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Session ordinaire de 2000-2001 - 23ème jour de séance, 50ème séance

2ème SÉANCE DU JEUDI 9 NOVEMBRE 2000

PRÉSIDENCE de M. Yves COCHET

vice-président

Sommaire

          LOI DE FINANCES POUR 2001 -deuxième partie- (suite) 2

          TRAVAIL ET EMPLOI (suite) 2

          QUESTIONS (suite) 2

          EMPLOI 7

          ART. 57 7

          ART. 58 8

          APRÈS L'ART. 59 9

          ORDRE DU JOUR DU VENDREDI 10 NOVEMBRE 2000 11

La séance est ouverte à vingt et une heures.

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LOI DE FINANCES POUR 2001 -deuxième partie- (suite)

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2001.

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TRAVAIL ET EMPLOI (suite)

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QUESTIONS (suite)

M. Jean-Luc Reitzer - J'ai dit plusieurs fois, et depuis des années, à Mme Aubry, les préoccupations des 160 000 frontaliers -dont 95 000 travaillent en Suisse. Ils sont une chance pour la France, puisque ce sont là 160 000 emplois assurés, mais la France le leur rend mal. Non seulement l'entrée en vigueur de la CMU a eu pour effet que leur affiliation à la sécurité sociale a été supprimée mais encore la France ne leur accorde pas la liberté de choix entre l'adhésion au système de soins suisse et l'adhésion au système du pays de résidence. Quelles mesures le Gouvernement compte-t-il prendre pour régler ce problème ? Et comment entend-il faire cesser l'injustice flagrante subie par les travailleurs frontaliers ayant travaillé en Suisse, dont l'allocation d'indemnisation du chômage est réduite d'un quart par rapport à celle que perçoivent tant les salariés travaillant en France que les frontaliers ayant travaillé dans les pays membres de l'Union européenne ?

Après tant d'interventions, tant de réunions, tant de promesses de votre prédécesseur, où en est-on, Madame la ministre ? Des milliers de frontaliers attendent votre réponse.

M. Jean-Pierre Baeumler - Moi aussi !

Mme Nicole Péry, secrétaire d'Etat aux droits des femmes et à la formation professionnelle - Les travailleurs frontaliers antérieurement occupés en Suisse sont indemnisés par la France sur la base d'un salaire réel affecté d'un coefficient de minoration. La commission paritaire nationale du régime d'assurance chômage a amélioré leur situation par une décision prise le 17 septembre 1998, qui rend les niveaux réels d'indemnisation conformes aux indemnisations moyennes des salariés ayant travaillé et cotisé en France.

M. Jean-Luc Reitzer - Ce n'est pas exact.

Mme la Secrétaire d'Etat - La Suisse s'acquitte chaque année, envers l'UNEDIC, d'une rétrocession qui, en 1999, s'est élevée à quelque 473 880 millions de francs français. Il est vrai que le groupement des frontaliers suisses plaide pour l'identité de traitement avec les frontaliers de l'Union européenne, indemnisés sur la base du salaire réel total.

Par ailleurs, les frontaliers occupés en Suisse ne peuvent prétendre à l'allocation « chômeurs âgés », car la Suisse n'a pas ratifié le traité de Porto sur l'espace économique européen. De ce fait, les périodes validées au titre du régime suisse d'assurance vieillesse ne sont pas prises en compte par le régime français. Cependant, une évolution de cette situation est prévisible depuis que la Suisse a adopté, en juin 1999, certains accords sectoriels avec l'Union européenne, portant notamment sur la libre circulation des personnes. Sous réserve que ces accords soient ratifiés par la France, les frontaliers antérieurement occupés en Suisse bénéficieront d'une indemnisation identique à celle des travailleurs frontaliers qui ont été occupés dans l'Union européenne, ainsi que de la validation des périodes pendants lesquelles ils ont cotisé au régime suisse.

Je tiens à votre disposition, Monsieur le député, une réponse écrite plus détaillée à ces questions très techniques.

Mme Odile Saugues - Dans des PME, dans des grandes entreprises et parfois dans des services publics, des salariés sont victimes de harcèlement moral.

Mis à l'écart, contraints à la démission, humiliés, dépossédés de leurs dossiers, insultés, poussés à la faute, ces salariés n'osent plus s'exprimer. Ils paient parfois leur engagement syndical, leur liberté de parole, mais, le plus souvent, ils paient le fait que le chef d'entreprise veut éviter un licenciement économique... Qu'ils soient cadres supérieurs, employés ou ouvriers, certains sont cassés à vie. Pour d'autres, les conséquences de ces brimades sont pires encore.

Oui, le harcèlement moral existe dans l'entreprise et il a été trop longtemps tu. Aussi, Madame la ministre, pouvez-vous nous dire de quels moyens vous disposez, dans ce budget, pour lutter contre de telles pratiques ? Quels moyens nouveaux seront affectés à l'inspection du travail et à la médecine du travail ? Considérez-vous, par ailleurs, que notre arsenal législatif actuel est suffisant pour faire cesser les souffrances des salariés ainsi agressés ? Votre expérience à la Chancellerie sera, dans ce dossier délicat, un atout précieux.

Mme la Secrétaire d'Etat - La violence que constitue le harcèlement moral dans l'entreprise n'est pas reconnue par notre législation. Elle touche les salariés des deux sexes, mais plus particulièrement les femmes. Le Gouvernement soutient donc la Commission européenne qui compte réviser la directive de 1976 pour y inclure une référence au harcèlement moral. Il a par ailleurs demandé à des universitaires de lui remettre une étude sur les violences dont sont victimes les femmes. Les conclusions de ce travail scientifique me seront remises dans un mois. Elles nous permettront de définir les politiques publiques propres à faire cesser les violences. Les moyens correspondants figureront dans le budget de 2002.

M. Jean-Pierre Baeumler - Bien que la situation de l'emploi se soit très notablement améliorée, le taux de chômage n'étant plus que de 9,5 % et le nombre de chômeurs ayant été ramené à 2 270 000 au 31 octobre 2000, la lutte contre le chômage doit se poursuivre. Le Gouvernement s'est dans cette perspective fixé cinq priorités : enrichir la croissance en emplois, développer les emplois d'utilité collective, mener à bien la réduction du temps de travail, poursuivre l'allégement du coût du travail pour les salariés peu qualifiés, inciter davantage à la création d'entreprises. Ces priorités ne pourraient toutefois se traduire dans les faits sans la mobilisation de tous les services de votre ministère, et des servies déconcentrés en particulier, au premier rang desquels les directions départementales du travail et de l'emploi. L'excellent travail que celles-ci mènent sur le terrain explique pour une large part les bons résultats obtenus, notamment pour les jeunes et les chômeurs de longue durée.

Les DDTE n'assurent pas seulement des missions de contrôle mais aussi de conseil, sans bien sûr oublier leurs missions traditionnelles d'aide à la restructuration des entreprises, au reclassement des salariés licenciés, à la création d'entreprises. Si leurs missions se sont diversifiées, leurs méthodes de travail aussi ont évolué. Une multiplicité d'acteurs, publics mais aussi privés, concourt désormais au service public de l'emploi à l'échelle d'un territoire. La réussite de l'ensemble suppose des services déconcentrés efficaces, susceptibles de s'appuyer sur des moyens matériels et humains suffisants. Des efforts ont déjà été faits pour informatiser les services et améliorer la situation des personnels. Cette politique doit se poursuivre. Quelles sont les intentions du Gouvernement en ce domaine ?

Mme Elisabeth Guigou, ministre de l'emploi et de la solidarité - Vous avez raison d'insister sur ce point car, quelle que soit la qualité de la politique de l'emploi, l'essentiel dépend de sa mise en _uvre sur le terrain. Un effort important a déjà été fait en faveur des personnels, vous l'avez dit. Nous allons encore recruter 20 inspecteurs et 93 contrôleurs du travail en 2001. De nombreux emplois de catégorie C sont également créés. La revalorisation des carrières se poursuivra. Des efforts importants ont également été consentis ces cinq dernières années pour informatiser les services : c'est essentiel pour que les agents puissent consacrer davantage de temps à des actions plus personnalisées. 90 % des agents sont équipés d'un poste informatique relié par Intranet au réseau du ministère. Tous ont une adresse électronique. Cet effort sera poursuivi en 2001 puisque les crédits prévus à cet effet augmentent de 5 %. Le ministère de l'emploi dispose d'un équipement informatique et bureautique supérieur à la moyenne des autres ministères.

M. Gérard Lindeperg - Les contrats de qualification, tant au bénéfice des adultes que des jeunes, rencontrent un grand succès. La prime à l'embauche sera maintenue pour les adultes, il faut s'en féliciter. Vous proposez en revanche de la supprimer pour les jeunes. Je n'y vois pas d'objection lorsque cette prime constitue en effet une aubaine pour un employeur qui aurait de toute façon dû embaucher un jeune qualifié. Mais cette décision mettrait les groupements d'employeurs des entreprises d'insertion en grande difficulté. Il faut examiner cela de près. Si vous ne devez pas revenir sur votre choix, qu'à tout le moins une exception soit prévue pour les entreprises qui font de l'insertion. Nous avions de même l'an passé fait une exception pour les niveaux V lors de la suppression de la prime d'apprentissage.

Mme la Secrétaire d'Etat - Je ne reviens pas sur cette question, je me suis expliquée tout à l'heure et je prends mes responsabilités. Cela étant, j'ai été sensible aux courriers que j'ai reçus, émanant d'élus mais aussi de simples citoyens pointant les difficultés que cette mesure créerait pour les groupements d'employeurs d'insertion, lesquels réalisent un travail irremplaçable auprès des jeunes. J'ai donc demandé à mes services de prévoir non pas de les traiter à part et de leur conserver le bénéfice de cette prime, mais de prévoir pour eux une compensation totale de la perte de ressources. Une circulaire est en préparation. Elle sera prête dans le mois.

M. Gérard Lindeperg - Sur quelle ligne seront pris les crédits ?

Mme la Secrétaire d'Etat - N'ayez aucune crainte. J'ai pris toutes garanties.

M. Jean-Pierre Baeumler - L'amélioration quantitative mais aussi qualitative de la situation de l'emploi tient certes à l'embellie de la conjoncture mais surtout à la politique volontariste menée par ce gouvernement depuis juin 1997. D'importantes disparités subsistent toutefois, parfois même à l'échelle d'un département ou d'une agglomération. Une approche plus ciblée est donc nécessaire. C'est d'ailleurs pourquoi les contrats de ville comportent un volet emploi -il ne faut pas non plus oublier les territoires ruraux qui peuvent eux aussi présenter des poches de chômage tenace. Un effort a été fait pour territorialiser davantage la politique de l'emploi : des coordonateurs des DDTE établissent par exemple des diagnostics économiques et sociaux au niveau des bassins d'emploi. Il faut renforcer cette approche pragmatique y compris dans les départements d'Alsace où l'on constate plutôt au niveau global une pénurie de main-d'_uvre et où un effort particulier de formation est nécessaire pour mieux adapter l'offre à la demande. Les pays mis en place par la loi Voynet paraissent un échelon pertinent d'action. Votre ministère soutiendra-t-il les initiatives prises en matière d'emploi et de formation professionnelle à l'échelle des pays.

Mme la Ministre - Oui, nous allons accentuer encore la territorialisation de nos actions, en particulier de lutte contre le chômage de longue durée et l'exclusion. Des séminaires inter-régionaux ont actuellement lieu afin de voir comment organiser au mieux les partenariats dans les territoires. La loi Voynet mais aussi la loi Chevènement offrent de nouvelles opportunités. Les plans locaux élaborés par le service public de l'emploi doivent alimenter le volet emploi des projets de pays et d'agglomération et proposer des solutions concrètes aux tensions pouvant exister localement sur le marché du travail. Je crois beaucoup en toutes ces démarches territorialisées.

M. Gérard Lindeperg - Les crédits consacrés aux politiques contractuelles de la formation professionnelle diminuent de 15 %, ce qui m'inquiète. En effet, les contrats études et prospective conclus avec les branches et les engagements de développement pris avec les entreprises seront inévitablement moins nombreux. Je suis de ceux pour qui la décentralisation de la formation professionnelle ne doit pas se traduire par l'affaiblissement du rôle de l'Etat. Celui-ci doit continuer d'impulser une politique novatrice en partenariat avec les autres acteurs. Pouvez-vous, Madame la ministre, nous dire pourquoi les moyens de cette politique diminuent ?

Mme la Secrétaire d'Etat - Cette politique mobilise d'importants fonds structurels européens, si bien que nous parvenons à maintenir notre effort malgré la réduction des crédits budgétaires.

La politique contractuelle est au c_ur de la méthode que je compte employer pour la réforme de la formation professionnelle. Elle se construit par la collaboration des régions, des branches professionnelles et de l'Etat.

Comme l'année dernière, je dispose d'une ligne de 20 millions. Ce n'est pas énorme, mais c'est pour moi un formidable levier, qui me permet de mettre en mouvement le secteur de la formation sans attendre le vote de la réforme : c'est ainsi que nous procédons pour la validation des acquis.

J'ai conclu une dizaine d'accords avec des régions ainsi qu'avec les secteurs de la plasturgie, de la chimie et du papier.

M. Jacques Guyard - La première génération des emplois jeunes est aux trois cinquièmes de son parcours. Ces jeunes sortiront dans deux ans du dispositif.

Dans l'Éducation nationale, sur les 40 000 premiers recrutés, 25 000 seront partis au 1er janvier prochain : il s'agit des jeunes les plus qualifiés, en majorité des hommes. Les autres, essentiellement des femmes, n'ont en général que le bac -en particulier, des bacs professionnels. La préparation à la sortie du dispositif est donc pour eux inadaptée, puisqu'ils ne pourront pas se présenter aux concours administratifs.

Dans ma ville, les services de la commune et les associations ont recruté 300 jeunes. Certains ont tellement bien travaillé qu'on a déjà créé des postes pour les garder. D'autres trouveront un emploi à la fin de leur contrat car ils ont fait la preuve de leur utilité. Certains en revanche n'ont toujours pas de projet professionnel. Il est vrai qu'on ne les a guère aidés à en former un.

Comment comptez-vous préparer ces jeunes qui vont sortir massivement du dispositif dans deux ans ?

Mme la Ministre - Le Gouvernement est décidé à assurer l'avenir de ces jeunes, qui doivent trouver un emploi à l'issue de leur contrat.

Dans les associations, la moitié des emplois sont déjà solvabilisés. D'ici la fin de l'année, nous devrions atteindre un taux de solvabilisation de 60 %, voire 65 %. Le gros des emplois-jeunes ayant été conclu dans le courant de l'année 1998, nous avons tout de même jusqu'en 2003 pour préparer la sortie. En outre, je ferai des propositions -préparées d'ailleurs par Martine Aubry- pour que les associations bénéficient de délais supplémentaires de solvabilisation.

Dans les collectivités locales, les débouchés sont assurés, à quelques exceptions près : il s'agit de communes pauvres qui ont créé des emplois jeunes dans une optique d'insertion. Il faudra voir si on peut les aider à continuer, sur la base de critères et d'un zonage précis.

Restent les ministères. L'Intérieur a recruté 16 000 adjoints de sécurité, qui entreront pour la plupart dans la police. Le ministère de la justice, qui a commencé ses recrutements avec un an de décalage, dispose donc d'un délai supplémentaire. L'Éducation nationale, enfin, a créé 65 000 emplois jeunes. Un certain nombre de leurs bénéficiaires pourront rester dans cette administration en signant des contrats ou en passant des concours, mais les jeunes qui n'ont que le bac ne le pourront pas. Il faut donc les préparer à trouver un emploi. Des programmes de formation ont été mis au point avec des entreprises privées : il faut les relancer. J'en ai parlé avec les organisations syndicales, qui ont manifesté un réel intérêt pour ces programmes.

Je ne peux vous en dire plus pour le moment. Avec Jack Lang, nous travaillons en vue d'assurer à tous ces jeunes des débouchés.

Par ailleurs, nous disposons des crédits nécessaires pour continuer à recruter : à la fin de l'année prochaine, nous aurons bien recruté 350 000 jeunes.

M. Gérard Bapt - Cet après-midi, de nombreux orateurs ont critiqué la réduction du nombre des contrats aidés. Il est tout de même paradoxal qu'au moment où diminue le nombre des contrats emploi-solidarité, une formule plus intéressante en termes d'insertion, le contrat emploi consolidé, se révèle insuffisamment utilisée. En effet, nous n'avons pas atteint l'objectif de 57 000 fixé dans la loi de finances pour 2000.

Ne pourriez-vous pas demander aux services déconcentrés de votre ministère de promouvoir ces contrats auprès des collectivités locales et des réseaux associatifs ?

Mme la Ministre - Vous avez raison. Cette année, nous ne conclurons que  47 000 de ces contrats, sur 50 000 prévus. Nous en signerons davantage l'année prochaine. Il faut en effet promouvoir cette formule.

M. Jacques Guyard - Le passage progressif aux 35 heures a des conséquences sur l'organisation de l'apprentissage et de l'ensemble des formations en alternance. Avant la circulaire du 17 octobre, nous étions dans une situation curieuse. Certaines des entreprises accueillant les apprentis fonctionnaient sur 39 heures, d'autres sur 35 heures. Les CFA raisonnaient sur 39 heures.

Il devient nécessaire de fixer des règles du jeu.

M. Germain Gengenwin - Ce n'est pas la peine de poser cette question : le Gouvernement ne répond pas !

M. Jacques Guyard - Comment va-t-on adapter le contenu de ces formations ? Quelles conséquences auront les 35 heures sur le personnel des CFA, sur la valeur des diplômes ? Au demeurant, la modulation du temps de travail ne peut évidemment s'appliquer au temps de formation.

Sur le terrain, on trouve des solutions, parce que tout le monde a envie que l'alternance marche. Mais nous avons besoin de règles.

Mme la Secrétaire d'Etat - Votre question me permettra de répondre aussi à M. Gengenwin, qui est un expert et que j'ai entendu protester parce que je ne lui apportais pas assez de précisions alors que j'ai essayé, en quinze minutes, de traiter le plus de sujets possible.

Pour le personnel des CFA, l'application de la loi du 19 janvier 2000 dépend de la nature juridique des organismes gestionnaires. Pour les jeunes en contrat de qualification et d'apprentissage, Mme Aubry et moi-même avions demandé à nos services, en liaison étroite avec le centre de coordination des programmes régionaux de formation professionnelle et le ministère de l'éducation nationale, qui fixe la durée de préparation aux diplômes pour l'apprentissage, de faire l'inventaire des difficultés d'application de la loi et de publier une circulaire qui permette de traiter toutes les situations. Cette circulaire est parue le 17 octobre dernier, elle est à votre disposition.

Parmi les dispositions complexes et techniques, elle prévoit des mesures transitoires jusqu'au 1er janvier 2002 pour résoudre les problèmes liés aux durées des formations, dont beaucoup dépassent les horaires collectifs en entreprise. Elle offre aussi des garanties en matière de rémunération pour les jeunes sous contrat visés par l'article 32 de la loi RTT. Elle permet des ajustements des durées en fonction des diplômes et des modalités de formation pour chaque CFA qui accueille des apprentis dont la durée de travail passe de 39 à 35 heures. Enfin, elle incite à moderniser la pédagogie et à recourir aux nouvelles technologies car, aujourd'hui, une heure de formation n'est plus forcément une heure passée en classe avec un maître.

M. Gérard Bapt - Au sein des crédits destinés à l'insertion des publics en difficulté, les contrats initiative emploi bénéficient de 7,1 milliards, contre 6,5 milliards pour les CES.

Mais, le Gouvernement comptant, au titre de ses engagements européens, s'en tenir à une progression de 1 % de la dépense publique pour la période 2002-2004, ne peut-on craindre, dans un contexte de décrue du chômage liée à la croissance et à la politique menée, une réduction des crédits destinés aux publics en difficulté, qui sont pourtant fort utiles aux organismes publics, aux collectivités locales, au réseau associatif ? Pour ma part, je considère que, puisque nous avons battu des records de création d'emplois marchands, il faut recentrer notre action vers les publics en difficulté.

Mme la Ministre - Je n'ai pas le sentiment que Mme Aubry ait cherché à réduire les crédits des dispositifs destinés aux publics en grande difficulté. Les besoins sont, en la matière, toujours supérieurs aux moyens engagés. Il est vrai que l'on assiste à une diminution du nombre de CIE et de CES. Il est donc absolument essentiel de recentrer le dispositif vers les publics les plus en difficulté. C'est ce que nous allons faire.

Par ailleurs, une certaine latitude est laissée aux services déconcentrés pour qu'ils adaptent les moyens aux besoins identifiés sur le terrain.

M. le Président - J'appelle maintenant les crédits inscrits à la ligne emploi et solidarité.

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EMPLOI

Les crédits inscrits au titre III de l'état B, mis aux voix, sont adoptés, de même que ceux inscrits au titre IV de l'état B et aux titres V et VI de l'état C.

M. le Président - J'appelle maintenant les articles 57, 58, 59 et 60 rattachés à ce budget.

En accord avec la commission des finances, j'appellerai aussi les amendements tendant à insérer des articles additionnels après l'article 59 et après l'article 60.

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ART. 57

M. Jacques Barrot, rapporteur spécial de la commission des finances pour la formation professionnelle - La commission des finances, à l'unanimité, a souhaité que cet article soit supprimé et son président, Henri Emmanuelli, est d'ailleurs l'un des signataires de l'amendement 116, dont tel est l'objet.

En effet, supprimer la prime destinée aux apprentis pour les entreprises de plus de 10 salariés nous semble très contestable, pour une économie bien modeste. Cela serait une source de complexité, un frein à l'emploi car on sait que le seuil de 10 est toujours dissuasif pour des PME qui sont les principales créatrices d'emplois.

Vous nous avez dit, Madame la ministre, ne pas vouloir revoir la loi sur les 35 heures, mais être prête à examiner avec attention les demandes qui vous seraient faites en fonction des difficultés rencontrées. Vous semble-t-il opportun et pédagogique, en ce moment douloureux pour bien des PME, de supprimer ainsi une prime pour l'embauche d'apprentis ?

Le Premier ministre et le Président de la République s'apprêtent à se rendre devant l'Union professionnelle artisanale, ils devront s'y expliquer sur cette mesure, injuste pour les entreprises qui font l'effort de prendre des apprentis. Mme Péry a dit que 67 % des apprentis sont aujourd'hui dans des entreprises de moins de 10 salariés, mais dans bien des professions, même artisanales comme la pâtisserie, il y a des unités qui dépassent 10 salariés. La fédération de la propreté, très créatrice d'emplois, a aussi créé, dans une branche qui sort à peine du moyen âge, six CFA propreté. Et vous vous apprêtez à rendre la formation plus chère !

Surtout, cette mesure est injuste pour les jeunes, qui seront moins facilement recrutés par les entreprises, même si celles-ci se servent parfois de cette mesure comme d'un alibi.

Enfin je comprends mal, alors que les emplois-jeunes sont dotés de 20 milliards, que l'on s'acharne à supprimer une prime qui ne coûte que 100 millions.

M. Germain Gengenwin - L'amendement 19 a le même objet que celui qu'a excellemment défendu Jacques Barrot. J'ajoute simplement, en y associant M. Ueberschlag, que certaines entreprises vont se trouver doublement pénalisées, puisqu'elles devront payer des heures supplémentaires à leurs apprentis travaillant 39 heures et se verront d'autre part privées de la prime à l'embauche. Les petites entreprises, dites-vous, ne sont pas concernées. Le président de la Chambre des métiers d'Alsace me fait pourtant part de sa « consternation ». J'ai posé beaucoup de questions cet après-midi où nous étions une quinzaine de députés en séance. Si mes collègues n'obtiennent pas plus de réponses que moi, à quoi servons-nous ? Ainsi je vous ai à nouveau demandé si vous allez changer le référentiel des programmes d'apprentissage. Mais ce qui m'importe, c'est le sort des apprentis : le temps de leur formation va-t-il être réduit ? Après avoir limité le bénéfice de la prime à l'embauche au niveau V, alors que le développement de l'apprentissage, notamment grâce aux régions, a été favorisé par son ouverture aux niveaux III et IV, voire à celui d'ingénieur, vous enverriez à nouveau, avec cette mesure, un signal négatif.

Mme la Secrétaire d'Etat - Monsieur Gengenwin, je mène actuellement des discussions avec le ministère de l'éducation nationale qui englobent la définition des référentiels, puisqu'elles visent à mettre en place un répertoire national avec des référentiels transversaux. Je ne doute pas qu'avec encore un peu d'énergie, nous y parviendrons. Monsieur Barrot, les formations en alternance, apprentissage et qualification, bénéficient de plus de 13 milliards de francs de crédits, dont près de 8 milliards destinés au financement des exonérations de charges sociales par les entreprises.

M. Germain Gengenwin - Cela a toujours existé !

Mme la Secrétaire d'Etat - Cet effort est maintenu, et la suppression proposée ne vise que la prime à la signature du contrat. Nous conservons les primes à la formation et les exonérations. J'assume mon choix d'augmenter le nombre d'entrées dans ces contrats, fût-ce au prix d'une limitation du niveau des primes, que les entreprises peuvent aujourd'hui supporter, ce qui n'était pas le cas il y a quatre ou cinq ans.

M. Gérard Lindeperg - Le groupe socialiste demande une suspension de séance.

La séance, suspendue à 22 heures 5, est reprise à 22 heures 10.

Les amendements de suppression 116, 19 et 123, mis aux voix, sont adoptés.

L'article 57 est ainsi supprimé.

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ART. 58

M. Jacques Barrot, rapporteur spécial - L'amendement 131, également présenté par M. Rigal et M. Bouvard, vise à supprimer l'article 58, qui prive de l'exonération de cotisations familiales sur les bas salaires les entreprises des zones de revitalisation rurale et les entreprises nouvelles exonérées d'impôts. Il a été adopté par la commission des finances, qui estime qu'une telle mesure est prématurée. En effet, les entreprises de moins de 20 salariés, pour lesquelles le passage aux 35 heures n'est obligatoire qu'au 1er janvier 2002, risquent, si elle est adoptée, de perdre le bénéfice de cette exonération, alors qu'elles n'auront pas encore celui des abattements liés au passage aux 35 heures.

M. Jean-Claude Boulard, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles pour le travail et l'emploi - Notre commission a également adopté un amendement 87 de suppression. Mais je crois que le Gouvernement va proposer un amendement qui répond à nos préoccupations.

M. le Président - Des membres du groupe RCV ont déposé l'amendement identique 86.

Mme la Ministre - Ces amendements proposent de revenir sur la suppression d'exonération de cotisations d'allocations familiales. Bien entendu le Gouvernement ne veut pas pénaliser l'emploi dans ces zones prioritaires mais il n'est pas convaincu que ces exonérations lui soient très favorables. Effectivement, il y a une difficulté d'ajustement pour les entreprises de moins de 20 salariés puisqu'elles ne sont tenues de passer aux 35 heures qu'au 1er janvier 2002. Ce n'est qu'alors qu'elles bénéficieront des avantages afférents. Le Gouvernement est donc d'accord pour différer dans leur cas la suppression des avantages visés dans l'article. C'est l'objet de l'amendement 154. La loi du 19 janvier 2000 prévoit pour les entreprises qui passeront aux 35 heures des avantages plus importants que ces exonérations de cotisations : une majoration de l'allégement de 1 400 F par salaire et par an, porté à 1 420 F depuis le 1er juillet, qui est prévue pour les emplois en zone de revitalisation rurale. Les entreprises nouvelles qui appliquent les 35 heures bénéficient de l'aide incitative, du nouvel allégement et de sa majoration. Je rappelle que les entreprises de plus de 20 salariés, qui anticipent la réduction de la durée légale, bénéficient de l'aide incitative et du nouvel allégement auquel s'ajoute la majoration dans 8 zones de revitalisation rurale. Le montant cumulé de ces aides est beaucoup plus élevé que celui des exonérations de cotisations d'allocations familiales. Je signale également que le maintien des exonérations prévu par l'amendement réduit de 110 millions l'économie estimée initialement à 330 millions. J'espère que ces explications vous permettront de retirer les amendements de suppression.

M. Gérard Bapt, rapporteur spécial de la commission des finances pour le travail et l'emploi - L'amendement a été voté par la commission. Mais j'ai pris contact avec M. Rigal qui est d'accord pour le compromis proposé par le Gouvernement. A titre personnel, je m'y rallie également. Si personne ne reprend l'amendement, on peut considérer qu'il est retiré.

M. Jean-Claude Boulard, rapporteur pour avis - L'amendement du Gouvernement répond à nos préoccupations. Je retire celui de la commission.

M. Augustin Bonrepaux - C'est parce que nous avions le sentiment qu'on faisait disparaître un dispositif avantageux pour les zones de revitalisation rurale auxquelles nous sommes très attachés que nous avons adopté cet amendement de suppression. Mme la ministre a bien expliqué quels avantages étaient prévus dans la loi lors du passage aux 35 heures et proposé le maintien des exonérations actuelles pour les entreprises de moins de 20 salariés. Les amendements de suppression peuvent être retirés.

L'amendement 154, mis aux voix, est adopté.

L'article 58, ainsi amendé, mis aux voix, est adopté, de même que l'article 59.

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APRÈS L'ART. 59

M. Gérard Bapt, rapporteur spécial - L'amendement 117 que M. Barrot et moi-même avons présenté à la commission qui l'a adopté, n'a pas d'incidence budgétaire. Les entreprises de travail temporaire ont développé la formation en alternance pour les jeunes intérimaires avec un tel succès que tous les fonds collectés ont été utilisés, moins 35 % qui restent à l'organisme collecteur. Afin d'utiliser tous les crédits pour développer les contrats de mission formation jeunes intérimaires -CMJI- l'amendement propose d'exonérer le secteur du versement aux collecteurs interprofessionnels.

Mme la Secrétaire d'Etat - L'effort de ces entreprises est réel. Mais le problème soulevé ici relève plutôt de la gestion que de la définition d'une politique. Le mois prochain en discutant de la réforme de la formation professionnelle les partenaires sociaux reverront les dispositifs financiers. Mieux vaudrait donc retirer cet amendement. Sinon, sagesse.

M. Jacques Barrot, rapporteur spécial - Effectivement il y aura arbitrage entre les employeurs. Mais les CMJI ont été très positifs, ces entreprises se sont engagées, et je considère qu'il faut leur donner un signal pour les encourager. Maintenons l'amendement même si les partenaires sociaux négocient.

M. Gérard Lindeperg - Je sais M. Barrot très attaché à la reconnaissance des partenaires sociaux, et à ce que le législateur suive les accords. Considérant que les négociations s'engagent le mois prochain, il me paraîtrait plus sage de retirer l'amendement, et de revoir cette question après que les partenaires sociaux se seront prononcés.

M. Gérard Bapt, rapporteur spécial - Le contrat de mission formation jeunes intérimaires est issu d'une négociation salariale qui vient de s'achever. L'accord a été signé par la CFDT, la CGC, la CFTC et la CGT. L'amendement me semble donc devoir être maintenu.

L'amendement 117, mis aux voix, est adopté.

L'article 60, mis aux voix, est adopté.

M. le Président - Nous avons terminé l'examen des crédits du travail et de l'emploi.

La suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2001 est renvoyée à la prochaine séance qui aura lieu demain, vendredi 10 novembre, à 9 heures.

La séance est levée à 22 heures 35.

                      Le Directeur du service
                      des comptes rendus analytiques,

                      Jacques BOUFFIER

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ORDRE DU JOUR
DU VENDREDI 10 NOVEMBRE 2000

A NEUF HEURES : 1ère SÉANCE PUBLIQUE

Suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2001
(n° 2585).

      M. Didier Migaud, rapporteur général au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du plan. (Rapport n° 2624)


Equipement et transports ; budget annexe de l'aviation civile

Mer :

      M. Guy Lengagne, rapporteur spécial au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du plan. (Annexe n° 26 du rapport n° 2624)

Transports aériens et météorologie :

      M. Gilbert Gantier, rapporteur spécial au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du plan. (Annexe n° 28 du rapport n° 2624)

Transports aériens :

      M. François Asensi, rapporteur pour avis au nom de la commission de la production et des échanges. (Tome XIII de l'avis n° 2629)

Transports terrestres :

      M. Augustin Bonrepaux, rapporteur spécial au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du plan. (Annexe n° 29 du rapport n° 2624)

Equipement et transports terrestres :

      M. Jean-Jacques Filleul, rapporteur pour avis au nom de la commission de la production et des échanges. (Tome XIV de l'avis n° 2629)

Transports maritimes et fluviaux :

      M. André Capet, rapporteur pour avis au nom de la commission de la production et des échanges. (Tome XV de l'avis n° 2629)

A QUINZE HEURES : 2ème SÉANCE PUBLIQUE

      Suite de l'ordre du jour de la première séance

Eventuellement, A VINGT ET UNE HEURES : 3ème SÉANCE PUBLIQUE

      Suite de l'ordre du jour de la première séance.

Le Compte rendu analytique
est disponible sur Internet
en moyenne trois heures après la fin de séance.


Préalablement,
est consultable une version incomplète,
actualisée au fur et à mesure du déroulement de la séance.

        www.assemblee-nationale.fr


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