Journée nationale des mémoires de la traite négrière, de l’esclavage et de leurs abolitions

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Hommage
Esclave enchaîné | Copyright : Thinkstock

Le 10 mai est, depuis 2006, la journée des mémoires de la traite négrière, de l’esclavage et leurs abolitions. Créée par la loi du 21 mai 2001 tendant à la reconnaissance de la traite et de l'esclavage en tant que crime contre l'humanité, cette journée de commémoration a pour objet « d’éviter que cette période [de la traite], essentielle pour comprendre les interrogations actuelles des sociétés d’outre-mer, ne soit passée sous silence » selon les termes du rapport de la commission des lois.

Du XVIe au XIXe siècle, ce sont plus de 11 millions d’hommes, de femmes et d’enfants victimes qui ont été capturés, arrachés à leur sol natal, transporté à travers l’Atlantique et mis en servitude pour travailler dans des conditions inhumaines dans les exploitations coloniales.

Si l’esclavage est une pratique aussi ancienne que les civilisations, « elle a pris une dimension nouvelle avec la traite transatlantique » rappelle Christiane Taubira, rapporteure du projet de loi.

C’est en 1441 que débute la traite européenne. Les Noirs d’Afrique était d’abord acheminés vers la péninsule Ibérique et vers les îles de Sao-Tomé-et-Principe avant d’être transportés directement vers les colonies américaines après la « découverte » du continent en 1492. La traite européenne était fondée sur trois opérations : échange de « pacotille », c’est-à-dire de produits bruts et manufacturés européens (objets métalliques, armes, alcool, textiles) contre des captifs africains ; transport des captifs par mer afin d’en faire des esclaves dans les colonies ; vente ou échange des captifs contre les denrées tropicales, dont le sucre.

Le commerce des esclaves d’Afrique est progressivement institutionnalisé au cours du XV et du XVIe siècle. Ainsi, en mars 1685, la France promulgue l’Édit « touchant la police des Isles de l’Amérique Françoise » ou « Code noir » qui codifie le statut des esclaves, auxquels est déniée toute personnalité civile et juridique.

À partir de la seconde moitié du XVIIIe siècle, la contestation de la traite négrière et de l’esclavage se fait plus pressante. C’est pourtant au cours du même siècle que le commerce des esclaves atteint son apogée avec plus de 7,2 millions de personnes capturées, transportées et vendues.

En 1794, quatre ans après avoir adopté la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, sous la pression de la révolte des esclaves à Saint-Domingue, la France est le premier pays à proclamer l’abolition de l’esclavage. Le décret de la Convention nationale, appliqué dans toutes les colonies françaises, sauf à l’île Bourbon et aux Mascareignes, est révoqué en 1802 par Bonaparte, alors Premier consul.

Cette première abolition avortée enclenche un processus. Le XIXe siècle verra l’extinction progressive de la traite transatlantique puis de l’esclavage.

Ainsi, au Congrès de Vienne, à l’initiative de la Grande-Bretagne, huit puissances européennes signent une déclaration condamnant la traite négrière « répugnant au principe d'humanité et de morale universelle » et les engageant à l’interdire. La France le fait en 1818.

En 1833, le Parlement britannique vote la suppression de l’esclavage. L’année suivante, la Société française pour l’abolition de l’esclavage, présidée par le duc de Broglie, est créée à Paris. Lamartine, La Rochefoucauld-Liancourt, Tocqueville portent régulièrement des propositions abolitionnistes à la Chambre des députés. Finalement, quelques jours après les Journées révolutionnaires de février 1848 et la proclamation de la République, Victor Schoelcher rédige les décrets qui abolissent définitivement l’esclavage en France.

Cent cinquante ans après, le Parlement adopte la loi tendant à la reconnaissance de la traite et de l'esclavage en tant que crime contre l'humanité. Cent cinquante ans durant lesquels, selon les mots de Christiane Taubira, « l’oubli fut organisé politiquement […], l’oubli fut organisé administrativement […], l’oubli fut organisé juridiquement […], l’oubli fut organisé économiquement […], l’oubli fut organisé moralement […] ».

L'abolition de l'esclavage (1794 et 1848) sur le site de l'Assemblée nationale
La loi du 21 mai 2001 tendant à la reconnaissance de la traite et de l'esclavage en tant que crime contre l'humanité
Site de la Fondation pour la mémoire de l’esclavage