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Document E4043
(Mise à jour : 12 décembre 2009)


Proposition de décision du Conseil relative à la position de la Communauté au sein du Conseil d'association concernant la mise en oeuvre de l'article 73 de l'accord euro-méditerranéen établissant une association entre les Communautés européennes et leurs Etats membres, d'une part, et l'Etat d'Israël, d'autre part.


E4043 déposé le 22 octobre 2008 distribué le 22 octobre 2008 (13ème législature)
   (Référence communautaire : COM(2008) 0646 final du 15 octobre 2008, transmis au Conseil de l'Union européenne le 15 octobre 2008)

Ce document a été présenté par M. Jérôme LAMBERT , rapporteur, au cours de la réunion de la Commission du 29 octobre 2008.

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La Commission européenne propose au Conseil de remplacer le groupe de travail informel sur les droits de l’homme par un sous-comité à part entière qui viendra s’ajouter aux dix sous-comités déjà en place pour mettre en œuvre l’accord d’association entre l'Union européenne et Israël et le plan d’action UE-Israël élaboré dans le cadre de la politique européenne de voisinage (PEV).

Le sous-comité sur les droits de l’homme examinera tout problème susceptible de survenir dans les domaines de la démocratie, des droits de l’homme, des libertés fondamentales, de la lutte contre l’antisémitisme, le racisme et la xénophobie, notamment contre la discrimination. D’autres questions, y compris de nature horizontale, pourront être ajoutées par le comité d’association. Le sous-comité concentrera son attention sur la dimension « droits de l’homme » et « droit humanitaire international » du plan d’action relevant de la PEV, en insistant sur les problèmes nationaux/internes d’Israël et de l'Union européenne. Des cas individuels pourront aussi être soulevés lorsqu’une des parties l’exigera.

Ce renforcement du dialogue sur les droits de l’homme répond au souhait commun de renforcer les relations bilatérales et s’inscrit dans le contexte particulier d’une démarche beaucoup plus ambitieuse initiée par Israël lors de la septième réunion du Conseil d’association UE-Israël, le 5 mars 2007.

Dans un « non-paper » présenté le 7 octobre 2007, Israël a demandé sa pleine intégration aux mécanismes communautaires dans les domaines politique, économique, de sécurité, de régulation et de gestion du marché intérieur, ainsi que dans l’essentiel des programmes communautaires.

Israël réclame le renforcement de la coopération politique, le bénéfice d’une intégration significative dans le marché intérieur et sa pleine association aux activités des agences, programmes et groupes de travail européens, aux niveaux politique et technique. Il propose aussi la tenue d’un sommet annuel des chefs d’Etat de l’Union européenne et d’Israël, une réunion semestrielle des ministres des affaires étrangères pendant chaque période de présidence européenne et sa participation à tous les conseils thématiques (Ecofin, énergie, environnement, etc.) ainsi qu’aux réunions à tous les niveaux des groupes spécialisés, notamment en matière de sécurité et de dialogue stratégique (COPS), aux réunions sur le processus de paix, aux délibérations des comités Maghreb et Mashrek du Conseil et au groupe de travail sur les activités de l’Union européenne au sein de l’ONU. Enfin, sa demande porte sur la création d’une structure parlementaire conjointe.

Israël demande un partenariat politique global qui n’a jamais été accordé à ce jour à aucun pays voisin relevant de la PEV. Il va, en effet, au-delà du statut avancé demandé par le Maroc pour une participation accrue à des politiques et programmes de l’Union européenne, afin de remplir progressivement l’espace entre le statut d’association et l’adhésion et de tout partager sauf les institutions.

Le Conseil d’association Union européenne-Maroc, réuni le 13 octobre 2008 à Luxembourg, a accordé au Maroc un statut avancé dans le cadre de la PEV. Dans le domaine politique, ce statut prévoit notamment la mise en place d’un sommet Union européenne-Maroc, de mécanismes de concertation au niveau ministériel, l’invitation du Maroc en marge des réunions de certains conseils des ministres ou de certains groupes d’experts du Conseil de l’Union européenne (par exemple les réunions Maghreb-Mashrek ou Afrique du Conseil), la négociation d’un accord cadre pour la participation du Maroc aux opérations de gestion des crises. En matière économique et conformément à l’objectif d’intégration progressive du Maroc à plusieurs politiques sectorielles de l’Union européenne, le statut comporte une harmonisation législative et réglementaire suivant une méthode graduelle et qui concerne d’abord des secteurs prioritaires. Il propose en outre d’approfondir les relations commerciales à travers un accord de libre échange global qui couvre de nouveaux domaines (marchés publics, droits de la propriété intellectuelle, mouvements des capitaux, concurrence, développement durable). Enfin, le statut envisage l’approfondissement des relations entre le Parlement européen et la Chambre des représentants du Maroc, les associations du monde des affaires, les conseils économiques et sociaux, ou entre le Maroc et le Conseil de l’Europe.

Ces mesures forment une feuille de route ambitieuse qui devra être mise en œuvre progressivement dans les années à venir. Le statut avancé marque la reconnaissance des progrès réalisés par le Maroc dans ses réformes politiques, notamment pour les droits de l’homme, économiques et administratives qui en ont fait le premier bénéficiaire des fonds de la PEV.

En revanche, la présence des ministres israéliens dans tous les conseils européens et la participation d’experts israéliens dans l’ensemble des programmes et des groupes de travail européens, avec un statut d’observateur à définir, pourrait conférer à Israël un statut de quasi-membre de l’Union européenne.

Cette demande d’Israël a suscité des réactions d’autant plus vives au Parlement européen qu’il a été maintenu pendant des mois dans l’ignorance des négociations discrètes menées par le Conseil et la Commission avec Israël.

Au terme d’une mission dans la région effectuée début juin et coprésidée par Mmes Véronique de Keyser (PSE) et Annemie Neyts (ADLE), le groupe de travail Moyen-Orient du Parlement européen a appelé la Commission et le Conseil à ne pas donner d’encouragements à Israël au moment où ses pratiques sur le terrain ne justifieraient pas une telle faveur, en particulier le blocus de Gaza, l’extension des colonies, les blocages du processus de paix et le nonreversement des taxes dues à l’Autorité palestinienne. Mme Neyts, présidente du parti libéral européen, a notamment critiqué la mise en place d’une discrimination généralisée et constante en Cisjordanie, en particulier autour de Jérusalem, avec un système de murs, de routes interdites aux Palestiniens et de check points qui morcelle le territoire, enclave des villages palestiniens et diminue la mobilité de leurs habitants.

Lors de sa huitième réunion le 16 juin 2008, le Conseil d’association Union européenne-Israël a donné une première réponse positive à la demande israélienne, mais en l’assortissant d’un lien entre l’approfondissement de la coopération, accepté dans son principe, et les progrès à faire dans le processus de paix. Le Conseil de l’Union européenne fait de ce renforcement un objectif commun, car Israël est « un véritable Etat de droit, doté d’une économie de marché dynamique ainsi que d’une administration publique développée et possède également les structures institutionnelles nécessaires à une coopération toujours plus étroite et approfondie avec l’Union européenne ». Les Etats membres sont d’accord pour une évolution progressive de cette coopération.

Concrètement, l’Union européenne est prête à renforcer le dialogue politique avec Israël, notamment en marge des sessions de l’Assemblée générale des Nations Unies. Des réunions ad hoc au niveau de hauts fonctionnaires sont envisagées. Mais Israël demeurera un pays tiers, non intégré dans les différents cadres de concertation et de décision sur des aspects stratégiques, diplomatiques ou de défense et de sécurité. Une large coopération économique et sociale sera recherchée en matière de commerce et, pour assurer une vaste intégration dans le marché unique, dans des domaines tels que les marchés publics, les réglementations techniques concernant les produits industriels, les droits de propriété intellectuelle et industrielle, la politique de concurrence, la législation dans le domaine sanitaire et phytosanitaire. Un très large champ d’action est ouvert en particulier dans les transports, l’aéronautique, l’environnement, les sciences et technologies, l’enseignement supérieur, la santé.

L’Union européenne entend inscrire cette démarche dans « le cadre du large éventail de nos intérêts et objectifs communs, qui comprend notamment le règlement du conflit israélo-palestinien ». L’Union européenne a mis en garde Israël contre l’extension des colonies de peuplement qui « menace la viabilité » d’une solution « fondée sur la coexistence de deux Etats » et l’appelle à « geler toute activité de colonisation, y compris l’expansion naturelle, et à démanteler les colonies de peuplement sauvages créées depuis mars 2001 » et aussi à mettre fin aux « restrictions » qui paralysent l’activité économique et sociale en Cisjordanie. L’Union européenne se dit aussi « vivement préoccupée par la situation humanitaire intenable que connaît Gaza ». L’Union européenne incite Israël à contribuer à la sécurité régionale, à la non-prolifération des armes de destruction massive et au désarmement. Elle réaffirme son engagement vers « l’établissement d’une zone exempte d’armes de destruction massive, nucléaires, biologiques et chimiques et de leurs vecteurs, qui soit assortie d’un système de vérification mutuelle efficace ». Tous les Etats de la région, « y compris Israël, sont invités à adhérer au traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP) » et à diverses autres conventions internationales.

La création d’un sous-comité sur les droits de l’homme prend donc une importance particulière après la réponse positive mais conditionnée de l’Union européenne à la demande d’un partenariat de très haut niveau souhaité par Israël.

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L’exposé de M. Jérôme LAMBERT , rapporteur, a été suivi d’un court débat.

Le Président Daniel GARRIGUE s’est déclaré très réservé sur l’octroi, par l'Union européenne, d’un partenariat avancé avec Israël et a considéré que la position du groupe de travail Moyen-Orient du Parlement européen était justifiée, compte tenu de la situation actuelle. Même s’il y a un débat très fort en Israël et si un évènement symbolique s’est déroulé à Jérusalem avec le match de football entre la Palestine et la Jordanie, la crise ne se dénoue pas dans le sens souhaité et ce constat conduit à être réservé à l’égard du statut très avancé demandé par Israël dans ses relations avec l'Union européenne.

Il a donc exprimé un avis favorable à la création d’un sous-comité sur les droits de l’homme UE-Israël parce qu’il peut aller dans le bon sens, tout en l’assortissant d’une réserve très forte au regard de l’ensemble de la situation.

Le rapporteur a rappelé qu’il a fait état, dans son rapport, des réserves qu’avait suscitées au Parlement européen la demande de statut très avancé présentée par Israël et qui correspondent aux réserves de M.  Daniel GARRIGUE .

Puis la Commission a approuvé ce document.