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N° 1591 rect.

______

 

ASSEMBLÉE   NATIONALE

 

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DIX-SEPTIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 18 juin 2025.

 

 

 

RAPPORT SUPPLÉMENTAIRE

 

 

 

FAIT

 

 

 

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES ET DE L’ÉDUCATION SUR LA PROPOSITION de loi, adoptÉe par le sÉnat,

relative à la réforme de l’audiovisuel public et à la souveraineté audiovisuelle,

 

 

 

 

Par Mme Virginie DUBY-MULLER et M. Jérémie PATRIER-LEITUS,

 

 

Députés.

 

——

 

 

 

 

Voir les numéros :

Sénat  545, 693, 694 et T.A. 132 (2022‑2023).

Assemblée nationale :  118, 1266.


  SOMMAIRE

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Pages

Avant-propos

examen des articles

Chapitre Ier Réforme de l’audiovisuel public

Article 1er Création de la société holding France Médias et transformation de l’Institut national de l’audiovisuel en société anonyme

Article 1er bis Inscription des missions de TV5 Monde dans la loi du 30 septembre 1986

Article 1er ter (nouveau) Inscription dans la loi des garanties statutaires d’ARTE-France résultant du traité du 2 octobre 1990 instituant une chaîne culturelle européenne

Article 2 Détention par l’État de l’intégralité du capital de la société holding  France Médias

Article 2 bis (nouveau) Nouvelle gouvernance du secteur public de l’audiovisuel

Article 2 ter (nouveau) Composition du conseil d’administration de l’Institut national de l’audiovisuel

Article 3 Nomination des présidents-directeurs généraux de France Médias et France Médias Monde, conditions de retrait de leur mandat, dispositions relatives au fonctionnement des conseils d’administration des sociétés de l’audiovisuel public

Article 4 Dispositions de coordination au sein de la loi du 30 septembre 1986

Article 5 Création des conventions stratégiques pluriannuelles et allocation des ressources de l’audiovisuel public

Article 6 Dispositions de coordination au sein de la loi du 30 septembre 1986

Article 7 Transformation de l’INA en société anonyme

Article 8 Création de la société France Médias et mise en place de sa gouvernance

Article 9 Date d’entrée en vigueur des dispositions relatives à l’audiovisuel public

Chapitre II Préservation de notre souveraineté audiovisuelle

Article 10 (supprimé) Évènements sportifs d’importance majeure

Article 11 (supprimé) Définition des services d’intérêt général et de leur visibilité appropriée

Article 11 bis A (supprimé) Part minimale d’investissement consacrée à l’information

Article 11 bis (supprimé) Modernisation de la plateforme TNT avec l’expérimentation de l’ultra-haute définition (UHD)

Article 11 ter (supprimé) Exemption des services distribués par contournement de l’obligation de reprise du signal

Article 12 (supprimé) Conditions d’autorisation par l’Arcom d’un changement dans le contrôle du capital d’une chaîne autorisée par convention à émettre sur la TNT

Article 12 bis (supprimé) Mesures d’audience par des organismes tiers

Article 13 (supprimé) Exclusion des mandats de commercialisation de la définition de la production audiovisuelle indépendante

Article 13 bis (supprimé) Autorisation d’une troisième coupure publicitaire pour la diffusion des œuvres cinématographiques et audiovisuelles de longue durée et la diffusion de bandes annonces pour les programmes

Article 14 (supprimé) Développement des services interactifs sur la TNT

Article 14 bis (supprimé) Développement de l’ultra haute définition

Article 15 (supprimé) Développement de la radio numérique terrestre

Article 16 (nouveau) Remise d’un rapport au Parlement

TRAVAUX DE LA COMMISSION

Réunion du mardi 17 juin 2025 à 16 heures 30

Réunion du mardi 17 juin 2025 à 21 heures

Réunion du mercredi 18 juin 2025 à 9 heures 30

Annexe : textes susceptibles d’être abrogés ou modifiés à l’occasion de l’examen de la proposition de loi

 


    

   Avant-propos

Lors de sa seconde réunion du mardi 8 avril 2025, la commission des affaires culturelles et de l’éducation a pris acte qu’elle n’était pas en mesure d’achever l’examen de la proposition de loi adoptée par le Sénat, relative à la réforme de l’audiovisuel public et à la souveraineté audiovisuelle (n° 118) ([1]). En effet, à minuit, il lui restait encore 1 538 amendements à examiner. Dans la mesure où la proposition de loi était inscrite à l’ordre du jour du vendredi 11 avril 2025, il était impossible à la commission d’achever ses travaux dans des délais compatibles avec un examen en séance publique aussi proche. La proposition de loi a finalement été retirée de l’ordre du jour le 9 avril. Depuis, elle a été réinscrite par le gouvernement à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale des lundi 30 juin et mardi 1er juillet 2025, soit le dernier jour de la session ordinaire 2024-2025 et le premier jour de la session extraordinaire de juillet. Dès lors, la commission s’est réunie les mardi 17 et vendredi 18 avril 2025 pour reprendre, et achever, l’examen de la proposition de loi commencé en avril.

Le présent rapport supplémentaire a pour objet de compléter le rapport n° 1266 d’avril 2025 ([2]), qui contenait les commentaires détaillés des articles de la proposition de loi, par la présentation des modifications apportées au texte par la commission.


   examen des articles

Chapitre Ier
Réforme de l’audiovisuel public

Article 1er
Création de la société holding France Médias et transformation de l’Institut national de l’audiovisuel en société anonyme

L’article premier crée la société holding France Médias, qui serait notamment chargée de définir les orientations stratégiques des sociétés France Télévisions, Radio France, France Médias Monde et Institut national de l’audiovisuel (INA). Il transforme à cet effet celui-ci en société commerciale afin de lui permettre d’intégrer le périmètre de la holding. Enfin, il élargit la possibilité pour les sociétés de l’audiovisuel public de créer des filiales.

La commission a adopté vingt-deux amendements à l’article premier, dont neuf amendements rédactionnels, de précision ou de coordination.

Contre l’avis des rapporteurs, la commission a adopté un amendement du gouvernement ([3]), ainsi que plusieurs amendements identiques, visant à exclure la société nationale de programme France Médias Monde du périmètre de la société holding France Médias. Si les rapporteurs ont donné un avis défavorable à ces amendements, ils ne se sont en revanche pas opposés aux amendements poursuivant le même objectif au sein des articles ultérieurs de la proposition de loi, par souci de cohérence rédactionnelle.

La commission a adopté deux amendements identiques de M. Frédéric Maillot ([4]) et de Mme Sophie Taillé-Polian, précisant que la société holding France Médias garantit l’indépendance et la liberté éditoriales de ses filiales. Les rapporteurs ont donné un avis défavorable à ces deux amendements. En effet, l’indépendance et la liberté éditoriales des sociétés nationales de programme et de l’Institut national de l’audiovisuel sont déjà garanties par la loi et par le cahier des charges de ces organismes. De plus, la société holding sera un outil de coordination de l’action des filiales, d’impulsion d’actions communes, et n’aura pas vocation à surveiller au quotidien la ligne éditoriale des différentes rédactions. Dès lors, l’adoption de ces deux amendements apparaissait superfétatoire.

Suivant l’avis des rapporteurs, la commission a adopté un amendement du gouvernement ([5]) introduisant dans l’objet social de la société holding la possibilité de créer des filiales pour la conduite de ses actions communes.

La commission a adopté un amendement de Mme Céline Calvez ([6]), précisant que l’INA contribue à l’innovation et à la recherche « notamment sur l’impact et les opportunités de l’intelligence artificielle ». Cet amendement a reçu un avis favorable des rapporteurs.

Suivant l’avis des rapporteurs, la commission a adopté un amendement du gouvernement ([7]), prévoyant que le président-directeur général de la société France Médias est également le président-directeur général ou le président du directoire de chacune des filiales éditrices de services. L’amendement garantit également la représentation de l’État dans les conseils d’administration de ces sociétés.

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Article 1er bis
Inscription des missions de TV5 Monde dans la loi du 30 septembre 1986

L’article 1er bis insère dans la loi du 30 septembre 1986 un article 44-2 consacré à la société TV5 Monde. Il en définit les missions et le fonctionnement.

La commission a adopté un amendement rédactionnel des rapporteurs.

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Article 1er ter (nouveau)
Inscription dans la loi des garanties statutaires d’ARTE-France résultant du traité du 2 octobre 1990 instituant une chaîne culturelle européenne

L’article 1er ter modifie l’article 45 de la loi du 30 septembre 1986, afin d’y consacrer le respect des garanties statutaires d’ARTE-France découlant du traité du 2 octobre 1990 instituant une chaîne culturelle européenne.

Le présent article résulte de l’adoption d’un amendement du gouvernement ([8]) et d’un amendement identique de Mme Géraldine Bannier ([9]). Il complète le second alinéa de l’article 45 de la loi du 30 septembre 1986, qui dispose que le capital d’ARTE-France est détenu directement ou indirectement par des personnes publiques, par les mots : « dans le respect des garanties statutaires de cette société résultant du traité du 2 octobre 1990 instituant une chaîne culturelle européenne ».

L’introduction de cette garantie dans la loi du 30 septembre 1986 résulte de la prise en compte d’une recommandation du Conseil d’État formulée dans son avis de 2019 sur le projet de loi relatif à la communication audiovisuelle et à la souveraineté culturelle à l’ère numérique. Le Conseil d’État avait ainsi considéré que : « S’agissant en particulier d’ARTE qui devient une filiale de deuxième rang de France Médias alors que son capital est aujourd’hui réparti entre plusieurs entités publiques, si le projet de loi ne modifie ni sa gouvernance, ni ses missions, ni les conditions de sa régulation, ni son financement, le Conseil d’État estime cependant nécessaire de réaffirmer dans le projet de loi le principe du respect des garanties statutaires résultant du traité du 2 octobre 1990 instituant une chaîne culturelle européenne. » ([10])

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Article 2
Détention par l’État de l’intégralité du capital de la société holding
France Médias

L’article 2 prévoit que l’État détient directement la totalité du capital de la société France Médias et soumet celle-ci, ainsi que ses filiales, à la législation sur les sociétés anonymes ainsi qu’aux dispositions en vigueur relatives aux sociétés à participation publique. Il place auprès de ces sociétés des commissaires du gouvernement.

La commission a adopté un amendement du gouvernement tirant les conséquences rédactionnelles du retrait de la société France Médias Monde du périmètre de la société holding France Médias ([11]).

En outre, elle a adopté un amendement de Mme Béatrice Piron ([12]), ainsi que plusieurs amendements identiques, qui visaient à supprimer les mots : « France Médias Monde » de l’alinéa 3 de l’article 2, mais qui ont eu pour effet de soustraire cette société à la législation sur les sociétés anonymes ainsi qu’à l’ordonnance n° 2014-948 du 20 août 2014 relative à la gouvernance et aux opérations sur le capital des sociétés à participation publique. En effet, dans sa rédaction actuelle, le second alinéa de l’article 47 de la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication prévoit que les sociétés France Télévisions, Radio France et France Médias Monde sont soumises à la législation sur les sociétés anonymes ; l’alinéa 3 de l’article 2 de la proposition de loi reprenait cette disposition. Il s’agit d’une erreur matérielle que les rapporteurs proposeront de corriger lors de l’examen de la proposition de loi en séance publique.

La commission a adopté un amendement de M. Erwan Balanant ([13]), prévoyant que le capital de la société France Médias et France Médias Monde est « incessible ». Les rapporteurs avaient demandé son retrait, l’estimant satisfait par la rédaction de l’alinéa 2 du présent article, qui prévoit que « l’État détient directement la totalité du capital des sociétés France Médias et France Médias Monde ». Il découle de cette rédaction que si l’État souhaitait un jour céder une partie du capital de ces deux sociétés, il devrait modifier la loi pour ce faire. Dès lors, l’amendement était redondant.

Enfin, la commission a adopté un amendement du gouvernement ([14]) et deux amendements identiques des rapporteurs et de M. Erwan Balanant, supprimant l’alinéa 4 du présent article, qui prévoyait la possibilité de désignation de commissaires du gouvernement dans les sociétés de l’audiovisuel public, afin de maintenir la composition dérogatoire à l’ordonnance du 20 août 2014 précitée de leur conseil d’administration.

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Article 2 bis (nouveau)
Nouvelle gouvernance du secteur public de l’audiovisuel

Le présent article propose une nouvelle rédaction des articles 47-1, 47-2, 47-3, 47-4 et 47‑5 de la loi du 30 septembre 1986. Il définit la composition des conseils d’administration de la société holding France Médias et de ses filiales et détermine les modalités de nomination du président-directeur général de la holding et des directeurs généraux des filiales.

Suivant l’avis des rapporteurs, la commission a adopté un amendement du gouvernement de rédaction globale de l’article 3 ([15]), lequel proposait une nouvelle rédaction des articles 47-1, 47-2, 47-3, 47-4 et 47-5 de la loi du 30 septembre 1986 précitée. Le gouvernement a souhaité que la réécriture de chacun de ces articles fasse l’objet d’un seul et même article au sein de la proposition de loi. Dès lors, l’article 3 de celle-ci insère au sein de la loi du 30 septembre 1986 précitée un nouvel article 47-1 A, déterminant la composition du conseil d’administration de la société holding France Médias. Les articles 47-1, 47-2 et 47-3 ne sont plus modifiés par la proposition de loi, dans la mesure où la composition du conseil d’administration de France Télévisions, de Radio France et de l’INA demeure inchangée.

L’amendement de rédaction globale du gouvernement insère un nouvel article 47-1 A au sein de la loi du 30 septembre 1986 précitée, qui dispose que le conseil d’administration comprendrait, outre le président-directeur général, quatorze membres, sur le modèle du conseil d’administration de France Télévisions.

La commission a adopté un sous-amendement de Mme Calvez ([16]), prévoyant que l’une des cinq personnalités indépendantes nommées par l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (Arcom), chargée de veiller à l’impartialité de l’information, soit également chargée de veiller à l’honnêteté, à l’indépendance et au pluralisme de l’information. Les rapporteurs ont donné un avis favorable à l’adoption de ce sous-amendement.

Enfin, la commission a adopté un sous-amendement des rapporteurs ([17]), prévoyant que l’un des deux représentants élus du personnel siégeant au sein du conseil d’administration de France Médias soit un journaliste professionnel au sens de l’article L. 7111-3 du code du travail.

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Article 2 ter (nouveau)
Composition du conseil d’administration de l’Institut national de l’audiovisuel

Introduit dans le texte par l’adoption d’un amendement du gouvernement ([18]), qui a reçu un avis favorable des rapporteurs, le présent article insère dans la loi du 30 septembre 1986 précitée un nouvel article 47-3-1 relatif à la composition du conseil d’administration de l’INA ([19]).

Cette composition serait légèrement modifiée, du fait d’un abaissement du nombre de représentants de l’État de quatre à trois, dans la mesure où le président de l’INA, nommé parmi les membres du conseil d’administration représentant l’État, serait remplacé par le PDG de France Médias. 

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Article 3
Nomination des présidents-directeurs généraux de France Médias et France Médias Monde, conditions de retrait de leur mandat, dispositions relatives au fonctionnement des conseils d’administration des sociétés de l’audiovisuel public

Le présent article a été introduit dans le texte par l’adoption de trois amendements du gouvernement.

  1.   Nomination des Présidents-directeurs généraux de France Médias et de France Médias Monde

Le premier amendement du gouvernement ([20]), qui a reçu un avis favorable des rapporteurs, a introduit dans le texte une nouvelle rédaction de l’article 47-4 de la loi du 30 septembre 1986 précitée, relatif à la nomination des présidents-directeurs généraux des sociétés France Médias et France Médias Monde. Conformément à la position exprimée par les rapporteurs dans leur rapport sur la proposition de loi ([21]), cette nouvelle rédaction prévoit que les deux PDG seraient nommés par l’Arcom au terme d’une procédure transparente, ouverte, effective et non discriminatoire. L’inscription de ces principes dans la loi vise à assurer le plein respect par la France des garanties procédurales découlant de l’article 5 du règlement européen sur la liberté des médias ([22]).

La commission a adopté un sous-amendement de Mme Céline Calvez ([23]) conditionnant la nomination des PDG de France Médias et de France Médias Monde à un avis conforme de la commission permanente chargée des affaires culturelles de l’Assemblée nationale et du Sénat, rendu à la majorité des suffrages exprimés au sein des deux commissions. Les rapporteurs ont donné un avis défavorable à l’adoption de ce sous-amendement. En premier lieu, cette rédaction est manifestement imprécise : la majorité des suffrages exprimés doit-elle être atteinte au sein de chacune des deux commissions, prises séparément, ou en prenant en compte l’addition des votes au sein des deux commissions ? Deuxièmement, les rapporteurs sont favorables au maintien plein et entier de l’Arcom dans ses prérogatives, ce mode de désignation étant à leurs yeux le mieux à même d’assurer le respect de l’indépendance des sociétés nationales de programme, exigence constitutionnelle qui participe à la mise en œuvre de la liberté de communication ([24]). La possibilité pour les commissions permanentes chargées des affaires culturelles de l’Assemblée nationale et du Sénat de s’opposer aux décisions de nomination de l’Arcom risquerait de porter atteinte à la crédibilité et à l’autorité du régulateur, l’affaiblissant durablement.

En outre, les rapporteurs s’interrogent sur la conformité à la Constitution d’une telle procédure de validation par le Parlement des nominations d’une autorité publique indépendante, en l’espèce l’Arcom. Si les autorités administratives indépendantes sont budgétairement rattachées à l’État, elles échappent à tout contrôle hiérarchique ou de tutelle. Le deuxième alinéa de l’article 9 de la loi n° 2017-55 du 20 janvier 2017 portant statut général des autorités administratives indépendantes et des autorités publiques indépendantes dispose ainsi que « dans l’exercice de leurs attributions, les membres des autorités administratives indépendantes et des autorités publiques indépendantes ne reçoivent ni ne sollicitent d’instruction d’aucune autorité ». En 2000 déjà, dans son étude annuelle consacrée aux autorités administratives indépendantes ([25]), le Conseil d’État considérait que « l’indépendance impose seulement qu’il ne puisse y avoir véto gouvernemental à l’égard des décisions des autorités administratives indépendantes ». Dans la même étude, le Conseil d’État relevait que « les caractéristiques de la Constitution et la tradition politique ne prédisposent pas le Parlement à exercer un contrôle politique continu sur les autorités administratives indépendantes ». Certes, le Parlement exerce un contrôle de l’activité des autorités administratives et des autorités publiques indépendantes. Celles-ci doivent ainsi lui adresser chaque année, avant le 1er juin, un rapport d’activité rendant compte de l’exercice de leurs missions et de leurs moyens ([26]). De plus, à la demande des commissions permanentes compétentes de l’Assemblée nationale et du Sénat, toute autorité administrative indépendante ou autorité publique indépendante rend compte annuellement de son activité devant elles ([27]). Le président de l’Arcom est ainsi entendu chaque année par la commission permanente des affaires culturelles et de l’éducation de l’Assemblée nationale.

En revanche, l’institution d’un droit de véto des commissions permanentes de l’Assemblée nationale et du Sénat chargées de la culture ne relèverait pas de l’exercice normal d’un tel contrôle mais serait l’expression d’une potentielle atteinte à la séparation des pouvoirs. Comme leur nom l’indique, les autorités administratives et publiques indépendantes agissent au nom et pour le compte de l’État. En particulier, les autorités administratives indépendantes étant dépourvues de personnalité morale, c’est la responsabilité de l’État qui est engagée en cas de litige ([28]). En principe, le pouvoir de nomination des dirigeants des entreprises publiques relève du président de la République, en application du troisième alinéa de l’article premier de l’ordonnance n° 58-1136 du 28 novembre 1958 portant loi organique concernant les nominations aux emplois civils et militaires de l’État, qui prévoit qu’il est pourvu en conseil des ministres aux emplois de direction dans les établissements publics, les entreprises publiques et les sociétés nationales quand leur importance justifie l’inscription sur une liste dressée par décret en conseil des ministres. Le président de la République nomme à ces emplois ; le Parlement, au nom de la séparation des pouvoirs, n’est pas censé pouvoir interférer avec ce pouvoir de nomination. Un tempérament à ce principe a été introduit dans la Constitution, s’agissant de certains emplois ou fonctions présentant une importance particulière pour la garantie des droits et libertés ou pour la vie économique et sociale de la Nation : en application du dernier alinéa de l’article 13 de la Constitution, le président de la République ne peut procéder à une nomination lorsque l’addition des votes négatifs dans chaque commission permanente compétente de l’Assemblée nationale et du Sénat représente au moins trois cinquièmes des suffrages exprimés au sein des deux commissions. Il s’agit bien d’une exception au principe de séparation des pouvoirs qui ne pouvait donc être inscrite que dans la Constitution. Par conséquent, les rapporteurs estiment que l’institution d’un droit de véto des commissions permanentes chargées des affaires culturelles de l’Assemblée nationale et du Sénat, pour être juridiquement valable, devrait être inscrite dans la Constitution. Une telle procédure étant proposée dans une loi ordinaire, elle leur paraît manifestement contraire à la Constitution.

La commission a par ailleurs adopté un sous-amendement des rapporteurs ([29]) à l’amendement du gouvernement, prévoyant que le rapport d’orientation stratégique remis aux commissions permanentes compétentes de l’Assemblée nationale et du Sénat par les PDG de France Médias et de France Médias Monde, dans un délai de deux mois à compter du premier jour de leur mandat, est rendu public à l’issue de leur audition devant lesdites commissions.

  1.   Conditions du retrait des mandats des présidents-directeurs généraux de France Médias et France médias Monde et dispositions relatives au fonctionnement des conseils d’administration

La nouvelle rédaction de l’article 47-5 de la loi du 30 septembre 1986 précitée, qui résulte de l’adoption d’un deuxième amendement du gouvernement ([30]) ayant reçu un avis favorable des rapporteurs, dispose que les mandats des PDG de France Médias et de France Médias Monde peuvent leur être retirés par décision motivée de l’Arcom. Cette décision doit être fondée sur des éléments de nature à ne pas compromettre la capacité de l’intéressé à poursuivre sa mission dans des conditions garantissant le bon fonctionnement de la société, la préservation de son indépendance ou la mise en œuvre du projet pris en compte lors de sa nomination. Cette décision est prise à la majorité des membres qui composent l’autorité et après que l’intéressé a été mis à même de présenter ses observations.

Le second alinéa de l’article 47-5 de la loi du 30 septembre 1986 précitée prévoit qu’en cas de vacance, pour quelque cause que ce soit, d’un ou plusieurs sièges de membre du conseil d’administration de France Médias, de l’une de ses filiales ou de France Médias Monde, le conseil d’administration délibère valablement jusqu’à la désignation d’un ou des nouveaux membres, sous réserve du respect des règles du quorum. En cas de vacance, pour quelque cause que ce soit, de la présidence du conseil d’administration, le doyen d’âge des personnalités indépendantes exercerait les fonctions de président-directeur général.

Enfin, un troisième amendement du gouvernement ([31]), qui a reçu un avis favorable des rapporteurs, a inséré un nouvel article 47-5-1 au sein de la loi du 30 septembre 1986 précitée, qui dispose qu’en cas de partage des voix au sein du conseil d’administration de France Médias, de l’une de ses filiales ou de France Médias Monde, la voix du président est prépondérante.

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Article 4
Dispositions de coordination au sein de la loi du 30 septembre 1986

L’article 4 procède à plusieurs coordinations au sein de la loi du 30 septembre 1986, qui découlent de la création de la société France Médias. Il propose une nouvelle rédaction des articles 47-6 et 48-1 A, modifie les articles 48, 48-1, 48-2, 48-3, 48-9 et 48-10. Il abroge les articles 49, 49-1 et 50.

Suivant l’avis des rapporteurs, la commission a adopté un amendement du gouvernement de rédaction globale du présent article ([32]) visant à compléter les coordinations au sein de la loi du 30 septembre 1986, rendues nécessaires par la création de la société holding France Médias.

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Article 5
Création des conventions stratégiques pluriannuelles et allocation des ressources de l’audiovisuel public

L’article 5 propose une nouvelle rédaction de l’article 53 de la loi du 30 septembre 1986, qui vise à substituer aux contrats d’objectifs et de moyens (COM) conclus entre l’État, France Télévisions, Radio France, France Médias Monde, ARTE-France et l’Institut national de l’audiovisuel, des conventions stratégiques pluriannuelles (CSP), qui seraient conclues entre, d’une part, l’État et, d’autre part, la société holding France Médias et ARTE-France, chacune pour ce qui la concerne. Le présent article détermine également les modalités de répartition des ressources publiques entre les filiales de la société France Médias.

Suivant l’avis des rapporteurs, la commission a adopté un amendement du gouvernement ([33]) de rédaction globale de l’article 5, visant à :

– tirer les conséquences rédactionnelles du retrait de France Médias Monde du périmètre de la société holding France Médias ;

– réintroduire l’avis de l’Arcom sur les CSP des sociétés France Médias et France Médias Monde, dans la mesure où l’Arcom se prononce aujourd’hui sur les COM de France Télévisions, Radio France et France Médias Monde ;

– prévoir qu’en cas d’écart d’au moins 10 % entre la répartition des ressources publiques inscrite dans la CSP de France Médias et la répartition indicative des ressources communiquée au Parlement avant l’examen du projet de loi de finances, la société France Médias informe sans délai les commissions permanentes compétentes de l’Assemblée nationale et du Sénat, qui peuvent procéder à l’audition de son PDG ;

– inscrire dans la loi que la principale source de financement des organismes de l’audiovisuel public est constituée par une ressource publique de nature suffisante, durable et prévisible, conformément à l’article 5 du règlement européen sur la liberté des médias précité ;

– préciser que les bandes annonces des programmes de France Télévisions n’entrent pas dans le champ de la prohibition de la diffusion de messages publicitaires après 20 heures, afin de tenir compte d’une jurisprudence récente de la Cour de justice de l’Union européenne, qui a qualifié les bandes annonces des programmes de messages publicitaires ([34]).

L’amendement du gouvernement n’a pas retenu la disposition, introduite dans le texte de la proposition de loi par un amendement du rapporteur de la commission de la culture, de l’éducation, de la communication et du sport du Sénat, relative à la fixation, au sein de la CSP de France Médias, d’un niveau maximal de recettes publicitaires et de parrainage, y compris numériques, aux sociétés France Télévisions, Radio France et France Médias Monde, défini en fonction des montants de ressources publiques qui leur sont attribués.

La commission a adopté un sous-amendement de Mme Céline Calvez ([35]) à l’amendement du gouvernement, prévoyant que la CSP de la société France Médias « fixe une durée maximale de diffusion annuelle des messages publicitaires et de parrainage, y compris digitales, aux sociétés France Télévisions, Radio France et France Médias Monde. Elle mentionne également l’objectif de réduction progressive de la place de la publicité et des parrainages dans la diffusion de l’offre de service public ». Les rapporteurs ont donné un avis défavorable à l’adoption de cet amendement, pour plusieurs raisons :

– la durée de diffusion des messages publicitaires est déjà encadrée par la loi s’agissant de France Télévisions, non pas en termes de durée annuelle mais en termes d’heure d’horloge. La publicité sur les antennes de Radio France n’est pas encadrée en durée mais en recettes, puisque le COM de cette société fixe un plafond de recettes publicitaires linéaires à 42 millions d’euros chaque année ;

– une limitation en durée annuelle pourrait logiquement se traduire par une diminution du volume d’espaces publicitaires offerts aux annonceurs, et donc conduire à une perte d’attractivité de France Télévisions et de Radio France auprès de ceux-ci. Les sociétés nationales de programme pourraient être tentées de vendre plus cher leurs espaces publicitaires auprès des annonceurs mais il est peu probable que ceux-ci les achèteraient, compte tenu de la concurrence croissante sur le marché publicitaire, qui tire les prix à la baisse ;

– une telle limitation en volume serait extrêmement compliquée, voire impossible, à mettre en œuvre pour les régies publicitaires de France Télévisions et de Radio France.

La commission a adopté un second sous-amendement de Mme Céline Calvez ([36]) proposant une nouvelle rédaction du II de l’article 53 de la loi du 30 septembre 1986 précitée, qui prévoit que les projets de CSP ainsi que leurs avenants sont transmis aux commissions permanentes compétentes de l’Assemblée nationale et du Sénat. Le Parlement peut en débattre et les commissions peuvent formuler un avis sur ces conventions stratégiques pluriannuelles ainsi que sur leurs éventuels avenants dans un délai de six semaines. Si le Parlement n’est pas en session, ce délai court à compter de l’ouverture de la session ordinaire ou extraordinaire suivante.

Le sous-amendement de Mme Calvez a repris ces dispositions, tout en inscrivant dans le texte que « le Parlement est associé à l’élaboration des conventions stratégiques pluriannuelles ainsi que des éventuels avenants à ces conventions, afin d’assurer un suivi et un contrôle effectif de leur contenu dès leur conception ». Cette rédaction n’a pas recueilli l’avis favorable des rapporteurs, en raison de son caractère imprécis et excessif. En effet, la tutelle des organismes de l’audiovisuel public n’est pas assurée par le Parlement mais par la direction générale des médias et des industries culturelles (DGMIC) et par la direction du budget. Il est donc logique que les projets de CSP soient élaborés conjointement par les organismes de l’audiovisuel public et leurs tutelles, puis que le Parlement s’en saisisse pour avis. Par ailleurs, les rapporteurs souhaitaient renforcer la portée de l’avis des commissions permanentes de l’Assemblée nationale et du Sénat en leur permettant de travailler dans un délai de huit semaines, plutôt que six. Ils avaient ainsi déposé un sous-amendement ([37]) en ce sens. Compte tenu de l’adoption du sous-amendement de Mme Calvez, le sous-amendement des rapporteurs est tombé.

En outre, le sous-amendement de Mme Calvez a subordonné la signature des projets de CSP à « l’avis conforme de la commission permanente chargée des affaires culturelles des deux assemblées parlementaires, rendu à la majorité des suffrages exprimés au sein des deux commissions ». Les rapporteurs ont exprimé leur crainte d’une trop grande difficulté à atteindre la majorité des suffrages exprimés, ce qui pourrait différer, de façon préjudiciable, l’adoption des CSP, lesquelles déterminent la trajectoire pluriannuelle des ressources publiques allouées aux organismes de l’audiovisuel public. Dès lors, l’incertitude de ces organismes sur le niveau de leur financement serait renforcée. Les rapporteurs avaient proposé une procédure alternative : dans l’hypothèse où l’addition des votes négatifs au sein des deux commissions chargées des affaires culturelles représenterait au moins trois cinquièmes des suffrages exprimés  soit la même majorité de blocage que celle prévue à l’article 13, alinéa 5, de la Constitution s’agissant de certaines nominations du Président de la République –, la CSP ne pourrait pas être signée par l’État et par la société concernée. Une telle procédure aurait rendu l’adoption des CSP moins difficile, tout en dotant les commissions permanentes chargées des affaires culturelles d’un vrai pouvoir décisionnaire.

Suivant l’avis des rapporteurs, la commission a adopté un sous-amendement de Mme Taillé-Polian ([38]) prévoyant que la signature des projets de CSP est précédée par des consultations publiques qui associent les différents acteurs associatifs et syndicaux du secteur de l’audiovisuel et du cinéma.

Enfin, la commission a adopté un sous-amendement des rapporteurs, disposant qu’après leur signature, les CSP sont rendues publiques ([39]).

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L’article 6 procède à deux coordinations au sein de l’article 57 de la loi du 30 septembre 1986, rendues nécessaires par la création de la société France Médias.

Suivant l’avis des rapporteurs, la commission a adopté un amendement de rédaction globale du gouvernement ([40]) supprimant deux coordinations rendues inutiles par le vote des amendements précédents et actualisant la dénomination sociale de la société France Médias Monde, actuellement désignée comme la société en charge de l’audiovisuel extérieur de la France.

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L’article 7 vise à transformer en société anonyme l’établissement public Institut national de l’audiovisuel (INA) afin de pouvoir l’intégrer à la société France Médias. Il prévoit les modalités de cette transformation.

La commission a adopté un amendement des rapporteurs ([41]) visant à garantir à la future société anonyme INA le maintien de l’exonération de contribution foncière des entreprises, dont elle bénéficie actuellement au titre de son statut d’établissement public industriel et commercial. Un amendement des rapporteurs ([42]) ajoutant la capacité de l’INA à délivrer des diplômes à la liste des prérogatives transmises de plein droit et sans modification de l’établissement public à la société anonyme a également été adopté. La commission a enfin adopté deux amendements de coordination identiques du gouvernement et des rapporteurs ([43]), ainsi que treize amendements rédactionnels.

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L’article 8 prévoit les dispositions transitoires nécessaires à la création du groupe France Médias : création de la société, approbation des statuts et calendrier de la constitution progressive du conseil d’administration, attribution de la présidence‑direction générale à un doyen d’âge et désignation du premier président-directeur général de France Médias.

Cet article permet ainsi la mise en place de la gouvernance de France Médias, dont les modalités pérennes sont par ailleurs fixées par l’article 3 de la présente proposition de loi.

La commission a adopté un amendement de rédaction globale du gouvernement ayant reçu un avis favorable des rapporteurs ([44]). Cet amendement décale la création de la société France Médias au 1er janvier 2026 et ajuste les conditions de sa création, au regard des modifications effectuées à l’article 3 portant sur la composition du conseil d’administration de la société. L’amendement précise que les mandats des présidents des entités de l’audiovisuel public sont interrompus au 1er février 2026, dans la mesure où le président-directeur général de la holding deviendra également celui de ses filiales à cette date. En cohérence avec les amendements votés précédemment, France Médias Monde est retirée du périmètre de la holding. Enfin, une disposition transitoire est ajoutée garantissant la maintien des contrats d’objectifs et de moyens conclus avec les entités de l’audiovisuel public, dans l’attente de l’adoption de la convention stratégique pluriannuelle de France Médias.

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L’article 9 prévoit une entrée en vigueur des dispositions relatives à l’audiovisuel public de la présente proposition de loi (articles 1 à 6, hors dispositions transitoires des articles 7 et 8) au 1er janvier 2024.

La commission a adopté un amendement de coordination juridique des rapporteurs ([45]) ainsi que deux amendements identiques déposés par le gouvernement et les rapporteurs ([46]) afin de décaler l’entrée en vigueur des dispositions citées au 1er janvier 2026.

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Chapitre II
Préservation de notre souveraineté audiovisuelle

L’article 10 vise à élargir aux plateformes le régime applicable aux chaînes de télévision en matière d’acquisition des droits de retransmission des événements d’importance majeure.

La commission a supprimé cet article en adoptant, avec l’avis favorable des rapporteurs, un amendement de suppression déposé par le gouvernement ([47]).

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L’article 11 définit les services audiovisuels d’intérêt général et prévoit les modalités d’une visibilité appropriée des services et de leurs programmes sur les interfaces utilisateurs.

Suivant l’avis des rapporteurs, la commission a supprimé cet article en adoptant un amendement de suppression du gouvernement ([48]).

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L’article 11 bis A, introduit par le Sénat en séance publique, vise à introduire dans les conventions passées entre les services diffusés par voie hertzienne terrestre (autres que ceux exploités par les sociétés nationales de programme) et l’Arcom, sur le fondement de l’article 28 de la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, la mention obligatoire d’une part minimale d’investissement consacrée à l’information.

La commission a supprimé cet article en adoptant deux amendements de suppression déposés par le gouvernement et les rapporteurs ([49]).

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L’article 11 bis, introduit en commission au Sénat, vise, d’une part, à porter de trois à cinq ans le délai prévu par l’article 30-1-1 de la loi du 30 septembre 1986 pour permettre au régulateur de délivrer de nouvelles autorisations d’émettre en UHD à des chaînes déjà autorisées à le faire précédemment et, d’autre part, à porter à sept ans la durée de ces autorisations temporaires.

La commission a supprimé cet article en adoptant, avec l’avis favorable des rapporteurs, un amendement de suppression déposé par le gouvernement ([50]).

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Article 11 ter (supprimé)
Exemption des services distribués par contournement de l’obligation de reprise du signal

L’article 11 ter vise à exclure les services distribués par contournement de l’obligation de reprise du signal imposée par l’article 34-2 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986.

La commission a supprimé cet article en adoptant, avec l’avis favorable des rapporteurs, deux amendements de suppression déposés par le gouvernement et par Mme Soumya Bourouaha ([51]).

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Article 12 (supprimé)
Conditions d’autorisation par l’Arcom d’un changement dans le contrôle du capital d’une chaîne autorisée par convention à émettre sur la TNT

L’article 12 vise à ramener de cinq à deux ans le délai minimal de conservation d’une fréquence accordée par le régulateur avant une possible autorisation d’un changement de contrôle du capital du titulaire de cette fréquence. Sous le contrôle de l’Arcom, cet article permet également de passer outre cette durée minimale de deux ans dès lors qu’un changement de contrôle du capital ne porte atteinte ni à l’impératif fondamental de pluralisme, ni à l’intérêt du public, et ne présente aucun objectif manifestement spéculatif. Cet article autorise enfin l’Arcom à donner, sous certaines conditions, son agrément à une modification des conventions en cours d’exécution.

La commission a supprimé cet article en adoptant, avec l’avis favorable des rapporteurs, deux amendements de suppression déposés par leurs soins et par le gouvernement ([52]).

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Article 12 bis (supprimé)
Mesures d’audience par des organismes tiers

L’article 12 bis vise à définir les conditions à remplir pour les organismes réalisant des mesures d’audience pour le compte des services de communication audiovisuelle, des services de média audiovisuels à la demande et des services de partage de plateforme de contenus vidéo et/ou audio qui font appel à la publicité pour se financer, ainsi que pour les annonceurs et les agences média qui négocient et achètent des espaces publicitaires.

La commission a supprimé cet article en adoptant, avec l’avis favorable des rapporteurs, deux amendements de suppression déposés par leurs soins et par le gouvernement ([53]).

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Article 13 (supprimé)
Exclusion des mandats de commercialisation de la définition de la production audiovisuelle indépendante

L’article 13 vise à exclure les mandats de commercialisation de la définition de la production audiovisuelle indépendante.

La commission a supprimé cet article en adoptant, avec l’avis favorable des rapporteurs, un amendement de suppression déposé par le gouvernement ([54]).

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Article 13 bis (supprimé)
Autorisation d’une troisième coupure publicitaire pour la diffusion des œuvres cinématographiques et audiovisuelles de longue durée et la diffusion de bandes annonces pour les programmes

L’article 13 bis vise à autoriser l’introduction d’une troisième coupure publicitaire pendant la diffusion des œuvres cinématographiques et audiovisuelles dont la durée excède deux heures et à permettre la diffusion de bandes annonces pour les programmes pendant les coupures publicitaires.

La commission a supprimé cet article en adoptant, avec l’avis favorable des rapporteurs, deux amendements de suppression déposés par M. Frédéric Maillot et par le gouvernement ([55]).

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Article 14 (supprimé)
Développement des services interactifs sur la TNT

L’article 14 vise à instaurer l’obligation pour les terminaux mis sur le marché (à la location comme à la vente) d’assurer la réception des services interactifs fournis par les éditeurs de services de communication audiovisuelle diffusés par voie hertzienne terrestre au moyen de la technologie HbbTV (Hybrid Broadcast Broadband TV). Il prévoit également, sous le contrôle de l’Arcom, une réception de ces services par défaut sur les équipements et l’interdiction de leur modification et de leur suppression par les constructeurs sans autorisation des éditeurs.

La commission a supprimé cet article en adoptant, avec l’avis favorable des rapporteurs, un amendement de suppression déposé par le gouvernement ([56]).

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Article 14 bis (supprimé)
Développement de l’ultra haute définition

L’article 14 bis vise à imposer progressivement la compatibilité des nouveaux téléviseurs avec l’ultra haute définition dès lors que 20 % de la population française aura accès à la diffusion de ce type de programmes.

La commission a supprimé cet article en adoptant, avec l’avis favorable des rapporteurs, un amendement de suppression déposé par le gouvernement ([57]).

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Article 15 (supprimé)
Développement de la radio numérique terrestre

L’article 15 vise, d’une part, à promouvoir le développement de la radio numérique terrestre par la généralisation progressive de la réception de la norme DAB+ (Digital Audio Broadcasting) dans tous les équipements de radio vendus en France et, d’autre part, à imposer la présence de terminaux adaptés dans les véhicules automobiles neufs de transport de personnes mis à la vente ou en location. Cet article impose également au gouvernement de remettre au Parlement un rapport sur les possibilités d’aide à l’équipement des foyers et d’aide à l’investissement et à l’absorption du coût de double diffusion des éditeurs de radio afin de favoriser la réception de la radio numérique terrestre sur l’ensemble du territoire.

La commission a supprimé cet article en adoptant, avec l’avis favorable des rapporteurs, deux amendements de suppression déposés par M. Salvatore Castiglione et par le gouvernement ([58]).

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Article 16 (nouveau)
Remise d’un rapport au Parlement

La commission a adopté un amendement des rapporteurs ([59]) prévoyant que le gouvernement remet au Parlement avant le 1er janvier 2028, un rapport visant à :

– évaluer l’opportunité d’intégrer la société nationale de programme France Médias Monde au sein de la société holding France Médias ;

– présenter un bilan des coopérations éditoriales et non éditoriales menées entre les sociétés filles de France Médias, d’une part, et entre celles‑ci et France Médias Monde, d’autre part ;

– évaluer le coût de la création de filiales par France Médias ainsi que le coût du rapprochement des statuts sociaux des salariés intégrés au sein de ces filiales ;

– étudier les conséquences de la réforme de la gouvernance de l’audiovisuel public sur le climat social au sein de France Médias et ses filiales ainsi que sur les conditions de travail des salariés.

Cet amendement réunit en un seul article et complète le contenu de six demandes de rapport proposées par d’autres amendements ([60]).


  1 

   TRAVAUX DE LA COMMISSION

Réunion du mardi 17 juin 2025 à 16 heures 30

La commission procède à l’examen de la proposition de loi, adoptée par le Sénat, relative à la réforme de l’audiovisuel public et à la souveraineté audiovisuelle (n° 118) (Mme Virginie Duby-Muller et M. Jérémie Patrier-Leitus, rapporteurs ([61]).

Mme la présidente Fatiha Keloua Hachi. Nous poursuivons l’examen de la proposition de loi relative à la réforme de l’audiovisuel public et à la souveraineté audiovisuelle, inscrite à l’ordre du jour de la séance publique des lundi 30 juin et mardi 1er juillet. Il reste 863 amendements à discuter.

Nous avions dû interrompre nos travaux le 8 avril dernier à minuit, après avoir examiné 178 amendements, car le texte devait être débattu en séance à la fin de la semaine. Il avait finalement été retiré de l’ordre du jour. Nous reprenons donc où nous nous étions arrêtés, soit à l’amendement AC786 de Mme Taillé-Polian sur l’article 2.

Article 2 (suite) : Détention par l’État de l’intégralité du capital de la société holding France Médias

Amendement AC786 de Mme Sophie Taillé-Polian

M. Alexis Corbière (EcoS). Cet amendement de repli vise à exclure l’Institut national de l’audiovisuel (INA) du regroupement des entreprises de l’audiovisuel public.

Madame la ministre de la culture, le groupe Écologiste et social continue à être opposé à cette réforme. Disons-le clairement, les arguments que vous avancez – vous avez le mérite de la fidélité et de la constance – ne nous ont pas convaincus. Nous n’en comprenons pas l’intérêt. Les défenseurs de la réforme nous assènent, comme un argument d’autorité, qu’il faut la faire car elle répondra aux évolutions du paysage audiovisuel. Certes, le paysage audiovisuel évolue, mais en quoi cette holding répondra-t-elle aux enjeux de cette évolution ? Quelles sont donc les évolutions auxquelles il est fait référence ?

Votre récente interview dans Le Monde, dont je vous remercie, est assez complète. Vous avez indiqué que tout le monde était convaincu, hormis les députés socialistes. J’ai le cœur brisé de vous le dire : cela n’est pas vrai. Nous ne sommes pas convaincus non plus ; et sans doute ne sommes-nous pas les seuls. Ainsi, et sans parler en leur nom, j’ai cru comprendre que les professionnels, et notamment les organisations syndicales de professionnels, n’étaient pas convaincus non plus. Vous répétez qu’il faut un PDG unique et une stratégie partagée : pourquoi ? Cela n’a pas été démontré, sauf à donner des arguments d’autorité. On nous explique qu’il faut s’adresser à la jeunesse. Certes, mais en quoi ce grand média, dit à 360 degrés, le permettrait-il ?

L’enjeu de l’indépendance des médias est la question majeure. À notre sens, la centralisation dans une holding, avec un PDG unique, fait courir le risque d’un rapprochement extrêmement puissant entre le pouvoir politique et la personne qui occupera cette responsabilité. Il faut faire l’inverse. Il faut garantir l’indépendance du service public de l’information, grâce nomment à l’articulation de plusieurs pôles en son sein. Nous demeurons donc opposés à cette réforme.

M. Jérémie Patrier-Leitus, rapporteur. Mon propos sera également général et j’y associe ma collègue Virginie Duby-Muller. Certes, le paysage audiovisuel n’a pas évolué depuis notre dernière rencontre, mais entre-temps, nous avons tous pris connaissance du rapport de Mme Laurence Bloch, qui relève quelques chiffres importants. Nous ne pouvons pas nous satisfaire de la situation actuelle. L’usage de la télévision s’effondre chez les jeunes : c’est un fait. La part de la télévision dans la consommation de médias des Français recule, de même que la part des classes populaires dans la consommation de la radio. L’âge des téléspectateurs augmente, ce qui est un défi pour les acteurs de l’audiovisuel public.

Notre conviction – et je comprends que vous ne la partagiez pas – est que la holding sera un outil stratégique pour répondre aux nombreux défis. J’en mentionnerai quatre, rappelés dans le rapport éclairant de Mme Bloch. Sur la concentration des médias, vous évoquez leur indépendance à l’égard du pouvoir politique, mais les grandes plateformes ne menacent-elles pas les acteurs de l’audiovisuel public ? Le chiffre d’affaires de Google atteint 350 milliards de dollars, soit l’équivalent du budget de l’État français, celui d’Amazon s'élève à 658 milliards, quant à celui de Netflix il est de 40 milliards. L’enjeu est donc de regrouper les moyens de l’audiovisuel public pour peser dans la compétition internationale.

On ne peut pas non plus balayer d’un revers de main la question de la méfiance d’une partie de la population vis-à-vis de nos médias traditionnels : une reconquête est nécessaire, pour renforcer notre audiovisuel public. Par ailleurs, la manière de consommer l’information connaît des bouleversements : nous ne pouvons pas nous satisfaire d’un pays où 60 % de la population s’informe exclusivement sur les réseaux sociaux. Nous en sommes convaincus, le rapprochement des acteurs de l’audiovisuel public permettra de répondre à ce défi. Le dernier est celui des ruptures technologiques : nous avons besoin d’investissements majeurs dans l’intelligence artificielle (IA). Les acteurs de l’audiovisuel public doivent de saisir de ces outils technologiques. S’ils ne rassemblent pas leurs forces pour investir de manière significative dans ce domaine, ils seront dépassés.

Avis défavorable sur l’amendement.

Mme Rachida Dati, ministre de la culture. Je vous remercie, monsieur le député, pour nos échanges très respectueux, malgré nos désaccords. J’entends les inquiétudes car elles sont légitimes dès lors qu’il y a une réforme. Elles étaient les mêmes lors de la réforme de 2009, à laquelle j’ai assisté. Pourtant, il ne viendrait à l’idée de personne de revenir aujourd’hui sur le rapprochement alors opéré au niveau de France Télévisions. Depuis, la concurrence s’est exacerbée, celle, non pas des médias traditionnels – M6 ou TF1 –, mais des plateformes. Le rapporteur a très bien évoqué la force de ces plateformes et de leurs contenus.

Comme vous, je suis très favorable à l’indépendance des médias et la liberté de la presse : elles sont capitales. Certes, on peut critiquer certains contenus, mais l’un ne va pas sans l’autre dans une démocratie. Le processus de nomination est une garantie d’indépendance : il sera le même qu’aujourd’hui. Qui peut douter de l’indépendance de Mme Ernotte ou de Mme Veil ? Personne. L’objectif de la holding sera de rassembler les moyens et d’avoir une stratégie cohérente et coordonnée. Sur l’absence d’intérêt des jeunes, je considère qu’il faut aller chercher l’auditeur ou le spectateur partout sur le territoire. Puisque les Français consentent au financement de l’audiovisuel public, il est normal que celui-ci s’adresse à tous, partout sur le territoire. La démocratie consiste aussi à accéder à une information fiable et de qualité, y compris sur d’autres types de contenus.

M. le rapporteur l’a indiqué, les usages ont évolué : 62 % des Français s’informent sur les réseaux sociaux, dont beaucoup d’adolescents. Faut-il les laisser de côté ? Nous ne pouvons nous y résoudre. L’audiovisuel public doit continuer à s’adresser à tous, à la jeunesse comme aux classes plus populaires, ce qui n’est plus le cas aujourd’hui. Laurence Bloch le démontre dans son rapport et en conclut que le statu quo n’est plus une option. Cette réforme est donc nécessaire. Il faut une stratégie coordonnée de distribution des contenus.

M. Aurélien Saintoul (LFI-NFP). Vous avez très bien identifié les défis et les enjeux, que tous les observateurs sont susceptibles de partager. Cependant, force est de constater qu’une réforme de structure ne sera pas de nature à apporter une réponse, sauf à imaginer que vous avez déjà un plan, que vous voudriez voir appliqué par la future direction de la holding. Or, la loi ne vous le permettra pas, puisque la direction de cette holding devra être indépendante. Je ne suis donc pas du tout convaincu par votre argumentation.

En quoi une réforme de structure, qui aura pour principal effet de réduire les moyens de celles et ceux qui sont déjà à pied d’œuvre, répondra-t-elle aux questions relatives aux publics ? Je ne partage pas l’appréciation générale selon laquelle le service public ne toucherait pas les classes populaires – peut-être ne les touche-t-il pas assez. En tout état de cause, je ne perçois pas le lien entre la réforme de structure et la transformation des usages.

Mme Sophie Taillé-Polian (EcoS). Nous sommes toujours fermement opposés à cette réforme. Tout d’abord, l’argument du rassemblement des forces face à des plateformes gigantesques est totalement inopérant. En effet, avec moins de 4 milliards d’euros – nous avons franchi ce seuil à la baisse en raison des coupes budgétaires – de financement public de l’audiovisuel, nous ne sommes pas du tout au niveau de ces plateformes.

Vous considérez, madame la ministre, que le bilan du rapprochement de France Télévisions a été très positif. Or à la suite de la fusion de toutes les antennes de France Télévisions, la rédaction nationale de France 3 a été purement et simplement supprimée. Nous avons perdu une rédaction nationale. Cet exemple concret montre que ce type de rapprochement conduit, par la mutualisation, à un appauvrissement, surtout en période de disette budgétaire. L’État n’a jamais pris d’engagement fort, par exemple avec une loi de programmation, pour garantir un financement du service public de l’audiovisuel à la hauteur des enjeux.

M. Emmanuel Grégoire (SOC). Il s’est passé beaucoup de choses depuis notre dernière discussion. Je commencerai par rappeler, madame la ministre, vos expressions très insultantes à l’endroit des journalistes du service public de l’audiovisuel, dont vous avez la tutelle et dont vous devez garantir l’indépendance rédactionnelle absolue. Par ailleurs, vous dites des choses fausses dans votre longue interview publiée dans le journal Le Monde, dont certaines en totale dissonance avec le rapport Bloch, dont vous vous prévalez. Je ne reviens pas sur le fait que ce rapport ne répond absolument pas à la demande d’étude d’impact de la représentation nationale. Au regard des rares chiffres qui sont avancés, il est en tout cas en contradiction avec le principe d’une réforme à somme nulle, que vous affirmez. Le rapport Bloch indique en effet l’inverse, y compris sur des chiffres datant de 2016 – ils ne me semblent pas opportuns en raison de leur absence d’actualisation.

Certains de vos propos introductifs sont également faux. Je ne fais pas référence aux éléments d’analyse évoqués par le rapporteur et aux enjeux, qui pourraient sans doute nous réunir tous, tandis que la façon d’y répondre nous éloigne. Le 7 mai dernier, vous avez dit de France Inter « ça devient un club, c’est CSP plus – les catégories socioprofessionnelles supérieures – et plus âgé ». Outre qu’il est très cocasse de l’avoir déclaré en direct – je reconnais là votre courage –, vous critiquez un service public qui a démontré sa capacité à devenir la première radio de France. Il s’agit de la troisième radio des moins de 25 ans. Elle a gagné 400 000 auditeurs de moins de 25 ans. Et il est faux de dire que les classes populaires s’en désintéressent : Radio France est le deuxième groupe de radio pour les catégories socioprofessionnelles inférieures, dites « CSP moins », après radio NRJ.

Je le répète, certes, nous pouvons partager certains de vos éléments de diagnostic sur les enjeux stratégiques, mais vous alignez des mensonges insultants vis-à-vis du service public de l’audiovisuel. Ils montrent que cette réforme de l’audiovisuel public n’a absolument pas pour but de répondre à ces enjeux stratégiques – nous démontrerons que c’est l’inverse. Elle n’a que deux enjeux : faire des économies budgétaires – vous ne l’assumez pas – et exercer un contrôle politique sur la ligne éditoriale de l’audiovisuel public, comme nombre de vos déclarations le confirment. Madame la ministre, les journalistes du service public sont aussi indépendants que les autres, ne vous en déplaise. La holding n’est pas là pour répondre à une injonction politique de contrôle.

Mme la présidente Fatiha Keloua Hachi. Je vous rappelle les règles à observer jusqu’à la fin de la discussion : je vous remercie d’éviter les invectives et les propos qui pourraient être mal pris et je vous invite à vous limiter à un avis pour et un avis contre, pour chaque amendement, de façon à ce que nous puissions travailler sereinement.

La commission rejette l’amendement.

Amendement AC931 de Mme Céline Calvez

Mme Céline Calvez (EPR). Il vise à marquer clairement notre attachement au maintien du service public audiovisuel sous le contrôle exclusif de l’État, en interdisant toute forme de privatisation de la société France Médias et de ses filiales, que cette cession soit partielle ou totale. Nous adressons ainsi un contre-argument à tous ceux qui voient dans cette réforme un affaiblissement de l’audiovisuel public. La détention intégrale du capital par l’État assurera la pérennité du service public dans toutes ses missions.

Mme Virginie Duby-Muller, rapporteure. Votre amendement est superfétatoire, puisque déjà satisfait par le vote de l’amendement AC188 de notre collègue Erwan Balanant, prévoyant l’incessibilité du capital de la société France Médias. Nous vous invitons donc à le retirer.

Mme Céline Calvez (EPR). L’amendement AC188 concerne-t-il également les cessions partielles ?

Mme Rachida Dati, ministre. Oui, le capital n’étant pas cessible, cela vaut pour les cessions totales ou partielles.

L’amendement est retiré.

Amendements identiques AC1154 du gouvernement, AC1034 de Mme Virginie Duby-Muller et AC183 de M. Erwan Balanant.

Mme Rachida Dati, ministre. L’amendement AC1154 a pour objet de supprimer la possibilité de désignation de commissaires du gouvernement dans les sociétés de l’audiovisuel public, afin de maintenir la composition actuelle des conseils d’administration.

M. Aurélien Saintoul (LFI-NFP). Ces amendements visent à supprimer l’alinéa 4 qui prévoit la nomination des commissaires du gouvernement auprès des différentes sociétés. Désormais, l’État ne sera donc représenté qu’au niveau de la holding : nous nous opposons à ce mouvement de centralisation de la décision.

Mme Rachida Dati, ministre. Nous maintenons les conseils d’administration à l’identique, monsieur le député. Nous ne touchons à rien.

La commission adopte les amendements.

En conséquence, les autres amendements sur l’article tombent.

La commission adopte l’article 2 modifié.

Article 3 : Nouvelle gouvernance du secteur public de l’audiovisuel

Amendements de suppression AC52 de M. Aurélien Saintoul, AC202 de M. Emmanuel Grégoire et AC787 de Mme Sophie Taillé-Polian

M. Aurélien Saintoul (LFI-NFP). L’amendement AC52 vise à supprimer l’article 3, relatif aux règles de gouvernance de la holding, auxquelles nous sommes opposées, comme au texte dans son ensemble.

M. Emmanuel Grégoire (SOC). L’amendement AC202, qui vise à supprimer le projet de holding, me permet d’évoquer l’un des éléments nouveaux apportés par le rapport de Laurence Bloch et certaines incohérences. Madame la ministre, vous avez indiqué, avec constance, qu’il n’y aurait aucun coût. Or Mme Bloch reconnaît l’existence de très nombreux coûts induits par la holding. Ainsi, les synergies à la base, grand enjeu de la réforme, nécessitent précisément beaucoup de moyens. Sans oser demander à nouveau une étude d’impact, j’aimerais que vous nous expliquiez comment la création de la holding n’engendrera aucun coût, alors que le rapport de Mme Bloch – élément central, nous dit-on, qui ne nous a été transmis qu’hier – indique le contraire.

Mme Sophie Taillé-Polian (EcoS).  Puisque nous sommes opposés à la création de la holding, nous proposons de supprimer l’article qui régit sa gouvernance. Par ailleurs, la composition du conseil d’administration telle qu’elle est prévue ne nous convient pas du tout. En effet, elle n’accorde ni aux salariés, ni aux représentants et représentantes des auditeurs ou des téléspectateurs, ni à la démocratie sociale telle que nous l’appelons de nos vœux la place qu’ils méritent.

Mme Virginie Duby-Muller, rapporteure. Avis défavorable.

Je rappelle que, comme l’a indiqué le Conseil d’État dans son avis sur les projets d’amendements du gouvernement, l’instauration d’une présidence exécutive ne porte atteinte ni à l’exigence constitutionnelle d’indépendance des sociétés nationales de programme vis-à-vis des pouvoirs publics, ni à l’impératif de pluralisme.

Monsieur Grégoire, la proposition de création de la holding résulte du constat que les coopérations par le bas ne marchaient pas et qu’il fallait adopter une approche top-down.

Il est exact que l’alignement des statuts aura un coût. Le rapport de Mme Bloch se réfère à l’estimation de l’Inspection générale des finances (IGF) et cite un montant de 30 millions d’euros. Cet alignement nécessiterait vingt-sept mois de négociations. En revanche, le rapport de l’IGF estime que les économies d’échelle permettront un gain de 10 millions d’euros par an. Elles seront donc réelles, bien que limitées dans un premier temps.

M. Jérémie Patrier-Leitus, rapporteur. M. Grégoire s’est interrogé sur les coûts liés à la création de la holding. Mais on pourrait aussi le faire au sujet du coût de l’échec des coopérations par le bas.

Ainsi, l’échec du rapprochement entre la radio et la télévision s’agissant de France Info coûte de l’argent. Personne ne peut se satisfaire des audiences de la chaîne de télévision franceinfo, alors que la radio est puissante et réalise de bonnes audiences. On peut aussi se référer aux difficultés rencontrées pour rapprocher France Bleu et France 3 afin de couvrir certains événements en commun.

M. Saintoul a déclaré que nous étions d’accord sur les défis auxquels devait faire face l’audiovisuel public, mais pas sur l’outil pour y répondre. Nous sommes pour notre part persuadés que la holding permettra de trouver les voies et moyens pour apporter des réponses fortes et réaliser des économies dans la durée.

Mme Rachida Dati, ministre.  Les coopérations par le bas coûtent de l’argent, mais aussi des efforts aux salariés en raison des dissensions entre les sociétés. Leurs dirigeantes, que j’ai reçues l’an dernier, m’ont demandé de mettre en place un cadre permettant d’impulser les coopérations. Leur mise en place est actuellement trop lente et trop coûteuse. Une stratégie unique les faciliterait.

Je remercie la présidente d’avoir rappelé qu’il était nécessaire de se respecter lors de nos discussions. Ainsi, contrairement à vous, monsieur Grégoire, je ne dis pas que vous êtes un menteur, je ne vous accuse pas de dire des mensonges. Je dis simplement que vous avez mal lu le rapport de Mme Bloch. Ce dernier ne détaille pas en effet les coûts liés à la mise en place de la holding, mais cite un rapport de l’IGF, comme l’a bien expliqué la rapporteure.

Mme Soumya Bourouaha (GDR). Notre groupe s’oppose farouchement à cette réforme de l’audiovisuel public et à la création d’une holding.

Tout d’abord, la méthode est brutale et autoritaire. Ce texte, qui était un peu l’Arlésienne, revient en effet pour la troisième fois devant notre commission.

La brutalité est ensuite et surtout institutionnelle, puisque ni les dirigeants ni les représentants et les acteurs de l’audiovisuel public n’ont été consultés. Les salariés se sont massivement opposés à cette réforme. Aucune urgence politique ou contrainte économique ne la justifie.

Nous maintenons en outre que cette réforme menace l’indépendance éditoriale. Le fait qu’elle soit soutenue fermement par le Rassemblement national devrait alerter toutes les forces attachées à la démocratie et au pluralisme.

Enfin, nous aurons l’occasion de revenir sur ce qui met en péril le financement de l’audiovisuel public.

Mme Sophie Taillé-Polian (EcoS). On nous dit que les coopérations par le bas sont des échecs. Mais ce n’est pas toujours le cas. Ainsi, le projet Lumni est une grande réussite. La mobilisation du groupe France Télévisions pour produire en commun des contenus sur la désinformation en est également une.

Peut-être les projets qui ne marchent pas ne sont-ils pas pertinents. Est-il opportun de vouloir fusionner à toute force le réseau départemental de France Bleu et le réseau régional de France 3, dont les manières de travailler sont extrêmement différentes – à moins qu’on veuille remettre en cause leur existence en les appauvrissant par une mutualisation ? Si cette coopération a tant de mal à aboutir, c’est, non pas la faute des personnels sur le terrain, mais c’est tout simplement parce qu’elle n’a pas été bien pensée.

M. Inaki Echaniz (SOC). Je pose une nouvelle fois la question de l’impact réel de ce projet mené à marche forcée sur les rédactions locales – notamment dans les Pyrénées-Atlantiques, où l’on trouve une rédaction dans le Béarn et une autre au Pays basque, tant pour la radio que pour la télévision.

On a vu les conséquences de la nouvelle organisation des éditions locales de France 3 pour les équipes et, surtout, pour la qualité des programmes. La durée des journaux locaux, qui font la force de France 3, a ainsi été réduite de plusieurs minutes, ce qui a suscité la colère aussi bien des salariés que des téléspectateurs. Nous avons le même problème s’agissant des émissions en langue régionale.

Je souhaite que la ministre s’engage à préserver les rédactions locales spécifiques, les émissions en langues régionales et la couverture de l’actualité locale dans les territoires où c’est nécessaire.

La commission rejette les amendements.

Amendement AC1138 du gouvernement

Mme la présidente Fatiha Keloua Hachi. Cet amendement fait l’objet de très nombreuses séries de sous-amendements.

Mme Rachida Dati, ministre. L’amendement maintient la composition actuelle des conseils d’administration des sociétés nationales de programme, en reprenant ce modèle qui a fait ses preuves pour la société holding France Médias.

Sous-amendements AC1521 de M. Aymeric Caron, AC1512 et AC1503 de M. Aurélien Saintoul, et AC1507 et AC1515 de M. Aymeric Caron

M. Aurélien Saintoul (LFI-NFP). Vous postulez qu’il existe un besoin de coopérations par le bas. Mais, en réalité, il s’agit de rédactions différentes. Il n’y a aucune raison d’imposer à des entreprises qui n’ont pas le même métier de coopérer, pour reprendre votre expression. Cela n’a pas marché parce que cela ne pouvait pas marcher.

Notre groupe retire l’ensemble de ses sous-amendements à cet amendement du gouvernement. Nous avions été assez créatifs, mais le besoin ne se fait plus sentir.

Les sous-amendements sont retirés.

Sous-amendements AC1462 de Mme Soumya Bourouaha, AC1387 de Mme Céline Hervieu, AC1443 de M. Frédéric Maillot, AC1341, AC1306 et AC1384 de Mme Sophie Taillé-Polian, AC1372 de Mme Céline Hervieu, AC1304 de Mme Sophie Taillé-Polian et AC1371 de Mme Céline Hervieu (discussion commune)

Mme Céline Hervieu (SOC). Nous sommes complètement opposés à la création de la holding France Médias. Ce mauvais projet va fragiliser les spécificités de l’audiovisuel public, et notamment les métiers de la radio.

Des mutualisations ont été organisées dans le passé, mais elles n’ont pas permis d’améliorer la situation d’ensemble de l’audiovisuel public. Les difficultés rencontrées par ce dernier sont liées à des problèmes de financement et aux mauvaises décisions prises ces dernières années.

L’audiovisuel public français marche sur ses deux jambes : la radio et la télévision. Tenter d’additionner leurs forces en faisant fi des spécificités des différents métiers peut in fine être contre-productif. Ce n’est donc pas judicieux.

Nous aurons l’occasion d’en reparler plus tard, mais le sujet du financement est déterminant. Je rappelle que le budget de l’audiovisuel public français est deux fois moindre que celui de l’audiovisuel public allemand et respectivement inférieur de 40 % et de 30 % par rapport à ceux de ses homologues belge et britannique. La fragilité de notre audiovisuel public ne s’explique pas par le maintien de structures spécifiques pour la radio et la télévision, mais bien à titre principal par l’insuffisance de son budget.

Mme Sophie Taillé-Polian (EcoS). Le sous-amendement AC1341 propose de faire passer de quatorze à dix-sept le nombre des membres du conseil d’administration de la holding, pour y faire siéger les directeurs généraux de France Télévisions, de Radio France et de l’INA (Institut national de l’audiovisuel).

En effet, on peut lire dans le rapport de Mme Bloch : « Osons la comparaison de la holding avec un grand loft qui accueillerait différents appartements dont les propriétaires ont leur mot à dire mais aussi des règles de copropriété qui concourent au bien commun et qu’il faut respecter. »

Il est donc extrêmement important que les directeurs généraux des différentes filiales qui composeront la holding puissent siéger dans son conseil d’administration, afin d’éviter de confier un pouvoir trop important au président-directeur général.

La réunion est suspendue de dix-sept heures vingt à dix-sept heures quarante.

Mme Sophie Taillé-Polian (EcoS). Dans le cas où, malgré nos efforts, la holding verrait le jour, le sous-amendement AC1306 propose de renforcer le rôle des salariés au sein du conseil d’administration. La place qui leur est accordée n’est pas assez importante, alors qu’ils sont ceux qui connaissent le mieux les organisations, les entreprises et les différents métiers.

Aussi proposons-nous de porter de deux à quatre le nombre des représentants du personnel. Mais il serait également opportun de s’assurer que des représentants des salariés de chacune des filiales siègent au conseil d’administration. Si chaque filiale doit avoir son mot à dire, il faut – en paraphrasant la conclusion lyrique de Mme Bloch – que les directeurs généraux puissent révéler tous leurs talents au sein du conseil d’administration, mais aussi que l’ensemble des acteurs de chaque structure – et donc les salariés – y soient représentés.

Avec le sous-amendement AC1384, nous proposons que le conseil d’administration comprenne également deux représentants des sociétés de journalistes. Il s’agit ainsi de garantir l’indépendance de l’information et la diversité des voix s’exprimant à travers les médias du service public. Ces sociétés présentent en effet l’intérêt majeur de veiller à la déontologie ; elles pourront faire au conseil d’administration des remarques destinées à améliorer la qualité de l’information. Ce point est très important, car nous sommes très préoccupés par les conséquences éventuelles de ce projet de société holding. C’est la raison pour laquelle nous souhaitons que les sociétés de journalistes soient pleinement associées aux décisions qui les concerneront directement.

M. Emmanuel Grégoire (SOC). Le sous-amendement AC1372 propose également d’augmenter le nombre des membres du conseil d’administration de France Médias.

Je profite de cette occasion pour répondre aux propos que vous avez tenus tout à l’heure, madame la ministre. Je ne vous invective pas et je ne vous insulte pas. Quand j’utilise le mot « mensonge », j’explique pourquoi je le fais. Vous avez toute liberté pour me montrer que j’ai tort – et je le reconnaîtrai très volontiers si c’est le cas.

Ce matin, je vous ai entendue sur Europe 1 – je n’écoute pas que le service public – utiliser des mots extrêmement violents à l’endroit d’un certain nombre d’entre nous pour qualifier nos propos ou nos interrogations.

Je rappelle que vous êtes la ministre de tutelle de l’audiovisuel public et qu’à ce titre, vous êtes la garante de son indépendance éditoriale, comme le prévoit la loi. Je persiste et signe en disant que, derrière votre projet de holding, il y a une volonté de contrôle politique de la ligne éditoriale de l’audiovisuel public.

Vous avez porté à la télévision des accusations extrêmement graves contre des journalistes de « Complément d’enquête », en expliquant que vous aviez les preuves qu’ils avaient voulu payer des témoins contre vous. Confirmez-vous ces accusations ? Ou, si vous les infirmez, vous excusez-vous auprès des journalistes ?

Ce point n’est pas du tout annexe. Je le dis solennellement : le sujet de l’indépendance éditoriale des journalistes est central dans ce projet de réforme de l’audiovisuel public.

On ne peut pas s’amuser à tenir des déclarations rocambolesques ou fantaisistes à l’extérieur et se prévaloir ici du sérieux, y compris en accusant de mensonge ses adversaires politiques ou, en tout cas, les opposants à cette réforme.

J’espère, madame la présidente, que vous demanderez à la ministre de nous répondre.

M. Jérémie Patrier-Leitus, rapporteur. Le conseil d’administration de France Médias doit être capable d’assurer le pilotage stratégique de la nouvelle structure.

Augmenter le nombre de ses membres pour porter l’effectif à vingt-huit voire trente personnes reviendrait en fait à l’empêcher de rendre des arbitrages sur des sujets importants. Or nous sommes convaincus que l’audiovisuel public fait face à des défis majeurs.

S’agissant de la représentation des salariés, nous sommes plusieurs ici à avoir siégé au sein de conseils d’administration de l’audiovisuel public. Leur composition est équilibrée et chacun, à sa place, peut s’y exprimer. Je n’ai pas le sentiment que les représentants des salariés de l’audiovisuel public n’aient pas voix au chapitre.

Par ailleurs, le dialogue social ne se résume pas à ces conseils, madame Taillé-Polian. Il existe des instances à cet effet, et elles ne disparaîtraient pas avec la création de la holding. Dire que la composition des conseils d’administration n’est pas équilibrée constitue un contresens.

M. Saintoul et Mme Taillé-Polian nous ont expliqué que si les projets de coopérations par le bas n’avaient pas été mis en place, c’est parce qu’ils n’avaient pas lieu d’être ou n’étaient pas pertinents. Mais vous êtes les seuls à penser qu’un rapprochement entre France Bleu et France 3 n’est pas essentiel.

Vous critiquez à longueur de journée les médias du groupe Bolloré, tout en constatant que l’alliance de la télévision et de la radio fait leur force. Pourtant, vous refusez à l’audiovisuel public de se renforcer comme l’ont fait des acteurs privés. Considérer que la coopération entre la radio et la chaîne de télévision s’agissant de France Info n’a pas lieu d’être revient à affaiblir l’audiovisuel public.

Mme Rachida Dati, ministre. Ce texte maintient en l’état la composition des conseils d’administration. Les salariés y sont représentés. Rien ne change.

M. Echaniz s’est interrogé sur l’importance accordée aux langues régionales. Elles sont mentionnées par l’article 40 du cahier des charges et leur place n’est absolument pas affectée par la réforme.

Mme Sophie Taillé-Polian (EcoS). J’espère bien que les autres instances de dialogue social vont continuer à exister, puisqu’elles sont obligatoires dans des entreprises de cette taille. Il n’empêche que la représentation des salariés dans les conseils d’administration est selon moi trop faible. Par ailleurs, je considère que l’ensemble des filiales qui composeront cette holding doivent pouvoir participer au dialogue. Il convient donc d’augmenter le nombre des membres du conseil d’administration, afin que des représentants du personnel de chaque filiale puissent y siéger.

Vous n’avez pas répondu à la question sur les directeurs des filiales. Auront-ils voix au chapitre ou seront-ils de simples supplétifs du président-directeur général, qui concentrera tous les pouvoirs ?

Enfin, considérer que la fusion de France 3 et de France Bleu au sein d’une même structure n’est pas pertinente ne signifie pas que nous voulons affaiblir le service public. Arrêtons de caricaturer les propos et faisons preuve d’un peu d’honnêteté intellectuelle ! Construire des services publics de proximité suppose de tenir compte des différences de maillage entre les départements et les régions. Vouloir tout fusionner aboutit bien souvent à des baisses de budgets, ce qui met en danger les rédactions locales. J’ai pu le constater lors d’un déplacement dans la région Centre-Val de Loire, où l’on m’a expliqué que les crédits n’étaient pas à la hauteur, ce qui ne permettait pas de soutenir des initiatives communes et aboutissait à ne plus couvrir certains événements. C’est une réalité.

M. Aurélien Saintoul (LFI-NFP). Le rapporteur estime que faire passer de quatorze à vingt-huit le nombre des membres du conseil d’administration de la holding empêcherait ce dernier de prendre des décisions. Cet argument n’a pas de sens : on peut être nombreux et décider, en se respectant – n’est-ce pas ce que nous faisons au sein des groupes parlementaires ?

Plutôt que de présenter ce texte, vous auriez dû commencer par proposer une transcription législative des recommandations des états généraux de l’information. Cela aurait certainement permis de réunir une majorité beaucoup plus facilement et d’apporter des réponses beaucoup plus pertinentes. On peut donc s’interroger sur votre sens des priorités.

Le rapporteur a ensuite évoqué la réussite des médias du groupe Bolloré. Nous voulons que le service public réussisse, mais nous ne voulons pas qu’il reprenne leur modèle, où les mêmes intervenants disent tout le temps la même chose, à la radio et à la télévision. Nous défendons pour notre part la diversité des sensibilités et des points de vue. Vous vous orientez vers la concentration de la production et la multiplication de la diffusion. C’est précisément ce que nous ne voulons pas. Mme Bloch suggère d’ailleurs dans son rapport de s’orienter vers un seul directeur de l’information. Le service public garantissait l’expression de points de vue différents, ce qui faisait sa richesse et permettait à chacun de se sentir représenté.

La commission rejette successivement les sous-amendements.

Sous-amendement AC1414 de Mme Soumya Bourouaha

Mme Soumya Bourouaha (GDR). Ce sous-amendement propose de réduire d’un an la durée du mandat du conseil d’administration de France Médias, en le faisant passer à quatre ans.

Nous estimons qu’il est important de le renouveler assez régulièrement, d’autant qu’il va concentrer de nombreux pouvoirs s’exerçant sur l’ensemble des sociétés de l’audiovisuel public.

Mme Virginie Duby-Muller, rapporteure. Avis défavorable. Il est de tradition de nommer les dirigeants des sociétés nationales de programme pour cinq ans, conformément à l’article 47-4 de la loi du 30 septembre 1986. Pourquoi faudrait-il réduire ce mandat à quatre ans ?

Mme Rachida Dati, ministre. Même avis.

M. Inaki Echaniz (SOC). Vous m’avez répondu qu’il n’y avait aucun problème s’agissant de la place des langues régionales, madame la ministre.

Je vais pourtant vous lire un message des équipes de France 3 Euskal Herri Pays Basque publié en février 2025, car il est symptomatique ce qui se passe : « Si la direction a accepté de revenir sur la décision initiale concernant la durée de l’édition, elle maintient sa réduction des moyens durant les vacances. Il y aura une équipe en moins chaque jour pour réaliser ce journal – un exercice plus que difficile. La direction annonce également supprimer l’édition locale durant les deux semaines de fêtes de fin d’année. L’équipe de France 3 Euskal Herri Pays basque déplore la réduction des effectifs et estime que la fermeture en fin d’année reste un recul de l’information de proximité sur ce territoire particulièrement riche en actualité et événements, y compris pendant les vacances. L’une des conséquences est qu’il n’y aura aucun sujet en langue basque à l’antenne durant la période de fermeture. Le personnel de France 3 Euskal Herri Pays basque entend défendre au quotidien un service public de qualité et de proximité. »

Nous aussi, madame la ministre.

M. Alexis Corbière (EcoS). Le rapport Bloch, que vous citez à l’envi, est, certes, central, mais il ne faudrait pas qu’il devienne le rapport du bloc central. Mme Bloch préconise, par exemple, un investissement massif dans la stratégie numérique. Or quels moyens les promoteurs de la réforme envisagent-ils d’allouer à cet investissement ? Nous ne le savons pas.

Madame la ministre, vous avez déclaré, dans Le Monde, que la création d’une direction unique s’imposait au motif que certaines informations diffusées à la radio ne le sont pas à la télévision. L’argument est imparable… Pouvez-vous nous dire à quelles informations majeures vous faisiez allusion ? Vous savez, car vous êtes plus intelligente que cela, que ce n’est pas vrai. Tenons-nous-en à des arguments rationnels.

La commission rejette le sous-amendement.

Sous-amendement AC1417 de Mme Soumya Bourouaha

Mme Soumya Bourouaha (GDR). Nous proposons que les membres du conseil d’administration de la société France Médias, qui concentrera de nouveaux pouvoirs sur l’ensemble des sociétés de l’audiovisuel public, ne puissent exercer qu’un mandat non renouvelable. Il s’agit de garantir l’indépendance du conseil d’administration en mettant ses membres à l’abri des pressions liées à la perspective d’une reconduction.

M. Jérémie Patrier-Leitus, rapporteur. Avis défavorable. Il est salutaire d’encourager le renouvellement des membres du conseil d’administration, quels qu’ils soient, mais il serait dommage de leur interdire, par principe, de poursuivre leur engagement au sein de celui-ci.

Mme Rachida Dati, ministre. Vous avez raison, monsieur Corbière, les informations auxquelles je pensais ne sont pas mineures. Il arrive, par exemple, que plusieurs équipes de la même maison couvrent le même événement. Une meilleure coordination leur permettrait donc de traiter davantage d’informations. Par ailleurs, lorsque les journalistes d’une rédaction ont la primeur d’une information ou ont connaissance d’une information sous embargo, ils ne la communiquent pas forcément à leurs collègues des autres rédactions. Ce sont des remarques qui nous ont été remontées du terrain. Même avis que le rapporteur.

La commission rejette le sous-amendement.

Sous-amendements AC1345, AC1343 et AC1342 de Mme Céline Hervieu (discussion commune)

Mme Céline Hervieu (SOC). Puisque le projet de réforme tend à dessaisir le Parlement des questions relatives au financement, à l’indépendance et à la visibilité de l’audiovisuel public, nous proposons d’augmenter le nombre des députés membres du conseil d’administration de la holding France Médias.

Madame la ministre, les coopérations que vous appelez de vos vœux existent déjà ; le statut de l’entreprise n’y changera rien. Mais le traitement de l’information est différent selon qu’il est assuré par un journaliste de radio ou par un journaliste de télévision. C’est précisément cette complémentarité qui fait la force de notre audiovisuel public et que nous voulons sauvegarder.

Mme Virginie Duby-Muller, rapporteure. Le texte prévoit qu’un député et un sénateur représentent le Parlement au sein du conseil d’administration de France Médias – dont la composition sera identique à celle du conseil d’administration de France Télévisions. Si l’on vous suivait, les parlementaires y seraient plus nombreux que les représentants du personnel ! Avis défavorable.

Mme Rachida Dati, ministre. Même avis que la rapporteure.

Mme Sophie Taillé-Polian (EcoS). D’abord, je m’associe aux questions posées par Emmanuel Grégoire : nous devons être certains que la ministre soutient l’audiovisuel public. Or, dans certaines de ses déclarations, elle s’en est clairement prise à ses salariés, à ses journalistes. Ensuite, qu’en est-il de la présence des directeurs généraux des filiales au conseil d’administration de la holding ? Si elle n’est pas assurée, le président détiendra bien un pouvoir exorbitant. Enfin, plusieurs équipes peuvent couvrir un même événement, mais une équipe de radio ne travaille pas du tout de la même manière qu’une équipe de télévision.

M. Aurélien Saintoul (LFI-NFP). Peut-être trouvez-vous ces sous-amendements problématiques, mais il me paraît très sain, sur le plan démocratique, que plus d’un député siège au conseil d’administration. Il y va de la représentation des différentes forces qui composent le paysage politique et notre assemblée, qui compte onze groupes parlementaires. Rien ne justifie que le président du conseil d’administration soit privé de l’éclairage d’au moins un groupe de l’opposition, lequel doit pouvoir avoir accès aux informations relatives à l’entreprise. La présence d’au moins deux députés garantirait une forme de transparence et la bonne information du Parlement. Ces sous-amendements sont donc utiles et pertinents ; je ne comprends pas qu’on les balaie d’un revers de la main.

La commission rejette successivement les sous-amendements.

Sous-amendements AC1349, AC1347 et AC1346 de Mme Céline Hervieu

Mme Céline Hervieu (SOC). Il s’agit, cette fois, d’augmenter le nombre des sénateurs siégeant au conseil d’administration, dans le but, là encore, de sauvegarder l’indépendance de l’audiovisuel public face à une direction toute-puissante. Dans la période troublée que nous vivons, où les jeunes s’informent de plus en plus sur les réseaux sociaux, nous avons besoin d’un audiovisuel qui soit suffisamment fort pour lutter contre la diffusion de fake news et suffisamment indépendant pour nous permettre de lutter contre les grands groupes de médias privés. Puisque la direction de la holding sera nommée par l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (Arcom), elle-même associée à la présidence de la République, il est nécessaire que le pluralisme soit respecté et que des contre-pouvoirs existent au sein du conseil d’administration.

M. Jérémie Patrier-Leitus, rapporteur. M. Grégoire, qui siège au conseil d’administration d’une entité de l’audiovisuel public, pourrait vous dire que le Parlement y est représenté de manière satisfaisante.

Soyons sérieux ! Le conseil d’administration prend des décisions stratégiques. Quant au Parlement, il contrôle l’audiovisuel public dans le cadre de ses prérogatives, notamment lors de l’examen du projet de loi de finances. Des parlementaires siègent au conseil d’administration au même titre que les représentants de l’État ou des salariés ; il n’y a aucune raison qu’ils y soient surreprésentés.

Mme Rachida Dati, ministre. Même avis que le rapporteur. Je précise, à l’intention de M. Echaniz, que France 3 diffuse notamment neuf heures en basque, 255 heures de programmes sous-titrés en basque et que France Bleu Pays basque diffuse, chaque année, 600 heures de programmes en basque.

Quant aux directeurs généraux des filiales, ils assistent à chaque conseil d’administration.

M. Erwan Balanant (Dem). Je m’étonne que le groupe Socialistes, qui semble avoir renoncé à ralentir les débats, persiste à défendre ce type de sous-amendements. Aucun conseil d’administration dont les délégations parlementaires relèvent de notre commission ne compte deux, cinq ou huit députés. En règle générale, il n’y en a qu’un – alternativement un homme et une femme. Restons-en là. Au demeurant, tous les députés membres d’un conseil d’administration n’y siègent pas. Soyons sérieux et évitons de ralentir inutilement les débats.

M. Alexis Corbière (EcoS). La question est fondamentale. Nous nous inquiétons qu’une centralisation du pouvoir similaire à celle qui étouffe le pays soit instaurée au sein de la future holding. C’est pourquoi nous souhaitons que les parlementaires qui siégeront au sein de son conseil d’administration reflètent le paysage politique actuel. Je m’étonne, du reste, que nos collègues du groupe RN ne votent pas pour ces sous-amendements – cela en dit long, peut-être, sur la manière dont ils concevraient les choses s’ils étaient aux responsabilités.

Si Emmanuel Grégoire siège au conseil d’administration de France Télévisions, c’est parce qu’actuellement, aucun groupe parlementaire n’est majoritaire. S’il en est autrement demain, les membres du collège de l’Arcom seront nommés par le président de l’Assemblée nationale, le président du Sénat et le président de la République, et c’est un député de la majorité présidentielle qui siégera au CA de la holding. Avouez que c’est inquiétant !

M. Aurélien Saintoul (LFI-NFP). Nous ne voterons pas pour ces sous-amendements dès lors que ceux qui visaient à augmenter le nombre des députés membres du conseil d’administration ont été rejetés.

Monsieur Balanant, si des députés membres d’un conseil d’administration n’y siègent pas, c’est regrettable. La question qui se pose est celle de savoir si le pluralisme doit être respecté au sein de ces instances. Nous, nous estimons que, parce que des décisions stratégiques y sont prises, la diversité de nos assemblées doit y être représentée, même partiellement. Du reste, pour chaque mission d’information, deux rapporteurs sont désignés : l’un appartient à la majorité, l’autre à l’opposition. Pourquoi devrait-on tenir un raisonnement différent à propos de la représentation du Parlement au sein de conseils d’administration ?

M. Denis Masséglia, rapporteur pour avis de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire. Le rôle d’un député n’est pas de siéger dans un conseil d’administration ; il est de contrôler l’action du gouvernement. C’est pourquoi j’ai défendu, en commission des finances, un amendement à l’article 5 qui visait précisément à renforcer le contrôle du Parlement sur les futures conventions stratégiques pluriannuelles (CSP). Or vous avez voté contre, main dans la main avec le Rassemblement national !

La commission rejette successivement les amendements.

Sous-amendement AC1354 de Mme Céline Hervieu

Mme Céline Hervieu (SOC). Il s’agit de garantir le respect de la parité au sein du conseil d’administration de la future holding.

Mme Virginie Duby-Muller, rapporteure. Le sous-amendement est satisfait par l’article 2 de la loi du 3 août 2018 visant à garantir la présence des parlementaires dans certains organismes extérieurs au Parlement et à simplifier les modalités de leur nomination. La parité est déjà assurée au sein des conseils d’administration de l’audiovisuel public. Avis défavorable.

Le sous-amendement est retiré.

Sous-amendements AC1353 et AC1370 de Mme Céline Hervieu, sous-amendements identiques AC1369 de Mme Céline Hervieu et AC1420 de Mme Soumya Bourouaha et sous-amendement AC1352 de Mme Céline Hervieu (discussion commune)

Mme Céline Hervieu (SOC). Nous proposons de réduire la présence de l’État au sein du conseil d’administration en diminuant le nombre de ses représentants, actuellement fixé à cinq. Il s’agit de préserver cette structure d’une centralisation étatique et de garantir son indépendance, laquelle sera mise à mal par la fusion puisque la multiplicité des structures garantit la pluralité, qui protège elle-même l’indépendance.

Mme Soumya Bourouaha (GDR). Notre sous-amendement vise à abaisser de cinq à trois le nombre des représentants de l’État au sein du conseil d’administration afin de renforcer l’indépendance éditoriale de l’audiovisuel public. Nous cherchons en effet à garantir, par une plus grande neutralité, la liberté d’expression dans le traitement de l’information. Or les nominations dans l’audiovisuel public sont souvent perçues comme politiques.

M. Jérémie Patrier-Leitus, rapporteur. Je souhaiterais que M. Grégoire éclaire ses collègues du Nouveau front populaire sur le rôle de l’État dans ces conseils d’administration. On semble dire que les hauts fonctionnaires chargés de représenter leurs ministères au sein des conseils d’administration, en l’espèce ceux de la culture et de l’économie, y porteraient une parole politique. Si c’était le cas, cela se saurait ! Il est tout de même important qu’un ministère soit représenté au sein du conseil d’administration d’une entité dont il exerce la tutelle. On ne peut pas affirmer que l’indépendance de l’audiovisuel public est remise en cause par la présence de représentants de l’État au sein du conseil d’administration.

M. Alexis Corbière (EcoS). Ils sont tout de même là pour défendre la politique de leur ministre !

M. Jérémie Patrier-Leitus, rapporteur. Il est question de l’indépendance éditoriale des médias, non de la stratégie de l’entreprise publique. Encore une fois, je n’ai jamais vu un représentant de l’État porter une parole politique ou remettre en cause l’indépendance des rédactions de l’audiovisuel public dans un conseil d’administration. Avis défavorable.

Mme Rachida Dati, ministre. Je souscris entièrement aux propos du rapporteur. Avis défavorable.

M. Aurélien Saintoul (LFI-NFP). Monsieur le rapporteur, d’abord, le texte prévoit que cinq représentants de l’État siègent au conseil d’administration de la future holding. Or la tutelle de l’entreprise ne sera pas exercée par cinq ministères différents. Ensuite, vous nous avez répondu tout à l’heure qu’il n’y avait pas lieu d’augmenter de façon pléthorique le nombre des représentants de la nation au sein du conseil d’administration. Pourquoi en irait-il différemment des représentants de l’État ?

Par ailleurs, vous nous dites que ces derniers ne sont pas des représentants du ministre. Il est pourtant déjà arrivé que des personnalités politiques soient reclassées en représentants de l’État. Ainsi, un ancien directeur de cabinet du ministre de l’intérieur a été récemment nommé préfet des Hauts-de-Seine, alors qu’il n’appartenait pas à ce corps auparavant, et il a manifestement décidé de faire de la politique.

Enfin, j’ouvre une parenthèse concernant les langues régionales : la radio Ici Breizh Izel a annoncé qu’elle cesserait de diffuser les journaux d’information en langue bretonne.

Mme Sophie Taillé-Polian (EcoS). Nous touchons là un des points centraux de notre discussion, à savoir notre crainte, largement partagée, de voir centralisé entre les mains d’une seule personne un pouvoir très important sur le travail des salariés de l’audiovisuel public. Nous considérons donc que le conseil d’administration doit être un garde-fou en cas de pressions politiques sur le dirigeant. Il jouera d’autant plus efficacement ce rôle que la pluralité politique y sera respectée, que la représentation des salariés, notamment des sociétés de journalistes, y sera forte et que les directeurs généraux y auront un droit de vote. C’est fondamental !

La commission rejette successivement les sous-amendements.

La réunion est suspendue de dix-huit heures vingt à dix-huit heures trente.

Sous-amendement AC1444 de M. Frédéric Maillot

M. Jérémie Patrier-Leitus, rapporteur. Il s’agit de préciser que l’intérêt pour l’audiovisuel des représentants de l’État désignés pour siéger au conseil d’administration devra avoir été prouvé. Mais le fait que ces représentants soient nommés au titre de leurs fonctions suffit à démontrer leur expertise. Ainsi, on peut présumer que la directrice générale des médias et des industries culturelles connaît l’audiovisuel public.

J’ajoute que tous ceux qui ont siégé au sein d’un conseil d’administration savent que l’on y évoque les questions budgétaires ou immobilières, les marchés publics, jamais la stratégie éditoriale. Par ailleurs, augmenter à l’infini le nombre des représentants au sein du conseil d’administration les priverait de toute fonction stratégique et empêcherait la prise de décisions.

Mme Rachida Dati, ministre. Même avis que le rapporteur.

Mme Sophie Taillé-Polian (EcoS). En dépit de quelques inquiétudes, les entreprises du service public de l’audiovisuel sont aujourd’hui protégées des influences politiques sur leur ligne éditoriale. Mais qui vous dit qu’il en ira de même à l’avenir ? Les instances que nous instaurons doivent résister aux crises. Or dans tous les pays dans lesquels l’extrême droite arrive au pouvoir, on observe une mise sous tutelle et une fragilisation du service public de l’audiovisuel : un conseil d’administration plus robuste et plus diversifié peut constituer une protection en cas d’évolution vers une démocratie illibérale – qui, de fait, n’en est pas une. Ne faites pas comme si notre pays n’était pas confronté à ce danger.

La commission rejette le sous-amendement.

Sous-amendements AC1359, AC1356, AC1355 de Mme Céline Hervieu et AC1419 de Mme Soumya Bourouaha (discussion commune)

Mme Céline Hervieu (SOC). Nous proposons de porter à dix le nombre de personnalités indépendantes au sein du conseil d’administration. C’est un fait : la holding, première étape vers une potentielle fusion, ouvre la porte à une ingérence politique grandissante. Le fait que le Rassemblement national plaide pour une privatisation de l’audiovisuel public et pour son détricotage, auquel ce projet de réforme va contribuer, devrait nous interroger.

L’exemple de la Hongrie est frappant. Dès son arrivée au pouvoir, Viktor Orbán n’a cessé de dénigrer l’audiovisuel public, qu’il transforme petit à petit en organe de propagande. Pour éviter que cela ne se produise en France, nous avons besoin de garantir la pluralité et l’indépendance des membres du conseil d’administration.

Mme Virginie Duby-Muller, rapporteure. Nous émettons évidemment un avis défavorable à ces sous-amendements d’obstruction.

Mme Rachida Dati, ministre. Même avis.

M. Alexis Corbière (EcoS). Ce ne sont pas des sous-amendements dilatoires ; ils portent sur un sujet de fond. J’ai siégé pendant six ans au conseil d’administration de LCP-AN. Nous avons changé de présidence, discuté de la ligne éditoriale et fait des choix stratégiques. Les parlementaires y ont du pouvoir, heureusement – ils choisissent même le président !

Vous nous répétez que le statu quo n’est pas possible face aux défis, mais c’est parce que nous sommes inquiets que nous discutons en détail de la composition de la nouvelle instance. Demander une plus grande pluralité de la représentation parlementaire et la présence des directions générales des chaînes, ce n’est pas une perte de temps. Nous craignons que le conseil d’administration soit une caisse d’enregistrement centralisée autour de la présidence qui aura été choisie par l’Arcom – sachant que la capacité de celle-ci à choisir des personnalités totalement indépendantes du pouvoir politique est très perfectible ! Quant aux représentants du ministère de la culture, madame la ministre, j’imagine qu’ils sont plutôt d’accord avec les politiques publiques que vous mettez en place ! Parlons-nous honnêtement.

Nous plaidons donc simplement pour éviter une concentration extrême du pouvoir au sein du conseil d’administration.

La commission rejette successivement les sous-amendements.

Sous-amendement AC1550 de M. Philippe Ballard

M. Philippe Ballard (RN). Il serait utile d’ajouter que la personnalité indépendante qui siégera au conseil d’administration n’a « jamais travaillé dans un média d’opinion, eu de mandat électif politique et syndical ou de lien avec des organisations liées à des pays étrangers. »

M. Jérémie Patrier-Leitus, rapporteur. Je comprends votre intention mais le terme « média d’opinion » est trop imprécis pour être opérant. Je vous invite donc à retirer votre amendement.

S’agissant des risques évoqués par Mmes Taillé-Polian et Hervieu, je crois qu’il faut arrêter de jouer sur les peurs. Madame Hervieu, on ne peut pas parler d’« ingérence politique grandissante » dans les médias de l’audiovisuel public lorsque France Télévisions réalise des enquêtes sur des ministres en fonction et même sur sa ministre de tutelle ! Vous avez le droit d’avoir des préoccupations, mais il me semble dangereux de tenir de tels propos.

Depuis tout à l’heure, vous défendez des amendements visant à anticiper le cas où le RN arriverait au pouvoir. Mais s’il arrive au pouvoir, ce n’est pas dans les conseils d’administration qu’il mettra en œuvre ses décisions : la privation de l’audiovisuel public nécessiterait une loi ! Vous aurez beau avoir trituré ce texte, cela ne servira rien.

Mme Rachida Dati, ministre. Jusqu’à maintenant, les ingérences évoquées n’ont jamais eu de matérialité. Ce n’est même pas jouer à se faire peur, c’est chercher à nous intimider. Vous considérez que ceux qui ne partagent pas votre couleur politique ou votre idéologie ne sont pas des gens bien. Il faudrait que nous nous laissions marcher dessus. Eh bien non ! Nous ne sommes pas les serpillières des gens de gauche. Le passé et l’actualité démontrent qu’être de gauche, ce n’est pas forcément être quelqu’un de bien.

Vous vous gargarisez de mots ! Nous n’allons pas nous excuser : nous avons le droit de défendre un audiovisuel public fort, pour tous les Français. Ce n’est pas à vous de décider qui peut y avoir accès ou pas. Tous les Français le financent, donc ils y ont droit !

S’agissant de la personnalité indépendante évoquée par M. Ballard, elle ne pourra, de fait, avoir assuré un mandat électif politique ou syndical dans un passé récent. De surcroît, il n’existe pas de définition en France d’un « média d’opinion ». C’est la raison pour laquelle cet amendement pose difficulté.

Mme Sophie Taillé-Polian (EcoS). Depuis l’ORTF (Office de radiodiffusion-télévision française), il y a toujours eu des risques, des velléités voire des actes d’ingérence politiques dans les médias publics. Nous devons avoir pour principe fondamental de nous en garder.

Dans les pays où les amis du Rassemblement national sont au pouvoir, il y a effectivement des tentatives musclées d’ingérence mais chaque outil de protection peut jouer son rôle ; chaque détail peut compter. Peut-être le RN trouve-t-il cette réforme à son goût, d’ailleurs, puisqu’il a voté l’article 2 !

La commission rejette le sous-amendement.

Sous-amendements AC1368 et AC1366 de Mme Céline Hervieu (discussion commune)

Mme Céline Hervieu (SOC). L’amendement AC1368 vise à porter à quatre le nombre de personnalités indépendantes chargées de veiller à l’impartialité de l’information.

Je n’ai pas spécifiquement dénoncé l’existence d’une ingérence politique : j’ai expliqué que le projet de holding et de fusion était potentiellement une porte ouverte à de l’ingérence politique, par une forme de centralisation, en soulignant que la multiplicité des structures permettait de garantir la pluralité et donc l’indépendance.

Quoi qu’il en soit, il y a bien eu récemment une ingérence politique assez grave, qui mérite d’être dénoncée.

Suivant l’avis du rapporteur, la commission rejette successivement les sous-amendements.

Sous-amendements AC2033 de Mme Céline Calvez et AC2052 de Mme Sophie Taillé-Polian (discussion commune)

Mme Céline Calvez (EPR). Je propose que la personnalité indépendante désignée par l’Arcom et chargée de veiller à l’impartialité de l’information soit également chargée de veiller à son honnêteté, à son indépendance et à son pluralisme.

La décision du Conseil d’État de février 2024 a en effet souligné l’importance du pluralisme de l’information, dont le respect est aussi visé par la loi du 14 novembre 2016 visant à renforcer la liberté, l’indépendance et le pluralisme des médias dite Bloche, tout comme l’honnêteté et l’indépendance.

Mme Sophie Taillé-Polian (EcoS). Dans le même esprit, mon amendement propose d’ajouter les termes « indépendance » et « pluralisme », qui sont fondamentaux pour la déontologie journalistique.

Mme Virginie Duby-Muller, rapporteure. L’amendement AC2033 complète les missions de l’administrateur indépendant de France Médias. La précision qu’il apporte, reprenant les principes édictés par la loi Bloche, nous apparaît utile : nous y émettons un avis favorable.

Nous invitons Mme Taillé-Polian à retirer son amendement au bénéfice de celui de Mme Calvez, plus complet.

Le sous-amendement AC2052 est retiré.

La commission adopte le sous-amendement AC2033.

Sous-amendement AC2053 de Mme Sophie Taillé-Polian

Mme Sophie Taillé-Polian (EcoS). Dans son rapport, Mme Laurence Bloch soulève une inquiétude que nous avons déjà formulée – sans obtenir de réponse – au sujet de l’avenir de la radio. Elle souligne que la tutelle et le Parlement devront être particulièrement attentifs à ce que l’audio ne soit pas traité comme le parent pauvre de la holding : l’audio pourrait en effet être moins bien moins financé et pourrait dépérir, au profit des contenus vidéo.

Nous souhaitons donc que l’une des personnalités nommées par l’Arcom au conseil d’administration bénéficie d’une expérience reconnue dans le domaine radiophonique. Ce serait un très léger garde-fou, sur un sujet fondamental.

M. Jérémie Patrier-Leitus, rapporteur. Votre intention est louable et nous partageons vos préoccupations. Les résultats d’audience remarquables et la qualité des programmes de Radio France ont été rappelés ; il est important que la holding ne fragilise pas les radios.

Nous considérons néanmoins que les membres du conseil d’administration de France Médias doivent avoir une expérience transversale – nous défendrons d’ailleurs tout à l’heure un sous-amendement à ce sujet. Veillons à ne pas trop spécialiser les administrateurs, au risque qu’ils ne représentent plus qu’un seul intérêt. Avis défavorable.

Mme Rachida Dati, ministre. L’Arcom désignera les personnalités indépendantes « à raison de leur compétence » : l’amendement est donc satisfait. Avis défavorable, à moins de son retrait.

M. Alexis Corbière (EcoS). La question de l’expérience en télévision ou en radio me semble pertinente. Vous m’avez répondu tout à l’heure, madame la ministre, qu’il arrivait que des équipes s’aperçoivent, sur le terrain, qu’elles se marchent sur les pieds.

Mme Rachida Dati, ministre. Ce n’est pas ce que j’ai dit !

M. Alexis Corbière (EcoS). Une équipe de télévision et une équipe de radio ne font pas le même métier et traitent différemment un même événement. Radio France est leader dans le domaine de la radio, grâce à son excellence, mais elle n’exerce pas le même métier que France Télévisions. Nous craignons que l’optimisation visée ne conduise à une concentration des rédactions et à une baisse de la qualité de l’information.

La commission rejette le sous-amendement.

Sous-amendement AC2054 de Mme Sophie Taillé-Polian

Mme Sophie Taillé-Polian (EcoS). Nous souhaitons que l’une des personnalités nommées par l’Arcom bénéficie d’une expérience reconnue à l’international.

Je considère qu’il est de bon aloi de fixer les compétences requises pour siéger au conseil d’administration, tout en laissant à l’Arcom le choix des personnes. Je ne suis donc pas convaincue par votre argument, madame la ministre : nous espérons effectivement que l’Autorité ne nommera pas une personne sans aucune expérience des médias ! M. le rapporteur soutient d’ailleurs le même principe que nous – j’espère que son sous-amendement à venir ne tombera pas en cas d’adoption de l’amendement de réécriture globale de l’article 3.

Mme Virginie Duby-Muller, rapporteure. Avis défavorable. Lorsque notre collègue Jean-Raymond Hugonet, rapporteur au Sénat, avait proposé une rédaction similaire, France Médias Monde devait faire partie de la holding. Dans la mesure où elle est désormais exclue du périmètre, il ne nous apparaît pas nécessaire de reprendre cette proposition. C’est à l’Arcom qu’il reviendra de choisir des profils diversifiés dont les compétences pourront bénéficier au conseil d’administration.

M. Jérémie Patrier-Leitus, rapporteur. La radio n’est effectivement pas la télévision, cher collègue Corbière, mais admettez avec moi qu’il est important que l’audiovisuel public crée un média global de proximité. La mission de cet acteur doit consister à fabriquer de l’information, pour la radio ou la télévision, à destination des Français vivant par exemple dans les territoires ruraux.

L’ensemble des professionnels estiment – comme Laurence Bloch dans son rapport – que le projet de coopération entre France 3 et France Bleu, lancé en 2018, ne fonctionne toujours pas ! Figurez-vous que le site internet du réseau Ici n’inclut pas les textes de la rédaction de France 3, et que France Télévisions bâtit une stratégie d’éducation aux médias à laquelle elle n’associe pas Radio France. Peut-on l’accepter ?

Ce n’est pas les salariés qui sont en cause, c’est l’absence d’arbitrage sur des décisions essentielles. En dépit des financements importants alloués à l’audiovisuel public, il n’existe pas aujourd’hui de média public de proximité qui soit fort. Vous dites qu’il y aurait d’autres manières de faire et que les coopérations pourraient mieux fonctionner. Notre conviction, c’est qu’en l’absence de holding, les décisions stratégiques essentielles ne pourront pas être prises.

Mme Rachida Dati, ministre. Avis défavorable également.

M. Emmanuel Grégoire (SOC). L’argument principal en faveur de la holding tient au fait que les synergies de base n’auraient pas fonctionné. Or le rapport de l’IGF a bien montré que des synergies pouvaient venir du terrain sans nécessité d’une holding et que celle-ci, à l’inverse, n’en générait pas forcément.

D’une certaine manière, vous blâmez les effets dont vous êtes la cause : tous les programmes de rapprochement par la base étaient financés par les crédits de transformation – ceux, précisément, que le gouvernement a supprimés dans le cadre de la régulation infra-annuelle sur l’exercice budgétaire 2024 !

La commission rejette le sous-amendement.

Sous-amendement AC1301 de M. Max Mathiasin

M. Salvatore Castiglione (LIOT). Ce sous-amendement tend à préciser que l’une des personnalités indépendantes mentionnées au 3° bénéficie d’une expérience reconnue dans un territoire d’outre-mer.

M. Jérémie Patrier-Leitus, rapporteur. Il est essentiel de s’assurer que la question des outre-mer sera prise en considération dans les décisions stratégiques du conseil d’administration, mais gardons-nous d’y nommer des personnalités trop spécialisées. Avis défavorable.

La commission rejette le sous-amendement.

La réunion est suspendue de dix-neuf heures cinq à dix-neuf heures vingt.

Sous-amendements AC2049 et AC1382 de Mme Soumya Bourouaha (discussion commune)

Mme Soumya Bourouaha (GDR). Le sous-amendement AC2049 est défendu.

Le sous-amendement AC1382 tend à renforcer la place des salariés dans le conseil d’administration des entreprises de l’audiovisuel. Alors que la réforme va bouleverser leur organisation, leurs conditions d’exercice, leurs missions et les équilibres internes, ceux qui font vivre le service au quotidien sont malheureusement tenus à l’écart des décisions. Leur voix est essentielle.

M. Jérémie Patrier-Leitus, rapporteur. La composition des conseils d’administration nous paraît équilibrée – d’ailleurs, aucun syndicat ne nous a demandé de la modifier. En outre, si la holding est effectivement créée, les filiales – Radio France et France Télévisions – garderont leur conseil d’administration, au sein duquel siègent les représentants des salariés. Avis défavorable.

Mme Rachida Dati, ministre. Même avis.

Mme Sophie Taillé-Polian (EcoS). Il est normal que des représentants des salariés siègent dans les CA des filiales. Mais les arbitrages financiers et les grandes orientations se décideront au niveau de la holding : son président et son conseil d’administration disposeront ainsi d’un fort pouvoir d’influence sur les choix des filiales. Il est donc à la fois logique et très important qu’y siègent davantage de représentants des organisations syndicales des filiales.

La commission rejette successivement les sous-amendements.

Sous-amendement AC2080 de M. Jérémie Patrier-Leitus

M. Jérémie Patrier-Leitus, rapporteur. Dans un souci d’indépendance, nous souhaitons que l’un au moins des deux représentants des salariés siégeant au conseil d’administration de France Médias soit un journaliste professionnel – d’où ce sous-amendement. L’information étant au cœur des médias de l’audiovisuel public, il nous paraît difficilement compréhensible qu’aucun journaliste n’y siège.

Mme Rachida Dati, ministre. Pour l’INA (Institut national de l’audiovisuel), cela n’aurait pas de sens car il n’y a pas de journalistes.

Par ailleurs, votre proposition réduirait d’un siège la représentation des salariés : cela me gêne. Je ne veux pas contraindre les élections professionnelles. Je vous demande donc de bien vouloir retirer votre amendement.

Mme Sophie Taillé-Polian (EcoS). Je partage la volonté du rapporteur, mais il me semble délicat de demander à une même personne de représenter à la fois l’ensemble des salariés – un mandat souvent confié par une organisation syndicale – et ceux d’un métier en particulier, dans une logique plus corporatiste. C’est la raison pour laquelle nous avions proposé d’ajouter un représentant des sociétés de journaliste dans la composition du CA. Ce serait plus équilibré.

Madame la ministre, même si l’INA est un média patrimonial, il y a bien une rédaction, qui travaille sur la base des archives dans une démarche éditoriale. Et ses journalistes font d’ailleurs un travail remarquable.

La commission adopte le sous-amendement.

Sous-amendements AC1442 de M. Frédéric Maillot et AC1464 de M. Steevy Gustave (discussion commune)

Mme Soumya Bourouaha (GDR). Pour que nos médias soient à l’image de la France, ce sous-amendement de mon collègue Frédéric Maillot, député de La Réunion, vise à garantir la présence d’un représentant des organisations syndicales outre-mer compétent et légitime dans les instances décisionnelles de l’audiovisuel.

Selon le dernier rapport annuel de l’Arcom (Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique) sur le sujet, la diversité dans les médias progresse peu, voire pas du tout. Depuis 2013, les personnes perçues comme non blanches ne représentent que 15 % des personnes à l’écran, un chiffre qui descend à tout juste 9 % en 2023 dans les programmes d’information. Cette sous-représentation est particulièrement criante dans les sujets politiques ou d’actualité. Pire encore : ces personnes sont quatre fois plus souvent associées à une image négative qu’à une image neutre. D’où ce sous-amendement.

Mme Sophie Taillé-Polian (EcoS). Le dernier rapport de l’Arcom sur la représentation de la diversité de la société française dans les médias de 2013 à 2023 est sans appel : depuis 2013, les personnes perçues comme non blanches sont représentées en moyenne à hauteur de 15 %, et cette part est plus faible encore dans les programmes d’information. Les personnes non blanches sont sous-représentées dans les sujets liés à la politique française – seulement 8 % en 2023 – et sur-représentées négativement dans l’information en continu.

Le rapport alerte sur le renforcement de cette représentation négative. Malgré la politique menée depuis plus de dix ans par les sociétés d’audiovisuel public, comme France Télévisions, avec le pacte pour la visibilité des outre-mer, on ne constate aucune évolution majeure en la matière. Déjà en 2015, Delphine Ernotte, constatant une faible diversité sociale et ethnique, souhaitait que France Télévisions soit le reflet de la France. Or la suppression de France Ô, seule chaîne dédiée à l’outre-mer, a favorisé l’invisibilisation de l’actualité ultramarine. Le « réflexe outre-mer » n’existe pas, a fortiori lorsque son actualité est reléguée au rang d’information secondaire.

Pour pallier ce manque de représentativité, le sous-amendement AC1464 tend à assurer la présence de deux référents disposant d’une compétence avérée et reconnue dans le domaine de l’audiovisuel public de l’outre-mer à des postes clés.

Mme Virginie Duby-Muller, rapporteure. Avis défavorable. L’idée peut paraître séduisante sur le papier, mais il ne nous semble pas pertinent de spécialiser à outrance les personnalités qui siégeront au sein du conseil d’administration.

Mme Rachida Dati, ministre. Même avis. Je précise que j’ai déjà répondu à Steevy Gustave, qui m’avait sollicitée sur ce sujet.

La commission rejette successivement les sous-amendements.

Sous-amendement AC1302 de M. Joël Bruneau

M. Salvatore Castiglione (LIOT). Ce sous-amendement prévoit que les directeurs généraux des filiales sont représentés au conseil d’administration de France Médias, avec voix consultative. Mais j’ai cru comprendre tout à l’heure que cette demande était déjà satisfaite.

M. Jérémie Patrier-Leitus, rapporteur. Il n’y aura dans les filiales que des directeurs généraux délégués, et non des directeurs généraux. Compte tenu de cette erreur de forme, je vous demande de bien vouloir retirer ce sous-amendement.

Le sous-amendement est retiré.

Sous-amendement AC2055 de Mme Sophie Taillé-Polian

Mme Sophie Taillé-Polian (EcoS). Ce sous-amendement prévoit que les élus du personnel de chaque société sont présents aux séances du conseil d’administration de la holding lorsque celles-ci abordent des questions sociales relatives à leur société. Cette disposition renforcera les synergies qui, pour être efficaces, devront aussi être ascendantes. Nous avons demandé sans succès qu’il y ait plus de représentants des personnels, ne serait-ce que pour mieux refléter leur diversité. Il s’agit là d’une proposition de repli.

Par ailleurs, compte tenu du faible nombre de représentants syndicaux dans les CA, j’insiste sur le fait qu’il n’est vraiment pas de bonne politique de demander aux organisations syndicales de représenter aussi les métiers sur leur quota, ainsi que le prévoit le sous-amendement du rapporteur qui vient d’être adopté. Il faut retravailler ce sujet.

M. Jérémie Patrier-Leitus, rapporteur. Avis défavorable. Vous mélangez les enjeux du conseil d’administration avec le dialogue social – nécessaire et légitime – au sein des sociétés de l’audiovisuel public. Votre proposition reviendrait à modifier la composition du conseil d’administration en fonction de l’objet des réunions : sauf votre respect, ce serait une usine à gaz.

Mme Rachida Dati, ministre. La composition d’un CA ne change pas en fonction des thèmes : une fois qu’il est installé, il traite de tous les sujets, y compris des questions sociales.

Mme Marie Mesmeur (LFI-NFP). La démocratie n’est jamais une usine à gaz, monsieur le rapporteur.

Madame la ministre, en fonction de l’ordre du jour, certains intervenants sont parfois invités au conseil d’administration. En outre, contrairement à ce qu’a affirmé M. le rapporteur, les CA ne font pas que voter le budget ou définir des grandes orientations : dans de nombreuses institutions publiques, ils votent aussi des motions. Il me semble donc intéressant et pertinent que les élus du personnel soient invités à participer aux séances qui les concernent, à titre consultatif.

M. Jérémie Patrier-Leitus, rapporteur. C’est possible !

La commission rejette le sous-amendement.

Sous-amendement AC2056 de Mme Sophie Taillé-Polian

Mme Sophie Taillé-Polian (EcoS). Dans le même esprit que le précédent, ce sous-amendement prévoit que les élus des sociétés de journalistes sont invités aux séances du conseil d’administration traitant de sujets relatifs à l’information dans une ou plusieurs des sociétés.

L’objectif n’est pas de moduler la composition du conseil d’administration en fonction des thèmes abordés, simplement d’inviter certains représentants à y participer à titre consultatif. C’est effectivement déjà possible, mais pas obligatoire. Nous voulons être sûrs que si la holding venait à être créée, le dialogue social, l’honnêteté journalistique et la transparence seront garantis. C’est l’objet de cette série d’amendements très complémentaires.

Suivant l’avis du rapporteur, la commission rejette le sous-amendement.

Sous-amendement AC2051 de Mme Sophie Taillé-Polian

Mme Sophie Taillé-Polian (EcoS). Ce sous-amendement vise à supprimer l’alinéa 8 de l’amendement du gouvernement, qui aboutirait à supprimer les fonctions des directeurs généraux des entreprises regroupées au sein de la holding au profit d’un président-directeur général unique qui concentrerait le pouvoir, ce qui nuirait à l’indépendance des filiales. C’est l’essence même de la holding exécutive, que nous refusons.

Suivant l’avis du rapporteur, la commission rejette le sous-amendement.

Sous-amendement AC2057 de Mme Sophie Taillé-Polian

Mme Sophie Taillé-Polian (EcoS). Nous sommes attachés au rôle qu’auront les directeurs généraux délégués de chacune des filiales. Ce sous-amendement de repli tend donc à leur conférer une identité et un pouvoir propres afin de pallier les risques d’appauvrissement et de perte d’indépendance.

Suivant l’avis du rapporteur, la commission rejette le sous-amendement.

Sous-amendements AC1303 de Mme Sophie Taillé-Polian, AC1438, AC1439, AC1440 et AC1441 de Mme Soumya Bourouaha, et AC2034 de Mme Céline Calvez (discussion commune)

Mme Soumya Bourouaha (GDR). Nous réaffirmons notre opposition à la création de la holding. Nous refusons également que son président-directeur général cumule ce rôle avec les fonctions de président-directeur général des filiales France Télévisions, Radio France et INA, car une telle concentration du pouvoir est de nature à mettre en péril l’équilibre, la diversité et l’indépendance de l’audiovisuel. C’est l’objet du sous-amendement AC1438. Les sous-amendements AC1439, AC1440 et AC1441 sont de repli.

Mme Céline Calvez (EPR). Les fonctions de président-directeur général de la société France Médias ne sont pas incompatibles avec celles de président-directeur général de chaque filiale. Le sous-amendement AC2034 vise simplement à préciser que le président-directeur général « peut déléguer une partie de ses pouvoirs exécutifs aux directeurs généraux de ces sociétés, notamment à des fins de représentation légale ou de relations sociales », ne serait-ce que pour alléger l’emploi du temps du PDG, appelé à siéger dans divers comités.

Mme Virginie Duby-Muller, rapporteure. Avis défavorable.

Madame Calvez, l’article L. 225-56 du code de commerce dispose : « En accord avec le directeur général, le conseil d’administration détermine l’étendue et la durée des pouvoirs conférés aux directeurs généraux délégués. Les directeurs généraux délégués disposent, à l’égard des tiers, des mêmes pouvoirs que le directeur général. » Votre précision n’est donc pas utile.

Surtout, comme nous l’avons déjà expliqué, nous sommes favorables à une présidence exécutive, c’est-à-dire à ce que le PDG de France Médias soit également le PDG des filiales. Sous cet angle, votre sous-amendement devient sans objet.

Mme Rachida Dati, ministre. Le code de commerce prévoit explicitement que dès lors que le président-directeur général est mandataire social, les directeurs généraux exécutifs le sont aussi et disposent de pouvoirs étendus. Il est inutile d’alourdir la loi.

Mme Marie Mesmeur (LFI-NFP). Au-delà du risque pointé par Mme Calvez – le président-directeur général aura nécessairement beaucoup de rendez-vous, de contraintes, de réunions –, l’existence d’un directeur de l’information unique représente, selon les syndicats, une menace sérieuse pour l’indépendance de l’information et du journalisme en France.

Mme Céline Calvez (EPR). Si j’ai bien compris, le directeur de chaque filiale sera mandataire social. Mais imaginons que plusieurs instances où se décideront des choses pour différentes filiales se réunissent en même temps : le PDG ne pourra pas être partout. Sera-t-il autorisé à déléguer son mandat à l’un de ses directeurs ? J’ai l’impression que la disposition du code du commerce ne concerne que les conseils d’administration.

Mme Rachida Dati, ministre. Le PDG de la holding exécutive est, par définition, membre de tous les CA. À ce titre, il peut déléguer son pouvoir à un autre membre du CA, notamment aux directeurs généraux délégués – par exemple pour pallier un éventuel manque de temps. J’ai peur qu’ajouter cette précision n’affaiblisse la portée du droit existant. Je préfère qu’on s’en tienne à la rédaction la plus large possible.

Le sous-amendement AC2034 est retiré.

La commission rejette successivement les autres sous-amendements.

Sous-amendement AC1308 de M. Emmanuel Grégoire

M. Emmanuel Grégoire (SOC). Mon objectif était d’instaurer une parité réelle au sein des conseils d’administration en n’autorisant qu’une unité de différence entre les effectifs des deux sexes. Une lecture plus attentive du texte ayant montré qu’il est satisfait, je retire ce sous-amendement.

Le sous-amendement est retiré.

Mme Sophie Taillé-Polian (EcoS). Je regrette qu’aucune de nos propositions visant à améliorer le dispositif et à lever partiellement nos inquiétudes quant à la question centrale de l’indépendance n’ait été prise en compte : tous les sous-amendements visant à ouvrir le conseil d’administration, que ce soit à des journalistes, à davantage de salariés ou aux directeurs généraux des entreprises, ont été rejetés. Cette instance aurait pourtant pu constituer un contre-pouvoir, un garde-fou face au futur président-directeur général, qui occupera une place centrale.

Je tiens également à exprimer à mon tour notre plus vive préoccupation quant à la proposition de Mme Bloch de créer un directeur de l’information unique, placé sous l’autorité du président-directeur général. La lecture de son rapport renforce l’inquiétude quant à une possible concentration des pouvoirs entre quelques mains.

Nous nous opposerons donc à cet amendement de réécriture.

La commission adopte l’amendement AC1138 sous-amendé et l’article 3 est ainsi rédigé.

En conséquence, les autres amendements tombent.

Après l’article 3

Amendement AC1162 du gouvernement et sous-amendements AS1569, AC1596, AC1594, AC1591, AC1604, AC1602, AC1600, AC1598, AC1609 et AC1608 de M. Inaki Echaniz

Mme Rachida Dati, ministre. Il s’agit de maintenir la composition actuelle du conseil d’administration de l’INA, en abaissant simplement le nombre de représentants de l’État de quatre à trois pour tenir compte de la création de la holding exécutive – le président de l’INA, qui siège actuellement parmi les représentants de l’État, ayant vocation à être remplacé par le PDG de France Médias.

Mme Virginie Duby-Muller, rapporteure. L’amendement se borne à tirer les conséquences de la création de la holding exécutive. Il améliore aussi la lisibilité de la loi du 30 septembre 1986, dite loi Léotard, en plaçant les dispositions relatives au conseil d’administration de l’INA après celles qui régissent les conseils d’administration de France Télévisions, de Radio France et de France Médias Monde.

Avis favorable.

M. Emmanuel Grégoire (SOC). Nous retirons l’ensemble des sous-amendements relatifs à cet amendement.

Les sous-amendements sont retirés.

La commission adopte l’amendement.

Amendement AC1165 du gouvernement

Mme Rachida Dati, ministre. Nous proposons d’appliquer au futur PDG de France Médias les modalités de nomination actuelles.

M. Jérémie Patrier-Leitus, rapporteur. Cet amendement offre d’importantes garanties d’indépendance à l’audiovisuel public. La procédure de nomination sera transparente, ouverte, non discriminatoire et tiendra compte du règlement européen sur la liberté des médias. Avis favorable.

Sous-amendement AC1484 de M. Inaki Echaniz

M. Emmanuel Grégoire (SOC). L’amendement du gouvernement est plutôt intéressant, mais il ne faudrait pas qu’il soit contredit par les faits.

Madame la ministre, la presse a fait état d’ingérences dans les nominations aux présidences de l’audiovisuel public. Vous auriez notamment demandé le « scalp » de la présidente de France Télévisions. Alors que vous présentez un amendement visant à assurer l’autonomie de l’Arcom en la matière, je voudrais m’assurer qu’il n’en est rien.

Mme Virginie Duby-Muller, rapporteure. Avis défavorable.

Mme Rachida Dati, ministre. Je ne réponds pas aux rumeurs et aux ragots, dont chacun et chacune d’entre nous pouvons faire l’objet, vous y compris. Il est insupportable qu’on me prête ainsi des actions ou des propos ; à l’évidence, certains aimeraient me ramener à une condition qui n’est pas la mienne. J’ai très clairement répondu au journal Le Monde et France Télévisions a également démenti. Si vous pouviez éviter de colporter des ragots et des rumeurs – ce que vous adorez visiblement faire –, ce serait mieux.

Avis défavorable.

La commission rejette le sous-amendement.

Sous-amendement AC2037 de Mme Céline Calvez

Mme Céline Calvez (EPR). Le dernier alinéa de l’amendement dispose que le Parlement peut inviter le candidat retenu à être auditionné. Je souhaite aller plus loin pour rééquilibrer les pouvoirs, en prévoyant que le président-directeur général de France Médias est nommé « après avis conforme de la commission permanente chargée des affaires culturelles des deux assemblées parlementaires rendues à la majorité des suffrages exprimés ». Cela compléterait le dispositif proposé par le gouvernement.

Mme Virginie Duby-Muller, rapporteure. Nous sommes favorables au maintien des prérogatives de l’Arcom. Les modalités de nomination proposées nous semblent présenter les meilleures garanties d’indépendance. Nous souhaitons également que la procédure soit transparente, pour garantir une équité complète entre les candidats, ce qui suppose que l’Arcom puisse garder les candidatures secrètes afin de permettre à des personnalités issues du secteur audiovisuel privé de se présenter sereinement.

En revanche, nous ne sommes pas favorables à ce que les commissions permanentes chargées des affaires culturelles de l’Assemblée nationale et du Sénat rendent un avis conforme. Notre commission pourra bien auditionner le PDG de France Médias dans un délai de deux mois suivant sa nomination, sur la base du rapport stratégique qu’il aura rédigé. Nous préférons que l’avis sur la CSP (convention stratégique pluriannuelle) de France Médias soit rendu contraignant.

Mme Rachida Dati, ministre. Un avis conforme du Parlement rendu à la majorité des trois cinquièmes comporterait un risque d’inconstitutionnalité, car il porterait atteinte à la séparation des pouvoirs. En outre, le PDG serait nommé par l’Arcom, une autorité administrative indépendante dont le pouvoir de nomination ne peut pas être soumis à un droit de regard des assemblées.

Je demande donc le retrait du sous-amendement.

Mme Céline Calvez (EPR). Nous n’allions pas jusqu’à demander un vote à la majorité des trois cinquièmes : sur ce point, notre sous-amendement est un peu moins-disant et ne pose donc aucun risque d’inconstitutionnalité.

Quant au fait que le Parlement puisse rendre un avis sur une nomination relevant d’une autorité administrative indépendante, je ne vois pas ce qui l’interdit, même si cela n’a peut-être jamais été fait : nous pouvons innover démocratiquement. Cela me paraîtrait même essentiel, car il semblerait délicat que nous nous contentions d’auditionner quelqu’un qui vient d’être désigné sans pouvoir nous prononcer d’aucune façon sur cette nomination.

En revanche, je rejoins Mme la rapporteure sur un point : nous devrons avoir un regard beaucoup plus contraignant sur les conventions stratégiques pluriannuelles, qui ont vocation à remplacer les contrats d’objectifs et de moyens, sur lesquels nous n’avons aucun pouvoir – la preuve en est que ceux qui devaient couvrir la période 2024-2028 ne sont toujours pas signés.

Il me semble toutefois que nous pouvons très bien nous prononcer à la fois sur la nomination et sur les conventions.

Mme Marie Mesmeur (LFI-NFP). Je ne comprends pas d’où viendrait le risque d’atteinte à la séparation des pouvoirs ou d’inconstitutionnalité. Nous avons récemment reçu les candidats à la présidence de l’Arcom ou du Haut Conseil de l’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur – j’étais moi-même rapporteure pour cette dernière audition. Nous avons pu les questionner sur leur projet et leur vision. Pourquoi ne pourrions-nous pas le faire pour le dirigeant de la holding que vous souhaitez créer ? Chacun des membres de cette commission est attaché non seulement à ses missions de parlementaire et à la souveraineté qu’il doit exercer en tant qu’élu du peuple, mais aussi à la direction que prendront nos institutions culturelles à court, moyen et long termes.

Je soutiens donc ce sous-amendement.

Mme Sophie Taillé-Polian (EcoS). J’y suis pour ma part opposée. Il faudrait au contraire séparer de façon plus étanche encore le pouvoir politique et la direction opérationnelle des médias. Je vous rejoins sur un point : l’Arcom pourrait être plus autonome vis-à-vis du pouvoir politique et garantir une meilleure transparence des procédures de nomination. Seulement, cela ne passera certainement pas par une implication plus forte de notre part dans le choix des candidats, qui nuirait à leur nécessaire indépendance.

La commission adopte le sous-amendement.

*

Réunion du mardi 17 juin 2025 à 21 heures

La commission poursuit l’examen de la proposition de loi, adoptée par le Sénat, relative à la réforme de l’audiovisuel public et à la souveraineté audiovisuelle (n° 118) (Mme Virginie Duby-Muller et M. Jérémie Patrier-Leitus, rapporteurs) ([62]).

Mme la présidente Fatiha Keloua Hachi. Nous poursuivons l’examen des sous-amendements à l’amendement AC1165 du gouvernement.

Après l’article 3 (suite)

Amendement AC1165 du gouvernement faisant l’objet de sous-amendements (suite)

Sous-amendement AC2058 de Mme Sophie Taillé-Polian

Mme Sophie Taillé-Polian (EcoS). Il s’agit de rendre la procédure de nomination du PDG de France Médias par l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (Arcom) plus transparente, avec une plus grande publicité sur les candidatures, les projets et les auditions des candidats. Le soin de préciser les modalités de publicité des auditions des candidats est renvoyé au décret.

Suivant l’avis des rapporteurs, la commission rejette le sous-amendement.

Sous-amendement AC2039 de Mme Céline Calvez

Mme Céline Calvez (EPR). Dans la version initiale, telle que discutée par le Sénat, il était proposé de faire intervenir le conseil d’administration dans la désignation du PDG. Cela avait la vertu de légitimer le conseil d’administration et de lui donner du poids. Nous proposons de donner au conseil d’administration la possibilité de présenter une liste de candidats, ce qui permettrait aussi de répondre à une critique que l’on entend parfois sur le caractère public des appels à candidatures par l’Arcom, qui dissuade certaines personnes de se porter candidat. L’idée est de créer une sorte de sas d’examen des candidatures, ce qui permettrait de légitimer le conseil d’administration et de préserver le caractère non public, quoique transparent, des candidatures.

Mme Virginie Duby-Muller, rapporteure. Même avis défavorable que pour le sous-amendement AC2037 : nous souhaitons que l’Arcom conserve ses prérogatives.

Mme Rachida Dati, ministre de la culture. Nous souhaitons maintenir le mode de nomination en vigueur depuis 1982, qui permet une indépendance de la personne nommée. Si elle dépend du conseil d’administration, je crains qu’elle ne soit obligée de plaire aux administrateurs plutôt que de construire une stratégie cohérente et indépendante. Avis défavorable.

Mme Sophie Taillé-Polian (EcoS). Au contraire, le sous-amendement de ma collègue Calvez a l’intérêt de donner davantage de poids au conseil d’administration.

La commission rejette le sous-amendement.

Suivant l’avis des rapporteurs, la commission rejette le sous-amendement AC1537 de M. Inaki Echaniz.

Sous-amendement AC2059 de Mme Sophie Taillé-Polian

Mme Sophie Taillé-Polian (EcoS). Il s’agit de s’assurer de la publicité de l’avis de l’Arcom sur les résultats de France Médias en insérant le mot « public », pour favoriser une plus grande transparence.

M. Jérémy Patrier-Leitus, rapporteur. Demande de retrait car il est satisfait.

La commission rejette le sous-amendement.

Sous-amendement AC2060 de Mme Sophie Taillé-Polian

Mme Sophie Taillé-Polian (EcoS). Il est un peu dans le même esprit que celui qu’a présenté Mme Calvez. Le PDG de la société France Médias est nommé pour cinq ans par l’Arcom sur proposition du conseil d’administration de la société. Un comité de nomination constitué au sein du conseil d’administration veille à garantir la transparence des critères de sélection, l’équité entre les candidats et la compétence des personnes dont il soumet les noms au conseil d’administration.

Suivant l’avis des rapporteurs, la commission rejette le sous-amendement.

Suivant l’avis des rapporteurs, elle rejette successivement les sous-amendements AC2076 de Mme Sophie Taillé-Polian et AC1528 de M. Inaki Echaniz.

Sous-amendement AC2081 de M. Jérémy Patrier-Leitus

M. Jérémy Patrier-Leitus, rapporteur. Il vise à rendre public le rapport d’orientation stratégique qui est remis aux commissions permanentes compétentes de l’Assemblée nationale et du Sénat par les PDG de France Médias et de France Médias Monde, dans un délai de deux mois à compter du premier jour de leur mandat. Le rapport sera publié à l’issue de l’audition des PDG par les commissions permanentes compétentes de l’Assemblée nationale et du Sénat, afin que chacun puisse consulter ces documents : les salariés de l’audiovisuel public, les professionnels du secteur audiovisuel privé, et plus largement chaque citoyen qui s’intéresse au fonctionnement de l’audiovisuel public.

Mme Rachida Dati, ministre. Les commissions parlementaires peuvent déjà rendre publics ces rapports. Pourquoi les contraindre ? La demande étant satisfaite, avis défavorable.

La commission adopte le sous-amendement.

Elle adopte l’amendement AC1165 sous-amendé.

Amendement AC1163 du gouvernement

Mme Rachida Dati, ministre. Cet amendement porte sur la révocation des PDG de France Médias et France Médias Monde. Il tire les conséquences rédactionnelles du retrait de la société France Médias Monde du périmètre de la holding.

Suivant l’avis des rapporteurs, la commission adopte l’amendement.

Amendement AC1164 du gouvernement

Mme Rachida Dati, ministre. Il reprend la disposition adoptée par le Sénat relative à la voix prépondérante du président de France Médias, France Télévisions, Radio France, France Médias Monde et de l’Institut national de l’audiovisuel (INA) au sein de leur conseil d’administration.

Suivant l’avis des rapporteurs, la commission adopte l’amendement.

Article 4 : Dispositions de coordination au sein de la loi du 30 septembre 1986

Amendements de suppression AC203 de M. Emmanuel Grégoire et AC813 de Mme Sophie Taillé-Polian

Mme Sophie Taillé-Polian (EcoS). En cohérence avec notre opposition à votre projet, nous proposons de supprimer cet article 4.

Suivant l’avis des rapporteurs, la commission rejette les amendements.

Amendement AC1468 du gouvernement et sous-amendement AC2006 de Mme Sophie Taillé-Polian

Mme Rachida Dati, ministre. L’amendement propose une nouvelle rédaction de l’article.

Mme Sophie Taillé-Polian (EcoS). Le sous-amendement vise à renforcer l’exigence de neutralité de l’audiovisuel public en période électorale. Il intègre la notion de débat contradictoire sur les questions prêtant à controverse, comme l’exige la décision rendue le 13 février 2024 par le Conseil d’État sur le pluralisme de l’information à l’occasion de sa saisine par Reporters sans frontières contre la chaîne CNews, régulièrement épinglée pour sa surreprésentation des idées d’extrême droite et l’absence de contradictoire dans les débats qu’elle diffuse.

Mme Virginie Duby-Muller, rapporteure. Telle que proposée, la disposition est redondante avec celle de l’article 43-11 de la loi du 30 septembre 1986 qui fixe un haut niveau d’exigence aux sociétés nationales de programmes en matière de pluralisme et de diversité. Ces sociétés doivent ainsi offrir « un ensemble de programmes et de services qui se caractérisent par leur diversité et leur pluralisme ». Elles doivent également assurer « l’honnêteté, l’indépendance et le pluralisme de l’information ainsi que l’expression pluraliste des courants de pensée et d’opinion dans le respect du principe d’égalité de traitement et des recommandations de l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique ». La délibération de l’Arcom du 17 juillet 2024 est bien applicable aux sociétés de l’audiovisuel public. Avis défavorable au sous-amendement.

La commission rejette le sous-amendement.

Elle adopte l’amendement et l’article 4 est ainsi rédigé.

En conséquence, les autres amendements sur l’article tombent.

Article 5 : Création des conventions stratégiques pluriannuelles et allocation des ressources de l’audiovisuel public

Amendements de suppression AC204 de M. Emmanuel Grégoire, AC818 de Mme Sophie Taillé-Polian et AC1057 de la commission des finances

Mme Sophie Taillé-Polian (EcoS). Nous nous opposons à l’évolution des modalités de contrôle de l’audiovisuel public proposée, qui affaiblit le rôle du Parlement et donne toute latitude au PDG de la holding pour répartir les crédits entre les futures filiales. Alors qu’il conviendrait de renforcer les moyens de l’audiovisuel public, acteur essentiel du bon fonctionnement de notre démocratie, cette proposition de loi ouvre la porte au chantage budgétaire et à la baisse des moyens. Enfin, les modalités d’association optionnelle du Parlement à l’élaboration de ces conventions stratégiques pluriannuelles (CSP) ne sont pas satisfaisantes.

M. Denis Masséglia, rapporteur pour avis de la commission des finances. Le dispositif de cet article, qui vise à réduire le pouvoir du Parlement, a été voté main dans la main par l’extrême droite et le Nouveau Front populaire. Pour ma part, j’y suis défavorable et je laisse les collègues du Rassemblement national et de la gauche expliquer pourquoi il faut réduire les pouvoirs du Parlement.

Suivant l’avis des rapporteurs, la commission rejette les amendements.

Amendement AC1466 du gouvernement, faisant l’objet de sous-amendements

Mme Rachida Dati, ministre. L’amendement poursuit plusieurs objectifs : il réintroduit l’avis de l’Arcom sur les conventions stratégiques pluriannuelles ; il renforce l’information du Parlement en cas d’écart entre le budget prévisionnel et la répartition des ressources entre les filiales ; il permet de se conformer aux critères du règlement européen sur la liberté des médias ; il apporte diverses précisions au régime de la publicité de l’audiovisuel public.

M. Jérémy Patrier-Leitus, rapporteur. Avis favorable.

Sous-amendement AC2061 de Mme Sophie Taillé-Polian

Mme Sophie Taillé-Polian (EcoS). Je propose de supprimer la seconde phrase de l’alinéa 3 de cet amendement de réécriture globale. La possibilité de renégociation de la convention stratégique pluriannuelle en cas de changement de présidence laisse craindre une réévaluation à la baisse des moyens affectés à l’audiovisuel public, alors que la législation européenne sur la liberté des médias (European Media Freedom Act) prévoit de garantir des ressources prévisibles, stables et suffisantes pour l’audiovisuel public.

Suivant l’avis des rapporteurs, la commission rejette le sous-amendement.

Sous-amendement AC2062 de Mme Sophie Taillé-Polian

Mme Sophie Taillé-Polian (EcoS). Ce sous-amendement propose de mieux associer les représentants du milieu du cinéma et de l’audiovisuel à l’élaboration des CSP. Le format des consultations publiques permet de favoriser la transparence et l’accès au débat public des citoyens et des citoyennes, dans ce domaine essentiel du point de vue aussi bien démocratique qu’économique, puisqu’il est au cœur de l’exception culturelle française. Au cours de notre travail sur les anciennes versions de ces conventions, nous avions noté une forte demande des représentants de ces filières d’être associés pleinement et entièrement, et non de manière officieuse.

M. Jérémy Patrier-Leitus, rapporteur. Votre sous-amendement reprend une partie des conclusions du rapport d’information sur l’avenir de l’audiovisuel public, dans lequel nos collègues regrettaient que certains acteurs ne soient pas consultés en amont de la signature des contrats d’objectifs et de moyens (COM) et proposaient notamment d’organiser des consultations publiques préalables. Nous sommes favorables à ce sous-amendement qui permet d’associer l’ensemble des acteurs qui contribuent de près ou de loin à l’audiovisuel public.

La commission adopte le sous-amendement.

Sous-amendement AC2041 de Mme Céline Calvez

Mme Céline Calvez (EPR). Dans le même souci de transparence, ce sous-amendement précise que les conventions stratégiques pluriannuelles sont rendues publiques dès leur signature. C’est important, car il est arrivé que des documents ne soient pas portés à la connaissance des parties prenantes ni des citoyens.

M. Jérémy Patrier-Leitus, rapporteur. Nous partageons votre objectif mais nous demandons le retrait de votre sous-amendement au profit de celui que nous avons déposé, le AC2078, que nous avons élaboré avec les services de l’Assemblée et du ministère et dont la rédaction nous semble préférable.

Mme Rachida Dati, ministre. Je souscris aux arguments du rapporteur.

Le sous-amendement est retiré.

Sous-amendement AC2038 de M. Salvatore Castiglione

M. Salvatore Castiglione (LIOT). L’idée est aussi de rendre publiques les conventions stratégiques pluriannuelles. Ce sous-amendement vise à assurer une transparence sur le contenu de celles qui sont conclues entre l’État et la société France Médias.

M. Jérémy Patrier-Leitus, rapporteur. Même demande de retrait au profit du sous-amendement AC2078.

Le sous-amendement est retiré.

Sous-amendements AC2065 et AC2063 de Mme Sophie Taillé-Polian (discussion commune)

Mme Sophie Taillé-Polian (EcoS). Ces deux sous-amendements visent à ce que le service public de l’audiovisuel soit pleinement ouvert à l’inclusion des personnes en situation de handicap.

Le premier propose d’ancrer dans les dispositions de l’article 53 de la loi du 30 septembre 1986 et les conventions ou contrats programmatiques qu’il encadre les engagements permettant d’assurer la participation et la citoyenneté des personnes handicapées ainsi que l’adaptation aux personnes sourdes ou malentendantes de la totalité des programmes de télévision diffusés, à l’exception des messages publicitaires, sous réserve des dérogations justifiées par les caractéristiques de certains programmes.

Le second propose d’assurer la diffusion de programmes de télévision rendus accessibles aux personnes aveugles ou malvoyantes par des dispositifs adaptés.

Ces problématiques sont insuffisamment prises en compte, il faut les inscrire dans la loi.

M. Jérémy Patrier-Leitus, rapporteur. Ce sujet important relève du cahier des charges des sociétés nationales de programme, et bientôt de leurs filiales, et non pas des CSP, qui doivent rester des documents courts et stratégiques. Demande de retrait.

Mme Rachida Dati, ministre. Même avis.

Mme Sophie Taillé-Polian (EcoS). Pour ma part, je pense que ces sujets doivent être traités à un niveau hiérarchique plus élevé. Au cours des dernières années, ils étaient mentionnés dans différents documents, mais sans concrétisation suffisante. C’est la raison pour laquelle nous proposons de hausser un peu le ton en inscrivant ces enjeux dans la loi.

La commission rejette successivement les sous-amendements.

Sous-amendement AC2064 de Mme Sophie Taillé-Polian

Mme Sophie Taillé-Polian (EcoS). Il s’agit d’inscrire plus haut dans notre agenda collectif, en les gravant dans la loi, les objectifs d’information sur les enjeux écologiques et environnementaux. Les experts du Giec (Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat) insistent sur le rôle des médias pour faire progresser la prise de conscience des citoyennes et des citoyens en la matière. Nous proposons de renforcer les missions de l’audiovisuel public dans le traitement médiatique de l’urgence écologique.

Mme Virginie Duby-Muller, rapporteure. Avis défavorable pour les mêmes raisons que pour les sous-amendements précédents.

Mme Rachida Dati, ministre. Même avis.

M. Alexis Corbière (EcoS). Madame Dati, vous avez vous-même motivé cette réforme par la volonté de sortir de l’entre-soi, d’aller chercher un public plus jeune, hors des catégories socioprofessionnelles les plus favorisées. En tant que législateur, nous mettons l’accent sur d’autres aspects importants, comme l’inclusion des personnes en situation de handicap ou l’information sur les enjeux écologiques et environnementaux, et vous nous renvoyez dans les cordes en disant que tout cela est déjà traité.

M. Jérémy Patrier-Leitus, rapporteur. Il y a d’autres documents pour ce faire.

M. Alexis Corbière (EcoS). Nous préférons ces documents-là.

Mme Rachida Dati, ministre. Et nous, nous en préférons d’autres.

M. Alexis Corbière (EcoS). Nous n’outrepassons pas nos prérogatives en proposant des pistes pour monter en gamme, si vous me permettez l’expression, s’agissant d’un outil commun à tous les citoyens et financé par eux.

La commission rejette le sous-amendement.

Sous-amendement AC2066 de Mme Sophie Taillé-Polian

Mme Sophie Taillé-Polian (EcoS). Une fois encore, il s’agit de renforcer les dispositions législatives qui encadrent les documents contractuels entre le ministère de la culture, la tutelle, et la future holding. Il est important de citer les éléments qui nous semblent essentiels pour élargir les publics et pour que le service public joue pleinement son rôle. Nous proposons d’ajouter les engagements pris au titre de la diversité culturelle et de l’innovation dans la création, afin qu’il ne soit pas possible, quoi qu’il advienne, de faire l’impasse sur ces enjeux.

M. Jérémy Patrier-Leitus, rapporteur. Je comprends le débat et je respecte votre point de vue. Mais les cahiers des charges actuels des sociétés ne sont pas des documents anecdotiques et ils sont déjà très complets sur tous les sujets essentiels que vous citez. D’où notre avis défavorable.

Mme Rachida Dati, ministre. Les cahiers des charges sont en effet complets et essentiels. C’est le document stratégique sur lequel se fondent d’ailleurs les nominations. Avis défavorable.

Mme Sophie Taillé-Polian (EcoS). Ils sont certes essentiels et mettent en œuvre les orientations du gouvernement qui nous sont présentées, mais, quels que soient les aléas politiques et les alternances, ces éléments fondamentaux que sont l’inclusion des personnes en situation de handicap, la prise en compte des enjeux environnementaux et l’information en la matière, ainsi que tout ce que j’ai défendu tout à l’heure, comme la diversité culturelle, doivent être inscrits dans la loi afin de ne pas reposer sur le seul exécutif.

La commission rejette le sous-amendement.

Sous-amendement AC2067 de Mme Sophie Taillé-Polian

Mme Sophie Taillé-Polian (EcoS). Il est regrettable que vous ne souhaitiez pas inscrire ces orientations fondamentales dans la loi et abandonniez à l’exécutif la régulation qui est au cœur des missions de service public de nos entreprises de l’audiovisuel.

Le sous-amendement vise à encadrer les montants minimaux d’investissement de France Télévisions dans la production d’œuvres cinématographiques et audiovisuelles européennes et d’expression originale française, en pourcentage de ses recettes et en valeur absolue.

M. Jérémy Patrier-Leitus, rapporteur. Avis défavorable, car ce sous-amendement est satisfait.

Mme Rachida Dati, ministre. Même avis.

M. Alexis Corbière (EcoS). Quel regard le législateur peut-il avoir sur un cahier des charges défini par les services du ministère ? Pour être aimable, je dirai, madame la ministre, que je vous connais, mais que j’ignore qui vous succédera. Le législateur est en droit, non de définir les horaires des programmes, car c’est un travail de professionnel, mais de se prononcer sur des questions fondamentales liées à l’évolution d’un service public d’information, avec les enjeux que cela comporte. Il est un peu curieux de nous renvoyer à un cahier des charges alors que nous ignorons quelles seront les priorités de vos successeurs. Le rôle de notre commission est de débattre des grands axes de l’encadrement de ce grand média qui doit répondre à des missions de service public et qui, comme vous l’avez dit souvent, madame la ministre, appartient à nos concitoyens et doit refléter ce qu’ils sont.

La commission rejette le sous-amendement.

Sous-amendement AC2043 de Mme Céline Calvez

Mme Céline Calvez (EPR). La place de la publicité sur les antennes et les chaînes du service public est définie par plusieurs normes – parfois applicables seulement au linéaire et non au numérique, parfois avec des plafonds fixés en recettes, ou alors seulement en volume.

Le sous-amendement vise à inscrire dans les CSP une durée maximale de diffusion annuelle de messages publicitaires et de parrainage – j’insiste pour que les parrainages soient pris en compte, notamment après 20 heures sur France Télévisions, et pour que le dispositif s’applique également au digital, car nous avons tous déjà dû subir de longs tunnels de publicité en voulant revoir un programme sur l’audiovisuel public numérique.

Serait aussi mentionné dans les CSP un objectif de réduction progressive de la place de la publicité et des parrainages dans l’offre de service public. On peut regretter que des espaces faisant appel à la publicité nuisent non seulement à l’intégrité des programmes, mais aussi à la part d’attention que les citoyens peuvent consacrer à ce qui est important.

L’audiovisuel public pourrait gagner encore en distinction en aménageant pour les citoyens – qui y contribuent – un espace sans publicité. Cette limitation en volume permet d’éviter l’écueil de la limitation en montant de recettes. On a vu en effet à plusieurs reprises que les plafonds, notamment pour Radio France, étaient presque contre-productifs, car ils obligeaient les chaînes à brader en fin d’année les derniers espaces disponibles. Il faut davantage penser au citoyen, qu’il soit auditeur ou téléspectateur, et lui offrir une perspective d’audiovisuel public plus libéré des impératifs commerciaux.

M. Jérémy Patrier-Leitus, rapporteur. Le plafonnement des recettes publicitaires des acteurs de l’audiovisuel public est un débat important. La publicité est déjà très encadrée et limitée. France Télévisions ne peut diffuser de publicité qu’en dehors des heures d’interdiction. Cette publicité est limitée à six minutes par heure d’antenne et représente 3,7 % du temps d’antenne sur France Télévisions, contre près de 15 % pour les éditeurs privés.

Je suis défavorable à ce sous-amendement car la concurrence ne se joue pas aujourd’hui avec les acteurs privés, mais avec les réseaux sociaux et les plateformes du numérique. Plafonner les recettes publicitaires de l’audiovisuel public, c’est-à-dire à fixer une durée maximale, revient à renforcer les plateformes numériques, ce qui ne me semble pas aider l’audiovisuel public.

Mme Rachida Dati, ministre. Même avis.

M. Emmanuel Grégoire (SOC). Le modèle idéal serait celui d’un service public de l’audiovisuel qui serait entièrement affranchi de la publicité. C’est cependant impossible dans un contexte de contrainte budgétaire où, compte tenu de la diminution des moyens de l’audiovisuel public, nous ne devons pas charger la barque en réduisant les recettes.

La question, c’est la disponibilité du temps d’antenne – la quantité induisant logiquement de la valeur, même si je ne sais pas dans quelle proportion, ce que l’amendement ne permet d’ailleurs pas de discuter.

Nous devons nous saisir en urgence absolue de l’asymétrie des obligations qui incombent aux médias traditionnels et aux médias numériques. Je regrette beaucoup que cette proposition de loi n’en soit pas l’occasion, et j’espère que nous le ferons lors du texte sur les états généraux de l’information. La dérégulation est totale en matière de publicité sur les smartphones et sur internet, qui sont aujourd’hui le lieu d’exposition maximale, notamment pour les enfants, alors que la télévision souffre d’un système beaucoup trop contraignant. Nous lestons nos champions industriels, privés ou publics, d’obligations dont nous exonérons le reste de l’univers.

Mme Sophie Taillé-Polian (EcoS). Je partage l’inquiétude de M. Grégoire pour ce qui est de la question financière. En effet, du fait de la disette budgétaire que vous faites subir à l’audiovisuel public depuis de nombreuses années, les recettes publicitaires sont absolument essentielles à son équilibre.

Je soutiendrai toutefois le sous-amendement de Mme Calvez, car nous avons à cœur de réduire l’intensité de la publicité dans notre vie. Il est choquant que les plateformes numériques, y compris celles du service public, soient à ce point remplies de publicité. Une innovation majeure, un investissement très fort dans le numérique, consisterait à permettre aux plateformes du service public de s’exonérer de la publicité. Elles feraient alors vraiment la différence, outre la qualité des contenus, avec les grandes plateformes que vous prétendez contrer en créant cette holding. Il faut donner davantage de moyens à l’audiovisuel public, en garantissant sa diversité et en faisant en sorte qu’il constitue des zones sûres, hors de la publicité et des conséquences néfastes de la société de consommation sur nos modes de vie et sur l’environnement.

Mme Céline Calvez (EPR). Le sous-amendement ne prévoit pas de limitation en recettes. Une limitation en volume peut certes induire une limitation des recettes, mais peut-être peut-on aussi valoriser davantage cet espace.

Monsieur le rapporteur, des limites de volume sont déjà fixées pour la diffusion linéaire. Peut-être ne sont-elles d’ailleurs pas complètement respectées – je pense notamment aux parrainages. Mais pour le digital, aucune limite n’existe et mon usage personnel comme de nombreux témoignages me convainquent que le fonctionnement actuel ne rend pas service au service public, tant on hésite parfois à regarder un replay de crainte de devoir subir une masse de publicités. Il existe donc aussi une asymétrie entre l’encadrement de la publicité sur l’offre linéaire du service public et sur son offre digitale. Prendre en compte cette réalité contribuerait à un esprit de distinction.

M. Jérémy Patrier-Leitus, rapporteur. Vous pourriez retirer le sous-amendement afin de le retravailler pour la séance publique, en particulier pour limiter la publicité sur les plateformes numériques de l’audiovisuel public, car aucune ne s’applique actuellement. Nous maintenons toutefois notre position quant au fait que nous fragiliserions l’audiovisuel public, qui a précisément besoin de moyens, en réduisant encore ses ressources publicitaires.

Monsieur Grégoire, madame Taillé-Polian, vous évoquez une disette budgétaire mais même si vous renforcez encore les moyens publics pour lutter contre les géants privés du numérique, nous aurons besoin de recettes, et même de recettes privées, pour renforcer l’audiovisuel public. C’est mentir aux Français que de dire qu’une subvention publique, quelle qu’elle soit, suffira à l’aider à lutter contre les plateformes numériques, notamment étrangères. Ces recettes, je le répète, provoqueront un effet d’éviction au profit des géants du numérique. Les acteurs privés nous le disent : lorsqu’on réduit les ressources publicitaires de l’audiovisuel public, ce n’est pas à eux que vont les bénéfices, mais aux grandes plateformes étrangères.

Mme Céline Calvez (EPR). Nous ne visons pas seulement les acteurs privés, mais avant tout le citoyen. Je maintiens le sous-amendement qui, s’il est voté, pourra servir de base à celui que vous proposerez en séance.

La commission adopte le sous-amendement.

Sous-amendement AC2040 de M. Salvatore Castiglione

M. Salvatore Castiglione (LIOT). Il vise à réintroduire à l’article 5 le principe du plafonnement des recettes publicitaires et de parrainage, y compris digitales, pour France Médias, tel qu’il avait été voté par les sénateurs. Il ne s’agit ni de supprimer ni de diminuer le montant des recettes potentielles de l’audiovisuel public, mais de privilégier le statu quo en matière de recettes publicitaires. Un tel plafonnement est d’ailleurs déjà appliqué à Radio France, mais pas encore à France Télévisions.

M. Jérémy Patrier-Leitus, rapporteur. Avis défavorable. Je répète que le recours à la publicité par les sociétés de l’audiovisuel public est déjà strictement encadré, avec un maximum de six minutes par heure d’antenne et de huit minutes par heure d’horloge. Le recours à la publicité par Radio France est également encadré pour les antennes linéaires. Il serait par ailleurs difficile pour la régie publicitaire de gérer un tel plafonnement. Enfin, cet argent en moins pour l’audiovisuel public renforcerait les plateformes étrangères, et non pas les éditeurs privés.

Mme Rachida Dati, ministre. Même avis.

Mme Sophie Taillé-Polian (EcoS). Il a été dit hors micro que le budget de l’audiovisuel public avait augmenté. Ce budget représente 3,946 milliards d’euros en 2025, soit tout juste 100 millions de plus qu’en 2008, malgré une inflation cumulée de 32,4 % sur la période. Cela constitue bien une paupérisation du service public – avec, monsieur Balanant, une perte de 776 millions d’euros réels depuis 2017, c’est-à-dire depuis l’élection d’Emmanuel Macron. Il faut en tenir compte, et c’est pourquoi nous ne proposons pas de supprimer la publicité, malgré notre souhait de voir énormément diminuer son poids dans nos vies, mais de la limiter au maximum, au titre de la différenciation du service public.

La commission rejette le sous-amendement.

Les sous-amendements identiques AC2044 de Mme Céline Calvez et AC2068 de Mme Sophie Taillé-Polian sont retirés.

Sous-amendements AC2045 et AC2046 de Mme Céline Calvez, AC2042 de M. Salvatore Castiglione, AC2070 de Mme Sophie Taillé-Polian et AC2077 de M. Jérémy Patrier-Leitus (discussion commune)

Mme Céline Calvez (EPR). Le sous-amendement AC2045 vise à clarifier le rôle du Parlement dans le processus d’élaboration et de validation des conventions stratégiques pluriannuelles et de leurs avenants. On a déjà pu constater que le Parlement était assez peu associé pour ce qui est des contrats d’objectifs et de moyens. Il s’agirait donc d’associer les parlementaires tout au long de la rédaction et de remplacer l’avis consultatif des chambres par un vote conforme afin d’assurer un meilleur encadrement et de donner plus de force aux CSP, qui sont les normes de base de la définition et de l’exécution des missions de l’audiovisuel public.

Quant au sous-amendement de repli AC2046, il vise à ce que les conventions et leurs éventuels avenants soient transmis aux commissions permanentes afin d’en assurer le suivi.

M. Salvatore Castiglione (LIOT). Le sous-amendement AC2042 vise à inclure davantage l’Assemblée nationale et le Sénat dans les orientations de l’audiovisuel public français en s’assurant que le Parlement organise un débat sur les conventions stratégiques pluriannuelles, ce qui n’est que facultatif aux termes de la proposition de loi et que nous voudrions rendre obligatoire.

Mme Sophie Taillé-Polian (EcoS). Dans le même esprit, il semble indispensable que les conventions fassent l’objet d’un débat approfondi par les commissions, dont la nôtre, et que leur adoption ou leur rejet par le Parlement garantisse la bonne prise en compte de l’avis de la représentation nationale. Mme Calvez et moi-même avons été corapporteures de projets de COM qui étaient déjà obsolètes lorsqu’ils nous ont été présentés et dont les trajectoires financières n’étaient pas respectées. L’avis de notre commission était quasiment anecdotique, symbolique, voire ridicule. Le Parlement doit reprendre sa place et ces conventions doivent lui être soumises pour approbation, et non pas seulement pour avis éventuel.

Mme Virginie Duby-Muller, rapporteure. Il nous paraît excessif d’inscrire dans la loi que le Parlement est associé à l’élaboration des projets de conventions stratégiques pluriannuelles. D’abord, il l’est déjà, puisque les députés et les sénateurs sont représentés au sein des conseils d’administration des filiales. Ensuite, la tutelle des organismes de l’audiovisuel ne relève pas du Parlement, mais du gouvernement, à qui nous pourrons, si nécessaire, demander de revoir sa copie en rejetant les projets de conventions stratégiques pluriannuelles. Enfin, le sous-amendement de Mme Calvez est proche du nôtre lorsqu’il propose, dans sa dernière partie, une validation par avis conforme des commissions chargées des affaires culturelles, là où nous proposons une majorité de blocage des trois cinquièmes des suffrages exprimés. Nous préférons cette option, qui permet de ne pas rendre trop difficile la signature des CSP – dans le même esprit que ce que nous pratiquons pour rendre notre avis sur certaines nominations proposées par le président de la République, conformément à l’article 13 de la Constitution.

M. Jérémy Patrier-Leitus, rapporteur. Avis défavorable à ces sous-amendements.

Mme Rachida Dati, ministre. Les sous-amendements AC2045 et AC2046 sont satisfaits par ce que nous avons voté tout à l’heure. J’en demande donc le retrait. À défaut, avis défavorable.

Mme Sophie Taillé-Polian (EcoS). Sauf erreur de ma part, l’amendement que nous avons voté portait sur la nomination du président-directeur général, et non sur les CSP.

Il y a un paradoxe : vous refusez d’inscrire dans la loi de grands éléments de principe au motif qu’ils doivent figurer dans les conventions, tout en refusant que le Parlement soit pleinement intégré au processus de rédaction et d’approbation de ces conventions. Il faut choisir ! Si c’est dans la loi, l’implication du Parlement sera plus légère ensuite. Sinon, le Parlement doit avoir un réel pouvoir dans l’élaboration des conventions.

M. Emmanuel Grégoire (SOC). Je ne suis pas très à l’aise avec ces amendements, car je suis très attaché à l’indépendance de l’audiovisuel public. Toute forme de contrôle politique sur des orientations stratégiques revient à mettre les mains un peu trop profondément dans le moteur. En revanche, je déplore comme Mme Taillé-Polian le caractère superfétatoire que revêt l’avis de notre commission sur les contrats d’objectifs et de moyens. L’une des pistes intéressantes – nous verrons si nous parvenons à la préciser d’ici à la séance – est de trouver un moyen que l’État actionnaire respecte ces contrats, ce qui est plus respectueux envers nous comme envers les entreprises publiques. Comment voulez-vous bâtir un plan stratégique si le contrat d’objectifs et de moyen fait l’objet de réductions budgétaires et d’économies infra-annuelles ? Le résultat est bien, depuis plusieurs années, l’obsolescence de tous les plans stratégiques, parce que l’État n’honore pas ses engagements budgétaires. Je suis donc défavorable à cet amendement car, si je nous fais confiance, je ne sais pas de quoi l’avenir sera fait.

M. Denis Masséglia, rapporteur pour avis. Je comprends de tout cela que l’avis sera favorable au sous-amendement AC2079 de Mme la rapporteure, qui retient une majorité de blocage des trois cinquièmes au sein des deux commissions des affaires culturelles. Ne préféreriez-vous pas mon sous-amendement AC2082, qui prévoit la même majorité de trois cinquièmes, mais pour la commission des finances en plus de celle des affaires culturelles ? Il me paraît mieux rédigé. S’il ne peut toutefois être voté, je voterai les sous-amendements proposés.

Mme Rachida Dati, ministre. Outre les sous-amendements AC2045 et AC2046, le sous-amendement AC2042 est satisfait. Avis favorable sur le sous-amendement AC2077 et défavorable sur le AC2070.

La commission adopte le sous-amendement AC2045.

En conséquence, les sous-amendements AC2046, AC2042, AC2070 et AC2077 tombent.

Sous-amendement AC2079 de Mme Virginie Duby-Muller

Mme Virginie Duby-Muller, rapporteure. C’est celui qui fixe à trois cinquièmes des suffrages exprimés la majorité requise au rejet des projets de CSP au sein des commissions des affaires culturelles. Je le retire compte tenu de l’adoption du sous-amendement de Mme Calvez.

Le sous-amendement est retiré.

Sous-amendement AC2082 de M. Denis Masséglia

M. Denis Masséglia, rapporteur pour avis. Il se fonde sur le même argument que celui de Mme Calvez, en prévoyant toutefois une majorité des trois cinquièmes plutôt qu’une majorité simple pour refuser la convention, afin de limiter les risques de blocage. Ainsi, les commissions des finances et des affaires culturelles des deux assemblées pourront valider ou non la stratégie de l’audiovisuel public.

Mme Virginie Duby-Muller, rapporteure. Je demande le retrait de ce sous-amendement. Il nous paraît normal que seules les commissions des affaires culturelles rendent un avis contraignant sur les CSP, car ce sont elles qui sont chargées de l’audiovisuel public.

La commission rejette le sous-amendement.

Sous-amendement AC2078 de M. Jérémy Patrier-Leitus

M. Jérémy Patrier-Leitus, rapporteur. Il vise à rendre publiques les conventions stratégiques pluriannuelles, une fois signées.

Mme Rachida Dati, ministre. Avis favorable.

La commission adopte le sous-amendement.

Sous-amendement AC2069 de Mme Sophie Taillé-Polian

Mme Sophie Taillé-Polian (EcoS). Il vise à inclure l’avis des représentants du personnel de l’audiovisuel public dans la phase de consultation précédant l’établissement de la convention stratégique pluriannuelle.

Mme Virginie Duby-Muller, rapporteure. Défavorable.

Mme Rachida Dati, ministre. Défavorable.

M. Emmanuel Grégoire (SOC). Avis très favorable sur ce sous-amendement très intéressant !

La commission rejette le sous-amendement.

Sous-amendement AC2000 de M. Aurélien Saintoul

M. Aurélien Saintoul (LFI-NFP). Il vise à exonérer Arte France de l’obligation d’établir une convention stratégique pluriannuelle, étant donné que la proposition de loi n’inclut pas cette société dans la holding France Médias. Nous proposons de retirer du texte toutes les mentions de la chaîne.

M. Jérémy Patrier-Leitus, rapporteur. C’est précisément parce qu’Arte-France est exclue du périmètre de la holding que le sous-amendement du gouvernement prévoit la conclusion d’une CSP spécifique. Je demande donc le retrait du sous-amendement.

Mme Rachida Dati, ministre. Même avis. C’est une question purement technique.

La commission rejette le sous-amendement.

Suivant l’avis du rapporteur, la commission rejette le sous-amendement AC2004 de M. Aurélien Saintoul.

Sous-amendement AC2071 de Mme Sophie Taillé-Polian

Mme Sophie Taillé-Polian (EcoS). Ce sous-amendement de réécriture globale ne prévoit qu’une consultation des conseils d’administration des sociétés fusionnées dans l’élaboration des conventions stratégiques pluriannuelles qui les concernent et dans leur utilisation des ressources affectées. Je considère par ailleurs que les enveloppes de chacune des futures filiales doivent passer par le Parlement, et non pas être à la main du président de la holding. Le Parlement doit avoir une vue sur le budget alloué à chacune des structures.

Le sous-amendement tend ainsi à ce que chaque conseil d’administration se prononce par un vote sur les aspects des conventions stratégiques pluriannuelles qui le concernent. Les filiales doivent effet avoir leur mot à dire, surtout après que vous avez refusé d’y associer les salariés dans le cadre d’une concertation, ce qui me paraît incompréhensible.

Suivant l’avis de la rapporteure, la commission rejette le sous-amendement.

Suivant l’avis du rapporteur, elle rejette le sous-amendement AC2007 de M. Aurélien Saintoul.

Sous-amendement AC2072 de Mme Sophie Taillé-Polian

Mme Sophie Taillé-Polian (EcoS). Nous demandons que l’évolution de ces outils fasse l’objet d’un débat public de qualité, auquel participent les éditeurs, les journalistes et les différents publics. Puisque la réforme aurait pour vocation d’élargir ces derniers, il faut les associer à la définition des objectifs de la holding. Nous proposons pour cela de recourir au Conseil de déontologie journalistique et de médiation, dont le travail de qualité mérite d’être salué.

Mme Virginie Duby-Muller, rapporteure. Vous voulez en fait interdire au Parlement de modifier le régime des CSP (conventions stratégiques pluriannuelles) en l’absence d’une consultation des professionnels du journalisme, du public et des éditeurs dans des conditions déterminées par un décret en Conseil d’État. Cette disposition est contraire à la Constitution dans la mesure où elle méconnaît le droit d’initiative législative du gouvernement et des membres du Parlement. Celui-ci est souverain : il n’a pas à être autorisé à changer la loi. Avis défavorable.

La commission rejette le sous-amendement.

Suivant l’avis du rapporteur, elle rejette le sous-amendement AC2019 de M. Aurélien Saintoul.

Sous-amendement AC2083 de M. Denis Masséglia

M. Denis Masséglia, rapporteur pour avis. Il faut faire confiance à la holding pour mettre en œuvre la CSP une fois qu’elle aura été validée par l’Assemblée et le Sénat. Néanmoins, en cas d’évolution substantielle de la trajectoire financière, ce document devrait de nouveau être soumis au Parlement.

Mme Virginie Duby-Muller, rapporteure. Avis défavorable, pour les mêmes raisons que précédemment.

Mme Rachida Dati, ministre. J’ai déjà eu l’occasion de dire que je n’étais pas favorable au dispositif proposé. Je rappelle en outre qu’une audition du PDG de la holding est prévue s’il y avait un écart d’au moins 10 %, ce qui permet de satisfaire votre demande. Je souhaite donc un retrait.

Mme Sophie Taillé-Polian (EcoS). Je m’oppose à ce sous-amendement car il donne une prérogative à la commission des finances qui ne me semble pas compétente pour juger de la mise en œuvre des CSP, lesquelles touchent au fond de ce que doit être l’audiovisuel public.

M. Denis Masséglia, rapporteur pour avis. Cet argument me surprend beaucoup : ce ne serait donc pas à la commission des finances de contrôler la trajectoire financière ? Sauf erreur de ma part, mais je connais plutôt bien le fonctionnement de l’Assemblée nationale, la commission des affaires culturelles se prononce pour avis sur le financement de l’audiovisuel public, et la commission des finances sur le fond. Néanmoins, je serais favorable à ce que ces deux commissions soient incluses dans le dispositif – n’opposons pas culture et finances.

Mme Céline Calvez (EPR). Le sous-amendement AC2045, que nous avons adopté, précise que le Parlement – donc la commission des affaires culturelles et celle des finances – est associé à l’élaboration de la convention stratégique pluriannuelle et de ses éventuels avenants, sur lesquels il doit aussi se prononcer. Cette demande est donc satisfaite.

Le sous-amendement est retiré.

Sous-amendement AC2075 de Mme Sophie Taillé-Polian

Mme Sophie Taillé-Polian (EcoS). Nous demandons, pour garantir un financement pérenne, que les dotations budgétaires tiennent compte de l’inflation. Elles ont quasiment stagné entre 2008 et 2025, alors que l’inflation cumulée s’est élevée à 32,4 %. Quand on regarde l’exécution des budgets, en particulier en 2024 et 2025, comment croire à votre volonté de renforcer l’audiovisuel public en le regroupant au sein d’une holding ? Votre projet est avant tout de réduire les moyens, par des mutualisations.

M. Jérémy Patrier-Leitus, rapporteur. Je comprends l’objectif de ce sous-amendement, mais il n’est pas normatif : le Parlement se prononce souverainement sur les projets de loi de finances. Sagesse.

Mme Rachida Dati, ministre de la culture. Avis défavorable.

M. Alexis Corbière (EcoS). Je soutiens ce sous-amendement. Il est très inquiétant que nous ne soyons pas d’accord sur cette idée que les dotations doivent, au minimum, suivre l’inflation. Vous vous appuyez sur le rapport de Mme Bloch, qui souligne la nécessité d’un investissement massif, mais vous ne vous engagez même pas à faire en sorte que les trajectoires budgétaires soient totalement respectées !

La commission rejette le sous-amendement.

Sous-amendement AC2074 de Mme Sophie Taillé-Polian

Mme Sophie Taillé-Polian (EcoS). La contribution fiscale prévue par la loi de 1986 doit être progressive. Nous souhaitons charger l’Arcom d’y veiller en faisant œuvre de transparence et de pédagogie. Le présent article de la proposition de loi précise que « la principale source de financement des sociétés [de l’audiovisuel public] est constituée par une ressource publique de nature fiscale, pérenne, suffisante, prévisible et prenant en compte l’inflation. »

Mme Virginie Duby-Muller, rapporteure. Avis défavorable.

Mme Rachida Dati, ministre. Même avis.

M. Aurélien Saintoul (LFI-NFP). Ce sous-amendement est l’occasion de rappeler que le financement de l’audiovisuel public est dramatiquement stable depuis une décennie. Vous nous parlez encore d’économies, mais les budgets ont déjà été sabrés. Notre audiovisuel public s’en sort malgré tout avec les honneurs : ses chaînes continuent de faire partie de celles qui sont le plus suivies en France. Elles pourraient faire encore beaucoup mieux si elles avaient les mêmes moyens que leurs homologues au niveau européen.

La commission rejette le sous-amendement.

Elle adopte l’amendement AC1466 sous-amendé et l’article 5 est ainsi rédigé.

En conséquence, les autres amendements sur l’article tombent.

Après l’article 5

Amendement AC1056 de la commission des finances et amendements identiques AC738 de Mme Sophie Taillé-Polian et AC757 de Mme Soumya Bourouaha

M. Denis Masséglia, rapporteur pour avis. Je laisserai mes collègues défendre l’amendement AC1056, que la commission des finances a adopté avec les voix du Rassemblement national et de la gauche en vue de créer une nouvelle taxe – une de plus ! Nous y sommes plutôt opposés au sein de la majorité présidentielle, mais d’autres sont d’une inventivité sans limite dans ce domaine.

Mme Sophie Taillé-Polian (EcoS). Nous n’avons absolument pas renoncé à faire financer le service public de l’audiovisuel par une contribution affectée, car cela renforcerait son indépendance. Pour votre part, vous préférez asseoir le financement sur une fraction de TVA, l’impôt le plus injuste qui soit. Nous considérons que la fiscalité doit permettre de prendre en compte les différences de situation liées aux inégalités qui s’accroissent dans notre société. Ce joyau de nos services publics doit être financé d’une manière juste.

Mme Soumya Bourouaha (GDR). L’amendement AC757 va dans le même sens. Nous souhaitons rétablir une redevance afin de garantir à l’audiovisuel public des ressources pérennes. Contrairement à l’ancien système, qui ne prenait pas en compte les ressources des contribuables, la redevance que nous souhaitons serait proportionnelle au revenu imposable, à hauteur de 0,25 %. Par ailleurs, un crédit d’impôt annulerait le coût du dispositif pour les ménages les moins aisés. Les plans d’économies budgétaires qui se succèdent ont fait perdre aux médias publics 1,252 milliard d’euros depuis 2008, dont 776 millions depuis l’élection d’Emmanuel Macron. Leur situation de vulnérabilité économique remet fortement en question leur capacité à assurer leurs missions, notamment la production d’une information fiable et de qualité.

M. Jérémy Patrier-Leitus, rapporteur. Avis défavorable au retour d’une redevance. Par ailleurs, la proposition de loi a trait à la gouvernance de l’audiovisuel public : ce n’est pas le bon cadre pour reprendre le débat sur cette question importante.

Mme Rachida Dati, ministre. Même avis. Nous avons sécurisé le mode de financement de l’audiovisuel public. Il ne sera plus soumis aux régulations infra-annuelles évoquées par M. Corbière.

M. Emmanuel Grégoire (SOC). Les conditions un peu rocambolesques dans lesquelles nous avons examiné la proposition de loi organique portant réforme du financement de l’audiovisuel public ont fait que nous avons été obligés, moralement, de la voter conforme afin de protéger du pire notre audiovisuel. Mais nous avons prévenu que le mécanisme retenu était incapable d’assurer un financement pérenne : il conduira inéluctablement, année après année, à une attrition des moyens en période de crise budgétaire. Il serait irresponsable d’imposer, en plus, à l’audiovisuel public une holding dont la mise en œuvre serait fort coûteuse et les résultats opérationnels nullement garantis.

M. Aurélien Saintoul (LFI-NFP). Je suis un peu choqué par la désinvolture avec laquelle le rapporteur pour avis traite un amendement adopté par la commission des finances. Qu’il ne s’y retrouve pas à titre personnel, c’est une chose ; c’en est une autre de dire, avec un sarcasme assez déplacé, que nous sommes inventifs en matière de fiscalité. Vous avez, de votre côté, réinventé l’affectation de la TVA ! Il faudrait être un peu sérieux sur ce sujet. Demander l’instauration d’une redevance progressive, c’est faire preuve de bon sens et de justice sociale. La démonstration n’a jamais été faite que la TVA est un impôt juste, qui ne pèse pas de façon excessive sur les classes populaires. En tout cas, vous pourriez faire preuve d’un peu de considération pour le travail de la commission des finances.

M. Denis Masséglia, rapporteur pour avis. Je reviens sur l’amendement AC1056, qui, au passage, n’est pas indexé sur l’inflation : pouvez-vous nous dire quel montant est attendu de cet impôt ? On ne sait pas quelle serait la dotation pour l’audiovisuel public.

Par ailleurs, les amendements AC738 et AC757 prévoient que « la contribution à l’audiovisuel public est due par l’ensemble des foyers fiscaux à la proportion de 0,25 % du revenu imposable tel que défini à l’article 1A du code général des impôts. » Je traduis : ce sont toujours les mêmes qui vont payer, ceux qui travaillent. Mais la coupe est pleine ! Les personnes qui travaillent n’arrivent plus à s’en sortir à la fin du mois, parce que la charge des impôts est trop importante. Arrêtons d’ajouter des impôts aux impôts, d’augmenter la pression sur nos concitoyens.

M. Emmanuel Grégoire (SOC). Monsieur Masséglia, votre leçon de finances publiques aurait un sens si tout cela n’était pas financé par le déficit. De toute façon, ce sont nos enfants, petits-enfants et arrière-petits-enfants qui paieront. Il est facile, par exemple, de supprimer les impôts locaux, mais le financement par la dette revient à faire appel à un impôt différé – il faut appeler les choses par leur nom. Nous considérons que le meilleur moyen de protéger l’audiovisuel public est de rétablir une contribution.

Mme Sophie Taillé-Polian (EcoS). Ne nous parlez pas, monsieur Masséglia, des Françaises et des Français en difficulté alors que votre politique sociale les appauvrit chaque jour davantage.

La commission rejette successivement les amendements.

Amendement AC862 de Mme Sophie Taillé-Polian

Mme Sophie Taillé-Polian (EcoS). Cet amendement vise à sanctuariser la complémentarité entre les informations départementales et régionales. Nous parler d’une fusion au sein d’une même filiale de France Bleu et de France 3, sous la marque Ici, c’est oublier les différences entre les maillages territoriaux et les pratiques sur le terrain. Ce n’est certainement pas une fusion sans moyens – vous ne répondez jamais aux questions sur ce point, madame la ministre – qui permettra d’améliorer la présence des médias du service public au plus près de tous les territoires.

Suivant l’avis du rapporteur, la commission rejette l’amendement.

Amendement AC883 de Mme Sophie Taillé-Polian

Mme Sophie Taillé-Polian (EcoS). Il s’agit de garantir la cohérence entre ce qu’on demande aux sociétés de l’audiovisuel public, dans le cadre des CSP, et les moyens dont elles disposent. En Allemagne, une structure qui s’appelle la KEF, la commission chargée de déterminer les besoins financiers des organismes de radiodiffusion, permet de veiller à ce qu’on ne demande pas l’impossible en l’absence des financements nécessaires. On peut remplir les conventions de très belles paroles et de grands objectifs – les rapprochements sur le terrain, le développement de l’information… – mais si les budgets ne suivent pas, cela ne fait que cacher l’affaiblissement continu de l’audiovisuel public.

M. Jérémy Patrier-Leitus, rapporteur. La loi autorise déjà l’Arcom à se prononcer sur les trajectoires budgétaires inscrites dans les projets de COM – et demain dans les projets de CSP. L’Arcom peut également se prononcer, dans ses avis sur les rapports d’exécution des COM, sur les niveaux des dotations budgétaires. Votre demande est donc largement satisfaite. Demande de retrait, sinon avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement AC928 de M. Steevy Gustave

M. Alexis Corbière (EcoS). Il faut rendre à César ce qui est à César et à Gustave ce qui est à Gustave : notre collègue propose d’inscrire dans ce texte la notion de continuité territoriale audiovisuelle entre l’Hexagone et les territoires ultramarins, qui a été supprimée de la loi en 2009 et reléguée, depuis 2017, aux cahiers des charges de France Télévisions. La continuité territoriale n’est plus vraiment assurée, malgré les efforts des chaînes ultramarines. La suppression de France Ô, qui était un des derniers recours pour nos concitoyens des DOM-TOM qui vivent dans l’Hexagone, a rompu le lien.

M. Jérémy Patrier-Leitus, rapporteur. Les cahiers des charges comprennent déjà des engagements relatifs aux outre-mer – il s’agit de l’article 7-1 du cahier des charges de France Télévisions et de l’article 93 du cahier des charges de Radio France, qui sont très complets. Des dispositions sont par ailleurs inscrites dans la loi. Nous considérons que ces précisions n’ont pas à figurer dans les CSP, qui doivent demeurer des documents concis et stratégiques. Par conséquent, demande de retrait ou avis défavorable.

Mme Rachida Dati, ministre. La question avait déjà été soulevée par M. Gustave lors de la première discussion du texte, et il avait retiré son amendement. Nous avions en effet rappelé que le pacte pour la visibilité des outre-mer, conclu en 2019, concrétisait les engagements pris en la matière. De plus, une mission dite de continuité territoriale audiovisuelle entre l’Hexagone et les territoires ultramarins est inscrite dans le cahier des charges de France Télévisions. Cet amendement est donc doublement satisfait.

M. Alexis Corbière (EcoS). Depuis le début, vous nous dites que la structure doit être modifiée, parce qu’il existe de nouveaux enjeux et de nouveaux publics, mais à chaque fois que nous faisons une proposition, c’est « circulez, y a rien à voir » ! Si tout est déjà prévu, on se demande pourquoi il faudrait changer ! Vous devriez plutôt saluer le travail réalisé pour essayer d’enrichir le dispositif.

M. Aurélien Saintoul (LFI-NFP). Le pacte de 2019 pour la visibilité des outre-mer n’a pas porté ses fruits : son bilan n’est pas positif. De l’avis de la délégation aux outre-mer et des collègues de ces territoires, la réalité est loin d’être satisfaisante. Les personnes ultramarines ont peut-être une visibilité dans des programmes plus généralistes mais, dans l’ensemble, la visibilité des outre-mer n’a pas progressé, c’est le moins qu’on puisse dire. Quant aux professionnels de France Ô, rapatriés, si je puis dire, au siège de France Télévisions, le bilan est plus que mitigé.

Mme Rachida Dati, ministre. Monsieur Saintoul, vous ne pouvez pas dire que le pacte de 2019 ne se traduit pas par des engagements. J’ai montré à M. Gustave les résultats obtenus.

La commission rejette l’amendement.

Amendements AC896, AC892, AC895 et AC894 de Mme Sophie Taillé-Polian

Mme Sophie Taillé-Polian (EcoS). Nous demandons que l’Arcom se saisisse pleinement des questions budgétaires. Il faut analyser les besoins du service public de l’audiovisuel, dans toutes ses branches, et les mettre en regard des ressources, notamment fiscales. Les cahiers des charges comprennent des chiffres et des évolutions budgétaires, mais l’on constate fréquemment que l’État ne respecte pas ses propres engagements – en tout cas, quand les évolutions sont prévues sont à la hausse ! Il y a donc un problème de cohérence entre les objectifs inscrits dans les conventions des sociétés et les moyens qui leur sont alloués. L’audiovisuel public et ses salariés ne peuvent pas continuer à recevoir des injonctions contradictoires : l’Arcom doit davantage veiller à ce que les sociétés de l’audiovisuel public aient des moyens correspondant aux ambitions qui leur sont fixées ; sinon, il faut l’expliquer.

Mme Virginie Duby-Muller, rapporteure. Avis défavorable, pour les raisons déjà exprimées sur votre amendement AC883.

La commission rejette successivement les amendements.

Amendement AC872 de Mme Sophie Taillé-Polian

M. Jérémy Patrier-Leitus, rapporteur. Cet amendement est assez dangereux. Vous parlez d’indépendance des médias et d’étanchéité entre le pouvoir politique et les acteurs de l’audiovisuel public, et voilà que vous voulez inscrire dans la loi un journal à 23 heures ! Pourquoi pas 22 heures ou minuit, d’ailleurs ? Je ne sais pas s’il s’agit d’obstruction, mais je vous appelle quand même à faire attention : le législateur n’a pas à définir les contenus éditoriaux de l’audiovisuel public. Sinon, pourquoi ne pas aller jusqu’à choisir le nom du présentateur ou de la présentatrice ? Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement AC873 de Mme Sophie Taillé-Polian

Mme Sophie Taillé-Polian (EcoS). L’objectif du précédent amendement était en fait d’engager un débat sur la décision de supprimer la rédaction de France 3. Le AC873, lui, propose un journal d’information à destination de la jeunesse. Mais de toute façon, rien ne vous agrée, monsieur le rapporteur, ni cela, ni quand nous proposons d’inscrire de grands principes dans la loi ! Il faudra bien pourtant revoir les objectifs du service public de l’audiovisuel, refonder ses missions, dans le cadre d’un grand débat parlementaire. Les véritables enjeux ne sont pas dans la gouvernance mais dans les objectifs fondamentaux – quels publics on vise, avec quels outils, ce qui pose notamment la question de la place des réseaux sociaux et des plateformes. Ce serait bien plus intéressant qu’une réforme de structure qui, n’étant pas financée, conduira certainement à un appauvrissement du service public de l’audiovisuel.

M. Jérémy Patrier-Leitus, rapporteur. Tout cela n’est pas antinomique. Nous considérons que ces grandes questions doivent être traitées par l’ensemble des forces de l’audiovisuel public au sein d’une holding. Vous et moi sommes d’accord sur l’objectif : je pense comme vous que l’audiovisuel public doit répondre à des défis majeurs – vous avez cité ceux qui sont sans doute les plus impérieux et les plus urgents. Mais pour nous, cette réforme de la structure et de la gouvernance est stratégique : elle permettra de répondre à tous les enjeux que vous avez évoqués. La jeunesse, objet de cet amendement, est effectivement une priorité, mais de là à demander un journal qui lui serait destiné le matin… Présenté par Casimir, peut-être, me souffle la ministre ? Avis défavorable.

Mme Rachida Dati, ministre de la culture. Même avis.

Mme Anne Genetet (EPR). Cet amendement tend à inscrire dans la loi que « France Télévisions présente tous les matins un journal d’information à destination de la jeunesse ». Je voterais des deux mains contre, si je le pouvais. D’abord, ce n’est pas au législateur d’élaborer les programmes. Ensuite, on passerait complètement à côté de la manière dont la jeunesse consomme désormais l’information. Si on s’imagine inciter les jeunes à s’informer précisément à 7 heures, à 7 h 30 ou à 8 h 15 – vous ne l’avez pas précisé dans l’amendement ! – on fait vraiment fausse route. En revanche, cette proposition de loi permettra de créer des contenus qui seront diffusés sur différentes plateformes. Je veux saluer à cet égard France Inter, qui crée des programmes extrêmement intéressants pour la jeunesse. C’est de cette manière qu’on peut aller la chercher et l’informer, et non en décidant, en tant que législateur, qu’il faut lui consacrer un programme le matin.

La commission rejette l’amendement.

Amendement AC835 de Mme Sophie Taillé-Polian

Mme Sophie Taillé-Polian (EcoS). Je reviens sur un problème très important, qui est celui de l’adéquation entre le niveau des budgets et les objectifs. Cet amendement vise à renforcer la connaissance de cette question que peuvent avoir le gouvernement, le Parlement et l’ensemble des Françaises et des Français, en précisant que le contrôle de la Cour des comptes sur l’activité de France Médias porte notamment sur l’adéquation entre les objectifs qui lui sont fixés et le budget qui lui est affecté pour mener à bien ses missions. Madame la ministre, vous n’avez jamais répondu sur ce point.

Lors de l’examen des COM, j’ai proposé avec Mme Calvez que l’Assemblée examine un texte de programmation afin que nous puissions avoir le débat que j’appelle de mes vœux sur la redéfinition collective, de manière transparente pour les citoyens et citoyennes, des missions de service public et des moyens alloués en parallèle. Nous connaissons les faiblesses des lois de programmation, mais aussi leur force : un tel texte donnerait un peu de visibilité aux sociétés de l’audiovisuel public, qui évoluent, comme vous l’avez rappelé à plusieurs reprises, dans un environnement très concurrentiel.

Nous avons donc ici un problème majeur qui met à terre toute la crédibilité de votre réforme. Alors que Mme Bloch précise que ce projet – comme tout autre d’ailleurs, même s’il ne modifiait pas la gouvernance – ne pourra pas être mené sans un investissement massif dans le numérique, vous n’en dites rien. Or c’est bien le sujet : si nous voulons continuer à faire face à la guerre informationnelle, à chérir et à développer l’exception culturelle française, ce ne sera pas sans des moyens supplémentaires adaptés aux missions de service public que nous confions à l’audiovisuel public.

Mme Virginie Duby-Muller, rapporteure. Avis défavorable.

Mme Rachida Dati, ministre. Défavorable.

M. Denis Masséglia, rapporteur pour avis. La Cour des comptes est compétente pour contrôler les dépenses réalisées, non pour proposer des dépenses budgétaires. Chacun doit être dans son rôle. Or ce n’est pas le cas avec cet amendement.

Mme Sophie Taillé-Polian (EcoS). L’Humanité a révélé une note de Bercy évoquant différents projets d’économies, dont celui d’instaurer une holding. Et de citer la fusion entre France 2 Cinéma et France 3 Cinéma, celle entre France Médias Monde et sa filiale internationale, la mutualisation de tous les correspondants étrangers… Toujours selon cette note, l’accord collectif entraînerait dans un premier temps des dépenses supplémentaires avant de permettre la réalisation d’économies importantes.

Le sujet fondamental que vous ne traitez jamais est celui du financement de l’audiovisuel public à l’heure où notre pays traverse une période grave, avec un dérapage des finances publiques dû à vos propres majorités.

M. Alexis Corbière (EcoS). La Cour des comptes émet des avis sur de nombreux sujets ; elle peut très bien mettre en lumière l’insuffisance des moyens alloués à la holding pour accomplir ses missions de service public. Il s’agit bien de l’une des missions qui incombe à la Cour des comptes ; cet amendement est tout à fait pertinent.

Vous ne cessez de dire, monsieur Patrier-Leitus, que nous partageons le même objectif et que vous souhaitez le meilleur pour l’audiovisuel public. Pourtant, nous ne savons pas ce que contiendra cette holding !

Nous débattons maintenant des questions budgétaires, qui sont fondamentales. Nous vous poussons dans vos retranchements : nous voulons savoir si le financement sera pérenne, si les moyens seront indexés sur l’inflation. Mais vous ne nous répondez pas. Nous exprimons donc notre doute et notre inquiétude.

Selon le rapport de Mme Bloch, sur lequel vous vous appuyez, madame la ministre, dans le cadre de nos échanges, des investissements massifs seront nécessaires. Or vous n’apportez aucune garantie, ni sur la trajectoire ni sur les investissements envisagés.

La commission rejette l’amendement.

La réunion est suspendue de vingt-trois heures à vingt-trois heures cinq.

Article 6 : Dispositions de coordination au sein de la loi du 30 septembre 1986

Amendements de suppression AC82 de M. Aymeric Caron et AC836 de Mme Sophie Taillé-Polian

M. Aurélien Saintoul (LFI-NFP). Cet amendement, qui vise à supprimer cet article de coordination, est cohérent avec notre opposition à l’ensemble de ce texte.

M. Jérémy Patrier-Leitus, rapporteur. Avis défavorable.

La commission rejette les amendements.

Suivant l’avis du rapporteur, la commission adopte l’amendement AC1467 du gouvernement et l’article 6 est ainsi rédigé.

Article 7 : Transformation de l’INA en société anonyme

Amendements de suppression AC83 de M. Aurélien Saintoul, AC206 de M. Emmanuel Grégoire, AC758 de M. Frédéric Maillot et AC837 de Mme Sophie Taillé-Polian

M. Aurélien Saintoul (LFI-NFP). Il s’agit de supprimer l’article consacré à l’Institut national de l’audiovisuel.

Depuis sa création en 1974, l’INA, qui est un établissement public à caractère industriel et commercial (Epic) – peut-être le dernier en France –, accomplit des missions particulières au sein de l’audiovisuel public : conservation des archives, recherche et création audiovisuelle, formation professionnelle, dépôt légal de la télévision et de la radio depuis 1992. Tout cela participe à la constitution d’un patrimoine public de l’audiovisuel exceptionnel, à disposition de toutes et tous.

Loin des caricatures qui sont parfois faites de l’audiovisuel public, l’INA a su se moderniser pour répondre aux nouvelles attentes des Français, notamment avec la création d’une offre de streaming dont la richesse séduit de plus en plus de Français et qui mériterait d’être davantage promue. Alors qu’aucune réorganisation d’ampleur, comme celle envisagée aujourd’hui, n’a été engagée, elle a déjà noué de nombreuses coopérations, en particulier avec France Télévisions pour la création de la plateforme Lumni Enseignement.

Dans ce contexte, la transformation de l’INA en société anonyme ne se justifie absolument pas : elle ne permettrait pas à l’Institut de relever les défis structurels auxquels il est confronté. Comme le souligne la CGT INA dans un communiqué du 26 mars 2024 intitulé « Avenir de l’audiovisuel public : la holding de tous les dangers », le statut juridique de l’INA est loin d’être le souci. Les vrais défis sont ailleurs : par exemple, l’introduction de l’intelligence artificielle, dont le déploiement est envisagé « sur tous les métiers » sans qu’à ce jour les représentants des salariés aient été consultés. Quel impact aura-t-elle sur l’organisation interne de l’INA, sur les missions des salariés et sur leurs conditions de travail ? La transformation de l’INA en société anonyme ne répond à aucune de ces questions pourtant cruciales.

M. Emmanuel Grégoire (SOC). Ces amendements traduisent notre opposition à cette réforme.

Mme Soumya Bourouaha (GDR). Il faut en effet empêcher la transformation de l’INA en société anonyme, en vue d’éviter une éventuelle privatisation.

Mme Sophie Taillé-Polian (EcoS). Nous sommes opposés à la holding de l’audiovisuel public, et particulièrement hostiles à ce que l’INA y soit intégré.

L’INA constitue un patrimoine, notamment au moyen d’accords conclus avec des entreprises privées. Nous craignons que son intégration au sein de la holding brouille les choses, notamment au regard des partenariats établis avec les autres chaînes de la TNT (télévision numérique terrestre). L’Institut doit rester indépendant afin de poursuivre sa mission d’archivage et de conservation de l’ensemble des contenus diffusés dans notre pays.

J’en profite pour saluer le travail extraordinaire des agents et des salariés de l’INA, qui, d’une part, conservent et archivent, et d’autre part, grâce au service de journalistes qui a été créé, éditorialisent et remettent au goût du jour notre patrimoine commun de l’audiovisuel en rencontrant un vif succès sur les réseaux sociaux.

Mme Virginie Duby-Muller, rapporteure. Nous nous associons à l’hommage que vous rendez aux salariés de l’INA. Néanmoins, leur avenir réside dans son intégration à la holding. Cet article, qui prévoit la transformation de l’établissement public INA en société anonyme ainsi que les modalités de modification de la forme sociale, est essentiel.

La holding permettra de mener les coopérations nécessaires pour améliorer l’efficacité du service public audiovisuel – partenariats éditoriaux, plateformes numériques, groupements d’achats, emprises immobilières.

Par ailleurs, elle contribuera à une stratégie de diffusion commune à la radio et à la télévision locale et nationale afin de garantir un service public impartial, à l’heure où les médias privés se polarisent.

Enfin, la société France Médias permettra de mieux coordonner les investissements vers des objectifs communs à tous les médias publics – déploiement de l’intelligence artificielle et du numérique, lutte contre les fausses informations. Avis défavorable sur ces amendements.

Mme Rachida Dati, ministre. Avis défavorable.

M. Aurélien Saintoul (LFI-NFP). Je n’ai pas bien compris le sens de la réponse de la rapporteure.

Il serait intéressant d’abord que vous précisiez en quoi le changement de statut permettrait d’atteindre précisément ces objectifs. Je ne vois pas en quoi le statut d’Epic empêche l’INA de travailler avec les différentes rédactions, notamment les entreprises privées – avec lesquelles il conclut déjà des contrats.

Ensuite, parmi les coopérations fructueuses que vous envisagez au sein de la holding figure le partage des emprises immobilières. On ne saurait dire plus clairement que l’objectif est de mutualiser les moyens et de réduire les coûts ! Ou alors êtes-vous en train de nous dire que l’INA va déménager à la Maison de la radio ? Cela n’a aucun sens : cela ne changerait rien aux métiers exercés par les salariés. Votre objectif n’est pas clair.

Mme Sophie Taillé-Polian (EcoS). Pouvez-vous préciser quelles sont les opérations d’emprise immobilière envisagées pour l’INA ?

Mme Virginie Duby-Muller, rapporteure. Il s’agissait de la holding !

Mme Sophie Taillé-Polian (EcoS). Nous avons bien compris que les stratégies immobilières envisagées notamment pour la filiale de proximité visent à rationaliser et, au bout du compte, à faire baisser les coûts. Nous ne sommes pas d’accord avec cette logique, mais elle ne nous a pas étonnés. Mais le fait que ces questions immobilières soient désormais évoquées dans le cadre d’un amendement portant spécifiquement sur l’INA accroît notre inquiétude.

Mme Virginie Duby-Muller, rapporteure. Je rappelle qu’un alignement social est nécessaire puisque l’INA, qui a le statut d’Epic, doit devenir une société anonyme pour intégrer la holding. Les arguments que j’ai ensuite exposés étaient relatifs à la holding.

La commission rejette les amendements.

Amendements AC897 de Mme Sophie Taillé-Polian et amendements identiques AC1469 du gouvernement et AC1036 de M. Jérémy Patrier-Leitus (discussion commune)

Mme Sophie Taillé-Polian (EcoS). L’article 7 de cette proposition de loi du sénateur Laurent Lafon prévoit que l’INA doit changer de statut au 1er janvier 2024. Cela ne me paraît plus guère approprié. Quitte à rectifier, je propose la date de 2044, pour avoir le temps d’y réfléchir !

Mme Rachida Dati, ministre. L’amendement AC1469 vise à décaler l’entrée en vigueur de la transformation de l’INA au 1er janvier 2026.

M. Jérémy Patrier-Leitus, rapporteur. Ce sont effectivement des amendements de coordination concernant les mesures transitoires. Avis défavorable à l’amendement AC897.

Mme Rachida Dati, ministre. Même avis.

M. Alexis Corbière (EcoS). Pourrions-nous avoir un tout petit argument ? Pourquoi l’INA, qui accomplit des missions d’excellente qualité et très particulières, qui ne sont pas celles exercées par une holding de l’audiovisuel, devrait-il rejoindre cette holding ? Pourquoi y tenez-vous tant ? Vous avez l’air très convaincus, mais nous ne voyons pas pourquoi : simplement parce qu’il y a le mot « audiovisuel » dans INA ?

Vu que vous n’apportez pas de réponse pertinente, nous craignons que vous cherchiez simplement à « optimiser les moyens » – on sait ce que cela signifie.

M. Aurélien Saintoul (LFI-NFP). M. Corbière a raison ! Les missions et les métiers de l’INA sont complètement différents de ceux qu’exercerait la holding. Transformer l’INA en société anonyme au prétexte d’intégrer une holding laisse simplement présager que demain, peut-être, les missions qui lui sont confiées aujourd’hui auront vocation à être confiées à d’autres. Après tout, le traitement de l’archivage et la conservation des données pourraient faire l’objet d’un marché et être confiés à des grandes chaînes, qui se feraient alors beaucoup d’argent ! Pourtant, c’est une mission qui doit être assurée par le service public.

Nous avons toutes les raisons de croire qu’il y a un loup dans cette affaire. Ce n’est pas la première fois qu’on nous fait le coup : on transforme un Epic en société anonyme et, un jour, on le privatise, on le sort de la holding, ou on le met en concurrence avec d’autres.

M. Denis Masséglia, rapporteur pour avis. Je salue la qualité du travail accompli par l’ensemble des salariés de l’INA. Je rappelle que l’Institut n’accomplit pas qu’une mission de sauvegarde et d’enrichissement des archives : il diffuse également des contenus relatifs à l’histoire française sur les réseaux sociaux.

Il est nécessaire d’avoir une capacité de communication globale de nature publique. En diffusant ces contenus historiques, l’INA participe pleinement à cette démarche, au même titre que l’ensemble de l’audiovisuel public.

Par ailleurs, lors de son audition, l’INA a fait part de sa volonté de rejoindre la holding.

La commission rejette l’amendement AC897.

Elle adopte les amendements AC1469 et AC1036.

Amendement rédactionnel AC1037 de Mme Virginie Duby-Muller

Mme Virginie Duby-Muller, rapporteure. Il s’agit de remplacer « sa date de » par « la date de sa ».

Mme Rachida Dati, ministre. Avis favorable.

M. Aurélien Saintoul (LFI-NFP). Il vaut vraiment la peine, cet amendement ! Nous voudrions une explication grammaticale qui justifie cette modification !

Mme Rachida Dati, ministre. Vous serez dans les archives de l’INA !

La commission adopte l’amendement.

Amendement rédactionnel AC1038 de M. Jérémy Patrier-Leitus

M. Jérémy Patrier-Leitus, rapporteur. Nous nous sommes inspirés de notre collègue Sophie Taillé-Polian. Cet amendement rédactionnel vise à remplacer « conformément » par les mots « dans les conditions prévues ».

La commission adopte l’amendement.

Amendement AC1039 de M. Jérémy Patrier-Leitus

M. Jérémy Patrier-Leitus, rapporteur. Il vise à maintenir l’exonération de contribution foncière des entreprises dont bénéficie l’INA à raison de ses activités exercées sous le statut d’Epic.

La commission adopte l’amendement.

Amendements AC1040 de Mme Virginie Duby-Muller, AC1041 de M. Jérémy Patrier-Leitus, AC1042 de Mme Virginie Duby-Muller, AC1043 de M. Jérémy Patrier-Leitus, AC1044 de Mme Virginie Duby-Muller, AC1045 de M. Jérémy Patrier-Leitus, AC1046 et AC1047 de Mme Virginie Duby-Muller, AC1049 de M. Jérémy Patrier-Leitus, AC1048 de Mme Virginie Duby-Muller, AC1050 et AC1051 de M. Jérémy Patrier-Leitus

M. Jérémy Patrier-Leitus, rapporteur. Ils sont tous rédactionnels, sauf l’amendement AC1050.

La commission adopte successivement les amendements.

Elle adopte l’article 7 modifié.

Article 8 : Création de la société France Médias et mise en place de sa gouvernance

Suivant l’avis du rapporteur, la commission rejette les amendements de suppression AC56 de M. Aymeric Caron, AC207 de M. Emmanuel Grégoire et AC838 de Mme Sophie Taillé-Polian

Amendement AC1470 rectifié du gouvernement, faisant l’objet de plusieurs sous-amendements

Mme Rachida Dati, ministre. Cet amendement propose une nouvelle rédaction de l’article en décalant la création de la société France Médias au 1er janvier 2026.

M. Jérémy Patrier-Leitus, rapporteur. Avis favorable.

Sous-amendements AC2026 de M. Aurélien Saintoul, AC1978 de M. Aymeric Caron, AC1976 de M. Aurélien Saintoul, AC1972 et AC1914 de M. Aymeric Caron, AC1968 et AC1919 de M. Aurélien Saintoul, AC1908 de M. Aymeric Caron, AC1905 et AC1900 de M. Aurélien Saintoul, AC1895 et AC1884 de M. Aymeric Caron, AC1879 de M. Aurélien Saintoul ; sous-amendements identiques AC1628 de Mme Soumya Bourouaha et AC1743 de M. Emmanuel Grégoire ; sous-amendement AC1739 de M. Aurélien Saintoul ; sous-amendements identiques AC1627 de Mme Soumya Bourouaha et AC1742 de M. Emmanuel Grégoire ; sous-amendement AC1736 de M. Aymeric Caron ; sous-amendements identiques AC1626 de Mme Soumya Bourouaha et AC1741 de M. Emmanuel Grégoire ; sous-amendements AC1732 de M. Aurélien Saintoul et AC1625 de Mme Soumya Bourouaha (discussion commune)

M. Aurélien Saintoul (LFI-NFP). Je retire tous mes sous-amendements et ceux de M. Caron du AC2026 au AC1879.

Mme Soumya Bourouaha (GDR). Le sous-amendement AC1628 vise à reporter la création de France Médias à 2030. Le 1er janvier 2026 est une échéance un peu précipitée.

M. Emmanuel Grégoire (SOC). Je retire les sous-amendements AC1743, AC1742 et AC1741 : nous reparlerons de ces sujets en séance.

J’ai néanmoins quelques questions. La société France Médias devrait être créée au 1er janvier 2026. J’imagine qu’il sera mis fin au mandat des dirigeants actuels de l’audiovisuel public : à quelle date ? Quel est le calendrier du recrutement du futur président, dans l’hypothèse où nous ne parviendrions pas à faire obstacle à ce texte en séance ? Quelles sont les modalités de fin de contrat des dirigeants actuels de l’audiovisuel public ? En ont-ils été informés ?

M. Aurélien Saintoul (LFI-NFP). Je retire les sous-amendements AC1739 et AC1732.

Nous avons proposé plusieurs dates pour une entrée en vigueur plus tardive. Dans tous les cas, les questions relatives à la fin des mandats en cours méritent une réponse.

Le calendrier que vous proposez aboutira à bouleverser les équilibres et le fonctionnement de l’audiovisuel public en 2026, en pleine campagne présidentielle. Il y aura une année pleine de déstabilisation avant l’élection. Cela contribuera, que vous le vouliez ou non, à obscurcir le débat démocratique. Nous devrions avoir la sagesse de repousser cette réforme après l’élection présidentielle.

Mme Soumya Bourouaha (GDR). Je retire mon sous-amendement AC1625 qui proposait une entrée en vigueur en 2027, car c’est une année électorale.

M. Jérémy Patrier-Leitus, rapporteur. Avis défavorable sur cette série de sous-amendements.

Mme Rachida Dati, ministre. Même avis.

Mme Sophie Taillé-Polian (EcoS). Ce calendrier nous amène à nous interroger. Je me joins aux questions posées par Emmanuel Grégoire sur les mesures transitoires que vous prendrez en vue de la création de cette holding au 1er janvier 2026, s’agissant notamment des dirigeants.

Je rejoins également les propos d’Aurélien Saintoul sur les années électorales, mais en commençant par les élections locales. La création d’une filiale commune entre France 3 Régions et France Bleu – réorganisation très importante –, réunies sous la marque Ici mais pas encore dans la même structure, risque de fragiliser fortement la couverture de ces élections. C’est déraisonnable.

C’est la raison pour laquelle je soutiendrai le sous-amendement AC1628, qui vise à reporter la création de la holding à 2030. À tout le moins, elle ne doit pas voir le jour avant 2028, ainsi que le propose le AC1626. La question n’est plus de savoir si on est pour ou contre la réforme, mais plutôt d’éviter de la mener au cours des deux périodes électorales qui s’ouvriront entre 2026 et 2027, durant lesquelles le service public de l’audiovisuel sera soumis à des pressions importantes.

Tous les autres sous-amendements ayant été retirés, la commission rejette successivement les sous-amendements AC1628, AC1627, AC1736 et AC1626.

Suivant l’avis du rapporteur, la commission rejette le sous-amendement AC1888 de Mme Sophie Taillé-Polian.

Sous-amendement AC1881 de M. Aurélien Saintoul

M. Aurélien Saintoul (LFI-NFP). Ce sous-amendement vise à exclure l’INA de la holding compte tenu de sa singularité. Comme je l’ai déjà dit, l’INA assure une mission régalienne de préservation des archives audiovisuelles et d’accès libre à celles-ci. Cette mission est parfaitement incompatible avec un régime juridique de société anonyme dont l’objet serait alors d’assurer la rentabilité de ses activités, et donc de l’accès au patrimoine. Ce serait d’autant plus absurde que l’INA serait contraint de monnayer les archives des autres sociétés de l’audiovisuel public au sein de la holding.

M. Jérémy Patrier-Leitus, rapporteur. Avis défavorable.

Mme Rachida Dati, ministre. Avis défavorable.

M. Aurélien Saintoul (LFI-NFP). C’est un vrai sujet ! Ce changement risque de transformer l’activité de l’INA en activité commerciale avec un objectif de rentabilité. Quels engagements pouvez-vous prendre en la matière ? Essayez de répondre sur le fond : jusqu’à présent, nous n’avons pas fait preuve d’un esprit d’obstruction acharné !

Mme Rachida Dati, ministre. C’est justement pour éviter le basculement vers une activité commerciale privée qu’il est préférable d’intégrer l’INA dans la holding. Cela permettra également des synergies en matière de formation professionnelle. L’INA est un pilier essentiel pour l’audiovisuel public, notamment en termes d’archivage ; nous n’allons pas le laisser tout seul à l’extérieur. Enfin, lors des auditions, l’INA s’est dit tout à fait favorable à son intégration dans la holding pour préserver sa mission de service public et le trésor national que sont les archives.

S’agissant du calendrier, le processus de recrutement du président de la holding sera lancé à l’automne, pour une nomination au 1er janvier 2026 ; les mandats des présidentes actuelles prendront fin au 1er février 2026 – elles deviendront directrices générales déléguées –ce qui permettra un tuilage entre janvier et février 2026.

La commission rejette le sous-amendement.

Sous-amendement AC1903 de M. Aurélien Saintoul

M. Aurélien Saintoul (LFI-NFP). Il s’agit là encore de préserver la singularité de l’INA en l’excluant du périmètre de la holding. Je ne suis pas convaincu par l’idée de ne pas le laisser tout seul dehors, comme le Petit Chaperon rouge : quel est donc le grand méchant loup qui va croquer l’INA ? S’il reste un Epic, je ne vois pas ce qui pourrait lui faire perdre ses missions, ses moyens ou son statut – à moins que vous n’ayez décidé, en tant que ministre, d’en saper les fondements.

Mme Virginie Duby-Muller, rapporteur. L’INA a pleinement réussi son virage numérique et il a beaucoup à apporter aux autres entités. Le rapport de Laurence Bloch indique qu’il a rencontré un vrai succès sur TikTok avec ses rétrospectives sur des thématiques toujours d’actualité. En audition, son président, Laurent Vallet, s’est montré totalement favorable au projet de holding. Avis défavorable.

Mme Rachida Dati, ministre. Défavorable.

Mme Sophie Taillé-Polian (EcoS). Mme la rapporteure nous dit que l’INA connaît une réussite formidable en ligne : c’est vrai, alors pourquoi faudrait-il qu’il intègre la holding ? Ne serait-il pas préférable qu’il reste à l’extérieur, compte tenu de son développement, de sa capacité à répondre aux enjeux du numérique et de sa spécificité comme média patrimonial ? Vous n’apportez en réalité aucun argument. Rassembler les forces pour faire baisser les moyens n’est pas une réponse.

M. Aurélien Saintoul (LFI-NFP). Je ne ferai pas l’argumentaire à votre place, mais j’entends implicitement que la mission de valorisation des archives serait mieux accomplie dans le cadre d’un partenariat plus étroit avec les chaînes de l’audiovisuel public au sein de la holding – concrètement, vous voulez un community manager commun pour valoriser des extraits de programme sur les réseaux sociaux. Cela n’a pas de sens : l’objectif de la valorisation des archives est de fournir un point de vue décalé, de faire un pas de côté par rapport à ce que proposent les chaînes du service public. C’est tout l’intérêt d’une éditorialisation séparée. Vous n’avez pas fourni d’exemple précis de coopération et, quand on le fait à votre place, on se rend compte que ce que vous proposez n’est pas très intéressant.

La commission rejette le sous-amendement.

Sous-amendements AC1917 de Mme Soumya Bourouaha, AC1722 de M. Aymeric Caron, AC1719, AC1716 et AC1711 de M. Aurélien Saintoul, AC1706 et AC1700 de M. Aymeric Caron, AC1698 de M. Aurélien Saintoul, AC1694, AC1689, AC1671 et AC1663 de M. Aymeric Caron, AC1659 de M. Aurélien Saintoul, AC1654 de M. Aymeric Caron, AC1648 de M. Aurélien Saintoul, AC1638 de M. Aymeric Caron ; sous-amendements identiques AC1620 de M. Aurélien Saintoul et AC1930 de Mme Soumya Bourouaha ; sous-amendements identiques AC1617 de M. Aymeric Caron et AC1929 de Mme Soumya Bourouaha ; sous-amendements identiques AC1615 de M. Aymeric Caron et AC1928 de Mme Soumya Bourouaha ; sous-amendements identiques AC1613 de M. Aurélien Saintoul, AC1812 de M. Emmanuel Grégoire et AC1927 de Mme Soumya Bourouaha ; sous-amendements identiques AC1605 de M. Aurélien Saintoul et AC1926 de Mme Soumya Bourouaha ; sous-amendements identiques AC1601 de M. Aymeric Caron et AC1925 de Mme Soumya Bourouaha ; sous-amendements identiques AC1597 de M. Aurélien Saintoul et AC1924 de Mme Soumya Bourouaha ; sous-amendements identiques AC1593 de M. Aymeric Caron et AC1923 de Mme Soumya Bourouaha ; sous-amendements identiques AC1581 de M. Aurélien Saintoul et AC1922 de Mme Soumya Bourouaha (discussion commune)

Mme Soumya Bourouaha (GDR). Le sous-amendement AC1917 vise à retarder l’approbation des statuts de la société France Médias et de l’Institut national de l’audiovisuel en allongeant le délai de six semaines à un an. Nous sommes résolument opposés à l’intégration de l’INA dans la holding, pour laquelle vous n’avez donné aucun argument précis – ni même qui tienne la route. En outre, il n’existe encore aucun plan de préfiguration.

Je retire les sous-amendements AC1927, AC1926, AC1925, AC1924, AC1923 et AC1922.

M. Aurélien Saintoul (LFI-NFP). Je retire tous mes sous-amendements, ainsi que ceux de M. Caron.

M. Emmanuel Grégoire (SOC). Je retire le sous-amendement AC1812.

M. Jérémy Patrier-Leitus, rapporteur. Vous pouvez ne pas y souscrire, mais il n’est pas exact de dire que nous ne vous avons donné aucun argument. L’intégration de l’INA dans la holding permettra de faciliter l’accès à son patrimoine audiovisuel important et son exploitation, de créer des synergies éditoriales et de proposer des documentaires dans des formats numériques inédits. Ce sera un atout pour renforcer les missions de l’INA. Comme je l’ai dit l’année dernière au sujet de France Médias Monde, nous considérons qu’une non-intégration aurait pour conséquence une fragilisation de cet acteur face à une holding puissante. Avis défavorable.

Mme Rachida Dati, ministre. Même avis.

Mme Sophie Taillé-Polian (EcoS). Les synergies existent déjà, avec l’ensemble des chaînes de télévision : par un système informatisé extrêmement puissant, l’INA transmet plusieurs fois par jour des images d’archives à toutes les sociétés audiovisuelles, publiques comme privées. C’est son rôle. La meilleure preuve qu’il n’a rien à faire dans cette holding, c’est que le document de Laurence Bloch auquel vous vous référez, et qui propose quatre filiales basées sur les plateformes existantes – une filiale de la proximité, une de l’information, France. TV et Radio France –, ne cite pas l’INA, hormis pour dire qu’il a réussi sur TikTok.

Mme Rachida Dati, ministre. L’INA est bien cité dans le rapport.

Mme Sophie Taillé-Polian (EcoS). Je vous invite à le relire. Vous n’avez peut-être eu, comme nous, que la nuit pour le faire, mais je l’ai parcouru de manière suffisamment attentive pour constater que l’INA n’est pas au cœur du projet, même pour ceux qui le défendent avec vigueur. Il n’a rien à faire dans la holding. Avec le dépôt légal, l’INA travaille pour toute la production audiovisuelle, pas seulement pour le service public. L’intégrer à une entreprise publique concurrente des autres, c’est le fragiliser. Et si la direction de l’INA est favorable au projet, l’intégralité des représentants des salariés y sont défavorables.

Vous n’avez pas répondu non plus concernant le rôle particulier de l’INA vis-à-vis des autres chaînes de télévision et de radio.

Tous les autres sous-amendements ayant été retirés, la commission rejette successivement les sous-amendements AC1917, AC1930, AC1929 et AC1928.

Le sous-amendement AC1867 de M. Emmanuel Grégoire est retiré.

Suivant l’avis du rapporteur, la commission rejette successivement les sous-amendements AC1911 et AC1915 de M. Aurélien Saintoul.

Le sous-amendement AC1981 de M. Aurélien Saintoul est retiré.

La commission adopte l’amendement AC1470 rectifié et l’article 8 est ainsi rédigé.

En conséquence, les autres amendements sur l’article tombent.

Article 9 : Date d’entrée en vigueur des dispositions relatives à l’audiovisuel public

Amendements de suppression AC85 de M. Aurélien Saintoul, AC208 de M. Emmanuel Grégoire et AC843 de Mme Sophie Taillé-Polian

M. Aurélien Saintoul (LFI-NFP). Il s’agit de supprimer cet article relatif au calendrier. Comme je l’ai déjà dit, nous entrerons bientôt en période électorale. Vous avez bien dit que ce qui compte le plus à vos yeux, ce sont les élections locales – loin de vous l’idée de peser sur les présidentielles ! – mais je ne crois pas que l’on puisse dissocier les deux. La centralisation de l’audiovisuel public a vraisemblablement pour objectif de nuire à l’indépendance des rédactions et d’influer, d’une façon ou d’une autre, sur les campagnes électorales à venir. Nous ne sommes favorables ni à la réforme, ni à son calendrier et la précipitation qui entoure désormais le sujet est de nature à conforter notre soupçon.

M. Emmanuel Grégoire (SOC). Cet amendement de suppression est en cohérence avec ceux que nous avons déposés précédemment.

Suivant l’avis du rapporteur, la commission rejette les amendements.

Elle adopte l’amendement de coordination juridique AC1052 de Mme Virginie Duby-Muller, rapporteure.

Amendement AC730 de Mme Sophie Taillé-Polian et amendements identiques AC1053 de M. Jérémy Patrier-Leitus et AC1471 du gouvernement (discussion commune)

Mme Sophie Taillé-Polian (EcoS). Mon amendement vise à reporter à 2030 la date d’entrée en vigueur de la proposition de loi. La date initialement prévue est obsolète et l’application en janvier 2026 proposée par les rapporteurs et par Mme la ministre nous semble déraisonnable, pour ne pas dire dangereuse, compte tenu de la séquence électorale qui s’ouvrira cette année-là. On sait que les réformes de structure sont déstabilisantes pour les salariés ; or, si vous aviez d’abord annoncé que les structures actuelles resteraient des filiales séparées, on voit bien que Radio France sera démantelée – puisqu’on lui enlève France Bleu, au profit de la filiale de la proximité Ici, et France Info, qui sera intégrée à la filiale de l’information – et qu’il en ira de même pour France. TV. L’information et la proximité sont pourtant des éléments essentiels au bon déroulement du débat public en période électorale.

M. Jérémy Patrier-Leitus, rapporteur. L’amendement AC1053 est un amendement de coordination.

Mme Rachida Dati, ministre. Celui du gouvernement est identique.

Mme Virginie Duby-Muller, rapporteure. Avis défavorable à l’amendement AC730.

La commission rejette l’amendement AC730 et adopte les amendements identiques AC1053 et AC1471.

Elle adopte l’article 9 modifié.

*

Réunion du mercredi 18 juin 2025 à 9 heures 30

Au cours de sa réunion, la commission poursuit l’examen de la proposition de loi, adoptée par le Sénat, relative à la réforme de l’audiovisuel public et à la souveraineté audiovisuelle (n° 118) (Mme Virginie Duby-Muller et M. Jérémie Patrier-Leitus, rapporteurs) ([63]).

Mme la présidente Fatiha Keloua Hachi. Mes chers collègues, l’ordre du jour appelle la suite de l’examen de la proposition de loi relative à la réforme de l’audiovisuel public et à la souveraineté audiovisuelle (n° 118, Mme Virginie Duby-Muller et M. Jérémie Patrier-Leitus, rapporteurs).

Chapitre II Préservation de notre souveraineté audiovisuelle

Article 10 : Événements sportifs d’importance majeure

Amendement AC1472 du gouvernement

Mme Rachida Dati, ministre de la culture. Tous les amendements du gouvernement à partir de celui-ci tendent à supprimer les articles auxquels ils s’appliquent.

Suivant l’avis des rapporteurs, la commission adopte l’amendement.

En conséquence, l’article 10 est supprimé et les autres amendements tombent.

Article 11 : Définition des services d’intérêt général et de leur visibilité appropriée

Amendement AC1473 du gouvernement

Mme Rachida Dati, ministre. Il vise à supprimer l’article.

M. Alexis Corbière (EcoS). Madame la ministre, le gouvernement ayant déposé pour chaque article un amendement tendant à sa suppression, peut-être pourriez-vous indiquer à grands traits les raisons de ces suppressions. Cela nous sera utile pour les débats dans l’hémicycle.

Mme Rachida Dati, ministre. Si le chapitre I de la proposition de loi porte exclusivement sur l’audiovisuel public, le chapitre II comporte de nombreuses dispositions relatives à l’audiovisuel en général, notamment l’audiovisuel privé, dont la plupart seront reprises dans le texte sur les états généraux de l’information (EGI), qui est en cours d’élaboration. Au demeurant, plusieurs de vos collègues considèrent qu’elles y ont davantage leur place que dans la présente proposition de loi.

La commission adopte l’amendement.

En conséquence, l’article 11 est supprimé et les autres amendements tombent.

Article 11 bis A : Part minimale d’investissement consacrée à l’information

Amendements identiques AC1055 de Mme Virginie Duby-Muller et AC1474 du gouvernement

Mme Virginie Duby-Muller, rapporteure. Il s’agit de supprimer l’article. La place de l’information a fait l’objet d’une réflexion nationale engageant de nombreux acteurs dans le cadre des EGI, qui devrait inspirer une initiative législative. La disposition introduite dans l’article 11 bis A du présent texte trouvera plus utilement et plus logiquement sa place dans ce futur véhicule législatif.

La commission adopte les amendements.

En conséquence, l’article 11 bis A est supprimé et l’amendement suivant tombe.

Article 11 bis : Modernisation de la plateforme TNT avec l’expérimentation de l’ultra-haute définition (UHD)

Suivant l’avis des rapporteurs, la commission adopte l’amendement AC1475 du gouvernement.

En conséquence, l’article 11 bis est supprimé et les autres amendements tombent.

Article 11 ter : Exemption des services distribués par contournement de l’obligation de reprise du signal

Amendements identiques AC748 de Mme Soumya Bourouaha et AC1476 du gouvernement

Mme Soumya Bourouaha (GDR). Il s’agit de supprimer l’article 11 ter, qui prévoit l’exclusion de l’obligation de « must carry » si les services sont distribués par contournement ou par des plateformes de télévision en streaming. Cette modification aura pour effet, non pas de permettre à France Télévisions de maîtriser la reprise de ses programmes par les plateformes, mais au contraire d’affaiblir considérablement leur diffusion. De fait, le « must carry » contribue à la diversité du paysage audiovisuel, offre à tout citoyen la possibilité d’avoir accès à une offre de médias pluraliste et garantit la visibilité de certains contenus qui, en son absence, pourraient disparaître au profit de services plus rémunérateurs pour les distributeurs.

La commission adopte les amendements.

En conséquence, l’article 11 ter est supprimé et les autres amendements tombent.

Article 12 : Conditions d’autorisation par l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (Arcom) d’un changement dans le contrôle du capital d’une chaîne autorisée par convention à émettre sur la TNT

Amendements identiques AC1024 de Mme Virginie Duby-Muller et AC1477 du gouvernement.

M. Jérémie Patrier-Leitus, rapporteur. Il s’agit de supprimer l’article 12, qui soulève des questions importantes mais ne semblant pas devoir être traitées dans la présente proposition de loi.

La commission adopte les amendements.

En conséquence, l’article 12 est supprimé et les autres amendements tombent.

Article 12 bis : Mesures d’audience par des organismes tiers

Amendements identiques AC1023 de Mme Virginie Duby-Muller et AC1478 du gouvernement

M. Jérémie Patrier-Leitus, rapporteur. Les dispositions de l’article ne nous semblent pas de voir figurer dans le présent texte.

La commission adopte les amendements.

En conséquence, l’article 12 bis est supprimé et les autres amendements tombent.

Article 13 : Exclusion des mandats de commercialisation de la définition de la production audiovisuelle indépendante

Suivant l’avis des rapporteurs, la commission adopte l’amendement AC1479 du gouvernement.

En conséquence, l’article 13 est supprimé.

Article 13 bis : Autorisation d’une troisième coupure publicitaire pour la diffusion des œuvres cinématographiques et audiovisuelles de longue durée et la diffusion de bandes annonces pour les programmes

Suivant l’avis des rapporteurs, la commission adopte les amendements identiques AC759 de M. Frédéric Maillot et AC1480 du gouvernement.

En conséquence, l’article 13 bis est supprimé et les autres amendements tombent.

Article 14 : Développement des services interactifs sur la TNT

Suivant l’avis des rapporteurs, la commission adopte l’amendement AC1481 du gouvernement.

En conséquence, l’article 14 est supprimé et les autres amendements tombent.

Article 14 bis : Développement de l’ultra haute définition

Suivant l’avis des rapporteurs, la commission adopte l’amendement AC1482 du gouvernement.

En conséquence, l’article 14 bis est supprimé et les autres tombent.

Article 15 : Développement de la radio numérique terrestre

Amendements identiques AC763 de M. Salvatore Castiglione et AC1483 du gouvernement

M. Salvatore Castiglione (LIOT). Il s’agit de supprimer l’article afin de garantir l’accès de tous à la radio.

M. Jérémie Patrier-Leitus, rapporteur. Avis favorable. Le déploiement du DAB + est un vrai sujet qui devra être traité dans d’autres véhicules législatifs.

Mme Sophie Taillé-Polian (EcoS). Madame la ministre, madame et monsieur les rapporteurs, nous prenons acte de votre souhait de limiter cette proposition de loi, initialement conçue dans une forme d’équilibre entre audiovisuel privé et audiovisuel public. Nous prenons acte du fait que Mme la ministre s’engage une nouvelle fois à faire en sorte qu’un texte issu des réflexions des EGI nous soit présenté rapidement, cette fois de façon plus claire, sous la forme d’un projet de loi. Nous l’attendons avec impatience.

Nous souhaitons avoir connaissance des premiers travaux qui ont été menés, dont nous avons entendu parler sans y être associés. Nous souhaitons que, à cette occasion, de nombreuses questions soient traitées afin de renforcer la démocratie, notamment la lutte contre la concentration dans les médias et tout particulièrement la prohibition de toute spéculation sur des chaînes de télévision ayant fait l’objet d’un agrément récent de l’Arcom.

M. Emmanuel Grégoire (SOC). L’article 15 est le seul du chapitre II qui aurait mérité d’être maintenu, dans la mesure où le déploiement du DAB+ soulève des questions importantes. Il me semble très dommage que nous ne saisissions pas l’occasion de le traiter au niveau législatif. Je ne voudrais pas jouer les oiseaux de mauvais augure, mais, si le texte issu des EGI met autant de temps à aboutir que celui-ci, nous en reparlerons dans sept ans. Je me fonde sur cette observation pour dire que l’article 15 mérite que nous nous interrogions à nouveau sur son sens en séance publique.

Mme Rachida Dati, ministre. Je prends note de ces observations. Nous sommes prêts à en discuter à nouveau dans le cadre de la poursuite de l’examen de ce texte. Nous sommes tenus par un impératif lié à l’audiovisuel public et à la réforme du mode de gouvernance, mais nous pourrons rétablir l’article 15 en séance publique sans difficulté.

M. Jérémie Patrier-Leitus, rapporteur. Virginie Duby-Muller et moi-même partageons cet avis.

La commission adopte les amendements.

En conséquence, l’article 15 est supprimé et les autres amendements tombent.

Après l’article 15 :

Amendement AC1062 de M. Jérémie Patrier-Leitus

M. Jérémie Patrier-Leitus, rapporteur. À l’orée de l’examen de plusieurs amendements prévoyant la remise de rapports, Virginie Duby-Muller et moi-même vous proposons d’adopter l’amendement AC1062. Sur la forme, il s’agit de ne pas multiplier les demandes de rapport. Sur le fond, notre rapport prévoit la possibilité, pour le gouvernement, d’étudier le moment venu l’opportunité d’intégrer France Médias Monde à la société holding France Médias. Si elle en est initialement exclue, nous pensons qu’il faudra, à l’avenir, prendre la mesure des effets de la holding sur France Médias Monde et explorer les opportunités, pour cette entreprise publique, de la rejoindre si cela lui est utile.

Le rapport que nous prévoyons dressera un bilan des coopérations entre les filiales de la holding et France Médias Monde et évaluera les coûts de création des filiales, ce qui a souvent été demandé par nos collègues de gauche, qui souhaitent pouvoir mesurer précisément le coût de la holding. Nous proposons, dans ce rapport, de mesurer l’impact de la holding sur le climat social et les conditions de travail des salariés.

Madame Taillé-Polian, notre rapport intègre les vôtres, relatifs au coût de la réforme, aux conditions de travail, au dialogue social, aux conditions de création de la holding et aux coûts sociaux. Nous suggérerons donc le retrait de vos amendements et émettrons à défaut un avis défavorable.

Mme Rachida Dati, ministre. Avis favorable.

Mme Sophie Taillé-Polian (EcoS). Certes, le rapport demandé par le présent amendement reprend certains sujets abordés par les miens, qui en réalité auraient dû être versés à la discussion afin de mieux analyser et anticiper les conséquences de la création de la holding, notamment sur l’organisation du travail, de risques en matière de santé et de sécurité pour les agents et de coût de cette structure. Rien de tout cela ne figure dans le document qui nous a été transmis, lequel n’est pas, quoi qu’on en dise, une étude d’impact. Il s’agit également de prendre la mesure, avant la mise en œuvre de la réforme, de ses effets sur la filière audiovisuelle.

Je ne voterai pas le présent amendement, étant donné qu’il souhaite explorer l’intégration de France Médias Monde pour éventuellement mener d’autres réformes, ce qui d’ailleurs nourrit nos pires craintes sur la volonté réelle de pratiquer la politique des petits pas. Nous nous opposons fermement à l’intégration de France Médias Monde dans la holding en raison de sa spécificité à l’international. Nous considérons que cette question ne doit pas être rouverte.

La commission adopte l’amendement.

Amendement AC1058 de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire

Mme Sophie Taillé-Polian (EcoS). Il s’agit d’obtenir un rapport visant à évaluer le coût des réorganisations qui seront mises en œuvre. On me dira que cet amendement est satisfait. La commission des finances ne demande pas souvent des rapports au gouvernement. Qu’elle le fasse démontre les lacunes qui ont présidé à l’examen du présent texte de loi.

Mme Virginie Duby-Muller, rapporteure. Demande de retrait ou avis défavorable. L’évaluation du coût des réformes entreprises par France Médias Monde est prévue dans le rapport que nous demandons. L’amendement est satisfait par l’adoption de l’amendement AC1062.

Mme Rachida Dati, ministre. Avis défavorable.

L’amendement est retiré.

Suivant l’avis des rapporteurs, la commission rejette l’amendement AC55 de M. Aymeric Caron.

Amendement AC850 de Mme Sophie Taillé-Polian

Mme Sophie Taillé-Polian (EcoS). Il s’agit d’obtenir un rapport sur les conséquences de la réforme sur le financement de la production audiovisuelle.

M. Jérémie Patrier-Leitus, rapporteure. Avis défavorable. La suppression de l’article 13 visant à redéfinir la production audiovisuelle enlève toute pertinence à un rapport sur le financement de celle-ci. Ce sujet important doit être traité dans un autre cadre.

La commission rejette l’amendement.

L’amendement AC847 de Mme Sophie Taillé-Polian est retiré.

Amendement AC849 de Mme Sophie Taillé-Polian

Mme Sophie Taillé-Polian (EcoS). Il s’agit d’obtenir un rapport sur le coût de la holding.

Mme Virginie Duby-Muller, rapporteure. Demande de retrait ou avis défavorable. L’amendement est satisfait par l’adoption de l’amendement AC1062.

L’amendement est retiré.

Amendement AC852 de Mme Sophie Taillé-Polian

Mme Sophie Taillé-Polian (EcoS). Il s’agit d’obtenir un rapport sur les risques de la réforme s’agissant des garanties d’indépendance de la holding vis-à-vis du pouvoir exécutif, ce qui est un élément majeur de nos inquiétudes.

Suivant l’avis des rapporteurs, la commission rejette l’amendement.

Amendement AC848 de Mme Sophie Taillé-Polian

Mme Sophie Taillé-Polian (EcoS). Il s’agit de réaliser un bilan de l’impact social de la réforme. Certains de ses aspects étant pris en compte dans l’amendement AC1062, je retire l’amendement, mais j’en défendrai un en séance publique car la vision des rapporteurs sur ce sujet me semble trop restrictive.

L’amendement est retiré.

Amendement AC851 de Mme Sophie Taillé-Polian

Mme Sophie Taillé-Polian (EcoS). Le rapport de Mme Bloch nourrit nos craintes de mise en retrait de la radio au profit de l’image, que le numérique favorise nettement au détriment du son. Or celui-ci doit être développé, notamment pour la jeunesse, qui apprend ainsi d’autres manières de se concentrer. Nous considérons qu’il faut lui porter une attention toute particulière. Le développement de Radio France, ses innovations, sa place de leader sur les podcasts démontrent que, si l’on s’intéresse à ces sujets, on peut faire des choses extraordinaires. Mme Bloch indique dans son document qu’il faudra veiller à éviter que la radio ne soit le parent pauvre. Le rapport que je demande vise à surveiller la situation comme le lait sur le feu. Nous considérons qu’il s’agit d’un risque majeur, source de conséquences importantes.

M. Jérémie Patrier-Leitus, rapporteur. Pour nous, cette réforme renforcera l’audiovisuel public, et notamment Radio France. La radio doit certes être préservée dans le cadre de cette holding, mais voter un rapport sur les risques de disparition de la radio ne me semble pas pertinent. Il est certain que la radio se transformera et que, publique comme privée, elle fait face à des défis majeurs, comme la concurrence d’autres médias et le changement des usages, mais affirmer que cette holding induirait un risque de disparition de la radio ne nous semble pas approprié. Avis défavorable.

M. Alexis Corbière (EcoS). Les rapprochements entre deux médias, comme entre RMC et BFM ou entre RTL et M6, ont souvent fait reculer l’audience des radios. C’est une réalité, contrairement à ce que vous répétez en affirmant sans le démontrer qu’il faut globaliser et intégrer. Des médias que nous connaissons et qui sont des marques de radio très reconnues en ont fait l’expérience, comme RMC, lors de la concentration de sa rédaction avec celle de BFM, qui n’a pas été harmonieuse pour les deux médias et qui s’est traduite par une baisse d’audience. Vous n’apportez pas de réponses à nos questions, qui sont aussi celles des sociétés de journalistes et des organisations syndicales. Nous en discuterons donc dans l’hémicycle.

La commission rejette l’amendement.

L’amendement AC809 de Mme Sophie Taillé-Polian est retiré.

Suivant l’avis du rapporteur, elle rejette successivement les amendements AC694, AC667, AC681 et AC707 de Mme Céline Hervieu.

Amendement AC655 de Mme Céline Hervieu

M. Emmanuel Grégoire (SOC). Nos échanges ont été moins longs que la dernière fois, mais nous avons voulu garder le débat principal pour la séance publique. Nous regrettons, je le répète, qu’il ne soit pas apporté de réponses plus précises à certaines questions factuelles, celles non seulement des députés de mon groupe, mais aussi des salariés, des journalistes, des dirigeants de l’audiovisuel public et des spécialistes de l’économie des médias, très dubitatifs quant aux arguments utilisés. Il peut y avoir des points de convergence en matière d’analyse des grands enjeux, mais c’est une erreur stratégique que de considérer l’audiovisuel public comme concurrent des plateformes numériques américaines, car ce n’est ni sa vocation ni le sens de sa mission. Il faudrait que nous puissions, lors du débat en séance publique, éclairer les Français sur ces enjeux : Pour quoi faire ? Combien ça coûte ? Selon quel calendrier ?

Pour ce qui est du calendrier, l’application du dispositif en 2026 ne respecte même pas les conditions du droit du travail pour les contrats engagés, notamment ceux des responsables de l’audiovisuel public. Nous souhaitons donc poursuivre les échanges avec les rapporteurs pour affiner le texte, voir ce qui pourrait y être introduit en séance et, peut-être, le faire évoluer dans le bon sens. En aucun cas, cependant, nos débats n’ont éclairé tous ceux qui s’interrogent, voire s’inquiètent, sur le sens profond de cette réforme qui ne répond qu’à deux évidences : préparer des économies budgétaires plus massives encore que celles qui ont déjà été imposées ces dernières années et, avec la création d’une direction de l’information de la holding, instaurer un contrôle politique de l’information dans le service public de l’audiovisuel.

M. Jérémie Patrier-Leitus, rapporteur. Ces débats, plus sereins et plus apaisés que les précédents, ont permis de mesurer à la fois nos différences et nos convergences. Monsieur Grégoire, l’erreur stratégique serait de nous satisfaire de ce statu quo. L’audiovisuel, public comme privé, fait face à des défis majeurs et à de multiples enjeux. Nous partageons de nombreux constats sur la concurrence des plateformes du numérique, sur le changement des usages et sur les ruptures technologiques. La holding sera, à court ou à moyen terme, un levier stratégique pour renforcer les acteurs de l’audiovisuel public.

Je m’inscris en faux contre vos accusations qui nous prêtent des intentions cachées, comme celle de préparer, avec cette holding, des économies et un contrôle politique de l’audiovisuel public. Notre objectif – qui peut nous réunir – est de renforcer les acteurs de l’audiovisuel public pour leur permettre de travailler ensemble et de nourrir des coopérations, ce qu’ils ont du mal à faire aujourd’hui, et pour continuer, demain, à offrir à nos concitoyens une information de qualité, fiable, pluraliste et indépendante.

Mme Rachida Dati, ministre. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Titre

Amendement AC858 de Mme Sophie Taillé-Polian

M. Alexis Corbière (EcoS). Il s’agit de rédiger ainsi le titre de ce texte : proposition de loi visant à casser les métiers de l’audiovisuel public. Cet amendement tout en finesse et en subtilité est une belle manière de terminer la discussion. Tout le monde répète comme étant de Camus une phrase que ce dernier n’a jamais prononcée : « Mal nommer les choses, c’est participer aux malheurs du monde. » – mais l’idée est là. Nous avons voulu, au moment de conclure nos travaux, exprimer notre désaccord. Nous le ferons aussi, comme nous l’avons dit, dans l’hémicycle : comptez sur nous pour faire entendre une opposition résolue à ce texte et pour argumenter avec la conviction que nous avons raison sur le fond et que nous sommes aussi la voix des nombreuses organisations syndicales de personnel. Nos débats sont très suivis par la profession, qui nous envoie de nombreux messages car elle est très impliquée et très inquiète.

Vous avez dit, madame la ministre, que vous aviez rencontré les directeurs des différentes structures, mais vous n’ignorez pas qu’il y a, derrière eux, des salariés très inquiets, qui voient cette proposition de loi, que vous qualifiez de réforme, comme un danger pour leur métier. Le titre proposé par l’amendement exprime cette vive préoccupation et notre opposition à ce texte de loi.

Mme Virginie Duby-Muller, rapporteure. Défavorable, évidemment, car il s’agit d’une présentation caricaturale du texte et de notre vision. Je souscris à cet égard aux propos de M. Patrier-Leitus.

Au terme de nos débats, je pense tout d’abord à nos collègues Quentin Bataillon et Jean-Jacques Gaultier, dont le rapport très lucide rendu en 2023 nous a conduits à examiner la proposition de loi portée par le sénateur Lafon. Le cheminement a été laborieux, mais la holding est un outil qui permettra de pérenniser et de renforcer notre audiovisuel public dans un contexte géopolitique très particulier, avec des révolutions technologiques, un changement des usages des consommateurs et un vieillissement des utilisateurs. Nous laissons ainsi sur le bord du chemin les CSP –. Pour toutes ces raisons, avis défavorable à cet amendement.

M. Jérémie Patrier-Leitus, rapporteur. Monsieur Corbière, les salariés de l’audiovisuel public ne se satisfont pas non plus de coopérations par le bas qui n’avancent pas ni d’arbitrages qui ne sont pas rendus. Les difficultés de la création de ce média global de proximité que nous appelons tous de nos vœux, avec le rapprochement entre France Bleu et France 3, pour offrir une information à nos concitoyens, notamment dans les territoires ruraux, illustre le fait que les salariés aussi subissent parfois cette absence d’arbitrages stratégiques et de coopération entre leurs entreprises. Les salariés de France Info Télévision et de France Info Radio ne se satisfont pas non plus de cette absence de coopération et de ces revirements stratégiques permanents. Il ne faut pas croire que le statu quo actuel placerait les salariés de l’audiovisuel public dans une situation confortable et dans d’excellentes conditions de travail.

Il n’y a pas parmi nous ceux qui portent la voix des salariés et ceux qui voudraient les opprimer ou les contraindre. Nous avons tous des convictions, mais nous sommes tous aux côtés des salariés de l’audiovisuel public et heureux qu’ils puissent faire leur travail dans de bonnes conditions.

Mme Rachida Dati, ministre. Comme je l’ai dit hier à Mme Taillé-Polian, il n’y a pas de députés qui valent plus que d’autres, car tous représentent des Français qui attendent ces débats et qui souhaitent que nous répondions à leurs préoccupations. Ne nous pouvons pas nous satisfaire que 62 % des Français s’informent désormais sur les réseaux sociaux, avec toute la désinformation et toutes les ingérences qui s’y produisent. C’est particulièrement le cas en ce moment avec une actualité internationale qui fracture non seulement le monde, mais aussi notre pays, comme on le voit dans l’hémicycle.

En dix ans de rapports parlementaires, tous, toutes tendances politiques confondues, concluent à la nécessité de réformer l’audiovisuel public si nous voulons qu’il soit préservé. C’est un choix politique que nous faisons : nous voulons garder un audiovisuel public fort. Arrêtez de dire qu’il n’y a que vous qui voyez les salariés, les représentants de syndicats et les organisations professionnelles de journalistes ! Cette tendance à opposer les Français les uns aux autres tue la gauche. Tout le monde est dans l’attente d’une réforme mais évidemment, et c’est légitime, les réformes déstabilisent et inquiètent. Nous devons accompagner celle-ci ensemble.

Nous ne devons pas nous contenter d’observer la désaffection des jeunes pour l’audiovisuel public – ce n’est d’ailleurs pas une désaffection : ils ne savent même plus comment y accéder, en particulier dans les catégories populaires. Il faut un financement public sanctuarisé ; le montant des crédits doit être intégralement consacré, sans aucune régulation, à l’audiovisuel public – c’est ce que nous avons obtenu l’année dernière. Il faut donc être fiers non seulement de réformer la gouvernance, mais aussi d’avoir pu sauver ce financement. Comme vous le savez, en effet, il ne devait plus y avoir, au 1er janvier 2025, de financement sanctuarisé et circonscrit à l’audiovisuel public.

Tout le monde s’accorde à dire que l’audiovisuel public a des contenus de qualité et que le pluralisme y est nécessaire. Tout cela doit en effet être accessible à tous les Français, partout sur le territoire. C’est à l’audiovisuel public d’aller chercher les Français là où ils sont. On ne saurait se contenter d’être peu nombreux et entre nous. Les Français, qui consentent au financement de l’audiovisuel public, doivent pouvoir tous en bénéficier. Tel est l’objet de cette réforme.

Quant à l’amendement, avis évidemment défavorable.

Mme Anne Genetet (EPR). Nous sommes tout à fait défavorables à cet amendement. Je souhaite toutefois souligner la chance que nous avons d’avoir un audiovisuel public de qualité. Pour avoir beaucoup voyagé, je peux dire que c’est le cas dans peu de pays et que nous devons absolument le préserver. Cependant, comme le disait à l’instant Mme la ministre, nous ne pouvons pas nous satisfaire d’un audiovisuel essentiellement tourné vers une forme d’élite de la nation et qui n’est donc pas accessible à tous, pour de nombreuses raisons, liées par exemple à de nouvelles manières de consommer.

Notre choix politique est de chercher les moyens de rendre cet audiovisuel public accessible à tous. C’est ce que permettra cette holding. La coopération pour chercher à produire des contenus existe déjà, mais nous devrons pouvoir les déployer plus largement et plus massivement pour rendre l’audiovisuel public accessible à tous. Je suis certaine que les Français comprendront cet objectif et je me réjouis de penser qu’au bout du compte, nous aurons un audiovisuel qui permettra à chacun, sur l’ensemble du territoire national, d’y avoir accès. Je suis par ailleurs favorable à ce que France Médias Monde puisse intégrer la holding – ce serait un élément fort de ce texte.

M. Laurent Croizier (Dem). Je veux rendre hommage aux salariés de l’audiovisuel public pour la qualité de leur travail, mais personne, de quelque organisation qu’il s’agisse, ne peut accaparer leur parole.

Par ailleurs, des amendements tels que celui que nous examinons ne grandissent pas notre institution.

M. Emmanuel Grégoire (SOC). Ce débat est un peu dystopique. L’audiovisuel public a des défis à relever ? Il faut créer une holding. La banquise fond ? Il faut créer une holding. Or à aucun moment il ne nous a été démontré que la holding permettait de relever les défis que nous avons évoqués. Le fait que les jeunes s’informent sur les réseaux sociaux – ce qui n’est du reste pas mal en soi, la question étant celle des contenus – pourrait nous conduire à nous interroger sur l’accès à la presse écrite et cela pourrait être un débat intéressant, mais on le traite par la création d’une holding. Nous reparlerons de tout cela en séance publique. Permettez-moi de citer, non pas Albert Camus, mais le Syndicat national des journalistes de Radio France, pour illustrer la monstruosité démocratique que nous sommes en train de créer : « Une seule et même personne pour résister aux pressions, pour valider des projets d’investigation sensible, pour décider de couvrir telle ou telle actualité lointaine et risquée : c’est le temps de l’ORTF. Rien que de donner corps à cette idée en l’écrivant représente un cadeau immense… »

Mme la présidente Fatiha Keloua Hachi. Merci, Monsieur Grégoire. Vous avez épuisé votre temps de parole.

M. Erwan Balanant (Dem). Je souscris aux propos de M. Croizier. Quels que soient nos différends et nos différences de perception sur le sujet, j’ai tout de même l’impression que la grande majorité des familles politiques démocratiques et républicaines sont favorables à un audiovisuel public fort et puissant. Il est donc inutile de faire des procès d’intention avec de tels amendements.

Chers collègues écologistes, vous n’avez pas le monopole de l’audiovisuel public. Madame Taillé-Prolian, je vous ai écoutée avec respect présenter tous les amendements que nous avons subis dans la première partie de l’examen du texte pour ralentir les débats. J’ai noté que vous n’avez pas fait ce choix dans cette deuxième séquence, et c’est tant mieux. Tout le monde ici souhaite que, dans ces temps troublés, l’audiovisuel public soit un outil de notre souveraineté informationnelle et intellectuelle. Ne nous faisons donc pas de procès d’intention. Avec des visions différentes, tout le monde ici veut que l’audiovisuel public soit puissant et réponde à ses enjeux.

Mme Soumya Bourouaha (GDR). Le titre proposé par l’amendement me convient tout à fait, car la réforme proposée casse véritablement le service public, auquel nous sommes tous très attachés. Sous couvert d’amélioration, vous affaiblissez l’audiovisuel et menacez son indépendance et son financement.

Qui plus est, il n’est pas acceptable que plusieurs amendements relatifs aux outre-mer soient passés à la trappe.

Ce projet de holding procède d’une logique managériale qui se révélera contre-productive.

Mme Sophie Taillé-Polian (EcoS). L’audiovisuel public a besoin de poursuivre son évolution et nous voulons l’aider à continuer à mener à bien les transformations importantes impulsées par les directions et mises en œuvre par les salariés, qui ont fait, ces dernières années, constamment progresser ses audiences. France Inter est ainsi devenue la première radio de France et Radio France la deuxième chez les jeunes, après le groupe NRJ. Nous voulons donc aider le service public de l’audiovisuel à poursuivre son évolution dans un monde numérique qui se transforme, car c’est essentiel face à la guerre informationnelle.

Or, depuis 2017, vous n’avez cessé de l’affaiblir, en réduisant ses moyens de 776 millions d’euros. Dans le budget 2025, leur montant est repassé sous la barre des 4 milliards. Vous n’avez fourni aucun élément garantissant le financement de l’audiovisuel public. Vous avez supprimé la redevance et fragilisé son financement. Il faut soutenir les projets qui vont dans le bon sens et non pas faire des réformes de structure.

La commission rejette l’amendement.

Elle adopte l’ensemble de la proposition de loi modifiée.

*

*     *

En conséquence, la commission des Affaires culturelles et de l’éducation demande à l’Assemblée nationale d’adopter la présente proposition de loi dans le texte figurant dans le document annexé au présent rapport.

 Texte adopté par la commission : https://assnat.fr/saRkRT

 Texte comparatif : https://assnat.fr/weOL2G

 

 


  1 

   Annexe :
textes susceptibles d’être abrogés ou modifiés à l’occasion de l’examen de la proposition de loi

Proposition de loi

Dispositions en vigueur modifiées

Articles

Codes et lois

Numéros d’article

1er

Loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication

43-12 (nouveau)

1er

Loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication

44, 44-1,

1er bis

Loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication

44-2 (nouveau)

1er ter

Loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication

45

2

Loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication

47

2 bis

Loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication

47‑1 A (nouveau)

2 ter

Loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication

47-3-1 (nouveau)

3

Loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication

47-4, 47-5, 47-5-1 (nouveau)

4

Loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication

7, 9, 16, 17-1, 18, 26, 28, 29‑1, 30-8, 33-1 et 34

4

Loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication

35‑1 (abrogé),

4

Loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication

47-6, 48, 48‑1 A, 48-1 et 48-2

4

Loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication

49, 49-1 et 50 (abrogés)

4

Loi n° 94‑629 du 25 juillet 1994 relative à la famille

39

5

Loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication

53, 46, 56-1 et 81

6

Loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication

44, 48 et 53-1

9

Loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication

108

 


([1]) https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/17/comptes-rendus/cion-cedu/l17cion-cedu2425051_compte-rendu#

([2]) https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/17/rapports/cion-cedu/l17b1266_rapport-fond#

([3]) https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/17/amendements/0118/CION-CEDU/AC1094

([4]) https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/17/amendements/0118/CION-CEDU/AC750

([5]) https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/17/amendements/0118/CION-CEDU/AC1063

([6]) https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/17/amendements/0118/CION-CEDU/AC930

([7]) https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/17/amendements/0118/CION-CEDU/AC1091

([8]) https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/17/amendements/0118/CION-CEDU/AC1152

([9]) https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/17/amendements/0118/CION-CEDU/AC890

([10]) https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/15/textes/l15b2488_avis-conseil-etat.pdf

([11]) https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/17/amendements/0118/CION-CEDU/AC1137

([12]) https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/17/amendements/0118/CION-CEDU/AC26

([13]) https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/17/amendements/0118/CION-CEDU/AC188

([14]https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/17/amendements/0118/CION-CEDU/AC1154

([15]) https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/17/amendements/0118/CION-CEDU/AC1138

([16]) https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/17/amendements/0118/CION-CEDU/AC2033

([17]) https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/17/amendements/0118/CION-CEDU/AC2080

([18]) https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/17/amendements/0118/CION-CEDU/AC1162

([19]) En l’état du droit, la composition du conseil d’administration de l’INA est déterminée par l’article 50 de la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication. Cet article est abrogé par l’article 4 de la proposition de loi.

([20]) https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/17/amendements/0118/CION-CEDU/AC1165

([21]) https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/17/rapports/cion-cedu/l17b1266_rapport-fond#

([22]) Règlement (UE) 2024/1083 du Parlement européen et du Conseil du 11 avril 2024 établissant un cadre commun pour les services de médias dans le marché intérieur et modifiant la directive 2010/13/UE (règlement européen sur la liberté des médias).

([23]) https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/17/amendements/0118/CION-CEDU/AC2037

([24]) Voir notamment la décision n° 2009-577 DC du 3 mars 2009 du Conseil constitutionnel sur la loi relative à la communication audiovisuelle et au nouveau service public de la télévision.

([25]) https://www.conseil-etat.fr/publications-colloques/etudes/etudes-annuelles/les-autorites-administratives-independantes

([26]) Article 21 de la loi n° 2017-55 du 20 janvier 2017 portant statut général des autorités administratives indépendantes et des autorités publiques indépendantes.

([27]) Article 22 de la loi n° 2017-55 du 20 janvier 2017 portant statut général des autorités administratives indépendantes et des autorités publiques indépendantes.

([28]) Voir notamment la décision du Conseil d’État n° 18371 du 22 juin 1984 « Société Pierre et Cristal ».

([29]) https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/17/amendements/0118/CION-CEDU/AC2081

([30]) https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/17/amendements/0118/CION-CEDU/AC1163

([31]) https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/17/amendements/0118/CION-CEDU/AC1164

([32]) https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/17/amendements/0118/CION-CEDU/AC1468

([33]) https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/17/amendements/0118/CION-CEDU/AC1466

([34]) CJUE, C-255/21, 30 janvier 2024.

([35]) https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/17/amendements/0118/CION-CEDU/AC2043

([36]) https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/17/amendements/0118/CION-CEDU/AC2045

([37]) https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/17/amendements/0118/CION-CEDU/AC2077

([38]) https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/17/amendements/0118/CION-CEDU/AC2062

([39]) https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/17/amendements/0118/CION-CEDU/AC2078

([40]) https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/17/amendements/0118/CION-CEDU/AC1467

([41]) https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/17/amendements/0118/CION-CEDU/AC1039

([42]) https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/17/amendements/0118/CION-CEDU/AC1050

([43]) https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/17/amendements/0118/CION-CEDU/AC1469 https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/17/amendements/0118/CION-CEDU/AC1036

([44]) https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/17/amendements/0118/CION-CEDU/AC1470

([45]) https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/17/amendements/0118/CION-CEDU/AC1052

([46]) https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/17/amendements/0118/CION-CEDU/AC1471 https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/17/amendements/0118/CION-CEDU/AC1053

([47]) https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/17/amendements/0118/CION-CEDU/AC1472

([48]) https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/17/amendements/0118/CION-CEDU/AC1473

([49]) https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/17/amendements/0118/CION-CEDU/AC1474 https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/17/amendements/0118/CION-CEDU/AC1055

([50]) https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/17/amendements/0118/CION-CEDU/AC1475

([51]) https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/17/amendements/0118/CION-CEDU/AC748 https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/17/amendements/0118/CION-CEDU/AC1476

([52]) https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/17/amendements/0118/CION-CEDU/AC1024 https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/17/amendements/0118/CION-CEDU/AC1477

([53]) https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/17/amendements/0118/CION-CEDU/AC1023 https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/17/amendements/0118/CION-CEDU/AC1478

([54]) https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/17/amendements/0118/CION-CEDU/AC1479

([55]) https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/17/amendements/0118/CION-CEDU/AC759 https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/17/amendements/0118/CION-CEDU/AC1480

([56]) https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/17/amendements/0118/CION-CEDU/AC1481

([57]) https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/17/amendements/0118/CION-CEDU/AC1482

([58]) https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/17/amendements/0118/CION-CEDU/AC763 https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/17/amendements/0118/CION-CEDU/AC1483

([59]) https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/17/amendements/0118/CION-CEDU/AC1062

([60]) Amendements nos AC 809, AC 847, AC 848 et AC 849 déposés par Mme Sophie Taillé-Polian, n° AC 989 déposé par M. Denis Masséglia et AC 1058 adopté par la commission des finances.

([61])  https://assnat.fr/XanxDi

([62])  https://assnat.fr/eG64Fg

([63])  https://assnat.fr/u6bawF