Accueil > Archives de la XIe législature > Les comptes rendus > Les comptes rendus analytiques (2000-2001)

Session ordinaire de 2000-2001 - 20ème jour de séance, 43ème séance

2ème SÉANCE DU LUNDI 6 NOVEMBRE 2000

PRÉSIDENCE de M. Pierre LEQUILLER

vice-président

Sommaire

          LOI DE FINANCES POUR 2001 -deuxième partie- (suite) 2

          DÉFENSE (suite) 2

          QUESTIONS 21

          ART. 34 31

          DÉSIGNATION D'UN CANDIDAT À UN ORGANISME
          EXTRAPARLEMENTAIRE 31

          ORDRE DU JOUR DU MARDI 7 NOVEMBRE 2000 32

La séance est ouverte à quinze heures.

Top Of Page

LOI DE FINANCES POUR 2001 -deuxième partie- (suite)

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2001.

Top Of Page

DÉFENSE (suite)

M. Guy-Michel Chauveau - Comme vous l'avez dit en commission de la défense, Monsieur le ministre, vos crédits permettent de privilégier quatre orientations essentielles pour la modernisation de l'outil de défense. Il s'agit de poursuivre la professionnalisation des armées, et ce sera pour 2001 la suppression de 39 657 emplois d'appelés et la création de 12 000 emplois professionnels. Il s'agit ensuite de maintenir les activités d'entraînement. Troisième priorité : le renforcement de la sécurité intérieure. C'est enfin la coopération européenne sur les programmes d'équipement. Cela représente au total près de 189 milliards hors pensions, dont 105,5 pour le titre III et 83,4 milliards pour les titres V et VI. A quoi s'ajoute l'A400 M pour lequel les crédits viendront en cours d'année. Nous sommes satisfaits de ce budget de continuité et de respect des engagements.

Sans reprendre les analyses des rapporteurs et du président de la commission, j'aborderai plusieurs sujets liés à la coopération européenne. Le rapporteur de la commission des finances a comparé l'effort de la France à ceux du Royaume-Uni, de l'Allemagne, de l'Italie ; je vous renvoie à son rapport. Il est sûr que les sommes retenues pour l'investissement, par rapport à la revue des programmes, accusent un déficit de 3,5 milliards ; mais nous sommes loin du déficit de 15 milliards observé en 1995-1996, et certains, qui dénoncent des retards, devraient s'en prendre à eux-mêmes. Je partage par ailleurs les préoccupations relatives aux emplois civils qu'ont exprimées le président Quilès et M. Sandrier, même si Monsieur le ministre a largement répondu sur ce point devant la commission.

S'agissant des crédits de la dissuasion, j'ai cru entendre M. Raimond les déclarer satisfaisants, appréciation bien différente de celle de M. Galy-Dejean... Quant aux rémunérations, M. Cova a jugé l'effort insuffisant. Mais nous avions dit, lorsqu'en 1996 le Président de la République décida la professionnalisation, qu'elle coûterait plus cher que prévu : si l'on veut passer des contrats courts, avec de vrais professionnels, il faut non seulement les rémunérer pendant qu'ils sont dans nos armées, mais prévoir aussi leur reconversion ; et sans doute le coût en avait alors été sous-estimé.

M. Didier Boulaud - La mission Séguin l'avait dit.

M. Guy-Michel Chauveau - L'an prochain verra la fin du service national. Vous vous apprêtez, Monsieur le ministre, à tenir compte de l'effort particulier des jeunes qui contribuent à notre défense pendant ces derniers mois, et je vous remercie d'avance de nous donner des précisions sur ce point. Les hommes et les femmes qui servent dans nos armées doivent le faire dans de bonnes conditions : votre budget de fonctionnement le permettra.

J'en viens à la coopération européenne. A l'aube de notre travail sur la prochaine loi de programmation, une discussion sur la perception de l'évolution des menaces est nécessaire au sein de l'Union européenne. Ce budget, l'avant-dernier de la loi de programmation 1997-2002, tire les enseignements des opérations militaires récentes. Pour préparer la loi de programmation 2003-2008, cet exercice d'analyse est plus que jamais nécessaire. Pouvons-nous le mener seuls ? Non : il doit se faire au niveau de l'Union européenne. C'est ainsi que nous pourrions hiérarchiser les réponses à partir des appréciations faites sur les zones à risques et les réponses à y apporter : quelle prévention, politique, diplomatique ? Quelles actions de la France, de l'Union européenne ou coordonnées avec d'autres pays ? A quels outils recourir pour anticiper la crise ? Et je pense à des outils diplomatiques et militaires, mais aussi économiques.

Si une telle réflexion avait été davantage conduite au niveau européen, cela nous aurait aidé quand les sénateurs américains ont proposé la NMD ; et quand, pour la justifier, les Etats-Unis ont désigné les « Etats parias », la réponse européenne aurait peut-être été plus rapide, plus argumentée, et mieux comprise de nos opinions. Bill Clinton a décidé le 1er septembre que les choix sur la NMD seraient reportés après les élections, et le débat est actuellement suspendu. Mais nous le savons : une initiative « hardie » intervenant après les élections -essentiellement pour des raisons de politique intérieure américaine- pourrait remettre en cause nos stratégies. Elle pourrait en outre inciter certains pays à moderniser plus vite leurs systèmes d'armement. Je pense bien sûr à la Chine. C'est d'elle, à mon avis, que partent les effets dominos, et non de l'Inde comme le pense M. Galy-Dejean : l'Inde se nucléarise par rapport à la Chine, puis le Pakistan par rapport à l'Inde. De même au Proche-Orient les avancées de la dénucléarisation présupposent celles du processus de paix.

Cette réflexion au sein de l'Union européenne aurait aussi pour mérite de déterminer ce qui relève du niveau national, du niveau européen et de celui de l'Alliance atlantique. Elle permettrait aussi de préciser les conditions politiques et militaires d'engagement de cette force de 60 000 hommes, bref de donner un contenu doctrinal aux missions de Petersberg. Les pays de l'Union européenne pourraient alors, au sein de l'OTAN, contribuer à l'élaboration du concept civilo-militaire de la gestion de crise, qui a tant manqué au début de la crise du Kosovo, et en être les acteurs. L'objectif est simple : mieux intégrer la coordination entre le traitement non-militaire et le traitement militaire d'une crise, en collaboration avec tous les partenaires impliqués. Le problème posé à l'Union européenne est de mettre en _uvre une capacité globale -économique, politique et militaire- de gestion de crise, donc de définir sa propre doctrine.

Ce débat européen devrait aussi nous donner de meilleures bases pour aborder la sécurité collective en Europe, car celle-ci ne s'arrête pas à l'Oural ! Ce travail à quinze doit se poursuivre avec les pays européens membres de l'OTAN mais non de l'Union européenne. C'est nécessaire pour que l'Union soit un partenaire crédible dans le débat sur la sécurité collective avec la Russie et les pays du Caucase, mais aussi pour que soit envisagé, sur le long terme, un débat sur les moyens : il faudra éviter que ne se créent des sureffectifs -consommateurs de crédits aux dépens des équipements. En effet, si l'on ajoute aux effectifs militaires de l'Union ceux des pays européens membres de l'OTAN mais non de l'Union, on arrive à 2,3 millions d'hommes et de femmes pour un budget d'environ 170 milliards de dollars, alors que les USA, pour 1,5 million d'hommes, consomment près de 300 milliards de dollars. On ne peut attendre la loi de programmation 2008-2013 pour aborder ce problème lourd de conséquences, notamment pour la recherche-développement.

D'autant que les conditions imposées aux pays entrant dans l'OTAN aggravent cette situation : on leur demande en général de fournir une armée conséquente, donc des effectifs, et des matériels aux normes de l'OTAN, donc peu nombreux... Vous avez déclaré le 24 octobre à Strasbourg, Monsieur le ministre, que : « pour renforcer leurs capacités propres, des Etats pourraient s'engager à mutualiser leurs efforts ». Comment concevez-vous cette mutualisation, et jusqu'où peut-elle aller ?

Ce débat européen nécessaire aurait aussi le mérite de permettre une coopération industrielle plus efficace. Il y a tout d'abord à cela des raisons opérationnelles et économiques. La construction de l'Europe de la défense passe par la convergence entre les partenaires européens sur les méthodes de programmation et les programmes des armées ; or cet embryon de programmation ne concerne qu'environ 10 % des dépenses d'équipement des différents pays, chiffre dont on ne peut à moyen terme se satisfaire.

L'Europe de l'armement doit obéir à des motifs opérationnels et surtout économiques. En période de réduction des budgets de défense, il faut fournir aux industries des marchés à l'échelle européenne afin de les rendre plus compétitives.

Cela implique aussi des coopérations étroites en « amont ». Il faut rationaliser la demande pour assurer une convergence des besoins des Etats vers les mêmes équipements, et le rôle des états-majors est sur ce point primordial.

Dans le domaine industriel, nous avons aussi agi, en particulier à travers l'OCCAR, dans lequel certains pays demandent à entrer. Faut-il assouplir les règles du juste retour ? Voilà encore une préoccupation.

Je crois enfin à la nécessité d'un débat collectif sur la non-prolifération, dans lequel l'Union européenne doit s'affirmer davantage. La commission de la défense présentera dans quelques jours des propositions, car, à la différence de l'exécutif requis par d'autres priorités, le Parlement est le lieu approprié pour discuter des sujets réputés tabous. L'Europe ne pourra pas jouer un rôle stratégique si elle n'a pas réglé en son sein ce type de problème. L'Union doit donc se résoudre à se donner les moyens de ses ambitions, même dans un domaine qui suscite davantage de débat que de consensus entre Etats membres.

Depuis Saint-Malo, Cologne, Helsinki, Feira, que de progrès ! La France contribue à la construction de l'Europe de la défense par ses initiatives et par son budget, que nous voterons donc. Mais, je l'ai montré, le chemin à parcourir est encore long (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. Guy Teissier - Au moment où fut rédigé le Livre blanc sur la défense, régnait encore un certain flou quant aux conséquences de l'éclatement de l'URSS. Lorsque la loi de programmation fut rédigée, l'horizon s'était éclairci. Certes des menaces subsistaient, telles que la prolifération des armes de destruction massive, et le terrorisme sous toutes ses formes. En revanche l'éventualité d'une attaque conventionnelle massive pouvait être exclue.

La France avait, et a toujours la volonté de participer dans les pays en crise, sous l'égide des Nations unies, à la prévention des conflits, au rétablissement de la paix, et à la restauration de l'ordre public.

Les missions des armées étaient ainsi fixées : maintenir la stratégie de dissuasion, participer à la lutte contre le terrorisme sur le territoire national, ainsi qu'aux actions de paix internationales.

Depuis le vote de la loi de programmation, le contexte international n'a pas sensiblement évolué. En effet, la nouvelle orientation politique de l'ex-Yougoslavie ne résout pas tous les problèmes des Balkans et le Proche-Orient connaît une crise grave et sans doute durable. Lors du conflit du Kosovo, les lacunes dénoncées en matière de renseignement stratégique ou de capacité de tir tout temps du Jaguar, et constatées lors de la guerre du Golfe, ont été mises en évidence, même si elles ne compromettaient pas l'action de nos forces.

Mais la crise du Kosovo a démontré une nouvelle fois l'incapacité des principales puissances européennes à régler un problème de moyenne importance, même en Europe, sans les Américains.

Le Gouvernement a-t-il su tirer les enseignements du passé ?

En matière d'équipements, je note avec satisfaction la poursuite de la politique de commandes pluriannuelles, et la commande cette année de 20 Rafales et 52 chars Leclerc, ainsi que l'attention particulière réservée au programme satellitaire Hélios II. Cependant, ces dépenses d'équipements insuffisantes ne correspondent pas à ce que nous pourrions attendre d'une nation supposée être le fer de lance d'une Europe de la défense. Le président Quilès s'est lui-même exprimé sur ce point.

Le chef d'état-major des armées à fait état des difficultés rencontrées dans le maintien de la capacité opérationnelle de certains matériels.

Nous sommes unanimes à déplorer les conséquences de l'insuffisance des crédits de paiement sur le niveau de disponibilité des équipements. Ainsi le taux de disponibilité des hélicoptères Puma de l'armée de terre s'établit à 55 % alors qu'il devrait être de 75 %. Il en va de même pour les crédits affectés aux produits pétroliers. Compte tenu de la conjoncture, une majoration de 20 % eût été souhaitable.

Aussi, on le sait, des mesures d'étalement et de lissage des dépenses ont-elles été prises, ce qui a entraîné des retards dans l'équipement des armées, dont nous regrettons que votre budget ne permette pas de les rattraper.

Notre groupe fait avec regret le même constat en matière de fonctionnement, et singulièrement d'entraînement. Nous avons, il est vrai, progressé un peu, pour atteindre une centaine de jours dans l'armée de terre (Interruptions sur les bancs du groupe du RPR et du groupe UDF).

M. René Galy-Dejean, rapporteur pour avis - Hélas, on en est encore loin !

M. Guy Teissier - En Grande-Bretagne, les unités de l'armée de terre accomplissent entre 110 et 150 jours de sortie par an, les bâtiments sortent en mer 150 jours et les pilotes effectuent 200 heures de vol par an. Nous en sommes loin, et les efforts faits par le Gouvernement sont insuffisants.

Ces incohérences sévissent aussi dans la réorganisation territoriale de la défense nationale, avec des incidences sur certains organismes de l'armée de terre implantés à Marseille. Il est en effet étonnant que l'armée de terre soit la seule arme à avoir préféré le découpage en cinq régions de défense. Ainsi, le grand Sud qui dépendait de la circonscription militaire de Marseille se trouve-t-il rattaché à la région militaire de Lyon. La réponse de votre directeur de cabinet à ma lettre du 6 juillet dernier cache mal votre embarras sur cette question.

Le processus de professionnalisation offre un autre sujet de préoccupation : l'état de fatigue ressenti par l'armée de terre. Il y a quelques mois, le général Crène, son chef d'état-major, a dénoncé une situation de surchauffe, terme lourd de sens.

En contact régulier avec les régiments basés dans ma région, j'ai senti flotter sur le moral des troupes un certain sentiment de résignation.

L'armée de terre est en effet fortement sollicitée : elle a participé à plus de soixante opérations extérieures depuis 1990. Elle contribue à des opérations de secours sur le territoire national au travers des plans Vigipirate, Polmar ou Orsec, auxquelles s'ajoutent des efforts de restructuration toujours très difficiles. Il est concevable que cette charge de travail ait fini par affecter le moral des troupes. Comment ne pas craindre de voir le personnel sous contrat ne pas renouveler son engagement ?

Comment fidéliser les jeunes volontaires lorsque les budgets ne permettent pas d'assurer de bonnes conditions de travail et de vie ? Quelles mesures comptez-vous prendre à ce sujet ?

Enfin, cette année encore, les remarques formulées avec constance par le chef de l'Etat sont restées vaines.

Alors que celui-ci s'inquiète des atteintes portées aux orientations de la loi de programmation, notamment en matière d'équipements, et qu'il vous exhorte à accomplir des efforts budgétaires significatifs, le Gouvernement s'en tient à une approche dogmatique des questions de défense, comme en témoigne son refus d'utiliser une partie des fruits de la croissance pour notre défense.

Mon regret est d'autant plus fort que le rapport de la Cour des comptes montre que le ministère de la défense consomme mieux ses crédits que la moyenne des ministères civils.

Dans ces conditions, le groupe votera contre ce projet de budget (Applaudissements sur les bancs du groupe DL, du groupe UDF et du groupe du RPR).

M. Michel Voisin - Décidément, la défense n'est pas une priorité pour le Gouvernement. Chaque année, il vous aura fallu réduire la taille de votre budget, et donc les ambitions internationales de la France.

L'ancien rapporteur général du budget nourrissait certainement de grands espoirs à la lecture des communiqués euphoriques de Bercy sur les rentrées fiscales d'un montant exceptionnel. Les programmes d'armement n'allaient plus être de la revue, les recrutements indispensables à la réussite de la professionnalisation pourraient être lancés, et les capacités opérationnelles de nos forces pourraient revenir à un niveau plus digne.

M. René Galy-Dejean, rapporteur pour avis - On peut toujours rêver !

M. Michel Voisin - Le ministre de la défense, lui, a dû déchanter. On vous fait un bien mauvais sort, Monsieur le ministre ! Pourtant, vous n'aviez pas ménagé vos efforts pour contraindre à la baisse les crédits des armées.

J'étais d'accord avec vous lorsque vous avez présenté votre revue des programmes : c'était effectivement une très bonne chose.

Il convenait, tout simplement, de demander aux états-majors, aux militaires, à la DGA et aux industriels d'y mettre du leur, pour permettre au Gouvernement d'honorer ses engagements.

Comment en effet ne pas être inquiet quand on sait, comme l'a souligné le président Quilès, que l'une des principales inconnues de la professionnalisation est son impact budgétaire et que les coûts des rémunérations et des charges sociales risquent de déraper, au détriment du fonctionnement des armées ?

Comment ne pas l'être quand l'augmentation du prix des carburants entrave encore davantage l'activité des forces ?

Comment ne pas s'interroger sur notre intégration aux forces internationales quand le niveau des crédits d'équipement s'avère inférieur aux annuités de la revue des programmes, elle-même en retrait sur la loi de programmation ?

Non, ce budget n'est pas satisfaisant. Certes, il s'inscrit dans la continuité des précédents, mais rappelez-vous : « Errare humanum est... sed perseverare diabolicum ! ».

Les rentrées fiscales exceptionnelles n'ont pas profité à nos armées et le retard se creuse dans l'accomplissement de la loi de programmation. Il ne vous restera, Monsieur le ministre, qu'une année pour trouver les 25 milliards nécessaires. Or il existe une série de tensions, ce que le chef d'état-major appelle la surchauffe.

La première concerne le coût de la professionnalisation. La rémunération des militaires de carrière ne doit pas restreindre la disponibilité opérationnelle des armées, laquelle est amputée de 350 millions par rapport à la norme souhaitable. Et elle ne devrait pas s'améliorer avec un projet de budget établi sur un prix du baril à 20 dollars avec un dollar à 6,50 F !

La stagnation du fonctionnement courant et l'extrême faiblesse de l'entretien des matériels obèrent les taux de disponibilité de nos forces. Par exemple, le parc de Pumas de l'armée de terre a un taux de 55 % et celui des avions de combat de l'armée de l'air de 65 %.

Ensuite, la réalisation des grands programmes de la dernière décennie ne doit pas justifier l'abandon de l'effort de modernisation des équipements.

Je voudrais dire mon inquiétude sur le programme du missile M51, qui connaît une baisse spectaculaire de ses autorisations de programme. On a certes souligné les commandes de deux Nouveaux transports de chaland de débarquement, et de 7 750 munitions pour les chars Leclerc, ou le lancement de la construction de 2 frégates Horizon et du programme A400 M. Mais ces décisions auraient dû être prises l'année dernière. Nombreux sont les rapports de l'OTAN qui soulignent l'écart inquiétant qui se creuse entre les capacités opérationnelles des forces américaines et européennes. Quels moyens pourrons-nous mobiliser pour concourir à la réalisation des objectifs d'Helsinki ? Certes, nous disposerons du personnel, mais avec quel matériel ? L'un de vos prédécesseurs, Pierre Joxe, avait fait de la préparation de l'avenir l'un des maîtres mots d'une loi de programmation ; dix ans plus tard, nous en sommes toujours au stade des mots.

Enfin, la professionnalisation ne saurait couper le lien entre la nation et son armée : le recrutement devrait compenser la diminution du nombre des appelés du contingent. Or il continue d'être inférieur aux besoins. La difficulté d'attirer des hommes et des femmes dans une carrière militaire ne tient pas tant aux rémunérations qu'aux conditions mêmes d'exercice du métier. Dans l'armée de terre, les hommes ont de plus en plus de mal à dissimuler leur mécontentement. Vous les entendez et vous les comprenez, Monsieur le ministre ; mais que faites-vous ? Rappelons-nous les leçons de l'histoire : une armée démoralisée n'est plus à même de remplir ses missions dans de bonnes conditions.

Cette année, il faut aussi tenir compte du contexte particulier de l'après-guerre au Kosovo. Pourquoi ne pas en tirer les conséquences, notamment en matière de renseignement, de munitions et de transport de troupes ?

Certes, l'an dernier, un effort tout particulier a été entrepris pour restaurer notre stock de munitions. Il en allait de l'avenir de GIAT et de l'attitude bienveillante de quelques membres de la majorité plurielle. En matière de renseignement, il semblerait, au vu du budget de l'espace, que la France ait hélas fait le choix de la dépendance à l'égard des Etats-Unis. Quant au transport de troupes et à la projection de puissance, qui devraient être des priorités étant donné le contexte international, la marine nationale construira désormais 4 navires par an. Cela ne lui permet que de sortir du creux de la vague, de maintenir l'existence de la DCN et des compétences technologiques et humaines que notre pays a bien failli perdre. Et qu'en est-il des transferts qui concernent Toulon et Brest ?

Bientôt, vous allez définir les contours de la prochaine loi de programmation militaire. Auparavant, il faudra dresser le bilan de la précédente. Vous ne partez pas sur des bases saines. Vous avez pris un retard qui rend le format 2015 de notre armée difficilement réalisable. Je pense notamment à notre second porte-avions. Dès lors que le Charles de Gaulle est construit, un second porte-avions est nécessaire à notre flotte aéronavale et il ne faut pas tarder à lancer ce programme pour lequel nous disposons encore d'études valables.

Qu'espérions-nous de votre budget ? La compréhension du présent et la préparation de l'avenir, le respect de la loi de programmation militaire ou, à défaut, de votre revue des programmes, l'adaptation aux défis de demain et la valorisation des moyens humains et matériels.

Vous nous proposez une gestion étriquée et qui ne fait en rien bénéficier nos forces des fruits de la croissance.

Ce budget n'est pas adapté aux enjeux de l'avenir et il est du devoir de l'UDF de le refuser (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF, du groupe du RPR et du groupe DL).

M. Charles Cova - Ce budget revêt un caractère particulier puisqu'il constitue l'avant-dernier de la loi de programmation militaire 1997-2002. Il nous permet de tracer un premier bilan de l'effort de mutation sans précédent de nos armées.

S'il est important de se soucier des autorisations de programme ou de l'équipement prévu, il ne l'est pas moins de se préoccuper de la manière dont vivent nos militaires. Selon le chef d'état-major de l'armée de terre, lui-même, lors de sa dernière audition, « Une politique de ressources humaines, adaptée à un monde en pleine évolution, devrait être mise en _uvre en vue d'offrir des rémunérations adaptées, d'assurer un cadre de vie convenable et des conditions de travail décentes, sans quoi il serait illusoire d'espérer recruter et conserver une ressource de qualité ».

Monsieur le ministre, vous ne pourrez pas échapper, au moment où le chômage baisse, où les charges de travail dans la gendarmerie pèsent lourdement, à la revalorisation des rémunérations dans les armées. Or, en 2001, rien n'est prévu en la matière.

Alors que les armées vont parachever leur professionnalisation, nous devons nous préoccuper tout particulièrement des conditions que nous offrons à celles et ceux qui font carrière. Deux problèmes me paraissent urgents à résoudre.

Tout d'abord, l'actuel statut général des militaires, rédigé en 1972 et modifié à plusieurs reprises, contient des dispositions inadaptées sinon même choquantes. Ainsi de son article 7, qui limite la liberté d'expression des militaires. Un peu plus de confiance ne me paraîtrait pas impensable à notre époque. Si nous voulons que soient émises des idées nouvelles en matière de défense, la liberté d'expression des militaires devrait être alignée sur le régime de droit commun des agents de l'Etat.

Une autre disposition oblige le militaire qui souhaite épouser une personne ne possédant pas la nationalité française à obtenir l'autorisation préalable de son ministre. Cette contrainte est devenue anachronique. C'est donc à un toilettage complet de ces textes que nous devons procéder afin de mieux intégrer les militaires à la société.

Ensuite, pour rendre la concertation dans les armées plus efficace, il convient d'aménager les modes de désignation des membres des CFM et du CSFM. Le rôle des présidents de catégories doit être renforcé. La confiance qu'ils suscitent et leur expérience sont des outils précieux. Leur légitimité pourrait être accrue en généralisant leur désignation par l'élection, comme nous l'ont demandé à Bernard Grasset et à moi-même, les trois armes et la gendarmerie.

De même, l'institution d'un médiateur du personnel militaire serait de nature à pallier le manque de représentation des militaires.

Vous connaissez mon attachement, Monsieur le ministre, à l'amélioration des conditions de vie des militaires. Je sais à quel point vous partagez ces préoccupations.

Nous devons travailler à l'élaboration de nouveaux textes statutaires et disciplinaires, réorganiser le dialogue et la circulation de l'information au sein des armées, et faire en sorte que, dans ce domaine, l'institution soit montrée en exemple plutôt, que montrée du doigt.

Je souhaite ardemment qu'un débat sur le statut s'engage, même s'il faut pour cela bousculer une administration réticente. Pour tenter de vous convaincre, permettez-moi de citer votre prédécesseur de 1972, Michel Debré. Pour lui le statut du militaire c'était : « l'affirmation que les pouvoirs publics ont conscience de ce que représente éternellement l'armée et ceux qui la servent pour le bien de la République et de la nation ». Et, cette année-là déjà, il déclarait : « les militaires en ont besoin ! ». Oui, Monsieur le ministre, les militaires des années 2000 ont besoin de nouvelles conditions de vie et d'un nouveau statut (Applaudissements sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL).

M. Antoine Carré - Alors que la professionnalisation de nos armées aurait dû vous conduire à nous proposer un projet ambitieux, vous nous présentez un budget a minima, qui ne résoudra rien des difficultés de recrutement de personnels civils, et particulièrement des médecins.

La réduction des effectifs amorcée en 1997 crée pourtant de graves problèmes, car une forte proportion des personnels de santé des armées était issue du contingent : 25 % pour les médecins, et jusqu'à 90 %, certaines années, pour les chirurgiens-dentistes. De plus, de nombreux médecins choisissaient de faire carrière dans l'armée au terme de leur service national, si bien qu'entre 20 et 30 étaient embauchés chaque année comme médecins militaires. La professionnalisation de l'armée interdira qu'il en aille ainsi désormais. Pourtant, la loi de programmation établit à 2 411 le nombre de postes nécessaires en 2002 et, compte tenu des départs en retraite, 108 créations de postes sont nécessaires. Or, le déficit actuel est déjà de 120 postes !

Etant donnée la durée des études médicales, seul un recrutement immédiat permettrait d'endiguer ce sous-effectif. Mais, jusqu'à présent, le recrutement entrepris a donné des résultats décevants. Certes, votre ministère a déjà pris diverses mesures et en a annoncé d'autres, mais elles sont insuffisantes, et les tensions observées au sein des services de santé s'accentuent. Il est urgent de rendre la profession plus attrayante en revalorisant les soldes.

La diminution des autorisations de programme est tout aussi inquiétante. Elle l'est tout particulièrement pour le poste « recherche et développement », en chute libre à moins 28,1 %. De même, la simple reconduction des crédits affectés à la dissuasion est contestable, d'autant que la France, présidente en exercice de l'Union, aurait dû s'attacher à rendre crédible l'Europe de la défense.

S'agissant de l'armée de terre, des retards dans la passation des commandes sont à craindre, et le budget de la marine a déjà fait l'objet de plus de 4 milliards d'annulations d'autorisations de programme en 2000. Ce n'était pas la première fois, et l'on ne s'étonnera pas qu'il en ait résulté une gestion tendue. Il faut donc souhaiter que les dotations inscrites dans le budget 2001 au profit de la marine soient respectées en cours d'exercice.

Quant au programme d'avion de transport futur, dont dépend la capacité de transport de l'armée de l'air, c'est le grand oublié du budget. Vous vous étiez pourtant engagé, en juillet, à commander cinquante A400 M avant mars 2001. Vous avez en effet annoncé que les autorisations de programme manquantes seraient inscrites dans le projet de loi de finances rectificative. Mais où comptez-vous trouver les milliards nécessaires ?

M. Jacques Myard - Cher Jack Lang !

M. Antoine Carré - Cette inscription dans le collectif risque, en outre, d'être trop tardive pour que les livraisons puissent se faire en 2007 et 2008 comme prévu. Pour cela, la commande doit être confirmée aux industriels dès le début de l'année prochaine. Comment, donc, ne pas partager la préoccupation du chef d'état-major des armées, le général Kelche, devant l'insuffisance des crédits inscrits au titre V ?

Enfin, comment ne pas s'inquiéter d'estimations pour les carburants qui reposent sur un baril à 25 dollars et une monnaie américaine à 6,50 F alors que la réalité est tout autre : un baril à plus de 30 dollars et un taux de change de 7,50 F pour 1 dollar ! Cette sous-estimation compromet gravement la promesse que vous aviez faite d'augmenter les heures de vol et les entraînements terrestres et maritimes. Il paraît déjà plus qu'incertain de penser que le projet de budget 2001 permettra à l'armée de terre de réaliser les 80 jours de sortie prévus ; ce chiffre était pourtant en deça des 100 jours souhaités.

Les limites et les faiblesses que je viens de dénoncer ne peuvent qu'inciter le groupe démocratie libérale à voter contre ce projet de budget (Applaudissements sur les bancs du groupe DL, du groupe du RPR et du groupe UDF).

M. Jacques Myard - Je vous avais trouvé fort courageux, Monsieur le ministre, de nous présenter l'année dernière un aussi mauvais budget que celui que vous nous aviez soumis. Cette année, c'est de témérité périlleuse, sinon de suicide politique qu'il s'agit (Protestations sur les bancs du groupe socialiste). Votre nom restera attaché au désarmement unilatéral et coupable de la France, alors que des menaces grondent sourdement, qui trouvent leur origine dans de multiples ruptures géostratégiques, en Méditerranée, en Afrique, au Moyen-Orient, en Asie. Ces menaces, sur lesquelles vos services ne cessent de vous alerter, vous avez tragiquement décidé de les ignorer et, anesthésié par un discours puéril selon lequel la France n'aurait que des amis et plus aucun ennemi, vous baissez les bras.

Jamais la France n'a consenti pour sa défense un effort aussi insignifiant. Il serait, dites-vous, de 2 % du PIB. En réalité, si l'on prend comme référence la nomenclature de l'OTAN, il n'est que de 1,70 % -du jamais vu ! Je doute, Monsieur le ministre, que vous puissiez dormir tranquille, vous qui mettez notre sécurité en péril. Bientôt, nos armées tiendront, toutes confondues, dans l'équivalent d'un Stade de France (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste).

Comment ignorer qu'au Kosovo, nous n'avons pu aligner que dix avions, alors que les Pays-Bas en envoyaient cent ?

M. Alain Richard, ministre de la défense - Je pense, Monsieur le député, que vous avez interverti les lignes de votre discours : c'est l'inverse qui est vrai.

M. Jacques Myard - Je maintiens que seuls 10 de nos avions étaient opérationnels.

En matière de recherche et développement, effort indispensable à toute nation qui ne veut pas hypothéquer son avenir, la situation est désastreuse, puisque nos investissements ont reculé de 70 %. Cela ne peut durer ! Qu'en est-il, par exemple, du missile M51 ? Quand cesseront vos atermoiements dans les négociations avec EADS, qui menacent la mise au point des engins et, par ricochet, 700 emplois aux Mureaux et 600 en Aquitaine ? Qu'en est-il du poids de la France, à terme, au sein du consortium ? Ne vous retranchez pas derrière la DGA, qui semble en être restée à l'achat de pièces détachées automobiles ! (Protestations sur les bancs du groupe socialiste).

Ne vous retranchez pas, non plus, derrière la construction de l'identité européenne de défense et de sécurité pour donner le change ! J'approuve cet objectif, mais point votre fuite en avant, ni vos slogans destinés à endormir l'opinion publique pour dissimuler la vacuité de vos efforts en matière de défense nationale. De la politique européenne de défense, vous faites un alibi à votre défaillance, en oubliant de signaler qu'à l'heure actuelle elle ne rassemble que des canards dont nul ne sait lequel boîte le plus.

Il n'y aura de véritable défense européenne commune que lorsque la France se sera dotée de moyens suffisants pour maintenir son rang et préserver son autonomie de décision. Or, aujourd'hui, la France déserte ! Le budget que vous nous présentez, Monsieur le ministre, est celui d'un battu, perdant des arbitrages budgétaires. Comment, dans ces conditions, seriez-vous pris au sérieux par vos partenaires ? (Protestations sur les mêmes bancs).

M. Jean-Michel Boucheron rapporteur spécial de la commission des finances - Vos propos consternants atterrent même la droite !

M. André Vauchez - Après ce discours calamiteux, il est grand temps de revenir à la réalité et, en particulier, à la gendarmerie, arme qui a su s'adapter à son siècle et qui doit continuer de le faire, tant l'évolution des territoires est profonde.

La gendarmerie assure seule la sécurité publique sur 95 % du territoire, où vivent 50 % des habitants, mais où circule la quasi-totalité de la population. En dehors de la police judiciaire et administrative, elle assure de nombreuses missions pour divers ministères, dont la défense.

Ce projet de budget est bon. Il permet de respecter la loi de programmation militaire, notamment son volet professionnalisation : l'augmentation des effectifs d'officiers, celle des volontaires, dénommés gendarmes-adjoints, et la baisse des appelés du contingent se traduisent par un gain net de 580 personnes.

La gendarmerie joue également un rôle important dans l'organisation de la journée d'appel de préparation à la défense et participe ainsi au renforcement du lien armée-nation.

Cette mission est confortée par la mise sur pied d'une réserve, qui reçoit cette année une dotation en forte augmentation.

Ce projet permet d'amplifier l'effort entrepris depuis deux ans pour redéployer les moyens vers les zones périurbaines sensibles, tout en maintenant le maillage cantonal de l'implantation des brigades. Les gendarmes expérimentés sont orientés vers ces secteurs et remplacés dans les zones rurales par de jeunes gendarmes-adjoints volontaires, succédant aux appelés : 3 725 ont été recrutés cette année, ils seront 11 025 fin 2001 et 16 000 à terme. Mieux formés, recrutés pour plusieurs années, ils sont investis de compétences plus importantes.

Votre projet permet également de moderniser l'équipement des unités en matériel et en véhicules.

Nous saluons la proposition d'augmenter le nombre des pelotons spécialisés d'intervention, les PSIG : 80 auront été créés en 2000 et 2001 pour renforcer l'action des brigades. Par leur présence nocturne sur le terrain et leur rapidité d'intervention, ces structures sécurisent les zones où elles sont implantées.

Les moyens nouveaux de fonctionnement permettront à la gendarmerie de s'engager dans des partenariats tels que les contrats locaux de sécurité, qui développent la prévention et débouchent parfois sur des initiatives originales, telles que les patrouilles à vélo.

Enfin je me réjouis de la création de 50 postes sur les autoroutes. Je voudrais cependant vous soumettre l'exemple jurassien : sur les 96 hommes que compte l'escadron départemental de sécurité routière, 57 sont affectés aux 108 km d'autoroute et à aucun moment le commandant n'a le droit de les placer sur les routes nationales et départementales, alors que l'inverse est possible. C'est un vrai problème.

Cela n'empêchera pas les députés du groupe socialiste de voter ce budget, car il apporte une réponse politique conforme à l'attente de nos concitoyens du monde rural ou périurbain. C'est ce que nous expliquerons dans nos campagnes (« Très bien ! » sur les bancs du groupe socialiste)

M. Alain Richard, ministre de la défense - Je voudrais souligner la haute tenue des débats et je souhaiterais que ce moment de vie politique, riche en points de vue et propositions, soit repris par les médias nationaux comme il devrait l'être (Applaudissements divers bancs).

J'évoquerai d'abord le cadre politique et stratégique de l'action du Gouvernement en matière de défense. L'Europe est en train de se doter d'un outil commun, une force de réaction rapide appuyée sur de véritables capacités stratégiques, pour pouvoir décider et agir seule dans les années qui viennent. Au moment où nous exerçons la présidence de l'Union européenne, les efforts pour faire de l'Europe un nouvel acteur stratégique commencent à porter leurs fruits. Les Européens ont, après quelques années de tâtonnements et de divergences, rapproché leurs points de vue et face à l'aggravation des crises régionales, ils ont décidé de prendre collectivement leurs responsabilités. Le temps est révolu où beaucoup des pays se satisfaisaient d'une répartition des rôles qui rendait incontournable la participation directe de notre allié américain à toute opération. Il ne s'agit pas de remettre en cause ce lien transatlantique, mais de le rééquilibrer dans le sens d'une plus grande contribution de l'Europe à sa propre sécurité.

L'objectif est de pouvoir, en 60 jours, déployer 60 000 hommes pendant un an. Il s'agit d'un dispositif à peine supérieur à celui qui est déployé au Kosovo depuis dix-sept mois.

La France figure parmi les pays européens qui ont le plus tôt adapté leur défense à la nouvelle donne. Elle est d'ailleurs souvent citée, avec la Grande-Bretagne, pour la solidité et la continuité de son effort de défense et pour la valeur de ses moyens militaires.

Le conflit du Kosovo nous a rappelé brutalement à quel point la puissance militaire et la cohérence politique dans son emploi commandaient la maîtrise d'une situation de crise majeure.

M. Jean-Bernard Raimond nous a d'ailleurs rappelé à quel point ces événements justifiaient la détermination à garder un outil de défense apte au combat de haute intensité. Les évolutions positives constatées depuis 18 mois en ex-Yougoslavie ne se seraient pas produites si l'un ou l'autre des protagonistes avait cru possible de reprendre l'action armée en misant sur la faiblesse ou l'indécision des forces multinationales.

La participation à un dispositif européen ne signifie pas que nous limitons notre zone d'intérêt et d'action à notre seul continent. L'embrasement du Timor-Est, l'année dernière, a montré que nous devions aussi être en mesure de mobiliser rapidement des moyens militaires à forte composante humanitaire pour faire respecter les résolutions des Nations unies, même très loin.

L'actualité africaine montre également que l'instabilité sur ce continent ne recule pas. Il s'y développe des situations qui pourraient nous conduire, dans le cadre de la légalité internationale, à mettre en _uvre, avec d'autres, nos moyens militaires -d'où la nécessité de maintenir un effort important de coopération de défense en Afrique et d'y entretenir des forces prépositionnées, avec l'accord des pays d'accueil.

D'autre part, la présence maritime française dans le Pacifique et l'Océan indien est conforme aux grands objectifs de la politique de défense française, dans des zones importantes sur le plan stratégique et économique.

Je voudrais dire à M. Boucheron, qui s'est interrogé sur les crédits consacrés à la Polynésie, que le Gouvernement, en vertu du principe de la continuité de l'Etat, n'a pu que prendre acte de l'accord signé par M. Juppé, Premier ministre du gouvernement précédent, avec l'autorité territoriale, accord, au terme duquel 150 millions d'euros sont versés chaque année pendant dix ans au territoire de Polynésie. C'est également, Monsieur Galy-Dejean, sur un arbitrage personnel de M. Juppé que ce crédit a été imputé sur le budget de la défense (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste). Les montants versés correspondent à des investissements laissés à l'appréciation de l'autorité territoriale (« Hélas ! » sur les bancs du groupe socialiste).

Je ferai un point rapide sur les étapes franchies par l'Europe de la défense juste avant le conseil européen de Nice, pour répondre à M. Chauveau et au président Quilès, qui a insisté sur le caractère stratégique des enjeux.

Les organes politico-militaires de gestion de crise, qui sont en place sous une forme intérimaire depuis le 1er mars, seront institués définitivement : comité politique et de sécurité, comité militaire, état-major européen. Les relations entre l'Europe de la défense et son environnement stratégique, l'OTAN et les pays européens non membres de l'Union européenne, auront été clarifiées par l'adoption, à l'unanimité, de principes équilibrés de coopération. Et, surtout, les capacités militaires européennes seront entrées dans le domaine du concret. L'objectif fixé par le Conseil européen d'Helsinki était de pouvoir déployer 60 000 hommes en 60 jours pour remplir les missions dites de « Petersberg », prévues dans le traité d'Amsterdam. Cette force doit disposer de tous les appuis nécessaires, être autosuffisante et pouvoir se maintenir pendant une année au moins.

Depuis juin, les experts militaires des Quinze ont élaboré un document très détaillé de planification militaire, qui a fait l'objet d'un dialogue constructif avec l'OTAN. Sur la base de ce catalogue des capacités nécessaires, les pays membres feront connaître, le 20 novembre, les moyens qu'ils s'engagent à mettre à la disposition de l'Union européenne si cette dernière décide d'agir militairement.

M. Chauveau évoquait les possibilités de mutualisation dans ce cadre. Il y en a déjà des exemples : avec nos amis allemands, nous avons prévu la mise en place, pour les pays volontaires, d'un commandement des transports aériens. Nos amis néerlandais et belges travaillent à un programme de projection navale. Donc des coopérations renforcées sont possibles et en cours dans le cadre plus général des Quinze.

Des programmes multilatéraux ou nationaux pourront couvrir les besoins non satisfaits dans l'immédiat -en particulier en ce qui concerne les moyens de contrôle et de commandement, le transport stratégique ou le renseignement.

Il nous restera beaucoup de travail après cette première étape. Il faudra apprendre à nos armées à agir en commun, tout en demeurant sous contrôle national, et mieux répartir nos ressources dans le respect des impératifs de sécurité nationale ; bref, il faudra penser désormais notre action dans un nouveau cadre, pour un meilleur exercice collectif de nos responsabilités.

La pertinence du modèle d'armées que nous avons décidé de mettre en place est donc confirmé. La loi de programmation 1997-2002 sera conduite à son terme, tant en matière d'effectifs, lesquels évoluent conformément aux objectifs fixés, que d'équipements. La revue de programmes de 1997-1998 a permis de réaliser les équipements prévus tout en optimisant l'utilisation des crédits et en faisant évoluer les structures et les méthodes. J'indique à ce sujet aux orateurs de l'opposition que rares sont les programmes prévus qui n'auront encore fait l'objet d'aucune commande avant la fin 2001, soit un an avant la fin de la période couverte. Je les invite à se reporter au rapport sur l'exécution de la loi de programmation.

Les crédits du ministère de la défense -hors pensions- progressent de 0,55 % en 2001 pour s'établir à 28,8 milliards d'euros, si bien que les moyens disponibles augmentent de près de 1 %, compte tenu de la baisse du taux de TVA applicable à la plupart des achats.

L'effort de défense de la France demeure donc à un niveau élevé, excédant celui de nos principaux partenaires de l'Union et restant voisin de celui du Royaume-Uni. Le rapport de M. Boucheron, qui apporte des données complémentaires à celui de M. Raimond, le démontre. Il faut avoir à l'esprit quelques comparaisons intéressantes. Des documents de l'Office budgétaire du Congrès américain nous apprennent que les dépenses d'achat de matériel des Etats-Unis, qui représentaient 108 milliards de dollars en 1989, sont tombés à 54 milliards en 1997 avant de remonter à 62 milliards en 2000 -soit tout de même 44 % de moins qu'en 1989 ! Le rapport entre les investissements de défense de la France et des Etats-Unis est de un à six, équivalent au rapport entre le PIB des deux pays...

M. Jacques Myard - Puis-je vous interrompre, Monsieur le ministre ?

M. le Ministre - Je vous en prie.

M. Jacques Myard - Aux Etats-Unis, les crédits de recherche-développement sont beaucoup plus importants. Leur diminution en France hypothèque l'avenir.

M. le Ministre - Il ne vous aura pas échappé, Monsieur Myard, qu'il n'existe pas de ministère de la recherche aux Etats-Unis et que l'essentiel des crédits de recherche civile se retrouve dans le budget du Pentagone (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

Les crédits du titre III progressent de 16 à 16,1 milliards d'euros en 2001, alors même que les effectifs globaux diminuent de 5,9 %.

L'adaptation de nos armées concerne d'abord les hommes. Avec vous, je rends hommage à l'engagement exemplaire des personnels militaires et civils pour la transformation de notre outil de défense. Cette lourde tâche s'est cumulée avec des missions nombreuses à l'étranger comme sur le territoire national, toutes assumées avec succès. L'intensité de ces engagements, alors que la professionnalisation n'est pas achevée n'est donc pas encore optimale, explique pour une bonne part la surchauffe évoquée par le général Crène en commission.

Les effectifs budgétaires du ministère de la défense s'établissent pour 2001 à 446 143. La réduction de 27 866 emplois résulte de la suppression de 39 657 postes budgétaires d'appelés et de la création nette de 11 791 emplois professionnels, civils ou militaires. Ce mouvement est rigoureusement conforme à la programmation.

Nous continuons à assurer dans de bonnes conditions les départs de cadres nécessaires pour adapter le nombre d'officiers au nouveau format des armées, mais aussi, à plus long terme, pour maintenir une pyramide des âges équilibrée. Cela concerne aussi, comme l'a souligné M. Cova, les sous-officiers. La réduction du nombre d'officiers est, elle, un peu moins importante que prévu, pour tenir compte des besoins grandissants dans certains domaines, en particulier pour assurer la présence de la France dans les structures internationales. Ces départs s'effectuent sur la base du volontariat. Le travail de formation et de reconversion réalisé au sein des armées y est pour beaucoup. L'évolution harmonieuse des effectifs tient aussi aux pécules auxquels plus de trois milliards de francs auront été consacrés au cours des quatre dernières années. Une dotation de 95,6 milliards d'euros en 2001 permettra, à elle seule, d'aider le départ de plus de 2 000 cadres.

Ce rajeunissement du personnel militaire professionnel s'accompagne d'une féminisation croissante qui constitue un élément supplémentaire d'ouverture. Avec plus de 9 % de femmes, la défense française est l'une de celles qui est la plus ouverte. Le dernier arrêté que j'ai signé permet notamment l'accès des femmes à tous les emplois de l'armée de terre. Le taux de féminisation au recrutement, voisin de 15 %, indique par ailleurs que ce mouvement progressera encore durant les prochaines années.

A tous les orateurs qui se sont interrogés sur la situation des appelés, j'indique que ceux-ci continuent de répondre de façon exemplaire à l'appel sous les drapeaux. Leur présence est indispensable à la réalisation des missions des forces armées et à une professionnalisation efficace des unités opérationnelles. Leur sens civique joue un rôle déterminant dans la réussite de la réforme engagée.

Il m'a semblé important de valoriser leur passage sous les drapeaux afin de faciliter leur insertion sur le marché du travail. C'est ce souci qui a inspiré les mesures prises en juin tendant à assouplir les reports d'incorporation pour les détenteurs d'un emploi. Mais, suivant en cela des demandes exprimées ici, notamment par le groupe socialiste, j'ai souhaité également améliorer les perspectives professionnelles des appelés n'ayant pas d'emploi stable au moment de leur incorporation. Ils pourront, dès ce mois-ci, bénéficier d'un bilan de compétences et établir un projet professionnel avec l'aide d'un tuteur qui les aidera dans leur recherche d'emploi. Ceux qui auront trouvé un emploi pourront être libérés par anticipation après huit mois de service. Pour ceux qui effectueront leur service en entier et qu'il convient d'aider à entrer dans la vie professionnelle, j'ai proposé au Président de la République et au Gouvernement, qui ont approuvé ce projet, de revaloriser de manière significative l'allocation de fin de service. D'un montant de 610 euros, elle sera versée à la fin du dixième mois, et ce dès la fin de novembre 2000 (« Très bien ! » sur les bancs du groupe socialiste).

Nos armées doivent attirer de nouvelles compétences, de nouvelles énergies. Le solde net de créations d'emplois civils et militaires s'établit à 12 000 en 2001 du fait de 19 000 créations et 7 000 suppressions. Je redis ma satisfaction de la manière dont ont lieu les recrutements, et ce dans toutes les catégories. Le nombre de candidatures reste suffisant. Le sentiment de sécurité et la certitude d'y trouver un bon encadrement poussent de nombreux jeunes à rechercher une première expérience professionnelle dans nos armées, en tant qu'engagés ou en tant que volontaires.

Pour assurer la poursuite de la professionnalisation dans de bonnes conditions, le budget 2001 comporte la création de 7 700 postes de militaires du rang, ce qui permettra d'atteindre dès 2001 90 % des postes prévus dans la loi de programmation. La création de 7 000 postes de volontaires permettra, quant à elle, d'atteindre avant fin 2002 67 % du volume prévu, sachant que les recrutements n'ont réellement commencé que fin 1998.

Il nous faudra être durablement attentifs à la situation sociale et professionnelle des militaires, et sur ce point je tiens à rassurer M. Cova. A cet égard, je remercie tout particulièrement les parlementaires qui suivent les débats du Conseil supérieur de fonction militaire. J'ai proposé à ce conseil lors de sa prochaine réunion de se prononcer sur une évolution du mode de désignation des représentants des personnels. Ceux-ci seraient désormais, si le Conseil l'accepte, désignés par scrutin par leurs pairs pour les présidents de catégories et les membres des commissions participatives d'unités.

M. Sandrier s'est inquiété de la situation des personnels civils et souhaite que les recrutements nécessaires aient lieu. 3 014 postes de fonctionnaires sont créés en 2001, soit beaucoup plus que l'an passé. Par ailleurs, j'ai obtenu l'autorisation exceptionnelle d'ouvrir 250 nouveaux emplois d'ouvriers d'Etat qui devraient profiter principalement à l'armée de terre.

Considérant que certains postes ne requièrent pas les qualifications technologiques et industrielles propres aux ouvriers d'Etat, le ministère de la défense développe également le recours aux ouvriers fonctionnaires dont le recrutement, soumis à moins de contraintes, est plus rapide. Le budget 2001 crée 1 100 emplois dans cette catégorie. Mais je tiens à souligner que le recrutement de 6 300 nouveaux fonctionnaires est prévu en 2001. Cela permettra de résorber très sensiblement le déficit existant, d'autant que nous avons largement résorbé le sureffectif en personnel civil. Nous avons par ailleurs une démarche d'externalisation, qui doit être modérée et pragmatique : aussi avons-nous adopté un guide d'externalisation, qui donne des garanties aux personnels concernés. L'externalisation ne touche bien sûr à aucun des aspects directement opérationnels. J'ajoute enfin que le programme pluriannuel « formation et mobilité » est un outil juste, dont l'efficacité est reconnue.

M. Warhouver s'est inquiété des personnels civils de droit allemand employés par les forces françaises stationnées en Allemagne. A ce jour, 75 de ces personnes sont encore inscrites à l'ANPE, alors que plus de deux mille pouvaient avoir des problèmes de reconversion. Au cours d'une réunion organisée à ma demande, le directeur général de l'ANPE s'est engagé à procéder à un examen individuel de ces dossiers.

M. Aloyse Warhouver, rapporteur pour avis - Je vous remercie.

M. Alain Richard, ministre de la défense - M. Boucheron déplore dans son rapport l'insuffisance des crédits indemnitaires. Ceux-ci feront l'objet d'un nouveau rattrapage de 30,5 millions d'euros, après celui, légèrement supérieur, opéré en 2000 : cela nous rapprochera beaucoup du niveau de ressources nécessaire. Plusieurs dispositions indemnitaires prévues dans le projet de budget pour 2001, pour un total de 13,2 millions d'euros, conforteront par ailleurs la situation des moyens humains au regard des objectifs opérationnels.

Ces mesures concernent en particulier les personnels du service de santé des armées, où l'on constate notamment un sous-effectif de médecins, qu'ont souligné MM. Carré et Meylan. C'est en grande partie un effet de la fin de la conscription, dont les conséquences se résorbent moins vite dans les spécialités à formation longue. Etant donnée l'importance de ce service dans le soutien moral et l'efficacité des armées, ainsi que son intégration croissante dans l'offre de soin au niveau national, sur lequel M. Cazeneuve nous a éclairés, nous avons engagé un plan de revalorisation sur deux ans des rémunérations des médecins, ainsi qu'une compensation accrue des gardes hospitalières. Un effort particulier a également été fait en faveur des personnels civils et des ingénieurs de l'armement, ainsi que des gendarmes. J'y reviendrai.

La sécurité intérieure est une priorité forte du Gouvernement. La participation des armées répond à l'attente exprimée par nos concitoyens. Leurs moyens humains et matériels effectuent des opérations de lutte contre les catastrophes naturelles et des missions d'assistance et de sauvetage en matière aérienne et maritime. Au quotidien, la sécurité publique est assurée, et de nombreux orateurs s'y sont montrés sensibles, par la gendarmerie, qui veille, dans des conditions appréciées de tous, à la sécurité de nos concitoyens.

A la suite du naufrage de l'Erika, le 12 décembre 1999, les plans Polmar Mer et Polmar Terre ont été déclenchés. Jusqu'à sept bâtiments de la marine sont intervenus simultanément, ainsi que de nombreux moyens de surveillance aérienne. De 1 200 à 1 600 hommes ont été déployés quotidiennement sur les plages jusqu'au mois de juin, et encore 200 hommes de juillet à septembre. Les armées ont ainsi fourni plus de 250 000 journées de travail sur le littoral atlantique. Depuis le 31 octobre dernier, les moyens de la marine sont à nouveau en première ligne, cette fois au large du Cotentin. Coordonnés par le préfet maritime de la Manche et de la Mer du Nord, avions, hélicoptères et bâtiments de surface assurent la surveillance constante de l'épave de l'Ievoli Sun.

A la lumière du drame de l'Erika, l'Etat a rapidement pris d'importantes décisions. Elles se traduisent pour le budget des armées par l'inscription de moyens supplémentaires. La marine pourra ainsi compléter ses moyens aériens par la livraison du quatrième Falcon 50 de surveillance maritime et l'acquisition d'un sixième hélicoptère Dauphin dédié au secteur public. De plus, les crédits de fonctionnement relatifs à l'assistance et à la lutte antipollution en mer seront abondés de 3,8 millions d'euros. Ces crédits contribueront notamment à compléter le dispositif de trois remorqueurs d'intervention déjà affrétés par la marine par une quatrième permanence dans le Pas-de-Calais, en partage avec les Britanniques.

Les armées et la gendarmerie sont intervenus après les tempêtes de décembre 1999. Pendant plus de trois mois, elles ont porté assistance aux personnes sinistrées, aidé à la remise en état des voies de communication et au rétablissement de l'électricité. La contribution des armées a été de 400 000 journées de travail, 1 200 heures de vol d'hélicoptère et 250 heures d'avion de transport. Je remercie les très nombreux parlementaires qui ont exprimé auprès de mon ministère leur satisfaction et leur reconnaissance pour cet effort.

Conformément aux engagements que j'ai pris au printemps dernier, le Gouvernement a décidé un effort particulier en faveur de la gendarmerie. Ne l'oublions pas, sa zone de responsabilité recevra dans les dix ans à venir au moins 80 % de la croissance de la population du pays, avec l'accroissement des charges de sécurité publique qui en résulte. Votre rapporteur, M. Lemoine, a bien voulu, sur la base d'une analyse approfondie des problèmes de la gendarmerie, souligner les efforts accomplis sous l'autorité de M. le Premier ministre, et je l'en remercie.

En premier lieu les effectifs de ce corps seront sensiblement renforcés : 1 050 postes budgétaires de sous-officiers seront ouverts en 2001, dont 500 sont pourvus par anticipation dès 2000, sans oublier cinquante gendarmes d'autoroute, comme l'a souhaité M. Vauchez. S'y ajoute le renfort de 3750 gendarmes adjoints volontaires : il permettra notamment de renforcer les zones périurbaines de 28 départements sensibles par 700 militaires supplémentaires et de compenser la diminution du nombre d'appelés. L'objectif final reste de créer d'ici la fin 2002 16 200 postes de volontaires. Ce sera là un renforcement réel des moyens disponibles, puisqu'ils remplaceront 12 000 appelés.

Il importe donc, comme l'a recommandé M. Vauchez, que l'intégration de ces volontaires dans la gendarmerie soit la meilleure possible. Des mesures en ce sens ont été prises et seront d'ailleurs renforcées, avec notamment un rallongement de la durée de formation.

Cet effort en matière d'effectifs et d'organisation sera accompagné de l'élargissement de certaines mesures indemnitaires destinées aux officiers ou aux sous-officiers de gendarmerie, à hauteur de 4,6 millions d'euros. Par ailleurs, comme je m'y étais engagé, les moyens de fonctionnement de la gendarmerie ont crû de 53 millions d'euros. Ils augmenteront à nouveau fortement en 2001, puisque les crédits nouveaux qui lui seront attribués représentent un montant de près de 68,6 millions d'euros, hors rémunérations.

Enfin, la hausse des crédits d'équipement concerne, pour 12,3 millions d'euros, les matériels nécessaires au service quotidien. Elle permettra également d'améliorer de manière significative les conditions de logement, conformément à l'attente légitime des personnels. Dans ce domaine, nous avons engagé une action ambitieuse à long terme, puisque les crédits destinés à favoriser l'engagement de programmes d'infrastructures ont été abondés en gestion 2000 de 15,2 millions d'euros. Les crédits de 2001 permettront la construction de 680 unités de logement au titre des collectivités locales. S'y ajouteront 787 unités de logements mises en chantier par l'Etat. S'agissant des délais de paiement des loyers pouvant léser certaines collectivités, j'ai engagé une évaluation précise de la situation : les problèmes qui seraient constatés seront résolus au plus tard lors du collectif de fin d'année.

M. René Galy-Dejean, rapporteur pour avis - A plusieurs reprises, Monsieur le ministre, vous avez affirmé à juste titre qu'il y avait un effort sur la condition militaire, qu'il s'agisse des armées ou de la gendarmerie, et notamment sur le niveau des rémunérations. Nous ne pouvons que nous en réjouir. Toutefois, dans le titre III, la part du fonctionnement par rapport aux ressources et charges sociales est passée, entre 1990 et aujourd'hui, de 30 % à 20 %. Je souhaite donc savoir à quel niveau vous situez la juste proportion entre ces deux grandeurs. Car vous pouvez bien continuer à augmenter les rémunérations : si vous n'augmentez pas le titre III à due concurrence, la proportion entre le fonctionnement et les RCS continuera à se dégrader.

Qu'en sera-t-il alors, si cette dérive se poursuit, du niveau d'entraînement et de la qualité première de notre armée professionnalisée ?

M. le Ministre - Je vais y revenir dans quelques instants. Mais j'observe que vous semblez confondre une réforme et une dérive... Le système de défense de 2002 n'est plus comparable à celui de 2000. Il ne faut pas raisonner en pourcentages, mais définir les besoins en capacités de financement réel des différents éléments de nos armées. Or les crédits pour 2001 permettront une remontée des activités d'entraînement. Les moyens de fonctionnement par homme sont en train d'augmenter substantiellement.

En effet le budget 2001 prévoit un redressement de l'ensemble des crédits de fonctionnement, gage d'efficacité de l'outil militaire. Nous avons en vue le défi que constitue pour nos armées nouvellement professionnalisées leur insertion réussie dans des dispositifs interalliés. Cet effort sur les moyens de fonctionnement est aussi indispensable au succès de la professionnalisation, car seules des armées entraînées, disposant de matériels de haut niveau, pourront attirer et conserver les hommes et les femmes de qualité qui leur sont indispensables.

Un crédit de 30,5 millions d'euros servira, comme l'ont noté MM. Voisin et Teissier, à accentuer l'effort engagé en 2000 pour relever les taux d'activité des armées. Celui de l'armée de terre, qui est passé en 2000 de 70 à 73 jours d'entraînement par an, sera porté à 80 jours en 2001. Le taux d'activité de la marine passera de 89 à 94 jours à la mer. L'armée de l'air, dont les taux sont déjà aux normes de l'Alliance, pourra développer les exercices interalliés afin d'accroître l'interopérabilité de ses unités.

Plusieurs orateurs, particulièrement M. Galut, dans son rapport sur l'armée de l'air, ainsi que MM. Fromion et Meylan, se sont inquiétés de l'effet de la hausse du prix des carburants sur l'activité des armées. Nous avons veillé à ce que cette activité n'en soit pas pénalisée. Le Gouvernement a trouvé des réponses : 53,3 millions d'euros ont déjà été inscrits au collectif de printemps, et des moyens supplémentaires sans doute encore supérieurs seront financés en collectif de fin d'année. Pour 2001, 106,7 millions d'euros supplémentaires ont déjà été provisionnés dans le projet de budget.

Au-delà de ce problème conjoncturel, la disponibilité des hommes et des matériels est une préoccupation essentielle des armées et du Gouvernement. Les chefs d'état-major l'ont évoqué devant la commission de la défense, ainsi que le délégué général pour l'armement. MM. Boucheron, Sandrier, Le Drian, Galut, Michel et Voisin s'en sont également souciés. Je partage cette préoccupation, et j'ai déjà engagé des réformes d'organisation. Deux structures ont été créées, dont chacune regroupe sous une autorité unique des compétences jusqu'ici dispersées : le service de soutien de la flotte, et la structure intégrée de maintien en condition opérationnelle des matériels aéronautiques de la défense. En ce qui concerne les matériels terrestres, une structure analogue sera créée dans les prochains mois. Je veillerai particulièrement aux améliorations nécessaires sur ce chapitre, et je serai à la disposition de la commission de la défense au cours des prochains mois pour lui présenter en détail les actions entreprises dans ce domaine décisif de la maintenance des matériels.

Pour les équipements, les dotations des deux dernières années et celles que je vous présente permettent d'exécuter la loi de programmation.

La manière dont nous procédons anticipe sur les réformes des procédures budgétaires examinées dans le cadre de la révision de l'ordonnance de 59 : le but n'est pas de dépenser le maximum de crédits, c'est d'atteindre les objectifs fixés au meilleur coût. C'est exactement ce que nous faisons, si bien que je comprends mal que ceux qui mettent au-dessus de tout la baisse des dépenses publiques ne soutiennent pas davantage notre démarche (Rires sur les bancs du groupe socialiste).

C'est au regard de cette préoccupation qu'il convient d'examiner les crédits des titres V et VI qui s'élèvent à 12,9 milliards d'euros en AP et 12,7 milliards d'euros en CP, en progression donc par rapport à 2000. Soulignons en outre l'impact de la baisse de la TVA sur le titre V soit, Monsieur Fromion, 61 millions d'euros, et la baisse de 38,1 millions d'euros du crédit transféré au titre du BCRD.

Si nous parvenons à réaliser les objectifs physiques de la loi de programmation avec des moyens moins importants que prévu, c'est que nous modernisons la gestion des crédits.

Les engagements d'AP avaient connu un niveau très bas en 1995, 11,9 milliards d'euros et en 1996, 9,3 milliards d'euros, et sont passés de 12,2 milliards d'euros en 1997 et 1998, à 13,1 milliards d'euros en 1999 ; cette année-là les engagements correspondaient enfin au montant des AP inscrites dans la loi de finances initiale, et il en sera de même en 2000. Ainsi, les AP sont aujourd'hui mieux consommées.

Cette masse disponible a été largement mobilisée pour le financement des 20 commandes globales, à hauteur de 9,1 milliards d'euros. La réduction du coût des programmes qui en a résulté a fait l'objet d'une appréciation positive de la Cour des comptes. Voilà justifié pleinement que pour la deuxième année consécutive, l'enveloppe des AP soit supérieure à celle des CP. Si l'écart proposé pour 2001 est moins grand qu'en 2000, c'est que l'on entre dans une période de fabrication des armements, qui succède à celle de la conception et du développement des programmes.

Aux critiques de la politique du Gouvernement, je fais observer que nous inscrivons dans la loi de finances rectificative les 3 milliards d'euros nécessaires au lancement de l'A400M, pour lequel aucune dotation n'avait été programmée. Nous dégageons donc et quand il faut les moyens nécessaires dès lors que ceux-ci trouvent effectivement un emploi... (« Très bien ! » sur les bancs du groupe socialiste) ...à l'inverse des gouvernements précédents, qui ont brutalement réduit les engagements en 1995 et 1996.

Cet effort de rattrapage va favoriser une remontée des CP. En loi de finances pour 2000, il n'aurait pas été de bonne gestion d'inscrire un montant supérieur à ce que nous savons pouvoir consommer. En 2001, la remontée des CP est en vue : l'enveloppe utile du budget 2001, a montré M. Jean Michel, est en augmentation de 1,3 % et permettra de faire face aux engagements pris dans de meilleures conditions.

Les progrès accomplis dans la nomenclature budgétaire, auxquels vous avez largement contribué, Monsieur Boucheron, facilitent la mise sous contrôle de gestion de ces programmes.

L'accent a également été mis sur l'obtention de gains de productivité au sein de la délégation générale pour l'armement, dont le coût d'intervention est estimé à 980 millions d'euros en baisse de 23 % sur la durée écoulée de la loi de programmation. L'objectif d'une réduction de 30 % sur six ans paraît donc à notre portée, Monsieur Meylan.

M. Charasse a appelé mon attention sur la situation de nos PME-PMI, fournisseurs fidèles de la Défense. Le Gouvernement travaillant à la transposition des directives communautaires, nous nous attachons à éviter toute distorsion de concurrence.

Alors que nous en sommes aux cinq dixièmes de la programmation, les priorités sont respectées : ainsi 48 Rafale auront été commandés et 11 livrés ; 41 Mirage 2000-D ont été livrés ; 37 Mirage 2000 ont été transformés en Mirage 2000/5 ; les Super-Etendard de la marine ont reçu des capacités complémentaires qui sont livrées pour 36 d'entre eux et en commande pour 21 avions supplémentaires. 3 avions de surveillance maritime et 2 avions de guet embarqué ont été commandés et livrés et 1 avion supplémentaire est commandé. Enfin un avion d'écoute Sarigue NG a été livré. 27 hélicoptères NH90 et 80 Tigre sont commandés. 2 systèmes d'hélicoptères de surveillance Horizon ont été livrés.

Monsieur Voisin, la modernisation de notre marine se poursuit : 3 frégates Lafayette auront été livrées ; le porte-avions Charles de Gaulle est en phase d'essai à la mer ; 2 frégates Horizon et la modernisation de 13 chasseurs de mines sont commandées. Par ailleurs, 300 torpilles MU90 sont commandées et 50 seront livrées.

S'agissant des moyens terrestres, la rénovation de 60 AMX 10 RC a été commandée : 20 seront réalisées en 2001. Par ailleurs, 10 radars de contrebatterie ont été commandés, un sera livré en 2001 et 4 en 2002. De 1998 à 2001, 135 chars Leclerc auront été livrés. Les 96 derniers seront commandés d'ici fin 2001 : en fin de programmation, l'armée de terre en possédera 320. 12 dépanneurs Leclerc seront livrés d'ici 2002, la première livraison ayant eu lieu en 1999.

145 missiles air-air MICA seront livrés d'ici fin 2001 et 500 commandes de missiles d'emploi général SCALP-EG ont été notifiées en 1997 et seront livrées à partir de 2003. Sur les 100 missiles Apache commandés en 1997, 29 seront livrés en 2001 et 43 en 2002. Une commande globale de 500 munitions AASM pour l'armée de l'air et de 250 munitions pour la marine a été passée cette année. Au total, nous sommes donc très avancés.

Le développement de la coopération entre les Etats européens permet lui aussi de réduire sensiblement les coûts des programmes, tout en contribuant à une plus grande homogénéité des forces de l'Union. Le lancement de la fabrication du Tigre en 1999, puis de l'hélicoptère NH 90 cette année, la commande, il y a quelques jours, du programme franco-italien de frégates Horizon et de leurs systèmes d'armes PAAMS sont des succès importants, tout comme l'engagement récent des sept pays partenaires du projet A400M en faveur du programme d'avion de transport européen.

L'entente de cinq pays pour un missile air-air de nouvelle génération commun au Rafale et à l'Eurofighter constitue un autre projet majeur, de même que la combinaison du projet franco-italien de satellites d'observation et de la décision allemande de lancer un programme d'observation radar.

La montée en puissance de l'OCCAR doit permettre de nouveaux développements de cette coopération européenne. De nouveaux partenaires européens se sont manifestés et je précise à cette occasion que l'OCCAR est bien fondé sur un assouplissement des règles de retour.

Nous souhaitons aussi jouer un rôle moteur dans la coordination de la recherche de défense au niveau européen, en réalisant au moins 25 % de notre effort de recherche dans ce cadre à partir de 2002. C'est dans cette perspective que nous avons décidé avec nos partenaires allemands de confier à l'OCCAR la conduite de programmes de recherche.

Plus globalement, c'est dans cette perspective de l'Europe de la défense, et en tirant les enseignements des opérations récentes, que nous poursuivons aujourd'hui la modernisation des équipements.

En matière de communication et de renseignement, dont l'importance a été soulignée par M. Grasset, la France dispose de capacités uniques en Europe. La décision de doter Hélios II d'une capacité de très haute résolution a été prise. S'y ajoutera la notification avant la fin de l'année du contrat pour la réalisation d'un premier satellite de télécommunications successeur de Syracuse II. Les moyens figurant dans le projet de budget permettront de poursuivre cet effort.

Les capacités en systèmes d'information et de communication permettent à la France de jouer un rôle central dans le renforcement des capacités de l'Union européenne. Certaines de ces capacités, comme le rappelait M. Chauveau, ont été mises en _uvre avec succès lors des opérations du Kosovo. Plusieurs exercices interalliés ont confirmé l'importance croissante des communications. Aussi les moyens de transmission de l'armée de terre ont-ils été commandés pour 99 sites et livrés pour 42. Il en va de même des 69 groupes de la Gendarmerie supplémentaires qui sont équipés de Rubis. De plus 24 moyens de transmission des bases aériennes ont été commandés en 1997 et 20 auront été livrés en 2001.

La commande de l'A400M permettra de préparer la relève de nos avions Transall, comme l'a souligné M. Michel, et de consolider les capacités européennes. Ce contrat pourra être officialisé dès le printemps 2001. Le mouvement correspondant vous sera soumis dans la plus totale transparence lors du collectif de printemps.

Le contrat de commande du Nouveau transport de chalands de débarquement sera signé dans les prochains jours. La maîtrise d'_uvre en est confiée à la DCN et la charge globale sera répartie à environ 50 % entre DCN et les Chantiers de l'Atlantique. Ce navire aura la possibilité d'embarquer, pour la première fois, un poste de commandement de force interarmées multinationale.

Monsieur Sandrier, la commande du véhicule de combat et d'infanterie vient d'être notifiée à GIAT Industries et à RVI. Elle concerne la production de 65 véhicules sur une cible de 700 véhicules devant équiper l'armée de terre à partir de 2005 et porte sur près de 358,2 millions d'euros dont 25,3 millions d'euros en 2001. Une nouvelle commande de chars Leclerc sera également passée dans les tout prochains jours, accélérant la cadence de livraison pour la porter à 96 chars sur la période 2000-2001, et renforçant le plan de charge de GIAT Industries. Après le retrait de certains de nos partenaires, le programme « TRIGAT » est arrêté. En revanche, EADS nous a proposé de développer le « TRIGAN » ; cette solution est en cours d'examen. Le maintien d'une capacité industrielle française et européenne dans ce secteur est une de mes fortes préoccupations.

Je mentionnerai aussi la dissuasion, pour laquelle la continuité des deux fonctions continue de prévaloir. Les deux premiers SNLE ont été livrés dans la période de programmation. La commande de SNLE-NG n° 4 a été passée en juillet, cependant que la construction du n° 3 se poursuit. Les travaux concernant l'ASMP amélioré se poursuivent selon le calendrier fixé. Quant au missile M51, le premier contrat de développement vient de s'achever, ainsi que l'indiquait M. Galy-Dejean, et la négociation est en cours pour lancer le second contrat. Voilà qui ramène les déclarations alarmistes de cet été à leur rôle de test tactique (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste). Je peux dire à M. Voisin que ce contrat sera conclu, comme prévu, avant la fin de l'année, ce qui correspond au cadrage budgétaire arrêté de longue date par mon ministère.

J'espère que M. Myard trouvera autant de force vocale pour s'en réjouir qu'il n'en a manifesté, à l'ébahissement de ses amis, en adoptant un langage extrêmement voisin de celui de l'extrême droite... (M. Myard s'exclame).

M. le Ministre - Essayez de vous contrôler !

M. Jacques Myard - C'est vous qui ne vous contrôlez pas !

M. le Ministre - Dans la discussion politique, on doit s'écouter, si l'on est maître de ses nerfs. M. Myard a donc été le seul à employer un langage très influencé pour contester, de manière je crois irréfléchie, certains aspects de la politique de défense de son pays (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe RCV).

Pour répondre à M. Galy-Dejean sur les crédits consacrés à la dissuasion, j'observerai qu'il admet lui-même que les budgets suivent de façon stricte les objectifs retenus par les autorités nationales. Tous les commentaires sont les bienvenus, mais l'application des objectifs nationaux fonde la crédibilité de notre dissuasion.

Dans le domaine du nucléaire maintenant, le ministère de la défense est aussi soucieux de la bonne information des citoyens que dans tout autre. Un décret en cours de préparation reprendra les recommandations de Jean-Yves Le Déaut. A l'exception des informations qui doivent rester confidentielles pour éviter les risques de prolifération ou pour préserver les personnes, nous nous engagerons à donner toute information utile en matière de santé publique et d'environnement.

Ainsi, cet été, l'ancien centre d'expérimentation du Pacifique a été largement ouvert à l'office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques et à des journalistes nationaux et internationaux qui ont pu constater la réalité des mesures de surveillance.

Le Gouvernement continue aussi d'_uvrer pour une industrie européenne de défense forte et compétitive, encouragé en cela par les résultats qu'il a déjà obtenus.

Les restructurations intervenues depuis trois ans dans l'industrie aéronautique et spatiale lui donnent aujourd'hui les moyens de son développement, conformément au principe d'équilibre énoncé par le président Quilès. Le groupe EADS est désormais constitué et a renforcé ses partenariats avec les industries britannique et italienne. Thomson-CSF s'est rapproché du groupe RACAL.

La France a joué son rôle dans la constitution de grands groupes capables d'affronter la concurrence mondiale. Nous avons franchi une nouvelle étape avec la signature par six pays européens de l'accord-cadre pour l'harmonisation des règles applicables aux industries de défense, qui constitue l'aboutissement de la démarche initiée en 1998.

Il faut également être attentif aux restructurations qui s'amorcent dans les autres secteurs de l'industrie de la défense. L'annonce par GIAT Industries et Renault véhicules industriels de leur intention de créer une société commune chargée des véhicules blindés à roues constitue une étape de la consolidation de l'industrie française. Je souhaite que GIAT Industries noue des partenariats avec d'autres industriels de ce secteur.

Dans le domaine de l'industrie navale de défense, les industriels français ont aussi les moyens de jouer un rôle de premier plan. C'est l'objectif de la modernisation de la DCN que j'ai engagée il y a trois ans et que M. Le Drian dans son rapport a fort bien analysée.

D'importants progrès ont déjà été réalisés. Les relations de la DCN avec la délégation générale pour l'armement sont désormais identiques à celles des autres industriels. Un avis du Conseil d'Etat est attendu sur le projet de décret relatif aux règles de passation des marchés de la DCN d'ici la fin du mois.

Le plan d'entreprise destiné à restaurer la compétitivité de DCN est en cours d'application. Il prévoit un ambitieux programme de réduction des coûts, notamment dans le domaine des achats et un plan de réaménagement des sites de DCN.

J'attache, Monsieur Le Drian, Monsieur Cazeneuve, une importance particulière à ce que les salariés de DCN et leurs représentants soient pleinement associés à ces évolutions. Cela s'est traduit par un accord, accepté par la plupart des organisations représentatives, sur la réduction du temps de travail, adapté aux missions de l'établissement.

Je suis aujourd'hui confiant dans la capacité de l'entreprise à atteindre d'ici deux à trois ans le niveau de compétitivité de ses principaux concurrents. Les succès récents à l'exportation, en particulier la vente de corvettes à Singapour, sont des signes particulièrement encourageants.

DCN sera, avec son partenaire Thomson CSF, un acteur européen majeur de la construction navale militaire. C'est le sens de la création de leur filiale commune.

Le schéma directeur des ports de la marine défini en 1999 se poursuit. C'est dans ce cadre que la commande de deux nouveaux remorqueurs pour le port de Toulon vient d'être passée. D'ici à 2002, 15 millions d'euros en moyenne par an auront été investis pour la modernisation des moyens. L'accompagnement économique des restructurations a été pris en compte dans les contrats de plan Etat-région. Près de 74 millions d'euros ont été contractualisés au profit des 12 régions les plus touchées. Les crédits du FRED sont maintenus et les fonds structurels européens sont eux aussi engagés. La SODIE et la SOFRED, sociétés de conversion, mandatées pour revitaliser les bassins d'emploi touchés par les restructurations poursuivent leur action.

Le Premier ministre a chargé le Gouvernement d'élaborer, sur la base des travaux des états-majors, une nouvelle loi de programmation militaire pour 2003-2008, qui devra prendre le relais de l'actuelle en respectant la cohérence du modèle d'armée 2015.

Cette loi doit consolider la professionnalisation, dégager des moyens pour développer l'entraînement des forces et améliorer la disponibilité des matériels. Elle doit comporter une programmation physique et financière de chacun des systèmes de force. Elle doit être cohérente avec l'Europe de la défense qui monte en puissance, comme l'a rappelé le président Quilès.

Le Parlement doit contribuer à la réflexion sur cette loi. Vous êtes nombreux à vous être exprimés en ce sens. Le Gouvernement est conscient de l'ampleur de l'effort consenti par nos concitoyens et de l'enjeu pour notre démocratie d'associer la nation tout entière à la détermination des objectifs de défense.

C'est pourquoi j'adresserai d'ici à la fin du mois à votre commission de la défense un document comportant les éléments d'analyse stratégique, les programmes d'équipement, de maintenance, d'infrastructure et d'études déjà engagées, les données liées à l'Europe de la défense et les besoins suggérés par l'évolution technologique et l'expérience opérationnelle.

Mes collaborateurs et moi-même serons à la disposition de la commission. Ses propositions seront précieuses et son travail permettra d'élargir la réflexion à l'opinion publique tout entière, ce qui est le fondement même de la démocratie.

La qualité et la clairvoyance dont témoigne le débat d'aujourd'hui, dont je remercie tous les participants, annonce la richesse et la tonicité de cette réflexion (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe RCV et du groupe communiste).

M. Jacques Myard - Il est facile d'accuser ses adversaires d'extrémisme. J'explique cela plus par votre nervosité à présenter un mauvais budget que par une analyse objective. Il reste que votre budget représente 1,75 % du PIB. Pour le M51, vous nous annoncez un contrat, mais cela fait six mois que l'industriel demande une réponse à votre administration ! (Murmures sur les bancs du groupe socialiste)

Top Of Page

QUESTIONS

M. François Rochebloine - J'aimerais évoquer la situation délicate de GIAT Industries. Les années passent, mais les inquiétudes demeurent. Le contexte général de l'industrie de l'armement est difficile.

Au plan social, le climat s'est dégradé et le personnel est démobilisé : il n'est plus en mesure d'apprécier le bien-fondé des choix stratégiques.

L'échec rapide des plans sociaux n'a pu instaurer un climat de confiance. S'y ajoutent des éléments résultant du reformatage de l'entreprise : une pyramide des âges vieillissante, une baisse du budget recherche et développement par exemple. La baisse du plan de charges, résultant de la réduction des débouchés à l'exportation, semble inéluctable au point de remettre en cause le plan social. L'Etat est tout à la fois dispensateur de crédits, actionnaire majoritaire, donneur d'ordres, régulateur et client de GIAT. Il a donc le devoir d'accompagner les mutations en amortissant les chocs conjoncturels. Les organisations syndicales, conscientes des enjeux, ont formulé des propositions constructives. Elles fondent de grands espoirs sur le programme VCI, sur la reconstruction et la rénovation des matériels et sur une anticipation des commandes de chars Leclerc.

N'ignorant pas les efforts de l'Etat, je ne peux que vous inciter, Monsieur le ministre, à exercer votre vigilance. Il en va de l'avenir du groupe, des salariés et des bassins d'emplois. Pourriez-vous préciser ici quelles sont les perspectives des établissements de la Loire ?

M. le Ministre - Le dialogue se poursuit dans d'excellentes conditions. L'Etat actionnaire a consacré 17 milliards à une recapitalisation qui assure la stabilité financière de l'entreprise. Les commandes de l'Etat ont dépassé 600 millions d'euros en 2000 et seront de l'ordre de 530 millions d'euros pour les mêmes programmes en 2001.

Vous le savez, GIAT Industries a remporté l'appel d'offre pour les VCI, et le contrat portant sur les chars Leclerc lui sera notifié cette semaine. Il n'y a donc pas lieu de modifier les orientations fixées, d'autant que les réductions d'effectifs sont faites de manière équilibrée et négociée. Ainsi, l'Etat actionnaire joue son rôle, et l'Etat client aussi. Quant aux salariés et à l'encadrement, ils réalisent un effort méritoire de restructuration et de redynamisation industrielle. Il est donc légitime de souligner qu'en cette période douloureuse, chacun a pris ses responsabilités.

M. Jacques Masdeu-Arus - Je souhaite à nouveau appeler l'attention sur les difficultés dues au blocage des négociations sur le missile M51. La société EADS s'est engagée, en juillet 1992, à industrialiser ces engins dans les conditions prévues par le programme Minos. Cependant, les négociations piétinent en ce qui concerne le renouvellement du premier contrat notifié en août 1998 pour une durée de deux ans, ce qui a déjà eu pour conséquence que le personnel des Mureaux comme celui du site d'Aquitaine ont subi des journées de chômage technique. A terme, c'est la force de dissuasion française qui peut être menacée. Qu'en est-il précisément ? Les enjeux humains et stratégiques sont considérables, puisqu'il y va à la fois de la crédibilité de la défense française et de notre avance technologique.

M. le Ministre - Comme nul ne l'ignore, l'Etat entretenait des relations suivies avec la société fabriquant ces engins, depuis de très longues années. Nous ne doutions pas que, lorsqu'elle aurait acquis les réflexes de rentabilité qui sous-tendent l'action des entreprises privées, tout en conservant son monopole technique, ses prétentions financières prendraient de l'ampleur. Sachez-le : nous n'avons pas été déçus (Sourires) et les demandes de l'EADS ont augmenté de 30 %, sans que des modifications substantielles aient été apportées au programme prévu. Là est l'objet des négociations, négociations au cours desquelles on cherche à faire feu de tout bois en utilisant tous les canaux disponibles, y compris les instances représentatives du personnel, sans, peut-être, informer aussi exactement la représentation nationale sur les montants en discussion...

Pour autant, les quelques retards antérieurs, sans gravité, du plan de charge de l'entreprise, permettront d'éviter des mesures de chômage technique prolongées, et un accord sera trouvé, soyez-en certains. Il y va, en effet, de la crédibilité d'EADS auprès de tous les gouvernements du monde ; elle ne pourra donc se soustraire aux engagements qu'elle a souscrits.

Déjà, des progrès très nets ont été accomplis dans la négociation, et les prétentions de l'entreprise ne sont plus ce qu'elles étaient. Je suis donc persuadé de pouvoir, d'ici peu, annoncer la conclusion d'un accord satisfaisant pour les deux parties.

M. Patrice Martin-Lalande - Le département du Loir-et-Cher compte un grand nombre d'établissements liés à la défense nationale. J'aimerais, Monsieur le ministre, que vous me donniez des précisions sur leur avenir.

S'agissant d'Etamat à Salbris, quel est l'état d'avancement du projet de construction des 140 igloos de stockage de munitions ? Peut-on examiner en urgence les synergies possibles entre cet établissement et ceux de Matra BAe Dynamics Salbris et de Selles-Saint-Denis ? Quel sera, d'autre part, l'avenir du site de GIAT Industries à Salbris ? Il est vital pour la commune et son bassin d'emploi que de nouvelles activités y soient créées pour compenser la disparition des huit cents emplois de l'établissement.

Je regrette que l'Etat n'ait toujours pas décidé qui doit assumer la maîtrise d'ouvrage et donc le financement de l'étude de pollution due aux faits de guerre sur le site. Je demande donc, à nouveau, au Gouvernement selon quel calendrier et dans quelles conditions l'étude de dépollution du site GIAT Industries de Salbris sera lancée, et ses résultats connus pour permettre l'utilisation du site.

Pour ce qui est de la base aérienne, quels effets sa transformation en « détachement air » aura-t-elle sur les effectifs ? Quelles seront les conséquences de l'externalisation éventuelle de certaines activités et qu'en sera-t-il pour l'entrepôt ?

Enfin, le CS10 de Blois va fermer au cours de l'été 2001 : quelle aide l'Etat compte-t-il apporter pour assurer la réutilisation du site ?

M. le Ministre - En ce qui concerne Etamat à Salbris, des abris de stockage de munitions seront effectivement construits. Le financement initialement prévu couvrait la période 2002 à 2006 ; une révision de ce calendrier est envisagée, qui aurait pour effet de construire moins d'igloos, mais dans un avenir plus proche. Les effectifs civils prévus seront de 105 personnes en 2001, et de 113 en 2013.

S'agissant du site de GIAT Industries à Salbris, le cofinancement de la dépollution est prévu dans le contrat de plan Etat-région. La FRED l'abondera, car le ministère de la défense considère avoir, en la matière, une dette à l'égard des collectivités locales concernées. Le calendrier des travaux sera précisé.

Comme prévu, la base aérienne de Romorantin-Lanthenay deviendra un « détachement air » en 2002. L'armée de l'air étudie l'externalisation de certains services non-militaires. La transformation en détachement aura pour conséquence la disparition de 44 postes militaires, mais le nombre de postes civils ne variera pas. En 2002, les effectifs complets s'élèveront à 249 militaires et 236 civils.

Enfin, les ressources du FRED, qui ne sont, pour l'instant contractualisées qu'à hauteur de 40 %, pourront faciliter la conversion du site de Blois.

M. Etienne Pinte - Je me félicite que GIAT Industries ait bénéficié de nouvelles commandes, ce qui devrait permettre de repousser sa recapitalisation, que certains estiment à 2 milliards, jusqu'à la fin de 2001. Je note cependant avec étonnement que la commission de la défense et celle des finances ont un avis divergent sur le montant exact de la recapitalisation de GIAT Industries depuis sa création en 1990, puisque la première l'estime à 17,4 milliards cependant que la seconde l'évalue à 18,5 milliards.

Deuxième question, que pensez-vous de la dévolution à GIAT Industries de l'entretien du matériel que l'entreprise fabrique elle-même ?

Troisième question, où en sont les négociations sur des commandes de chars Leclerc par la Grèce, l'Arabie saoudite, le Qatar et la Turquie ?

Enfin l'Allemagne a décidé récemment de restructurer son industrie d'armement en ouvrant les négociations à des partenaires européens. Etes-vous favorable à la création de filiales communes entre le GIAT et l'industrie allemande ? Cela permettrait peut-être de consacrer plus de fonds à la recherche.

M. le Ministre - Au moment où le GIAT a été créé, la valeur de son capital a été estimée à 1,1 milliard. Selon qu'on ajoute ou non cet apport initial aux quatre recapitalisations successives, on arrive au total de 17,4 milliards ou de 18,5 milliards.

En ce qui concerne l'entretien du matériel, la discussion porte sur ce qui peut être assuré par GIAT Industries et sur ce qui doit l'être par l'armée de terre. On va vers un accroissement de la charge d'entretien de GIAT Industries, ce qui lui assurerait un chiffre d'affaires régulier. Mais l'armée souhaitant prendre certaines précautions, le processus se déroule plus lentement que prévu.

En ce qui concerne les contrats d'exportation, les essais techniques en Grèce ont montré que le char Leclerc se situait en bonne place dans la confrontation avec ses concurrents.

En Arabie Saoudite, cette phase est dépassée, les autorités ont confirmé leur intérêt pour le char Leclerc et un groupe de travail mixte met au point les transferts de technologie et de production qui devraient accompagner cette commande.

Avec la Turquie, les négociations prennent également un tour positif ; la décision des autorités turques se fera cependant attendre plus longtemps, d'autant qu'elles ont décidé de réduire leur programme d'acquisition de blindés.

Quant aux possibilités de rapprochement européen, la ligne de conduite du Gouvernement est bien de favoriser la réalisation d'accords équilibrés entre GIAT Industries et ses partenaires. Mais ceux-ci s'interrogent sur le niveau de rentabilité de GIAT Industries, encore inférieur au leur. Nous cherchons donc à constituer des filiales communes pour le développement de certains programmes et nous espérons que cela débouchera au cours de l'année prochaine.

M. Jean-Noël Kerdraon - Je souhaiterais quelques précisions concernant l'avenir de DCN, et plus particulièrement de son établissement de Brest.

Dans le cadre du plan d'entreprise annoncé en mai 1999, il était prévu un assouplissement des règles de passation des marchés. Qu'en est-il aujourd'hui ?

Il y a quelques mois, un projet d'alliance commerciale entre DCNI et Thomson-CSF a été annoncé, mais il semble se heurter à certaines difficultés. Quel sera le calendrier de constitution de la société commune ?

En ce qui concerne l'établissement de Brest, le niveau d'activité est très bas, dans la sous-traitance des emplois disparaissent. Heureusement qu'un plan social élaboré en 1997 accompagne les salariés. Si à moyen terme les perspectives sont meilleures avec les commandes de NTCD et la construction d'un second porte-avions, j'aimerais connaître quelles activités pourraient être confiées à cet établissement dans l'intervalle. Il serait cohérent que les Chantiers de l'Atlantique, qui connaissent actuellement une forte activité, en confient une partie à Brest.

M. le Ministre - La réforme se poursuit avec deux priorités : d'une part, la constitution d'une société commune avec Thomson-CSF, qui est pratiquement acquise et va demander un effort financier important à Thomson-CSF, d'autre part, un programme de réduction des coûts accompagné par des investissements importants et une adaptation du régime d'achats de DCN. Les aménagements au code des marchés publics entreront en vigueur à la fin de l'année.

Un plan de formation interne mobilise de nombreux salariés. L'acquisition de nouvelles compétences passe aussi par le recrutement de jeunes : 100 techniciens contractuels ont été ainsi recrutés en 2000.

DCN devrait ainsi atteindre dans les prochaines années le niveau de compétitivité de ses principaux concurrents, tout en confirmant son excellence sur le plan technologique.

Les commandes très importantes passées en 2000 -les NTCD, les frégates Horizon, le quatrième SNLE, les corvettes pour Singapour- représentent plus de 30 milliards de francs. L'établissement de Brest retrouvera son niveau d'activité normal fin 2001. Pour le début de l'année, nous espérons pouvoir lui apporter, par des mesures que je préciserai dans les prochaines semaines, une charge de travail supplémentaire de 300 000 heures.

M. Michel Dasseux - La professionnalisation des armées nous ont conduit à imaginer une nouvelle organisation des réserves militaires. La loi du 22 octobre 1999 et le décret du 13 septembre 2000 ont fixé la nature et le rôle des réserves opérationnelles et citoyennes.

Pouvez-vous nous préciser par armée les sommes prévues pour la réserve opérationnelle ? Les effectifs comptabilisés à ce jour répondent-ils aux prévisions, notamment pour les hommes du rang ?

Le décret sur le Conseil supérieur de la réserve militaire a été publié. Vous avez désigné son secrétaire général. Les réservistes attendent beaucoup de la mise en place de cet organisme, qui devra rapidement trouver des solutions pour répondre à leurs interrogations et inquiétudes. Quand comptez-vous l'installer ?

Enfin, s'agissant du lien nation-armée, la « journée nationale du réserviste » verra-t-elle le jour en 2001.

M. le Ministre - Les crédits totaux consacrés aux réserves sont en augmentation de 13 %, conformément à la programmation. L'effort porte, cette année, sur la gendarmerie et les services de santé, dont les crédits affectés aux réserves augmenteront de 50 %.

En ce qui concerne les effectifs, les disponibilités sont très bonnes pour les personnels officiers, satisfaisantes pour les sous-officiers, plus préoccupantes pour les militaires de rang, sauf dans la gendarmerie. Il nous faut passer de l'ancien système de réserve de masse, où seuls les cadres étaient formés, à une réserve concernant toutes les catégories. Nous allons donc faire un effort de communication pour attirer des jeunes.

Avec Jean-Pierre Masseret, nous allons installer le Conseil supérieur de la réserve militaire dans des locaux adaptés à son fonctionnement le 4 décembre prochain. Ce sera un lieu de dialogue unique en son genre, où seront représentés les parlementaires, les organismes socio-professionnels, les associations de réservistes, et nous voulons en faire un support essentiel du lien armée-nation.

Toujours avec Jean-Pierre Masseret, nous pensons organiser une journée nationale du réserviste au cours de l'année 2001.

M. Robert Gaïa - Le chantier de rénovation ouvert à DCN n'aboutira pas sans la mobilisation des personnels, des élus locaux et des acteurs socio-économiques. Il faut pour cela dissiper les rumeurs qui affectent le moral de tous les partenaires, et présenter une réforme lisible, assortie d'un échéancier à court, moyen et long terme. L'absence d'embauches de jeunes alors même que les mesures d'âges, certes nécessaires, ont continué, laisse craindre une perte des savoir-faire. Après le conflit de 1998, le besoin d'emploi de Toulon, dans lequel les industries de défense et DCN en particulier jouent un rôle moteur, a besoin de perspectives claires.

Qu'en est-il de la création de la société commune Thomson-CSF-DCN pour les frégates Horizon ? Les difficultés que fait actuellement l'administration aux nombreux salariés volontaires pour intégrer la nouvelle structure risquent de pénaliser ceux qui ont choisi avec enthousiasme de se projeter dans l'avenir.

Qu'en est-il de la vente et de la remise à niveau des avisos ? Cette tâche devait être confiée à la DCN de Toulon, conformément au relevé de conclusions du conflit de 1998.

Qu'en est-il des IPER à Toulon du porte-avions Charles de Gaulle ? Sont-ils remis en cause ?

Qu'en est-il des IPER et des IE des SNA qui représentent 30 % du chiffre d'affaires de DCN à Toulon et sont perçus par beaucoup comme un pôle d'excellence ? Ces travaux, qui peuvent être programmés, autorisent une meilleure productivité que l'entretien des navires de surface.

Qu'en est-il de la réparation de ceux-ci ? Les IPER des bâtiments Cassard, Courbet, Somme-Ouragan ont déjà été reportés plusieurs fois.

Il ne s'agit nullement d'opposer Toulon à Brest ni d'entretenir une concurrence malsaine entre les deux sites. Mais du flou naît l'inquiétude. Si les personnels ne sont pas réfractaires à l'évolution de leurs métiers, ils ont besoin de lisibilité, d'engagements et d'échéanciers.

M. le Ministre - La restructuration de DCN s'opère conformément aux objectifs fixés.

La contribution de la société Thomson CSF-DCN est imminente : l'accord doit être conclu dans les tout prochains jours.

Pour le maintien et le renouvellement des compétences, le plan de formation interne qui inclut notamment des formations longues, sera l'élément-clé.

S'agissant du plan de charge, le programme d'entretien des sous-marins nucléaires d'attaque sera respecté. Le porte-avions Charles de Gaulle a rejoint Toulon et les modalités de sa maintenance sont à l'étude.

L'entretien des bâtiments de surface a, pour sa part, connu des difficultés, liées notamment à la passation de marchés de sous-traitance. Ces difficultés sont en voie de résolution. Le carénage et la modernisation de la frégate Cassard ainsi que le carénage de la frégate Courbet pourraient ainsi débuter début 2001.

Les recrutements se poursuivent dans les métiers stratégiques de DCN Toulon. Ainsi dix ingénieurs et vingt techniciens sont-ils en train d'être recrutés dans le domaine des bureaux d'études et de la propulsion nucléaire.

M. Bernard Grasset - Les effectifs du service de santé des armées passeront de 18 451 en 1996 à 13 509 en 2002. Beaucoup des personnels qualifiés actuels devront être remplacés par des militaires.

Malgré l'augmentation notable des postes ouverts au concours et l'accélération des recrutements de médecins diplômés dès 1997, le nombre de médecins des armées est aujourd'hui inférieur aux effectifs budgétaires théoriques. Il manque actuellement 161 médecins d'active par rapport à l'effectif moyen.

Peut-on escompter une résorption rapide du sous-effectif de médecins de façon que le niveau de sécurité dans les établissements réponde aux normes en vigueur ?

Depuis la parution du décret du 20 mars 2000 créant un corps de chirurgiens-dentistes, comment se déroulent les recrutements ?

Les mesures des prochains budgets permettront-elles de poursuivre la montée en puissance des para-médicaux civils, dotés d'un nouveau statut, et de pérenniser les conditions actuelles de recrutement des infirmiers et techniciens des hôpitaux des armées ?

Enfin, quelles sont les perspectives des personnels de santé dans la nouvelle réserve ?

M. le Ministre - Nous avons augmenté de 140 le nombre de places offertes au concours. Le nombre de postes pourvus n'est pas encore connu pour 2000 mais en tout état de cause, le nombre de postes ouverts sera reconduit en 2001.

Nous avons par ailleurs amélioré la rémunération des gardes -les intéressés recevront 5 000 francs de plus par mois dès lors qu'ils auront effectué au moins quatre gardes- et les perspectives de carrière en créant 220 postes de médecin principal en 2001 et 2002. Ces mesures étaient nécessaires pour contrer la désaffection observée et rendre les carrières hospitalières militaires aussi intéressantes que les carrières civiles.

Le corps des chirurgiens-dentistes des armées a en effet été créé en 2000 et nous avons d'ores et déjà prévu des recrutements en 2001 pour combler les postes vacants.

Quant aux postes de techniciens et infirmiers des hôpitaux des armées, nous en avons créé 191 en 1999, 225 en 2000 et allons en créer 217 en 2001.

Vous le voyez, le service de santé des armées disposera d'un niveau d'encadrement correspondant à son volume d'activité.

M. Patrice Martin-Lalande - Le maintien de la production de missiles par Matra BAe Dynamics -MBD- en Sologne préoccupe les salariés, les habitants du bassin d'emploi de Salbris et leurs élus, en particulier le maire de Salbris, Jean-Pierre Albertini, et le conseiller général, maire de Selles-Saint-Denis, Michel Leroux.

Des évolutions sont inévitables du fait de la baisse considérable des commandes de missiles par l'armée française et de la restructuration mondiale en cours, avec notamment la constitution heureuse du géant européen EADS.

Mais comment le Gouvernement peut-il à la fois soutenir la création d'EADS et priver en même temps sa composante MBD d'un marché qui a été attribué à SAGEM, alors qu'il aurait été indispensable à Salbris ?

Le bassin d'emploi de Salbris a été traumatisé par la fermeture de GIAT avec 800 emplois, de l'entreprise SM5 avec 250 emplois, de l'entreprise La Solognote avec 100 emplois et de quelques autres sous-traitants. Il serait injuste et très mal supporté qu'il soit à nouveau mis à contribution.

Salbris et Selles-Saint-Denis ont des atouts nouveaux qui doivent être pris en compte dans les scénarios à l'étude. MBD se trouve maintenant située dans une zone éligible aux aides européennes d'objectif 2, à la prime d'aménagement du territoire et aux aides régionales « fonds sud », ce qui les rend compétitives par rapport à d'autres sites concernés par la restructuration.

Je souhaite aussi que les scénarios intègrent les possibilités de synergie entre MBD Salbris et Selles-Saint-Denis et l'Etamat de Salbris.

Que compte faire le Gouvernement pour élaborer d'urgence une stratégie gagnante à la fois pour MBD et pour le bassin d'emploi de Salbris et Selles-saint-Denis ?

M. le Ministre - Un pôle européen missilier va être constitué, rassemblant en France les activités de MBD et d'Aérosptiale-Matra Missiles. Le Gouvernement dialogue actuellement avec EADS sur ce sujet.

Le plan de rationalisation devra être fondé sur les perspectives de marché à moyen terme, et non pas seulement à court terme où l'on observe en effet un creux de commandes. Mais on peut raisonnablement penser que celles-ci repartiront dans les prochaines années, étant donné la valeur technologique des matériels produits.

Il faudra veiller à la valorisation des compétences des personnels sur tous les sites concernés. Celui de Salbris, compte tenu des difficultés du bassin d'emploi, mérite en effet une attention particulière. Si des réductions d'effectifs ont lieu, ce qui sera inévitable, le traitement social devra être exemplaire : le Gouvernement y veillera et demandera à EADS d'y veiller également.

M. Jean-Claude Viollet - Le 24 octobre au salon « Euronaval », et encore aujourd'hui, Monsieur le ministre, vous indiquiez que les mutations en cours au sein de DCN étaient en bonne voie. En effet, sa nouvelle organisation en service à compétence nationale est en place depuis le 12 avril et ses relations avec la DGA sont désormais identiques à celles des autres industriels du secteur de la défense. DCN dispose en outre d'un Conseil stratégique pour l'aider dans ce processus de réforme et dans la définition de sa stratégie. Le plan d'entreprise, destiné à restaurer sa compétitivité, est mis en _uvre. D'ici la fin de l'année, les premières mesures d'adaptation du code des marchés publics devraient permettre à DCN de fonctionner autant que possible comme une entreprise. Enfin DCN a mis en place avec succès une démarche d'aménagement et de réduction du temps de travail, après négociation avec les syndicats et large consultation des personnels.

DCN devrait en outre devenir rapidement, avec son partenaire Thomson-CSF, un acteur majeur du paysage européen de la construction navale militaire. Je suis donc, comme vous, confiant envers sa capacité d'atteindre, d'ici deux ou trois ans, le niveau de compétitivité de ses principaux concurrents.

Dans ce contexte nouveau, que certains n'osaient pas même espérer en 1997, DCN-Ruelle bénéficie d'atouts certains, avec ses trois matériels « maison » : le système de lancement vertical des missiles SYLVER, le système d'aide à la manutention des hélicoptères SAMAE et les systèmes intégrés de conduite de commandes des bâtiments de surface et des sous-marins.

Mais des interrogations subsistent. Elles portent sur les partenariats, voire les alliances, que devra nécessairement envisager DCN, à l'exemple de notre industrie aéronautique. Mais elles concernent aussi le statut de DCN. Son directeur M. Poimboeuf a clairement indiqué que le service à compétence nationale n'était qu'une étape et évoqué la prise de personnalité juridique, ce qui ne saurait remettre en cause le statut des personnels. Alors que DCN est à nouveau résolument engagée dans une évolution positive, il faut que vous apportiez rapidement les éclairages indispensables sur ces deux points.

M. le Ministre - L'effort de réforme conduit au sein de DCN a permis de faire de sa transformation en service à compétence nationale une étape fructueuse. Il faut bien noter que le marché de la construction navale militaire est stabilisé ; il pourrait même connaître des remontées. Et DCN s'est maintenue à un niveau d'excellence technologique, qu'illustrent les produits que vous avez cités. Vous évoquez ses partenariats. Compte tenu de son statut d'entreprise d'Etat, elle en a d'importance, avec une entreprise italienne pour la torpille MU-90, avec une société espagnole pour les sous-marins, sans oublier la frégate Horizon. D'autres contrats se développent, qui devraient permettre à DCN d'intégrer de plain-pied le paysage européen du naval militaire. Son projet de société commune avec Thomson-CSF accroîtra sa capacité d'alliance, et je me réjouis que ce projet entre dans sa dernière étape.

A plus long terme, les réformes que nous faisons, et les effets positifs de la création du service à compétence nationale, nous conduisent à rechercher une solution plus durable, qui permette à DCN, entreprise d'Etat, de conclure des alliances plus intégrantes avec ses partenaires industrielles. Dans la décennie qui s'ouvre, la consolidation de l'industrie navale militaire ira plus loin, selon une évolution analogue à celle qu'a connue l'aéronautique. La réflexion doit donc se poursuivre, et là réside l'intérêt du conseil stratégique. DCN recherche les meilleurs outils à long terme pour être, à la hauteur de ses capacités technologiques, un acteur majeur de la consolidation du naval militaire en Europe.

M. Yann Galut - Je souhaite appeler votre attention, Monsieur le ministre, sur la situation des industries de défense dans le Cher. Ce département a en la matière une longue tradition, avec trois sites industriels, dont GIAT Industries et EADS. Mais des milliers d'emplois ont été perdus depuis quinze ans, et le département a connu une baisse historique de population.

Depuis deux ans, en concertation avec les parlementaires, et notamment mon collègue Sandrier, vous impulsez une politique de diversification, et je tiens à saluer le travail des délégués interministériels successifs, ainsi que des délégués régionaux, pour la restructuration des industries de défense. Bourges a bénéficié des mesures décidées par le CIAT de 1998, et je rappelle à cette occasion mon attachement au projet de création d'une école de l'Internet. Mais il est fondamental que la France conserve ses compétences reconnues en matière d'industries de défense, afin de ne pas laisser ces compétences à un seul pays. Je souhaite donc connaître votre réflexion sur l'avenir de GIAT, concernant plus spécialement l'artillerie du futur, et d'EADS, en ce qui concerne particulièrement les missiles.

M. le Ministre - Vous avez évoqué le contexte d'ensemble où s'inscrit le redéveloppement économique du Cher. Il est exact qu'il a bénéficié des mesures CIAT de 1998, qui seront sans doute complétées par d'autres, favorisant la différenciation industrielle. Tel est l'environnement où s'inscrit l'action propre du ministère de la défense.

Vous m'interrogez sur l'avenir de GIAT Industries dans le domaine de l'artillerie. Globalement, le niveau de commandes de l'Etat à GIAT Industries est supérieur aux prévisions du plan stratégique. La montée en puissance des programmes d'artillerie AUF1 et AUF2, Caesar et Bonus confortent à moyen terme les activités de GIAT en matière d'artillerie, notamment sur les sites de Bourges et de La Chapelle. De façon générale, le marché de l'armement terrestre est en repli et s'oriente vers des produits à plus haut contenu technologique. Dans ce contexte, il importe que GIAT Industries cherche des partenariats pour développer de nouveaux produits en partageant les frais de développement. C'est une condition nécessaire pour être compétitif par rapport à ses grands concurrents mondiaux. Ce constat s'applique particulièrement aux équipements et sous-systèmes comme les armes et munitions.

Pour ce qui est de la branche missilière d'EADS en France, elle est constituée de MBD France et de la société Aérospatiale Matra Missiles. Un pôle missilien européen va se constituer en regroupant, avec les activités françaises, celles de MBD en Grande-Bretagne et les capacités italiennes de Finmeccanica. Cela permettra de constituer un acteur de taille mondiale, capable de concurrencer les groupes américains de ce secteur ; telle est la voie de l'avenir. Le Gouvernement sera vigilant pour que les capacités industrielles françaises soient valorisées dans ce nouvel ensemble, notamment celles présentes en région Centre. C'est l'objet des discussions que nous avons avec les dirigeants d'EADS, et dont j'espère qu'elles déboucheront prochainement sur des perspectives positives pour le bassin d'emploi de Bourges.

M. Bernard Cazeneuve - Je souhaite en premier lieu appeler votre attention sur les conséquences de la professionnalisation des armées sur certains établissements, notamment le centre hospitalier des armées de Cherbourg. Du fait de la professionnalisation, nombre de structures hospitalières sont privées du concours des appelés, mais aussi des médecins militaires, de plus en plus présents sur les théâtres d'opérations extérieures. La décision de l'Etat de mettre fin aux activités des centres hospitaliers des armées -à l'exception des centres d'instruction- a des conséquences pour certains bassins sanitaires, dont celui de Cherbourg. Si nous sommes satisfaits de votre engagement de maintenir tous les moyens de la carte sanitaire dans cette ville, je me demande si tous les moyens nécessaires au fonctionnement du centre hospitalier des armées lui seront assurés jusqu'à sa fermeture prévue en juillet 2002. C'est indispensable, l'hôpital civil Louis Pasteur connaissant une surcharge d'activité qu'aggravera l'obligation qui lui est faite d'absorber en 2002 les activités chirurgie et maternité du centre hospitalier de Valognes.

Ma seconde question concerne l'établissement cherbourgeois de DCN. Le choix, fait par le plan d'entreprise de DCN, de recentrer l'activité des établissements sur les c_urs de métiers, et de recourir à la sous-traitance, n'a de sens que si les compétences essentielles sont maintenues dans les établissements. Comment entendez-vous dynamiser la pyramide des âges qui permettra, au sein de l'établissement, le maintien des compétences ?

M. le Ministre - Concernant le centre hospitalier des armées, je confirme l'engagement de maintenir son activité de soins au niveau actuel jusqu'à la fermeture, le 30 juin 2002. Dans certains services la demande de soins augmente, mais ils y font face conformément aux directives, qui ne sont pas remises en cause. Nous disposons de ce délai d'un peu moins de deux ans pour que s'opère la transition avec la montée en puissance de l'hôpital civil, et je poursuis la concertation à ce sujet avec le secrétariat d'Etat à la santé.

Le plan de modernisation de DCN va conduire l'entreprise à se recentrer sur son c_ur de métier, c'est-à-dire sa compétence de systémier et de réalisateur de navires militaires complexes. De ce fait, DCN passera avec ses sous-traitants de plus en plus de contrats de sous-traitance globale. Ce changement pourra susciter des difficultés d'adaptation, mais c'est une voie obligée.

DCN doit aussi se doter de compétences nouvelles. Ainsi, nous sommes en train, à Cherbourg, d'embaucher des techniciens pour l'ingénierie de construction noble, et dix autres spécialistes dans des métiers stratégiques. Cette demande devra se poursuivre pour que les grands établissements de DCN disposent des moyens humains nécessaires au développement de leurs compétences.

M. Bernard Grasset - La place grandissante occupée par les femmes dans notre société et la professionnalisation des armées ont conduit à supprimer la limitation de l'accès des femmes aux carrières militaires. Notre armée est ainsi la plus féminisée d'occident après celle des Etats-Unis. Quels sont les pourcentages d'emploi dans les différentes armes ? Des contraintes pèsent-elles encore sur une accessibilité encore plus étendue ? Les aménagements nécessaires des infrastructures et des matériels militaires sont-ils prévus dès leur conception ?

M. le Ministre - Je vous transmettrai le détail des répartitions d'emplois entre hommes et femmes dans les différentes armes. C'est dans l'armée de l'air et dans la marine que les femmes entrent en plus grand nombre, l'armée de terre venant après. Le mouvement s'amorce dans la gendarmerie.

Nous avions besoin de concevoir tout l'environnement professionnel en fonction de cette féminisation, qui est certainement l'un des meilleurs acquis de la professionnalisation, parce qu'elle transforme en profondeur la relation entre la nation et la communauté de défense, désormais davantage à l'image de la société française active.

Chaque projet d'infrastructure tient à présent compte de la mixité. Cependant l'égalité de chances et de capacités entre hommes et femmes appelle encore des progrès sur deux points : d'abord le soutien familial à apporter aux femmes retenues par les missions de longue durée ou des engagements à horaires exceptionnels, l'égal déroulement de carrière compte tenu de l'interruption causée par des périodes de maternité. Cette question va se poser de plus en plus dans les prochaines années. Ces interruptions de services ne doivent pas constituer un handicap de carrière. Je travaille à adapter les rythmes d'avancement en fonction de cette réalité.

M. Jean-Claude Viollet - La direction de la SNPE a annoncé l'arrêt de production de son site d'Angoulême pour la fin 2002, et sa fermeture en 2005. J'ai déjà regretté le désengagement continu de la SNPE. J'ai ainsi proposé d'_uvrer sans délai à la redynamisation de ce site. Celle-ci passe d'abord par un plan de dépollution, sur lequel l'Etat doit s'engager ; ensuite par une meilleure lisibilité du plan de charge de l'établissement jusqu'à son arrêt de production, les commandes ne devant pas être détournées par anticipation vers d'autres établissements, encore moins refusées ; enfin par la réutilisation de 200 hectares du site, aujourd'hui reconnu d'intérêt communautaire par la jeune communauté d'agglomération du grand Angoulême, qui pourrait être assumée par la société d'aménagement dont j'ai proposé la création.

Tous ces éléments conditionnent le plan social actuellement envisagé, qui doit pour finir offrir un reclassement de qualité à tous les salariés, lesquels n'ont déjà que trop souffert de six plans d'adaptation. Alors qu'un comité de site de l'industrie de l'armement doit se tenir après-demain à Angoulême, pouvez-vous confirmer l'engagement de l'Etat sur ce dossier ? Les salariés de la SNPE, les élus de la Charente seront attentifs à votre réponse.

M. le Ministre - Cette décision de fermeture, qui correspond au faible niveau des commandes militaires, doit faire l'objet de mesures de compensation et d'accompagnement du meilleur niveau. Des propositions soutenues par le Gouvernement, présentées à un récent comité d'entreprise, ont débouché sur un accord de réduction de 20 % du temps de travail sans baisse de salaire et sur la majoration des primes de mobilité et de départ volontaire. La fermeture, étalée sur cinq ans, touche 153 personnes. Celles qui ne bénéficient pas du départ à 55 ans se verront proposer un poste dans le groupe SNPE et deux postes dans le bassin d'emploi d'Angoulême. Il n'y aura donc pas de mutation ou de départ imposés jusqu'au prochain comité central d'entreprise, qui se tiendra à la fin du premier semestre 2001.

S'agissant de l'avenir du site, une étude de sol est en cours et une étude d'ensemble sur sa réindustrialisation associera la SNPE, les élus locaux et l'Etat. J'ai déjà décidé la construction sur le site d'un four d'incinération de certains déchets.

A partir de cette étude d'ensemble, nous pourrons, avec les moyens du FRED et l'aide des sociétés de développement, établir un programme exemplaire de réindustrialisation.

Mme Françoise Imbert - Elue du secteur ouest de Toulouse, où est implanté EADS, je me préoccupe de la réalisation du programme de l'A400M. Je me félicite de l'inscription de 20 milliards dans la loi de finances rectificative, qui consolide ainsi les progrès de l'Europe de l'armement. J'y vois le signe d'un engagement politique fort.

Comment la région toulousaine, fleuron de l'industrie aéronautique, pourra-t-elle bénéficier de la réalisation de ce programme ?

M. le Ministre - Le programme A400M est un élément déterminant de l'avenir d'Airbus, même si la composante militaire ne représente plus qu'une partie réduite de l'activité du groupe. Ce savoir-faire nouveau dans les avions de transport militaires offre à Airbus et à EADS des moyens prometteurs de diversification, qui pourront bénéficier aux prochaines générations d'avions civils. De plus ce programme militaire permet à Airbus de réduire la variabilité conjoncturelle de son activité, l'aéronautique civile étant une industrie cyclique.

Ce programme sera conçu et géré à Toulouse. L'équipe de programme intergouvernementale, destinée à préparer le contrat qui devrait être signé avant la fin du premier semestre 2001, s'installe à Toulouse. Cette équipe, placée sous la direction d'un Allemand, pilotera ensuite le développement du programme.

Les avions seront montés à Séville, mais les compétences et l'excellence technologique des sites de Toulouse et de leurs salariés trouveront à s'employer dans ce programme. Nous le vérifierons bientôt.

M. le Président - J'appelle les crédits du ministère de la défense.

L'article 33, mis aux voix, est adopté.

M. Jean-Claude Sandrier - Le groupe communiste s'est abstenu.

Top Of Page

ART. 34

M. Jean-Claude Sandrier - Le groupe communiste s'abstiendra.

Les crédits inscrits au titre V, mis aux voix, sont adoptés, de même que les crédits inscrits au titre VI.

L'article 34 est adopté.

M. le Président - Nous avons terminé l'examen des crédits du ministère de la défense.

Top Of Page

DÉSIGNATION D'UN CANDIDAT À UN ORGANISME EXTRAPARLEMENTAIRE

M. le Président - M. le Président a reçu de M. le Premier ministre une demande de désignation d'un membre de l'Assemblée nationale au sein du Haut conseil de l'évaluation de l'école.

Conformément à l'alinéa 2 de l'article 26 du Règlement, M. le Président a confié à la commission des affaires culturelles, familiales et sociales le soin de présenter un candidat.

La candidature devra être remise à la Présidence avant le mercredi 15 novembre 2000, à 18 heures.

La suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2001 est renvoyée à la prochaine séance, qui aura lieu demain à 9 heures.

La séance est levée à 18 heures 35.

                      Le Directeur du service
                      des comptes rendus analytiques,

                      Jacques BOUFFIER

Top Of Page

ORDRE DU JOUR
DU MARDI 7 NOVEMBRE 2000

A NEUF HEURES : 1ère SÉANCE PUBLIQUE

1. Suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2001 (n° 2585).

M. Didier Migaud, rapporteur général au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du plan. (Rapport n° 2624.)

. Affaires étrangères

M. Yves Tavernier, rapporteur spécial au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du plan. (Annexe n° 1 du rapport n° 2624.)

M. Pierre Brana, rapporteur pour avis au nom de la commission des affaires étrangères. (Tome II de l'avis n° 2626.)

- Coopération et développement

M. Maurice Adevah-Poeuf, rapporteur spécial au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du plan. (Annexe n° 3 du rapport n° 2624.)

M. Jean-Yves Gateaud, rapporteur pour avis au nom de la commission des affaires étrangères. (Tome III de l'avis n° 2626.)

- Affaires étrangères et coopération

M. Bernard Cazeneuve, rapporteur pour avis au nom de la commission de la défense nationale et des forces armées. (Tome I de l'avis n° 2627.)

- Relations culturelles internationales et francophonie

M. Patrick Bloche, rapporteur pour avis au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales. (Tome I de l'avis n° 2625.)

M. Georges Hage, rapporteur pour avis au nom de la commission des affaires étrangères. (Tome IV de l'avis n° 2626.)

2. Fixation de l'ordre du jour.

A QUINZE HEURES : 2ème SÉANCE PUBLIQUE

Questions au Gouvernement.

A VINGT ET UNE HEURES : 3ème SÉANCE PUBLIQUE

Suite de l'ordre du jour de la première séance.


© Assemblée nationale