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Edition J.O. - débats de la séance
Articles, amendements, annexes

Assemblée nationale
XIIIe législature
Session ordinaire de 2008-2009

Compte rendu
intégral

Deuxième séance du mercredi 3 décembre 2008

SOMMAIRE ÉLECTRONIQUE

SOMMAIRE


Présidence de M. Alain Néri

1. Communication audiovisuelle et nouveau service public de la télévision

Rappels au règlement

M. Jean-Marc Ayrault

M. Noël Mamère

Mme Christine Albanel, ministre de la culture

M. Jean-Marc Ayrault

M. Jean-Marc Ayrault

M. Roger Karoutchi, secrétaire d'État chargé des relations avec le Parlement

M. Jean-Marc Ayrault

M. Noël Mamère

M. Michel Herbillon

M. Jean-Marc Ayrault

M. Patrick Braouezec

Article 6 (suite)

Article 7

M. Patrice Martin-Lalande

M. Didier Mathus

M. Marcel Rogemont

M. Patrick Braouezec

M. Michel Françaix

Mme Sandrine Mazetier

Mme Aurélie Filippetti

M. Patrick Roy

M. Patrick Bloche

M. Noël Mamère

M. François Pupponi

M. David Habib

M. Jean-Pierre Dufau

M. Jean Mallot

M. François Loncle

M. Jean Gaubert

M. Philippe Martin

M. Patrick Braouezec

M. Didier Mathus

Mme Christine Albanel, ministre de la culture

Rappel au règlement

M. Jean-Marc Ayrault

M. Jean Leonetti

M. Jean-Marc Ayrault

2. Ordre du jour de la prochaine séance

Présidence de M. Alain Néri,
vice-président

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à vingt et une heures trente.)

1

Communication audiovisuelle et nouveau service public de la télévision

Suite de la discussion, après déclaration d'urgence, d'un projet de loi

M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion, après déclaration d’urgence, du projet de loi relatif à la communication audiovisuelle et au nouveau service public de la télévision (nos 1209, 1267).

M. Jean-Marc Ayrault. Je demande la parole pour un rappel au règlement.

Rappels au règlement

M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Ayrault.

M. Jean-Marc Ayrault. Cet après-midi, j’ai interpellé M. le secrétaire d'État chargé des relations avec le Parlement à la suite des déclarations qu’il a faites dans l’hémicycle et à l’extérieur. Je lui ai dit que nous avions le sentiment que le Gouvernement était en train de préparer l’opinion à l’utilisation de l’article 49-3 pour faire passer son projet de loi, et que c’était sa manière à lui de casser le travail de conviction engagé par l’opposition pour sensibiliser les Français au danger de cette prétendue réforme qui met en péril l’indépendance et la pérennité de l’audiovisuel public.

J’ai demandé que le Premier ministre vienne en personne s’expliquer devant la représentation nationale et pour lui donner le temps de s’organiser, car je sais bien que son temps est précieux, j’ai demandé la vérification du quorum, ce qui a été fait. Il est maintenant un peu plus de vingt et une heures trente et le Premier ministre n’est pas présent.

M. Didier Mathus. Où est-il ?

M. Jean-Marc Ayrault. Je voudrais savoir s’il va venir, si nous devons attendre. Et si le Gouvernement ne répond pas à ma demande, je vous demanderai, monsieur le président, une suspension de séance pour réunir mon groupe et prendre une décision sur la suite de nos interventions.

Mme Isabelle Vasseur. Quelle image vous donnez du Parlement !

M. le président. La parole est à M. Noël Mamère.

M. Noël Mamère. Monsieur le président, au nom de mon groupe, j’avais formulé la même demande que le président Ayrault, afin d’entendre le Premier ministre. En effet, nous n’avons pas reçu de réponses aux nombreuses questions que nous avons posées au Gouvernement. Mme la ministre de la culture et de la communication a préféré l’invective à des réponses constructives (Exclamations sur les bancs du groupe UMP), en nous accusant d’obstruction.

Nous avons entendu M. le secrétaire d'État chargé des relations avec le Parlement nous expliquer que si nous nous obstinions à poser des questions gênantes au Gouvernement et à la majorité sur un projet de bricolage de la télévision publique, alors le Gouvernement pourrait faire preuve d’imagination. Il s’agit bien évidemment d’un euphémisme, dont on sait bien ce qu’il signifie : attention, si vous continuez à vous occuper de ce qui vous regarde, c’est-à-dire de la télévision publique et de la démocratie, nous allons sortir les outils de notre boîte à empêcher le débat démocratique !

M. Benoist Apparu. Empêcher le débat, c’est exactement ce que vous faites !

M. Noël Mamère. Des outils, il y en a plusieurs : le 49-3, le 44-3, le vote bloqué. Vous allez sans doute faire preuve de beaucoup d’imagination pour empêcher le débat.

Ce que nous voulons dire ici de la manière la plus claire et la plus solennelle, c’est que nous voulons que le débat se poursuive.

M. Benoist Apparu. Nous aussi !

M. Noël Mamère. Nous voulons examiner chacun des articles, chacun des amendements. Et nous regrettons beaucoup que les bancs de la majorité soient aussi silencieux,…

M. Didier Mathus. Et clairsemés !

M. Noël Mamère. …et que nos collègues n’aient rien d’autre à proposer que des onomatopées chaque fois que nous intervenons.

Ce que nous voulons aussi, et nous le répétons, c’est que ce gouvernement réponde enfin clairement aux questions que nous lui posons sur un texte qui n’illustre rien d’autre que l’alliance entre l’affairisme et la télévision d’État. (Protestations sur les bancs du groupe UMP.)

Nous ne sommes pas ici pour cautionner un véritable hold-up sur le service public, pour cautionner des cadeaux faits à la télévision privée et aux amis du Président de la République.

Si les Français sont, à juste titre, d’abord préoccupés par leur pouvoir d’achat et par la question du chômage, s’ils savent que la crise va les toucher de manière encore plus dure et encore plus brutale, ils doivent aussi savoir qu’ils vont faire les frais des actions entreprises par ceux qui préfèrent le cynisme à l’intérêt général, et que demain ils auront une télévision publique au rabais. Ainsi, les principes démocratiques seront sapés.

Nous savons que l’emploi du temps du Premier ministre est très chargé. Cela dit, on entend plus souvent le Président de la République. On peut donc considérer qu’avec un hyper-président, un omni-président, le Premier ministre doit pouvoir trouver quelques moments pour venir discuter avec le Parlement. C’est tout de même sa fonction, puisque lui, contrairement au Président de la République, il est responsable devant la représentation nationale. Voilà pourquoi nous attendons qu’il vienne s’expliquer devant nous.

Il est vingt et une heures quarante. Le Premier ministre n’est toujours pas ici. Par conséquent, comme mon collègue Ayrault, je vous demande, monsieur le président, une suspension de séance pour réunir mon groupe (« Quel groupe ? Vous êtes deux ! » sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à Mme Christine Albanel, ministre de la culture et de la communication.

Mme Christine Albanel, ministre de la culture. J’écoute avec beaucoup d’intérêt M. Noël Mamère nous annoncer qu’il va sortir de nouveaux instruments de sa boîte à outils pour faire de l’obstruction. Nous avons cru déjà les voir, puisque, depuis plus d’une semaine, nous avons examiné en moyenne huit amendements par heure.

M. Noël Mamère. C’est un rythme écologique !

Mme Christine Albanel, ministre de la culture et de la communication. Vous souhaitez certainement, mesdames, messieurs les députés de l’opposition, nous voir utiliser l’article 49-3, mais nous sommes prêts à poursuivre le débat très sereinement. Je suis là pour cela, ainsi que le secrétaire d'État chargé des relations avec le Parlement, qui va sans doute bientôt arriver. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Ayrault.

M. Jean-Marc Ayrault. Je note que Mme Albanel ne m’a répondu ni sur la forme ni sur le fond. Je suis désolé pour elle, mais je suis donc obligé de demander une suspension de séance pour réunir mon groupe et décider de la suite de nos interventions dans cet hémicycle.

M. le président. M. Mamère a demandé une suspension de séance. Je ne peux pas la lui accorder, car il n’a pas la délégation de son groupe. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

M. Michel Herbillon. C’était un de ces effets de séance auxquels M. Mamère nous a habitués !

M. le président. S’il vous plaît, mes chers collègues, ne vous énervez pas !

Le président Ayrault m’a aussi demandé une suspension de séance. Elle est de droit. Je vais donc suspendre la séance pour dix minutes.

Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à vingt et une heures quarante, est reprise à vingt et une heures cinquante-cinq.)

M. le président. La séance est reprise.

La parole est à M. Jean-Marc Ayrault.

M. Jean-Marc Ayrault. Madame la ministre, vous avez indiqué tout à l’heure que M. Karoutchi allait nous rejoindre. S’agissait-il d’une impression ou d’une information ?

M. Jean-Claude Lenoir. Il est là !

M. Jean-Marc Ayrault. Je pose la question parce que je constate que le Premier ministre, lui, ne vient pas.

Mme Muriel Marland-Militello. Mais nous, nous sommes là !

M. Jean-Marc Ayrault. Mais je vois que M. Karoutchi arrive et, avec lui, une partie de la réponse à ma question. Aussi vais-je pouvoir l’interroger directement et solennellement.

Monsieur le secrétaire d’État chargé des relations avec le Parlement, pouvez-vous assurer à la représentation nationale qu’en aucun cas le Gouvernement n’utilisera des moyens qui lui permettront de mettre fin à ce débat et à l’examen, article par article et amendement par amendement, de ce projet de loi ? (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

M. Alain Marty. Cela dépend de vous !

M. Jean-Marc Ayrault. Je vous demande, monsieur le secrétaire d’État, de répondre précisément à ma question.

M. Patrice Martin-Lalande, vice-président de la commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi relatif à la communication audiovisuelle et au nouveau service public de la télévision et le projet de loi organique relatif à la nomination des présidents des sociétés France Télévisions, Radio France et de la société en charge de l’audiovisuel extérieur de la France. C’est un Gouvernement libre ou pas ?

M. le président. La parole est à M. Roger Karoutchi, secrétaire d'État chargé des relations avec le Parlement.

M. Roger Karoutchi, secrétaire d'État chargé des relations avec le Parlement. Monsieur le président Ayrault, j’ai déjà eu l’occasion de vous relater la réflexion que m’avait faite un journaliste dans la salle des quatre colonnes, mais c’est avec bonheur que je recommencerai. Les socialistes affirment avoir la patience et l’imagination de l’obstruction, m’a-t-il dit.

M. Marcel Rogemont. Non, nous ne faisons pas d’obstruction !

M. Roger Karoutchi, secrétaire d'État. À quoi j’ai répondu : « Moi, j’ai la patience et l’imagination que me donnent la force constitutionnelle et le fait de devoir débattre ». Et chacun de se demander ce que voulait dire « la force constitutionnelle ». Eh bien, c’est la force constitutionnelle du Gouvernement.

Le Gouvernement, Mme Albanel l’a dit tout à l’heure, est tout à fait disposé au débat, au dialogue. (« Alors ! » sur les bancs du groupe SRC.) Cependant, on ne peut pas dire que nous avancions à un rythme soutenu : aucun amendement n’a fait l’objet d’un vote cet après-midi.

M. Michel Herbillon. Zéro amendement en trois heures !

M. Marcel Rogemont. À qui la faute ?

M. Roger Karoutchi, secrétaire d'État. Sincèrement, le Gouvernement est tout à fait prêt au débat. Si vous me demandez si, là, nous avons décidé d’une quelconque mesure visant à empêcher ou à arrêter le débat, la réponse est non. (« Ah ! » sur les bancs du groupe SRC.) Mme Albanel et moi-même souhaitons que la discussion puisse progresser. Nous en sommes à l’article 6 ou 7.

M. Patrick Braouezec. À l’article 6 ! N’allez pas trop vite !

M. Roger Karoutchi, secrétaire d'État. Reconnaissez que ce n’est pas un rythme propre à balayer toute idée de volonté d’obstruction.

Avec un geste des deux côtés, nous pourrions avancer, échanger des arguments comme cela est légitime en démocratie. Mais avançons ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Mme Catherine Génisson. Il n’y a pas d’échange d’arguments, c’est le problème !

M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Ayrault.

M. Jean-Marc Ayrault. Je remercie M. le secrétaire d’État d’avoir répondu courtoisement à ma question. Si cela pouvait être une habitude de la part du Gouvernement, ce serait mieux.

M. Michel Herbillon. C’est comme cela depuis le début !

M. Jean-Marc Ayrault. Pas du tout !

Je prends acte de votre réponse, monsieur le secrétaire d’État, notamment du fait que vous n’envisagiez pas, à cet instant, de prendre des mesures relevant de la « force constitutionnelle ». Avec honnêteté, vous avez précisé que vous parliez pour l’instant présent.

M. Roger Karoutchi, secrétaire d'État. Évidemment, si cela doit durer jusqu’à la mi-mars…

M. Jean-Marc Ayrault. Le Gouvernement ne s’interdit donc pas d’utiliser ladite force constitutionnelle. Disant cela, je ne fais pas de procès d’intention. Monsieur le secrétaire d’État, quand vous dites que nous n’avons pas avancé en termes d’articles et d’amendements depuis seize heures trente,…

M. Michel Herbillon. C’est vrai !

M. Jean-Marc Ayrault. …c’est vrai. Mais si Mme la ministre n’avait pas utilisé la séance des questions au Gouvernement pour caricaturer, à deux reprises, les positions du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et de l’opposition (Protestations sur les bancs du groupe UMP), nous n’en serions sans doute pas là. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Je ne crois pas qu’il s’agisse d’un hasard. Vous vous êtes dit, madame : « En dehors des séances télévisées de quinze à seize heures, ce débat dans l’hémicycle ne va pas intéresser grand monde. Je vais en profiter pour dire ma vérité, qui devrait être considérée comme la vérité. » C’est une certaine conception. J’espère que, demain, ce ne sera pas celle du service public de la télévision et de la radio. Ce qui n’est pas acceptable, c’est que vous ayez « fait » non la ministre de la communication et de la culture, mais la ministre de la propagande. (Protestations sur les bancs du groupe UMP. – Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.) Il faut en assumer les conséquences.

Monsieur le secrétaire d’État, je prends acte de vos propos. Nous allons voir ce qui va se passer. Des amendements seront défendus par des députés de mon groupe et nous jugerons sur les actes. En tout cas, nous exigeons que ce débat aille jusqu’au bout, en prenant le temps qu’il faut pour étudier au fond les questions, afin que les Français soient réellement éclairés sur la nature de ce projet de loi.

M. le président. La parole est à M. Noël Mamère.

M. Noël Mamère. La réponse de M. le secrétaire d'État chargé des relations avec le Parlement ne peut nous satisfaire que dans l’instant.

Mme Claude Greff. En tout cas, vous ne sortez pas grandis de ce débat !

M. Noël Mamère. Monsieur le secrétaire d’État, vous n’avez pas réellement répondu à la question posée par le président Ayrault. Il vous a dit que nous étions décidés à travailler sur chacun des articles au rythme qui est le nôtre depuis le début de la discussion. Et vous répondez : « À l’instant où je vous parle, je n’ai pas l’intention d’ouvrir ma boîte à outils constitutionnelle et d’empêcher le débat. » Vous ajoutez : « Chacun doit faire des efforts, nous sommes prêts au débat. Si vous faites des efforts, nous en ferons aussi et nous laisserons notre boîte à outils dans le placard. » Ces réponses ne peuvent pas nous satisfaire. Nous ne pouvons accepter cette forme de chantage. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Nous sommes une opposition responsable, qui défend le service public de l’audiovisuel.

Mme Claude Greff. Vous sombrez dans le ridicule !

M. Noël Mamère. Je rejoins le président Ayrault : Mme la ministre a en effet profité de la séance des questions de cet après-midi pour se livrer à de la propagande pure et simple (Protestations sur les bancs du groupe UMP), ce qui est très inquiétant pour l’idée qu’elle se fait du service public.

Lorsque l’on regarde votre projet, madame, et les amendements qui ont été déposés, on se dit que vous voulez faire de la télévision publique une télévision d’État et une télévision de propagande. (Protestations sur les bancs du groupe UMP.) Nous ne laisserons pas passer cela. Nous ne sommes pas du tout prêts à répondre à votre chantage et nous continuerons avec la même obstination, la même pugnacité, la même patience à combattre votre projet, qui est scandaleux. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à M. Michel Herbillon.

M. Michel Herbillon. Je veux dire, au nom de mon groupe, que nous sommes extrêmement choqués des propos tenus par le président Ayrault. (« C’est vrai ! » sur les bancs du groupe UMP.) Je suis extrêmement étonné que le président d’un groupe important de l’Assemblée, qui se réfère régulièrement à la démocratie et à la liberté, se permette, après les mises en cause du président du CSA, de Mme Ockrent et de l’intégrité personnelle de certains journalistes, de mettre en cause la liberté d’expression du ministre de la culture lorsqu’elle répond aux questions adressées au Gouvernement.

M. Noël Mamère. C’est de la propagande !

M. Michel Herbillon. Faudrait-il, monsieur le président du groupe socialiste, que le Premier ministre et les ministres vous demandent votre accord sur les termes mêmes de leurs réponses aux questions posées ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Alors que vous vous drapez en permanence dans votre dignité en évoquant la liberté d’expression et en parlant de textes « liberticides » – quelle modération dans le propos ! –, comment pouvez-vous employer de tels termes à l’encontre de Mme la ministre de la culture ? Ses réponses ne vous conviennent pas parce qu’elles portent sur les objectifs de ce texte, pas sur la caricature que vous en faites régulièrement. Monsieur Ayrault, les mensonges et les contrevérités ne deviennent pas une vérité parce qu’ils sont inlassablement répétés par vous et vos collègues. Je trouve extrêmement choquants vos propos sur les réponses que Mme la ministre de la culture a faites lors des questions au Gouvernement. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. Mes chers collègues, j’ai l’impression qu’à cette allure, nous ne finirons pas le texte ce soir ! (Rires et applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

La parole est à M. Jean-Marc Ayrault.

M. Jean-Marc Ayrault. Monsieur le président, je vois que vous faites preuve de bon sens. (Sourires.)

Je ne vais pas polémiquer avec M. Herbillon. Je ne retire rien de mes propos.

M. Michel Herbillon. Moi non plus !

M. Jean-Marc Ayrault. Si nous avons demandé cet après-midi au Premier ministre de venir s’expliquer en personne sur les intentions du Gouvernement concernant l’utilisation du 49-3, c’est parce que toutes les organisations syndicales des personnels de France Télévisions sont particulièrement inquiètes de ce qui se prépare.

Un député du groupe UMP. Les Français aussi sont inquiets !

M. Jean-Marc Ayrault. Nous ne sommes d’ailleurs pas les seuls à le dire. Ne sous-estimez pas ce qui est en train de se passer, la montée des angoisses, des inquiétudes. Vous devriez y être attentifs.

Nous, nous voulons faire preuve d’esprit constructif. Je répète ce que j’ai dit tout à l’heure et je n’ai pas compris pourquoi M. Herbillon a voulu relancer cet échange. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Nous sommes tout à fait prêts à passer à l’examen de nos amendements. Je crois d’ailleurs qu’un vote doit intervenir à la suite de ma demande de quorum.

M. le président. La parole est à M. Patrick Braouezec.

M. Patrick Braouezec. Je ne dérogerai pas à la ligne de conduite que nous nous sommes fixée. Nous avons déposé un nombre d’amendements tout à fait raisonnable sur les points les plus importants de ce projet de loi, ceux qui posent un grand nombre d’interrogations aux personnels et aux téléspectateurs attachés au service public de télévision.

Monsieur Herbillon, quand vous dites que le Gouvernement répond à nos questions, ce n’est pas vrai.

M. Michel Herbillon. Il ne répond peut-être pas dans le sens que vous souhaitez !

M. Patrick Braouezec. S’il en était autrement, nous n’aurions pas à poser plusieurs fois certaines questions. Je prendrai deux exemples, mais on pourrait en citer d’autres. J’ai dû m’y reprendre à trois fois pour obtenir de Mme la ministre la confirmation que la rumeur de la suppression de l’antenne de RFI à Moscou n’était pas fondée, alors qu’un certain nombre d’intellectuels, dont j’ai rappelé qu’ils n’étaient pas des gauchistes invétérés  – André Glucksman et Vladimir Bukowski –, sont à l’origine d’une pétition visant à dénoncer la suppression de cette antenne à Moscou. Il aurait suffi que Mme la ministre réponde dès ma première interrogation !

Autre exemple : nous avons interrogé le Gouvernement et le rapporteur sur la signification du mot « outre » dans les articles 5 et 6. Nous avons dû nous y reprendre à plusieurs reprises pour obtenir un début d’explication – ce n’était pas forcément satisfaisant, mais au moins a-t-il été tenu compte de notre interrogation légitime – sur le fait que le président du conseil d’administration de France Télévisions et de Radio France devrait répondre de son activité non pas devant le conseil d’administration, mais devant celui qui le nommait. Certains députés sont intervenus pour dire que l’on aurait pu porter le nombre de membres du conseil d’administration à treize, et non à douze « outre le président ».

Si vous voulez que ces débats se déroulent à un rythme un peu plus soutenu, il faudrait donc également que vous fassiez un effort de votre côté et que vous répondiez précisément aux questions que nous posons. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et SRC.)

Article 6 (suite)

M. le président. Cet après-midi, le vote sur les amendements nos 163, 164, 165, 167 et 168 à l’article 6 a été reporté en application de l’article 61, alinéa 3, du Règlement.

(Les amendements identiques nos 163, 164, 165, 167 et 168 ne sont pas adoptés.)

M. le président. Monsieur le secrétaire d’État, vous pouvez constater que nous avons beaucoup avancé, puisque nous venons de voter, d’un seul coup, cinq amendements ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC. Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Nous en arrivons à l’amendement n° 42 de la commission spéciale faisant l’objet de trois sous-amendements, nos 696, 427 et 865.

Je rappelle que cet amendement et ces sous-amendements ont été discutés lors de la séance de cet après-midi.

Sur le vote du sous-amendement n° 696, repoussé par Gouvernement et la commission, je suis saisi par le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche d’une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.

……………………………………………….

Nous allons maintenant procéder au scrutin.

(Il est procédé au scrutin.)

M. le président. Voici le résultat du scrutin :

(Le sous-amendement n° 696 n'est pas adopté.)

(Les sous-amendements nos 427 et 865, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)

(L'amendement n° 42 est adopté.)

M. le président. En conséquence, les amendements n°s 426 et 149 tombent, et l’article 6 est ainsi rédigé.

Article 7

M. le président. Plusieurs orateurs sont inscrits sur l’article 7.

La parole est à M. Patrice Martin-Lalande.

M. Patrice Martin-Lalande. Cet article détermine la composition du conseil d’administration de la future société en charge de l’audiovisuel extérieur de la France. Que l’AEF soit enfin réuni est une bonne nouvelle parce qu’il souffrait depuis de nombreuses années d’un éclatement et d’un manque de coordination dénoncés par beaucoup, notamment par la Cour des comptes qui, sous l’autorité du président Picq, a publié des travaux mettant en lumière cette faiblesse.

Avec ce conseil d’administration de la future société, il sera enfin possible de mettre en œuvre des synergies et de définir un projet d’entreprise cohérent. Il s’agit là d’un progrès important dont je me réjouis d’autant plus qu’il est à mettre en parallèle avec la définition d’un outil de pilotage politique de l’audiovisuel extérieur français. Je fais partie de ceux qui pensent que ce n’est pas à une société, fût-elle publique, de définir la politique extérieure de la France en matière d’audiovisuel ; c’est aux autorités politiques de le faire. Sur ce plan également, nous souffrions d’une profonde carence. Le conseil de l’audiovisuel extérieur de la France, qui n’a pas été réuni depuis de nombreuses années, était une institution en sommeil. Le pilotage politique constitue une étape positive avec la création d’une structure souple qui prendrait la forme d’un comité directeur regroupant les directeurs des administrations centrales concernées – services du Premier ministre, affaires étrangères, culture, budget et économie – avec l’agence des participations de l’État. Ce comité se réunirait périodiquement pour décider des orientations politiques à donner à l’action audiovisuelle extérieure de la France.

Deux bonnes nouvelles donc : un pilotage politique et un conseil d’administration permettant la mise en œuvre d’un projet pour l’audiovisuel extérieur de la France, comme jamais il n’en a existé auparavant !

M. le président. La parole est à M. Didier Mathus.

M. Didier Mathus. Nous avons déjà eu l’occasion, hier, de parler de l’audiovisuel extérieur de la France. Selon Patrice Martin-Lalande, il y aurait deux bonnes nouvelles. Pour ma part, j’en ai découvert une très mauvaise dans la presse aujourd’hui : le sénateur Kergueris explique, en effet, dans son rapport qu’il manque 25 millions d’euros au budget de l’audiovisuel extérieur français pour assurer le développement planifié et programmé de France 24 et de RFI.

Replaçons les choses dans leur contexte. Je rappellerai à nos collègues qui prennent les débats en cours que l’audiovisuel extérieur français est une tentative, ratée, pour essayer de regrouper les différentes composantes de l’AEF. L’UMP faisant appel à des « permanenciers », nous sommes obligés de répéter régulièrement nos arguments de façon à les informer des termes du débat ! L’AEF, chers collègues, est le regroupement de TV5Monde, de RFI et de France 24. Nous n’allons pas rappeler l’histoire de France 24, sa composition surprenante en 2006 avec la participation de TF1 au capital, à égalité avec France Télévisions, les mésaventures de RFI, parent pauvre de l’AEF, aujourd’hui négligée, méprisée, voire humiliée, et de TV5Monde que le conseiller Benamou – qui a failli aller à Rome – voulait annexer dans l’outil opérationnel de l’audiovisuel extérieur français. Mal lui en prit, car son faux pas a braqué nos partenaires francophones, québécois, belges et suisses. N’oublions jamais que leurs bras armés dans TV5Monde, sont non pas les gouvernements, mais les opérateurs nationaux, ce qui fait singulièrement défaut en France. Cette mésaventure s’est traduite par un affaiblissement de la France au sein de TV5Monde et par un échec du projet initial qui consistait à tout regrouper dans une holding intégralement contrôlée par l’État. TV5Monde n’est donc qu’un partenaire de la holding, celle-ci n’ayant d’autorité – si j’ose dire – que sur RFI et France 24. Nous connaissons les tenants et les aboutissants de cette équation. France 24 a vocation à s’adresser au monde. Or le Président de la République a, dans sa conférence du 8 janvier dernier, souhaité qu’elle s’exprime exclusivement en français ! Heureusement, quelques bons esprits, dont vous, madame la ministre, je n’en doute pas, lui ont rappelé que lorsqu’on avait vocation à s’adresser aux peuples du monde, il était pour le moins délicat de s’exprimer exclusivement en français sous-titré. Je me réjouis donc que le Gouvernement ait ramené le Président de la République à la raison, car il est prudent et plutôt efficace qu’une chaîne destinée à l’international ne soit pas uniquement diffusée en français ! Cela étant, les moyens du développement de cette chaîne ne sont pas assurés. RFI n’est pas une radio de sous-titrage ou de traduction ; c’est une radio de journalistes. Lorsque des journalistes de RFI font des émissions en russe, ce ne sont pas des émissions françaises traduites en russe ; ce sont des émissions réalisées par des journalistes imprégnés de culture russe. On pourrait dupliquer cet exemple dans toutes les parties du monde. Considérer que tout cela coûte trop cher et que l’on pourrait s’en passer serait une grave méprise. La vérité est que RFI constitue une des très grandes richesses de l’audiovisuel national.

Permettez-moi, pour conclure, de regretter l’échec de la tentative d’un regroupement rationnel des forces de l’audiovisuel français auquel aspirent Patrice Martin-Lalande et d’autres parlementaires. Cette tentative a été gâchée par la précipitation…

M. Patrice Martin-Lalande. C’est faux !

M. Didier Mathus. …des décisions impulsives comme on le voit souvent aujourd’hui. Il y a là une formidable occasion manquée. Il est vrai qu’en regroupant les richesses potentielles de France 24 – elles sont difficilement décelables –…

M. le président. Veuillez conclure, monsieur Mathus !

M. Didier Mathus. …et celles, extraordinaires, de RFI, nous aurions pu espérer quelque chose d’important. Certains esprits éclairés – je pense au président de la commission des affaires étrangères, Axel Poniatowski – considèrent que l’alliance entre la radio et la télévision est sans avenir – un mariage de la carpe et du lapin – et ne constitue pas un outil opérationnel. Je ne partage pas cet avis.

M. Jean Dionis du Séjour. Très bien !

M. Didier Mathus. Je pense au contraire qu’il y a beaucoup de choses à faire avec RFI, qui dispose de 1 000 journalistes remarquables. Ceux qui écoutent RFI – c’est possible à Paris – mesurent à quel point cette radio représente une richesse pour notre pays et pour notre capacité de faire mieux comprendre le monde à l’échelle internationale. Il est dommage que l’audiovisuel extérieur de la France soit aujourd’hui sacrifié et, surtout, inféodé, puisque l’épouse du ministre des affaires étrangères a été nommée à sa tête.

Mme Isabelle Vasseur. Pour ses qualités professionnelles !

M. Didier Mathus. Personne ne songe à remettre en cause ses qualités professionnelles, mais dans tout autre pays que la France, une telle nomination aurait été inimaginable ! Il n’y a que dans la France « sarkozyenne » qu’il est possible de nommer l’épouse du ministre des affaires étrangères patronne de l’audiovisuel extérieur français qui représente la France à l’étranger. Première singularité.

M. le président. Veuillez conclure !

M. Didier Mathus. Seconde singularité : la composition du conseil d’administration qui nous est soumise vise à aménager celui-ci pour permettre la nomination du président par décret présidentiel. C’est le coup de pied de l’âne ! Comment des antennes qui seront totalement soumises au pouvoir pourront-elles dès lors avoir la moindre crédibilité ?

M. le président. La parole est à M. Marcel Rogemont.

M. Marcel Rogemont. Comme l’a dit Didier Mathus, le sénateur Kergueris, élu du Morbihan, qui n’est pas dans l’opposition, a fait savoir qu’il manquait 25 millions d’euros pour le financement de l’audiovisuel extérieur de la France. Il indique également dans son rapport que 233 millions d’euros étaient prévus pour 2009, 218 millions pour 2010 et que nous en serions à 203 millions en 2011.

M. Jean-Louis Léonard. Cela n’a rien à voir avec l’article 7 !

M. Marcel Rogemont. Il n’est pas inutile, cher collègue, de savoir si le financement des structures que l’on va mettre en place sera pérenne ! C’est la raison pour laquelle je souhaite interroger Mme la ministre sur le niveau de financement de l’audiovisuel extérieur de la France pour 2009, 2010 et 2011, et lui demander si les montants que je viens d’évoquer sont exacts.

Dans un premier temps, l’audiovisuel extérieur de la France – AEF – devait s’appeler France Monde. Pour moi qui ai fait mes études du temps des colonies, AEF signifiait Afrique équatoriale française ! Le titre est en lui-même assez surprenant…

M. Patrice Martin-Lalande. Il est provisoire !

M. Marcel Rogemont. …et nous en aurions préféré un autre.

J’en viens à l’objet principal de l’article,…

M. Patrice Martin-Lalande. Enfin !

M. Marcel Rogemont. …c’est-à-dire, chacun l’aura compris, au conseil d’administration de la société en charge de l’AEF.

Le Président de la République a eu la courtoisie de décréter qu’il nommerait et révoquerait le président de France Télévisions à sa guise. S’agissant de l’AEF, non seulement il nomme et révoque, mais il provoque par ses nominations ! Sur ce point, je rejoins M. Mathus : il est étonnant, reconnaissons-le, que le Président de la République, qui ne devait nommer que le président de l’AEF, se préoccupe de l’organisation de cette société au point d’en désigner également la directrice générale déléguée. Cela ne laisse pas de nous inquiéter quant au fonctionnement de l’AEF.

Je reviens à la discussion dont la composition du conseil d’administration a fait l’objet, si je ne me trompe, en commission. Je suis désolé de revenir sur une question que le rapporteur, voulant supprimer plusieurs amendements, a souhaité évoquer à l’article 6, mais je me dois de rappeler qu’il serait naturel que l’opposition siège dans les organismes de l’audiovisuel extérieur de la France (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe UMP), comme à France Télévisions et à Radio France.

N’oubliez pas, mes chers collègues, que, jusqu’à ce que ce projet de loi soit appliqué – si vous le votez, ce dont je ne désespère pas de vous dissuader –, l’opposition est présente dans les conseils d’administration des sociétés de l’audiovisuel public. Si vous ne faites pas en sorte qu’elle continue à y être, il faudra retenir l’amendement que je m’apprête à vous présenter.

M. le président. Monsieur Rogemont, hâtez-vous vers votre conclusion !

M. Marcel Rogemont. J’y viens, monsieur le président. Si j’en avais le temps, je demanderais à chacun d’entre vous s’il trouve normal que l’opposition ne fasse plus partie des conseils d’administration dans lesquels elle siégeait jusqu’à présent.

M. Richard Mallié. Oui !

M. Bernard Gérard. C’est juste !

M. Marcel Rogemont. Je ne désespère pas de votre attachement à la démocratie…

M. le président. Ne désespérez pas et concluez, monsieur Rogemont !

M. Marcel Rogemont. Je conclus : je ne désespère donc pas de vous convaincre de modifier l’article 7.

M. le président. La parole est à M. Patrick Braouezec.

M. Patrick Braouezec. Avant de défendre tout à l’heure notre amendement, j’aimerais revenir sur la création de l’AEF. Vous remarquerez qu’à l’instar des deux derniers intervenants, je ne cherche pas à tout prix à gagner du temps, puisque nous utilisons le sigle alors que nous pourrions le développer …

Comme eux, je crains que l’AEF ne dispose pas des moyens lui permettant d’atteindre ses objectifs. Madame la ministre, sollicitée à trois reprises, vous avez fini par me répondre sur l’avenir de l’agence moscovite de RFI, mais je dois vous dire que vous ne m’avez pas convaincu, car j’entends ici ou là que sa suppression est bien prévue pour fin janvier 2009. Qu’en sera-t-il des autres agences ? Subiront-elles le même sort ?

Je tiens à souligner, après M. Rogemont, le rôle essentiel de RFI, qui constitue, je l’ai dit hier, la French touch à l’étranger. Sa spécificité lui confère une place particulière dans certains pays où le droit à l’information est parfois bafoué ou, en tout cas, maltraité. Personne ne comprendrait que cette radio ne puisse plus émettre dans certains pays étrangers, que ce soit en langue française ou dans d’autres langues.

Nous sommes inquiets, et les personnels qui seront rattachés à l’AEF le sont autant que nous. Ils l’ont manifesté, ils continuent de le faire et le feront sans doute à l’avenir, peut-être plus vigoureusement encore. Notre amendement tendra du reste à leur donner une plus grande place au sein du conseil d’administration. J’espère, madame la ministre, que vous serez sensible à nos arguments.

M. le président. La parole est à M. Michel Françaix.

M. Michel Françaix. Que dire à ce moment de la soirée (Murmures sur les bancs du groupe UMP), puisque nous voulons nous montrer le plus courtois possible, comme nous l’ont demandé nos collègues de la majorité ?

M. Michel Herbillon. Ah oui !

M. Michel Françaix. Je choisirai soigneusement mes mots, car je ne voudrais ni être désagréable ni accabler la majorité.

Vous affirmez l’importance de la politique extérieure de la France, que vous souhaitez regrouper afin de réparer toutes les bêtises de Jacques Chirac. Il n’est guère étonnant que le président Sarkozy, comme toujours lorsqu’il ouvre un dossier, décrète la rupture, juge la politique de Jacques Chirac catastrophique et affirme que nous allons voir ce que nous allons voir. Sur la première partie, nous ne pouvons vous donner totalement tort : la manière dont Jacques Chirac avait souhaité remettre 50 % de l’audiovisuel extérieur entre les mains de TF1 n’était sans doute pas très satisfaisante. Il arrive donc finalement au président Sarkozy de faire preuve de clairvoyance.

On nous dit que nous allons maintenant avoir un audiovisuel extérieur sérieux, solide, dont les parlementaires de la majorité comme de l’opposition pourront être fiers, et on lit dans la presse que le président Sarkozy se réjouit d’entendre parler français lorsqu’il séjourne dans un bel hôtel à l’étranger. Je suis heureux que le président ait trouvé un bel hôtel ; c’est certainement utile (Protestations sur plusieurs bancs du groupe UMP),…

M. Gérard Cherpion. Remplissage !

M. Michel Françaix. …mais je trouve que c’est un peu réducteur s’agissant de la politique extérieure de la France.

On me reprochera de polémiquer. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) On dira que le problème n’est pas là, que le président Sarkozy a sorti TF1 du capital de France 24, que, pour une fois, il ne met pas TF1 en avant, et on me demandera de cesser de dire des méchancetés.

Certes, TF1 va quitter le capital de France 24, mais en récupérant beaucoup d’argent, uniquement parce qu’il est entré au capital de l’audiovisuel extérieur et en sera sorti au bout de trois mois ! Parce qu’il a siégé deux fois au conseil d’administration, TF1 obtiendra une somme si élevée que Mme la ministre n’est toujours pas en mesure de nous la fournir ou nous donne des informations changeantes – mais nous tirerons cela au clair !

On me dira : « Michel, tu polémiques ; on t’aime bien, mais désormais, c’est évident, tout va bien fonctionner ! » Or, nous apprenons que la politique extérieure de la France sera moins bien dotée et que nous perdrons 25 millions d’euros au départ. « Mais tes chiffres sont-ils exacts ? », me dira-t-on encore. Je ne sais pas s’ils sont exacts, mais ils émanent de sénateurs de la majorité, de personnes honnêtes, qui travaillent sérieusement et refusent de voir la politique extérieure de la France décliner ainsi.

En effet, pourquoi avait-on fait tout cela ? Il ne s’agissait pas, comme au temps du général de Gaulle, de faire de l’audiovisuel extérieur la voix de la France. Certes, cela avait un sens à l’époque. Mais passer de la voix de la France à la voix de Sarko, voilà qui est un peu étroit ! Vous comprendrez en tout cas que cela ne puisse susciter l’accord de tous.

M. Jean Mallot. La voix de son maître !

M. Michel Françaix. Seuls les ministres de la République pourraient le souhaiter !

M. Étienne Blanc. La voix européenne !

M. Michel Françaix. Voilà pourquoi nous ne pouvons approuver ni cette politique ni le fait que l’AFP n’ait jamais été associée à la réflexion sur notre politique extérieure. Elle aurait pourtant pu jouer un rôle important, mais on le lui refuse, et on voudrait peut-être même s’en débarrasser ! De même, alors que nous pourrions être fiers de RFI, on veut faire des économies, ce qui implique de licencier du personnel et d’accorder moins de moyens à la chaîne, que l’on veut en outre contrôler entièrement.

Je me suis efforcé d’aborder le sujet le plus raisonnablement possible, mais les membres de la majorité qui se soucient de la politique étrangère et de la politique culturelle françaises ne doivent pas être très fiers de cet article !

M. le président. Merci, monsieur Françaix : vous avez parfaitement respecté votre temps de parole.

M. Michel Françaix. Comme toujours !

M. le président. J’engage vos collègues à faire de même.

La parole est à Mme Sandrine Mazetier.

Mme Sandrine Mazetier. Comme l’a dit Didier Mathus, nous sommes préoccupés par le budget de rigueur imposé à l’audiovisuel extérieur. En effet, le rapport de Joseph Kerguéris ne laisse pas de nous inquiéter. Du reste, selon son collègue de l’UMP Claude Belot, la situation est préoccupante et le budget ne répond ni aux projets de développement de France 24 ni aux besoins de financement de RFI et de TV5.

En outre, la presse du jour confirme que TF1 est sur le point de sortir du capital de France 24 et qu’un protocole d’accord doit être prochainement signé à ce sujet, TF1 et France Télévisions vendant à l’État les 50 % du capital qu’ils détiennent respectivement, pour 2 millions d’euros chacun. J’aimerais que l’on nous explique ce qui justifie une telle rentabilité, un tel retour sur investissement de l’apport en capital initial de TF1, qui n’atteignait même pas 20 000 euros !

Par ailleurs, dans l’édition de La Tribune datée d’aujourd’hui, on apprend que les contrats de fourniture d’images par TF1 à France 24 en cours seront reconduits pour sept ans à leurs conditions actuelles.

Or, la semaine dernière, un hebdomadaire satyrique au nom de volatile expliquait que les tarifs pratiqués par TF1 pour la fourniture d’images à France 24 étaient largement supérieurs à ce qu’ils devraient être.

Nous nous inquiétons d’avance, madame la ministre, du cadre budgétaire dans lequel évoluera cette nouvelle société. Nous vous prions instamment de faire en sorte que les contrats de fourniture d’images liant France 24 à TF1 ne soient pas reconduits pour sept ans dans leurs conditions actuelles. À cet égard, les représentants de l’État, qui siègeront désormais au conseil d’administration de la société, devront se montrer plus vigilants qu’ils ne l’ont été jusqu’à présent.

À la suite de Patrick Braouezec, je souligne à quel point la formule « outre le président » qui figure à l’alinéa 2 de l’article a de quoi nous outrer. L’irresponsabilité du président devant le conseil d’administration est pour le moins baroque, pour ne pas dire choquante.

Enfin, et c’est peut-être le plus grave, alors qu’AEF doit représenter la voix de la France à travers le monde – même si vous avez renoncé à une diffusion continue en arabe –, son président est soumis, en raison de sa nomination, à la volonté d’un seul homme, le Président de la République, et aux modes qu’il choisit d’adopter en matière de relations internationales.

Quelles seront pour la rédaction de France 24 les conséquences du fait que, du jour au lendemain, la France déroule le tapis rouge pour la Syrie et la Libye ? Ses journalistes auront-ils le droit de présenter des sujets susceptibles de gêner les nouveaux amis de Nicolas Sarkozy ? Comment garantir l’indépendance des médias en ce domaine et l’intégrité du travail des journalistes qui prennent des risques en s’exprimant à propos de pays non-démocratiques ?

M. le président. Il vous faut conclure, madame Mazetier.

Mme Sandrine Mazetier. C’est l’inquiétude la plus grave que nous exprimons à propos de cet article que nous vous invitons, chers collègues, à ne pas voter en l’état.

M. le président. La parole est à Mme Aurélie Filippetti.

M. Michel Herbillon. Enfin quelqu’un de modéré ! (Sourires.)

Mme Aurélie Filippetti. Je veux revenir sur une question à laquelle il ne nous a pas encore été répondu de manière satisfaisante. C’est pourtant une question d’importance puisqu’elle concerne l’utilisation que le Gouvernement fait de l’argent public. Je veux parler de la manière scandaleuse dont vont être rétribués les bons et loyaux services de TF1 au Président de la République.

Comme l’a rappelé Sandrine Mazetier, la mise initiale de TF1 dans France 24 en 2006 a été de 17 500 euros. Certes, c’est un petit investissement au regard des capacités financières d’une telle entreprise, mais un investissement plutôt rentable, compte tenu de la magnifique culbute que cette société s’apprête à opérer, pour reprendre des termes de boursicoteurs. Les chiffres évoqués par M. Paolini, s’agissant de la valorisation réalisée, sont passés de 10 millions à 20 millions d’euros, puis de 90 millions à 45 millions d’euros. Nous attendons des éclaircissements à ce sujet, madame la ministre, car vous avez évoqué le chiffre de 2 millions d’euros, qui paraîtrait presque peu élevé par rapport aux sommes citées, mais cela représente tout de même beaucoup, et ce n’est pas mon collègue Tony Dreyfus qui le niera, lui qui connaît si bien la bourse. (Rires sur les bancs du groupe SRC.)

M. Jean-Claude Lenoir. On en apprend tous les jours !

M. le président. Veuillez rester dans le sujet, madame Filippetti !

Mme Aurélie Filippetti. En effet, ces 2 millions d’euros de valorisation correspondraient, pour TF1, à une multiplication de sa mise initiale par 115.

En outre, il convient d’ajouter à ces 2 millions d’euros la somme annuelle de 1,7 million d’euros correspondant à l’obligation faite à France 24 de racheter chaque année des images à TF1. Cette condition semblerait être, en effet, la solution que vous avez trouvée pour adoucir, aux yeux de TF1, sa sortie de France 24, dont la nationalisation totale s’avère particulièrement coûteuse. Pendant quelle durée s’appliquera cette obligation ? Nous aimerions avoir des explications à ce sujet, madame la ministre, car c’est l’argent du contribuable qui est en jeu.

Par ailleurs, s’agissant toujours de l’article 7, se pose la question du pluralisme au sein du conseil d’administration de la société chargée de l’audiovisuel extérieur de la France.

Nous avons déjà eu l’occasion d’évoquer ce sujet à propos de la composition du conseil d’administration de France Télévisions ou de celui de Radio France. Le rapporteur avait alors insisté sur la nécessité d’instaurer un équilibre. Or le conseil d’administration aura à sa tête un président nommé par le Président de la République, qui pourra le révoquer.

Par ailleurs, en augmentant le nombre de ses membres de douze à quatorze, vous n’avez même pas songé à faire figurer parmi eux des représentants de l’opposition démocratiquement élue au Parlement. Est-ce à dire que le pluralisme ne fait pas partie des valeurs que vous défendez, que cela soit dans notre pays même ou à l’étranger, à travers l’image que vous voulez en donner ?

M. Bernard Carayon. Mieux vaut être sourd que d’entendre cela. Il est vrai qu’au PS, vous vous y connaissez en pluralisme !

Mme Aurélie Filippetti. La façon dont France 24 a traité la campagne présidentielle de 2007 laisse penser que le pluralisme n’était déjà pas de mise sur cette chaîne. Les chiffres sont éloquents : elle avait consacré deux heures et dix-neuf minutes à Nicolas Sarkozy, soit 54, 8 % du temps d’antenne, quarante et une minutes à François Bayrou et, étonnamment, quatorze minutes à Ségolène Royal. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

M. Bernard Carayon. Beaucoup trop !

Mme Aurélie Filippetti. Cela lui avait d’ailleurs valu une remontrance du CSA.

Dès lors, on comprend mieux la continuité dans laquelle s’inscrit votre refus de respecter le pluralisme dans le conseil d’administration de la société.

Enfin, le budget de France 24, déjà lourdement amputé par les cadeaux faits à TF1, ne permettra pas de passer à une diffusion continue en langue arabe, à l’instar de la diffusion en langue anglaise. Ce projet ne pourra pas être mené à bien et nous devrons en rester aux quatre heures quotidiennes : le manque à gagner s’élevait déjà à 25 millions d’euros pour 2009 et il s’accroîtra en 2010 et en 2011.

Dans ces conditions, madame la ministre, nous aimerions savoir où en sont les négociations entre le Gouvernement et TF1 et avoir des explications sur les conditions qui entourent la nationalisation de France 24. Saurez-vous lever les soupçons de scandale d’État qui pèsent sur le très beau cadeau que vous êtes en train de faire à TF1 ?

M. le président. La parole est à M. Patrick Roy.

M. Patrick Roy. Avant d’aborder l’article 7 en lui-même, je vais revenir sur quelques réflexions qui me tiennent à cœur. J’aurais aimé en faire part à M. Copé, mais il est absent ce soir, alors que ces questions sont censées l’intéresser. Heureusement, nous avons à nos côtés le président Ayrault, qui est particulièrement attentif à nos débats : il le prouve encore ce soir par sa présence renouvelée. À défaut de pouvoir m’adresser au président du groupe UMP, je me tournerai donc vers M. Herbillon, homme dont on m’a loué l’intelligence et la pondération.

M. Michel Herbillon. C’est vraiment de moi qu’il parle ?

M. Patrick Roy. Vous savez, je me demande toujours si cet hémicycle ne souffre pas d’un problème acoustique : nos arguments ne semblent jamais porter jusqu’à sa partie droite. Je vais donc m’efforcer de parler fort afin que vous soyez pleinement informés, mesdames, messieurs de la majorité.

M. Jean-Claude Lenoir. Ce n’est pas nécessaire !

M. Patrick Roy. Vous ne cessez de nous répéter, à longueur de séances, qu’il s’agisse de ce projet de loi ou d’autres, que l’opposition ne sait que critiquer et qu’elle n’a pas de propositions. Nous avons pourtant déposé 800 amendements visant à enrichir le texte, et vous ne les avez pas compris.

Vous prétendez encore que nous ferions de l’obstruction. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP dont certains députés brandissent le communiqué reprenant les propos de M. Bloche sur lepoint.fr.)

Vous aurait-il échappé, monsieur Herbillon, que le gouvernement que vous soutenez a, une fois de plus, déclaré l’urgence sur un texte, alors que rien ne le justifiait ? Vous êtes toujours pressés ; ralentissez donc ! Ne vous exposez pas aux risques de problèmes cardiaques, ce serait trop bête. Nous tenons à vous garder en pleine forme, vous savez, car nous voulons avoir un vrai débat.

Quand j’entends M. Copé nous demander de nous hâter car la loi doit entrer en vigueur le 5 janvier, les bras m’en tombent ! Je croyais pourtant – du moins est-ce ce que j’expliquais à mes élèves lorsque j’étais enseignant – que la loi ne pouvait être mise en application qu’une fois votée et le décret d’application publié. Si vous posez le 5 janvier comme date butoir, cela signifie-t-il que nos débats ne servent à rien ? Monsieur Herbillon, informez donc M. Copé que c’est d’abord ici, à l’Assemblée, qu’on fait la loi et que ce n’est qu’ensuite qu’elle entre en vigueur.

Je sais que l’UMP souhaite que l’opposition soit riquiqui. Manque de chance, moi, je la préfère « maousse costaud » : nous continuerons donc à nous battre et à défendre nos arguments !

S’agissant de l’article 7, nous trouvons une nouvelle preuve du coup d’État que vous voulez perpétrer à l’encontre de la télévision publique. Madame la ministre, ne savez-vous pas que la France a encore dans le monde l’image d’une vraie démocratie ?

C’est le pays de la Révolution et de la déclaration des droits de l’homme.

M. le président. Je vous demande de conclure !

M. Patrick Roy. Si vous expliquez que le fonctionnement de l’audiovisuel extérieur de la France est le fait du prince, l’image de la France à l’étranger s’en trouvera dégradée.

M. Bernard Carayon. Allez à l’essentiel !

M. Patrick Roy. M. Braouezec a souligné que la discussion n’avançait pas, non parce que nous faisions de l’obstruction mais parce que la ministre ne répondait jamais.

Nous lui avons demandé pourquoi elle refusait que l’opposition soit membre du conseil d’administration. On pourrait très bien en effet augmenter le nombre de participants.

M. le président. Monsieur Roy, je vous demande de conclure ! Vous développerez votre argumentation en défendant vos amendements !

M. Patrick Roy. Nous lui avons aussi demandé pourquoi TF1 allait toucher plus de cent fois sa mise en vendant France 24. Là encore, elle ne nous a pas répondu.

Enfin, madame la ministre, en quoi la nomination ou la révocation par le Président de la République du président en charge de l’audiovisuel extérieur de la France constitue-t-elle une avancée de la démocratie ? Chantez, si vous le voulez, mais répondez-nous car nous avons besoin être informés ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. le président. La parole est à M. Patrick Bloche.

M. Patrick Bloche. Notre débat est utile car il permet de préciser un certain nombre de faits, et notamment la vérité des chiffres.

Madame la ministre, j’ai trouvé votre réponse aux observations pertinentes de M. Braouzec sur la fermeture, fin janvier 2009, de la station de RFI diffusée en langue russe, très insuffisante. Vous avez certes répondu que cette station ne serait pas fermée. C’est vrai. Mais vous avez oublié de dire qu’elle sera basculée sur internet à partir du 31 janvier 2009.

M. Noël Mamère. Voilà le subterfuge !

M. Patrick Bloche. Chacun se souvient que c’est en Russie que la journaliste Anna Politkovskaïa s’est fait assassiner en 2006 et l’on sait bien ce qu’il en est de la liberté de la presse, de la liberté de l’information et, plus largement de la démocratie et des droits de l’homme, dans la Russie de Poutine.

Pour montrer à quel point le basculement de RFI en langue russe sur internet est hypocrite, je vous rappelle que lors des Jeux olympiques de Pékin, des moteurs de recherche très puissants ont bloqué l’accès au web international. Il en sera de même en Russie, c’est-à-dire que les auditeurs russes de RFI sur la radio n’auront plus accès aux informations marquées du sceau de la liberté de la presse et de l’information, et du libre travail des journalistes.

J’en viens maintenant à la vérité des chiffres. On ne peut pas tenir ici des discours officiels sur la présence internationale de la France, sur la diffusion de la culture et de la langue française, sur l’essor de la francophonie, ni se rendre au sommet de la francophonie, comme l’a fait en octobre dernier le Président de la République, sans donner des moyens financiers à l’audiovisuel extérieur de la France.

M. Patrice Martin-Lalande, vice-président de la commission spéciale. Vous êtes hors sujet !

M. Patrick Bloche. Certains de mes collègues, se référant à un rapport sénatorial de M. Kergueris, élu de la majorité, ont pointé des chiffres qui montrent que le compte n’y sera pas en 2009 pour l’audiovisuel extérieur de la France. Comment voulez-vous nous faire croire qu’avec votre loi le compte y sera pour France Télévisions en 2009 ?

Selon M. Kergueris, 322 millions d’euros sont nécessaires pour financer l’audiovisuel extérieur de la France : 117 millions d’euros pour France 24, 72 millions d’euros pour TV5 Monde et 133 millions d’euros pour RFI.

Certes 298 millions d’euros sont d’ores et déjà mobilisés dans le budget 2009, mais il faut les comparer aux 322 millions d’euros nécessaires pour financer l’audiovisuel extérieur de la France. Je vous laisse faire la différence ! Je précise que, sur ces 298 millions d’euros, 233 millions d’euros proviennent d’une dotation publique et 65 millions d’euros d’une redevance allouée à RFI.

Comme l’ont fort bien expliqué les orateurs précédents qui se sont exprimés sur cet article 7, la loi de programmation nous indique que les 233 millions d’euros déjà insuffisants pour 2009 deviendront 218 millions d’euros en 2010 et 203 millions d’euros en 2011.

Pour financer l’audiovisuel extérieur de la France à la hauteur de ses missions, M. Kergueris propose de transférer la part de redevance qui va à l’INA, soit 86 millions d’euros, sur l’audiovisuel extérieur de la France, une dotation publique compensant le manque à gagner pour l’INA, sachant que la part de redevance qui va à l’INA assure les deux tiers de son financement.

M. le président. Veuillez conclure, monsieur Bloche !

M. Patrick Bloche. Ce système des vases communicants me fait penser que la commission Copé proposait déjà de transférer la part de redevance destinée à l’INA et à RFI sur France Télévisions. Alors que les caisses de l’État sont vides, ce système de vases communicants nous montre, plus que jamais, que le compte n’y sera pas pour 2009, qu’il s’agisse de parts de redevance, de dotations publiques, de ressources publicitaires ou encore de taxes dont le rendement sera aléatoire pour l’audiovisuel extérieur de la France comme pour France Télévisions. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. Marcel Rogemont. Excellent !

M. le président. La parole est à M. Noël Mamère.

M. Noël Mamère. L’article 7 est très important pour l’avenir de l’audiovisuel extérieur de la France.

Actuellement, celui-ci est dirigé par le ministre des affaires étrangères avec l’appui de ses plus proches, tout simplement parce que le sarkozisme a décidé de mettre la main sur l’audiovisuel extérieur de la France. Du reste, l’audiovisuel extérieur de la France est à l’image de notre politique africaine qui va dans le sens de ce qu’on a appelé la France-Afrique, laquelle protège certains chefs d’État qui s’en mettent plein les poches, au détriment du peuple.

L’audiovisuel extérieur de la France est une sorte d’annexe de ces cabinets noirs de la République qui mettent en péril l’image de notre pays à l’étranger.

Je veux dire ici, après mes collègues, qu’il est inacceptable, du point de vue démocratique, que le président de France Télévisions, celui de Radio France et celui de l’audiovisuel extérieur de la France soient nommés directement en conseil des ministres. Cette clique qui dirige l’audiovisuel extérieur de la France va devenir un lien consubstantiel de dépendance au pouvoir. Nous n’avions vraiment pas besoin de cela !

M. Kergueris, qui ne peut pas être qualifié de dangereux révolutionnaire, a montré, dans son rapport, que l’audiovisuel extérieur de la France était sous-financé et que, au fur et à mesure des années, il sera de plus en plus en difficulté. Ce n’est pas pour rien que, cet après-midi, le syndicat CGT de l’audiovisuel public a protesté contre cette forme de dépouillement de l’INA pour venir en aide au holding de l’audiovisuel extérieur de la France qui est déjà bien malade.

En outre des prédateurs sont en train de se servir. En effet, comment peut-on accepter, sans barguigner, que M. Paolini réclame 90 millions d’euros pour France 24, alors que la société TF1 a sorti de sa petite poche 17 500 euros, soit une peccadille ?

M. Jean Mallot. Un pourboire !

M. Noël Mamère. Pour qui nous prend-on ? Les Français sont-ils des « cochons de payeurs » qui devraient permettre à TF1 de s’en mettre encore un peu plus dans les poches ? Bien évidemment, la réponse est non, et nous allons nous battre.

Mme Claude Greff. Vous avez été content d’y travailler !

M. Noël Mamère. Pour un investissement de 17 500 euros, on récupère 90 millions d’euros ; reconnaissez que c'est un bon placement ! Je n’ai jamais vu une aussi bonne rentabilité.

M. Braouezec a fort bien parlé de la situation de RFI : c’est une situation de mainmise du pouvoir. Un certain nombre de journalistes ont été renvoyés manu militari. Je pense notamment à ce journaliste qui a eu la très mauvaise idée de diffuser l’interview d’une crapule, M. Bachar el-Assad, président de la Syrie, même si, aujourd’hui, cette crapule est devenue l’ami du Président de la République française. À l’époque, M. Bachar el-Assad, tout comme M. Kadhafi, n’étaient pas les amis du Président de la République. Aussi ce journaliste avait-il été viré. S’il réalisait maintenant cette interview, peut-être recevrait-il la Légion d’honneur !

Madame la ministre, vous n’avez pas répondu à M. Braouezec.

M. Patrick Roy. Elle ne répond jamais !

M. Noël Mamère. Comme l’a dénoncé M. Bloche, vous êtes en train de supprimer les émissions en langue russe. Dans la Russie de Poutine, celle qui commet des crimes en Tchétchénie, celle qui assassine des journalistes, il est utile que ceux qui veulent se battre pour défendre leur vie, la liberté et la démocratie naissante dans ce pays, puissent entendre des radios comme RFI.

Ainsi que l’a souligné M. Mathus, RFI doit servir à répandre l’idée de la démocratie dans d’autres pays et à venir en aide à ceux qui se battent pour elle. Si aujourd’hui M. Glucksmann, un récent converti au sarkozisme, et M. Boukovski se lèvent pour protester contre la suppression de la diffusion de RFI en langue russe, c’est bien qu’il y a un problème, comme il y en a un, du reste, avec le polonais ou le serbo-croate. Nous le savons, un plan est à l’étude, qui vise à fermer un certain nombre de bureaux de RFI, à Berlin notamment, ce qui affaiblira l’audiovisuel extérieur de la France.

M. le président. Monsieur Mamère, veuillez conclure !

M. Noël Mamère. Avec M. Braouzec, nous réclamons l’association des représentants de l’Assemblée nationale et du Sénat, c’est-à-dire de l’opposition, afin que le pluralisme soit assuré. Par ailleurs, dans une grande démocratie comme la France, il serait utile que les personnels soient représentés dans ce conseil d’administration.

M. le président. La parole est à M. François Pupponi, pour cinq minutes, je le rappelle.

M. François Pupponi. Je ne peux pas vous le promettre, monsieur le président !

M. le président. Il faudra vous y tenir !

M. François Pupponi. Madame la ministre, vous nous avez démontré à l’article 6 que vous ne vouliez pas modifier les équilibres des conseils d’administration. Or ce qui valait pour l’article 6 ne vaut pas pour l’article 7, car vous modifiez les conditions de l’équilibre de l’actuel conseil d’administration de la structure en charge de l’audiovisuel extérieur de la France.

Le précédent conseil d’administration avait été mis en place par la loi de 1986 – M. Chirac étant à l’époque Premier ministre –, avec six représentants de l’État et six personnalités qualifiées. Le président de la structure était nommé par décret parmi les membres du conseil d’administration, ce qui est une pratique normale, puisqu’en général, les conseils d’administration désignent eux-mêmes leur président. Or là, vous décidez de passer de douze à quatorze membres.

Contrairement à ce que vous avez fait pour l’article 6, vous modifiez l’équilibre qui vous est si cher pour le conseil d’administration de Radio France, en passant à quatorze membres : deux parlementaires, quatre personnalités qualifiées, deux représentants du personnel et cinq administrateurs, qui seront, de fait, des représentants de l’État puisqu’il n’y a aujourd’hui qu’un actionnaire.

La question que je vous pose à nouveau est la suivante : pourquoi n’acceptez-vous pas que, parmi les deux parlementaires, il y en ait au moins un – voire les deux – qui soit membre de l’opposition, puisque le président, qui sera désigné par le Président de la République, ainsi que les cinq membres désignés par l’État, seront, bien entendu, tous de la même couleur politique ? Qu’est-ce qui vous empêche d’accepter la pluralité, s’agissant d’un élément aussi important que l’audiovisuel extérieur de la France, ce qui permettra également une certaine indépendance, indépendance qui est d’ailleurs très importante pour le rapporteur ? Dans un de ses amendements, en effet, il demande que, parmi les personnalités qualifiées, on choisisse des personnalités qualifiées « indépendantes ». Ce qui veut bien dire que ce conseil d’administration doit être pluraliste et indépendant.

Dès lors que vous avez décidé de modifier la structure du conseil d’administration existant, vous avez la possibilité de faire entrer pluralisme et indépendance dans le nouveau conseil d’administration. Après toutes ces heures de débat, j’avoue que je ne comprends toujours pas pourquoi le Gouvernement refuse qu’un membre de l’opposition fasse partie de ce conseil d’administration. C’est un déni de démocratie, qui s’explique peut-être par la manière, qu’a rappelée Noël Mamère, dont vous avez désigné les responsables de cette structure.

Je rappelle que Mme Christine Ockrent, femme du ministre des affaires étrangères, la dirige, et que M. Alain de Pouzilhac, dont on connaît les liens avec nombre de responsables politiques de la majorité, a été nommé président de France 24, de RFI et de TV5 Monde. Voilà comment vous souhaitez que soient dirigées demain les grandes institutions de l’audiovisuel français : elles devront être à la botte du pouvoir !

Nous ne pouvons, dans cet hémicycle, accepter de telles pratiques. C’est un recul par rapport à la loi de 1986, que votre majorité avait à l’époque proposée, par rapport aux pratiques de toutes les grandes démocraties et de tous les pays européens. Vous agissez sans vergogne, car vous n’avez même pas le courage d’assumer votre position. Vous proposez un dispositif, on vous interroge et vous ne répondez pas ! À moins qu’il ne s’agisse d’une certaine résignation…

J’ose espérer que nos collègues de la majorité, qui ne disent pas un mot…

M. Michel Herbillon. Nous buvons vos paroles !

M. Benoist Apparu. Vous ne parlez de rien, on ne peut pas vous répondre !

M. François Pupponi.…et ne répondent pas à nos questions, ne cautionnent pas de telles pratiques. Ou alors, il faut assumer le fait que, pour la première depuis des décennies, vous refusez à l’opposition d’être présente dans des structures aussi importantes pour la démocratie et pour la liberté. Je le dis sincèrement, nous vivons des heures sombres pour la démocratie et pour la République. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC. –Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à M. David Habib, pour cinq minutes.

M. David Habib. Tout à l’heure, lors d’une réunion en commission des finances, nous avons essayé, à la faveur d’un amendement du rapporteur général du budget, de réaffecter 60 millions d’euros pour permettre à l’État d’assumer ses responsabilités envers les collectivités locales. Il a fallu puiser dans une des rares ressources fiscales dynamiques, les amendes de police, pour permettre à l’État de boucler ses fins de mois.

Or nous examinons à cette heure un texte de loi dont chacun s’accorde à reconnaître qu’il est mal ficelé, de nature à entraîner un déséquilibre en faveur du secteur privé, et qu’il va coûter extrêmement cher à la puissance publique et au contribuable français. Si l’on examine, comme nous l’avons fait il y a deux jours à l’article 3, la répartition du capital de l’audiovisuel extérieur de l’État, on ne peut que constater – Aurélie Filippetti l’a rappelé – l’importance des cadeaux que l’État français s’apprête à faire au groupe TF1 en acceptant son retrait du capital de France 24, et la propension du pouvoir en place à donner beaucoup à ceux qui ont contribué à son installation, il y a deux ans, lors de l’élection présidentielle.

L’article 7 contient nombre d’éléments surprenants.

D’abord – les orateurs du groupe SRC qui m’ont précédé ne l’ont pas indiqué – le texte prévoit de laisser aux futurs actionnaires privés du capital de l’audiovisuel extérieur de la France des sièges au prorata de leur participation au capital. Lorsque l’arrivée de ces actionnaires privés avait été évoquée à l’article 3, on nous avait dit que rien n’était prévu et qu’aucun dossier n’était en préparation. Or le projet de loi prévoit déjà leur participation au conseil d’administration et on prépare leur arrivée au sein de l’instance gouvernante de l’audiovisuel extérieur de la France. On souhaite les nommer au sein du collège des représentants de l’État, en envisageant, bien sûr, une diminution du nombre des représentants de l’État. Et c’est en cela que votre texte est flou, car on ignore à quel titre ceux-ci siégeront et de quel ministère ils seront issus : celui des affaires étrangères, celui de l’éducation nationale ? Lorsque les commissaires socialistes ont interrogé le Gouvernement pendant les travaux préparatoires, il s’est bien gardé de donner des précisions.

Le texte prévoit seulement deux représentants du personnel. M. Yves Fromion, député de la majorité, avait évoqué, dans un amendement, la possibilité de faire siéger au conseil d’administration des représentants des téléspectateurs. M. Copé lui a répondu qu’il ne voyait pas comment désigner des téléspectateurs, alors qu’il est tout à fait possible de faire appel à des associations de consommateurs, qui, grâce à la loi et à différents textes, ont bénéficié d’un agrément. On les a écartés du conseil d’administration pour permettre aux actionnaires privés d’être en tête-à-tête avec les représentants du pouvoir, dont on sait qu’ils seront, eux, désignés, puisque les deux parlementaires, le représentant du Sénat et celui de l’Assemblée nationale auront un point commun : ils siégeront tous deux au titre de l’UMP.

M. Jean Mallot. Voilà !

M. David Habib. Tout à l’heure, alors que certains évoquaient l’absence de représentation pluraliste au sein du conseil d’administration, l’un de nos collègues de la majorité nous a dit : « Vous n’avez qu’à être majoritaires ! »

Nous avons déjà entendu cela ; d’ailleurs, certains membres du parti socialiste, il y a très longtemps, s’étaient égarés en considérant que le fait électif devait dominer le droit. Je suis maire de ma commune et je bénéficie, comme nombre d’entre vous dans cet hémicycle, à gauche comme à droite,…

M. le président. Monsieur Habib, il faut vous acheminer vers votre conclusion !

M. David Habib. …d’une large majorité, en tout cas supérieure à celle que l’UMP a obtenue en juin 2007. Or, dans toutes les institutions, dans tous les organismes, dans toutes les commissions qui sont amenés à gérer de l’argent public, une place est laissée à l’opposition. (« Oui ! » sur les bancs du groupe SRC.)

M. Patrick Roy. Voilà un bon exemple !

M. David Habib. Cela est dû à la fois à l’application des textes et au bon esprit républicain qui existe dans les municipalités, de gauche comme de droite.

Inversement, avec ce texte, vous voulez faire en sorte que seuls les élus de la majorité, habilités à porter le message du Président de la République, puissent participer au conseil d’administration, orienter la stratégie de l’audiovisuel extérieur de la France et, éventuellement, comme l’a souligné Noël Mamère, censurer les journalistes et la politique rédactionnelle qui serait suivie par les différentes sociétés de l’audiovisuel extérieur.

M. le président. Veuillez conclure !

M. David Habib. Ce qui vous anime aujourd’hui, c’est la préparation des prochaines élections, législatives et présidentielle. Vous êtes en train de « rembourser » les engagements que vous avez contractés lors de la dernière élection présidentielle.

M. Didier Mathus. Excellente intervention !

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Dufau.

M. Jean-Pierre Dufau. J’ai écouté avec grand intérêt l’intervention de M. le maire David Habib et son plaidoyer pour la démocratie. En effet c’est bien de cela qu’il est question dans cet article 7, et dans l’ensemble du texte.

Nous aurons l’occasion de revenir, par le biais des amendements, sur la constitution du conseil d’administration, qui n’est absolument pas démocratique. Nous reviendrons également sur le mode de désignation et de révocation du PDG des différentes sociétés, en particulier l’audiovisuel extérieur de la France. C’est toujours la méthode Sarkozy : le Président de la République décide de tout !

M. Jean Mallot. Oh oui !

M. Jean-Pierre Dufau. Et ce n’est pas très sympathique pour le CSA. Certes, on peut penser ce que l’on veut du CSA, mais c’est sans doute un outil perfectible. En l’occurrence, vous le balayez d’un revers de main, comme on renvoyait autrefois, sous l’Ancien régime, les valets.

N’étant pas un spécialiste de l’audiovisuel…

Mme Claude Greff. Quand on ne sait pas, on se tait !

M. Jean-Pierre Dufau. …je me suis livré à un petit exercice : depuis quelques semaines, j’ai essayé d’en discuter, dans ma circonscription, avec les téléspectateurs, les lecteurs de journaux et les auditeurs de la radio, bref, avec les usagers. J’ai rencontré des gens pleins de bon sens. Ils n’avaient pas tous les connaissances techniques qu’ont nombre d’entre vous dans cet hémicycle, mais les Françaises et les Français sont plus intéressés que vous ne le croyez par notre débat sur l’audiovisuel et ils comprennent très bien ce qui se passe, même s’ils le disent avec leurs mots.

Les deux grands sujets qui reviennent dans leurs interrogations, leurs critiques ou leurs remarques, touchent d’abord au financement de l’audiovisuel public. Ils ont compris qu’on allait donner plus à la télévision privée, par le biais de la publicité. Ils ont aussi compris qu’on allait essayer de compenser pour l’audiovisuel public, et ils ont surtout compris qui allait payer ! Qui va paga ! C’est toujours cette question qu’ils posent, dans les Landes comme ailleurs, et lorsqu’on leur explique que cela va leur retomber sur le nez, que le compte n’y sera pas et qu’on va priver l’audiovisuel public de moyens, ils se révoltent, parce qu’ils n’admettent pas, contrairement à ce que vous croyez, que l’on porte atteinte, en toute impunité, au service public.

Le deuxième élément de leur réflexion est simple puisqu’il tient à l’omnipotence du Président de la République qui décide de tout, qui nomme et révoque, comme tel est son bon plaisir, les présidents des différentes sociétés. On touche, là, à un point essentiel pour les Françaises et les Français : l’indépendance de l’information. Cela paraît être une formule, mais, croyez-le, les gens les plus simples ont droit à la dignité, au respect. Ils ont appris, à l’époque, sur les bancs de l’école publique que l’indépendance et la pluralité de l’information étaient importantes.

M. Benoist Apparu. Quel est le rapport avec le conseil d’administration ? Cela m’échappe !

M. Jean-Pierre Dufau. Pour eux, cette indépendance est indissociable du pluralisme. Ils voient comment, par asservissement progressif, on porte atteinte à ce pluralisme.

J’en reviens à l’audiovisuel extérieur de la France.

M. Benoist Apparu. Enfin !

M. Patrice Martin-Lalande, vice-président de la commission spéciale. Il ne faut pas désespérer !

M. Jean-Pierre Dufau. Aujourd’hui, écoutez-moi bien, la France et le Président de la République président encore pour quelques semaines le Conseil de l’Union européenne.

M. le président. Il faut conclure !

M. Jean-Pierre Dufau. Que se passe-t-il quand on se promène dans les différents pays européens ?

M. le président. Ne vous promenez pas trop, parce qu’il faut conclure ! (Sourires.)

M. Jean-Pierre Dufau. On leur donne des leçons de démocratie, des critères précis pour atteindre la démocratie, afin de leur permettre de signer des accords de stabilisation et d’association pour commencer leur intégration dans l’Europe ou pour intégrer l’Europe. Parmi les critères qu’on leur donne à propos de la démocratie, au-delà de la démocratie représentative, figurent la pluralité de l’information, le droit à la diversité de la presse, à la liberté d’opinion et de son expression.

M. le président. On vous remercie, monsieur Dufau ! Il faut conclure !

M. David Habib. Ce qu’il dit est important, monsieur le président !

M. le président. Tout est important !

M. Patrick Roy. Et ce qu’il dit, encore plus !

M. Jean-Pierre Dufau. Ce sera ma conclusion.

Imaginez notre perte de crédibilité ! Ils savent déjà, grâce à la littérature francophone, que, « Sans la liberté…

M. le président. Concluez, monsieur Dufau, nous sommes impatients d’écouter M. Mallot !

M. Jean-Pierre Dufau. …« de blâmer, il n’est pas d’éloge flatteur. » J’aimerais que Beaumarchais soit au cœur de nos préoccupations !

M. le président. La parole est à M. Jean Mallot.

M. Jean Mallot. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, vous me permettrez d’insister sur le caractère particulièrement important de cet article 7. En effet, tout le monde l’a compris ici, il ne s’agit, ni plus ni moins, que de l’image de la France dans le monde !

M. Patrick Roy. Eh oui !

M. Jean Mallot. Nous avons tous à cœur de faire en sorte que, par les dispositions que nous allons voter – que l’UMP va voter, si possible sur notre conseil – l’image que nous donnerons soit meilleure que celle du projet de loi de l’UMP sur l’audiovisuel public en général, texte qui ne vise qu’à obtenir la mise à la botte de l’exécutif de cet audiovisuel public.

M’étant interrogé sur la façon dont le Gouvernement envisageait d’assurer cette image de la France dans le monde, je me suis reporté à l’exposé des motifs du projet de loi. J’ai lu que le Gouvernement souhaitait permettre à la France de mener une politique audiovisuelle extérieure plus cohérente. J’observe que cette majorité est au pouvoir depuis bientôt sept ans et, s’il y a un problème de cohérence dans la politique audiovisuelle extérieure de la France, il serait temps qu’elle le découvre et qu’elle nous fasse des propositions. Les explications de Mme la ministre dans les heures qui viennent seront précieuses, à cet égard.

Si on lit le paragraphe suivant de l’exposé des motifs, on s’aperçoit qu’il s’agit d’assurer – alors, oui, on y voit peut-être un peu plus clair – « l’émergence d’une grande puissance médiatique francophone ». Comment se mesure la grandeur d’une puissance médiatique francophone ? Se mesure-t-elle à l’audience, au poids économique, à la capacité de véhiculer une culture ? Je pense, là aussi, madame la ministre, que vous aurez à cœur de nous éclairer.

Cet article 7, sous des apparences techniques, fait partie de ces articles qu’on lit en tournant les pages, pour passer à l’article suivant. Cependant on s’arrête tout de même, parce que sa lecture nous amène à nous poser quelques questions.

J’observe que, dans l’exposé des motifs, vous évoquez une société dite « audiovisuelle extérieure de la France ». Le nom de la société ne figure pas dans le dispositif de l’article 7. C’est un peu comme lorsque l’on a examiné la fusion de l’ANPE et des ASSEDIC et que vous appeliez l’entité à venir « France emploi » – n’est-ce pas, cher collègue Jean-Patrick Gille ? – alors qu’elle se nomme finalement « pôle emploi ».

Il conviendrait donc que vous nous expliquiez, madame la ministre, comment vous souhaitez appeler cette société et pourquoi son nom ne figure pas dans la loi.

Mme Claude Greff. Finalement, c’est « Ernest » !

M. Jean Mallot. Voilà un bon amendement de l’UMP qu’il faut noter, monsieur le président !

M. le président. N’interrompez pas M. Mallot, cela fait perdre du temps !

M. Jean Mallot. Ce conseil d’administration comportera désormais treize membres plus le président. Naturellement, quand on parle du conseil d’administration, on s’interroge sur son indépendance. Il comprendra notamment – et je m’arrêterai un moment sur ce point, car c’est très important – deux parlementaires – pas quatre, pas six, mais deux – : un sénateur ou une « sénateure », un député ou une députée.

S’agissant de la politique audiovisuelle extérieure de la France, on ne peut pas ne pas rapprocher votre proposition d’une réforme en cours de discussion tendant à l’application de la révision constitutionnelle du mois de juillet dernier. Et si la tentation était forte de puiser les deux représentants du Parlement au conseil d’administration de l’audiovisuel extérieur de la France parmi les députés et sénateurs représentant les Français établis à l’étranger ? Nous avons bien compris que, dans le dispositif que vous avez mis sur la table du Parlement, vous avez tout fait pour que ces parlementaires représentent la droite.

On retrouve, bien entendu ici, la question du mode de scrutin. Faut-il découper des circonscriptions ? Faut-il, comme nous le proposons, recourir à la proportionnelle ? En tout cas, nous souhaitons que le pluralisme puisse être assuré à ce niveau. Nous avons notamment déposé un amendement qui porte le nombre de parlementaires de deux à quatre. Je pense qu’il faudrait y adjoindre une disposition tendant à ce que deux parlementaires représentent la majorité et deux l’opposition. Vous en serez d’accord avec moi, monsieur le président.

M. le président. Oui, mais il faut conclure, monsieur Mallot !

M. Jean Mallot. Cela tombe très bien, monsieur le président, puisque je m’achemine vers ma conclusion.

La cohérence des réformes proposées par la droite – et ce qu’elle appelle des « réformes » sont, en général, des régressions – nous apparaît assez clairement au détour de cet article 7.

Je me permets de conclure, monsieur le président, pour faire avancer le débat…

M. le président. Concluez, monsieur Mallot !

M. Jean Mallot. Bien entendu, monsieur le président !

M. le président. Vous interviendrez lors de la discussion des amendements !

M. Jean Mallot. …en évoquant l’articulation entre l’article 4 et l’article 7.

Il est en effet précisé, à l’article 7, que cinq représentants seront désignés par l’assemblée générale des actionnaires, « sous réserve des représentants de l’État qui sont nommés par décret ». Je demande que l’on m’explique le « sous réserve ». Quant à l’article 4, il prévoit que : « L’État détient directement la totalité du capital des sociétés France Télévisions et Radio France. Il détient directement la majorité du capital de la société en charge de l’audiovisuel extérieur de la France. »

M. le président. C’est parfait, monsieur Mallot !

M. Jean Mallot. Cette majorité est-elle qualifiée et est-elle importante ?

M. Patrick Roy. Très bien !

M. le président. La parole est à M. François Loncle.

M. François Loncle. Monsieur le président, je n’ai…

Mme Claude Greff. Rien à dire ! (Sourires.)

M. le président. Ne les provoquez pas, madame Greff !

Vous seul avez la parole, monsieur Loncle !

M. François Loncle. Cela m’étonne de vous, madame Greff !

Mme Sandrine Mazetier. Pas moi !

M. François Loncle. Restez jusqu’au bout de mon propos, madame Greff.

M. le président. Le temps court, monsieur Loncle !

M. François Loncle. Il ne dépassera pas cinq minutes, en vertu des exigences de notre président !

Je voulais donc dire que je n’ai jamais eu beaucoup d’affection pour les sigles. « AEF » évoque effectivement d’autres choses pour moi. Je parlerai donc clairement de l’audiovisuel extérieur de la France. Toutefois, s’il fallait imaginer à cet instant un autre sigle, on pourrait penser à « IFM », c’est-à-dire à l’image de la France dans le monde.

Voilà exactement le sujet qui nous occupe. Je me tourne ici vers ceux qui, par exemple, siègent au Conseil de l’Europe et vers ceux qui siègent à la commission des affaires étrangères, comme mon ami Tony Dreyfus ou Didier Mathus et quelques autres sur les bancs de la majorité. C’est exactement le sujet de l’article 7.

En effet, qu’offrons-nous comme image au monde,…

M. Benoist Apparu. Quand ils nous voient comme ce soir, c’est une belle image !

M. François Loncle. … aux démocraties, à ceux qui aspirent à rejoindre le camp des démocraties – et nous y travaillons au Conseil de l’Europe ? Qu’offrons-nous comme image, lorsque l’on prévoit – c’est l’objet de l’article 7 – pour l’audiovisuel extérieur de la France, un conseil d’administration qui ressemble bien davantage à une sorte de coalition de commissaires politiques ?

Ce conseil serait en effet composé, hormis le président désigné par le Président de la République – et c’est déjà tout un programme ! – de douze membres dont dix seront désignés par le courant politique majoritaire. Il y aurait, en effet, deux parlementaires – un député et un sénateur de la majorité – cinq administrateurs, dont on nous dit qu’ils seront les représentants de l’État, et quatre personnalités qualifiées nommées – oui, nommées ! – par le CSA. Quand on connaît aujourd’hui la composition du CSA, en particulier, quand on connaît – on l’a constaté cet après-midi – la manière dont le président du CSA exerce ses fonctions, on devine exactement ce que donnera ce conseil d’administration qui, je le répète, sera une sorte de coalition de commissaires politiques.

Que fait le conseil d’administration ? Il prend toutes les décisions nécessaires. Il pourrait, en particulier, à l’avenir donner son avis sur les licenciements tels que ceux auxquels il a récemment été procédé, que ce soit à France 24 ou à RFI. Là encore, quelle image donne-t-on de la France dans le monde, lorsque l’on sait ce qui s’est passé à l’encontre de quatre excellents journalistes qui ont été remerciés ?

Connaissant de longue date Mme Ockrent, j’ai voulu croire sincèrement à son indépendance ; j’ai voulu croire qu’il n’y avait pas nécessairement un lien entre sa nomination à la tête de l’audiovisuel extérieur et la présence de M. Kouchner au Quai-d’Orsay. Malheureusement lorsqu’on constate les motifs de licenciement de M. Richard Labévière à RFI, parce qu’il avait déplu au Quai-d’Orsay, de M. Bertrand Coq, rédacteur en chef de France 24, de M. Grégoire Deniau, directeur de l’information à France 24, et ceux du licenciement, hier encore, sans qu’il soit entendu, d’un journaliste fort connu depuis longtemps, M. Ulysse Gosset, dont on a supprimé purement et simplement le magazine, et lorsque l’on sait que ces quatre journalistes ont été remerciés sans ménagement…

M. le président. Monsieur Loncle, je suis sûr que vous pensez à conclure !

M. François Loncle. Tout à fait !

…lorsque l’on sait que ces journalistes ont été remerciés sans ménagement parce qu’ils avaient déplu au ministre des affaires étrangères, là encore, chacun peut comprendre que l’on offre une image de la France qui n’est absolument pas digne de la patrie des droits de l’homme !

Je demande, pour cela, que l’on soit raisonnable dans la composition d’un conseil d’administration qui doit être équilibré et équitable et qui ne doit pas ressembler, je le répète, à une coalition de commissaires politiques. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe SRC.)

M. le président. La parole est à M. Jean Gaubert.

M. Jean Gaubert. Je n’ai pas participé à la commission spéciale qui a travaillé sur ce texte mais je suis venu assez régulièrement dans l’hémicycle ce qui m’a permis de constater que nous allons de surprise en surprise. La plus grosse est tout de même l’attitude de nos collègues de la majorité. J’hésite entre les qualifier de stoïques – c’est vrai qu’il faut l’être (Rires et exclamations sur les bancs du groupe UMP)...

M. Richard Mallié. Pas de provocation !

M. Jean Gaubert. …mais que ne ferait-on pas quand les ordres viennent de l’Élysée ? – ou, ce qui est plus grave, penser que c’est du « cause toujours ». (Rires et exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

M. Benoist Apparu. Ce n’est pas faux !

M. Jean Gaubert. Cela ne vous honore pas, mes chers collègues. La décision est déjà prise, et ce n’est pas la vôtre ; la seule solution que vous ayez, c’est de passer le temps qu’il faudra pour voter comme on vous l’a dit.

Je veux revenir à mon tour sur plusieurs points qui ont été évoqués, d’abord pour faire quelques corrections.

Ainsi Marcel Rogemont a évoqué l’excellent rapport de Joseph Kergueris. Je vous signale, monsieur Mathus qu’il n’est pas noble et n’a pas de particule. Vous avez sans doute confondu avec M. de Rohan, qui est lui aussi sénateur du Morbihan. Tout le monde ici connaît ce nom puisque son cousin, je le dis pour les nouveaux qui ne le savaient pas, a siégé sur nos bancs pendant de longues années. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Un débat, c’est une succession de précisions. J’imagine que nous n’aurons plus besoin d’en apporter sur l’état civil de M. Kergueris.

Nous discutons du financement de l’audiovisuel de la France ; cela a été souligné par les uns et par les autres. La question qui se pose, à laquelle vous ne répondez vraiment pas, est celle de savoir avec quel argent il sera assuré. Tout le monde connaît la situation dramatique de nos finances publiques, et ce n’est pas encore la crise qui en est responsable, mais un certain nombre de décisions prises depuis 2007 et avant.

Le Président Sarkozy a fait différentes annonces : 100 millions ici, 25 millions là, un milliard ailleurs. On se demande où est cet argent. Il en a tout de même trouvé un peu pour les banques, lesquelles d’ailleurs vont bénéficier d’un privilège extraordinaire puisque, si j’ai bien compris ce qui se discute à Bruxelles, on veut pouvoir obtenir pour elles l’autorisation de distribuer des dividendes sur les bénéfices qu’elles n’ont pas faits, sans doute pris sur l’argent que nous allons leur donner. L’argent que les contribuables vont leur donner va donc servir à distribuer des dividendes à leurs actionnaires ! Cela devait être souligné.

Le Président de la République a une autre qualité. Quand il s’agit de créer des taxes, il tire plus vite que son ombre. J’ai compté rapidement et je crois que nous en sommes à douze ou treize depuis qu’il est Président de la République, depuis un peu plus d’un an.

M. Jean Dionis du Séjour. M. Gaubert n’a pas tort !

M. Jean Gaubert. Il s’agit en fait de dégrever les plus riches, qui versaient les impôts les plus justes, pour faire payer les plus pauvres, qui règleront les taxes. Nous avons ainsi eu l’occasion d’évoquer celles qui serviront à financer un tant soit peu le service public de l’audiovisuel.

Je ne vais pas revenir sur les fameux 15 milliards qui devaient servir à la relance. Mais quelle relance ? Vous le constatez vous-mêmes, ce n’est même pas une relance : c’est un coup de frein, un coup d’arrêt, et c’est même une marche arrière que nous risquons malheureusement de faire. Il y a pire : comme les banques vont cumuler des déficits, elles ne paieront plus d’impôt sur les sociétés dans les années qui viennent, ce qui fera des recettes en moins.

Vous êtes donc dans l’impasse, et il me vient une maxime de quelqu’un dont vous retrouverez certainement le nom : Du passé, il reste des souvenirs. Pour l’avenir, nous avons l’espoir. Pour le présent, nous n’avons que des devoirs.

Votre devoir, ce devrait être de dire la vérité. Or force est de constater que vos engagements sont insuffisants et que, en dépit de leur insuffisance, vous ne pourrez pas les tenir parce que vous n’en avez pas les moyens.

M. le président. Il faut conclure, monsieur Gaubert.

M. Jean Gaubert. Mes chers collègues, je vous appelle tout simplement à un petit moment de lucidité et d’honnêteté.

M. le président. La parole est à M. Philippe Martin, dernier orateur inscrit sur l’article. (« Ah ! » sur les bancs du groupe UMP.)

M. Philippe Martin. Même si Didier Mathus a essayé de dissuader ses collègues du groupe socialiste d’intervenir sur cet article, j’ai finalement décidé de le faire après réflexion. (Sourires.)

Si je n’avais pas un avis bien formé au début de l’examen de cet article, je dois dire qu’après avoir entendu mon collègue de l’Ille-et-Vilaine, Marcel Rogemont, écouté mon collègue de Paris, Patrick Bloche, écouté mon collègue du Nord, dans un style différent, Patrick Roy, entendu ensuite Michel Françaix, mon excellent collègue de l’Oise, écouté avec attention Sandrine Mazetier, députée de Paris (Murmures sur les bancs du groupe UMP) , écouté aussi Aurélie Filippetti, de la Moselle, puis François Pupponi, député du Val-d’Oise, entendu David Habib, avec son expérience des Pyrénées-Atlantiques, (Exclamations sur les bancs du groupe UMP), après avoir entendu, y compris dans un patois local, Jean-Pierre Dufau, député des Landes, écouté Jean Gaubert, député des Côtes-d’Armor, été convaincu par Jean Mallot, député de l’Allier, puis par François Loncle, député de l’Eure, sans avoir entendu Delphine Batho et Daniel Goldberg, qui, s’ils étaient intervenus, auraient probablement dit la même chose (Rires et exclamations sur les bancs du groupe UMP), je me sens désormais capable d’intervenir sur cet article 7 !

Ce qui est en jeu une fois de plus, mes chers collègues, ce sont la liberté, la démocratie et le pluralisme.

Me reviennent alors à l’esprit, au moment même où il revient dans l’hémicycle, les propos de M. Karoutchi, qui ne voulait pas être le « Monsieur bricolage » du Parlement mais qui, il y a peu de temps, brandissait la menace de sortir sous quarante-huit heures une arme constitutionnelle.

Vos propos, monsieur le ministre, ont un peu changé la nature des débats. Il y a, depuis, une forme de crispation qui a peut-être un peu ralenti nos débats (« Non ! » sur les bancs du groupe UMP), et nous avons parfois le sentiment de légiférer sous la menace.

Si nous nous battons pied à pied comme nous le faisons ce soir et comme nous allons continuer de le faire dans les heures qui viennent, c’est parce que ce texte recèle des armes de destruction massive contre la liberté, la démocratie et le pluralisme. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Nous avons déposé un amendement pour que, sur les quatre parlementaires, deux soient de l’opposition. Vous devriez nous remercier, mes chers collègues de la future opposition, car, à force de faire passer des textes liberticides ou de fausse liberté, comme celle de travailler le dimanche ou jusqu’à soixante-dix ans, c’est bientôt vous qui bénéficierez de ces deux postes donnés à l’opposition. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. le président. Nous allons aborder les amendements à l’article 7.

M. Patrick Braouezec. Je demande la parole, monsieur le président.

M. le président. La parole est à M. Patrick Braouezec.

Mme Claude Greff. M. Martin a oublié de citer votre nom !

M. Patrick Braouezec. Effectivement, c’est une omission.

Je vous demande, monsieur le président, une suspension de séance d’une dizaine de minutes, pour deux raisons.

D’abord cela fait une semaine et un jour que nous examinons ce texte de loi. Les seules séances que j’ai manquées sont celles de lundi car nous ne devions pas siéger et je m’étais engagé auprès de la ville de Barcelone à participer à une conférence internationale assez importante sur un sujet beaucoup plus d’actualité et urgent qui est l’inclusion sociale.

Les rapports de force étant ce qu’ils sont aujourd’hui dans cette assemblée, et même si certains collègues socialistes s’installent de temps en temps près de moi pour faire croire que nous sommes plus nombreux, je suis seul et j’ai besoin de reconstituer ma force de travail avant d’aborder ces amendements. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Ensuite je souhaite me réunir avec moi-même pour voir si le « je » qui s’exprime dans cette assemblée est en accord avec l’autre qui sommeille.

M. le président. Vous êtes tout seul, monsieur Braouezec, et, pour réunir votre groupe, cela ne va pas être d’une simplicité biblique.

M. Patrick Braouezec. Je l’ai dit !

M. le président. Nous pouvons donc continuer nos travaux puisque vous êtes réuni. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

M. Patrick Braouezec. Je vous ai expliqué, monsieur le président, que j’avais également besoin de reconstituer ma force de travail. Je vous demande donc cinq minutes pour ce faire. La suspension est de droit.

M. le président. Selon le règlement, je ne peux vous accorder une suspension que pour réunir votre groupe. Cela dit, comme M. Mathus demande la parole, je suis certain que nous allons trouver une solution qui va vous donner satisfaction. (Rires.)

Vous avez la parole, monsieur Mathus.

M. Didier Mathus. Monsieur le président, vous savez que, dans les rangs de la gauche, la solidarité n’est pas un vain mot. Pour venir au secours de M. Braouezec, je vous demande, au nom du groupe socialiste, une suspension de séance d’une quinzaine de minutes pour réunir notre groupe et le sien.

M. le président. Les choses s’arrangent ainsi dans le respect du règlement.

Votre demande est parfaitement conforme au règlement, monsieur Mathus, et je vous accorde une suspension de cinq minutes. Vous avez donc satisfaction, monsieur Braouezec.

Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à vingt-trois heures cinquante-cinq, est reprise, le jeudi 4 décembre 2008, à zéro heure dix.)

M. le président. La séance est reprise.

Madame la ministre, souhaitez-vous répondre aux intervenants sur l’article 7 ?

Mme Christine Albanel, ministre de la culture. Non, monsieur le président. Je ne tiens pas à apporter ma pierre au mur très épais de l’obstruction. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. – Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Mme Aurélie Filippetti. Ce n’est pas possible !

M. Jean-Marc Ayrault. Je demande la parole pour un rappel au règlement.

Rappel au règlement

M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Ayrault.

M. Jean-Marc Ayrault. Je regrette de faire ce rappel au règlement, mais la réponse – qui n’en est pas une – de Mme la ministre est profondément choquante. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

M. Benoist Apparu. Les orateurs n’ont rien dit !

M. Jean-Marc Ayrault. Madame la ministre, à plusieurs reprises, vous avez entendu nos collègues, notamment Aurélie Filippetti, vous interroger sur l’affaire de France 24. Que vous n’ayez pas le courage de répondre sur ce point précis est franchement scandaleux. Il y a sans doute quelque chose qui vous gêne ; vous ne voulez pas dire la vérité sur cette vente des actions de TF1, qui n’ont coûté que 17 500 euros à cette chaîne – autant dire rien – alors que, dans la négociation, celle-ci a eu le culot d’en demander 90 millions d’euros. Vous ne voulez pas répondre à cela. Cela veut dire que quelque chose vous gêne et que vous voulez le cacher !

Monsieur le président, cela commence à aller trop loin. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.). Ce refus d’éclairer l'Assemblée nationale, après les interventions du groupe socialiste est inadmissible. Je demande donc une suspension de séance pour réunir mon groupe. (Protestations sur les bancs du groupe UMP.)

M. Gérard Voisin. Ridicule !

M. le président. La parole est à M. Jean Leonetti.

M. Jean Leonetti. Monsieur Ayrault, vous venez de parler de scandale et vous avez dit à Mme la ministre qu’elle ne disait pas la vérité. C’est votre attitude qui est un scandale et c’est vous qui ne dites pas la vérité ! (Vives protestations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

M. Jean-Claude Lenoir. Très bien !

M. François Loncle. Que Mme la ministre s’exprime !

M. Jean Leonetti. Le scandale, c’est que vingt personnes soient intervenues sur le même article…

M. David Habib. Et alors ?

M. Jean Leonetti. … en disant quasiment la même chose.

La vérité, que vous ne voulez pas dire, c’est que vous avez l’intention de bloquer ce projet de loi, parce que ce texte, qui vous gêne, vous offre en même temps l’occasion de donner l’illusion d’une unité du parti socialiste, au moment où celui-ci est complètement éclaté. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

En réalité, à force de petites questions sur de petits problèmes et malgré la sagesse de Mme la ministre et la tolérance de l’ensemble du groupe majoritaire,…

Mme Claude Greff. La patience !

M. Jean Leonetti. …, vous êtes à présent dans une situation où vous avez envie d’aller vous coucher.

M. Jean-Claude Lenoir. Eh oui ! Ils veulent aller au dodo.

M. Jean Leonetti. La vérité, c’est que vous n’avez pas envie que l’on débatte de ce texte ; vous voulez poursuivre vos litanies.

Comme l’a très clairement dit M. Bloche dans Le Point, en réalité, votre objectif est de mener une obstruction totale pour retarder l’adoption du texte. En effet, si vous n’avez pas d’arguments contre son adoption, vous disposez de procédures pour la retarder. Cela n’est pas à l’honneur de notre démocratie ni à l’honneur de notre hémicycle. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. C’est la démocratie qui est déshonorée par ce texte !

M. Jean Leonetti. Votre attitude, monsieur Ayrault, ne fait pas honneur à votre parti ni à votre mandat de député.

Mme Aurélie Filippetti. Pas de leçon de morale, monsieur Leonetti !

M. Jean Leonetti. Nous avons très bien compris où vous vouliez en venir.

Monsieur le président, je vous prends à témoin que, dans la situation dans laquelle nous sommes, d’obstruction en obstruction et de demande de suspension en demande de suspension, le débat ne peut pas se dérouler de manière sereine.

Mme Aurélie Filippetti. Nous voulons des réponses !

Mme Claude Greff. À quoi ?

M. Benoist Apparu. Il n’y a pas de questions !

Mme Aurélie Filippetti. Nous avons posé beaucoup de questions et nous n’avons pas eu de réponses !

M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Ayrault.

M. Jean-Marc Ayrault. Je suis surpris du ton employé par M. Leonetti, que je vois pour la première fois dans ce débat. Je suppose qu’il a autre chose à faire, c’est normal, chacun ayant des responsabilités à assurer. Néanmoins, venir inopinément et nous faire la leçon, à nous, députés socialistes, qui, depuis le début, sommes engagés dans ce débat, je trouve cela tout à fait choquant.

Cela étant j’en reviens à l’essentiel : je n’admets pas qu’un gouvernement refuse de répondre aux députés de l’opposition sur un projet de loi qui touche à la démocratie. Je trouve cela profondément choquant et scandaleux !

M. Patrice Martin-Lalande, vice-président de la commission spéciale. Le Gouvernement fait ce qu’il veut, monsieur Ayrault !

M. Jean-Marc Ayrault. Je ne retire rien à ce que j’ai dit tout à l’heure ! Je ne comprends pas pourquoi la ministre de la communication se refuse à communiquer avec nous. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) On pouvait espérer une petite réponse, un peu de considération : non, décidément, on voit quelle est votre conception du débat et de la démocratie.

M. Benoist Apparu. On a vu quelle est la vôtre !

M. Jean-Marc Ayrault. Monsieur le président, je réitère ma demande de suspension de séance.

M. le président. Suite à la demande du président Ayrault, compte tenu des propos tenus par M. Leonetti au nom du groupe UMP, qui constate que l’on ne peut pas débattre dans la sérénité, et vu l’heure, je pense qu’il convient de lever la séance.

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

2

Ordre du jour de la prochaine séance

M. le président. Prochaine séance, aujourd’hui à neuf heures trente.

Discussion de deux conventions internationales et suite de la discussion du projet de loi relatif à la communication audiovisuelle et au nouveau service public de la télévision.

La séance est levée.

(La séance est levée à zéro heure vingt.)