent réduit. L'allongement de la durée de cotisation va dégrader encore plus leur situation.

Mme Muguette Jacquaint s'est déclarée en accord avec les recommandations de la délégation aux droits des femmes, qui ne peut néanmoins donner qu'un avis. Les femmes travaillent souvent à temps partiel, ce qui ampute le montant de leur retraite. La conférence de la famille a étudié une mesure permettant aux femmes d'interrompre leur activité professionnelle pendant trois ans pour élever un enfant : cette mesure sera-t-elle compatible avec le projet du gouvernement ? Il est très probable que de nombreuses femmes seront contraintes de prendre un travail à temps partiel au moment de leur départ à la retraite pour compléter leurs revenus.

Mme Marie-Renée Oget s'est interrogée sur l'absence de prise en compte par le projet de la question du vieillissement prématuré des personnes handicapées au travail.

M. Alain Néri a souligné que les amendements proposés visent à prendre en compte la situation des plus modestes. La pénibilité de certains métiers conduit souvent à l'usure prématurée des personnes. Est-il vraiment raisonnable de demander à ces personnes d'entamer une deuxième carrière ?

M. Denis Jacquat a rappelé que deux mots guident le projet : d'une part la pérennité et d'autre part l'équité, notamment entre les générations. L'augmentation de la durée de vie s'est accompagnée du recul de l'âge où intervient l'incapacité. Dès lors, l'augmentation de la durée de la cotisation apparaît comme la moins mauvaise solution, comme le montrent les exemples étrangers et les travaux du conseil d'orientation des retraites. En outre, le facteur de la pénibilité est inscrit dans le texte.

Le rapporteur a d'abord précisé que les régimes spéciaux ne sont pas concernés par la réforme, qui par ailleurs prend en compte la pénibilité. On peut souligner que les professeurs sont ceux qui ont l'espérance de vie la plus longue. En outre, le texte prend en compte les périodes d'inactivité. S'agissant de la situation des personnes handicapées, il en sera tenu compte par des amendements. De plus, le gouvernement a annoncé le dépôt du texte relatif au handicap.

Après que le rapporteur a émis un avis défavorable, la commission a rejeté les amendements.

La commission a examiné six amendements de Mme Jacqueline Fraysse, Mme Marie-George Buffet, M. Frédéric Dutoit, M. François Liberti, M. Maxime Gremetz et Mme Muguette Jacquaint visant à substituer aux mots « doivent pouvoir bénéficier », le mot « bénéficient ».

Mme Jacqueline Fraysse a précisé qu'il faut faire passer dans la réalité les affirmations de principe du projet de loi. La retraite est un droit acquis par les cotisations des salariés et non pas un droit hypothétique.

Le rapporteur s'est déclaré défavorable à l'amendement car en droit l'indicatif vaut impératif.

La commission a rejeté les amendements.

La commission a examiné un amendement de Mme Martine Billard visant à faire prendre en compte la pénibilité des activités professionnelles par le système des retraites.

Mme Martine Billard a indiqué que le projet de loi n'évoque dans aucun article la notion de pénibilité ; il est d'ailleurs probable que le gouvernement sera obligé de pallier cette carence par la voie d'un amendement. Il n'est pas juste de lier systématiquement espérance de vie et pénibilité au travail. Si la notion de seconde carrière ne doit pas être rejetée systématiquement, elle est néanmoins parfois inenvisageable, par exemple pour des caissières de supermarché ou des coiffeuses auxquelles on ne voit vraiment pas quelle seconde carrière pourrait être offerte. Introduire la notion de pénibilité en définissant ses critères dans la loi constituerait une véritable avancée. Mme Muguette Jacquaint a confirmé qu'il est irréaliste d'envisager une seconde carrière pour des métiers aussi pénibles que le bâtiment par exemple où les salariés arrivent en fin de carrière dans un état d'épuisement physique et psychique total.

Le rapporteur s'est déclaré défavorable à l'amendement, indiquant que l'article 12 du projet apporte des précisions sur la pénibilité.

La commission a rejeté l'amendement.

La commission a examiné six amendements identiques de précision rédactionnelle présentés par Mme Jacqueline Fraysse, Mme Marie-George Buffet, M. Frédéric Dutoit, M. François Liberti, M. Maxime Gremetz et Mme Muguette Jacquaint.

Mme Jacqueline Fraysse a indiqué que les salariés relèvent d'un régime de retraite et n'en dépendent pas. M. Pascal Terrasse a soutenu l'amendement car cette précision rédactionnelle renforce le fond de l'article.

Considérant que le terme proposé est juridiquement plus approprié, le rapporteur s'est déclaré favorable aux amendements, qui ont été adoptés par la commission.

La commission a examiné un amendement de Mme Paulette Guinchard-Kunstler visant à faire reconnaître la pénibilité de certains métiers par l'attribution d'une bonification de la durée des années d'assurance.

Mme Marie-Renée Oget a estimé que le projet de loi doit affirmer la reconnaissance de la pénibilité au travail, ce qui n'est pas le cas. Par exemple, les personnes handicapées vieillissent plus vite et souffrent de fatigue physique plus précoce que les autres salariés. M. Pascal Terrasse a expliqué que le mot pénibilité apparaît dans l'exposé des motifs du projet mais pas dans les articles, ce qui constitue un recul par rapport au texte initial qui obligeait les partenaires sociaux à négocier sur ce point dans un délai de trois ans. Cette obligation de négocier doit figurer dans la loi, ce qui ne ferait que prolonger la loi de 1975 prévoyant des retraites anticipées pour les travailleurs manuels. La notion de pénibilité concerne aujourd'hui au moins deux millions de personnes.

M. Denis Jacquat a précisé qu'il est fait référence à la pénibilité dans l'article 12 du projet de loi. M. Georges Colombier a considéré qu'il est impossible de définir la notion de pénibilité à l'échelle nationale. Il faut laisser ce soin aux branches professionnelles. Il existe d'ailleurs des métiers pénibles dans les activités de service et pas seulement dans les activités manuelles.

Mme Martine Billard a contesté que le concept de pénibilité figure dans le projet, l'article 12 ne prenant en compte cette notion que dans le cadre du taux de cotisation. A la pénibilité physique il faut ajouter la pénibilité liée à la tension nerveuse et aux exigences de performance, par exemple dans le secteur de l'informatique.

M. Alain Néri a admis la difficulté qui existerait à vouloir énumérer dans la loi les métiers pénibles, d'autant qu'il n'est pas question de porter des jugements de valeur sur le travail des autres. L'amendement propose donc légitimement d'ouvrir les négociations entre les partenaires sociaux afin de déterminer les degrés de pénibilité dans chaque métier.

Le rapporteur s'est déclaré défavorable à l'amendement tout en reconnaissant qu'il s'agit d'une question importante et qu'il faut tendre vers une redéfinition de la pénibilité.

La commission a rejeté l'amendement.

Elle a également rejeté un amendement de Mme Paulette Guinchard-Kunstler visant à accorder des bonifications aux personnes handicapées pour leur permettre de partir plus tôt à la retraite.

La commission a adopté l'article 3 ainsi modifié.

Après l'article 3

La commission a rejeté un amendement de Mme Paulette Guinchard-Kunstler visant à accorder une bonification de la durée des années d'assurance pour tous les métiers pénibles.

Elle a examiné un amendement de M. Jean-Luc Préel visant à introduire l'extinction progressive des régimes spéciaux de retraite avec le maintien des droits acquis.

M. Claude Leteurtre a précisé qu'il s'agit d'organiser une sortie « en sifflet » des régimes spéciaux dont les nouveaux actifs recrutés ne pourront plus se prévaloir.

M. Alain Néri a vivement protesté, constatant que cet amendement est l'aveu - comme d'ailleurs les salariés l'ont bien compris - de la volonté de s'attaquer aux régimes spéciaux, contrairement aux affirmations contraires réitérées par le gouvernement.

Le rapporteur s'est déclaré défavorable à l'amendement puisque dans un esprit de pragmatisme et d'efficacité le gouvernement a choisi de ne pas impliquer les régimes spéciaux dans le champ du projet de loi.

La commission a rejeté l'amendement.

Avant l'article 4

La commission a examiné six amendements identiques de Mme Jacqueline Fraysse, Mme Marie-George Buffet, M. Frédéric Dutoit, M. François Liberti, M. Maxime Gremetz et Mme Muguette Jacquaint créant une cotisation sociale additionnelle assise sur les revenus financiers et à appliquer un même niveau de contribution à tous les revenus.

Mme Jacqueline Fraysse a indiqué qu'il est légitime de faire contribuer les revenus financiers au financement des retraites au même titre que les revenus du travail. Cette disposition devrait contribuer à orienter les investissements des entreprises vers les investissements productifs et la création d'emplois et non plus vers la spéculation boursière. Elle a regretté que cette mesure d'élémentaire justice n'ait pas été engagée par le précédent gouvernement.

Le rapporteur s'étant déclaré défavorable, la commission a rejeté les amendements.

La commission a examiné six amendements identiques de Mme Jacqueline Fraysse, Mme Marie-George Buffet, M. Frédéric Dutoit, M. François Liberti, M. Maxime Gremetz et Mme Muguette Jacquaint réformant l'assiette des cotisations au bénéfice des entreprises à fort taux de main d'œuvre.

Mme Jacqueline Fraysse a estimé indispensable d'augmenter la contribution des entreprises hautement capitalistiques afin de mettre un frein à la spéculation financière et de favoriser réellement des créations d'emplois. Cette contribution fournira des ressources nouvelles et pérennes à l'assurance vieillesse.

Suivant l'avis défavorable du rapporteur, la commission a rejeté les amendements.

La commission a examiné six amendements identiques de Mme Jacqueline Fraysse, Mme Marie-George Buffet, M. Frédéric Dutoit, M. François Liberti, M. Maxime Gremetz et Mme Muguette Jacquaint supprimant les dispositions législatives qui déconnectent les exonérations de charges patronales de l'obligation faite à l'employeur d'engager et de conclure les négociations sur la réduction du temps de travail.

Tout en jugeant contestable d'exonérer les entreprises des charges patronales en vue d'une négociation sur la réduction du temps de travail, Mme Muguette Jacquaint a considéré qu'il est inadmissible d'accepter une exonération des charges patronales sans contrepartie en termes de créations d'emplois.

Le rapporteur a rappelé que les exonérations de charges patronales constituent un dispositif très important de la politique de l'emploi et existaient bien avant la mise en place des trente-cinq heures.

La commission a rejeté les amendements.

La commission a examiné six amendements identiques de Mme Jacqueline Fraysse, Mme Marie-George Buffet, M. Frédéric Dutoit, M. François Liberti, M. Maxime Gremetz et Mme Muguette Jacquaint prévoyant la poursuite du contrat de travail sous astreinte lorsque le licenciement a été prononcé pour une cause non réelle ou sérieuse ou sans respect des procédures prévues légalement ou conventionnellement.

Mme Jacqueline Fraysse a expliqué que ces amendements visent à conférer au salarié victime d'un licenciement abusif un droit absolu à son emploi.

Le rapporteur ayant souligné l'absence de lien de ces amendements avec le projet de loi, la commission les a rejetés.

La commission a examiné six amendements identiques de Mme Jacqueline Fraysse, Mme Marie-George Buffet, M. Frédéric Dutoit, M. François Liberti, M. Maxime Gremetz et Mme Muguette Jacquaint proposant une nouvelle définition du licenciement économique.

Mme Muguette Jacquaint a indiqué que ces amendements reprennent la définition du licenciement économique issue de la loi de modernisation sociale afin de limiter les licenciements abusifs. La majorité ayant supprimé ces dispositions législatives au début de la législature, cette définition doit être de nouveau imposée aux entreprises afin de considérer le licenciement comme le moyen ultime de résolution des difficultés économiques. Une telle mesure a sa place dans le débat, la réduction du chômage constituant une des conditions pour garantir l'équilibre du financement des retraites.

Le rapporteur ayant souligné l'absence de lien de ces amendements avec le texte, la commission les a rejetés.

La commission a examiné six amendements identiques de Mme Jacqueline Fraysse, Mme Marie-George Buffet, M. Frédéric Dutoit, M. François Liberti, M. Maxime Gremetz et Mme Muguette Jacquaint visant à sanctionner de nullité un licenciement en cas de manquement par l'employeur à son obligation de reclassement du salarié.

Mme Jacqueline Fraysse a observé qu'il s'agit là encore d'éviter d'accroître le nombre de chômeurs.

La commission a rejeté les amendements.

La commission a examiné six amendements identiques de Mme Jacqueline Fraysse, Mme Marie-George Buffet, M. Frédéric Dutoit, M. François Liberti, M. Maxime Gremetz et Mme Muguette Jacquaint conférant un droit nouveau aux représentants du personnel et au comité d'entreprise pour s'opposer et faire annuler les licenciements dont le motif économique est injustifiable.

Mme Muguette Jacquaint a jugé opportun de donner un véritable pouvoir de contrôle et de contestation aux représentants du personnel et au comité d'entreprise.

Le rapporteur ayant jugé ces amendements sans lien avec le texte en discussion, la commission les a rejetés.

La commission a examiné six amendements identiques de Mme Jacqueline Fraysse, Mme Marie-George Buffet, M. Frédéric Dutoit, M. François Liberti, M. Maxime Gremetz et Mme Muguette Jacquaint obligeant l'employeur à prendre réellement en compte le point du vue du personnel exprimé par ses représentants sur les mesures économiques et sociales proposées par l'employeur.

La commission a rejeté les amendements, après que le rapporteur a fait valoir l'absence de lien avec le texte.

La commission a examiné six amendements identiques de Mme Jacqueline Fraysse, Mme Marie-George Buffet, M. Frédéric Dutoit, M. François Liberti, M. Maxime Gremetz et Mme Muguette Jacquaint obligeant l'employeur à assurer aux jeunes l'acquisition d'une formation professionnelle initiale ou complémentaire.

Mme Muguette Jacquaint s'est déclarée convaincue de l'inefficacité des aides publiques accordées sans contrepartie depuis vingt ans, faisant valoir qu'elles ne produisent que des effets d'aubaine et ne contribuent en rien à la résorption du chômage. M. Alain Néri s'est déclaré en accord avec la préoccupation de donner aux jeunes une formation professionnelle leur permettant de trouver un emploi stable. Une des causes principales du chômage des jeunes résidant, en effet, dans l'absence de formation professionnelle. Il convient de donner une seconde chance aux jeunes les plus défavorisés ayant une scolarité incomplète.

Après que le rapporteur a estimé que ces amendements sont sans lien avec le texte, la commission les a rejetés.

La commission a examiné six amendements identiques de Mme Jacqueline Fraysse, Mme Marie-George Buffet, M. Frédéric Dutoit, M. François Liberti, M. Maxime Gremetz et Mme Muguette Jacquaint visant à lutter contre le travail précaire.

Mme Jacqueline Fraysse a indiqué que ces amendements tendent à préciser la législation en affirmant que le taux de 5 % n'est pas un droit à employer 5 % de travailleurs précaires mais bien un seuil maximum.

Le rapporteur ayant jugé ces amendements sans lien avec le texte, la commission les a rejetés.

La commission a successivement rejeté :

- six amendements identiques de Mme Jacqueline Fraysse, Mme Marie-George Buffet, M. Frédéric Dutoit, M. François Liberti, M. Maxime Gremetz et Mme Muguette Jacquaint visant à lutter contre le travail dissimulé et inégal en prévoyant en cas de condamnation supprimer la majoration des cotisations patronales de 10 % pour une durée de trois ans ;

- six amendements identiques de Mme Jacqueline Fraysse, Mme Marie-George Buffet, M. Frédéric Dutoit, M. François Liberti, M. Maxime Gremetz et Mme Muguette Jacquaint tendant à lutter contre les heures supplémentaires qui ne seraient pas justifiées ;

- deux séries de six amendements identiques de Mme Jacqueline Fraysse, Mme Marie-George Buffet, M. Frédéric Dutoit, M. François Liberti, M. Maxime Gremetz et Mme Muguette Jacquaint limitant le recours aux contrats à durée déterminée ;

- six amendements identiques de Mme Jacqueline Fraysse, Mme Marie-George Buffet, M. Frédéric Dutoit, M. François Liberti, M. Maxime Gremetz et Mme Muguette Jacquaint ayant pour objet de limiter le nombre de salariés employés à temps partiel à 10 % de l'effectif total de l'entreprise ;

- six amendements identiques de Mme Jacqueline Fraysse, Mme Marie-George Buffet, M. Frédéric Dutoit, M. François Liberti, M. Maxime Gremetz et Mme Muguette Jacquaint destinés à associer à la gestion de l'entreprise le comité d'entreprise, notamment sur les décisions de l'employeur concernant l'emploi ;

- six amendements identiques de Mme Jacqueline Fraysse, Mme Marie-George Buffet, M. Frédéric Dutoit, M. François Liberti, M. Maxime Gremetz et Mme Muguette Jacquaint prévoyant l'accord du comité d'entreprise sur le plan de formation de l'entreprise.

Article 4

Garantie d'un niveau minimum de pension

Cet article pose pour principe national l'objectif de garantir en 2008, lors de la liquidation, un montant de retraite au moins égal à 85 % du salaire minimum de croissance (SMIC). Cette garantie concerne les salariés ayant cotisé sur la base du SMIC.

L'alinéa unique du présent article prévoit que cette garantie concerne la retraite des salariés ayant travaillé à temps complet disposant de la durée d'assurance nécessaire pour bénéficier d'une retraite à taux plein d'au moins 160 trimestres cotisés sur la base d'une assiette correspondant au salaire minimum de croissance.

Cette garantie de 85 % du SMIC est un objectif et elle s'applique à la date de la liquidation totale (base et complémentaire), le montant de la pension évoluant par la suite en fonction de la revalorisation annuelle qui est indexée sur les prix (cf. article 19 du projet de loi).

L'article 6 du projet investit le Conseil d'orientation des retraites d'une mission de surveillance du niveau des pensions et de recherche et de propositions propres à le garantir. Selon l'étude d'impact, une autre mesure, figurant à l'article 18 du projet de loi, contribue à la réalisation de cet objectif de 85 % puisque le nouveau « minimum garanti de pension » viendra relever, à la liquidation, le niveau des pensions assises sur de faibles revenus.

Aux termes de cet article la revalorisation de ce minimum évoluera selon l'échéancier suivant :

· 3 % au 1er janvier 2004 ;

· 3 % au 1er janvier 2006 ;

· 3 % au 1er janvier 2008.

*

La commission a examiné six amendements de suppression de l'article de Mme Jacqueline Fraysse, Mme Marie-George Buffet, M. Frédéric Dutoit, M.François Liberti, M. Maxime Gremetz et Mme Muguette Jacquaint.

Après que le rapporteur a émis un avis défavorable, la commission a rejeté les amendements.

La commission a examiné un amendement de M. Pascal Terrasse visant à préciser que la Nation assure, à un salarié ayant effectué une carrière complète et disposant de cent soixante trimestres validés pour bénéficier du taux plein, un montant total de pension lors de la liquidation au moins égale à 95 % du salaire minimum de croissance net lorsqu'il a cotisé pendant cette durée sur la base du salaire minimum de croissance.

Après que le rapporteur a émis un avis défavorable, la commission a rejeté l'amendement.

La commission a examiné six amendements identiques de Mme Jacqueline Fraysse, Mme Marie-George Buffet, M. Frédéric Dutoit, M. François Liberti, M. Maxime Gremetz et Mme Muguette Jacquaint précisant la nécessité non seulement d'assurer une pension minimum mais surtout de la garantir.

Après que le rapporteur a émis un avis défavorable, la commission a rejeté les amendements.

La commission a examiné sept amendements identiques de Mme Jacqueline Fraysse, Mme Marie-George Buffet, M. Frédéric Dutoit, M. François Liberti, M. Maxime Gremetz et Mme Muguette Jacquaint visant à rendre applicable à partir de 2004, au lieu de 2008, la garantie d'un montant de pension de retraite à 85 % du salaire minimal de croissance net.

Après que le rapporteur a rappelé que 2008 est une date pivot, notamment en matière de convergence des régimes des salariés du secteur privé et du secteur public, et émis un avis défavorable, la commission a rejeté les amendements.

La commission a examiné sept amendements identiques de Mme Jacqueline Fraysse, Mme Marie-George Buffet, M. Frédéric Dutoit, M. François Liberti, M. Maxime Gremetz et Mme Muguette Jacquaint et de Mme Martine Billard visant à affirmer dans la loi le principe d'un niveau satisfaisant de pension pour les salariés dont la carrière s'est déroulée au SMIC, en leur assurant un minimum de 100 % du salaire minimal de croissance net.

Après que le rapporteur a émis un avis défavorable, la commission a rejeté les amendements.

La commission a rejeté un amendement de M. Jean-Luc Préel tendant à préciser que le taux de 85 % porte sur le SMIC, les cotisations sociales salariées et les impositions de toute nature.

La commission a examiné six amendements identiques de Mme Jacqueline Fraysse, Mme Marie-George Buffet, M. Frédéric Dutoit, M. François Liberti, M. Maxime Gremetz et Mme Muguette Jacquaint tendant à faire correspondre le minimum pour les pensions à un pourcentage du SMIC brut et non pas net.

Après que le rapporteur a émis un avis défavorable, la commission a rejeté les amendements.

La commission a examiné six amendements identiques de Mme Jacqueline Fraysse, Mme Marie-George Buffet, M. Frédéric Dutoit, M. François Liberti, M. Maxime Gremetz et Mme Muguette Jacquaint tendant à préciser que, pour les salariés relevant du régime privé ou assimilé, le salaire servant de base au calcul de la pension est le salaire brut annuel moyen correspondant aux cotisations versées au cours des dix années civiles d'assurance accomplies dont la prise en compte est la plus avantageuse pour l'assuré. Pour les salariés relevant du régime public le montant est calculé sur la référence des six derniers mois de salaire brut, y compris les éléments de rémunération non pris en compte dans l'assiette de calcul.

Mme Jacqueline Fraysse a souligné la nécessité de revenir sur les décrets dits « Balladur » de 1993 et de maintenir le régime de retraite actuel des fonctionnaires.

Après que le rapporteur a émis un avis défavorable, la commission a rejeté les amendements.

Elle a rejeté un amendement de Mme Martine Billard tendant à prévoir une réévaluation annuelle du niveau du minimum contributif au 1er juillet.

La commission a adopté l'article 4 sans modification.

Après l'article 4

La commission a rejeté un amendement de M. Jean-Luc Préel tendant à engager une réflexion sur la possibilité de garantir un niveau minimum de pension situé à 90 % du SMIC.

Article 5

Allongement de la durée d'assurance

Cet article porte la durée d'assurance nécessaire à la liquidation d'une retraite à taux plein à 42 ans en 2020 pour le régime général et les régimes alignés ainsi que pour les régimes des professions artisanales, des professions industrielles et commerciales, des professions libérales et des professions agricoles ; cette durée est portée à 40 ans en 2008 pour les régimes de la fonction publique, puis évoluera comme pour les autres régimes.

Il s'agit de maintenir constant, jusqu'en 2020, le rapport existant entre la durée d'assurance et la durée moyenne de retraite. Pour mémoire, il est rappelé, qu'au sens du présent article, la durée d'assurance est la période retenue pour le calcul de la pension de vieillesse exprimée en trimestres, semestres ou années et qu'elle influe sur la détermination du taux de liquidation de la retraite ou pension.

Pour les assurés du régime général, depuis le 1er janvier 2003, cette durée est de 160 trimestres d'assurance - soit quarante années - pour bénéficier du taux plein entre 60 et 65 ans. Auparavant, il fallait justifier de 150 trimestres pour les personnes nées avant 1934, de 151 trimestres, pour les personnes nées en 1934, 152 en 1935, 153 en 1936, 154 en 1937, 155 en 1938, 156 en 1939, 157 en 1940, 158 en 1941, 159 en 1942. Pour la liquidation de la retraite à taux plein, cette condition de durée est cumulée avec une condition d'âge : 60 ans dans le régime général depuis le 1er avril 1983.

Pour les agents de la fonction publique, le maximum des annuités liquidables est fixé à 37,5 ans. Il existe deux autre conditions cumulatives : un minimum de quinze ans de services effectifs et un âge minimum de soixante ans.

La durée moyenne de retraite s'apprécie en prenant en compte l'espérance de vie à l'âge de soixante ans. L'espérance de vie à 60 ans a augmenté continûment : elle est passée de 14 ans en 1932 à 19 ans en 1990 pour les hommes et de 16 ans à 24 ans pour les femmes.

Espérance de vie après 60 ans

Date

Espérance de vie à 60 ans

Hommes

Femmes

2000

20,2

25,6

2020

23,2

28,5

2040

25,9

31,0

Le rapport jugé souhaitable entre la durée d'assurance et la durée moyenne de retraite est de deux tiers/un tiers. Pour maintenir ce rapport constant, il est nécessaire d'augmenter la durée d'assurance.

Le premier alinéa du I du présent article prévoit l'évolution de la durée d'assurance nécessaire ainsi que celle de la durée des services et bonifications (régime des fonctionnaires civils et militaires) au service d'une retraite à taux plein dans le but de maintenir constant, jusqu'en 2020, le rapport entre ces durées et celle de la retraite. Ce rapport est celui constaté à la date de publication de la loi. Les assurés concernés sont ceux mentionnés aux 1°, 2° et 3° du V du présent article.

Le deuxième alinéa du présent II définit la notion de durée moyenne de retraite ; il s'agit, pour une année civile donnée, de l'espérance de vie à 60 ans telle qu'estimée cinq ans auparavant (2003 pour 2008 par exemple), dont est retranché l'écart existant entre la durée d'assurance ou la durée des services et bonifications nécessaires au service d'une retraite ou d'une pension à taux plein et celle de 160 trimestres résultant des dispositions de la présente loi pour l'année 2008.

Le calcul peut être établi comme suit : soit un fonctionnaire titulaire âgé de 60 ans en 2005, qui a une espérance de vie après 60 ans de 20,75 années (soit une durée moyenne de retraite de 83 trimestres), et qui totalise 37,5 annuités (donc sans modification de durée, soit 150 trimestres), la durée d'assurance nécessaire pour cette année civile étant, de 154 trimestres. L'écart constaté entre ces 150 trimestres et les 154 exigés est de 4. Il faut donc retrancher aux 83 trimestres de durée moyenne de retraite à 60 ans les 4 trimestres de l'écart constaté, soit : 83 - 4 = 79.

Avec l'application des effets du présent article, l'écart est ramené à 0 et la durée moyenne de retraite est de 83 trimestres (soit 20,75 années).

Jusqu'en 2008, cette mesure n'affecte que les régimes dont la durée d'assurance ou la durée des services et bonifications nécessaires au service d'une retraite ou d'une pension à taux plein est inférieure à 160 trimestres à la date de publication de la loi.

Le II du présent article prévoit qu'un rapport initial élaboré par le Gouvernement, au plus tard pour le 1er janvier 2008, sera rendu public et transmis au Parlement : il permettra de faire apparaître les évolutions du taux d'activité des plus de 50 ans, l'évolution de la situation financière des régimes, l'évolution de la situation de l'emploi et d'examiner l'ensemble des paramètres de financement des régimes de retraite.

Le III du présent article prévoit la majoration, à compter de 2009, d'un trimestre par année, pour atteindre 41 annuités en 2012, de la durée d'assurance ou de la durée des services et bonifications nécessaire pour obtenir le pourcentage maximum d'une pension civile ou militaire de retraite. Cette majoration peut être modifiée, le cas échéant, par décret pris après avis, rendus publics, du Conseil d'orientation des retraites ou de la Commission de garantie des retraites.

Il s'agit, d'après l'étude d'impact, d'ajuster la durée d'assurance ou de services et bonifications, de manière à « partager pour le futur les gains d'espérance de vie entre le temps de travail et le temps de retraite ». A cette fin, il y a lieu d'augmenter la durée d'assurance ou de services et bonifications d'un an à partir de 2009. En effet, à cette date, et en application des I et 2° et 3° du IV du présent article, les fonctionnaires civils et militaires et ouvriers de l'Etat auront vu le nombre exigible de leurs annuités évoluer de 37, 5 à 40.

Ainsi, la durée nécessaire à l'obtention du taux plein atteindra 41 ans (164 trimestres) en 2012, sauf si un décret modifie cette échéance sur la base d'un rapport public transmis au Parlement avant le 1er janvier 2008. D'après l'étude d'impact, à caractéristiques inchangées, cette durée pourrait atteindre 41 ans ¾ en 2020, compte tenu des hypothèses centrales du rapport du Conseil d'orientation des retraites.

Le premier alinéa du IV du présent article prévoit qu'un nouveau rapport sera remis au plus tard, dans les mêmes conditions que le précédent, pour le 1er janvier 2012 et avant le 1er janvier 2016, en incluant les mêmes éléments que le rapport initial, et en faisant apparaître l'évolution prévisible du rapport existant entre la durée d'assurance et la durée moyenne des retraites.

Le deuxième alinéa prévoit, qu'au vu des éléments prévus dans les rapports précités, les durées d'assurance ou de services et bonifications seront fixées par décret pris après avis, rendus publics, du Conseil d'orientation des retraites ou de la commission de garantie des retraites.

Le 1° prévoit le premier décret avant le 1er juillet 2012 pour les années 2013, 2014, 2015 et 2016 ;

Le 2° prévoit le second décret avant le 1er juillet 2016 pour les années 2017, 2018, 2019, et 2020.

Le V du présent article détermine, pour chaque catégorie de régime, la durée d'assurance ou de services requise pour l'obtention d'une pension au taux plein ou au pourcentage maximum :

1° En ce qui concerne les assurés relevant du régime général de l'assurance vieillesse, de l'assurance vieillesse des travailleurs salariés des professions agricoles ou de l'assurance vieillesse des professions mentionnées à l'article L. 621-3 du code de la sécurité sociale (professions artisanales, professions industrielles et commerciales, professions libérales et professions agricoles), celle qui est en vigueur, en application du présent article, lorsqu'ils atteignent l'âge prévu au premier alinéa de l'article L. 351-1 du code de la sécurité sociale ;

2° En ce qui concerne les fonctionnaires civils de l'Etat, les fonctionnaires affiliés à la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales et les ouvriers des établissements industriels de l'Etat, celle qui est en vigueur l'année d'ouverture du droit à l'obtention d'une pension à jouissance immédiate ;

3° En ce qui concerne les militaires, celle qui est en vigueur l'année où ils atteignent la limite d'âge ou la limite de durée de service de leur corps et de leur grade.

Le VI du présent article porte création d'une commission de garantie des retraites, chargée de veiller à la mise en œuvre des dispositions du présent article.

Cette commission est présidée par le vice-président du Conseil d'Etat et comprend le président du Conseil économique et social, le premier président de la Cour des comptes et le président du Conseil d'orientation des retraites.

*

La commission a examiné sept amendements identiques de suppression de l'article présentés par Mme Jacqueline Fraysse, Mme Marie-George Buffet, M. Frédéric Dutoit, M. François Liberti, M. Maxime Gremetz, Mme Muguette Jacquaint et M. Pascal Terrasse.

M. Maxime Gremetz a expliqué que l'amendement tend à supprimer tout allongement de la durée de cotisation. L'article visé prévoit une harmonisation entre le public et le privé. Le gouvernement répond avec cet article à une mesure inique prise par un gouvernement de la même sensibilité politique par le passé. Cette régression ne peut pas être acceptée : il existe d'autres propositions que l'allongement de la durée de cotisation que rejette massivement les salariés qui en sont déjà victimes. Il faut aller au contraire vers une harmonisation dans le sens inverse.

Le rapporteur a émis un avis défavorable en déclarant que l'allongement de la durée de cotisation permet d'éviter soit un doublement des cotisations, soit une division par deux du montant des retraites.

M. Pascal Terrasse a rappelé que le groupe socialiste était opposé à l'allongement de la durée de cotisation. Dans un contexte de chômage grandissant, il s'agit d'une mesure injuste, alors même que d'autres paramètres auraient pu être utilisés. La logique dogmatique et ultra-libérale du gouvernement s'inspire de la philosophie du MEDEF, qui propose une durée de cotisation de cent quatre-vingts trimestres. Augmenter la durée de cotisation, c'est revenir sur un acquis de la gauche : le droit de partir à la retraite à taux plein à soixante ans. M. Denis Jacquat, président, a rappelé que le Livre blanc sur la retraite préconisait l'augmentation de la durée de cotisation. Cette solution a été appliquée par d'autres pays européens et elle est au cœur des réflexions du Conseil d'orientation des retraites. Il ne s'agit en aucun cas d'une proposition téléguidée par le MEDEF.

Le rapporteur a souligné que les positions du groupe socialiste se rapprochent des mouvements les plus extrémistes. Toutefois, de hauts responsables du parti socialiste soutiennent la réforme actuelle. En 1982, le passage à la retraite à soixante ans n'était pas financé. Les contre-propositions de l'opposition doivent, au minimum, être crédibles.

Suivant l'avis défavorable du rapporteur, la commission a rejeté les amendements.

La commission a ensuite examiné en discussion commune six amendements de M. Pascal Terrasse :

- le premier tendant à renvoyer à la négociation la définition des conditions de liquidation des droits à la retraite ;

- le deuxième précisant que la durée de cotisation tient compte de la pénibilité de l'activité professionnelle et des inégalités d'espérance de vie et des temps de formation ;

- le troisième tendant à faire prendre en compte la pénibilité des métiers pour définir la durée d'assurance nécessaire au bénéfice d'une pension de retraite à taux plein ;

- le quatrième précisant que cette durée d'assurance tient également compte des inégalités d'espérance de vie ;

- le cinquième visant à prendre en compte les périodes d'inactivité et de formation ;

- le sixième disposant que la durée nécessaire pour bénéficier d'une pension de retraite à taux plein tient compte des inégalités entre les hommes et les femmes.

Mme Danielle Hoffmann-Rispal a évoqué l'inquiétude des salariés à la perspective de l'échéance de 2012. Comment la retraite à soixante ans pourrait - elle être garantie si les salariés doivent cotiser pendant 42 ans ? M. Pascal Terrasse a dénoncé « l'autisme » du gouvernement et a souhaité renvoyer la fixation de la durée de cotisation à la négociation. Il faut débattre par branche et le cas échéant par métier. Ainsi, s'agissant des chauffeurs de poids lourds, on peut craindre que les faire travailler jusqu'à 65 ans n'entraîne une dégradation de la sécurité sur les routes. Des remarques similaires peuvent être faites concernant les personnes travaillant dans le secteur sanitaire, à la chaîne ou en trois-huit. Le débat doit tenir compte de ces situations. En tous les cas, il faut garantir un départ à la retraite à taux plein à soixante ans et procéder à la réforme par le dialogue social. M. Alain Néri a estimé que l'article 5 du projet est dangereux, notamment parce qu'il renvoie au décret au lieu de renvoyer à la négociation ou à la loi. C'est le signe d'un double mépris, mépris des organisations syndicales et mépris du Parlement.

Le rapporteur a jugé que les représentants de l'opposition n'apportent pas de projet alternatif cohérent. Fixer les paramètres différents pour chaque profession prendrait beaucoup trop de temps. En tous les cas, s'agissant des inégalités entre les professions, il faut rappeler que ce sont les universitaires qui ont la plus longue espérance de vie.

Suivant l'avis défavorable du rapporteur, la commission a rejeté les amendements.

La commission a rejeté quatre séries de six amendements identiques présentés par Mme Jacqueline Fraysse, Mme Marie-George Buffet, M. Frédéric Dutoit, M. François Liberti, M. Maxime Gremetz et Mme Muguette Jacquaint, et visant respectivement à supprimer le I de cet article ; supprimer le premier alinéa du I de cet article ; fixer à 150 trimestres la durée de cotisation permettant d'obtenir une retraite pleine ; supprimer la référence à la date de 2020 qui laisse accroire que le gouvernement ne remettra pas en cause d'ici là son objectif contestable d'équilibre entre temps passé au travail et temps passé en retraite tel que fixé à la date de publication de la loi.

Mme Jacqueline Fraysse a estimé que l'établissement d'un lien entre durée de la vie passée au travail et durée de la vie en retraite peut conduire à un allongement quasiment sans limite de la durée de cotisation.

Le rapporteur a émis un avis défavorable sur ces amendements et indiqué que la date de 2020 résulte des travaux du Conseil d'orientation des retraites.

La commission a rejeté les amendements.

La commission a examiné un amendement présenté par Mme Martine Billard tendant à exclure de l'allongement de la durée de cotisation les personnes reconnues travailleurs handicapés.

Mme Martine Billard a déclaré que tous les commissaires s'accordent sur la nécessité d'un traitement spécifique au bénéfice des personnes handicapées. Non seulement elles trouvent difficilement du travail mais, en outre, elles sont plus vite fatigués par ce travail et ont vraisemblablement une espérance de vie à la retraite moindre, cela justifiant une durée de cotisation moins élevée.

Mme Catherine Génisson a vivement appuyé cet amendement.

Le rapporteur a considéré que cette question particulière n'a pas lieu d'être évoquée dans un article de loi consacré à des problématiques d'ordre plus général.

La commission a rejeté l'amendement.

La commission a rejeté trois séries de six amendements identiques présentés par Mme Jacqueline Fraysse, Mme Marie-George Buffet, M. Frédéric Dutoit, M. François Liberti, M. Maxime Gremetz et Mme Muguette Jacquaint, et tendant respectivement à supprimer le second alinéa du I de cet article qui définit la répartition entre temps au travail et temps à la retraite,  revenir dans cet alinéa à la référence aux 150 trimestres de cotisation, supprimer le II de cet article au motif qu'il introduit des principes qui aboutiront à une réduction des droits pour les futurs retraités.

La commission a rejeté un amendement rédactionnel de M. Jean-Luc Préel.

La commission a rejeté seize séries de six amendements identiques de Mme Jacqueline Fraysse, Mme Marie-George Buffet, M. Frédéric Dutoit, M.François Liberti, M. Maxime Gremetz et Mme Muguette Jacquaint tendant à :

- prévoir la transmission du rapport du gouvernement prévu à cet article aux présidents des groupes parlementaires ;

- prévoir la transmission de ce rapport aux présidents des commissions parlementaires chargées des affaires sociales et des finances ;

- prévoir la transmission de ce rapport aux membres de ces commissions ;

- prévoir la transmission de ce rapport aux membres des groupes parlementaires désignés dans ces commissions ;

- supprimer le 1° du II de cet article précisant que le rapport fait apparaître l'évaluation du taux d'activité des personnes de plus de cinquante ans ;

- préciser que le rapport distingue la situation des femmes et des hommes de plus de cinquante ans ;

- supprimer le 2° du II de cet article précisant que le rapport fait apparaître l'évolution de la situation financière des régimes de retraite ;

- supprimer le 3° du II de cet article précisant que le rapport fait apparaître l'évolution de la situation de l'emploi ;

- supprimer le dernier alinéa du II de cet article prévoyant que le rapport est rendu public et transmis au Parlement ;

- instituer un débat parlementaire sur ledit rapport.

Suivant l'avis défavorable du rapporteur, la commission a rejeté l'ensemble des amendements.

La commission a examiné six amendements identiques de Mme Jacqueline Fraysse, Mme Marie-George Buffet, M. Frédéric Dutoit, M. François Liberti, M. Maxime Gremetz et Mme Muguette Jacquaint, étendant le champ du rapport du gouvernement à l'analyse de l'évolution des exonérations de cotisations sociales et de leur impact sur l'emploi.

M. Maxime Gremetz a cité une étude récente selon laquelle l'allégement des cotisations patronales en tant que mesure au bénéfice de l'emploi aurait mangé son pain blanc.

Le rapporteur a rappelé que le financement de la réduction du temps de travail est également fondé sur l'exonération de cotisations sociales et que « la ristourne Juppé » a créé 400 000 emplois.

La commission a rejeté les amendements.

La commission a examiné six amendements identiques de Mme Jacqueline Fraysse, Mme Marie-George Buffet, M. Frédéric Dutoit, M. François Liberti, M. Maxime Gremetz et Mme Muguette Jacquaint étendant le champ du rapport du gouvernement à l'analyse de l'évolution des exonérations de cotisations sociales et de leur impact sur les comptes de la sécurité sociale.

Mme Martine Billard a estimé qu'il s'agit d'un amendement important, car son adoption permettrait de quantifier les sommes que, par idéologie, le gouvernement consacre de plus en plus à ces exonérations, alors qu'elles pourraient l'être à d'autres causes de solidarité, comme les retraites.

Le rapporteur a rappelé que ces éléments sont disponibles dans les rapports de la commission des comptes de la sécurité sociale.

La commission a rejeté les amendements.

La commission a examiné six amendements identiques de Mme Jacqueline Fraysse, Mme Marie-George Buffet, M. Frédéric Dutoit, M. François Liberti, M. Maxime Gremetz et Mme Muguette Jacquaint proposant qu'un rapport soit élaboré par le gouvernement faisant apparaître les scénarios de réponse des cotisations sociales patronales prenant en compte la valeur ajoutée.

M. Pascal Terrasse a souhaité que la commission des affaires culturelles, familiales et sociales se penche sur la notion de valeur ajoutée. Le seul outil fiscal touchant la valeur ajoutée est en effet la TVA qui ne peut financer les retraites. Il s'agit là d'une question qui dépasse les clivages partisans.

Le rapporteur a souligné le revirement de l'opposition à l'égard de ces modes de financement et a donné un avis défavorable.

La commission a rejeté les amendements.

La commission a ensuite rejeté six séries d'amendements identiques de Mme Jacqueline Fraysse, Mme Marie-George Buffet, M. Frédéric Dutoit, M. François Liberti, M. Maxime Gremetz et Mme Muguette Jacquaint invitant le gouvernement à faire apparaître dans le rapport prévu au II de l'article :

- l'évolution des profits et bénéfices des grandes entreprises et la part consacrée à l'investissement, l'emploi et la formation ;

- l'évolution de l'emploi à temps partiel, de l'emploi des jeunes et des CDD ;

- l'évolution des durées d'assurance ou de services, des durées moyennes des pensions de retraite selon les branches professionnelles et les niveaux socio-professionnels ;

- l'évolution du nombre d'assurés en activité au moment de la liquidation de leur pension de retraite ;

- l'âge moyen des assurés demandant la liquidation de leur pension de retraite ;

- la durée d'assurance ou de service moyenne des assurés qui demandent la liquidation de leur pension de retraite.

La commission a rejeté sept amendements identiques de Mme Jacqueline Fraysse, Mme Marie-George Buffet, M. Frédéric Dutoit, M. François Liberti, M. Maxime Gremetz, Mme Muguette Jacquaint et Mme Martine Billard visant à supprimer tout allongement de la durée de cotisation.

La commission a rejeté six amendements identiques de Mme Jacqueline Fraysse, Mme Marie-George Buffet, M. Frédéric Dutoit, M. François Liberti, M. Maxime Gremetz et Mme Muguette Jacquaint fixant à 37,5 annuités de cotisation la durée nécessaire à l'ouverture du droit à la retraite à taux plein.

La commission a rejeté six amendements identiques de Mme Jacqueline Fraysse, Mme Marie-George Buffet, M. Frédéric Dutoit, M. François Liberti, M. Maxime Gremetz et Mme Muguette Jacquaint visant à supprimer la référence à la commission de garantie des retraits en raison de l'existence du COR.

La commission a rejeté deux séries de six amendements identiques de Mme Jacqueline Fraysse, Mme Marie-George Buffet, M. Frédéric Dutoit, M. François Liberti, M. Maxime Gremetz et Mme Muguette Jacquaint ayant pour objet de supprimer l'élaboration d'un rapport faisant apparaître l'évolution prévisible du rapport entre la durée d'assurance et la durée moyenne de retraite.

La commission a rejeté six amendements identiques de Mme Jacqueline Fraysse, Mme Marie-George Buffet, M. Frédéric Dutoit, M. François Liberti, M. Maxime Gremetz et Mme Muguette Jacquaint supprimant la référence aux conditions d'élaboration, ignorant la concertation et le dialogue du rapport susmentionné.

La commission a rejeté six amendements identiques de Mme Jacqueline Fraysse, Mme Marie-George Buffet, M. Frédéric Dutoit, M. François Liberti, M. Maxime Gremetz et Mme Muguette Jacquaint substituant au mot « document » le mot « rapport ».

La commission a rejeté cinq séries de six amendements identiques de Mme Jacqueline Fraysse, Mme Marie-George Buffet, M. Frédéric Dutoit, M. François Liberti, M. Maxime Gremetz et Mme Muguette Jacquaint organisant les différentes modalités de transmissions aux élus des documents d'information.

La commission a rejeté six amendements identiques de Mme Jacqueline Fraysse, Mme Marie-George Buffet, M. Frédéric Dutoit, M. François Liberti, M. Maxime Gremetz et Mme Muguette Jacquaint tendant à supprimer l'introduction de principes susceptibles d'aboutir à une réduction des droits des futurs retraités.

La commission a ensuite rejeté cinq séries de six amendements identiques de Mme Jacqueline Fraysse, Mme Marie-George Buffet, M. Frédéric Dutoit, M. François Liberti, M. Maxime Gremetz et Mme Muguette Jacquaint détaillant les modalités de transmission aux élus de l'avis du COR.

La commission a rejeté six amendements identiques de Mme Jacqueline Fraysse, Mme Marie-George Buffet, M. Frédéric Dutoit, M. François Liberti, M. Maxime Gremetz et Mme Muguette Jacquaint renvoyant à la loi de financement de la sécurité sociale, et non pas à un décret pris après avis du COR, le soin de fixer les durées d'assurance ou de services et bonifications.

La commission a rejeté six amendements identiques de Mme Jacqueline Fraysse, Mme Marie-George Buffet, M. Frédéric Dutoit, M. François Liberti, M. Maxime Gremetz et Mme Muguette Jacquaint supprimant, par cohérence, la référence à la commission de garantie des retraites.

La commission a rejeté deux séries de six amendements identiques de Mme Jacqueline Fraysse, Mme Marie-George Buffet, M. Frédéric Dutoit, M. François Liberti, M. Maxime Gremetz et Mme Muguette Jacquaint organisant le calendrier de rédaction des décrets.

La commission a rejeté six séries de six amendements identiques de Mme Jacqueline Fraysse, Mme Marie-George Buffet, M. Frédéric Dutoit, M. François Liberti, M. Maxime Gremetz et Mme Muguette Jacquaint :

- tendant à supprimer le paragraphe fixant la durée d'assurance requise pour l'obtention d'une pension au taux plein ;

- procédant à une précision rédactionnelle ;

- supprimant les dispositions fixant la durée d'assurance requise pour les assurés du régime général de l'assurance vieillesse ;

- visant à perpétuer l'âge de soixante ans pour l'obtention de la retraite à taux plein ;

- supprimant les dispositions fixant la durée requise pour les fonctionnaires civils de l'Etat ;

- introduisant une précision rédactionnelle.

- supprimant les dispositions fixant la durée d'assurance requise pour les militaires.

La commission a rejeté six amendements identiques de Mme Jacqueline Fraysse, Mme Marie-George Buffet, M. Frédéric Dutoit, M. François Liberti, M. Maxime Gremetz et Mme Muguette Jacquaint visant à accorder le droit à la retraite à cinquante-cinq ans pour les salariés ayant exercé une activité professionnelle pénible.

La commission a rejeté six amendements identiques de Mme Jacqueline Fraysse, Mme Marie-George Buffet, M. Frédéric Dutoit, M. François Liberti, M. Maxime Gremetz et Mme Muguette Jacquaint visant à accorder aux assurés sociaux qui ne bénéficient pas à soixante ans du nombre de trimestres requis, une bonification pour les cotisations validées entre 60 et 65 ans pour atteindre le nombre légal.

La commission a examiné deux séries de six amendements identiques, portant sur le paragraphe VI, de Mme Jacqueline Fraysse, Mme Marie-George Buffet, M. Frédéric Dutoit, M. François Liberti, M. Maxime Gremetz et Mme Muguette Jacquainti visant à supprimer la création d'une Commission de garantie des retraites chargée de veiller à la mise en œuvre des dispositions de cet article.

Mme Jacqueline Fraysse a en effet estimé que la création d'une nouvelle commission n'avait pas de sens dans la mesure où les attributions prévues pour celle-ci pouvait très bien être remplies par le Conseil d'orientation des retraites.

La commission a rejeté les amendements.

La commission a ensuite rejeté trois séries de six amendements rédactionnels identiques de Mme Jacqueline Fraysse, Mme Marie-George Buffet, M. Frédéric Dutoit, M. François Liberti, M. Maxime Gremetz et Mme Muguette Jacquaint portant sur le paragraphe VI.

Puis la commission a rejeté six amendements identiques de Mme Jacqueline Fraysse, Mme Marie-George Buffet, M. Frédéric Dutoit, M. François Liberti, M. Maxime Gremetz et Mme Muguette Jacquaint visant à supprimer les dispositions relatives à la composition de la Commission de garantie des retraites.

La commission a rejeté six amendements identiques de coordination de Mme Jacqueline Fraysse, Mme Marie-George Buffet, M. Frédéric Dutoit, M. François Liberti, M. Maxime Gremetz et Mme Muguette Jacquaint

Puis, la commission a examiné six amendements identiques présentés par Mme Jacqueline Fraysse, Mme Marie-George Buffet, M. Frédéric Dutoit, M. François Liberti, M. Maxime Gremetz et Mme Muguette Jacquaint substituant aux mots : « vice-président du Conseil d'Etat », les mots : « vice-président(e) du Conseil d'Etat ».

Mme Jacqueline Fraysse a indiqué que cet amendement constitue un prolongement naturel à la mise en œuvre, dans tous les domaines, de la parité homme-femme.

Après que Mme Martine Billard a apporté son soutien à cet amendement, le rapporteur a émis un avis défavorable au motif que la généralisation de telles rédactions alourdirait considérablement les textes et leur ferait perdre de leur nécessaire lisibilité.

La commission a rejeté les amendements.

La commission a également rejeté trois séries de six amendements identiques présentés par Mme Jacqueline Fraysse, Mme Marie-George Buffet, M. Frédéric Dutoit, M. François Liberti, M. Maxime Gremetz et Mme Muguette Jacquaint visant à féminiser les titres de président du Conseil économique et social, de président de la Cour des comptes et de président du Conseil d'orientation des retraites.

Puis, la commission a rejeté six amendements identiques présentés par Mme Jacqueline Fraysse, Mme Marie-George Buffet, M. Frédéric Dutoit, M. François Liberti, M. Maxime Gremetz et Mme Muguette Jacquaint visant à supprimer le renvoi à un décret pour la définition des règles de fonctionnement de la Commission de garantie des retraites ainsi que six amendements rédactionnels identiques des mêmes auteurs.

La commission a ensuite adopté l'article 5 sans modification.

Après l'article 5

La commission a examiné six amendements identiques présentés par Mme Jacqueline Fraysse, Mme Marie-George Buffet, M. Frédéric Dutoit, M. François Liberti, M. Maxime Gremetz et Mme Muguette Jacquaint visant à permettre aux personnes reconnues handicapées par la COTOREP de bénéficier, Si elles le souhaitent, d'un droit à liquidation de leur pension de retraite après 27,5 annuités de cotisations.

M. Maxime Gremetz a indiqué que si la rédaction de l'amendement peut sans aucun doute être améliorée, il est néanmoins nécessaire d'adopter un régime spécial de retraite pour les personnes handicapées. En effet, leur espérance de vie est plus brève que la moyenne. En ce domaine, il n'existe pas de solution idéale mais il importe de formuler des propositions. Il faut enfin rappeler que ces personnes, lorsqu'elles travaillent, ne bénéficient pas d'un contrat de travail et dès lors ne sont pas considérées comme des salariés.

Après avoir indiqué que cette question mérite effectivement toute l'attention du législateur, le rapporteur a émis un avis défavorable au motif que le gouvernement présenterait au Parlement dans les prochains mois un texte spécifique sur les personnes handicapées et qu'il déposera, dans le cadre de la discussion du texte sur les retraites, un certain nombre d'amendements en ce sens dont la rédaction paraît meilleure.

La commission a rejeté les amendements.

La commission a examiné six amendements identiques présentés par Mme Jacqueline Fraysse, Mme Marie-George Buffet, M. Frédéric Dutoit, M. François Liberti, M. Maxime Gremetz et Mme Muguette Jacquaint insérant un article tendant à exonérer les pensions de retraite de la CRDS.

M. Maxime Gremetz a déclaré que cette cotisation est vécue comme une grande injustice par les personnes âgées disposant d'une pension modeste. M. Pascal Terrasse a indiqué que sur ce point l'analyse du groupe socialiste diffère de celle du groupe communistes et républicains. Créée par le gouvernement de M. Alain Juppé, cette cotisation rapporte chaque année près de 4,6 milliards d'euros. Elle constitue donc une ressource importante et le pragmatisme commande de ne pas la remettre en cause, ni d'ici à 2015, terme prévu de son existence, ni au-delà de cette date, dans la mesure où elle pourrait alors constituer une manne financière utile pour revaloriser les petites pensions de retraite ou pour abonder le Fonds de réserve des retraites.

Après avoir rappelé que la CRDS a été créée afin d'éponger une gestion budgétaire calamiteuse de la majorité socialiste, le rapporteur a émis un avis défavorable.

M. Maxime Gremetz a souligné que le groupe communiste s'est opposé à la création de la CRDS. En aucun cas, celle-ci ne saurait être destinée à augmenter le montant des pensions de retraite car cela reviendrait à ponctionner les retraites dans le but de les revaloriser, ce qui est pour le moins contradictoire.

La commission a rejeté les amendements.

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N° 0898 - Rapport sur le projet de loi portant réforme des retraites (M. Bernard Accoyer) (Tome I)


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