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Edition J.O. - débats de la séance
Articles, amendements, annexes

Assemblée nationale
XIIIe législature
Session ordinaire de 2011-2012

Compte rendu
intégral

Deuxième séance du mercredi 21 décembre 2011

SOMMAIRE ÉLECTRONIQUE

SOMMAIRE


Présidence de M. Bernard Accoyer

1. Questions au Gouvernement

Efficacité économique de la politique du Gouvernement

Mme Annick Girardin

M. François Baroin, ministre de l’économie, des finances et de l’industrie

Politique industrielle

M. Serge Poignant

M. Éric Besson, ministre chargé de l’industrie, de l’énergie et de l’économie numérique

Lutte contre la pauvreté

M. Jean-Pierre Brard

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre des solidarités et de la cohésion sociale

Prolifération du frelon asiatique

M. Philippe Folliot

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l’écologie, du développement durable, des transports et du logement

Alourdissement de l’impôt sur le revenu et de la TVA

M. Christian Eckert

Mme Valérie Pécresse, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l’État, porte-parole du Gouvernement

Encadrement des mineurs délinquants

M. Éric Ciotti

M. Michel Mercier, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés

Situation de l’emploi

M. Pierre Gosnat

Mme Nadine Morano, ministre chargée de l’apprentissage et de la formation professionnelle

Médecine de proximité

M. Michel Raison

Mme Nora Berra, secrétaire d’État chargée de la santé

Politique environnementale

M. Jean-Paul Chanteguet

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l’écologie, du développement durable, des transports et du logement

Prime de Noël

M. Joseph Bossé

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre des solidarités et de la cohésion sociale

Énergies renouvelables

M. Christophe Bouillon

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l’écologie, du développement durable, des transports et du logement

Réduction de la dépense publique

M. Alain Gest

Mme Valérie Pécresse, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l’État, porte-parole du Gouvernement

Emploi

M. Michel Liebgott

Mme Nadine Morano, ministre chargée de l’apprentissage et de la formation professionnelle

Formation par alternance

M. Georges Colombier

Mme Nadine Morano, ministre chargée de l’apprentissage et de la formation professionnelle

Réglementation du secteur bancaire

M. Serge Janquin

M. François Baroin, ministre de l’économie, des finances et de l’industrie

Présidence de M. Louis Giscard d’Estaing

2. Projet de loi de finances pour 2012

Mme Valérie Pécresse, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l’État, porte-parole du Gouvernement

M. Gilles Carrez, rapporteur général

M. Jérôme Cahuzac, président de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire

Motion de rejet préalable

M. Christian Eckert

M. Charles de Courson, M. Jean-Pierre Brard, M. Jean Launay, M. Jérôme Chartier

Discussion générale

M. Charles de Courson

M. Jean-Pierre Brard

M. Jérôme Chartier

M. Jean Launay

Mme Sandrine Mazetier

M. François Pupponi

Mme Valérie Pécresse, ministre

Texte adopté par l’Assemblée nationale en nouvelle lecture

Vote sur l’ensemble

3. Accord France-Panama sur les doubles impositions

M. Édouard Courtial

Mme Martine Aurillac, rapporteure de la commission des affaires étrangères

Discussion générale

M. Raymond Durand

M. Jean-Paul Lecoq

M. Jacques Remiller

M. François Loncle

Texte adopté par l’Assemblée nationale en nouvelle lecture

Explications de vote

M. Jean-Pierre Brard, M. Jean-Pierre Dufau

Vote sur l'article unique

4. Approbation de conventions et accords internationaux

Accord de passation conjointe de marché en vue de la désignation par adjudication de plates-formes d'enchères communes

Accord de passation conjointe de marché en vue de la désignation par adjudication d'une instance de surveillance des enchères

5. Projet de loi de finances rectificative pour 2011

Mme Valérie Pécresse, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l’État, porte-parole du Gouvernement

M. Gilles Carrez, rapporteur général de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire

Discussion générale

M. Charles de Courson

M. Jean-Pierre Brard

M. Jérôme Chartier

M. Christian Eckert

M. Gérard Bapt

Mme Valérie Pécresse, ministre

Texte adopté par l’Assemblée nationale en nouvelle lecture

Vote sur l’ensemble

6. Ordre du jour de la prochaine séance

Politique industrielle (p.

Lutte contre la pauvreté (p.

Prolifération du frelon asiatique (p.

Alourdissement de l’impôt sur le revenu et de la TVA (p.

Encadrement des mineurs délinquants (p.

Situation de l’emploi (p.

Médecine de proximité (p.

Politique environnementale (p.

Prime de Noël (p.

Énergies renouvelables (p.

Réduction de la dépense publique (p.

Emploi (p.

Formation par alternance (p.

Réglementation du secteur bancaire (p.

Présidence de M. Bernard Accoyer

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

1

Questions au Gouvernement

M. le président. L'ordre du jour appelle les questions au Gouvernement.

Efficacité économique de la politique du Gouvernement

M. le président. La parole est à Mme Annick Girardin, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

Mme Annick Girardin. Je souhaite interroger M. le Premier ministre sur l'inefficacité de la politique économique de son Gouvernement.

À cause de la politique que vous menez depuis cinq ans, la France risque de perdre son triple A et les Français s'apprêtent à subir une période de récession.

Si le contexte international et européen est difficile, vous ne pouvez cependant pas nier votre responsabilité dans la situation actuelle. Au lieu de reconnaître l'échec patent d'une politique de rigueur dogmatique, au lieu de reconnaître l'impérieuse nécessité de soutenir la croissance et de restaurer la confiance, vous vous entêtez à répondre servilement aux exigences des agences de notation, et pour couronner le tout, le projet de l'UMP pour 2012 annonce trois nouveaux coups durs qui seraient portés à la croissance économique de notre pays si vous deviez remporter les prochaines échéances électorales.

Tout d'abord, votre programme prévoit une attaque sur les allocations chômage – que vous souhaitez rendre dégressives dans le temps. C'est une menace pour les plus vulnérables, qui se verraient privés du minimum nécessaire pour consommer et participer à la vie de la société. Je vous rappelle que sous votre Gouvernement, un million de travailleurs supplémentaires se sont retrouvés au chômage.

Ensuite, vous prévoyez d'imposer aux collectivités locales l'absurde et inefficace rationalisation budgétaire menée aveuglément dans les services publics de l'État. Après avoir creusé de près de 700 milliards d'euros le déficit de notre pays en seulement cinq ans, voilà que l'UMP entend financer son programme électoral sur le dos des collectivités, en menaçant de couper les moyens qu'elles mettent au bénéfice de leurs habitants.

Enfin, votre projet industriel passe par l'instauration d'une TVA sociale, sournoisement rebaptisée « fiscalité anti-délocalisation », qui frapperait une nouvelle fois les plus modestes.

M. Christian Vanneste. Stupide !

Mme Annick Girardin. Combattre les délocalisations passe au contraire par l’investissement public, notamment dans les grandes infrastructures technologiques et de transports, dans l’enseignement, dans la recherche, rendant la France attractive et créant une dynamique de croissance et d’espoir.

Avec votre projet, on aboutirait donc à une triple contraction de l'économie : en restreignant un peu plus les ressources à la consommation de centaines de milliers de chômeurs, en pénalisant les collectivités locales qui réalisent pourtant 73 % des investissements publics, et en poursuivant une politique fiscale économiquement inefficace et socialement injuste. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie.

M. François Baroin, ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Madame Girardin, si ce n’étaient l’approche des fêtes de Noël et un désir de concorde nationale, je vous répondrais : quand je me regarde, je me désole, et quand je me compare, je me console. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Si vous pensez pouvoir régler les problèmes que vous décrivez concernant la situation économique de notre pays en vous fondant sur une partie de votre bilan, si vous pensez que c’est en remettant en cause la réforme des retraites à soixante ans, en abaissant éventuellement le temps de travail à 32 heures et en multipliant les financements par déficits, vous allez résoudre le problème de l’endettement de notre pays, il faudra vraiment qu’on en reparle… Laissons passer la trêve hivernale et nous nous retrouverons sur d’autres tréteaux.

M. Christian Eckert et M. Patrick Lemasle. Répondez à la question !

M. François Baroin, ministre. La situation économique de notre pays est conditionnée, vous le savez, par un environnement international très lourdement impacté par trois crises.

M. Alain Cacheux. Vous n’y êtes pas pour rien !

M. François Baroin, ministre. Une première crise, dont l’épicentre était aux États-Unis, avec les subprimes à partir de 2007 ; une deuxième dont l’épicentre était à nouveau aux États-Unis – vous en êtes, madame la députée, plus proche que nous à Saint-Pierre-et-Miquelon et vous avez pu en mesurer directement l’impact –, avec la crise de Lehman Brothers ; une troisième enfin dont l’épicentre est dans la zone euro, qui est une crise de la dette.

Dois-je vous rappeler, une fois encore, que les États ont fait le choix, pour soutenir l’activité économique en 2008-2009 de porter sur leurs épaules le soutien à l’activité économique ? Le prix à payer a été un endettement. Celui-ci a dérapé et il est exclusivement lié à la crise économique mondiale.

Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. Absolument pas !

M. François Baroin, ministre. Le ralentissement économique que l’on observe en zone euro est lié d’une part, aux interrogations relatives à l’économie américaine, et, d’autre part, aux économies émergentes et à l’instabilité de la zone euro.

Nous essayons de répondre méthodiquement, point par point, à toutes les problématiques qui ont été soulevées par cette crise. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Deux gouvernances, deux disciplines, deux convergences économiques budgétaires et fiscales, deux coordinations de la solidarité : c’est autour de cela que nous aurons la bonne réponse. J’espère que vous pourrez, le moment venu, la soutenir. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Politique industrielle

M. le président. La parole est à M. Serge Poignant, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.

M. Serge Poignant. Ma question s’adresse à M. Éric Besson, ministre chargé de l’industrie, de l’énergie et de l’économie numérique.

En préambule, je voudrais souligner la mobilisation du Gouvernement et de sa majorité en faveur d’une véritable politique industrielle.

M. Dino Cinieri. Très bien !

M. Serge Poignant. À la suite des états généraux de l’industrie, conduits avec les partenaires sociaux et les représentants des filiales, de nombreuses mesures structurelles ont en effet été prises.

Je pense notamment au renforcement du crédit impôt recherche, qui est un outil précieux pour favoriser l’innovation en France. Je pense à la réforme de la taxe professionnelle, qui pesait tout particulièrement sur l’industrie de notre pays.

M. Patrick Lemasle. Pour quel résultat ?

M. Serge Poignant. Je pense aux outils financiers comme OSEO ou le FSI. Je pense encore aux investissements d’avenir.

Aujourd’hui, l’opposition et singulièrement le candidat socialiste, M. Hollande, viennent s’afficher ici ou là en France en faisant des promesses. C’était le cas il y a quelques jours aux chantiers de Saint-Nazaire, dans le département de Loire-Atlantique où je suis élu.

M. Patrick Lemasle. Quelle est la question ?

M. Serge Poignant. Je veux rappeler devant la représentation nationale tout entière que c’est bien l’engagement déterminé du Président de la République, Nicolas Sarkozy, qui a permis des bouclages de commandes de paquebots et d’assurer ainsi la pérennité de ces chantiers navals et de leurs emplois, ce dont ont bien conscience les ouvriers de Saint-Nazaire.

M. Henri Emmanuelli. C’est quoi la question ?

M. Serge Poignant. Alors, monsieur le ministre, au moment où certains s’adonnent au tourisme industriel, et font de nouveau des promesses après avoir rejeté des dispositifs cruciaux, pouvez-vous rappeler tout simplement, mais fermement, les mesures prises par notre gouvernement et notre majorité pour dynamiser l’industrie française et préparer concrètement l’avenir ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à M. le ministre chargé de l’industrie, de l’énergie et de l’économie numérique.

M. Éric Besson, ministre chargé de l’industrie, de l’énergie et de l’économie numérique. Monsieur le député, je crois sincèrement qu’il ne faut pas se plaindre de la visite de François Hollande à Saint-Nazaire,…

M. Jean Glavany. Vous êtes trop bon ! (Sourires.)

M. Éric Besson, ministre. …il faut la voir comme un hommage rendu à l’action du Président de la République (Exclamations sur les bancs du groupe SRC) qui, depuis dix ans, s’est rendu, je crois, onze fois à Saint-Nazaire. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

C’est grâce à Nicolas Sarkozy que les anciens Chantiers de l’Atlantique, aujourd’hui appelés STX France, ont vu l’État, par le biais du fonds stratégique d’investissement, apporter 110 millions d’euros en capital en 2008.

M. Henri Emmanuelli. Allez plutôt jouer au foot !

M. Éric Besson, ministre. C’est aussi grâce à lui que nous consacrons 100 millions d’euros à la construction navale, au navire du futur, grâce aux investissements d’avenir.

C’est grâce au plan de relance que STX s’est vu commander par l’État un bâtiment dit de projection et de commandement, qui a généré 2,5 millions d’heures de travail à Saint-Nazaire. Voilà un bel exemple de ce que l’on appelle le produire en France.

Je pense aussi à l’action diplomatique de la France, qui a contribué à l’achat par la marine russe de deux bâtiments de projection et de commandement, ce qui a directement bénéficié à Saint-Nazaire.

Pour le reste, et vous l’avez suggéré, il faut aussi voir un hommage à notre action dans le projet proposé, que l’on ne connaît pas bien, mais dont on a une esquisse.

M. Patrick Lemasle. Il faut se méfier des hommages de M. Besson.

M. Éric Besson, ministre. Quand le PS dit qu’il faut des filières industrielles, je comprends : hommage aux douze filières stratégiques que nous avons créées. Quand il dit qu’il faut créer un livret d’épargne, il doit penser au livret de développement industriel et durable, que nous avons créé. Quand il parle de « banque des PME », je pense qu’il veut rendre hommage à la création d’OSEO. Quand il dit qu’il faut soutenir l’innovation, je pense qu’il a en tête le crédit impôt recherche et les investissements d’avenir. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe UMP.)

Vous le voyez, il n’y a pas à se plaindre. François Baroin a rappelé que nous entrons dans la période des fêtes. En l’occurrence, c’est un joli cadeau qui nous a été fait. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Lutte contre la pauvreté

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Brard, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.

M. Jean-Pierre Brard. Monsieur le Premier ministre, le 1er novembre dernier, à deux pas d’ici, un enfant est né dans la rue. Les deux parents habitaient sous une tente. Le bébé est mort. Le 2 novembre dernier, à Orléans, un chômeur de cinquante-quatre ans a vu son électricité coupée. Il s’éclairait à la bougie. Il est mort brûlé vif dans son appartement.

Huit millions de personnes en dessous du seuil de pauvreté, quatre millions trois cent mille chômeurs, cent millions de repas servis par les Restaurants du cœur : voilà votre bilan. Et pendant ce temps-là, vos amis du CAC40 (Exclamations sur les bancs du groupe UMP) ont vu leurs bénéfices progresser de 85 % en un an. Nous, au Front de gauche, nous sommes avec les gens qui souffrent, avec ceux qui tirent le diable par la queue, avec ceux qui ont peur pour l’avenir de leurs enfants, avec les membres des couches moyennes qui craignent de perdre leur travail et de tomber dans la pauvreté.

C’est vrai que nous ne sommes pas du même côté. Jusqu’à présent, monsieur le Premier ministre, avec le Président de la République, vous avez été du côté des profiteurs. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Moi, je pense aux petits François, Farouk, Myriam, David dont les yeux ne brilleront pas d’émerveillement devant le sapin de Noël, à cause de la politique que leurs familles subissent. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Monsieur le Premier ministre, je vous suggère de méditer la phrase de cette sainte femme que fut Geneviève De Gaulle-Anthonioz : « Un nouveau totalitarisme est en train de naître, celui de l’argent. Ayons le courage de refuser que des personnes et des familles vivent dans l’inhumanité. »

Êtes-vous prêt, monsieur le Premier ministre, à renoncer à votre zèle en faveur des privilégiés et à écouter Geneviève De Gaulle-Anthonioz ? (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre des solidarités et de la cohésion sociale.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre des solidarités et de la cohésion sociale. Monsieur le député, la lutte contre la pauvreté, le combat en faveur des plus modestes d’entre constituent le fil rouge de la politique gouvernementale. (Exclamations sur les bancs du groupe GDR.) Les derniers chiffres de l’OCDE ont d’ailleurs montré que la politique sociale de notre pays, à laquelle sont consacrés 30 % du produit intérieur brut, était le meilleur rempart contre la pauvreté…

M. Pierre Gosnat. Ce sont les départements et les communes qui agissent, pas l’État !

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. …et que c’était dans notre pays que la pauvreté avait le moins augmenté.

D’ailleurs, le bilan qui vient d’être dressé lors de la Conférence nationale du RSA a montré qu’avec les politiques du Gouvernement, nous avions sorti 150 000 personnes de la pauvreté et que le revenu de solidarité active, qui a permis de consacrer 1,5 milliard d’euros de plus aux politiques de lutte contre la pauvreté, était une véritable réussite.

Nous ne nous sommes pas limités à cela. Dois-je rappeler, monsieur le député, que l’allocation pour adulte handicapé a augmenté de 25%, et que le minimum vieillesse, devenu l’ASPA, a aussi augmenté de 25 % ?

La mobilisation du Gouvernement, mesdames et messieurs les députés, est donc totale dans la lutte contre la pauvreté. Et je ne laisserai pas dire qu’il y a d’un côté, vous qui vous vous battez aux côtés des pauvres (« C’est pourtant la réalité ! » sur les bancs du groupe GDR) et, de l’autre, nous.

Nous sommes entièrement mobilisés. Nous défendons notre modèle social, et si nous voulons avoir une véritable politique de retour à l’équilibre, c’est précisément pour protéger ce modèle social qui fait l’identité et la fierté de la France. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Prolifération du frelon asiatique

M. le président. La parole est à M. Philippe Folliot, pour le groupe Nouveau Centre.

M. Philippe Folliot. Féroce et agressif, venant de Chine, il colonise insidieusement notre pays et se propage petit à petit, entraînant de graves problèmes : je veux parler de Vespa velutina, ou frelon asiatique, introduit en 2004 par inadvertance dans le Sud-Ouest, qui prolifère dans des proportions particulièrement inquiétantes et devient une véritable menace tant pour la filière apicole que pour la biodiversité et pour chacune et chacun d'entre nous.

Menace pour la filière apicole, car il attaque et tue les abeilles européennes Apis mellifera et met à mal une activité importante pour nos terroirs : ce fléau menace près de 1 345 000 ruches et 69 000 apiculteurs en France.

Menace pour la biodiversité, car la prolifération de cette espèce, qui n’a pas de prédateur en Europe, est alarmante, chaque nid comportant 4 000 à 5 000 frelons. Il fait des dégâts considérables sur les abeilles mais aussi sur les guêpes autochtones, avec de lourdes conséquences sur la si essentielle fonction de pollinisation que ces deux espèces assurent.

Menace pour l'homme enfin, car s'il ne faut pas sombrer dans une quelconque psychose, il importe de souligner que nous avons déploré cet été les deux premiers décès en France causés par des frelons asiatiques. Les spécialistes sont d'accord pour dire que les conséquences d'une piqûre de cet insecte sont autrement plus dangereuses que celles, déjà sévères, que peut provoquer la piqûre d’une simple guêpe.

Auteur d'une proposition de loi sur cette question, j'ai recueilli en quelques jours plusieurs dizaines de signatures de collègues députés répartis sur tous les bancs de cet hémicycle, ce qui montre combien sont grandes les inquiétudes. Dans ce texte, nous demandons – cette décision aurait dû être prise depuis longtemps – que cette espèce qualifiée d’« invasive » par le ministère de l’agriculture soit classée « nuisible », et que les moyens adéquats pour enrayer sa dangereuse prolifération soient mis en œuvre.

Madame la ministre de l’écologie, du développement durable, des transports et du logement, que comptez-vous faire concrètement à court terme ? (Applaudissements sur de nombreux bancs.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre de l’écologie, du développement durable, des transports et du logement.

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l’écologie, du développement durable, des transports et du logement. Monsieur le député, effectivement, le frelon asiatique prolifère, en particulier dans le Sud-Ouest.

M. Jean Glavany. Il est même arrivé aux portes de Paris !

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre. Et ce phénomène est source de très grandes inquiétudes.

Les spécialistes ne s’accordent pas sur la question de savoir s’il est plus dangereux pour l’homme que le frelon ou la guêpe ordinaires. Ce qui est certain, c’est que le caractère récent de sa présence sur notre territoire fait que nous savons moins bien le combattre alors qu’il cause de très gros dégâts.

Ces dégâts frappent avant tout l’apiculture, qui est déjà très fortement affectée par la mortalité des abeilles et qui doit faire face à un surcroît de problèmes.

Depuis 2009, plusieurs institutions et services sont mobilisés – inspections générales du ministère de l’agriculture, du ministère de l’écologie, Institut national de la recherche agronomique et Muséum national d’histoire naturelle – afin de rechercher des solutions.

Les solutions ne sont pas simples. Il faut d’abord repérer les nids de frelons, souvent difficiles à atteindre car ils sont construits très haut.

M. Jérôme Lambert. Le problème, ce n’est pas de détruire les nids : ça, nous savons faire ; c’est de savoir qui paie !

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre. Il faut établir des méthodes de lutte sélective, qui restent à mettre au point, ou encore explorer des pistes comme le piégeage des reines au sortir de l’hibernation. Ce point lui aussi est en débat.

Le classement de l’espèce comme nuisible ne permettra pas, d’un coup de baguette magique, de trouver une solution de lutte appropriée, mais il permettra probablement au ministère de l’agriculture, en charge d’organiser la lutte contre le frelon asiatique, d’être plus efficace et il permettra également aux collectivités locales et aux services d’incendie et de secours d’intervenir plus systématiquement…

M. Henri Emmanuelli. Non, l’hygiène et la sécurité relèvent de l’État !

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre. …alors qu’ils ne se déplacent pour l’instant qu’en cas de danger immédiat – lorsqu’un nid est découvert dans une école, par exemple.

C’est donc une bonne initiative que vous prenez, monsieur Folliot, et nous la suivrons. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP.)

Alourdissement de l’impôt sur le revenu et de la TVA

M. le président. La parole est à M. Christian Eckert, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

M. Christian Eckert. Monsieur le Premier ministre, après plusieurs navettes, il est malheureusement probable que le Parlement, avec le soutien de tous les députés de la majorité,…

Plusieurs députés du groupe de l’Union pour un mouvement populaire. Oui !

M. Christian Eckert. … validera, à la veille de Noël – et ce n’est pas un cadeau ! –, le projet de loi de finances pour 2012 et le projet de loi de finances rectificative pour 2011.

M. Guy Geoffroy. Nous assumons nos responsabilités !

M. Christian Eckert. Pour faire payer à tous les Français dix ans de votre politique de droite et plus particulièrement cinq ans de gouvernance Sarkozy-Fillon, vous allez prendre deux mesures qui vont peser pour près de 4 milliards d’euros sur le pouvoir d’achat des Français.

M. Pascal Brindeau. Et combien ont coûté les 35 heures ?

M. Christian Eckert. La première, c’est le gel de l’indexation du barème de l’impôt sur les revenus. Ce qui veut implique mécaniquement – et cela nous a été confirmé au cours de nos débats – que 200 000 foyers vont être assujettis pour la première fois à l’impôt sur le revenu.

Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. Et voilà !

M. Christian Eckert. Outre les sommes qu’ils devront payer au titre de cette imposition, ils vont perdre le bénéfice des réductions de taxe foncière, de taxe d’habitation, de redevance sur l’audiovisuel.

M. Christian Jacob. Démago !

M. Christian Eckert. La seconde, c’est l’augmentation de la TVA sur bon nombre de biens et de services : les transports publics, empruntés par tous les Français, y compris les transports scolaires, la taxe d’assainissement, payée par tous les foyers, la taxe sur les ordures ménagères, la taxe sur les services à la personne. Comble d’ironie, sur le logement social, la TVA va passer de 5,5 % à 7 % !

Mme Pécresse nous soutenait hier soir que la création d’un nouveau taux de TVA à 7 % n’aura aucun impact sur le prix des produits de première nécessité. (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.) Osez-vous assumer ces propos devant la représentation nationale, monsieur le Premier ministre ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l’État, porte-parole du Gouvernement.

Mme Valérie Pécresse, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l’État, porte-parole du Gouvernement. Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, le Gouvernement a un cap.

Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. Droit dans le mur !

Mme Valérie Pécresse, ministre. Ce cap, c’est celui du désendettement et de la réduction des déficits.

Permettez-moi de profiter de votre question pour remercier la majorité parlementaire pour son soutien et pour l’esprit de coresponsabilité dont elle fait preuve au moment où elle s’apprête à adopter les 17 milliards d’euros du plan de redressement des comptes publics, annoncés par le Premier ministre, le 24 août et le 7 novembre derniers. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. Bernard Roman. La question !

Mme Valérie Pécresse, ministre. Ce sont 17 milliards d’euros d’efforts supplémentaires demandés aux Français, (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)…

M. Dominique Baert. Aux plus modestes !

Mme Valérie Pécresse, ministre. …dans un esprit d’équité, monsieur Eckert, qui ne souffre pas la caricature parce que nous avons demandé davantage à ceux qui avaient plus. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

M. Christian Eckert. C’est faux !

Mme Valérie Pécresse, ministre. Nous avons demandé davantage aux grands groupes qui contribueront à ce plan à hauteur de 4 milliards d’euros. Nous avons demandé davantage aux ménages les plus aisés, qui contribueront à ce plan à hauteur de 3,5 milliards : hausse de la fiscalité des plus-values, hausse de la fiscalité du patrimoine, contribution exceptionnelle de solidarité.

Et je réponds à votre question sur le gel du barème de l’impôt sur le revenu : vous le savez bien, monsieur Eckert, 10 % des foyers paient 70 % de l’impôt sur le revenu.

M. Pierre Gosnat. Et les autres, ils gagnent combien ?

Mme Valérie Pécresse, ministre. Un impôt progressif gelé, c’est évidemment un impôt qui pèsera davantage sur les plus hauts revenus. L’équité est bien au cœur de notre projet.

M. Jean Mallot. C’est aux plus faibles que vous demandez toujours plus !

Mme Valérie Pécresse, ministre. Quant à la hausse de la TVA, elle représentera 10 % de l’effort demandé dans ce plan : 1,7 milliard sur un total de 17 milliards. C’est un effort dosé, c’est un effort raisonnable, qui ne pèsera pas sur les plus fragiles puisque nous en exonérons tous les produits de première nécessité :…

M. Christian Eckert. C’est faux !

Mme Valérie Pécresse, ministre….les médicaments remboursables, l’eau, qu’elle soit minérale ou potable, les produits alimentaires, les cantines scolaires et les équipements destinés aux personnes handicapés. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Encadrement des mineurs délinquants

M. le président. La parole est à M. Éric Ciotti, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.

M. Éric Ciotti. Monsieur le garde des sceaux, notre assemblée a adopté en dernière lecture, la semaine dernière, la proposition de loi, que j’ai eu l’honneur de porter avec 150 de nos collègues de l’UMP et du Nouveau Centre, instaurant un service citoyen pour les mineurs délinquants.

M. Jean-Pierre Brard. La honte !

M. Éric Ciotti. Ce service citoyen explore une voie nouvelle, inédite, entre la rue et la prison, pour lutter contre ce fléau que constitue la délinquance des mineurs. Grâce à ce service citoyen, les magistrats pourront désormais placer les mineurs délinquants dans des centres spécialisés, les EPIDE,…

M. Jean Mallot. C’est vous qu’il faudrait placer dans un centre !

M. Éric Ciotti. …établissements publics d’insertion de la défense, où ils recevront une formation scolaire, où ils apprendront un métier, et où, surtout, ils bénéficieront d’une formation comportementale de type militaire. (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

M. François Loncle. Honteux !

M. Éric Ciotti. Ces établissements sont en effet inspirés des valeurs militaires : port de l’uniforme, salut au drapeau, exigences physiques et sportives importantes, respect de la discipline.

M. Pierre Gosnat. Incroyable.

M. Éric Ciotti. Il s’agira de redonner à ces jeunes des repères, des valeurs – qu’ils ont trop souvent perdus – et de leur offrir ce qui est souvent une dernière chance dans la voie de la réinsertion.

Monsieur le garde des sceaux, quels délais, quels moyens, quel calendrier prévoyez-vous pour la mise en œuvre de ce texte ?

Ce texte ambitieux, voulu par le Président de la République, soutenu par notre majorité, a été combattu par les sénateurs socialistes et par les députés socialistes, avec une forme d’irresponsabilité totale, puisqu’au Sénat, la majorité sénatoriale a tout simplement refusé de débattre de ce texte.

Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. Bravo le Sénat !

M. Éric Ciotti. Pourtant, la délinquance des mineurs est un sujet grave, qui devrait faire l’objet d’un consensus et réunir tous ceux qui souhaitent sincèrement apporter des réponses concrètes et pertinentes. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à M. le garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés.

M. Michel Mercier, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés. Monsieur le député, l’Assemblée nationale vient en effet d’adopter la proposition de loi dont vous êtes l’auteur, et je tiens à souligner votre engagement personnel dans ce combat pour la création de ce contrat citoyen qui s’adresse aux jeunes mineurs délinquants.

M. Jean-Pierre Brard. Ne vous y trompez pas ! Il veut une place !

M. Michel Mercier, garde des sceaux. Il nous appartient désormais de mettre en œuvre la loi votée par le Parlement.

M. François Loncle. Non. C’est honteux. Ça ne se fera pas !

M. Michel Mercier, garde des sceaux. Les trois ministères de tutelle de l’EPIDE, ainsi que le ministère de la justice, consacreront dès cette année 2 millions d’euros chacun au fonctionnement de ces nouveaux établissements.

M. Jean-Pierre Brard. Il veut être maton, Ciotti !

M. Michel Mercier, garde des sceaux. Dès le mois de février 2012, douze centres seront en mesure d’accueillir les premiers mineurs délinquants. Les personnels d’encadrement bénéficieront à cet effet d’une formation spécifique.

Par ailleurs, les services de l’EPIDE et ceux du ministère de la justice travaillent conjointement pour que les décrets d’application, conformément aux instructions du Premier ministre, soient transmis au Conseil d’État avant le 31 décembre de cette année.

M. François Loncle. Imposteurs !

M. Michel Mercier, garde des sceaux. En outre, le directeur de l’EPIDE a décidé d’ouvrir ces établissements aux juges pour enfants, afin qu’ils puissent découvrir leur fonctionnement. Ainsi, les magistrats pourront prendre leur décision en pleine connaissance de cause et cette nouvelle possibilité de travailler à la reconstruction des mineurs délinquants pourra être utilisée à meilleur escient possible. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. François Loncle. Lamentable !

Situation de l’emploi

M. le président. La parole est à M. Pierre Gosnat, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.

M. Pierre Gosnat. Monsieur le Premier ministre, le candidat Sarkozy avait promis de vaincre sur tous les fronts : emploi, relance économique, pouvoir d’achat, justice sociale. Or le pouvoir d’achat stagne, voire baisse, pour la majorité de la population. On compte plus de 4,5 millions de chômeurs ; en cinq ans, la France a perdu 400 000 emplois industriels,…

M. André Wojciechowski. Vous n’avez pas fait mieux !

M. Pierre Gosnat. …et vous avez supprimé 160 000 emplois publics. Pour la première fois, il est officiellement annoncé que notre pays entre en récession.

Alors, comme toujours, vous allez rétorquer que la crise est passée par là. Mais qui a intérêt à cette crise ? Qui souffle sur ses braises, sinon vous, qui êtes au pouvoir depuis dix ans, avec vos amis du MEDEF ? Qui, sinon tous ces gouvernements européens qui se sont engouffrés dans les tsunamis économiques et sociaux que sont les traités de Maastricht et de Lisbonne, que jamais les communistes n’ont votés ?

Oui, la crise est une tragédie pour les peuples, mais c’est un paradis pour une minorité de nantis ! Comment ne pas rappeler ici que les revenus moyens des dirigeants du CAC40 se situent à 2,5 millions d’euros, soit l’équivalent de 150 fois le SMIC ? Comment ne pas rappeler que le PDG de PSA gagne 9 000 euros par jour, alors qu’il s’apprête à liquider 5 000 emplois ?

Ma question est simple, monsieur le Premier ministre : quelle est donc cette société où les femmes et les hommes sont tant méprisés ? Pour vous aider à y répondre, et à quelques jours de Noël, je vais vous faire un cadeau, monsieur le Premier ministre : ce livre, L’humain d’abord, programme du Front de gauche, de Jean-Luc Mélenchon, qui est en rupture totale avec votre politique !

M. le président. Monsieur Gosnat, c’est interdit par le règlement ! Messieurs les huissiers…

M. Pierre Gosnat. J’en profite pour inviter toutes celles et tous ceux qui nous regardent à se le procurer et à l’offrir sans modération !

M. le président. Monsieur Gerin, rangez cela, s’il vous plaît ! Vous savez très bien que c’est interdit.

M. Pierre Gosnat. Quant à vous, monsieur le Premier ministre, ce sera un cadeau…

M. le président. La parole est à Mme la ministre chargée de l’apprentissage et de la formation professionnelle, pour une réponse qui va bien entendu apaiser l’assemblée.

Mme Nadine Morano, ministre chargée de l’apprentissage et de la formation professionnelle. Monsieur le député, la crise que nous traversons est grave et réelle. Si le nombre de demandeurs d’emploi a augmenté dans notre pays, il a heureusement moins augmenté qu’au Royaume-Uni, en Espagne, ou dans d’autres pays de l’Union européenne. L’ensemble du Gouvernement est totalement mobilisé pour accompagner nos concitoyens dans cette crise ; nous sommes totalement mobilisés sur l’emploi.

Monsieur Gosnat, vous venez de nous dire que l’emploi vous préoccupe. Mais alors pourquoi le département du Val-de-Marne n’a-t-il pas signé la convention permettant de cofinancer les contrats uniques d’insertion pour les bénéficiaires du RSA ? (Huées sur les bancs du groupe UMP à l’adresse des membres du groupe GDR.)

M. Henri Emmanuelli. Zéro pointé, madame la ministre !

Mme Nadine Morano, ministre. Si l’emploi vous préoccupe, monsieur le député, soyez mobilisé, avec le Gouvernement, pour aider nos concitoyens, pour aider ceux qui sont dans les situations les plus fragiles et les plus précaires, pour leur permettre de retrouver un emploi.

Vous sortez le bâton contre le Gouvernement, alors que les Français attendent la mobilisation de tous.

M. Jean-Pierre Brard. Madame Sarah Palin, arrêtez d’aboyer !

Mme Nadine Morano, ministre. C’est cela qu’attendent nos concitoyens !

Nous avons, avec Xavier Bertrand, consacré 500 millions d’euros à la mise en place de contrats aidés et de formations. C’est cela qui est important !

M. Pierre Gosnat. Vous donnez cet argent aux patrons !

Mme Nadine Morano, ministre. Vous devriez dire aussi que nous avons de bons résultats, au lieu de nous dire que la crise est une tragédie. Nous, nous pensons que nous devons sortir de la crise.

M. Jean-Pierre Brard. Qu’on lui mette une muselière !

Mme Nadine Morano, ministre. Mais la bonne nouvelle, c’est que le nombre de contrats d’alternance a augmenté dans notre pays de 8,3 %. Nous attendons, d’ici à la fin de l’année, une augmentation de presque 10 %. Ce sont 50 000 jeunes qui n’auront pas connu le chômage, qui disposeront d’un contrat, d’un emploi. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Médecine de proximité

M. le président. La parole est à M. Michel Raison, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.

M. Michel Raison. Madame la secrétaire d’État chargée de la santé, vous étiez hier en déplacement en Ardèche avec le Président de la République.

Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. En campagne électorale !

M. Michel Raison. …pour rencontrer des citoyens, des élus, notamment notre collègue Jean-Claude Flory, et des médecins. Vous avez ainsi pu mesurer l'efficacité des mesures déjà prises pour soutenir l'exercice de la médecine de proximité et maintenir l'accès aux soins de premier recours. Je pense plus particulièrement aux 230 maisons de santé déjà créées dans notre pays.

Nos concitoyens et leurs élus s'inquiètent légitimement de la diminution du nombre de médecins en milieu rural et en zone urbaine sensible.

Depuis 2005, le numerus clausus a été augmenté de manière significative par rapport à 1999, mais les effets sont mathématiquement lents à se faire sentir. Bien entendu, ce n’est pas la solution, car en termes de démographie médicale, de très fortes inégalités se creusent entre les territoires. Bon nombre de départements, la Haute-Saône par exemple, sont confrontés à cette réalité.

Outre l'accès aux soins, ce phénomène de concentration aura aussi un impact direct sur le maillage des acteurs de la santé, qu'ils soient médecins, paramédicaux ou pharmaciens qui occupent un rôle de premier plan en matière de relais de santé auprès des Français.

Entre des mesures incitatives parfois insuffisantes et des mesures coercitives pouvant être décourageantes, il existe des solutions intermédiaires.

Aussi madame la secrétaire d’État, pouvez-vous nous faire part de ce premier bilan et des grands axes évoqués par le Président de la République hier en Ardèche ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État chargée de la santé.

Mme Nora Berra, secrétaire d’État chargée de la santé. Monsieur le député, effectivement nous étions avec Xavier Bertrand, aux côtés du Président de la République, en déplacement en Ardèche…

M. Michel Sapin. En campagne électorale !

Mme Nora Berra, secrétaire d'État. …pour rencontrer les professionnels de santé qui travaillent dans les zones rurales.

Ce qui caractérise la majorité présidentielle c’est qu’elle encourage les professionnels à travailler dans ces territoires et qu’elle leur accorde toute sa confiance. C’est là que réside la différence avec le parti socialiste.

M. Patrick Lemasle. Arrêtez !

Mme Nora Berra, secrétaire d'État. Après avoir porté le numerus clausus à son niveau le plus bas en 1992, celui-ci n’a d’autre réponse à la désertification médicale dont on sait qu’elle décourage nos concitoyens professionnels de santé que la coercition. Certains élus ont même songé à proposer de remplacer les médecins par des vétérinaires !

En tout cas, notre Gouvernement s’est engagé sur un certain nombre de mesures : le doublement du numerus clausus depuis dix ans que Xavier Bertrand et moi-même avons porté récemment à 8 000 ; la mise en place de bourses en direction des étudiants et des internes pour ceux qui acceptent de travailler dans ces territoires sous-dotés en professions médicales. Nous avons voulu libérer du temps médical pour les professionnels de santé en engageant, avec Xavier Bertrand, le chantier de simplification administrative. Nous avons voulu faciliter également l’exercice regroupé qui correspond à l’aspiration des professionnels, avec les maisons de santé pluridisciplinaires. Au total, 231 maisons fonctionnent aujourd’hui : autrement dit, l’objectif que nous nous étions fixé a été atteint avec un an d’avance.

Enfin, nous avons voulu faciliter le cumul emploi-retraite. 5 000 médecins ont fait le choix de cet exercice.

Les résultats sont là : on compte désormais davantage d’installations de médecins dans les zones rurales que de départs. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. Gérard Bapt. C’est faux !

Politique environnementale

M. le président. La parole est à M. Jean-Paul Chanteguet, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche

M. Jean-Paul Chanteguet. Madame la ministre de l’écologie, du développement durable, des transports et du logement, arrivant au terme de cette législature, l’heure est venue de faire le bilan de l’action gouvernementale en matière environnementale, bilan auquel le Président de la République ne saurait échapper.

De l’abandon de la taxe carbone et de toute fiscalité écologique au report de mesures concernant la RSE en passant par l’autorisation de circulation des 44 tonnes, les coups de rabots successifs sur le crédit d’impôt développement durable ou l’absence d’un plan massif de rénovation des logements, sont autant de signaux négatifs qui ont été adressés à l’opinion publique et qui marquent bien votre manque de volonté politique de vous approprier les enjeux environnementaux.

Si l’État est défaillant, les collectivités territoriales sont agissantes, à la tête desquelles les socialistes ont montré leur capacité à entreprendre (Rires et exclamations sur les bancs du groupe UMP) en matière de transport, de lutte contre les émissions de gaz à effet de serre, de construction de bâtiments HQE ou de modes de consommation et de production.

Amnésique depuis sa tonitruante déclaration faite au mois de mars 2010 au salon de l’agriculture, le Président de la République, touché à nouveau par la grâce environnementale, content de lui et donneur de leçon n’aura pu s’empêcher, il y a quelques semaines encore, en Mayenne, de multiplier les promesses. Ne vous a-t-il pas, madame la ministre, demandé de faire, avant la fin de l’année, des propositions portant sur la création d’un fonds national de préservation de la biodiversité financé par le redéploiement de toutes les incitations fiscales largement inefficaces ?

Attendant vos propositions avec beaucoup d’impatience, nous découvrîmes que vous aviez pris la liberté de désobéir au Président de la République en n’exécutant pas sa commande et de suggérer, peut-être touchée par un éclair de lucidité en matière de fiscalité écologique, la création d’un bonus-malus sur l’électroménager – éclair qui vous attira immédiatement les foudres de Mme Pécresse qui vous recadra sèchement en jugeant le dispositif coûteux et complexe.

Madame la ministre, après avoir été confrontée à de nombreux reculs et abandons et avoir perdu différents arbitrages, ce nouveau rejet n’est-t-il pas la preuve que le divorce entre la majorité présidentielle et l’environnement est maintenant définitivement consommé ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre de l’écologie, du développement durable, des transports et du logement.

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l’écologie, du développement durable, des transports et du logement. Monsieur le député, le Grenelle de l’environnement est une vraie révolution vers un modèle fondé sur la sobriété, la proximité, la qualité, une révolution dans laquelle nous aimerions être parfois mieux accompagnés par les députés socialistes. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC – Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Cette révolution est en cours : 1 000 logements ou bâtiments basse consommation avaient été construits en 2007, et plus de 100 000 au premier trimestre de 2011 ; en 2007, une voiture rejetait en moyenne 149 grammes de CO2 par kilomètre, et seulement 130 grammes aujourd’hui grâce au bonus-malus ; l’éolien en mer et à terre a été développé ; de nouveaux tarifs en matière de méthanisation ont vu le jour ; en matière de photovoltaïque, nous atteindrons bien en avance les objectifs du Grenelle de l’environnement ; dans le domaine de l’agriculture biologique, le nombre d’opérateurs, a augmenté de 49 % entre 2008 et 2010. Sans oublier le transfert modal : 1,3 milliard a été investi dans les transports en commun et les tramways en province ; nombre de collectivités socialistes ont voulu participer à des appels d’offre et ont du reste reçu des subventions. Nous aimerions les entendre en parler.

Le fonds pour la biodiversité dont vous parlez, annoncé par le Président de la République, va être créé et doté de 30 millions d’euros qui proviennent notamment de l’augmentation de la TVA à 19,6 % sur les produits phytosanitaires – votre question tombe à point, monsieur le député, puisque cette mesure a été décidée cette nuit même.

En fait, nous sommes obligés de faire à votre place le travail que vous auriez dû faire…

M. Patrick Lemasle. C’est vous, la majorité !

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre. …et que vous vantez d’avoir fait.

Je vous donnerai un seul exemple que j’aimerais que les Français retiennent. Tout le monde avait signé le pacte écologique de Nicolas Hulot, donc la taxe carbone. Nous l’avons faite, mais vous l’avez déférée au Conseil constitutionnel. C’est à cause de vous qu’il n’y a pas de taxe carbone aujourd’hui en France !

Bref, l’écologie, il y a ceux qui en parlent et ceux qui la font ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Prime de Noël

M. le président. La parole est à M. Joseph Bossé, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.

M. Joseph Bossé. Madame la ministre des solidarités et de la cohésion sociale, la lutte contre la précarité et l’exclusion sociale constitue un combat quotidien, auquel le Gouvernement et la majorité accordent une priorité absolue. Dans cet esprit, il est important de conforter les dispositifs de solidarité. (Exclamations sur les bancs du groupe GDR.)

À la veille de Noël, alors que des millions de Français et de Françaises s’apprêtent à passer les fêtes de fin d’année, nous ne devons pas oublier les plus démunis. L’an dernier, à cette période de l’année, un coup de pouce a été accordé à 1,7 million de bénéficiaires des minima sociaux grâce à la prime de Noël.

M. Jacques Desallangre. Quel en est le montant ?

M. Joseph Bossé. Cette prime est une aide attendue et considérable pour de nombreux foyers français, qui pourront ainsi, à l’occasion des fêtes, offrir eux aussi un Noël à leurs enfants.

M. Jean-Pierre Brard. Non mais sur quelle planète vivez-vous, mon cher collègue ?

M. Joseph Bossé. Madame la ministre, pouvez-vous nous confirmer que la prime de Noël sera reconduite cette année et selon quelles modalités ? (Applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP.)

M. Pierre Gosnat. Vous êtes trop bon !

M. le président. La parole est à Mme la ministre des solidarités et de la cohésion sociale.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre des solidarités et de la cohésion sociale. Monsieur le député, le Gouvernement est entièrement mobilisé dans la lutte contre la pauvreté. La période de Noël est une période de fête mais aussi une période de difficultés pour nos compatriotes les plus modestes. C’est la raison pour laquelle le Gouvernement a décidé de reconduire l’aide exceptionnelle de fin d’année que l’on appelle couramment la prime de Noël.

Elle va concerner les bénéficiaires du revenu de solidarité active, mais également ceux de l’allocation spécifique de solidarité, ainsi que ceux de l’allocation équivalent retraite. Je précise que nos compatriotes d’outre-mer sont maintenant concernés, depuis le 1er janvier 2011, par le bénéfice du RSA. Ils pourront donc également toucher cette prime de Noël…

M. Jean-Pierre Brard. Il ne manquerait plus que le contraire !

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. …s’ils sont bénéficiaires du RSA en novembre ou en décembre.

M. Jacques Desallangre. Quel est le montant de la prime ?

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Nous avons donc donné des consignes pour que les caisses d’allocations familiales et les caisses de MSA versent la prime de Noël aux 1,7 million de bénéficiaires du RSA. Les ordres de mandatement sont partis le 15 décembre et la prime devrait donc avoir été versée sur les comptes bancaires des bénéficiaires.

M. Jean-Pierre Brard et Mme Marie-Hélène Amiable. Combien ?

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Pour ce qui concerne l’allocation spécifique de solidarité et l’allocation équivalent retraite, l’ordre de mandatement est pris par Pôle emploi aujourd’hui.

M. Jacques Desallangre. Dites-nous quel est le montant de la prime, n’ayez pas honte !

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Les bénéficiaires vont donc toucher le montant de cette prime dans les prochains jours. Elle est d’environ 250 euros en moyenne et par famille. (« Ah ! » sur les bancs du groupe GDR.) Cela représente, ne serait-ce que pour les bénéficiaires du RSA, 366 millions d’euros.

C’est donc un effort tout à fait considérable, qui va permettre à de nombreuses familles modestes d’envisager ces fêtes de Noël avec plus de sérénité. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Énergies renouvelables

M. le président. La parole est à M. Christophe Bouillon, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

M. Christophe Bouillon. Madame la ministre de l’écologie, du développement durable, des transports et du logement, l’année 2011 s’achève. C’est l’heure des bilans, notamment pour les énergies renouvelables.

Sur ce sujet comme sur beaucoup d’autres, il y a les discours et il y a les actes. Intéressons-nous aux actes, quand on sait ce que valent les discours depuis 2007. Et voyons ce qu’il en est de l’éolien et du photovoltaïque en France.

L’année 2011 aura été celle de la panne de croissance du secteur éolien en France. La puissance installée est passée de 479 mégawatts en 2009 à 1 034 mégawatts en 2010 et à 340 en 2011. À ce rythme-là ce n’est pas une décrue, ce sont les chutes du Niagara. Et les projets d’éoliennes offshore ne gommeront pas cet effet.

Avec vous, la France n’atteindra jamais l’objectif de 25 000 mégawatts de puissance installée en 2020.

M. Alain Gest. N’importe quoi !

M. Christophe Bouillon. L’année 2011 aura aussi été celle de la crise de la filière photovoltaïque. L’entreprise Photowatt, acteur historique du solaire en France, a déposé son bilan.

M. François de Rugy. Eh oui !

M. Christophe Bouillon. Alors que partout dans le monde l’énergie solaire est en pleine expansion, notre pays, en quelques mois, a détruit un tiers des 25 000 emplois que la filière avait créés entre 2007 et 2010.

Souvenez-vous, on nous parlait, il n’y a pas si longtemps, de croissante verte et d’emplois verts. Les chiffres annoncés donnaient même presque le vertige. La réalité, aujourd’hui, c’est que les emplois verts sont passés au rouge. Pire, on n’en verra sans doute jamais la couleur.

Les petites entreprises, non délocalisables, sont les plus touchées. N’ayant pas la possibilité de se reporter sur d’autres activités, elles n’ont d’autre choix que de procéder à des licenciements. Triste nouvelle, dans le contexte actuel d’aggravation du chômage en France.

Alors, à qui la faute, me direz-vous ?

N’allez pas chercher, comme d’habitude, les 35 heures, le Front populaire, Mai 68, ou encore la crise, pour justifier vos échecs. La crise de l’éolien et du photovoltaïque s’explique par l’instabilité réglementaire dont vous avez fait preuve depuis plusieurs années.

Vous êtes atteints du complexe de Pénélope : vous détricotez ce que vous avez fait.

Quand allez-vous, madame la ministre, mettre fin à l’incohérence gouvernementale ? (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre de l’écologie, du développement durable, des transports et du logement.

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l’écologie, du développement durable, des transports et du logement. Pénélope va vous répondre, monsieur le député. En 2007, il y avait dans notre mix énergétique 9,3 % d’énergies renouvelables. Cette proportion était restée stable depuis la mise en service des derniers grands barrages. Ce taux est aujourd’hui de 13 % et nous sommes sur la voie de l’objectif de 23 % en 2020.

M. François de Rugy. Sûrement pas !

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre. L’éolien offshore est lancé. François Hollande est allé le saluer hier à Saint-Nazaire, qui sera un des grands sites de l’éolien offshore. Nous en attendons 10 000 emplois. L’appel d’offre a été lancé le 11 juillet dernier. Les entreprises doivent déposer leur projet avant le 11 janvier.

En ce qui concerne le solaire, nous avons triplé la puissance installée entre l’année précédente et l’année 2010-2011, en partant du mois de juin. Nous en étions à 1 700 mégawatts pour la période juin 2010-juin 2011. Que voudriez-vous ? Que nous ne soyons pas préoccupés par les 1,5 milliard d’euros de déficit de la balance commerciale dans le secteur solaire ?

Oui, nous avons rectifié le cadre du soutien au solaire. Mais c’est pour mieux créer des emplois en France, créer une filière industrielle en France et produire les panneaux que nous posons plutôt que de les importer. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. –Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

M. Christophe Bouillon. Ce n’est pas vrai !

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre. Mesdames et messieurs les députés, une politique énergétique solide se fonde d’abord sur une politique industrielle, et c’est ce que nous cherchons à faire dans le secteur des énergies renouvelables : produire en France les équipements que nous installons et que nous finançons. Car tout cela est financé sur la facture d’électricité des Français.

Il s’agit d’une politique poursuivant des objectifs de puissance, des objectifs environnementaux, mais aussi des objectifs en matière d’emploi. Il nous semble parfois, mesdames et messieurs les députés socialistes, que vous les oubliez un peu. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Réduction de la dépense publique

M. le président. La parole est à M. Alain Gest, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.

M. Alain Gest. Monsieur le président, ma question s’adresse à Mme la ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l’État. La crise des dettes souveraines, qui touche l’ensemble de la zone euro, nous conforte dans l’idée de l’impérieuse nécessité de moderniser nos politiques publiques. Le Gouvernement et la majorité n’ont d’ailleurs pas attendu 2011 pour engager cette modernisation à travers des politiques sectorielles. Le mouvement de réforme de l’État enclenché est donc durable. Qu’on en juge : 9,5 milliards d’euros d’économies seront réalisés en 2011 par rapport à 2008, et le cumul de l’ensemble des économies sur la période 2009-2013 représente 44 milliards d’euros d’économies.

M. Christian Eckert. C’est faux !

M. Alain Gest. Dans la majorité, nous sommes donc tout à fait clairs : il convient d’être vigilant sur les dépenses et de baisser les déficits publics. C’est une question de responsabilité envers les générations futures.

Pendant ce temps, la gauche tente de faire croire que le Gouvernement est seul responsable de notre déficit, alors même que la Cour des comptes, présidée par Didier Migaud, affirme que plus de la moitié est l’héritage d’un passé collectif et que la crise explique près de 40 % de cet endettement. Que propose la gauche ? L’augmentation massive de la fiscalité !

M. Jean Glavany. Et vous, que faites-vous ?

M. Alain Gest. La baisse et l’optimisation des dépenses ne sont jamais évoquées. Pour preuve, le Sénat, véritable laboratoire de la pensée de François Hollande, a dévoilé son programme lors de l’examen du budget de l’État et de la sécurité sociale. Résultat : le Sénat a alourdi les dépenses, et par voie de conséquence les recettes fiscales : une trentaine de nouvelles taxes ont été créées, pour un montant de 32 milliards.

M. Dominique Baert. Caricature !

M. Alain Gest. Madame la ministre, alors que vous venez de tenir le sixième conseil de modernisation des politiques publiques, pouvez-vous nous indiquer comment vous obtiendrez la participation des autres composantes des dépenses publiques, la sécurité sociale et les collectivités territoriales ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l’État, porte-parole du Gouvernement.

Mme Valérie Pécresse, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l’État, porte-parole du Gouvernement. Monsieur le député, le Gouvernement a fait un choix clair : celui de faire des économies sur ses dépenses et de réduire son train de vie.

M. Jean Glavany. Ce n’est pas le choix présidentiel en tout cas !

Mme Valérie Pécresse, ministre. La révision générale des politiques publiques engendrera 15 milliards d’économies d’ici à 2013. Au cœur de cette RGPP, il y a évidemment la diminution du nombre de fonctionnaires d’État : 150 000 fonctionnaires en moins, soit une baisse de 7 % des effectifs de l’État en cinq ans.

M. Pierre Gosnat. Ce n’est pas glorieux : moins de policiers, moins de services publics, moins d’infirmières !

Mme Valérie Pécresse, ministre. Nous avons aussi fait beaucoup d’économies sur les dépenses de fonctionnement de l’État. Permettez-moi d’en citer quelques-unes.

D’abord, en nous fixant comme objectif douze mètres carrés de bureau par agent, nous avons pu vendre 3 milliards d’euros de patrimoine. Nous avons supprimé un tiers des logements de fonction, 15 % des voitures de fonction et du parc automobile. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

M. Jean Mallot. Et votre bureau à vous, il fait combien de mètres carrés ?

Mme Valérie Pécresse, ministre. Nous avons mutualisé les achats de l’État, ce qui nous a permis de réaliser entre 30 % et 40 % d’économies sur les factures informatiques et téléphoniques. Au total, cela représentera 1 milliard d’euro d’économies. Enfin, nous avons baissé de 20 % les dépenses de communication de l’État.

M. Pierre Gosnat. Et l’ISF !

Mme Valérie Pécresse, ministre. Permettez-moi de lancer aujourd’hui un vibrant appel aux collectivités territoriales (Exclamations sur les bancs du groupe SRC – Applaudissements sur les bancs du groupe UMP) à nous rejoindre dans ce mouvement d’économies, de réduction du train de vie et des dépenses. Il n’y a qu’une seule dette publique : c’est la dette de l’État, mais c’est aussi la dette des collectivités territoriales. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Emploi

M. le président. La parole est à M. Michel Liebgott, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

M. Michel Liebgott. Monsieur le président, ma question s’adresse à M. le ministre du travail, de l’emploi et de la santé. Le quinquennat qui s’achève était annoncé comme celui du pouvoir d’achat ; il restera dans l’histoire comme celui du nombre record de chômeurs : toutes catégories confondues, nous en sommes aujourd’hui à 4,2 millions (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC), soit 1 million de plus depuis 2007. Plus inquiétant, le rythme annuel d’augmentation est de 5,2 %.

Vous voudriez nous faire croire que la crise en est la seule cause. Eh bien non ! Vos choix politiques ont fait office de facteurs aggravants.

Pourquoi les Allemands ont-ils créé 200 000 emplois en un an pendant que nous en supprimions 130 000 durant la même période ? Tout simplement parce que le taux des travailleurs à temps partiel en Allemagne est bien plus élevé : 26 % contre 17 % en France. Oui, le partage du temps de travail est une solution qui va de pair avec une augmentation de la productivité. Pendant ce temps, en France, on incite les entreprises à faire travailler plus ceux qui travaillent déjà. Par la défiscalisation des heures supplémentaires, mesure unique au monde et farfelue (Exclamations sur les bancs du groupe UMP),

M. Lucien Degauchy. Pas autant que les 35 heures !

M. Michel Liebgott. …qui coûte à nos finances publiques 4,5 milliards d’euros par an, vous ne donnez en moyenne que 48 euros par mois à ceux qui en bénéficient au détriment des créations d’emplois.

Mais l’emploi et le travail ne sont pas votre priorité. Chaque année, dans le projet de loi de finances, vous en réduisez les crédits : moins 12 % encore cette année. Vous n’êtes pas meilleurs quand il s’agit de permettre aux personnes les plus éloignées de l’emploi de reprendre pied, pour les jeunes comme pour les seniors.

M. Lucien Degauchy. C’est vous qui perdez pied !

M. Michel Liebgott. Un jour, c’est oui aux emplois aidés ; le lendemain, c’est non : moins 135 millions pour 2012. Même chose pour l’allocation équivalent retraite, elle est supprimée pour ceux qui ont les annuités mais pas l’âge du départ à la retraite. Il en est de même pour les aides aux chômeurs de longue durée ou les chômeurs en fin de droits dont, que vous le vouliez ou non, les allocations sont en baisse.

On comprend pourquoi le Président de la République veut aujourd’hui convoquer un sommet sur l’emploi le 18 janvier. Le problème, c’est qu’il ne lui restera plus que trois mois pour changer de politique et sauver son propre emploi ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre chargée de l’apprentissage et de la formation professionnelle.

Mme Nadine Morano, ministre chargée de l’apprentissage et de la formation professionnelle. Monsieur le député, quelle déception d’entendre un député mosellan adopter une posture aussi partisane s’agissant de l’emploi ! J’ai répondu tout à l’heure à votre collègue du Val-de-Marne sur l’accompagnement des demandeurs d’emploi les plus en difficulté, notamment les bénéficiaires du RSA. Le département de la Moselle, dirigé par un président UMP, Philippe Leroy,…

M. Michel Liebgott. Il est indépendant, pas UMP !

Mme Nadine Morano, ministre. …a signé une convention permettant de cofinancer les contrats uniques d’insertion pour les bénéficiaires du RSA. Les résultats sont là : 1 160 contrats ont été cofinancés sur un objectif annuel de 1 610 ; autrement dit, 72 % de l’objectif a été réalisé en Moselle.

Avec une posture idéologique de gauche, on n’accompagne pas les demandeurs d’emploi les plus en difficulté ; avec une volonté d’agir, comme celle du président UMP du conseil général de Moselle, les résultats sont là.

M. Bernard Roman. Et le taux de chômage ?

Mme Nadine Morano, ministre. Vous nous parlez de l’Allemagne, monsieur Liebgott. Vous êtes bien placé pour savoir que, depuis des décennies, les Allemands pratiquent la formation duale, que nous sommes en train de mettre en place en France. Aujourd’hui, là aussi, les résultats sont là. Les contrats d’alternance pour les jeunes ont augmenté de 8,3 % dans notre pays.

M. Jean-Paul Lecoq. Ils ont des emplois ?

M. Pierre Gosnat. Ils restent en dessous du seuil de précarité !

Mme Nadine Morano, ministre. D’ici à la fin du mois de décembre, 50 000 jeunes auront signé un contrat d’alternance. Ces jeunes ne sont pas à Pôle emploi – rappelons à ce propos que vous n’avez pas voté le budget nécessaire à son fonctionnement, qui atteint 1,3 milliard d’euros malgré un contexte difficile. Alors ne venez pas nous donner des leçons sur l’emploi ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. Daniel Vaillant. Alors là, si !

Formation par alternance

M. le président. La parole est à M. Georges Colombier, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire

M. Georges Colombier. Ma question s’adresse à Mme la ministre chargée de l’apprentissage et de la formation professionnelle. (« Encore ? » sur les bancs du groupe SRC.)

Madame la ministre, cela fait maintenant plus d’un an que vous êtes chargée de l’apprentissage et de la formation professionnelle. Le Président de la République vous a fixé une feuille de route ambitieuse, avec pour objectif 800 000 alternants d’ici 2015.

Cette feuille de route est importante, tant pour notre jeunesse que pour l’avenir de notre pays. En effet, l’emploi des jeunes est aujourd’hui un enjeu de taille, nous en sommes tous conscients. Notre responsabilité est de donner à nos jeunes la formation qui leur permettra d’accéder à un emploi durable et de trouver leur propre voie et leur autonomie. Notre responsabilité est de favoriser toutes les formations, et non la seule voie académique. Nous avons besoin de tous les talents et de toutes les intelligences.

Le Gouvernement et la majorité sont à la pointe de la lutte contre le chômage des jeunes, avec notamment le développement de l’alternance. Aujourd’hui, ce sont huit apprentis sur dix qui trouvent un emploi à l’issue de leur formation. L’alternance est un véritable « prêt à l’emploi » pour nos jeunes, un passeport pour l’emploi.

Il ne tient qu’à nous, madame la ministre, d’accélérer ce mouvement et d’amplifier la révolution culturelle que vous avez initiée.

Les jeunes savent qu’ils peuvent compter sur nous pour répondre à leurs attentes et les accompagner dans leur vie professionnelle.

En cette fin d’année, pouvez-vous nous faire un bilan des mesures qui ont été prises pour la valorisation de l’apprentissage et afin que les jeunes puissent trouver durablement le chemin de l’emploi ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre chargée de l’apprentissage et de la formation professionnelle.

Mme Nadine Morano, ministre chargée de l’apprentissage et de la formation professionnelle. Mesdames et messieurs les députés, je viens de le rappeler par deux fois dans cet hémicycle, et je m’en réjouis, parce que c’est une bonne nouvelle pour la France, cette révolution culturelle que nous avons engagée est en marche.

Nous le devons aux dispositifs que vous avez votés, notamment la loi Cherpion qui a permis d’élargir l’apprentissage et l’alternance au secteur de l’intérim et aux secteurs saisonniers. Elle a aussi permis la création de la carte étudiant des métiers – je l’ai lancée en début de semaine –, qui permet d’offrir les mêmes conditions tarifaires aux jeunes en apprentissage qu’à ceux qui suivent un cursus universitaire classique…

M. Guy Geoffroy. Très bien !

Mme Nadine Morano, ministre. …pour les restaurants universitaires, pour les logements universitaires, mais aussi pour les entrées dans le secteur culturel ou sportif.

Nous avons engagé, au niveau de l’État, 1,7 milliard d’euros à travers la contractualisation avec les régions. Nous donnons à ce titre la possibilité d’investir dans les CFA, d’avoir des effectifs supérieurs et donc d’atteindre, comme l’a souhaité le Président de la République, l’objectif de 800 000 alternants d’ici à 2015.

Nous savons que pour permettre aux jeunes d’entrer sur le marché de l’emploi, dans le secteur marchand, nous devons mettre en œuvre des politiques qui permettent aux entreprises, comme avec le dispositif zéro charges, de recruter des jeunes en alternance pour les entreprises de moins de 250 salariés.

Vous le voyez, notre politique est le contraire de la politique voulue par le Parti socialiste, et notamment François Hollande, qui propose la création de 300 000 emplois jeunes dans le secteur public, alors qu’ils ont mené les jeunes dans une voie sans issue en 1997.

M. Jean Glavany. Vous pourriez citer encore une fois François Hollande, s’il vous plaît ?

Mme Nadine Morano, ministre. Nous, nous voulons une politique active qui permette aux jeunes d’avoir un vrai avenir, et cet avenir, c’est dans l’entreprise qu’il se joue. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Réglementation du secteur bancaire

M. le président. La parole est à M. Serge Janquin, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

M. Serge Janquin. Monsieur le ministre de l’économie et des finances, nous convenons du fait qu’il est essentiel de protéger l’épargne de nos concitoyens. Aussi, dès lors que la Banque centrale européenne décide de prêter à 1 % aux banques pour financer les prêts aux ménages et aux entreprises, il est indispensable de réguler et de contrôler.

Faut-il que ce soient les États-Unis et le Royaume-Uni qui donnent l’exemple dans le domaine de la réglementation du secteur bancaire ? Aux États-Unis, la règle Volcker s’applique désormais. Ce lundi 19 décembre, le gouvernement britannique vient d’adopter le rapport de la commission Vickers recommandant de séparer les activités de dépôt des activités d’investissement, et ce contre le lobby de la City, qui voulait le maintien des banques dites universelles.

Le gouvernement britannique justifie sa position par la protection des dépôts des particuliers comme des entreprises, en rendant ces activités étanches par rapport aux placements à risque. Pourquoi le Gouvernement français ne décide-t-il pas une telle réforme, qui est de prudence et de bon sens ? Ne me dites pas, comme vient de le faire Nadine Morano, que je suis dans une posture idéologique, puisque je demande au Gouvernement conservateur français de ne pas faire moins dans ce domaine que le gouvernement conservateur de M. Cameron.

Quand allez-vous décider de séparer ces activités bancaires, pour assurer la protection des épargnants et la transparence des opérations ? Parce que vous le savez : dans ces activités spéculatives des banques, ce sont les Français qui trinquent, y compris du fait de la tarification bancaire abusive. Et les Français, monsieur le ministre, ils en ont jusque-là ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie.

M. François Baroin, ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Monsieur le député, vous avez évoqué la Banque centrale européenne. Nous avons salué l’initiative qui a été prise de donner une profondeur de champ de trois années d’accès illimité aux liquidités. Ce matin s’est tenue l’opération, c’est un grand succès et une réponse puissante qui permet de retirer une très large partie de la pression qui pèse sur les établissements bancaires depuis plusieurs semaines. C’est une initiative positive, qui va dans la bonne direction et qui permet de solidifier nos établissements bancaires.

Vous me demandez si nous allons dénoncer votre idéologie ou votre doctrine. Surtout pas ! Et je vais vous dire pourquoi : c’est en 1984, Jacques Delors étant ministre des finances, que se met en place le dispositif de modèle bancaire à la française que vous contestez aujourd’hui.

M. Jean Glavany. C’est faux ! C’est un mensonge absolu !

M. François Baroin, ministre. Je me garderai bien, en conséquence, de vous reprocher, comme vous semblez le craindre, une position idéologique : c’est sous le gouvernement Mauroy qu’est entrée en vigueur la loi du 24 janvier 1984 relative à l’activité et au contrôle des établissements de crédit.

Aujourd’hui, vous mettez ce modèle en cause. Nous ne pensons pas que ce soit une bonne idée car l’histoire récente montre que cela peut être un échec. Lehman Brothers, pure banque d’affaire, est tombée sans être soutenue par l’administration américaine de l’époque, et ce fut un désastre puisque son rôle de banque d’affaire était un rôle systémique et que sa faillite a entraîné un désastre bancaire à l’échelle internationale. Le contre-exemple est celui de Northern Rock, stricte banque de dépôt, qui n’a pas échappé à un bank run, c’est-à-dire des files d’attentes de déposants allant chercher leurs économies et vider les coffres de cette banque, qui s’est effondrée et a été soutenue par l’État. Ces deux contre-exemples montrent que la séparation des banques d’affaires et des banques de dépôt ne permet pas de garantir la stabilité.

La voie choisie par le Gouvernement est différente : c’est le renforcement des règles prudentielles, l’application stricte des normes d’augmentation des fonds propres, et l’évolution de la surveillance pour la protection du modèle généraliste. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. Jean Glavany. Voilà un bon porte-parole de l’Association française des banques !

M. le président. Nous avons terminé les questions au Gouvernement.

Mes chers collègues, je crois que nous pouvons tous souhaiter à nos compatriotes, et en particulier à ceux qui sont confrontés à des difficultés, de passer les meilleures fêtes de fin d’année possible. (Applaudissements sur tous les bancs.)

Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à seize heures, est reprise à seize heures vingt, sous la présidence de M. Louis Giscard d’Estaing.)

Présidence de M. Louis Giscard d’Estaing,
vice-président

M. le président. La séance est reprise.

2

Projet de loi de finances pour 2012

Lecture définitive

M. le président. M. le président a reçu de M. le Premier ministre une lettre demandant à l’Assemblée de statuer définitivement, en application de l’article 45, alinéa 4, de la Constitution, sur le projet de loi de finances pour 2012.

En conséquence, l’ordre du jour appelle la discussion de ce projet de loi en lecture définitive (nos 4108, 4111).

La parole est à Mme Valérie Pécresse, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l’État, porte-parole du Gouvernement.

Mme Valérie Pécresse, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l’État, porte-parole du Gouvernement. Monsieur le président, monsieur le rapporteur général, mesdames et messieurs les députés, dans quelques minutes, vous allez statuer en dernier ressort sur ce projet de loi de finances pour 2012. Vous mettrez ainsi un point final à près de trois mois de débats qui furent non seulement riches et animés mais aussi extrêmement constructifs.

Ce budget, nous l’avons en effet élaboré en toute coresponsabilité…

M. Christian Eckert. Pas avec nous !

Mme Valérie Pécresse, ministre. …en faisant preuve de sérieux et de réactivité dans une période marquée par de grandes incertitudes. Et le résultat de nos travaux, mesdames et messieurs les députés, c’est un budget grâce auquel la France franchit une nouvelle étape sur le chemin du désendettement.

Car il s’agit bien d’une étape : notre effort de réduction des déficits, nous l’avons engagé dès 2010 et nous le poursuivrons jusqu’en 2016, c’est-à-dire jusqu’au retour à l’équilibre de nos finances publiques. Cet effort de désendettement est porté depuis trois ans par une seule et même stratégie qui fait l’unité et la cohérence des textes financiers que vous avez examinés au cours des derniers mois.

C’est une stratégie au long cours car le désendettement du pays n’est pas l’affaire d’une seule année ; il exige de la constance et de la persévérance dans l’effort et d’abord dans nos efforts pour réduire les dépenses de l’État.

Si nous sommes parvenus à amorcer cette baisse dès 2011 et à l’accélérer en 2012, c’est grâce à toutes les mesures que nous avons prises depuis cinq ans : le non-remplacement d’un départ à la retraite sur deux dans la fonction publique de l’État ;…

M. Michel Bouvard. Très bien !

Mme Valérie Pécresse, ministre. …la réforme de l’État au travers de la révision générale des politiques publiques ; la réforme de la carte judiciaire ; la réforme de la carte militaire ; et dans le champ des dépenses sociales, la réforme des retraites ou celle de l’hôpital.

Chacune de ces réformes, en son temps, a été contestée, critiquée, caricaturée.

M. Michel Bouvard. C’est vrai !

Mme Valérie Pécresse, ministre. Mais nous le voyons aujourd’hui : ces réformes sont désormais des acquis irréversibles et personne ne pourra se payer le luxe de les remettre en cause parce qu’on ne désendettera pas la France en augmentant les dépenses publiques.

C’est l’évidence même. Tous ceux qui, dans les circonstances actuelles, jugent raisonnable une charge supplémentaire d’un milliard d’euros vivent en dehors de la réalité. Nous avons changé de monde et dans le monde où nous vivons aujourd’hui, les promesses irresponsables n’ont plus leur place.

Plus que jamais, l’heure est au discours de vérité. Oui, la réduction des déficits exige des efforts de la part de tous, et d’abord de l’État et des administrations qui avaient oublié ce que le mot « économies » voulait dire. Tous les Français le savent : c’est nous tous qui sommes aujourd’hui appelés à prendre notre juste part de l’effort de désendettement.

C’est pourquoi l’équité est l’autre fil rouge qui, avec la baisse des dépenses, traverse l’ensemble des textes que vous avez adoptés au cours des derniers mois.

Là encore, je ne reviendrai pas sur le détail de dispositions dont nous avons longuement débattu. Je me contenterai d’un seul chiffre : 2,3 milliards d’euros. C’est le montant de la contribution au désendettement qui sera demandée aux Français les plus aisés en 2012, effets de la réforme de l’impôt de solidarité sur la fortune inclus.

M. Christian Eckert. Vous plaisantez ?

Mme Valérie Pécresse, ministre. Avec la refonte du régime des plus-values immobilières, avec la hausse des prélèvements sociaux et fiscaux sur les revenus du capital, avec la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus ou bien encore avec la baisse du plafond global des niches, notre politique fiscale est à l’évidence marquée du sceau de l’équité.

Nous veillons à l’équité entre les ménages, bien sûr, mais aussi entre les entreprises. Avec la limitation du report des déficits, avec la fin du bénéfice mondial consolidé ou bien encore avec la majoration exceptionnelle de l’impôt sur les sociétés, nous demandons un effort supplémentaire aux plus grandes entreprises et nous préservons les PME, qui, chacun sait, sont plus fragiles face au ralentissement de l’économie.

Il est en effet absurde d’opposer, comme l’a fait l’opposition tout au long de nos débats, la réduction des déficits et le soutien à la croissance. Nous n’avons pas à choisir entre ces deux objectifs parce qu’ils vont de pair : le redressement des finances publiques est la condition de la confiance qui est elle-même nécessaire à la croissance partout en Europe.

M. Christian Eckert. Pour l’instant, c’est loupé sur les deux tableaux : vous n’avez ni la confiance ni la croissance !

Mme Valérie Pécresse, ministre. De même, la croissance est la condition sine qua non du retour à l’équilibre des comptes publics. C’est pourquoi notre effort de redressement des finances publiques se double d’une vraie politique de compétitivité pour stimuler notre croissance à long terme.

Depuis cinq ans, nous investissons comme jamais dans la recherche et l’innovation grâce au crédit impôt recherche, bien sûr, mais également grâce aux investissements d’avenir. La réindustrialisation de la France ne se décrète pas mais elle se construit en réformant nos universités, en faisant tomber le mur de Berlin qui sépare la recherche publique de la recherche privée…

M. Christian Eckert. L’exemple, c’est Servier !

Mme Valérie Pécresse, ministre. …et en aidant nos PME à innover pour grandir et gagner des parts de marché.

Mesdames et messieurs les députés, la compétitivité passe aussi par la revalorisation du travail grâce à la création du revenu de solidarité active et à la défiscalisation des heures supplémentaires, que l’opposition n’a eu de cesse de vouloir remettre en cause. Là encore, quel contresens ! La France est plus compétitive lorsque chacun peut travailler plus pour gagner plus, lorsque l’effort et l’initiative sont récompensés, lorsque la création d’entreprise devient plus facile grâce, par exemple, au statut d’auto-entrepreneur.

M. Jean Launay. Allez dire cela à la CAPEB !

M. Christian Eckert. Invendable !

Mme Valérie Pécresse, ministre. C’est pourquoi, au cœur de ce budget 2012, il y a bien deux priorités : la réduction des déficits, bien sûr, mais aussi le soutien à la croissance.

Avec l’appui permanent de la majorité et du rapporteur général de la commission des finances, que je veux remercier au nom du Gouvernement et en mon nom personnel,…

M. Gilles Carrez, rapporteur général de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire. Merci, madame la ministre.

Mme Valérie Pécresse, ministre. …nous avons ainsi veillé à préserver tous les dispositifs qui soutiennent l’activité économique et l’emploi.

Le résultat, c’est un budget de soutien à la croissance et de désendettement, un budget que nous avons construit ensemble et que le Gouvernement vous demande d’adopter définitivement. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à M. Gilles Carrez, rapporteur général de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire.

M. Gilles Carrez, rapporteur général de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le Sénat a adopté la motion tendant à opposer la question préalable à ce projet de loi de finances pour 2012. Il a donc rejeté ce projet de budget.

Conformément à l’article 45, alinéa 4, de la Constitution, le Gouvernement demande donc à l’Assemblée nationale de statuer en dernier ressort. La commission mixte paritaire n’ayant pu parvenir à un texte commun, l’Assemblée nationale doit donc se prononcer sur le texte que nous avons adopté la semaine dernière en nouvelle lecture.

C’est la première fois que cette situation se produit depuis dix ans, depuis 2002 précisément. Elle s’était déjà produite auparavant, entre 1997 et 2002.

La commission des finances, en application de l’article 114, alinéa 3, de notre règlement, vous propose donc, chers collègues, d’adopter définitivement le texte voté par notre assemblée.

Je n’évoquerai pas le contenu de ce budget. Nous l’avons déjà longuement débattu et vous venez, madame la ministre, d’en rappeler les grandes lignes. Je me borne donc à reprendre le point central de votre intervention : ce projet de loi de finances pour 2012 s’inscrit résolument dans la trajectoire indispensable de réduction progressive de nos déficits publics.

M. Guy Malherbe. Eh oui !

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Cela dit, en cette fin de session budgétaire particulièrement chargée, je veux formuler des remerciements.

Je vous remercie, tout d’abord, madame la ministre, ainsi que l’ensemble de vos collaborateurs, présentement assis derrière vous au banc des commissaires du Gouvernement. Nous avons vécu, c’est vrai, des moments intenses, des moments de travail particulièrement difficiles, et les conditions dans lesquelles nous devions examiner les différents textes nous ont parfois obligés à travailler très rapidement.

M. Guy Malherbe. Et très efficacement !

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Je rappelle, mes chers collègues, c’est un record, que nous aurons examiné, depuis la fin du mois d’août dernier, quatre projets de loi de finances : trois collectifs et le projet de loi de finances pour 2012. Nous l’avons fait dans des délais réduits, et c’est grâce à une excellente coopération entre vous-même, madame la ministre, vos collaborateurs et l’ensemble des députés que nous avons pu relever ce défi.

J’ai fait un rapide calcul. Savez-vous, mes chers collègues, que nous aurons, avec ces quatre lois de finances, examiné 2 130 amendements ? Nous avons siégé pendant 52 séances, et nous avons adopté 400 articles, qui, à eux seuls, représentent 730 pages de texte.

M. Charles de Courson. C’est formidable ! (Sourires.)

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Je veux vous remercier, mes chers collègues, que vous siégiez sur les bancs de la majorité ou sur ceux de l’opposition, pour la qualité de nos discussions. Toutes ces lois de finances ont été l’objet, on peut le dire, de discussions approfondies et un certain nombre d’amendements, qui se révèleront, je l’espère, des amendements d’amélioration, ont pu, grâce à la grande ouverture d’esprit dont vous avez fait preuve, madame la ministre, être adoptés par notre assemblée. Je pense que nous pouvons éprouver une certaine fierté à l’issue de l’examen de ces quatre textes, qui vont vraiment dans le sens de l’intérêt général. Je remercie donc chaleureusement tous mes collègues. Beaucoup de temps de discussion, beaucoup de temps de travail aura été nécessaire. Je vous remercie, vous avez énormément apporté.

Je m’adresse plus particulièrement à la majorité : nous avons vraiment travaillé dans un climat de collégialité. Chacun a su écouter l’autre, et nous avons toujours cherché à retenir ce qu’il y avait de plus intéressant, tout en posant des questions de fond.

Je remercie aussi le président de la commission des finances.

M. Michel Bouvard. À raison !

M. Gilles Carrez, rapporteur général. En effet, monsieur le vice-président Bouvard, notre président a mené les débats en faisant preuve de beaucoup d’ouverture d’esprit, de beaucoup d’écoute, le tout avec la rapidité et l’efficacité nécessaires à la prise de décisions.

Je remercie également les présidents de séance, tout d’abord notre actuel président de séance, qui, de surcroît, a beaucoup siégé sur les bancs de l’hémicycle dans le cadre de l’examen des lois de finances, mais aussi l’ensemble des présidents de séance qui se sont succédé. Tous ont présidé remarquablement, alors que, s’agissant de textes très techniques, il faut à la fois savoir laisser du temps à la discussion lorsque c’est nécessaire et accélérer quand on peut accélérer. Je les remercie donc vivement, et je vous prie, monsieur le président Giscard d’Estaing, de bien vouloir exprimer ma reconnaissance à vos collègues.

Pour terminer, je remercie la presse, qui a rendu compte de nos travaux, et l’ensemble du personnel de l’Assemblée nationale, présent tout au long de ces longues séances. Me faisant, je crois, le porte-parole d’un sentiment unanime, je remercie plus particulièrement les administrateurs de la commission des finances. (Applaudissements.)

Je vous souhaite à toutes et à tous d’excellentes fêtes de fin d’année, que nous pourrons passer avec le sentiment du devoir accompli. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

M. le président. Merci, monsieur le rapporteur général. Je transmettrai, tout naturellement, vos remerciements et vos compliments aux autres présidents de séance.

La parole est à M. Jérôme Cahuzac, président de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire.

M. Jérôme Cahuzac, président de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire. C’est avec un très vif plaisir que je sacrifie à mon tour à la tradition et remercie, moi aussi, l’ensemble des collègues qui ont bien voulu participer à la discussion des projets de loi de finances que nous venons d’examiner, discussion qui se conclut aujourd’hui. Plus généralement, je remercie tous ceux qui ont bien voulu examiner les lois de finances de l’ensemble d’une législature qui n’en fut pas avare. Tous les collègues ont donc droit à mes amicales pensées et à ma reconnaissance, peut-être plus particulièrement les membres de la commission des finances qui, reconnaissons-le, ont été particulièrement sollicités cette année, comme les années précédentes, le contexte l’expliquant parfaitement.

Je veux aussi remercier à mon tour le service de la séance et la présidence de séance, plus particulièrement tous ceux qui ont exercé cette présidence. Je remercie aussi le seul qui n’a, pour l’instant, pas été remercié, et pour cause, puisque c’est lui qui s’exprimait : le rapporteur général. Tout au long de cette législature, il aura su être à l’écoute, naturellement, de ses amis de la majorité – il parle souvent en leur nom – mais aussi, souvent, pour ne pas dire toujours, des parlementaires de l’opposition, n’écartant jamais d’un revers de main les arguments qui pouvaient être exposés et les amendements déposés. Il s’est toujours efforcé, avec une parfaite honnêteté intellectuelle et avec ses convictions, de leur répondre. Le plus souvent, c’était pour réfuter les arguments et refuser les amendements, mais il s’exprimait de telle façon que chacun ne pouvait qu’accepter les explications données, certes sans forcément y adhérer.

Monsieur le rapporteur général, vous avez puissamment contribué à ce que l’examen de ces lois de finances puisse se dérouler dans un climat parfaitement républicain. Cela n’exclut pas l’opposition – nous sommes ici pour confronter des idées, des projets et peut-être des valeurs que nous ne partageons pas – mais nous savons ce qui doit l’emporter, puisque la démocratie, c’est-à-dire la loi de la majorité, est notre règle commune à tous.

Je remercie à mon tour, monsieur le rapporteur général, les services de la commission des finances, en particulier ses administrateurs, dont de nombreux collègues, me semble-t-il, méconnaissent le travail. C’est pourtant un travail absolument indispensable et terriblement exigeant, qui nécessite une présence continuelle et, très souvent, tardive, chaque jour de la semaine, voire le week-end – je peux en témoigner car je les croise lorsque je viens travailler le week-end – un travail fait de loyauté et d’abnégation. Le rapporteur général a ainsi pu dire qu’il était dans l’incapacité de dire quels étaient les choix personnels des administrateurs avec qui il travaille. J’en suis également incapable, mais je peux, comme le rapporteur général, reconnaître leur parfaite loyauté et leur extraordinaire dévouement pour que les parlementaires puissent travailler de la meilleure manière possible. Je les remercie donc à mon tour, très chaleureusement et très sincèrement.

Je vous remercie, monsieur le président, de m’avoir permis de conclure à mon tour ce marathon budgétaire, de l’année mais peut-être aussi de la législature. Il semble effectivement douteux, malgré certaines suppositions et certains pronostics, qu’un nouveau collectif nous soit soumis. Si c’était néanmoins le cas, je suis sûr que nous viendrions de nouveau, avec enthousiasme,…

M. André Wojciechowski. Avec grand plaisir !

M. Jérôme Cahuzac, président de la commission des finances. …dans cet hémicycle, pour avoir le plaisir de nous y retrouver et pour y confronter nos idées et nos projets. Si ce n’était pas le cas, hypothèse qui me paraît aujourd’hui la plus probable, je tiens à remercier à titre personnel le rapporteur général pour le travail que nous avons pu faire ensemble. Je vous remercie également, madame la ministre, pour le travail que nous avons fait depuis que vous avez pris vos fonctions ; vous avez votre caractère, j’ai le mien, vous avez vos convictions, j’ai les miennes, mais cela ne nous a pas empêchés de montrer que le travail se fait, au Parlement, dans le respect de nos lois, de nos règlements et de la sincérité de chacun. Je ne doute pas de la vôtre, comme, naturellement, vous ne doutez pas de la mienne.

Chers collègues, je vous souhaite un très joyeux Noël, de très bonnes fêtes, une très bonne et très heureuse année.

Chers collègues de la majorité, permettez-moi de vous souhaiter plus particulièrement tout ce que voulez de bon et de meilleur, sauf, peut-être, une chose – vous devinez laquelle. (Applaudissements sur de nombreux bancs.)

Mme Marie-Christine Dalloz. Très bien !

M. le président. Je vous remercie, monsieur le président de la commission des finances.

Motion de rejet préalable

M. le président. J'ai reçu de M. Jean-Marc Ayrault et des membres du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche une motion de rejet préalable déposée en application de l'article 91, alinéa 5, du règlement.

La parole est à M. Christian Eckert.

M. Christian Eckert. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur général, mes chers collègues, j’ai cherché qui j’aurais pu remercier, qui n’aurait pas déjà été remercié. J’ai pensé aux collaborateurs des groupes, souvent mobilisés, qui ont veillé tard, et à mon épouse, qui a beaucoup souffert de mon absence. (Sourires.)

M. Jean-Pierre Brard. Il faut toujours garder ses illusions ! (Sourires.)

M. Christian Eckert. Cela dit, le sujet est sérieux et cette ambiance de fin de cycle – fin de cycle à tous égards – ne doit pas nous cacher l’essentiel.

Le texte que le Gouvernement nous demande d’adopter en dernier ressort ne saurait être lu à la seule lumière de sa volonté de nous désendetter ou de renouer avec une vertu depuis longtemps perdue. Si nous en sommes là sur le plan budgétaire et sur le plan de l’endettement, madame la ministre, c’est bien à la suite de dix ans d’exercice du pouvoir par une même majorité et de cinq ans d’exercice du pouvoir par Nicolas Sarkozy et par les gouvernements qu’il a nommés. Cela ne saurait être oublié.

Vous nous dites qu’il s’agit d’un budget de soutien à la croissance. Las, j’ai bien cherché mais je n’ai point trouvé de soutien à la croissance dans ce budget.

Cherchant, par exemple, dans le budget de la mission « Travail et emploi », j’y ai trouvé une diminution de 12 % des crédits. Pour soutenir le travail et l’emploi, on a connu mieux !

J’ai cherché dans le bilan de la RGPP, que vous vantez, heure après heure, sur toutes les tribunes. Avec un collègue de l’UMP, François Cornut-Gentille, nous avons commis un rapport sur le bilan de la RGPP, madame la ministre. Il est pour le moins interrogatif. Le 1er décembre, nous l’avons présenté au Comité d’évaluation et de contrôle de notre assemblée.

Nous y avons écrit que les mesures d’économie annoncées, à hauteur de 15 milliards d’euros sur la période 2009-2011, ne sont pas atteintes. En additionnant des carottes et des navets, on n’obtient pas forcément un bon pot-au-feu !

Par exemple, vous avez omis de dire que si le non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux peut, certes, provoquer une économie budgétaire sur les postes, il engendre, dans l’éducation nationale notamment, le déploiement d’un nombre d’heures supplémentaires considérable, plus payées, défiscalisées et sources d’une importante dépense fiscale.

Nous sommes d’accord pour chiffrer à environ 500 millions d’euros – ce qui n’est pas rien, sans être non plus une somme gigantesque – l’économie budgétaire, hors dépense fiscale, engendrée par le non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux.

D’ailleurs, dans l’un de ses rapports, le rapporteur général avait obtenu des résultats équivalents. On est loin de ce qui est claironné à toutes les tribunes.

Venons-en à quelques-unes des mesures contenues dans ce projet de loi de finances. Ce sont des mesures sévères. Par exemple, vous avez introduit ce fameux jour de carence pour tous les fonctionnaires, qu’il s’agisse de la fonction publique d’État, de la fonction publique territoriale ou de la fonction publique hospitalière, soi-disant par équité, pour s’aligner sur le privé.

Mais, madame la ministre, les trois quarts des salariés du privé ne subissent aucune diminution de salaire suite au jour de carence, puisqu’ils ont négocié des accords de branche qui prennent en charge dans les trois quarts des cas les trois jours de carence.

Or, dans la fonction publique, vous n’aurez pas ce résultat. Par conséquent, ce sera un nouveau déséquilibre, qui ne va pas malheureusement dans le sens de vos annonces.

Vous prétendez avoir raboté les niches. Mais vous avez utilisé une lime à ongle, pour reprendre l’expression du rapporteur général. Votre coup de rabot est de 15 % supplémentaire mais combien des niches existantes concerne-t-il ? Il ne porte que sur une très faible partie des niches, soit 3,5 milliards d’euros de niches sur les 30 milliards recensés.

Ce n’est pas un coup de rabot, ce n’est que de l’affichage, encore une fois !

En revanche, votre projet de loi de finances contient des mesures extrêmement dures et pénalisantes pour les plus fragiles. Par exemple, vous avez décidé de ne plus augmenter les allocations logement à hauteur de l’inflation et vous prétendez les augmenter selon la croissance.

Mais heureusement que ce n’est pas le cas, madame la ministre : vous avez indiqué dans le texte une augmentation de 1 %. Si vous les aviez augmentées au niveau de la croissance, ce serait encore moins, car nous connaissons tous les inquiétudes sur le volume de la croissance pour les mois et les années à venir.

Dans ce projet de loi de finances, vous avez aussi diminué de 200 millions d’euros les ressources des collectivités territoriales. C’est un montant considérable. Or, dans notre pays, ce sont les collectivités territoriales qui ont la libre administration de leur budget, qui ne peuvent s’endetter au-delà de ce qui est contrôlé et qui assurent les trois quarts de l’investissement public. D’ailleurs ceci pèse sur la croissance.

Je ne dis pas que tout est mauvais. Il y a eu quelques petites avancées. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) L’objectivité n’est pas le monopole du rapporteur général du budget.

Vous avez, par exemple, introduit dans ce projet de loi la péréquation horizontale pour les collectivités territoriales. C’est une bonne chose, qui était recherchée depuis plusieurs années.

D’ailleurs, il a probablement fallu l’amicale pression de nos collègues sénateurs pour avancer sur ce sujet, qui a finalement rassemblé l’ensemble des parlementaires, sénateurs ou députés. C’est un premier pas.

Cette avancée était nécessaire mais reste encore insuffisante. Peut-être faudra-t-il parfaire le système mis en place. Nous disposons de simulations mais nous n’y verrons peut-être plus clair que dans un an. Néanmoins, c’est un progrès incontestable. François Pupponi y reviendra lors de la brève discussion générale que nous aurons sur ce texte.

Vous avez instauré diverses taxes sur les boissons sucrées et faussement sucrées. Je doute que cela soit fait pour la prévention et dans un souci de santé publique. Cette mesure n’a que peu d’intérêt.

Madame la ministre, vous voulez continuer sur cette voie. Les Français décideront aux mois d’avril et de juin prochains s’il en sera ainsi.

Des différences fondamentales nous opposent. J’en rappellerai quelques-unes.

D’abord en ce qui concerne les notions de service public et de mission de l’État. La RGPP n’a pas été conçue dans un sens tout à fait adéquat, indépendamment de la forme.

Il faut que vous cessiez de présenter les fonctionnaires comme une charge. La chasse aux fonctionnaires est devenue une mode et un symbole. Les fonctionnaires ne sont pas une charge, madame la ministre.

Nous considérons plutôt les missions de service public assurées par les fonctionnaires comme un facteur de redistribution de l’impôt. C’est une redistribution sous forme de service de la contribution que chacun apporte à l’État.

Évidemment, il faut la gérer, mais cessons de penser que les fonctionnaires d’État, territoriaux ou hospitaliers ne représentent qu’une charge et que, plus on en supprime, plus on va vers l’égalité et l’équité. C’est faux, nous le vivons tous sur nos territoires et dans l’offre de service qui existe.

Nous avons également des divergences fondamentales sur la question du travail et des heures supplémentaires. Les débats qui ont eu lieu dans cet hémicycle, sur ce texte ou sur le PLFR, ont montré une fracture.

Madame la ministre, nous ne sommes pas contre les heures supplémentaires mais contre leur défiscalisation. Nous pensons que tous les revenus doivent rentrer dans une même assiette, sur un impôt progressif.

S’il faut des heures supplémentaires, payons-les. Pour assurer le pouvoir d’achat, payons-les plus, s’il le faut. Mais stoppons cet effet d’aubaine considérable. Au cours des débats, nous avons parlé de l’effet d’aubaine que les heures supplémentaires ont produit dans la fonction publique. Plutôt que de défiscaliser ces heures supplémentaires pour revaloriser les salaires, il nous semble préférable de revaloriser les salaires, tout en maintenant, en cas de besoin, notamment dans le secteur privé, la possibilité d’heures supplémentaires, dans des limites raisonnables, pour répondre aux pointes de demande ou d’activité.

Ces différences subsisteront et seront probablement discutées dans les prochains débats préélectoraux. Les Français nous départageront.

Nous n’oublions pas ce qui n’est pas dans ce texte : la taxe sur les contrats d’assurance solidaires pour tous les Français qui paient des mutuelles, dont vous avez parlé dans le collectif de septembre, ou les dispositions du projet de loi de finances rectificatives que vous allez défendre dans quelques minutes.

Nous vous demandons, madame la ministre, de ne pas maintenir ce projet de loi en l’état. L’expression démocratique va se dérouler. Bien sûr, nous respecterons le choix qui sera fait, mais nous ne pouvions pas ne pas pointer dans ce projet de loi de finances 2012 les iniquités…

M. Dominique Baert. Les injustices !

M. Christian Eckert. …et les injustices.

À la veille de Noël, nous vous demandons, mes chers collègues, de vous ressaisir, d’avoir un éclair de lucidité et de nous donner encore le temps de revoir ce qui fait défaut dans ce projet de loi de finances.

M. Jérôme Chartier. Continuons la semaine prochaine !

M. Dominique Baert. Si vous êtes libres, cela ne nous pose pas de problème !

M. Christian Eckert. Pourquoi pas !

On a reconnu sur ces bancs l’esprit de responsabilité de l’ensemble des parlementaires. L’opposition a exprimé ses points de vue et défendu de très nombreux amendements. Elle n’a jamais perturbé le débat par des effets de procédure. Elle a même accepté des modifications de la procédure qui étaient parfois très difficiles à accepter, comme le dépôt d’amendements en cours de séance, dans des conditions d’examen peu correctes. Certes, l’urgence le justifiait mais cela a été parfois un peu exagéré…

Cher Jérôme Chartier, poursuivons ces discussions la semaine prochaine, au mois de janvier ou de février ! Le président de la commission des finances affirme qu’il n’y aura pas de collectif budgétaire, j’en doute malgré tout.

Il y en aura un, paraît-il, au premier semestre, Mme la ministre nous l’a confirmé. Mais puisque nous arrêtons nos travaux aux alentours de la fin du mois de février, il me semble qu’il ne reste que très peu de temps.

Si un collectif budgétaire était imposé par la mise en œuvre d’accords européens, comme d’habitude, nous nous livrerions à cet exercice. Mais que l’on n’en profite pas pour y glisser encore des mesures, dont on entend parfois parler, qui s’ajouteront encore aux difficultés que connaissent les plus défavorisés de nos concitoyens. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. le président. Dans les explications de vote sur la motion de rejet préalable, la parole est à M. Charles de Courson, pour le groupe Nouveau Centre.

M. Charles de Courson. Monsieur Eckert, vous avez beaucoup développé la thèse de l’injustice sociale d’un certain nombre de mesures.

Je reviendrai d’abord sur les délais de carence. Mon cher collègue, voici l’injustice actuelle : les salariés du privé ont trois jours de délai de carence ; ceux du public n’en ont pas.

Lorsque le Gouvernement a proposé de passer à un jour pour les salariés du public, nous étions pour la parité.

Vous avez déclaré que la part complémentaire était prise en charge pour les salariés du privé. Je me permets de vous rappeler que ce n’est pas le cas de tous les salariés, tant s’en faut ! Seuls les deux tiers d’entre eux sont concernés et selon des modalités diverses, car il y a autant de cas de figure que d’entreprises.

Vous avez oublié de dire que les salariés du privé co-financent ces mesures de couverture complémentaire dans les accords collectifs.

M. Christian Eckert. Pas toujours !

M. Charles de Courson. La plupart du temps !

Il en est de même des prestations de base. Vous avez également oublié de rappeler que, pour les salariés du public, c’est une cotisation patronale implicite qui les finance à hauteur de 100 %.

Si l’on est pour la justice sociale, mon cher collègue, il faut avoir le courage de remettre de l’ordre pour que les salariés du privé soient traités comme les salariés du public et vice-versa.

Vous avez critiqué la taxe sur les sodas et les édulcorants. Mais enfin, vous connaissez la position de la très grande majorité de la majorité ! Cette taxe n’a pas été établie à des fins de politique de santé ; elle vise à financer la mesure permettant de réduire la précarité chez les salariés du secteur agricole. Certes, elle n’y est pas affectée juridiquement, mais elle a permis de financer 210 millions d’euros. Bernard Reynès, ici présent, pourrait vous en parler abondamment, puisque nous avons travaillé ensemble et avec d’autres collègues, pendant des mois, pour tâcher de trouver une solution. Vos assertions ne sont donc pas exactes.

D’autre part, en ce qui concerne les heures supplémentaires, je note que la conversion de notre collègue est en cours, puisqu’il a déclaré qu’il n’était pas contre.

M. Christian Eckert. Je ne suis pas contre les heures supplémentaires !

M. Charles de Courson. C’est un progrès ! Monsieur Eckert, certains de vos collègues ici présents ont voté contre l’augmentation du quota d’heures – vous n’étiez pas encore député – après l’avoir tant réduit, sous Martine Aubry, qu’il n’était plus possible d’en faire. La bonification des heures supplémentaires sous forme d’exonération d’impôts et de cotisations sociales est une mesure sociale : vouloir la supprimer, comme vous faites, est antisocial.

Vous ne nous avez décerné qu’un seul bon point, à propos de la péréquation. Il est vrai que nous l’avons inscrite dans la Constitution et même s’il s’est ensuite écoulé deux ans avant qu’elle ne s’applique, nous avons progressé. Ce que nous avons fait n’est pas parfait, chacun en est conscient.

M. Jean Launay. Il reste du chemin à parcourir !

M. Charles de Courson. Mais il suffit d’écouter nos collègues des collectivités riches crier comme des putois pour se convaincre que nous allons dans la bonne direction.

M. Christian Eckert. Je n’ai pas dit le contraire !

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Brard, pour le groupe GDR.

M. Jean-Pierre Brard. Si les plus riches crient comme des putois, c’est parce que, dès qu’on leur arrache un poil, ils hurlent comme si on les saignait. Vous qui les fréquentez plus que nous, mes chers collègues, savez que c’est la vérité. Et vous qui avez l’habitude de tondre les pauvres, vous n’ignorez pas non plus que, trop souvent, ceux-ci se laissent faire et ne savent pas utiliser, pour protester, les cordes vocales dont la nature les a dotés.

Nous arrivons au terme de la discussion, et, bien que vous n’ayez pas encore compris ce que nous disons depuis des semaines et des mois, je crois qu’il est inutile de tout répéter. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

M. Christian Jacob. C’est gentil de nous épargner cela !

M. Jean-Pierre Brard. En fin de compte, ce n’est pas telle ou telle mesure qu’il faut rejeter : c’est une politique globale. Et l’actualité se charge de nous en apporter la confirmation. Savez-vous, madame la ministre, que les entreprises du CAC 40 ont gagné 83 milliards d’euros de bénéfices pour le seul profit des actionnaires ? Ceux-là, vous ne les tondez pas, parce que vous craignez, pour vos chastes oreilles, le cri des putois, comme dirait Charles de Courson.

Dans votre système injuste, après les irréels sommets de Bruxelles, il a donc été décidé que la BCE allait ouvrir ses coffres-forts aux banques européennes. Dès ce matin, elle leur a prêté 489 milliards. Les banques ont emprunté au taux de 1 %. Mais savez-vous à quel taux elles vont prêter à leur tour ? Jusqu’à 7 % ! Avec l’argent de la Banque centrale, vous allez encore permettre aux banquiers de faire du gras, comme s’ils n’en avaient pas assez ! C’est tout votre système qui est injuste. Demain, ce n’est pas le rafistoler qu’il faudra, mais l’abattre, pour éviter que les Français ne connaissent encore la déception et le désespoir.

M. le président. La parole est à M. Jean Launay, pour le groupe SRC.

M. Jean Launay. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nous avons à peine terminé l’examen du projet de loi de finances pour 2012, et ce budget est déjà caduc. Christian Eckert vient de le démontrer, dans une nouvelle synthèse des reproches politiques que nous pouvons légitimement vous adresser, eu égard à la différence de nos options en matière fiscale et financière.

Madame la ministre, vous avez mis l’accent sur le désendettement, alors que vous avez largement contribué à accroître la dette. Tout cela ne masquera pas les nombreux manques dans de nombreuses missions : Christian Eckert a cité la mission « Travail et emploi » et la mission « Enseignement scolaire ».

Le rabot n’a été passé que sur une faible partie des niches, la taxe sur les hauts revenus est cosmétique, tout cela relevant de l’affichage, alors que de nombreuses mesures touchent ceux de nos concitoyens qui connaissent la précarité, et que ce budget crée beaucoup de taxes. Christian Eckert a justement dénoncé les déchirements que vos choix entraînent dans le tissu social : taxe sur les mutuelles, délai de carence, assimilation systématique des fonctionnaires à la dépense publique. Tout cela n’est pas correct.

Madame la ministre, ce budget est caduc, car il repose sur une hypothèse de croissance déjà dépassée. Il n’est pas équitable, parce que la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus, les efforts supplémentaires demandés aux grandes entreprises ne masqueront pas les déséquilibres des revenus et les déséquilibres sociaux que vous avez creusés. Tout au long de cette mandature, vous avez voulu jumeler croissance et confiance. Ce budget est la marque de votre échec en la matière. C’est la raison pour laquelle je vous invite, mes chers collègues, à adopter la motion de rejet préalable défendue par Christian Eckert. Si vous ne le faisiez pas, notre groupe ne pourrait voter ce budget socialement et fiscalement injuste et économiquement inefficace. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. le président. La parole est à M. Jérôme Chartier, pour le groupe UMP.

M. Jérôme Chartier. La majorité va, bien sûr, rejeter cette motion de rejet préalable, car l’adopter serait revenir sur toutes les décisions prises par la majorité, notamment celles qui visent à contrer tout ce que les socialistes ont imaginé au Sénat et dont voici la rapide synthèse : 32 milliards d’euros d’impôts en plus…

M. Charles de Courson. Vingt-sept !

M. Jérôme Chartier. …5 milliards d’euros de niches fiscales supplémentaires, vingt-trois taxes créées ou augmentées, y compris une taxe sur l’eau douce qui aurait frappé toutes les familles de France, notamment les plus modestes. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Vous nous reprochiez d’avoir fait preuve, ces cinq dernières années, d’une certaine créativité en matière de taxes : vous venez de montrer, au Sénat, qu’elle n’était rien face à la vôtre, laquelle est sans limite. Cela laisse bien augurer de ce que vous feriez si par malheur vous étiez appelés aux responsabilités. Pour les Français, ce n’est pas souhaitable.

M. Jean Launay. C’est en route !

M. Jérôme Chartier. Ça ne l’est pas plus pour la situation budgétaire du pays. Ça ne l’est pas davantage pour le déficit français.

Sans doute ces responsabilités au Sénat vous ont-elles été confiées trop tôt et cela ne vous facilite pas la tâche. Vous êtes désormais placés face à vos contradictions. Vous croyiez que votre discours tiendrait la route, avec vos fameux « 15 milliards d’euros pour les riches ».

M. Christian Eckert. Quinze milliards par an !

M. Jérôme Chartier. Mais, en même temps, vous condamniez les heures supplémentaires qui permettent aux 9 millions de Français qui, depuis 2007, pratiquent chaque année 750 millions d’heures supplémentaires de toucher en moyenne un mois et demi de salaire en plus. Voilà ce que vous appelez un « cadeau aux riches » ! Pour vous, les riches, ce sont ceux qui travaillent plus pour gagner plus.

M. Christian Jacob. Ce sont les gens qui travaillent, monsieur Brard !

M. Jérôme Chartier. C’est toute la démarche de l’opposition qui est anéantie depuis qu’elle a remporté la majorité au Sénat. Et ce n’est pas seulement aujourd’hui que nous lui reprocherons ces contradictions, mais tout au long des six prochains mois : il faut que tous les Français sachent que vous avez un discours populiste en période d’élections, et, lorsque vous êtes aux responsabilités comme au Sénat, un discours destructeur de démocratie, destructeur d’économie, destructeur de croissance et, surtout, destructeur pour l’avenir des Français. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

(La motion de rejet préalable, mise aux voix, n’est pas adoptée.)

Discussion générale

M. le président. Dans la discussion générale, la parole est à M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson. Tout a été dit, tous les remerciements ont été adressés aux collègues qui sont intervenus, car nous avons la chance de siéger dans une commission où majorité et opposition se respectent, s’écoutent, où il arrive même – hélas trop rarement – que la majorité retienne des propositions de l’opposition, ce qui doit être la règle dans une démocratie équilibrée.

Il est regrettable que nos collègues du Sénat aient adopté la question préalable : en effet, il n’y a plus de discussion. Nous nous étions pourtant bien amusés avec la première lecture au Sénat. Les plus facétieux disaient que la nouvelle majorité sénatoriale avait fumé la moquette – la moquette budgétaire, s’entend. Elle avait augmenté les recettes de 29 milliards mais supprimé 190 milliards d’euros de dépenses : il n’y avait plus d’éducation nationale, plus d’affaires étrangères, plus d’agriculture. Il n’y avait même plus de Journaux officiels : on était bien tranquille, on n’avait plus besoin de publier les lois de la République ! Vous avouerez, chers collègues de l’opposition de l’Assemblée nationale, que jamais vous n’auriez fait cela, vous. Mettons ça sur le compte de la jeunesse de la majorité socialiste du Sénat.

Plus sérieusement, je voudrais dire un mot des mesures de redressement. Le rapporteur général et le président de la commission des finances l’ont dit, nous avons largement amélioré le texte du Gouvernement. Madame la ministre, vous l’avez d’ailleurs reconnu dans votre propos introductif : nous vous avons aidé, nous avons amélioré les choses dans le sens de la justice et de l’efficacité économique. C’est notamment vrai à propos de la tranche supplémentaire : nos collègues de l’opposition étaient très surpris de nous voir créer une tranche supplémentaire à 45 % sur une assiette beaucoup plus large que prévu, les 4 % concernant le revenu fiscal de référence. Tout cela va donc dans la bonne direction.

Je n’émettrai, en conclusion, qu’une seule réserve. La situation économique continue de se dégrader en Europe. Je supplie l’opposition de cesser de dire que c’est la faute du Gouvernement. Si seulement c’était vrai ! Il suffirait de changer de Gouvernement et tout irait bien !

M. Dominique Baert. On va essayer !

Mme Sandrine Mazetier. Tout ira mieux, en tout cas !

M. Charles de Courson. Soyez un peu sérieux ! Nous sommes en récession, mais les Allemands aussi : ce n’est donc pas la faute de la politique gouvernementale.

M. Jérôme Cahuzac, président de la commission des finances. Nous convergeons ! (Sourires.)

M. Charles de Courson. Il faudra faire une dizaine de milliards d’euros d’efforts supplémentaires dès le premier semestre de l’année prochaine. Nous discuterons des modalités ultérieurement.

Le groupe Nouveau Centre votera ce texte.

M. Dominique Baert. La soupe approche !

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Brard.

M. Jean-Pierre Brard. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le 27 octobre dernier, Nicolas Sarkozy a déclaré que son « travail, c’est de rapprocher la France d’un système qui marche, celui de l’Allemagne ». Mais l’Allemagne n’est pas un Eldorado, contrairement à ce que prétend Nicolas Sarkozy. Les Allemands eux-mêmes critiquent leur modèle économique égoïste qui prospère au détriment des autres États. L’ancien chancelier allemand Helmut Schmidt a déclaré le 4 décembre dernier que « les excédents allemands ne sont en réalité que les déficits des autres États ».

Écoutez ceci, mes chers collègues : L’Allemagne est le pays d’Europe qui a le moins créé d’emplois. C’est le pays où la hausse des inégalités de revenus a été la plus forte, à l’exception de la Bulgarie et de la Roumanie. C’est le pays où la part des salaires dans la valeur ajoutée a le plus diminué. C’est le pays où le pourcentage de chômeurs indemnisés a le plus baissé. Enfin, en Allemagne, un emploi sur trois est un emploi précaire et un emploi sur dix est payé moins de 400 euros par mois. Que répondez-vous à cela, madame la ministre ? Il faut arrêter de parler de l’Allemagne en général : le responsable, ce n’est pas l’Allemagne, c’est le gouvernement fédéral allemand. Nicolas Sarkozy est en train de nous placer dans un rapport de subordination vis-à-vis de Mme Merkel et du Konzern qui décide de la politique allemande. J’ai d’ailleurs rapporté de Berlin un photomontage que j’ai fait distribuer à certain d’entre vous, mes chers collègues. Il décrit très bien la situation.

Mme Valérie Pécresse, ministre. Monsieur Brard, nous ne sommes pas dans une cour de récréation !

M. Jean-Pierre Brard. C’est vrai, madame la ministre, nous ne sommes pas dans une cour de récréation, nous sommes dans le symbole ! Qui tient le biberon pour alimenter la pensée de Nicolas Sarkozy ? C’est Mme Merkel. Pour qui roule-t-elle ? Pour les Thyssen ou les Krupp. Ce n’est pas nouveau.

M. Sarkozy prend les Français pour des candides ! Cela marche pour vous, madame Pécresse, et pour certains membres de l'UMP, mais soyez assurée que le peuple français comprend parfaitement que M. Sarkozy tente d'imposer une régression sociale sans précédent.

Madame Pécresse, je pensais que vous aviez le sens de l’humour, surtout quand les images parlent mieux encore que le texte.

Mme Valérie Pécresse, ministre. C’est un peu puéril !

M. Jean-Pierre Brard. Le personnage qui est représenté est puéril, je vous l’accorde ! La mère, dans cette affaire, il n’y a pas de doute, c’est Mme Merkel ! Je comprends qu’après ces échanges, les journalistes veuillent savoir de quoi je parle. Qu’ils se rassurent, je vais leur faire parvenir un exemplaire du photomontage.

Nous assistons aujourd'hui, sous couvert d'une volonté d'harmonisation avec l'Allemagne, à une remise en cause totale des acquis sociaux arrachés de haute lutte, le siècle dernier, aux forces de l'argent.

Non, nous ne vivons pas dans le meilleur des mondes possibles. En contraignant les salaires et les investissements, le capitalisme financier tue la source de la croissance. Vos politiques d'austérité sont à l’origine d'une réalité terrible pour les salariés français, je l’ai dit tout à l’heure lors des questions au Gouvernement : ils sont pris entre le marteau et…

M. Christian Jacob. La faucille !

M. Jean-Pierre Brard. …l’enclume.

D'un côté, la rémunération des salariés diminue ou, au mieux, stagne – en valeur de pouvoir d’achat –, et ce dans le public comme dans le privé. De l'autre, vous augmentez la TVA sur les produits de première nécessité et les complémentaires santé, ce qui écrase et diminue d'autant le pouvoir d'achat des salariés. Votre stratégie de la tenaille accable la France du travail. Le célèbre dialoguiste Michel Audiard disait : « Les salariés sont les êtres les plus vulnérables du monde capitaliste : ce sont des chômeurs en puissance. »

Que fait le Président de la République pour ces salariés, les dignes représentants de la France d'en bas, qu’il regarde, lui, d’en haut ? Rien, si ce n'est proposer, lors de son déplacement à Sallanches, le 13 décembre dernier, de développer le chômage partiel.

Nicolas Sarkozy a déclaré : « Je crois à l'activité partielle. […] c'est certainement l'une des mesures que l'on peut développer […], nous y consacrerons des moyens supplémentaires. » Le Président de la République sait-il ce que c’est qu’un emploi partiel quand on est caissière chez Carrefour ? Comment ferait-il, lui, pour vivre avec 500 euros par mois ?

M. Christian Jacob. Et vous, vous le savez ?

M. Jean-Pierre Brard. Certainement mieux que vous, monsieur Jacob ! D’abord parce que, dans ma circonscription, il y a plus de situations…

M. Christian Jacob. Nous pourrions comparer nos feuilles d’impôts, si vous en avez le courage !

M. Jean-Pierre Brard. Banco ! Comparons nos feuilles d’impôts ! J’ai quitté le parti communiste depuis longtemps, mais j’ai gardé les mêmes conditions de rémunération parce que je n’ai jamais fait de la politique pour de l’argent.

M. Jérôme Chartier. Et où va le reste ?

Mme Valérie Pécresse, ministre. Dans les niches !

M. Jean-Pierre Brard. Le reste, monsieur Chartier, je le donne ! Le fait que vous m’interrogiez en dit long sur vous-même…

M. Jérôme Chartier. Vous le donnez à qui ?

M. Jean-Pierre Brard. Aussi bien au Secours populaire qu’au Secours catholique qu’à la Fondation de l’Institut Curie, ou encore aux Petits frères des pauvres, mon cher collègue !

M. Jacques Remiller. Et Mme Voynet, elle fait comment ?

M. Jean-Pierre Brard. Vous irez en parler avec elle, elle est en voie de recyclage !

Mais revenons-en à notre propos, chers collègues.

Le Président de la République ose dire qu’il est favorable au travail précaire. Sait-il ce que sont les fins de mois impossibles ? Ce qu’est la vie des femmes seules avec des enfants quand elles ne savent pas de quoi le lendemain sera fait ? Comment être aussi inhumain, aussi peu sensible à la misère, si ce n’est dans les discours, quand il parle de la France qui travaille dur et qui se lève tôt, mais qu’il ne fréquente jamais ? Il est vrai qu’on ne peut pas aller à la fois au LIDL du coin et fréquenter le Fouquet’s ! Nous n’avons pas les mêmes références !

Alors que les entreprises du CAC 40 ont réalisé 83 milliards d'euros de bénéfices l'année dernière et servi 40 milliards d'euros de dividendes à leurs actionnaires, des entreprises profitables, comme Renault, se servent de ces dispositifs pour augmenter leurs bénéfices et rémunérer grassement leurs actionnaires, délocaliser davantage et supprimer des emplois – chez Renault comme chez Peugeot. Pour autant, le ministre nous a dit cet après-midi que ce qui se passait chez Peugeot, par exemple, ne l’indignait pas particulièrement.

Le chômage partiel sert de variable d'ajustement de la masse salariale et permet de faire supporter par la collectivité la rémunération des salariés de ces entreprises. C’est un marché de dupes. Un article des Échos daté d'hier cite la situation des salariés de l'entreprise Poclain Hydraulics, qui ont conclu en 2008 – les naïfs ! – un accord sur le chômage partiel et une diminution de salaire correspondante. S'il n'y a eu aucune suppression d'emploi dans cette entreprise, les salariés n'ont pas été récompensés des sacrifices consentis puisque les bénéfices réalisés ont été distribués aux actionnaires de l'entreprise. C’est cela, votre système ! C’est rendre la vie chaque jour plus difficile pour les gens qui n’ont à vendre, comme disait le grand ancêtre, que leur force de travail, tandis que ceux qui en vivent sont de plus en plus riches, grâce aux actions qu’ils possèdent et dont les dividendes grossissent grâce au travail de ceux qui usent leur vie dans les entreprises.

Monsieur le président, je sens que vous allez me rappeler à l’ordre…

M. le président. Vous le pressentez à juste titre !

M. Jean-Pierre Brard. Je voudrais dire à Mme la ministre, en paraphrasant un homme politique américain, Frederick Douglass, que les puissants – vous appartenez à cette classe, madame la ministre, dût votre modestie en souffrir, encore que je n’aie pas l’impression qu’elle en souffre vraiment… Les puissants, disais-je, ne connaissent d’autre limite à leurs exactions que la patience de ceux qu’ils oppriment. Je vous le dis, chers collègues de la majorité, vous devriez être attentifs au grondement qui vient du peuple et qui vous dit : « Nous n’en pouvons plus ! » Et la révolte gronde aussi bien dans nos campagnes que dans nos entreprises tant les injustices sont insupportables.

Monsieur le président, je vais quitter cette tribune, mais je sens bien que tout à l’heure, dans mon dos, vous vous interrogiez sur ce que j’avais distribué à nos collègues et qui les faisait sourire. Comme je ne veux pas vous priver du plaisir de recevoir ce petit cadeau, je vais vous donner le photomontage que j’ai évoqué tout à l’heure. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. le président. La parole est à M. Jérôme Chartier.

M. Jérôme Chartier. Monsieur le président, madame la ministre, chers collègues, nous voici au terme d’un débat budgétaire qui fut plus long qu’à l’accoutumée et établi dans des circonstances exceptionnellement difficiles, tendues, serrées, mais qui, en même temps, a permis un large débat sur les enjeux qui nous concernent.

Quels sont-ils ?

Chacun a pu observer une dégradation de la conjoncture internationale depuis le mois de juillet dernier, due aux tensions nées de la crise des dettes souveraines. Cette crise a engendré un gel de l’ensemble de l’activité économique mondiale, qui s’est traduit par une contraction de la croissance dans le monde, particulièrement dans les pays occidentaux, et donc dans la zone euro. Ce contexte nous a conduits à de nouvelles hypothèses budgétaires et à marquer la volonté du Gouvernement et de la majorité de respecter la réduction du déficit public à l’aune d’une moindre croissance. En effet, après avoir espéré pour 2012 une croissance de 2 %, nous sommes passés à une prévision de 1,75 %, puis de 1,4 % et, pour finir, de 1 %.

Nous tiendrons ce taux de croissance ; ce n’est ni un vœu pieux ni une illusion, mais une réalité qui repose sur la base de plusieurs éléments à la fois déterminants et convergents.

Je pense d’abord au maintien de la consommation. Chacun a pu l’observer au mois de novembre dernier, la consommation française, vecteur essentiel pour la croissance du PIB, s’est maintenue et elle va jouer son rôle au début de l’année 2012 comme au quatrième trimestre de 2011. C’est une perspective importante qui va traditionnellement à l’encontre de toute pensée de récession.

Ensuite, les capacités de la production française tiennent. Nous continuons à produire et nous sommes dans une bonne moyenne pour ce qui est de l’utilisation des capacités de production. On ne peut donc pas parler d’une chute de nos capacités de production, ce qui permet d’augurer – si la situation de la zone euro se décoince – une reprise relativement rapide, une fois que la gouvernance de la zone euro et l’ensemble des éléments permettant cette gouvernance seront mis à jour et établis par l’Eurogroupe.

En outre, c’est un point important, la confiance des directeurs d’investissements se stabilise. Elle s’est dégradée aux mois d’août, septembre et octobre, et s’est stabilisée au mois de novembre. Les directeurs d’investissements, l’un des principaux indicateurs observés par la Banque de France, attendent une possible remontée de la conjoncture nationale – je dis bien « possible ». Mais cette remontée, qui était inenvisageable il y a quelques mois, laisse augurer une réelle possibilité de reprise, plus rapide et dans de meilleures conditions que prévu.

Enfin, la trésorerie des entreprises est à son plus haut niveau depuis 2006. Aujourd’hui, nos entreprises, qui ont fait attention à leurs dépenses, ont contracté leur investissement, et ce faisant, elles ont une trésorerie positive si bien qu’elles pourront réinvestir rapidement dès que les conditions de la confiance seront réunies. Les conditions de la confiance sont liées, bien sûr, à la capacité de stabilisation et de solidification de la zone euro. La prise de décision, annoncée voici quelques jours et mise en œuvre dès aujourd’hui, de la Banque centrale européenne, de prêter à 523 banques 489 milliards d’euros à 1 % sur trois ans, permet de redonner de la fluidité à l’économie à travers les banques, qui, chacun le sait, sont l’élément moteur du financement de l’économie.

Nous allons donc pouvoir, grâce à cette mécanique vertueuse, compter sur l’investissement productif – espérons-le – et sur la fluidité du financement – espérons-le aussi –, en tout cas sur une somme conséquente qui va enclencher la machine à croissance et permettre le financement des dettes souveraines puisque nous allons emprunter sur les marchés, en 2012, 178 milliards d’euros, dont un bon tiers sur le premier trimestre. Pour ce faire, nous allons solliciter les spécialistes en valeur du trésor, c’est-à-dire les seize personnalités morales qui, traditionnellement, sollicitent des emprunts auprès de la France, qui ont confiance en notre pays, une confiance qui n’a jamais été démentie ni dégradée. Ces spécialistes en valeur du Trésor sont aussi les banques à qui la Banque centrale européenne prête de l’argent pour assurer la fluidité.

Voilà tous les fondements économiques, nationaux et européens, qui permettent d’augurer une meilleure trajectoire que celle pressentie soit par des spécialistes, soit par l’opposition. Continuons à nous inscrire dans cette trajectoire et, surtout, souhaitons que les dix-sept pays de la zone euro puissent, grâce à l’initiative de Nicolas Sarkozy et d’Angela Merkel, s’inscrire dans le renouvellement de la gouvernance, dans la dynamique européenne, dans une vision de convergence budgétaire, qui nous permettent de sortir de cette période extraordinairement difficile pour notre pays et pour les Français par le haut, en faisant grandir l’économie, l’Europe et la zone euro.

L’UMP soutient naturellement ce projet de loi de finances parce qu’elle a été directement associée à l’établissement et à la construction de ce budget, lequel a été établi de façon extrêmement sérieuse, rigoureuse et avec courage, qualité toute particulière que je tiens à souligner. C’est un budget sérieux parce qu’à chaque fois que la conjoncture s’est dégradée, la trajectoire de réduction du déficit devant être respectée, la prévision de croissance a été révisée à la baisse et nous avons maintenu l’équilibre budgétaire en ajustant les dépenses – à la baisse – et les recettes –légèrement à la hausse. En 2011, le déficit public est de 5,7 % du PIB et il sera respecté. Il est prévu qu’il atteigne 4,5 % du PIB en 2012, il sera respecté. Nous envisageons qu’il soit de 3 % du PIB en 2013 pour qu’il y ait en 2016 une extinction du déficit budgétaire, et ce pour la première fois depuis 1974. La trajectoire de réduction du déficit public sera donc tenue…

M. Dominique Baert. Vous ne l’avez pas tenue toutes ces dernières années !

M. Jérôme Chartier. …puisque le Gouvernement et la majorité s’en sont donné les moyens grâce à une gestion très sérieuse et rigoureuse et parce qu’ils ont annoncé avec beaucoup de courage des mesures qui peuvent, certes, apparaître impopulaires, mais qui sont surtout courageuses et responsables à une époque où il n’existe pas d’alternative possible, chacun le sait, et où il faut en même temps veiller au fondement de l’économie et au pouvoir d’achat des Français. Les socialistes sont d’ailleurs en proie à leur turpitude, s’agissant du maintien du pouvoir d’achat, car ils renoncent, maintenant, à la mesure qu’ils avaient prise, mesure consistant à priver de tout allégement fiscal et social les neuf millions de Français qui accomplissent des heures supplémentaires. Le Sénat a pourtant voté la disparition de cette mesure qui a donné, depuis 2007, 22,67 milliards d’euros de pouvoir d’achat en plus à ces neuf millions de Français. Or, depuis quelques semaines, les socialistes reculent, hésitent parce qu’ils ont compris que ces neuf millions de Français souhaitaient conserver ce pouvoir d’achat important. Ce ne sont pas les Français les plus riches, mais ceux qui travaillent davantage, ceux qui font des heures supplémentaires, ceux qui appartiennent, comme on le dit souvent, à la classe moyenne et qui trouvent légitime de gagner davantage lorsqu’ils travaillent davantage. Cette mesure coûte, c’est vrai, 4 milliards d’euros par an au budget de la France, mais ce sont 4 milliards d’euros de pouvoir d’achat supplémentaire. Telle est la façon dont le Gouvernement respecte sa trajectoire et ses principes. Ces principes sont les mêmes depuis 2007 : davantage de pouvoir d’achat lorsque les circonstances l’autorisent, ce qui est encore le cas aujourd’hui ; davantage d’économies, cœur de la révision générale des politiques publiques, à savoir près de 15 milliards d’euros à l’horizon 2013…

M. Christian Eckert. Qu’est-ce qu’on va faire de tout ce « pognon » ?

M. Jérôme Chartier. …ce qui est une performance extrêmement significative et, surtout, une démarche très rigoureuse s’agissant de la gestion publique. Ainsi, depuis 2007, année après année, nous avons réalisé entre 1,2 point et 1,7 point d’économies budgétaires par an. Dans ce projet de budget pour 2012, les dépenses de l’État diminuent pour la première fois depuis 1945, comme l’a dit Valérie Pécresse. C’est la vérité, mes chers collègues, j’ai pu le vérifier !

Telle est la démarche de la majorité : une démarche extrêmement courageuse, rigoureuse et sérieuse. Nous allons ainsi, chers collègues, pouvoir préparer l’année 2012 sous les meilleurs auspices et dans les meilleures conditions et nous garderons surtout cette trajectoire de réduction des déficits, cette trajectoire à laquelle les Français sont aujourd’hui attachés ! (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

M. le président. La parole est à M. Jean Launay.

M. Jean Launay. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, deux mois ont passé depuis le début de l’examen du projet de loi de finances pour 2012.

Dans la discussion générale, j’avais alors fait le choix d’intervenir sur la péréquation horizontale, et j’y reviens rapidement. En effet, ce projet de loi de finances amorce finalement à hauteur de 200 millions d’euros les redistributions entre collectivités. François Pupponi développera ce point. Je m’interroge, pour ma part, sur les conditions de détermination des communes éligibles au versement et celles éligibles à la subvention. Je pense concrètement que la stratification envisagée par la définition complexe du potentiel financier moyen agrégé risque de faire verser des communes moins riches au bénéfice des communes plus riches, forme de redistribution à rebours, ce qui n’est pas véritablement le sens que je donne au mot «péréquation ». Il y a aussi la péréquation verticale, celle assumée par l’État. Ce sont, je le rappelle, près de 3 milliards d’euros sur le bloc communal à travers les composantes de la dotation globale de fonctionnement que sont la dotation de solidarité urbaine et la dotation de solidarité rurale. Je veux ici réaffirmer le caractère antipéréquateur de la dotation de base de la dotation globale de fonctionnement, puisque les communes de moins de 500 habitants ont une dotation par habitant de 64 euros environ, alors que les communes de plus de 200 000 habitants ont une dotation du double, donc de plus de 128 euros par habitant.

Je dirai un mot des collectivités locales. Je pense, madame la ministre, que vous voulez les entraîner sur le terrain de la diminution des dépenses publiques. Vous les ponctionnez à hauteur de 200 millions d’euros dans cette phase budgétaire, alors même que la part des collectivités locales dans l’investissement public national diminue déjà parce que toutes les mesures de transfert de compétences sont mal compensées. J’ai dit lors de la discussion générale initiale et je le répète ce soir : vous entraînez les collectivités et notre pays tout entier dans un cercle récessif. Vous n’avez également pas lésiné sur tous les subterfuges possibles pour « taxer les taxes ». Je m’expliquerai sur cette expression en prenant l’exemple de votre prélèvement de 55 millions d’euros sur les fonds de l’Office national de l’eau et des milieux aquatiques, qui est, en fait, un prélèvement sur les redevances que les agences de bassin – donc vos propres établissements publics – avaient été contraintes d’augmenter pour mener des politiques légitimes dont elles sont naturellement porteuses. Je pense ici au respect des directives-cadres sur l’eau et sur les eaux résiduaires urbaines.

L’autre point marquant de ce débat budgétaire est le contraste entre l’ampleur de la crise financière et bancaire pour laquelle nous aurions fait des choix fondamentalement différents et l’application dont vous avez fait preuve en vous appesantissant sur des points marginaux pour amuser la galerie. J’évoquerai, ici, la taxation des boissons sucrées. Nous ne savons toujours pas s’il s’agit d’une taxe dictée par un objectif de santé publique ou s’il s’agit d’un prélèvement destiné à financer la baisse du coût du travail dans la filière agroalimentaire, mais c’est, en résumé, une taxe de plus parmi la trentaine que vous avez imaginée durant cette législature.

Je terminerai mon propos par une remarque sur le détricotage du Grenelle de l’environnement auquel nous assistons dans ce projet de loi de finances pour 2012. Jean-Paul Chanteguet et Christophe Bouillon ont évoqué ce point lors de la séance des questions d’actualité d’aujourd’hui. Je prendrai, pour ma part, l’exemple des dispositions financières ou fiscales dont la lisibilité n’est plus assurée dans le public. Ainsi, l’éco-prêt à taux zéro n’est plus vendu et proposé par les banques à ce jour. Il n’est pas étonnant que les objectifs d’amélioration de l’isolation thermique des logements ne soient pas à la hauteur – et ce n’est qu’un exemple parmi d’autres – des ambitions du Grenelle de l’environnement.

Ce budget pour 2012 s’inscrit sous le signe de la récession au cours de ce trimestre et très probablement au cours de celui à venir, récession que les crises ne peuvent expliquer à elles seules. Cette croissance asphyxiée, atrophiée par vos choix pèsera lourd dans la conviction des Français qu’il est largement temps de changer de logiciel politique ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. le président. La parole est à Mme Sandrine Mazetier.

Mme Sandrine Mazetier. Gilles Carrez a souhaité tout à l’heure que tout le monde ait le sentiment du devoir accompli au terme de ce long travail sur ce projet de loi de finances pour 2012 et sur les collectifs budgétaires. Nous ne l’avons pas tout à fait, parce que, si nous avons réussi, au cours de cette législature, à vous convaincre de vos erreurs sur certains sujets – le bouclier fiscal, par exemple –sur lesquels vous êtes, en partie, revenus, nous n’y sommes pas totalement parvenus s’agissant des heures supplémentaires défiscalisées, qui coûtent 4,5 milliards d’euros chaque année, alors que notre pays comptait, au mois d’octobre dernier, en France métropolitaine et dans les départements d’outre-mer 4,459 millions de chômeurs. Ce dispositif extrêmement coûteux creuse la dette et consiste finalement à subventionner la destruction d’emplois. Or, nous y sommes, notre pays s’enfonce dans la récession. L’OFCE a estimé que ce dispositif, qui coûte très cher aux finances publiques, a, d’ores et déjà, détruit 70 000 emplois selon un mécanisme que décrit précisément la Cour des comptes, ce qui amène les entreprises à « substituer » des heures de travail à des femmes et à des hommes au travail. Ce dispositif est inefficace, très coûteux et aussi très inégalitaire. Il ne bénéficie pas aux salariés à temps partiel et il ne bénéficie pas non plus aux travailleurs pauvres et aux ménages non imposables. L’excellent rapport d’information de nos collègues Jean Mallot et Jean-Pierre Gorges fait apparaître que cette mesure, que vous présentez comme bénéficiant au pouvoir d’achat des salariés modestes, ne leur profite pas du tout. En effet, seul un quart des foyers fiscaux les plus fortunés en bénéficie et 1 000 foyers ont un avantage fiscal de 8 000 euros, alors que leurs revenus s’élèvent à quasiment 100 000 euros par an. Nous sommes donc très loin des catégories modestes, voire de la classe moyenne ! Il est également précisé dans cet excellent rapport qu’un tiers des foyers ayant déclaré des heures supplémentaires l’an dernier est, en fait, non imposable. Ils ne bénéficient donc pas, par définition, de cet avantage.

Enfin, et c’est un aspect moins connu, mais aussi grave et durablement douloureux pour ceux qui s’en apercevront un peu tard, ce dispositif pèse sur les négociations salariales et sur la rémunération des heures de travail normales. Ainsi, 34 % seulement des entreprises de moins de dix salariés qui emploient la majeure partie de nos concitoyens appliquent ce dispositif. En revanche, les grands groupes, les entreprises de plus de 2 000 salariés, ont totalement profité, pour 90 % d’entre elles, de ce qu’il convient d’appeler un effet d’aubaine. Donc, tant que vous n’entendrez pas ce que nous vous disons, nous n’aurons pas le sentiment du devoir accompli.

Nous pensons, en cette veille de fête, aux deux millions de travailleurs pauvres, aux 4,5 millions de chômeurs.

M. Guy Malherbe. Nous aussi !

Mme Sandrine Mazetier. Nous pensons aux millions de précaires qui sont des femmes, celles qui sont à la caisse quand vous faites vos courses de Noël, qui ne travaillent qu’à temps partiel et qui ne peuvent pas choisir de travailler à temps complet. Vous auriez été mieux inspirés de majorer les heures supplémentaires dès la première heure pour permettre à ces travailleurs pauvres, à ces femmes qui subissent le temps partiel, de gagner davantage.

Il n’y a décidément, Jérôme Chartier, ni courage ni responsabilité lorsque l’on maintient une telle mesure. Que les choses soient claires, nous ne sommes pas opposés aux heures supplémentaires, mais nous sommes contre la destruction de l’emploi. Nous pensons qu’il conviendrait de réorienter cette dépense publique importante afin qu’elle permette de créer des emplois. Nous avons réussi à vous convaincre tardivement, mais efficacement sur le bouclier fiscal. Nous ne renoncerons jamais à vous persuader que la défiscalisation des heures supplémentaires est un dispositif injuste et inefficace ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. le président. La parole est à M. François Pupponi.

M. François Pupponi. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je partage bien entendu toutes les critiques, plus que justifiées, qui ont été avancées par mes collègues, mais nous avons tout de même voté quelques articles de ce projet de loi de finances. Nous avons en effet trouvé deux articles qui vont dans le bon sens, les articles 58 et 59, puisqu’ils proposent des mesures que nous demandons depuis de nombreuses années. Ils concernent la péréquation horizontale, celle permettant aux collectivités locales de participer à un effort de solidarité vis-à-vis d’autres collectivités beaucoup plus démunies qu’elles, qui ne sont plus capables de mettre en œuvre des politiques publiques dignes de ce nom. C’est le cas en particulier dans les territoires urbains les plus difficiles, mais également dans certains secteurs ruraux où, des communes n’ayant plus les moyens de faire face aux demandes, justifiées, de leurs populations, il faut faire appel à la solidarité nationale.

Notre ami Jean Launay a parlé de la solidarité nationale dans le cadre de la péréquation verticale, mais il était important d’engager le grand processus de la mise en œuvre de la péréquation horizontale.

M. Guy Malherbe. C’est fait !

M. François Pupponi. Après des débats fort intéressants ici, en première lecture, puis au Sénat et, enfin, en nouvelle lecture ici, nous avons pu, sous l’égide du rapporteur général et du président de la commission des finances, lancer un projet qui va dans le bon sens. Même si la première marche n’est pas aussi haute que nous aurions pu espérer, il y aura 150 millions pour la péréquation au niveau national, qui, dès 2012, permettront à des collectivités d’engager des politiques publiques plus efficaces.

Il faudra bien entendu, Jean Launay l’a souligné, respecter cette fameuse clause de revoyure et je sais que le rapporteur général est attentif à cette question, le Gouvernement également. Nous savons très bien, en effet, que cette première marche sera parfois difficile. Un certain nombre de collectivités, en particulier franciliennes, seront appelées à participer à la solidarité nationale alors qu’elles ne sont pas toujours considérées au départ comme des communes riches. Nous devrons donc bien regarder à la fin de l’année comment les choses se sont passées et si nous pouvons et nous devons passer à la deuxième marche et dans quelles conditions. La péréquation devra monter en puissance d’ici à 2016 jusqu’à environ un milliard d’euros, puisque c’est le montant qui était prévu dans la loi de finances de 2011.

Une grande avancée a également été portée par Paris Métropole, c’est la réforme du fonds de solidarité régional d’Île-de-France. Le travail a été bien mené par l’ensemble des élus franciliens, toutes tendances confondues, puisque la proposition reprise dans ce texte avait fait l’objet d’un vote unanime du bureau de Paris Métropole.

C’est sur une note positive concernant ces deux points que je voudrais terminer. C’est l’époque des vœux. Ce que je souhaite pour l’année prochaine, mes chers collègues, c’est que, après cette première marche montée dans une bonne ambiance et une bonne entente, nous puissions poursuivre l’année prochaine et les années suivantes car c’est à ce prix, je le répète, que nous pourrons mettre en œuvre une réelle égalité territoriale pour l’ensemble de nos collectivités locales. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Très bien !

M. le président. La discussion générale est close.

La parole est à Mme la ministre.

Mme Valérie Pécresse, ministre. Monsieur le président, mesdames, messieurs, je tiens à remercier chacun des orateurs qui se sont exprimés et, plus largement, l’ensemble d’entre vous avec qui j’ai eu beaucoup de plaisir à débattre tout au long de ces derniers mois.

Je vous remercie, monsieur le président de la commission des finances. Nous avons eu, je l’ai dit, un débat républicain. Nous avons tous les deux nos personnalités, nous n’acceptons pas que l’on nous marche sur les pieds, mais c’est aussi comme cela que l’on débat et que l’on échange, dans le respect des principes républicains. Merci pour ce débat exigeant.

Je vous remercie, monsieur le rapporteur général, ainsi que tous les rapporteurs spéciaux de ce budget. Je tiens également à saluer les administrateurs de la commission des finances, qui ont dû travailler avec de grandes contraintes et qui, nous l’avons souligné à de nombreuses reprises, ont su être à la hauteur des enjeux. Pour avoir siégé sur les bancs de cette assemblée, et travaillé d’ailleurs avec un certain nombre d’entre eux, je suis consciente de tout le travail que cela représente.

Je remercie évidemment la majorité de son soutien indéfectible, le président Jacob mais aussi Jérôme Chartier, Michel Bouvard, Charles de Courson, Yves Censi, tous ceux qui ont fait vivre ces débats. Je salue également les parlementaires de l’opposition. Nos échanges ont été vifs et animés mais ils ont toujours été courtois.

Enfin, monsieur le président, j’aimerais que vous fassiez part de ma reconnaissance à tous ceux qui ont dirigé et orchestré nos travaux, de jour comme de nuit, la qualité des présidences successives nous ayant permis de ne pas nous embourber dans des débats parfois techniques.

Mesdames, messieurs, sans rouvrir les débats que nous avons largement approfondis, je veux seulement répéter à Christian Eckert que le Gouvernement a deux objectifs. Le premier, c’est de réduire les déficits au rythme prévu. C’est tout le sens des mesures que vous avez examinées depuis l’été. Le second, c’est de soutenir la croissance et de renforcer notre compétitivité.

La revalorisation du travail, par la défiscalisation des heures supplémentaires, fait partie intégrante d’une stratégie de compétitivité, madame Mazetier, et c’est toute la différence entre le budget qui vous est soumis et celui qu’a adopté le Sénat.

Comme l’a rappelé Charles de Courson, les sénateurs ont voté un choc fiscal de 32 milliards d’euros, dont 20 milliards d’euros sur les seules entreprises. Est-ce bien raisonnable dans une période de difficulté économique ?

M. Charles de Courson. La réponse est dans la question !

Mme Valérie Pécresse, ministre. À l’évidence, cela empêcherait tout rebond de croissance et cela pèserait sur le pouvoir d’achat et l’emploi des Français.

Notre stratégie est bien différente. Comme l’a rappelé Jérôme Chartier, elle est sérieuse, responsable, car nous donnons la priorité à la baisse des dépenses publiques, ce qui nous permet de doser nos efforts fiscaux.

J’ajoute, monsieur Launay, que la co-responsabilité doit être la règle. Les collectivités doivent prendre toute la part de cet effort d’économie, et les économies doivent porter en priorité sur le fonctionnement grâce à des gains de productivité.

M. Jean Launay. On les a étranglées !

Mme Valérie Pécresse, ministre. Pour mémoire, je rappelle que, tandis que l’État diminuait le nombre de ses fonctionnaires, les collectivités, elles, continuaient à recruter plus de 37 000 agents par an.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Nous ouvrons des crèches !

Mme Valérie Pécresse, ministre. Cet impératif de maîtrise des dépenses publiques ne nous a pas empêchés, monsieur Pupponi, bien au contraire, de travailler avec vous mais également avec la Haute assemblée sur les dispositifs de péréquation

Monsieur Brard, tous les pays d’Europe et pas seulement ceux auxquels vous vous êtes particulièrement attaché cet après-midi, la France et l’Allemagne, vont sur la même voie.

M. Jean-Pierre Brard. C’est un cul-de-sac !

Mme Valérie Pécresse, ministre. Cette union vous déplaît peut-être, c’est une grande famille européenne, elle n’en est pas moins une réalité. Plus que jamais, l’Europe a besoin d’unité car c’est en nous rassemblant que nous vaincrons la crise, et nous ne pouvons que nous réjouir de voir le Président de la République et la Chancelière Angela Merkel la main dans la main prendre toutes leurs responsabilités pour consolider la zone euro et la construction communautaire. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Texte adopté par l’Assemblée nationale
en nouvelle lecture

M. le président. J’appelle maintenant, conformément au troisième alinéa de l’article 114 du règlement, le projet de loi dans le texte adopté par l’Assemblée nationale en nouvelle lecture.

Vote sur l’ensemble

M. le président. Je mets aux voix l’ensemble du projet de loi tel qu’il résulte du texte voté par l’Assemblée nationale en nouvelle lecture.

(L’ensemble du projet de loi est adopté.)

3

Accord France-Panama
sur les doubles impositions

Discussion, en lecture définitive, d’un projet de loi

M. le président. M. le Président a reçu de M. le Premier ministre une lettre demandant à l’Assemblée de statuer définitivement, en application de l’article 45, alinéa 4, de la Constitution, sur le projet de loi autorisant l’approbation de la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Panama en vue d’éviter les doubles impositions et de prévenir l’évasion et la fraude fiscales en matière d’impôts sur le revenu.

En conséquence, l’ordre du jour appelle la discussion de ce projet de loi en lecture définitive (n°s 4114, 4115).

La parole est à M. le secrétaire d’État chargé des Français de l’étranger.

M. Édouard Courtial, secrétaire d’État chargé des Français de l’étranger. Monsieur le président, mesdames, messieurs, après l’échec de la commission mixte paritaire lundi, et faute d’avoir pu accorder les positions des deux chambres du Parlement après la nouvelle lecture, nous voici une nouvelle fois réunis pour examiner la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Panama en vue d’éviter les doubles impositions et de prévenir l’évasion et la fraude fiscales en matière d’impôts sur le revenu.

Cette convention est aujourd’hui soumise à votre approbation définitive.

Mes collègues Henri de Raincourt et Jean Leonetti ont déjà eu l’occasion de vous exposer les raisons pour lesquelles le Gouvernement soutient l’approbation de ce projet de loi. Je tiens à vous affirmer à nouveau avec force notre conviction.

Le Gouvernement n’a pas varié dans sa position. Avec constance, il considère que la convention fiscale franco-panaméenne est une avancée majeure dans le cadre de la lutte contre les pratiques fiscales dommageables, qui permettra un échange d’informations fiscales effectif et sans restriction. Le Gouvernement panaméen s’est engagé dans ce sens et a déjà largement réformé sa législation interne afin de permettre à la convention d’être suivie d’effets. Il n’y a donc aucune raison de se priver plus longtemps des possibilités d’assistance administrative qu’apportera cet accord.

En outre, après avoir encouragé le Panama pendant des années à se mettre en conformité avec les standards internationaux en matière de transparence et d’échange de renseignements fiscaux, il serait des plus regrettables de refuser de conclure avec lui un accord qui viendrait renforcer ses obligations en la matière.

Mesdames, messieurs, je souhaite à nouveau vous rassurer quant à l’application qui sera faite de cet accord. Les négociateurs ont eu à cœur d’en prévenir tout effet pervers et ne se sont pas contentés de suivre à la lettre le modèle de l’OCDE. Ils sont allés bien plus loin, notamment en multipliant les clauses anti-abus tout au long du texte.

De même, soyez certains que le Gouvernement ne s’engage pas dans cette voie les yeux fermés, et qu’il se garde la possibilité de réinscrire le Panama sur la liste française des États et territoires non coopératifs. Nous n’hésiterions pas à le faire si le Panama revenait sur ses engagements ou si l’assistance administrative en matière d’échange de renseignements ne donnait pas satisfaction.

En conclusion, vous constaterez que, dans tous les cas, la France a tout à gagner de la ratification de la présente convention avant la fin de l’année. D’une part, elle se dote d’un outil optimal pour lutter contre la fraude et l’évasion fiscale à destination du Panama, tout en se préservant des moyens de pression dans le cas où il viendrait à changer sa position. D’autre part, elle vient sécuriser les intérêts français sur place, en éliminant les sources de doubles impositions, tout en évitant que des opérateurs puissent tirer parti de ces dispositions de manière abusive.

Telles sont les principales observations qu’appelle la convention fiscale franco-panaméenne qui fait l’objet du projet de loi aujourd’hui proposé à votre approbation. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à Mme Martine Aurillac, rapporteure de la commission des affaires étrangères.

Mme Martine Aurillac, rapporteure de la commission des affaires étrangères. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, la procédure veut qu’après l’échec de la CMP et le rejet par le Sénat, nous soyons à nouveau saisis, pour la troisième fois, du projet ratifiant la convention fiscale entre la France et le Panama.

Notre Assemblée a adopté ce projet car la bonne volonté de Panama semble démontrée. Le processus de réformes est largement engagé et une coopération efficace est envisageable. C’est la raison pour laquelle plusieurs de nos partenaires ont déjà conclu un tel accord. De plus, cette convention, tout à fait conforme au modèle de l’OCDE, a été conclue selon toutes nos demandes, souvent plus sévères, avec, comme vous l’avez rappelé, monsieur le secrétaire d’État, de nombreuses clauses anti-abus.

S’agissant des capacités du Panama à l’appliquer – c’est au fond le nœud du problème –, ce pays a entrepris depuis 2010 toute une série de réformes, dont la plupart n’ont pas été prises en compte lors de la dernière évaluation de l’OCDE. Citons, ainsi, plusieurs lois sur l’identité des propriétaires, la transmission de renseignements, ou encore la signature de conventions d’échange avec douze pays, dont les États-Unis, les Pays-Bas, l’Italie, l’Espagne.

M. Jean-Pierre Brard. Ce n’est pas rassurant !

Mme Martine Aurillac, rapporteure. Il existe aussi une surintendance bancaire efficace avec une nouvelle cellule spéciale chargée de l’application des accords fiscaux. Et s’il reste encore, il est vrai, quelques obstacles à l’échange d’informations sur les obligations comptables des sociétés offshore et les actions au porteur,…

M. Jean-Pierre Dufau. Ah ! Quel aveu !

Mme Martine Aurillac, rapporteure. …un groupe de travail a été mis en place pour les modifications nécessaires.

M. Jean-Pierre Brard. C’est une confession !

Mme Martine Aurillac, rapporteure. Un programme de formation de son administration fiscale est d’ailleurs en cours avec l’Espagne.

Alors, pourquoi ratifier cette convention ? Parce que le Panama, comme je viens de l’expliquer, a démontré sa détermination à conduire les réformes, parce qu’une coopération réelle peut donc s’établir et qu’il ne serait pas justifié de faire preuve de plus de réticence à l’égard de cet État qu’à l’égard d’un autre.

Pourquoi ratifier la convention dans des délais il est vrai très courts ? Parce qu’à côté du processus d’évaluation de l’OCDE, il existe, vous le savez, une liste noire française des États et territoires non coopératifs. Cette liste a été instituée en loi de finances rectificative pour 2009 afin que la France dispose d’un mécanisme autonome d’évaluation et de sanction.

Elle est mise à jour au 1er janvier de chaque année. Le Panama, avec qui la France n’avait pas conclu d’accord l’an passé, y figure donc. Je signale d’ailleurs que, si ce pays avait accepté un simple accord d’échange de renseignements en 2009, celui-ci aurait sans doute été signé, comme de nombreux autres, très rapidement, et la question de la présence du Panama sur la liste française en 2012 ne se poserait même pas.

M. Jean-Pierre Dufau. Oui, mais elle se pose !

Mme Martine Aurillac, rapporteure. Mais le Panama a exprimé le souhait de négocier une convention complète, incluant donc l’élimination des doubles impositions. C’est une très bonne chose pour celles de nos entreprises qui s’implantent dans cet État, lequel a lancé de grands projets d’infrastructures pour les prochaines années : métro de Panama, grands travaux sur le canal…

M. Jean-Pierre Brard. C’est désintéressé, en somme…

Mme Martine Aurillac, rapporteure. Permettre la sortie du Panama de la liste noire française avant le 1er janvier 2012 est donc un élément particulièrement favorable aux intérêts français, afin d’offrir à nos entreprises une meilleure sécurité juridique. Dois-je rappeler que ce sont elles qui créent des emplois, et que nous nous devons de les soutenir ?

En conclusion, la France s’est beaucoup engagée depuis deux ans en faveur de la coopération fiscale et de la transparence, et cette convention va dans ce sens. La réalité des efforts de mise en conformité effective du Panama à ses engagements devra bien sûr être attentivement examinée, comme pour tous les autres pays, à la fois par le Forum d’évaluation de l’OCDE et par la France, dans le plein exercice de sa souveraineté, pour apprécier la qualité des coopérations qu’elle a négociées.

J’ajoute, enfin, que le processus de sortie de la liste noire française est complètement réversible. Tout pays ne respectant pas ses engagements devra être inscrit sur la liste et se verra de nouveau appliquer les sanctions correspondantes.

Je vous propose donc, mes chers collègues, de confirmer la position de notre assemblée et d’adopter ce projet de loi. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Discussion générale

M. le président. Dans la discussion générale, la parole est à M. Raymond Durand.

M. Raymond Durand. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, madame la rapporteure, mes chers collègues, la convention fiscale entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Panama que nous examinons aujourd’hui en lecture définitive constitue une étape indispensable au développement des relations franco-panaméennes et participe à la mise en place d’un véritable dispositif de lutte contre la fraude et l’évasion fiscale.

Il ne s’agit pas d’un accord de circonstance, comme nous avons pu l’entendre dans cet hémicycle, mais bien d’un texte qui s’inscrit logiquement dans une démarche de renforcement de la transparence fiscale. À cet égard, on ne peut, en l’encourageant, que se féliciter de la prise de conscience, tant au niveau national qu’international, de la nécessité de lutter contre la fraude et l’évasion fiscales, qui constituent une menace pour les États du monde entier.

En adaptant sa législation, le Panama, perçu historiquement comme un paradis fiscal non coopératif, a clairement démontré sa volonté de se conformer aux standards internationaux en matière fiscale. À titre d’exemple, cet État a levé l’impossibilité de transmettre des renseignements qui ne sont pas utiles pour l’application de sa propre loi fiscale. Il a également modifié sa législation en vue de renforcer les obligations des agents résidents en matière d’identification de leurs clients. Ces dispositions constituent une avancée considérable pour un pays qui, il y a encore quelques années, était réticent à l’idée d’adapter sa législation aux nouvelles exigences internationales en matière de transparence financière.

Avec une économie en croissance et une situation stratégique, le Panama possède de nombreux atouts pour conforter sa qualité de pays émergent et présente à ce titre des perspectives intéressantes pour les entreprises françaises. Ces constats ne se limitent d’ailleurs pas au Panama ; ils valent également pour nombre de ses voisins d’Amérique centrale, qui font preuve d’un dynamisme et d’une croissance importants. L’examen de ce projet de loi est l’occasion d’attirer l’attention sur une zone que nous avons trop longtemps négligée.

Sur le fond, l’accord présente deux intérêts majeurs. D’une part, il permet au Panama, suite à la conclusion de douze conventions d’échange d’informations, de sortir de la liste grise de l’OCDE. D’autre part, il tend à éliminer le risque de double imposition jusqu’à présent source d’incertitude pour les investisseurs et, par là même, de conforter la décision d’implantation de grands groupes dans ce pays.

Ces dispositions présentent aussi l’avantage de faciliter nos exportations dans un cadre conforme au droit international public. Pour répondre à cet objectif, la convention franco-panaméenne définit avec précision les modalités de l’imposition des revenus, qu’il s’agisse des bénéfices des entreprises, des revenus immobiliers ou encore des revenus passifs. Elle permet notamment d’éviter la force effective de l’établissement stable, une composante essentielle des paradis fiscaux, en prévoyant un dispositif législatif strict en la matière.

Autre apport de la convention qu’il convient de souligner : ce texte prévoit de lutter contre les prix de transfert. Il clarifie en outre les modalités d’imposition des dividendes en posant le principe de l’imposition dans l’État de résidence des bénéficiaires, principe auquel il peut être dérogé par un dispositif de retenue à la source.

Au regard de ces dispositions, l’accord devrait permettre de renforcer la présence économique de la France au Panama, dans le respect des standards internationaux en matière fiscale.

M. Patrice Martin-Lalande. Exactement !

M. Raymond Durand. Comme nous l’avons souligné lors des précédentes lectures, la promotion de la transparence et de l’échange de renseignements à des fins fiscales doit demeurer une priorité de notre politique internationale. Pour toutes ces raisons, le groupe Nouveau centre apportera son soutien à ce projet de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Paul Lecoq.

M. Jean-Paul Lecoq. Monsieur le secrétaire d’État, madame la rapporteure, mes chers collègues, j’ai beaucoup hésité pour savoir si je devais reprendre mes deux premières interventions sur le sujet. Comme ce sont les mêmes collègues qui allaient de nouveau être présents, je me suis dit que je ne le ferais pas, j’ai eu pitié d’eux !

M. Patrice Martin-Lalande. Merci ! C’est Noël !

M. Jean-Paul Lecoq. Avant que je vote pour la troisième fois contre cette convention fiscale franco-panaméenne, permettez-moi donc de vous livrer quelques éléments puisés à d’autres sources.

Vous connaissez peut-être, monsieur le secrétaire d’État, le cabinet France Offshore. Si ce n’est pas le cas, je vais vous le présenter. C’est un cabinet privé parisien de conseil en création de sociétés offshore et internationales, situé dans le seizième arrondissement de Paris ; c’est vous dire les moyens dont il dispose.

Ce cabinet est doté d’un site internet délicieux qui affirmait, quelques semaines après la signature de la présente convention par la France, je cite : « L’intérêt de l’offshore au Panama se renforce. » Intéressant à l’heure où M. Sarkozy prétend en avoir fini avec les paradis fiscaux ! Ce constat est quelque peu contradictoire avec les discours des parlementaires de la majorité qui affirment, à l’Assemblée comme au Sénat, que le Panama est sur la voie de la transparence financière et de la vertu.

M. Jacques Remiller. Bien sûr ! C’est une évidence !

M. Jean-Paul Lecoq. Si vous le voulez bien, poursuivons la lecture de la passionnante note de France Offshore consacrée au Panama : « Le Panama a récemment obtenu une série d’évaluations positives de la part d’organisations internationales. La reconnaissance de ces organisations a permis au Panama de voir son intérêt en tant que juridiction offshore croître substantiellement ».

M. Jacques Myard. Vous voyez !

M. Jean-Paul Lecoq. « Les investissements offshore sont en hausse de 21 % comparés à la même période de l’an dernier. Tous les indicateurs économiques panaméens sont actuellement au vert. »

Ce cabinet privé explique très clairement que les récents satisfecit internationaux décernés au Panama lui permettent d’attirer encore plus de capitaux anonymes. Cela signifie que le vote de cette convention, qui permettra à ce paradis fiscal d’Amérique centrale de sortir de la liste grise de la France, après être sorti de celle de l’OCDE, va engendrer un nouvel afflux d’argent sale dans la lessiveuse !

Il nous faut prendre conscience du désastreux signal que le Parlement français enverrait s’il ratifiait cette convention.

M. Jacques Remiller. Mais non !

M. Jean-Paul Lecoq. Cela se traduirait par une accélération de la dérive de la finance internationale, car, en redorant son blason auprès des instances internationales, le Panama accroît, paradoxalement, son attrait comme plateforme de blanchiment. Une telle contradiction est symptomatique de l’irrationalité du système capitaliste. Sortir de la liste grise des États non coopératifs en matière fiscale, c’est s’assurer de devenir un véritable Éden de l’offshore. On marche sur la tête !

Revenons à notre cabinet privé, qui affirme haut et fort : « Le Panama est l’une des meilleures juridictions pour l’enregistrement offshore. La juridiction attire les investisseurs et les hommes d’affaires grâce à des taux d’impôt sur le revenu et sur les bénéfices égaux à 0 %. Elle présente également l’intérêt d’avoir un droit des affaires souple » – chacun voit ce que cela veut dire – « et des mesures de protection des actifs efficaces » – chacun voit ce que cela veut dire. On peut ajouter que son actuel président a créé une immense zone franche au bord du canal : chacun voit, encore une fois, ce que cela veut dire !

Les agences de notation décernent aujourd’hui des « triples A » en veux-tu en voilà à cet État peu scrupuleux. Depuis sa sortie des listes grises, il est considéré comme un bon élève ! On croit rêver, surtout quand on sait que c’est précisément la convention dont nous débattons qui a permis au Panama de sortir de la liste grise des États non coopératifs de l’OCDE. Cette organisation s’est appuyée sur la présente convention pour considérer que le Panama pouvait sortir de sa liste grise tandis que vous vous appuyez ici, pour défendre cette convention, sur le fait que l’OCDE a pris la décision de sortir le Panama de sa liste !

M. Jean-Pierre Brard. Eh oui !

M. Jean-Paul Lecoq. C’est le serpent qui se mord la queue ou l’histoire de la poule et de l’œuf : qui est arrivé le premier ? C’est Lecoq qui vous pose la question ! (Sourires.)

Nous considérons que le Panama est toujours un paradis fiscal et nous le réaffirmons. Comme les débats au Sénat l’ont montré, ce pays n’a en réalité nullement renoncé à son système opaque. Comment le pourrait-il alors qu’il est, depuis des décennies, la base arrière financière des États-Unis, qui en font et défont les gouvernements ?

Chers collègues, personne n'est dupe au Panama, et les cabinets privés conseillent à leurs clients spéculateurs de domicilier leurs capitaux dans ce paradis fiscal. Chacun sait qu'aucun effort n'a été fourni en matière de lutte contre l'argent sale. Le gouvernement panaméen n'a pas accepté le moindre progrès concernant le secret bancaire et la traçabilité des fonds, je l’ai démontré dans mes interventions précédentes.

De plus, cette convention supprime la double imposition, comme si notre préoccupation actuelle devait être de réduire encore les rentrées fiscales. Ce n’est pas l’heure. Ce n’est pas le jour. Ce n’est pas l’année.

Dans un tel contexte, adopter cette convention reviendrait à donner quitus aux pratiques, pourtant loin d'être vertueuses, de l'actuelle administration panaméenne. Ce serait aussi donner une sorte de sauf-conduit aux multinationales qui profitent des largesses d'un État hors-la-loi. Le patronat français veut évidemment sa part du gâteau panaméen, et vous lui obéissez au pas de charge, monsieur le secrétaire d’État. Le gouvernement français est coupable d'une tolérance impressionnante…

M. Jean-Pierre Brard. Une complicité !

M. Jean-Paul Lecoq. …envers les filiales qui opèrent dans les paradis fiscaux ainsi qu'envers les fraudeurs du fisc. Il faut dire que ceux qui bénéficient de ces complicités font parfois partie des grands donateurs de l’UMP ! (« Oh ! » sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

M. Jacques Remiller. Ça n’a rien à voir !

M. Jean-Paul Lecoq. Il existe des solutions pour lutter véritablement contre les paradis fiscaux. Elles figurent dans le programme du Front de gauche, que je ne vous ai pas amené puisque vous en avez déjà eu une petite distribution cet après-midi, mes chers collègues.

M. Jacques Remiller. Quelle distribution ? De quoi parlez-vous ?

M. Jean-Paul Lecoq. Vous pourrez vous adresser aux huissiers pour en avoir un exemplaire, monsieur Remiller.

Nous proposons un blocage des échanges de capitaux avec les États non coopératifs, le placement sous contrôle social des banques privées qui ne respectent pas la lutte contre la spéculation et la financiarisation, des pouvoirs nouveaux pour les citoyens vis-à-vis des institutions bancaires car il y a urgence, et aussi la taxation des revenus financiers des entreprises. Vous le voyez : nous proposons d'en finir avec l'hypocrisie dont cette convention est le pur produit.

C'est pourquoi pour laquelle les députés communistes, républicains, citoyens et du parti de gauche voteront contre ce texte. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et SRC.)

M. Franck Gilard. Vous êtes très dur !

M. Jean-Pierre Brard. Nous sommes les incorruptibles, fils de Maximilien !

M. Jacques Myard. Attendez, je vais chercher la guillotine ! (Sourires.)

M. le président. La parole est à M. Jacques Remiller.

M. Jacques Remiller. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, madame la rapporteure, mes chers collègues, je ne vais même pas utiliser les cinq minutes qui me sont accordées car je ne vois pas pourquoi nous sommes encore là, pour la troisième fois, pour débattre de cet accord. Il y aurait dix lectures, mesdames, messieurs les députés de l’opposition, que vous nous demanderiez de revenir dix fois.

M. Jean-Pierre Brard. Exactement ! Parce que vous continuer à pécher !

M. Jacques Remiller. Monsieur Brard, j’ai fait des recherches : trois lectures pour une convention fiscale, c’est vraiment historique.

M. Jean-Pierre Brard. Il en faut une quatrième !

M. Jacques Remiller. C’est la première fois dans les annales de l’Assemblée nationale.

M. Jean-Paul Lecoq. Vous faites donc partie de l’histoire, cher collègue. Donnez-nous des arguments historiques !

M. Jacques Remiller. Je ne vais pouvoir que redire, comme je l’ai dit en première lecture et Jacques Myard lors de la deuxième, que ce projet de loi constitue une étape indispensable au renforcement des relations franco-panaméennes.

M. Jean-Pierre Brard. La Banco Ambrosiano !

M. Jacques Remiller. Il participe, M. le secrétaire d’État et Mme la rapporteure l’ont fort bien rappelé, de la mise en place d'un véritable dispositif de lutte contre la fraude et l'évasion fiscales.

J’insiste sur le fait que la France a beaucoup œuvré, sous l'impulsion du Président Nicolas Sarkozy, notamment dans le cadre du G8 et du G20, pour la transparence et la clarification de la situation des paradis fiscaux. Mme la rapporteure a une nouvelle fois donné en commission, il y a quelques minutes, toutes les précisions que vous attendiez encore et a apporté toutes les réponses aux questions que vous posiez pour la troisième fois.

La convention permettra bien sûr de confirmer les engagements affichés par le gouvernement panaméen, qui a affirmé à de nombreuses reprises sa volonté de se conformer aux attentes de la communauté internationale en matière de transparence fiscale.

Aussi, je suis surpris par l'attitude des membres du groupe SRC, qui soufflent le chaud et le froid sur ce dossier, annonçant en commission qu'ils vont s'abstenir pour finalement voter contre, comme s'ils cherchaient à gagner du temps.

M. Jean-Paul Lecoq. C’est le débat qui les a fait évoluer, monsieur Remiller !

M. Jacques Remiller. Pour toutes ces raisons, le groupe UMP votera ce projet de loi de ratification, d'autant plus qu'il ne s’agit pas d'un chèque en blanc signé aux Panaméens puisque le Gouvernement s'est engagé à suivre de près l'application de cette convention et que, rappelons-le, rien est irréversible en la matière ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe NC.)

M. Raymond Durand. Très bien !

M. le président. La parole est à M. François Loncle.

M. François Loncle. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, madame la rapporteure, mes chers collègues, je vous épargnerai les quinze minutes auxquelles j’avais droit, soyez-en sûrs (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe UMP), parce que je n’ai pas besoin de répéter ce que nous avons dit en première et en deuxième lectures ainsi qu’à la commission mixte paritaire, ni ce qu’ont exprimé nos collègues sénateurs lorsque la gauche majoritaire a repoussé la ratification de cette convention. Il faut vous habituer, monsieur Remiller, au fait qu’il y a plusieurs lectures. J’ai essayé de vous l’expliquer la semaine dernière mais, semble-t-il, vous ne m’avez pas écouté.

Je vais aussi, pour le plaisir et puisque vous y avez fait allusion, mon cher collègue, relire la phrase que M. le président Sarkozy a prononcée au G20 de Cannes, le 4 novembre dernier : « Nous ne voulons plus de paradis fiscaux. Le message est très clair […] les pays qui demeurent des paradis fiscaux avec la dissimulation financière seront mis au ban de la communauté internationale […] ». Rien de moins ! Je vous épargne la suite. Je vous épargne aussi la liste des pays concernés, dans laquelle se trouvait le Panama.

Nous ne sommes pas d’accord avec cette convention pour des raisons de forme et pour des raisons de fond. J’observe, au passage, que l’organisation gouvernementale ne dénote pas une conviction extrêmement précise sur ce sujet puisqu’il y a eu trois lectures… et trois ministres : M. de Raincourt tout d’abord, M. Leonetti en deuxième lecture, et maintenant M. Courtial, dont je suis très heureux de faire la connaissance.

Et puis il y a eu ce fameux carambolage diplomatique. J’étais habitué à cela du temps de M. Kouchner,…

M. Jacques Myard. Oh, mauvais camarade !

M. François Loncle. …comme du temps de Mme Alliot-Marie s’agissant de la Tunisie, mais cela m’étonne de M. Juppé.

M. Patrice Martin-Lalande. Ah, monsieur fait la différence !

M. François Loncle. Le 4 novembre, le président de la République montre du doigt et fustige, dans des termes que nous-mêmes n’avons pratiquement pas employés, le Panama en tant que paradis fiscal. Le 24 novembre, soit vingt jours plus tard, Mme la ministre du budget en remet une couche en accentuant la critique du Président de la République. Mais elle ignorait qu’entre-temps, les 17 et 18 novembre, il avait reçu à l’Élysée Ricardo Martinelli, le Président du Panama, et que, au terme de longues conversations – il l’a reçu à deux reprises en deux jours –, il y avait eu un accord dont on a fait assez largement état. Mon collègue et ami Lecoq y a fait allusion : si le Panama a été sorti de la liste noire par cette convention et par l’OCDE, il reste bel et bien dans la liste grise établie par cette dernière organisation, liste qui sert de référence aux pays du G20.

Nous ne voulons pas de double discours, avec un discours qui fustige les paradis fiscaux et affirme qu’ils vont disparaître, et le constat qu’en dépit d’un certain nombre de dispositions ces pays restent bel et bien des paradis pour ceux qui en profitent.

On invoque les entreprises françaises. Nous sommes évidemment attentifs au développement international de nos entreprises,…

M. Jacques Myard. Très bien !

M. François Loncle. …nous sommes attentifs au commerce extérieur,…

M. Jean-Pierre Dufau. Il en a besoin !

M. François Loncle. …d’autant plus que celui-ci se porte au plus mal, mais pas à n’importe quel prix, pas n’importe comment et pas sans un minimum d’éthique.

Ce sont les raisons pour lesquelles nous nous opposons au vote de cette convention, qui ne remplit pas les conditions juridiques de transparence et d’efficacité que requiert la lutte contre les paradis fiscaux. Mon collègue Dufau précisera pourquoi nous maintenons notre hostilité.

M. Patrice Martin-Lalande. Si le vide juridique perdurait, croyez-vous que ce serait mieux ?

M. le président. La discussion générale est close.

Texte adopté par l’Assemblée nationale
en nouvelle lecture

M. le président. J’appelle maintenant, conformément au troisième alinéa de l’article 114 du règlement, le projet de loi dans le texte adopté par l’Assemblée nationale en nouvelle lecture.

Explications de vote

M. le président. Dans les explications de vote, la parole est à M. Jean-Pierre Brard, pour le groupe GDR.

M. Jean-Pierre Brard. J’avoue que les propos de notre collègue Remiller m’ont beaucoup étonné. Il sait particulièrement bien ce qu’est un péché capital. Dans un texte sacré, il est prescrit : « Tu ne voleras point. Tu ne mentiras point. » Or les Panaméens avec qui le Gouvernement traite n’ont certainement pas la version espagnole du texte et donc ils ne savent pas ce que cela veut dire.

Il faut reconnaître à Mme Aurillac de la franchise dans le propos parce qu’elle a dit pour qui on roulait dans cette affaire :…

M. Franck Gilard. Pour Noriega ? (Sourires.)

M. Jean-Pierre Brard. …pas pour Noriega, mon cher collègue, mais pour des intérêts financiers actuels. En réalité, cet accord a été acheté (Exclamations sur les bancs du groupe UMP) pour Bouygues et pour Alstom. Voilà un péché capital, et je vois, mon cher collègue Remiller, que vous êtes déjà sur le chemin de la confession. Reste à savoir si vous obtiendrez l’absolution, car vous avez accumulé les péchés, et en l’occurrence vous êtes complice de pécheurs encore plus grands que vous.

M. Antoine Herth. Pour M. Brard, le péché est dans le capital ! (Sourires.)

M. Jean-Pierre Brard. Lors de mon travail sur la fraude, je me suis rendu au Panama, et je vais vous raconter deux anecdotes, monsieur le président, qui vont vous intéresser.

Un jour, au sommet d’un gratte-ciel, il y avait une réception avec du beau linge, tous des voleurs et des fraudeurs (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe UMP) qui représentaient des filiales de banques européennes, en particulier d’une grande banque suisse. Le banquier en question, ayant terminé sa coupe de champagne, est descendu au parking.

M. Franck Gilard. Deux balles dans la tête !

M. Jean-Pierre Brard. Depuis, on ne le revit jamais.

M. Franck Gilard. Et voilà !

M. Jean-Pierre Brard. On ne sait pas s’il a fini les deux pieds dans le béton, au fond du canal de Panama, ou bien dans la jungle, dévoré par les fourmis.

Je vais vous raconter une autre anecdote plus édifiante encore : avec beaucoup de difficultés, notre ambassadeur m’obtint un rendez-vous avec le directeur des services fiscaux du Panama. Celui-ci, dès que l’entretien commença, me dit que, malheureusement, il n’avait pas beaucoup de temps à me consacrer, et de fait notre entrevue dura vingt minutes. Monsieur le secrétaire d’État, savez-vous pourquoi ? Parce que ce directeur des services fiscaux de la République du Panama dirigeait en même temps un cabinet privé de défiscalisation…

M. Franck Gilard. C’est d’une flexibilité extraodinaire ! Il faudrait le suggérer à Baroin ! (Sourires.)

M. Jean-Pierre Brard. Voilà les gens avec lesquels vous êtes en train de traiter. Vous le savez et ce n’est donc pas un acte par inadvertance que vous commettez. C’est consciemment que le Gouvernement signe avec un État voyou, uniquement pour qu’il disparaisse de la liste grise afin que les grandes entreprises françaises que j’ai citées ne perdent pas des marchés, ceux-ci étant évidemment la contrepartie qu’offre l’État du Panama pour obtenir cette convention.

M. Jacques Myard. Amen !

M. Franck Gilard. N’oubliez pas, monsieur Brard : felix culpa !

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Dufau, pour le groupe SRC.

M. Jean-Pierre Dufau. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, j’ai trouvé un point d’accord avec notre collègue Remiller. Il a dit, en effet, que cette convention était une étape. Je le lui accorde, c’est une étape dans un tour qui en comporte plusieurs. Cela signifie que la convention est loin d’être aboutie et qu’il y a encore beaucoup d’étapes à franchir.

Un député du groupe UMP. Commençons !

M. Jean-Pierre Dufau. En effet, le Panama a été recalé dès la phase 1 par le forum international et n’a pas été autorisé à passer à la phase 2. C’est sur ces bases-là que Nicolas Sarkozy a fustigé le Panama, le 4 novembre.

Ensuite, force est de constater qu’il n’y a pas suffisamment de transparence et de garantie dans cette convention avec le Panama. Je ne reviens pas sur l’absence de mécanismes d’identification des actionnaires au porteur. Si on ne les connaît pas, il sera difficile de lutter contre la fraude. Et n’oublions pas l’absence de comptabilité des sociétés offshore, trusts et fondations, et les avocats qui peuvent ne pas fournir le nom de leurs clients. Les exemples abondent.

D’ailleurs, Mme Aurillac a précisé avec beaucoup de franchise qu’il était nécessaire qu’un groupe de travail se réunisse, même après cette adoption, pour continuer de clarifier ce qui n’est pas encore réglé. C’est la démonstration que cette convention est incomplète, non aboutie, insuffisante au niveau des garanties et donc qu’il faut revoir la copie.

Le plus choquant, c’est la précipitation avec laquelle on nous demande de décider avant le 1er janvier – j’ai pris note de cette date – pour les raisons évoquées, qui sont purement calendaires et ne répondent pas à des motifs sérieux et profonds.

En réalité, lors de la rencontre des présidents du Panama et de la République française, le gouvernement panaméen a fait pression sur la France, puisqu’il avait déjà gelé, refusé l’accord de la Coface. Cela signifie donc que nous sommes passés en la matière sous les fourches caudines du Panama, pour satisfaire les intérêts d’entreprises françaises. Autant le dire, puisque c’est la vérité. On peut d’ailleurs comprendre la défense des intérêts français.

Enfin, coïncidence troublante : le 11 décembre, le dictateur Noriega a été extradé de France, où il était retenu depuis 2009 et où il devait purger une peine de sept ans – il aurait donc dû rester en prison jusqu’en 2016 –, vers le Panama. Il avait été condamné pour blanchiment d’argent.

Il nous est proposé d’adopter cette convention, alors que l’Allemagne, référence chère au Président Sarkozy, refuse de la ratifier.

M. Jean-Paul Lecoq. Vous citez l’Allemagne uniquement quand cela vous arrange !

M. Jean-Pierre Dufau. Je laisserai la conclusion à un journal indépendant, La Tribune : « La France accorde un passe-droit au Panama ». C’est pourquoi le groupe SRC votera contre ce texte.

Vote sur l'article unique

M. le président. Je mets aux voix l'article unique du projet de loi, tel qu’il résulte du texte voté par l’Assemblée nationale en nouvelle lecture.

(L'article unique du projet de loi est adopté.)

4

Approbation de conventions et accords internationaux

Procédure d'examen simplifiée

M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion, selon la procédure d'examen simplifiée, en application de l’article 103 du Règlement, de deux projets de loi autorisant l'approbation de conventions et accords internationaux (nos 4077, 4092 ; 4078, 4093).

Ces textes n’ayant fait l’objet d’aucun amendement, je mets directement aux voix l’article unique de chacun d’entre eux, en application de l’article 106 du règlement.

Accord de passation conjointe de marché en vue de la désignation par adjudication de plates-formes d'enchères communes

Vote sur un projet de loi

(L'article unique du projet de loi est adopté.)

Accord de passation conjointe de marché en vue de la désignation par adjudication d'une instance de surveillance des enchères

Vote sur un projet de loi

(L'article unique du projet de loi est adopté.)

Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-huit heures trente-cinq, est reprise à dix-huit heures quarante-cinq.)

M. le président. La séance est reprise.

5

Projet de loi de finances rectificative pour 2011

Lecture définitive

M. le président. M. le Président a reçu de M. le Premier ministre une lettre demandant à l'Assemblée de statuer définitivement, en application de l'article 45, alinéa 4, de la Constitution, sur le projet de loi de finances rectificative pour 2011.

En conséquence, l’ordre du jour appelle la discussion de ce projet de loi en lecture définitive (n°s 4116, 4117).

La parole est à Mme Valérie Pécresse, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l’État, porte-parole du Gouvernement.

Mme Valérie Pécresse, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l’État, porte-parole du Gouvernement. Monsieur le président, monsieur le rapporteur général, mesdames et messieurs les députés, nous arrivons à présent au terme de cette session budgétaire. Les mois que nous venons de vivre ont été, à bien des égards, exceptionnels. Dans des délais souvent très resserrés et dans un contexte marqué par de profondes incertitudes, vous avez examiné toute une série de textes financiers, qui ont permis de sécuriser notre trajectoire de réduction des déficits publics.

Ces circonstances très particulières ont exigé la mobilisation de tous et à tous les niveaux. La représentation nationale a en a pris toute sa part, je l’ai dit il y a quelques heures à peine. Mais je tiens une nouvelle fois, mesdames et messieurs les députés, à vous en remercier au nom du Gouvernement et en mon nom personnel : dans la bataille de la crédibilité, la réactivité est en effet une arme essentielle.

Et malgré les contraintes que cette mobilisation a parfois entraînées, nos travaux nous ont permis d'aller au fond des choses.

M. Christian Eckert. Dans le trou !

Mme Valérie Pécresse, ministre. Le désendettement est une nécessité d'intérêt national, une nécessité qui méritait un débat approfondi. Ce débat était attendu, parfois depuis longtemps, il a enfin eu lieu, il a eu lieu dans cet hémicycle et il a eu lieu grâce à vous. Et je tenais, là encore, à vous exprimer toute ma reconnaissance, vous qui l'avez fait vivre sur tous les bancs de cette assemblée.

Dans ce débat, votre rapporteur général a bien évidemment tenu une place centrale.

M. Charles de Courson. Comme toujours !

Mme Valérie Pécresse, ministre. Cher Gilles Carrez, il fallait toute votre expérience et toute votre connaissance des questions budgétaires et fiscales pour éclairer ces quatre mois de travaux comme vous l'avez fait.

M. Gérard Bapt. Il n’a pas limité les dégâts !

Mme Valérie Pécresse, ministre. Et ce dixième projet de loi de finances vous aura donné l'occasion de déployer tout votre art, en vous confrontant même à des exercices inédits – je pense bien sûr aux rabots successifs.

Je veux également saluer l'ensemble de la commission des finances, dont les membres ont été présents tout au long de nos débats et bien sûr son président Jérôme Cahuzac, qui a su donner tout leur relief à nos travaux.

Je tiens enfin à exprimer la reconnaissance du Gouvernement à tous les parlementaires de la majorité, notamment aux présidents Christian Jacob et Yvan Lachaud. Ces textes financiers, permettez-moi de le souligner une dernière fois, nous les avons élaborés en toute coresponsabilité, à l'issue d'un dialogue nourri et exigeant, mais toujours constructif.

Grâce au travail que nous avons conduit ensemble, la France avance sur son chemin de désendettement. Ce collectif budgétaire en est la meilleure preuve. Le Gouvernement vous demande donc de l'adopter définitivement.

M. Jean-Pierre Brard. Vous avez oublié de saluer l’opposition, madame la ministre ! Elle a tout de même plus de mérite que vos porteurs de hallebardes !

M. Éric Berdoati. Ne l’écoutez pas, madame la ministre !

Mme Valérie Pécresse, ministre. Monsieur Brard, j’ai salué le travail de l’opposition à de nombreuses reprises cet après-midi : vous n’étiez sans doute pas encore arrivé ! (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

M. le président. La parole est à M. Gilles Carrez, rapporteur général de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire.

M. Gilles Carrez, rapporteur général de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le Sénat a adopté la question préalable et, de ce fait, rejeté le projet de loi de finances rectificative, le quatrième de cette année 2011.

Conformément à l’article 45 de la Constitution, le Gouvernement demande à l’Assemblée de statuer en dernier ressort. Comme la commission mixte paritaire, qui s’est tenue avant-hier matin, n’a pas abouti, il s’agit pour nous de revenir au texte que nous avons adopté en nouvelle lecture. Je vous propose donc d’adopter une nouvelle fois ce texte.

À mon tour, je veux vous remercier, comme je l’ai fait il y a une heure, mais rassurez-vous, cher Charles de Courson, je ne m’attarderai pas. Je tiens à saluer tous les collègues de la majorité qui ont été présents, actifs, et qui ont fait beaucoup de propositions intéressantes. Et avec Mme la ministre, nous avons essayé de retenir le maximum de propositions parlementaires tout en respectant l’objectif intangible de réduction du déficit.

Je voudrais également saluer, monsieur Brard, l’opposition qui a été constructive, c’est vrai, et dont les interventions ont été utiles.

M. Michel Bouvard. Quelques-uns de leurs amendements ont été adoptés.

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Et sur certains points, elle a eu gain de cause.

J’ai été heureux, par exemple, d’entendre François Pupponi sur la péréquation, qui n’est pas si évidente pour certains de nos collègues.

M. Michel Bouvard. Tout à fait !

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Finalement, chacun a pris sur soi et cette péréquation, nous sommes en train de la mettre en place et elle sera fondatrice. Évidemment, il faudra y aller doucement.

M. Michel Bouvard. Très doucement !

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Mais nous sommes partis sur des bases assez consensuelles qui laissent bien augurer de la suite.

Merci au service de la séance et à tous les services. Merci au président, aux administrateurs, en particulier ceux de la commission des finances. Enfin, merci à vous, madame la ministre, car cela a été très agréable de travailler avec vous, je le dis en toute sincérité...

M. André Schneider. Un bonheur.

M. Gilles Carrez, rapporteur général. …ainsi qu’avec vos collaborateurs.

Ce faisant, monsieur Jacob, je pense pouvoir m’exprimer au nom de tout le groupe UMP.

M. Christian Jacob. Vous avez ma bénédiction ! (Sourires.)

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Je n’irai pas jusqu’à dire au nom du groupe GDR, mais au nom de tout le groupe UMP, je remercie la ministre pour sa qualité d’écoute et son ouverture d’esprit.

M. Jean Mallot. N’en faites pas trop ! (Sourires.)

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Je me réjouis des conditions dans lesquelles nous avons pu élaborer et voter ces différents textes.

En application de l’article 114 alinéa 3 du règlement de notre assemblée, je vous propose d’adopter définitivement le projet de loi de finances rectificative, le dernier de l’année 2011 et, qui sait, le dernier ou l’avant-dernier de la législature. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

M. Jean Mallot. Tout est dans le « qui sait » ! (Sourires.)

Discussion générale

M. le président. Dans la discussion générale, la parole est à M. Charles de Courson, premier orateur inscrit.

M. Charles de Courson. Mes chers collègues, nous en avons tous assez…(Exclamations et sourires sur tous les bancs.) Puisque tout a été dit et redit…

À mon tour, je remercie Mme la ministre car nous avons eu de vrais dialogues, parfois musclés, pour appuyer le Gouvernement contre une partie de la majorité, voire de l’opposition. Bref, le débat démocratique a eu lieu.

M. Jean Mallot. Quel fayot !

M. Michel Bouvard. Ce n’est pas son genre !

M. Charles de Courson. Il ne s’agit pas de fayoter, cher collègue. La démocratie, c’est accepter le dialogue, accepter d’évoluer et de ne pas penser que l’on détient la vérité.

Sur de nombreux points, madame la ministre, vous avez fait preuve d’un esprit d’ouverture.

Je veux également rendre hommage à notre rapporteur général car j’estime que l’on lui rend insuffisamment hommage. Je tiens à saluer un homme à l’esprit clair, équilibré et qui n’est pas sectaire. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.) Or dans la vie politique, on souffre beaucoup du sectarisme. Gilles Carrez est un homme ouvert avec qui l’on peut dialoguer, l’opposition le reconnaît du reste bien volontiers. C’est dommage que notre président de la commission ne soit pas présent, parce que lui aussi est un homme ouvert. (« Oh ! » sur les bancs du groupe UMP.)

Mais si, chers collègues. Ce n’est pas parce qu’il est dans l’opposition…(Sourires.)

M. Gilles Carrez, rapporteur général. À notre contact, il évolue dans le bon sens ! (Sourires.)

M. André Schneider. C’est l’effet Père Noël !

M. Charles de Courson. Et c’est cela la démocratie.

Je ne vais pas reprendre tous les arguments qui font que le groupe Nouveau Centre votera la loi de finances rectificative. Les ayant rappelés déjà trois fois, je vous ferai grâce de la quatrième ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe NC.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Brard.

M. Jean-Pierre Brard. Madame la ministre, je vous épargnerai une nouvelle intervention générale…(Sourires )

Mme Valérie Pécresse, ministre. Quel dommage ! (Sourires.)

M. Jean-Pierre Brard. …car nous nous sommes déjà beaucoup expliqués.

M. Christian Jacob. Mais on ne s’est toujours pas compris.

M. Jean-Pierre Brard. En vous entendant pendant ces semaines et ces semaines, je me dis que la parité a progressé, madame la ministre. Autrefois, en parlant du Père Noël, on pensait forcément au masculin. Maintenant, grâce à vous, madame la ministre, on pense au féminin. (Sourires.) Avec le contenu de votre hotte, vous remplissez les coffres-forts et quand il n’y a plus de place dans les coffres-forts, vous leur dites d’ouvrir leurs poches.

Il faut reconnaître que vous avez été d’une générosité fantastique. Comme vous avez le souci de l’efficacité, vous avez renoncé à remplir les poches des petites gens parce qu’ils sont trop nombreux et que cela vous donnerait trop de travail dans votre distribution générale.

Mme Valérie Pécresse, ministre. Je ne fuis jamais le travail.

M. Jean-Pierre Brard. Le rapporteur a souligné votre ouverture d’esprit dans la confrontation. Madame la ministre, permettez-moi cette familiarité : si l’on peut dire qu’une huître est ouverte, on peut dire que vous avez été ouverte à la discussion. (Sourires.)

Sinon, il faut avoir beaucoup d’imagination parce que vous n’avez pas fait preuve d’ouverture par rapport à ce que nous représentons.

M. Christian Jacob. Uniquement aux bonnes propositions.

M. Jean-Pierre Brard. D’une certaine manière, vous me rassurez. August Bebel, qui n’est peut-être pas un grand-parent à vous, disait : quand l’adversaire politique me félicite, je me demande quelle sottise j’ai bien pu faire. Et je me dis que, depuis le début du débat, nous n’en avons fait aucune puisqu’à aucun moment, vous ne nous avez félicités.

En revanche, ce qui est vrai, c’est que l’opposition, dans sa diversité, a fait vivre le débat. S’il n’y avait eu que la majorité, cela aurait été d’un ennui invraisemblable, n’est-ce pas, monsieur Jacob ?

M. Christian Jacob. Oui. (Sourires.)

M. Jean-Pierre Brard. Vous y contribuez, d’ailleurs, parce que vous veillez à ce que l’ordre règne dans les rangs de l’UMP.

M. Jean Mallot. Même pour l’élection présidentielle.

M. Jean-Pierre Brard. Vous avez des orthodoxes chez vous et s’il y avait un prix à décerner, il serait assurément pour Jérôme Chartier. Car en matière d’orthodoxie, il est le plus remarquable.

M. Christian Jacob. Chez vous, c’est plus simple, vous êtes moins nombreux.

M. Jean-Pierre Brard. Quant à Gilles Carrez, il fait consensus. Il travaille du matin au soir et même la nuit du 31 décembre au 1er janvier, à tel point qu’il évoque dans mon esprit un souvenir : Stakhanov (Sourires) montant les rangs de brique et les rangs de brique...(Rires sur tous les bancs.) Il ne souciait pas de l’utilité de ce qu’il faisait, mais simplement de la quantité de travail accompli.

M. Michel Bouvard. Cela, ce n’est pas très sympathique !

M. Jean-Pierre Brard. Et de ce point de vue, je dois reconnaître à Gilles Carrez qu’il est le plus productif de notre assemblée. Quant à l’utilité, si je juge par rapport aux intérêts que nous représentons ici, il me permettra de contester l’utilité de ce qu’il a fait, de même que je contestais autrefois l’utilité des stakhanovistes.

Rappelez-vous, Charles-Amédée de Courson, vous qui avez des références, que dans l’ex-Union soviétique, on produisait des chaussures sans se soucier si elles étaient à la taille des pieds des clients éventuels. (Rires.)

Avec Gilles Carrez, on est un peu dans la même situation, ce qui n’enlève rien à son talent et – je terminerai par là, monsieur le président – ce qui n’enlève rien à son esprit d’abnégation parce qu’il arrive bien évidemment qu’il fasse des propositions intéressantes,…

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Grâce à moi, vous êtes bien chauffé !

M. Jean-Pierre Brard. …mais qui tombent dans l’oreille de ministres qui ne sont pas appareillés du point de vue acoustique. (Sourires.)

M. le président. La parole est à M. Jérôme Chartier.

M. Jean Mallot. L’orthodoxe !

M. Jérôme Chartier. Mes chers collègues, nous nous sommes largement exprimés tout à l’heure. À la fin de ce marathon budgétaire – appelons-les choses par leur nom –, le moment est venu des salutations et des remerciements.

Je voudrais saluer le travail accompli par l’ensemble des collaborateurs du groupe parlementaire UMP qui se sont donné énormément de mal pour veiller, dans la discrétion, à la bonne organisation de la majorité et assurer une production intellectuelle de qualité. Je tiens à les en remercier tout particulièrement.

Je tiens également à remercier tous mes collègues de la majorité, qui ont été très présents. Contrairement à Jean-Pierre Brard, véritable stakhanoviste de la prise de parole, qui privilégie la quantité par rapport à la qualité – qui reste exceptionnelle chez lui –, …

M. Jean-Pierre Brard. Je vous revaudrai ça !

M. André Schneider. On y compte bien !

M. Jérôme Chartier...chaque député de la majorité sait que, pour que les débats puissent suivre leur cours de façon naturelle et fluide, il faut parfois savoir limiter son envie de prendre la parole.

M. Jean Mallot. Fermer sa gueule, quoi !

M. Jérôme Chartier. Chacun l’a fait avec beaucoup d’intelligence…

M. Jean-Pierre Brard. Une intelligence bien silencieuse !

M. Jérôme Chartier. …avec beaucoup d’humour aussi, il faut le reconnaître, et dans un esprit collectif.

Au nom de notre bien-aimé président Christian Jacob (Rires.)…

M. Jean-Pierre Brard. Attention, il parle comme s’il était votre successeur, monsieur Jacob !

M. Jérôme Chartier. …je voudrais les en remercier.

M. André Schneider. C’est l’esprit de Noël !

M. Jérôme Chartier. Non, monsieur Brard, je ne brigue pas la place de mon ami Christian Jacob.

Je tiens encore à saluer le travail de Gilles Carrez, mais sans l’ironie de Jean-Pierre Brard. Il lui revient toujours le rôle difficile d’être le rapporteur des projets de loi de finances et les projets de loi de finances rectificative. Il le fait en tant que rapporteur général de la commission des finances mais aussi en tant qu’homme politique engagé. Toujours habile à se maintenir sur un chemin de crête …

M. Michel Bouvard. Peu encombré !

M. Jérôme Chartier. …et toujours fidèle à ses convictions personnelles, il sait soutenir la voix de la majorité et celle du Gouvernement, avec toute la précision et la finesse d’analyse qui le caractérise ...

M. Jean Mallot. La subtilité aussi.

M. Jérôme Chartier. …mais aussi, disons-le, avec la gentillesse qui est sa marque. Qu’il en soit infiniment remercié. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Merci !

M. Jérôme Chartier. Je voudrais également saluer le travail de Valérie Pécresse. C’était son premier marathon budgétaire en tant que ministre des comptes publics et elle en a impressionné plus d’un, ces derniers mois…

M. Gilles Carrez, rapporteur général. C’est vrai !

M. Jérôme Chartier. …tant par son ardeur et son courage que par sa connaissance précise d’éléments qui ne sont pas simples d’accès, de prime abord. À chaque fois, elle a su mettre en avant des analyses incontestables et rallier les points de vue de la majorité, ce qui n’est jamais chose facile, comme Jean-Pierre Brard le sait, pour avoir été dans des temps très anciens membre d’une majorité.

M. Jean Mallot. Un peu de patience !

M. Jérôme Chartier. Surtout, elle n’a jamais été rancunière quand tel ou tel a voulu faire avancer une disposition qui lui était chère dans le cadre d’un projet de loi de finances.

M. Jean-Pierre Brard. J’en connais à l’UMP qui en seraient incapables !

M. Jérôme Chartier. Elle a gardé les yeux sur l’essentiel, c’est-à-dire l’esprit général de la politique de la majorité et du Gouvernement, dans l’intérêt de la France. Elle veille toujours au respect de cette trajectoire qui, je crois, l’honore comme elle honore toute la majorité. Qu’elle en soit infiniment remerciée. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Je ne serais pas complet si je ne saluais pas l’ensemble des collaborateurs du Gouvernement, toujours présents et disponibles, ne comptant jamais leur temps, au même titre que les administrateurs de la commission des finances, tous émérites. Je remercie l’ensemble des fonctionnaires de l’Assemblée nationale, toujours silencieux mais sans lesquels la démocratie ne pourrait s’exprimer valablement.

Je remercie encore l’ensemble des présidents de séance qui, de l’opposition, cher Jean Mallot, comme de la majorité,…

M. Jean Mallot. Au perchoir, il n’y a ni opposition, ni majorité !

M. Dominique Tian. Quelle hauteur d’esprit !

M. Jérôme Chartier. … se montrent toujours bienveillants à l’égard des orateurs, quels qu’ils soient, pour faire en sorte que le débat prospère, et on a vu qu’il avait prospéré plus d’une fois pendant ce marathon budgétaire.

N’en déplaise à l’opposition, nous allons maintenant voter en faveur de ce projet de loi de finances rectificative, qui est la voie logique de l’apurement des déficits…

M. Jean Mallot. « Apurement des déficits » !

M. Jérôme Chartier. …et du maintien de la trajectoire française dans un univers instable, en vue d’une croissance que l’on souhaite le moins atone possible, tant pour la France et l’ensemble des démocraties occidentales que pour le reste du monde.

M. Jean Mallot. Et au-delà !

M. Jérôme Chartier. À l’approche de la nouvelle année, je formulerai trois vœux : prospérité, emplois pour tous les Français, union nationale, dans cette période difficile que vit notre pays.

M. Jean Mallot. Oui, union nationale derrière François Hollande !

M. Jérôme Chartier. Cette union nationale, les Français y aspirent et, même si nous aurons des débats tranchés dans quelques mois, il nous faut continuellement y tendre. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

M. le président. La parole est à M. Christian Eckert.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Je sens qu’il va casser l’ambiance !

M. Christian Eckert. Mes chers collègues, nous ne sommes pas réunis pour un exercice d’autosatisfaction, même si la courtoisie républicaine m’oblige à saluer l’ensemble des courageux qui sont restés jusqu’au bout de nos débats budgétaires. Je l’ai déjà fait tout à l’heure. Point trop n’en faut : revenons au texte.

Vous vous autocongratulez, chers collègues de la majorité, mais sur le terrain – je ne sais pas si vous êtes allés récemment dans vos circonscriptions –, ce n’est pas exactement la même ambiance. On ne se fait pas spécialement remercier ni féliciter.

M. Éric Berdoati. Vous, non !

M. Christian Jacob. Il a sans doute une mauvaise circonscription !

M. Christian Eckert. Ce projet de loi de finances rectificative, je vous rappelle qu’il trouve son origine dans votre propension à nier que les perspectives de croissance seraient nulles. Nous vous avions prévenu que le taux de 1 % ne serait pas atteint. Vous savez aujourd’hui que nous nous situerons très probablement en dessous de 0,5 %.

M. Michel Bouvard. Nous discutons du collectif pour 2011 : les prévisions de croissance ont été atteintes !

M. Christian Eckert. Les conséquences se chiffrent en milliards et il va falloir beaucoup de courage l’année prochaine, lors de la prochaine loi de finances rectificative, pour essayer de rééquilibrer les choses.

Ne perdons pas de vue le contenu de ce collectif : la pédagogie est l’art de la répétition.

Vous vous apprêtez à voter, mes chers collègues de la majorité, une ponction de 4 milliards d’euros sur l’ensemble de nos concitoyens, à travers des impôts directs ou indirects.

M. Jean Mallot. Eh oui !

M. Christian Eckert. Le gel du barème de l’impôt sur le revenu aboutira à une hausse généralisée de cet impôt, pour les plus riches comme pour les moins fortunés.

M. Michel Bouvard. Les moins fortunés ne le paient pas !

M. Jean-Pierre Brard. Et la TVA ?

M. Christian Eckert. Ce sont près de 200 000 foyers fiscaux qui vont être assujettis pour la première fois à l’impôt sur le revenu et qui vont, en outre, devoir s’acquitter de la taxe d’habitation et de la taxe foncière. Vous l’avez souligné dans votre rapport, monsieur le rapporteur général : ce sont près de 80 millions d’euros de réductions d’impôts locaux qui vont disparaître.

Mais que représentent ces 80 millions, chers collègues ? C’est moins que ce que Bernard Tapie a perçu indûment.

M. Jean-Pierre Brard. Beaucoup moins !

M. Christian Eckert. Moins que ce que les époux Tapie ont perçu lorsque vous avez couvert la fameuse décision du tribunal arbitral. Nous aurons l’occasion d’en reparler.

M. Jean Mallot. C’est bien possible !

M. Christian Eckert. Vous vous apprêtez, mes chers collègues, à voter la hausse de la TVA et vous vous promenez partout en affirmant que cette hausse ne concerne pas les produits de première nécessité. Mais il ne suffit pas de le dire : vous faites le contraire,…

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Exactement !

M. Christian Eckert. …qu’il s’agisse de l’assainissement, de l’enlèvement et du tri des ordures ménagères, des services à la personne à domicile, du logement social ou du livre – sur le livre, les recettes prévues sont de 70 millions d’euros, soit encore moins que ce que les époux Tapie ont perçu.

Vous vous retranchez derrière cette fameuse « taxounette » sur les hauts revenus, qui est purement cosmétique. J’ai refait des calculs – nous ne sommes pas fatigués, nous, nous sommes prêts à nous battre jusqu’au bout. Prenons le cas d’une personne qui gagnerait vingt fois le SMIC net – 1 073 euros –, soit plus 20 000 euros chaque mois et 257 520 euros par an. Si elle est en couple, elle n’aura rien à payer au titre de votre contribution, puisque le seuil a été fixé à 250 000 euros par part. Si elle est seule, elle ne paiera que 225 euros de taxe sur les hauts revenus !

M. Jean Mallot. Des pièces jaunes !

M. Christian Eckert. Soit moins d’un dix millième de ses revenus annuels !

Vous pouvez toujours vous promener en répétant : équité, équité, équité. Il n’y pas d’équité dans ce projet de loi de finances rectificative.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Évidemment !

M. Christian Eckert. Il y a une hausse de la TVA que tout le monde subit, une hausse générale de l’impôt sur le revenu, avec 200 000 nouveaux foyers qui y seront assujettis.

Madame la ministre, lorsque vous pointez les collectivités territoriales en soulignant qu’elles ont embauché, vous oubliez que vous leur avez transféré des personnels, des charges et des services – les personnels des collèges et des lycées, entre autres.

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Ils ne sont pas comptés.

M. Christian Eckert. Vous oubliez aussi le nombre d’emplois créés chez les opérateurs de l’État. Savez-vous combien il y en a eu ? La Cour des comptes a établi que durant cette législature, les opérateurs de l’État ont embauché 25 000 personnes supplémentaires. Et pour cause : nous savons qu’il y a des besoins.

Pour vous, les services publics et les moyens qui vont avec sont une charge. C’est vrai que certaines personnes n’en ont pas besoin ou presque, et ce sont probablement celles avec lesquelles vous entretenez les meilleures relations. Mais pour nos autres concitoyens, les services publics sont une forme de redistribution de la richesse, une forme de service à la personne qui assure l’équité qui est au cœur de la République. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR.)

M. le président. La parole est à M. Gérard Bapt, dernier orateur inscrit.

M. Jean Mallot. Il est temps d’appeler le médecin !

M. Jérôme Chartier. Il faut bien que les différents courants du PS soient représentés !

M. Gérard Bapt. Madame la ministre, il est temps d’appeler le médecin, dit mon collègue. Ce n’est pas parce que je suis le dernier orateur inscrit mais parce qu’à la veille de Noël, ce projet de loi de finances rectificative nous laisse dans un état de désenchantement.

Pour prolonger les propos de M. Eckert, ne vous en déplaise, chers collègues, je soulignerai que les 1,8 milliard de recettes liés à l’augmentation de la TVA d’1,5 point correspondent, à l’euro près, au coût de la réforme de l’impôt sur la fortune que vous avez votée en juin. Cela me paraît emblématique de votre politique : tout se passe comme si l’allégement de la charge de l’impôt sur la fortune était immédiatement répercuté sur la consommation populaire. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Néanmoins, Noël approche et nous devons faire place à l’espérance, même si nous ne sommes pas à Bethléem. Je viens de recevoir le dernier numéro de la revue Pharmaceutiques éditée par des laboratoires pharmaceutiques, numéro consacré aux aides à la recherche, à travers le crédit impôt-recherche et les partenariats public-privé notamment – et j’ai pensé à vos anciennes fonctions, madame la ministre. La couverture est une photo qui représente un petit animal de laboratoire au cœur d’un dédale : il ne sait pas comment s’en sortir. Il m’a fait penser à la recherche publique, en particulier dans le domaine de la santé environnementale qui m’est cher puisque je préside le groupe d’études sur la santé environnementale dans cette assemblée.

Deux mauvaises nouvelles viennent de me parvenir.

La première est le report d’un an des appels d’offres de l’Agence nationale de la recherche concernant un programme CESA portant sur les déterminants en santé environnementale. Il s’agit pourtant là d’un engagement du Grenelle de l’environnement. Il s’agit pourtant là d’un engagement du plan national de recherche sur les perturbateurs endocriniens. Il s’agit pourtant là d’un engagement du deuxième plan national santé-environnement.

L’autre, c’est l’arrêt, décidé par un comité national des registres, du seul registre de surveillance des malformations à la naissance. Il existait depuis trente ans : c’est en tirant les leçons du drame sanitaire de la thalidomide, qui a provoqué des milliers de malformations chez les enfants, que l’on avait mis en place ce registre, à Lyon.

Ce registre va s’arrêter au 1er janvier 2012, car il vient d’être disqualifié. C’est pourtant le seul registre de cette qualité qui existe à l’heure actuelle sur notre territoire.

Oh, bien sûr, il ne s’agit que d’une petite chose – quelques centaines de milliers d’euros, cinq emplois de gens qualifiés dont le dernier audit avait montré la qualité du travail. Mais il s’agit aussi de l’abandon d’engagements : grâce, notamment, aux investissements d’avenir, nous avions pensé que les sciences de la vie étaient considérées aussi comme un facteur de progrès, de compétitivité, de croissance, par la recherche de brevets nouveaux.

Tout ce secteur des sciences de la vie semble, notamment pour ce qui est de la santé environnementale, être victime des économies, qui frappent aussi des secteurs d’avenir. Vous sacrifiez la consommation, par vos mesures sur la TVA et par le blocage des crédits affectés aux allocations logement, mais vous sacrifiez aussi des dépenses qui sont pourtant stratégiques pour la recherche de compétitivité, dans un des secteurs dans lesquels nous sommes encore présents, celui des sciences de la vie.

Voilà pourquoi, madame la ministre, si je puis former un vœu à la veille de Noël, c’est que vous rectifiiez cette erreur et qu’à l’occasion, peut-être, d’une nouvelle discussion budgétaire, vous puissiez rassurer les secteurs de la recherche, de la recherche publique en général, et de la recherche en santé publique en particulier. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. le président. La discussion générale est close.

La parole est à Mme la ministre.

Mme Valérie Pécresse, ministre. Je ne veux pas rouvrir la discussion, car nous avons déjà beaucoup parlé, et du projet de loi de finances, et du projet de loi de finances rectificative. (Sourires.)

M. Christian Eckert. C’est dommage ! Nous ne sommes pas fatigués !

Mme Valérie Pécresse, ministre. Mais je voudrais répondre à M. Bapt, en lui suggérant, s’il en était d’accord, d’organiser une séance de questions cribles sur l’utilisation des investissements d’avenir en recherche biomédicale. Je pense qu’il serait surpris de voir les sommes qui ont été investies par le Gouvernement depuis cinq ans.

Jules Hoffmann, notre nouveau prix Nobel de médecine, s’est, vous le savez, fait connaître par ses recherches sur la mouche drosophile mais il fait partie d’une université, Strasbourg, très connue pour des recherches notamment sur la souris, avec le prix Nobel de Jean-Marie Lehn.

M. André Schneider. Strasbourg est une très bonne université ! (Sourires.)

Mme Valérie Pécresse, ministre. Il vous dira ce qu’il a dit urbi et orbi lorsqu’il a reçu son prix : aujourd’hui, en France, il y a enfin de l’argent pour tous les bons projets de recherche. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Texte adopté par l’Assemblée nationale
en nouvelle lecture

M. le président. J’appelle maintenant, conformément à l’alinéa 3 de l’article 114 du règlement, le projet de loi dans le texte adopté par l’Assemblée nationale en nouvelle lecture.

Y a-t-il des explications de vote ?

M. Jean-Pierre Brard. Croyez-vous que ce soit nécessaire ?

M. le président. Je crois en effet que l’Assemblée a été suffisamment éclairée. (Sourires.)

Plusieurs députés du groupe de l’Union pour un mouvement populaire. Et même illuminée !

M. Jean Mallot. À l’UMP, il y en a, des illuminés !

M. Jean-Pierre Brard. À l’UMP, ils sont irradiés par le grand capital !

Vote sur l’ensemble

M. le président. Je mets aux voix l’ensemble du projet de loi tel qu’il résulte du texte voté par l’Assemblée nationale en nouvelle lecture.

(L’ensemble du projet de loi est adopté.)

6

Ordre du jour de la prochaine séance

M. le président. Prochaine séance, jeudi 22 décembre à neuf heures trente :

Discussion du projet de loi relatif à la répression de la contestation de l’existence des génocides reconnus par la loi.

La séance est levée.

(La séance est levée à dix-neuf heures vingt.)