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Session ordinaire de 2000-2001 - 64ème jour de séance, 148ème séance

SÉANCE DU MERCREDI 4 AVRIL 2001

PRÉSIDENCE de M. Raymond FORNI

Sommaire

SOUHAITS DE BIENVENUE AU PRÉSIDENT DE L'ASSEMBLÉE PARLEMENTAIRE DE L'ORGANISATION POUR LA SÉCURITÉ ET LA COOPÉRATION EN EUROPE 2

QUESTIONS AU GOUVERNEMENT 2

POLITIQUE AGRICOLE 2

PROTECTION CONTRE LES INONDATIONS 3

TVA SUR LA RESTAURATION 4

MONDIALISATION 5

LICENCIEMENTS COLLECTIFS 5

PRESSION FISCALE
ET SOCIALE 7

ALLOCATION
POUR L'AUTONOMIE 8

DIFFICULTÉS D'APPLICATION
DES TRENTE-CINQ HEURES 8

RATIFICATION DU PROTOCOLE
DE KYOTO 9

AMÉLIORATION DU POUVOIR D'ACHAT DES BAS SALAIRES 10

POLITIQUE DE SANTÉ PUBLIQUE 11

CONGRÈS NATIONAL DU SNES
À STRASBOURG 11

PROJET DE LOI
RELATIF À MAYOTTE 12

ARTICLE PREMIER 30

ART. 2 31

ART. 3 32

ART. 4 32

ART. 5 32

ART. 8 33

ART. 9 33

ART. 10 33

APRÈS L'ART. 12 33

ART. 14 33

ART. 18 33

ART. 19 33

ART. 28 36

ART. 29 36

ART. 35 36

APRÈS L'ART. 36 36

ART. 38 36

ART. 40 37

APRÈS L'ART. 41 37

ART. 42 37

ART. 44 38

ART. 45 38

AVANT L'ART. 46 38

ART. 46 38

APRÈS L'ART. 46 38

ART. 51 38

APRÈS L'ART. 52 39

ART. 53 39

APRÈS L'ART. 54 39

ART. 55 39

ART. 56 40

APRÈS L'ART. 59 41

ART. 63 41

²EXPLICATIONS DE VOTE 42

RÉUNION D'UNE COMMISSION MIXTE PARITAIRE 42

FIN DE LA MISSION
D'UN DÉPUTÉ 43

ORDRE DU JOUR
DU JEUDI 5 AVRIL 2001 44

La séance est ouverte à quinze heures.

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SOUHAITS DE BIENVENUE AU PRÉSIDENT DE L'ASSEMBLÉE PARLEMENTAIRE DE L'ORGANISATION POUR LA SÉCURITÉ ET LA COOPÉRATION EN EUROPE

M. le Président - Je signale à l'Assemblée la présence dans les tribunes de M. Adrian Severin, président de l'assemblée parlementaire de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe.

Je suis heureux de lui souhaiter, en votre nom, la bienvenue.

(Mmes et MM. les députés se lèvent et applaudissent).

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      QUESTIONS AU GOUVERNEMENT

L'ordre du jour appelle les questions au Gouvernement.

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POLITIQUE AGRICOLE

M. Pascal Clément - Monsieur le ministre de l'agriculture, je vous accuse de désinvolture ! (Murmures sur les bancs du groupe socialiste) Vous êtes le seul ministre qui, à ma souvenance, ait refusé de se rendre au congrès de la FNSEA (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe RCV). Il s'agit pourtant du syndicat majoritaire de l'agriculture. Je vous laisse imaginer ce qu'il adviendrait si un ministre de droite refusait de recevoir la CGT ! (Exclamations sur les bancs du groupe communiste, du groupe socialiste et du groupe RCV) Vous avez fait un choix politique, le refus de cette cogestion, qui a permis à l'agriculture de traverser de façon humaine une crise sans précédent : en quarante ans, quatre millions de paysans ont quitté leurs terres. Cette méthode de gouvernement a permis d'effectuer une difficile transition, sans heurts et sans poujadisme, avec des progrès extraordinaires en qualité. Or, l'agriculture connaît aujourd'hui une crise très grave, même si elle est conjoncturelle, qu'il s'agisse de l'ESB ou de la fièvre aphteuse, et le ministre chargé du dialogue se met aux abonnés absents !

M. le Président - Veuillez poser votre question.

M. Pascal Clément - Vous risquez d'accroître le désespoir du monde agricole et de susciter des actes que nous déplorerions tous. Auriez-vous choisi de soutenir contre la majorité des électeurs, la confédération paysanne et son leader, aussi démagogue que délinquant ? Ou auriez-vous manqué du courage nécessaire pour vous présenter devant le syndicat majoritaire ? (Applaudissements sur les bancs du groupe DL, du groupe UDF et du groupe du RPR)

M. le Président - Monsieur le ministre, je souhaiterais que vous répondiez en quelques mots (Protestations sur les bancs du groupe DL). Mes chers collègues, suis-je condamné à répéter éternellement que le temps de parole est limité à cinq minutes par question ?

M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche - Je vous prie tout d'abord d'excuser l'absence du Premier ministre, parti en déplacement officiel au Brésil. Monsieur Clément, vous dites que mon attitude est désinvolte, je serais tenté de m'en remettre à une parole d'expert... Mais dois-je constater par ailleurs votre mauvaise mémoire. Des ministres de droite, M. Cointat ou M. Méhaignerie par exemple, n'ont pas toujours eu de bonnes relations avec la FNSEA et n'ont pas toujours assisté à ses congrès. Vous me reprochez de remettre en cause la cogestion ? Je vous réponds : mais bien sûr ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe RCV) Dois-je vous rappeler que dans notre démocratie, le Gouvernement n'est pas responsable devant les organisations professionnelles, mais devant le Parlement ? (Mêmes mouvements)

M. Jean-Michel Ferrand - Et la CGT ?

M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche - C'est au nom de l'intérêt général que nous gouvernons (Exclamations sur les bancs du groupe DL, du groupe UDF et du groupe du RPR ; applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe RCV).

Et l'intérêt général, ce n'est pas la somme des intérêts particuliers, ceux des agriculteurs, ceux des enseignants, ceux des salariés, des chômeurs, des retraités, non, c'est l'intérêt de la nation, sur lequel nous pouvons certes avoir des conceptions divergentes, mais qui doit demeurer notre impératif.

Je suis déjà allé au congrès de la FNSEA et me suis retrouvé devant une salle de deux ou trois mille personnes qui me bombardait de noms d'oiseaux -ministre menteur, voleur, salaud... Ce n'est pas que cela me fasse peur. Mais je n'en vois guère l'intérêt, ni pour moi, ni pour la FNSEA elle-même. Le dialogue social ne peut être fécond que s'il est serein et fondé sur le respect mutuel. La FNSEA est le syndicat majoritaire et je respecte ses représentants, ma porte leur est toujours ouverte, et ils savent en user, car enfin on les voit au ministère matin, après-midi et soir. J'ai d'ailleurs proposé à l'équipe dirigeante de tenir dans quelques jours un séminaire qui nous permettra sans doute de mieux travailler que lors d'une séance de défoulement (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe RCV).

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PROTECTION CONTRE LES INONDATIONS

M. Jean-Pierre Pernot - Ma question s'adresse au ministre de l'agriculture, un homme sérieux, un homme responsable, un homme de conviction que nous apprécions tous ici (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste ; murmures sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL).

Depuis le début de l'année, la plupart de nos régions ont connu de graves inondations. L'Ile-de-France, et notamment la vallée de l'Oise, viennent d'être touchées.

Face aux dégâts considérables qu'ont causé les crues, les acteurs locaux ont pris toutes leurs responsabilités : élus, services de secours, sapeurs-pompiers, gendarmerie, police, préfecture et Croix-rouge ont fait preuve de toute l'efficacité qu'on attendait d'eux, relayés par les actions de solidarité que les Français savent engager dans des circonstances difficiles.

Plusieurs voix à droite - La question ?

M. Jean-Pierre Pernot - Toutes ces opérations ont un coût, que la nation supporte comme il est normal. Des avancées techniques ont été réalisées, mais il faut accélérer la mise en place des dispositifs de prévention...

Plusieurs voix à droite - Accélérez vous-même !

M. Jean-Pierre Pernot - La recherche des zones d'expansion des crues et la conversion des terres arables en prairies permettront notamment d'atténuer les effets des crues.

Plusieurs voix - La question !

M. Jean-Pierre Pernot - A ce titre, les contrats territoriaux d'exploitation que vous avez mis en place, Monsieur le ministre, peuvent constituer un outil de prévention, en intégrant l'ensemble des actions environnementales en matière d'écoulement des eaux ou d'érosion des sols.

M. le Président - Votre question, s'il vous plaît.

M. Jean-Pierre Pernot - Monsieur le ministre, que pensez-vous des CTE déjà conclus dans ce domaine ? Comptez-vous accélérer leur développement ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe RCV)

M. le Président - Si chacun voulait bien respecter la discipline des deux minutes trente, cela ne pourrait qu'améliorer l'image que nous donnons.

M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche - Je voudrais d'abord réaffirmer la solidarité active du Gouvernement à l'égard des victimes des inondations, des populations et des agriculteurs sinistrés, comme à l'égard des éleveurs de la filière bovine, frappés par une autre crise.

Je crois comme vous, Monsieur le député, que l'agriculture peut fournir une contribution décisive à la lutte contre les inondations : conversion de terres arables en prairies, maintien de la couverture végétale en hiver, entretien des berges, restauration des haies -l'an dernier plusieurs centaines de kilomètres de haies ont été replantées- voire organisation de la submersion de certaines parcelles agricoles en cas de crues, comme cela se fait en Basse-Normandie.

L'agriculture participe donc à la lutte contre les inondations, et cela dans le cadre du plan national de développement rural, dont les orientations se traduisent dans les contrats passés avec les agriculteurs. Le dispositif des contrats territoriaux d'exploitation monte en régime, même si le rythme est plus lent que je ne le souhaiterais : 7 à 8 000 CTE ont été signés, les crédits sont disponibles pour d'autres. Il faut encourager la mobilisation sur ces contrats pour que le dispositif agro-environnemental soit toujours plus efficace (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

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TVA SUR LA RESTAURATION

M. Thierry Mariani - Jeudi dernier, la Cour européenne de justice a condamné la France à soumettre à la TVA à 19,6 % les pourboires inclus dans les prix de vente des cafetiers, restaurateurs et coiffeurs notamment.

Cette décision remet en cause une pratique en vigueur depuis 1923, l'exonération fiscale des sommes correspondant au service et pourboires. Elle portera gravement préjudice à ces professions et à leurs clients, car elle entraînera une augmentation du prix.

Votre responsabilité, Monsieur le Premier ministre, est directement engagée : si vous aviez accepté, comme l'opposition le réclame depuis des mois, d'appliquer le taux de TVA réduit de 5,5 % à la restauration, nous n'en serions aujourd'hui pas là ! (Applaudissements sur les bancs du groupe du RPR)

L'augmentation continue des prélèvements que vous infligez aux contribuables devrait pourtant permettre la réduction de la TVA dans ces secteurs : dix-neuf impôts nouveaux depuis 1997, hausse de 500 milliards des impôts et cotisations sociales en trois ans et demi, ce n'est pas rien ! Et aucun obstacle juridique ne s'oppose à cette diminution du taux de TVA.

Suite à l'arrêt de la Cour de justice, vous déciderez-vous enfin à appliquer le taux réduit de TVA aux restaurateurs, aux cafetiers, aux coiffeurs et de nombreuses autres professions qui se préparent à entamer de légitimes et vigoureux mouvements de protestation ? (Applaudissements sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL)

Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat au budget - La question que vous posez n'a rien de polémique. Elle touche à la vie quotidienne, puisqu'elle concerne la TVA perçue sur les 15 % correspondant au service sur les factures des restaurants. Il ne s'agit pas des pourboires laissés aux serveurs, qui ne sont pas visés par la jurisprudence de la Cour de justice européenne.

Le 29 mars, celle-ci a pris une décision sévère, mais à laquelle nous devrons nous conformer : la TVA doit être perçue sur ces 15 %, contrairement à l'usage antérieur.

Mais j'observe que la grande majorité des restaurants propose déjà des prix service compris et qu'en outre l'incidence financière de cette taxation sera assez faible (Interruptions sur les bancs du groupe du RPR et du groupe UDF).

Nous examinons les mesures d'allégements de charges de la restauration en liaison avec la mise en place des 35 heures. Le Gouvernement prépare un décret diminuant les charges sociales pesant sur la valeur des repas servis aux employés des restaurants.

M. Jean-Michel Ferrand - Ce n'est pas la question !

Mme la Secrétaire d'Etat - Pour ce qui est de la décision de la Cour, nous allons en étudier toutes les implications (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste ; exclamations sur les bancs du groupe du RPR).

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MONDIALISATION

M. François Asensi - Depuis quatre ans le Gouvernement a engagé des réformes importantes, qui ont notamment permis la décrue du chômage. Pourtant la France subit les effets pernicieux de la mondialisation sur le modèle libéral. En témoignent la vague de licenciements décidés brutalement par des multinationales comme Danone ou Marks et Spencer, la persistance de l'exclusion et la vitalité de l'économie souterraine.

Votre gouvernement se borne à de simples ajustements alors qu'il faut revoir le partage du bien commun. Les concentrations et les incertitudes pesant sur la législation du travail font craindre pour l'avenir des salariés. Le modèle productiviste et financier menace les politiques publiques, les fondements démocratiques et les équilibres écologiques.

Cette pression de la financiarisation affecte tous les gouvernements, tandis que l'administration du président Bush entend accélérer le processus : la relance de la course aux armements et le refus d'adhérer aux accords de Kyoto confortent le cynisme des multinationales, alors que de nouveaux modes de développement durable sont nécessaires pour tous les peuples.

Quelles initiatives va prendre le Gouvernement pour assurer la prééminence des politiques publiques en Europe, donner un sens plus solidaire à l'action de la France dans les instances internationales, notamment l'OMC, et s'inscrire dans une logique de paix, de développement et de respect de l'environnement ? (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste)

M. Laurent Fabius, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie - L'internationalisation est un fait. Mais la question est de savoir si elle doit être purement financière ou bien « humanisée ».

La mondialisation économique a des aspects positifs : l'an dernier les investissements en France ont représenté plus de 30 000 emplois et dans votre département, Citroën et d'autres entreprises gagnent beaucoup à l'exportation.

Que peut faire la France pour humaniser cette mondialisation ? En matière d'environnement, le Gouvernement partage totalement votre critique de la position de la nouvelle administration américaine : elle fait peu de cas de l'avenir de la planète et le Gouvernement français s'y opposera résolument (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe RCV).

En ce qui concerne les services publics, au Conseil européen de Stockholm, la France s'est opposée à une dérégulation sauvage des secteurs de la Poste et de l'énergie.

Quant à la dérégulation financière, la France profitera de la prochaine réunion, à Washington, du FMI et de la Banque mondiale pour affirmer le primat de la dimension humaine (Exclamations sur les bancs du groupe du RPR).

Bref, sans résignation ni démagogie, nous combattrons pour une mondialisation humanisée ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

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LICENCIEMENTS COLLECTIFS

M. Jean-Pierre Chevènement - La multiplication de plans sociaux par des entreprises bénéficiaires comme Alstom, Danone ou Marks and Spencer suscite une hostilité croissante. Tous les secteurs semblent dominés par les exigences exorbitantes des marchés financiers.

Or, rien n'empêche ces licenciements collectifs en l'état actuel du droit, ni dans le projet de loi sur les nouvelles régulations économiques, ce qui explique le vote des députés du Mouvement des citoyens.

Un simple signalement au procureur de la République ou le renvoi au juge d'un plan social sont des mesures illusoires car les juridictions ne sont pas équipées pour valider ou non une stratégie industrielle.

Ce matin, dans un entretien avec la presse régionale, le Premier ministre a déclaré que nous devions conduire une politique économique et sociale adaptée à un monde ouvert. Cela signifie-t-il que le Gouvernement entend borner son intervention à s'assurer de la consultation préalable des comités d'entreprise ou de l'application des trente-cinq heures, et laisser le reste aux tribunaux ? Ne serait-il pas utile, à l'occasion de la loi de modernisation sociale, de renchérir fortement le coût des licenciements pour les entreprises bénéficiaires, comme le suggère d'ailleurs le député Eric Besson ?

Au-delà, ne faut-il pas prévoir une faculté d'autosaisine gouvernementale quand un intérêt national est en jeu ? Prenons l'exemple d'Alstom à Belfort. Les alternateurs que nous fabriquions le sont désormais à Mannheim, en Allemagne. Aucun investissement de plus de 50 000 euros ne peut être réalisé sans l'autorisation de la direction de Mannheim. Or nous sommes au c_ur de la filière énergétique, puisqu'on ne peut produire d'électricité sans de telles machines (« C'est vrai ! » sur les bancs du groupe du RPR). Le Gouvernement est-il prêt à utiliser tous les moyens de pression dont il dispose ? En effet Alstom dépend du soutien public à l'exportation, du partenariat avec EDF et des commandes de frégates aux chantiers de l'Atlantique.

M. Balladur a certes déclaré que, s'il existait un tel droit d'intervention des pouvoirs publics, les entreprises ne créeraient plus d'emplois. Pourtant il n'en a pas toujours été ainsi. Mais depuis trop d'années les gouvernements successifs ont intériorisé les règles de la mondialisation libérale, et se sont réduits eux-mêmes à l'impuissance. Je souhaiterais que vous écoutiez davantage Jean-Pierre Chevènement et les Français, plutôt que M. Balladur et les milieux d'affaires ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RCV, du groupe socialiste et du groupe communiste)

M. Laurent Fabius, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie - Je vous écoute toujours avec beaucoup d'intérêt, ayant été votre collègue, ayant dirigé un gouvernement auquel vous participiez, et faisant désormais partie avec vous de la même majorité plurielle (Murmures sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL). Vous posez une question particulière, celle d'Alstom, et une question plus générale. Sur Alstom, M. Pierret et moi-même -saisis par vous et par le président Forni- avons eu l'occasion de faire passer très nettement nos messages à l'entreprise, et nous sommes prêts à le refaire. Mais je crois que, grâce aux efforts des uns et des autres, à la mobilisation de la population et des syndicats, le site, malgré des difficultés, a été préservé, et avec lui beaucoup d'emplois.

Mais je n'entends pas esquiver votre question de fond : comment agir face aux licenciements ? Vous souhaitez rétablir l'autorisation administrative de licenciement, supprimée en 1986. Mais les syndicats, qu'a consultés Mme Guigou, n'y sont pas favorables. Ils estiment en effet que la procédure judiciaire, malgré ses limites et ses délais, ouvre des possibilités, grâce notamment à une jurisprudence nouvelle, audacieuse et intéressante, de la Cour de cassation. Le juge a la possibilité de refuser les licenciements demandés. Il doit veiller à ce que les consultations soient menées correctement, et que des propositions sociales et de reclassement soient faites. Si ce n'est pas le cas, il peut et même il doit annuler.

Dans le cas de Marks et Spencer, je veux être précis. Des instances ont été déposées par les syndicats. Le Gouvernement soutient la position des syndicats et des salariés, pour des raisons de forme comme de fond. Nous jugeons inacceptable la décision de Marks et Spencer de supprimer ses installations en France.

M. Jean-Michel Ferrand - Qu'allez-vous faire ?

M. le Président - Monsieur Ferrand, seriez-vous compétent sur toutes les questions ?

M. le Ministre - On a pu voir à la télévision une interview scandaleuse d'un dirigeant international de l'entreprise. Ayant affirmé d'abord que la concertation avait eu lieu dans les règles, il a précisé ensuite -en réponse à un journaliste qui faisait bien son travail- que le délai écoulé entre la saisine du comité d'entreprise et l'information des salariés avait été... de vingt minutes ! Voilà qui reflète une conception que nous ne saurions accepter, mais qui est sans doute partagée de l'autre côté de l'hémicycle... (Vives protestations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL) Pour nous une société ne peut se comporter de la sorte, et, quelles que soient les vociférations, nous ne changerons pas d'attitude ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe RCV ; exclamations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL)

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PRESSION FISCALE ET SOCIALE

M. Charles de Courson - Une précision d'abord : contrairement à ce qu'a dit M. Glavany, M. Méhaignerie, quand il était ministre de l'agriculture, avait des relations de confiance avec la FNSEA.

Ma question s'adresse à M. le ministre de l'économie. Depuis l'arrivée au pouvoir de la gauche dite plurielle, 53 % du surplus de richesse nationale créé par les Français ont été prélevés au profit des administrations publiques, ce qui représente une augmentation de 500 milliards de francs de la pression fiscale et sociale. C'est ce qui ressort de l'évaluation des comptes des administrations publiques publiée le 9 mars par l'INSEE : la pression fiscale et sociale est passée, à législation fiscale d'avril 1997, de 3 664 milliards en 1997 à 4 164 milliards en 2000, soit un accroissement de 500 milliards alors que pendant le même temps la richesse nationale augmentait de 937 milliards.

Les Français en ont assez de l'excessive pression fiscale et sociale, et du non-respect de vos promesses de la réduire. En 1997 vous aviez promis le maintien de cette pression, mais dès votre arrivée les impôts ont augmenté de 0,3 point de richesse nationale. En 1998, vous aviez promis une baisse de 0,2 point de richesse nationale : elle n'a pas eu lieu. En 1999, vous aviez promis la même chose, et là vous avez fait très fort, puisque la pression sociale et fiscale s'est accrue de 0,8 point de richesse nationale ! En 2000 vous aviez promis que le taux de la pression par rapport à la richesse nationale diminuerait d'un point : vous n'êtes parvenu qu'à 0,2 point, et encore, grâce à des mesures de dernière minute. Ainsi, sur quatre ans, l'écart entre vos promesses et la réalité représente 2,3 points de richesse nationale, soit 216 milliards...

Pour 2001 vous avez de nouveau promis de réduire de 0,5 point la pression fiscale et sociale. Or la révision à la baisse de la croissance et la révision à la hausse des recettes sociales rendent ce résultat plus qu'incertain. Allez-vous continuer en 2001, comme depuis quatre ans, à ne pas tenir vos promesses ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF, du groupe du RPR et du groupe DL)

M. Laurent Fabius, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie - Vos chiffres seraient excusables, venant de quelqu'un qui connaîtrait mal les finances nationales, mais force m'est de croire que vous abusez sciemment ceux qui nous écoutent (Exclamations sur les bancs du groupe UDF, du groupe du RPR et du groupe DL). Pourquoi ? Depuis 1997, la croissance a permis de dégager une richesse supplémentaire. Dès lors, même si tel ou tel impôt diminue, on comprend bien que la masse prélevée augmente en valeur absolue. Reste que les impôts, sinon tous, du moins beaucoup, ont diminué. Oui ou non, la vignette a-t-elle été supprimée ? (Exclamations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL) La taxe d'habitation a-t-elle été réduite ? L'impôt sur les sociétés continue-t-il à diminuer ? De même que l'impôt sur le revenu ? (Mêmes mouvements) Oui ou non la prime pour l'emploi a-t-elle été créée ? Et, pour poser une autre question, oui ou non les gouvernements que vous souteniez ont-ils alourdi la TVA et la CSG ? La réponse à toutes ces questions est oui. Je n'y peux rien : vous avez augmenté les impôts, et nous, nous les diminuons (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe RCV). Revenu dans votre circonscription, demandez donc à nos concitoyens s'il faut continuer à réduire les impôts. Et demandez-leur si, sur les feuilles d'impôt local ou national, il y a des baisses perceptibles. Je pense que dans les deux cas leur réponse sera oui.

Pour la première fois en dix ans, les prélèvements obligatoires ont diminué en 2000, et, j'ai le regret de vous dire, cela continuera en 2001 (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe RCV et sur quelques bancs du groupe communiste).

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ALLOCATION POUR L'AUTONOMIE

M. Vincent Burroni - En raison des perspectives démographiques, les personnes âgées, notamment dépendantes, sont de plus en plus au c_ur des préoccupations de notre société. Elles souhaitent vivre chez elles dans de bonnes conditions. Mais, à un certain stade de la perte d'autonomie, c'est l'établissement qui va apporter les réponses. Nous avons un véritable devoir de solidarité.

Le 14 février dernier, vous avez annoncé la création de l'allocation pour l'autonomie qui, corrigeant les inégalités qui s'attachaient à la prestation spécifique dépendance, témoignera de la volonté du Gouvernement d'apporter de nouvelles réponses aux personnes concernées et à leurs familles au travers d'une mesure moderne, équitable et citoyenne.

Pouvez-vous, Madame la ministre, nous préciser l'économie générale de cette allocation, le champ de ses bénéficiaires et son coût global ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

Mme Paulette Guinchard-Kunstler, secrétaire d'Etat aux personnes âgées - Nous sommes tous concernés par le vieillissement (Murmures sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL) dont les effets influent sur notre vie quotidienne dans toutes ses dimensions. A l'évidence, la perte d'autonomie est l'effet de l'âge le plus redouté en ce qu'elle affecte la dignité des personnes. C'est pourquoi le Gouvernement a souhaité créer une allocation universelle et juste, qui sera versée sur l'ensemble du territoire selon des critères objectifs et personnalisés aux personnes en perte d'autonomie, qu'elles soient accueillies en établissement ou maintenues à leur domicile. Collectivités proches du terrain, les départements seront à même de la gérer dans de bonnes conditions.

Evalué à 16,5 milliards, le coût de l'allocation sera assumé à hauteur de 11 milliards par les départements, de 0,5 milliard par les caisses de retraite et de 5 milliards par l'Etat, au titre de la solidarité nationale.

L'APA procède d'une vraie logique de solidarité nationale car quelle que soit la taille de la bougie, la flamme éclaire toujours... (Exclamations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL)

Aider les personnes âgées dépendantes à vivre dans la dignité, tel est l'objectif que nous poursuivons (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe RCV).

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DIFFICULTÉS D'APPLICATION DES TRENTE-CINQ HEURES

M. Jean-Paul Charié - Monsieur Fabius, quand vous présidiez notre Assemblée, vous nous aviez habitués à une pondération que je n'ai pas retrouvée dans vos propos de tout à l'heure ! (Huées sur les bancs du groupe socialiste) Vous n'avez pas le monopole du respect des salariés et d'ailleurs, si vous les respectiez vraiment, vous ne feriez pas adopter des lois qui vont contre leurs intérêts et vous n'auriez pas à dix-sept reprises augmenté les impôts ! Mais les Français s'en sont aperçu et ils ne vous croient plus (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste ; applaudissements sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL).

Dans un tiers des entreprises de plus de vingt salariés et dans les deux tiers de celles qui emploient moins de vingt salariés, les 35 heures ne sont toujours pas appliquées. Une raison simple l'explique : les salariés de notre pays restent très réticents et ils auraient infiniment préféré une appréciation réelle de leur pouvoir d'achat (Applaudissements sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL). Source de tracasseries quotidiennes, les 35 heures démotivent les PME qui, acculées, ne parviennent pas à recruter. Vous ne pouvez ignorer que dans certains secteurs, nos entreprises ne trouvent pas de candidats pour les postes sur lesquels elles seraient prêtes à embaucher.

Le Gouvernement est-il enfin décidé à prendre des mesures pour rendre applicable cette loi ou entend-il priver notre pays du dynamisme de ses PME ? (Applaudissements sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL)

M. François Patriat, secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat et à la consommation - A défaut de faire digne, on peut faire simple et vous semblez avoir choisi cette voie... Qu'il me soit permis d'ajouter à la longue liste des impôts allégés par le Gouvernement qu'a dressée M. Fabius la baisse de la TVA sur les travaux d'entretien dans les logements qui a eu un effet extrêmement favorable sur l'activité des branches concernées (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste). C'est bien la stratégie de soutien à la croissance poursuivie par la Gouvernement qui a en outre permis à plus d'un million de chômeurs de retrouver le chemin de l'emploi (Applaudissements sur quelques bancs du groupe socialiste). La réduction du temps de travail est responsable au moins pour un tiers de ce résultat (Exclamations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL). Le président de la chambre des métiers d'un département breton m'indiquait ces jours derniers que près de 2 500 emplois avaient été créés dans le ressort de son activité grâce à cette réduction (« Mensonge ! » sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL).

Et contrairement à ce que vous prétendez, les salariés sont très favorables à la réduction du temps de travail, qu'ils considèrent comme une chance, aussi bien pour leur entreprise que pour eux-mêmes.

Par ailleurs, les difficultés de recrutement dont vous avez témoigné ne sont pas liées aux 35 heures et l'on observe même que ce sont les entreprises qui ne les appliquent pas qui les rencontrent. Le Gouvernement entend poursuivre dans la voie de la concertation et de la négociation collective en sorte que, sans mésestimer les difficultés que rencontrent certains, les entreprises concluent des accords de RTT « gagnant-gagnant », pour les salariés comme pour elles-mêmes (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste).

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RATIFICATION DU PROTOCOLE DE KYOTO

Mme Annette Peulvast-Bergeal - Madame la ministre de l'environnement, confirmant la position qui avait entraîné l'échec de la conférence de La Haye de novembre dernier, le Président des Etats-Unis a tenu mercredi dernier des propos cyniques et dangereux faisant part de son refus de réglementer de manière stricte les émissions de CO2. Les Américains feignent donc de considérer que le réchauffement de la planète lié à l'émission des gaz à effets de serre relèvent d'un mauvais scénario de science-fiction !

Quelle stratégie la France entend-elle retenir pour tendre, avec ses partenaires européens, à une ratification rapide du protocole de Kyoto ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe RCV)

Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement - Choquée par le cynisme du Président Bush sur cette affaire, j'ai adressé sans tarder à mon homologue américaine et à la présidence suédoise de l'Union européenne une lettre de protestation et la plupart de nos partenaires européens ont agi de même pour inciter les Etats-Unis à revenir sur leur position. Le Conseil des ministres européens de l'environnement est de même résolu à poursuivre, avec ou sans les Etats-Unis, dans la voie de la ratification du protocole de Kyoto. Les grands pays en voie de développement ont souscrit à nos positions, de même -et cela est particulièrement remarquable- que le Japon ou la Nouvelle-Zélande qui ont fortement interpellé les Etats-Unis. De leur côté, les parlementaires français n'ont pas à rougir de leur action puisque les deux chambres ont à l'unanimité autorisé le Gouvernement à ratifier le protocole de Kyoto et ont défini la lutte contre les gaz à effet de serre comme une priorité nationale.

Je reste pour ma part fermement convaincu de la nécessité d'inciter les Américains -premiers pollueurs de la planète- à prendre leur part du fardeau dans la lutte contre le réchauffement. (Applaudissements sur les bancs du groupe RCV, du groupe socialiste et du groupe communiste)

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AMÉLIORATION DU POUVOIR D'ACHAT DES BAS SALAIRES

Mme Marie-Thérèse Boisseau - Monsieur le ministre de l'économie et des finances, chacun s'accorde sur la nécessité de revaloriser les revenus du travail par rapport aux minima sociaux mais à l'échec de votre première tentative en ce sens de décembre 2000 -la ristourne de la CSG- s'ajoute à présent celui de la prime pour l'emploi. Celle-ci ne profitera en effet ni aux plus précaires, qui, en règle générale, ne déposent pas se déclaration de revenus, ni à d'autres bénéficiaires potentiels, qui, rebutés par la complexité du dispositif, n'auront pas rempli les bonnes rubriques. Comment les en blâmer du reste lorsque l'on se réfère à la page six de la notice explicative qui pose l'équation toute fabiusienne « AV + DV = PPE » ? (Sourires et exclamations sur divers bancs)

L'UDF prônait pourtant de longue date une solution simple, qui eût profité directement à l'ensemble des familles les moins favorisées, l'allégement des cotisations sociales salariales sur les bas salaires. Après l'échec prévisible de la prime pour l'emploi, quand vous déciderez-vous pour de bon à redonner du pouvoir d'achat à tous les Français en allégeant les cotisation sociales des salariés ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF)

M. Laurent Fabius, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie - La prime pour l'emploi, chère Madame la députée, a été votée à l'unanimité par l'Assemblée nationale. Ou bien vous avez une absence, ou bien vous étiez absente ! (Applaudissements et rires sur les bancs du groupe socialiste ; exclamations sur les bancs du groupe UDF, du groupe du RPR et du groupe DL)

Pourquoi donc a-t-elle été votée à la même unanimité par l'Assemblée puis, hier, groupe communiste excepté, par le Sénat ? Nous avions présenté ici, il est vrai, un système plus simple, qu'avait voté la majorité et qui aurait dû être appliqué dès le mois de janvier. Seulement voilà : des parlementaires de l'opposition, et, parmi eux, sans doute vous-même, ont saisi -comme ils en ont le droit- le Conseil constitutionnel, qui a censuré l'allégement de la CSG sur les bas salaires. Ne venez donc pas aujourd'hui verser des larmes de crocodile !

Sans ce recours, la mesure n'aurait jamais été annulée, et 8 millions de Français en bénéficieraient déjà aujourd'hui. Quant à la prime pour l'emploi, que vous avez votée et dont vous instruisez maintenant le procès, c'est une bonne mesure, qui permettra à 10 millions de Français de toucher au 15 septembre un revenu supplémentaire. Il est vrai que le retard occasionné par la saisine, puis par la décision du Conseil constitutionnel, nous a empêchés de simplifier les déclarations. Que faire alors ? Ou l'on tente une exploitation politique de la situation, ou l'on travaille, comme je m'y emploie avec Mme Parly, les services des impôts, et la presse, pour que tous les Français concernés puissent effectivement toucher la prime. Je vais peut-être vous décevoir : elle sera bien versée et perçue au 15 septembre ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe RCV et sur quelques bancs du groupe communiste)

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POLITIQUE DE SANTÉ PUBLIQUE

M. Philippe Nauche - Vous avez, Monsieur le ministre délégué à la santé, affirmé une grande ambition. Vous voulez développer la sécurité sanitaire, l'éducation à la santé, et faire évoluer l'exercice médical vers davantage de complémentarité. Depuis les ordonnances de 1996, nous débattons bien plus, ici même, de la politique d'assurance maladie que de la santé publique, qui n'est abordée qu'en tant qu'élément annexe à l'ONDAM. Il y a donc un problème de cohérence entre le vote annuel de l'ONDAM, la définition d'une politique de santé publique de plus long terme et la réponse aux revendications touchant la politique de soins et de santé. Quelles actions concrètes entendez-vous mener sur ce terrain de la santé publique, et où en sont les projets de loi sur les droits des malades et sur la prise en compte des aléas thérapeutiques ?

M. Bernard Kouchner, ministre délégué à la santé - Oui, la santé publique fait figure de parent pauvre : sur les 900 milliards consacrés à notre système de soins, à peine 30 milliards sont dévolus à la santé publique, à la prévention et au dépistage. Comment faire ? Si nous pouvons présenter la loi de modernisation de notre système de santé, il nous faudrait prévoir, au lieu du traditionnel débat de septembre, une régionalisation du système, permettant, grâce à la remontée de l'état des besoins à Paris, de prendre véritablement la santé publique en considération au moment de la discussion relative à l'ONDAM. Ce que nous appelons la démocratie sanitaire, c'est la prise en charge de chacun. Ainsi, le dépistage du cancer du sein, jusqu'ici réservé à seulement 32 départements, sera généralisé par l'envoi d'une lettre invitant toutes les femmes entre 50 et 74 ans à se présenter, tous les deux ans. Le principe est accepté, et le budget obtenu.

Mme Nicole Bricq - Très bien !

M. le Ministre délégué - Reste à l'étendre à d'autres maladies comme le cancer colo-rectal. Je vous annonce, pour terminer, qu'Elisabeth Guigou et moi-même venons de signer avec les trois fédérations représentant les établissements de santé privés, un accord qui prévoit 600 millions de francs d'augmentation générale, 600 millions également pour des augmentations ciblées -ce qui permet une hausse identique dans les établissements publics et privés-, et une enveloppe de 100 millions de francs pour l'obstétrique. Cela permettra un nouveau départ, à condition que nous fassions pression sur les directeurs de cliniques pour qu'ils l'emploient bien à cet effet ! (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe RCV)

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CONGRÈS NATIONAL DU SNES À STRASBOURG

M. Bernard Schreiner - Le congrès national du SNES, qui vient de se terminer à Strasbourg, a tenté de réveiller la guerre scolaire en Alsace-Moselle, en s'en prenant violemment au statut local de l'enseignement public et à la convention Etat-région sur les langues régionales. L'intolérance sectaire et le jacobinisme dont ce syndicat fait preuve sont intolérables.

La croisade du SNES contre le statut local de l'enseignement est la meilleure preuve de la méconnaissance qu'il en a. Le statut local de l'enseignement public met en effet en place un régime de liberté pour l'enseignement religieux, qui n'est en rien contraire aux « principes républicains de laïcité ». Contrairement aux affirmations du SNES, en Alsace et en Moselle les parents peuvent choisir librement s'ils souhaitent ou non que leur enfant suive une instruction religieuse.

Enfermé dans sa tradition rétrograde, le SNES continue de refuser toute adaptation de l'éducation nationale aux réalités locales, alors qu'il s'agit là de la seule voie permettant de préparer l'avenir de nos enfants. La convention Etat-région sur les langues régionales n'a jamais eu pour objectif de contraindre un enfant « à apprendre la langue du voisin. » La maîtrise de celle-ci est simplement un atout majeur sur le marché du travail.

Comment comptez-vous répondre au SNES qui « exige » de vous que vous preniez des mesures dès la rentrée prochaine, en particulier sur le statut scolaire local. Allez-vous le suivre dans son sectarisme et son jacobinisme ?

M. Jack Lang, ministre de l'éducation nationale - Votre question mériterait plutôt d'être posée au SNES, syndicat que je respecte au même titre que tous les syndicats, et à l'endroit duquel je n'aurais pas employé les qualificatifs qui sont les vôtres (« Très bien ! » sur les bancs du groupe socialiste). Je n'ai qu'une réponse à vous apporter : le Gouvernement respecte les lois et les traditions historiques, parmi lesquelles, en Alsace-Moselle, celle du maintien d'un régime particulier, qui a été confirmé par les textes. Mais si, à vos yeux, l'unité et l'indivisibilité de la République n'empêchent pas la reconnaissance du pluralisme, puissiez-vous conserver cette philosophie lorsque nous débattrons de la loi sur la Corse ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

La séance, suspendue à 16 heures 10 est reprise à 16 heures 20, sous la présidence de M. Cochet.

PRÉSIDENCE de M. Yves COCHET

vice-président

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    PROJET DE LOI RELATIF À MAYOTTE

L'ordre du jour appelle la discussion, après déclaration d'urgence, du projet de loi relatif à Mayotte.

M. Christian Paul, secrétaire d'Etat à l'outre-mer - Les Mahorais ont exprimé il y a vingt-cinq ans le souhait que leur île soit maintenue au sein de la République française et ont toujours, depuis lors, confirmé cet attachement à notre pays.

Avant d'exposer le contenu d'un projet de loi qui s'inscrit bien dans cette histoire, je tiens à rendre hommage à tous ceux qui ont _uvré pour faire entendre les aspirations d'une population qui reconnaît dans nos institutions un espace où ses attentes et son identité peuvent être respectées.

Ma pensée va donc à Mayotte, à ses responsables politiques d'hier et d'aujourd'hui, aux signataires de l'accord sur l'avenir de Mayotte, dont l'histoire retiendra qu'ils furent des visionnaires. Ma pensée va aussi au Mouvement des femmes mahoraises, dont je sais le rôle. Je tiens également à saluer le travail de Jacques Floch, votre rapporteur, qui a pris à c_ur la cause de Mayotte et a su la faire entendre au sein de votre commission des lois.

Ma première observation, qui ralliera tous les esprits républicains, m'est inspirée par les déplacements que j'ai effectués à Mayotte, à plusieurs reprises ces derniers mois : l'attachement de cet ensemble d'îles et de leurs habitants à la France, à notre République est sans ambiguïté. La société mahoraise est une société ouverte ; son identité est le fruit d'une longue histoire et d'influences diverses : arabe, perse, malgache, bantoue, française. Elle n'est ni figée, ni arc-boutée sur des structures traditionnelles. L'aspiration des Mahorais à une évolution politique, économique et sociale témoigne de leur étonnante capacité d'adaptation et d'intégration.

Avec ce projet de loi comme avec l'ensemble des actions qu'il conduit pour l'île, l'Etat répond aux attentes des Mahorais désireux que leur île participe véritablement au développement national et saisisse toutes les opportunités. Certains ont pu parler d'urgence sociale à propos de la situation de l'île.

M. Henry Jean-Baptiste - Tout à fait.

M. le Secrétaire d'Etat - Il est dans nos intentions d'y répondre avec force. Le Premier ministre l'a montré avec solennité lors de son déplacement dans l'île, le 27 janvier 2001, en rappelant les efforts récemment engagés. J'y reviendrai tout à l'heure.

Un dernier enjeu est plus institutionnel. L'Assemblée nationale et le Sénat n'ont pas eu l'occasion de se prononcer très souvent sur le statut de l'île et le sort de nos concitoyens mahorais. Depuis 1976, Mayotte vit dans le provisoire. Je suis donc heureux de présenter aujourd'hui un texte qui mettra fin à cette situation qui a trop duré. La représentation nationale n'a pas à se sentir coupable, mais plutôt, en adoptant ce texte, à rattraper le temps perdu.

Quelques mots tout d'abord des conditions exemplaires dans lesquelles ce texte a été élaboré et qui donnent toute sa légitimité à cette démarche commune.

Le travail s'est déroulé en trois étapes. La première a permis de dégager les axes d'une réforme en profondeur du statut de Mayotte. Le Gouvernement a préparé un texte d'orientation, l'accord sur l'avenir de Mayotte, discuté point par point avec les principales forces politiques de l'île et signé le 27 janvier 2000 par l'Etat, en la personne de M. Jean-Jack Queyranne, auquel je souhaite rendre ici hommage, par le président du conseil général, M. Bamana, et par trois partis représentés au conseil général, le RPR, le PS et le Mouvement populaire mahorais.

La deuxième étape est fondamentale. Le Parlement a décidé de consulter la population mahoraise sur les orientations de l'accord. Le oui l'a emporté avec près de 73 % des voix, validation indispensable aux yeux du Gouvernement pour poursuivre la démarche : il n'était pas question d'imposer à Mayotte des décisions depuis Paris. Il s'agissait, au contraire, comme nous l'avons voulu dans les départements d'outre-mer avec la loi d'orientation du 13 décembre, d'associer la population aux projets de réforme.

Nous avons ensuite préparé le projet de loi au cours de l'automne. Je souhaite rappeler l'état d'esprit qui a régné pendant ces longues séances de travail, à Mayotte comme à Paris. Les signataires de l'accord, mais aussi les parlementaires de Mayotte, y ont pris part avec un sérieux et un engagement qu'il faut saluer.

Enfin, le projet de loi, qui a été présenté aux membres du comité de suivi en décembre dernier, a été adopté par le conseil général le 15 janvier 2001, par 14 voix sur 18.

Respect des engagements, transparence, recherche du consensus, consultation de la population, association des élus à toutes les phases de préparation : telle est la méthode que le Gouvernement a mise en _uvre.

Sur le plan institutionnel, ce projet est une réponse historique à vingt-cinq ans d'attente.

La loi du 24 décembre 1976 avait fait de Mayotte, de façon provisoire, une collectivité territoriale de la République, définie par l'article 72 de la Constitution. La consultation qui devait être organisée dans les trois ans, puis dans les cinq ans sur son statut n'a jamais eu lieu.

Il convenait de sortir de cette situation, pour trois raisons principales.

La première tient au fait que Mayotte fait partie de la République et ne peut cesser d'y appartenir sans le consentement de la population. Ce sont les termes de la Constitution, repris par l'article premier du projet.

L'insertion de Mayotte dans son environnement régional est un des chantiers majeurs des prochaines années. Les échanges sont déjà nombreux entre les différentes îles et ce projet de loi permettra à Mayotte d'espérer vivre en harmonie avec elles, notamment avec les Comores. Ceci ne sera pas facile. La collectivité départementale bénéficiera progressivement de tous les dispositifs existants dans les départements d'outre-mer, pour mener des actions de codéveloppement en matière de santé ou de protection civile par exemple.

La deuxième raison a trait aux institutions mahoraises. Comment une administration pourrait-elle être crédible et efficace alors que son statut est précaire et en l'absence de toute décentralisation ? L'accord sur l'avenir de Mayotte, que le Conseil constitutionnel a jugé conforme à la Constitution, a prévu la création d'une collectivité départementale. Placée dans le cadre de l'article 72 de la Constitution, elle bénéficiera progressivement du droit commun applicable aux régions et aux départements d'outre-mer. L'insertion de Mayotte dans la troisième partie du code général des collectivités départementales, consacrée aux départements, est la manifestation d'une véritable volonté politique, celle de réaliser l'alignement sur le droit commun le plus souvent possible et le plus tôt possible.

Les institutions mahoraises se verront ainsi appliquer la décentralisation. L'article 2 du projet propose de transférer l'exécutif, actuellement exercé par le préfet, au président du conseil général après le renouvellement de 2004, puis de conférer un caractère exécutoire de plein droit à ses décisions après le renouvellement de 2007. Le conseil général de Mayotte exercera alors pleinement ses nouvelles compétences, dans un cadre juridique sécurisé. A partir de 2010, il pourra, s'il le souhaite, proposer une nouvelle évolution statutaire au Gouvernement.

Les dix-sept communes de Mayotte ne sont pas oubliées. Elles ne se sont d'ailleurs pas trompées sur l'importance de l'évolution puisqu'elles ont massivement approuvé « l'accord sur l'avenir de Mayotte ». Créées en 1977, elles n'ont pas connu la décentralisation. Elles bénéficieront donc des dispositions du code des collectivités territoriales, qui posent les grands principes de la décentralisation. Surtout, le titre IV du projet dispose que de nouvelles compétences, telles l'exploitation des ports de plaisance ou la gestion des écoles maternelles et élémentaires, leur seront transférées. De nouvelles ressources financières leur seront donc attribuées. Une dotation de rattrapage et de premier équipement sera versée de 2002 à 2005. Un fonds intercommunal de péréquation, destiné à contribuer au fonctionnement et à l'investissement dans les communes, leur permettra de rattraper leur retard en équipements publics, par exemple pour la voirie, l'éclairage public, l'adduction d'eau ou encore les équipements culturels et sportifs. Pour le reste, l'extension des dispositions du code général des collectivités territoriales relatives aux communes sera réalisée par voie d'ordonnances.

Ces évolutions seront accompagnées d'un effort très important pour la formation des agents publics et des élus. Le contrat de plan y consacrera trente missions. Une mission du Centre national de la fonction publique territoriale a eu lieu récemment et des actions suivront très vites. La modernisation des moyens d'action de l'Etat et la clarification des compétences exercées par les différentes collectivités sont également engagées. La décentralisation à Mayotte appelle de la part de l'Etat un véritable effort, comme cela fut le cas en son temps en métropole et dans les départements d'outre-mer.

En ce qui concerne l'Europe, Mayotte est aujourd'hui au regard du droit communautaire un « pays et territoires d'outre-mer », qui a bénéficié d'environ 10 millions d'euros au titre du Fonds européen de développement entre 1996 et 2000. Ces crédits s'élèveront à environ 15 millions d'euros sur la période 2001-2006. Même si ces montants sont importants, le Gouvernement est déterminé à poursuivre les travaux avec Bruxelles pour que Mayotte relève à terme du droit commun des régions ultrapériphériques.

La troisième raison qui rendait l'évolution nécessaire est d'ordre juridique. Placée dans notre édifice institutionnel entre les territoires et les départements d'outre-mer, Mayotte, est depuis longtemps régie par un droit hybride et extrêmement complexe, favorable aussi peu à l'accès de tous aux règles de droit qu'au développement de l'île. Le Gouvernement a d'ores et déjà réalisé un important travail d'alignement sur le droit commun, notamment grâce aux ordonnances du printemps 2000 consacrées notamment à la réforme de l'état civil. Le projet de loi réalise de nouvelles avancées : dans toute une série de matières, il propose que le droit commun soit applicable de plein droit à Mayotte, sans mentions spécifiques.

Le deuxième volet du projet porte sur le développement économique de Mayotte. Ce texte donne en effet à Mayotte les moyens de prendre en compte son avenir et vient ainsi illustrer ce que le Premier ministre a appelé « un nouvel effort » pour Mayotte, lors de son déplacement dans l'île le 27 janvier.

Le contrat de plan signé le 8 septembre 2000 double les interventions de l'Etat, qui passent à 4,386 milliards, soit 877 millions par an. Ce nouvel effort permettra l'amélioration progressive des infrastructures de transport, notamment du réseau routier ou du port de Langoni, mais aussi celle du logement social, auquel sont consacrés 915 millions dans le contrat de plan.

En matière économique, différents outils donneront aux Mahorais les moyens d'exploiter leurs formidables potentialités.

L'équipement des collectivités et la création d'entreprises seront soutenus par une agence de développement qui prendra la forme d'un groupement d'intérêt public associant acteurs publics et privés et par un fonds mahorais de développement.

En outre, trois compagnies consulaires -chambre de commerce et d'industrie, chambre de métiers et chambre d'agriculture- se substitueront, avant la fin 2004, à l'actuelle compagnie consulaire.

En matière d'aménagement foncier, la collectivité départementale doit aussi pouvoir assurer un développement durable et équilibré. La pression foncière est une réalité. Un droit de préemption sera ouvert à la collectivité départementale, sauf dans la zone dite des cinquante pas géométriques.

En ce qui concerne la protection de l'environnement, le projet étend à Mayotte de nombreuses règles du code de l'environnement. La beauté du lagon, la richesse et la variété des ressources naturelles justifient cette modernisation.

Enfin, les Mahorais souffrent aujourd'hui de la carence des services publics. Ceux-ci, freinés par un droit inadapté, incarnent pourtant la solidarité nationale. La situation n'a, là aussi, que trop duré. Les tarifs de l'électricité sont beaucoup plus élevés qu'ailleurs en France. La poste n'est pas présente dans des conditions de droit commun. Dans le secteur de l'électricité ou des télécommunications, le droit commun s'appliquera dorénavant, tout en étant adapté aux réalités locales.

M. Henry Jean-Baptiste - Il était temps !

M. le Secrétaire d'Etat - J'ai la conviction que Mayotte est à un tournant de son histoire. En effet, c'est l'ensemble de la société mahoraise qui connaîtra un exceptionnel mouvement de modernisation.

Mayotte, société profondément attachante, est aussi, à plusieurs égards, une société tendue, qui connaît des difficultés sérieuses : en matière de logement, dans plusieurs zones de l'île, notamment dans la banlieue de Mamoudzou ; en matière, également, d'immigration clandestine. Le préfet de Mayotte, qui appliquera, à partir du 1er mai, de nouvelles règles à l'entrée et au séjour des étrangers, a mis sur pied récemment « le plan Lagon », qui renforce les moyens de l'Etat.

Toute vie sociale sera ainsi concernée par l'élan donné à Mayotte, au premier chef à travers les droits des femmes, le statut civil de droit local et la justice.

Les femmes sont l'élément stabilisateur de la société mahoraise, qui est matriarcale. Elles sont propriétaires de leur maison, leurs maris ne le sont pas. Les coutumes africaines tendent ainsi à neutraliser certains effets de la loi islamique. Les femmes mahoraises aspirent à une reconnaissance de leur rôle social. Elles sont d'ailleurs entrées massivement dans les 17 conseils municipaux de Mayotte, grâce à la loi du 6 juin 2000 sur la parité. Le nombre des conseillères municipales est passé de 20 à près de 250 soit 48,8 % des élus municipaux. C'est là une véritable révolution tranquille. La réforme de l'état des personnes engagée par ordonnances durant l'année 2000 doit se poursuivre. Ce projet de loi affirme ainsi que les femmes ayant le statut civil de droit local peuvent librement exercer une profession, percevoir les gains et les salaires en résultant et en disposer.

Le Gouvernement s'est engagé par ailleurs dans la modernisation du statut civil de droit local, inspiré du droit coranique, dans lequel s'inscrivent 95 % des Mahorais. Nous n'avons pas voulu imposer un dispositif qui aurait pu apparaître comme un déracinement pour certains, notamment pour les plus âgés, qui restent attachés à des traditions pluriséculaires. Ainsi, l'institution de la collectivité départementale ne signifie pas l'obligation de renoncer à ce statut reconnu par la Constitution depuis 1958.

En revanche, le projet simplifie les modalités de renonciation volontaire à ce statut au profit du statut civil de droit commun et organise les relations juridiques entre des personnes de statuts civils différents.

Le troisième volet est la réforme de la justice cadiale. Les cadis sont actuellement des agents de la collectivité territoriale de Mayotte qui assurent, pour la population de statut personnel local, des fonctions de juges, de notaires, de tuteurs et d'administrateurs. Le Gouvernement a souhaité répondre au v_u des élus en dotant Mayotte d'une organisation judiciaire modernisée. Les missions des cadis seront désormais recentrées sur la médiation et la conciliation et, lorsqu'ils exerceront des fonctions juridictionnelles, ils seront les assesseurs de magistrats professionnels. Ce dispositif devrait concilier les traditions locales et les impératifs d'une justice de notre temps.

Au-delà de ce projet de loi statutaire, je voudrais vous dire quelques mots sur la politique de développement social de Mayotte. Le Premier ministre Lionel Jospin en a tracé les grandes lignes, fin janvier, à Mayotte. Il a rappelé la méthode retenue en accord avec les élus, à savoir procéder par ordonnances.

Une loi d'habilitation a été soumise pour avis au conseil général de Mayotte et au Conseil d'Etat et le conseil des ministres l'examinera le 11 avril. Mon objectif est qu'elle soit votée au cours de cette session, de façon à pouvoir adopter dès l'automne les ordonnances concernant deux domaines majeurs, l'emploi et la protection sociale.

Le développement économique et celui de l'emploi doit aller de pair avec la mise en _uvre d'une protection sociale adaptée à la situation mahoraise.

En effet, si la protection sociale était dissociée du développement économique, elle produirait des effets pervers. Il faut que les Mahorais, en particulier les jeunes et les femmes, disposent avant tout de revenus tirés du travail. Nous voulons ouvrir à Mayotte la voie du développement et de la responsabilité, non celle de l'assistance.

Plusieurs dispositifs sont à l'étude pour développer l'emploi. Dès cette année, 300 emplois jeunes y seront créés pour développer des activités d'utilité sociale et satisfaire les besoins d'encadrement des associations et des collectivités locales.

Un cadre sera arrêté pour la création d'un régime conventionnel d'indemnisation du chômage en cas de licenciement économique, car aucune protection n'existe actuellement. Une réflexion est également engagée sur la façon d'indemniser le chômage partiel, l'activité économique dans une île étant plus sujette qu'ailleurs à des variations.

Le code du travail devra aussi être complété, pour mieux assurer, notamment, l'hygiène et la sécurité du travail.

Le statut des travailleurs indépendants, commerçants et artisans, ainsi que celui des exploitants agricoles, sera précisé. Tout doit être fait pour éviter un exode rural massif qui bouleverserait la société mahoraise.

J'en viens à la protection sociale. Rien ne justifie que de nombreux habitants bénéficient d'une protection faible, voire nulle dans des domaines aussi importants que l'enfance, la famille, la maladie, le handicap ou encore la retraite.

Notre première priorité portera sur l'enfance et la famille. Actuellement les allocations familiales sont d'un niveau modeste et versées exclusivement aux salariés, ce qui aggrave les inégalités sociales.

Elles seront généralisées par ordonnances à toutes les familles résidant à Mayotte. Les familles étrangères en bénéficieront si elles justifient d'une situation régulière et d'une durée minimale de résidence. La première étape, au 1er janvier 2002, concernera les travailleurs indépendants, la deuxième étape, courant 2002, toutes les autres familles. Le nombre de familles allocataires sera ainsi multiplié par trois.

Les allocations familiales seront également revalorisées fortement, d'abord le 1er octobre prochain, puis le 1er mars 2002. Ainsi, d'ici à un an, le montant des allocations familiales sera augmenté de 50 % environ pour les familles comptant un ou deux enfants, et de 33 % pour les familles de trois enfants ; la hausse sera plus faible au-delà, car la politique familiale doit favoriser la réduction de la natalité à Mayotte.

L'éducation est une priorité majeure pour Mayotte : 1,2 milliard de francs seront consacrés aux institutions scolaires, de 2000 à 2004, ce qui permettra de doubler en cinq ans le nombre des collèges et lycées. Pour que les élèves puissent les fréquenter dans de bonnes conditions, deux mesures seront prises rapidement.

L'allocation de rentrée scolaire, -150 F dans le primaire, 300 F dans le secondaire- sera portée, dès la rentrée, à 300 F dans le primaire et à 700 F dans le secondaire, dont 500 F seront versés à la famille et 200 F aux établissements pour l'achat de fournitures scolaires remises aux enfants.

Ensuite, une aide à la restauration scolaire sera versée aux gestionnaires. Un grand nombre d'enfants à Mayotte ne prennent pas de repas avant de partir à l'école et beaucoup n'ont pas non plus de repas à midi. Une telle situation n'est pas tolérable : nous voulons, avec les élus, favoriser la construction des restaurants scolaires, pour garantir une alimentation saine et régulière aux enfants mahorais.

Le montant minimal des allocations versées aux plus démunis sera augmentée progressivement. Actuellement, les personnes âgées ou handicapées perçoivent une allocation minimale de 420 F par mois seulement. La première revalorisation interviendra dans les mois qui viennent.

Voilà les prochaines mesures sociales, d'autres sont en préparation. Il fallait les évoquer pour avoir une vision complète de ce que nous voulons mettre en place à Mayotte.

Ce projet de loi est une inflexion majeure, attendue par les Mahorais. La maturité dont ils ont fait la preuve, ces trois dernières années, démontrent qu'ils sauront faire vivre la démocratie locale que ce projet institue.

Au-delà du statut de l'île, ce projet illustre la vision de la République qu'incarne l'outre-mer français : une République forte et cohérente, solidaire et tolérante, une République unie sans être uniforme. Mayotte a été pendant un quart de siècle dans l'insécurité et l'incertitude. Nous allons ensemble mettre fin à cette période, par une méthode adaptée, dont nous pourrons tirer des enseignements pour d'autres lieux de l'outre-mer.

Ce que Mayotte sera dans dix ans, nul ne peut le prévoir. J'ai toutefois la conviction que la voie pour un développement harmonieux et solidaire est ouverte. Les errements passés appartiennent à l'histoire et c'est désormais aux Mahorais qu'il revient de bâtir l'avenir de leur collectivité, dans la République (Applaudissements sur divers bancs).

M. Jacques Floch, rapporteur de la commission des lois - Nous avons eu un excellent débat à la commission des lois et j'en remercie particulièrement notre collègue Henry Jean-Baptiste, qui nous a fait des propositions constructives et adaptées à la situation.

Quelle est la situation ? Une petite île située dans l'océan Indien, entre Madagascar et les Comores, qui a une histoire longue et perturbée. Une petite île où résident 150 000 habitants et qui demande à la France de l'aider à instaurer plus de stabilité. Stabilité nécessaire pour permettre le développement culturel, social, économique et, dirai-je, le développement familial.

Nos concitoyens de Mayotte sont aujourd'hui français, avec un statut particulier et, il faut bien le dire, bâtard. C'est un legs de notre histoire coloniale. Depuis 1841 Mayotte fait partie de la communauté française, mais son mode d'appartenance à celle-ci a connu des variations. Elle fut rattachée aux Comores, cependant que sa réglementation dépendait de ce qui se passait à Madagascar. Après la seconde guerre mondiale vint l'époque de la décolonisation. Les Comores choisirent l'indépendance, sauf une île, Mayotte, qui a décidé de rester française. Les Mahorais ont pensé que la protection de la France pouvait leur apporter le développement dont ils ont tant besoin. M. le ministre s'est livré à une description qui fait apparaître le retard pris, non seulement par rapport à la métropole, mais à d'autres départements ou territoires d'outre-mer. A Mayotte 75 % de la population ne parlent pas encore le français, mais deux langues dérivées, l'une du bantou, l'autre d'un idiome malgache. C'est dire que l'école de la République n'a pas fait son travail, peut-être parce qu'on ne lui en a pas donné les moyens.

En outre le double statut dont peuvent bénéficier les Mahorais ne permet pas le plein développement des familles, et particulièrement des Mahoraises. Certes le droit issu du Coran n'a pas revêtu à Mayotte ses formes les plus intégristes, c'est le moins que l'on puisse dire. Comme dans tout l'Islam africain, il y a eu des accommodements, des interprétations. L'histoire des trois grandes religions du Livre connaît de telles démarches interprétatives, qui peuvent créer un certain écart avec le contenu strict des textes sacrés. Ces interprétations n'en ont pas moins été produites dans un contexte historique totalement différent de notre monde moderne. Et le problème que nous pose Mayotte est de trouver les formes d'organisation qui permettront à nos compatriotes mahorais de s'intégrer pleinement dans la République, avec leurs différences, et leur capacité à interpréter les lois de la République, cependant que nous accepterons leur culture et les règles sur lesquelles s'appuie la société mahoraise. Cela est-il possible dans le cadre de la République ? Les lois républicaines peuvent-elles s'appliquer dans un pays à 95 % musulman ? Notez que ce problème se pose aussi en métropole, l'Islam étant devenu la deuxième religion de France. Nous devrons donc nous poser cette question : peut-on être républicain et musulman ? Sur ce point Mayotte nous donnera peut-être des leçons, qui nous aideront à voir comment les lois de la République peuvent s'appliquer dans une région d'abord régie par les règles islamiques. En matière de droit des femmes, notamment, il existe de très mauvaises interprétations. Mais si l'on regarde ce qu'ont enseigné les docteurs de l'Islam, on constate que la femme peut avoir des droits égaux à ceux de l'homme, tout en pratiquant la religion musulmane.

Il faut penser à cela si l'on veut comprendre l'évolution que Mayotte est désormais susceptible de connaître. Ainsi nous disons que les filles ne pourront plus se marier avant quinze ans, alors qu'elles le pouvaient sitôt pubères. Mais cette mesure sera comprise de tous, grâce au développement de l'île, à la scolarisation, à une meilleure situation sanitaire, économique, culturelle. Chacun pourra comprendre que, pour se marier, il faut être en âge de comprendre l'engagement qu'implique cet acte. J'ai rencontré des jeunes gens et des jeunes filles du lycée de Mayotte : ils ont bien compris les raisons de notre choix. C'est ainsi qu'on pourra faire un pas vers l'application des lois de la République à un territoire tel que Mayotte.

Il y a eu un accord politique, qui engage la parole de la France, et tous les articles du texte sont fondés sur cet accord. Nous proposons une évolution tout au long des huit prochaines années, afin qu'à partir de 2010 les Mahorais puissent choisir leur avenir -dans le cadre, je n'en doute pas, de la République française. Pour assurer cette évolution, il faut faire un effort pour le développement. Cela exigera des moyens, mais pas seulement ceux de la France : l'appartenance de Mayotte aux régions périphériques de l'Union européenne devrait lui permettre de bénéficier de moyens communautaires au même titre que d'autres collectivités portugaises, espagnoles ou grecques. Par ailleurs, et j'appelle l'attention sur ce point, il n'y aura pas de développement à Mayotte si nous négligeons la coopération régionale et l'effort nécessaire de la France en direction des Comores et de Madagascar. Sans cet effort, et sans une relance très forte de notre coopération avec ces pays voisins de Mayotte, nous connaîtrons de graves difficultés internationales. Je compte sur le Gouvernement pour engager cet effort. Nos voisins comoriens et malgaches ont besoin de l'appui de la France pour assurer leur développement et peut-être leur stabilité politique.

Je demande à mes collègues d'adopter ce projet, parce que je crois que la République est capable d'accueillir tous ses enfants, et que son universalité doit permettre aux Mahorais d'être des nôtres (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur divers bancs).

M. Henry Jean-Baptiste - L'on se condamnerait à ne pas comprendre la patiente obstination de la population de Mayotte à réclamer un statut définitif dans la République si l'on négligeait le contexte historique ; M. le rapporteur l'a fort bien rappelé, et je l'en remercie. Mayotte, c'est l'histoire très singulière d'un petit peuple insulaire qui obtient dès 1841 de se placer dans la souveraineté française, pour se prémunir contre un environnement oppressif. Sur cette adhésion volontaire, Mayotte ne reviendra jamais, même quand se lève, dans les années soixante-dix, le vent des indépendances : contre le fameux « sens de l'histoire », mais avec l'appui, au Parlement français, de quelques amis fidèles, de toutes sensibilités politiques, Mayotte ouvre une brèche dans le prétendu droit de la décolonisation et crée ainsi son espace de liberté au sein de la République.

La loi de 1976, modifiée en 1979, que vous entendez abroger, Monsieur le ministre, a eu l'immense mérite d'apporter aux Mahorais des garanties essentielles -même si elle ne fut pas intégralement appliquée, mais à qui la faute ? Ce fut d'abord la consécration de la place -certes encore incertaine- de Mayotte comme collectivité territoriale de la République. En outre, la législation de 1976 et 1979 a ouvert aux Mahorais un véritable choix entre trois options statutaires. Mais c'est surtout l'espérance, qui n'a pas disparu, de voir Mayotte accéder au statut de département d'outre-mer. Nous avons pris acte des résultats de la consultation du 2 juillet 2000. Mais évitons tout malentendu : les 73 % d'électeurs qui ont approuvé le projet de collectivité départementale, en se disant « prenons déjà ce qu'on nous donne », n'ont pas renoncé, croyez-le, à la départementalisation. Ils ont voulu mettre un terme à une trop longue attente mais ils n'ont pas abandonné cette vieille espérance, portée par des générations de Mahorais. Vous ne pouvez davantage ignorer que la nouvelle configuration politique issue des toutes récentes consultations le confirme pleinement, avec l'émergence forte du mouvement départementaliste mahorais. Pour Mayotte, il y a là un enjeu de sécurité, juridique et diplomatique. Face à des revendications territoriales étrangères toujours vives, les Mahorais ont également compris -en particulier les plus jeunes- que le statut départemental pouvait permettre de combler les handicaps structurels du territoire.

L'examen de ce projet vient à point nommé au moment où, dans l'ensemble de l'outre-mer, se trouve posée la question des réformes institutionnelles. Les vieilles catégories établies en 1946 et reprises dans la Constitution de 1958 sont remises en cause.

Ainsi, la catégorie des TOM ne recouvre plus que Wallis et Futuna et les terres australes et antarctiques. S'agissant des DOM, plusieurs élus antillais ou guyanais avancent aujourd'hui des propositions d'approfondissement de la décentralisation et d'affirmation identitaire. Quant au projet de bi-départementalisation à la Réunion, j'ose espérer que le Gouvernement a tiré du résultat des dernières consultations électorales d'utiles enseignements sur l'avantage qu'il y a de répondre directement aux aspirations de la population ! L'outre-mer s'achemine vers une évolution institutionnelle différenciée, qui préfigure peut-être, même dans la France métropolitaine encore tellement centralisée, l'avènement d'une certaine liberté d'organisation au niveau local. Comment, dès lors, ignorer le discours de Madiana du Président de la République, évoquant les possibilités de « statut sur mesure » ?

De même, Mayotte a écouté avec la plus grande attention les propos de portée générale tenus récemment à la Réunion par le Premier ministre en faveur du statut départemental, présenté à juste titre comme un mode d'affermissement de la citoyenneté française et comme un puissant levier de développement économique et social. Pourquoi ces excellents arguments ne vaudraient-ils pas pour Mayotte, d'autant que nous avons admis que l'adaptation aux spécificités locales doit se réaliser à terme ? Pourquoi, dans ce mouvement général d'évolution pour l'outre-mer, Mayotte se trouverait-elle enfermée dans un projet de statut que nous n'avions envisagé que comme une transition et non comme un aboutissement ?

En dépit de plusieurs avancées que j'admets sans difficulté, ce projet de loi manque par trop de perspectives pour Mayotte et de moyens pour la mise en _uvre de ses dispositions. Le cap de la départementalisation n'est pas perdu de vue à Mayotte et l'horizon que vous nous proposez reste, Monsieur le ministre, peu dégagé.

Contrairement à ce qu'affirment à Mayotte certains commentateurs zélés, il n'y a dans ce texte ni « saut extraordinaire dans l'avenir », ni « nouvelle ère ». Le texte s'inscrit du reste dans la continuité des travaux des deux groupes de réflexion créés à ma demande qui ont travaillé de 1996 à 1998 et les propositions dans le domaine institutionnel figurent à la page 46 de cet excellent rapport ! Je regrette que certaines conclusions de la commission locale n'aient pas davantage inspiré les rédacteurs du présent projet et notamment celle-ci, qui prend la valeur d'un véritable engagement de la jeunesse de Mayotte : « La société mahoraise est prête à réaliser les efforts nécessaires pour s'adapter aux règles de fonctionnement de la République française et aux exigences de la modernité, à condition que cette évolution se réalise progressivement et de manière pragmatique ».

Bien sûr, il n'y a là qu'une déclaration d'intention mais lorsque l'on se veut à l'écoute des populations, il faut savoir entendre de tels appels plutôt que s'en tenir aux préjugés.

Ce projet de loi se situe dans la logique directe des quelque 45 ordonnances ou décrets d'application, qui, au cours des dernières années, ont visé à combler les lacunes du droit applicable à Mayotte. L'esprit général et la finalité de ces « trains d'ordonnances » étaient déjà de rapprocher Mayotte du droit commun départemental. D'ailleurs, l'article 55 du projet prévoit de poursuivre l'_uvre de mise à niveau juridique dans les domaines les plus divers.

Les mesures vont à l'évidence dans la bonne direction, de même que l'extension à Mayotte, d'importantes dispositions de droit commun de la partie législative du code général des collectivités territoriales ou l'application à la « collectivité départementale » de Mayotte des dispositions législatives concernant la coopération, le développement économique et social et les principes généraux de la décentralisation. A cet égard, vous avez eu raison, Monsieur le secrétaire d'Etat, de résister à certaines impatiences locales en maintenant l'application en trois phases -2004, 2007, 2010- du droit de la décentralisation. Certes, le dispositif sera complexe mais il incitera les gestionnaires et les élus locaux à enrichir leurs connaissances.

Ayant admis l'existence de nombreuses avancées, je ne suis que plus libre pour vous dire en quoi ce texte est condamnable. Il nous a été dit et répété qu'il marquait la fin d'une longue attente des Mahorais en permettant à Mayotte de sortir du statut « durablement provisoire » excellemment dénoncé par notre rapporteur. Soit. Mais à quel prix pour les Mahorais ?

D'abord, votre projet supprime la liberté de choix que leur garantissait la législation de 1976 et 1979. Il est, à cet égard, tout à fait significatif que la fameuse « clause de rendez-vous, en 2010 », prétendument destinée à dresser un bilan de la « collectivité départementale », en préalable à une éventuelle consultation de la population, a été quasiment vidée de son contenu.

Voici pourtant ce qu'en disait à cette même tribune votre prédécesseur il y a moins d'un an : « L'accord prévoit enfin une « clause de rendez-vous » fixée en 2010. A cette date, le Gouvernement et les principales forces représentatives de Mayotte feront le bilan d'application du statut de « collectivité départementale » et devront se prononcer pour doter l'île d'un statut définitif. Toutes les options sont laissées ouvertes -je le confirme- pour l'accord, y compris la transformation en département d'outre-mer et l'article 73 de la Constitution pourrait alors avoir évolué. Donc, dans dix ans, toutes les possibilités juridiques seront ouvertes ».

Or, l'article 2, alinéa 3, du projet prévoit simplement que le conseil général de Mayotte, à la majorité des deux tiers de ses membres, « peut » adopter une résolution portant sur une modification du statut de Mayotte. Ce dispositif, simplement facultatif, reste en deçà des engagements du Gouvernement comme des termes de l'accord du 27 janvier 2000 disant que « le Gouvernement soumettra au Parlement, en 2010, un projet de loi portant sur l'avenir institutionnel de Mayotte ».

Lors de son trop bref séjour à Mayotte, le Premier ministre...

M. le Secrétaire d'Etat - Il reviendra !

M. Henry Jean-Baptiste - Je m'en réjouis ! Le Premier ministre a bien voulu nous confirmer que toute proposition sera recevable et étudiée. N'est-ce pas -et c'est d'actualité- ce que l'on peut appeler une clause de service minimum ?

Le moins que je puisse faire est de chercher à rétablir par voie d'amendement au moins cette stipulation d'un accord dont vous avez vous-même souligné qu'il avait été approuvé par 73 % des électeurs. Les signataires mahorais risquent d'être fort surpris de cette violation délibérée des engagements pris par le Gouvernement sur la base d'un « accord » si solennellement proclamé !

Sur le fond, le texte, fondé sur l'article 72 de la Constitution, ne fera que proroger le système précédent en instillant un peu de droit départemental et de droit des régions d'outre-mer, notamment sous la forme de plusieurs « conseils » à compétence économique, sociale ou culturelle. On aurait pu faire l'économie de cette coûteuse « polysynodie » qui pèsera encore sur le budget de fonctionnement de la collectivité. A ce titre, il eût été plus raisonnable de ne pas céder à la tentation démagogique de se faire à bon compte des obligés en multipliant des postes et d'appliquer à Mayotte la formule retenue pour la Corse, soit celle d'un unique conseil économique, social et culturel.

De même, il n'est guère satisfaisant d'avoir écarté du projet la procédure de la consultation populaire, qui a toujours joué un rôle éminent dans toute l'histoire de Mayotte et qui, dans la loi d'orientation pour l'outre-mer est appelée à présider aux éventuels changements de statuts. Suivant nos traditions démocratiques, la population mahoraise devrait être appelée en 2010 à choisir, soit de demeurer dans la « collectivité départementale », soit d'accéder au statut de DOM.

M. le Rapporteur - Elle pourra même opter pour une autre formule !

M. Henry Jean-Baptiste - Privée de perspectives d'avenir et d'une finalité politique clairement établie, il est à craindre que la collectivité départementale conserve un régime hybride et mal assuré. En droit communautaire, Mayotte continuera d'être considérée comme un PTOM, éligible au FED et non aux fonds structurels, ouverts aux seuls départements d'outre-mer.

J'en viens aux moyens prévus par le titre VI en faveur d'un « rattrapage » dans les domaines économique et social. Les instruments en seront le fonds mahorais de développement, la dotation de rattrapage et de premier équipement des communes, le fonds intercommunal de péréquation et, pour la collectivité départementale, la dotation générale de décentralisation et les dotations forfaitaires ou de péréquation, avec des garanties de progression. Ces fonds seront alimentés par l'Etat et par le produit de certains impôts locaux tels que les centimes additionnels à l'IGR, les patentes et les impôts fonciers sur le non-bâti. Il serait cependant plus aisé d'apprécier ces innovations si leur application était précédée d'une évaluation et de projections chiffrées, voire de simulations sur les produits, les charges et leur répartition. Une évaluation de la dotation générale de décentralisation serait également utile ; il existe d'ailleurs bien une commission d'évaluation.

En l'absence de tels indicateurs, je me bornerai à trois observations. Je souhaite, en premier lieu, que l'article 54 du projet ne reste pas lettre morte. Il satisfait, en effet, une très ancienne demande formulée par les élus mahorais pour que l'Etat prenne en charge les dépenses régaliennes relevant de sa compétence, longtemps assumées par le budget de Mayotte. Pourquoi, dès lors, attendre 2004 pour alléger celui-ci de telles charges indues ? Je rappelle, en second lieu, que le produit de l'impôt foncier est encore limité à Mayotte, le cadastre parcellaire n'étant pas encore réalisé. L'impôt foncier n'est donc réellement perçu que sur une partie du territoire mahorais (Petite-Terre et Mamoudzou) mais à des taux prohibitifs en raison de son assiette réduite. Il est donc urgent de mener à son terme ce vaste chantier du cadastre mahorais.

Enfin, le projet de loi reprend, dans son article L. 3551-29, une proposition des parlementaires mahorais : l'élaboration d'un plan de développement durable de Mayotte. N'est-ce pas là le moyen le plus sûr de coordonner les moyens, les objectifs et les priorités ?

Le fonds mahorais de développement s'inscrit dans le même projet de coordination des concours de l'Etat, de la collectivité départementale et de la Communauté européenne. Il est temps -et vous l'avez compris- de poser le problème de l'éligibilité de Mayotte aux fonds structurels européens et d'ouvrir par conséquent, comme nous l'avons nous-mêmes tenté plusieurs fois en nous rendant à Bruxelles, des négociations avec les autorités communautaires. Or, l'accord du 27 janvier demeure, curieusement, muet sur ce point. Mayotte reste donc soumise au régime d'association à l'Union européenne applicable aux PTOM français au même titre qu'aux pays ACP !(Afrique-Caraïbes-Pacifique)

Ces fonds structurels occupent pourtant une place grandissante dans le financement du développement de l'outre-mer, notamment de celui des DOM. L'écart entre ces derniers et Mayotte est de 1 à 12 en leur faveur. On aide ainsi douze fois moins ceux qui en ont le plus besoin, simplement parce que le critère juridique l'emporte sur les critères socio-économiques. Vous avez mesuré cette incohérence, qui est le signe tangible de l'effet d'entraînement que peut jouer le statut en faveur du développement. Que reste-t-il donc aujourd'hui de la vieille requête mahoraise en faveur de la « départementalisation » ?

Je ne pense pas que le prétendu obstacle diplomatique soit insurmontable : personne n'y prête plus guère attention, ni à l'ONU, ni ailleurs, même si les difficultés des Comores font de Mayotte un alibi permanent, et pour peu que certains diplomates cessent de considérer la « question de Mayotte » comme une affaire dérisoire.

Plus sérieusement, l'on nous oppose les dysfonctionnements de l'institution départementale outre-mer, comme si Mayotte était condamnée à réitérer les mêmes erreurs. Or, le développement de Mayotte peut être conduit en assurant les équilibres socio-économiques, dont l'absence a handicapé l'économie productive des départements d'outre-mer. La récente proposition de loi de Pierre Méhaignerie sur l'expérimentation dans les collectivités locales, rapportée par Emile Blessig, y trouverait de justes applications.

Il faut enfin répondre à l'argument sociologique, sociétal et culturel : Mayotte serait une société trop différente par sa religion, ses m_urs, sa tradition, jugées incompatibles avec la « norme » républicaine. Ces arguments étonnent de la part de ceux qui font du progrès des sociétés et de l'évolution sociale l'une des clés de l'histoire universelle. D'ailleurs, de quelle Mayotte s'agit-il ? Elle évolue rapidement, en particulier grâce aux femmes et aux jeunes générations.

La réponse sera donc double : elle réside dans cette diversité culturelle française, dont l'outre-mer témoigne également, comme dans les capacités d'intégration de ce pays, à condition qu'il y ait, en face, une ferme volonté d'adhésion : toute l'histoire de Mayotte le prouve, aujourd'hui comme hier.

Je suis convaincu de la pérennité du discours de Renan et de sa conception de la Nation, qui n'est pas affaire de race, de religion, de simple intérêt... mais qui résulte, je le cite, d'un « vouloir vivre ensemble », d'un « plébiscite de tous les jours ». Ces mots furent prononcés lors d'une conférence à la Sorbonne, le 11 mars 1882... Mayotte était française depuis 41 ans...

Libre à chacun d'ignorer ces principes, de les écarter de la recherche d'un statut définitif pour Mayotte, mais les Mahorais continueront de plaider pour la sauvegarde de leurs libertés et de leurs chances de progrès économique, social et culturel dans la République.

Ce projet de loi, dont je ne méconnais pas les mérites, ne répond cependant entièrement ni aux aspirations profondes de la population mahoraise, ni aux intérêts fondamentaux de Mayotte. De vos réponses à mes propositions dépendront l'appréciation et le vote du groupe UDF (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF).

M. Jean-Pierre Michel - Il me semble, à moi qui suis membre de la commission des lois depuis vingt ans et qui entends parler de façon récurrente de Mayotte comme d'un problème jamais résolu, qu'il faut mettre au crédit de ce Gouvernement -notre collègue Henry Jean-Baptiste aurait pu au moins le reconnaître- d'avoir pris ce problème à bras le corps et de nous proposer ce projet de statut pour Mayotte, qu'une grande partie de sa population approuve. Mayotte entend rester dans la République française avec son originalité -et le projet le dit clairement. L'idée générale qui l'inspire est que la législation mahoraise doit se rapprocher le plus vite et le plus tôt possible de la législation de la République. Je préfère de loin cette méthode à celle que le Gouvernement a choisie pour la Corse, qui tend au contraire à l'éloigner de la République. Certes, la société mahoraise doit évoluer à son rythme vers nos valeurs fondatrices. Mais je préfère invoquer, au lieu de l'alinéa 2 de l'article 3, l'article premier, qui opte pour un règlement du problème dans le cadre de la Constitution et de la République, en garantissant à Mayotte et à ses habitants qu'ils demeureront dans la République, à l'abri des revendications des Etats environnants. Cela n'en constitue pas moins, pour le MDC, un pas vers la création d'un département à part entière. C'est pourquoi nous soutenons ce projet. L'aspect institutionnel se trouve provisoirement réglé, donnant ainsi à la société et aux dirigeants mahorais la sécurité juridique sans laquelle on ne peut aller plus loin.

Les graves problèmes économiques et sociaux que connaît l'île pourront ainsi être abordés avec plus de clarté et de détermination. S'agissant des aides à la famille et des allocations chômage, nous prenons acte des annonces faites tout à l'heure par le ministre. Se posent également des problèmes d'éducation et de formation dans l'île : une grande partie de la population ne parle pas le français et va devoir peu à peu l'apprendre. Un effort sera également nécessaire pour donner aux élèves un environnement plus favorable aux apprentissages : ainsi n'existe-t-il aujourd'hui aucune cantine scolaire à Mayotte ! Il faudra aussi favoriser le développement économique de l'île, en particulier de son agriculture et de sa pêche. L'agrandissement de l'aéroport, de façon qu'il puisse accueillir de gros porteurs, et la fin du monopole d'Air Austral seront des éléments favorables. Des efforts enfin devront être consentis pour mieux assurer la sécurité des personnes -vous n'avez que peu abordé ce point, Monsieur le ministre- et maîtriser l'immigration sauvage qui sévit dans l'île, au risque de déstabiliser cette petite collectivité.

Je ne doute pas que les Mahorais sauront faire vivre et évoluer ce nouveau statut. Permettez-moi d'adresser le salut amical des députés MDC aux deux conseillers généraux de notre parti élus à Mayotte. Comme nous faisons confiance aux Mahorais, nous faisons confiance à l'universalité de la République qui trouve ici une éclatante illustration (Applaudissements sur les bancs du groupe RCV et du groupe socialiste).

M. Henry Jean-Baptiste et M. Robert Pandraud - Très bien !

M. Gilbert Gantier - Le 8 février 1976, les Mahorais ont rejeté l'indépendance à la quasi-unanimité. La loi du 24 décembre 1976, tenant compte de cette position, a érigé Mayotte en collectivité territoriale sui generis sur le fondement de l'article 72 de la Constitution. Le statut qui lui fut alors conféré et qui n'était que temporaire a finalement été prorogé de cinq ans par la loi du 22 décembre 1979... et dure toujours.

Depuis lors, la population de Mayotte n'a eu de cesse de vouloir confirmer son appartenance à la République. Plusieurs gouvernements se sont engagés à lui permettre de se prononcer sur l'avenir institutionnel de l'île. C'est donc avec une certaine satisfaction que les députés du groupe DL ont pris connaissance de ce texte qui, même s'il n'est pas parfait, marque des avancées significatives. Je salue le travail de notre excellent collègue Henry Jean-Baptiste, que j'ai eu le plaisir de rencontrer sur place et qui, depuis de nombreuses années, milite pour une meilleure intégration de Mayotte dans nos institutions.

Mayotte a déjà trop attendu : il faut donc saisir cette occasion de sortir l'archipel de l'impasse institutionnelle dans laquelle il se trouve.

En effet, cette collectivité territoriale connaît une situation juridique tout à fait particulière. Soumise au principe de spécialité législative, selon lequel les lois de la République ne lui sont applicables que si elles le prévoient expressément, à l'exception bien sûr des lois dites de souveraineté, Mayotte constitue une société à part au sein de l'ensemble français. Sa population, en très grande majorité musulmane, n'est pas soumise au code civil français mais bénéficie d'un statut personnel inspiré du droit islamique. De plus, de nombreux Mahorais ne parlent pas le français. Il n'existe pas non plus sur l'île d'état civil au sens où nous l'entendons en France. Enfin, si la situation économique et sociale de Mayotte est moins catastrophique que celle des Comores voisines, elle demeure précaire.

Si nous demeurons attachés à l'intégration de Mayotte à la République, nous nous demandons si l'archipel est capable, en quelques années, de se transformer aussi radicalement qu'il serait nécessaire pour normaliser totalement son droit selon les critères métropolitains. Sans vouloir rompre le lien fort qui nous unit à sa population, nous devons reconnaître que la situation économique, juridique et social de l'archipel ne permet pas d'envisager à court terme d'en faire un département d'outre-mer.

En attendant cette départementalisation, qui doit demeurer un objectif affiché, il ne serait pas raisonnable de maintenir un statu quo que les Mahorais eux-mêmes acceptent mal.

En effet, l'incertitude institutionnelle handicape le développement économique de Mayotte. La démographie galopante de l'île, les problèmes graves liés à l'immigration clandestine, en provenance notamment d'Anjouan, le taux de chômage élevé puisque près de 30% de la population est sans travail : autant de problèmes qui ne peuvent trouver de solutions dans le cadre juridique actuel. Toute politique de développement passe nécessaire par l'adoption d'un véritable statut permettant à l'île d'envisager avec confiance l'avenir.

Les problèmes sont nombreux. La commission des lois a ainsi pu constater, lors de sa mission sur place sous la conduite de Catherine Tasca, que de nombreux services publics étaient financés par la collectivité territoriale et non par l'Etat. Le problème de l'éducation est crucial pour l'avenir de l'île. En raison de l'évolution démographique, le nombre d'enseignants demeure insuffisant, bien que l'on ait nommé beaucoup plus de nouveaux maîtres à Mayotte que dans de nombreux départements métropolitains... En dépit de l'inauguration du nouvel hôpital de Mamoudzou, l'état sanitaire de la population demeure inquiétant.

Enfin, alors que Mayotte est située dans l'un des plus beaux lagons du monde, l'absence d'infrastructures et l'enclavement la prive des revenus qu'elle pourrait tirer du tourisme. La piste d'atterrissage de l'aéroport ne permettant pas aux gros porteurs de se poser, il faut faire escale à La Réunion ou à Madagascar avant de rejoindre l'île avec de plus petits appareils. L'absence de liaison aérienne directe avec la métropole handicape lourdement l'économie de l'île.

L'impossibilité de transformer Mayotte en DOM ne signifie pas renoncer au maintien de l'île dans la République, ni encore moins renoncer à assurer son développement économique. Mayotte deviendra, aux termes de ce texte, une « collectivité départementale » dont « l'organisation juridique, économique et sociale se rapprochera le plus possible du droit commun et sera adaptée à l'évolution de la société mahoraise ». Prenant acte du relatif consensus qui s'est établi autour de ces propositions, le groupe DL votera favorablement tout en restant extrêmement vigilant sur l'avenir de Mayotte et son maintien dans la République (Applaudissements sur les bancs du groupe DL, du groupe UDF et du groupe du RPR).

M. Jean-Yves Caullet - En entrant, il y a vingt ans, dans mon bureau au ministère de l'outre-mer, j'ignorais quasiment tout de Mayotte. Ce n'est que peu à peu que j'ai découvert cette île si particulière, confrontée à de nombreux problèmes, concernant notamment son avenir institutionnel et son développement économique, auxquels bien peu de réponses étaient apportées.

Mayotte est en train de sortir d'une longue période d'incertitude pour ses habitants mais aussi d'ignorance par nos concitoyens. La situation actuelle ne pouvait perdurer. Le présent projet de loi, fondé sur un accord politique dépassant les clivages partisans, permet d'en sortir : il faut en rendre hommage au Gouvernement et à tous ceux qui ont participé à l'élaboration du texte. J'espère que nous l'adopterons à une large majorité transcendant elle aussi les clivages traditionnels, apportant ainsi la preuve que l'outre-mer, qui si souvent nous déchire, peut aussi nous rassembler. L'action conduite par ce gouvernement et sa majorité, en concertation avec les intéressés, a d'ailleurs permis de décrisper la situation outre-mer : il faut s'en féliciter car c'est cette crispation qui a rendu l'évolution passée de l'outre-mer si douloureuse et chaotique.

Ce texte permet à Mayotte d'envisager clairement l'avenir et de sortir du blocage institutionnel actuel en lui conférant un statut véritable, ce qui est essentiel même si à lui seul, un statut ne suffit pas.

Ce texte échappe à la mauvaise logique du tout ou rien. Bien au contraire, il tient compte des réalités, ouvre des perspectives claires et propose des voies pour une évolution, acceptée par les Mahorais et conduite par eux.

Ce projet vise aussi à inscrire Mayotte dans l'évolution de l'ensemble de l'outre-mer français. Les différents statuts des collectivités ne portent plus à des conséquences aussi tranchées qu'auparavant. Mayotte cesse d'être une singularité en creux pour devenir une des collectivités de la République. Enfin, l'évolution concerne les relations de la France avec ses régions, mais aussi avec l'Europe et même le monde. L'existence de l'outre-mer français a toujours été une chance pour la République. C'est maintenant aussi une chance pour l'Europe. Mayotte n'est pas isolée et elle ne doit pas, par une organisation trop différente, être conduite à s'opposer à ses voisins.

Mayotte sort aujourd'hui d'une période qui n'était favorable ni au développement ni au droit. Demain, ses institutions ne seront plus un carcan, mais un cadre qui permettra une évolution respectueuse de la volonté de la population, instrument de la construction d'un avenir collectif. Je pense que nous serons tous fiers d'avoir fait un grand pas pour son avenir (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. Henry Jean-Baptiste - Très bien.

M. Robert Pandraud - Enfin, un projet de loi constructif pour Mayotte. M. le ministre a beaucoup de mérite d'avoir assimilé toutes les contraintes juridiques qui entraient en compte. 1976 peut paraître loin, mais il faut reconnaître que les difficultés, tant constitutionnelles que pratiques, étaient nombreuses.

Après la consultation du 2 juillet 2000, nous devons aujourd'hui franchir une étape décisive pour mettre un terme à l'incertitude institutionnelle, qui entraverait aussi le développement économique de l'archipel. Le RPR souscrit logiquement à cette démarche.

Le 6 avril 2000, il avait déjà voté le projet de loi organisant la consultation sur le statut de Mayotte avec d'autant plus de conviction qu'il faisait partie des trois partis politiques du conseil général qui ont signé l'accord du 27 janvier 2000.

Les Mahorais ont approuvé à près de 73 % cet accord et ce vote massif constitue un succès pour le RPR et pour son secrétaire départemental, Mansour Kamardine, qui avait mené activement campagne pour le oui.

Il convient aujourd'hui de construire un nouvel équilibre selon une approche pragmatique qui prenne en compte la complexité sociale, historique et culturelle de Mayotte.

C'est par un traité de 1841 que Mayotte est devenue française. En 1946 l'archipel obtient le statut de territoire d'outre-mer. Son attachement à la France est ancien et solide : en 1974 les Mahorais refusent de quitter la République française alors que les autres habitants des Comores se prononcent, peut-être imprudemment, en faveur de l'indépendance.

La loi de 1975 relative aux conséquences de l'autodétermination des îles Comores a permis à Mayotte de choisir le maintien dans la République française.

En 1976, des Mahorais refusant de conserver leur statut de territoire d'outre-mer, une loi érige provisoirement l'archipel en collectivité territoriale sui generis. Elle prévoyait au terme d'un délai d'au moins trois ans, une nouvelle consultation qui n'a jamais été organisée. Il aura fallu attendre l'année 2000.

La population mahoraise n'a cessé, par ses élus et son député, de témoigner son attachement indéfectible à la France, tout en exprimant, on le comprend, son souhait de bénéficier d'un statut pérenne. L'accord du 27 janvier et le projet adopté le 6 avril lui répondent enfin. On peut se réjouir qu'ils n'aient, pas plus que la loi de 1976, été soumis au Conseil constitutionnel, car je ne suis pas sûr qu'ils auraient été validés. Quoi qu'il en soit, le vote massif de la population montre son adhésion au processus prévu pour les dix années à venir.

Cet accord attribue à Mayotte le statut de collectivité départementale, un statut taillé sur mesure afin de rapprocher ses institutions politiques et sociales du droit commun métropolitain. Il engage clairement l'île sur la voie de la modernisation et constitue une reconnaissance de la spécificité mahoraise.

Ce long projet de loi, qui compte 64 articles, organise la transformation de Mayotte en collectivité départementale.

Dans son volet statutaire, il prévoit un alignement progressif sur la métropole : accroissement des compétences du conseil général, transfert, en 2004, du pouvoir exécutif du préfet au président du conseil général, suppression en 2007 de la tutelle a priori. Les délais, qui peuvent paraître longs, sont souhaitables compte tenu des inerties administratives. Un « rendez-vous » important est pris pour 2010, date à laquelle le conseil général proposera au Gouvernement une nouvelle évolution de statut.

Un second volet concerne le développement économique. Il faut aujourd'hui donner à Mayotte toutes les chances de le maîtriser, et de rattraper la métropole. Il s'agit essentiellement de créer un fonds mahorais de développement, une agence de développement et trois chambres consulaires et d'étendre à Mayotte les dispositions du code de l'environnement. Cependant, d'autres efforts, qui ne sont pas mentionnés, restent à accomplir, notamment dans le domaine de la santé ou de l'éducation.

Je formulerai deux souhaits. D'abord, que l'extension progressive de la décentralisation commence dès 2002, ainsi que le demande le conseil général. Ensuite, et surtout, que la création des trois chambres consulaires ait lieu dès cette année. En effet, le développement économique de l'île passe par une participation effective et active des Mahorais dans le processus, et notamment à travers ces chambres consulaires.

Le volet social enfin amorce une profonde évolution de la société mahoraise, actuellement régie à 95 % par un statut civil de droit local. Là aussi, il faut sortir du prisme français classique. Nous devons aider les Mahorais à progresser vers le droit commun en respectant les spécificités de l'île, presque exclusivement musulmane.

Je pense qu'il est possible de concilier la nouvelle identité législative de Mayotte avec le respect des particularismes. Ce sera un bel exemple pour la France tout entière.

M. Henry Jean-Baptiste - Très bien !

M. Robert Pandraud - Trois exigences sont à prendre en compte. Il faut d'abord dépasser la question statutaire en accueillant sans arrière-pensée et définitivement Mayotte dans la République, et en lui donnant le statut qui répond à ses besoins.

Il faut ensuite poursuivre et amplifier le développement. Beaucoup de progrès ont été faits. Le plan décennal de Bernard Pons, en 1987, a permis de réaliser un port en eau profonde, d'allonger la piste de l'aéroport et de construire des logements sociaux adaptés. Plus récemment, MM. Perben, de Peretti, Gaymard et les ministres de votre majorité ont aidé à construire un hôpital et des écoles.

Mais c'est peu dire qu'il reste beaucoup à faire.

Troisième exigence : il faut, enfin, que Mayotte s'insère pleinement dans son environnement régional.

C'est à la lumière de ces exigences que je vous invite à voter en faveur de ce texte que nous attendions depuis longtemps.

M. le Rapporteur - Très bien !

Mme Martine Lignières-Cassou - Ainsi, après 25 ans de statut provisoire, nous allons, conformément aux v_ux des Mahorais, donner à Mayotte un statut plus proche du droit commun des collectivités de la République.

Faire de Mayotte une collectivité à vocation départementale permettra de lui donner une identité juridique claire, notamment auprès des instances européennes, et de mettre fin aux spéculations sur son avenir au sein de la République.

Ce nouveau statut, prévu pour dix ans, est accompagné de mesures qui favoriseront le développement économique et la modernisation de la société mahoraise.

Cette modernisation permettra de prendre en compte les attentes d'une société multiculturelle. Si la scolarisation a conduit à un changement des aspirations chez les jeunes générations, il est impossible actuellement de donner à Mayotte le statut de département d'outre-mer : en effet 95 % de la population est régie par un statut personnel fondé sur le droit musulman, auquel se mêlent des éléments de coutume africaine et malgache. Le statut de DOM empêcherait cette population de continuer à en bénéficier alors qu'elle y est majoritairement attachée. Une évolution est nécessaire, mais elle ne peut être que progressive.

Je m'attarderai un peu sur le droit des femmes à Mayotte. Le statut civil de droit personnel appliqué à 95 % des Mahorais et inspiré du droit coranique porte notamment sur le mariage, la garde des enfants, l'entretien, la filiation, la séparation des époux. Or ce droit local consacre certaines situations d'inégalité, en particulier entre les hommes et les femmes.

Les changements démographiques et économiques intervenus au cours des vingt dernières années font imploser le modèle familial traditionnel. Le nombre des femmes célibataires est en forte augmentation, même si le mariage reste le modèle dominant. Mais la majorité des femmes n'ont pas été scolarisées -92 % ont un niveau inférieur au CM2- et éprouvent d'énormes difficultés à trouver un emploi -les femmes représentent 70 % des demandeurs d'emploi.

Or de nombreux droits sont subordonnés à l'exercice d'une activité salariée, notamment le droit aux allocations familiales. L'accord de Paris du 27 janvier 2000 prévoit que les droits des femmes mahoraises seront confortés. Quelle sont donc les réformes engagées en ce sens ?

L'ordonnance du 8 avril 2000 garantit le principe fondamental de la liberté matrimoniale. L'âge minimum de mariage a été fixé à 15 ans pour la femme, la comparution personnelle des époux et la présence de l'officier d'état-civil sont obligatoires.

La parité est entrée en vigueur lors des élections municipales de mars 2001.

Des ordonnances sont en cours de préparation pour développer l'emploi des femmes et faciliter les gardes d'enfants.

Enfin ce projet de loi lui-même facilite le passage du statut de droit local au statut de droit commun, plus favorable aux femmes sur de nombreux points, et il donne des droits nouveaux aux femmes ayant le statut de droit local : elles pourront exercer librement une profession indépendante ou salariée et disposer de leurs revenus et biens propres, ce qui n'est pas le cas actuellement. Ce principe semble aller de soi en métropole, mais il faut se rappeler que la possibilité pour une femme mariée de disposer librement de ses biens ou de son salaire n'a été reconnue dans le code civil que dans les années soixante...

Il n'en est pas moins nécessaire de mener une politique volontariste pour que le droit mahorais respecte le principe d'égalité des femmes et des hommes, inscrit dans notre Constitution et au c_ur des valeurs de la République. La reconnaissance de statuts locaux ne saurait prévaloir sur ce principe.

Mais puisque la plupart des Mahorais garderont, dans l'immédiat, leur statut de droit local, il convient de le réformer progressivement. La juridiction cadiale est ainsi remplacée par une juridiction de droit commun complétée par des assesseurs cadis. De plus, les droits sociaux seront étendus par ordonnance dès cette année : généralisation des allocations familiales, augmentation de l'allocation de rentrée scolaire et de l'allocation des personnes handicapées. Le projet autorise le Gouvernement à mettre en place un dispositif pour l'emploi qui devrait bénéficier aux femmes : création d'emplois-jeunes, statut pour les professions indépendantes, convention pour l'indemnisation du chômage.

En conclusion, ce projet, dont les orientations ont été approuvées par la grande majorité des Mahorais, permet de garantir le lien qui unit Mayotte à la France, tout en conservant certaines particularités du droit des personnes.

L'égalité entre hommes et femmes reste un objectif prioritaire et il faudra mener des actions en ce sens.

La création, vingt-cinq ans après son annonce, d'un statut particulier à Mayotte, ancre celle-ci dans la République et s'accompagne d'engagements significatifs de l'Etat, marquant ainsi l'attachement de la République à Mayotte (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur divers bancs).

M. le Secrétaire d'Etat - Je voudrais remercier tous les intervenants dans leur contribution à ce débat et dissiper quelques inquiétudes.

Monsieur le rapporteur, je vous remercie d'être allé à Mayotte, de sorte que votre rapport épouse la réalité de cette île. Vous avez bien identifié un des points d'équilibre de ce projet : il fallait engager un mouvement vers le droit commun tout en respectant l'identité de Mayotte. Oui, l'Outre-mer est une école de diversité : Mayotte et l'Outre-mer inspirent la République.

Vous avez évoqué la nécessité de renforcer la coopération régionale. Nous allons, avec mes collègues Josselin et Kouchner, relancer cette coopération régionale dès que les conditions politiques seront réunies. Nous avons la volonté de prendre très rapidement des initiatives fortes en ce domaine.

Monsieur Jean-Baptiste, vous êtes le représentant de Mayotte dans cette Assemblée et je voudrais vous répondre plus longuement. Vous avez rappelé l'attachement de Mayotte à la République.

Chacun doit contribuer à ce débat, qui devrait permettre non seulement au Parlement, mais à tous les Français de porter un regard neuf sur Mayotte, qui a souffert de trop d'ignorance et d'indifférence, et c'est un des enjeux de ce débat que d'y remédier. Mayotte est loin, sinon du c_ur, du moins dans l'espace. Il importe donc d'informer très exactement le Parlement sur l'île et les attentes de ses habitants, et chacun s'y est efforcé aujourd'hui. Mais, réciproquement, il ne faut pas induire les Mahorais en erreur sur les intentions du Gouvernement, et sur ce point je crois que nous avons encore un peu de chemin à faire. J'espère pouvoir préciser ces intentions sur certains points à propos desquels vous avez exprimé des inquiétudes. Je veux vous faire part d'une conviction, qu'ont corroborée mes déplacements à Mayotte : lorsqu'en juillet 2000 les trois quarts des Mahorais ont approuvé l'accord sur l'avenir de Mayotte, ils ne l'ont pas fait par opportunisme, pour engranger les acquis sociaux de cette réforme.

Monsieur Jean-Baptiste - Je n'ai jamais dit cela !

M. le Secrétaire d'Etat - Je crois qu'ils ont adopté cet accord par sagesse, parce qu'ils veulent que Mayotte avance par étapes, sans déracinement, sans déchirement de la société mahoraise. Et ils ont compris que l'issue d'une réforme plus lourde, plus complexe, serait incertain. Ils n'ont pas voulu de Grand Soir pour Mayotte. Et beaucoup d'entre eux pensent que ce 4 avril 2001 est un grand jour pour leur archipel. Pour l'avenir, tout est ouvert ; mais plus rien n'est incertain, et c'est à cette incertitude que nous voulions remédier. Cette ouverture, qui permettra de nouveaux progrès en 2010 si Mayotte le souhaite, n'est pas source d'insécurité ou d'instabilité.

Durant ces dix ans, Mayotte est invitée à donner la priorité au développement économique, à l'amélioration des conditions de la vie quotidienne ; et je préfère les progrès concrets aux revendications peut-être trop formelles.

La clause de rendez-vous permettra d'ailleurs, en 2010, de faire le point. Et comme l'a dit l'an dernier M. Queyranne, dans la discussion du texte qui organisait la consultation de juillet 2000, toutes les options sont laissées ouvertes, y compris la transformation de Mayotte en département d'outre-mer. Mais pour une départementalisation immédiate, il aurait fallu une réforme lourde, avec notamment la création d'un conseil régional -ainsi le veut la jurisprudence du Conseil constitutionnel-, réforme qui eût été peu compréhensible pour nos concitoyens mahorais. En outre, à l'heure où beaucoup, ici et là-bas, réfléchissent à l'évolution du statut des DOM, il serait sans doute dommage de plaquer sur Mayotte, sans vraie réflexion et à Constitution inchangée, le statut de département d'outre-mer tel que défini par la loi du 19 mars 1946.

Ceux qui l'an dernier ont souhaité une départementalisation immédiate ont peut-être fait preuve d'un peu de précipitation, eu égard à la réalité mahoraise d'aujourd'hui. Le Gouvernement souhaite que Mayotte se transforme en profondeur, mais à un rythme apaisé, sans rupture. Et nous mettons en place, au-delà de ce projet de loi, les outils de cette modernisation ; j'ai rappelé l'ensemble des réformes engagées. Cette démarche, je le crois, est bien comprise à Mayotte.

M. Michel a souligné combien ce projet, et notamment son article premier, consolidait l'ancrage de Mayotte dans l'ensemble français, et il a rappelé les garanties renouvelées que lui apporte le texte.

M. Gantier a reconnu les avancées de ce projet. Il a évoqué un atout considérable dont dispose Mayotte pour l'avenir : le tourisme. En écho à sa préoccupation, que partagent les élus mahorais, je veux dire combien m'apparaît indispensable que la desserte aérienne de Mayotte soit considérablement améliorée. Je crois le projet de construction d'une piste pour les avions gros porteurs nécessaire et réaliste. Comme le Premier ministre l'a annoncé en janvier à Mayotte, nous ferons à ce sujet, avec les élus mahorais, une étude poussée, qui en précisera les conditions de faisabilité. Cette démarche n'est pas d'ordre législatif, mais nous entendons bien la faire avancer avec les élus.

M. Caullet, qui est au sein de son groupe un des meilleurs spécialistes de l'outre-mer français, a rappelé avec sensibilité et justesse la place de Mayotte dans cet ensemble, au-delà des catégories juridiques traditionnelles de l'outre-mer, qui demandent à être aujourd'hui revisitées ; elles l'ont déjà été à l'occasion de l'accord de Nouméa et de l'évolution institutionnelle subséquente en Nouvelle-Calédonie, et la loi d'orientation pour l'outre-mer invite à les réexaminer aussi pour les départements français d'Amérique. Il était important que Mayotte ne fût pas oubliée dans cette mutation de l'outre-mer français.

M. Pandraud a bien voulu reconnaître que ce projet apportait un éclairage définitif sur la situation de Mayotte. Il a rappelé la volonté de décentralisation poussée du Gouvernement. Quiconque a visité Mayotte depuis deux décennies a pu voir des collectivités locales dont les pouvoirs restaient bridés, un peu comme ceux des communes de métropole avant les lois de décentralisation. Je suis heureux que nous nous retrouvions sur ce point.

Enfin, Mme Lignières-Cassou, qui préside la délégation aux droits des femmes de votre assemblé, a souligné le renforcement de ces droits qui constitue un avancée décisive du projet. Elle a insisté sur l'évolution du statut personnel des Mahoraises. Le texte permettra en effet une adoption simplifiée du statut de droit commun. Elle a signalé aussi l'importance de l'accès des femmes à l'emploi, et du droit de bénéficier de la rémunération de leur travail : ce droit élémentaire sera désormais inscrit dans la loi. Par ailleurs, tout comme elle, je suis ravi que la loi sur la parité se soit appliquée de manière éclatante à Mayotte, où le nombre des élues, lors des dernières élections locales, est passé de 20 à quelque 250.

Je réaffirme l'engagement du Gouvernement aux côtés de Mayotte. J'attends de ce débat qu'il enrichisse le texte, et je serai attentif à vos amendements (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. le Président - Nous abordons maintenant, dans les conditions prévues à l'article 91, alinéa 9, du Règlement, les articles du projet de loi dans le texte du Gouvernement.

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ARTICLE PREMIER

M. Henry Jean-Baptiste - Je veux éviter toute polémique, mais aussi tout malentendu. Je n'ai jamais dit que les Mahorais avaient voulu engranger des avantages sociaux. Leur devise est : « être Français pour être libres », et elle n'a jamais changé. D'ailleurs la protection sociale est embryonnaire à Mayotte, et le Premier ministre a dû s'engager à créer un régime d'allocations familiales aujourd'hui quasiment inexistant. Il n'est donc pas question de mettre en avant des avantages sociaux. J'ai simplement dit que l'attente avait été longue, et plus qu'on ne croit, puisque ce n'est pas en 1976, mais dès 1958 que les Mahorais ont demandé la départementalisation -ce qui ne reposait évidemment sur aucune considération d'avantages sociaux. Enfin, nous n'avons jamais souhaité une départementalisation sans délai. Nous avions même admis un délai de treize ans, qu'on a ramené à dix ; mais à condition que cette phase de transition soit employée à améliorer les conditions de production. Il convient de prévenir tout risque de malentendu.

Il au aussi été fréquemment question de créer un deuxième siège de député à Mayotte, pour tenir compte de l'évolution démographique de la collectivité. Quel est l'état d'avancement de la réflexion à ce sujet ?

J'en viens à l'amendement 59 qui vise à inscrire dans la loi l'engagement pris au nom de l'Etat dans l'accord du 27 janvier 2000 et par le Gouvernement devant la représentation nationale lors du débat du 6 avril 2000. A l'évidence, de tels engagements ont fortement orienté le vote positif des Mahorais à la consultation du 2 juillet 2000. En outre, dans son rapport de fin de mission, notre commission des lois a recommandé de faire de Mayotte une collectivité à « vocation départementale ». Nous estimons que cette vocation pourrait se réaliser au terme de la période transitoire, en 2010.

M. le Rapporteur - Avis défavorable de la commission qui entend s'appuyer sur l'accord, tout l'accord et rien que l'accord. Un large éventail d'options d'évolution institutionnelle s'ouvrira aux Mahorais en 2010 et il n'y a pas lieu de le restreindre par avance en privilégiant telle ou telle voie.

M. le Secrétaire d'Etat - Les signataires de l'accord de Mayotte ont prévu une clause de rendez-vous en 2010 qui vise à laisser largement ouvert l'avenir institutionnel de la collectivité. Les élus mahorais ne se sont du reste pas sentis trahis par notre texte et le conseil général de Mayotte, saisi pour avis, l'a adopté à une très large majorité en estimant qu'il traduisait bien l'esprit de l'accord du 27 janvier 2000. Dès lors, le Gouvernement ne peut accepter cet amendement car cela viendrait en contradiction des principes de liberté de choix qu'il entend affirmer.

S'agissant, Monsieur Jean-Baptiste, de la création d'une deuxième circonscription législative à Mayotte, vous n'ignorez pas que la procédure à suivre serait très lourde cependant que l'urgence de cette évolution n'est pas démontrée. Je suggère donc que l'on attende le prochain recensement de la population mahoraise qui doit intervenir en 2002 pour réexaminer cette question.

L'amendement 59, mis aux voix, n'est pas adopté.

L'article premier, mis aux voix, est adopté.

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ART. 2

M. le Rapporteur - L'amendement 3 vise, tout en évitant de faire au Gouvernement des recommandations pouvant s'apparenter à une injonction, à inscrire dans la loi la disposition de l'accord du 27 janvier 2000 qui prévoit le dépôt d'un projet de loi sur le statut de Mayotte à la suite de l'adoption par le conseil général de la collectivité à la majorité qualifiée d'une résolution en ce sens.

M. le Secrétaire d'Etat - En dépit des précautions oratoires du rapporteur, je m'interroge sur la possibilité d'inscrire dans la loi une telle disposition, qui peut présenter un caractère d'injonction. Dans sa décision du 4 mai 2000, le Conseil constitutionnel a jugé non conforme à la Constitution l'injonction faite au Gouvernement de déposer un projet de loi dans un délai donné. Le Gouvernement ne se dérobe pas devant ses obligations morales et politiques mais il est défavorable à l'inscription dans la loi de telles dispositions. Souhaitons cependant que le gouvernement qui sera aux affaires en 2010 porte la même attention que le nôtre au devenir de Mayotte et qu'il soit comme lui capable de nouer un dialogue de qualité avec toutes les forces représentatives de l'île.

M. Henry Jean-Baptiste - Je regrette que cet amendement soit mal accueilli car il me semblerait opportun, en se référant à l'accord de traduire en obligation juridique les engagements politiques et moraux des uns et des autres.

M. Robert Pandraud - Eu égard aux principes généraux du droit constitutionnel, je ne puis que m'opposer à l'adoption de cet amendement même si je comprends l'intention des auteurs. Du reste, quelle serait la portée réelle d'une injonction faite à un gouvernement aux affaires en 2010, soit à deux mandatures d'aujourd'hui ? Ce serait un coup d'épée dans l'eau !

M. le Rapporteur - Notre propos, Monsieur Pandraud, n'est pas d'adresser une injonction au Gouvernement de 2010 mais de transmettre un message politique. Notre raison d'être n'est pas de plaire aux éminents juristes du Conseil constitutionnel mais de prendre des décisions politiques conformes aux v_ux exprimés par les populations concernées.

M. le Secrétaire d'Etat - C'est vous-même, Monsieur Jean-Baptiste, qui avez renforcé mes arguments en saisissant le Conseil constitutionnel à l'occasion du projet de consultation de la population mahoraise de l'été 2000. Vous avez ainsi donné au juge constitutionnel l'occasion d'affirmer le principe selon lequel toute injonction faite au Gouvernement de déposer un projet de loi dans un délai donné est dépourvu de base juridique.

M. Henry Jean-Baptiste - Ce qui a motivé notre excès de précaution, s'explique par la longue attente de Mayotte et par la non-application des dispositions de la loi de 1976. J'abonde donc dans le sens du rapporteur.

L'amendement 3, mis aux voix, est adopté.

M. Henry Jean-Baptiste - L'amendement 48 vise à souligner l'importance de la consultation qui, historiquement, a toujours joué un rôle éminent à Mayotte. Les conseils municipaux, le conseil général, ont, comme l'a rappelé le ministre, été consultés. Il serait bon que Mayotte soit consultée, à l'instar de ce qui est prévu dans la loi d'orientation pour l'outre-mer, sur le changement de statut. Le rapporteur m'ayant fait valoir en commission que la mention de la départementalisation fermerait l'avenir, j'ai développé la question en ajoutant : « ou demeure une collectivité départementale. »

M. le Rapporteur - Tout en reconnaissant le savoir-faire parlementaire et politique de notre collègue Jean-Baptiste, la commission invite à repousser son amendement.

M. le Secrétaire d'Etat - Cet amendement n'est pas conforme à l'accord sur l'avenir de Mayotte, approuvé par les Mahorais en toute connaissance de cause. Celui-ci ne prévoit pas de consultation de la population en 2010, afin d'éviter une nouvelle phase d'incertitude comparable à celle traversée au milieu des années 70. Au demeurant cet amendement encadrerait dès à présent le choix des Mahorais, alors que le Gouvernement souhaite laisser toutes les options ouvertes en 2010, et pas seulement celle de la départementalisation. J'émets donc un avis défavorable.

L'amendement 48, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Henry Jean-Baptiste - L'amendement 61 est défendu.

L'amendement 61, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

L'article 2 modifié, mis aux voix, est adopté.

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ART. 3

M. le Rapporteur - L'amendement 4 propose une extension du principe d'identité législative au droit électoral. Il est important de l'adopter.

M. le Secrétaire d'Etat - Le Gouvernement est favorable à cet amendement, qui étend la liste des matières pour lesquelles la spécialité législative est levée, et rapproche ainsi la situation de Mayotte du droit commun.

L'amendement 4, mis aux voix, est adopté.

M. Henry Jean-Baptiste - L'amendement 47 est défendu.

M. le Rapporteur - Avis défavorable. Nous en reparlerons lors de la discussion de l'article 54.

M. le Secrétaire d'Etat - Même avis.

M. Henry Jean-Baptiste - Je retire l'amendement.

M. le Rapporteur - L'amendement 54, que M. Jean-Baptiste a cosigné, vise à appliquer le code du commerce, à l'exception de certaines de ses dispositions, à Mayotte.

L'amendement 54, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

L'article 3 modifié, mis aux voix, est adopté.

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ART. 4

M. le Rapporteur - L'amendement 5 est rédactionnel.

L'amendement 5, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 6 répare un oubli dans la transposition de l'article L. 2215-1 du code général des collectivités territoriales.

L'amendement 6, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

L'article 4 modifié, mis aux voix, est adopté.

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ART. 5

M. le Rapporteur - L'amendement 7 rédactionnel est relatif à la codification.

L'amendement 7, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 8 est de précision.

L'amendement 8, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 9 vise à améliorer la cohérence et la lisibilité du texte.

L'amendement 9, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 10 est de coordination.

L'amendement 10, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

L'article 5 modifié, mis aux voix, est adopté.

L'article 6, mis aux voix, est adopté, de même que l'article 7.

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ART. 8

M. le Rapporteur - L'amendement 11 est rédactionnel.

L'amendement 11, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

L'article 8 modifié, mis aux voix, est adopté.

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ART. 9

M. le Rapporteur - L'amendement 12 est de coordination avec un amendement voté à l'article 5.

L'amendement 12, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté et l'article 9 est ainsi rédigé.

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ART. 10

M. le Rapporteur - L'amendement 13, qui apporte une précision, est la conséquence de celui qui a été adopté à l'article 5.

L'amendement 13, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

L'article 10 modifié, mis aux voix, est adopté.

L'article 11, mis aux voix, est adopté de même que l'article 12.

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APRÈS L'ART. 12

M. le Rapporteur - L'amendement 14 corrigé est de coordination avec celui qui a été adopté à l'article 5.

L'amendement 14 corrigé, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

L'article 13, mis aux voix, est adopté.

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ART. 14

M. le Rapporteur - L'amendement 15 est de précision.

M. le Secrétaire d'Etat - Précision utile !

L'amendement 15, mis aux voix, est adopté.

L'article 14 modifié, mis aux voix, est adopté.

L'article 15, mis aux voix, est adopté, de même que les articles 16 et 17.

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ART. 18

M. le Rapporteur - L'amendement 55 vise à corriger une erreur.

L'amendement 55, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

L'article 18, mis aux voix, est adopté.

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ART. 19

M. le Rapporteur - L'amendement 16 est rédactionnel.

L'amendement 16, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. Henry Jean-Baptiste - Je souhaite que le Gouvernement réponde à une double interrogation. L'article L. 3551 7e alinéa indique que la collectivité départementale est chargée de l'organisation et du fonctionnement du service d'incendie et de secours de Mayotte. Or une loi du 28 décembre 1999 a prévu un supplément de DGE pour assurer le fonctionnement des services d'incendie et de secours dans les départements.

Ma seconde interrogation a trait à la coopération régionale. Mayotte, qui ne souhaite nullement se recroqueviller sur elle-même -si elle l'a fait par le passé, c'est contrainte par les circonstances-, y est tout à fait disposée. Mais ce sont ses voisins qui refusent une telle coopération, au motif que Mayotte a choisi de rester française. Ces jours-ci encore, on vient d'interdire aux jeunes sportifs mahorais de participer aux Jeux des îles de l'Océan indien qui auront lieu en 2003. Nos jeunes sportifs se trouvent ainsi frappés d'ostracisme alors même que Mayotte a déjà accueilli des délégations sportives malgaches ou comoriennes.

Quant à mon amendement 60 rectifié, il me paraît de bon sens, puisqu'il tend à économiser les moyens. Il s'agit de regrouper au sein d'un même organe le Conseil économique et social et le Conseil de la culture, de l'éducation et de l'environnement qui ont été institués dans le cadre des régions d'outre-mer, et ce à l'instar de ce qui a été fait pour la Corse en 1991. Le nombre des obligés en sera certes réduit mais il faut tenir compte des moyens, limités, de Mayotte qui doivent être consacrés en priorité à son développement véritable.

M. le Rapporteur - Avis défavorable. L'accord sur l'avenir de Mayotte prévoit la création de deux conseils distincts, comme dans les départements d'outre-mer. Or, ce projet de loi reprend très précisément les termes de l'accord. Il me paraît donc opportun de conserver ces deux conseils. La démocratie locale ne peut d'ailleurs qu'y gagner.

M. le Secrétaire d'Etat - Je partage l'avis du rapporteur. Il faut s'en tenir aux termes de l'accord. Au demeurant le dispositif retenu s'inspire de celui mis en place dans les départements d'outre-mer et notre objectif est bien de rapprocher le plus possible la situation de Mayotte du droit commun. Enfin, comme on le sait, fusionner deux instances n'aboutit pas toujours à réduire le nombre de leurs membres, et donc à une économie de moyens. L'existence de deux lieux distincts de proposition, l'un dans le domaine économique et social, l'autre dans le domaine de la culture, de l'éducation et de l'environnement, secteurs fondamentaux pour l'avenir de Mayotte, paraît tout à fait justifiée. Comme l'a souligné le rapporteur, la démocratie locale a tout à y gagner. Enfin, soyez rassuré, la collectivité recevra les moyens supplémentaires nécessaires au bon fonctionnement de ces deux organes.

L'amendement 60 rectifié, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Rapporteur - La loi du 24 décembre 1976 autorisait la consultation périodique de la population de Mayotte sur toute évolution de son statut. Ce texte étant abrogé, il nous a paru nécessaire de préserver cette possibilité. D'où l'amendement 18, que j'ai cosigné avec M. Jean-Baptiste et qui, directement inspiré des dispositions prévues dans la loi d'orientation pour l'outre-mer, permet de consulter la population de Mayotte sur toute modification statutaire proposée par le conseil général. Là encore, on tend à faire prévaloir à Mayotte le droit commun.

M. le Secrétaire d'Etat - Le Gouvernement est défavorable à cet amendement car l'accord politique intervenu préalablement ne prévoit pas une telle consultation mais un acheminement progressif vers le droit commun et une clause de rendez-vous en 2010. Mayotte ne doit pas retomber dans l'incertitude institutionnelle qu'elle a connue durant vingt-cinq ans.

M. le Rapporteur - J'entends bien ces arguments. Je m'en remets toutefois à la sagesse de l'Assemblée, ne m'estimant pas autorisé à retirer un amendement cosigné par mon collègue Jean-Baptiste.

M. Henry Jean-Baptiste - Le ministre n'a cessé de rappeler que ce texte avait pour objectif d'aligner Mayotte sur le droit commun. Je le prends au mot et ne comprends donc pas pourquoi on refuse une disposition prévue pour les départements d'outre-mer par la loi d'orientation.

L'amendement 18, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Secrétaire d'Etat - Les sociétés d'économie mixte ont pris depuis plusieurs années une part importante à l'essor de la coopération régionale décentralisée dans tout l'outre-mer, notamment à la Réunion pour l'Océan indien.

Doté de compétences élargies par la présente loi, le conseil général de Mayotte doit pouvoir s'appuyer pour lancer des projets de coopération régionale, sur des opérateurs qualifiés, notamment les SEM compétentes en matière d'habitat, d'aménagement urbain ou de transports publics.

L'habilitation juridique d'une SEM à intervenir dans un Etat étranger faisant l'objet d'interprétations divergentes, une clarification a été apportée pour les conseils généraux des DOM à l'article 42 de la loi d'orientation pour l'outre-mer. Dans un souci de sécurité juridique et d'alignement de Mayotte sur le régime de droit commun, la loi doit autoriser explicitement les SEM de Mayotte à intervenir en matière de coopération régionale. D'où l'amendement 51.

M. le Rapporteur - Avis favorable.

M. Henry Jean-Baptiste - Excellent amendement auquel je me rallie volontiers. Nous n'avions d'ailleurs pas attendu pour engager des coopérations régionales. J'ai ainsi longtemps présidé la SIM, Société Immobilière de Mayotte, qui a conduit des opérations à Madagascar, mais aussi en Nouvelle-Calédonie ou au Sénégal.

L'amendement 51, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 17 est rédactionnel.

L'amendement 17, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 19 également.

L'amendement 19, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - De même que l'amendement 20.

L'amendement 20, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 21 rectifié tend à pallier l'insuffisance des ressources de la collectivité départementale de Mayotte. Il a certes un coût, mais l'amélioration qu'il entraînera pour les collectivités locales le justifie pleinement.

M. le Secrétaire d'Etat - Le Gouvernement n'y est pas favorable. La TVA n'existant pas à Mayotte, il est difficile de faire bénéficier l'île du fonds de compensation de la TVA. Toutefois, le texte prévoit une évolution de la fiscalité de Mayotte en 2002. L'extension du FCTVA sera étudiée dans ce cadre.

M. Henry Jean-Baptiste - Je regrette ce refus d'une très vieille demande de Mayotte, d'autant que la Guyane, qui elle non plus n'est pas assujettie à la TVA, bénéficie du FCTVA ! Certaines communes de Guadeloupe, qui n'appliquent que le taux réduit de TVA, sont, elles, remboursées sur la base du taux de droit commun. Il est donc depuis longtemps admis par les pouvoirs publics et même par Bercy que les versements du FCTVA constituent beaucoup plus une aide à l'investissement qu'un mécanisme strictement lié à la TVA. La commission avait adopté le même point de vue en acceptant cet amendement.

M. le Rapporteur - D'autres TOM bénéficient en effet de cette mesure. Mayotte ne constituerait pas une exception.

M. le Secrétaire d'Etat - Le bénéfice du FCTVA ne serait rien d'autre pour Mayotte qu'une subvention. Je ne doute pas de la nécessité d'aider les communes à investir, mais c'est la dotation de rattrapage et de premier équipement qui poursuit ce but.

L'amendement 21 rectifié, mis aux voix, est adopté.

L'article 19, modifié, mis aux voix, est adopté.

L'article 20, mis aux voix, est adopté.

M. le Président - Aucun amendement n'a été déposé sur les articles 21 à 27.

L'article 21, mis aux voix, est adopté, de même que les articles 22 à 27.

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ART. 28

M. le Rapporteur - L'amendement 23 est rédactionnel.

L'amendement 23, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

L'article 28, ainsi modifié, mis aux voix, est adopté.

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ART. 29

M. le Rapporteur - L'amendement 24 est rédactionnel.

L'amendement 24, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

L'article 29, ainsi modifié, mis aux voix, est adopté.

L'article 30, mis aux voix, est adopté, de même que les articles 31 à 34.

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ART. 35

M. le Rapporteur - L'amendement 25 corrigé rectifie une erreur matérielle.

L'amendement 25 corrigé, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 26 rectifié découle de celui sur la FCTVA.

M. le Secrétaire d'Etat - Défavorable pour les mêmes raisons.

L'amendement 26 rectifié, mis aux voix, est adopté.

M. le Président - Je présume que le Gouvernement ne lève pas le gage.

M. le Secrétaire d'Etat - En effet.

L'article 35, modifié, mis aux voix, est adopté.

L'article 36, mis aux voix, est adopté.

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APRÈS L'ART. 36

M. le Rapporteur - L'amendement 56 étend à Mayotte le bénéfice du fonds national de péréquation.

M. le Secrétaire d'Etat - Le Gouvernement n'est pas systématiquement opposé aux aides financières proposées par les parlementaires.

M. Henry Jean-Baptiste - Bonne nouvelle !

M. le Secrétaire d'Etat - Le FNP est alimenté par la taxe professionnelle, qui n'existe pas à Mayotte. Son extension semble toutefois envisageable. Sagesse.

L'amendement 56, mis aux voix, est adopté.

L'article 37 modifié, mis aux voix, est adopté.

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ART. 38

M. le Rapporteur - Par son amendement 27 la commission demande au Gouvernement de déposer un rapport annuel sur l'avancement économique de Mayotte, qui sera notamment utile dans le cadre de nos relations avec l'Union européenne.

M. le Secrétaire d'Etat - Cela peut être utile. Sagesse.

M. Henry Jean-Baptiste - Je donne acte au ministre de ses efforts auprès de l'Union européenne pour que Mayotte obtienne un traitement plus favorable. Je n'ignore pas que l'attribution des fonds structurels est subordonnée à plusieurs conditions préalables, qui tiennent par exemple aux politiques communes ou à l'existence d'un tarif extérieur commun. Mais je rappelle que le gouvernement espagnol a pu faire en sorte que les Canaries bénéficient de ces fonds structurels dont Mayotte a le plus urgent besoin.

L'amendement 27, mis aux voix, est adopté.

L'article 38 modifié, mis aux voix, est adopté, de même que l'article 39.

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ART. 40

M. Henry Jean-Baptiste - Un décret, soumis en ce moment aux consultations d'usage, prévoit la création de trois sections dans la chambre professionnelle de Mayotte, instituée en 1981. Il semble aussi être question de transformer cette dernière rapidement, alors que le texte initial prévoyait la date de 2004. L'amendement 62 vise à connaître plus précisément les intentions du Gouvernement.

M. le Rapporteur - L'accord, tout l'accord, rien que l'accord ! La commission a rejeté cet amendement.

M. le Secrétaire d'Etat - Vous préféreriez repousser la création de trois sections au sein de la chambre professionnelle, puis la transformation de celle-ci en trois établissements publics distincts. Mais la concertation qui a eu lieu sur l'accord ainsi que ce que j'ai entendu à Mayotte même font ressortir des attentes différentes de la part de certaines professions. Les agriculteurs notamment, qui se jugent écartés des décisions dans le système actuel, souhaitent aller plus vite vers une chambre de l'agriculture de plein exercice. Cela serait conforme au droit commun des départements français. J'ai même dû expliquer aux syndicats agricoles mahorais, qui souhaitaient que cette chambre soit mise en place dès 2002, qu'il y avait des étapes intermédiaires à respecter.

Néanmoins je crois le texte conforme à l'accord et je pense qu'il faut s'en tenir à cette rédaction.

M. Henry Jean-Baptiste - Tout le monde est d'accord sur la nécessité de doter la profession agricole d'un organisme consulaire. D'ailleurs l'ordonnance de 1981 en prévoyait la possibilité. Mais les moyens financiers, techniques et humains ont fait défaut.

Mon amendement est dicté par un souci de sagesse : il faut sortir d'un climat de règlements de comptes et créer des instruments aptes à favoriser le développement de Mayotte, mais à condition de leur en donner les moyens.

L'amendement 62, mis aux voix, n'est pas adopté.

L'article 40, mis aux voix, est adopté.

L'article 41, mis aux voix, est adopté.

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APRÈS L'ART. 41

M. le Rapporteur - La loi d'orientation pour l'outre-mer a instauré une commission des comptes économiques et sociaux. L'amendement 28 étend sa compétence à Mayotte.

L'amendement 28, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

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ART. 42

M. le Rapporteur - L'amendement 29 est rédactionnel.

L'amendement 29, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

L'article 42, mis aux voix, est adopté, de même que l'article 43.

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ART. 44

M. le Rapporteur - L'amendement 30 est rédactionnel.

L'amendement 30, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

L'article 44 ainsi modifié, mis aux voix, est adopté.

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ART. 45

M. le Secrétaire d'Etat - Compte tenu de l'évolution statutaire de Mayotte, il convient d'y rendre applicables certaines dispositions déjà en vigueur dans les quatre départements d'outre-mer.

L'amendement 49 étend à Mayotte des articles du code de l'environnement relatifs à la protection des sites et monuments naturels. L'île comporte en effet des paysages et sites dont la qualité justifie le classement.

L'amendement 49, accepté par la commission, mis aux voix, est adopté.

M. le Secrétaire d'Etat - L'amendement 50 du Gouvernement vise également à rapprocher Mayotte du droit commun en matière d'environnement. Dans sa rédaction initiale, l'article 45 ne reprenait pas les dispositions du code relatives à la chasse et à la pêche car elles nécessitaient des adaptations. Elles font l'objet de cet amendement.

L'amendement 50, accepté par la commission, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - Mayotte étant située à plus de 1 500 km du département le plus proche, les amendements 31, 32 et 33 suppriment les références à l'avis des conseils départementaux ou régionaux « voisins ».

M. le Secrétaire d'Etat - Avis favorable.

Les amendements 31, 32 et 33, successivement mis aux voix, sont adoptés.

L'article 45 ainsi amendé, mis aux voix, est adopté.

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AVANT L'ART. 46

M. le Rapporteur - L'amendement 34 met l'accent sur la nécessité de mener une politique volontariste pour assurer l'égalité des femmes et des hommes à Mayotte.

M. le Secrétaire d'Etat - Avis très favorable.

L'amendement 34, mis aux voix, est adopté.

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ART. 46

L'article 46, mis aux voix, est adopté.

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APRÈS L'ART. 46

M. le Secrétaire d'Etat - L'amendement 52 a pour but de porter d'un à deux ans le délai donné aux personnes sous statut de droit local pour déposer leur demande en fixation de leur nom et prénoms.

M. le Rapporteur - Avis défavorable.

L'amendement 52, mis aux voix, est adopté.

Les articles 47 à 50, successivement mis aux voix, sont adoptés.

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ART. 51

M. le Rapporteur - L'amendement 35 est rédactionnel.

L'amendement 35, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

L'article 51 ainsi modifié, mis aux voix, est adopté, de même que l'article 52.

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APRÈS L'ART. 52

M. le Rapporteur - Je crois très intéressant d'instituer à Mayotte un comité de réflexion sur l'évolution du statut de droit local. C'est l'objet de l'amendement 36.

M. Henry Jean-Baptiste - Cet amendement est particulièrement important car il encourage les Mahorais à réfléchir eux-mêmes à la modernisation de ce qu'on appelle le statut local, sans toujours savoir ce qu'on met sous ce mot. Ce comité prolongerait les travaux menés sous la présidence du préfet Boisadam il y a quelques années.

Ce comité remettrait au Gouvernement un rapport contenant ses propositions.

M. le Secrétaire d'Etat - Le Gouvernement souscrit aux intentions de l'amendement : il est très important que soit poursuivi l'effort d'accompagnement juridique des mutations sociales en cours à Mayotte. En revanche, il trouve le calendrier proposé trop timide, d'autant que nous avons prévu de réformer l'organisation de la justice d'ici fin 2002. Peut-être la commission pourrait-elle revoir la rédaction de l'amendement ?

M. le Rapporteur - Je propose de remplacer les mots « en 2007 » par « chaque année ».

M. le Secrétaire d'Etat - Je m'en remets à la sagesse de l'Assemblée.

L'amendement 36 corrigé, mis aux voix, est adopté.

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ART. 53

M. le Rapporteur - L'amendement 37 est rédactionnel.

L'amendement 37, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté et l'article 53 est ainsi rédigé.

L'article 54, mis aux voix, est adopté.

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APRÈS L'ART. 54

M. le Secrétaire d'Etat - L'évolution statutaire de Mayotte rend nécessaire de modifier l'ordonnance du 5 septembre 1996. Par ailleurs, l'article 54 du projet de loi statutaire prévoit la mise à disposition de l'Etat d'agents de la collectivité départementale affectés dans les services de l'Etat. Il faut donc aménager le dispositif institutionnel prévu par l'ordonnance de 1996 afin de mieux distinguer, en matière de gestion, les questions relatives aux agents des communes et de leurs établissements publics, de celles des agents de la collectivité départementale. Le Gouvernement propose donc, par l'amendement 2, de rendre obligatoire l'affiliation des communes au centre de gestion de la fonction publique territoriale de Mayotte, le conseil général gérant lui-même son personnel, comme dans tous les départements. Cependant, afin de ne pas rompre l'unité de la fonction publique territoriale à Mayotte, le centre de gestion assure la formation de tous les fonctionnaires territoriaux de Mayotte.

Il est donc proposé de modifier sur plusieurs points les articles concernant le centre de gestion des cadres de fonctionnaires de Mayotte et de modifier l'article 16 de l'ordonnance de 1996 pour que les commissions administratives paritaires ne soient pas toutes placées auprès du centre de gestion : celles des fonctionnaires de la collectivité départementale doivent rester auprès de celle-ci.

M. le Rapporteur - Avis très favorable.

L'amendement 2, mis aux voix, est adopté.

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ART. 55

M. le Rapporteur - L'amendement 38 a pour objet d'habiliter le Gouvernement à prendre une ordonnance relative à la coopération intercommunale, indispensable à Mayotte et nécessaire corollaire à la modernisation du régime communal.

L'amendement 38, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. le Secrétaire d'Etat - Dans le cadre de la nouvelle étape, citoyenne et solidaire, annoncée en janvier par le Premier ministre, le Gouvernement vous présentera un premier projet tendant à démocratiser l'exercice des mandats locaux en en améliorant les conditions. Certaines dispositions de ce projet, concernant les communes et leurs élus, peuvent être appliquées à Mayotte dans le cadre de l'ordonnance prévue sur la modernisation du régime communal. Mais le Gouvernement souhaite également que l'amélioration des conditions d'exercice des mandats locaux puisse profiter aux conseillers généraux de Mayotte, et que l'on puisse modifier le droit du travail et de la sécurité sociale de telle sorte que cette amélioration bénéficie à tous les élus locaux mahorais. Il vous propose donc, par l'amendement 53, d'élargir le champ de l'habilitation prévue par le projet aux « conditions d'exercice des mandats locaux ».

M. le Rapporteur - Excellent amendement.

M. Henry Jean-Baptiste - Tout à fait.

L'amendement 53, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 39 est rédactionnel.

L'amendement 39, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 40 tend à élargir le champ de l'habilitation accordée au Gouvernement au « développement de l'enseignement supérieur et de la recherche scientifique ».

M. le Secrétaire d'Etat - J'ai dit quelle importance le Gouvernement attachait à l'enseignement scolaire à Mayotte, et l'accord sur l'avenir de Mayotte prévoit aussi que l'Etat développera la formation universitaire. Pour autant, je ne suis pas particulièrement favorable à cet amendement, car le cadre juridique actuel permet déjà de prendre en compte les besoins de Mayotte en matière de formations supérieures. Compte tenu du nombre actuel de bacheliers, dont la moitié ont des baccalauréats technologiques, la priorité doit être donnée dans un premier temps au développement de filières après-bac courtes, du type BTS, qui sont suivies dans les lycées et n'impliquent pas nécessairement la création d'une structure universitaire de plein exercice. Ce sont ces formations qui favoriseront l'accès des jeunes Mahorais au marché du travail. Or le droit existant permet de les développer. Pour les cursus plus longs, il existe des liens avec les universités de la Réunion et il faut les développer. Si toutefois des adaptations apparaissaient nécessaires dans ce domaine, elles pourraient être intégrées dans le code de l'éducation, en cours d'examen parlementaire, ou dans le code de la recherche, en préparation.

M. le Rapporteur - C'est à l'avenir que nous pensions en proposant cet amendement. Nous savons que ce n'est pas possible immédiatement, mais il est bon que soient mentionnés dans le texte l'enseignement supérieur et la recherche, car l'île en aura besoin.

L'amendement 40, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 41 inclut dans le champ de l'habilitation le développement de la formation des élus et des agents de la fonction publique territoriale.

M. le Secrétaire d'Etat - L'amendement du Gouvernement que vous avez adopté à ce même article 55 permettra, en transposant à Mayotte des dispositions de la future loi sur la démocratie de proximité, d'améliorer le droit à la formation des élus.

Je souhaite donc le retrait de cet amendement. Le Gouvernement en partage l'objectif, mais il propose une autre méthode, que je crois plus rapide.

M. le Rapporteur - Avec l'accord de M. Jean-Baptiste, nous retirons l'amendement 41.

L'article 55, modifié, mis aux voix, est adopté.

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ART. 56

M. le Rapporteur - L'amendement 42 prévoit une information du Parlement et du conseil général de Mayotte, avant le 1er janvier 2006, sur les modalités de l'application dans l'île du code général des impôts et du code des douanes, envisagée pour le 1er janvier 2007.

M. le Secrétaire d'Etat - Favorable.

M. Henry Jean-Baptiste - Ces conditions d'application en 2007 du système fiscal de droit commun doivent être bien analysées et maîtrisées. Cet amendement est donc une mesure de précaution et de sagesse.

L'amendement 42, mis aux voix, est adopté.

L'article 56 ainsi modifié, mis aux voix, est adopté.

Les articles 57 à 59 sont successivement adoptés.

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APRÈS L'ART. 59

M. le Rapporteur - La loi d'orientation pour l'outre-mer a créé une instance de concertation des politiques de coopération régionale dans la zone Antilles-Guyane. Nous proposons par l'amendement 43 rectifié de créer une instance semblable dans la région de l'Océan indien, intéressant la Réunion et Mayotte.

L'amendement 43 rectifié, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - Notre amendement 44 rectifié répare une erreur, en rendant applicable à Mayotte un article de la loi de 1979 sur les archives, relatif au régime des études statistiques.

L'amendement 44 rectifié, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

L'article 60, mis aux voix, est adopté, de même que les articles 61 et 62.

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ART. 63

M. le Rapporteur - L'amendement 45 tend à simplifier le texte de loi : il est inutile de maintenir en vigueur jusqu'en 2004 l'article 32 de la loi de 1871, qui concerne la publicité des procès-verbaux de séance, car le code général des collectivités territoriales prévoit déjà de telles dispositions.

L'amendement 45, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 57 corrige une erreur de numérotation.

L'amendement 57, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. Henry Jean-Baptiste - Je retire l'amendement 63.

M. le Rapporteur - L'amendement 46 corrige une erreur de numérotation.

L'amendement 46, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - Il en va de même de l'amendement 58.

M. le Secrétaire d'Etat - N'y a-t-il pas plutôt une erreur matérielle dans l'amendement lui-même ?

M. le Président - Il ne semble pas.

M. le Secrétaire d'Etat - Je m'en remets à la lecture de la commission.

L'amendement 58, mis aux voix, est adopté.

M. Henry Jean-Baptiste - Je retire l'amendement 64.

L'article 63, modifié, mis aux voix, est adopté, de même que l'article 64.

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²EXPLICATIONS DE VOTE

M. Henry Jean-Baptiste - J'ai dit à la tribune quel était notre souci de quitter le provisoire, et de sortir d'une longue attente. Ce projet apporte beaucoup d'éléments positifs, notamment l'extension à Mayotte de dispositions qui faisaient défaut. Nous déplorons en revanche l'absence de toute perspective institutionnelle car nous aurions souhaité que soit inscrit dans la loi que Mayotte pourrait accéder au statut de DOM si tel était le souhait majoritaire de la population. Outre qu'il offre le meilleur ancrage dans la République, ce statut permet d'accéder aux fonds structurels et les jeunes générations mahoraises en sont très conscientes.

Franche et ouverte, la discussion a permis des échanges fructueux, tous orientés vers l'intérêt de Mayotte, et les Mahorais auront tout lieu de s'en féliciter.

Dans l'attente de nouvelles améliorations et alors que la discussion va se poursuivre au Sénat, je m'abstiendrai personnellement sur ce projet tout en remerciant notre commission des lois pour la qualité du travail qu'elle a fourni, sur des sujets parfois complexes et quelque peu ignorés des media.

Mayotte est française et veut le rester. Elle entend simplement accéder au statut qui lui donne les meilleures chances de se développer.

M. Jean-Yves Caullet - Le groupe socialiste, la majorité plurielle voteront en faveur de l'adoption de ce texte qui donne à Mayotte toutes les chances de se développer.

L'ensemble du projet de loi, mis aux voix, est adopté.

M. le Secrétaire d'Etat - S'agissant, Monsieur Jean-Baptiste, de la majoration de la dotation globale d'équipement au service départemental d'incendie et de secours que vous appelez de vos v_ux, je m'engage à procéder aux vérifications nécessaires mais je gage qu'il ne sera pas facile de l'obtenir.

Quant à la participation de Mayotte aux Jeux des jeunes de l'Océan Indien, le Gouvernement ne se satisfait pas du refus qui a été opposé à la collectivité par l'instance habilitée et il est résolu à engager les démarches diplomatiques nécessaires pour permettre aux jeunes mahorais, qui sont souvent d'excellents sportifs, de participer aux prochains jeux.

En adoptant en première lecture ce projet, votre Assemblée adresse ce soir un message très fort de fraternité et de solidarité aux habitants de Mayotte et je remercie tous les orateurs pour la qualité de leurs contributions. Une nouvelle ère s'ouvre à Mayotte pour accompagner le vaste mouvement de modernisation dont j'ai pu apprécier les premiers signes lors de mon déplacement sur place.

Au-delà de nouveaux outils de développement qu'il donne à la collectivité, le texte confère aussi de nouveaux droits et je songe notamment à tous ceux -et en particulier aux femmes de Mayotte- qui pourront plus aisément choisir le statut civil de droit commun. L'île bénéficiera aussi de la généralisation des allocations familiales, des emplois jeunes et de diverses prestations sociales qui amélioreront directement la vie quotidienne des Mahorais.

Ce texte fait date également en ce qu'il marque la fin de la période d'incertitude institutionnelle. Nous pouvons collectivement nous féliciter de mettre ainsi fin à un quart de siècle d'impuissance politique : à Mayotte, tout est désormais ouvert mais plus rien n'est incertain. (Applaudissements)

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RÉUNION D'UNE COMMISSION MIXTE PARITAIRE

M. le Président - M. le Premier ministre m'a fait connaître qu'il avait décidé de provoquer la réunion d'une commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi portant création d'une prime pour l'emploi.

Acte est donné de cette communication.

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FIN DE LA MISSION D'UN DÉPUTÉ

M. le Président - M. le Premier ministre m'a informé de la fin de la mission temporaire précédemment confiée à M. Dominique Dupilet.

Prochaine séance le jeudi 5 avril 2001 à 9 heures.

La séance est levée à 20 heures 25.

                      Le Directeur du service
                      des comptes rendus analytiques,

                      Jacques BOUFFIER

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ORDRE DU JOUR
DU JEUDI 5 AVRIL 2001

A NEUF HEURES : 1ère SÉANCE PUBLIQUE

Discussion de la proposition de loi (n° 2494) de M. Bernard PERRUT et plusieurs de ses collègues relative à la médiation familiale.

      M. Bernard PERRUT, rapporteur au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République. (Rapport n° 2970)

A QUINZE HEURES : 2ème SÉANCE PUBLIQUE

Discussion du projet de loi, adopté par le Sénat (n° 2815), autorisant la ratification de la convention n° 182 de l'Organisation internationale du travail concernant l'interdiction de l'exploitation par le travail des enfants et l'action immédiate en vue de son élimination.

      Mme Monique COLLANGE, rapporteure au nom de la commission des affaires étrangères. (Rapport n° 2957)

(Procédure d'examen simplifiée ; article 106 du Règlement)

Discussion du projet de loi, adopté par le Sénat (n° 2674), autorisant l'approbation de l'instrument d'amendement à la Constitution de l'Organisation internationale du travail.

      Mme Monique COLLANGE, rapporteure au nom de la commission des affaires étrangères. (Rapport n° 2958)

(Procédure d'examen simplifiée ; article 107 du Règlement)

Discussion du projet de loi, adopté par le Sénat (n° 2812), autorisant la ratification de la convention de sécurité sociale entre la République française et la République du Chili.

      M. François ROCHEBLOINE, rapporteur au nom de la commission des affaires étrangères. (Rapport n° 2959)

(Procédure d'examen simplifiée ; article 107 du Règlement)

Discussion du projet de loi, adopté par le Sénat (n° 2813), autorisant la ratification du Traité d'entraide judiciaire en manière pénale entre la France et les États-Unis d'Amérique (ensemble deux annexes).

      M. Marc REYMANN, rapporteur au nom de la commission des affaires étrangères. (Rapport n° 2956).

(Procédure d'examen simplifiée ; article 107 du Règlement)

Discussion du projet de loi, adopté par le Sénat (n° 2680), autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République dominicaine sur l'encouragement et la protection réciproques des investissements

      Mme Martine AURILLAC, rapporteure au nom de la commission des affaires étrangères. (Rapport n° 2960)

(Procédure d'examen simplifiée ; article 107 du Règlement)

A VINGT ET UNE HEURES : 3ème SÉANCE PUBLIQUE

Suite de l'ordre du jour de la deuxième séance.


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