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Edition J.O. - débats de la séance
Articles, amendements, annexes

Assemblée nationale
XIIIe législature
Session ordinaire de 2009-2010

Compte rendu
intégral

Première séance du mercredi 28 avril 2010

Questions au Gouvernement

Première séance du mercredi 28 avril 2010

Présidence de M. Bernard Accoyer

M. le président . La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

Souhaits de bienvenue à une délégation parlementaire étrangère

M. le président. Mes chers collègues, je suis heureux de souhaiter en votre nom la bienvenue à une délégation du Parlement de la République islamique de Mauritanie, conduite par M. Mohamed Abdellahi Ould Guelaye. (Mmes et MM. les députés et les membres du Gouvernement se lèvent et applaudissent.)

Questions au Gouvernement

M. le président. L’ordre du jour appelle les questions au Gouvernement.

Situation de la Grèce

M. le président. La parole est à M. Paul Giacobbi, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

M. Paul Giacobbi. Ma question s’adresse à Mme la ministre de l’économie, de l’industrie et de l’emploi.

Ce qui arrive à la Grèce est le signe précurseur du fait que nous sommes désormais entrés, après la crise bancaire dans celle des trésors publics. Le Portugal et, plus encore, l’Irlande, l’Espagne sont clairement les prochains sur la liste et une récente étude du McKinsey Institute a rappelé l’énormité de l’endettement global du Royaume-Uni, concluant trivialement que l’on ne sort d’une telle situation que par le défaut de paiement, l’inflation ou en se serrant la ceinture!

Pis encore, depuis quelques semaines, les taux d’intérêt des bons du trésor américain ont dépassé les taux représentatifs de la prise de risque sur les obligations privées. Les États se sont terriblement endettés pour sauver les banques et les marchés répondent par des attaques spéculatives contre les trésors publics qui leur ont permis de survivre.

Face à ces attaques, il ne semble exister aucune solidarité des États. L’Allemagne, par exemple, a dépensé 35 milliards d’euros pour recapitaliser la banque Hypo Real Estate, mais semble plus réticente à sauver le crédit de la République hellénique. De même, trois pays de l’Union européenne ont pu, vous le savez, décider en une nuit de sauver Dexia, mais la zone euro dans son ensemble ne semble pas si pressée de porter secours à l’un de ses États membres.

Au fond, si la Grèce était non pas un État mais une banque, la zone euro, la BCE ne l’aurait-elle pas sauvée depuis longtemps déjà?

La crise des trésors publics qui éclate ces jours-ci se profile en réalité depuis deux ans et va prolonger de plusieurs années la crise économique du monde occidental, et surtout celle de l’Europe.

La France a défendu avec détermination une position courageuse sur la réglementation financière et sur la refonte du système monétaire international. Notre gouvernement est-il déterminé, dans le cadre de la présidence du G20, à faire en sorte que les trésors publics se défendent enfin solidairement contre la spéculation du système financier?

M. le président. La parole est à M. François Fillon, Premier ministre.

M. François Fillon, Premier ministre. Monsieur Giacobbi, je voudrais tout d’abord faire remarquer que si la Grèce est aujourd’hui dans une telle situation, ce n’est pas parce qu’elle s’est endettée pour aider ses banques, c’est parce qu’elle s’est endettée tout court et qu’elle a conduit une politique dont le fruit est un déficit presque double de celui qui avait été annoncé. (« Tout à fait! » sur les bancs du groupe UMP.)

Je voudrais profiter de votre question pour m’adresser à tous ceux qui spéculent aujourd’hui contre la Grèce et, au fond, contre la monnaie européenne. Je veux leur dire de la façon la plus claire qui soit que les États de la zone euro vont assumer toutes leurs responsabilités à l’égard de la Grèce. Nous serons aux côtés de la Grèce comme cela a été décidé au dernier Conseil européen.

Si le gouvernement allemand a pu sembler hésiter, cette impression se dissipera aujourd’hui même. Mme Merkel doit s’exprimer dans quelques minutes et je ne doute pas qu’elle adoptera exactement la même position que le gouvernement français et l’ensemble des États européens.

Nous devons arrêter cette spéculation qui est irrationnelle, qui n’a rien à voir avec la réalité des finances publiques grecques, même si celle-ci est sérieuse. La seule façon de le faire est de réunir immédiatement les 30 milliards d’euros que les pays européens ont promis de prêter à la Grèce pour lui permettre de faire face à ses échéances dans des conditions convenables.

Pour le reste, vous avez raison, monsieur Giacobbi: la France mène le combat pour une réforme profonde du système monétaire; je vous remercie de l’avoir rappelé. J’entendais hier un député du parti socialiste s’en prendre au Gouvernement qui n’aurait pas de résultats sur ce sujet; il aurait pu, plutôt, nous apporter son soutien, car il est vrai que nous avons du mal à convaincre l’ensemble des pays qui, s’agissant de cette crise financière, ont une responsabilité. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.) Je pense aux États-Unis, où les débats au Congrès, comme vous le savez, ne vont pas dans le bon sens. Je pense à d’autres pays européens. Je pense à la Chine, où se trouve aujourd’hui le Président de la République. Ces pays doivent, avec nous, prendre leurs responsabilités pour changer les règles d’un système financier qui autorise aujourd’hui une spéculation immorale, une spéculation qui n’a aucun fondement, contre un État que nous allons ensemble protéger, comme nous allons protéger notre monnaie. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Port du voile intégral

M. le président. La parole est à Mme Nicole Ameline, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.

Mme Nicole Ameline. Madame la garde des sceaux, premières victimes de toutes les souffrances, de tous les conflits, de toutes les violences dans le monde, les femmes sont aussi partout des forces de progrès. La France est au premier rang de ce combat, aux Nations unies, en Europe, à l’OIT et elle le mène avec beaucoup de détermination et de courage. Où serait la cohérence si nous ne traduisions pas, au cœur de notre République, les principes pour lesquels nous nous battons partout dans le monde?

Les entretiens que nous avons eus dans le cadre de la mission d’information conduite par André Gerin et Eric Raoult…

Mme Huguette Bello. Un spécialiste!

Mme Nicole Ameline. …ont démontré qu’il n’y avait aucune incompatibilité entre l’interdiction de la burqua, du port du voile intégral, et les principes de la communauté musulmane défendus par les représentants du culte musulman. Il est donc essentiel que nous apportions aujourd’hui une réponse claire et exemplaire à toutes les femmes de France et du monde qui se battent pour leur liberté, pour l’égalité et pour leur autonomie sociale et professionnelle.

Notre majorité a défendu, depuis le début, le recours à la procédure législative assortie d’une résolution politique.

Madame la garde des sceaux, quelles en seront les modalités? Dans quel cadre strict respectant l’esprit de tolérance qui est le nôtre et dans le souci naturel de ne stigmatiser aucune population pouvons-nous répondre ensemble? L’unité nationale serait en effet une nécessité dans ce domaine afin que nous soyons exemplaires également au-delà de nos frontières. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d'État, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés.

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d'État, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés. Madame Ameline, la France, et c’est son honneur, assure pour tous les citoyens la liberté, l’égalité, le respect. Ces principes sont ceux qui garantissent l’unité nationale, ceux sur lesquels repose notre volonté commune de vivre ensemble. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle nous nous opposons au communautarisme.

Le port du voile – nous le ressentons ainsi – porte atteinte à la liberté, à la dignité de la femme et au respect qui lui est dû. C’est pourquoi la résolution et le projet de loi réaffirmeront avec force les valeurs républicaines qui sont partagées sur tous ces bancs.

Il ne s’agit pas de porter atteinte, de stigmatiser ou de montrer du doigt une religion. Je rappelle que la France assure à chacun la liberté de pratiquer sa religion. En ce qui concerne le monde musulman, les autorités religieuses ont bien réaffirmé que le port du voile n’était nullement une prescription du Coran: l’interdire n’est pas une atteinte au droit de nos compatriotes musulmans d’exercer librement leur religion; c’est l’affirmation de valeurs que nous partageons tous.

M. Roland Muzeau. Il n’y a que la manipulation politicienne qui vous intéresse!

Mme Michèle Alliot-Marie, garde des sceaux. C’est dans cet esprit de modération, de sérénité, mais aussi de détermination pour nos valeurs que nous allons travailler. Avec le Premier ministre, nous recevons les responsables religieux et politiques pour discuter du texte sur cette question qui touche aux fondements mêmes de notre République. Nous devons agir avec sérénité, mais avec volonté. La loi exprime l’intérêt général; la démocratie se vit à visage découvert.

M. le président. Merci!

Mme Michèle Alliot-Marie, garde des sceaux. À travers cette interdiction, je suis sûre que tous les républicains auront à cœur de le rappeler à chacun. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et sur plusieurs bancs du groupe NC.)

Situation de l'usine AFR de Douai et politique industrielle

M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Candelier, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.

M. Jean-Jacques Candelier. Monsieur le ministre chargé de l’industrie, je suis heureux de vous voir aujourd'hui, car le 30 avril, date d'une réunion à Bercy, seul votre collaborateur nous recevra pour évoquer l'avenir de l'usine AFR de Douai.

À cause du manque de volonté de l'État, cette usine de wagons de fret, comme le triage SNCF de Somain ou la raffinerie Total de Dunkerque, vont fermer. Assez d'opérations de communication: il faut du concret! Nous en avons assez des grands discours sur l'industrie en France.

Les 226 salariés sont en arrêt de travail technique et occupent légitimement le site pour sauver leur savoir-faire unique. Les syndicats cherchent à sauver les brevets, à recréer une structure juridique pour relancer la machine et honorer les commandes. Dans ce dossier, n'accusons pas les travailleurs de sabotage. Ils luttent pour leurs propres emplois et pour une meilleure gestion.

Monsieur le ministre, vous dites vouloir « renforcer la structuration des filières industrielles françaises ». Vous dites vouloir pérenniser les filières porteuses des emplois de demain, notamment dans le secteur stratégique du ferroviaire. Je dis « chiche »!

Le gros problème d'AFR, c'est le manque de capitaux, puisqu'il ne resterait que 3000 euros dans les caisses. Le soutien de l'État est indispensable pour créer un pôle ferroviaire dans le Nord–Pas-de-Calais, avec des entreprises comme Alstom ou Bombardier. À l'approche d'une possible liquidation judicaire d'AFR par le tribunal de commerce, êtes-vous prêt à mobiliser le fonds stratégique d'investissement?

De plus, pour développer réellement l'emploi en France, quelles dispositions entendez-vous proposer pour favoriser la reprise des activités par les salariés, qui sont, comme je le rappelle souvent, les seuls créateurs des richesses produites? (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR et sur quelques bancs du groupe SRC.)

M. le président. La parole est à M. Christian Estrosi, ministre chargé de l'industrie.

M. Christian Estrosi, ministre chargé de l'industrie. Monsieur Candelier, comme les salariés d’Arbel Fauvet Rail, je suis conscient des difficultés. (M. Maxime Gremetz brandit une pancarte.)

M. le président. Monsieur Gremetz! Huissiers veuillez récupérer cette pancarte!

M. Christian Estrosi, ministre chargé de l'industrie. Cela étant, nous n’avons jamais baissé les bras. Depuis 2004 – dois-je le rappeler? – il y a eu près de 13 millions d’euros d’abandon de dette sociale et fiscale ainsi que d’avances non remboursées. (M. Jean-Jacques Candelier brandit une pancarte identique que les huissiers récupèrent. - Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Malgré ces efforts, après de très longues périodes de redressement judiciaire entre janvier et décembre2009, nous n’avons pas pu éviter à Arbel Fauvet Rail les difficultés qu’elle rencontre aujourd’hui.

Quatre mois après, nous sommes malheureusement à nouveau dans une impasse de trésorerie qui fait peser une grave menace sur l’entreprise. Nous n’allons pas baisser les bras pour autant. Je suis prêt à examiner la possibilité de développer une filière de wagons de fret qui nous permette de démontrer que, dans ce bassin d’emplois, il y a une vraie viabilité pour cette activité. C’est dans ce cadre que je vous recevrai personnellement, à la demande du député-maire de Douai, Jacques Vernier…

M. Bernard Roman. Il n’est pas député! Les députés sont ici!

M. Christian Estrosi, ministre chargé de l'industrie.… avec l’ensemble des élus locaux.

Au-delà d’Arbel Fauvet, nous devons songer au rebond du territoire. Avec Michel Mercier et Laurent Wauquiez, nous mettrons en œuvre, au profit du Douaisis et du Valenciennois, 3 millions d’euros du fonds national de revitalisation pour les territoires, que nous rendons éligibles au contrat de transition professionnelle pour permettre la liquidation de 90 % des rémunérations qui seront touchées pendant douze mois par les salariés.

M. le président. Merci!

M. Christian Estrosi, ministre chargé de l'industrie. La priorité, c’est l’activité industrielle et l’emploi…

Économie sociale et solidaire

M. le président. La parole est à M. Francis Vercamer, pour le groupe Nouveau Centre.

M. Francis Vercamer. Monsieur le Premier ministre, vous m'avez confié, au mois d'octobre dernier, une mission sur le développement de l'économie sociale et de l'entreprenariat social, afin de déterminer les moyens de renforcer le potentiel de ce secteur de notre économie et d'identifier les freins à la création des entreprises sociales.

L'économie sociale et solidaire rassemble non seulement les associations, les fondations, les mutuelles et les coopératives, mais aussi des entreprises qui, sous une forme classique, mettent au cœur de leur projet une finalité, un mode d'action ou un fonctionnement social. Elle réunit des hommes et des femmes qui ont la volonté d'entreprendre autrement, en portant davantage leur attention sur le projet qu'ils développent et la manière de le mener à bien que sur la recherche d'un rendement financier maximal à court terme.

Fort de son poids – d'ores et déjà significatif dans notre économie –, de la diversité des activités qu'il regroupe, de ses valeurs et de son dynamisme, ce secteur manifeste un fort besoin de reconnaissance de la part des pouvoirs publics. Il souhaite, ainsi, participer à l'élaboration par l'État d'une politique de long terme qui vise à renforcer sa place dans la dynamique de création de richesse de notre société. Nous savons que l'État partage cet objectif qu'il entend notamment atteindre avec le grand emprunt et les 100 millions d'euros qu'il compte consacrer au développement de l'économie sociale.

À l’issue d'un travail d'auditions, j'ai remis, ce matin, à MM. Daubresse et Wauquiez un rapport qui avance cinquante propositions. Celles-ci ont pour objectif de donner une impulsion nouvelle au secteur et dessinent, ainsi, les contours d'une vaste politique d'ensemble dont la définition doit être poursuivie – c'est essentiel – avec la participation active des acteurs de l'économie sociale et solidaire.

Vous avez manifesté, monsieur le Premier ministre, votre volonté de voir notre pays se doter d'une politique ambitieuse de développement de l'économie sociale et de l'entreprenariat social. Quelles sont les prochaines étapes de l'élaboration de cette politique et quelles suites le Gouvernement entend-il donner aux orientations et propositions de ce rapport? (Applaudissements sur les bancs du groupe NC.)

M. le président. La parole est à M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État chargé de l’emploi.

M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État chargé de l’emploi. Monsieur le député Francis Vercamer, vous avez réalisé, dans le cadre de la mission qui vous a été confiée par le Premier ministre et à laquelle celui-ci est personnellement très attaché, un énorme travail.

M. Albert Facon. A-t-il été récompensé?

M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État. En effet, contrairement aux idées reçues, l’économie sociale est un secteur qui compte, puisque c’est 10 % de notre économie et à peu près 12 % de nos emplois. Ce secteur a crû, au cours de ces trois dernières années, deux fois plus vite que les autres secteurs de l’économie et a continué, pendant la crise, à créer de l’emploi. Ce secteur est très diversifié, puisqu’il s’étend des chantiers d’insertion, comme les Jardins de Cocagne, aux réseaux mutualistes, voire à la chaîne de vêtements Idéo. Mais il a une même conviction: l’économique ne s’oppose pas au social; investir sur la durée, sur l’humain, sur les équipes n’est pas l’ennemi de la compétitivité et de la rentabilité, bien au contraire.

Dans ce cadre, le Premier ministre a souhaité que nous renforcions l’économie sociale. Ainsi, 200 millions d’euros lui ont été consacrés dans le cadre du plan de relance et 100 millions d’euros permettront de soutenir ce secteur dans le cadre du grand emprunt.

Nous avions besoin d’un rapport qui nous permette d’identifier des pistes concrètes. C’est ce que vous avez fait en le remettant à Marc-Philippe Daubresse et à moi-même. Ce rapport porte sur des points très précis: création d’un label social, mise en place de formations, accession notamment au crédit pour l’innovation, mise en place de dispositifs permettant de favoriser la reprise d’entreprises par les salariés.

Le Premier ministre a souhaité que votre rapport ne reste pas lettre morte et qu’il puisse se traduire rapidement de manière concrète et opérationnelle. Il sera donc soumis dans les toutes prochaines semaines au Conseil supérieur de l’économie sociale. Le but est de renforcer l’économie sociale, non seulement dans l’intérêt de l’emploi, mais également parce que nous avons besoin, dans cette sortie de crise, du sens et des valeurs de l’économie sociale après les excès de l’économie financière! (Applaudissements sur les bancs du groupe NC et sur quelques bancs du groupe UMP.)

Petites retraites

M. le président. La parole est à Mme Martine Carrillon-Couvreur, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

Mme Martine Carrillon-Couvreur. Monsieur le ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique, un million de retraités vit aujourd’hui sous le seuil de pauvreté et 50 % des retraités ont une pension inférieure à 1000 euros. Cette situation est connue de tous et les quelques revalorisations, souvent inférieures à l'inflation, ne permettent pas d'améliorer le pouvoir d'achat de ces retraités. Ils sont de plus en plus nombreux à se retrouver dans une situation de précarité. Les travailleurs à temps partiel, les conjoints et aides familiaux dans l'agriculture et, en particulier, les femmes sont parmi les plus touchés. Nous le voyons chaque semaine dans nos permanences, où nous rencontrons des retraités qui ne peuvent plus honorer leurs factures.

Deux rapports récents pointent clairement cette situation: celui du Secours Catholique et celui du Médiateur de la République. Il s'agit, monsieur le ministre, d'une urgence sociale. Face à cette urgence, il faut replacer la solidarité nationale au cœur de notre système de retraite. L'équité implique que toutes les rémunérations contribuent au financement de notre système de protection sociale, qu'il s'agisse des stock-options ou des autres rémunérations du capital qui ne sont pas sollicitées à ce jour.

Un député du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. Très bien!

Mme Martine Carrillon-Couvreur. Il est insupportable que de nombreux Français se retrouvent, au moment de leur retraite, sans revenus décents, alors qu'ils ont participé durant leur carrière au dynamisme de la France.

Monsieur le ministre, allez-vous vous engager à soumettre les très hauts revenus, les produits du capital financier ou de la rente au financement de la solidarité nationale pour améliorer la situation du million de retraités qui vit aujourd’hui sous le seuil de pauvreté? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Mme Huguette Bello. Très bien!

M. le président. La parole est à M. Éric Woerth, ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique.

M. Éric Woerth, ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique . Madame la députée Carrillon-Couvreur, il s’agit évidemment d’un sujet de préoccupation majeure pour le gouvernement de François Fillon. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) C’est tellement vrai que nous avons fait voter l’augmentation de 25 % du minimum vieillesse sur cinq ans, donc jusqu’à la fin du mandat du Président de la République.

M. Albert Facon. Lequel?

M. Bernard Roman. Il n’y a pas eu de vote!

M. Éric Woerth, ministre du travail. Cela concerne 400000 personnes. Avez-vous voté cela? Non!

Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. Il n’y a pas eu de vote!

M. Éric Woerth, ministre du travail. Nous avons revalorisé de 11 % les pensions de réversion des plus modestes.

Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. Menteur!

M. Éric Woerth, ministre du travail. Cela concerne 600000 personnes. Avez-vous voté cela? (Vives protestations sur les bancs du groupe SRC.)

Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. Il n’y a pas eu de vote!

M. Éric Woerth, ministre du travail. Nous avons revalorisé les petites pensions agricoles, qui sont trop modestes. (Protestations sur les bancs du groupe SRC.)

M. Philippe Martin. Quelle honte!

M. Éric Woerth, ministre du travail. Cela représente un gain pour 230000 agriculteurs retraités! (Vives protestations sur les bancs du groupe SRC.)

Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. Menteur!

M. le président. Je vous en prie! Calmez-vous!

M. Éric Woerth, ministre du travail. Avez-vous voté cela? Non! (« C’est scandaleux! » sur les bancs du groupe SRC.)

Nous avons voté la revalorisation de l’aide à la complémentaire santé qui a été portée de 400 à 500 euros pour les personnes âgées les plus modestes. (Protestations sur les mêmes bancs.)

M. Philippe Martin. Quelle honte! C’est faux!

M. le président. On se calme, monsieur Martin!

M. Éric Woerth, ministre du travail. Avez-vous voté cela? (« Non! » sur les bancs du groupe UMP.)

Nous avons revalorisé les pensions complémentaires des agriculteurs, ce qui représente un gain moyen de 400 euros par an pour100000 veuves. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Avez-vous voté cela? (Protestations sur les mêmes bancs.)

De nombreux députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. Menteur!

M. Éric Woerth, ministre du travail. On peut, ainsi, le mercredi après-midi, essayer d’enfourcher tous les chevaux de bataille démagogiques! Il faut simplement essayer d’agir! (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Dans le débat sur les retraites, nous intégrons évidemment la dimension de la solidarité au plus haut niveau.

M. Philippe Martin. C’est faux! Quelle honte!

M. Éric Woerth, ministre du travail. Nous discutons avec les partenaires sociaux. Je discuterai avec le parti socialiste dans une heure et j’imagine que nous parlerons de la solidarité. Mais, madame, il faut être simplement à la hauteur de l’enjeu qui nous est posé. (Vivres protestations sur les bancs du groupe SRC.) Si vous êtes responsables, soyez-le jusqu’au bout! (Vifs applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC. – Vives protestations sur les bancs du groupe SRC.)

Marché de l’emploi

M. le président. La parole est à M. Philippe Armand Martin, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.

M. Philippe Armand Martin. Monsieur le secrétaire d’État chargé de l’emploi, selon les statistiques mensuelles publiées hier par Pôle emploi, le nombre de demandeurs d’emploi n’ayant pas du tout travaillé pendant le mois a baissé de 0,2 % en mars, pour atteindre 2661300. Cela confirme que le marché de l’emploi est dans une phase de stabilisation (Rires et exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR) et, surtout, que notre pays résiste mieux que nos voisins européens,

Cependant, ce sont avant tout les premiers fruits du travail accompli par le Gouvernement depuis de longs mois, avec un triple objectif sur le front de l’emploi: tout faire pour maintenir l’emploi et éviter les licenciements; aider les salariés ayant perdu leur travail à rebondir, en facilitant leur reconversion vers des secteurs porteurs; stimuler la création d’emplois dans les domaines qui restent dynamiques.

J’appelle tout particulièrement votre attention, monsieur le secrétaire d’État, sur l’aide à la reconversion des salariés ayant perdu leur emploi car l’action du Gouvernement est indispensable en la matière; je pense notamment aux salariés de ma circonscription qui vivent une telle situation.

Dans ce cadre, vous avez souligné à plusieurs reprises que vous vouliez des mesures simples, pragmatiques et rapidement opérationnelles: amélioration du dispositif de l’activité partielle, extension du contrat de transition professionnelle, mise en place du dispositif « zéro charges », renforcement du soutien à l’alternance pour les jeunes, ont bénéficié globalement de plus de 2,5 milliards d’euros supplémentaires par rapport au budget de l’emploi initial en 2009.

M. Christian Eckert. Dites ça sur le terrain!

M. Philippe Armand Martin. Je sais votre engagement et votre détermination en ce domaine. À la veille du sommet social du 10 mai prochain, pouvez-vous nous confirmer ces chiffres et nous indiquer quelle sera la poursuite de ces mesures sur le terrain? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à M. Laurent Wauquiez, secrétaire d’État chargé de l’emploi.

M. Laurent Wauquiez, secrétaire d’État chargé de l’emploi. Le chiffre du mois de mars, monsieur le député, est bon. Il ne doit évidemment pas nous inciter au triomphalisme mais il est un signe d’espoir fort après les mois douloureux qu’ont vécus nos compatriotes.

Une baisse de 6600 du nombre de demandeurs d’emploi représente le meilleur chiffre depuis deux ans. Cela montre clairement que le marché de l’emploi est en train de redémarrer,…

M. Christian Eckert. Tout va bien! Ne changez rien!

M. Laurent Wauquiez, secrétaire d’État. …avec des signaux d’espoir fort: la diminution du chômage des jeunes se poursuit pour le cinquième mois consécutif; les offres d’emploi sont en hausse sur un an de 16 %, et c’est le meilleur indicateur, avec 40000 offres d’emploi supplémentaires proposées; les licenciements, qui ont frappé durement sur votre circonscription, sont en réduction de 30 % ce mois-ci ce qui montre que, là encore, nous allons progressivement vers une sortie de la crise.

Il ne faut pas se raconter d’histoires: nous continuerons, dans les mois à venir, à avoir des chiffres moins bons. Néanmoins cela montre que nos efforts sont en train de payer et que, dans la zone européenne, la France est, avec l’Allemagne, le pays qui a les meilleurs résultats en termes de croissance comme en termes d’emploi.

Pour autant, il ne faut en aucun cas désarmer notre politique de l’emploi. Qu’il s’agisse de l’action « Zéro charges », qui a accompagné un million d’embauches dans les toutes petites entreprises, du programme « Former plutôt que licencier », qui a bénéficié à 400000 salariés, des programmes de reconversion des salariés des secteurs difficiles, de la défense de l’alternance, qui me tient également extrêmement à cœur, parce que c’est la meilleure voie d’insertion de nos jeunes dans l’emploi; dans tous ces domaines, nous devons continuer sans relâche.

La bataille de l’emploi n’est évidemment pas encore gagnée. Nous commençons à en récolter les fruits; les efforts vont payer; les résultats seront à l’arrivée. (Applaudissements sur de nombreux bancs des groupes UMP et NC.)

Situation des céréaliers

M. le président. La parole est à M. Philippe Vigier, pour le groupe Nouveau Centre.

M. Philippe Vigier. Ma question s’adresse à Bruno Le Maire, ministre de l’agriculture, et j’y associe François Sauvadet et l’ensemble des parlementaires du Nouveau Centre.

Près de 10000 agriculteurs ont manifesté hier dans les rues de Paris, parce que l’agriculture est en danger, toute l’agriculture.

Les céréaliers n’échappent pas à la règle. Ce ne sont pas des nantis; leur profession est également en crise. Plus de la moitié d’entre eux sont en déficit, c’est-à-dire qu’ils n’ont pas de salaire. Ne plus avoir d’autre perspective que le déclin est une souffrance terrible dont nous sommes tous témoins dans nos territoires. L’Europe, la France ont besoin d’une agriculture forte, et il n’y aura pas de ruralité dynamique sans agriculture.

Je tiens à saluer le travail accompli par Bruno Le Maire, avec la mise en place d’un plan de soutien de 1,8 milliard d’euros, qui prévoit non pas des aides mais des avances remboursables pour les exploitations agricoles. Je veux également souligner l’importance de l’appel qu’il a lancé pour fédérer autour de la France vingt-deux des vingt-sept pays de l’Union européenne.

Toutefois, la crise agricole ne sera pas résolue avec ces seules aides.

Face aux contraintes de plus en plus grandes auxquelles est confrontée la profession, face à la dérégulation des marchés, face à la spéculation, il faut une réponse de l’Europe et de la France qui soit à la hauteur du drame qui se joue.

Quelles réponses, concrètes apporte la loi de modernisation de l’agriculture pour sécuriser les revenus des agriculteurs?

Plusieurs députés du groupe SRC. Aucune!

M. Philippe Vigier. Quelles sont les perspectives du budget agricole de l’Union européenne en 2011?

Quels outils de régulation comptez-vous proposer au niveau de l’Organisation mondiale du commerce pour satisfaire à la fois les besoins en alimentation et la rémunération des agriculteurs et donner enfin des perspectives d’avenir au monde agricole? (Applaudissements sur les bancs du groupe NC.)

M. le président. La parole est à M. Michel Mercier, ministre de l’espace rural et de l’aménagement du territoire.

M. Michel Mercier, ministre de l’espace rural et de l’aménagement du territoire. Monsieur le député, je vous présente tout d’abord les excuses de Bruno Le Maire, qui est au Sénat pour un débat d’orientation agricole.

Le Gouvernement, soyez-en pleinement assuré, comprend parfaitement l’inquiétude et la souffrance des agriculteurs, en particulier celle des céréaliers, dont les revenus ont diminué de 85 % entre2007 et2009.

M. Roland Muzeau. N’importe quoi!

M. Michel Mercier, ministre de l’espace rural. Cette situation révèle les évolutions auxquelles nous devons faire face.

Nous entrons dans un monde agricole nouveau, avec une forte volatilité des prix et la concurrence de nouveaux acteurs, notamment des pays émergents tels que le Brésil, l’Inde, la Chine, et le retour de la Russie sur les marchés céréaliers. Il faut naturellement en tenir compte, donner aux agriculteurs les moyens de se mesurer avec ces nouveaux concurrents et, en même temps, prévoir une régulation des marchés agricoles européens.

Face à la crise, le Gouvernement a pris, à la demande du Président de la République, des mesures fortes pour répondre à l’urgence; c’est le plan de soutien exceptionnel de 1,8 milliard dont vous avez parlé et qui a pleinement bénéficié au secteur céréalier.

Avec le projet de loi de modernisation de l’agriculture, le Gouvernement prend aussi des mesures structurelles. Ce projet sera examiné dès le 18 mai au Sénat.

C’est également au niveau européen qu’il est impératif d’agir, avec la régulation des marchés agricoles. L’Union européenne doit protéger et agir sur les marchés. Bruno Le Maire est intervenu auprès du commissaire européen en demandant que soient la mise en œuvre de l’intervention communautaire et prises des mesures permettant de soulager le marché, que ce soit par une amélioration du stockage ou par une augmentation du budget communautaire.

Soyez assuré que le Gouvernement sera attentif au sort des agriculteurs et au suivi de ce dossier. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe NC.)

Réforme des IUFM

M. le président. La parole est à M. Pascal Deguilhem, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

M. Pascal Deguilhem. Avant de poser ma question, je voudrais rappeler à M. Woerth que ce sont son gouvernement et sa majorité qui ont, il y a quelques semaines, voté contre notre proposition de loi sur le régime de retraite complémentaire obligatoire pour les conjoints et aides familiaux. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC. – Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Monsieur le ministre de l’éducation nationale, les inspecteurs d’académie ne passent pas pour être des agitateurs irresponsables et déloyaux à l’égard de leur ministre de tutelle. Ils vous ont néanmoins interpellé récemment sur les conséquences négatives, et même inquiétantes, des décisions prises actuellement quant à l’affectation, le service et les modalités de formation des futurs professeurs stagiaires.

Tout comme les enseignants formateurs qui encadrent les nouveaux collègues, ils sont consternés de constater que l’affectation des lauréats du concours sur un poste à temps plein rendra leur entrée dans le métier bien plus difficile qu’auparavant.

Comment imaginer qu’un jeune enseignant nommé à temps complet, et qui aura naturellement aussi à préparer ses cours, disposera du temps nécessaire à la réflexion et à la concertation? De quels moments disposera-t-il pour profiter de l’expertise de son enseignant tuteur? Votre réforme et les conditions de sa mise en œuvre – nous l’avons dit et répété à votre prédécesseur – suppriment totalement la passation d’expérience entre anciens et nouveaux enseignants.

À l’évidence, ces dispositions qui ont uniquement pour but de diminuer la charge budgétaire de l’éducation nationale présentent le risque de nuire sérieusement à la qualité de l’enseignement et à la sécurité professionnelle des jeunes enseignants, amenés à exercer un métier difficile. Elles poseront également de multiples problèmes aux rectorats et aux inspections académiques.

Monsieur le ministre, on ne peut pas faire d’économie sur la formation pédagogique des enseignants; elle est indispensable à la réussite des élèves. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.) Celles et ceux qui souhaitent défendre un service public d’éducation de qualité vous ont posément alerté. Allez-vous les entendre? Allez-vous revenir sur tout ou partie de ces dispositions? (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

M. le président. La parole est à M. Henri de Raincourt, ministre chargé des relations avec le Parlement.

M. Henri de Raincourt, ministre chargé des relations avec le Parlement. Mesdames, messieurs les députés, je vous présente les excuses de mes collègues Luc Chatel, qui accompagne le Président de la République en Chine, et Valérie Pécresse, qui est souffrante.

Le Gouvernement n’a pas du tout l’intention de faire des économies sur la formation, en particulier sur la formation des maîtres, car nous considérons qu’il s’agit d’un atout majeur pour notre pays. C’est tout le sens de la réforme aujourd’hui menée pour améliorer le contenu de cette formation sans négliger l’expérience au profit des élèves.

Vous le savez, monsieur le député, dès la rentrée prochaine, les étudiants qui souhaitent devenir enseignants et passer les concours de l’éducation nationale devront justifier de cinq années d’études.

M. Pascal Deguilhem. Ça n’est pas le problème!

M. Henri de Raincourt, ministre chargé des relations avec le Parlement. Nous élevons donc le niveau de la qualification. En outre, nous organisons la formation en alternance dans les classes.

Tel est, monsieur le député, le sens de la réforme que nous menons: des professeurs mieux formés, mieux payés et mieux considérés.

M. Yves Durand. C’est n’importe quoi!

M. Henri de Raincourt, ministre chargé des relations avec le Parlement. Quant aux locaux, vous le savez très bien, un travail de proximité est actuellement conduit à la demande de ma collègue Valérie Pécresse.

Nous ne devons donc pas parler des mêmes choses (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR) parce qu’il est bien certain à nos yeux que la formation est une priorité absolue pour l’avenir. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes UMP et NC.)

RSA jeunes

M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Binetruy, pour le groupe UMP.

M. Jean-Marie Binetruy. Monsieur le ministre de la jeunesse et des solidarités actives, le principe du RSA jeunes en faveur des moins de vingt-cinq ans ayant déjà travaillé au moins deux ans a été approuvé par notre assemblée dans le cadre de la loi de finances pour 2010, conformément à l’engagement pris par le Président de la République dans un discours prononcé en Avignon le 29 septembre 2009, pour une application effective au 1 er  septembre 2010.

C’est une mesure d’équité en faveur de notre jeunesse, qui fait suite à la généralisation, le 1 er  juin 2009, du revenu de solidarité active, mesure phare de l’action de Martin Hirsch, haut commissaire aux solidarités actives.

M. Jean-Pierre Dufau. Il est parti!

M. Jean-Marie Binetruy. Dans le cadre d’une mission de suivi de la mise en place du RSA, qui m’a été confiée par notre commission des finances, je me suis rendu dans plusieurs départements où j’ai pu rencontrer les personnels des CAF et des conseils généraux en charge de ce dossier.

Je voudrais tout d’abord saluer le remarquable travail des uns et des autres. Il a permis la mise en place de ce dispositif qui a sensiblement amélioré les conditions de vie des foyers les plus modestes et a également contribué à réduire de plus de moitié le nombre de dossiers en stock par rapport aux périodes les plus critiques de fin 2009 et début 2010.

Pour éviter un nouvel engorgement des CAF avec la mise en place du RSA jeunes, qui pourrait concerner 160000 personnes, pour leur permettre d’anticiper et de s’organiser afin d’apporter le meilleur service aux jeunes bénéficiaires, ces personnels souhaiteraient que soient connues le plus rapidement possible les modalités d’application de cette mesure très attendue, qui doit faire l’objet d’un décret à paraître prochainement.

Pourriez-vous, monsieur le ministre, informer la représentation nationale de la date de publication de ce décret et des grandes lignes de son contenu? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à M. Marc-Philippe Daubresse, ministre de la jeunesse et des solidarités actives.

M. Marc-Philippe Daubresse, ministre de la jeunesse et des solidarités actives . Monsieur le député, vous avez activement participé à l’élaboration de la loi généralisant le revenu de solidarité active et vous continuez en conduisant des missions d’évaluation tout à fait utiles sur le terrain. Vous êtes donc bien placé pour savoir qu’aujourd’hui 1132000 personnes perçoivent le RSA que l’on appelait le RMI, et que 625000 personnes perçoivent désormais le revenu de solidarité d’activité qui n’existait pas antérieurement.

Tout ce que vous a dit Éric Woerth avant moi est vrai. D’un côté de l’hémicycle, vous avez des personnes qui stigmatisent des mesures fiscales pour quelques centaines de millions d’euros alors que, de l’autre côté, nous avons mis en place des mesures de plusieurs milliards d’euros. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.) Si vous ajoutez tout ce qu’a rappelé Éric Woerth au revenu de solidarité active et aux mesures prises dans le cadre du plan de relance de l’économie, il n’y a pas photo, mes chers collègues: nous sommes bien au rendez-vous de la justice sociale pour que, comme le voulait le Président de la République, personne ne reste sur le bord du chemin! (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC. – Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

En ce qui concerne le revenu de solidarité active pour les jeunes, dès lors que l’on décide d’attribuer un revenu complémentaire d’activité aux personnes qui travaillent, c’était une grande injustice, qui datait d’au moins trente ans, de prendre un seuil de vingt-cinq ans. Un jeune de vingt-quatre ans et six mois qui travaille doit avoir les mêmes droits qu’un jeune de vingt-cinq ans et six mois. Encore faut-il qu’il ait cette période de travail.

Le décret paraîtra dans les jours qui viennent, comme le Premier ministre l’a souhaité. Il confirmera la décision du Président de la République d’assortir la mesure de la condition d’avoir travaillé deux ans au cours des trois années précédentes. Ce décret concerne bien 160000 jeunes…

Investissements chinois à Lisieux

M. le président. La parole est à Mme Philippe Duron, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

M. Philippe Duron. Vous tenez, monsieur le ministre de l’industrie, un discours très volontariste sur la politique industrielle du Gouvernement. Devant notre assemblée, le 4 novembre dernier, répondant à une question de notre collègue Claude Leteurtre sur les états généraux de l’industrie, vous donniez des assurances sur l’avenir de la société Plysorol: « Plysorol est ouvert. les ouvriers sont au travail […] le repreneur s’est engagé sur de nouveaux investissements ».

Or quelques mois plus tard, la réalité est toute autre: cette entreprise se trouve dans une situation dramatique. En redressement judiciaire pour la seconde fois en un an, elle doit, si l’on veut préserver ses 500 emplois sur notre territoire à Lisieux, Fontenay-Le-Comte et Épernay, trouver un repreneur au cours des prochains jours. Victime d’un actionnaire chinois intéressé par ses seules filiales et forêts gabonaises, cette entreprise est aujourd’hui atteinte dans ses actifs et confrontée à une situation financière très dégradée.

Dans cette affaire qui concerne trois régions – Basse-Normandie, Pays-de-Loire et Champagne-Ardenne – les collectivités territoriales ont, depuis 2008, affirmé leur disponibilité pour contribuer au redressement de l’entreprise, mais l’actionnaire chinois a refusé tout concours public.

Aujourd’hui, dans l’impasse dans laquelle se trouve l’entreprise, seul l’État est en capacité de contribuer à une solution en recherchant un partenaire industriel qui s’appuie sur les sites français et des partenaires financiers dans la filière bois.

Au nom des salariés qui se sentent abandonnés, et des élus en attente d’un État plus présent, je souhaite, monsieur le ministre, que, dans cette période où va se jouer le sort de Plysorol, au-delà des déclarations d’intention volontaristes, vous vous engagiez devant la représentation nationale à rechercher une solution qui préserve l’activité et les emplois industriels dans des territoires déjà fortement touchés par la désindustrialisation. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.)

M. le président. La parole est à M. Christian Estrosi, ministre chargé de l’industrie.

M. Christian Estrosi, ministre chargé de l’industrie. Monsieur Philippe Duron, il s’agit de 437 emplois à Lisieux, Épernay, Fontenay-Le-Comte où je me suis rendu personnellement, et de 350 emplois au Gabon. Je vous rappelle que ce n’est pas le Gouvernement mais le tribunal de commerce qui a accordé la reprise de l’entreprise à ce repreneur chinois. Nous nous sommes battus pour obtenir des délais de paiement auprès de l’URSSAF; nous nous sommes battus pour qu’il n’y ait pas de coupure de courant de la part d’EDF. Malheureusement, au bout de toutes ces démarches, nous n’avons pu qu’enregistrer, le 8 avril dernier, le dépôt de bilan de l’entreprise (Murmures sur les bancs des groupes SRC et GDR) à cause du comportement de ses responsables.

M. Maxime Gremetz. Il faut les mettre en prison!

M. Christian Estrosi, ministre chargé de l’industrie. Bien évidemment, je mobilise aujourd’hui toute mon énergie pour rechercher un nouveau repreneur, et je recevrai les dirigeants concernés, vous-même et les élus locaux après la date de dépôt des nouveaux dossiers, qui sera fixée dans les semaines qui viennent.

Je puis vous assurer que je serai attentif à ce qu’il n’y ait aucune cession de la filiale gabonaise. J’ai demandé à notre ambassadeur au Gabon de rencontrer le Président Ali Bongo à ce sujet. (Murmures sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Monsieur Philippe Duron, il est trop facile d’intervenir ainsi sur le cas d’une entreprise alors que l’on sait que les conséquences qu’elle subit aujourd’hui sont le fruit des erreurs des politiques industrielles conduites pendant des années (Rires et exclamations sur les bancs du groupe SRC) , politiques que vous-même et vos amis n’avez cessé de soutenir.

M. Philippe Duron. Vous êtes au pouvoir depuis huit ans!

M. Christian Estrosi, ministre chargé de l’industrie. Au terme des états généraux de l’industrie, nous ne disons pas que l’avenir de la France est celui d’un pays de services, de finances et d’économie virtuelle. Au contraire, son avenir réside dans la révolution industrielle que nous commençons à mener, avec une véritable politique de filières et de pôles de financement public, une véritable politique qui nous permette d’harmoniser les filières avec nos partenaires européens comme l’a fait l’Allemagne.

Ainsi nous sommes en train d’inverser le cours des choses: 6,6 % de reprise de la commande industrielle alors que ce taux n’est que de 3,3 % au plan européen.

M. le président. Merci!

M. Christian Estrosi, ministre chargé de l’industrie. Cela veut dire que notre politique industrielle est en train de porter ses fruits…

Contrôle de constitutionnalité par le citoyen

M. le président. La parole est à M. Dominique Perben, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.

M. Dominique Perben. Madame la garde des sceaux, lors de la récente réforme de la Constitution, nous avons souhaité, les uns et les autres, donner de nouveaux droits à nos concitoyens et, en particulier, leur permettre de soulever, à l’occasion de toute affaire devant un tribunal, une question prioritaire de constitutionnalité. Il s’agit ainsi de donner à chaque citoyen la possibilité de faire vérifier par le Conseil constitutionnel la conformité d’une loi à la Constitution.

Cette réforme est aujourd’hui applicable. Or le 16 avril dernier, la Cour de cassation a rendu un arrêt surprenant, transmettant à la Cour de justice de l’Union européenne un cas dont elle était saisie pour faire vérifier la compatibilité de notre dispositif constitutionnel et législatif avec le droit communautaire. Chacun se souvient pourtant que la nouvelle question préalable de constitutionnalité n’entame en rien le droit et le devoir des juridictions de veiller au respect du droit communautaire.

M. Jean-Pierre Soisson. Très juste!

M. Dominique Perben. Lors de nos débats, tous les orateurs, sur tous les bancs, l’avaient souligné. Dès lors comment interpréter un tel arrêt?

La Cour de cassation met en cause une réforme constitutionnelle…

M. Jean-Pierre Soisson. Bravo!

M. Dominique Perben. …qui a créé un droit nouveau pour nos concitoyens en laissant penser à la Cour de justice de l’Union que ladite réforme serait contraire au droit communautaire, ce qui, à l’évidence, est inexact.

M. Guy Geoffroy. Tout à fait!

M. Dominique Perben. Cette affaire pose la question de savoir si les juges peuvent s’arroger le droit de faire obstacle à la volonté du législateur. (Exclamations sur de nombreux bancs du groupe UMP.) Cette décision de la Cour de cassation pose le problème de la séparation des pouvoirs et soulève une grave question constitutionnelle.

Madame la garde des sceaux, comment envisagez-vous les suites de cette affaire? (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC, et sur plusieurs bancs du groupe SRC.)

M. le président. La parole est à Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d’État, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés.

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d’État, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés. Monsieur Perben, vous le savez pour avoir exercé ces fonctions, le ministre de la justice n’a pas le pouvoir de commenter un arrêt de la Cour de cassation.

M. Roland Muzeau. Mais?...

Mme Michèle Alliot-Marie, garde des sceaux. Cela ne m’empêchera pas de rappeler quelques réalités.

La première de ces réalités, c’est que la question de constitutionnalité ouvre un droit nouveau et considérable à nos concitoyens. Tout Français devant une juridiction a la possibilité de lui demander qu’une loi qui ne serait pas conforme aux garanties et aux libertés prévues par la Constitution non seulement ne soit pas applicable à son cas, mais même soit abrogée.

M. Maxime Gremetz. On le sait déjà!

Mme Michèle Alliot-Marie, garde des sceaux. La deuxième réalité, c’est que si les juridictions judiciaires et administratives sont les seuls juges du fond, lorsqu’une question de constitutionnalité apparemment sérieuse et nouvelle est soulevée, la Cour de cassation ou le Conseil d’État doivent la transmettre au Conseil constitutionnel. Le Conseil d’État l’a déjà fait à cinq reprises.

La troisième réalité, c’est que ces nouvelles dispositions ne font pas du tout obstacle à l’application du droit communautaire, conformément à la volonté du législateur. Il est clair que le législateur souverain a voulu clairement rendre prioritaire l’examen par le Conseil constitutionnel.

Plusieurs députés du groupe SRC. Deux minutes!

Mme Michèle Alliot-Marie, garde des sceaux. L’arrêt de la Cour de cassation ne fait pas obstacle à la mise en œuvre de la question de constitutionnalité.

M. Jean Mallot. Nous non plus!

Mme Michèle Alliot-Marie, garde des sceaux. La loi constitutionnelle est et sera respectée, monsieur le député. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe UMP.)

M. le président. Mes chers collègues, l’importance de la réponse de Mme la garde des sceaux sur un sujet touchant à la primauté de notre Constitution justifiait que je lui accorde quelques secondes supplémentaires.

Création des maisons d'assistants maternels

M. le président. La parole est à M. Jean-Patrick Gille, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

M. Jean-Patrick Gille. Madame la secrétaire d'État chargée de la famille et de la solidarité, les professionnels de la petite enfance sont mobilisés contre votre politique. On les comprend! (« Ils ont raison! » sur les bancs du groupe SRC.)

Pour honorer la promesse présidentielle de créer 200000 places d'accueil supplémentaires alors qu’il en faudrait 350000 comme nous le savons, vous avez fait essentiellement le choix de déréglementer, d'abaisser les normes d'encadrement et de formation et de favoriser largement l'émergence du secteur privé lucratif. (« C’est faux! » sur les bancs du groupe UMP.)

M. Jean-Pierre Soisson. Vous exagérez comme d’habitude!

M. Jean-Patrick Gille. Votre stratégie est claire: faire primer la quantité sur la qualité et considérer l'accueil de la petite enfance comme un service à la personne comme un autre. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

J'en veux pour preuve la suppression dans votre décret de la référence à un projet éducatif, comme c'est également le cas dans la proposition de loi créant les maisons d'assistants maternels que nous examinerons demain.

Si elle est adoptée en l'état, elle donnera la possibilité à quatre assistants maternels de se regrouper sur un même lieu pour accueillir jusqu'à seize enfants et autorisera la délégation d'accueil d'une assistante à une autre, ce qui n’ira pas sans poser la question de la responsabilité.

Vous créez ainsi une forme d'accueil collectif déguisé, totalement exonéré des principales normes de fonctionnement, de supervision et de formation du personnel.

M. François Grosdidier. Vous voulez la pénurie!

M. Jean-Patrick Gille. Cette généralisation hâtive de quelques expérimentations en milieu rural risque de remettre en cause l'effort de professionnalisation et de qualification engagé avec succès depuis plusieurs années et va aussi entraîner un surcoût pour les familles. (« Mais non! sur les bancs du groupe UMP.)

Parce que la petite enfance est le premier temps de l'éducation, il faut au contraire soutenir l'effort de formation des assistants maternels et investir massivement dans l'accueil collectif des enfants de zéro à trois ans, notamment sous la forme d’un service public local de la petite enfance.

C'est pourquoi, madame la secrétaire d’État, avec les professionnels et de nombreux élus locaux…

M. François Grosdidier. Ce n’est pas vrai!

M. Jean-Patrick Gille. …nous vous demandons de revoir votre copie et de reprendre le chemin de la concertation. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. le président. La parole est à Mme Nadine Morano, secrétaire d'État chargée de la famille et de la solidarité.

Mme Nadine Morano, secrétaire d'État chargée de la famille et de la solidarité. Monsieur le député Gille, ce matin j’étais chez votre collègue Serge Grouard, à Orléans dans le Loiret, ville et département exemplaires en matière de développement des modes de garde de la petite enfance et de toutes ces initiatives qui rendent service aux familles. J’en ai profité pour dresser un premier bilan de la politique du Gouvernement s’agissant du développement des modes de garde.

Monsieur le député, je vous rappelle qu’en pleine période de crise économique et financière, au mois d’avril dernier, nous avons signé une convention d’objectif et de gestion avec la CNAF portant sur un montant de 1,3 milliard d’euros. Cette convention nous permet de tenir notre engagement de créer 200000 offres de gardes supplémentaires sur l’ensemble du territoire. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

S’agissant de l’accueil collectif, nous avons déjà rempli près de 50 % de nos objectifs…

M. Jean-Pierre Dufau. Avec moins d’aides!

Mme Nadine Morano, secrétaire d'État. …puisque près de 45000 places ont été créées, grâce à l’optimisation des structures existantes et aux créations. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP.)

S’agissant des assistants maternels, les regroupements existent déjà depuis le PLFSS pour 2009! Vous ne l’avez pas voté! (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Nous avons aussi donné aux assistants maternels la possibilité d’avoir quatre agréments, contre trois auparavant. Nous avons permis le versement d’une prime à l’installation de 300 à 500 euros dans les secteurs déficitaires.

Dans le cadre du PLFSS pour 2010, cette majorité a voté un prêt à taux zéro d’un montant plafonné à 10000 euros, afin d’aider à l’installation des assistants maternels.

Nous souhaitons offrir aux familles des modes de garde diversifiés sur l’ensemble du territoire, avec des accompagnements pour les horaires atypiques.

Nous sommes en train de tenir l’ensemble de nos engagements comme le démontre le tableau de bord de la CNAF. Désolée de vous décevoir, monsieur le député! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Chômeurs en fin de droits

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Nicolas, pour le groupe de l’UMP.

M. Jean-Pierre Nicolas. Monsieur le secrétaire d'État chargé de l’emploi, l'enquête annuelle de Pôle emploi fait ressortir qu'une entreprise sur cinq prévoit de recruter au moins une personne cette année. Ces intentions de recrutement pourraient générer 1,7 million d'embauches dans notre pays. C'est une bonne nouvelle pour l'emploi qui subit de plein fouet les effets de la crise économique et financière que nous connaissons tous.

Avant la traduction concrète de ces perspectives, il est un problème urgent à régler, celui des chômeurs en fin de droits.

« On ne laissera personne sur le bord de la route » a déclaré le Président de la République. Nous nous en réjouissons tous, car il s'agit là d'un problème de solidarité nationale à l'égard des 360000 chômeurs qui arrivent en fin de droits et qui, en l'état actuel des dispositifs, se trouveraient dans une situation de précarité que personne ne peut accepter.

Monsieur le secrétaire d'État, je sais que, sous l'impulsion du Président de la République et du Premier ministre, vous avez pris ce problème à bras-le-corps afin de mettre en place ce que j'appellerai un « plan de rebond » pour l'emploi.

À cet effet, vous avez multiplié inlassablement les contacts, les réunions et les discussions non seulement avec les partenaires sociaux, bien sûr, mais aussi avec tous les organismes susceptibles d'apporter leur contribution à ce devoir de solidarité nationale dans une logique de droits et de devoirs.

Monsieur le secrétaire d'État, pouvez-vous exposer à la représentation nationale l'état d'avancement de vos travaux et dire quels espoirs peuvent entretenir nos concitoyens frappés par le chômage et se trouvant en fin de droits? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État chargé de l’emploi.

M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État chargé de l’emploi. Monsieur le député Jean-Pierre Nicolas, vous avez rappelé que ce sujet était très difficile: sous l’effet de la crise, plus de 350000 de nos compatriotes allaient se retrouver sans aucun droit à assurance chômage et sans aucun dispositif de soutien.

Le Gouvernement s’était engagé à apporter une réponse, de le faire vite, afin d’offrir une protection à l’ensemble des demandeurs d’emploi concernés.

Je ne doute pas que tous ceux qui se sont amusés à avoir la critique facile sur ce sujet ne manqueront pas aussi de souligner le travail accompli par les partenaires sociaux sur cette question.

Nous avons donc travaillé d’arrache-pied pendant un mois, tenu plus d’une trentaine de réunions, afin d’obtenir un accord avec les partenaires sociaux et l’ensemble des secteurs du Gouvernement. La quasi-totalité des partenaires sociaux a validé cet accord qui a été signé la semaine dernière. La CFDT, FO, la CFTC, la CGC, le MEDEF, l’UPA, tous se sont retrouvés sur le même dispositif.

Ce dispositif permettra d’abord de répondre aux 360000 demandeurs d’emplois – je sais que vous y teniez. Il sera centré sur le retour à l’emploi, car il n’était pas question de créer un nouveau dispositif d’assistanat: le but est de garder le lien avec le travail, de miser sur des formations et sur des contrats.

Ce dispositif permettra aussi de répondre aux classes moyennes. Trop souvent en effet, comme vous le savez, pour quelques euros de trop, des familles de classe moyenne passent systématiquement à côté de nos mesures de soutien et de nos politiques sociales. Cela suffit! Les classes moyennes modestes ont aussi le droit à notre attention et à toutes nos mesures. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP.)

Enfin, ce dispositif reposera sur des mesures simples de droits et de devoirs. Quelqu’un qui ne viendrait que pour toucher l’allocation se verra répondre: non!

M. Guy Geoffroy. Très bien!

M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État. Ce dispositif est fait pour des gens qui veulent revenir vers l’emploi, pas pour ceux qui veulent profiter de l’assistanat. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Schéma minier en Guyane

M. le président. La parole est à Mme Christiane Taubira, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

Mme Christiane Taubira. Ma question concerne le schéma minier en Guyane, seul territoire aurifère de la République. Je l’adresse à M. le Premier ministre, car la mise en œuvre de ce schéma nécessitera des arbitrages interministériels entre le ministère de l’industrie, qui a plutôt la culture de l’exploitation des ressources partout où elles existent, celui de l’environnement et du développement durable, qui devrait se préoccuper des écosystèmes fragiles, celui des finances, qui sera inévitablement sollicité pour des exonérations fiscales, celui des affaires sociales, qui, face aux indicateurs économiques et sociaux désastreux, notamment le taux de chômage, poussera certainement à l’exploitation, et le ministère de l’outre-mer, enfin, qui fera mine d’avoir tout compris avant les autres. (Sourires.)

Le schéma minier, élaboré par un préfet dépêché par le Président de la République l’an dernier, fera l’objet à partir de demain d’une enquête publique. Il laisse en suspens les questions importantes que le Gouvernement a refusé de trancher lors du Grenelle 1, et qui se poseront de nouveau avec l’examen du Grenelle 2.

Une telle méthode ne permet pas de saisir la stratégie du Gouvernement en matière d’exploitation minière, l’État étant propriétaire, en Guyane, de la totalité du sous-sol et de 90 % du sol. Afin d’y voir plus clair, j’aimerais savoir si vous comptez procéder à l’inventaire des autres ressources naturelles, comme le préconise le schéma, et, si oui, avec quel budget et selon quel calendrier, sachant que l’inventaire du BRGM, le Bureau de recherches géologiques et minières, a duré presque vingt-cinq ans.

Comment seront articulés le schéma d’aménagement régional et le schéma minier, sachant que la hiérarchie des normes n’est pas claire et que cette question détermine le fait de savoir qui, de l’État ou de la région, donnera l’impulsion économique?

Selon quels principes traiterez-vous les conflits d’usage au sein des territoires entre l’exploitation minière d’une part, les lieux, les modes de vie, les servitudes sur l’eau et les inventaires naturalistes, de l’autre? Le code minier n’apporte pas de réponses suffisantes, compte tenu des dérogations substantielles déjà accordées.

Enfin, quelles garanties apporterez-vous sur les mesures compensatoires d’intérêt général et sur la prise en compte de l’avis des habitants qui résident dans des zones directement exposées à l’exploitation minière, mais n’ont pas la culture de l’enquête publique? (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe SRC et sur quelques bancs du groupe GDR.)

M. le président. La parole est à Mme Chantal Jouanno, secrétaire d’État chargée de l’écologie.

Mme Chantal Jouanno, secrétaire d’État chargée de l’écologie. L’élaboration du schéma minier a été décidée, madame Taubira, après la décision du Président de la République d’interdire l’exploitation d’une mine d’or dans la montagne de Kaw, au motif que celle-ci est un réservoir de biodiversité exceptionnel. À l’époque, les acteurs locaux nous avaient dit que de tels motifs environnementaux ne justifiaient pas que l’on mette l’ensemble du territoire guyanais, en effet exceptionnel de ce point de vue, sous cloche; d’où l’idée de ce schéma destiné à définir, pour les ressources minières, les zones d’exploitation autorisées, sachant que les zones interdites ne le sont pas toujours pour des motifs seulement environnementaux.

Comme vous l’avez rappelé, le schéma sera soumis à la consultation publique pendant deux mois, ainsi qu’à une concertation avec les collectivités, puis avec les chambres consulaires. Nous espérons donc qu’il sera définitivement arrêté, par un décret en Conseil d’État, avant la fin de l’année.

Reste que ce schéma ne règle pas tout. Je pense par exemple aux ressources minières en mer, pour lesquelles nos connaissances sont aujourd’hui insuffisantes; il s’agira donc d’une deuxième étape.

Par ailleurs, nous répétons souvent que la biodiversité est une source de développement, mais il nous faut encore le prouver pour la Guyane car le schéma ne règle pas cette question; aussi souhaitons-nous relancer une nouvelle mission sur le sujet, puisque la première n’avait pas été concluante.

Troisième point: nous ne réussirons à développer l’orpaillage légal qu’en luttant contre l’orpaillage illégal. Tel est le but de l’opération Harpie, plan de lutte permanent décidé par le Président de la République qui mobilise sur le terrain, sous l’autorité de Brice Hortefeux, plus de 950 militaires et gendarmes.

Beaucoup de questions restent donc posées, mais nous sommes ouverts au dialogue pour le développement par la biodiversité.

Hôpital franco-espagnol

M. le président. La parole est à M. François Calvet, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.

M. François Calvet. Madame la ministre de la santé et des sports, lundi dernier, vous vous êtes rendue à la frontière franco-espagnole, dans les Pyrénées-Orientales, pour signer la convention relative au Groupement européen de coopération territoriale, qui consacre la réalisation et le fonctionnement de l'hôpital transfrontalier commun entre la France et l'Espagne à Puigcerdà. L'Europe va ainsi verser 18,6 millions d'euros de subventions pour cet ouvrage en cours de construction. L'hôpital permettra d'assurer l'offre de soins de proximité pour les patients résidant dans ces zones de montagne ainsi que pour les touristes qui fréquentent nos stations d'hiver ou d'été de part et d'autre de la frontière. Il sera mis en réseau avec les futurs pôles gériatrique et pédiatrique.

La mission transfrontalière qui s'est rendue sur le site a néanmoins constaté que des obstacles juridiques subsistaient. Ces difficultés sont dues aux règles peu adaptées du droit français, notamment celles qui interdisent aux élus locaux d'être membres du conseil d'administration du GECT, au motif que la compétence sanitaire relève du seul État central, ce qui n'est pas le cas en Espagne. Des difficultés existent également en matière d'état-civil. En effet, les enfants nés dans cet hôpital commun seront considérés comme nés à l'étranger.

Pouvez-vous m'éclairer sur les solutions qui seront apportées à ces obstacles juridiques, et m’indiquer quelles seront les règles applicables pour les salariés français de cet hôpital en matière de recrutement, de formation et de statut des personnels?

Enfin, madame la ministre, pensez-vous étendre cette expérience sanitaire unique en Europe à d'autres territoires frontaliers? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé et des sports.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé et des sports. Nous étions en effet réunis lundi dernier, monsieur Calvet, pour signer avec José Montilla, président de la Généralité de Catalogne, la convention instituant le groupement de coopération transfrontalière de Puigcerdà. Un équipement de qualité sera ainsi offert aux habitants de cette zone particulièrement difficile d’accès, le plateau cerdan. Je vous remercie, monsieur le député, d’avoir œuvré à la création de cet établissement.

Première question, à caractère juridique, que vous avez soulevée: comment associer les élus locaux? Nous avons résolu ce problème en créant une commission consultative ad hoc qui réunira les élus territoriaux au côté du conseil d’administration.

Votre deuxième question porte sur la nationalité des enfants nés dans cet hôpital. La solution est simple: les enfants de parents français resteront bien entendu français; il suffira à leurs parents de transmettre au consul général de France à Barcelone, dans le mois qui suit la naissance, une demande de transcription sur les registres d’état-civil français.

Quant aux personnels, ils seront, soit recrutés directement par l’hôpital, et relèveront bien sûr du droit espagnol, soit en situation de détachement à partir d’un établissement hospitalier français, auquel cas leur statut restera régi par le droit français. Enfin, conformément aux règlements communautaires de coopération des régimes de sécurité sociale, tous les trimestres acquis dans l’hôpital de Puigcerdà seront pris en compte pour le calcul des droits à la retraite en France.

Ce faisant, nous avons ouvert des voies juridiques utiles pour les futurs projets de coopération transfrontalière, que j’espère nombreux. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

M. le président. Nous avons terminé les questions au Gouvernement.

Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à seize heures cinq, est reprise à seize heures vingt, sous la présidence de M. Marc Le Fur.)
Présidence de M. Marc Le Fur,
vice-président

M. le président. La séance est reprise.

Débat sur l’évolution de l’emploi industriel

M. le président. L’ordre du jour appelle le débat sur l’évolution de l’emploi industriel en France.

L’organisation de ce débat ayant été demandée par le groupe de la Gauche démocrate et républicaine, la parole est au premier orateur de ce groupe, M. Alain Bocquet, pour dix minutes.

M. Alain Bocquet. Monsieur le président, monsieur le ministre chargé de l’industrie, mes chers collègues, si le groupe des députés communistes et du parti de gauche a demandé que soit organisé un débat sur l’évolution de l’emploi industriel, c’est parce qu’il y a urgence: notre industrie est dans l’œil du cyclone. MEDEF et Gouvernement feignent de s’interroger sur l’avenir d’une France sans industrie. Où sont les responsables politiques et patronaux qui prônaient l’ère postindustrielle? Quand les députés communistes défendaient l’industrie et le « produire français », on les traitait de ringards, mais, en huit ans, notre part dans la production industrielle européenne a baissé de 25 % et notre industrie ne représente plus que 3,8 % de l’exportation mondiale. Or, pour un pays, l’industrie, c’est la vie.

Il ne suffit pas d’avoir tenu des états généraux de l’industrie pour croire que tout va changer comme par enchantement. Toute votre politique va à l’encontre des intentions affichées et la dure réalité s’impose, avec les questions majeures que sont le redressement de l’économie, le chômage et la précarité que subissent 5 millions de Français en âge de travailler.

Un chômeur sur quatre de la zone euro vit en France. Au moment de l’élection de Nicolas Sarkozy, le taux de chômage était de 7,8 %. Il est désormais de 10 %, et la crise ne fait que s’aggraver, la situation en Grèce est là pour nous le rappeler. Le bilan de l’Europe du capitalisme ultralibéral, que vous avez construite à marche forcée du traité de Maastricht au traité de Lisbonne, est désastreux.

En vérité, l’industrie est parasitée par la finance. C’est l’argent qui passe avant la production. Ainsi, avec leurs filiales de crédit, Renault et Peugeot gagnent plus d’argent en vendant de l’argent qu’en vendant des voitures. Tout est là. L’un des ressorts de la crise de système actuelle est le pillage des ressources du travail par les actionnaires, les fonds de pension et autres, avec leurs exigences de rendement à deux chiffres. Le seul enseignement que les plus fortunés de ce monde ont tiré de la crise, c’est: « Pourquoi changer? Continuons comme avant, et en pire! » Et votre gouvernement, hélas! va au devant de leurs désirs. Tout l’effort de l’État depuis l’automne a visé à rétablir, à coups de centaines de milliards, leur rentabilité.

Du côté des donneurs d’ordres, la priorité est au cash , pas à l’investissement productif et salarial. L’étranglement des sous-traitants demeure plus que jamais la règle. Mais la France peut-elle sortir de la crise en abandonnant des pans entiers de son industrie et ses PME? Son industrie peut-elle être facteur de croissance sans investissement dans l’emploi, les salaires et la formation? C’est dans cette direction que l’argent devrait être réorienté en priorité. Mais le chef de l’État et la majorité ont procédé à un allégement sans précédent de la taxe professionnelle, au détriment des citoyens et des collectivités.

Vous persistez dans des solutions conformes à l’intérêt du CAC 40, mais contraires à celui du pays. Vous laissez Total fermer à Dunkerque et préparer le démantèlement du raffinage français. Vous laissez Renault, dont l’État est actionnaire, produire quatre voitures sur cinq à l’étranger, et Peugeot deux sur trois pendant que, en France, on liquide l’intérim et développe le chômage partiel. Ces deux grands groupes automobiles ont bénéficié de 6 milliards d’euros de l’État, et qu’en ont-ils fait? Ils ont supprimé des emplois et délocalisé à l’étranger en dépit des engagements qu’ils avaient pris.

Vous laissez les constructeurs du ferroviaire, titulaires de commandes publiques, expatrier les trois quarts de la sous-traitance, tandis que nos PME restent sur le carreau, comme c’est le cas dans ma ville de Saint-Amand-les-Eaux, chez Delos où cinquante emplois viennent d’être supprimés, ou à Douai, chez AFR, où l’on envisage d’en supprimer 250, alors que vous prétendez relancer le fret ferroviaire.

Vous laissez ArcelorMittal agir au détriment de nos sites du Nord, de Lorraine et de Fos, alors que la production mondiale d’acier progresse de 24 %.

Notre industrie ne représente plus que 13,2 % de l’emploi et 16,4 % de la valeur ajoutée. Entre 2000 et 2008, elle a perdu 500000 emplois et 180000 de plus avec la crise en 2009.

Vous dites que, mondialisation oblige, c’est une fatalité. Mais l’exemple allemand prouve le contraire. La part de l’industrie dans notre PIB est de 12,2 % contre 17,7 % il y a dix ans. Elle est du double en Allemagne et en Italie. Mais, depuis dix ans, rappellent Les Échos , l’Allemagne développe « le maintien sur place des laboratoires et des usines », et elle redresse ses effectifs industriels salariés quand ceux de la France continuent de chuter. Or, dans une balance commerciale dangereusement déficitaire, c’est encore l’industrie qui représente 80 % des exportations françaises.

Vous évoquez volontiers la compétitivité et le coût du travail en France. Ce sont, là encore, des mensonges. Il suffit de lire la récente interview de Mme Mathilde Lemoine, directrice des études économiques de la banque HSBC France, qui n’a pas une sympathie particulière pour le parti communiste: « En réalité, dit-elle, le coût du travail français reste inférieur à celui du travail allemand. […] Au total, le coût d’une heure de travail est donc plus bas en France qu’en Allemagne, aux Pays-Bas, au Royaume-Uni et bien entendu au Danemark, en Suède ou au Luxembourg. » On ne saurait mieux dire.

Votre politique industrielle laisse le champ libre aux exportateurs de capitaux: 140 milliards d’investissements directs à l’étranger en 2009 comme en 2008. Vous négligez l’effort qu’exige la recherche, inférieure, en pourcentage du PIB, à son niveau de 2002. Vous démantelez l’éducation nationale quand le renouvellement des technologies appelle celui des savoirs. Vous ne mettez en place aucun dispositif pour remplacer sans rupture les 40 % de salariés qui, d’ici à cinq ans, vont partir en retraite, puisque la part du PIB allant à la formation professionnelle régresse depuis dix ans.

Enfin, vous avalisez les délocalisations, car il y a encore à ce titre 430 fermetures de sites industriels, pour 215 projets d’usines nouvelles. Et, en pleine crise, vous laissez le CAC 40 affecter 73 % de ses profits de 2009 en dividendes, soit 36 milliards pour les actionnaires.

Accumulation de cadeaux fiscaux et d’exonérations sociales – 80 milliards par an –, octroi de prêts et de fonds publics sans contrôle ni contrepartie, casse du droit du travail: voilà le fond de vos choix.

Sauver l’industrie exige de rompre avec l’exploitation du travail et la course aux profits. Et les moyens existent. Vous pourriez, par exemple, instaurer un crédit bancaire favorable à l’emploi et à la formation. Qu’attendez-vous pour engager cette démarche et l’adosser à la création d’un pôle financier public autour de la Caisse des dépôts?

Il faut réorienter la Banque centrale européenne, l’utiliser pour protéger l’économie réelle des marchés financiers et promouvoir un droit d’accès aux marchés de l’Union européenne qui pénalise le dumping social et fiscal de certains États.

Il faut créer un fonds national pour l’emploi qui serait décliné au niveau régional et donner aux comités d’entreprise un pouvoir suspensif sur les licenciements économiques.

De même, l’usage des fonds publics octroyés pour l’emploi doit être contrôlé par l’institution qui a apporté les financements, la direction de l’entreprise, le comité d’entreprise et les élus locaux.

Il est nécessaire de soumettre les appels d’offres publics français à des règles qui permettent aux sous-traitants proches des donneurs d’ordre d’en bénéficier réellement. Je pourrais citer quelques exemples scandaleux dans le Valenciennois, notamment pour les sous-traitants ferroviaires: Alstom, maître d’œuvre, transfère en Tchéquie ou en Pologne le travail qu’il devrait leur confier, alors qu’il s’agit de commandes publiques faites par la région, la RATP et la SNCF.

Il faut, par ailleurs, relever les salaires et relancer les services publics indispensables à l’essor de la société française.

Une industrie française moderne, présente sur le terrain de l’innovation, du « produire autrement » et capable de répondre aux besoins sociaux, voilà l’enjeu. Les Français sont très attentifs aux réponses qui seront apportées pour assurer le plus imprescriptible des droits: le droit au travail. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et SRC.)

M. le président. La parole est à M. Christian Estrosi, ministre chargé de l’industrie.

M. Christian Estrosi, ministre chargé de l’industrie. Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, je suis très heureux que votre assemblée ait choisi de consacrer son ordre du jour à débattre de l’évolution de l’emploi industriel. Au-delà des oppositions politiques, au-delà des clivages partisans, c’est une question qui concerne tous les Français et sur laquelle notre majorité veut apporter des réponses claires.

Trop longtemps, cette question n’a pas été un sujet de débat. Si elle l’est aujourd’hui, c’est que notre gouvernement a choisi d’engager une véritable révolution industrielle.

Aujourd’hui, le constat est simple: année après année, et depuis plus d’un demi-siècle, de gouvernement de droite en gouvernement de gauche, on a fait de l’évolution de l’emploi industriel la preuve indiscutable de l’évolution des économies développées vers une société du « tout service », au détriment des activités productives. Ce n’est pas Nicolas Sarkozy ni aucun membre de ce gouvernement qui, il y a quinze ans, il y a dix ans, expliquait aux jeunes Français que leur avenir serait dans les services, la finance, l’économie virtuelle. Cela se faisait au temps, monsieur Bocquet, où vous participiez au gouvernement avec vos partenaires socialistes.

M. Alain Bocquet. Sarkozy n’était pas ministre de l’économie?

M. Christian Estrosi, ministre chargé de l’industrie. Ce constat, c’est celui de Colin Clark et Jean Fourastié montrant, à la veille des Trente Glorieuses, le glissement progressif du secteur primaire au secteur secondaire, puis du secondaire au tertiaire. C’est celui qu’a fait Daniel Bell proclamant l’avènement d’une société « postindustrielle » au moment du premier choc pétrolier. C’est celui que faisaient tous ceux qui ont cru pouvoir décréter trop rapidement l’avènement d’une « nouvelle économie » au tournant des années 2000. On a vu rapidement les limites de cette économie virtuelle.

Je ne veux pas nier ou relativiser la réalité de la diminution de l’emploi industriel dans notre pays. Les chiffres parlent d’eux-mêmes et vous les avez rappelés. En dix ans, nous avons perdu plus de 500000 emplois industriels et notre part dans les exportations européennes a diminué d’un quart entre2000 et2008. Chacun a à assumer sa part de responsabilité. Quant à l’emploi industriel, sa part dans la population active est passée de 16 % en 2000 à 13 % en 2009.

Si nous sommes dans cette situation, c’est parce que nous avons trop longtemps cru que l’emploi industriel n’avait pas d’avenir; que malgré tous nos efforts, nos entreprises industrielles finiraient de toute façon par délocaliser leurs activités dans d’autres pays; qu’il valait mieux investir dans les services que dans le développement de nouveaux produits industriels.

M. Thierry Benoit. C’est vrai.

M. Christian Estrosi, ministre chargé de l’industrie. C’est parce que nous n’avons pas cru dans notre industrie que nous nous sommes fragilisés. Paradoxalement, c’est lorsque nous sommes devenus plus fragiles que nous avons recommencé à croire dans l’avenir de notre industrie.

Depuis deux ans, nous faisons face à une crise économique mondiale sans précédent. Cette crise a durement touché l’emploi industriel de toutes les économies développées. Aux États-Unis et en Espagne, le nombre de chômeurs a plus que doublé et dans la zone euro, il a augmenté de 33 % par rapport à mai2007.

Avec une progression de 23 % du nombre de chômeurs, la France n’est pas épargnée par cette crise. Si elle s’en sort mieux que la plupart des pays européens, c’est parce que le Président de la République a su prendre très tôt les mesures qui s’imposaient en installant un système de garantie du système bancaire, en proposant un plan de relance de 39 milliards d’euros sur l’année 2009-2010 et en accompagnant les Français confrontés à la perte d’emploi, à travers notamment l’extension du contrat de transition professionnelle.

Je me souviens du temps où l’opposition n’avait pas de mots assez durs pour critiquer ces mesures. Si nous avions suivi vos propositions, à savoir faire un plan de relance par la consommation grâce à la baisse de la TVA, au vu du nombre d’emplois que nous aurions perdus, vous n’auriez sans doute pas osé demander ce débat sur l’emploi industriel.

M. Alain Bocquet. Bien sûr que si!

M. Christian Estrosi, ministre chargé de l’industrie. Force est de constater, pourtant, que la France a été l’un des premiers pays de la zone euro à retrouver une croissance positive, dès le second trimestre 2009.

On nous disait alors que nos mesures n’auraient qu’un effet ponctuel, artificiel, et que l’activité industrielle chuterait dès qu’elles prendraient fin. L’exemple de la prime à la casse, qui a bénéficié à 650000 particuliers en 2009, prouve pourtant que ce n’est pas le cas. On nous avait dit: arrêter la prime à la casse en décembre – je rappelle au passage que les Allemands l’ont arrêtée en septembre – même en en faisant bénéficier les véhicules commandés avant et livrés après cette date, et en faisant passer la prime progressivement de 1000 euros à 700 euros au premier semestre et à 500 euros au deuxième semestre, aura des conséquences dramatiques. Or, au premier trimestre 2010, les ventes ont progressé de 17 % par rapport au premier trimestre 2009. La politique que nous avons choisie était, une fois encore, la meilleure.

En affirmant la nécessité d’une logique de relance par l’offre, le Président de la République a manifesté un signe de confiance extraordinaire dans la capacité de notre système productif à retrouver le chemin de la croissance.

Débattre de l’emploi industriel, comme nous le faisons aujourd’hui, c’est proclamer le retour du politique dans la détermination des choix stratégiques qui guideront la croissance économique de notre pays au cours des prochaines années. Il fut un temps, lors de la fermeture de l’usine de Vilvoorde, où M. Jospin disait: l’État ne peut pas tout. Les temps ont changé.

M. David Habib. Sans le dire, vous faites la même chose.

M. Christian Estrosi, ministre chargé de l’industrie. Aujourd’hui, le politique met en œuvre une véritable stratégie industrielle et l’impose dans la révolution industrielle qu’il engage. Nous mettons en œuvre un principe clair, celui de la vocation industrielle de l’économie et du territoire français. Et nous le faisons en recherchant les conditions nécessaires pour permettre à nos entreprises industrielles de relever ce défi.

En moins de trois mois, les états généraux de l’industrie ont permis de mobiliser plus de 5000 personnes dans le cadre de plus 250 réunions, qu’il s’agisse des groupes de travail nationaux ou des ateliers régionaux. Au total, ce sont 800 propositions d’actions qui ont été formulées par les différents acteurs, partenaires sociaux, fédérations industrielles et élus locaux.

De ce débat et de ces propositions a découlé la stratégie industrielle qu’a présentée le Président de la République le 4 mars dernier et qu’il m’a chargé de mettre en œuvre. Cette stratégie repose sur des objectifs très clairs et c’est un engagement fort de notre gouvernement: une augmentation de l’activité industrielle de plus de 25 % d’ici à la fin de 2015; la pérennisation de l’emploi industriel en France sur le long terme; le retour à une balance commerciale industrielle durablement positive d’ici à 2015 et un gain de plus de 2 % de la part française dans la production industrielle totale. C’est un défi immense que nous devons relever.

Ma priorité est de permettre à nos entreprises industrielles de passer d’une logique de secteur à une logique d’organisation en filières.

M. Thierry Benoit. Très bien!

M. Christian Estrosi, ministre chargé de l’industrie. C’est l’exemple allemand, auquel vous avez eu raison de faire référence, monsieur Bocquet, que nous suivons, avec dix ans de retard. L’Allemagne a choisi d’organiser des filières et de défendre un certain patriotisme industriel. Pour ma part, qu’on me dise que je fais du protectionnisme ou de l’interventionnisme ne me pose aucun problème. Cela ne me pose aucun problème de dire à Renault, dont l’État est actionnaire, que la Clio 4 ne doit pas être produite en Turquie mais à Flins, pour ce qui est destiné à la France et en grande partie pour ce qui est destiné à l’Europe.

De même, c’est à Flins que Renault va sortir en 2011 le premier véhicule électrique français, la Zoé. Très bien! Mais quand, à y regarder de plus près, je constate qu’il n’y aura que 35 % de composants français, je n’ai pas peur de demander clairement à Renault de monter à 70 % au minimum. Je crois en effet au « fabriqué en France » et dans le cadre des mesures des états généraux de l’industrie que je veux mettre en œuvre, dans les prochaines semaines, l’étiquetage sur l’origine des composants pourrait être exigé sur chaque produit. En lisant qu’un produit comprend 40 % de composants français, 20 % de composants allemands, 10 % de composants coréens, il appartiendra au consommateur de faire son choix. Or l’enquête d’opinion que j’ai fait lancer il y a deux semaines par mon ministère montre que 91 % des Français sont attachés aux produits fabriqués en France et que 88 % d’entre eux considèrent que c’est un gage de qualité. (« Eh oui! » sur les bancs du groupe GDR.).

Je veux donc me battre de toutes mes forces pour organiser des filières à la française, comme l’ont fait les Allemands il y a une dizaine d’années. Dans cet objectif, je viens de nommer Jean-Claude Volot médiateur de la sous-traitance. Il sera chargé d’exiger que lorsqu’un grand industriel décide de la fabrication d’un produit, il réunisse les équipementiers et les sous-traitants, pour s’assurer que c’est toute la chaîne de production française qui va se mettre en marche et que le produit comportera en majorité des composants français. Quand j’apprends que, pour la Zoé, Renault va acheter le compresseur chez Denso, filiale de Toyota au Japon, alors que Valeo peut très bien le produire, cela me dérange. D’ailleurs, l’ensemble des partenaires des états généraux de l’industrie partage ce sentiment avec nous. Et si le Gouvernement a été conduit à mettre en œuvre vingt-trois mesures, c’est parce qu’il a décidé d’inverser le courant et d’en finir avec les dérives dues à trente années d’abandon de la politique industrielle en France.

Monsieur Bocquet, accompagner le développement de PME et de PMI, c’est d'abord soutenir l’innovation. C’est ce que nous faisons avec la montée en puissance des pôles de compétitivité qui bénéficient à nouveau, pour la période de 2009 à 2011, d'une dotation totale d’1,5 milliard d’euros de crédits de l'État. Par ailleurs, en 2010, notre crédit d’impôt recherche, dont chacun s'accorde à reconnaître qu'il s’agit d’un dispositif particulièrement performant, représentera un soutien de l'État de l'ordre de 4 milliards d'euros.

Enfin, nous nous attachons à mettre en place un cadre avantageux pour les jeunes entreprises innovantes, et notamment pour 3000 d'entre elles qui ont bénéficié de plus de 100 millions d'euros d'exonérations de charges sociales.

Nous devons aussi soutenir la compétitivité de nos entreprises. C'est tout l'objet de l’exonération de la taxe professionnelle, tant combattue sur vos bancs, qui représente, en 2010, une économie pour les entreprises de 12 milliards d'euros, dont près de 2 milliards bénéficient directement à l’industrie.

M. Thierry Benoit. C’est important!

M. Christian Estrosi, ministre chargé de l'industrie. Que préfère-t-on: permettre à nos industries d’économiser 2 milliards d’euros qu’elles pourront réinvestir dans l’outil productif et donc dans l’emploi, ou les faire payer et, ainsi, les décourager d’investir et de créer de l’emploi industriel?

Pour notre part, avec l’exonération de la taxe professionnelle, nous avons fait le choix de l’investissement productif et de l’emploi.

M. Daniel Paul. On en reparlera tout à l’heure!

M. Christian Estrosi, ministre chargé de l'industrie. Je veux également préciser que la suppression de l'impôt forfaitaire annuel représentera environ 1,3 milliard d'euros d'ici à 2011.

Renforcer les PME et les PMI, c'est aussi les aider à trouver une assise financière plus stable. C'est précisément 1’objet de la création de France Investissement qui doit permettre d'abonder des fonds d'investissement dans des PME innovantes et en développement. C’est encore encourager l’investissement individuel dans les PME, ce que permet la mesure ISF-PME qui représente un soutien de l’État estimé à 670 millions d'euros. C’est enfin la mise en place du Fonds stratégique d'investissement ainsi que celle du FCDE, le Fonds de consolidation et de développement des entreprises, qui consacrera pas moins de 2 milliards d'euros à la consolidation des fonds propres des PME et des entreprises de taille intermédiaire.

Monsieur Bocquet, vous critiquez le Fonds stratégique d’investissement; permettez-moi de vous citer en exemple l’une de ses actions, parmi tant d’autres. Depuis près d’un siècle, dans la vallée de l’Arve, de très nombreuses petites entreprises ont développé un savoir-faire et une spécialisation en matière de décolletage.

M. Thierry Benoit. Bon exemple!

M. Christian Estrosi, ministre chargé de l'industrie. Il y a seulement un an et demi, ces dernières étaient toutes menacées d’être rachetées par des capitaux asiatiques. Les nouveaux propriétaires seraient partis avec nos brevets: c’était la perte industrielle sèche d’un savoir-faire de l’industrie française. Si nous n’avions pas mis en place le Fonds stratégique d’investissement – qui a permis d’entrer provisoirement dans le capital des entreprises françaises afin d’empêcher des sociétés étrangères de venir piller notre savoir-faire –, les PME de l’Arve ne connaîtraient pas, aujourd’hui, un regain d’activité et un nouveau dynamisme grâce à la reprise des commandes. Sans cet outil nous aurions donc sans doute perdu des pans entiers de notre activité industrielle.

Enfin, je veux rappeler que, sur les 35 milliards d'euros du grand emprunt, 17 milliards seront affectés à des priorités touchant à l'industrie, dont 7 milliards directement.

Vous le constatez, mesdames, messieurs les députés, l'emploi industriel n'est ni une fatalité historique ni une abstraction statistique. C'est, tout simplement, un enjeu économique essentiel pour l'avenir de notre pays.

Au moment où le monde industriel se trouve dans une phase nouvelle, au moment où un nouveau modèle industriel s'invente sous nos yeux, nous devons être aux côtés des ouvriers, des ingénieurs, des techniciens, des salariés et des chefs d'entreprises pour leur permettre d’aborder au mieux ce nouveau tournant de notre économie française.

Je le sais, le défi est difficile, mais il est exaltant et nous sommes bien décidés à le relever. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

M. Christian Vanneste. Très bien!

M. le président. La parole est à M. Thierry Benoit.

M. Thierry Benoit. Monsieur Estrosi, je veux vous dire toute l’importance que j’accorde au ministère dont vous avez la charge et à votre fonction. L’existence d’un ministère chargé de l’industrie montre bien la volonté du Gouvernement de travailler à la reconversion industrielle de la France.

J’insiste sur le bien-fondé d’une telle démarche. La désindustrialisation du nord de l’Europe est en marche depuis plus de trente ans et, malheureusement, la France n’y échappe pas. Nous avons ainsi perdu 500000 emplois industriels depuis dix ans.

Député d’Ille-et-Vilaine, je suis élu de Fougères qui est, avec Vitré, l’un des deux premiers bassins industriels de Bretagne. Mon propos sera donc très concret.

Les raisons du déclin actuel sont multiples. Au risque de heurter quelques dogmes, je profite de ce débat pour rappeler certaines réalités.

Aujourd’hui, deux questions se posent: celle de la compétitivité de l’industrie française, et celle du coût du travail. (Protestations sur les bancs du groupe GDR.) Les charges que nous faisons peser sur la production restent élevées.

M. Daniel Paul. C’est un fantasme!

M. Thierry Benoit. C’est pourquoi, à titre personnel, j’ai soutenu la réforme de la taxe professionnelle,…

M. David Habib. Vous n’êtes pas maire, vous!

M. Thierry Benoit. …même si je considère qu’avec la contribution économique territoriale nous continuons de taxer la valeur ajoutée, ce qui pose plusieurs problèmes.

Monsieur Bocquet, vous serez rassuré de savoir que je suis membre de l’Alliance-centriste, et donc proche de Jean Arthuis.

M. Christian Vanneste. Très bien!

M. Thierry Benoit. Vous retrouverez sans doute dans mes propos l’idée que tout se tient. En effet, selon moi, l’emploi industriel est lié aux taxes sur les salaires et à celles qui pèsent sur la production. Plutôt que de taxer la production, il me semble en conséquence qu’il faudrait poser le problème de la taxation de la consommation.

J’en viens à une autre cause du déclin. Monsieur Bocquet, au risque de vous fâcher, je considère que le choix fait, il y a dix ans, de mettre en œuvre de façon autoritaire…

M. Daniel Paul. Les 35 heures!

M. Thierry Benoit. …les 35 heures a créé des difficultés pour le pays et pour l’industrie française.

M. David Habib. C’est faux!

M. Daniel Paul. Évidemment: c’est comme la retraite à soixante ans!

M. Thierry Benoit. Les 35 heures coûtent deux points de produit intérieur brut et 40 milliards d’euros par an.

M. Alain Bocquet. On peut aussi ne pas donner de salaires!

M. Thierry Benoit. À l’époque, on nous parlait du « caractère aliénant du travail ». En 1999! On nous expliquait que l’avenir était à une société de loisir. Résultat: aujourd’hui, en France, nous avons un problème d’attractivité de l’emploi dans le secteur de l’industrie mais aussi dans l’artisanat ou la restauration, autant de métiers difficiles. La question de l’orientation des jeunes vers les diverses formations est donc posée.

Après le diagnostic, je veux évoquer quelques leviers que nous pourrions actionner pour en finir avec la désindustrialisation de notre pays.

Tout d’abord, il faut cesser de taxer la production et taxer la consommation, car les consommateurs français recherchent des produits à faible coût, souvent fabriqués en Asie, en Afrique du Nord ou en Europe de l’Est. Nous devons rouvrir le débat sur…

M. Christian Vanneste. La TVA sociale!

M. Thierry Benoit. …la TVA sociale. Nous n’y échapperons pas!

Ainsi, dans mon département d’Ille-et-Vilaine, qui compte un million d’habitants, la TVA est, de loin, l’impôt qui rapporte le plus à l’État. En 2009, le montant prélevé s’élevait à 1,5 milliard d’euros, alors que seulement 575 millions d’euros rentraient dans les caisses de l’État grâce à l’impôt sur le revenu, et 557 millions grâce à la taxe professionnelle.

M. Daniel Paul et M. Alain Bocquet. Ce sont les pauvres qui paient!

M. Thierry Benoit. Il faut dire aux Français que chacun d’entre eux porte la responsabilité de créer des richesses pour son pays. Cela est vrai pour le dirigeant d’entreprise, pour le salarié et, évidemment, pour le pouvoir politique.

M. Alain Bocquet. Mais les chômeurs ne demandent que cela: ils veulent travailler!

M. Thierry Benoit. C’est le devoir d’une société qui s’honore. Nos compatriotes sont courageux, ils veulent travailler.

M. Alain Bocquet. Voilà!

M. Thierry Benoit. Seulement, il ne s’agit pas de leur dire que parce qu’il y a moins de travail, il faut se partager l’emploi en travaillant moins. Il faut trouver des recettes nouvelles pour créer de l’emploi en France.

M. Alain Bocquet. Ceux qui sont licenciés veulent un travail!

M. Thierry Benoit. Les élus doivent être fiers de la main-d’œuvre du pays. Elle est généreuse et volontaire; elle n’hésite pas à se former et à relever des défis afin de réussir la reconversion industrielle.

Ainsi, monsieur le ministre, avec Mme Lagarde, ministre de l’économie de l’industrie et de l’emploi, vous avez accompagné un projet de reconversion industrielle à Fougères: Sagem industries. En 2008, cette société a informé, du jour au lendemain, ses 730 salariés qu’ils devaient arrêter la production industrielle de téléphones mobiles. En dix-huit mois, grâce au concours de l’État et des collectivités locales – communauté de communes, département, région –, Sagem industries est en passe de relever le défi de la reconversion industrielle et compte toujours aujourd’hui 730 salariés en CDI.

M. Alain Bocquet et M. Daniel Paul. Si ça marche, c’est bien!

M. Thierry Benoit. Ils réussissent leur reconversion grâce au programme de défense Félin et aux actions renforcées de reconversion électronique.

Par ailleurs, des savoir-faire français ont disparu de notre territoire. C’est le cas de la fabrication de verre, avec la disparition de plusieurs cristalleries,…

M. Alain Bocquet et M. Christian Vanneste. Cristal d’Arques!

M. Thierry Benoit. …ou de la fabrication industrielle des chaussures. Fougères comptait des milliers d’emplois dans la chaussure. Aujourd’hui, ce secteur industriel n’existe plus en France!

M. Alain Bocquet. Nous allons tous être des va-nu-pieds!

M. Thierry Benoit. Pourquoi a-t-il disparu? Parce que le fabricant de formes se trouve en Roumanie, celui des talons en Estonie…

M. Alain Bocquet. Eh oui!

M. Thierry Benoit. …et que le fabricant de semelles est en Tunisie.

M. Alain Bocquet. Eh oui!

M. Thierry Benoit. Dès lors, au stade de l’assemblage, nous ne sommes plus compétitifs, et les dirigeants d’entreprises de fabrication industrielle de chaussures délocalisent.

Monsieur le ministre, j’encourage donc votre idée de restructurer les filières industrielles et de raisonner dans ce cadre, tant en ce qui concerne la logistique que la recherche et le développement.

Il faut aussi insister sur la formation initiale et sur la formation continue: elles doivent être réadaptées aux besoins. Mais nous devons également compter avec les dispositifs d’aide au retour à l’emploi comme la CRP, la convention de reclassement personnalisé, et le CTP, le contrat de transition professionnelle. Le territoire dont je suis l’élu bénéficie depuis quelques mois du CTP, et je peux témoigner qu’il s’agit d’un outil extraordinaire d’aide au retour à l’emploi.

M. Alain Bocquet. Ça ne va pas loin!

M. Thierry Benoit. Enfin, monsieur le ministre, en matière de redressement industriel, le principal défi que vous devez relever concerne l’attractivité des villes moyennes et des territoires ruraux, car, pour y fixer les populations, il faut y créer des emplois industriels.

On a longtemps snobé l’emploi et les bassins industriels en France. Mais nous ne pourrons pas tous être premiers de la classe. La production manuelle doit se voir reconnaître la même valeur que la production intellectuelle. Ainsi que vous l’indiquiez, monsieur le ministre, on ne travaillera pas tous dans le tertiaire, les bureaux et les services.

M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue.

M. Thierry Benoit. Je terminerai en exprimant une inquiétude relative à la stratégie industrielle des entreprises. Lorsque celle-ci est mise en œuvre par un PDG identifié, cela fonctionne. Ma préoccupation concerne davantage les multinationales, dont les dirigeants, souvent mal identifiés, sont plus enclins à faire fructifier l’actionnariat qu’à élaborer une stratégie créatrice de richesse pour l’entreprise et ses salariés. J’ajoute que ces multinationales n’hésitent pas à réclamer le bénéfice de dispositifs d’aides publiques. Ceux-ci devraient donc être soumis à davantage de conditions, plus contrôlés et les aides versées par l’État devraient lui être reversées en cas de délocalisations.

M. Daniel Paul. Voilà une remarque de bon sens!

M. le président. La parole est à M. Christian Vanneste.

M. Christian Vanneste. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, lundi dernier, à Linselles, dans ma circonscription, un défilé était organisé par la CGT en réaction à l’annonce de la fermeture du site SCA par le groupe propriétaire de l’entreprise.

M. Daniel Paul. Vous y étiez, j’espère!

M. Christian Vanneste. J’y étais, parmi les élus locaux du secteur – le maire sans étiquette, la conseillère générale socialiste – et j’ai écouté l ’Internationale  : la défense de l’industrie vaut bien une Internationale ...

M. Alain Bocquet. C’est bien, monsieur Vanneste. Vous progressez!

M. Daniel Paul. J’ai un bulletin d’adhésion sur moi!

M. Christian Vanneste. Aussi, je remercie le groupe GDR d’avoir organisé ce débat: nous ne sommes sans doute pas d’accord sur les solutions, mais au moins pouvons-nous nous accorder sur le problème.

Quel est-il? Il y a plus de dix ans maintenant, à l’époque de la prétendue nouvelle économie, certains voyaient la France devenir le grand pays des services, d’autres annonçaient des entreprises industrielles sans usines et Jeremy Rifkin pronostiquait la fin du travail. Depuis, on s’est aperçu que l’industrie et ses produits s’en vont avec les usines, que beaucoup de services sont liés aux industries et que la fin du travail, ce n’est pas le loisir, mais le chômage – chômage que, selon Alain Minc, la France aurait choisi.

Nous sommes nombreux à penser que, si l’essentiel de notre richesse est désormais dans les services, c’est dans l’industrie que se développent l’innovation, l’invention des véritables nouveaux produits et que se situe le moteur de la croissance et de l’emploi. Quand l’industrie crée un emploi, elle en crée deux dans les services.

C’est la première raison pour laquelle nous devons refuser le déclin industriel de notre pays. Celui-ci a perdu 500000 emplois industriels depuis 2000. Si nous progressons dans la pharmacie ou la parfumerie, nous stagnons dans l’agroalimentaire et nous reculons dans le secteur des biens de consommation ou dans celui de l’automobile. Nous sommes faibles dans les domaines des biotechnologies et des TIC, et certains voudraient, en plus, nous faire ignorer les nanotechnologies!

Cette situation se traduit par un recul de notre pays sur le marché mondial. La part des exportations de la France dans celles de l’ensemble de l’Europe est ainsi passée de 16 % à 13 %. Le déclin de l’industrie a, certes, été accentué par la crise, mais il ne date pas de celle-ci. Il frappe d’ailleurs toute l’Europe, puisque la part de l’industrie dans la valeur ajoutée a chuté de 20,5 % à 17 % dans l’Union européenne entre1995 et2006, mais la chute est plus sévère dans notre pays, puisque – vous l’avez dit tout à l’heure, monsieur Bocquet – l’industrie manufacturière ne représente plus que 16 % de la valeur ajoutée, soit moins que la moyenne européenne.

Nous devons également nous battre pour l’industrie parce qu’elle représente une richesse humaine. Dans l’usine de Linselles à laquelle je faisais référence tout à l’heure, 50 % des ouvriers ont plus de cinquante ans. Beaucoup y ont passé leur vie, beaucoup en sont fiers. Un sondage récent de la SOFRES indiquait que, si l’entreprise est, pour les Anglo-saxons, un gagne-pain et, pour les Allemands, un lieu de valorisation par le travail, elle est, pour les Français, un lieu où se nouent des relations humaines. On comprend mieux ainsi ce qui se passe lorsque, dans certaines grandes entreprises, le traitement réservé aux salariés manque d’humanité.

Hier, le tribunal de commerce de Roubaix-Tourcoing a décidé de la sortie des chantiers Wauquiez de la procédure de sauvegarde. Il y a quelques mois, des ouvriers, des ébénistes de ce chantier naval situé en pleine terre, à Neuville-en-Ferrain, sont venus me dire qu’ils souhaitaient, non pas obtenir des primes ou des indemnités, mais tout simplement continuer à travailler dans et pour une entreprise dont ils étaient fiers – à ce propos, je tiens à vous remercier, monsieur le ministre, pour la part déterminante que vous avez prise dans ce dossier. C’est cette fierté qu’il faut communiquer aujourd’hui aux jeunes qui répugnent à choisir cette voie. Bien sûr, il faut aussi leur garantir une sécurité, dont ils peuvent légitimement douter.

M. Daniel Paul. Eh oui!

M. Christian Vanneste. Pour atteindre cet objectif, trois moyens essentiels doivent être utilisés.

Il faut rendre notre pays plus attractif – il l’est déjà en raison de ses infrastructures et du coût de son énergie –, rendre surtout nos produits plus compétitifs et, enfin, développer la synergie essentielle entre la formation, la recherche et la production, à l’instar de ce qui se fait en Allemagne grâce au dispositif Fraunhofer. Nous avons déjà beaucoup progressé dans ce domaine, avec les pôles de compétitivité et le crédit d’impôt recherche – dont je souhaite pour ma part qu’il soit étendu aux collections et aux modèles, ainsi que le réclame l’industrie du textile et de l’habillement. Nous avons, en revanche, de grands progrès à faire en matière de compétitivité. Le manque de compétitivité étouffe en effet notre industrie. Les prélèvements sociaux sur les sociétés représentent en France 11 % du PIB, contre 6,5 % en Europe et 6 % seulement en Allemagne. À cet égard, la suppression de la taxe professionnelle est une excellente mesure. La TVA sociale, qui aurait permis de faire reposer une partie de nos dépenses sociales sur la consommation, donc sur les importations et le tourisme, demeure une occasion manquée.

M. Thierry Benoit. Absolument!

M. Christian Vanneste. Pour ma part, j’ai soutenu cette idée que Jean Arthuis a défendue sans succès jusqu’à présent, hélas!

Après bien des efforts, et malgré la difficile digestion de la zone d’occupation communiste (Sourires sur les bancs du groupe GDR) , l’Allemagne est plus compétitive que la France, puisqu’elle vend très cher des produits de qualité fabriqués par des ouvriers qui ont des revenus supérieurs à ceux des Français, mais avec un coût salarial plus faible.

M. le président. Il vous faut conclure, mon cher collègue.

M. Christian Vanneste. Le coût français a doublé celui des Allemands en 2001. Comme le montre Christian Gianella, les 35 heures de Mme Aubry ont eu un effet macroéconomique à long terme négatif, alors que l’effet microéconomique à court terme pouvait paraître positif, ici ou là. Les 35 heures sont bien l’une des causes du chômage industriel!

Monsieur le ministre, vous avez déclaré qu’il fallait sortir de la crise « plus forts ». Le Président de la République avait lui-même déclaré, en septembre dernier: « Si on ne garde pas les usines, on n’aura pas d’emplois ». Pour faire face à la crise, de nouveaux moyens ont été créés: médiateur du crédit, médiateur de la sous-traitance, Fonds d’intervention stratégique, Fonds national de revitalisation des territoires. Il y a encore beaucoup à faire, mais le maintien et le développement de l’industrie française sont des enjeux qui méritent tous nos efforts.

M. Thierry Benoit. Très bien. Le message est clair!

M. le président. La parole est à M. David Habib.

M. David Habib. Monsieur le président, monsieur le ministre, si M. Vanneste s’est surpris à écouter l’ Internationale , je me suis, quant à moi, surpris à reconnaître que je pourrais faire miens certains des propos qui ont été prononcés à cette tribune par mes prédécesseurs. En tout cas, nous devons tous rendre hommage à Alain Bocquet et au groupe GDR, auxquels revient l’initiative de ce débat qui nous permet d’affirmer notre ambition industrielle.

En 2012, lorsque nous serons majoritaires (Sourires) , il nous faudra tourner la page de dix années de désindustrialisation, de renoncement. Je le dis à mes collègues de gauche: nous serons jugés sur notre capacité non seulement à rétablir la justice sociale, mais aussi à remettre notre industrie et l’emploi industriel au cœur de nos stratégies économiques et finan cières. La gauche, c’est l’industrie, c’est une ambition pour notre tissu productif. Lorsque la gauche oublie cette ambition, elle perd.

Pour vous, monsieur le ministre, la question ne se pose pas. Certes, vous tenez un discours sincère et volontaire, mais vous n’avez pas de politique industrielle. Tout à l’heure, en vous écoutant, je regardais François Loos, qui était assis dans l’hémicycle et qui a vous a précédé dans ces fonctions, au sein de la même majorité. Il était animé de la même volonté, de la même sincérité, du même courage politique que vous, et il a obtenu des résultats identiques aux vôtres, hélas!

Les chiffres sont éloquents. Les relations entre l’UMP et l’industrie n’ont pas débuté avec Nicolas Sarkozy; on peut remonter à Jacques Chirac – c’est presque de la préhistoire. Entre2002 et2008, 500000 emplois, soit 12 % des effectifs, ont été détruits dans l’industrie. En un an, entre septembre2008 et septembre2009, 173000 emplois ont été supprimés. Ce phénomène, qui a débuté dans les années 1990 – au cours desquelles la gauche et la droite se sont succédé au pouvoir –, s’est poursuivi et amplifié, de sorte que – les orateurs précédents l’ont souligné – l’industrie ne représente plus aujourd’hui qu’une part marginale de la valeur ajoutée, alors qu’elle reste un élément déterminant en Allemagne et dans les autres pays de la zone euro.

Au-delà des chiffres, la crise de notre industrie est due d’abord à l’abandon de certains secteurs: le textile, l’habillement, l’électronique, la machine-outil, l’informatique, l’aluminium. Est-il besoin de citer ces groupes industriels qui n’existent plus – je pense notamment à Péchiney? Lorsque Nicolas Sarkozy, alors ministre de l’économie, était venu nous parler d’Alstom à cette tribune, nous avions été un certain nombre à lui demander: pour un Alstom, combien la France a-t-elle abandonné de Péchiney? Demain, si le Gouvernement persiste dans cette voie, la chimie et, pourquoi pas, l’agroalimentaire pourraient être malmenés.

Qu’elle le veuille ou non, la France est engagée, par votre politique, dans une dérive postindustrielle, laquelle n’est pas fatale. Avant d’en analyser les causes et les conséquences, je veux rappeler que votre échec en matière industrielle relève d’abord d’une erreur de diagnostic. En effet, pour vous, la question de l’emploi industriel et de la désindustrialisation est d’abord celle du coût du travail. Depuis 2002, toute votre stratégie consiste en la quête d’une baisse des rémunérations dans le secteur industriel.

M. Christian Vanneste. Pas des rémunérations, du coût du travail!

M. David Habib. Or le coût d’une heure de travail – Alain Bocquet l’a rappelé – est plus bas en France qu’en Allemagne, en Angleterre, au Luxembourg ou en Suède. L’amélioration de notre compétitivité ne passait pas par là. Mme Lemoine, la directrice des études économiques de la banque HSBC, que l’on va beaucoup citer, n’est pas communiste, a dit M. Bocquet; elle n’est pas davantage socialiste – du moins ne s’affirme-t-elle pas comme telle. Pourtant, elle a rappelé, dans Le Monde du 24 mars, que ce qui manquait aux entreprises françaises pour développer l’industrie, c’étaient « de l’investissement productif, de l’investissement en innovation et de l’investissement en capital humain. »

Il est inutile de vous rappeler les insuffisances de votre politique de recherche et d’innovation: la France investit moins dans les dépenses d’avenir que ses principaux partenaires. Et quand des dispositifs sont mis en place pour favoriser l’innovation, certains – le secteur bancaire, par exemple – les dévoient. La mission d’évaluation et de contrôle des politiques publiques, que je préside, était réunie hier pour évaluer le crédit d’impôt recherche. Il s’agit d’une bonne mesure, mais, lorsque la CGPME – et nous allons vérifier ces chiffres – nous apprend qu’un tiers des dépenses réalisées à ce titre vont bénéficier au secteur bancaire, on peut s’interroger sur la pertinence d’un tel dispositif.

M. Alain Bocquet. Eh oui!

M. David Habib. Monsieur le ministre, vous avez évoqué le volontarisme, déclarant vous battre pour que le patriotisme économique s’impose dans notre pays. Il serait totalement inconséquent de ma part de vous faire un procès d’intention, mais, le 31 décembre 2009, alors que vous étiez déjà ministre, une usine a fermé dans ma circonscription. Je suis, moi aussi, député, d’un département du Sud, frontalier, où il y a beaucoup de soleil, la mer, la montagne: ce ne sont pas les Alpes-Maritimes mais les Pyrénées-Atlantiques. Cette usine qui a fermé appartenait au groupe texan Celanese: 500 emplois ont été supprimés. On en a beaucoup parlé à la télévision.

Elle gagnait beaucoup d’argent, mais elle a été fermée pour être délocalisée en Chine. Qu’a dit le gouvernement français? Rien! Même lorsque nous avons essayé de trouver des solutions, il s’est abstenu de nous soutenir et n’a absolument rien fait. Pire, il vient d’accepter une convention de réindustrialisation aux termes de laquelle 350 emplois sont supprimés directement par le groupe américain – sur 500 au total. Une somme de 1,6 million d’euros a été mise sur la table, dont 700000 destinés au seul cabinet Altedia, chargé d’assurer la reconversion.

J’ai évoqué votre discours sincère sur le volontarisme, monsieur le ministre, mais je vous mets au défi de démontrer la réalité de votre volonté politique: pour le faire, ce ne sont pas les dossiers qui manquent en France! Provoquez la réunion d’une commission associant les parlementaires de toutes sensibilités afin que nous puissions, avec vos services et sous votre autorité, examiner dans le détail, en prenant le temps nécessaire, ces dossiers qui font qu’un pays reste industriel ou non.

Voilà ce que je voulais vous dire, monsieur le ministre. Les autres députés socialistes développeront un certain nombre de propositions à la suite de mon intervention. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

M. le président. La parole est à M. Daniel Paul.

M. Daniel Paul. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, depuis le début de la crise, nous avons perdu 600000 emplois, dont 269000 dans l’industrie, soit 45 % des restructurations, auxquels s’ajoutent 150000 intérimaires.

Aucune branche industrielle n’a été épargnée, qu’il s’agisse de l’industrie automobile – je vous épargne les pourcentages, que tout le monde connaît –, du secteur verre, caoutchouc et plastiques, des équipements électriques, de la chimie, des biens d’équipement mécanique, de la filière bois et papier, des produits informatiques et électroniques, du secteur habillement, textile et cuir, de la pharmacie ou de l’agroalimentaire. Il y a, dans cet inventaire à la Prévert, des secteurs de pointe et d’autres qui le sont un peu moins, mais tous ont été impactés. Et, on le sait bien, la casse continue.

À l’origine de la destruction de ces capacités de production et d’emplois, il y a la financiarisation généralisée de notre économie. J’ai reçu tout à l’heure une délégation de Generali; il s’est produit, au sein de ce que l’on peut considérer comme une entreprise d’industrie financière, le même phénomène que celui touchant les industries classiques: des licenciements visant à améliorer la productivité, au bénéfice des seuls actionnaires.

Le débat sur les retraites montre que depuis plus de trente ans, la part des profits augmente dans le PIB au détriment des salaires, mais aussi de l’investissement. Ceux qui pensaient que la crise mettrait fin à cette spirale en sont pour leurs frais: le taux des dividendes ne cesse d’augmenter, atteignant 56 % des bénéfices contre 40 % ces dernières années. L’objectif de « compétitivité », tant ressassé, ne peut cacher que la création de valeur pour l’actionnaire est l’objectif prioritaire, et que c’est en son nom que sont menées des restructurations destructrices de sites et d’emplois viables. Décidément, la crise a bon dos!

Dans ce contexte, sauver l’industrie et l’emploi industriel ne passe pas par ce que propose le MEDEF – je le regrette, chers collègues! –, focalisé sur la « baisse des charges. Après avoir obtenu la suppression de la taxe professionnelle, il veut à présent réduire sa participation au financement des régimes sociaux, c’est-à-dire la sécurité sociale et les retraites. Dans ma belle région de Normandie, la suppression de la TP n’amène pas la direction de Renault à maintenir la fabrication d’un modèle haut de gamme à Sandouville, ni même en France! Aujourd’hui, les salariés de Sandouville subissent le chômage technique, mais la direction de Renault demande encore qu’ils améliorent leur compétitivité. Alors même que les voitures ne se vendent pas, il faudrait les fabriquer plus vite, probablement pour être plus souvent au chômage technique – ce n’est pas Renault qui paye, c’est l’argent public!

La sauvegarde de l’emploi industriel ne réside pas non plus dans la politique actuelle d’aides publiques, à guichets ouverts, sans contrôle réel. Ainsi, alors que le crédit d’impôt recherche va dépasser 4 milliards d’euros, la part du privé dans la R & D n’augmente pas: on ne peut, à la fois, financer la recherche, investir et verser plus de dividendes! Monsieur le ministre, je ne peux m’empêcher de vous citer une note, qui n’est pas extraite de L’Humanité mais émane du Centre d’analyse stratégique: « Si le crédit d’impôt recherche est a priori un instrument adapté au renforcement de l’investissement en R & D des entreprises, l’absence de ciblage peut cependant amoindrir l’efficacité de cette mesure. Or, la réforme de 2008 du CIR – celle que vous avez demandée et votée – alimente le débat sur les catégories d’entreprises bénéficiant le plus de cette aide fiscale, de nombreuses voix s’élevant pour signaler que l’essentiel des gains de la réforme risque de profiter aux très grandes entreprises, dont certaines auraient accru l’externalisation à l’étranger de leur activité de R & D ».

Ainsi, les milliards versés à l’industrie automobile n’empêchent pas les suppressions massives d’emplois, même déguisées en départs volontaires, ou les fermetures de sites au prétexte qu’il ne s’agirait pas « de sites de production » – vous voyez à quoi je fais allusion, monsieur le ministre.

Quand la question du raffinage est posée, comment comprendre et accepter que le port du Havre, au cours des trois premiers mois de l’année, ait vu ses importations de pétrole brut diminuer, alors que celles de produits raffinés augmentaient? C’est bien que l’on raffine de plus en plus à l’étranger et de moins en moins en France!

Nous pensons qu’il faut à la fois refuser les logiques financières qui étouffent l’économie, intervenir dans les stratégies des entreprises en conditionnant les aides, aux niveaux régional et national, en montant au capital pour peser sur les choix et développer les atouts de notre pays, en particulier la formation des salariés, la qualité des territoires en services publics, en recherche publique, en infrastructures.

Alain Bocquet a évoqué un certain nombre de mesures que nous préconisons. Je rappellerai la création d’un pôle public financier; la constitution de fonds régionaux publics pour l’emploi prenant en charge tout ou partie des intérêts des crédits pour les investissements des entreprises; la préservation et le développement de la chaîne qui va de la recherche à la production, dans les secteurs émergents mais aussi traditionnels, ce qui passe par la formation, l’innovation, le travail en réseau; le rétablissement du contrôle de l’utilisation des fonds publics – je vous rappelle, monsieur le ministre, que la première mesure prise par la droite en arrivant au pouvoir en juillet2002 a consisté à supprimer la commission chargée de contrôler l’utilisation des fonds publics dans les entreprises; un droit d’accès aux marchés français et européen, calculé en fonction des écarts de salaires et de protection sociale entre les pays importateurs et exportateurs.

Monsieur le ministre, vous avez fait de grandes déclarations, souvent contredites par la réalité. Vous avez stigmatisé des salariés en lutte contre la casse organisée de leur outil de travail, comme à Sodimatex. Vous avez laissé, comme à Isotherma, près du Havre, des financiers se conduire en voyous et entraîner la liquidation d’entreprises. Vous venez de prendre une nouvelle fois, ici même, un certain nombre d’engagements: chiche!

Nous pensons quant à nous qu’une politique industrielle a toute sa place dans notre pays, à condition de sortir, aux niveaux national comme européen, d’une politique qui considère les salariés comme des variables d’ajustement, les droits sociaux comme des obstacles à abattre et les États comme des outils d’adaptation des hommes et des territoires aux besoins du capitalisme financier et mondialisé.

M. le président. La parole est à M. Marcel Bonnot.

M. Marcel Bonnot. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, il est des éléments parfaitement incontournables. L’évolution de l’emploi industriel en France demeure interdépendante de la compétitivité de nos entreprises, de la pérennité de nos sites de production, de leur capacité à appréhender l’innovation, la recherche et le développement, de la formation susceptible d’être apportée aux hommes et femmes qui y travaillent.

Alors que l’industrie française ne peut être déconnectée de la satellisation d’autres entreprises sur le plan mondial, c’est-à-dire de la mondialisation, elle arbore des spécificités qui ne la rendent pas forcément compétitive. Ainsi, elle est tenaillée par un étau fiscal et social – à cet égard, la suppression de la taxe professionnelle, qui pénalisait les investissements et, par voie de conséquence, l’emploi, relevait d’une vraie nécessité.

M. Thierry Benoit. C’est vrai!

M. Marcel Bonnot. La crise économique est venue ajouter au problème existant. C’est ainsi que nous vivons chaque jour dans l’inquiétude de voir une entité de notre territoire touchée par une liquidation judiciaire ou obligée de fermer ses portes par une décision relevant d’une stratégie de restructuration où le calcul froid et l’autoritarisme l’emportent sur une survie possible. Comme l’a rappelé récemment le Président de la République, la France a perdu 500000 emplois industriels entre2000 et2007.

Dresser un simple constat de la situation et s’arrêter là serait faire preuve d’une certaine incapacité. Dans le souci permanent de sauver l’industrie et ses emplois, le Gouvernement n’est pas resté inactif. Différentes mesures ont été prises: le chômage partiel, la prime à la casse, le prêt direct aux entreprises, la création du FSI ou la mise en place des états généraux de l’industrie à votre initiative, monsieur le ministre, lors de laquelle vous avez rappelé la nécessité de « traiter les faiblesses structurelles de l’industrie en France pour sortir de la crise plus forts ».

C’est dans cet esprit que vous m’avez chargé de présider un groupe de travail sur la sous-traitance automobile. La mission qui m’était confiée devait conduire ce groupe de travail à réunir constructeurs, équipementiers, sous-traitants, organisations syndicales, élus, fédérations professionnelles, organismes de recherche, pour proposer des mesures à court terme afin de soutenir les sous-traitants de rang 2 et plus en difficulté, d’apporter des solutions pour mieux anticiper. Deux autres groupes de travail étaient chargés d’apporter des éléments pour mieux accompagner la structuration de la filière et réfléchir aux besoins futurs des consommateurs.

Très rapidement, mon groupe de travail a dressé le constat de la situation de ces sous-traitants de rang 2 et plus, un constat éloquent: la baisse de production connue en 2009 a généré des pertes importantes conduisant du même coup à l’épuisement des fonds propres; ces entreprises sous-traitantes peu capitalisées dégagent des marges faibles, dépendent le plus souvent d’un seul client, sont victimes de la frilosité de leurs banques, ne trouvent pas chez leurs donneurs d’ordres la moindre visibilité.

À l’issue de la présentation de nos conclusions, vous avez annoncé plusieurs mesures, à savoir la création d’un fonds au sein du Fonds de modernisation des équipementiers automobiles, le FMEA, destiné aux sous-traitants de rang 2 et plus, doté de 50 millions d’euros; un accès facilité pour les PME de la filière automobile aux 2 milliards d’euros gérés par OSEO et le FSI pour le renforcement des fonds propres ou quasi-fonds propres.

Pour ce qui est des mesures d’accompagnement des mutations stratégiques économiques, vous avez annoncé le financement par l’État de diagnostics stratégiques pour les PME de la filière qui en feront la demande pour les aider à bâtir une stratégie et définir un cap; la mise en place, dans les grandes régions automobiles, d’une plate-forme ou guichet unique, constitué, sous l’égide du préfet, d’une équipe de personnes compétentes, de nature à accompagner efficacement les entreprises de la filière sur les différents outils disponibles en matière de financement et d’accompagnement des mutations économiques.

Vous avez également décidé, monsieur le ministre, de la poursuite des réflexions sur l’évolution de l’emploi dans la filière automobile grâce à la mise en place d’un groupe de travail placé auprès de la plate-forme automobile existante.

M. Thierry Benoit. Très bien!

M. Marcel Bonnot. Si la situation de l’emploi industriel est de nature à maintenir en éveil la conscience politique, force est de constater que les différentes mesures mises en place, notamment depuis la crise économique, paraissent aller dans le bon sens. Comme le relevait récemment un économiste, l’industrie ne disparaît pas, elle se transforme et s’élargit.

Cette incontournable réalité ne pouvait qu’amener le Gouvernement à réagir. De toute évidence, l’emploi industriel peut encore être sauvé en France. Les mesures prises vont dans le bon sens. Les politiques nouvelles doivent être tournées vers l’emploi, vers le soutien aux entreprises, vers une plus grande transparence des circuits de sous-traitance, vers une productivité qui n’obéisse pas simplement aux seuls critères financiers.

Pour sauver l’emploi industriel, la France doit être plus compétitive, et sa compétitivité doit être recherchée par un effort d’innovation, de recherche et de développement, faiblesses de l’industrie française par rapport à la démarche de l’Allemagne, des États-Unis, du Japon et de la Chine.

En 2006, le Premier ministre m’avait nommé en mission sur l’innovation et les transferts technologiques. J’ai eu l’occasion de passer plusieurs jours dans la société allemande Fraunhofer à laquelle il a été fait référence il y a quelques instants. Depuis trente ans, cette société met en synergie la recherche, l’université, les entreprises, le monde de la formation, ce qui permet de déboucher sur des brevets, une stratégie d’innovation, de recherche et de développement accomplie qui la rend leader sur le plan mondial.

La même année, nous avons tenté de copier l’Allemagne en mettant en place le label Carnot qui a été attribué à certains laboratoires. Alors que la société Fraunhofer mobilisait 10 milliards dans l’innovation et la recherche-développement, fruits de la compétitivité et de la pérennité de son entreprise, la France en consacrait 49 millions. Il nous reste du chemin à parcourir!

M. le président. Il faut conclure, mon cher collègue.

M. Marcel Bonnot. Sans sombrer dans l’autosatisfaction, dans ma Franche-Comté, terre industrielle s’il en est, celle de l’automobile, de la sous-traitance et de la plasturgie, celle des mobilités et des microtechniques, grâce aux moyens mis en place et à la mobilisation de tous les acteurs, aucune entité de plus de cinquante emplois n'a disparu depuis la crise, en dépit de la velléité entretenue par certaines stratégies autoritaires et qui apparaissaient sans appel.

Mieux, pour la première fois depuis longtemps, on a enregistré en mars, dans l'aire urbaine Montbéliard-Belfort, une légère baisse du chômage, alors même que l’on peut lire, dans le quotidien régional aujourd’hui, que, sur le plan conjoncturel, l'activité reste soutenue pour l'automobile.

M. le président. Monsieur Bonnot, merci de conclure!

M. Marcel Bonnot. Néanmoins, je partage le sentiment de beaucoup: la volonté politique de la France quant à l’emploi industriel ne saurait souffrir le moindre relâchement. Notre emploi industriel de demain en dépend.

Aussi, pour conclure, permettez-moi d'emprunter les propos très volontaristes d'une plume avertie, qui livrait en substance: « Lorsque nous voulons quelque chose de différent, nous devons oser faire et réussir quelque chose de nouveau. » (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

M. le président. La parole est à M. Michel Liebgott.

M. Michel Liebgott. Monsieur le ministre, à ce point du débat, je veux rappeler qu’il y a, d’un côté, les libéraux et, de l’autre, les interventionnistes, les Keynésiens, ceux qui veulent être actifs sur l’économie.

M. Alain Bocquet. C’est vrai!

M. Michel Liebgott. L’économie française ne s’est jamais aussi bien portée que lorsqu’on y développait des projets de grande ambition comme Ariane, Airbus, le TGV, le nucléaire civil, la couverture téléphonique nationale, autant de dossiers qui ont été menés avec la présence constante de l’État.

Je ne reviendrai pas sur les chiffres catastrophiques de ces dernières années ni sur les 269000 emplois supprimés en raison de la crise. Si Lionel Jospin avait dit, alors qu’il était Premier ministre, que l’État ne pouvait pas tout faire, cela ne voulait pas dire pour autant que l’on ne pouvait rien faire. Dans ce domaine, il a fait beaucoup puisque 2 millions d’emplois ont été créés de 1997 à 2002.

Quand, pour sa part, le Président de la République a déclaré, à Gandrange – plus peut-être dans un moment d’exaltation personnel que de lucidité – qu’il allait sauver l’entreprise, il n’a pas obtenu le résultat escompté. Il n’a rien sauvé, pire, il a désespéré Gandrange mais aussi la France. On n’a pas le droit de faire de la communication de cette manière, c’est-à-dire sur le dos de ceux qui vont perdre leur emploi.

Nous ne sommes pas opposés à une relance de l’économie par l’offre ou par la demande. Ce qu’il faut rechercher, c’est un équilibre. Nous ne sommes pas, par exemple, contre la prime à la casse, mais nous considérons que les efforts faits par les uns et par les autres sont injustes. Certains de mes collègues considèrent que les taux de TVA sont trop élevés. Peut-être faudrait-il alors revoir la fiscalité, notamment pour ceux qui en sont exemptés. À cet égard, je pense au bouclier fiscal dont on parle beaucoup actuellement et que vous n’avez toujours pas abrogé. Supprimez-le et réinvestissez les sommes ainsi dégagées dans le volontarisme économique. Il y a tant à faire pour accompagner les entreprises! Malheureusement, je ne crois pas que les sommes redistribuées aux bénéficiaires du bouclier fiscal se retrouvent aujourd’hui dans l’économie française.

M. Christian Vanneste. Ne répétons pas les erreurs du passé!

M. Michel Liebgott. Monsieur le ministre, chacun s’accorde à reconnaître que, dans le domaine industriel, il faut être plus volontariste que jamais. Or le problème, c’est que vous ne l’êtes pas. Un pays dit libéral comme le Luxembourg qui, soit dit en passant, est aujourd’hui gouverné par des socialistes, a développé dans le sud du pays une stratégie de développement économique en lien avec l’Arbed, en l’occurrence ArcelorMittal. Alors que le Luxembourg y consacrait 1 milliard d’euros, de l’autre côté de la frontière, en France, on investissait zéro malgré un projet d’opération d’intérêt national lancé par le Président de la République. Comme l’a rappelé Jacques Attali, qui a été récemment auditionné par la commission des affaires sociales, les Ecopolis ne font l’objet d’aucun financement, pas un centime!

Je comprends et je souscris à votre volontarisme, mais si je reprends cet exemple concret du site d’Esh-Belval, alors que le Luxembourg a consacré 1 milliard d’euros, rien de tel n’a été engagé du côté français. Malgré la venue de M. Mercier sur le territoire, j’attends toujours des propositions concrètes, comme le groupe socialiste en attend sur tous les autres territoires que vous avez évoqués.

Je pourrais citer également l’Allemagne où la part de l’industrie dans le PIB est passée de 29 % à 30 %, grâce à la mise en place d’une autre démocratie sociale. En Allemagne, on ne réunit pas les syndicats uniquement pour faire du palliatif, du social lorsque l’on dépose le bilan; il y a un dialogue social permanent entre les Länder, l’État, l’entreprise et les syndicats, que l’on ne méprise pas. Du reste, si, à Gandrange, on avait réuni les syndicats et écouté leur expertise, ce site n’aurait pas été fermé. On savait très bien que les investissements nécessaires n’y avaient pas été réalisés, que les équipements étaient obsolescents. On avait préféré conclure des marchés avec les producteurs d’électricité des Pays-Bas plutôt que de continuer à travailler avec des producteurs français d’électricité.

Le problème, c’est qu’il n’y a aucune volonté politique. On va aider les banques, les entreprises du CAC 40, mais on va oublier les sous-traitants de la sidérurgie qui ont dû supprimer des emplois, car ils ne bénéficient d’aucune aide. La force de l’Allemagne sur la France, c’est de disposer d’un tissu de PMI et PME que nous n’avons pas, tout simplement parce que nous n’avons pas de politique industrielle. Nous aidons les très grandes entreprises et nous ne pensons pas aux entreprises intermédiaires.

M. Thierry Benoit. On les aime, mais on s’en méfie!

M. Michel Liebgott. Il faut travailler en amont, c’est-à-dire consacrer une part importante des dépenses publiques à la recherche et au développement. Or, dans ce domaine, nous ne sommes pas non plus les meilleurs, puisque la recherche-développement ne représente que 1,9 % du PIB, contre 2,4 % en Allemagne et 2,5 % aux États-Unis. Peut-être faut-il utiliser ce facteur de compétitivité extraordinaire que représentent les mises aux normes environnementales qui sont créatrices d’emplois. Je pense, en particulier, au stockage et au captage de CO 2 .

En conclusion, il faudrait inciter l’Europe à être un peu moins tentée de faire constamment la chasse aux subventions et à l’État actionnaire et à laisser la puissance publique jouer son rôle. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

M. le président. La parole est à M. Gérard Charasse.

M. Gérard Charasse. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, j’ai la conviction que le débat lancé par le groupe GDR est essentiel. En effet, le sujet traverse toutes les couches de la population, les partis politiques, les organisations syndicales.

Nous sommes effectivement à un tournant. Nous avons assisté, avec désespoir, parfois aussi avec violence, au départ de nos industries, aux délocalisations, terme d'ailleurs inventé pour cela. Dans le bassin d'emploi de Vichy, ce sont ainsi 800 emplois directs qui ont disparu en quelques années.

J’ai vu Sediver, archétype de l’entreprise privée européenne, partir en Chine, déboutée deux ans après de la justification économique donnée à son départ. Ce n’était qu’une mauvaise excuse.

J'ai vu se réduire puis s'en aller Manurhin, filiale de Giat, aujourd'hui Nexter. Cinq ans après, l'analyse économique de l'époque s'avère fausse, comme nous l'avions dit, au point que la production n’a pu reprendre ailleurs et que l'armée française qui s'équipait à Cusset et Bellerive, achète plus cher sur étagère des munitions que l'on hésite à charger dans le canon d'un Rafale.

J'ai aussi vu se réduire, mais rester, Applifil. Cette délocalisation sans analyse devait se faire une nuit au coup de poing. Nous nous y sommes physiquement opposés.

Ces trois événements, qui existent hélas! à des centaines d'exemplaires, montrent la dimension collective d’intérêt général de l'acte de production lorsqu'il mobilise des moyens à cette échelle. Cela justifie la nécessité pour l'État de s'intéresser et d'agir dans ce secteur.

Ajoutons à cet argument, qui vaut à toutes les échelles, d’abord l'interdépendance avec le secteur tertiaire, voire ce que nous appelons le quaternaire. Ce secteur mis en avant vit, dans mon département, pour moitié de la commande industrielle, pour moitié des ménages dont le dynamisme tient aux revenus du travail, de la redistribution. Dans l'Allier, en période de crise, c'est l'industrie qui amortit les chocs de conjoncture.

L'engagement public dans l’industrie a connu deux temps: le temps de l'État entrepreneur, s'appuyant notamment sur la constitution de champions nationaux; le temps de l'État facilitateur, avec la constitution des pôles de compétitivité. Les interlocuteurs de l'État ont d'abord été les grands groupes. Mais la mesure d'une unité de production n'est pas celle du groupe qui la soutient. Nous en savons quelque chose, à Vichy notamment.

En fait, la vraie question est de savoir si la politique industrielle a encore une place. À partir de l'histoire et de l'actualité, nous, radicaux, répondons oui. C'est grâce à l'action publique que la France dispose d'entreprises dans les tout premiers rangs mondiaux et d'avantages décisifs de compétitivité dans l'aéronautique, l'espace, le TGV, le pétrole et l'énergie nucléaire. De plus, la globalisation marque à l'évidence une pause. La poursuite de la libéralisation des marchés financiers est mise en cause par la crise bancaire, les fonds souverains, la sous-évaluation de la monnaie chinoise, la raréfaction des ressources, la course à la sécurisation des approvisionnements en matières premières. Tout nous dit la nécessité d'une politique industrielle, avec cinq piliers: l'initiative, l'outil, le financement, les hommes, l'aménagement.

Premièrement, l’initiative doit être partagée. Il n'y a pas de honte pour un État à dire qu'il veut devenir terre d'accueil de la recherche, du développement de telle ou telle industrie, orientation politique à choisir et à assumer sur le long terme, où la continuité républicaine doit être respectée. Mais l'initiative doit aussi être celle des industriels. Un patron de PME ou de PMI doit pouvoir dire à l'État qu'il a besoin d'aide dans ses projets de réactivité. Nous avons malheureusement tant de corps intermédiaires qu'aucun chef d'entreprise modeste ne peut avoir accès à la pleine mesure des leviers publics. D’où l'idée d'une Agence européenne de l'innovation industrielle adossée à la Banque européenne d'investissement.

Deuxièmement, l’outil de production est le cœur de l’efficience où l'investissement doit porter. Une remise à niveau s’impose pour nos investissements. À cet égard, les fonds du CIR pourraient être efficacement utilisés.

Troisièmement, le financement. Une entreprise sur deux est en situation de sous-capitalisation, menace permanente sur l'entreprise et les emplois. Pour y remédier, au-delà des fonds d'adossement régionaux, il faut mobiliser des fonds aujourd'hui captés par des banques aux desseins variés, parfois très éloignés de notre pays. Je pense à l’épargne française notamment.

Quatrièmement, les femmes et les hommes. Comment faire fonctionner un système industriel sans eux? La difficulté, c'est l'adaptation. C'est donc vers la formation continue que doit porter l'effort. Les radicaux ont déjà proposé la mise en place du revenu d’insertion professionnelle et du compte individuel formation. D’autres y ont réfléchi.

Cinquièmement, enfin, que celles et ceux qui regardent encore d’un bien mauvais œil l'État s'engager dans le secteur économique veuillent bien considérer cela comme un investissement. Si l’engagement de l'État est mesuré, juste, les entreprises vivront mieux, se développeront. C'est à la clé, pour nos territoires, de l'emploi, de la redistribution, de la confiance, un cercle vertueux que, par essence et par construction, l'investisseur privé, solitaire, ignore.

Telles sont, monsieur le ministre, les options défendues par les radicaux, fruits de réflexions, de confrontation avec la réalité. Ces propositions méritent l'attention du Gouvernement. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

M. le président. La parole est à M. Jean Grellier, dernier orateur inscrit.

M. Jean Grellier. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je tiens tout d’abord à remercier nos collègues du groupe GDR qui ont permis la tenue de ce débat sur l’emploi industriel.

Compte tenu du temps qui lui est consacré, il faut souhaiter qu’il soit le départ d’une réflexion et d’une action d’envergure de notre assemblée sur l’avenir de l’industrie en France, avec deux priorités que sont les emplois correspondants et l’urgence de la situation.

En effet – cela a été dit‚–, depuis huit à dix ans, ce sont plus de 500000 emplois qui ont été perdus dans le secteur industriel dans notre pays, avec le cortège de pertes d’activités, de fermetures d’usines, de délocalisations et de licenciements que cela suppose.

Trop longtemps, on a cru que le libéralisme, voire l’ultralibéralisme, liés à la mondialisation, allaient permettre de rebondir et de trouver des solutions, y compris avec des transferts d’emplois dans les services. Pendant ce temps, l’action publique s’est réduite à sa plus simple expression ou a été diluée dans une panoplie d’aides peu efficaces. Seule la notion de pôle de compétitivité a été mise en œuvre, sans pour cela corriger totalement les effets de cette mondialisation non maîtrisée qui continue de fragiliser notre industrie.

La crise financière de l’automne2008 a accentué les difficultés, qui se sont traduites par une accélération depuis deux ans des fermetures d’usines, des licenciements et des délocalisations, même si certains secteurs tentent courageusement de résister ou de se transformer. En conséquence, si une mobilisation générale de nos capacités industrielles, accompagnée fortement par la puissance publique, n’est pas décrétée rapidement, nous pouvons avoir de grandes craintes pour les prochains mois et les prochaines années.

À l’automne dernier, monsieur le ministre, vous avez effectivement lancé les états généraux de l’industrie, initiative que l’on peut considérer comme positive, que ce soit dans son concept ou dans son déroulement, même si les délais pour l’échange et la réflexion ont été trop courts au regard des enjeux. Ces états généraux ont permis de dresser le constat selon lequel l’industrie française souffrirait de problèmes de compétitivité en matière de prix, d’un manque de recherche et d’innovation, et de difficultés de financement, ces différents handicaps – sans doute trop rapidement résumés‚–, étant en partie liés.

Le jeudi 4 mars dernier, après qu’un rapport lui eut été remis le 16 février à l’Élysée, le Président de la République, chez Eurocopter à Marignane, a clos les états généraux de l’industrie. Malheureusement, permettez-moi de vous le dire, cette journée ne marquera certainement pas l’histoire de l’industrie française, les propositions du Président de la République étant, à mon avis, très loin de la révolution industrielle que vous aviez annoncée, monsieur le ministre, lors du lancement de ces mêmes états généraux. Elles s’additionnent aux autres procédures déjà engagées ou en cours, voire se confondent avec elles. Je pense notamment à certaines propositions du rapport Attali, à la notion de pôle de compétitivité et aux activités qui y sont liées, aux récentes assises des territoires ruraux, aux objectifs annoncés du grand emprunt, voire, pour certains territoires, à la mise en œuvre des schémas régionaux de développement économique, sans oublier certaines missions confiées à des parlementaires sur les PME ou encore sur l’économie sociale.

Tout cela ne permet pas d’obtenir de la cohérence, avec une vision, des objectifs clairs sur l’avenir de l’industrie en France, si bien que les quelques annonces faites par le Président de la République ne répondent en aucun cas à ces enjeux, ni aux conclusions – nettement plus ambitieuses‚– des groupes de travail nationaux et régionaux des états généraux.

L’affectation annoncée de 6,5 milliards du grand emprunt – il s’agit donc d’une dette supplémentaire pour l’État‚– n’est pas a priori , à ce jour, déterminée précisément. Ainsi, le douloureux problème du financement et de la capitalisation des entreprises industrielles n’a toujours pas de solution à la hauteur des besoins.

L’évolution de la place des salariés au sein des entreprises, mais aussi les thèmes de l’orientation des jeunes vers les filières industrielles et de leur formation, n’ont pas été abordés par le Président de la République. Il n’a pas manqué toutefois de faire des incantations vis-à-vis de l’Europe ou encore du G 20 et du G 8, mais sans perspective de résultats à court terme.

Par ailleurs, l’idée, qui peut apparaître positive, du médiateur de la sous-traitance, ne pourra s’exprimer que s’il y a une vraie stratégie de rapprochement et de complémentarité entre les grands donneurs d’ordre et les sous-traitants, dans un véritable esprit de coopération.

L’idée de l’organisation en filières s’inscrit dans la même exigence stratégique et il est difficile de comprendre comment elle s’intégrera dans la réalité des pôles de compétitivité.

Ne croyez-vous pas, monsieur le ministre, qu’une grande déception affecte aujourd’hui toutes celles et tous ceux qui se sont mobilisés pour ces états généraux, au regard de l’ambition que vous aviez affichée lors de leur lancement et du peu de retombées que nous constatons aujourd’hui pour assurer l’avenir de notre industrie, mais surtout des emplois et des richesses qu’elle procure encore à nos territoires?

Il est aujourd’hui nécessaire d’engager politiquement une action publique forte, qui passe, à mon avis, par la création d’un outil financier public qui soit puissant et d’envergure; un outil qui apporterait un soutien significatif aux différentes filières industrielles, compensant le trop fort intérêt des fonds d’investissements pour les gains à court terme, et le peu d’empressement du secteur bancaire traditionnel à prendre des risques – ce qui ne doit pas empêcher de solliciter sa participation.

Il faut également achever la décentralisation de2004 en donnant aux conseils régionaux la totalité de la compétence en matière de développement économique, afin de leur permettre d’agir sur les principales filières industrielles se trouvant à proximité, en s’appuyant sur des coopérations interrégionales et – pourquoi pas?– sur une contractualisation claire avec l’État sur les problématiques d’amont et d’aval de l’industrie,…

M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue.

M. Jean Grellier. …intégrant la formation, la recherche, l’innovation, ainsi que les outils financiers de proximité et les capacités de développement de leurs marchés.

Par ailleurs, il est nécessaire de répartir plus justement les contributions fiscales et sociales des entreprises, afin de mieux reconnaître celles qui produisent et emploient en France, qui sont les plus contributives, et de faire jouer une forme de compensation avec celles qui délocalisent et importent – les deux allant souvent de pair‚–,…

M. le président. Merci, mon cher collègue!

M. Jean Grellier. …tout en étant épargnées.

Il est également nécessaire et urgent d’avoir une vue claire en ce qui concerne le coût futur de l’énergie, facteur important de compétitivité de nos entreprises et sans doute encore plus déterminant que les coûts salariaux.

De même, il sera indispensable de faire évoluer la place et le pouvoir des salariés au sein des entreprises, afin qu’ils puissent peser davantage sur les orientations et sur les décisions prises, qui doivent être inspirées prioritairement par une stratégie industrielle et non par la seule rentabilité financière.

Il faudrait encore du temps, monsieur le président, pour développer tous ces aspects.

M. le président. Eh oui! Hélas, il va falloir conclure (Sourires.)

M. Jean Grellier. Et je ne vous ai pas parlé d’Heuliez!

Pour toutes ces raisons, je souhaite que ce débat marque le point de départ d’un engagement fort et rapide de notre assemblée pour accompagner la mutation de notre industrie, notamment en matière écologique, afin de sauvegarder son implantation sur nos territoires et surtout les emplois qu’elle peut encore y développer. C’est la condition de l’espoir. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Christian Estrosi, ministre chargé de l’industrie. Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, je voudrais répondre à chacun d’entre vous dans le cadre de ce débat que je vous remercie d’avoir abordé.

Voilà finalement très longtemps qu’un gouvernement n’avait pas pris, comme celui-ci l’a fait, des initiatives dans le domaine industriel. Je veux croire que c’est cela qui a suscité, sur tous ces bancs, la volonté d’ouvrir ce débat. Et c’est sans doute particulièrement le cas pour la gauche, qui avait oublié que l’avenir de la France reposait pour une grande part sur l’industrie. (Protestations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

M. Daniel Paul. Il ne faut pas pousser!

M. David Habib. C’est n’importe quoi!

M. Christian Estrosi, ministre chargé de l'industrie. Monsieur Thierry Benoit, dans un marché globalisé, les enjeux de la compétitivité et de l’innovation sont essentiels; on ne peut pas les occulter.

Notre pays peut être fier d’avoir une protection sociale de haut niveau. On a d’ailleurs vu le rôle positif qu’elle a pu jouer comme amortisseur de la crise. Mais, pour autant, cela ne saurait nous empêcher d’examiner la manière dont cette protection sociale est financée. Les charges sociales pour les entreprises sont les plus lourdes d’Europe et les allégements de charges profitent trop peu à l’industrie.

M. Thierry Benoit. C’est vrai!

M. Christian Estrosi, ministre chargé de l'industrie. L’industrie manufacturière représente 21 % de la masse salariale, mais elle reçoit moins de 15 % des allégements de charges. C’est paradoxal, car cela signifie que ce sont les secteurs les plus exposés à la concurrence internationale qui bénéficient le moins des allégements de charges sociales.

M. Daniel Paul. Il ne fallait pas baisser la TVA sur la restauration!

M. Christian Estrosi, ministre chargé de l'industrie. C’est pour cela que le Président de la République a annoncé à Marignane, le 4 mars dernier, qu’il souhaitait une véritable réflexion sur le mode de financement de notre protection sociale. Cela ne veut d’ailleurs pas dire nécessairement qu’une TVA sociale sera instaurée. Je crois qu’il faut dépasser cette question et appréhender le problème de manière beaucoup plus globale. Pour ma part, je suis convaincu que ce sera un sujet majeur de la seconde partie du quinquennat.

M. Thierry Benoit. Très bien!

M. Christian Estrosi, ministre chargé de l'industrie. Le coût total du travail en France, qui était inférieur de 10 % à celui de l’Allemagne il y a dix ans, est revenu aujourd’hui au même niveau.

M. Thierry Benoit. Eh oui!

M. Christian Estrosi, ministre chargé de l'industrie. Et, vous l’avez dit, monsieur Benoit, c’est essentiellement à cause des 35 heures, qui ont plombé la compétitivité des entreprises, au nom d’un dogme – celui du partage du travail. On a vu le résultat!

Plusieurs députés du groupe SRC. C’est faux!

M. Christian Estrosi, ministre chargé de l'industrie. Sur la conditionnalité des aides, je vous annonce que les avances remboursables que nous mettons en œuvre dans le cadre des états généraux de l’industrie seront conditionnées à des exigences strictes en termes de créations d’emplois, qui seront suivies dans la durée.

M. Thierry Benoit. Très bien!

M. Christian Estrosi, ministre chargé de l'industrie. Ce sont 200 millions d’euros de crédits au titre de l’emprunt national qui seront consacrés à ce domaine. De plus, les entreprises devront informer les représentants du personnel de toute aide reçue.

Telle est notre conception du débat avec l’ensemble de nos partenaires sociaux: il faut qu’ils puissent participer, conformément au souhait exprimé au sein des états généraux de l’industrie, à la stratégie industrielle de leur entreprise. Je n’ai jamais entendu qui que ce soit, par le passé, inviter les représentants du personnel à participer de cette façon!

M. Alain Bocquet. Nous, nous l’avons proposé!

M. Christian Estrosi, ministre chargé de l'industrie. Monsieur Christian Vanneste, vous connaissez mon attachement à défendre notre industrie et vous pourrez en témoigner: nous avons lutté tous les deux pour défendre les chantiers Wauquiez et nous avons réussi, en faisant en sorte que les actionnaires apportent l’argent nécessaire.

M. David Habib. C’est le Guevara de l’industrie!

M. Christian Estrosi, ministre chargé de l'industrie. Le tribunal de commerce a approuvé hier la sortie de la période de sauvegarde, sans condition. Je veux ici souligner l’action des services de l’État, et notamment de François Yoyotte, commissaire à la réindustrialisation, qui ont permis de dénouer la situation.

Vous évoquez aujourd’hui le dossier de SCA, qui vient d’annoncer la fermeture de son site comptant 280 salariés. J’y serai très attentif. Il faut en particulier que toutes les pistes de reconversion du site soient étudiées avec la plus grande attention. La commune de Linselles est éligible aux aides à finalité régionale. Je suis prêt à intervenir auprès de Michel Mercier si un projet de reprise du site, éligible au dispositif, voyait le jour.

Au-delà de ce dossier emblématique, le Gouvernement s’est attaché à accompagner beaucoup mieux qu’auparavant le reclassement des salariés, grâce au contrat de transition professionnelle, le CTP. Toujours chez vous, monsieur Vanneste, le CTP permet de maintenir 90 % du salaire net pendant douze mois lorsqu’un salarié est licencié après une liquidation ou lorsqu’il travaillait pour une entreprise de moins de 1000 personnes.

En tout cas, je tiens à saluer votre action personnelle sur l’ensemble de ces dossiers, qui nous a aidés à trouver des réponses dans un certain nombre de cas et, pour les problèmes n’ayant pas encore été résolus, je serai attentif à ce que nous puissions trouver des solutions.

Monsieur David Habib, vous me dites qu’il n’y a pas de politique industrielle dans notre pays. Si vous aviez écouté mon discours, vous m’auriez entendu parler des états généraux et des vingt-trois mesures que nous allons mettre en œuvre. Le Gouvernement a donc une vraie ambition pour l’industrie française. Les mesures que j’évoquais n’ont pas été décidées de manière unilatérale; la plupart d’entre elles émane d’ailleurs des partenaires sociaux. Si vous les désapprouvez, cela veut dire que vous vous engagez dans une critique profonde à l’égard de la CGT, de Force ouvrière, de la CFDT (Sourires) et de tous ceux qui ont participé au processus et ont fait des propositions importantes dans ce domaine. Mais enfin, il est intéressant de savoir que ces organisations sont plus nos partenaires que les vôtres! (Rires.)

Je le répète, dans ce Gouvernement, nous avons une vraie ambition pour l’industrie, contrairement à vous. En effet, qui était, avant moi, le dernier ministre de l’industrie?

M. Alain Bocquet. On ne sait plus!

M. David Habib. Mme Parisot, peut-être? (Sourires.)

M. Christian Estrosi, ministre chargé de l'industrie. Eh bien, je vais vous le dire: c’était M. Strauss-Kahn, sous le Gouvernement de M. Jospin.

M. Alain Bocquet. C’est pour ça qu’il est au FMI!

M. Christian Estrosi, ministre chargé de l’industrie. Et, après son départ, à la moitié de la mandature du gouvernement de M. Jospin, celui-ci n’a pas souhaité le remplacer par un ministre de l’industrie de plein exercice, puisque c’est M. Christian Pierret, secrétaire d’État à l’industrie, qui lui a succédé. Depuis ce temps, et jusqu’à ce que Nicolas Sarkozy décide de me nommer dans son gouvernement, il n’y avait plus de ministre de l’industrie!

M. David Habib. Ne critiquez donc pas M. Chirac! (Sourires.)

M. Daniel Paul. Que s’est-il passé entre2002 et 2007? Il y a eu un trou d’air?

M. Christian Estrosi, ministre chargé de l'industrie. Nous voyons donc bien que celui qui a abandonné l’idée de conduire une grande politique industrielle dans notre pays, c’est bien un premier ministre socialiste!

Je dirai un mot sur Alstom, parce que, franchement, monsieur Habib, je ne peux pas laisser passer vos sous-entendus sur l’action du ministre de l’économie et des finances de l’époque, en2004, qui s’appelait Nicolas Sarkozy. Alors que l’Union européenne nous obligeait à un démantèlement du groupe Alstom…

M. David Habib. J’ai parlé de Péchiney, pas d’Alstom!

M. Christian Estrosi, ministre chargé de l'industrie. …dans l’ensemble de ses activités, au moment même où Siemens, en Allemagne, lançait une offensive importante, s’il n’y avait pas eu la combativité et la ténacité de ce ministre-là, qui s’était même heurté à des résistances dans notre pays, y compris sur les bancs de l’opposition,...

M. David Habib. Ce n’est pas vrai!

M. Christian Estrosi, ministre chargé de l'industrie. …aujourd’hui, nous ne pourrions plus revendiquer d’avoir, sur la scène nationale comme internationale, un grand groupe tel qu’Alstom. Vous auriez donc mieux fait, monsieur Habib, de rester discret sur ce sujet! (Protestations sur les bancs du groupe SRC.)

M. David Habib . Vous travestissez tout, même ce que vous venez d’entendre! C’est grave d’avoir si peu de mémoire!

M. Thierry Benoit. Le ministre dit vrai!

M. le président. S’il vous plaît, mes chers collègues, écoutons M. le ministre.

M. Christian Estrosi, ministre chargé de l’industrie. Monsieur Daniel Paul, je ne peux pas vous laisser dire que l’État a été absent dans le cas de Sandouville.

M. Daniel Paul. Je n’ai pas dit ça, monsieur le ministre!

M. Christian Estrosi, ministre chargé de l'industrie. J’ai moi-même reçu M. Patrick Pélata pour obtenir des engagements clairs de Renault, à la suite de la rencontre entre le Président de la République et le président de Renault, M. Carlos Ghosn.

Le niveau actuel de l’emploi à Renault-Sandouville est ainsi garanti, et j’ai installé un comité de suivi qui associe l’État, Renault, les salariés et les élus locaux, afin de veiller au respect de ces engagements. Je le réunirai prochainement, et je vous y inviterai, monsieur Paul: nous en avions parlé.

Malgré toutes nos différences, je crois en effet que nos points de vue sur Sandouville sont assez similaires: nous partageons l’ambition que Sandouville demeure sur cette plate-forme logistique un grand site de production pour le grand industriel de l’automobile français qu’est Renault.

M. Daniel Paul. Chiche!

M. Christian Estrosi, ministre chargé de l’industrie. Chiche, oui! Allons-y: je vous promets que, si nous devons mener ce combat, nous le mènerons ensemble. Je n’ai pas d’états d’âme sur ce sujet. Nous nous en sommes déjà entretenus, et je respecterai mes engagements.

Vous avez évoqué la question du raffinage. Nous produisons beaucoup d’essence, alors que nous consommons surtout du gazole: il y a là un problème, que le Gouvernement prend à bras-le-corps.

Je suis heureux que ce débat se tienne aujourd’hui: je voudrais que nous dépassions les conflits idéologiques sur ce sujet. Le ministre de l’industrie n’est pas plus le ministre des patrons que celui des ouvriers; c’est le ministre de ce qu’il y a de plus noble dans notre pays. Je le dis à tous ceux qui sont sur ces bancs cet après-midi, et qui d’ailleurs ne sont pas très nombreux, ni d’un côté ni de l’autre: au fond de vous-même, vous y croyez encore; vous considérez, les uns et les autres, qu’il faut mener ce combat et relever ce défi pour que la France reste, quels que soient les gouvernements de demain, une grande puissance industrielle.

M. Thierry Benoit. Oui!

M. Christian Estrosi, ministre chargé de l’industrie. Je le dis avec beaucoup d’humilité: nous ne gagnerons ce combat qu’en associant l’ensemble des partenaires.

Le débat sur le raffinage aujourd’hui est parti de la Raffinerie des Flandres, à Dunkerque. On nous a annoncé au mois de septembre dernier qu’il y aurait un arrêt provisoire, comme cela arrive souvent dans les raffineries pour des problèmes de stockage. Ensuite, Total, malgré des marges de près de 8 milliards d’euros en 2009, a commencé à laisser entendre qu’il pourrait y avoir un projet de fermeture de la Raffinerie des Flandres.

Je comprends parfaitement l’inquiétude des salariés, des sous-traitants, des élus locaux de l’ensemble du bassin industriel du port de Dunkerque, l’un des grands ports autonomes de France qui avait justement trouvé au cours des années écoulées un équilibre comme plate-forme logistique et comme centre industriel. Une telle fermeture ne toucherait donc pas la seule Raffinerie des Flandres; c’est l’ensemble de l’activité industrielle de Dunkerque et du Dunkerquois qui serait mis en danger.

Les partenaires sociaux, les salariés ont réagi. Plusieurs raffineries se sont mises en grève. Il y a eu des demandes fortes, mais raisonnables: un engagement fort de ne pas toucher aux cinq autres raffineries de Total dans notre pays au cours des cinq prochaines années; l’ouverture d’une table ronde sur le raffinage; l’accompagnement par l’État d’une discussion entre les raffineurs, Total, les partenaires sociaux, sur l’avenir industriel du bassin de Dunkerque.

Le Gouvernement a accepté ces demandes. La table ronde s’est ouverte il y a quinze jours, présidée par M. Jean-Louis Borloo et par moi-même. Trois tables rondes consacrées au raffinage vont se réunir à partir du début du mois de mai. Je me suis également rendu, il y a quelques jours, sur le port de Lavéra, site important de raffinage d’Ineos situé à côté de Fos-sur-mer.

Il en va de l’indépendance énergétique de notre pays. Une réflexion de fond est nécessaire. En effet, nous produisons trop d’essence par rapport à notre consommation locale, et en revanche nous sommes obligés d’importer beaucoup de gazole. Mais peut-on se préoccuper sérieusement de notre bilan carbone tout en faisant venir d’Asie, pendant des années encore, des produits qui ont un coût financier et des conséquences en matière d’émission de CO 2 ?

M. Daniel Paul. Très bien!

M. Christian Estrosi, ministre chargé de l’industrie. Cette table ronde, à laquelle sont associés les industriels de l’automobile, a permis de se demander tranquillement, sereinement, comment réorienter le marché pour les années à venir, ainsi – pourquoi pas? – que notre fiscalité. Comment rééquilibrer la consommation des véhicules de demain? Comment pérenniser l’activité de raffinage en France, tout en limitant les importations de gazole? Nous devons soutenir l’activité et, je le dis clairement, je suis favorable à ce que la production se fasse à proximité des lieux de consommation; n’acceptons pas de produire à des dizaines de milliers de kilomètres de notre pays et du continent européen. C’est une réflexion qui doit être menée en commun: puisque vous avez abordé le sujet, monsieur Paul, je souhaitais vous faire part de notre état d’esprit.

Vous évoquez aussi le sort de l’entreprise Isotherma, qui traverse – tout comme Heuliez, dont Jean Grellier me parle souvent – une période très difficile. C’est d’ailleurs le même homme, M. Petiet, qui est en cause. Les 400 salariés d’Isotherma ne sont plus payés, et je ne peux pas l’accepter: je souhaite que le tribunal de commerce lance rapidement la procédure nécessaire pour une reprise d’Isotherma. Soyez assuré, monsieur Paul, que les services de l’État feront tout leur possible pour faciliter cette reprise. Isotherma dispose, notamment dans le désamiantage, d’un savoir-faire remarquable: je veux qu’ensemble, nous puissions le préserver.

M. Daniel Paul. Très bien!

M. Christian Estrosi, ministre chargé de l’industrie. Monsieur Marcel Bonnot, je me félicite que vous ayez souligné toutes les initiatives prises par le Gouvernement: la prime à la casse, le Fonds stratégique d’investissement, le Fonds de modernisation des équipementiers automobiles, les états généraux de l’industrie – aux travaux desquels vous avez d’ailleurs pris une part importante.

Vous avez rappelé toutes les mesures prises pour la filière automobile. Une commission spécifiquement consacrée à la sous-traitance, à laquelle vous avez participé, a été mise en place au début du mois de septembre, et a rendu ses conclusions le 24 novembre dernier. Un fonds doté de 50 millions d’euros, dédié aux sous-traitants de rang 2 et plus, a été créé; l’État financera des diagnostics stratégiques pour les PME de la filière, et un comité de labellisation pour les projets de compétitivité automobile sera créé.

Monsieur Liebgott, jamais un Président de la République n’a été aussi respectueux du dialogue social. Toutes les grandes réformes font l’objet de concertations. Dans mon domaine, j’ai tenu à associer, pour la première fois, les partenaires sociaux au grand débat des états généraux de l’industrie que nous avons lancé au mois d’octobre dernier. Nous ne nous arrêterons pas là: grâce à la Conférence nationale de l’industrie, les partenaires sociaux seront associés dans la durée à la mise en œuvre de notre politique industrielle.

Vous évoquez aussi le dossier Gandrange; mais vous oubliez de dire que le Président de la République est personnellement revenu sur place au mois de septembre, pour vérifier que les engagements d’Arcelor-Mittal seront tous respectés. Et je le dis très clairement: ils seront respectés.

Vous évoquez enfin l’Europe. Nous ne pourrons pas réussir notre politique industrielle sans prendre en compte l’environnement européen. L’une des mesures les plus importantes des états généraux est la nomination d’un ambassadeur de l’industrie, à laquelle je procéderai d’ailleurs d’ici à quelques jours. Il fera, en notre nom, le tour des institutions européennes et des ministères de l’industrie de nos partenaires, afin de rapprocher un certain nombre de nos positions.

M. Thierry Benoit. Il faut harmoniser!

M. Christian Estrosi, ministre chargé de l’industrie. Il faut que nous nous rapprochions les uns des autres afin d’établir des règles environnementales, sociales et fiscales qui permettront de renforcer la compétitivité de l’industrie européenne. Sans cela, il sera difficile de relever les défis mondiaux.

Monsieur Charasse, vous avez abordé pêle-mêle toute une série de sujets, et je n’entre pas dans le détail de vos propositions, mais je vois que nous partageons la même ambition sur la réindustrialisation de la France. J’apprécie globalement les voies que vous avez tracées et que l’on retrouve, pour beaucoup, dans les conclusions des états généraux de l’industrie.

Monsieur Grellier, vous avez vous-même participé aux états généraux et vous avez pu constater le formidable élan né de ces échanges et de l’esprit de coopération de tous, y compris des syndicats. Contrairement à vous, je vois l’espoir et le dynamisme suscités par cette démarche et par les annonces faites le 4 mars par le Président de la République. Tout cela va dans la bonne direction. Vous dites que ces états généraux ont été trop courts; mais ils vont continuer: l’une des vingt-trois mesures prises, c’est justement la mise en place du comité national des états généraux, auquel vous continuerez à être associé. Nous serons ainsi dans le débat permanent: cela faisait bien longtemps que, dans notre pays, on n’avait pas organisé une discussion permanente sur l’industrie en France.

M. Thierry Benoit. Très bien!

M. Christian Estrosi, ministre chargé de l’industrie. Plusieurs d’entre vous ont parlé du pôle public de financement. C’est un vrai sujet, qui fait partie des vingt-trois mesures; c’est une demande forte des partenaires sociaux et nous sommes convaincus de son intérêt.

Les Français disposent aujourd’hui de 1250 milliards d’euros épargnés sous forme d’assurance-vie: on leur a tellement enseigné qu’il n’y avait pas d’avenir dans l’industrie qu’ils ont fini par le croire, et par cesser d’investir dans l’industrie française. L’une des conclusions des états généraux sur laquelle je travaille et sur laquelle je ferai, avec Christine Lagarde, des propositions d’ici au mois de juillet prochain, consiste à mettre en place soit un pôle public, soit, comme certains syndicats le proposent, un livret épargne-industrie. Ainsi, une partie de l’épargne des Français pourrait se déplacer vers l’industrie pour permettre à celle-ci de disposer de financements longs.

Il est en effet inadmissible, voire scandaleux, que les banques n’acceptent aujourd’hui de prêter en matière industrielle qu’à court terme et à ceux qui apportent des garanties.

M. Thierry Benoit. C’est un point très important!

M. Christian Estrosi, ministre chargé de l’industrie. Nous avons besoin d’une part de risque, au-delà d’Oseo, au-delà du Fonds stratégique d’investissement. La France doit montrer que son système bancaire et son épargne sont prêts à prendre des risques à moyen et à long terme. L’innovation industrielle sera l’enjeu de demain: dans le domaine des fibres optiques, des biotechnologies, des nanotechnologies, des véhicules du futur, de l’aéronautique, de l’aérospatiale, dans tant d’autres domaines, des défis immenses restent à relever.

Monsieur Habib, vous rappeliez que la France avait, au cours de son histoire, lancé une grande politique industrielle avec Airbus, avec Ariane, avec le TGV, avec l’électronucléaire. Eh bien, tout cela s’est décidé en deux ans, entre le général de Gaulle et Georges Pompidou.

M. Christian Vanneste. Bravo!

M. Christian Estrosi, ministre chargé de l’industrie. En deux ans seulement, ces hommes-là ont réussi à faire de notre pays, pour quarante années, l’une des grandes puissances industrielles du monde.

Au terme des états généraux de l’industrie, nous sommes à un nouveau carrefour. Nous ne devons pas nous tromper. Avec le grand emprunt, avec la réorientation de l’épargne des Français, nous devons réussir, à l’image du général de Gaulle et de Georges Pompidou, à garantir aux générations à venir que la France restera, pour les quarante ou cinquante ans à venir, une grande puissance industrielle. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

M. le président. Le débat est clos.

Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-huit heures quinze, est reprise à dix-huit heures vingt.)

M. le président. La séance est reprise.

Réseaux consulaires, commerce, artisanat et services

Suite de la discussion d’un projet de loi

M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi relatif aux réseaux consulaires, au commerce, à l’artisanat et aux services (n os 1889, 2388, 2374).

Le temps de parole restant pour la discussion de ce texte est de: trois heures trente-huit minutes pour le groupe UMP, dont 120 amendements restent en discussion; six heures deux pour le groupe SRC, dont 21 amendements restent en discussion; trois heures trente-huit pour le groupe GDR, dont 23 amendements restent en discussion; deux heures cinquante-six pour le groupe Nouveau Centre, dont 27 amendements restent en discussion; et vingt minutes pour les députés non inscrits.

Discussion des articles (Suite)

M. le président. Hier soir, l’Assemblée a commencé l’examen des articles, s’arrêtant à l’article 3.

Article 3

M. le président. La parole est à M. Renaud Muselier, inscrit sur l’article 3.

M. Renaud Muselier. Monsieur le secrétaire d’État chargé du commerce, de l’artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services et de la consommation, monsieur le président de la commission des affaires économiques, madame la rapporteure de la commission des affaires économiques, monsieur le rapporteur pour avis de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire, mes chers collègues, la discussion de ce projet de loi commencée hier a déjà permis de dire l’essentiel. Je préfère m’intéresser à la démarche qui a été la vôtre, monsieur le secrétaire d’État, dans la préparation de ce dossier ces deux dernières années.

Ce texte a suscité de l’inquiétude, de l’anxiété, provoquant des menaces et des craintes. Les suspicions, voire les rumeurs, ont été nombreuses. Mais, le débat d’hier l’a très clairement montré, le travail de fond effectué par le Gouvernement a modifié fondamentalement les réseaux tout en s’intégrant parfaitement dans la prochaine réforme des collectivités territoriales. Cela permettra d’aboutir à une réorganisation structurelle de notre pays cohérente, conséquente et construite.

Je voudrais saluer également le travail de la commission et de son président qui a su piloter les débats à l’issue du travail de Mme la rapporteure, Mme Vautrin. Avec une écoute remarquable, celle-ci a réalisé un travail méticuleux – tout le monde l’a constaté, sur les bancs de la majorité comme sur ceux de l’opposition – sur ce dossier qui aura une influence sur le développement économique des territoires dont nous sommes les élus.

Ce matin s’est tenue une réunion sous l’autorité de l’association des chambres de commerce et d’industrie métropolitaines, avec MM. Bonduelle, Weill, Perben, Juppé, Ayrault, Pfister. Tous les participants ont reconnu que le travail effectué par le Gouvernement et la commission apportait des réponses claires à ce jeu collectif nécessaire pour offrir des perspectives de développement à nos entreprises et accentuer le rayonnement international de nos métropoles françaises. Un travail de fond a été réalisé par les CCI. Je sais que vous avez beaucoup échangé, travaillé. Des amendements ont certes été déposés mais, fondamentalement, je crois qu’il convient de vous remercier, madame, messieurs, pour ce travail qui va modifier en profondeur nos structures et améliorer le travail de nos entreprises sur nos propres territoires.

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques et Mme Catherine Vautrin, rapporteure de la commission des affaires économiques. Merci.

M. Renaud Muselier. L’adoption de quelques amendements rendrait sans doute la tâche plus facile. Comme cela a été dit ce matin, les métropoles ne sont pas toutes de même taille. Il existe des métropoles européennes – Marseille, Lille, Nice, Strasbourg ont cette ambition – tandis que d’autres ont besoin d’avoir une taille critique pour assurer leur propre développement – je pense à Nantes, Saint-Nazaire ou Bordeaux. Chacune essaie de développer son territoire au profit de l’emploi et du mieux vivre grâce à l’évolution du transport des biens et des personnes au niveau européen et international. L’acceptation de nos quelques amendements permettra de peaufiner le travail excellent que vous avez engagé. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques et Mme Catherine Vautrin, rapporteure de la commission des affaires économiques. Très bien!

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 84.

La parole est à M. Charles de Courson, rapporteur pour avis de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire.

M. Charles de Courson, rapporteur pour avis de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire. Il s’agit d’un amendement rédactionnel.

M. le président. La parole est à Mme Catherine Vautrin, rapporteure de la commission des affaires économiques, pour donner l’avis de la commission sur cet amendement.

Mme Catherine Vautrin, rapporteure de la commission des affaires économique . Favorable.

M. le président. La parole est à M. Hervé Novelli, secrétaire d’État chargé du commerce, de l’artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services et de la consommation, pour donner l’avis du Gouvernement.

M. Hervé Novelli, secrétaire d’État chargé du commerce, de l’artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services et de la consommation. Favorable.

(L’amendement n° 84 est adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement de précision de la commission, n°220.

(L’amendement n°220, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 55.

La parole est à M. Max Roustan.

M. Max Roustan. Il s’agit d’un amendement rédactionnel.

(L’amendement n° 55, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, n os  87 et129.

La parole est à Mme Geneviève Fioraso, pour soutenir l’amendement n° 87.

Mme Geneviève Fioraso. Pour renforcer la reconnaissance des chambres métropolitaines et surtout affirmer le lien étroit qui doit exister, même s’il n’est pas évident dans le texte, entre les collectivités territoriales ou les formes d’intercommunalité que seront les pôles métropolitains, les métropoles et les chambres de commerce, nous proposons d’insérer la phrase suivante: « À ce titre, les chambres de commerce et d’industrie métropolitaines constituent des partenaires privilégiés des métropoles dans leurs domaines de compétence. »

Il nous paraît important que la tutelle des chambres ne soit pas seulement administrative mais qu’il existe un réel partenariat avec les politiques. Nous savons que s’il n’y a pas de partenariat avec les collectivités territoriales, l’animation économique du territoire se fait de façon désordonnée. Or le développement économique a horreur du désordre.

M. le président. La parole est à M. Renaud Muselier, pour défendre l’amendement n°129.

M. Renaud Muselier. Je l’ai défendu dans mon intervention sur l’article, monsieur le président.

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur ces deux amendements?

Mme Catherine Vautrin, rapporteure . Ces deux amendements sont en réalité satisfaits par l’alinéa 5 de l’article 3, qui dispose que « la chambre de commerce et d’industrie métropolitaine dispose par priorité des compétences […] pour animer la vie économique, industrielle et commerciale du bassin de vie correspondant à sa circonscription ».

Pour reprendre un terme cher à M. Brottes, la phrase que vous nous proposez, madame Fioraso, n’est pas très normative. Je préfère la rédaction du texte dont les termes « par priorité » permettent de préciser les choses. Voilà pourquoi la commission est défavorable à ces deux amendements.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement?

M. Hervé Novelli, secrétaire d’État. Comme vient de le dire Mme la rapporteure, il ne nous a pas paru opportun de préciser le caractère de « partenaires privilégiés », pour deux raisons. Au plan pratique, parce que cela n’aurait pas de conséquences juridiques réelles et parce qu’une telle précision pourrait donner l’impression d’écarter la chambre régionale du dialogue avec la métropole territoriale. Or il n’est absolument pas exclu que la chambre régionale puisse être également un interlocuteur privilégié de la métropole, notamment si elle se voit déléguer des compétences de nature régionale par les autres composantes du réseau. Donc, avis défavorable.

M. le président. La parole est à Mme Geneviève Fioraso.

Mme Geneviève Fioraso. Je trouve un peu suspect le fait qu’on ne veuille pas affirmer un lien entre les futurs pôles métropolitains et les chambres métropolitaines.

Mme Catherine Vautrin, rapporteure . Cela n’a aucune valeur normative!

Mme Geneviève Fioraso. Cela signifie-t-il que la tutelle des chambres sera seulement administrative?

Mme Catherine Vautrin, rapporteure . Non!

Mme Geneviève Fioraso. Cela signifie-t-il qu’on veut des contrepouvoirs administratifs face à des pôles métropolitains et à des régions qui ne sont pas forcément de la même majorité?

S’agissant du développement économique, il faut aller au-delà de ces clivages – c’est ce qu’apprécient en général les acteurs économiques – et favoriser un partenariat étroit entre les collectivités territoriales qui ont des compétences, des moyens et des ressources en termes de développement économique ainsi qu’une expertise forte, et les chambres quel que soit d’ailleurs leur périmètre mais en particulier les chambres métropolitaines. J’ai regretté hier, à l’occasion d’un amendement, qu’on n’ait pas attendu la réforme des collectivités pour mettre en place la réorganisation de cet outil partenaire que sont les organismes consulaires. A minima il faut affirmer l’importance de ce lien. Le fait de ne pas le faire renforce ma suspicion. Nous ne sommes pas du tout dans du normatif – de toute façon le développement économique est rarement normatif.

Mme Catherine Vautrin, rapporteure . Mais si!

Mme Geneviève Fioraso. Il naît de dynamiques. Or, pour favoriser une dynamique, il faut encourager les partenariats. Je ne suis donc pas satisfaite de la réponse qui m’a été faite.

M. le président. La parole est à Mme la rapporteure.

Mme Catherine Vautrin, rapporteure . Si, sur le fond, nous sommes d’accord, madame Fioraso, admettez que nous sommes là dans la déclaration d’intention. Nous sommes rassemblés pour écrire la loi et donc aller un peu plus loin que la déclaration d’intention.

(Les amendements identiques n os  87 et129 ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n°221.

La parole est à Mme la rapporteure.

Mme Catherine Vautrin, rapporteure . Il s’agit simplement d’appeler correctement les choses par leur nom. Nous proposons donc de substituer à la notion de « schéma directeur régional » celle de « schéma sectoriel régional » qui correspond à ce à quoi sont habituées les chambres.

(L’amendement n°221, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 56.

La parole est à M. Max Roustan.

M. Max Roustan. L’amendement est défendu.

(L’amendement n° 56, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, n os  88 et130.

La parole est à Mme Geneviève Fioraso, pour soutenir l’amendement n° 88

Mme Geneviève Fioraso. Il est défendu.

M. le président. La parole est à M. Renaud Muselier, pour soutenir l’amendement n°130.

M. Renaud Muselier. Il est défendu également.

(Les amendements identiques n os  88 et130, repoussés par la commission et par le Gouvernement, ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 22 rectifié.

La parole est à Mme Geneviève Fioraso.

Mme Geneviève Fioraso. Il faut une expérimentation cohérente. Les chambres que vous proposez en Île-de-France seront des chambres Canada Dry, comme je les ai appelées hier, puisqu’elles n’auront plus le statut d’établissement public tout en ayant des compétences, l’autonomie et l’initiative d’un EPCI. Comme Mme la rapporteure vient de le rappeler, nous sommes là pour écrire la loi. Quand on enlève dans la loi le statut d’EPCI, on enlève un droit à l’initiative. Puisque les chambres seront de fait amoindries par la loi, je ne vois pas pourquoi on leur proposerait le même droit à l’expérimentation. Il faut être cohérent: si vous voulez amoindrir le droit de ces chambres en leur enlevant le statut d’EPCI, allez jusqu’au bout de la logique.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Catherine Vautrin, rapporteure . La différence entre nous est assez simple à résumer: l’amendement de Mme Fioraso tend à faire de l’expérimentation en dehors du cadre de la stratégie annuelle votée par la région, cela sort de l’esprit du texte. Nous souhaitons acter dans ce texte que la stratégie et le budget sont définis à l’échelon régional, et que c’est à partir de là que l’on peut faire des expérimentations. C’est pour cela que notre avis est défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. Même avis que la commission.

M. le président. La parole est à M. Alain Rodet.

M. Alain Rodet. On croirait rêver en vous écoutant, madame la rapporteure! Nous pensions, suite à la loi de modernisation de l’économie votée il y a deux ans, être dans un système qui fait une large part au libéralisme. Or, nous avons l’impression d’être dans une économie totalement administrée. On fait un Gosplan à l’échelle de l’Île-de-France!

Au début des discussions de ce texte, nous avions l’impression que nos collègues de la majorité souhaitaient faire des députés de l’opposition les arbitres des élégances entre le Medef et la CGPME. Mais là, c’est trop!

(L'amendement n° 22 rectifié n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 57.

M. Max Roustan. Défendu!

(L'amendement n° 57, repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 14.

La parole est à M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson, rapporteur pour avis. Il s’agissait d’un amendement de coordination dans l’hypothèse où nous aurions voté la possibilité pour les CCIT de fusionner par une décision à la majorité. Par conséquent, je le retire.

(L'amendement n° 14 est retiré.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n°223, de la commission des affaires économiques, qui vise à rectifier une erreur de référence.

(L'amendement n°223, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n°132.

La parole est à M. Daniel Paul.

M. Daniel Paul. Cet amendement concerne la tutelle des chambres de commerce et d’industrie de région sur les établissements consulaires territoriaux.

À notre avis, cette réforme n’est pas la bonne. D’une part, elle va créer une technostructure régionale potentiellement paralysante, où les luttes d’influence risquent de primer sur les enjeux locaux. D’autre part, priver les CCIT de ressources propres et de la gestion directe des moyens humains reviendra à annihiler toute marge de manœuvre et toute prise d’initiative au niveau local.

On peut s’interroger sur la pertinence de régionaliser intégralement, aux plans électoral, financier et social, l’ensemble des moyens dont dispose le réseau consulaire dont le rôle principal est d’être un appui aux entreprises et aux territoires, précisément dans la proximité. C’est une mission qui nécessite un fort ancrage local.

En outre, on peut se demander si le terme « rattacher » ne préfigure pas une version plus aboutie de la réforme telle qu’elle était souhaitée par certains et telle qu’elle est mise en place en Île-de-France, à savoir le changement de personnalité morale des établissements territoriaux.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Catherine Vautrin, rapporteure . Ma réponse sera un peu longue, car cette question reviendra à plusieurs reprises dans le texte. Le projet de loi utilise le terme de « rattachement » pour désigner les rapports entretenus entre les différents niveaux des chambres, notamment aux articles 3, 5 ou 8.

Rappelons que, bien que peu usité en droit, ce terme existe dans plusieurs textes, notamment la loi du 26 janvier 1984 sur l’enseignement supérieur dont l’article 43 dispose: « Un établissement d'enseignement supérieur public ou privé peut être rattaché ou intégré à un établissement public à caractère scientifique, culturel et professionnel, par décret, sur sa demande et sur proposition de ce dernier, après avis du Conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche. (…) En cas de rattachement, les établissements conservent leur personnalité morale et leur autonomie financière. »

La jurisprudence administrative a également eu recours au terme de « rattachement, » ou de « rattaché ». Par exemple, dans le cadre d’un litige de la fonction publique, dans une décision du Conseil d’État du 18 mars 2005: « Considérant que M. X, membre du corps des administrateurs civils, a été mis à disposition, par arrêté du ministre de l'équipement, auquel il était rattaché, de l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME). »

Au regard de ces différents exemples, il apparaît que le terme « rattachement » est avant tout un terme vague qui peut faire référence à l’existence d’un certain degré de subordination allant de la franche dépendance à la collaboration plus ou moins étroite, mais qui peut également faire référence à une relation géographique. C’est notamment sous cet angle que le projet de loi recourt à ce terme. Si une CCIT est rattachée à une CCIR, cela signifie non seulement que la CCIT se trouve dans la circonscription de la CCIR, mais que la CCIT devra suivre les orientations générales définies dans le cadre de la stratégie régionale, ce qui est l’objet que nous avons défini à plusieurs reprises dans ce texte.

De ce fait, le terme de « rattachement » ou de « rattaché » n’exprime à mon sens aucune tutelle qui empêcherait les CCIT d’exercer librement leur activité. Voilà pourquoi la commission est défavorable aux amendements n os 132 et 58, ainsi qu’aux autres amendements sur ce sujet.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. Comme la commission, le Gouvernement est défavorable à cet amendement. Mme la rapporteure a largement expliqué les motivations de cet avis. Je voudrais pour ma part indiquer que la notion de chambre rattachée, qui n’instaure pas de tutelle des CCIR sur les CCIT, constitue un point majeur du projet de réforme. Je rappelle qu’après un examen approfondi, cette notion a été validée par le Conseil d’État. Elle permettra de faire réellement jouer au niveau régional le rôle d’entraînement souhaité, tout en conservant une autonomie suffisante aux chambres territoriales.

(L'amendement n° 132 n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 58.

M. Max Roustan. Retiré!

(L'amendement n° 58 est retiré.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, n os 89 et 127.

La parole est à Mme la rapporteure.

Mme Catherine Vautrin, rapporteure . L’amendement n°127 est un amendement de la commission.

(Les amendements identiques n os 89 et 127, acceptés par le Gouvernement, sont adoptés.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement de cohérence de la commission, n° 229.

(L'amendement n° 229, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 59, qui est retiré.

( L'amendement n° 59 est retiré .)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n°231.

La parole est à Mme la rapporteure.

Mme Catherine Vautrin, rapporteure . C’est un amendement de précision!

(L'amendement n°231, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n°232.

Mme Catherine Vautrin, rapporteure . Précision!

(L'amendement n°232, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements, n os 90 et 9, pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à Mme Geneviève Fioraso, pour soutenir l’amendement n° 90.

Mme Geneviève Fioraso. L’amendement vise à insérer l’alinéa suivant après l’alinéa 10:

« Si plus de la moitié des chambres de commerce et d’industrie territoriales d’une région ou si plusieurs chambres de commerce et d’industrie territoriales représentant plus de la moitié du poids économique d’une région le décident, elles se regroupent en une chambre de commerce et d’industrie de région. Cette chambre se substitue à la chambre de commerce et d’industrie de région et se compose au plus d’autant de délégations que de chambres entrant dans ce regroupement. De même, si une chambre de commerce et d’industrie territoriale et une chambre de commerce et d’industrie de région le décident conjointement à la majorité simple de leurs membres, elles se regroupent en une chambre qui se substitue à la chambre de commerce et d’industrie de région. Les chambres qui n’ont pas choisi de se regrouper demeurent des chambres de commerce et d’industrie territoriales rattachées à la chambre de commerce et d’industrie de région. Un décret en Conseil d’État définit les règles de gouvernance de la chambre de commerce et d’industrie territoriale de région en matière de répartition des sièges et de règles de vote. »

Il s’agit de donner un petit peu plus d’initiative aux chambres territoriales qui pourront décider, comme l’ont fait certaines chambres des métiers et d’artisanat, de se regrouper volontairement. Il me semble qu’il est toujours plus judicieux, en matière d’animation économique des territoires et d’initiative économique, de s’appuyer sur le volontarisme et sur les initiatives de terrain. C’est ce qui a été fait pour les pôles de compétitivité. Je ne vois pas pourquoi, concernant l’animation économique par les organismes consulaires, on revient à un certain centralisme qui n’est pas démocratique. Voilà pourquoi nous proposons cet amendement.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Catherine Vautrin, rapporteure . Cet amendement vise à permettre des regroupements entre CCIT et CCIR, les nouvelles entités ainsi créées ayant vocation à se substituer à la CCIR existante.

Outre le fait qu’il n’est pas précisé de ce qu’il adviendrait des CCIR existantes, cet amendement présente un risque pour l’architecture du réseau, principalement du fait de la reconnaissance des chambres métropolitaines. Le poids économique constitue un des critères pris en considération pour décider un tel regroupement. Si une chambre métropolitaine, dont le poids économique est par définition très important, s’allie avec des chambres territoriales, elle peut de facto devenir la nouvelle chambre régionale. À ce stade, nous sommes dans une logique dans laquelle la stratégie et le budget sont définis au sein de la chambre régionale. Ensuite, à l’échelle du territoire, il y a la chambre territoriale ou la chambre métropolitaine.

Nous pensons qu’en l’état actuel des choses, il est raisonnable qu’une chambre de commerce et d’industrie métropolitaine reste dans le contexte des chambres de commerce et d’industrie territoriales. Telle est la raison pour laquelle la commission est défavorable à cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Charles de Courson, pour soutenir l’amendement n° 9.

M. Charles de Courson, rapporteur pour avis . Cet amendement a été adopté en commission des finances – je l’ai expliqué cette nuit – pour offrir la possibilité à ceux qui le souhaitent de se regrouper, pourvu qu’ils aient la majorité en nombre de chambres, et non en termes de poids économique, à la différence des amendements précédents. C’est un amendement de souplesse permettant un regroupement pour ceux qui le souhaitent. Cela est apparu à la commission des finances comme un moyen permettant à ceux qui le souhaitent de rationaliser. Il s’agit d’un système à mi-chemin entre le système de régionalisation imposée par la loi, prévu pour l’Île-de-France, et le système proposé par le texte du Gouvernement qui n’ouvre pas la possibilité de ce type de fusion.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Catherine Vautrin, rapporteure C’est un des cas – il n’y en a pas beaucoup – de divergence avec M. de Courson. Pour les chambres des métiers, la mesure a été votée à 94 %, ce n’est pas le cas pour les chambres de commerce et d’industrie, et il nous semble prématuré d’aller jusque-là.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. Le Gouvernement est défavorable à ces deux amendements. C’est une question de méthode: depuis le début, le Gouvernement a souhaité tenir le plus grand compte de la volonté des réseaux. Nous leur avons donné la possibilité de présenter une réforme, le Parlement pouvant la voter ou la rejeter.

Le réseau des chambres de commerce et d’industrie n’est pas favorable aux propositions qui sont faites et qui s’inspirent de ce qui existe dans les chambres des métiers. Comme l’a rappelé Catherine Vautrin, 94 % des chambres des métiers ont adhéré à la réforme. Leur réseau est beaucoup plus intégré, et donc prêt à cette réforme très forte, bien plus que ne l’est le réseau des chambres de commerce. Il faut laisser aux réseaux la liberté de proposer leurs propres formes d’organisation.

(L'amendement n° 90 n'est pas adopté.) (L'amendement n° 9 n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 60.

(L’amendement n° 60 est retiré.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 61.

(L’amendement n° 61 est retiré.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 23.

La parole est à Mme Geneviève Fioraso.

Mme Geneviève Fioraso. Il s’agit toujours du statut « Canada Dry », pour ne pas dire bâtard, des chambres départementales d’Île-de-France, pour lesquelles il fallait bien trouver quelque chose de spécifique, faute de quoi toute la réforme aurait été bloquée.

Par une innovation, fruit d’une espèce de créativité juridique, on a ôté aux chambres le statut d’établissement public, tout en affirmant qu’elles peuvent faire exactement la même chose qu’un établissement public, et même davantage.

Pour notre part, nous pensons que la loi doit être rigoureuse. C’est pourquoi nous proposons de supprimer les mots « et départementales d’Île-de-France ». Les chambres départementales d’Île-de-France étant dénuées de la personnalité morale, ce que nous déplorons, il apparaît difficile de les faire devenir partie à des contrats, notamment avec l’État, comme le reste des établissements consulaires territoriaux, qui conservent, pour leur part, le statut d’établissement public.

L’architecture du texte conduit naturellement, dans le cadre de l’Île-de-France, à accorder les pouvoirs des CCIT à l’échelon régional uniquement, et ce sans le dire. Ce point n’est effectivement guère explicité par le texte du projet, alors même que la loi se doit d’être précise.

En effet, la conclusion d’une convention avec un établissement dénué de personnalité revient à faire concourir à l’acte la personne morale dont ledit établissement procède. Il serait donc plus cohérent de mentionner clairement l’échelon régional. Nous demandons que la loi soit précise et qu’elle n’entretienne pas l’ambiguïté.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Catherine Vautrin, rapporteure . Sur le fondement d’une délégation de compétence accordée par la future chambre de région Paris-Île-de-France, les CCID auront tout à fait la capacité d’exercer pleinement leur mission. Il nous paraît important de le mentionner. C’est pourquoi la commission est défavorable à l’amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Hervé Novelli, secrétaire d’État. Même avis que la commission.

M. le président. La parole est à M. Jean Lassalle.

M. Jean Lassalle. Je vous remercie, monsieur le président. Vous présidez toujours aussi bien, c’est un plaisir. Je ne vais cependant pas pouvoir rester longtemps, car je dois être dans plusieurs endroits en même temps! Or je ne peux me diviser en petits morceaux.

Cela dit, je ne suis pas très confiant pour l’avenir de cette réforme. Je ne prétends pas, par là, qu’elle ne va pas être adoptée: je ne me fais pas de souci à ce propos. Il me semble, en revanche, que nos citoyens ont de plus en plus besoin d’échanges de proximité, notamment avec des personnes élues qui détiennent une forme de légitimité. Or je crains que, en déplaçant toutes ces chambres, nous ne soyons en train de changer très profondément notre pays, que nous aimons tant les uns et les autres. Un habitant de Lourdios-Ichère ne parcourra pas les 300 kilomètres qui le séparent de Bordeaux pour expliquer son cas à la chambre des métiers ou à la chambre de commerce et d’industrie: il n’en aura pas le temps, il n’en aura pas envie, sa voiture sera en panne, sa femme ne voudra pas… En un mot, il est trop loin.

Je crois que nous sommes entrés dans une période de centralisme absolu. Ce phénomène, qui n’est pas propre à la France, que l’on constate dans toute l’Europe et dans le monde entier, éloigne de plus en plus l’individu et le relègue à une sorte d’anonymat dans lequel il devient quelque peu agressif et éprouve un sentiment de colère à l’égard de tous ses voisins. Nous aurions pourtant besoin d’organismes de proximité qui redonnent quelque cohérence à la société.

Je n’ai pas été long, je n’aurai guère perturbé les débats et je ne vais pas vous ennuyer beaucoup plus longtemps, mais je tenais à vous dire cela, qui vient du cœur. Vous l’aurez compris: le soutien que j’apporte à ce texte est relativement modéré. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

M. le président. Vous ne nous ennuyez jamais, monsieur Lassalle!

(L’amendement n° 23 n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 62.

M. Max Roustan. Défendu!

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Catherine Vautrin, rapporteure . Je voudrais très amicalement dire à M. Roustan que son amendement me surprend. L’alinéa 19 de l’article 3 traite bien sûr des chambres territoriales. Il dispose qu’« elles recrutent les agents de droit public nécessaires au bon accomplissement de leurs missions opérationnelles et gèrent leur situation statutaire dans des conditions déterminées par décret en Conseil d’État ».

En d’autres termes, cher collègue, il offre à ces chambres territoriales, auxquelles, si j’ai bien compris, vous êtes tellement attaché, la possibilité de recruter. L’adoption de votre amendement supprimerait cette possibilité. À votre place, je retirerais cet amendement. En tout cas, j’y suis défavorable.

M. Jean Dionis du Séjour. Mme Vautrin a raison!

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Hervé Novelli, secrétaire d’État. Cet amendement est parfaitement conforme à l’orientation générale de la réforme, monsieur Roustan. Je suis content que vous nous rejoigniez. (Sourires.)

À l’heure où elles vont structurer le réseau, les chambres de région doivent devenir l’employeur des agents publics des chambres. Votre amendement, qui tend à supprimer l’alinéa 19 de l’article 3 du texte de la commission, lequel autorise les chambres territoriales à effectuer des recrutements d’agents publics, ne peut donc, vous l’aurez compris, que recueillir un avis favorable du Gouvernement.

M. le président. Monsieur Roustan, l’amendement est-il maintenu?

M. Max Roustan. Oui, monsieur le président.

M. le président. La parole est à M. Jean Dionis du Séjour.

M. Jean Dionis du Séjour. Partageant la fibre girondine de mon collègue Roustan, je pense que ce texte aurait vraiment pu asseoir le réseau consulaire de manière plus démocratique, en partant des chambres territoriales pour aller vers les chambres régionales. Nous regrettons que cela ne soit pas le cas, et je me retrouve dans beaucoup d’amendements de Max Roustan.

Cependant, je le supplie de retirer cet amendement! La possibilité de recrutement par les chambres territoriales est une substantielle avancée obtenue par notre rapporteure. Il importe vraiment que les chambres territoriales gardent une capacité de projet. Or les projets requièrent des chefs de projet, des équipes de projet. Si cet amendement n’est pas retiré, nous voterons contre.

M. le président. La parole est à M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques.

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Je remercie M. le secrétaire d’État de son humour car, tout le monde l’aura compris, c’est à un trait d’humour qu’il vient de se livrer.

Cela dit, je voudrais que l’on légifère sérieusement. Or on ne peut, monsieur Roustan, voter l’amendement n° 62 si l’on souscrit à votre logique. Je le répète: il supprime la possibilité offerte aux chambres territoriales de recruter directement du personnel.

M. le secrétaire d’État vous félicite avec humour en suggérant d’aller plus loin encore que ce qui est prévu: franchissons un cap en donnant tous les pouvoirs à la chambre régionale! Ce n’est cependant pas notre objectif.

Par conséquent, soit, monsieur Roustan, vous retirez cet amendement, soit je demande à l’Assemblée de ne surtout pas suivre l’avis du Gouvernement et de rejeter votre amendement.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Hervé Novelli, secrétaire d’État. Je voudrais préciser à M. le président de la commission des affaires économiques que, si cet amendement était adopté, nous reviendrions au texte initial du Gouvernement, nous n’irions pas plus loin.

M. Max Roustan. Je retire l’amendement!

(L’amendement n° 62 est retiré.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 125, qui fait l’objet d’un sous-amendement n° 233 de la commission.

La parole est à M. Louis Cosyns, pour soutenir l’amendement n° 125.

M. Louis Cosyns. L’amendement n°125 vise un objectif inverse de celui de l’amendement n° 62. Je propose effectivement que les CCIT puissent recruter des agents de droit privé pour gérer les équipements qu’elles possèdent.

M. le président. La parole est à Mme la rapporteure, pour soutenir le sous-amendement n°233 et donner l’avis de la commission sur l’amendement n°125.

Mme Catherine Vautrin, rapporteure . L’excellent amendement de notre collègue Cosyns sera d’autant plus performant que nous insèrerons, au début de son alinéa 2, la phrase suivante: « Elles procèdent, par délégation des chambres de commerce et d’industrie de région dans le cadre de l’article L. 711-8-4° du code de commerce, au recrutement des agents de droit public nécessaires au bon accomplissement de leurs missions opérationnelles, et gèrent leur situation personnelle dans des conditions déterminées par décret en Conseil d’État. »

Nous en avons longuement parlé en commission. Il s’agit, mes chers collègues, de permettre aux chambres de commerce territoriales de disposer d’agents pour mettre en œuvre la politique sur les territoires. Je vous demande donc d’adopter l’amendement n°125 et le sous-amendement n°233.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Hervé Novelli, secrétaire d’État. Cet amendement et ce sous-amendement sont très importants puisqu’ils concernent la gestion du personnel des chambres de commerce et d’industrie de notre pays. Vous le savez, ce projet de loi, tel qu’il a été déposé et tel qu’il est ressorti de la commission, procède d’une philosophie, la philosophie de la régionalisation, qui repose sur deux piliers principaux: la collecte des ressources fiscales au niveau régional, et la maîtrise et l’affectation des ressources dans le cadre de la stratégie décidée au plan régional avec, bien sûr, le concours des chambres de commerce et d’industrie territoriales et de leurs représentants.

Autant la gestion des agents privés, aujourd’hui nombreux dans notre pays à s’occuper, pour le compte des chambres de commerce et d’industrie, des ports et aéroports ne pose pas de problème – le Gouvernement est favorable à la gestion de ces personnels privés au niveau territorial –, autant la gestion au niveau territorial des agents publics est un coin porté à la philosophie de la réforme. Je voudrais vous le montrer grâce à quelques chiffres précis sur lesquels j’attire votre attention.

Les établissements du réseau des chambres de commerce et d’industrie conservent aujourd’hui une grande autonomie en matière de gestion de personnel. À la différence des opérateurs publics, ils ne se voient pas imposer un plafond d’emploi. II est donc essentiel que les règles relatives à la gouvernance des chambres de commerce permettent une maîtrise des dépenses de personnel.

L’enjeu est essentiel, car l’effectif des CCI s’élève à 30720 agents. Parmi ceux-ci, 5100 agents sont de droit privé, le resteront et seront recrutés par les CCIT. Restent 25600 agents de droit public, population qui, je le souligne, a crû au cours de ces dix dernières années. Les charges de personnel représentent aujourd’hui près de 50 % des charges d’exploitation des chambres et 39,2 % de leur budget global.

J’en viens, maintenant, au point essentiel de mon argumentation. II n’est tout simplement pas cohérent de prévoir le vote des budgets au niveau régional, ce qui est l’objet d’une partie de la réforme, et de laisser le recrutement du personnel au niveau local. Dès lors que les dépenses de personnel représentent plus de 40 % d’un budget, il est essentiel que l’autorité budgétaire, la chambre régionale, conserve la maîtrise des dépenses de personnel. Je le dis avec gravité, car c’est l’un des très rares points de désaccord entre Mme la rapporteure et moi-même: si ce n’est pas le cas, une chambre territoriale pourra recruter du personnel et faire inscrire, de manière quasi-automatique, ces dépenses au niveau du budget régional unique, car il s’agit légalement de dépenses obligatoires. En d’autres termes, si l’on régionalise le budget sans régionaliser le personnel, on permet à une chambre territoriale de préempter, par ses décisions, le budget régional applicable à toutes les chambres de la circonscription régionale. Je le dis tout net: ce n’est ni souhaitable ni acceptable pour la cohérence de la réforme dont vous avez à débattre.

Certains contestent cette argumentation en prétendant que l’on risquerait d’aligner vers le haut les rémunérations au plan local. Or cette crainte ne repose sur aucun fondement. En effet, ce n’est pas au plan local que se décide la politique de rémunération. La loi de 1952 a confié à la commission paritaire nationale, et non aux chambres, le pouvoir d’élaborer les règles qui s’appliquent aux agents des chambres. C’est ainsi la commission paritaire nationale qui décide de l’évolution du point d’indice propre au réseau des CCI. La gestion au plan régional permettra d’assurer le respect de cette norme définie au niveau national. Confier la gestion des agents publics régis par un statut national aux chambres de région répond donc à un souci de cohérence évident.

En outre, la régionalisation est un point important pour qui s’intéresse, comme nous tous ici, à la gestion et aux carrières des personnels. Jusqu’à présent, la gestion des agents et la prise en compte de leur ancienneté intervenaient uniquement par rapport au service effectué dans une seule chambre. Par définition, un agent d’une chambre la quittant pour une autre, voit son ancienneté de service dans le réseau consulaire non prise en compte. La gestion régionale, qui couvrira l’ensemble de la région, offrira donc, sans contraintes additionnelles, de plus grandes opportunités de personnels.

Si j’ai pris le temps de poser les problèmes et fait appel à la cohérence de cette réforme, c’est que j’ai eu l’opportunité, au cours de la discussion générale, d’indiquer qu’un agent pourra refuser telle ou telle mobilité. Il n’y aura donc pas à craindre une régionalisation de ces agents publics.

Telles sont, mesdames et messieurs les députés, les raisons profondes et graves qui font que le Gouvernement est défavorable au sous-amendement de Mme la rapporteure, tout en étant favorable à l’amendement déposé par M. Cosyns qui traite des agents privés employés dans les chambres de commerce et d’industrie territoriales. Cela étant, c’est à vous d’arbitrer.

M. le président. J’ai plusieurs demandes de prise de parole.

La parole est à M. Jean Dionis du Séjour.

M. Jean Dionis du Séjour. L’intervention de M. le secrétaire d’État nous ramène au cœur du débat. Le projet de loi, il faut lui reconnaître ce mérite, a deux lignes forces: la première est la régionalisation du réseau et la deuxième concerne la réduction des dépenses publiques de ce réseau. Parce qu’elles apportent de la cohérence, le Nouveau Centre soutient ces deux lignes forces. Cependant nous ne transigerons pas sur la capacité d’initiative et de conduite de projets des chambres territoriales.

Dans les limites d’un budget qui lui sera alloué au niveau régional, les chambres territoriales doivent pouvoir conduire les projets qu’elles décident. Cela est vital. J’ai constaté ce qu’amène, par exemple, la chambre de commerce et d’industrie d’Agen en termes de capacité de projets. Elle doit pouvoir embaucher un chef de projet pendant trois ans et le décider librement, de manière autonome. C’est un point extrêmement important.

Il faut un équilibre entre, d’une part, le cadre gouvernemental, avec la régionalisation et la réduction des dépenses publiques et, d’autre part, la capacité et l’autonomie pour mener des projets au niveau régional. Je n’ai pour ma part qu’une confiance très modérée dans les chambres régionales de commerce et d’industrie pour impulser des projets territoriaux à 140 kilomètres de notre métropole régionale.

Pour toutes ces raisons, j’estime que l’amendement de notre collègue Louis Cosyns sous-amendé par Mme la rapporteure est vraiment nécessaire pour rééquilibrer le projet. Je rappelle qu’en matière de réduction des dépenses publiques, le carcan, ou plutôt la démarche suivante sera imposée: moins 3 % la première année, moins 12 % ou moins 15 % en trois ans. Nous n’avons donc pas à avoir peur de faire trop de dépenses publiques.

Il s’agit d’un point extrêmement important. C’est pourquoi le Nouveau Centre soutiendra fortement Mme la rapporteure et notre collègue Cosyns.

M. le président. La parole est à M. Daniel Paul.

M. Daniel Paul. Je reconnais à M. le secrétaire d’État une très grande cohérence dans son propos. Il s’agit sans aucun doute d’une cohérence idéologique, mais c’est éminemment respectable, et elle a le mérite de la clarté.

M. Novelli vient de dire oui aux emplois privés, non aux emplois publics. Il a ainsi confirmé les propos qu’il a prononcés après les interventions du président de la commission et de la rapporteure: il est pour la continuité libérale de ce texte.

En même temps, il confirme la nocivité de la réforme et la réalité de la tutelle qu’elle imposera aux chambres de commerce territoriales. Lorsqu’une chambre de commerce territoriale voudra développer un projet – ce qui est souhaitable, ne serait-ce que pour le développement de nos territoires –, que se passera-t-il en cas de veto de la chambre de commerce et d’industrie de région? Qui commandera? Celui qui aura l’argent. Dans ce cas, elle devra trouver une autre solution.

La chambre de commerce du Havre, par exemple, gère deux ponts – le pont de Tancarville et le pont de Normandie, excusez du peu! – et un aéroport: ce sont des services un peu particuliers. Or quelles sont les régions dans lesquelles il n’y a pas plusieurs services concurrents? Nous présenterons tout à l’heure un amendement concernant le développement de zones commerciales, lesquelles sont souvent mises en concurrence avec d’autres zones commerciales sur un même territoire. Dans ce cas, il ne peut pas y avoir de politique unique au niveau d’une région. Chaque chambre territoriale défendra les atouts de sa zone commerciale, parce qu’elle l’aura aménagée et qu’elle y aura investi. Il faut permettre à chacune de ces collectivités territoriales, à chacune des chambres de commerce et d’industrie territoriales de développer sa propre politique.

Pour ma part, je soutiens le sous-amendement de Mme la rapporteure, mais pas l’amendement de MM. Cosyns et Lezeau. À ce propos, je me demande comment vous faites, madame la rapporteure, pour articuler les deux. Si j’ai bien compris, vous souhaitez insérer une phrase au début de l’alinéa 2: mais il n’y a pas d’alinéa 2!

Mme Catherine Vautrin, rapporteure . Si, dans l’amendement de M. Cosyns!

M. Daniel Paul. Cela veut donc dire que vous l’insérez après. Ce n’est pas très clair!

Mme Catherine Vautrin, rapporteure . Les deux amendements se succèdent.

M. le président. Je vous fais remarquer, mon cher collègue, qu’il est difficile d’être pour un sous-amendement et contre l’amendement sur lequel il porte!

M. Daniel Paul. Je veux simplement montrer l’ambiguïté de la situation. En outre, l’amendement et le sous-amendement me semblent contradictoires.

Alors, levez la contradiction, faites en sorte que le Gouvernement ne soit pas suivi sur ce point et qu’il n’y ait pas de tutelle des chambres de commerce et d’industrie de région sur les chambres territoriales. Faute de quoi, nous savons ce qu’il va se passer dans les prochaines années. Si vous conjuguez la RGPP et la mise sous tutelle, je vous souhaite bien du plaisir pour les chambres de commerce et d’industrie territoriales!

M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. Charles de Courson, rapporteur pour avis. Je vais vous expliquer pourquoi, comme le Gouvernement, je suis favorable à l’amendement n°125 et défavorable au sous-amendement n°233. Ce n’est pas pour les mêmes raisons, mais le résultat est identique.

Il faut adopter l’amendement n°125, car il y a un problème de cohérence juridique et financière.

S’agissant d’abord de la cohérence juridique, les services publics à caractère industriel et commercial sont financés non par l’impôt, mais par la rémunération de services rendus dont le niveau est fixé par les CCIT.

Par ailleurs, puisqu’il s’agit d’un service public à caractère industriel et commercial, ce ne sont pas des agents de droit public qui le font fonctionner, mais des agents de droit privé. Sinon, ce n’est pas un SPIC – un service public industriel et commercial –, mais un SPA: un service public administratif.

L’amendement n°125 est tout à fait cohérent. Il indique en effet que, dans les SPIC, c’est à la CCIT de recruter puisque c’est elle qui va financer en fixant le tarif des rémunérations. C’est donc bien un statut d’agent de droit privé.

En revanche, peut-on accepter un recrutement d’agents de droit public au niveau des CCIT? Cela pose un vrai problème, car le financement des agents de droit public passe par l’impôt. Or nous avons régionalisé l’impôt. Ce n’est donc pas la CCIT qui fixe l’impôt.

Enfin, je veux exposer un troisième argument canon.

Un député du groupe UMP . Voilà le droit canon! (Sourires.)

M. Michel Piron. Au sens de la révélation!

M. Charles de Courson, rapporteur pour avis. Beaucoup de CCI ont filialisé leurs SPIC sous la forme de sociétés d’économie mixte. Or si vous ne votez pas l’amendement n°125, que se passera-t-il?

Je vous donne un exemple: le président d’une CCI qui va devenir une CCIT filialisera avant la régionalisation et gèrera le personnel via une SEM. Vous ne pourrez donc pas le remonter au niveau de la CCIR.

Nombre de CCI ayant filialisé leurs SPIC pour montrer que ce n’est pas l’impôt qui les finance, vous ne pouvez qu’être favorables à l’amendement n°125 et défavorables au sous-amendement n°233.

M. le président. La parole est à M. Alain Rodet.

M. Alain Rodet. Monsieur le secrétaire d’État, ainsi que Daniel Paul vient de le souligner, la tutelle que vous nous présentez est véritablement napoléonienne! Or nous sommes dans un domaine où il n’est de richesse que d’hommes.

Vous allez faire, avec ce système, des présidents des chambres territoriales des présidents soliveaux, qui se verront imposer des collaborateurs avec lesquels, parfois, ils ne pourront pas travailler. Comme le dit Jean Lassalle, celui qui paie les pipeaux commande la musique! Pour être clair, cela veut dire que les chambres territoriales vont perdre beaucoup de compétences et le sens de la proximité. C’est la raison pour laquelle nous considérons que Mme la rapporteure a fait, avec ce sous-amendement, une avancée importante.

M. le président. La parole est à M. Serge Poignant.

M. Serge Poignant. J’estime qu’il faut prendre en compte les deux aspects de la question: les personnes de droit privé et les personnes de droit public par délégation, non par recrutement direct, mais par délégation des chambres régionales. Il faut lire attentivement le texte qui précise: « par délégation ». C’est absolument nécessaire.

Mme Catherine Vautrin, rapporteure . Bien sûr!

M. Serge Poignant. Comme je l’ai souligné dans l’intervention que j’ai faite au nom de mon groupe: oui à la régionalisation, oui à l’acte fort et fondateur de vote du budget et de la stratégie régionale et, en même temps, application au plus près du terrain des CCIT et des CCI métropolitaines en leur permettant de recruter et de gérer leur personnel. Nous trouverons ainsi le point d’équilibre que nous recherchons tous.

Nous avons même souhaité, au niveau de l’acte fondateur, que deux tiers des membres votent la stratégie et le budget afin qu’il y ait la plus grande cohérence possible entre tous les membres participant à la CCI régionale. Cela étant l’un n’empêche pas l’autre. Nous pouvons aller vers cet équilibre que nous avons tous souhaité et que j’ai pour ma part souhaité au nom de notre groupe.

M. le président. La parole est à M. Jean Lassalle.

M. Jean Lassalle. Il s’agit d’un élément central du débat. Si les chambres territoriales ne peuvent pas recruter, elles n’en auront pas pour très longtemps…

Mme Catherine Vautrin, rapporteure . C’est exact.

M. Jean Lassalle. …car le président ne pourra pas faire grand-chose avec les quelques personnes mises à sa disposition.

J’ai le sentiment que l’on crée des dépôts de technocrates à la tête de chaque région. Ceux-ci sont de plus en plus nombreux; ils se concertent, se mettent en relation, tandis que nous, de notre côté, nous sommes de moins en moins utiles. Savez-vous ce qu’est un technocrate? C’est un technicien qui n’est pas fécondé par un élu, ce dernier étant issu du suffrage universel.

Dès lors qu’il n’y aura plus de possibilité d’embauche, les chambres territoriales disparaîtront tout naturellement dans les trois ou quatre prochaines années, et seules resteront les chambres régionales. J’estime que ce n’est pas une avancée et que ce n’est pas ce dont notre pays a besoin.

M. le président. La parole est à M. Max Roustan.

M. Max Roustan. Je dois certainement être un peu fatigué. On embauche, on n’embauche pas; c’est une délégation, ce n’en est pas une! On ne sait plus!

L’embauche des agents de droit privé est à juste titre régionalisée. Donc, il y a un budget et il est impossible d’embaucher librement, ce avec quoi je suis d’accord, car je ne vois pas comment on pourrait faire autrement. Lorsque les chambres de commerce et d’industrie territoriales veulent recruter des agents de droit privé, elles procèdent par délégation.

Mme Catherine Vautrin, rapporteure . Oui, c’est le sens du sous-amendement.

M. Max Roustan. Donc, même si le budget de la collectivité est en équilibre au niveau du FSI, il sera obligatoire de passer par le budget général.

M. le président. La parole est à Mme Geneviève Fioraso.

Mme Geneviève Fioraso. Je partage totalement les préoccupations évoquées par Alain Rodet et Jean Lassalle.

Je veux cependant profiter du débat sur ces amendements pour appeler l’attention sur les problèmes de personnels auxquels seront forcément confrontées les chambres de commerce et d’industrie territoriales.

En effet, bien informées par le « réseau », comme l’appelle M. le secrétaire d’État, les chambres régionales ont déjà commencé à embaucher et elles n'ont pas procédé en recourant à la mobilité des chambres territoriales, mais en faisant appel à du nouveau personnel. Elles vont percevoir de moindres ressources et, par conséquent, elles en distribueront d’autant moins aux chambres territoriales qui ne se poseront alors plus la question de savoir si elles peuvent ou non embaucher, puisqu’elles risqueront, au contraire, de devoir réduire leur personnel.

Crier victoire lors de l’assemblée générale de 2008, considérant que la réforme était pliée, et mettre deux ans à « rattraper le coup » en palliant le manque de concertation et en nommant une rapporteure de bonne volonté, a induit le contraire d’un système vertueux. J’insiste donc: les chambres régionales ont anticipé sur la réforme, elles ont embauché. Vous pouvez le vérifier. C’est vrai en Rhône-Alpes, comme partout ailleurs. De ce fait, il reviendra aux chambres territoriales totalement étranglées de gérer les licenciements. C’est leur faire, ici, un procès bien injuste, ce qui est tout de même d’un point de vue social, voire éthique, difficilement acceptable.

M. le président. La parole est à Mme la rapporteure.

Mme Catherine Vautrin, rapporteure . Je vous remercie, madame Fioraso d’avoir parlé d’une rapporteure de bonne volonté!

Il est essentiel que nous précisions où nous en sommes.

Je vous rappelle, mes chers collègues, que nous avons adopté en commission un amendement reprenant la notion de chambres territoriales et précisant qu’« elles recrutent les agents de droit public opérationnels nécessaires au bon accomplissement de leurs missions et gèrent leur situation statutaire dans des conditions déterminées par décret en Conseil d’État. » Les députés présents en commissions se souviendront que nous avons assez longuement débattu sur ce point effectivement essentiel. Il convenait, en effet, de fixer la capacité des chambres territoriales à décliner à l’échelle du territoire les outils dont elles ont besoin. À partir de là, il nous est apparu juridiquement plus sûr de préciser de nouveau qu’il était nécessaire de procéder par délégation des chambres de commerce et d’industrie de région.

Tel est exclusivement le sens de ce sous-amendement, lequel, pour répondre à M. Paul, présente l’avantage de compléter l’amendement de Louis Cosyns qui concerne le recrutement et la gestion des personnels de droit privé. Or vous savez tous qu’une chambre de commerce territoriale est compétente en matière de formation, de création et de gestion des équipements, en particulier portuaires et aéroportuaires, et qu’il y a aussi tous les agents de droit public. Il était logique de prendre les deux en considération.

Si nous votons cet amendement ainsi sous-amendé, nous pourrons maintenir un équilibre et permettre, à l’échelle du territoire, aux bénévoles – donc aux chefs d’entreprise qui s’impliquent dans les chambres de commerce – de reconnaître les collaborateurs avec qui ils travaillent. C’est pour moi un point tout à fait essentiel.

M. Jean Dionis du Séjour. Mme la rapporteure est excellente!

(Le sous-amendement n°233 est adopté.) (L'amendement n°125, sous-amendé, est adopté.)

M. le président. L’amendement n° 63 rectifié est retiré.

(L'amendement n° 63 rectifié est retiré.)

M. le président. La parole est à Mme la rapporteure, pour défendre l’amendement n°235.

Mme Catherine Vautrin, rapporteure . Cet amendement précise que l’activité de formation continue des chambres de commerce et d’industrie doit être replacée dans le cadre général des dispositions du code du travail.

(L'amendement n°235, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

(L'amendement n° 69 est retiré.)

M. le président. La parole est à M. Daniel Paul, pour soutenir l’amendement n°131.

M. Daniel Paul. Cet amendement propose de maintenir les règlements intérieurs locaux et de créer une commission paritaire territoriale. Aujourd’hui, un statut national s’applique à l’ensemble des personnels de droit public des chambres de commerce et d’industrie à l’échelle locale, c’est-à-dire territoriale. Les commissions paritaires locales ont négocié depuis des dizaines d’années des règlements intérieurs pour le personnel administratif et des règlements particuliers pour le personnel enseignant qui complètent ou améliorent le statut national en tenant compte des spécificités locales.

Le projet de réforme prévoit la disparition des règlements intérieurs locaux et la mise en place d’un règlement intérieur national unique. Les personnels craignent, à juste titre, que cet alignement sur un règlement unique ne s’accompagne d’un nivellement par le bas des conditions d’emploi.

(L'amendement n°131, repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.) (L'article 3, amendé, est adopté.)

Article 4

M. le président. Sur l’article 4, je suis saisi de nombreux amendements.

La parole est à M. Sauveur Gandolfi-Scheit, pour défendre l’amendement n° 4.

M. Sauveur Gandolfi-Scheit. Les CCI jouent un rôle capital dans l’économie de la France. De ce fait, la localisation des CCIR revêt une importance locale essentielle.

La formulation de l’article 4, qui laisse le soin à « l’autorité administrative compétente » de fixer son siège, apparaît trop floue. Il semble donc plus opportun de donner au Premier ministre le pouvoir de prendre une telle décision par décret après avis des CCIT.

M. le président. Quel est l'avis de la commission?

Mme Catherine Vautrin, rapporteure . L’alinéa 4 confie à l’autorité administrative compétente, c’est-à-dire le préfet, le soin de déterminer le siège de la CCIR. Toutefois, nous savons que ce sujet est extrêmement sensible. M. Gandolfi-Scheit pense, évidemment, à l’insularité corse. D’autres problèmes se posent sur le continent. Dans ce contexte, la commission écoutera avec beaucoup d’intérêt l’avis du Gouvernement.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement?

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. Cet amendement me semble intéressant.

M. Yves Albarello. C’est déjà ça!

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. Les chambres régionales de commerce et d’industrie ont été, jusqu’à présent, créées par décret. Il en ira de même pour les chambres de commerce et d’industrie de région. Dès lors, rien ne s’oppose à ce que le choix du siège se fasse selon la même forme, comme toute modification à venir. Par conséquent, cette proposition me paraît aller dans le bon sens. En cas de désaccord au niveau local, il est préférable que la question du siège soit tranchée par le Gouvernement via un décret après une concertation suffisante et sans précipitation.

Je m’en remets, en conséquence, à la sagesse de votre assemblée, position qui, vous l’aurez compris, est bienveillante.

(L'amendement n° 4 est adopté.)

(L'amendement n° 70 est retiré.)

M. le président. L’amendement n°222 de la commission est rédactionnel.

(L'amendement n°222, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

(Les amendements, n os 71 et 72 sont retirés.)

M. le président. La parole est à M. Daniel Paul, pour soutenir l’amendement n°177.

M. Daniel Paul. Cet amendement est défendu!

(L'amendement n°177, repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)

(Les amendements, n os 73, 74 et 75 sont retirés.)

M. le président. L’amendement n°176 est défendu.

(L'amendement n°176, repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)

(L'amendement n° 76 est retiré.)

M. le président. L’amendement n°175 de M. Daniel Paul est défendu.

(L'amendement n°175, repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)

(L'amendement n° 77 est retiré.)

M. le président. La parole est à M. Daniel Paul, pour défendre l’amendement n°174.

M. Daniel Paul. Si l’on peut concevoir la nécessité d’établir à l’échelon régional une stratégie de développement – nous n’avons évidemment rien contre la coordination qui peut exister à l’échelle régionale – il ne faut pas oublier que des chambres de commerce et d’industrie territoriales, au sein d’une même circonscription, peuvent être concurrentes, notamment dans le domaine commercial. Le mouvement de centralisation à l’excès, tel qu’il est présenté dans le projet de loi, semble être, de ce point de vue, contraire au respect de cette localisation et de cette défense des intérêts liés à la présence d’une zone commerciale ou artisanale, par exemple particulière.

Certes, dans le projet de loi, les CCIT, hors Ile-de-France, conservent leur personnalité morale, toutefois de plus en plus vidée de sa substance. C’est la raison pour laquelle nous demandons la suppression de l’alinéa 17 de cet article.

M. le président. Quel est l'avis de la commission?

Mme Catherine Vautrin, rapporteure . Défavorable. En effet, l’alinéa 19 n’instaure aucune tutelle financière, puisque le budget est voté par l’assemblée générale de la CCIR puis réparti, ensuite, entre les différentes chambres de la circonscription, lesquelles peuvent, évidemment, en fonction de la stratégie définie, utiliser librement leur enveloppe.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. Charles de Courson, rapporteur pour avis . D’un point de financier, si on vote cet amendement, on détruit totalement la cohérence du mode de financement. Il convient donc de le repousser.

(L'amendement n°174, repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.)

(Les amendements, n os 78 et 79, sont retirés.)

M. le président. La parole est à M. Daniel Paul, pour soutenir l’amendement n°173.

M. Daniel Paul. Cet amendement s’oppose à la régionalisation des moyens humains. Les CCIT doivent être dotées des moyens nécessaires à l’accomplissement de leurs missions, nous l’avons déjà rappelé précédemment. Certains présidents de CCI ont mis en avant la difficulté qui consisterait pour eux à travailler avec un directeur général nommé par le président de la CCIR. En effet, la relation de confiance ne serait pas forcément aisée. Je ne fais, en disant cela, que reprendre tout simplement ce qui a été écrit par un certain nombre de présidents de CCI.

Par ailleurs, on peut s’interroger sur l’efficacité d’un management bicéphale. Le personnel d’une CCIT serait également rattaché au directeur général de la CCIR. La gestion du personnel des CCIT par les CCIR comporte un risque fort d’éloignement des préoccupations réelles et des attentes des très petites entreprises et des PME qui ne comprendraient pas que le réseau construit pour elles par leurs représentants élus, et financé par leurs contributions, ne soit plus à leurs côtés pour les accompagner au quotidien dans leur développement.

M. le président. Quel est l'avis de la commission?

Mme Catherine Vautrin, rapporteure . La préoccupation exprimée par les auteurs de cet amendement est satisfaite par le vote de la disposition concernant la possibilité offerte aux CCIT de recruter les agents publics opérationnels nécessaires au bon accomplissement de leurs missions.

(L'amendement n°173, repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.)

M. le président. L’amendement n°172 est-il défendu, monsieur Paul?

M. Daniel Paul. Oui!

(L'amendement n°172, repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)

(L'amendement n° 80 est retiré.)

M. le président. La parole est à Mme Geneviève Fioraso, pour défendre l’amendement n° 91.

Mme Geneviève Fioraso. Il s’agit de réaffirmer l’importance de la prise en compte des expertises acquises au plus près du terrain par les chambres de commerce et d’industrie territoriales.

Il ne faut pas considérer que la région va forcément utiliser ses propres outils parce que ce serait au niveau régional que l’on aurait les meilleurs. Si l’on veut mutualiser, on doit prendre les outils là où ils ont été expertisés comme les meilleurs, et donc, comme nous le proposons, s’appuyer en priorité sur les pôles d’expertise existant dans les chambres de commerce et d’industrie territoriales de leur circonscription. Cela évitera les redondances et les dépenses inutiles déjà engagées pour partie par des chambres régionales qui n’ont pas confiance dans les chambres territoriales. Nous, nous faisons confiance à l’expertise des chambres territoriales.

M. le président. Quel est l’avis de la commission?

Mme Catherine Vautrin, rapporteure . Sur le fond, on ne peut qu’être d’accord, madame Fioraso, mais voici ce que prévoit l’alinéa 14: « Elles définissent une stratégie pour l’activité du réseau dans leur circonscription. Dans des conditions définies par décret, les chambres de commerce et d’industrie de région exercent leur activité en valorisant les compétences existant dans les chambres de commerce et d’industrie territoriales ou dans les chambres de commerce et d’industrie départementales d’Île-de-France de leur circonscription. » Votre demande est ainsi satisfaite et je suis donc défavorable à votre amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement?

M. Hervé Novelli, secrétaire d’État. L’objectif poursuivi est satisfait. Il est en effet prévu à l’alinéa 29 que les CCIR peuvent, par convention, confier à une chambre de commerce et d’industrie territoriale une partie de leurs fonctions de soutien. Cette disposition permettra aux chambres de commerce et d’industrie régionales d’optimiser ainsi les compétences et expertises au service des entreprises de la région.

(L’amendement n° 91 n’est pas adopté.)

(Les amendements n os 95 et 96 sont retirés.)

M. le président. J’en viens à l’amendement n°171.

La parole est à M. Daniel Paul.

M. Daniel Paul. Cet amendement est défendu.

(L’amendement n°171, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

(Les amendements n os  97, 98 et 99 sont retirés.)

M. le président. La parole est à Mme Geneviève Fioraso, pour défendre l’amendement n° 92.

Mme Geneviève Fioraso. Il faut tout de même insister sur la reconnaissance des compétences: la loi doit inciter les chambres régionales à confier des missions aux chambres territoriales.

Je pense par exemple à une chambre que je connais bien, celle de Grenoble, qui a un service d’accompagnement à l’export des PMI-PME, ce qui, lorsque l’on connaît nos pauvres performances à l’export, n’est franchement pas du luxe. Un service, qui s’appelle GREX, reconnu au niveau national, a été valorisé par la secrétaire d’État au commerce extérieur, Anne-Marie Idrac, et a atteint un niveau d’expertise qui pourrait même être utilisé au niveau national. Étant donné l’état d’esprit que vous encouragez dans ce projet de loi, je pense que GREX va s’étioler. Comme il n’aura plus les moyens de renouveler le personnel pour les raisons que nous avons évoquées tout à l’heure, c’est une expertise qui va se perdre et l’on va encore laisser pour compte des PMI-PME qui, pourtant, pourraient bénéficier très utilement de ces services non seulement au niveau régional mais aussi au niveau national.

Lors de nos auditions, j’avais évoqué le sujet et Mme Vautrin avait été beaucoup plus ouverte et incitative en expliquant même que des outils dont l’expertise était reconnue au plus haut niveau et qui donnaient des résultats depuis des années pouvaient être valorisés au niveau national. Or on ne précise même pas qu’ils peuvent être valorisés au niveau régional. Je trouve donc dommage de ne pas accepter l’amendement que je propose.

(L’ amendement n°92, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

(Les amendements n os 100 et 101 sont retirés.)

M. le président. L’amendement n°170 de M. Daniel Paul est défendu.

(L’amendement n°170, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

(L’amendement n°102 est retiré.)

M. le président. L’amendement n°169 est-il défendu?

M. Daniel Paul. Oui!

(L’amendement n°169, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.) (L’article 4, amendé, est adopté.)

Article 4 bis

M. le président. Plusieurs orateurs sont inscrits sur cet article.

La parole est à M. Yanick Paternotte.

M. Yanick Paternotte. L’article 4  bis concerne la chambre de commerce et d’industrie de Paris – Île-de-France. L’Île-de-France ne souhaite pas toujours avoir une situation particulière dans les textes, mais il s’agit, en l’occurrence, d’une structure qui comprend la première chambre de commerce de France, la CCIP, et la deuxième, la chambre de commerce Val d’Oise-Yvelines. Il fallait donc trouver un équilibre entre le droit commun, les chambres de commerce territoriales, et la possibilité de conserver un certain nombre d’initiatives. Je remarque d’ailleurs, madame la rapporteure, que l’amendement que vous déposez à la fin de l’alinéa 9 vient réaffirmer l’autonomie des CCIT en Île-de-France.

Je pense que l’on peut parvenir à un équilibre grâce à un certain nombre d’amendements que nous avons déposés, sous réserve, bien entendu, que le Gouvernement les accepte, ce dont je ne doute pas, et nous souhaitons que soient adoptés quelques amendements de forme.

Nous voulons d’abord insérer le terme « région » devant Paris – Île-de-France. C’est l’objet des amendements n° s 188, 195 et 196, qui permettraient d’affirmer le côté régional, sachant que, dans la structure consulaire, la CRCI a vocation à assurer la transition avec l’application en 2013 de l’autonomie départementale.

Nous avons également déposé un amendement, n°156, tendant à supprimer la dernière phrase de l’alinéa 6, qui prévoit que « les dispositions relatives à l’élection des futurs membres de la chambre de commerce et d’industrie de Paris – Île-de-France sont précisées en Conseil d’État ».

Cette phrase n’a pas lieu d’être puisque l’alinéa 12 dispose déjà que la disparition des différentes chambres de commerce et d’industrie « n’entraîne pas la fin des mandats de leurs membres, qui ont vocation à siéger à la chambre de commerce et d’industrie de Paris – Île-de-France et dans les chambres de commerce et d’industrie départementales d’Île-de-France jusqu’au prochain renouvellement des membres des chambres de commerce et d’industrie de région et des chambres de commerce et d’industrie territoriales. »

De telles dispositions n’ont pas à être codifiées dans la loi. Nous les retrouvons d’ailleurs dans les dispositions transitoires et finales à l’article 18, où les alinéas 11 à 13 de l’article 4 bis seraient mieux à leur place. C’est le sens de l’amendement n°199.

Je termine par les amendements n° s 197 et 198. La chambre de commerce de Paris, la chambre de commerce Val d’Oise-Yvelines et d’autres chambres ont une particularité. La chambre de commerce Val d’Oise-Yvelines porte l’école de commerce bien connue, l’ESSEC, la chambre de commerce de Paris gère les palais des congrès, les halls d’exposition, par exemple ceux de la porte Maillot et de la porte de Versailles. Il faudrait tout de même faire attention à une dévolution de biens préjudiciable à une politique régionale cohérente.

Sur le reste, on peut épiloguer. La bouteille est-elle à moitié vide ou à moitié pleine? Nous sommes un certain nombre à penser en Île-de-France que le texte est équilibré. Le travail de la commission permet de reconnaître une certaine autonomie, renforcée d’ailleurs paradoxalement par les amendements de M. Cosyns et celui de la rapporteure.

Le vrai risque, me semble-t-il, réside dans la question de savoir si des agents de statut public qui partent en retraite seront remplacés ou si l’on passera au statut privé. Je pense que les deux amendements que nous avons précédemment adoptés répondent parfaitement au souci d’équilibre qui est le mien et celui de mes collègues signataires de ces différents amendements.

M. le président. La parole est à M. Guy Malherbe.

M. Guy Malherbe. Cet article introduit une exception francilienne qui n’a pas sa place dans ce texte.

J’ai rappelé ce matin que ce dispositif était d’abord contraire à la RGPP mise en œuvre dans la région Île-de-France. La réorganisation des services déconcentrés a été limitée à Paris et à la petite couronne, les départements de la grande couronne n’ayant pas été concernés. Je ne vois donc pas pourquoi, pour la réforme des chambres consulaires, on appliquerait une sorte de RGPP spécifique aux CCI de l’Essonne et de la Seine-et-Marne. Il n’y a aucune raison de déroger à ce qui a été fait par l’État pour les services déconcentrés.

J’ai également démontré que, du point de vue économique, il n’y avait aucune raison de réserver un sort particulier à ces départements qui ne le méritent pas. Ils ont une fiscalité moindre que celle de Paris ou des Yvelines. Ils rendent un très grand service à leurs entreprises, à un moindre coût.

Aucun argument ne milite donc en faveur du fait que l’on réserve un sort particulier aux chambres de l’Essonne et de la Seine-et-Marne. Nous vous demandons simplement, monsieur le secrétaire d’État, de leur appliquer ce qui est prévu dans le projet et rien d’autre. C’est tout ce que ces deux CCI vous demandent.

C’est la raison pour laquelle j’ai déposé un certain nombre d’amendements, dont un en particulier qui vise tout simplement à donner à ces chambres la liberté de faire un choix, exprimé par leur organe délibérant à la majorité absolue. Elles pourraient être des chambres territoriales, en application du projet de loi que vous nous soumettez, avec toutes les prérogatives d’un établissement public, ce qui nous paraîtrait tout à fait correct. Si, un jour, elles le voulaient, car l’économie évolue, les responsables aussi, elles pourraient opter éventuellement, dans des conditions prévues par l’amendement, pour une réintégration dans la chambre régionale. Il s’agit simplement de laisser toute liberté à ces deux chambres de commerce, qui ne méritent pas d’avoir un sort particulier, et de préserver l’avenir.

M. le président. Les deux amendements identiques, n os 188 et192, ont été défendus.

Quel est l’avis de la commission?

Mme Catherine Vautrin, rapporteure . Défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement?

M. Hervé Novelli, secrétaire d’État. Défavorable.

M. le président. La parole est à Mme Geneviève Fioraso.

Mme Geneviève Fioraso. On parle de régionalisation mais on s’aperçoit qu’on a fait un statut d’« ami », un statut spécifique en tout cas, pour la région parisienne afin de réaliser une réforme s’appuyant sur la régionalisation.

À cet égard, je mets quiconque au défi d’expliquer le schéma de l’Île-de-France. Or, si on ne peut l’expliquer, ce ne sera pas efficace sur le plan économique parce qu’il n’y aura pas de lisibilité. Nous ne sommes tout de même pas loin du bidouillage parce que, si l’Île-de-France n’avait pas été d’accord, si l’on n’avait pas réussi à trouver un compromis, il n’y aurait pas eu de réforme possible sur l’ensemble du territoire. C’est tout de même un peu choquant et cela montre bien que la régionalisation ne va pas donner plus de pouvoir aux régions et aux territoires, mais qu’elle est faite d’abord pour réduire des dépenses et non améliorer l’efficacité.

Il est un autre élément qui me choque.

En ayant des contacts avec les personnels de toutes ces chambres, on s’aperçoit qu’ils n’ont jamais été consultés de façon homogène…

M. François Brottes. C’est scandaleux!

Mme Geneviève Fioraso. …et même jamais consultés du tout sur l’ensemble de ces réformes. Lorsque l’on utilise un outil qui est tout de même fondé sur l’expertise, donc sur la motivation des personnels, et qu’on ne les a jamais consultés, que ce soit en région parisienne, dans les régions ou au niveau des chambres territoriales, cela pose un sérieux problème.

M. Yanick Paternotte. Je retire l’amendement n°188.

(L’amendement n°188 est retiré.)

M. le président. Retirez-vous également votre amendement, monsieur Malherbe?

M. Guy Malherbe. Oui.

(L’amendement n°192 est retiré.)

M. le président. Les deux amendements identiques, n os 178 rectifié et 195, des mêmes auteurs ont été défendus.

(Les amendements identiques, n os 178 rectifié et 195, repoussés par la commission et le Gouvernement, sont retirés.)

(L’amendement n°103 est retiré.)

M. le président. La parole est à M. Guy Malherbe, pour soutenir l’amendement n°180.

M. Guy Malherbe. Je l’ai défendu en prenant la parole sur l’article.

M. le président. Quel est l’avis de la commission?

Mme Catherine Vautrin, rapporteure . Je m’exprimerai sur l’ensemble de ces différents amendements.

Nous avons longuement discuté sur la manière dont traiter le cas particulier du réseau consulaire en Île-de-France. Fallait-il, tout d’abord, le traiter comme un cas particulier ou appli quer le droit commun? Chaque option avait ses avantages et ses inconvénients. Plusieurs raisons nous ont conduit à privilégier la première option.

La première raison tient à l’incontestable spécificité de la région parisienne, qu’il s’agisse du nombre d’employés ou de ressortissants des CCI. En ce qui concerne le personnel, madame Fioraso, les associations de personnel qui le souhaitaient ont été reçues.

Mme Geneviève Fioraso et M. Daniel Paul. Les syndicats!

Mme Catherine Vautrin, rapporteure . J’ai reçu la CFDT, par exemple, mais vous n’étiez pas là, madame Fioraso.

M. François Brottes. Ça n’est pas ce qu’il nous ont dit!

Mme Catherine Vautrin, rapporteure . Je vous communiquerai la date de notre rencontre, monsieur Brottes. Malheureusement, j’étais seule; les représentants du groupe SRC n’étaient pas là.

En ce qui concerne l’accord passé entre la CCI de Paris et la CCI de Versailles-Val d’Oise, la majorité des membres étaient d’accord.

M. François Brottes. Un accord sur mesure!

Mme Catherine Vautrin, rapporteure . Je connais parfaitement les difficultés rencontrées dans les départements de Seine-et-Marne et d’Essonne. J’ai à plusieurs reprises travaillé avec Guy Malherbe sur ce sujet, de même que j’ai reçu les présidents des deux chambres concernées.

Lorsque j’ai eu connaissance de l’accord passé, à la fois par le président de l’assemblée des CFCI et le président de la CCI de Versailles-Val d’Oise, j’ai souhaité que la commission travaille à la rédaction d’un amendement qui permette de traduire cet accord.

M. François Brottes. Chambre d’enregistrement!

Mme Catherine Vautrin, rapporteure . Le système auquel nous sommes parvenus existe ailleurs, par exemple pour l’AP-HP ou pour certaines délégations de la chambre de Paris.

Je mesure les difficultés des autres chambres et c’est pourquoi, entendant leurs inquiétudes, j’ai déposé un amendement qui procède à une nouvelle rédaction de l’alinéa 9 veillant à préserver l’ensemble des futures CCI départementales et à faire en sorte qu’elles puissent disposer des moyens tant budgétaires qu’humains pour fonctionner.

Il conviendra de même de s’assurer que les délégations de compétences décidées par la future chambre respectent la liberté d’action des futures chambres départementales.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement?

M. Hervé Novelli, secrétaire d’État. Il s’agit d’un débat très important.

La région Île-de-France et son réseau consulaire pèsent d’un poids très considérable, représentant près du quart de l’ensemble des réseaux. Cela justifie à soi seul une attention soutenue.

Cette réforme, je l’ai déjà souligné, ne vient pas par hasard. Elle résulte de travaux approfondis menés par les réseaux. Je suis toujours très étonné d’entendre tel ou tel parlementaire parler d’une réforme « portée par le Gouvernement ». Certes, ce dernier a déposé un texte sur le bureau de l’Assemblée, mais il a d’abord mis les principaux acteurs devant leurs responsabilités en les invitant à proposer un texte.

Le projet du Gouvernement résulte d’un accord délicat. S’il a suscité autant de débats dans les réseaux, principalement dans ceux des chambres de commerce et d’industrie, c’est parce que cela n’allait pas de soi.

Mme Geneviève Fioraso. Cela ne va toujours pas de soi!

M. Hervé Novelli, secrétaire d’État. Or il se trouve qu’un accord a été passé entre la chambre de commerce et d’industrie de Paris et la tête de réseau, le président de l’assemblée des chambres françaises de commerce et d’industrie.

M. Guy Malherbe et M. Yves Albarello. C’est faux!

M. Hervé Novelli, secrétaire d’État. Ne dites pas que c’est faux: j’ai moi-même reçu l’accord des deux têtes de réseau. Je ne puis que dire la vérité dans cette enceinte et je vous demande de me croire.

M. Daniel Paul. Cela sera enregistré!

M. Hervé Novelli, secrétaire d’État. Cet équilibre a rendu possible un relatif accord qui nous a permis de présenter ce texte devant le Parlement. Que cet accord ne satisfasse pas telle ou telle chambre, qui va perdre le caractère de chambre de commerce et d’industrie territoriale, c’est un fait.

M. Guy Malherbe. C’est énorme!

M. Hervé Novelli, secrétaire d’État. Il appartiendra de voir dans quelles conditions nous pouvons garantir au maximum l’autonomie des chambres départementales, sans remettre en cause un accord sur lequel repose l’ensemble de l’architecture relativement consensuelle que nous avons obtenue dans le réseau.

M. Daniel Paul. Tout est relatif!

M. Hervé Novelli, secrétaire d’État. Voilà le défi qui nous est posé, et j’apprécie les efforts consentis, notamment par la rapporteure, pour donner aux chambres de commerce et d’industrie départementale le maximum d’autonomie auquel elles peuvent légitimement prétendre.

Nous sommes au début de l’examen de ce texte. Il y aura une discussion au Sénat, puis une seconde lecture ici. Il faut laisser le débat progresser. L’amendement de la commission améliore la situation des CCI départementales d’Île-de-France, et le Gouvernement soutiendra cet effort, mais je ne peux pas donner un avis favorable à l’amendement n°180.

M. le président. La parole est à M. Yves Albarello.

M. Yves Albarello. Monsieur le secrétaire d’État, depuis plusieurs heures que nous parlons de « spécificité », vous ne voulez pas nous entendre.

Je vous rappelle les propos que vous avez tenus hier soir sur cette problématique: « J’ai bien entendu les arguments de M. Guy Malherbe, et je souhaite que le schéma retenu au niveau francilien laisse toute leur place à l’Essonne et à la Seine-et-Marne. Cela me paraît possible et réalisable. » Or ce n’est pas ce que vous venez de dire!

M. Hervé Novelli, secrétaire d’État. Mais si!

M. Yves Albarello. L’amendement n°180 vise à mieux préciser la spécificité de la région Île-de-France en prenant en considération sa dimension territoriale. Les deux tiers de la superficie totale de la région sont en effet constitués par les départements de la Seine-et-Marne et de l’Essonne. En outre, ces deux départements sont riverains de la province, avec laquelle ils offrent de nombreux points communs, notamment la ruralité, qui est l’une de leur caractéristique essentielle. En même temps, ils rencontrent des problématiques urbaines, qui doivent être conciliées avec ces exigences rurales, phénomène qui les différencie totalement des autres départements franciliens, exclusivement ou très largement urbains. (« Non! » sur plusieurs bancs.)

Par ailleurs, les CCI du 77 et du 91 ont depuis longtemps l’habitude de travailler en partenariat confiant avec les nombreuses communes que comptent les deux départements: 514 pour la Seine-et-Marne, 196 pour l’Essonne. C’est le même esprit que celui existant dans les chambres de commerce territoriales.

Enfin, cet amendement procède de la même inspiration que celui de la commission des finances défendu tout à l’heure par notre collègue Charles de Courson.

M. le président. La parole est à M. François Brottes.

M. François Brottes. Ce débat animé et intéressant montre à quel point chacun est sur la même position au sein de la majorité!

Madame la rapporteure, loin de moi l’idée que vous n’ayez pas conduit de nombreuses auditions. Vous avez accompli un travail considérable et nous vous en avons rendu hommage. Simplement, vous ne pouvez pas avoir vu tout le monde.

Je relève simplement que ce texte ne comporte aucune disposition sur les modalités d’organisation du dialogue social pour la mise en œuvre de la réforme.

Mme Catherine Vautrin, rapporteure . Parce que c’est réglementaire!

M. François Brottes. Non, ça n’est pas réglementaire! Dans toutes les lois modifiant des statuts pour suivre l’évolution des structures, il y a toujours un article qui pose les termes de l’organisation du dialogue social et de la représentativité des personnels dans l’entreprise. Il ne s’agit pas du contenu des accords mais seulement des modalités pratiques d’organisation.

Monsieur le président, je crois que nous vivons une séance tout à fait exceptionnelle, dont vous aurez à vous souvenir, car vous présidez ce soir une assemblée de notaires! Nous sommes là, notaires assis face à une rapporteure qui nous explique que des accords ont été passés et que nous devons les entériner, les acter dans la loi. Le secrétaire d’État dit la même chose: « Il y a eu un accord; vous, députés, n’avez qu’à signer au bas de la page. » Où a-t-on vu que le Parlement était là pour entériner des accords passés à l’extérieur? Certes, nous devons les prendre en considération, car ils sont issus de la concertation, mais en tout état de cause, quand l’Île-de-France demande un droit particulier, comme la Moselle, l’Alsace et quelques autres collectivités, où va-t-on? Je pense que l’on n’est pas allé au bout de la réflexion; nous voyons bien qu’elle n’est pas mûre; il n’y a même pas d’accord où l’on dit qu’il y en a!

De grâce, monsieur le président, ne nous transformez pas en assemblée de notaires!

M. le président. Ce n’est pas mon intention.

La parole est à M. Daniel Paul.

M. Daniel Paul. Je vois au moins un intérêt dans la proposition de nos collègues MM. Malherbe et Albarello; celle de pointer les contradictions qui ont conduit à la présentation de ce texte de loi.

À l’évidence, comme je l’ai indiqué hier dans la discussion générale, ce texte n’a pas été suffisamment préparé. (Exclamations et rires sur les bancs des commissions.) Chers collègues, si c’était le cas, nous n’assisterions pas à ce qui se passe actuellement! Et ce pas n’est pas le seul sujet de nature à créer une telle situation.

Il existe un principe dans notre République, celui d’égalité. J’aimerais, madame la rapporteure, que l’amendement n°224 rectifié que vous présenterez plus tard s’applique de la même manière partout, dans tous les départements, à toutes les chambres territoriales; je ne vois pas pour quelle raison il s’appliquerait uniquement en région parisienne.

Je ne suis pas d’Île-de-France, mais nous sommes tous députés du peuple français.

M. Charles de Courson, rapporteur pour avis . De la nation française!

M. Daniel Paul. Nous sommes des représentants du peuple.

Paris, la Seine-Saint-Denis, le Val-de-Marne et les Hauts-de-Seine sont quatre entités que l’on ne peut pas comparer aux départements qui les entourent; de ce point de vue nos collègues ont tout à fait raison. Alors que les Hauts-de-Seine compte une trentaine de communes, l’Essonne en a deux ou trois cents.

M. Guy Malherbe. Cent quatre-vingt-seize!

M. Daniel Paul. Je n’étais pas loin. (Rires.) Elles sont un peu moins de deux cents.

J’ajoute que, avec le Grand Paris, plusieurs de ces départements connaîtront des évolutions; des zones d’emplois importantes vont s’y établir, ce qui provoquera des problèmes particuliers.

M. Guy Malherbe. Comme à Saclay!

M. Daniel Paul. En effet, mon cher collègue, en particulier à Saclay, et dans d’autres territoires probablement. Je pense donc qu’il faut faire un sort à part à ces départements.

C’est pourquoi je voterai votre amendement, monsieur Malherbe, même si j’émets quelques réserves sur certains points. Il va à l’encontre d’une logique que, comme d’autres, je n’accepte pas. Le fait qu’il soit présenté par des membres de la majorité gouvernementale et présidentielle…

M. Yanick Paternotte. Ça vous rassure! (Sourires.)

M. Daniel Paul. …ne me gêne pas en l’occurrence.

M. le président. La parole est à M. Alain Rodet.

M. Alain Rodet. Ce Yalta consulaire ne nous dit rien qui vaille. Nos collègues qui défendent les particularités des chambres de l’Essonne et de la Seine-et-Marne ont sans doute de bonnes raisons. Il existe déjà un statut spécial pour la chambre de commerce et d’industrie de Paris. N’oublions pas qu’il y a peu de temps encore, son directeur général des services était l’ancien délégué à l’aménagement du territoire et à l’action régionale, ce qui apparaît tout de même comme une particularité assez extravagante.

Aujourd’hui encore nous avons d’un côté le Nord, de l’autre le Sud, des zones de baillage, d’autres de sénéchaussée. À cet égard, j’ai une pensée pour un ancien collègue, Patrick Trémège, président de la chambre de Tarbes mais aussi de l’APCI; il ne siégeait pas sur les bancs de la gauche, mais il a joué un rôle important dans les réseaux consulaires. C’est en pensant à lui que je considère qu’on ne peut qu’être sensibles à ce que proposent les amendements déposés par nos collègues de la grande couronne parisienne.

M. le président. La parole est à M. Guy Malherbe.

M. Guy Malherbe. Monsieur le secrétaire d’État, je constate votre gêne et votre embarras. Certes, vous avez raison quand vous dites qu’un accord est intervenu entre le président de la chambre de commerce de Paris et M. Bernardin, président de la chambre de Versailles et de l’ACFCI. Néanmoins j’ai bien noté que vous avez aussi précisé que cet accord était « délicat ». Je mesure tout ce qu’il y a derrière un tel mot. On a bien compris en effet toute la délicatesse de cet accord! (Sourires.) De plus, je rappelle que celui-ci n’a concerné ni l’Essonne ni la Seine-et-Marne, ce qui explique cet amendement.

Je maintiens mon amendement, monsieur le secrétaire d’État, parce que je me dois de le faire, mais j’espère que le délai d’ici à la lecture au Sénat et à la navette sera l’occasion de remettre autour de la table l’ensemble des partenaires des chambres de commerce de la région Île-de-France de façon à parvenir à un accord réel, conforme et qui convienne à tout le monde, un accord qui ne soit pas délicat. Il faut essayer de mettre le temps à profit pour cela. Pour le moment, je le répète, je maintiens mon amendement.

M. le président. La parole est à M. Yanick Paternotte.

M. Yanick Paternotte. Monsieur le secrétaire d’État, on peut s’en remettre au Sénat, mais l’Assemblée a aussi une compétence en la matière, et l’on peut légiférer aussi bien ici qu’ailleurs.

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. Bien sûr!

M. Yanick Paternotte. Ma deuxième remarque est destinée à mon collègue François Brottes.

Nous ne sommes pas ce soir dans une assemblée de notaires: Guy Malherbe et moi sommes pharmaciens. (Sourires.) Sur cet amendement, c’est donc une assemblée de pharmaciens qui est à la manœuvre; je tiens à le souligner car nous ne sommes pas si nombreux.

Troisième remarque: je rappelle que la grande couronne comprend non pas seulement la Seine-et-Marne et l’Essonne, mais également le Val-d’Oise et les Yvelines, qui possèdent aussi des territoires agricoles importants. Nous, dans le Val-d’oise, comme d’ailleurs dans les Yvelines, nous avons une particularité: nous ne disposons pas de l’autonomie départementale puisque nous sommes en interdépartemental. À cet égard, nous voyons dans ce projet de loi une conquête du fait de la représentativité des chambres de commerce territoriales,…

Mme Catherine Vautrin, rapporteure . Bien sûr!

M. Yanick Paternotte. …conquête renforcée par l’amendement n 224 rectifié de la commission visant à réécrire la fin de l’alinéa 9: « [les CCIT] disposent, dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État, des moyens budgétaires et humains nécessaires au bon accomplissement de leurs missions de proximité et de la faculté de gérer ceux-ci de façon autonome ». L’amendement de la commission doit nous décomplexer car il répond de la bonne manière aux craintes de la Seine-et-Marne et de l’Essonne. Certes, il ne répond pas à toutes, mais je pense qu’il est satisfaisant. De plus, dans le projet de loi, il est bien précisé qu’il y aura une forme d’autonomie.

Par ailleurs, il faut savoir ce que l’on veut, mes chers collègues du groupe socialiste: soit on reconnaît que les régions ont une compétence économique, et l’on s’aligne sur la décentralisation et les compétences données aux collectivités territoriales; soit on le nie et, dès lors, il est impossible de défendre la départementalisation. J’ai été très longtemps élu départemental, et je peux vous affirmer que nous, dans le Val-d’Oise, nous sommes ravis d’avoir notre chambre, d’avoir enfin une CCIT.

M. Charles de Courson, rapporteur pour avis . C’est un progrès!

M. Yanick Paternotte. Nous nous félicitons que, grâce au travail de Mme la rapporteure, notre CCIT dispose d’une autonomie.

Ce texte est équilibré: il allie cohérence régionale de l’action et autonomie en termes de formation et d’animation du territoire. Il répond de la bonne manière au problème posé et fait l’objet d’un grand consensus dans nos territoires. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à M. Bruno Le Roux.

M. Bruno Le Roux. Je comprends les réserves de nos collègues de l’Essonne et de la Seine-et-Marne, mais il faut prendre le temps de bien saisir le fonctionnement du dispositif proposé par Mme la rapporteure, parce qu’il est ambitieux tout en étant équilibré.

Les nouvelles chambres de commerce et d’industrie départementales seront certes dépourvues de la personnalité morale, mais elles seront ancrées sur le territoire, avec de véritables moyens d’intervention, supérieurs peut-être aux chambres locales actuelles du fait de la mutualisation. Cela me semble une chance pour l’unité de notre région et aussi une opportunité, non seulement pour la Seine-Saint-Denis – je rejoins les arguments déployés par notre collègue M. Paternotte à propos du Val-d’Oise –, mais également pour les autres départements.

En tout état de cause, le vote de l’amendement n°180 bouleverserait et remettrait en cause tout ce dispositif,…

M. Guy Malherbe. Pas du tout!

M. Bruno Le Roux. …que je crois de conquête.

Il faut donc prendre du temps pour faire comprendre que ce dispositif n’est pas bon seulement pour quelques départements, mais pour toutes les entreprises de notre région, même celles qui sont situées aujourd’hui dans le département de l’Essonne et dans celui de la Seine-et-Marne. (« Très bien! » sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à M. Yves Vandewalle.

M. Yves Vandewalle. Je veux conforter la position de Yanick Paternotte. En effet, la création d’une chambre régionale à l’échelle de l’Île-de-France est une mesure un peu particulière puisque cette région atteint la taille de certains États européens.

M. Patrice Calméjane. Et même plus! Songeons aux États baltes!

M. Yves Vandewalle. Par conséquent, la création d’une chambre régionale suppose de ménager un minimum de déconcentration de la décision. J’ai déposé un amendement en ce sens.

Cela étant l’amendement n°224 rectifié me paraît parfaitement satisfaire à cette double exigence: avoir une chambre à l’échelle de la région Île-de-France tout en prévoyant une déconcentration à la fois de la décision et des moyens à l’échelon départemental. L’adoption de l’amendement de la commission apportera une solution équilibrée entre les préoccupations des uns et des autres.

M. le président. La parole est à M. Jean Gaubert.

M. Jean Gaubert. Ce débat sur l’organisation parisienne pourrait nous faire penser à nous, provinciaux, qu’il ne nous concerne pas vraiment. Or nous partageons les mêmes préoccupations que les intervenants précédents. En effet, les craintes que nous avons exprimées depuis hier se justifient également ici. La massification qui va être réalisée peut bien sûr être intéressante, mais elle risque de créer un éloignement par rapport à un certain nombre de situations, par rapport à des particularités économiques tout de même différentes d’un territoire à l’autre. C’est sur ce point, monsieur le secrétaire d’État, que vous avez intérêt à travailler.

Il faut réfléchir au type de tutelle que l’échelon régional imposera aux autres échelons, en particulier à l’échelon territorial. La chambre régionale lèvera l’impôt et donnera les dotations; si, en plus, elle doit approuver le budget de chaque échelon territorial, il est clair que la marge pour l’innovation, pour l’expérimentation, n’existera plus dans les CCIT. C’est l’une de nos craintes.

Dans mon département, il s’est fait des choses très différentes de ce qui a été réalisé ailleurs; or cela n’aurait jamais été le cas s’il y avait eu une tutelle au niveau régional, où on nous regardait en ricanant.

Monsieur le secrétaire d’État, vous nous renvoyez très souvent à ce qui se passera au Sénat…

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. Je ne l’ai fait qu’une seule fois.

M. Jean Gaubert. …et à la navette. En fin de matinée, nous avons eu une commission mixte paritaire sur l’EURL, et j’ai constaté que vous aviez accepté au Sénat des amendements que vous aviez refusés ici. Cela prouve que, parfois, le temps vous amène à réfléchir, ou que vous éprouvez une considération supérieure pour les sénateurs au point d’accepter chez eux ce que vous refusez chez nous. (Murmures sur les bancs du groupe UMP.)

M. Bruno Le Roux. Ce ne serait pas la première fois!

M. le président. La parole est à Mme la rapporteure.

Mme Catherine Vautrin, rapporteure . Quelques points après cette discussion qui a été tout à fait intéressante.

Tout d’abord, si nous ne voulons pas être une chambre de notaires…

M. Charles de Courson, rapporteur pour avis . Ni de pharmaciens! (Sourires.)

Mme Catherine Vautrin, rapporteure . …qui ne ferait qu’enregistrer des accords passés ailleurs, encore faut-il faire des propositions. Or force est de constater que nos collègues du groupe SRC n’en ont fait aucune sur ce sujet.

De toutes les interventions que j’ai entendues, il ressort une volonté de trouver une cohérence dans un esprit d’ouverture. Je suis totalement consciente de la surprise de celles et ceux, notamment en Seine-et-Marne et en Essonne, qui, au vu de cet accord, ont pu avoir des craintes. C’est dans cet esprit que j’ai cherché, par l’amendement n°224 rectifié, à apporter des réponses. Je partage la volonté que Guy Malherbe a toujours eue, à savoir essayer de trouver un consensus et d’avancer. Cependant pour parvenir à un consensus et pour avancer, encore faut-il que tous les acteurs fassent preuve d’un peu de calme et de retenue. Cela n’a malheureusement pas toujours été le cas.

À ce stade, mes chers collègues, adopter l’amendement n°180 ou ceux qui ont le même objectif créerait une véritable difficulté. La voie de la sagesse est de les rejeter en considérant que l’amendement n o 224 rectifié permettra déjà de franchir une étape supplémentaire. Ne doutons pas que cette nouvelle spécificité parisienne saura reconnaître les attentes de tous les départements.

M. le président. La parole est à M. Jean Gaubert.

M. Jean Gaubert. Madame la rapporteure, vous vous êtes très souvent plainte que nous déposions trop d’amendements.

Mme Catherine Vautrin, rapporteure . Je n’ai rien dit!

M. Jean Gaubert. Cette fois-ci, nous avons été raisonnables. Mais, rassurez-vous, votre incitation nous fera réfléchir pour la suite, et sans doute que, pour d’autres textes, vous verrez arriver des centaines d’amendements. Nous pourrons alors y passer un peu de temps.

Mme Catherine Vautrin, rapporteure . Entre zéro et une centaine, il y a une marge, monsieur Gaubert!

(L'amendement n°180 n'est pas adopté.)

M. le président. La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

Ordre du jour de la prochaine séance

M. le président. Prochaine séance, ce soir, à vingt et une heures trente:

Suite de la discussion du projet de loi relatif aux réseaux consulaires, au commerce, à l'artisanat et aux services.

La séance est levée.

(La séance est levée à vingt heures quinze.)

Le Directeur du service du compte rendu de la séance de l'Assemblée nationale,
Claude Azéma