XVIe législature
Session ordinaire de 2023-2024

Deuxième séance du mardi 07 mai 2024

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Deuxième séance du mardi 07 mai 2024

Présidence de M. Sébastien Chenu
vice-président

M. le président

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    La séance est ouverte.

    (La séance est ouverte à vingt et une heures trente.)

    1. L’austérité imposée par le Gouvernement

    M. le président

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    L’ordre du jour appelle le débat sur le thème : « L’austérité imposée par le Gouvernement ».
    La conférence des présidents a décidé d’organiser ce débat en deux parties. Dans un premier temps, nous entendrons les orateurs des groupes, puis le Gouvernement – je salue M. le ministre délégué chargé des comptes publics ; dans un second temps, nous procéderons à une séquence de questions-réponses.
    La parole est à Mme Charlotte Leduc.

    Mme Charlotte Leduc (LFI-NUPES)

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    L’austérité imposée par le Gouvernement… Monsieur le ministre, vous vous dites certainement : « Tiens, on en parle à l’Assemblée, on en débat, comment est-ce possible ? Qui a permis une chose pareille ? » Rassurez-vous : on ne vote pas lors des semaines de contrôle, vous n’aurez donc pas besoin de dégainer un énième 49.3 pour nous empêcher… de vous empêcher de plonger le pays dans une austérité absurde et particulièrement injuste. Ne vous en déplaise, nous allons tout de même parler de l’austérité que vous imposez.
    Cela dure depuis un moment, mais cette année, on atteint un point de bascule : dans le projet de loi de finances pour 2024, pour la première fois, le budget de l’État baisse en valeur réelle ; si l’on tient compte de l’inflation, le repli des dépenses publiques s’établit à 3,5 %. À l’heure où d’immenses défis climatiques, géopolitiques, économiques et sociaux se dressent devant nous, une telle contraction de la dépense, y compris de l’investissement public, est irresponsable.
    Muni de ce budget, déjà austéritaire et passé en force au 49.3, le Gouvernement a dû revoir sa copie au bout de deux mois à peine : dès février 2024, Bruno Le Maire, ministre de l’économie et des finances, a annoncé 10 milliards de coupes budgétaires, après avoir revu à la baisse les perspectives de croissance, de 1,4 % à 1 % du PIB. Cette annonce a en outre anticipé la confirmation d’un déficit bien pire que celui qu’avait annoncé le Gouvernement pour 2023 puisque, le 26 mars, le couperet de l’Insee est tombé : le déficit a été de 5,5 % du PIB au lieu des 4,9 % prévus.

    M. Maxime Minot

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    Eh oui ! Ça, c’est une réalité !

    Mme Charlotte Leduc

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    Le Gouvernement s’est trompé sur tout, qu’il s’agisse de la croissance, de la prévision des recettes publiques ou encore du déficit. Ces erreurs virent à l’incompétence, et l’on doute sérieusement de leur sincérité tant elles semblent justifier ensuite des coupes budgétaires brutales si assumées. Les 10 milliards de coupes que vous avez annoncées sont pourtant un scandale. En valeur absolue, l’écologie, l’emploi et l’enseignement supérieur seront les plus durement touchés ; en proportion, l’aide internationale et la jeunesse souffrent le plus.
    Votre austérité, c’est donc l’abandon de toute politique ambitieuse en matière de bifurcation écologique, et aussi l’abandon de la jeunesse, à qui vous n’avez rien d’autre à proposer que les coups de menton autoritaristes du Premier ministre. On ne forme pas des citoyennes et des citoyens à coups de cravache, d’uniforme et de service national universel (SNU), ni dans des internats qui ressemblent à s’y méprendre à des maisons de correction ; on forme des citoyennes et des citoyens en leur donnant des perspectives d’avenir et un espoir d’émancipation. Ce que vous promettez à notre jeunesse, c’est l’inaction climatique, la souffrance au travail et une militarisation absurde de la société, qui nous mène droit à la guerre.
    Cela ne s’arrête pas là : après les 10 milliards de coupes pour 2024, vous nous annoncez 20 milliards de coupes supplémentaires dans le projet de loi de finances pour 2025, et jusqu’à 50 milliards d’économies d’ici à 2027. C’est l’État social français et la cohésion de la société que vous êtes en train de détruire. Après vous, le déluge, pourvu que les comptes soient à l’équilibre ! Or vous n’y arrivez même pas, car le scénario budgétaire que nous connaissons en ce début d’année se reproduira année après année : manque de croissance, donc manque de recettes, d’où une nouvelle cure d’austérité absurde pour tenter inutilement de remédier à la situation. Nous avons un problème de recettes publiques, non pas de dépenses publiques ! Il faut donc augmenter les recettes.
    Loin de la caricature répétée à l’excès par les ministres sur les plateaux de télévision et dans les matinales à la radio quant à notre prétendue volonté de matraquer les Français d’impôts, nous avons des propositions, et elles sont justes : rétablir un impôt sur la fortune renforcé, incluant un volet climatique ; taxer les superprofits ; supprimer le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE), ainsi que le crédit d’impôt recherche (CIR) pour les plus grandes entreprises ; supprimer les niches fiscales les plus polluantes, ainsi que la niche Copé, qui permet aux holdings des milliardaires d’échapper à toute imposition ; rétablir la contribution sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) ; établir un impôt universel sur les entreprises ; renforcer la taxe sur les transactions financières (TTF) ; mettre fin à la flat tax ; et, évidemment, mener une véritable politique de lutte contre l’évasion fiscale. Vous n’avez qu’à faire votre marché parmi ces propositions,…

    M. Maxime Minot

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    Leur sectarisme les empêche de le faire !

    Mme Charlotte Leduc

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    …qui rapporteraient chacune plusieurs milliards. Nous pouvons et nous devons augmenter les recettes, dans le respect de la justice fiscale, pour investir dans l’avenir, enclencher la bifurcation écologique, reconstruire nos services publics et engager enfin une politique ambitieuse de lutte contre les inégalités et la misère.
    Oui, ce débat est nécessaire, tant les conséquences de votre austérité mettent le pays en danger ! Oui, ce débat est utile, contre une telle dérive antidémocratique et autoritaire ! Il est scandaleux que cette austérité soit imposée sans qu’un projet de loi de finances rectificative soit soumis à la délibération du Parlement. Nous ferons tout pour vous empêcher de l’imposer. (M. Emmanuel Fernandes applaudit.)

    M. le président

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    La parole est à M. Maxime Minot.

    M. Maxime Minot (LR)

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    En 2017, Emmanuel Macron promettait de réaliser 60 milliards d’économies d’ici à la fin du quinquennat, de ramener les comptes publics à l’équilibre, de réduire notre dette de 5 points et de supprimer 120 000 postes de fonctionnaires. Presque sept ans après, voici le résultat : en 2023, le déficit public a connu un dérapage sans précédent, de 5,4 % du PIB, alors que le Gouvernement avait promis qu’il serait de 4,9 %. Le Haut conseil des finances publiques (HCFP) parle d’ailleurs d’une « année noire pour les finances publiques ». Pour 2024, le nouvel objectif de déficit est de 5,1 % du PIB alors que le Gouvernement tablait jusqu’à présent sur 4,4 %. Cela implique de réaliser 20 milliards d’économies supplémentaires par rapport à ce qui a été voté dans la loi de finances pour 2024. Après les 10 milliards de crédits annulés par décret sans que la représentation nationale soit associée, il reste donc 10 milliards à trouver cette année.
    Rappelons que vingt-trois des vingt-huit pays de l’Union européenne d’alors ont profité des taux d’intérêt négatifs pour se désendetter entre 2014 et 2019. La France fait partie des cinq pays qui ont continué d’augmenter leur dette et sera, en 2024, le troisième pays le plus endetté d’Europe. En 2017, au moment de l’élection d’Emmanuel Macron, sept pays avaient une dette plus élevée que celle de la France ; désormais, il n’en reste plus que deux, la Grèce et l’Italie. Même le Portugal, jadis plus endetté que nous, a su faire redescendre sa dette sous la barre des 100 % du PIB. D’ici à 2026, tous les pays de l’Union européenne seront revenus sous les 3 % de déficit public… sauf nous ! Où est donc passé le Mozart de la finance ?
    À la fin du premier quinquennat d’Emmanuel Macron, plus de 72 000 agents de la fonction publique supplémentaires avaient été recrutés, le déficit commercial avait été considérablement accentué et le poids de la dépense publique avait plus que doublé. On est donc bien loin de l’austérité !
    Malgré tout, le Gouvernement maintient son objectif d’un déficit public inférieur aux 3 % du PIB en 2027. Les agences de notation Fitch et Moody’s laissent clairement entendre qu’elles n’y croient pas. Pour sa part, le Fonds monétaire international (FMI) prévoit un déficit de 4,3 % cette année-là, indiquant d’ailleurs que le déficit français ne devrait pas repasser sous la barre des 3 % du PIB avant 2029.
    Les hypothèses de croissance du Gouvernement restant exagérément optimistes, les prévisions en matière de dette et de déficit seront quasi impossibles à concrétiser. Si la croissance française s’avère, comme c’est probable, plus faible que celle qui est attendue par l’exécutif, les économies à faire seront donc plus importantes. Notre taux de dépenses publiques – 56,3 % en 2024 – est supérieur de 8 points à la moyenne de la zone euro, et la France affiche toujours, après le Danemark, le taux de prélèvements obligatoires le plus élevé d’Europe : 44,1 % du PIB en 2024.
    Après sept ans de renoncement et de politique de l’argent magique, le Gouvernement se réveille et annonce soudainement des économies irréalisables, qui risquent de mettre en péril la croissance française. Tout cela, je le répète, sans en référer à la représentation nationale, puisque le président Emmanuel Macron lui-même refuse une loi de finances rectificative. Le groupe Les Républicains met en garde depuis des années sur le risque qui pèse sur notre économie et sur les dangers auxquels la politique du Gouvernement expose notre pays. Des réformes structurelles essentielles doivent être entreprises pour réduire les dépenses publiques et le poids de la dette. Stop à la politique du sparadrap ! À quand un réel débat avec la représentation nationale ?

    M. le président

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    La parole est à M. Nicolas Sansu.

    M. Nicolas Sansu (GDR-NUPES)

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    De Maastricht à Lisbonne, en passant par le projet de Constitution européenne rejeté par le peuple français, les différents jalons de la construction européenne ont tous été marqués du sceau de l’ordolibéralisme, un projet qui consiste à réduire toujours plus la place de l’État et la mise en commun, au profit de l’individualisme et de la concurrence libre et non faussée. Dans ce cadre de pensée, la France, avec son système collectif de protection sociale – la sécurité sociale –, avec ses services publics développés, mais aussi avec ses monopoles publics et ses grands fleurons industriels à capital public, a toujours constitué un contre-modèle à abattre.
    Pour y parvenir, il fallait bien entendu fixer des règles contraignantes : ce sont les règles budgétaires, dont le seul objectif est de réduire les dépenses publiques et, avec elles, les services publics et le système de protection sociale. Il fallait en outre construire un récit anxiogène, à même de faciliter l’acceptation par les peuples de l’application de ces règles : c’est la fétichisation de la dette, fardeau financier que nos générations légueraient à leurs enfants.
    Dans ce travail de destruction, les règles européennes et le récit ne seraient rien sans les serviteurs qui les appliquent. Ils le font d’autant mieux qu’ils en sont eux-mêmes convaincus, comme le démontre la récente révision du pacte de stabilité et de croissance : alors que Bruno Le Maire se félicitait d’avoir arraché plus de flexibilité dans l’application des règles, il n’y aura dans les faits aucune évolution ; un temps évoquée, la sortie, du calcul des déficits publics, de certains investissements dans la transition écologique n’aura pas trouvé grâce aux yeux du Gouvernement.
    Il faudra donc bel et bien trouver 95 milliards d’euros à l’horizon 2027 pour revenir sous la barre des 3 % de déficit public. Pour cette année 2024, 10 milliards d’euros de crédits ont d’ores et déjà été annulés, sur des politiques publiques centrales et ô combien importantes pour l’avenir : la rénovation thermique des logements – moins 1 milliard d’euros ; les infrastructures de transport – moins 340 millions ; le fonds Vert destiné aux investissements écologiques des collectivités territoriales – moins 500 millions ; l’éducation nationale – moins 700 millions sur les dépenses de personnel ; l’enseignement supérieur – moins 600 millions.
    Laisser penser que ces annulations n’auront pas d’impact réel sur les politiques publiques est, bien sûr, un mensonge ; elles auront au contraire un impact bien palpable. Hier, monsieur le ministre, vous avez répondu ici même que ces annulations correspondaient à des sous-exécutions budgétaires. Si ces sous-exécutions budgétaires existent, elles sont avant tout le résultat d’un manque de volonté et de portage politiques dans ces domaines.
    Pour 2025, l’austérité sera plus marquée encore et aboutira inéluctablement à des coups de rabot massifs. Il s’agit d’économiser 20 milliards d’euros supplémentaires, faute de vouloir aller chercher l’argent là où il est. Pensons aux 97 milliards d’euros de dividendes et de rachats d’actions décidés par les sociétés du CAC40, aux 230 milliards d’euros de patrimoine supplémentaire accumulés en un an par les quarante-deux milliardaires français et, pour ne citer que cet exemple, aux 36 millions d’euros de rémunération indécente versés à Carlos Tavares. Voilà qui pourrait donner des idées de recettes nouvelles et tout à fait justes ! Nous ferons évidemment des propositions en ce sens.
    Mais non ! Vous refusez tout nouveau prélèvement, sous prétexte que notre pays présenterait les taux de prélèvements obligatoires et de dépenses publiques les plus importants de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE). Or ces taux élevés ne traduisent pas une quelconque inefficacité ou un gaspillage ; au contraire, ils traduisent un choix de société, celui de réponses collectives plutôt qu’individuelles, les premières se révélant d’ailleurs plus efficaces que les secondes.
    Rappelons par exemple que la France consacre environ 12 % de son PIB à son système de santé, structuré autour de la sécurité sociale, tandis qu’aux États-Unis, ce sont 20 % du PIB qui partent dans des systèmes d’assurance individuelle privés, pour des résultats moins bons et marqués par de très fortes inégalités. Les dépenses publiques sont certes proportionnellement moindres que chez nous, mais les dépenses de santé sont bien plus élevées et bien moins efficaces. Qu’importent ces faits bien établis, l’objectif doit être de poursuivre la réduction de la place de l’État.
    À trois reprises, monsieur le ministre, vous avez été interrogé sur la sous-indexation des pensions de retraite en 2025. Vous n’avez jamais répondu – ce sera peut-être encore le cas tout à l’heure –, preuve que le sujet est sur la table. Je retente néanmoins ma chance : entendez-vous, oui ou non, désindexer les pensions de retraite en 2025 pour faire des économies ?
    En procédant à la sous-indexation des pensions, en augmentant l’âge de départ à la retraite et en accroissant la période de cotisation, vous participez à la destruction de notre système public de retraite, au profit d’assurances privées qui combleront bientôt le vide que la puissance publique aura laissé. C’est pourquoi le groupe Gauche démocrate et républicaine soutiendra, dans le cadre de sa niche parlementaire, une proposition de loi constitutionnelle visant à constitutionnaliser la sécurité sociale, afin de protéger celle-ci contre les assauts répétés des libéraux et des marchés.
    Face aux politiques d’austérité qui affaiblissent l’État et les services publics, qui concourent à l’individualisme et à la concurrence de tous contre tous, vous trouverez toujours les députés de notre groupe sur votre route. (Applaudissements sur les bancs du groupe Écolo-NUPES.)

    M. le président

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    La parole est à M. Michel Castellani.

    M. Michel Castellani (LIOT)

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    Nous sommes réunis ce soir, à l’initiative du groupe La France insoumise, pour évoquer les politiques d’austérité et les conséquences qui en découleraient pour le pays. Disons-le d’emblée, le terme d’austérité ne correspond guère, selon nous, à la réalité.
    En effet, la sortie du « quoi qu’il en coûte », après la crise du covid-19, ne signifie pas pour autant la restriction budgétaire. Pour l’État, les dépenses autorisées s’élèvent cette année à 480 milliards d’euros, le solde budgétaire prévu étant de moins 174 milliards. L’Agence France Trésor (AFT) empruntera 285 milliards, sachant que le montant de la dette publique est de l’ordre de 3 200 milliards.
    En France, la dépense publique représente 53 % de la valeur créée annuellement. Dans le même temps, le taux de prélèvements obligatoires est l’un des plus élevés au monde, puisqu’il représente près de 44 % de la richesse totale créée. Alors même que le taux de l’emploi public est déjà le plus haut de l’OCDE, 59 000 nouveaux emplois publics ont été créés en 2023.
    Une politique sociale forte est maintenue, dont il ne faut sous-estimer ni l’ampleur ni l’utilité. Par exemple, 60 milliards d’euros sont versés chaque année au titre de l’assistance sociale, et 66 milliards d’euros d’allègements de charges sociales sont concentrés sur le soutien au Smic. Compte tenu de ces différents éléments, il est difficile de parler d’austérité.
    Cependant, notre propos n’est pas de dresser un panorama idyllique des réalités. Depuis quelques années, la situation n’a cessé de se dégrader : la dette est considérable ; le déficit est toujours plus important ; les impôts sont écrasants pour certains ; l’action publique n’a jamais été aussi peu estimée. Certes, le covid-19 est passé par là et le « quoi qu’il en coûte » était indispensable. Toutefois, face à cette situation, aucune coalition solide n’a été recherchée et les oppositions n’ont jamais été associées à l’action publique. Du recours au 49.3 au monologue de Bercy, une route solitaire est tracée. À une loi de finances rectificative, autrement dit à un vote de la représentation nationale, le Gouvernement préfère des décrets d’annulation de crédits. Ces coupes brutales, décidées sans concertation, sont dramatiques et créent un précédent grave, puisque la représentation nationale est muselée sur des questions budgétaires.
    Le groupe Libertés, indépendants, outre-mer et territoires s’efforce de suivre une ligne claire, qui tend à un rééquilibrage juste des comptes publics – juste, car il s’agit de taxer en fonction des ressources, d’oxygéner la création de richesses et de soutenir ceux qui sont les plus en difficulté. Certes, notre groupe est peu nombreux et ses marges de manœuvre sont contraintes, mais nous ne sommes pas avares de propositions. Je pense aux propositions de loi de mon collègue Benjamin Saint-Huile, l’une visant à réduire le déficit de l’État et à améliorer l’équité du système fiscal français, l’autre à taxer les rachats d’action. Je pense également à celle de Christophe Naegelen, qui propose d’élargir l’assiette de la TTF, à celle qui porte sur la taxation des superprofits ou encore à celle que j’ai déposée, qui vise à accroître la part des résidents nationaux parmi les détenteurs de la dette publique.
    Autrement dit, il existe des gisements de recettes potentielles, qui seraient de nature à financer des politiques utiles, par exemple l’extension du chèque énergie, qui aide les travailleurs périurbains et ruraux – nous avions un accord à ce sujet.
    Notre groupe entend aussi porter la voix des territoires. Dans ce domaine, le moins vertueux, c’est-à-dire l’État, impose aux plus sages, les collectivités, de pallier ses lacunes, sans concéder la moindre autonomie fiscale et en réduisant les ressources dont elles disposent. Il y a là un domaine majeur d’évolution des relations entre l’État central et les territoires. Il faudra traiter cette question, qu’on le veuille ou non.
    Permettez-moi d’ajouter, en tant que député de la Corse, que celle-ci attend, dans son immense majorité, l’attribution de compétences qui lui permettraient d’améliorer sa situation économique et sociale et, plus largement, la reconnaissance de sa particularité historique, qui est de nature certes géographique, mais surtout culturelle et sociétale, donc politique. L’idée est non pas de cultiver les particularismes, mais d’adapter la gestion, le plus finement possible, aux réalités concrètes.
    Nous sommes confrontés à une situation difficile sur les plans économique, social et budgétaire. Face à un monde dangereux, de tensions et de compétition, face à ces réalités inquiétantes, la meilleure réponse réside dans l’exercice démocratique, dans l’esprit de responsabilité et dans la solidarité sociale. Les marges de manœuvre sont limitées, mais elles existent et il est de notre devoir de les employer.

    M. le président

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    La parole est à Mme Eva Sas.

    Mme Eva Sas (Ecolo-NUPES)

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    Depuis sept ans, vous sabrez les recettes fiscales et versez le champagne aux entreprises. C’était donc cela, le projet que le Président hurlait de ses vœux, à Lyon, en 2017 : open bar pour les plus riches et les multinationales, tandis que les autres devront attendre le ruissellement ! Évidemment, il n’y a pas eu de ruissellement, et le déficit s’est creusé, pour atteindre 5,5 % en 2023.
    Vous mettez ce déficit sur le compte d’un retournement conjoncturel. Toutefois, le HCFP vous a opposé un démenti : en 2023, la croissance a été conforme aux prévisions inscrites dans la loi de finances. Ce qui explique le déficit, c’est donc non pas la conjoncture, mais les 52 milliards d’euros de baisses d’impôts que vous avez opérées depuis 2017.
    Cette politique a d’abord bénéficié aux ultrariches, à qui vous avez accordé 3,2 milliards d’euros de baisses d’impôts, en transformant l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF) en impôt sur la fortune immobilière (IFI) et en instaurant la flat tax sur les revenus du capital, désormais moins taxés que ceux du travail. Grâce à vous, les 1 % les plus riches ont ainsi gagné 3,3 % de pouvoir d’achat entre 2017 et 2022, soit quatre fois plus que les 5 % les plus modestes.
    Quant aux entreprises, elles ont bénéficié d’une baisse de 11 milliards de l’impôt sur les sociétés et d’une diminution de 14 milliards des impôts de production, auxquelles s’ajoute une nouvelle réduction de la CVAE, de 1 milliard, dans le budget de 2024. Non seulement vous baissez les impôts des entreprises, mais vous les subventionnez massivement : des aides leur sont octroyées chaque année à hauteur de 157 milliards, la plupart sans conditionnalité ni contrepartie. Il s’agit, entre autres, des exonérations de cotisations sociales – 80 milliards –, du CIR – 7,3 milliards – et de l’aide aux employeurs pour l’embauche d’alternants – 3,3 milliards. Le « quoi qu’il en coûte » est fini pour les ménages, mais vous continuez à biberonner les entreprises !
    Fatalement, le déficit est bien plus important que prévu en 2023. Or vous expliquez désormais aux Français qu’ils doivent se serrer la ceinture ! Alors qu’ils ont déjà encaissé de devoir travailler deux ans de plus pour partir à la retraite, vous projetez de durcir les conditions d’ouverture des droits à l’assurance chômage, notamment en allongeant le délai de carence avant indemnisation.
    Et que dire de la situation de l’hôpital ? En 2023, 40 % des établissements privés étaient en déficit. Quant au déficit cumulé des trente-deux centres hospitaliers universitaires (CHU), il a atteint 1,2 milliard d’euros, soit trois fois plus qu’en 2022. Les conditions de travail des professionnels et les conditions d’accueil des patients sont dégradées.
    Vous aggraverez encore la situation, puisque vous prévoyez 20 milliards de coupes budgétaires en 2024 et 27 milliards en 2025 ! C’est un choc pour les dépenses publiques, dont vous refusez de préciser les conséquences, mais qui détériorera plus encore nos services publics, notre protection sociale et l’accompagnement des Français face au dérèglement climatique.
    Pourtant, le chemin existe pour retrouver un équilibre budgétaire, tout en finançant nos besoins sociaux et écologiques. Seulement, pour cela, il faut du courage : le courage de mettre à contribution les profiteurs de crise – nous vous avons proposé d’instaurer un ISF climatique ou la contribution Pisani-Ferry –, le courage de taxer les groupes pétrogaziers, que vous avez toujours épargnés, malgré leurs profits indécents. Vous n’avez taxé que les producteurs d’électricité, et bien en deçà de vos savantes prédictions, au moyen de la contribution sur la rente inframarginale de la production d’électricité (Crim). Vous avez même refusé de prolonger la petite taxe sur les producteurs d’énergies fossiles, dite contribution temporaire de solidarité ; vous ne l’avez mise en place que pour les résultats réalisés en 2022.
    Pendant ce temps, toute l’Europe mettait à contribution les groupes pétrogaziers : non seulement le Royaume-Uni, mais aussi l’Italie et l’Espagne qui, comme nous, n’ont pas d’exploration-production sur leur territoire. La taxe italienne créée par Mario Draghi a rapporté 2,8 milliards d’euros, tandis qu’en France, le PDG de TotalEnergies s’est réjoui de diriger une « machine à cash » ! Vous vous dites ouverts et sans tabou à ce sujet ; nous verrons bien si vous voterez la taxe exceptionnelle que nous vous proposerons en la matière.
    Le courage, c’est aussi de faire des économies.

    M. Thomas Cazenave, ministre délégué chargé des comptes publics

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    Oui !

    Mme Eva Sas

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    Oui, mais en rationalisant les aides aux entreprises, notamment les exonérations de cotisations, qui n’ont aucun effet sur l’emploi au-delà de 2,5 fois le Smic – comme l’a confirmé la mission Bozio-Wasmer, que vous aviez vous-même lancée. Le courage, c’est aussi de conditionner le versement des aides aux entreprises. Il pourrait s’agir, par exemple, d’une conditionnalité sociale pour les exonérations de cotisations ou d’une conditionnalité environnementale pour le CIR.
    Vous le constatez, monsieur le ministre, un autre chemin que l’austérité est possible pour les finances publiques. Jacques Ellul disait : « On ne peut pas créer une société juste avec des moyens injustes. » Les moyens justes pour préserver nos services publics, notre protection sociale et la transition écologique existent. Je le répète, un autre chemin est possible, mais pour l’emprunter, il faut avoir le courage d’affronter les lobbys et les intérêts particuliers. Les Français peuvent compter sur les Écologistes pour ce faire. (Applaudissements sur les bancs des groupes SOC et GDR-NUPES.)

    M. le président

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    La parole est à Mme Violette Spillebout.

    Mme Violette Spillebout (RE)

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    Permettez-moi tout d’abord de vous faire part de mon étonnement quant au titre donné à ce débat : « L’austérité imposée par le Gouvernement ». Non, nous ne rêvons pas ! Le groupe LFI-NUPES ose parler d’austérité, alors qu’en réalité, c’est plutôt de bonne gestion des finances publiques, de création d’emplois et d’activité économique qu’il s’agit.

    M. Yoann Gillet

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    La blague !

    Mme Violette Spillebout

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    Oui, nous devons retrouver des comptes publics sains. Toutefois, ce n’est pas grâce aux recettes de LFI que nous y parviendrons ! Si nous vous écoutons, nous irons tout droit vers la banqueroute : Jean-Luc Mélenchon propose 250 milliards d’euros de dépenses publiques supplémentaires par an – 332 milliards selon Terra Nova. Or quels moyens propose-t-il pour financer ces dépenses ? Facile : le matraquage fiscal. « Il faut augmenter les impôts ; bien entendu, pas les vôtres, messieurs-dames, mais ceux des riches. » Comme si l’augmentation ciblée des impôts était une réponse magique !
    De l’autre côté de l’hémicycle, le Rassemblement national n’est pas en reste. Si nous suivons son programme, la faillite nous est promise, puisque le déficit se creusera chaque année de 100 milliards supplémentaires.
    À tous ceux qui veulent faire croire que notre économie est à l’arrêt, je réponds que les faits parlent d’eux-mêmes : la croissance française progresse ; le PIB a crû de 0,2 % au premier trimestre 2024.

    M. Gérard Leseul

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    Ce n’est pas beaucoup !

    Mme Violette Spillebout

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    C’est un nouveau signe qui traduit la solidité de notre économie. La stratégie du Gouvernement est payante. Pour la cinquième année consécutive, la France est le pays d’Europe le plus attractif. Dernièrement, les agences de notation Moody’s et Fitch ont décidé de laisser inchangée la notation de notre dette souveraine. C’est le fruit d’une politique économique constante, conduite depuis 2017.
    Les résultats sont également au rendez-vous en matière d’emploi et d’industrie. Nous avons mis fin à l’hémorragie industrielle : 100 000 emplois industriels ont été créés et 600 usines ont été ouvertes, dont 201 rien qu’en 2023, un record ! Dans ma région, les Hauts-de-France, de Dunkerque à Lille, il s’agit des futures gigafactories de batteries électriques, des futurs chantiers du canal Seine-Nord Europe et de centaines d’emplois créés dans la logistique.
    Maintenant que les crises ont été maîtrisées, que le covid-19 et l’inflation sont derrière nous (M. Nicolas Sansu s’exclame), nous devons reprendre le chemin du redressement des finances publiques, sereinement, fermement, comme nous l’avons fait en 2017, en 2018 et en 2019. La décision de maintenir la note de la France doit inciter le Gouvernement à redoubler de détermination pour rétablir les finances publiques et tenir l’objectif fixé par le Président de la République et par les ministres – Bruno Le Maire et vous-même, monsieur Cazenave : faire repasser le déficit public de la France sous la barre des 3 % du PIB. Rappelons que c’est notre majorité qui l’avait fait en 2018 ; nous devons y parvenir de nouveau en 2027.
    La feuille de route en matière de rétablissement des finances publiques est simple, claire et cohérente. Comme vous l’avez dit, monsieur le ministre, elle repose sur trois piliers essentiels : la croissance et le plein emploi, afin d’accélérer le désendettement ; les réformes de structure comme celle de l’assurance chômage ou celle de la simplification pour les PME ; la réduction des dépenses publiques qui ne rendent pas le service qu’elles devraient rendre. Le Gouvernement la met en œuvre en refusant d’augmenter les impôts, conformément à la promesse du Président de la République. Depuis 2017, cette promesse est tenue – il les a même baissés, de plus de 50 milliards d’euros.
    Il n’est plus question de postures, mais bien de vision. Il est vrai que nous n’avons jamais été aussi nombreux à nous alarmer du niveau de la dette. Cette situation doit nous amener à nous rassembler – nous, c’est-à-dire toutes celles et ceux qui, par-delà les polémiques, veulent sincèrement et fermement rétablir les finances publiques de la nation. Elle doit nous conduire, parlementaires de tous bords, à prendre nos responsabilités et à proposer des économies au Gouvernement, dès maintenant et d’ici à l’examen du projet de loi de finances pour 2025.
    Alexandre Holroyd, rapporteur spécial de la mission Culture, et moi-même avons formulé, dans une tribune publiée le 15 avril, des propositions concrètes dans le domaine culturel. Il convient de mettre fin à la perfusion d’argent public partout, y compris dans la culture, qui reste parfois dispendieuse – je dis bien « parfois » – et souvent inégalitaire et inefficace.

    Mme Eva Sas

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    Et les entreprises ?

    Mme Violette Spillebout

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    La culture mérite de l’ambition et les enjeux sont multiples. À l’heure de la numérisation, de l’intelligence artificielle, de l’économie du partage et de l’essor des plateformes, il est temps de faire des choix courageux : revoir certaines rémunérations, repenser le modèle de production des événements ou encore mutualiser des établissements culturels.
    L’Assemblée nationale peut agir en ce sens, non pas en s’apitoyant sur la situation du pays, ni en hystérisant le débat, mais en proposant des solutions concrètes, utiles et protectrices pour les Français.

    M. Gérard Leseul

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    Pas d’applaudissements ?

    M. le président

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    La parole est à M. Yoann Gillet.

    M. Yoann Gillet (RN)

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    Cela fait sept ans qu’Emmanuel Macron est Président de la République et que Bruno Le Maire est ministre de l’économie. En 2017, on nous vantait les « Mozart de la finance ». Sept ans plus tard, tout le monde sait que vous êtes en réalité des fossoyeurs de l’économie – les fossoyeurs de notre pays.
    En 2023, le déficit public a atteint le taux effrayant de 5,5 % – preuve flagrante de l’incapacité du Gouvernement à maîtriser les dépenses publiques et à susciter une croissance économique solide. Quant à la dette, elle a explosé de près de 1 000 milliards d’euros depuis que vous êtes aux responsabilités, ce qui fait de Bruno Le Maire le pire ministre de l’économie de la Ve République et, sûrement, de l’histoire moderne de notre pays.
    Nous ne devons pas sous-estimer l’ampleur de la situation et ses conséquences potentielles sur les générations futures. La balance commerciale française est elle aussi déficitaire, de près de 100 milliards d’euros. Nos industries sont étranglées ; nos entreprises, notamment les PME, sont étouffées par une bureaucratie toujours plus lourde et des taxes excessives. Les chiffres parlent d’eux-mêmes : le nombre de défaillances d’entreprises a augmenté de près de 36 % en 2023 par rapport à 2022 – rien qu’en 2023, plus de 57 700 procédures ont été ouvertes. Pendant ce temps, le Gouvernement continue de dilapider l’argent des Français, tout en les contraignant à se serrer toujours plus la ceinture.
    En plus de l’incompétence et de l’inconséquence du Gouvernement, les Français doivent subir l’austérité. Le Gouvernement a martelé une première fois la nécessité de réduire les dépenses publiques de 10 milliards d’euros. Puis, le 6 mars, dans une interview au Monde, Bruno Le Maire a annoncé qu’un projet de loi de finances rectificative était envisageable « à l’été, si nécessaire », tout en plaidant pour que l’on recherche au moins 12 milliards d’euros d’économies supplémentaires en 2025. Ce chiffre a presque doublé lors de l’audition des ministres de Bercy par la commission des finances de l’Assemblée : il faudrait désormais trouver 20 milliards d’euros d’économies d’ici à 2025.
    Le Gouvernement refuse de parler d’austérité ; elle est pourtant bien là. L’objectif est clair : orchestrer des coupes budgétaires sous le couvert d’une résorption du déficit public. Ces coupes, qui visent notamment la transition écologique, le travail et l’éducation, permettraient, selon vos dires, de respecter l’objectif de réduction du déficit public à 4,4 % du PIB en 2024.
    Une fois de plus, plutôt que de réaliser les économies là où les Français les attendent, la Macronie préfère imposer l’austérité. Par exemple, 1 milliard d’euros sera retiré du dispositif MaPrimeRénov’, autant d’argent en moins pour la rénovation énergétique des logements. Le ministère de l’écologie verra son budget diminuer de 2 milliards – la plus forte réduction. Le ministère du travail sera lui aussi affecté – la baisse des crédits atteindra 1,1 milliard, dont 863 millions pour le programme Accompagnement des mutations économiques et développement de l’emploi. Quant au ministère de l’éducation nationale, il subira une réduction de près de 700 millions – comme si la situation du système éducatif n’exigeait pas une attention particulière !
    Alors qu’un effort inouï de 95 milliards d’euros est nécessaire pour atteindre péniblement les 3 % de déficit public en 2027, force est de constater que le Gouvernement n’a pas le début d’une solution à proposer, hormis poursuivre une politique qui a déjà aggravé la dette et provoqué plusieurs records de prélèvements obligatoires.
    Le groupe Rassemblement national et sa présidente, Marine Le Pen, ont pourtant proposé des mesures concrètes pour sortir la France de sa descente aux enfers en matière économique. Il est impératif de s’attaquer à des sujets qui paraissent tabous aux yeux du Gouvernement, tels que la fraude fiscale et sociale, qui prive l’État des ressources nécessaires au fonctionnement de services publics essentiels.
    Pour dégager des économies et des marges de manœuvre, il est en outre crucial de revoir la politique migratoire et la contribution nette de la France à l’Union européenne. Le coût net de l’immigration en France, estimé entre 35 milliards et 50 milliards d’euros par an, doit être sérieusement examiné. Non, l’immigration ne rapporte pas à la France ! Ce n’est qu’un slogan des immigrationnistes que vous êtes.
    En parallèle, des réformes structurelles, telles que la privatisation du service public audiovisuel et radiophonique ainsi que la simplification du millefeuille administratif, sont nécessaires. Enfin, pour renforcer les recettes de l’État, nous préconisons l’instauration de nouvelles taxes ciblées sur les superprofits, les rachats d’actions et les surdividendes, ainsi que sur la fortune financière. Ces mesures contribueraient à l’équilibre des comptes publics et à une gestion financière plus responsable et équitable.
    Les Français savent qu’il n’y a pas de fatalité et qu’ils pourront, en 2027, compter sur Marine Le Pen, Présidente, et Jordan Bardella, Premier ministre, pour redresser la France. D’ici là, je les invite à se mobiliser et à vous infliger, le 9 juin prochain, une correction démocratique sans précédent – vous la méritez tant. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)

    M. le président

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    La parole est à M. le ministre délégué chargé des comptes publics.

    M. Thomas Cazenave, ministre délégué chargé des comptes publics

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    Ce débat est bienvenu : dans une actualité chargée sur le plan des finances publiques, il me donne l’occasion de clarifier devant vous plusieurs aspects de la politique que nous menons. Que pouvons-nous retenir de vos interventions ? D’un côté, le Gouvernement conduirait une violente politique d’austérité. De l’autre, il laisserait exploser la dette et les dépenses de façon irresponsable. La vérité doit certainement se trouver entre ces postures, à bonne distance de ces caricatures respectives.
    Ceux qui nous accusent aujourd’hui de dépenser trop sont les mêmes qui nous demandaient, il y a encore quelques mois, des dépenses supplémentaires. Permettez-moi de le rappeler : une unanimité existait sur ces bancs en faveur d’une politique de protection des ménages, des entreprises et des collectivités face à la crise sanitaire, aux conséquences de la guerre en Ukraine et à l’inflation.
    Notre politique repose sur une réalité, sur un constat et sur une ambition. Commençons par évoquer la réalité : la dépense publique annuelle de la France s’élève à 1 600 milliards d’euros et représente 57,3 % du PIB – le taux le plus élevé d’Europe. Elle finance l’ensemble de l’action de l’État, des collectivités territoriales et de la sécurité sociale : l’éducation, la défense, la sécurité, la recherche, la protection des plus fragiles, le soutien à l’investissement, l’action des élus dans les territoires – en somme, toutes nos politiques publiques. Il importe d’avoir en tête les ordres de grandeur pour pouvoir ensuite les mettre en perspective.
    Venons-en au constat : en dépit d’un contexte économique international moins favorable, la croissance française reste solide. Nous ne sommes pas le seul pays européen à avoir abaissé sa prévision de croissance en début d’année : en février, l’Allemagne a revu sa prévision de croissance pour 2024 à 0,2 % au lieu de 1,3 % initialement ; désormais, le gouvernement italien table sur une croissance de 1 % cette année, contre 1,2 % précédemment. Malgré cette conjoncture moins favorable, les fondamentaux de la croissance française restent solides, soutenus par les réformes structurelles, les investissements consentis depuis 2017 et, de façon plus conjoncturelle, par l’accélération de la consommation des ménages permise par la baisse de l’inflation, qui est désormais de 2,2 %. Les derniers chiffres de l’Insee montrent par ailleurs que l’acquis de croissance pour 2024 s’élève désormais à 0,5 % à la fin du premier trimestre, ce qui conforte notre prévision de 1 % pour l’année. Et, pour la cinquième année consécutive, la France est le pays le plus attractif d’Europe.
    Terminons par l’ambition : ramener le déficit sous les 3 % du PIB. Depuis le début des crises successives, en 2020, nous avons été au rendez-vous pour protéger nos compatriotes, grâce au chômage partiel, au fonds de solidarité, aux vaccins ou encore au bouclier tarifaire. Pour protéger le pouvoir d’achat face à l’inflation, nous avons instauré des dispositifs indispensables, qui n’en ont pas moins un coût. Nous sortons de ces crises en ayant préservé notre économie, nos emplois et notre potentiel de croissance.
    Il faut le dire : sans le « quoi qu’il en coûte », la crise nous aurait en réalité coûté beaucoup plus cher. Nous devons maintenant retrouver le chemin de la réduction du déficit, en le ramenant sous les 3 % en 2027, comme nous l’avons fait en 2018 et 2019. Précisons que ce chiffre est non pas un totem, mais la cible qui permet de stabiliser la dette.
    Pour tenir cet engagement, notre stratégie repose sur des efforts ciblés qui n’ont rien à voir avec l’austérité. S’agissant des dépenses de l’État, nous avons annulé 10 milliards d’euros de crédits pour l’année 2024. Je reconnais qu’il s’agit d’un effort, dans lequel tous les ministères se sont engagés. Je reconnais aussi qu’il s’agit d’une décision inédite dans l’histoire budgétaire, qui témoigne de notre détermination et de notre capacité à prendre des décisions difficiles.
    Néanmoins, je le rappelle, contrairement aux propos qui ont été tenus ce soir, ces annulations ont été faites dans un cadre totalement conforme à la loi organique relative aux lois de finances (Lolf). Nous les avons assumées et précisées devant la représentation nationale à plusieurs reprises, sans jamais nous dérober. Par ailleurs, les 10 milliards annulés représentent moins de 1,5 % des crédits ouverts pour le périmètre des dépenses de l’État. Surtout, ils sont à mettre en regard des 1 600 milliards de dépenses publiques, les dépenses de l’État ayant augmenté massivement depuis 2019. On est donc loin de l’austérité.

    M. Yoann Gillet

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    Ouf, nous sommes rassurés !

    M. Thomas Cazenave, ministre délégué

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    Certains considèrent pourtant – je les ai entendus à l’instant à cette tribune – que réduire de 1,5 % le budget de l’État et maîtriser la dépense publique en ciblant les dépenses de fonctionnement de l’État et des collectivités territoriales reviendrait à sombrer dans l’austérité. Pardonnez-moi, mais ceux-là n’ont jamais vu de près une politique austéritaire ! Des licenciements massifs de fonctionnaires, des réductions de traitement et de pension, des coupes dans toutes les subventions publiques : telle serait la réalité de l’austérité et de ses conséquences.
    Qu’en est-il réellement ? Depuis 2017, le budget de la justice a augmenté de 40 %. Les effectifs de magistrats ont été renforcés et continueront à augmenter jusqu’à la fin de la mise en œuvre de la loi d’orientation et de programmation du ministère de la justice 2023-2027 (LOPJ).
    Depuis 2017, le budget des armées a augmenté de plus de 30 %. La dernière loi de programmation militaire (LPM) vise à poursuivre cette dynamique d’ici à 2030, dans un contexte géopolitique qui impose à la France de pouvoir compter sur des forces armées de plus grande qualité encore.
    Depuis 2017, le budget du ministère de l’intérieur a augmenté de plus de 25 %. Grâce à la loi d’orientation et de programmation du ministère de l’intérieur (Lopmi), des milliers de policiers et de gendarmes supplémentaires seront déployés partout sur le territoire au service de la sécurité de nos concitoyens.
    Au terme de cette période de dix ans, nous n’aurons jamais autant investi dans la transition écologique. Rien qu’en 2024, les dépenses favorables à l’environnement s’élèvent à 40 milliards ; le budget de cette année est historique : il est le plus vert de l’histoire de notre pays. Je le répète, on est loin de l’austérité.
    S’agissant des collectivités territoriales, nous les avons aidées au cours de la période, en augmentant la dotation globale de fonctionnement (DGF), en créant un filet inflation leur permettant de faire face notamment à l’augmentation du coût de l’énergie, en créant le fonds Vert et en étendant le périmètre du fonds de compensation pour la TVA (FCTVA). L’effort qui leur est demandé aujourd’hui n’implique pas une baisse de leurs dépenses : il s’agit simplement de limiter la progression de leurs dépenses de fonctionnement à l’inflation minorée de 0,5 point, soit une hausse de 1,9 % en 2024.
    Pour y arriver, nous devons nous interroger sur l’enchevêtrement des responsabilités, sur l’efficacité de l’action publique et sur la façon d’en réduire le coût. Nous ne maîtriserons pas nos dépenses sans réformes structurelles. Tel sera le sens des conclusions qui seront bientôt présentées par le questeur Éric Woerth. De même, la mission confiée à Boris Ravignon permettra d’étayer les constats relatifs au coût de notre désorganisation collective. Je continuerai de mener un dialogue constant avec les élus locaux de tous bords et de toutes les régions, pour que nous avancions ensemble sur ces réformes, dont nous avons collectivement besoin.
    Quant aux dépenses de sécurité sociale, elles nous ont permis de faire face à la crise sanitaire et de soutenir notre système de santé. En 2023,  l’Ondam – objectif national de dépenses d’assurances maladie – hospitalier a, pour la première fois, dépassé les 100 milliards d’euros et, grâce à la poursuite de nos efforts en 2024, il aura augmenté de 26 millions par rapport à 2017. Depuis cette même date, les dépenses de l’Ondam en faveur du grand âge et du handicap ont augmenté de 11 milliards d’euros pour atteindre 31 milliards en 2024.
    Cette année, nous continuerons de soutenir des réformes structurelles pour plus de travail, plus de croissance et plus de recettes. Ce que je vous décris ici n’a rien à voir avec l’austérité qui fragiliserait la croissance ; c’est la poursuite d’une stratégie économique payante qui s’accompagne d’une gestion sérieuse de nos dépenses publiques.
    Cette stratégie économique, je veux l’assumer, nous y serons fidèles. Nous y serons fidèles parce qu’elle a permis de créer plus de 2 millions d’emplois, de ramener le taux de chômage à 7,5 % – ce trimestre encore, comme les chiffres de l’Insee le montrent, notre économie a créé plus de 50 000 emplois.

    M. Yoann Gillet

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    Il y a encore des millions de chômeurs !

    M. Thomas Cazenave, ministre délégué

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    Nous serons fidèles à cette stratégie parce qu’elle a permis de créer plus de 300 usines partout en France. Nous y serons fidèles tout simplement parce qu’elle a fait ses preuves.
    C’est parce que je suis profondément attaché à la bonne gestion de nos finances publiques que j’ai cette conviction profonde : si nous avons la responsabilité en partage et que des efforts doivent être faits tant par l’État que par les collectivités ou nos entreprises, il est de notre devoir de veiller à ce chacun contribue à sa juste part.
    C’est là que la lutte contre toutes les fraudes prend tout son sens. Depuis mon arrivée au Gouvernement, dans la continuité de l’action menée par Gabriel Attal, j’ai fait de cette lutte ma priorité car c’est le contrat social même qu’elle met en jeu. Notre bilan est très encourageant : depuis l’annonce du plan de lutte contre la fraude fiscale en 2023, quatorze mesures législatives ont été adoptées,…

    M. Yoann Gillet

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    Pour quel résultat !

    M. Thomas Cazenave, ministre délégué

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    …dix mesures réglementaires ont été prises et sept autres sont en cours de mise en œuvre. Il est de notre responsabilité de poursuivre notre offensive, notamment en luttant contre la fraude aux aides publiques. La lutte contre la fraude peut et doit nous rapporter plus.
    Quand certains nous accusent de mener une politique austéritaire, d’autres à l’inverse déplorent à chaque occasion que nous ayons, pendant toutes ces années, trop dépensé. Mais que nous reprochent-ils vraiment ? D’avoir protégé les Français avec le chômage partiel ? Sans cela, les entreprises auraient licencié, le chômage aurait explosé et notre dette serait plus élevée. D’avoir permis à l’ensemble de la population de se tester et de se faire vacciner gratuitement pendant la crise sanitaire ?

    M. Yoann Gillet

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    Cela représente un tiers de la dette !

    M. Thomas Cazenave, ministre délégué

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    Nous reprochent-ils encore ne pas avoir laissé la facture d’électricité des Français exploser lors du choc inflationniste ? De ne faire aucun effort en matière de fonctionnement de l’État ? Rappelons que nous avons réduit les dépenses de fonctionnement de l’État et des opérateurs. Ces efforts en faveur d’un État plus sobre nous ont déjà conduits à réduire l’an dernier de 150 millions la facture énergétique de l’État, à céder pour 280 millions d’euros de biens immobiliers et à diviser par trois en deux ans les dépenses de conseil. Soulignons encore que nous réduisons les dépenses de déplacement et les flottes de véhicules de fonction et que nous fixons des objectifs ambitieux de gains sur les achats de l’État.
    Voici posés, mesdames et messieurs, les termes du débat de ce soir. Malgré les accusations de tous bords que j’entends depuis bientôt dix mois que je suis à la tête du ministère des comptes publics, je reste fidèle à ma détermination de travailler, avec les parlementaires de la majorité comme de l’opposition, pour bâtir avec méthode un projet de budget pour 2025 qui nous permettra d’être à la hauteur de ce qu’attendent nos concitoyens.
    D’ici là, je le redis avec force : ni austérité, ni légèreté. Il est de notre responsabilité politique d’atteindre et de préserver l’équilibre des finances publiques au service de notre avenir.

    M. le président

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    Nous en venons aux questions, dont la durée, comme celle des réponses, est limitée à deux minutes, sans droit de réplique.
    La parole est à M. Alexis Corbière.

    M. Alexis Corbière (LFI-NUPES)

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    Derrière des chiffres froids, il y a des vies. En février, M. Bruno Le Maire a annoncé une purge budgétaire de 10 milliards d’euros. Quelques semaines plus tard, il indiquait aux Français qu’il faudrait faire un effort – mot que vous avez repris, monsieur le ministre – de 12 milliards à 20 milliards d’euros d’économies supplémentaires pour l’année 2025. Mais à qui demandez-vous de consentir cet effort ? Aux grands groupes comme Total, qui a réalisé l’année dernière un bénéfice record de 21,7 milliards ? Non. Aux actionnaires, qui ont reçu 67,8 milliards de dividendes l’année dernière ? Non.
    En revanche, pour l’éducation nationale, vous réclamez une réduction budgétaire de 692 millions d’euros. Le Premier ministre, lors de sa déclaration de politique générale, n’avait-il pas affirmé que pour lui, l’école était « la mère des batailles » et qu’il fallait lui donner tous les moyens nécessaires pour réussir ? J’insiste : tous les moyens pour réussir ! Résultat : 692 millions en moins.
    Aucune précision n’a été apportée au sujet des postes sur lesquels porteront ces économies. Un mail récemment envoyé aux chefs d’établissement leur a notifié une mesure de réduction de dotations des heures supplémentaires effectives – HSE – et des indemnités pour mission particulière, qui permettent pourtant que des heures devant élèves soient effectuées. Devant l’émotion que cette annonce a suscitée, vous avez reculé, mais un flou demeure. Je vous demande donc de nous dire dans cet hémicycle où ces 692 millions vont être pris au sein de l’éducation nationale, à laquelle je limite ma question ; vous avez le devoir d’y répondre.
    Mme Belloubet a assuré dans un premier temps que ces fonds ne seraient ponctionnés que sur les réserves du ministère, puis a fini par avouer devant les syndicats que cette opération ne serait pas indolore. Quand le Premier ministre a déclaré que l’école était la mère des batailles, nous n’avions pas compris que les batailles en question devaient être menées contre l’école publique elle-même. Si vous supprimez 692 millions, les Français comprendront ce qu’il en est de vos priorités. (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NUPES, SOC, Écolo-NUPES et GDR-NUPES.)

    M. le président

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    La parole est à M. le ministre délégué.

    M. Thomas Cazenave, ministre délégué

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    Vous faites bien de rappeler que lorsque nous avons constaté qu’il y aurait 20 milliards de recettes en moins que prévu, nous avons réagi immédiatement. Or moins de recettes, c’est moins de dépenses.

    M. Jocelyn Dessigny

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    Mais non !

    M. Thomas Cazenave, ministre délégué

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    Tout le monde peut le comprendre. Nous en avons informé la représentation nationale et avons pris un décret portant sur l’annulation de 10 milliards de crédits. L’effort, je le précise, ne repose que sur l’État, l’ensemble des ministères étant mis à contribution. Nous avons travaillé finement avec chacun d’entre eux en prenant en compte les sous-exécutions de l’année précédente – tous les crédits alloués ne sont pas forcément dépensés – afin de déterminer comment pouvait être absorbé l’effort demandé, effort qui nous paraît totalement légitime, et c’est peut-être ce qui nous sépare.
    S’agissant de l’éducation nationale, je tiens à rappeler que même après le décret d’annulation, son budget aura augmenté entre 2023 et 2024 de près de 3 milliards d’euros. La mère des batailles, dites-vous ? Oui, c’est bien la mère des batailles : cette hausse des crédits est la preuve que le Gouvernement, le Premier ministre et Président de la République en font une priorité absolue. Les annulations porteront sur 213 millions d’euros hors titre 2 et sur 470 millions d’euros pour ce qui est de la masse salariale, sans remise en question du schéma d’emplois, compte tenu des sous-exécutions constatées chaque année.

    M. le président

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    La parole est à Mme Clémentine Autain.

    Mme Clémentine Autain (LFI-NUPES)

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    Vous imposez 10 milliards d’euros d’annulation de crédits pour 2024, par décret, donc sans vote, et vous annoncez 20 milliards de coupes supplémentaires pour 2025. Comment allez-vous faire ? Jouerez-vous à Am, stram, gram, pic et pic et colégram pour savoir où couper dans les financements et quel service public décimer, quels emplois de la fonction publique supprimer ?
    Puisque vous ne dites jamais ce que vous allez faire, vous contentant de donner des chiffres désincarnés, je vais me référer à la comptabilisation concrète opérée par le collectif Nos services publics. C’est ainsi que les 690 millions dans l’éducation correspondent à la suppression de 436 écoles primaires, de 54 collèges et à la fin de l’accompagnement de 14 000 élèves en situation de handicap. Quant au milliard en moins pour le dispositif MaPrimeRénov’, cela représente 100 000 à 150 000 logements non rénovés, soit le nombre de logements d’une ville comme Rennes ou Lille. Pour ce qui est de la recherche et de l’enseignement supérieur, 900 millions en moins, c’est l’équivalent de 1 500 projets de recherche non financés ou de la suppression d’un tiers de cours pour chaque étudiant en licence. Enfin, pour le travail et l’emploi, l’annulation de 1 milliard de crédits, c’est 130 000 aides à l’embauche supprimées, un poste d’apprenti sur trois affecté dans l’enseignement secondaire. Tout cela est considérable !
    Le budget de la France, ce n’est pas du vent. Ces suppressions appellent des décisions précises. Ma question est simple : qui va trinquer ? (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NUPES, SOC, Écolo-NUPES et GDR-NUPES.)

    M. le président

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    La parole est à M. le ministre délégué.

    M. Thomas Cazenave, ministre délégué

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    Je tiens à préciser le cadre dans lequel nous avons procédé à cette annulation. Vous soulignez qu’elle a été faite par décret, sans vote du Parlement. Or nous n’avons fait qu’appliquer la loi organique relative aux lois de finances issue d’une proposition de loi, donc d’une initiative parlementaire, voulue à une très large majorité. Son article 14 prévoit que le montant des crédits annulés peut aller jusqu’à 1,5 % des crédits ouverts par les lois de finances afférentes à l’année en cours. Pourquoi ? Justement pour faire face aux aléas, aux incertitudes, aux événements nouveaux. Nous n’avons donc fait qu’appliquer strictement cet article – et encore le plafond nous aurait-il permis d’aller jusqu’à 12 milliards, mais nous en sommes restés à 10 milliards.
    Je comprends que vous ne partagiez pas notre choix de réduire les dépenses publiques mais ne nous accusez pas de ne pas respecter un cadre que le Parlement a lui-même fixé.

    M. Alexis Corbière

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    Et le 49.3 ?

    M. Thomas Cazenave, ministre délégué

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    Non, il s’agit de la Lolf.

    M. Alexis Corbière

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    Peut-être, mais le budget, lui, a été imposé par 49.3 !

    M. Thomas Cazenave, ministre délégué

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    Vous parlez de coupes claires auxquelles nous procéderions dans le budget de l’État. Sachez qu’entre 2019 et 2023, les dépenses de l’État ont augmenté de 100 milliards. La crise passée, il est légitime que nous repassions progressivement à un mode plus normal de gestion de nos finances publiques.
    S’agissant de MaPrimeRénov’, les crédits n’ont pas été totalement dépensés l’année dernière.

    Mme Eva Sas

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    C’est un problème !

    M. Thomas Cazenave, ministre délégué

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    Mettre beaucoup d’argent dans un tel dispositif ne suffit pas. Il faut des artisans formés, vous le savez très bien.

    Mme Clémentine Autain

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    En effet !

    M. Thomas Cazenave, ministre délégué

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    Rien ne sert de se faire plaisir avec des montants très élevés si l’on ne peut leur donner une traduction dans la réalité. Après cette annulation, le budget de MaPrimeRénov’ continuera à augmenter de 800 millions d’euros.

    M. Jocelyn Dessigny

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    Arrêtez les mensonges !

    M. Alexis Corbière

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    On réclame 350 millions pour la seule Seine-Saint-Denis !

    M. le président

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    La parole est à M. Gérard Leseul.

    M. Gérard Leseul (SOC)

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    Par cette annulation de 10 milliards d’euros, le Gouvernement engage une politique d’austérité sans l’assumer. Depuis l’annonce de cette coupe dans le budget de la nation, votre gouvernement n’a de cesse de tenter d’en minimiser ou d’en taire les effets. Vous essayez de nous faire croire que ces gros coups de rabot n’auraient aucun effet sur le quotidien de nos concitoyens, notamment les plus fragiles, mais c’est faux. Personne n’est dupe. Contrairement à ce que vous voulez faire croire aux Français, cette suppression aura un impact bien réel dans leur vie quotidienne.
    Alors que la rénovation énergétique des bâtiments est essentielle, votre coup de rabot se traduit par une baisse du budget de MaPrimeRénov’ de 1 milliard d’euros sur les 5 milliards d’euros prévus au budget 2024. Concrètement, plusieurs centaines de ménages ne pourront financer l’isolation thermique de leur logement ou l’installation d’une pompe à chaleur.
    À y regarder de plus près, l’acte 1 de votre cure d’austérité sélective se traduit par une baisse de 1,1 milliard d’euros pour le ministère de l’emploi, dont 863 millions au titre du programme Accompagnement des mutations économiques et développement de l’emploi, qui permet de prévenir les licenciements et d’aider concrètement au reclassement des salariés licenciés.
    Dans ma circonscription, à Port-Jérôme et à Lillebonne, l’entreprise Exxon Mobil a annoncé l’arrêt de son activité chimie et la suppression de 647 emplois, qui risque d’entraîner la destruction totale de plus de 4 000 emplois induits dans le territoire et la baisse des ressources fiscales des collectivités locales. Si rien n’est fait, c’est une austérité programmée qui se dessine pour tout le territoire, alors que l’entreprise est largement bénéficiaire au niveau national comme au niveau mondial.
    En parallèle des annonces austéritaires sélectives du Gouvernement et de certaines entreprises, des groupes du CAC40 réalisent des profits tellement mirifiques qu’ils financent le rachat d’actions pour favoriser la survaleur actionnariale au lieu de favoriser l’économie circulaire, l’emploi et les sous-traitants locaux.
    Alors que plusieurs membres de votre majorité ont pris position en faveur du rétablissement de l’ISF ou d’une taxation, même temporaire, des superprofits, vous vous obstinez à refuser ces options, préférant rogner sur la solidarité nationale – sécurité sociale, allocations chômage, allocation de logement sociale, éducation. Ma question est simple : alors que la théorie du ruissellement est un échec cuisant, quand allez-vous nous écouter et instaurer une taxation des superprofits ? L’austérité n’est pas une fatalité, mais c’est malheureusement votre choix politique.

    M. le président

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    La parole est à M. le ministre délégué.

    M. Thomas Cazenave, ministre délégué

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    Nous avons fait le choix de concentrer les 10 milliards d’euros de réduction de dépenses sur l’État, considérant qu’il était normal que nous soyons les premiers à faire les efforts nécessaires. Les dépenses consacrées à la transition écologique, contrairement à ce que vous affirmez, vont progresser, après le décret d’annulation, de plus de 8 milliards d’euros entre 2023 et 2024. De plus, je répète que les aides à la rénovation énergétique accordées par l’Agence nationale de l’habitat (Anah) vont augmenter de 800 millions d’euros. Le budget 2024 demeure donc le budget le plus vert de notre histoire : 40 milliards d’euros consacrés aux dépenses en faveur de la transition écologique, même après le décret d’annulation.
    S’agissant des dépenses en faveur des politiques de l’emploi, elles sont passées entre 2014 et 2024 de 15 à 21 milliards d’euros. En 2024, après le décret d’annulation, nous y consacrerons 450 millions d’euros de plus par rapport aux dépenses de 2023. C’est la raison pour laquelle le terme d’austérité fausse notre débat. Nous ne faisons qu’ajuster nos dépenses par rapport à l’évolution de nos recettes, sans remettre en cause l’équilibre de notre budget.
    Enfin, nous avons dit que nous sommes prêts à étudier la taxation des superprofits pour les énergéticiens, compte tenu du faible rendement de la contribution sur la rente inframarginale. Des députés de la majorité y travaillent et nous sommes prêts, comme en matière de rachat d’actions, à évoluer sur le sujet.

    M. Gérard Leseul

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    Vous mettez beaucoup de temps à travailler !

    M. le président

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    La parole est à M. Nicolas Sansu.

    M. Nicolas Sansu (GDR-NUPES)

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    Tout d’abord, je m’inquiète de l’absence de réponse à la question que je vous pose pour la quatrième fois : allez-vous maintenir l’indexation sur l’inflation des pensions de retraite et des allocations sociales en 2025 ? Je crains que l’absence de réponse ne vaille réponse…
    J’avais prévu de m’attarder sur les difficultés des collectivités territoriales consécutives à vos choix de réduire les soutiens à l’investissement, qui constituent une ineptie devant l’urgence écologique, sociale et démocratique. Vous estimez que les collectivités locales, en premier lieu le bloc communal, devraient participer à la réduction du déficit. Mais les collectivités locales, vous le savez, ont des budgets de fonctionnement en équilibre et des budgets d’investissement dont la dette est stable : elles ne sont donc pour rien dans l’aggravation du déficit public.
    Néanmoins, ma question sera tout autre et je souhaiterais que vous puissiez y répondre.

    M. Jocelyn Dessigny

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    Ce n’est pas gagné !

    M. Nicolas Sansu

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    Venue de nombreux bancs de notre assemblée, monte l’exigence d’une contribution sur les hauts patrimoines pour financer la transition écologique. Cette disposition qui, de Gabriel Zucman aux auteurs Jean Pisani-Ferry et Selma Mahfouz, d’Oxfam à la plateforme Tax the Rich, fait consensus, sera soutenue par plusieurs groupes dans le cadre du projet de loi de finances pour 2025. De même, une proposition de loi visant à lutter contre les mécanismes d’optimisation et d’évasion fiscales sur les dividendes versés, qu’on appelle CumCum et CumEx, a été déposée et se trouve sur le bureau de l’Assemblée.
    Ma question est simple : quelle est la position du Gouvernement sur ces deux sujets, à savoir la contribution exceptionnelle sur les revenus pour financer la transition écologique et la lutte contre les CumCum et CumEx ? (Applaudissements sur les bancs des groupes SOC et Écolo-NUPES.)

    M. le président

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    La parole est à M. le ministre délégué.

    M. Thomas Cazenave, ministre délégué

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    Je vous referai la même réponse : il y a quelques mois, nous avons procédé à la revalorisation des pensions de retraite en les indexant sur l’inflation, soit une augmentation de 5,3 % – 13 milliards d’euros – qui a permis de protéger les retraités contre l’inflation. Les prestations sociales ont elles aussi été indexées, ce qui représente un effort de 19 milliards d’euros.
    Vous m’interrogez sans arrêt sur le projet de loi de finances pour 2025. Nous aurons l’occasion d’en débattre, car vous savez que des rendez-vous sont prévus à ce sujet.
    S’agissant des dotations d’investissement pour les collectivités, je ne peux pas vous laisser dire ce que vous avez dit.

    M. Nicolas Sansu

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    Si.

    M. Thomas Cazenave, ministre délégué

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    On n’a jamais autant aidé les collectivités territoriales ! (Exclamations sur les bancs du groupe RN.)

    Mme Yaël Menache

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    C’est une honte !

    M. Thomas Cazenave, ministre délégué

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    De quand date la création du fonds Vert avec ses 2 milliards d’euros ? Oui, c’était il y a deux ans. Et nous n’aurions fait aucun effort ? Quand il a fallu mettre les collectivités territoriales à contribution pour plus de 10 milliards d’euros sur la dotation globale de fonctionnement, je crois d’ailleurs qu’on ne vous a pas entendu à l’époque.

    M. Nicolas Sansu

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    Moi ? Vous plaisantez ?

    M. Thomas Cazenave, ministre délégué

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    C’est un « vous » général, monsieur le député.
    J’en viens à la lutte contre la fraude fiscale : elle a produit 15 milliards d’euros de constatations et de redressements, grâce à une hausse de 25 % des contrôles fiscaux. Vous savez que la lutte contre la fraude fiscale, sociale et douanière est notre priorité et je serais ravi d’en débattre avec vous. Nous sommes preneurs de vos propositions.
    S’agissant enfin de la contribution sur les plus riches, Bruno Le Maire et moi-même nous sommes déclarés favorables à une initiative internationale, européenne, comme nous l’avons fait pour l’impôt sur les sociétés des multinationales, pour taxer celles et ceux qui échappent à l’impôt.

    M. Nicolas Sansu

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    Et la lutte contre les CumCum et les CumEx ?

    M. le président

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    La parole est à Mme Eva Sas.

    Mme Eva Sas (Écolo-NUPES)

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    Monsieur le ministre, vous répétez à qui veut l’entendre que la France n’a jamais autant dépensé pour l’écologie. On a envie de vous répondre : encore heureux ! Qui pourrait imaginer qu’on dépense moins qu’il y a dix ans pour l’écologie alors que les conséquences du dérèglement climatique sont là et que nous n’avons que quelques années pour agir ? Mais, vous le savez, votre effort n’est pas du tout à la mesure de cet enjeu historique : selon le rapport de Selma Mahfouz et Jean Pisani-Ferry sur les incidences économiques de l’action pour le climat, les financements publics supplémentaires nécessaires devraient être portés à 34 milliards d’euros, dont on peut estimer que les deux tiers doivent être engagés par l’État.
    Or, à rebours de l’histoire, vous avez clairement décidé de sacrifier l’écologie sur l’autel de l’orthodoxie budgétaire. Sur les 10 milliards d’euros de coupes budgétaires décidées par décret en février dernier, 2,2 milliards concernaient le budget de l’écologie : 1 milliard sur MaPrimeRénov, 341 millions sur les infrastructures de transport, 430 millions sur le fonds Vert. Concrètement, ce sont des actions de végétalisation dans les villes, de protection contre les incendies et les inondations, des rénovations thermiques d’écoles qui ne seront pas réalisées.
    Dans la deuxième tranche de 10 milliards prévue dès cette année, les premières informations sont parues aujourd’hui, faisant état de nouvelles coupes à venir dans le budget de l’écologie – entre 1 et 1,4 milliard d’euros. Ma question est simple : confirmez-vous que vous prévoyez de nouvelles coupes budgétaires, une fois de plus sur le budget de l’écologie ? Êtes-vous conscient que vous laissez les Français seuls et désarmés face aux conséquences du dérèglement climatique, au moment où ils ont le plus besoin d’être accompagnés ? (Applaudissements sur les bancs des groupes SOC et GDR-NUPES.)

    M. le président

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    La parole est à M. le ministre délégué.

    M. Thomas Cazenave, ministre délégué

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    La lecture des chiffres du budget constitue décidément un point de désaccord entre nous. Ce n’est pas le Gouvernement qui a fixé la méthodologie qui nous permet de retracer finement dans le budget de l’État les dépenses dites vertes, celles qui contribuent directement à la transition écologique. En examinant ensemble ce budget, nous constaterions que plus de 40 milliards d’euros de nos dépenses sont directement dédiés à la transition écologique, soit une augmentation de 8 milliards. Ce n’est quand même pas rien, 8 milliards ! Vous voudriez probablement plus, c’est en tout cas ce que j’ai cru comprendre dans vos différentes prises de parole.

    Mme Eva Sas

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    Ce n’est pas moi qui le dis, c’est le rapport de Selma Mahfouz et Jean Pisani-Ferry !

    M. Thomas Cazenave, ministre délégué

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    Les dépenses liées à MaPrimeRénov’ augmentent et le budget vert, qui n’existait pas auparavant, accompagne notamment la végétalisation des villes et la rénovation de nos écoles. Répondant à une demande des collectivités territoriales, nous avons élargi le FCTVA aux dépenses d’aménagement de terrain, pour plus de 250 millions d’euros. C’est pourquoi je ne peux pas vous laisser dire que nous laisserions les Français seuls face à l’enjeu de la transition écologique et du réchauffement climatique, alors que nous investissons comme jamais dans la rénovation énergétique, que nous soutenons la biodiversité et que nous avons réformé la politique de l’eau. Notre action porte sur tous les champs de la transition écologique.
    Enfin, il n’y aura pas de nouveau décret d’annulation. Les 10 milliards d’euros supplémentaires seront obtenus, à la fois par la mise à contribution des réserves de précaution des ministères. Dans le ministère de la transition écologique, de nombreux opérateurs possèdent une trésorerie qui peut être utilisée pour faire des efforts. Nous allons aussi demander aux collectivités territoriales de ralentir leurs dépenses et un travail sur les recettes est engagé par les parlementaires de la majorité. Tous ces leviers permettront d’atteindre les 10 milliards d’euros supplémentaires, pour tenir notre engagement de ramener le déficit à 5,1 % du PIB cette année.

    M. le président

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    La parole est à M. Stéphane Vojetta.

    M. Stéphane Vojetta (RE)

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    Face au ralentissement économique en France et en Allemagne, le Gouvernement s’est engagé à rétablir nos comptes publics, avec l’objectif de revenir sous les 3 % de déficit d’ici à 2027, puis d’atteindre l’équilibre des comptes publics en 2032. Les marchés financiers et les agences de notation expriment leur confiance en notre capacité à tenir cette trajectoire exigeante. Nous devrons en faire bon usage.
    Le titre absurde du débat proposé ce soir par le groupe La France insoumise sur le thème de « l’austérité imposée par le Gouvernement » m’a personnellement ramené à l’année 2012. À l’époque déjà, je vivais parmi les Français d’Espagne qui, aujourd’hui, ne pourraient que sourire en lisant cette question. Austérité, sérieusement ? Les mots ont un sens, chers collègues. Alors permettez-moi de vous rappeler ce qu’est l’austérité budgétaire.
    En Espagne, à la suite de la crise des subprimes, devenue crise immobilière, puis crise bancaire, puis crise de la dette publique, après trois ans de récession et d’application d’un plan de rigueur engagé par un gouvernement socialiste, la part des dépenses publiques dans le PIB était passée de 46,3 % à 41,6 %, soit une réduction de cinq points en trois ans : c’est cela, l’austérité. Aujourd’hui, en France – vous l’avez rappelé, monsieur le ministre –, les dépenses publiques représentent 57 % du PIB. Pour la seule année 2012, les budgets des ministères espagnols furent réduits de 17 % en moyenne et un énième plan d’austérité était annoncé : réduction du nombre de jours de congé des fonctionnaires, augmentation du taux de TVA de trois points, de nombreux produits passant du taux réduit de 8 % à 21 % : c’est cela, l’austérité. Par ailleurs, la stratégie espagnole visant à restaurer la compétitivité provoqua également une baisse des salaires réels par tête. Malgré cela, le taux de chômage en Espagne atteignit en 2012 plus de 25 % en moyenne, 55 % chez les jeunes de moins de 25 ans, et les indemnités chômage passèrent de 60 % à 50 % du dernier salaire : c’est cela, l’austérité.
    Alors, chers collègues mélenchonistes et lepénistes, vous devriez cesser de parler d’austérité, sinon quel mot vous restera-t-il pour qualifier les sacrifices auxquels vous devrez rapidement soumettre tous les Français si nous avions le malheur de vous voir un jour présider à la politique économique de notre pays ? Monsieur le ministre, ma question est simple : comment qualifieriez-vous notre politique économique et budgétaire actuelle, qui est tout sauf une politique d’austérité ?

    M. le président

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    La parole est à M. le ministre délégué.

    M. Thomas Cazenave, ministre délégué

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    Comme M. Vojetta, que je remercie, je ne comprends pas le titre du débat. Vous auriez pu le dire aux députés du groupe La France insoumise, mais ils n’assistent même pas à la fin du débat organisé à leur demande !
    Je partage votre point de vue : comment affirmer sérieusement que nous menons une politique d’austérité ? Vous rappeliez l’exemple espagnol que vous connaissez très bien. Je pourrais évoquer l’exemple de la Grèce, où la dépense de l’État a chuté de plus de 20 % entre 2013 et 2014 ! Avec 10 milliards de réduction de dépenses sur un budget de 1 600 milliards, nous en sommes très loin.
    En revanche, nous sommes très fiers de nos résultats en matière de politique économique. (M. Jocelyn Dessigny rit.) Vous pouvez ricaner sur les bancs du Rassemblement national, mais il n’empêche : quand vous créez plus de 2 millions d’emplois, que le taux de chômage est de 7,5 % et que vous restez le pays le plus attractif d’Europe… Je comprends que cela vous déplaise : vous vivez du malheur des autres, donc la réussite vous déplaît manifestement. Je le regrette. (Exclamations sur les bancs du groupe RN.)

    M. le président

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    La parole est à M. Matthieu Marchio.

    M. Matthieu Marchio (RN)

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    Incapable de rassembler une majorité autour d’un projet de loi de finances rectificative, votre gouvernement s’attaque par décret à la santé des Français pour faire des économies. À partir du 15 mai, pour chaque consultation et chaque acte médical, ce n’est plus 1 euro, comme à présent, mais 2 euros qui resteront à la charge du patient. Cette mesure scandaleuse fait suite au doublement des franchises médicales sur les boîtes de médicaments et s’appliquera aux affections de longue durée (ALD). Une fois de plus, vous vous en prenez aux Français qui souffrent.
    Alors que vous demandez un effort supplémentaire à des millions de Français qui ne peuvent déjà plus se soigner, nous apprenons qu’un individu entré clandestinement en France et bénéficiaire de l’aide médicale de l’État (AME), lui, ne verra pas son reste à charge augmenter. On l’a compris, pour se soigner dans la France de Macron, il vaut mieux être clandestin que Français.
    Pire encore, toujours par décret, vous envisagez de demander aux patients bénéficiant d’une ambulance ou d’un taxi remboursé d’avancer les frais. À partir de 2025, ils devront même payer une pénalité. Vous faites donc des économies sur le dos des Français qui souffrent de graves maladies et qui peuvent revenir par exemple d’une dialyse ou d’une séance de chimiothérapie.

    M. Thomas Cazenave, ministre délégué

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    C’est faux !

    M. Matthieu Marchio

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    Pour se soigner dans la France de Macron, il vaut mieux être riche que pauvre.
    Le manque d’humanité de ce gouvernement envers les personnes gravement malades n’est pas très étonnant lorsqu’on sait qu’une de ses ministres a osé comparer l’attente d’une nomination ministérielle à celle des résultats du diagnostic d’un cancer. Quelle honte !
    Je rappelle l’alinéa 11 du préambule de la Constitution de 1946 : « [La nation] garantit à tous, notamment à l’enfant, à la mère et aux vieux travailleurs, la protection de la santé. » Ma question est simple : quand cesserez-vous de mener une politique d’austérité sur le dos des Français qui souffrent ? (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)

    Mme Yaël Menache

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    Bravo !

    M. le président

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    La parole est à M. le ministre délégué.

    M. Thomas Cazenave, ministre délégué

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    Nous clôturons le débat en beauté ! Après nous avoir accusés de ne pas savoir tenir les comptes publics, vous vous montrez incapables de soutenir la moindre mesure d’économie. En outre, vous formulez des contrevérités manifestes. Contrairement à ce que vous affirmez, nous protégeons bien sûr les patients souffrant d’ALD contre l’augmentation des franchises et des participations forfaitaires. En effet, leur cas est couvert par un forfait qui, lui, n’évolue pas, destiné aux patients dont la situation exige des visites médicales et des prescriptions régulières.
    Vous qui défendez un programme économique qui mènerait notre pays à la ruine…

    M. Jocelyn Dessigny

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    Pas de leçons de morale !

    M. Thomas Cazenave, ministre délégué

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    Je ne vous fais pas une leçon de morale, je rappelle des faits : vous voulez exonérer d’impôt sur le revenu les moins de 30 ans,…

    M. Matthieu Marchio

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    On est ici pour parler de vous !

    Mme Yaël Menache

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    C’est de votre bilan qu’on parle !

    M. Thomas Cazenave, ministre délégué

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    …nationaliser les autoroutes et baisser la TVA. Vous ne proposez aucun financement pour les 100 milliards d’euros que coûteraient ces mesures, sinon celui que vous voulez tirer de l’étranger, votre obsession. Vous pensez qu’il suffira à financer ces dépenses ! Vous n’êtes pas crédibles en matière de finances publiques.

    Mme Yaël Menache

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    Parce que vous, vous l’êtes ?

    M. le président

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    La parole est à M. Jocelyn Dessigny.

    M. Jocelyn Dessigny (RN)

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    Nous avons eu hier un débat similaire, lors duquel vous n’avez pas voulu répondre à mes questions. Je vais donc les réitérer. Qu’avez-vous fait de l’argent des Français ?
    Vous parlez de lutte contre la fraude, mais vous savez pertinemment que vous n’avez rien fait en la matière, comme nous l’avons vu lors d’une récente semaine de contrôle où nous vous avons interrogé à ce sujet.

    M. Thomas Cazenave, ministre délégué

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    C’est faux !

    M. Jocelyn Dessigny

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    Vous n’avez pas été au rendez-vous et vous avez esquivé les questions que nous vous posions.
    Vous parlez des collectivités territoriales, mais vous les avez mises sous perfusion. Les départements sont en souffrance. Pour la première fois de son existence, le département de l’Aisne, dans lequel je suis élu, déposera cette année un budget en déséquilibre. Le président du conseil départemental est pourtant le secrétaire de Départements de France chargé des finances. La faute n’en est donc pas à une mauvaise gestion, mais aux transferts de compétences que vous n’avez pas assumés pleinement et qui mettent les collectivités territoriales en grave difficulté.
    Interrogé sur votre budget vert, vous vantez les 10 milliards d’économies réalisées par décret, mais vous savez pertinemment, comme je vous l’ai rappelé encore hier, qu’il s’agit là de fausses économies. En effet, vous aviez volontairement surévalué les budgets en question pour pouvoir ensuite en réduire les dépenses.
    Vous n’êtes pas au rendez-vous, monsieur le ministre. Votre bilan est éloquent. Vous allez demander des efforts aux collectivités territoriales, alors qu’elles sont les seules à rendre systématiquement un budget à l’équilibre. Quant à vous, vous présentez chaque année un budget en déséquilibre, depuis toujours ! Vous faites partie d’un gouvernement qui a porté à 3 000 milliards d’euros la dette de la France ; Emmanuel Macron, votre ministre Bruno Le Maire et vous-même êtes directement responsables de 900 millions – pardon, 900 milliards d’euros de dette. Les chiffres sont si considérables qu’on s’y perd !
    Je n’ai pas de question à vous poser, mais une demande à vous faire : ne nous donnez pas de leçons de morale. Quand on est le dernier de la classe, on a l’humilité de rester à sa place ! (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)

    Mme Yaël Menache

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    Bravo !

    M. le président

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    La parole est à M. le ministre délégué.

    M. Thomas Cazenave, ministre délégué

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    M. Dessigny ne m’a pas posé de question mais s’est livré à un commentaire libre, qui appellera de ma part un commentaire tout aussi libre. Je pense que vous faites semblant de ne pas comprendre mes réponses. En matière de lutte contre la fraude, par exemple, nous avons présenté nos résultats. Ainsi, nous avons augmenté de 50 % les recouvrements d’argent liés au travail dissimulé. Ces chiffres sont publics. Quant à la fraude fiscale, notre taux de recouvrement a augmenté de plus de 20 %.

    M. Jocelyn Dessigny

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    Ce n’est pas grand-chose !

    M. Thomas Cazenave, ministre délégué

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    Je sais que ces chiffres ne vous conviennent pas : vous préféreriez que nos mesures ne marchent pas (Exclamations sur les bancs du groupe RN),…

    M. Jocelyn Dessigny

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    Non, on préférerait qu’elles marchent !

    M. Thomas Cazenave, ministre délégué

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    …que nous n’ayions pas créé 2 millions d’emplois en France, que le taux de chômage soit très élevé et que nous n’attirions aucun investisseur étranger. Je vous comprends, car vous êtes ici en campagne électorale, et c’est probablement pourquoi vous n’avez aucune question à me poser.

    Mme Yaël Menache

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    N’importe quoi !

    M. Jocelyn Dessigny

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    Vous en parlerez aux ouvriers qui sont au chômage à cause de vous !

    M. Thomas Cazenave, ministre délégué

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    En revanche, lors de ce débat ou des précédents, je ne vous ai jamais entendu nous proposer de mesures d’économie.

    Mme Yaël Menache

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    On a un programme, il faut le lire !

    M. Jocelyn Dessigny

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    M. Gillet vous a donné nos propositions tout à l’heure !

    M. Thomas Cazenave, ministre délégué

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    Bien au contraire, quand nous faisons des économies, vous les estimez absolument insupportables, comme vient de le dire M. Marchio à propos des franchises médicales.

    Mme Yaël Menache

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    Il faut nous écouter et prendre des leçons !

    M. Thomas Cazenave, ministre délégué

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    Où sont vos mesures d’économie, à part la suppression de l’AME, qui ne rapporterait guère que 1 milliard d’euros ? Ce n’est pas avec cela que nous allons redresser les comptes publics ! Je crois que vous le savez, monsieur le député, aussi n’ai-je rien à ajouter à ce débat. Je pense avoir expliqué notre stratégie et démontré l’efficacité économique de la politique que nous menons depuis 2017.

    Mme Yaël Menache

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    Ah oui, cela se voit !

    M. le président

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    Le débat est clos.

    2. Ordre du jour de la prochaine séance

    M. le président

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    Prochaine séance, lundi 13 mai, à seize heures :
    Discussion, sur le rapport de la commission mixte paritaire, de la proposition de loi améliorant l’efficacité des dispositifs de saisie et de confiscation des avoirs criminels ;
    Discussion du projet de loi constitutionnelle, adopté par le Sénat, portant modification du corps électoral pour les élections au Congrès et aux assemblées de province de la Nouvelle-Calédonie.
    La séance est levée.

    (La séance est levée à vingt-deux heures cinquante.)

    Le directeur des comptes rendus
    Serge Ezdra