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SOMMAIRE
Présidence de M. Jean-Pierre Balligand
1. Renforcement de la sécurité sanitaire du médicament et des produits de santé
M. Xavier Bertrand, ministre du travail, de l’emploi et de la santé
Amendement no 70
M. Arnaud Robinet, rapporteur de la commission des affaires sociales
Amendements nos 87, 88, 203, 136, 204, 165, 166, 137, 205, 90, 89, 206, 207, 138, 145, 164
Amendements nos 139, 169, 171, 133, 140, 208, 141, 142, 58, 56, 143, 209, 30, 31, 32, 57
M. le président. La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à vingt et une heures trente.)
Suite de la discussion, après engagement de la procédure accélérée, d'un projet de loi
M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion, après engagement de la procédure accélérée, du projet de loi relatif au renforcement de la sécurité sanitaire du médicament et des produits de santé (n°s 3714, 3725).
M. le président. Dans la suite de la discussion générale, la parole est à M. Philippe Nauche.
M. Philippe Nauche. Monsieur le président, monsieur le ministre du travail, de l’emploi et de la santé, mes chers collègues, il a donc fallu une énième crise de santé publique majeure pour que le Gouvernement se décide à réagir : l'affaire du Mediator a suivi celle de la gestion désastreuse de la pandémie de grippe A/H1N1,…
M. Guy Lefrand. Tout en nuances !
M. Philippe Nauche. …elle-même précédée par d'autres crises, et le Gouvernement à dû prendre en considération les enjeux réels de la sécurité sanitaire. Vous avez donc, monsieur le ministre, réuni les Assises du médicament et présenté ce projet de loi tendant à renforcer la sécurité sanitaire de nos concitoyens.
La confiance de ces derniers dans leur système de santé, et celle des professionnels de santé et des prescripteurs dans le système de sécurité sanitaire ont fortement été ébranlées. Ce texte a donc le mérite d'exister et présente quelques réelles avancées, notamment en matière de transparence. Toutefois, certains problèmes de fond ne sont pas traités et d'autres sont simplement contournés. Il en va ainsi de l'indépendance de l'information sur le médicament et de la formation continue des médecins, thèmes auxquels je consacrerai mon intervention.
Nous aurions espéré discerner dans ce texte, même en filigrane, une volonté de changer profondément le système d'information des professionnels de santé sur le médicament. Tel n'est malheureusement pas le cas.
S’agissant de l'amélioration de la formation médicale continue, ou FMC, qui représente l'un des objectifs que nous partageons, si l'on peut considérer que le texte de la loi sera probablement respecté, on peut se demander ce qu'il en sera de son esprit. En effet, cette formation reposera toujours sur la visite médicale. Or, quelles que soient les modalités de cette dernière – individuelle ou collective –, dès lors qu'une part de la rémunération des délégués des laboratoires pharmaceutiques professionnels est directement liée au chiffre d'affaires réalisé, vouloir leur imposer une parfaite objectivité est un vœu pieux.
Vous proposez qu'une taxe soit versée par l'industrie pharmaceutique afin de financer la formation médicale continue. Il s’agit là d’une avancée réelle, mais qui ne répond pas aux enjeux. La FMC est en déshérence et, dans les hôpitaux publics, où les sommes consacrées à la formation des praticiens hospitaliers sont très faibles, l'industrie pharmaceutique s'est substituée depuis de nombreuses années – vous n’en êtes pas le seul responsable – à l'enseignement public. Avec cette taxe, nous risquons de traiter le symptôme plutôt que la maladie. C'est une sorte de replâtrage d'un système à bout de souffle.
Or, en juillet dernier, les résultats de l'enquête lancée par votre prédécesseur, Mme Bachelot, sur l'exercice médical dans les établissements publics de santé révèlent notamment que, si 96,5 % des praticiens hospitaliers considèrent le thème de la formation médicale continue comme très important, leur niveau de satisfaction en la matière reste, quel que soit le type d'établissement, relativement moyen – seule la moitié à peu près s’estiment satisfaits. En d'autres termes, l'importance accordée à l'acquisition de nouvelles qualifications médicales et professionnelles est loin d'être satisfait, et cela, je le répète, quel que soit le type d'établissement.
Comment faire pour que la formation médicale continue soit parfaitement dégagée de toute considération mercantile, notamment au sein de l'hôpital public ?
Une des solutions consisterait à établir une séparation très nette entre la promotion commerciale des nouveaux médicaments que les visiteurs médicaux doivent continuer à assumer, et l'information sur les médicaments qui, elle, doit se faire dans le cadre d'une formation médicale continue réellement indépendante, avec les moyens correspondants. Sinon, comment espérer, à moyen terme, une rationalisation de l'utilisation des médicaments dont on sait que les associations pléthoriques sont parfois à l'origine de pathologies iatrogènes et de surcoûts inutiles ?
Quant au dispositif de développement professionnel continu adopté par le Parlement voilà maintenant deux ans, nous attendons toujours sa mise en œuvre.
Je me référerai, pour conclure, au Manifeste pour une santé égalitaire et solidaire que cinq éminents professeurs de médecine et experts en politique de santé viennent de publier, texte cosigné par 123 personnalités du monde médical et de la société civile. Leur diagnostic est sévère : le modèle français est malade ; faute d'un traitement de choc, il est condamné. Je crains, monsieur le ministre, que le projet de loi que vous nous présentez ne réponde pas à leurs attentes, ni à celles des Français en la matière.
Les choix politiques pour restaurer la confiance dans notre système de santé et de sécurité sanitaire restent trop timorés, même si ce texte comporte quelques avancées. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
M. le président. La parole est à M. Guy Lefrand.
M. Guy Lefrand. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur de la commission des affaires sociales, mes chers collègues, le projet de loi qui nous est soumis représente un vrai changement de paradigme.
Faisant suite à de nombreux travaux de qualité réalisés en amont – je pense notamment aux Assises du médicament, au rapport de l'IGAS, aux missions parlementaires –, nous avons à examiner un texte cohérent visant en premier lieu à restaurer la confiance de nos concitoyens envers le médicament
Ce texte, s'il est la conséquence de la dérive d'un laboratoire pharmaceutique, est aussi l'occasion de souligner l'échec de certaines de nos institutions, notamment de l'AFSSAPS. Et je vous remercie, monsieur le ministre, d'avoir eu le courage de rappeler, à la suite de la campagne de vaccination contre le virus H1N1 et de l’affaire du Mediator, qu'il est urgent que le politique reprenne le pouvoir face à une certaine forme de technocratie – constat qui n'est malheureusement pas vrai seulement dans la politique du médicament. Dans ce cadre, nous aurons, après les prochaines élections, l'occasion de rénover l'ensemble des agences, comme le préconise le rapport Bur.
Nous ne pouvons qu'applaudir aux propositions du Gouvernement inscrites dans le projet de loi. Je citerai en particulier :
La lutte contre les conflits d'intérêts par la publication des liens d'intérêt, en prenant garde à ne pas confondre les deux ;
L'importance de l'évolution de la transparence dans toute la chaîne du médicament ;
La suppression de l'AFSSAPS et sa transformation en une nouvelle agence, nous permettant de repartir sur des bases saines et solides ;
Le renforcement de la pharmacovigilance, notamment avec l'évolution du statut des AMM – encore qu’il conviendrait que vous nous expliquiez comment vous inciterez les professionnels de santé à déclarer davantage les problèmes de pharmacovigilance, dont on sait la sous-déclaration chronique dans notre pays : vous avez parlé d’un niveau éventuellement législatif et peut-être pourrez-vous nous en dire un peu plus ;
L'encadrement de la publicité par le retour du contrôle a priori ;
Enfin, l'évolution nécessaire des logiciels médicaux, qui sont indispensables à la mise en œuvre de certains articles du projet de loi, sachant malheureusement qu’aujourd'hui 50 % seulement des médecins utilisent un logiciel professionnel.
Ce texte cherche en permanence un équilibre entre les innovations de fond, la symbolique – dont vous avez parlé à plusieurs reprises –, et le pragmatisme sur le terrain.
C'est pourquoi je proposerai différents amendements visant à rendre ce texte encore plus opérationnel.
Nous reviendrons ainsi sur la question de la prescription en dénomination commune internationale, ou DCI. Si j'étais en effet satisfait du texte issu des travaux de la commission des affaires sociales, un amendement de notre rapporteur tend à revenir au texte initial. Or ce dernier est inapplicable, et je donnerai plusieurs exemples des risques qui seraient alors encourus pour la santé publique, notamment en termes de mésusage ou de prescription hors AMM. Il conviendrait que, pendant au moins un certain temps, nous gardions le nom de marque à côté de la DCI.
De même, nous reviendrons sur le sujet de la visite médicale collective. Certes, celle-ci peut-être intéressante si l’objectif ultime est de supprimer la visite médicale individuelle, mais elle semble difficilement applicable s’agissant de l’information concernant certains types de pathologies ou de traitements.
Je profite d’ailleurs de l’occasion qui m’est donnée pour, dès ce stade de la discussion, souligner la contradiction de certains membres de l’opposition qui voudraient à la fois supprimer la visite médicale et garder les postes de visiteurs médicaux.
M. Roland Muzeau. Il ne faut pas caricaturer !
M. Guy Lefrand. Nous aurons l’occasion d’en reparler, mais il y a là une contradiction qu’il vous faudra gérer.
Monsieur le ministre, le projet de loi apporte de nombreuses réponses cohérentes, intelligentes et pratiques...
M. Michel Issindou. N’exagérons rien !
M. Guy Lefrand. …face aux inquiétudes et aux interrogations – je pèse mes mots – apparues dans notre pays à propos du médicament.
Ne doutant pas que vous aurez à cœur d'utiliser le travail parlementaire pour parfaire le texte, nous vous accompagnerons pour répondre aux inquiétudes de nos concitoyens et pour leur redonner totalement confiance dans le médicament. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
M. le président. La parole est à M. Jean Mallot.
M. Jean Mallot. Qu’il me soit d’abord permis, monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, monsieur le président de la commission des affaires sociales, mes chers collègues, de déclarer n’avoir aucun lien d’intérêt avec quelque entreprise du médicament que ce soit.
M. Guy Malherbe. Est-ce bien sûr ?
M. Jean Mallot. Certain. Nous ne sommes d’ailleurs pas nombreux à faire une telle déclaration...
Ma première observation a trait à un point qui n’a pas été abordé jusqu’à présent. L’étude d’impact fort volumineuse, monsieur le ministre, qui, ainsi que cela est obligatoire pour chaque projet de loi, accompagne votre texte, ne mentionne d’abord pas dans les documents de référence le rapport de Catherine Lemorton, effectué au nom de la MECSS en 2008 – mais peut-être ce document est-il tellement connu qu’il ne vous a pas semblé nécessaire d’en faire état...
À ce premier regret s’ajoute le fait qu’une étude d’impact – le président Méhaignerie pourra le confirmer – a aussi pour objet de mesurer les conséquences du texte en question, notamment sur les comportements économiques et sociaux. À cet égard, l’étude d’impact rappelle que, dans notre pays, 90 % des consultations médicales débouchent sur une prescription médicamenteuse et que les dépenses de médicaments y sont de 30 % supérieures à la moyenne de l’OCDE ; elle va même jusqu’à qualifier de préoccupante la situation française en matière de médicaments.
Cette étude d’impact, décomposée article par article, en s’appuyant sur une analyse juridique assez fournie, nous laisse finalement sur notre faim : rien sur les conséquences attendues de votre projet sur la santé publique, rien sur celles concernant les comptes de l’assurance maladie, rien encore sur la consommation médicamenteuse en France.
M. Michel Issindou. Sujets qui fâchent !
M. Jean Mallot. Qu’un jour la France ne soit plus championne du monde de la consommation de médicaments me semble pourtant une préoccupation importante.
Ma deuxième observation porte sur les liens d’intérêts, question délicate à laquelle votre texte consacre de nombreux articles. En particulier, ni la distinction entre liens d’intérêts et conflits d’intérêts, ni celle entre experts consultés pour avis et personnes participant à la décision ne sont suffisamment explicites.
Il en va d’ailleurs de même du traitement des conflits d’intérêt négatifs, difficulté qui n’est pas non plus suffisamment traitée dans votre projet. Si une personne qui a des liens d’intérêt avec telle ou telle entreprise peut, dans tel organisme ou commission, favoriser un dossier, elle peut aussi en défavoriser d’autres. Or les mesures annoncées ne me semblent pas de nature à traiter cet aspect des choses.
Ma dernière observation est relative à un point sur lequel je m’attarderai un peu plus, je veux parler de la prescription hors AMM, c'est-à-dire l’une des questions clé de l’affaire du Mediator. Il s’agit du cas où un médicament est prescrit en dehors des indications qu’il comporte.
L’article 11 du projet de loi prévoit sous certaines réserves la possibilité de prescrire hors AMM à condition que cette prescription soit motivée. Nous sommes évidemment d’accord avec cette disposition, à ceci près que le dernier alinéa de l’article précise que la mention « prescription hors autorisation de mise sur le marché » dispense de signaler le caractère non remboursable de la spécialité pharmaceutique en question.
À ce stade, je veux faire deux observations.
Aujourd’hui, bien souvent, les médecins prescripteurs ne portent pas sur leur ordonnance la mention « non remboursable ». Demain, n’en sera-t-il pas de même avec la mention « prescription hors AMM » ? Vont-ils vraiment changer leur comportement ?
Un autre point nous pose problème. Avec le dernier alinéa de l’article 11, vous établissez un lien direct entre la prescription hors AMM et le caractère non remboursable d’un médicament. La difficulté est réelle pour ce qui concerne les prescriptions hors AMM justifiées. Vous me répondrez que l’article 16 prévoit que « lorsqu’il n’existe pas d’alternative appropriée, toute spécialité pharmaceutique faisant l’objet d’une recommandation temporaire d’utilisation […] peut faire l’objet, à titre dérogatoire et pour une durée limitée, d’une prise en charge ou d’un remboursement ». Certes, mais dans ce cas, il n’y a plus d’automaticité.
Monsieur le ministre, je me tourne donc vers vous : pouvez-vous clarifier les choses ? Qu’en est-il de la définition de la recommandation temporaire d’utilisation par rapport à l’autorisation temporaire d’utilisation ? Quel lien faut-il établir entre la prescription hors AMM du médicament et son remboursement ou son non-remboursement ? Pour notre part, nous pensons que lorsqu’une prescription hors AMM est opportune, et cela est souvent le cas, elle a tout lieu d’être remboursée puisqu’elle peut être justifiée. À l’inverse, une prescription hors AMM non justifiée ne devrait pas être remboursée ; elle devrait même être sanctionnée.
M. le président. Monsieur Mallot, il faut conclure.
M. Jean Mallot. Pour conclure, je m’interroge sur l’effectivité de la démarche qui implique le Comité économique des produits de santé dans la maîtrise de la prescription hors AMM.
Selon l’article 13, un laboratoire pourrait s’engager à limiter l’usage de son médicament hors AMM. Mais sur quelle base le fera-t-il ? Si la prescription hors AMM de ce produit est justifiée par des recommandations, pourquoi la limiter, et, si elle ne l’est pas, pourquoi la tolérer ?
Si l’engagement pris n’est pas tenu, le Comité économique des produits de santé pourrait, toujours selon l’article 13, infliger une pénalité financière au laboratoire concerné. Pourquoi pas ? Mais quelle est la légitimité du CEPS ? Les prescriptions ne devraient-elles pas être analysées a posteriori par la Haute autorité de santé ? Nous pensons que son intervention serait à la fois légitime et opportune : sur la base de ses analyses, elle serait en effet en mesure d’émettre des recommandations.
Monsieur le ministre, sur les sujets…
M. Michel Issindou. Essentiels !
M. Jean Mallot. …que je viens d’évoquer, il me paraît indispensable que nous obtenions des éclaircissements et des clarifications, afin que nous sachions exactement ce que prévoit votre texte. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
M. le président. La parole est à M. Guy Malherbe.
M. Guy Malherbe. Monsieur le ministre, je veux saluer votre détermination et votre réactivité dans l’affaire du Mediator, qui a ébranlé la confiance que nos concitoyens avaient dans le médicament et a mis en lumière les lenteurs et les dysfonctionnements du système de pharmacovigilance.
Vous avez pris immédiatement conscience du scandale, de son ampleur et de sa signification, comme en témoigne l’organisation des Assises du médicament, réunissant tous les acteurs du médicament et de la santé, et, aujourd’hui, l’examen du projet de loi sur la sécurité sanitaire du médicament, qui concerne la santé de tous les Français.
Le projet de loi dont nous allons débattre, et sur lequel nous allons voter, contient des avancées majeures.
Il permet une meilleure gestion des conflits d’intérêts entre les experts et l’industrie. Il s’agit d’un vrai changement dans la culture médicale. Dans un système beaucoup moins perméable, on peut penser qu’une affaire comme celle du Mediator aurait été mise à jour bien plus tôt. L’adoption d’un Sunshine Act à la française permettra de renforcer la transparence des liens entre les différents acteurs de santé en obligeant de déclarer tous les liens d’intérêts avec l’industrie pharmaceutique sous peine de sanctions judiciaires. La chasse aux pratiques douteuses ou au lobbying agressif ne pourra qu’encourager la véritable innovation.
Également au cœur du projet de loi, la réforme de l’Agence du médicament doit garantir plus d’indépendance. Quand notre santé est en jeu, le culte du secret doit être combattu. C’est ce que vous nous proposez en rendant public les débats d’experts de la nouvelle Agence nationale de sécurité du médicament. Dorénavant, ces débats seront enregistrés, filmés, archivés et ils seront consultables par le public. Le directeur de l’Agence disposera de moyens autonomes et de pouvoirs accrus pour suspendre un médicament. Il pourra aussi demander des études supplémentaires aux laboratoires, qui seront tenus de les réaliser. Je souhaiterais être certain qu’on évaluera désormais le bénéfice réel d’un médicament par rapport à tous les autres antérieurs. En effet, à mon sens, on ne devrait autoriser un médicament que s’il apporte un bénéfice supplémentaire pour le patient. Il faut privilégier la notion de progrès thérapeutique. Je sais, monsieur le ministre, que telle est votre volonté.
Concernant la formation du médecin, il faut veiller à ne pas former les praticiens des hôpitaux et de ville en nourrissant le conflit d’intérêt au berceau, dès la formation initiale, lorsque le pot de thèse de nos internes est pris en charge par l’industrie. Il faut aussi leur offrir d’autres choix que de continuer à se former lors de congrès organisés par les laboratoires et éviter que ceux-ci influencent leur prescription dans l’intérêt des firmes. Il faut enfin revoir la pratique des visiteurs médicaux déjà évoquée.
La sécurité des médicaments passe également par la pharmacovigilance. Il s’agit d’un véritable enjeu. L’affaire du Mediator a mis en lumière les lenteurs et les dysfonctionnements du système de pharmacovigilance. Il faut agir pour minimiser les risques inévitables liés à l’utilisation de produits efficaces prescrits par les médecins dans le cadre de l’AMM ou hors AMM, comme c’était le cas pour le Mediator.
Même si la France est l’un des pays où la notification spontanée par les professionnels de santé est satisfaisante, il est possible et indispensable de l’améliorer encore et de renforcer sa capacité de détection des signaux, et surtout des signaux faibles. Le taux de notification par les médecins reste insuffisant. Il faut mettre le patient au centre du processus. La loi HPST prévoit d’encourager le signalement des effets indésirables directement par le patient. L’AFFSAPS s’est engagée dans cette voie depuis 2002. Elle a expérimenté la participation du patient lors de la pandémie grippale en 2009, à la satisfaction de la présidente des centres régionaux de pharmacovigilance. Les informations remontées étaient d’ailleurs très riches et différentes de celles habituellement signalées par les médecins. Il faudrait poursuivre dans ce sens et donner des moyens supplémentaires aux centres régionaux de pharmacovigilance.
Parmi les professionnels de santé, le pharmacien d’officine est un acteur incontournable de la pharmacovigilance en raison de sa proximité avec le patient et de sa connaissance du médicament. La présidente des centres régionaux de pharmacovigilance souligne le gros travail de remontée des informations réalisées par les officines. Demain, des progrès pourront être encore réalisés avec le dossier pharmaceutique, qui s’inscrit dans une démarche de pharmacovigilance et doit être utilisé comme un outil d’alerte descendante et montante par la direction générale de la santé. Dans le cadre des plans de gestion du risque, le dossier pharmaceutique peut permettre de bloquer sans délai des lots de médicaments suspectés, car il atteint la quasi-totalité des officines puisque 80 % des officines l’utilisent.
Le dossier pharmaceutique peut permettre, dans une démarche plus large de surveillance active, l’utilisation des données pour étudier un médicament durant sa vraie vie auprès du patient. Il doit aussi devenir un outil pour développer des études de pharmacoépidémiologie permettant de rechercher les effets d’un médicament grâce au suivi d’une cohorte de patients. La France doit combler son retard dans ce domaine. À ma connaissance, les premiers projets en la matière viennent seulement d’être labellisés dans le cadre du grand emprunt.
Restaurer la confiance dans le médicament et dans notre système sanitaire est une priorité pour les Français. C’est aussi votre priorité, monsieur le ministre, vous l’avez exprimée dès la remise du rapport de l’IGASS qui pointait les responsabilités de chacun dans l’affaire du Mediator et le dysfonctionnement des agences de sécurité du médicament.
Votre projet de loi propose aujourd’hui des mesures indéniablement fortes. Elles ont surtout l’avantage d’être lisibles pour le public. Elles doivent permettre de restaurer l’image du médicament, ce qui est absolument indispensable, ainsi que celle de tous les acteurs et décideurs de la chaîne du médicament.
M. Michel Issindou. On verra bien !
M. Guy Malherbe. Pour toutes c’est raisons, je voterai votre projet de loi.
M. Jean Mallot. Vous n’avez pas le choix : vous êtes à l’UMP ; vous voterez donc ce texte !
M. Guy Malherbe. Mais il faut aussi que le Parlement exerce son pouvoir de contrôle sur les agences sanitaires et que notre commission des affaires sociales auditionne régulièrement, chaque fois qu’elle l’estime nécessaire, les responsables de ces agences ; je fais confiance en la matière à notre président de commission. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
M. le président. La parole est à Mme Dominique Orliac.
Mme Dominique Orliac. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, le drame du Mediator a traumatisé les Français.
Nous étions persuadés que notre système de santé offrait toutes les qualités grâce aux nombreuses décisions législatives et réglementaires prises dans le passé, mais cette affaire a révélé de préjudiciables dysfonctionnements qu’il faut corriger. Toutefois, n’oublions pas que le système de santé de notre pays est toujours l’un des meilleurs du monde, et que notre circuit du médicament est l’un des plus sécurisé.
Un médicament ayant une AMM n’exclut pas un risque dans son utilisation courante. Tout médicament actif peut avoir des effets négatifs, il faut faire un choix sur la base du rapport entre bénéfice et risque. Les organismes de contrôle doivent donc avoir un rôle essentiel dans ce domaine, avec une réactivité réelle et obligatoire.
Après de nombreux rapports, après l’excellent travail des Assises du médicament, plusieurs carences se sont fait jour concernant les conflits d’intérêt des experts, la pharmacovigilance et la prescription hors AMM
D’autres points, sont maintenant à l’ordre du jour : la réorganisation des agences, la visite médicale, la formation initiale et continue des professionnels de santé… Nous sommes partis d’une affaire judiciaire concernant une entreprise et un produit pour en arriver à une loi qui concerne toute l’organisation sanitaire autour du médicament ce qui exige une étude précise sur les conséquences pour notre pays.
Avec mes collègues députés radicaux de gauche, j’approuve certaines mesures, par exemple celles destinées à prévenir les conflits d’intérêts.
Les règles de transparence ne sont pas toujours très claires aujourd’hui, avec des décisions surprenantes et des commissions trop personnalisées. Des règles strictes doivent être mises en place et je me réjouis de la présence des associations de patients : depuis la loi Kouchner, elles ont montré qu’elles pouvaient avoir un rôle positif.
La prescription hors AMM doit bien sûr être mieux encadrée.
La pharmacovigilance doit elle aussi être réorganisée et réactivée. Sa lenteur est en cause en ce qui concerne les dysfonctionnements observés dans l’affaire du Mediator : chacun envoyait des avis et les décisions n’ont pas été prises. Tous les acteurs de la chaîne doivent être mobilisés pour parvenir à une réelle réactivité, sans oublier le rôle du pharmacien d’officine qui, par son contact proche des malades et des familles, doit être un maillon important et reconnu.
En revanche, d’autres mesures de votre projet de loi sont pour nous difficilement acceptables. Votre texte manque de principes simples.
Ainsi, la sécurité sanitaire de la population est de la responsabilité exclusive de l’État. À ce titre, l’État ne peut s’exonérer de ses responsabilités au travers d’agences ou commissions qui rendent des avis sans valeur juridique, comme la commission de transparence par exemple. Il serait souhaitable que ces décisions soient dorénavant traçables, qu’elles soient communiquées et contestables.
On ne doit pas faire des visiteurs médicaux, profession qui a déjà perdu 8 000 emplois depuis 2004, des boucs émissaires. Bien sûr il faut renforcer l’encadrement des visites médicales, mais la médecine française n’est pas comparable à la médecine suédoise, parce qu’elle est libérale et non fonctionnarisée. Le bon sens veut que l’on donne une force supplémentaire par décret aux chartes de bonnes pratiques de la visite médicale en ville et à l’hôpital, et que l’on érige les certifications des réseaux aux normes AFNOR pour qu’elles soient internationales et évolutives.
Nous ne pouvons ignorer que le médicament est un bien de consommation mondialisé, avec des AMM européennes et plus seulement françaises. Ce que l’on appelle en France le SMR, le service médical rendu, est une donnée uniquement nationale.
Actuellement, chaque commission définit différemment la population cible, avec des dérives de prescription, alors que légalement c’est de la seule compétence des commissions d’AMM françaises ou européennes. Votre texte n’améliore pas la lisibilité de la commission de transparence Il y a des problèmes de cohérence inexplicables. Ainsi, il existe cinq taux de SMR et quatre taux de remboursement alors que l’objectif de l’évaluation du SMR est la fixation du taux de remboursement.
Monsieur le ministre, pourquoi ne pas simplifier cette situation ? Il est souhaitable de n’avoir que deux commissions : l’une qui rassemble l’AMM, la pharmacovigilance et la comparaison des produits, et une autre pour le prix des produits de santé. L’AMM sera de plus en plus européenne, alors que la fixation du prix est une composante nationale sur le plan sanitaire et sur le plan économique.
Cette illisibilité administrative a eu des conséquences lourdes. Les médicaments les plus innovants ne sont disponibles en France qu’avec un à deux ans de retard par rapport aux autres pays européens. L’avenir de la recherche et de la production française sont sombres. En cinq ans, nous avons régressé de la première à la troisième place des pays européens. L’industrie pharmaceutique ne crée plus d’emplois, et jamais le nombre de molécules nouvelles lancées en France n’a été aussi faible.
M. Michel Issindou. Quel bilan !
Mme Dominique Orliac. Cela pose le problème de notre politique nationale industrielle et de recherche. Faisons attention à la dépendance étrangère en matière de nouvelles thérapeutiques : les prix risquent de nous être imposés, ils seront lourds ! Et je ne parle pas de la délocalisation de nos unités de production et de recherche.
On voit d’ailleurs des pays comme l’Allemagne et les États-Unis payer des prix supérieurs pour des produits nationaux. Le Brésil, dernièrement, n’a pas hésité à payer 25 % plus cher un médicament avec un brevet national.
Les pouvoirs publics doivent organiser, grâce à une autorité indiscutable, une véritable transparence des coûts de santé pour mieux éclairer les décisions. Sur proposition de cette autorité, la liste des pathologies prises en charge au titre de l’assurance maladie devrait faire l’objet d’un débat au Parlement.
En conclusion, malgré des améliorations destinées à répondre à l’émoi suscité dans notre pays par l’affaire du Mediator, ce projet de loi ne permet pas d’assurer pleinement la qualité et la sécurité des soins souhaitées par les Français. De plus, il ne garantit pas dans l’avenir une indépendance nationale dans les domaines de la recherche publique et privée et des thérapeutiques nouvelles.
En résumé, nous avons affaire à un projet de loi parcellaire qui ne donne pas une vision globale à une réforme nécessaire. Trop de dispositions sont renvoyées à des décrets et des arrêtés.
Vous l’avez compris, les radicaux de gauche ne sont pas convaincus par la crédibilité de cette réforme qui vise plutôt à gérer la crise de 1’opinion publique qu’à réformer complètement le système. En l’état actuel du texte, nous ne le voterons pas, mais nous demeurerons très attentifs à son évolution. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
M. le président. La parole est à M. Nicolas Dhuicq.
M. Nicolas Dhuicq. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, je ferai une remarque d’ordre général, avant de mentionner trois interrogations soulevées par le texte qui nous est soumis.
Ma remarque est la suivante. Certes, les sociétés industrielles modernes ont besoin de mettre en place, pour leurs décideurs, des outils d’évaluation performants et une standardisation des pratiques. Mais, dans certaines disciplines – je pense notamment à celle qui est ma mère symbolique –, la transmission se fait de maître à élève. Ainsi, la psychiatrie peut encore résister quelque peu à l’objectif de standardisation industrielle, pour le bien du patient.
J’en viens maintenant aux trois interrogations soulevées par votre texte, monsieur le ministre.
La première concerne les prescriptions hors autorisation médicale. Dans les neurosciences, nous ne disposons pas de produits spécifiquement adaptés à une pathologie. Le spécialiste peut donc être, dans sa clinique quotidienne, un défricheur, un découvreur, pour le bien du patient, en prescrivant des traitements dans des indications non prévues. Je fais ainsi partie de ceux qui ont découvert l’aspect positif des antipsychotiques – traitements que l’on désigne par un anglicisme et qui sont, en fait, les nouveaux neuroleptiques –, sur l’athymie des patients,…
M. Jean Mallot. Bravo !
M. Nicolas Dhuicq. …surtout après une phase processuelle. Qu’en sera-t-il de cette liberté d’improviser et d’inventer du spécialiste, une fois que le texte aura été adopté ?
La deuxième interrogation porte sur les rapports entre les praticiens prescripteurs et les visiteurs médicaux. Il me fut en effet souvent précieux de pouvoir discuter avec ces professionnels des doses nécessaires pour obtenir un résultat clinique – souvent bien différentes de celles indiquées au début de la vie de la molécule – ou des nouvelles indications d’un traitement. Pour les praticiens installés dans des zones rurales, à faible densité de population, il peut être utile de recevoir, par ce biais, des informations sur la pratique de confrères exerçant dans d’autres régions du territoire national. Aussi, je ne voudrais pas que nous supprimions cette possibilité d’échanges, au profit de réunions qui, outre les problèmes pratiques qu’elles posent et qui ont déjà été évoqués ce soir, seraient chronophages et obligeraient les praticiens exerçant en zone rurale à effectuer de longs déplacements.
La troisième interrogation, qui me tient à cœur en tant que gaulliste, concerne l’éthique et la morale. Je n’ai en effet jamais été soumis à un quelconque diktat ou à une quelconque pression d’aucun laboratoire quel qu’il soit. Je n’ai jamais prescrit à mes patients une molécule parce que, par miracle ou par hasard calculé, j’avais rencontré un visiteur médical. Et les quelques colifichets offerts furent souvent jetés à la poubelle ou, lorsqu’il s’agissait de stylos, distribués aux membres des équipes.
M. Michel Issindou. Tant qu’il ne s’agit que de stylos !
M. Nicolas Dhuicq. Nous aurons beau produire des règles contraignantes pour la pratique quotidienne de certains secteurs médicaux, nous ne remplacerons pas l’éthique et la morale individuelle. Et moi qui souhaite que nous construisions une société de liberté, de responsabilité et de confiance, je m’interroge sur l’encadrement trop strict voulu par certains, sur les bancs de cette assemblée.
Enfin, monsieur le ministre, je souhaite que nous ne découragions pas notre jeunesse de s’engager dans des métiers à responsabilités, dont l’exercice est rendu de plus en plus difficile dans une société volontiers procédurière et paranoïaque, qui considère avec méfiance toute personne investie d’une autorité ou détentrice d’un savoir.
Votre tentative est louable ; elle répond à des exigences de la société. Si je me suis permis de soulever ces questions, c’est parce que je souhaite que les patients soient soignés au mieux, ce qui suppose que des médecins continuent de s’engager volontairement dans ces voies difficiles, en étant accompagnés par des équipes pluridisciplinaires.
M. le président. La parole est à M. Sauveur Gandolfi-Scheit.
M. Sauveur Gandolfi-Scheit. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, en novembre 2009, le Mediator était retiré de la vente. Nous n’étions alors qu’au commencement de ce qu’il convient aujourd’hui d’appeler le « scandale du Mediator ». Ce médicament, mis en vente depuis 1976, était pourtant sous surveillance sanitaire depuis plus de dix ans. Il aura donc fallu dix années avant que l’on entérine définitivement le retrait d’un produit dont les risques pour la santé étaient beaucoup plus importants que les bénéfices qu’on pouvait en tirer. C’est pourquoi il était essentiel que nous nous penchions sérieusement sur la situation de la pharmacovigilance en France.
Force est de constater que, depuis près de neuf mois, l’ensemble des instances et organismes concernés par la mise sur le marché et la sécurité sanitaire des médicaments à usage humain ont travaillé dur. Tous ont remis des rapports essentiels à la compréhension des dysfonctionnements qui ont conduit à cette affaire. Il était extrêmement important que le Parlement s’attache également à dresser un diagnostic des plus précis, dans le but ultime de rendre notre système de sécurité sanitaire du médicament efficace et sûr. Il y va en effet du lien de confiance entre les autorités sanitaires et les citoyens, qui sont tous des patients potentiels. À cet égard, je me permets de souligner la grande qualité du rapport d’information présenté par notre collègue le docteur Jean-Pierre Door, à l’issue de la mission d’information parlementaire sur le Mediator et la pharmacovigilance.
À propos de confiance, en tant que médecin, j’ai pu ressentir, sur le terrain, la crainte diffuse que suscitait l’affaire du Mediator. Sans identifier réellement les causes du malaise, j’ai pu voir combien certains patients doutaient de certaines prescriptions ou médicaments. Dès lors, on comprend aisément pourquoi il est crucial pour tous les acteurs de la santé que rien, dans la chaîne du soin, ne vienne contrarier son bon fonctionnement, sous peine de voir se développer une défiance généralisée. Je ne peux donc que saluer l’effort du Gouvernement, dont le texte est de nature à rassurer tous ceux qui ont pu douter de la qualité de notre système de pharmacovigilance.
En effet, le projet de loi modernise en profondeur un système devenu trop rigide, coupé des intérêts et des préoccupations des patients, donc enclin à susciter la défiance. En insistant sur la lutte contre les conflits d’intérêts, en modernisant profondément le système de mise sur le marché et de surveillance des médicaments, et en insistant sur l’information des patients et des professionnels de santé, le politique redevient le garant de la sécurité des citoyens. Reprenant un terme cher à notre rapporteur, Arnaud Robinet, je dirai que ce texte, loin de n’être que technique, constitue avant tout un grand pas pour la démocratie sanitaire.
Néanmoins, une condition me paraît absolument nécessaire à son effectivité : le fait que le doute, lorsqu’il existe, bénéficie davantage aux patients qu’aux laboratoires. À cet égard, il faut souligner que la chaîne du médicament retrouve enfin un acteur fort placé au cœur du système de sécurité du médicament. En effet, l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé – l’ANSM – créée par ce texte devient une véritable police du médicament. Plus réactive, dotée de missions clarifiées et d’une composition plus adaptée à l’intérêt des patients, l’ANSM crée les conditions d’un retour des impératifs de transparence et de responsabilité.
La création de cette agence s’accompagne d’une redéfinition des rapports entre des organismes tels que la Haute autorité de santé, le Comité économique des produits de santé ou l’Institut de veille sanitaire. On assiste au retour nécessaire du politique dans la gestion des produits de santé et de la sécurité sanitaire grâce à la mise en place d’un comité stratégique.
En outre, je constate avec satisfaction que, loin de brider toute initiative, le Gouvernement a su ménager les marges de manœuvre des laboratoires pharmaceutiques afin de leur permettre de continuer à innover. Je salue également sa décision de ne pas stigmatiser la profession de visiteur médical, en tenant compte du fait que la responsabilité des défaillances du système du médicament était largement partagée.
Enfin, je me permets de souligner que ce scandale doit aussi permettre d’anticiper un certain nombre de risques liés à la médecine et à sa pratique. Je prendrai pour seul l’exemple l’administration de médicaments ou de produits de santé à visée esthétique. Même si l’amendement que j’ai cosigné avec notre collègue Bérangère Poletti a été rejeté en commission, il me semble que nous devrions veiller à ce que l’usage et la prescription de certains médicaments ou l’exécution de certains actes médicaux soient davantage encadrés. Si ce texte ne permet pas de le faire, la question ne doit cependant pas être éludée.
Pour conclure, en transposant un certain nombre d’avancées réalisées au niveau européen, en remettant le patient au cœur du système de sécurité du médicament, en encadrant certaines pratiques des laboratoires et en limitant les risques de conflits d’intérêts, ce texte apporte une réponse d’envergure aux inquiétudes de nos concitoyens et aux dysfonctionnements objectifs de notre système de sécurité sanitaire du médicament. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
M. le président. Il est normal qu’au représentant de la Haute-Corse succède celui de la Corse-du-sud.
La parole est donc à M. Simon Renucci.
M. Simon Renucci. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, pour répondre à l’appel de ma collègue, je déclare n’avoir aucun lien d’intérêts quel qu’il soit,…
Mme Catherine Lemorton. Très bien !
M. Simon Renucci. …sinon celui qui nous lie au peuple et légitime notre démarche.
Le projet de loi relatif au renforcement de la sécurité sanitaire du médicament et des produits de santé est un pas en avant incontestable, et je reconnais que la rapidité avec laquelle ce texte nous a été présenté est inédite. Il s’agit d’un pas en avant pour l’amélioration de la santé publique et pour celles et ceux qui ont vécu des drames. Toutefois, je me dois de rappeler ici qu’une loi de santé publique doit être avant tout une loi pour tous, qui nous concerne tous : industriels, professionnels de santé, patients, usagers de la santé, acteurs et structures.
En effet, au cœur de la refondation nécessaire du dispositif sanitaire se trouve la nécessité d’éviter l’empilement successif des structures et de clarifier leurs missions. La chaîne est complexe et, par conséquent, les responsabilités multiples. Une refondation complète du système sanitaire dans l’intérêt de la santé des patients devrait donc s’inscrire dans une grande loi de santé publique attendue depuis plus de dix ans. Dois-je rappeler à ce propos le contenu de l’excellent rapport de notre chère collègue Mme Lemorton ? De nombreuses mesures ont été renvoyées à des décrets et la taxe censée financer la nouvelle agence ne sera présentée que dans le cadre du débat budgétaire. Aussi nos craintes sont-elles fortes que cette loi ne connaisse le même sort que toutes les lois de santé publique : il sera difficile de la faire appliquer rapidement.
En effet, le projet de loi prévoit que la future Agence nationale de sécurité du médicament, appelée à remplacer l’AFSSAPS, assurera la mise en place d’un contrôle a priori des mesures de publicité effectuées à l’égard des professionnels de santé en matière de médicaments à usage humain. Mais, encore une fois, avec quels moyens ? Cette question est au cœur de la réforme.
Par ailleurs, le fonctionnement de cette nouvelle agence reste à définir et l’on peut s’interroger sur la coordination des missions et des rôles des différentes agences – ANSM, HAS, INPES et CEPS – et sur son efficacité. Le projet de loi dispose que ce sera aux industries pharmaceutiques de prouver l’efficacité et le bénéfice de leurs produits en cas de doute, mais selon quelles modalités ? L’encadrement sera-t-il de nature à garantir l’impartialité ? Comment parler de transparence quand il est prévu que les industries pharmaceutiques auront leur place dans le conseil d’administration des futures agences, financées par des fonds publics, qui auront à juger en toute indépendance les résultats obtenus ? Le texte est muet sur l’expertise publique et aucun engagement financier n’est pris. Qu’advient-il donc de la recommandation de la mission sénatoriale – et nous savons combien le Sénat est important – sur les corps d’experts de santé publique indépendants de l’industrie pharmaceutique ?
Pour recréer un climat de confiance, il faut aller plus loin en matière de transparence et sécuriser l’ensemble du processus de contrôle des médicaments en prenant en compte le rapport bénéfice-risque sans pour autant ignorer que les industries pharmaceutiques jouent un rôle important dans l’innovation thérapeutique et la création de nouvelles molécules.
Cependant, la nouvelle agence doit être dotée de moyens suffisants pour pouvoir mener des études indépendantes et officielles. Nous avions proposé la création d’un Haut conseil de l’expertise en santé publique, qui aurait pu disposer de la vision transversale qui nous tient tant à cœur.
Pour garantir la sécurité sanitaire des patients et la formation des professionnels, il faut se doter de moyens efficaces pour une information rigoureuse et scientifiquement reconnue. La santé publique doit être porteuse de sens et de confiance, c’est pourquoi nous souhaitons une dérogation en matière de publicité, laquelle laisse aux mains des industriels les campagnes vaccinales, sous couvert d’approbation du Haut conseil de la santé publique. De plus, il convient de renforcer le système de pharmacovigilance en créant des réseaux de professionnels référents soutenus et reconnus, éventuellement en liaison avec les unions régionales des professionnels de santé, qui pourraient se voir dotées de nouvelles missions.
Ce texte, bien que porteur d’avancées incontestables, ne tient pas compte de certaines propositions faites lors des Assises du médicament ou par la voie des amendements que nous avons déposés.
Je milite pour que l’esprit de la santé publique reste au cœur de nos politiques, afin de lutter contre le cloisonnement, de simplifier la transmission des informations et de bénéficier d’une vision globale de notre dispositif sanitaire.
En conclusion, indépendance et transparence, lisibilité et sécurité, voilà ce que nous demandons aujourd’hui. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
M. le président. La parole est à M. Bernard Perrut.
M. Bernard Perrut. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, nos concitoyens et nous-mêmes, sur tous les bancs, avons été marqués par le drame humain causé par le Mediator. Ce soir, nous ne pouvons oublier les personnes malades ou décédées ainsi que leurs proches.
Cette affaire a révélé les dysfonctionnements de notre système de sécurité sanitaire, et il appartient désormais au Gouvernement et au Parlement d’assumer leurs responsabilités respectives. Vous n’avez pas hésité à réagir, monsieur le ministre, et à tirer les conséquences de ces dysfonctionnements. Je veux également saluer le travail accompli par les parlementaires dans le cadre de la mission d’information sur le Mediator et de la mission relative aux agences sanitaires.
On peut effectivement se demander comment un médicament sans réelle efficacité et doté d’effets secondaires graves a pu rester sur le marché français pendant 33 ans ! Il faut, bien évidemment, que cela ne puisse jamais se renouveler dans notre pays. C’est donc une réforme d’envergure que vous engagez. Dans son excellent rapport, notre collègue Arnaud Robinet parle d’un véritable choc de cultures. Il s’agit effectivement de procéder à une refonte du système de sécurité sanitaire des produits de santé propre à concilier la sécurité des patients et l’accès aux progrès thérapeutiques.
Il faut trouver le juste équilibre et affirmer clairement les valeurs fondamentales sur lesquelles doit reposer la politique du médicament : la responsabilité et la transparence ; l’efficacité et la mobilisation de tous les acteurs ; enfin, le souci constant de l’intérêt des patients.
La lutte contre les conflits d’intérêts constitue notre priorité à tous. De ce point de vue, les mesures du projet de loi sont essentielles, qu’il s’agisse de la déclaration publique d’intérêts ou de la cellule de déontologie chargée de contrôler les déclarations. Les règles de transparence devront être strictement appliquées, que ce soit sur l’existence de conventions conclues par l’industrie pharmaceutique avec les parties intervenant dans le champ de la santé ou sur les décisions et la collégialité des travaux des commissions de la nouvelle agence.
Cette transparence devra être perceptible par les Français, avec l’Agence nationale de sécurité du médicament, chargée de la police du médicament, qui disposera désormais d’un arsenal de sanctions. On peut d’ailleurs se féliciter – il n’est jamais trop tard – que la fédération professionnelle du secteur pharmaceutique se soit dotée, hier même, d’une instance de vigilance éthique. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Mme Catherine Lemorton. Il était temps !
M. Bernard Perrut. Le deuxième pilier de la réforme concerne directement le patient. Vous conviendrez qu’il est choquant de lire, dans le rapport de l’IGAS, que le doute a systématiquement bénéficié au laboratoire Servier. Garantir la sécurité des patients est une obligation qui dépasse le cadre national, et sur ce point nous savons, monsieur le ministre, le combat que vous livrez au niveau européen. Nous sommes là au cœur du débat sur la prise en considération de la valeur ajoutée thérapeutique d’un médicament, et sur le besoin de mener, à tout moment, des études d’efficacité et de sécurité en cas de suspicion et de modification du rapport bénéfice-risque par les autorités sanitaires.
Comme vous l’avez dit à juste titre, un médicament doit être suivi tout au long de sa vie, et dorénavant tout effet indésirable suspecté devra être notifié, et non plus seulement les effets indésirables graves. On imagine qu’en appliquant ces principes au Mediator, des vies auraient pu être sauvées. À l’avenir, les alertes ne resteront plus lettre morte.
Il est également question d’un point essentiel dans ce projet de loi : l’information des patients, ainsi que l’information et la formation des professionnels. Le portail public du médicament, avec une information publique de qualité, va dans ce sens. Il faut renforcer la connaissance du médicament et la pharmacovigilance dans les formations initiale et continue. La valeur irréprochable de la publicité des entreprises pharmaceutiques, ou encore l’évolution des visites médicales, dont nous allons discuter, sont à mon sens des avancées significatives.
Vous-même, monsieur le ministre, avez déclaré vouloir que rien n’échappe à la responsabilité publique. C’est tout à votre honneur. Ce texte de loi consacre le retour de l’autorité politique en matière de sécurité sanitaire et de refonte de la gouvernance de nos agences. Je souligne d’ailleurs la création de ce comité stratégique de la politique des produits de santé, où vous serez vous-même représenté.
En conclusion, mes chers collègues, ce texte qui fait suite au scandale du Mediator concerne chacun de nos concitoyens ; il est extrêmement important si nous voulons leur redonner confiance. Votre projet, monsieur le ministre, – notre projet –, est à la hauteur de l’enjeu, et les Français devraient être rassurés. La loi de 2002 relative aux droits du malade et à la qualité du système de santé confère d’ailleurs aux patients un rôle actif dans le fonctionnement du système de santé. De même, la loi Hôpital, patients, santé et territoires encourage le signalement des effets indésirables par le patient.
En matière de démocratie sanitaire, il convient certainement de réévaluer la place des patients dans le système actuel et peut-être d’envisager une nouvelle loi sur les droits des patients, afin de veiller à ce que la santé garde toujours sa dimension humaine. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
M. le président. La parole est à M. Élie Aboud.
M. Élie Aboud. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, on reproche souvent à l’exécutif de légiférer dans l’urgence. Reconnaissez, mes chers collègues, le bon sens de proposer ce texte après une affaire dramatique comme celle du benfluorex.
L’heure est venue de mieux responsabiliser les différents acteurs du médicament et de corriger les dysfonctionnements du système. Sur la base d’une large concertation, à partir des travaux de l’IGAS, des Assises du médicament, de la mission d’information sur le Mediator, mais aussi des travaux du Sénat, vous avez conclu, monsieur le ministre, à la nécessité d’améliorer la gouvernance, la transparence et surtout l’indépendance en ce domaine. Par nature, il convient évidemment que les services au patient soient au cœur du système. En légiférant sur ce sujet, nous avons montré que l’autorité politique prenait aussi ses responsabilités.
Il faut tout d’abord lutter contre les conflits d’intérêts. Vous avez, pour cela, étendu le champ d’application des déclarations d’intérêts en impliquant tous les professionnels de santé, les médecins, les associations, les étudiants, la presse spécialisée.
Deuxièmement, afin de responsabiliser les acteurs du système de sécurité sanitaire, vous avez choisi, avec sagesse, de maintenir la colonne vertébrale de notre organisation, pour porter une meilleure attention sur ce qui ne fonctionne pas. Plutôt que de révolutionner l’ensemble du système, il convient en effet de proposer des solutions, comme vous le faites.
En ce sens, la création d’un comité stratégique de la politique des produits de santé et de la sécurité sanitaire, que vous animerez, est symbolique. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
M. Jean Mallot. Avec ça, nous sommes bien avancés !
M. Guy Lefrand. Mais oui, c’est important !
M. Élie Aboud. L’autorité politique reprend ainsi les choses en main.
Troisièmement, l’amélioration du système de pharmacovigilance va permettre une meilleure traçabilité du médicament dans son ensemble. L’encadrement des prescriptions hors AMM constitue une avancée majeure du texte sans tomber dans un dogme absolu, en laissant la possibilité aux praticiens spécialisés de juger utile, dans certaines situations rares, d’anticiper afin d’optimiser les soins thérapeutiques donnés à un patient.
Si un régime juridique plus clair est évidemment une bonne chose, un encadrement trop strict des initiatives des différents partenaires peut aussi présenter des inconvénients, il faut avoir le courage de le dire.
M. Guy Lefrand. C’est vrai !
M. Élie Aboud. En ce qui concerne la visite médicale, j’observe tout d’abord deux choses : d’une part, la politique du médicament menée depuis des années a permis de restreindre la dépense en la matière ; d’autre part, le nombre de visiteurs médicaux n’a cessé de décroître depuis des années.
Si l’on veut améliorer la transparence, il convient non pas de supprimer des visiteurs médicaux, dont le rôle consiste avant tout à apporter de l’information aux praticiens, mais simplement de vérifier que cette information n’est pas dévoyée.
La visite médicale peut avoir un rôle positif concernant les informations techniques sur les produits de santé. Si je ne suis pas opposé à l’idée consistant à organiser des visites collectives, je souhaite qu’elles ne servent pas à stigmatiser les 16 000 visiteurs médicaux qui, pour l’essentiel, font leur travail avec honnêteté et professionnalisme.
En conclusion, il m’est agréable de voir que, sur l’ensemble des bancs de cette assemblée, chacun s’accorde à reconnaître les avancées de ce texte. Ma collègue Catherine Lemorton a eu raison de reconnaître qu’il ne s’agit pas d’un sujet partisan et d’approuver ce projet, fut-ce de manière critique.
M. Jean Mallot. Très critique !
M. Élie Aboud. Certains de mes collègues ont regretté de renvoyer tant de choses au domaine réglementaire.
M. Xavier Bertrand, ministre. Plus maintenant !
M. Élie Aboud. Cependant, il fallait prendre nos responsabilités. Vous l’avez fait, monsieur le ministre, et personne ne peut en douter, c’est pourquoi ce texte correspond à une réelle avancée.
Nous le voterons donc demain. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
M. le président. La discussion générale est close.
Souhaitez-vous répondre aux orateurs, monsieur le ministre, ou préférez-vous le faire lors de la discussion des amendements ?
M. Xavier Bertrand, ministre du travail, de l’emploi et de la santé. Je me contenterai de quelques mots, monsieur le président.
Si j’ai dit tout à l’heure que la réforme était un tout, j’ai également précisé que nous pourrions accepter un certain nombre d’amendements afin de restaurer la confiance que chacun appelle de ses vœux. Je pense à la question des liens d’intérêt, à celle de la prescription hors AMM, à celle des autorisations temporaires d’utilisation, à celles des AMM contre comparateurs, ou encore aux remboursements contre comparateurs actifs – autant de sujets sur lesquels nous pouvons enrichir le texte dès cette première lecture.
Pour ce qui est de la visite médicale, j’ai entendu des choses contradictoires, provenant parfois des mêmes bancs, à propos du point d’équilibre qu’il convient de rechercher. Pour moi, il se trouve dans le texte du Gouvernement. Ne rien toucher, ou faire semblant, n’est pas mon option, pas plus que ne l’est celle consistant à supprimer totalement et définitivement les visites médicales, comme l’a proposé l’IGAS.
Mme Catherine Lemorton. Ce n’est pas la nôtre non plus !
M. Xavier Bertrand, ministre. Je pense que l’expérimentation que nous proposons est sans doute la voie la plus équilibrée.
J’ai été attentif aux interventions de tous les orateurs. Je veux dire à Nicolas Dhuicq qu’en ce qui concerne la prescription hors AMM, ma préoccupation essentielle est celle de la sécurité. Il ne s’agit certes pas de casser l’exercice libéral, mais nous avons tout de même besoin de règles en termes de sécurité sanitaire, de police du médicament. Le précédent système s’étant, hélas, révélé complètement défaillant, on ne peut faire l’économie de cette police.
En matière d’AMM, il y a encore des marges de manœuvre, et les praticiens doivent pouvoir faire preuve d’initiative, car il arrive, on le sait, qu’un traitement apporte des résultats hors de son AMM, ce qui justifie notamment la pratique des ATU.
Je ne veux donc certainement pas tout casser au nom d’un principe de précaution juridique, sanitaire ou même politique exacerbé, mais je pense qu’il nous faut tout de même changer le système et poser un certain nombre de règles.
Si j’ai bien relevé quelques critiques, auxquelles nous serons sans doute à même d’apporter des réponses, je constate également le soutien particulièrement vigilant de certains, sur tous les bancs. J’en prends bonne note et vous en remercie. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
M. le président. J’appelle maintenant, dans le texte de la commission, les articles du projet de loi.
M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Préel, premier orateur inscrit sur l’article.
M. Jean-Luc Préel. L’article 1er concerne la transparence des liens d’intérêts. L’affaire du Mediator, évoquée par chacun d’entre nous, montre bien qu’il existe un vrai problème de liens d’intérêts ou de conflits d’intérêts, les deux notions ne devant pas être confondues.
Il est vrai qu’il convient de faire appel aux experts les plus compétents dès lors que l’Agence sera amenée à examiner le cas de nouveaux médicaments. Les laboratoires ont recours à des experts compétents qui ne sont pas légion, et l’on retrouve souvent les mêmes quand il s’agit d’étudier, par exemple, un anti-arythmique.
Il est par conséquent indispensable de légiférer pour clarifier ces liens d’intérêts. Le texte prévoit que l’on dépose une déclaration de liens d’intérêts. Ces derniers ne sont toutefois pas uniquement financiers et peuvent être personnels, d’amitié ; aussi aimerais-je, monsieur le ministre, que vous nous indiquiez la voie à suivre.
En effet, par exemple, quand j’étais interne à l’hôpital Bichat, les deux services de gastro-entérologie n’étaient pas toujours du même avis. Que faire, donc, face à des difficultés de ce type ?
On peut également avoir des liens d’intérêts d’ordre familial comme le montrent très bien certaines affaires récentes. Quand les parents, les enfants ou l’épouse travaillent dans l’industrie, y a-t-il ou non un lien d’intérêts ? Oui, selon moi, et je serais étonné que l’on soutienne le contraire.
M. Guy Lefrand. Bien sûr !
M. Jean-Luc Préel. Enfin, au sein de l’Agence, quand un expert déclarera ses liens d’intérêts avec un laboratoire comme SANOFI, va-t-on déclarer les liens d’intérêts d’un autre expert travaillant, lui, pour GSK, les deux entreprises fabriquant chacune un médicament équivalent ? L’expert lié à GSK aura-t-il ou non le droit de s’exprimer au sujet d’un produit qui sera en concurrence directe avec celui fabriqué par SANOFI ?
Le texte ne me paraît pas clair sur ce point et je souhaite qu’il y soit remédié.
M. le président. La parole est à M. Jean Mallot.
M. Jean Mallot. Avec cet article, nous entrons dans le vif du sujet. Je reviendrai sur plusieurs observations que j’ai formulées au cours de la discussion générale et auxquelles M. le ministre n’a pas répondu.
Ainsi la distinction entre liens d’intérêts et conflits d’intérêts ne nous paraît-elle pas claire, de même que la distinction entre les experts amenés à formuler un avis, d’une part, et les décideurs, de l’autre.
Ensuite, je souhaite savoir de quelle manière le texte traite des conflits d’intérêts négatifs. On peut, lorsque l’on a des liens d’intérêts avec une entreprise, favoriser, au sein d’une commission, tel ou tel produit, mais on peut aussi défavoriser tel ou tel dossier présenté par un concurrent.
La rédaction du texte m’inquiète par ailleurs quelque peu en ce qui concerne la charte de l’expertise sanitaire prévue par l’alinéa 20 de l’article 1er. Nous souhaitons davantage de précisions sur le contenu de cette charte. Je suppose, monsieur le ministre, que vos services en ont déjà rédigé plusieurs projets. Mon inquiétude vient du fait que cette charte à laquelle on renvoie est censée préciser la notion de liens d’intérêts, alors même que l’article 1er traite de cette question. Il faudrait savoir de quoi l’on parle avant de renvoyer, j’y insiste, à un texte à venir.
Enfin, au cours des travaux de la mission d’information sur le Mediator, nous avons été amenés à constater l’emprise, pour reprendre le mot d’une personne auditionnée, de l’industrie pharmaceutique sur l’ensemble du monde médical, qui se transmet de différentes manières et notamment lors de la formation des médecins. Vous annoncez certes le dépôt de textes sur la question, monsieur le ministre, mais je plaide d’ores et déjà pour préserver la formation initiale et continue des médecins de l’emprise de l’industrie pharmaceutique.
M. le président. La parole est à Mme Catherine Lemorton.
Mme Catherine Lemorton. L’article 1er constitue de mon point de vue la grande avancée du texte ; reste qu’il convient d’apporter plusieurs précisions, notamment à propos des personnes devant déclarer leurs liens d’intérêts. Je n’attaque personne, mais s’il est question des membres des commissions et conseils siégeant auprès des ministres, le texte dispose-t-il que les membres du Gouvernement eux-mêmes devront déclarer leurs liens d’intérêts ?
Dans la mesure où le projet ne semble pas le prévoir, un amendement du groupe SRC prévoit une application rétroactive de cinq ans de cette disposition. Il serait bon de rassurer tout le monde puisque, et toutes les tendances représentées dans l’hémicycle sont concernées, d’anciens ministres de la santé, d’anciens secrétaires d’État, rejoignent l’industrie pharmaceutique après la cessation de leurs fonctions gouvernementales ; c’est ce que l’on appelle communément le pantouflage.
La déclaration de liens d’intérêts sera-t-elle rétroactive et concernera-t-elle par conséquent les personnes en place aujourd’hui ?
Enfin, monsieur le ministre, pourquoi ne vous montrez-vous pas plus sévère aujourd’hui que l’article L. 4113-13 du code de la santé publique ? Dans la motion de rejet préalable que j’ai présentée, je rappelais que, depuis l’entrée en vigueur du décret de 2007 pris en application de la loi de 2002 relative aux droits des malades, tout professionnel de santé doit déclarer ses liens d’intérêts dès lors qu’il s’exprime publiquement, dans la presse, à la radio, à la télévision, voire dans cet hémicycle… Je n’ai pas remarqué que les déclarations de liens d’intérêts de la part de professionnels de santé ici présents aient été nombreuses. Comme il s’agit de la loi en vigueur, mes chers collègues, je demande à ceux d’entre vous qui seraient concernés de déclarer d’éventuels liens d’intérêts.
Si nous n’appliquons pas la loi là-même où on l’élabore, monsieur le ministre, je désespère de l’avenir du présent texte.
M. le président. La parole est à M. Roland Muzeau.
M. Roland Muzeau. Nous ne fantasmons pas les pressions ni l’influence économique des laboratoires pharmaceutiques sur notre système de santé. L’IGAS, pour ne prendre que cet exemple, a pointé l’incapacité des agences sanitaires à produire une expertise scientifique autonome de celle développée par les laboratoires sur les produits qu’ils commercialisent, décrivant l’AFSSAPS comme « structurellement et culturellement dans une situation de conflit d’intérêts [...] par une coopération institutionnelle avec l’industrie pharmaceutique qui aboutit à une forme de coproduction institutionnelle des expertises et des décisions qui en découlent ».
Sur ce sujet central des liens d’intérêts et de l’expertise, Dominique Maraninchi, directeur général de l’AFSSAPS, reconnaît lui aussi que « ce n’est pas aux firmes d’analyser les bénéfices et les risques de leurs produits. Ce n’est pas aux experts de décider car par nature ils sont liés à l’industrie pharmaceutique ».
M. Jean Mallot. Voilà de bonnes références !
M. Roland Muzeau. « L’agence devrait avoir son expertise interne », plaide-t-il fort justement.
Martin Hirsch, ex-ministre du Gouvernement, faisant part de son expérience de directeur général de l’Agence française de sécurité sanitaire des aliments, reconnaît également l’urgence « de reconstituer un vivier de médecins et de chercheurs totalement indépendants qui seront appelés à présider des commissions d’experts et à en constituer l’ossature ».
À la différence du rapport de l’Assemblée sur le Mediator, considérant comme indispensable de maintenir au premier plan l’expertise externe, s’accommodant des conflits d’intérêts dès lors qu’ils sont déclarés – ce qui avait notamment motivé notre abstention –, la mission d’information sénatoriale sur le Mediator, présidée par notre collègue François Autain, a elle aussi privilégié cette voie du développement d’une expertise publique interne aux agences.
Votre discours de janvier dernier, monsieur le ministre, semblait reprendre cette exigence : « Pour garantir une évaluation indépendante et de qualité, ne faut-il pas moins se reposer sur l’expertise externe et renforcer au contraire notre expertise interne ? Cela peut demander des moyens supplémentaires, j’en ai conscience, cela voudra donc dire mobiliser les financements nécessaires. »
Force est de constater que vous n’êtes pas passé de la parole aux actes, comme le montre l’article 1er : vous vous contentez d’aménager l’outil existant en matière de prévention des conflits d’intérêts en affichant la généralisation de l’obligation de déclaration d’intérêts, et vous n’ambitionnez en aucun cas de purger ces situations. Cet article est décevant à plus d’un titre. Nous en restons au principe des « conflits avoués, conflits pardonnés ». Vous nous privez de débat sur ce corps d’experts de santé publique indépendants de l’industrie pharmaceutique.
M. le président. La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, pour soutenir l’amendement n° 70.
Mme Jacqueline Fraysse. Le présent amendement est très important puisqu’il propose que les membres des commissions et conseils siégeant auprès des ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale ainsi que les membres des instances collégiales des commissions, groupes de travail et conseils des autorités, agences, organismes et établissements liés à la politique du médicament n’aient « jamais entretenu de liens » avec l’industrie pharmaceutique.
Nous considérons qu’en l’état les dispositions de l’article 1er étendant l’obligation de déclaration d’intérêts rendus publics ne suffisent pas, en soi, à lutter contre les conflits d’intérêts. L’article se contente en effet de les rendre transparents. La meilleure preuve en est qu’en ce qui concerne l’expertise sanitaire, le texte prévoit que la charte éponyme précisera la notion de conflits d’intérêts, les cas de conflits d’intérêts, les modalités de gestion d’éventuels conflits et les cas exceptionnels dans lesquels il peut être tenu compte des travaux réalisés par les experts présentant un conflit d’intérêts. On prévoit donc dans le texte que les conflits d’intérêts peuvent exister.
Nous ne croyons pas davantage en l’efficacité des mesures visant à interdire aux personnes en situation de conflit de participer à l’élaboration d’un avis ou d’une décision, ou de s’occuper d’un dossier. Nous pensons qu’il est indispensable, pour assurer l’impartialité et l’indépendance des décisions, que soient interdits tous les liens et conflits d’intérêts. C’est le sens de cet amendement.
J’ajoute que notre proposition est cohérente avec celle, malheureusement « retoquée » au titre de l’article 40 de la Constitution, consistant à créer une agence d’experts indépendants chargés de toute expertise, notamment interne, des agences.
M. Roland Muzeau. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Arnaud Robinet, rapporteur de la commission des affaires sociales, pour donner l’avis de la commission.
M. Arnaud Robinet, rapporteur de la commission des affaires sociales. Défavorable. Je rappelle que l’article 1er constitue une avancée majeure quant à la transparence sur les liens d’intérêts. Mme Lemorton l’a reconnu, à l’instar de nombreuses personnes auditionnées par la commission.
Sur la forme, madame Fraysse, votre amendement ne présente aucun intérêt – veuillez m’excuser d’être aussi direct. Les groupes de travail et conseils concernés sont en effet ceux de tous les établissements et agences visés par l’article 1er.
Sur le fond, vous proposez d’interdire tout lien d’intérêts aux experts intervenant au sein des instances de sécurité sanitaire. Une telle mesure se révèle impraticable et même contre-productive pour trois raisons.
D’abord, le simple fait, pour des experts, de collaborer avec tel industriel ne signifie pas qu’ils lui sont systématiquement inféodés. Ensuite, pour certaines spécialités, il est très difficile de trouver des experts ; aussi l’application de votre proposition poserait-elle de réels problèmes de recrutement. Enfin, les experts externes apportent des connaissances complémentaires issues de leur connaissance du milieu hospitalier, des centres ou des unités de recherche privés ou publics mais également de l’université.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Xavier Bertrand, ministre. Le sujet est sérieux, mais tout de même ! Qui voulez-vous retenir ? Des experts venus de Mars ? Il faut regarder les choses avec sérieux, on ne peut pas dire à quelqu’un qui a eu des liens d’intérêt voilà vingt ans, ou six ans, qu’il ne pourra jamais participer aux instances visées à l’article 1er.
Nous allons fixer des règles pour une durée de cinq ans et je donnerai tout à l’heure un avis favorable sur un certain nombre d’amendements dont c’est l’objet. Mais prévoir que jamais il ne faut avoir été en contact n’a pas de sens. Votre amendement concerne les experts, mais souvenez-vous de ce qu’a dit Mme Lemorton en faisant sa déclaration à la tribune : un parlementaire qui aurait été à un moment donné professionnel de santé ne pourrait plus s’exprimer sur la question ad vitam aeternam ? Je veux bien d’un texte intégral, mais ne soyons pas intégristes !
Je pense que la règle de cinq ans a du sens. Qui plus est, nous allons renforcer l’expertise indépendante, de façon à ne pas être directement concerné.
C’est toute la différence entre le lien d’intérêts et le conflit d’intérêts. La définition du conflit d’intérêts n’est pas simple, et vous le savez. Le texte du rapport Sauvé proposait une définition que le législateur n’a pas retenue, préférant laisser à la jurisprudence le soin de définir le conflit d’intérêts.
Je sais bien la complexité de cette notion, parce que lorsque j’ai voulu imposer, pour moi-même et pour l’ensemble des membres de mon cabinet, un dispositif de déclaration d’intérêts avant même que le texte Sauvé ne l’imposât, j’ai pris contact avec des avocats. Ils m’ont expliqué que nous étions en plein no man’s land. Il n’existe pas de définition à proprement parler. Mais, entre l’absence de définition et une incompatibilité absolue, il me semble que l’on doit trouver un juste équilibre, et c’est celui que nous proposons. Voilà pourquoi je suis désolé de ne pouvoir donner un avis favorable à cet amendement.
(L'amendement n° 70 n'est pas adopté.)
M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 87.
La parole est à M. Jean-Luc Préel.
M. Jean-Luc Préel. Comme vient de le dire M. le ministre, il est vrai que régler le problème des liens et des conflits d’intérêts est une question majeure si nous souhaitons avoir une vraie transparence. Déclarer ces liens est important, et nous avons besoin d’experts compétents. Ces experts compétents ont souvent travaillé pour développer la molécule, et nous avons alors du mal à trouver des experts pour certaines spécialités.
Mais dès lors que nous avons décidé de rendre obligatoire une déclaration, je propose qu’elle soit déposée auprès du comité éthique de l’agence, et il paraît nécessaire qu’il y ait un comité éthique dans chaque agence. Pour être valable, la déclaration doit pouvoir être étudiée par le comité éthique afin que l’on puisse juger de la réalité de cette déclaration. Il est donc souhaitable de préciser qui reçoit les déclarations et les étudie.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Arnaud Robinet, rapporteur. Avis défavorable. Sur la forme, il s’agit d’une mesure réglementaire. Sur le fond, votre amendement est en fait trop restrictif, puisque les déclarations seront remises aux cellules de déontologie propres à chaque agence, mais ces déclarations pourront également être remises au directeur de l’instance, voire au ministre.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Xavier Bertrand, ministre. Même avis, le texte de loi va beaucoup plus loin. Monsieur Préel, les directions des ministères sont concernées, les cabinets ministériels, ainsi que les directions des services déconcentrées. Tel qu’il est présenté, l’amendement est plus restrictif que le texte.
M. le président. La parole est à M. Jean Mallot.
M. Jean Mallot. Au cours des débats portant sur l’amendement précédent, un échange a eu lieu entre Mme Fraysse et M. le ministre relatif à la définition du conflit d’intérêts. À cette occasion, j’ai entendu avec satisfaction M. le ministre avancer dans la distinction entre lien d’intérêts et conflit d’intérêts plus précisément qu’au cours de la discussion générale.
Le ministre a affirmé qu’il est difficile de définir la notion de conflit d’intérêts. En réalité, le rapport Sauvé, auquel il a fait allusion, donne une définition du conflit d’intérêts qui me semble pertinente, et pour alimenter nos réflexions de façon plus précise, je vais vous la lire. Sinon, nous parlons et nous argumentons sans aller au fond des choses.
Le rapport Sauvé propose la définition suivante : « Un conflit d’intérêts est une situation d’interférence » – c’est le mot-clé – « entre une mission de service public et l’intérêt privé d’une personne qui concourt à l’exercice de cette mission, lorsque cet intérêt, par sa nature et son intensité, peut raisonnablement être regardé comme étant de nature à influencer ou paraître influencer l’exercice indépendant, impartial et objectif de ses fonctions. » Il y a là une définition permettant de recouvrir ce que nous considérons les uns comme les autres comme un conflit d’intérêts, et qui est opérationnelle. C’est pourquoi je propose que nous la retenions.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Xavier Bertrand, ministre. Le choix de cette définition a été écarté par le législateur. Si je peux me permettre, une interprétation plus large encore est possible : un conflit peut exister avec un intérêt public, et pas uniquement un intérêt privé. Si vous exercez une fonction publique et que vous siégez dans un autre établissement public de nature différente, je pense qu’il peut y avoir des interférences.
C’est d’ailleurs l’une des raisons pour lesquelles le législateur ne s’est pas arrêté à cette seule définition et que l’on a renvoyé cette définition à l’approche jurisprudentielle. Avec tout le respect que j’ai pour l’auteur de ce texte, je pense qu’il ne couvre pas encore toutes les situations. L’intérêt public existe également, et il ne me semble pas pris en compte par cette définition.
M. Jean Mallot. Vous souhaitez envisager la contradiction entre deux intérêts publics ?
M. Xavier Bertrand, ministre. C’est cela.
M. Jean Mallot. Pourquoi pas, en effet.
(L'amendement n° 87, repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 88.
La parole est à M. Jean-Luc Préel.
M. Jean-Luc Préel. Monsieur le ministre, vous n’avez pas encore répondu à la question que j’ai posée tout à l’heure ; je la répète donc : lorsque l’on fait partie d’un laboratoire concurrent, les liens d’intérêts seront-ils considérés, et le concurrent aura-t-il le droit de voter et de participer à la discussion ? Ce problème me paraît important, et j’aimerais avoir votre réponse sur ce point.
L’amendement que je défends a pour objet d’étendre votre proposition : les liens peuvent être personnels mais, lorsque l’on a un conjoint, un ascendant ou un descendant dans l’industrie, il peut exister également un lien d’intérêts, je souhaitais le préciser.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Arnaud Robinet, rapporteur. Avis favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Xavier Bertrand, ministre. Avis favorable.
(L'amendement n° 88 est adopté.)
M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 203.
La parole est à Mme Catherine Lemorton.
Mme Catherine Lemorton. Cet amendement vise à fixer la durée nécessaire pour déclarer ses liens d’intérêts. Au-delà de cette durée, le lien d’intérêt n’est plus forcément pertinent. Vous faites bien de redéfinir, ainsi que M. Mallot, ce qu’est un lien d’intérêts et un conflit d’intérêts. Un lien d’intérêts n’a aucun caractère délictueux, on ne devient pas un escroc pour autant. Un conflit d’intérêts, en revanche, commence à poser quelques problèmes.
Nous demandons que soient déclarés les liens des cinq dernières années, qu’il s’agisse de liens directs ou indirects.
J’en reviens à la question posée antérieurement. Monsieur Bertrand, une fois que cette disposition sera votée, quelqu’un qui travaille à vos côtés et qui aurait travaillé dans l’industrie pharmaceutique ou pour elle, aura donc un lien d’intérêts, je ne parle pas ici de conflit d’intérêts. L’alinéa 6 de cet article prévoit : La déclaration d’intérêts « est rendue publique. Elle est actualisée, à l’initiative de l’intéressé […]. »
Par conséquent, l’intéressée à laquelle je pense tout particulièrement devra-t-elle déclarer elle-même le lien d’intérêts qui existait depuis cinq ans avec au moins trois industries pharmaceutiques ?
Ma question est très claire : une fois le projet de loi voté, si vous-même ou quelqu’un de votre entourage a eu un lien d’intérêts dans les cinq années précédentes…
M. Yves Bur. Il faut être clair !
M. Jean Mallot. Écoutez bien, monsieur Bur !
Mme Catherine Lemorton. Ma question est claire, il ne s’agit pas de nommer des gens, mais si, autour du ministre, quelqu’un a eu des liens d’intérêts avec l’industrie pharmaceutique il y a trois ou quatre ans, dès lors que ce projet de loi sera voté, et si cet amendement est accepté, les personnes concernées déclareront-elles les liens d’intérêts qu’elles ont tissés dans les cinq dernières années, et si tel n’était pas le cas, monsieur le ministre, interviendriez-vous ?
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Arnaud Robinet, rapporteur. Autant l’amendement de Mme Fraysse proposant un délai de dix ans paraissait inconcevable car nous aurions alors des experts totalement déconnectés de la situation, autant le délai de cinq ans nous semble convenable. Avis favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Xavier Bertrand, ministre. Avis favorable à l’amendement.
Sur la question de Mme Lemorton, c’est le projet de loi Sauvé qui s’appliquerait dans le cas que vous avez visé. Et avant même que le projet de loi Sauvé ne s’applique, les déclarations en question sont dans le coffre du ministère, et au secrétariat général du Gouvernement.
Mme Catherine Lemorton. Donc elles ne seront pas rendues publiques ?
M. Xavier Bertrand, ministre. Tout comme pour les conjoints.
M. le président. La parole est à M. Jean Mallot.
M. Jean Mallot. Je souhaite faire une observation de méthode. Le ministre nous a parlé du « projet de loi Sauvé » à plusieurs reprises. Je suppose qu’il fait référence au projet de loi relatif à la déontologie et à la prévention des conflits d'intérêts dans la vie publique, déposé par le Gouvernement le 27 juillet 2011. Mais ce n’est qu’un projet de loi. Il sera peut-être discuté un jour, si le Gouvernement veut bien l’inscrire à l’ordre du jour de notre assemblée.
Qui nous dit ce que sera le contenu de ce texte après le débat au Parlement ? On ne peut pas nous opposer, au cours des débats visant à élaborer la loi, un projet de loi virtuel !
Par ailleurs, M. le ministre parle du « projet de loi Sauvé », mais il s’agit en fait du projet de loi déposé par le Gouvernement, sur la base notamment des travaux du rapport Sauvé. Nous avons vu au cours de l’échange précédent que ce projet s’est parfois largement écarté des préconisations du rapport Sauvé. Le pauvre M. Sauvé serait certainement ennuyé de se voir pris en otage par les uns et les autres, alors qu’il a fait un rapport très intéressant, dont le Gouvernement a tiré un projet de loi mais qui n’est pas encore débattu au Parlement.
Il y a donc un problème de méthode, et je pense que les arguments fondés sur un projet de loi non discuté sont des arguments faibles.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Xavier Bertrand, ministre. Monsieur Mallot, ce n’est pas moi qui ai évoqué ce texte !
Ne boudez pas votre plaisir : vous déposez un amendement auquel je donne un avis favorable.
Maintenant, sur un registre différent, je suis obligé de renvoyer à un texte qui n’est pas présenté par mon ministère, mais l’avantage est que je peux librement parler de la situation puisque je l’ai anticipée en appliquant pour moi-même et les membres de mon cabinet des dispositions plus drastiques encore que celles qui sont dans le texte dont vous parlez.
M. le président. La parole est à Mme Catherine Lemorton.
Mme Catherine Lemorton. J’en reviens à la question de l’initiative de l’intéressé. S’il y a changement ou évolution des liens d’intérêts, c’est à initiative de l’intéressé qu’il y a une actualisation. Qui va s’assurer que cela est bien fait ?
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Xavier Bertrand, ministre. Je ne suis pas garde des sceaux – on me prête beaucoup d’ambitions, mais je ne me connaissais pas celle-là.
Dans le texte Sauvé, je crois que c’est le secrétariat général du Gouvernement qui fait office de comité de déontologie, mais je n’en suis pas sûr. Pour les membres du Gouvernement, je ne sais pas quel est le rôle exact du SGG. En attendant, je lui ai transmis. Pour le reste, si vous le voulez, je vous dirai ce qu’il y a exactement dans le texte après avoir consulté le garde des sceaux.
M. le président. Mes chers collègues, il ne me semble pas utile d’aborder des questions qui ne relèvent pas du droit positif.
(L'amendement n° 203 est adopté.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 136 et 204.
La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, pour soutenir l’amendement n° 136.
Mme Jacqueline Fraysse. Nous souhaitons ajouter les groupes de travail à l’énumération des instances dont les travaux devront être rendus publics, afin que l’intégralité de la chaîne décisionnelle réponde à l’objectif de transparence que le Gouvernement affiche.
Nous savons que beaucoup de présidents des groupes de travail chargés d’élaborer les guides de bonne pratique risquent des conflits d’intérêts. C’est pour cela que nous pensons que notre amendement est nécessaire.
Cette mesure permettra au public de suivre, d’un bout à l’autre, le processus délibératif ou décisionnel sur l’ensemble des sujets abordés par l’Agence. Cela nous paraît une mesure raisonnable et utile.
M. le président. La parole est à Mme Catherine Lemorton, pour défendre l’amendement n° 204.
Mme Catherine Lemorton. Je suis d’accord avec Mme Fraysse. Les groupes de travail, s’ils ne sont pas inclus dans la loi, risquent de devenir le cheval de Troie des conflits d’intérêts. Alors que les autres instances ne subiraient pas de conflits d’intérêts puisque tout aurait été réglé auparavant.
Il est important, pour la transparence des débats, voulue par tous les membres de notre assemblée, d’intégrer les groupes de travail.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Arnaud Robinet, rapporteur. Avis défavorable.
Autant je suis favorable à étendre aux membres des groupes de travail l’obligation de la déclaration d’intérêts, autant je pense qu’il n’est pas nécessaire et opportun de rendre publique leurs réunions.
Ces groupes de travail sont par définition des lieux d’échanges parfois informels ; rendre leurs travaux publics aurait pour effet de limiter la liberté de parole.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Xavier Bertrand, ministre. Je comprends l’idée et je n’ai pas envie que ces groupes de travail constituent un interstice ou un cheval de Troie.
Il est dommage que je ne puisse laisser la parole à Dominique Maraninchi, il vous expliquerait pourquoi il n’est pas possible de donner un avis favorable à votre proposition. C’est très lourd et, de plus, les travaux préparatoires ne fondent pas une décision administrative.
En revanche, nous pourrions, après en avoir discuté, proposer que le compte rendu exhaustif sur lequel la commission se fondera fasse l’objet d’une publication. Il n’est pas possible de procéder à une transposition à l’identique des modalités de fonctionnement des commissions, notamment en ce qui concerne les enregistrements vidéo et autres.
Ce n’est pas tout à fait la même chose que pour les commissions, mais je pense que le texte va totalement dans le sens que vous souhaitez.
M. le président. La parole est à M. Gérard Bapt.
M. Gérard Bapt. Monsieur le ministre, en ce qui concerne la publicité, il serait très lourd, c’est vrai, que tous les groupes de travail – M. le directeur de l’AFSSAPS me l’a expliqué – soient soumis à des enregistrements vidéo, comme les commissions de décision.
Néanmoins, il faut que ces groupes de travail soient transparents, que les débats contradictoires propres à toute démarche d’expertise soient rapportés, que l’on sache qui a pris telle position, qui a voté pour ou contre. Je me rappelle trop les échanges initiaux avec le précédent directeur général de l’AFSSAPS, où les comptes rendus montraient une démarche consensuelle. On ne savait pas qui avait émis un vote positif ou négatif, on connaissait simplement le nombre d’abstentions et le nombre de votes négatifs. Dans un groupe de travail, lorsque le sujet est très pointu et technique, peu de membres de la commission peuvent parvenir au niveau de connaissances techniques suffisant pour prendre une position tout à fait éclairée, si le sujet est très scientifique. Il est donc très important que l’éclairage donné à la commission par le groupe de travail soit, à ce niveau aussi, totalement transparent.
M. le président. La parole est à Mme Catherine Lemorton.
Mme Catherine Lemorton. Je pense que l’on peut établir un parallèle avec les travaux de notre assemblée. Si les travaux de nos commissions n’étaient pas rendus publics, personne ne saurait ce qui s’y passe, alors que nous travaillons maintenant sur les textes issus de la commission.
M. Bernard Debré. Mais ce sont les mêmes qui siègent en commission et en séance publique !
M. le président. La parole est à M. Yves Bur.
M. Yves Bur. Il faut raison garder dans ce débat. Nous sommes en train d’instaurer un climat de suspicion partout.
Il y a de multiples groupes de travail dans toutes les organisations. Sont-ils pour autant normatifs ? Non, ils n’ont pas de capacité de décision. Si l’on cible la transparence par les enregistrements vidéo, une liste de commissions, de conseils, d’instances doit être précisée par la loi.
Que signifient les mots « groupe de travail » au niveau législatif ? Rien du tout ! Cessons de jeter la suspicion sur tout. Comme M. le ministre l’a dit, prenons en compte les procès-verbaux des groupes de travail, afin que les commissions puissent décider en toute transparence.
Madame Lemorton, vous avez cité la commission des affaires sociales. Elle se réunit en toute transparence, mais si toutes les réunions de travail qui préparent la commission devaient être filmées, la vie dans notre assemblée deviendrait impossible.
Cessons de penser que le mal est partout, jusque dans le détail. L’effort de transparence imposé par ce texte me semble déjà une grande avancée et se rapproche de ce qui se fait dans un certain nombre de pays. Vous avez proposé de limiter les liens d’intérêt à cinq ans. C’est ce qui se fait en Allemagne, et je trouve que c’est bien.
M. le président. La parole est à Mme Jacqueline Fraysse.
Mme Jacqueline Fraysse. Je regrette le contenu de nos échanges. Il n’est pas question, monsieur Bur, de voir le mal partout, mais de constater que des choses graves se sont produites dans notre pays, car notre législation et notre réglementation n’étaient pas suffisamment encadrées et précises.
Ou les groupes de travail ne servent à rien ; dans ce cas-là, supprimons-les. Ou ce sont des lieux de travail, comme leur nom l’indique – je pense que c’est le cas –, et je ne vois donc pas pourquoi le contenu de leurs travaux ne pourrait pas être accessible aux citoyens de notre pays.
Je suis surprise, monsieur le ministre, que vous puissiez dire que cela gênerait les échanges. Je pense plutôt que cela les responsabiliserait. Pourquoi quelqu’un qui a une opinion honnête et scientifique à donner sur un sujet ne pourrait pas le faire parce qu’elle sera rendue publique ? Il y a là quelque chose qui ne va pas, et vous cultivez effectivement la suspicion, alors que les personnes qui participent à ces groupes de travail devraient, je crois, pouvoir expliquer à chacun, sans retenue, pourquoi elles ont pris telle décision.
Je ne comprends pas ces réticences.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Arnaud Robinet, rapporteur. Je suis étonné que l’on passe plus de dix minutes sur ce sujet. Je crains que nous ne soyons dans l’excessif et que nous n’ayons affaire à des ayatollahs de la transparence : il faudrait laver plus blanc que blanc !
Si l’on reprend la comparaison évoquée par notre collègue Yves Bur de la commission des affaires sociales, nos auditions en commission sont publiques ou peuvent être filmées.
Ce qui est important, ce n’est pas ce qui se dit au sein du groupe de travail, mais la décision prise par la commission. Celle-ci doit être transparente. Je crois qu’il ne faut pas alourdir les choses, ce serait totalement contreproductif. L’objectif de l’article 1er, c’est la transparence des liens d’intérêts. Les travaux de la commission seront rendus publics avec l’objectif que ses décisions soient totalement transparentes.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Xavier Bertrand, ministre. A quoi sert une publication intégrale ? À donner exactement les mêmes garanties que pour le travail des commissions. Mais ce n’est pas la même chose. Les réunions des commissions doivent être filmées pour nombre d’entre elles ; les auditions du rapporteur ne sont pas décisionnaires, mais aident à la prise de décision. Or, dans le rapport, figure le compte rendu, exhaustif ou non, de ce qui a été dit lors de l’audition par le rapporteur.
Pour un colloque organisé par les parlementaires, sur les retraites par exemple, avant que le texte ne vienne en débat, doit-on faire exactement la même chose ? Je ne le crois pas. De plus, à l’intérieur des groupes de travail, cela fonctionne par consensus. En outre, il a été décidé que les membres des commissions ne feraient plus partie des groupes de travail.
Il faut savoir que les groupes de travail ne fonctionnent pas par avis contradictoire, mais, je le répète, par consensus. Vous voulez avoir le compte rendu ; c’est normal . Le fait qu’il soit à disposition en même temps que tous les documents qui seront remis à la commission, c’est tout aussi normal. Nous allons mettre ce principe en œuvre, Je veux bien une publication intégrale, mais j’ai appris qu’il n’y a pas pire que de mettre la barre très haut pour que rien ne se fasse.
Lors des débats que nous avons eus à l’issue du premier rapport de l’IGAS, j’ai appris que l’AFSSAPS en faisait trop, prenait trop de décisions, mettait trop de choses en œuvre. On va lui donner un budget supplémentaire, mais il faut aussi la recentrer sur ce qui est vraiment prioritaire. Je préfère que l’on définisse des priorités dont on s’occupe très bien – et il faudra rendre des comptes – plutôt que de dire que l’on veut le même niveau pour tout, alors qu’il ne s’agit pas du même degré d’importance.
La synthèse entre les positions exprimées me conduit à dire non à cet amendement mais oui à la mise à disposition d’un compte rendu intégral des travaux des groupes de travail.
(Les amendements identiques nos 136 et 204 ne sont pas adoptés.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour soutenir l’amendement n° 165.
M. Arnaud Robinet, rapporteur. L’amendement vise à préciser le champ d’application de l’article 1er, qui prévoit la possibilité de publier en ligne les réunions du conseil d’administration, du conseil scientifique, qui a un rôle d’appui auprès de la direction générale, et des instances représentatives du personnel…
M. Xavier Bertrand, ministre. Favorable !
M. Roland Muzeau. Le rapporteur n’avait même pas terminé son exposé !
(L'amendement n° 165 est adopté.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l’amendement n° 166.
M. Arnaud Robinet, rapporteur. Amendement de coordination.
(L'amendement n° 166, accepté par le Gouvernement, est adopté.)
M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 137.
La parole est à M. Roland Muzeau.
M. Roland Muzeau. Nous sommes bien entendu favorables à la publication des séances des commissions, groupes de travail, conseils et autres organismes sur le site internet du ministère de la santé et des autorités et organismes visés à l’alinéa 10.
De notre point de vue, cette information sera satisfaisante à condition que l’intégralité des débats soit publiée. Or le texte exclut les informations présentant un caractère de confidentialité commerciale ou industrielle ou relevant du secret médical. Le secret commercial, outre qu’il est protégé par des brevets, ne saurait primer sur l’exigence de transparence des décisions des instances concernant un médicament. Quant au secret médical, il sera, le cas échéant, aisé pour le personnel des agences de rendre anonymes les données publiées.
C’est pourquoi nous proposons de supprimer les mots ; « à l’exclusion de toute information présentant un caractère de confidentialité commerciale ou relevant du secret médical, ».
M. Bernard Debré. Mais non !
M. Jean-Pierre Door. Ce n’est pas possible !
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Arnaud Robinet, rapporteur. Avis défavorable. Certes, la publication des travaux des commissions et des différentes instances doit être la règle, mais supprimer toute référence au respect du secret médical et commercial semble très hasardeux.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Xavier Bertrand, ministre. Je ne suis pas favorable à cet amendement. Il est inconcevable de mettre en ligne des données relevant du secret médical, des données relatives au corps humain. Ce qui tient encore dans ce pays, c’est le secret médical. Je ne parle pas d’autres secrets…
M. Jean Mallot. N’ouvrez pas la boîte : Hortefeux téléphonerait !
M. Xavier Bertrand, ministre. Je ne suis donc pas certain qu’il faille aller dans ce sens.
En revanche, pour ce qui concerne les membres du conseil – parlementaires, associations de patients, qui seront membres de l’Agence nationale de sécurité du médicament – cela me pose moins de problèmes. Il est envisageable qu’ils aient un droit de regard, ce qui ne signifie pas un droit de divulgation.
Quant au secret commercial, je vous soumettrai quelques propositions pour le CEPS.
En tout état de cause, il me paraît inenvisageable de mettre en ligne des informations présentant un caractère de confidentialité commerciale ou relevant du secret médical. Cela ne répond pas à une volonté de tout cacher, mais il faut respecter les principes essentiels.
M. Jean-Pierre Door. Très bien !
M. Xavier Bertrand, ministre. Si nous commençons à jouer avec le secret médical, plus rien ne tiendra !
(L'amendement n° 137 n'est pas adopté.)
M. le président. La parole est à Mme Catherine Lemorton, pour soutenir l’amendement n° 205.
Mme Catherine Lemorton. Il est bien évident que dans cet amendement nous ne touchons pas au secret médical.
M. Guy Lefrand. Très bien !
Mme Catherine Lemorton. En revanche, nous n’avons pas la même position pour ce qui concerne la confidentialité commerciale en matière de santé publique.
Je vais répéter une phrase qui vous est chère, monsieur le ministre : « Le doute doit bénéficier au patient. » Nous sommes d’ailleurs tous d’accord à cet égard.
S’agissant de la définition du brevet sur les médicaments, je vous renvoie à celle que l’on trouve sur le site du LEEM, le syndicat professionnel de l’industrie pharmaceutique ; vous ne pourrez donc pas me reprocher d’être partiale. « Le brevet est publié, cette obligation est capitale. Le brevet rend publique une innovation dont les données pourraient rester confidentielles et secrètes. Breveter une innovation, c’est porter à la connaissance de tous des informations décrivant une nouveauté. »
Exclure de la publicité, comme vous le proposez, toute information présentant un caractère de confidentialité commerciale ne va pas dans le sens de l’intérêt du patient. Cela ne peut qu’être très exceptionnel eu égard à la définition même des entreprises du médicament.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Arnaud Robinet, rapporteur. Avis défavorable.
En revanche, il me semblerait tout à fait utile de prévoir un recours en cas de refus de mise à disposition du public, qui pourrait être relayé par un médiateur dans chaque agence.
M. Jean Mallot. Un Mediator ? (Sourires.)
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Xavier Bertrand, ministre. Nous sommes en train de dire que tout doit être publié. Soit, j’ai été le premier à défendre cette position. Mais nous ne devons pas nous tromper de priorités. Avec la publicité intégrale de tout, nous en revenons à la question des groupes de travail, et j’émettrai le même avis défavorable.
En revanche, si vous visez spécifiquement le secret commercial, madame Lemorton, j’ai en tête une idée précise sur laquelle je peux m’engager très clairement. Un an après la mise en œuvre de la loi, un rapport qui recenserait les cas de recours abusifs au secret commercial pourrait être publié – l’idée m’ayant été suggérée par Dominique Maraninchi lui-même. Au bout d’un an, l’Agence ferait connaître les différents types de recours. Le rapport étant public, la représentation nationale en aurait connaissance et pourrait se faire une opinion.
M. Bernard Debré. Très bien !
M. Xavier Bertrand, ministre. Cela permettrait de ne pas s’égarer et d’apporter une réponse précise à la question du secret commercial.
Avis défavorable à l’amendement.
M. le président. La parole est à M. Jean Mallot.
M. Jean Mallot. Une fois que nous disposerons de ce rapport au bout d’un an, la question se posera de savoir ce que l’on entend par recours abusif. À partir de quel seuil, un recours au secret commercial serait-il considéré comme abusif ? Au-delà de trois, trente, trois cents ?
(L'amendement n° 205 n'est pas adopté.)
M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 90.
La parole est à M. Jean-Luc Préel.
M. Jean-Luc Préel. Il s’agit d’un amendement de coordination, de simplification et de précision, comme vous le dites habituellement pour vos amendements, monsieur le rapporteur. (Sourires .)
Je propose de compléter l’alinéa 16 par la phrase suivante : « En cas de non-déclaration ou de fraude, le président du comité éthique transmet ces informations au procureur de la République. »
Des sanctions sont prévues en cas de fraude ou de non-déclaration. Pour l’application effective, il est nécessaire d’indiquer qui est chargé de les constater et comment les sanctions sont appliquées.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Arnaud Robinet, rapporteur. Avis défavorable. Le contrôle des déclarations sera bien sûr confié à une cellule propre à chaque instance, à chaque agence. Conformément à l’article 40 du code de procédure pénale, l’agence ou le directeur de l’agence devront prévenir le procureur en cas de manquement ou de fraude et lui transmettre tous les renseignements et procès-verbaux nécessaires.
Votre précision est donc inutile, monsieur Préel.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Xavier Bertrand, ministre. Avis défavorable. Je ne sais pas si M. Préel le sera, mais l’amendement, lui, est satisfait.
M. Jean-Luc Préel. Je suis satisfait par la réponse du ministre et je retire mon amendement. (Sourires.)
(L'amendement n° 90 est retiré.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Préel, pour soutenir l’amendement n° 89.
M. Jean-Luc Préel. Nous proposons d’insérer cet alinéa après l’alinéa 16 :
« Un décret en Conseil d’État fixe les conditions selon lesquelles une commission éthique, mise en place au sein de chaque agence, contrôle la véracité des informations délivrées dans la déclaration d’intérêts. »
Le système mis en place ne peut être légitime et son efficacité avérée que s’il existe un contrôle éthique des informations délivrées par les acteurs effectuant leur déclaration d’intérêts. Mme Lemorton a également posé cette question importante.
(L'amendement n° 89, accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.)
M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 206.
La parole est à Mme Catherine Lemorton.
Mme Catherine Lemorton. On a déjà élaboré de nombreuses chartes. Hélas, elles n’aboutissent pas à grand-chose, et surtout pas à des sanctions.
Voilà pourquoi, à la première phrase de l’alinéa 21, après les mots : « Une charte de l’expertise sanitaire, approuvée par décret en Conseil d’État, » nous proposons d’ajouter : « après avis préalable, obligatoire et conforme de la Conférence nationale de santé, du Haut conseil de la santé publique et de la Haute autorité de santé.
Si nous faisons une telle proposition, c’est que nous avons de mauvais souvenirs de chartes récemment signées avec de grands groupes. Ainsi celle de la visite médicale, monsieur le ministre, qui n’eut que peu d’effet sur la transparence de cette pratique. La responsabilité n’en incombe d’ailleurs pas aux visiteurs médicaux, qui ne faisaient que ce pour quoi ils étaient payés.
Lors de la discussion de la loi HPST, nous avons eu droit à la charte de l’agro-alimentaire. Sur le texte même de la loi, beaucoup d’amendements avaient été présentés par nos collègues de la majorité, notamment Mme Valérie Boyer, tous préoccupés par les problèmes de santé publique, l’obésité en particulier. Nous étions prêts à les voter. Mais, par un coup de baguette magique, on nous a subitement proposé une charte où le lobby de l’agro-alimentaire prenait l’engagement d’œuvrer en faveur de bonnes pratiques alimentaires, notamment par le biais de messages publicitaires diffusés entre les dessins animés du matin, mettant en garde contre les produits trop gras, trop sucrés, trop salés. Au passage, je fais remarquer que ces messages s’adressent à des enfants de moins de six ans qui ne savent pas lire !
Nous savons donc ce que donnent les chartes, monsieur le ministre. D’où cet amendement dont le but est d’encadrer la charte de l’expertise sanitaire et qui a toute son importance dans la mesure où l’on veut sécuriser la politique du médicament.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Arnaud Robinet, rapporteur. Avis défavorable. Docteur Lemorton, votre amendement est trop restrictif, car il ne vise pas l’ensemble des établissements.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Xavier Bertrand, ministre. Avis défavorable également. Votre liste, madame Lemorton, est en effet trop restrictive. Pourquoi n’y avez-vous pas intégré l’Agence de sécurité du médicament par exemple ? Pourquoi seulement trois instances ? On se prive ainsi d’une concertation plus large.
De plus, la charte doit être approuvée par décret en Conseil d’État, ce qui lui confère une force juridique supplémentaire.
M. le président. La parole est à Mme Catherine Lemorton.
Mme Catherine Lemorton. Pour suivre votre raisonnement, monsieur le ministre, je rappellerai qu’aucun avis n’a été requis pour la charte de la visite médicale et la charte de l’agro-alimentaire. Et nous voyons ce que cela a donné : prenez deux heures pour regarder les messages diffusés par l’industrie agro-alimentaire entre deux dessins animés le matin à la télévision, vous comprendrez très vite !
M. le président. La parole est à M. Gérard Bapt.
M. Gérard Bapt. Monsieur le ministre, il serait opportun que vous nous précisiez le contenu de cette charte. Comme vient de l’indiquer Mme Lemorton, il y a charte et charte.
S’agira-t-il d’un code de déontologie et d’expertise sanitaire ? Ce code s’étendra-t-il à l’expertise en matière de santé environnementale, dont les agences relèvent de tutelles différentes même si elles dépendent également du ministère de la santé ?
Après avoir été alerté des problèmes de conflits d’intérêts dans la gestion de la grippe A, j’ai organisé une réunion sur le thème de l’expertise publique. À l’époque, la HAS avait passé deux ou trois années à élaborer une charte de déontologie qui se serait appliquée à l’ensemble des agences mais aussi à l’ensemble des organismes de recherche publics. La proposition que vous faites dans le projet de loi n’est-elle une proposition de repli puisqu’elle ne s’appliquerait qu’à la chaîne du médicament ?
Par ailleurs, les comités d’éthique que vous voulez constituer au sein de chaque agence auront-ils obligation de se référer à cette charte pour l’appliquer au fonctionnement de leur agence ?
Mme Jacqueline Fraysse. Bonne question !
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Xavier Bertrand, ministre. Il s’agit bien d’un code. C’est vrai qu’il couvre tout le domaine sanitaire alors que de telles règles ne relèvent pas de ma seule compétence et qu’il faut avoir la même démarche dans les autres domaines.
Prenez l’aspartame, sujet qui vous tient à cœur et qui me tient également à cœur. Les études qui ont été menées font-elles toute la transparence sur les liens d’intérêts ? Il serait intéressant d’y regarder de plus près.
Si on veut qu’aucun problème ne se pose dans la lecture des différentes études, les mêmes règles doivent s’appliquer à tout le domaine de l’expertise. Seulement, dans le présent projet de loi, il me revenait de traiter de ce qui relève du seul champ sanitaire, et je l’assume.
(L'amendement n° 206 n'est pas adopté.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements, nos 207 et 138, pouvant être soumis à une discussion commune.
La parole est à M. Jean Mallot, pour soutenir l’amendement n° 207.
M. Jean Mallot. L’alinéa 21 de l’article 1er annonce la mise en place de la fameuse charte de l’expertise sanitaire. Nous avons eu tout à l’heure un échange avec M. le ministre non pas sur le contenu de cette charte mais sur les notions de liens d’intérêts et de conflits d’intérêts ; il a indiqué que le projet de loi ne reprenait pas les définitions établies par le rapport Sauvé. D’après lui, en effet, ce n’est pas à la loi de préciser de telles notions mais à un décret, plus exactement à une charte approuvée par décret en Conseil d’État, démarche bien curieuse.
Il y a là une contradiction difficile à résoudre : le Parlement ne serait pas capable de définir les notions de liens d’intérêts et de conflits d’intérêts et il reviendrait à des documents tels que des chartes, approuvées par décret, de les établir. Tout cela me paraît regrettable.
S’agissant de la charte elle-même, monsieur le ministre, je vous ai demandé tout à l’heure si vous aviez une première mouture. Je me doute bien que vous n’avez pas rédigé ce projet de loi sans vous inquiéter du contenu de la charte.
Notre amendement propose de modifier la fin de l’alinéa 21. Autant nous considérons que la charte, si l’on entre dans votre logique, peut préciser les modalités de choix des experts, la notion de lien d’intérêts, les cas de conflits d’intérêts, autant nous ne pouvons accepter qu’elle prévoie les « modalités de gestion d’éventuels conflits ». Elle n’a pas pour objet de gérer ce type de situation mais d’y mettre fin et de les sanctionner.
De même, nous considérons qu’il n’est pas normal de tenir compte de cas exceptionnels qui permettraient de rattraper par les cheveux des travaux réalisés par des experts présentant des conflits d’intérêts. Aussi proposons-nous d’y supprimer toute référence et de rédiger simplement ainsi la fin de l’alinéa 21 : « et les modalités de sanction d’éventuels conflits ».
M. le président. La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, pour soutenir l’amendement n° 138.
Mme Jacqueline Fraysse. C’est une mesure de coordination avec notre amendement de principe interdisant tout lien d’intérêts en amont.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur ces deux amendements ?
M. Arnaud Robinet, rapporteur. Avis défavorable. Ces amendements sont satisfaits. Ils préconisent que la charte fixe des sanctions ; or celles-ci sont déjà prévues à l’article 3 qui établit une amende de 30 000 euros en cas de défaut d’actualisation ou de transmission des déclarations d’intérêts. De plus, cette amende peut s’accompagner d’une interdiction d’exercer.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Xavier Bertrand, ministre. Avis défavorable. Vous entendez supprimer la mention des cas exceptionnels de recours à des experts présentant des conflits d’interêts, mais comment faire lorsqu’il s’agit de maladies rares ? Certes, vous pourrez toujours recourir à des experts indépendants ; reste que les experts qui auront la vision la plus aiguë seront ceux qui exercent au cœur du traitement de ces pathologies et, s’ils mènent des travaux de recherche, il y aura forcément un lien d’intérêts. Il faut donc maintenir la possibilité de dérogation pour ces cas exceptionnels. Vous n’êtes pas obligé de me croire, il vous suffit de vous adresser aux associations de patients : toutes vous diront la même chose.
Comme le soulignait M. Dhuicq, nous sommes obligés de tout dire, mais il faut faire attention. Ce n’est pas qu’on n’ose pas aller jusqu’au bout, c’est que nous estimons qu’il ne faut pas aller jusqu’au bout parce que nous risquons sinon de faire plutôt pire que mieux.
M. le président. La parole est à M. Jean Mallot.
M. Jean Mallot. L’argument de M. le ministre sur les cas exceptionnels et les maladies rares a une certaine portée, j’en conviens. Il nous faudrait modifier l’amendement. Mais comme vous avez voulu recourir à la procédure accélérée, il n’y aura qu’une lecture dans chaque chambre. S’agissant d’un projet de loi aussi technique qu’intéressant, une navette normale nous aurait permis de légiférer dans de meilleures conditions et de produire des textes plus précis.
Nous allons maintenant nous en remettre au Sénat. Bonne chance, monsieur le ministre, compte tenu de sa nouvelle composition ! Après tout, c’est votre choix d’avoir retenu cette procédure.
Quant à M. le rapporteur, j’aimerais souligner les contradictions de son argumentaire, qui relève d’une incohérence structurelle. Il estime que cet amendement est satisfait par l’article 3, lequel prévoit des sanctions, notamment des amendes allant jusqu’à 45 000 euros. Mais ces amendes, précises, viennent sanctionner des conflits d’intérêts dont on n’a jamais défini le contenu et dont la définition est renvoyée à une charte qui sera approuvée le moment venu par décret. C’est extraordinaire ! Que je sache, on ne peut fixer la sanction que lorsqu’on a défini ce à quoi elle s’applique !
M. Bernard Debré. Et la charte ?
M. Jean Mallot. Selon que la charte aura une conception large ou au contraire très restrictive des conflits d’intérêts, la batterie de sanctions ne sera pas de même nature.
On renvoie la définition du motif de la sanction à une future charte dont on ne sait pas le degré d’extension et on prévoit dans la loi la nature et le quantum de la sanction. Tout cela paraît bien contradictoire.
(L'amendement n° 207 n'est pas adopté.)
(L'amendement n° 138 n’est pas adopté.)
M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 145.
La parole est à Mme Jacqueline Fraysse.
Mme Jacqueline Fraysse. Il s’agit d’un amendement de coordination avec notre amendement posant le principe d’une interdiction totale de liens d’intérêts. Nous entendons le voir appliquer au domaine de l’expertise.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Arnaud Robinet, rapporteur. Défavorable. Je n’ai pas changé d’avis sur la question.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Xavier Bertrand, ministre. Par cohérence également : défavorable.
(L'amendement n° 145 n'est pas adopté.)
M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 164.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Arnaud Robinet, rapporteur. Il s’agit d’un amendement rédactionnel.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Xavier Bertrand, ministre. Favorable.
(L'amendement n° 164 est adopté.)
(L'article 1er, amendé, est adopté.)
M. le président. La parole est à M. Jean Mallot, inscrit sur l’article.
M. Jean Mallot. L’article 2 porte sur les conventions relatives aux avantages consentis par les entreprises. Il est prévu de rendre publique leur existence mais sans faire apparaître leur contenu. Certes, ces conventions sont une nécessité, mais comment se prononcer sur leur bien-fondé ou leur opportunité si l’on n’en connaît pas la teneur ?
Il y a deux points sur lesquels j’aimerais vous interroger plus précisément, monsieur le ministre.
Premièrement, il est prévu un seuil au-delà duquel l’avantage procuré par l’entreprise est considéré comme devant être déclaré. Nous souhaitons que la nature et le niveau de ce seuil soient précisés car vous n’avez pas été très clair, me semble-t-il, dans vos explications.
Deuxièmement, qu’entendez-vous par « hospitalité indirecte » ? Nous n’avons toujours pas bien compris les uns et les autres ce que vous entendiez par là.
M. le président. La parole est à Mme Catherine Lemorton.
Mme Catherine Lemorton. L’article 1er était très important.
M. Yves Bur. Pourtant, vous ne l’avez pas voté !
Mme Catherine Lemorton. L’article 2 ne l’est pas moins. On y aborde en effet la question des règles que peuvent se fixer entre eux les professionnels de santé et les industriels du médicament ou des dispositifs médicaux. Cela renvoie à l’éthique de chacun, mais aussi aux mille façons de contourner la loi.
Que met-on derrière les mots ? Quand l’article 2 mentionne les « avantages en nature ou en espèces », je ne sais pas très bien à quoi cela fait référence. De même, Jean Mallot évoquait l’alinéa 19, qui fait mention d’une hospitalité « indirecte ». On comprend bien ce que veut dire l’hospitalité directe : l’hébergement lors de rencontres ou d’un forum, le voyage – en train, en avion –, le remboursement des frais d’essence, les nuits d’hôtel, les repas… Vous voyez, je vais jusqu’au bout.
Mais qu’est-ce que l’hospitalité indirecte ? Aucune des personnes que nous avons auditionnées, y compris les représentants de l’Ordre des médecins, ne savait de quoi il s’agissait. Le LEEM lui-même, l’organisation professionnelle des entreprises du médicament, ne sait pas de quoi il retourne et estime que cette mention n’est sans doute pas nécessaire.
Comment, d’autre part, estimer le « niveau raisonnable » des avantages en nature ou en espèces ? Ce terme est-il d’ailleurs très juridique ? Il est bien difficile de dire ce qui est raisonnable. Une chambre d’hôtel à 50 euros, est-ce suffisant ? Une suite à 2 500 euros, est-ce raisonnable ? (Rires et exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Plusieurs députés du groupe UMP. Demandez donc à DSK !
Mme Catherine Lemorton. Nous, nous trouvons que ce n’est pas raisonnable. (Sourires.)
Quel est le fond du problème ? Il y a, on le voit bien, des médecins qui acceptent ou refusent les mêmes avantages, suivant leur éthique personnelle. Et selon ce qu’ils veulent bien entendre dans ces colloques, forums, déjeuners, petits-déjeuners, week-ends, etc., on peut constater la pénétration plus ou moins rapide des innovations thérapeutiques. (Rires.)
Ne riez pas, madame Lebranchu ! Je vais désormais essayer de m’exprimer en faisant très attention à chaque mot que j’utilise. (Sourires.) Disons que, selon leur qualité d’écoute, on mesure leur perméabilité à ces innovations...
A l’article 2, en tout cas, puisque le moment est venu de faire le ménage et d’améliorer la transparence, il faudrait peut-être, s’agissant de ces avantages, préciser certains mots et en éliminer d’autres.
M. le président. La parole est à M. Roland Muzeau.
M. Roland Muzeau. L’article 2 prévoit la publicité des avantages en nature ou en espèces que les entreprises produisant ou commercialisant des produits de santé procurent, directement ou indirectement, aux professionnels de santé, aux associations de professionnels de santé, aux étudiants, aux associations de patients, aux établissements de santé privés et publics, aux fondations, sociétés ou organismes de conseil, et aux organes de presse spécialisés.
Cette obligation s’appliquera au-delà d’un certain seuil seulement. Celui-ci devrait être fixé par décret. Selon le rapport de la commission des affaires sociales, « dans un souci d’efficacité et au moins dans un premier temps, il serait préférable d’opter pour des seuils de déclaration supérieurs à ceux, très faibles, retenus par le législateur américain. » Oralement, notre rapporteur a évoqué le seuil de 150 euros, ce qui représente tout de même quinze fois le seuil américain.
Pour notre part, nous considérons qu’il n’y a pas de petits avantages : c’est pourquoi notre amendement n° 140 propose de supprimer ce seuil en prévoyant la déclaration des intérêts matériels en nature ou en espèces quel que soit leur montant. Notre amendement n° 141 vise quant à lui à étendre l’obligation de publication des avantages consentis par l’industrie du médicament aux responsables associatifs, aux responsables politiques, aux membres des cabinets ministériels, aux économistes de la santé, aux sociétés savantes et aux organisations professionnelles, conformément à la proposition n° 6 du rapport sénatorial de la mission d’information sur le médicament.
Enfin, dans la mesure où le texte est pour le moins laconique sur la structure chargée de contrôler les déclarations des entreprises – la création d’une structure ad hoc ayant été écartée faute de moyens disponibles –, notre amendement n° 142, en précisant que le décret devra déterminer « l'autorité chargée de tenir un registre public de ces conventions et la forme du registre », appelle de la part du ministre un début de réponse.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Xavier Bertrand, ministre. Le Sunshine Act américain fixe le seuil à dix dollars. Pour ma part, j’ai toujours dit qu’il fallait le fixer au premier euro. Mais on m’a dit : attention, avec un seuil au premier euro, un médecin devra déclarer un café ou un stylo-bille qu’on lui a offert !
M. Roland Muzeau. Vous exagérez !
M. Xavier Bertrand, ministre. Ne faisons pas n’importe quoi ! Je n’ai pas envie qu’un médecin soit en infraction parce qu’on lui a payé un café.
Mme Jacqueline Fraysse et M. Roland Muzeau. Soyons sérieux !
M. Guy Lefrand. Au prix du café à Paris… (Sourires.)
M. Xavier Bertrand, ministre. Le problème est simple. J’estime toujours qu’une déclaration au premier euro serait préférable, mais on peut aussi transposer le seuil américain de dix dollars à dix euros : dites-moi ce que vous trouvez juste ! En tout cas, il ne faut pas que certains aient des ennuis parce qu’ils n’auraient pas déclaré un gadget.
Et puisque vous me dites qu’il n’y aura pas d’exagération, mon idée demeure de fixer le seuil au premier euro, parce que j’aime avoir de la suite dans les idées.
Quant à l’hospitalité, monsieur Mallot, cela fait référence aux congrès – appelons un chat un chat.
Mme Catherine Lemorton et M. Jean Mallot. Mais l’hospitalité indirecte, qu’est-ce que c’est ?
M. Xavier Bertrand, ministre. Pour moi, cela fait référence aux congrès, au sens large. Mais si vous voulez déposer un amendement rédactionnel, faites-le.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Door.
M. Jean-Pierre Door. J’ai l’impression que ce texte est assez clair ; on y lit bien la lutte contre les conflits d’intérêts.
Depuis une demi-heure, nous tournons en rond. J’aimerais poser la question à nos collègues socialistes : connaissez-vous la loi anti-cadeaux de Claude Evin ? Non, je ne crois pas. Vous devriez la relire, car elle remplit bien son rôle. Or, en ce moment, nous sommes en train d’accumuler, d’accumuler ; nous serons encore là dans quinze jours ! (Exclamations sur les bancs du groupe GDR.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Xavier Bertrand, ministre. Je voudrais être plus précis que je ne l’ai été : les termes d’hospitalité directe ou indirecte s’expliquent par le fait que le médecin peut être logé directement, mais aussi en tant qu’adhérent d’une association ou d’une société savante.
Suspension et reprise de la séance
M. le président. La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à vingt-trois heures cinquante-cinq, est reprise le mercredi 28 septembre à zéro heure cinq.)
M. le président. La séance est reprise.
M. le président. La parole est à M. Jean Mallot, pour un rappel au règlement.
M. Jean Mallot. Fondé, monsieur le président, sur l’article 58, alinéa 1, relatif au déroulement de nos travaux –un article que nous connaissons bien.
Je m’étonne en effet de l’intervention de notre collègue Jean-Pierre Door, qui, de manière quelque peu intempestive, est venu troubler le caractère tout à fait pacifique des débats que nous avions entre nous, et à l’occasion desquels nous avons pu clarifier certaines notions qui n’étaient manifestement pas évidentes. C’est ainsi que l’échange avec le ministre a permis de mieux comprendre ce qu’il entendait par hospitalité « indirecte ». Quant à la loi anti-cadeaux de Claude Évin, je ne vois pas très bien en quoi elle trancherait la question de savoir à partir de quel seuil devraient être rendus publics les avantages en nature ou en espèces procurés par les entreprises pharmaceutiques.
Cette remarque de notre collègue était d’autant plus malvenue qu’elle venait d’un député qui n’a pas hésité à voter, dans la loi de finances pour 2011, la création d’un droit de 30 euros dont le paiement conditionne l’accès à l’aide médicale d’État pour les étrangers en situation irrégulière, alors même qu’ils ont des revenus inférieurs à un certain montant.
M. Guy Lefrand. Quel rapport ?
M. Jean Mallot. Si l’on peut fixer dans la loi un montant de 30 euros pour l’accès à l’aide médicale d’État, on doit pouvoir se poser la question du seuil à partir duquel on doit déclarer les avantages en nature ou en espèces procurés par les entreprises.
J’accepte d’autant plus mal la leçon de M. Door que, s’il avait été précis dans ses propos, il aurait plus de crédibilité, lui qui, tout à l’heure, nous parlait d’un « filet imperméable » pour assurer la sécurité du médicament dans le pays.
M. le président. Nous en venons aux amendements à l’article 2.
La parole est à M. Roland Muzeau, pour soutenir l’amendement n° 139.
M. Roland Muzeau. Cet article prévoit que les industriels du médicament doivent rendre publiques les conventions qu’ils concluent, notamment avec les étudiants en médecine. Nous proposons de préciser que cette injonction vise également les conventions passées avec les associations et groupements représentant ces étudiants.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Arnaud Robinet, rapporteur. Favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Xavier Bertrand, ministre. Favorable.
(L’amendement n° 139 est adopté.)
M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 169 de M. Arnaud Robinet.
M. Arnaud Robinet, rapporteur. Amendement rédactionnel.
(L’amendement n° 169, accepté par le Gouvernement, est adopté.)
M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 171 de M. Arnaud Robinet.
M. Arnaud Robinet, rapporteur. Cet amendement tend à préciser que les conventions passées entre les entreprises du médicament et les éditeurs de logiciels d’aide à la prescription et à la délivrance seront rendues publiques.
(L’amendement n° 171, accepté par le Gouvernement, est adopté.)
M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 133.
La parole est à M. Guy Lefrand.
M. Guy Lefrand. Les conditions commerciales ne constituent pas des avantages, dans la mesure où elles sont consenties au regard de contreparties. Le législateur communautaire a d’ailleurs précisé qu’elles ne sont pas visées par l’interdiction générale des avantages dans le cadre de la promotion des médicaments.
Pour être plus précis, l’article L. 4221-17 du code de la santé publique, qui a étendu en 2002 aux pharmaciens les dispositions de l’article L. 4113-6 du même code, prévoit que ces dispositions sont applicables sous réserve des dispositions de l’article L. 138-9 du code de la sécurité sociale, ce dernier définissant les règles de plafonnement des remises, ristournes et avantages commerciaux et financiers assimilés de toute nature, y compris les rémunérations de services prévues à l’article L. 441-7 du code de commerce, qui peuvent être consentis par tout fournisseur de spécialités remboursables.
C’est pourquoi il convient d’exclure du champ de la déclaration des avantages les conventions se rattachant à la commercialisation des produits mentionnés à l’article L. 5311-1 du code de la santé publique, qui ne constituent pas des avantages.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Arnaud Robinet, rapporteur. À vrai dire, monsieur Lefrand, je ne comprends pas l’intention de cet amendement. Si vous voulez exclure les avantages commerciaux qui sont parfois consentis aux pharmaciens par les entreprises visées à l’article, il n’est pas nécessaire de le préciser, puisque l’article 2 ne concerne que les avantages pécuniaires et non les pratiques commerciales.
J’ajoute que la rédaction de votre amendement est particulièrement large et peu précise. Dans ces conditions, je ne peux qu’y être défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Xavier Bertrand, ministre. J’entends les questions du rapporteur mais, pour le Gouvernement, l’avis doit être défavorable parce que l’amendement est satisfait.
M. le président. La parole est à M. Guy Lefrand.
M. Guy Lefrand. Je fais confiance à M. le ministre, qui nous dit que l’amendement est satisfait. Dans ces conditions, je le retire.
(L’amendement n° 133 est retiré.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 140 et 208.
La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, pour soutenir l’amendement n° 140.
Mme Jacqueline Fraysse. L’alinéa 12 de l’article 2 prévoit que l’obligation de rendre publics les avantages procurés par les entreprises aux professionnels de santé s’applique « au-delà d’un seuil fixé par décret ». Nous considérons qu’il y a lieu de supprimer ce membre de phrase, car cette obligation doit s’appliquer à tout avantage en nature ou en espèces, et ce quel qu’en soit le montant.
M. le président. La parole est à M. Jean Mallot, pour soutenir l’amendement n° 208.
M. Jean Mallot. Cet amendement me permet de rebondir sur l’échange que nous avons eu tout à l’heure avec M. le ministre. Je crois que nous sommes en phase avec lui, mais nous ne sommes pas sûrs de l’être avec l’ensemble du Gouvernement et avec sa majorité. Nous souhaitons donc préciser les choses.
Le ministre a évoqué à plusieurs reprises le Sunshine Act. Il a indiqué qu’à ses yeux, le seuil à partir duquel les avantages en question devaient être rendus publics, c’était « au premier euro ». Ensuite, il nous a dit que, s’agissant de montants très faibles, une telle obligation pouvait causer des difficultés. Nous, nous souhaitons que les choses soient claires, et supprimer les mots : « au-delà d’un seuil fixé par décret ». Comme l’a très bien dit Mme Fraysse, tous les avantages doivent être rendus publics.
Cela étant, si M. le ministre propose un amendement précisant, par exemple, que cette obligation s’applique au-delà de dix euros, nous serons tentés de l’accepter, puisque l’esprit d’un tel amendement serait le même. Si c’est dix euros, soit. Mais nous souhaitons que cette précision figure expressément dans la loi.
M. le président. Quel est l’avis de la commission sur ces deux amendements ?
M. Arnaud Robinet, rapporteur. Je ne suis pas favorable à la disparition du seuil, comme je l’ai dit, avant la suspension. Si on prend l’exemple du Sunshine Act, le seuil est fixé à dix euros.
M. Roland Muzeau. À dix dollars !
M. Arnaud Robinet, rapporteur. À dix dollars, pardon. On n’a pas encore la parité dollar-euro.
M. Roland Muzeau. Le taux change tous les jours !
M. Yves Bur. Dans le cadre du Sunshine Act, il n’est pas obligatoire de rendre publiques les sommes inférieures à dix dollars, mais seulement à condition que le cumul de ces sommes n’excède pas 100 dollars par an.
M. Arnaud Robinet, rapporteur. En effet, comme nous l’avons dit tout à l’heure, le Sunshine Act vise également le cumul des petites sommes, s’il dépasse 100 dollars.
De plus, fixer un seuil permet de se concentrer sur les dépenses les plus importantes, et non pas sur les petits cadeaux, même si, dans certains cas, ils ont leur importance et peuvent jouer un rôle plutôt négatif.
M. Jean Mallot. Ils entretiennent l’amitié…
M. Arnaud Robinet, rapporteur. Je me fonde sur les déclarations du ministre, qui a pris en compte les réflexions des uns et des autres.
Avis défavorable, donc.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Xavier Bertrand, ministre. Défavorable également.
(Les amendements identiques nos 140 et 208 ne sont pas adoptés.)
M. le président. La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, pour soutenir l’amendement n° 141.
Mme Jacqueline Fraysse. Cet amendement vise à modifier la rédaction de l’alinéa 12 de l’article 2 concernant la publication des avantages consentis.
Nous proposons de substituer au mot : « personnes » la proposition n° 6 du rapport sénatorial de la mission d’information sur le médicament, qui nous paraît beaucoup plus précise. Il s’agit d’étendre l’obligation de publication des avantages consentis par l’industrie du médicament « aux responsables associatifs, aux responsables politiques, aux membres des cabinets ministériels, aux économistes de la santé, aux sociétés savantes et aux organisations professionnelles ».
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Arnaud Robinet, rapporteur. Avis défavorable. Les responsables d’associations ainsi que les sociétés savantes sont déjà visés par le projet de loi.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Xavier Bertrand, ministre. Cet amendement est satisfait.
(L'amendement n° 141 n'est pas adopté.)
M. le président. La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, pour soutenir l’amendement n° 142.
Mme Jacqueline Fraysse. Cet amendement de précision va dans le sens de la transparence. Il vise à compléter l’alinéa 13 en indiquant que le décret en Conseil d’État « détermine l’autorité chargée de tenir un registre public de ces conventions et la forme du registre ».
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Arnaud Robinet, rapporteur. Avis défavorable. Je ne suis pas sûr que nous soyons dans un contexte de création de nouvelles structures.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Xavier Bertrand, ministre. Même avis.
(L'amendement n° 142 n'est pas adopté.)
M. le président. La parole est à M. Yves Bur, pour soutenir l’amendement n° 58.
M. Yves Bur. Il s’agit de rendre transparentes et accessibles les informations relatives aux conflits d’intérêts ou aux liens d’intérêts, comme cela est prévu dans le Sunshine Act qui, je le rappelle, ne concerne pas véritablement l’expertise – pour laquelle la question a été réglée aux États-Unis depuis longtemps et souvent de manière automatisée – mais bien les prescripteurs, médecins généralistes, spécialistes, chirurgiens, qui doivent déclarer leurs liens d’intérêts.
Je souhaite que les entreprises de la chaîne du médicament et des produits de santé fassent les déclarations prévues par le texte, mais aussi que les professionnels de santé informent leurs patients, peut-être par voie d’affichage dans leur cabinet, de leurs éventuels liens d’intérêts avec tel ou tel laboratoire ou industriel du dispositif médical.
Voilà une information que l’on doit aux patients et qui permettrait d’assurer la transparence la plus totale, car ce sont eux les premiers concernés par ces liens d’intérêts.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Arnaud Robinet, rapporteur. Avis défavorable.
Si la proposition de M. Bur est très intéressante, elle stigmatise certaines professions, à savoir les professions médicales. En effet, elle ne s’adresse pas à toutes les autres professions concernées par l’article 2.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Xavier Bertrand, ministre. M. Bur n’aime pas que l’on prenne des gants ou que l’on s’embarrasse de formules ampoulées. Je serai donc très direct.
J’imagine mal qu’un patient aille consulter un médecin et débute l’entretien en lui demandant s’il a des liens d’intérêts avec tel ou tel laboratoire. Si, en tant que patient, je suis suspicieux, il me suffit d’aller sur le site des principaux laboratoires pour savoir s’ils versent des sommes à mon médecin.
Je vais être franc avec vous, monsieur Bur : on pourrait très bien adopter cet amendement, mais il ne serait jamais appliqué. Voilà pourquoi je n’y suis pas favorable.
Comme vous n’aimez pas qu’on vous fasse croire qu’on est d’accord avec vous quand on ne l’est pas, je vous le dis tout net : pas d’accord ! (Sourires.)
M. le président. Monsieur Bur, retirez-vous l’amendement ?
M. Yves Bur. Oui, monsieur le président.
(L'amendement n°58 est retiré.)
M. Roland Muzeau. M. Bur cède sans combattre !
M. le président. La parole est à M. Yves Bur, pour soutenir l’amendement n° 56.
M. Roland Muzeau. Retirez-le tout de suite !
M. Yves Bur. Avec cet amendement, je propose une autre possibilité d’information pour le patient.
Monsieur le ministre, vous venez de me répondre que le patient n’a qu’à se rendre sur le site des principaux laboratoires ou industriels du dispositif médical. Je vous rappelle qu’aux États-Unis, le Sunshine Act a vu le jour après des scandales liés à l’implantation de dispositifs médicaux pour lesquels les chirurgiens publiaient des rapports ou avaient des contrats avec des industriels. On avait constaté également que certains médecins avaient passé des conventions avec des laboratoires pharmaceutiques. C’est pour lutter contre l’opacité de ces conventions que le Sunshine Act a été mis au point.
Je crois que le site que vous proposez sera accessible au début de l’année 2013 ; il s’agira d’un site centralisé. Je propose, pour ma part, de centraliser ces informations afférentes à chaque professionnel de santé sur le site Ameli. On me dit que ce n’est pas possible. Certes, ça ne l’est pas encore, mais il ne faut pas se fermer cette piste. Ce site informerait le patient sur les dépassements d’honoraires, ce qui lui permettrait de choisir son praticien en fonction du coût de la consultation, mais aussi sur l’existence éventuelle de liens d’intérêts. Voilà un élément de transparence qui serait facilement accessible.
Si nous mettons en place un système difficilement accessible, je ne vois pas comment le patient pourra s’y retrouver. La disposition que je propose serait opérationnelle d’ici à deux ans.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Arnaud Robinet, rapporteur. Avis défavorable. (« Oh ! » sur les bancs du groupe GDR.)
Il est impossible de mettre en place un tel système pour diverses raisons.
L’information des patients est primordiale. On doit se donner un objectif et j’espère que le ministre nous dira quels moyens pourront être mis en place pour centraliser l’ensemble des données.
Il est clair que le patient doit pouvoir, en se rendant sur un site internet, disposer de l’ensemble des informations qui lui semblent importantes. Mais cela est difficilement réalisable sur le site Ameli.
M. Yves Bur. Je propose de l’inscrire dans la loi justement pour que ce soit réalisable !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Xavier Bertrand, ministre. Avis défavorable.
Monsieur Bur, vous disiez que ce n’est pas au patient d’aller chercher l’information. Or vous proposez maintenant qu’il aille la chercher en se rendant sur le site Ameli.
M. Yves Bur. Je souhaite simplement qu’il n’y passe pas la journée !
M. Xavier Bertrand, ministre. N’est-ce pas vous qui m’avez expliqué, un jour, que vous étiez devenu très efficace pour chercher des informations sur internet ? Tout patient saura le faire aussi.
Je considère que le site Ameli n’a pas vocation à donner ce genre d’information, à moins d’imposer à chaque professionnel de santé de faire une déclaration pour que l’on puisse croiser les sources. On peut demander cela à un expert, pas à un médecin.
Le dispositif que vous proposez apporte-t-il une garantie supplémentaire ? Non. Facilitez-vous vraiment la tâche de celui qui veut aller chercher l’information ? Oui. Mais, s’il veut vraiment obtenir une information, il regardera les déclarations faites par les laboratoires. Donc, en définitive, l’esprit de votre amendement est satisfait, même si vous-même ne l’êtes pas.
M. le président. La parole est à Mme Jacqueline Fraysse.
Mme Jacqueline Fraysse. Je regrette que M. Bur ait retiré l’amendement n° 58. Nous devrions tous partager sa préoccupation d’informer les patients pour éviter la suspicion, les conflits.
Monsieur le ministre, comment pouvez-vous dire que même si nous adoptions cet amendement pour faire plaisir à M. Bur, il ne serait jamais appliqué ? Quand on veut faire bouger les choses, il faut faire preuve de détermination.
M. Xavier Bertrand, ministre. Allons !
Mme Jacqueline Fraysse. Les propositions de M. Bur me semblent cohérentes et aller dans le sens de l’intérêt des patients. Je ne vois pas pourquoi vous les refusez.
(L'amendement n° 56 n'est pas adopté.)
M. le président. La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, pour soutenir l’amendement n° 143.
Mme Jacqueline Fraysse. Cet amendement de précision étend l’interdiction de recevoir des avantages des laboratoires en l’appliquant non seulement aux membres des professions médicales mais également aux associations les représentant.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Arnaud Robinet, rapporteur. Favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Xavier Bertrand, ministre. Même avis.
(L'amendement n° 143 est adopté.)
M. le président. La parole est à Mme Catherine Lemorton, pour soutenir l’amendement n° 209.
Mme Catherine Lemorton. Cet amendement vise à supprimer les alinéas 16, 17, 18 et 19 de l’article 2.
Il est évident que, comme l’esprit d’un jeune est plus malléable, plus un industriel de santé prend tôt un étudiant dans sa formation, mieux il peut le formater, et ce jusqu’à la retraite !
M. Nicolas Dhuicq. C’est vraiment prendre les jeunes pour des idiots !
Mme Catherine Lemorton. Je sais ce que vous allez me rétorquer : comment voulez-vous que ces pauvres étudiants fassent des thèses de recherche, etc. ? Mais si cela ne concernait que les thèses de recherche au sens propre du terme, nous serions pleinement d’accord. Tel n’est évidemment pas le cas, et les PU-PH sont tout à fait capables de former les futurs pharmaciens ou médecins généralistes qui n’ont pas vocation à devenir chercheurs, sans les emmener dans des colloques ou des forums.
Aux Assises du médicament, vous aviez dit, monsieur le ministre, qu’il n’y avait pas de paradoxe et que l’on pourrait lutter contre la privatisation des universités. Eh bien, je vais vous lire le contenu de la convention que Sanofi-Aventis, en région Auvergne, a signée avec la faculté de médecine. Ce n’est pas une invention de ma part ; vous pouvez trouver le texte sur le site internet du laboratoire.
« Désireux de s’ouvrir sur le monde extérieur, Sanofi-Aventis est devenu en 2008 membre fondateur de la Fondation de l’Université d’Auvergne. Ce partenariat a permis :
« de créer une “pharmacie pédagogique et expérimentale”: pour former les étudiants en médecine générale (cinquième et sixième années) et les étudiants de la filière pharmacie d’officine (sixième année) à la prévention ; pour créer des binômes médecin-pharmacien sur différentes thématiques (la prévention de l’iatrogénie médicamenteuse chez la personne âgée, l’outil de liaison Le trait d’union santé, entre les professionnels de santé et les patients) ;
« de mettre en place un colloque “Pharmacien acteur de santé publique” pour accompagner les pharmaciens d’officine ;
« de proposer un diplôme universitaire “Médecin de l’industrie pharmaceutique” pour mieux faire connaître l’industrie pharmaceutique aux internes en médecine et aux médecins diplômés. Cette filière accueillera ses premiers étudiants en septembre 2010 ;
« d’organiser la première “Journée auvergnate de la douleur”, destinée aux professionnels de santé ainsi qu’aux unités de recherche et consacrée à la prise en charge de la douleur par la filière de soins »…
Et je préfère m’arrêter là car c’est loin d’être fini !
M. Yves Bur. C’est la pharmacie idéale !
Mme Catherine Lemorton. Ensuite, je vais vous lire un extrait du communiqué de presse du Syndicat national des jeunes médecins généralistes, qui s’inquiétait en ces termes le 16 septembre dernier : « Malgré le Mediator, les collusions entre facultés de médecine et industrie pharmaceutique perdurent ! »
Le 15 septembre 2011, le ministre de la santé a assuré au micro de France Inter que, « désormais, la formation continue des médecins va être financée par l’État. » Fort bien !
« Cette annonce était attendue car lors de la présentation de ce projet le 1er août 2011, le ministre était resté flou sur la question de la formation des médecins. » Ce n’est pas moi qui le dis, mais le syndicat, lequel précise encore que Sanofi organise « des cours privés de préparation » aux épreuves classantes nationales et aux épreuves d’entrée en troisième cycle d’études médicales. Sur le conseil de leur faculté, ces étudiants sont fortement encouragés à aller « s’inscrire auprès des représentants commerciaux du laboratoire Sanofi » dans l’établissement concerné.
Vous comprenez bien que, si nous voulons faire tomber ces quatre alinéas de l’article 2, c’est pour les réécrire ensuite. Le problème est que, en l’état et au vu des objectifs que vous voulez atteindre – et que nous partageons –, vous ouvrez à l’industrie pharmaceutique la porte de la formation initiale de nos futurs médecins, pharmaciens et autres professionnels de santé. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
M. Jean Mallot. Imparable !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Arnaud Robinet, rapporteur. Défavorable pour deux raisons.
Premièrement, l’amendement de Mme Lemorton vise à remettre en cause un pan de l’une des grandes réformes du quinquennat : l’autonomie des universités, qui ouvre la possibilité de signer des conventions avec des entreprises.
M. Jean Mallot. Et de privatiser ainsi les universités !
M. Arnaud Robinet, rapporteur. Deuxièmement, il tend à porter atteinte au financement de certaines thèses d’université accessibles aux médecins, pharmaciens et scientifiques. Les bourses CIFRE donnent à des entreprises la possibilité de cofinancer des thèses pour permettre à des étudiants d’avoir un pied dans l’entreprise afin de favoriser leur carrière après la thèse et en tout cas leur entrée dans le monde du travail.
Si votre amendement était voté, madame Lemorton, on interdirait totalement ces bourses, qui font pourtant l’objet de la plus grande transparence, puisqu’il existe des conventions entre l’entreprise, l’université et le laboratoire de recherche.
Mme Marylise Lebranchu. Bravo ! Vous venez d’apporter la preuve de ce que nous disons.
M. Jean Mallot. Eh oui ! Autant de raisons de voter notre amendement !
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Xavier Bertrand, ministre. Même avis que la commission.
M. le président. La parole est à Mme Catherine Lemorton.
Mme Catherine Lemorton. Je m’attendais, monsieur le rapporteur, à l’argument que vous m’avez opposé ; c’est pourquoi j’y avais déjà répondu dans mon exposé. En l’occurrence, il ne s’agit pas de recherche à proprement parler, c’est-à-dire au sens d’innovation. C’est la raison pour laquelle je vous ai dit que ces quatre alinéas, tels qu’ils sont rédigés, doivent être supprimés puis réécrits dans le sens que vous voulez.
Sur l’ensemble des étudiants en médecine, en pharmacie et dans les autres professions de santé, ce n’est qu’une toute petite partie qui va faire de la vraie recherche. La plupart veulent accéder aux diplômes de base et devenir docteurs en médecine ou en pharmacie, sans qu’il s’agisse de doctorats ayant pour but la recherche, c’est-à-dire l’innovation.
Mme Jacqueline Fraysse. Eh oui !
Mme Catherine Lemorton. Ces quatre alinéas favorisent donc la formation initiale des professionnels de santé par les industries du médicament.
Mme Marylise Lebranchu. Bien sûr !
M. Jean Mallot. On est dans les mains des labos !
Mme Catherine Lemorton. Quant au bilan que vous voulez faire dans un an ou deux, son résultat est d’ores et déjà évident : vous avez entendu ce qu’écrit Sanofi.
M. le président. La parole est à M. Gérard Bapt.
M. Gérard Bapt. Je voudrais confirmer ce que vient de dire Mme Lemorton en donnant deux exemples.
J’ai été alerté par l’Association des formateurs en pharmacologie, que nous avons reçue récemment dans le cadre de la mission d’information, sur le fait que la faculté de Bordeaux renvoyait au laboratoire Sanofi l’organisation des cours de préparation aux examens classants. Certes, cela ne concerne pas ce texte car il s’agit d’un établissement d’enseignement supérieur.
Autre exemple : tout à l’heure, M. le ministre distinguait particulièrement, et il avait raison, le docteur Chiche pour avoir été un des lanceurs d’alerte. On a reparlé ces derniers temps de la période où le laboratoire Servier essayait par tous les moyens d’empêcher les notifications soit de partir, soit d’être traitées à leur arrivée à l’AFSSAPS. Eh bien, j’ai eu récemment un contact téléphonique avec le docteur Chiche, dont le fils devait partir aux États-Unis avec une bourse de recherche offerte par ce laboratoire et lui a dit : « Tu sais, papa, tu m’as fait perdre une bourse de 30 000 euros, mais je ne te le reproche pas car tu as agi pour de bonnes raisons. »
M. Arnaud Robinet, rapporteur. Vous allez nous faire pleurer !
M. Jean Mallot. On est au cœur du problème !
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Arnaud Robinet, rapporteur. Nous parlons de deux choses différentes. L’amendement de Mme Lemorton ne vise que les thèses d’exercice ou les thèses d’université.
M. Jean Mallot. Argutie !
M. Arnaud Robinet, rapporteur. Par ailleurs, Mme Lemorton dit qu’il y a peu d’étudiants en médecine ou en pharmacie qui décident de faire des thèses d’université. Le seul problème est que, pour faire une carrière d’hospitalo-universitaire, il est obligatoire d’avoir une thèse d’université. Un grand nombre d’étudiants en médecine ou en pharmacie sont donc concernés.
M. Bernard Debré. Cela vaut même pour les thèses de science !
Mme Catherine Lemorton. Il suffit de réécrire les quatre alinéas !
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Xavier Bertrand, ministre. Avant de penser à réécrire, il faudrait commencer par écrire. Comme je l’ai dit à propos des accords commerciaux, notamment des conventions commerciales à l’AFSSAPS, il peut être intéressant de faire un bilan, par exemple dans un an, pour voir exactement ce que ces aides aux étudiants représentent et quels sont les enjeux. Le problème que vous indiquez ne me laisse pas indifférent.
Je pense très sincèrement que les jeunes ne souhaitent pas qu’on leur applique un régime dérogatoire. Même si je ne me souviens pas exactement de ce qu’avait déclaré à l’époque le Syndicat des jeunes médecins généralistes, je sais qu’ils m’avaient demandé en substance : pourquoi un traitement différencié ? Ne sommes-nous pas adultes et responsables ? Ne savons-nous pas voir, juger et faire preuve de discernement ?
Je vous propose donc de voir dans un an quelles sont les pratiques effectives.
M. Jean Mallot. Pourquoi attendre ?
M. Xavier Bertrand, ministre. Dites-moi si cela vous intéresse. Je pense, quant à moi, que cela peut avoir du sens.
(L’amendement n° 209 n’est pas adopté.)
M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 30.
La parole est à Mme Jacqueline Fraysse.
Mme Jacqueline Fraysse. Si vous le permettez, monsieur le président, je défendrai en même temps les amendements nos 31 et 32.
M. le président. Je vous en remercie. Je n’osais vous presser de le faire ! (Sourires.)
Mme Jacqueline Fraysse. Nous exprimons, à travers ces trois amendements, la même préoccupation que Mme Lemorton, défendant son amendement n° 209. Le fait de permettre aux laboratoires de financer les recherches des étudiants en médecine pose au moins deux problèmes.
D’abord, nous ne sommes pas assez naïfs pour croire en une philanthropie désintéressée de ces industriels, qui cherchent évidemment, par ces subventions, à s’attirer un regard au moins bienveillant de la part de futurs praticiens déjà en fin d’études.
M. Jean Mallot. Évidemment !
Mme Jacqueline Fraysse. Surtout, nous considérons que c’est à la puissance publique – ici, au ministère de l’enseignement supérieur – de financer les recherches des étudiants en médecine.
M. Bernard Debré et M. Arnaud Robinet, rapporteur. Il n’y aura plus de recherche !
Mme Jacqueline Fraysse. C’est la raison pour laquelle notre amendement n° 30 tend à supprimer les alinéas 16 et 17.
Par ailleurs, le code de la santé publique, qui interdit les avantages en nature, prévoit une dérogation pour les hospitalités, c’est-à-dire lorsque des entreprises mettent à la disposition de chercheurs des lieux pour organiser des colloques scientifiques – plus souvent d’ailleurs aux Antilles que dans la Somme.
Les alinéas 18 et 19 étendent aux étudiants cette dérogation, ce à quoi nous nous opposons. Nous entendons les supprimer. Nous considérons en effet que la transparence ne suffit pas pour en finir avec les conflits d’intérêts. Les liens d’intérêts, même exposés au grand jour, demeurent des liens d’intérêts et ne sont pas anodins. C’est pourquoi nous considérons qu’il faut simplement les interdire, aussi bien pour les étudiants que pour les autres membres des professions médicales. Tel est l’objet de l’amendement n° 32, qui vise à supprimer la dérogation concernant les hospitalités – celle prévue par ce projet de loi pour les étudiants, mais également celle du code de la santé publique pour les membres des professions médicales.
Enfin, l’amendement n° 31 est un amendement de repli, qui tend simplement à supprimer l’extension aux étudiants de cette dérogation.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Arnaud Robinet, rapporteur. Défavorable, pour les mêmes raisons que précédemment. Je ne donne pas cher de la recherche française si on vote ces amendements !
Mme Jacqueline Fraysse. Il est dommage qu’elle soit suspendue aux industriels !
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Xavier Bertrand, ministre. Défavorable.
(Les amendements nos 30, 31 et 32, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 57.
M. Yves Bur. Défendu !
(L’amendement n° 57, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)
(L’article 2, amendé, est adopté.)
M. le président. La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.
M. le président. Prochaine séance, aujourd’hui à quinze heures :
Suite de la discussion du projet de loi relatif au renforcement de la sécurité sanitaire du médicament et des produits de santé ;
Discussion du projet de loi renforçant les droits, la protection et l’information des consommateurs.
La séance est levée.
(La séance est levée à zéro heure quarante-cinq.)
Le Directeur du service du compte rendu de la séance de l’Assemblée nationale,
Nicolas Véron