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Volume 2

L'ALÉA MÉTÉOROLOGIQUE 15

1. LA PRÉVISION GÉNÉRALE 15

1.1. L'observation 15

1.2. La prévision numérique 16

1.3. L'expertise humaine 17

1.4. Les performances de la prévision 17

2. LA PRÉVISION DES ÉVÉNEMENTS EXCEPTIONNELS 18

2.1. Les précipitations intenses 18

2.2. Les tempêtes 18

2.3. Les cyclones 19

3. L'ALERTE MÉTÉOROLOGIQUE 20

4. LES PROGRÈS TECHNIQUES ATTENDUS 30

4.1. Pour la prévision à courte échéance 30

4.2. Pour la prévision à moyenne échéance 30

5. LES ÉVÉNEMENTS MÉTÉOROLOGIQUES NON COUVERTS PAR L'ASSURANCE « CATASTROPHES NATURELLES » 31

5.1. Les orages 31

5.2. La tornade 32

L'ALÉA CYCLONIQUE 35

1. LES DANGERS LIÉS AU CYCLONE TROPICAL 40

1.1. Le vent 40

1.2. La pluie 41

1.3. Marée de tempête et houle cyclonique 42

2. LA SURVEILLANCE CYCLONIQUE 43

2.1. Les stations d'observations au sol et en altitude 43

2.2. Les systèmes de réception de données satellitales 43

2.3. Les radars météorologiques 44

3. LA PRÉVISION CYCLONIQUE 45

4. LA PRÉVENTION 49

L'ALÉA MÉTÉOROLOGIQUE

Les phénomènes météorologiques violents qui affectent le territoire national rentrent par leurs effets dans la catégorie des risques naturels.

Ces phénomènes, d'ampleur très différente, se caractérisent principalement par les orages, la pluie, la grêle, le vent, le brouillard, le verglas, la neige, les cyclones. Ils ont des effets directs sur les personnes et les biens, ou indirects par la création d'autres risques (inondations) ou l'aggravation de certains risques (glissements de terrain).

Comme il n'est pas possible d'agir directement sur l'aléa météorologique, c'est la prévision générale météorologique qui a été développée à partir de l'observation, de la mise au point de modèle de prévision et par l'expertise humaine.

M. Daniel MARBOUTY, de Météo-France, a défini le rôle que peut jouer la météorologie dans la connaissance de certaines catastrophes naturelles. Les grandes lignes de ces actions concernent notamment la prévision.

1. LA PRÉVISION GÉNÉRALE

1.1. L'observation

L'observation est réalisée à l'échelle globale -sur toute la planète- au moyen de systèmes de mesures variés allant des mesures effectuées au sol, sous abri ou en altitude à l'aide de ballons-sondes jusqu'aux puissants systèmes de télémesure que sont les réseaux de radars ou encore les satellites météorologiques. Ce réseau de mesures, appelé le Système Mondial d'Observation (SMO), est coordonné par l'Organisation Météorologique Mondial (OMM).

Son coût est extrêmement élevé (main d'_uvre, matériel consommable, mise en orbite, etc.). Rien que pour la France, ce coût est estimé à un total de 500 MF (dont 200 pour les satellites). Il faut cependant préciser que la contribution française est particulièrement importante du fait de son implantation outre-mer.

Cet effort est indispensable pour définir l'état de l'atmosphère avec un niveau de précision suffisante sur l'ensemble du globe à un moment donné. Cependant, la couverture du globe en observations est tout à fait hétérogène : les déserts, les grandes étendues océaniques font apparaître de grands vides qui ne sont qu'incomplètement comblés par les moyens de télémesure satellitaires.

Cet effort d'observation est complété par un effort de transmission. Toutes ces données sont échangées entre tous les pays du monde au moyen du Système Mondial de Transmission (SMT), lui aussi coordonné par l'OMM. Ceci permet à chaque pays de disposer des données du monde entier dans un délai de quelques heures, condition indispensable pour réaliser l'étape suivante, celle de la prévision.

1.2. La prévision numérique

A partir d'un état initial de l'atmosphère, obtenu en utilisant les mesures fournies par le SMO, il est possible de déterminer par étapes successives les états prévus de l'atmosphère en utilisant les techniques de modélisation numérique. Un modèle de prévision d'atmosphère fournit, pour diverses échelles, la valeur des paramètres caractéristiques dont la pression, le vent, la température et l'humidité sur un réseau maillé tridimensionnel. Plus le réseau maillé sera fin, plus le modèle sera à même de prendre en compte les phénomènes de petite échelle mais plus important sera son coût en termes de temps de calcul. A l'heure actuelle, Météo-France dispose d'un tel modèle de prévision global nommé ARPEGE, qui a pour caractéristique de fonctionner sur un réseau à maille variable ; ainsi, la dimension de la maille est de l'ordre de 30 km sur le territoire métropolitain et atteint 300 km aux antipodes. Il est lancé deux fois par jour à partir des données de 0000 UTC (c'est-à-dire « temps universel coordonné ») et de 1200 UTC et fournit des prévisions jusqu'à 72 heures d'échéance. Il fonctionne sur un nouveau calculateur. Le calculateur Cray UMP-C98 installé au Service Central d'exploitation de la Météorologie (SCEM) à Toulouse, pouvant effectuer environ 8 milliards d'opérations par seconde -ce qui donne un idée de la puissance nécessaire pour effectuer une prévision à 24 heures d'échéance en une vingtaine de minutes- a été remplacé début octobre 1997 par un supercalculateur Fujitsu VPP700 modèle E, d'une puissance théorique de 60 giga-flops (contre 8 au Cray C98). L'investissement que représente un tel modèle en temps de développement a été de 100 hommes x année pour Arpège.

Météo-France utilise aussi pour couvrir la moyenne échéance (du jour J+3 au jour J+5) les résultats fournis par le modèle du Centre Européen pour les Prévisions Météorologiques à Moyen Terme (CEPMMT) qui couvre le globe entier avec une résolution moyenne de 60 km mais se trouve initialisé uniquement à partir des données de 1200 UTC.

Les sorties de ces modèles ne sont en général pas directement exploitables par les utilisateurs, aussi convient-il de passer par l'étape de l'expertise humaine.

1.3. L'expertise humaine

Les résultats des modèles numériques doivent être interprétés par un expert prévisionniste pour plusieurs raisons. Pour les très courtes échéances, les résultats des modèles peuvent être confrontés à la réalité observée en temps réel, ce qui permet de déceler un mauvais démarrage du modèle. Ensuite, un examen quotidien attentif des modèles est indispensable pour bien connaître leur comportement dans des situations météorologiques variées. Enfin, les sorties des modèles ne fournissent que les paramètres moyens décrivant l'atmosphère alors qu'il est nécessaire de fournir à l'usager le temps sensible comme les températures extrêmes, la quantité et la nature des précipitations ainsi que l'occurrence des divers phénomènes météorologiques.

Le travail du prévisionniste consiste donc à suivre avec attention le comportement de l'atmosphère réelle fourni par le réseau d'observation ainsi que les prévisions fournies par les modèles numériques. Cette pratique, qui ne s'acquiert qu'au bout de 6 années d'expérience au minimum, va lui permettre de fournir une prévision finaliste, qui tiendra compte des imperfections connues du modèle.

1.4. Les performances de la prévision

La qualité des prévisions météorologiques peut être mesurée objectivement en évaluant les caractéristiques des erreurs de prévision (différence entre valeurs prévues et valeurs observées). Ces erreurs augmentent avec l'échéance de la prévision.

Les études basées sur l'évaluation subjective de la qualité des prévisions réalisées montrent qu'il devient tout à fait hasardeux de fournir des paramètres de temps sensibles prévus au delà de 5 jours.

2. LA PRÉVISION DES ÉVÉNEMENTS EXCEPTIONNELS

La France métropolitaine jouit d'un climat tempéré. Toutefois, les régions méridionales ne sont pas à l'abri de temps sévère et notamment de pluies diluviennes. Les départements d'outre-mer sont soumis aux cyclones. Il est donc important de prévoir ces événements, ce que nous allons voir rapidement avant d'y revenir plus en détail dans les chapitres suivants.

2.1. Les précipitations intenses

Les prévisions à courte échéance (12 à 60 h) sont basées essentiellement sur les sorties des modèles numériques. Cependant, les précipitations brutes prévues par les modèles ne sont pas actuellement d'une qualité suffisante pour être utilisées telles quelles par les prévisionnistes. Notamment dans les cas d'épisodes violents, ces prévisions sont systématiquement sous-estimées et/ou mal localisées. C'est donc un domaine où l'expertise est importante. Les prévisions ainsi réalisées sont au mieux à l'échelle du département. Elles ne peuvent donc être utilisées que comme préalerte.

Les prévisions à très courte échéance (jusqu'à 12 h) sont basées sur une synthèse des produits issus des modèles et des données d'observation en temps réel (radars, satellites, stations d'observation). On parle alors de prévision immédiate, voire de signalisation. La couverture encore insuffisante du réseau de radars et du réseau de stations automatiques rend parfois difficile une signalisation efficace des phénomènes dangereux. Celle-ci ne peut en général pas dépasser quelques heures.

2.2. Les tempêtes

La prévision des vents violents est relativement mieux maîtrisée que la prévision des précipitations.

Les dépressions océaniques ou méditerranéennes sont de mieux en mieux maîtrisées par les modèles actuels aux courtes échéances (jusqu'à 72 h), ce qui ne veut pas dire pour autant que les prévisions numériques soient aujourd'hui parfaites en ce domaine. Des dépressions restent encore trop grossièrement restituées, et certaines dépressions de petite taille peuvent encore passer à travers les mailles des modèles.

La prévision du vent en surface directement issue des modèles doit toujours être validée par le prévisionniste, qui va en particulier comparer les premières échéances aux données disponibles. Les données d'observation provenant des navires en mer ou de bouées peuvent donc s'avérer cruciales en faisant apparaître une zone de vents forts ou une chute importante de pressions, données que l'on ne peut encore déduire des mesures satellitales.

Les phénomènes d'échelle plus réduite (généralement l'échelle des orages) sont plus délicats à prévoir. Les modèles décrivent mal ces échelles, notamment l'interaction avec les conditions locales, et en particulier l'orographie. La prévision de ces phénomènes ne peut donc pas être maîtrisée. Actuellement, on peut prévoir grossièrement l'occurrence de ce type de phénomène pour les échéances inférieures à 72 h, sans pouvoir en préciser efficacement la localisation. On ne peut faire que de la signalisation et de l'extrapolation à très court terme ou prévision immédiate, une fois que le phénomène a débuté.

Ces phénomènes (orages, tornades), qui ne sont pas couverts par l'assurance « Cat Nat », font tout de même l'objet d'une brève étude en fin de ce chapitre.

2.3. Les cyclones

Si les caractéristiques du phénomène sont assez bien connues, la modélisation numérique est encore un véritable challenge. Le grande diversité des échelles en jeu, la variété des processus physiques impliqués, la grandeur de la maille, le manque d'observation rendent très difficiles les prévisions de trajectoire et d'intensité qui conditionnent directement les prévisions d'impact sur les terres menacées (vent, quantités de précipitations, marées de tempête...).

La surveillance cyclonique est réalisée par la réception de données satellitaires et des radars météorologiques, et sera développée dans le chapitre suivant.

3. L'ALERTE MÉTÉOROLOGIQUE

La prévision météorologique réalisée par Météo-France au-delà de sa diffusion générale fait l'objet de procédures particulières pour l'alerte d'événements exceptionnels.

Au niveau national, les prévisionnistes du service central d'exploitation de la météorologie (SCEM) fixent les lignes directrices pour l'interprétation des modèles sur le territoire national; au niveau régional, les prévisionnistes des sept Centres Météorologiques Inter-Régionaux (CMIR) fournissent une prévision plus détaillée à leur échelle ; enfin, les Centres Départementaux de la Météorologie (CDM) mettent en forme ces prévisions au niveau le plus fin et pour chaque type d'utilisateur.

Seuls les niveaux nationaux et régionaux ont un fonctionnement garanti 24 heures sur 24 : c'est donc sur eux que repose la mission de veille météorologique pour la sécurité, c'est-à-dire la responsabilité des alertes.

Les procédures d'alerte météorologique sont fixées par une circulaire commune entre les ministères de l'Intérieur et de l'Equipement chargés respectivement de la sécurité civile et de la météorologie (la circulaire actuellement en cours de validité date du 5 septembre 1993).

La prévision des événements pouvant affecter la sécurité des personnes et des biens est effectuée par le SCEM et les CMIR. Dès que l'évolution de la situation appréhendée par les prévisionnistes suggère une évolution dangereuse pour laquelle des seuils critiques risquent d'être dépassés, les CMIR émettent des Bulletins Régionaux d'Alerte Météorologiques (BRAM) qui sont acheminés auprès des préfectures par l'intermédiaire des centres interrégionaux de la Sécurité Civile (CIRCOSC). Dans le cas où les phénomènes prévus s'avèrent particulièrement dangereux ou susceptibles de toucher une vaste région, alors c'est le SCEM qui procède à l'émission d'un bulletin d'Alerte au Risque Météorologique Exceptionnel (ALARME) à destination du Centre Opérationnel de la Direction de la Sécurité Civile (CODiSC) qui le retransmet auprès des préfets concernés.

Depuis que la procédure ALARME a été mise en place en 1989, Météo-France peut dire que les tempêtes importantes ont été relativement bien prévues ; cependant, il faut savoir que l'intensité des petites dépressions est souvent sous estimée par les modèles et ces structures de petite échelle peuvent encore passer au travers des mailles du réseau d'observation, très lâche sur les océans, même sur le proche Atlantique. De leur côté, les précipitations intenses ont en général été bien couvertes par les alertes, mais le taux de fausse alerte est important, aussi bien en terme de couverture spatiale qu'en terme de nombre d'épisodes.

Pour la prévision des crues assurée par le Service d'Annonce des Crues (SAC), outre les messages ALARME et BRAM, des procédures particulières sont prévues entre CMIR et SAC. Il s'agit des Bulletins d'Alerte aux Précipitations (BAP) émis par les CMIR en cas de prévisions de dépassement de seuil définis à l'avance par les SAC et les Bulletins Réguliers de Précipitations (BRP) émis quotidiennement dès le déclenchement de l'alerte émis par les SAC.

La France est divisée au niveau de la Sécurité civile en zones, correspondant au CODISC pour la région parisienne et le centre, aux CIRCOSC de Bordeaux, Valabre, Lyon, Metz, au CODIS Nord et à l'Etat Major de zone ouest.

Pour chaque zone, des seuils de paramètres météorologiques déclenchant un BRAM sont définis en commun par les services de la DDSC et de Météo-France. Les cartes des pages suivantes présentent ces seuils pour les différents phénomènes : avalanches, vague de froid, neige, orages, fortes précipitations, vent violent et verglas.

4. LES PROGRÈS TECHNIQUES ATTENDUS

En termes généraux, pour assurer une prévision encore plus efficace, il convient d'améliorer les systèmes d'observations, la mise en place de modèles simulant de façon plus précise le comportement de l'atmosphère et de développer l'expertise du prévisionniste.

Les progrès espérés par le Directeur délégué de Météo-France, M. Olivier MOCH, et le Directeur de la Recherche, M. Daniel CARIOLLE, dans la prévision numérique reposent à la fois sur l'évolution des outils utilisés comme la puissance des supercalculateurs et sur les avancées de la recherche fondamentale et appliquée.

4.1. Pour la prévision à courte échéance

La résolution du modèle directionnel ARPEGE s'appuie sur une configuration dont la maille horizontale est passée de 30 km à 20 et 15 km actuellement, et le nombre de niveaux verticaux franchis 30 au lieu de 24. Le changement des méthodes d'analyse, passage aux méthodes d'analyse variationnelle, c'est-à-dire de détermination de l'état initial de l'atmosphère à l'aide des observations terrestres et satellitaires, devrait permettre un gain compris entre 3 h et 6 h en « heure de prévisibilité » pour les prévisions de 24 à 72 heures.

4.2. Pour la prévision à moyenne échéance

Le passage aux méthodes d'analyse variationnelle devrait permettre des gains en « heures de prévisibilité » importants. Le méthode dite de « prévision d'ensemble » est approfondie. Elle consiste à effectuer un certain nombre de prévisions (quelques dizaines) sur la base d'états initiaux légèrement différents les uns des autres.

Les applications de prévision de la qualité de la prévision doivent être mises en _uvre, permettant de prévoir de manière quantitative l'incertitude attachée à une prévision.

5. LES ÉVÉNEMENTS MÉTÉOROLOGIQUES NON COUVERTS PAR L'ASSURANCE « CATASTROPHES NATURELLES »

Bien que n'étant pas couverts par le risque « catastrophes naturelles », deux phénomènes météorologiques ont retenu mon attention, par la gravité des dégâts humains et en matériels produits en certains cas.

5.1. Les orages

Les orages sont des nuages (cumulonimbus) au sein desquels se produisent des décharges électriques dont les manifestations visuelles et auditives sont respectivement les éclairs et le tonnerre. Le cumulonimbus est reconnaissable par sa grande extension verticale et sa forte densité, et son sommet en forme d'enclume.

Les précipitations sont souvent importantes : des averses de pluie, souvent des chutes de grêle. On observe de puissantes rafales de vent, quelquefois des tornades.

Chaque jour, environ 50 000 orages éclatent de par le monde, le plus souvent dans les régions équatoriales. La vie d'un orage se déroule en trois étapes : le développement, la maturité et la dissipation.

La phase de développement survient quand de l'air chaud et humide s'élève dans le ciel. A mesure que l'air ascendant refroidit, il se condense et des nuages se forment.

Une fois que le nuage est devenu cumulonimbus, il se développe en hauteur jusqu'à ce que son sommet atteigne la tropopause, où il s'étale alors et prend la forme caractéristique d'une enclume.

A mesure que l'air se refroidit au sommet, il s'affaisse, aidé par la gravité et les précipitations, et engendre des courants descendants. Le nuage entre dans son âge mûr, la phase la plus destructrice d'un orage. Les courants ascendants et descendants de l'air activent la création de charges électriques opposées, qui produisent une décharge électrique. Quand l'éclair traverse l'air, sa chaleur dilate ce dernier et crée une onde acoustique : le tonnerre.

Dès que le nombre et la force des courants descendants froids augmentent, l'orage entre dans sa phase dissipative. Les courants descendants répandent un air froid sur le sol, et ces bourrasques de vent coupent l'alimentation de l'orage en air chaud et humide, d'où son affaiblissement. Selon le type d'orage, son cycle complet dure de 15 minutes à plusieurs heures.

Les éclairs, qui représentent la manifestation visible de l'orage, se développent soit à l'intérieur du système orageux (2/3 des éclairs), soit entre un nuage et la terre (1/3 des éclairs). La durée de l'éclair est variable, en général d'une centaine de milisecondes, temps qui peut atteindre trois secondes pour les coups violents.

La foudre est une très violente et brève décharge atmosphérique. L'intensité du courant électrique généré varie de 3 000 à 300 000 ampères. La foudre touche la terre entre 50 et 100 fois par seconde dans le monde, et en France on dénombre entre 700 000 et 1 000 000 impacts par an. Chacune de ces décharges électriques nuage-sol émet une puissance instantanée voisine de 20 000 mégawatts.

La foudre est responsable d'effets directs ou indirects dévastateurs : effets thermiques (échauffement, fusion), effets électrodynamiques, effets électrochimiques (corrosion), effets électromagnétiques (surtensions), effet de déflagration.

L'homme est victime de la foudre mais, heureusement, peu de cas sont mortels. En France, une quinzaine de morts sont enregistrés chaque année, mais il y a aussi de nombreux blessés qui ont des séquelles plus ou moins importantes. Ces troubles peuvent être neurologiques et psychiques, cardio-vasculaires, oculaires, auditifs ou des manifestations cutanées.

L'une des formes les plus spectaculaires de l'orage est la tornade. Les tornades se produisent aux stades les plus intenses de l'évolution des orages. Il est fréquent d'entendre qualifier dans les campagnes françaises certains phénomènes d'ouragan ; cette qualification impropre désigne le plus souvent des tornades.

5.2. La tornade

Une tornade est une perturbation tourbillonnaire très localisée -son diamètre est compris généralement entre quelques dizaines de mètres et une centaine de mètres- qui génère des vents d'une très grande violence (jusqu'à plus de 500 km/h), détruisant tout dans un couloir qui peut atteindre 300 kilomètres. Ce couloir suit une route aléatoire, et en dehors de ce couloir, tout reste calme.

La formation d'une tornade nécessite des conditions particulières, elle est la résultante de la rencontre de l'air froid de la haute troposphère et de l'air chaud et humide des couches atmosphériques plus basses.

La tornade est aussi appelée trombe, bien que cette dénomination qualifie aussi bien des tornades de faible intensité que celles prenant naissance sur des étendues d'eau.

L'intensité des tornades et l'importance des dommages qu'elles provoquent peuvent être quantifiés par la force du vent au niveau de la surface. T. T. FUJITA a ainsi défini, en 1981, l'échelle F regroupant les tornades en six classes de puissance croissante. Bien sûr, comme toute classification appliquée à un phénomène naturel, celle-ci comporte une part arbitraire. Elle permet cependant d'estimer l'énergie mise en jeu à l'aide de critères relativement simples à observer.

Niveau

F0

F1

F2

F3

F4

F5

catégorie

dommages légers

dommages modérés

dommages importants

dommages sévères

dommages dévastateurs

dommages incroyables

vitesse du vent

60 à 110 km/h

120 à 170 km/h

180 à 250 km/h

260 à 330 km/h

340 à 410 km/h

420 à 510 km/h

détail des dommages

antennes TV tordues, petites branches d'arbres cassées, caravanes déplacées

caravanes renversées, arbres arrachés, dépendances soufflées

toitures soulevées, objets légers transformés en projectiles, structures légères brisées

murs de maisons renversés, arbres cassés dans les forêts, projectiles de grandes dimensions

maisons bien construites rasées, gros projectiles, quelques arbres brisés emportés par le vent

fortes structures envolées, arbres emportés par le vent, projectiles à grande vitesse

Echelle de T. T. FUJITA

Sur la planète, les tornades sévissent dans de nombreux pays et sous bien des latitudes. Leur puissance, variable, provoque parfois des dégâts considérables, tuant et blessant dans des nuages de poussière et dans un vacarme dont tous les témoins se souviennent avec effroi. D'Est en Ouest, du Nord au Sud, les tornades sévissent au rythme des saisons propices à leur formation. Reste que les Etats-Unis sont la région du globe où les tornades se forment avec le plus de fréquence et d'intensité : les Etats du Middle West en souffrent plus particulièrement.

Avec plus de 1 000 tornades par an, les Etats-Unis sont de très loin les plus touchés. Dans aucun point du globe ces conditions idéales de formation des tornades ne sont aussi fréquemment réunies.

Aux Etats-Unis, 79 % des tornades sont faibles, durant 10 minutes, avec des vents ascendants de près de 180 km/h et une largeur d'une dizaine de mètres à la base. Environ 20 % sont fortes, durant de 10 minutes à 2 heures avec des vents pouvant atteindre 450 km/h, se déplaçant sur une distance de 160 km sur une largeur de 1 km. Enfin, 1 % sont considérées comme violentes.

Les régions tempérées de l'Europe de l'Ouest n'échappent pas aux tornades, même si les conditions de formation sont plus difficiles à cerner, donc à prévoir. Ce type de manifestation reste malgré tout assez rare.

La France, par exemple, a subi seulement 14 tornades de forte puissance (F4 et F5 sur l'échelle de FUJITA) entre 1680 et 1988, essentiellement dans le Nord et le Centre-Ouest.

On estime à environ 180 le nombre moyen de tornades se produisant par an sur la France métropolitaine. Les probabilités d'intensité sont d'à peu près 80 % pour l'échelle F0, 15 % pour F1, 4 % pour F2, l % pour F3, 0,1 % pour F4, 0,01 % pour F5. Ainsi, il doit se produire en moyenne deux tornades faibles (F0 ou Fl) par an et par département. Les risques de tornades fortes (F4 ou F5) semblent limités à quelques régions (Nord-Ouest, Jura, Languedoc), avec une fréquence moyenne d'environ une tous les cinq ans. La plupart des tornades (70 %) sont observées de mai à septembre, période pendant laquelle les orages sont les plus nombreux.

Ses effets dévastateurs sont peu prévisibles. Très localisée, elle prend naissance en quelques minutes, à tout moment et n'importe où. Son déplacement aléatoire ne peut être modélisé de nos jours. Seule une alerte imprécise sur le lieu et la date peut être délivrée lorsque les conditions atmosphériques sont propices à la formation de tornade. Mais comment se préparer lorsqu'aucun paramètre n'est connu, et que le déplacement se fait dans un couloir étroit et de manière aléatoire ?

Il faut donc essayer de se protéger, en évitant de se trouver sur le passage de la tornade qui se déplace à environ 50 km/h, car les courants ascendants et tourbillonnants arrachent tout du sol : toitures (tôles), arbres, êtres humains. L'anecdote circule pourtant sur ce groupe d'enfants marchant tranquillement sur une route en Chine, en mai 1986, et qui furent aspirés et déposés plusieurs kilomètres plus loin sans égratignure.

Se réfugier dans une maison n'est guère plus sûr, car la différence de pression entre l'extérieur et l'intérieur est telle que la construction en surpression explose littéralement.

Il ne reste donc que deux solutions de bon sens : descendre dans la cave, ou s'éloigner le plus rapidement possible de l'itinéraire que semble prendre la tornade, en ne mésestimant pas sa vitesse de déplacement.

L'ALÉA CYCLONIQUE

Par définition, un cyclone tropical (ouragan dans les Caraïbes, typhon dans le Nord-Ouest du Pacifique) est une dépression d'origine tropicale dans laquelle la vitesse des vents les plus forts dépassent 117 km/h. Il est important de préciser qu'il s'agit là de la vitesse moyenne du vent sur 10 minutes et qu'à ce stade, les rafales de vent peuvent déjà atteindre 170 km/h. L'intensité du vent est caractérisée soit par sa vitesse exprimée en n_uds ou kilomètre/heure, soit par son estimation d'après les effets sur la mer, ainsi que l'amiral BEAUFORT l'a définie.

A partir de cette codification, les phénomènes atmosphériques sont ainsi définis suivant les zones géographiques.

Sur les images satellitaires, le cyclone se présente sous la forme d'une énorme masse nuageuse organisée en bandes spiralées qui convergent vers le centre, l'_il du cyclone.

L'_il est une zone de calme caractérisée par des vents faibles et par un ciel généralement peu nuageux. C'est en revanche à la périphérie de cet _il, dans le mur de nuages qui l'entoure, que le phénomène atteint son paroxysme : précipitations diluviennes, vents pouvant en rafales, pour les cyclones les plus intenses, approcher le seuil de 350 km/h.

Tous les cyclones n'ont pas la même intensité. Entre un cyclone dépassant tout juste le seuil des 117 km/h et les cyclones les plus intenses qui ont été observés par le passé à travers le monde, l'intensité, mesurée par la vitesse du vent, varie pratiquement du simple au double et le pouvoir destructeur, en première approximation dans un rapport de 1 à 4.

Source : Météo-France

La masse nuageuse associée, génératrice de fortes pluies, d'un diamètre généralement de quelques centaines de kilomètres, peut atteindre dans certains cas 1 500, voire exceptionnellement 2 000 km. De la même façon, si le diamètre de l'_il est en moyenne de 30 à 40 km, il peut à l'occasion atteindre une centaine de kilomètres.

Avant d'atteindre l'intensité requise pour être classé cyclone tropical, le phénomène est généralement qualifié de tempête tropicale, suivant une terminologie variable dans les régions du monde.

Rappelons qu'un cyclone ne peut naître que si certaines conditions thermiques et dynamiques sont réunies. Conditions thermiques, puisque la température de l'océan doit être supérieure à 26°C, dans les 60 premiers mètres. Ceci pour permettre une évaporation intense et des transferts de chaleur et d'humidité de l'océan à l'atmosphère, ce qui rend la fin de l'été, où les eaux de surface atteignent 28 à 29°C, particulièrement propice. A contrario, ceci explique l'absence de cyclones dans l'Atlantique sud et le Pacifique sud-est où les eaux sont plus froides, et l'affaiblissement des cyclones dès qu'ils arrivent au dessus d'une terre importante. Un cyclone ne peut se former qu'avec une forte humidité, de l'ordre de 70 %.

Le facteur dynamique résulte de la force de Coriolis, qui déclenche le mouvement tourbillonnaire initial. Cette force est trop faible pour agir en dessous de cinq degrés de latitude ; mais 22 % des perturbations tropicales qui deviendront des cyclones prennent naissance au dessous de dix degrés de latitude, et 65 % entre 10 et 20°.

En moyenne, 85 tempêtes tropicales se forment par an à la surface du globe, dont un peu plus de la moitié atteignent finalement le stade de cyclone tropical. A part l'Atlantique Sud et le Sud Est du Pacifique, toutes les zones océaniques tropicales sont concernées mais à des degrés divers.

Avec environ 30 % des tempêtes tropicales de la planète, le Nord-Ouest du Pacifique constitue, de loin, le bassin océanique le plus actif. C'est dans ce bassin que l'on rencontre les cyclones les plus larges et les plus violents (les « Super Typhoons »), tel le cyclone record TIP au centre duquel fut relevé en octobre 1979 une pression de 870 hPa.

Suivent derrière par ordre décroissant d'activité, le Pacifique nord-est (près de 20 %), à quasi-égalité, le sud-ouest de l'Océan Indien, l'Atlantique Nord et le sud-ouest du Pacifique (respectivement 12, 12 et 11 %), le Sud-Est de l'Océan Indien (8 %) et le Nord de l'Océan Indien (près de 7 %).

Si le bassin Nord de l'Océan Indien est climatologiquement le moins actif, c'est là, en revanche, que l'on rencontre les cyclones les plus meurtriers de la planète en raison de l'ampleur que peuvent prendre, en particulier dans le Nord de la Baie du Bengale, les marées de tempête qui leur sont associées : 250 000 victimes en novembre 1970 (cyclone BHOLA) et 150 000 en avril 1991 au Bangladesh.

Il existe deux échelles pour caractériser les cyclones, selon la vitesse du vent et la dépression centrale. Celle de Vernon F. DVORAK, datant de 1984, comporte 9 niveaux et elle est utilisée dans l'ensemble des tropiques, hormis la zone Atlantique nord, mer des Caraïbes et golfe du Mexique.

Niveau

Vent maximal

(m.s-1)

Pression centrale (hPa)

(Atlantique)

Pression centrale (hPa)

(Pacifique NW)

0

_ 12

   

1

12

   

2

15

1009

1000

3

22

1000

991

4

32

987

976

5

45

970

954

6

57

948

927

7

70

921

898

8

85

890

858

Pour l'Atlantique, SIMPSON avait initié son échelle dès 1974. Celle-ci sera revue par SAFFIR en 1977, et l'échelle SAFFIR-SIMPSON, à cinq niveaux d'ouragan, est la plus connue des Occidentaux.

    Niveau

    Pression centrale (hPa)

    Vent maximal

    (m.s-1)

    1

    _ 980

    34 - 42

    2

    965 - 979

    43 - 51

    3

    945 - 964

    52 - 60

    4

    920 - 944

    61 - 69

    5

    _ 920

    _ 70

Cette échelle SAFFIR-SIMPSON est beaucoup plus explicite sous cette présentation :

1. LES DANGERS LIÉS AU CYCLONE TROPICAL

Le cyclone tropical est souvent comparé à une machine thermodynamique, mettant en jeu des énergies équivalentes à cinq bombes atomiques du type Hiroshima par seconde ! La chaleur latente liée à la condensation est le combustible.

Les puissances mises en jeu dans les cyclones laissent entrevoir les effets dévastateurs qu'ils peuvent entraîner, à cause des vents violents et des trombes d'eau. Mais un des effets les plus meurtriers est dû à l'influence des cyclones sur la mer, et par conséquent sur les régions côtières.

Le cyclone tropical est donc dangereux à trois titres : les vents violents, les pluies abondantes et les dégâts dus à la mer (houle cyclonique et marée de tempête).

1.1. Le vent

Dans les cyclones les plus puissants évoluant de par 1e monde, le vent peut approcher en pointe le seuil des 350 km/h.

Le pouvoir destructeur du vent n'est pas proportionnel à sa vitesse mais au carré de celle-ci. Outre son effet mécanique (poussée, soufflage), le vent lorsqu'il atteint des valeurs très élevées, transforme en véritables missiles les objets les plus lourds.

Lorsque se rapproche un cyclone tropical, le vent se renforce d'abord progressivement puis de façon quasi exponentielle à l'approche de l'_il. A une dizaine de kilomètres de la bordure de celui-ci, le vent souffle avec sa force maximale, les conditions sont véritablement indescriptibles. Puis, brutalement le vent tombe, le ciel s'éclaircit : c'est l'entrée dans l'_il.

Pour les cyclones se déplaçant lentement et possédant un _il de grand diamètre, l'accalmie peut durer plusieurs heures mais le répit est généralement plus court. Dans tous les cas, la reprise de la tempête est aussi brutale qu'avait pu l'être l'amélioration des conditions.

Le vent tourne de 180 degrés et, très rapidement, la tempête reprend avec une violence égale voire supérieure. Le « mur de l'_il » et les vents extrêmes qui l'accompagnent frappent pour la seconde fois. Le cyclone s'éloignant, ce n'est qu'ensuite que les vents commencent à décroître progressivement.

Il est important de souligner le danger que représente le passage de l'_il. Accalmie temporaire et trompeuse, il incite à sortir au risque, pour les personnes imprudentes, de se faire surprendre au dehors par le déchaînement brutal des éléments.

Le relief, tel celui d'une île montagneuse comme la Réunion, joue un rôle important sur la distribution des vents. Il contribue à protéger temporairement certaines régions renforçant, à l'inverse, le vent sur d'autres secteurs. Il peut en résulter, là aussi, des situations d'autant plus dangereuses pour la population qu'elles sont trompeuses : alors que le cyclone se rapproche et que déjà la situation est critique sur une partie de l'île, certains secteurs protégés par la montagne pourront rester assez longtemps à l'abri des vents violents. Que la trajectoire du cyclone vienne à se modifier légèrement et l'effet d'écran disparaît conduisant à l'aggravation brutale des conditions sur les régions jusqu'alors épargnées.

1.2. La pluie

Les formations nuageuses très actives associées au cyclone tropical sont à l'origine de pluies torrentielles qui provoquent inondations, coulées de boue et glissements de terrain.

On estime à 16 km3 par jour, c'est-à-dire 16 000 milliards de litres d'eau, les précipitations se produisant au sein d'un cyclone tropical mature.

Si, d'une manière générale, les précipitations sont plus intenses au coeur du cyclone, toutes les masses nuageuses instables qui accompagnent un tel phénomène sont productrices de fortes pluies. Et concrètement, pour un lieu donné, plus que l'intensité du cyclone, ce qui importe c'est le temps durant lequel il demeure sous ces masses nuageuses.

Ainsi, une tempête tropicale modérée stationnant pendant plusieurs jours à proximité pourra provoquer des pluies cumulées bien supérieures à un puissant cyclone passant rapidement. Ce fut le cas pour Mitch notamment.

Ces pluies sont renforcées de façon très sensible par la présence d'un relief, ce qui donne à cet aspect du cyclone une importance considérable dans les régions montagneuses.

Pour donner un exemple, la Réunion, dont le relief est particulièrement tourmenté, enregistre régulièrement des quantités de pluies phénoménales liées au passage, sur ou à proximité de l'île, de tempêtes tropicales ou cyclones tropicaux. Cette situation exceptionnelle lui vaut de détenir tous les records du monde de pluie pour les périodes comprises entre 12 heures et 15 jours (1 825 mm en 24 heures en janvier 1966 à Foc-Foc lors du cyclone Denise, 1 170 mm en 12 heures, 3 240 mm en 72 heures et 6 401 mm en 11 jours en janvier 1980 lors du cyclone Hyacinthe).

1.3. Marée de tempête et houle cyclonique

Sur les régions côtières, le passage du cyclone s'accompagne d'une élévation anormale et brutale du niveau de la mer, « l'onde de tempête ». La conjugaison de cette onde et de la marée astronomique donne ce que l'on appelle la « marée de tempête », il n'est pas question, ici, de vagues mais bien du niveau moyen de la mer.

Cette marée de tempête conduit généralement à l'envahissement, par la mer, des régions littorales basses. Elle associe son action meurtrière à celle des vagues et favorise, en particulier, le travail de sape des énormes déferlantes de la houle cyclonique sur les infrastructures côtières.

L'amplitude de l'onde de tempête dépend tout autant de la topographie et de la bathymétrie des zones littorales concernées que de l'intensité et de la trajectoire du cyclone. Ainsi, les régions aux plaines littorales très basses sont particulièrement menacées et les marées de tempête peuvent y atteindre des hauteurs considérables permettant à la mer de pénétrer de plusieurs dizaines de kilomètres à l'intérieur des terres. Lors du cyclone BHOLA en novembre 1970 au Bangladesh, l'onde de tempête a atteint 7,20 mètres à Chittagong qui se sont conjugués à 1,80 m de marée astronomique pour donner une marée de tempête de 9 mètres !

2. LA SURVEILLANCE CYCLONIQUE

2.1. Les stations d'observations au sol et en altitude

Les régions océaniques tropicales sont, du point de vue de l'observation classique au sol et surtout en altitude, de véritables « déserts météorologiques ». Ces observations sont cependant indispensables pour la validation des données satellitaires et pour l'alimentation des modèles numériques. L'amélioration de leurs performances globales, ainsi que la prise en compte de la prévision des perturbations cycloniques qui sont parmi les phénomènes les moins bien appréhendés par ces modèles, supposent non seulement le maintien du réseau existant mais son renforcement, avec l'implantation de nouvelles stations de radiosondages et la mise en _uvre d'un réseau complémentaire de stations automatiques et de bouées dérivantes.

2.2. Les systèmes de réception de données satellitales

Du fait de leur évolution sur des régions océaniques où les observations conventionnelles sont rares, la surveillance des tempêtes tropicales et des cyclones tropicaux repose, pour l'essentiel, sur l'exploitation des données satellitaires. Sur l'Atlantique Nord et le nord-est du Pacifique, au large des côtes américaines, les reconnaissances aériennes constituent un outil complémentaire particulièrement puissant mais il est peu probable que les autres bassins cycloniques disposent un jour de cette facilité.

Les images satellitaires permettent de localiser le centre du phénomène et donc, d'une image sur l'autre, de déterminer son déplacement. Elles permettent également d'en apprécier l'intensité (pression minimale au centre et vents maximaux à la périphérie de celui-ci), grâce à une technique d'analyse développée par l'Américain Vernon F. DVORAK, qui s'appuie sur l'étude des configurations et des caractéristiques des formations nuageuses associées au cyclone ainsi que sur l'étude de leur évolution dans le temps.

Là où l'on ne dispose pas d'imagerie de satellite géostationnaire, comme par exemple sur l'Océan Indien, l'imagerie des satellites à défilement est utilisée. Mais d'une manière générale, dans les centres où elles sont disponibles, l'exploitation des images des satellites géostationnaires est privilégiée.

En effet, l'organisation de la structure nuageuse des perturbations tropicales est éminemment variable dans le temps. Si d'une manière générale, l'intensification s'accompagne d'une amélioration de l'organisation de la convection profonde autour du centre, l'évolution de la structure nuageuse ne se fait pas pour autant de façon continue mais plutôt par « poussées ». Une configuration nuageuse permettant à un moment donné de déterminer très nettement la localisation du centre et le degré d'intensité, pourra, dans les heures qui suivent, évoluer d'une façon la rendant difficile à interpréter. A l'évolution de fond du système et de sa structure nuageuse, s'ajoutent les effets diurnes et ceux d'échelle inférieure liés à l'activité convective, sans compter ceux dus à l'interférence de la perturbation avec les circulations adjacentes.

Il est facile de comprendre dans ce contexte que le fait de disposer d'une image toutes les demi-heures (satellites géostationnaires) permettra de s'affranchir plus facilement de ces fluctuations que si l'on ne dispose que de 4 images par jour (satellites à défilement). Il est aussi plus aisé de déterminer le centre d'une circulation cyclonique au travers de l'animation des images d'un satellite géostationnaire que sur l'image figée et pas toujours très facile à « lire » d'un satellite à défilement.

2.3. Les radars météorologiques

Lorsqu'une perturbation cyclonique se situe à moins de 400 km, le radar météorologique de 10 cm de longueur d'onde et doté de systèmes fonctionnels et ergonomiques de traitement, d'affichage et d'archivage des données, devient, sans conteste, l'outil le plus performant et le plus adapté pour une surveillance rapprochée du phénomène. Outre un positionnement et un suivi continu en temps réel du météore, ce radar permet d'appréhender le risque pluviométrique associé, et fournit, s'il est doté de l'effet Doppler, des indications précieuses sur sa structure et notamment sur la vitesse et la répartition des vents à l'intérieur de celui-ci.

Il s'agit là d'un outil coûteux mais indispensable, recommandé par tous les experts et les groupes de travail de l'Organisation Météorologique Mondiale. Trop peu de services météorologiques, dans les pays en voie de développement, mais également dans les Départements et Territoires d'Outre-Mer français en sont actuellement dotés.

3. LA PRÉVISION CYCLONIQUE

La prévision cyclonique, c'est avant tout les prévisions de trajectoire et d'intensité qui conditionnent directement, en aval, les prévisions d'impact (vents, quantité de précipitations, marée de tempête,...) lorsqu'une terre est menacée.

La panoplie des outils permettant de traiter ce problème est large, mais il ne faut pas perdre de vue que le contexte est particulièrement difficile et que les progrès enregistrés sont lents.

Même si, certaines années, tel ou tel centre fait mieux, l'erreur moyenne de prévision de trajectoire à 24 heures reste de l'ordre de 200 km et de 400 km à 48 heures. Parmi ces outils, il y en a de purement climatologiques qui s'appuient sur les données de fichiers historiques, il y a les modèles d'adaptation statistique qui dérivent l'essentiel de leurs prédicteurs des champs prévus par un modèle numérique servant de support, il y a enfin les modèles numériques à domaine limité ou global.

Concernant la prévision numérique en zone tropicale, on notera qu'elle n'a pas connu, et de loin, les énormes progrès enregistrés au cours des 10 dernières années dans la prévision numérique de la circulation des latitudes moyennes. A cela, deux raisons principales : la faiblesse du réseau d'observation, qui pénalise énormément l'analyse des modèles et une connaissance imparfaite, voire insuffisante, de la physique des circulations tropicales, en particulier des problèmes d'interactions d'échelles.

Dans le cas précis du cyclone tropical, la grande diversité des échelles en jeu ainsi que la variété des processus physiques impliqués, font de la prévision numérique de ce phénomène un véritable challenge. On notera, d'autre part, que la maille qu'offrent actuellement les plus puissants des modèles numériques utilisés de façon opérationnelle ne permet pas de résoudre la structure interne du cyclone et, tout particulièrement, sa partie centrale, le c_ur, lieu des conditions météorologiques les plus extrêmes. Cela rend illusoire toute prévision d'intensité.

Des modèles, tel le modèle global du CEPMMT, possèdent la résolution suffisante pour résoudre correctement cette zone externe -zone s'étendant entre 300 et 800 km du centre- tout en restituant bien l'évolution du flux à grande échelle dont on connaît l'effet directeur qu'il a sur le déplacement du cyclone.

Toutefois, la résolution n'est pas seule en cause. A côté des problèmes de paramétrisation, d'assimilation des observations, de l'analyse et de l'initialisation, le problème fondamental reste celui du manque d'observations. Dans le futur, probablement, les techniques de télédétection devraient permettre d'y remédier.

En attendant, la technique du « bogussing » qui consiste à introduire dans le modèle, à partir des analyses des centres de surveillance cyclonique, un certain nombre d'observations fictives afin que le tourbillon soit représenté de façon réaliste dans l'analyse, apparaît comme une alternative intéressante qu'il faudrait cependant développer.

Votre Rapporteur a visité les centres de Météo-France dans les Départements d'Outre-Mer. Si, aux Antilles, Météo-France n'a que la charge de nos départements, le centre de la Réunion est responsable de la surveillance cyclonique pour l'Océan Indien depuis le 1er juillet 1993.

Le Centre fonctionne bien, mais le problème principal est celui du coût des télécommunications pour recevoir les informations de Toulouse et les diffuser dans la zone.

Pour améliorer la prévision cyclonique, ce centre de recherche compte 3 ingénieurs à partir d'août 1998.

Le radar Doppler actuel qui couvre le nord de l'île de la Réunion est très utile pour le plan « fortes pluies », permettant des prévisions de 3 à 6 heures. La zone sud nécessiterait également un radar, mais ceci représente 12 MF d'investissement et 0,5 MF par an de frais de fonctionnement.

Pour les Antilles, le centre régional est situé à MIAMI. En moyenne 9/10 tempêtes ont lieu chaque année dont 6 sont des ouragans. 1995 a été une année exceptionnelle, puisque sur 19 baptisés on a compté 11 ouragans. 1996 a connu une intensité très forte aussi avec 13 baptisés et encore 9 ouragans.

Des saisons 1995/96, on note des cyclones importants : IRIS, LUIS, MARILYN, BERTHA, HORTENSE. En 1995, « l'année de tous les cyclones » ainsi que l'a baptisée la direction interrégionale Antilles-Guyane de Météo-France, il y a eu la trilogie IRIS, LUIS, MARILYN.

IRIS a été une tempête tropicale qui a atteint les côtes de la Martinique le vendredi 26 août. Dès le 25, l'alerte n° 1 a été déclenchée. La vitesse de déplacement du cyclone s'est fortement ralentie au moment du passage sur le sud de l'île. Contrairement à des ouragans de classes supérieures, les parties les plus actives se sont déplacées à l'intérieur de la masse active, certains foyers s'atténuant, d'autres surgissant ailleurs. IRIS se caractérise essentiellement par de très fortes précipitations dans le sud de la Martinique. Elle est responsable de trois morts (dont deux provoquées par un glissement de terrain), de nombreux mouvements de terrain dans la chaîne Vauclin-Piteau, d'inondations et d'une destruction partielle de la bananeraie. Les changements de trajectoires d'IRIS ont été assez inhabituels, les prévisions numériques n'ont pas été très bonnes.

LUIS est un ouragan de classe 4 (vent maximal compris entre 210 et 249 km/h) qui, après avoir abordé l'arc antillais entre Antigua et Barbuda, a atteint les îles de Saint Martin et Saint Barthélemy le 5 septembre (alerte n°2 à 10 heures du matin). Dans les îles du nord, les dégâts sont considérables. De nombreuses constructions ont été endommagées, et l'importante flotte de plaisance est en majeure partie détruite. On déplore neuf victimes. En Guadeloupe, la banane est détruite à 100 %, les cannes du nord de Basse-Terre ont été sérieusement frappées, la côte sous le vent a souffert de la houle d'ouest qui a suivi le passage du cyclone. LUIS a été assez bien vu dans les prévisions de trajectoire.

MARILYN est un ouragan de classe 1 (vent compris entre 119 et 153 km/h) qui a eu un parcours relativement imprévisible. La prévision américaine à 24 h, ne s'est pas confirmée ; attendu au sud de l'arc (Barbade), il est remonté pour passer le jeudi 14 au matin à l'est de la Martinique. Progressant à grande vitesse, il a longé la côte au vent de la Dominique, pour s'engouffrer le soir dans le canal des Saintes. Son passage a été rapide (alerte n° 1 en Guadeloupe à 13 heures, alerte n° 2 à 18 heures, alerte n° 2 renforcée à 19 h 30, alerte n° 3 à 5 heures du matin le vendredi). Si les dégâts ont été peu importants en Martinique, les très fortes précipitations en Basse-Terre (environ 400 mm) ont provoqué des crues torrentielles destructrices et de nombreux glissements de terrain.

En 1996, BERTHA, qui était aussi un ouragan de classe 1, était accompagné d'une pluie normale, mais sa date très précoce (5 juillet) a surpris. HORTENSE qui n'était qu'une tempête, a provoqué des dégâts en passant directement sur la Guadeloupe.

Ces différents ouragans ou tempêtes ont donc eu des classifications très différentes, mais les dégâts ont tous été très importants. La classification n'est donc pas le seul élément à prendre en compte ; la trajectoire, la houle, les précipitations sont autant d'autres éléments à considérer.

NOMS DES FUTURS CYCLONES DANS L'HÉMISPHERE NORD

Atlantique, Golfe du Mexique, Mer des Caraïbes

1999

Arlene, Bret, Cindy, Dennis, Emily, Floyd, Gert, Harvey, Irène, Jose, Katrina, Lenny, Maria, Nate, Ophelia, Philippe, Rita, Stan, Tammy, Vince, Wilma

2000

Alberto, Beryl, Chris, Debby, Ernesto, Florence, Gordon, Helene, Isaac, Joyce, Keith, Leslie, Michael, Nadine, Oscar, Patty, Rafael, Sandy, Tony, Valerie, William

2001

Allison, Barry, Chantal, Dean, Erin, Felix, Gabrielle, Humberto, Iris, Jerry, Karen, Lorenzo, Michelle, Noel, Olga, Pablo, Rebekah, Sebastien, Tanya, Van, Wendy

NOMS INUTILISABLES à cause des dégâts provoqués dans le

BASSIN DE L'ATLANTIQUE (et à compléter lors d'une prochaine révision)

1954 Hazel ; 1955 Connie, Diane, Ione, Janet ; 1957 Audrey ; 1959 Gracie ; 1960 Donna ; 1961 Carla, Hattie ; 1963 Flora ; 1964 Cleo, Dora, Hilda ; 1965 Betsy, Carol ; 1966 Inez ; 1967 Beulah ; 1968 Edna ; 1969 Camille ; 1970 Celia ; 1972 Agnes ; 1974 Carmen, Fifi ; 1975 Eloise ; 1977 Nita ; 1979 David, Frederic ; 1980 Allen ; 1983 Alicia ; 1985 Elena, Gloria ; 1988 Gilbert, Joan ; 1989 Hugo ; 1990 Diana, Klaus ; 1991 Bob ; 1992 Andrew ; 1995 Luis, Marilyn, Opal, Roxanne.

4. LA PRÉVENTION

S'il est évident que l'on ne pourra jamais empêcher un cyclone de frapper, le but qui doit être, en revanche, visé en permanence, c'est de faire que toutes les pertes en biens et surtout en vies humaines qui peuvent être évitées, le soient effectivement.

Ainsi le cyclone n° 0292 du 12 septembre 1928 a fait 1 200 morts, alors qu'Hugo, qui avait une puissance légèrement supérieure, passant sur la même zone géographique, le 17 septembre 1989 a provoqué la mort de 11 personnes.

Aussi bonne que soit une prévision cyclonique, elle restera sans valeur si, d'une part, la population n'a pas de longue date été éduquée pour réagir de façon appropriée au péril cyclonique et si, d'autre part, l'avertissement n'est pas diffusé suffisamment tôt pour permettre à la population de prendre les mesures de sauvegarde qui s'imposent.

Mais il existe aussi un problème de mémoire. La vigilance d'après Hugo est vite retombée, surtout dans les îles épargnées. Ainsi, à Saint Martin, LUIS fit de gros dégâts, plus encore dans la partie hollandaise où l'habitat précaire du ghetto haïtien a été soufflé par le vent.

LUIS était aussi le premier cyclone à toucher l'île depuis 15 ans, il a été pris à la légère en plus d'une perte de crédibilité, de réflexe compte tenu des fausses alertes des années précédentes. C'est un réel souci que nous avons rencontré chez tous nos interlocuteurs de Météo-France, souci des prévisionnistes pour développer la crédibilité dans la population.

Ce n'est plus là qu'un problème purement météorologique ; c'est un problème beaucoup plus vaste touchant à l'organisation, l'information, l'éducation mettant en cause des actions de planification et de prévention souvent de longue haleine. A côté de Météo-France, on note des intervenants aussi divers que les représentants de l'Etat, ceux des différentes collectivités locales, les services de la Protection Civile, de l'Education Nationale et de l'Equipement.

Sur le long terme, le risque cyclonique doit être parfaitement intégré dans la planification des activités des populations, en particulier, au moment de l'élaboration des Plans d'Occupation des Sols.

La gestion des situations de crise provoquées par l'approche et le passage d'un cyclone doit être, quant à elle, soigneusement préparée au travers d'un plan d'urgence (exemple : Plan de Secours Spécialisé « Cyclone ») qui définit un système d'alerte, organise la mobilisation des services de sécurité et établit les responsabilités de chaque intervenant.

Un soin tout particulier doit être apporté pour que le système d'alerte et les conseils qui se rattachent à chacune de ses phases, soient bien connus de la population. Des campagnes d'information en ce sens doivent être organisées avant chaque saison cyclonique et les règles et conseils de base rappelés avant chaque épisode cyclonique.

Votre Rapporteur a eu l'occasion, lors de ses missions dans les départements d'outre-mer, d'assister à ces journées d'information ou de préparation à ces journées. Elles sont minutieusement préparées et font l'objet d'un réel intérêt des populations. L'information des populations passe aussi par la diffusion permanente de conseils dans l'annuaire des Télécom, des affiches, dans la presse écrite. En début de saison, des reportages télévisés, des conférences pour associations sont tenues.

Les services météorologiques, par l'audience certaine que leur confère leur expertise, ont, bien sûr, un rôle essentiel à jouer au niveau de cette information préventive. Ce rôle d'information, et d'explication, devient fondamental dans l'événement, lorsque la menace cyclonique se précise. L'expérience montre, en effet, que l'aspect communication (interventions fréquentes sur les ondes, points de presse) compte, alors, au moins autant que la qualité intrinsèque de la prévision.

Bien sûr, les informations doivent être traitées différemment suivant les destinataires : autorités, presse, public.

En cas de menace, la conduite à tenir fait l'objet de messages diffusés par les radios et les différentes chaînes de télévisions. Deux étapes importantes interviennent :

      · Alerte 1 : rappel des consignes

      · Alerte 2 : rappel par la Préfecture.

Conduite à tenir pour prévenir les accidents dus aux cyclones

(d'après « Le point sur les cyclones tropicaux », A. SOULAN, Ch. MANDAR, N. BLEUSE, Météo-France)

Lorsque la préalerte est déclenchée

    - rester à l'écoute des messages météorologiques sur un poste à piles,

    - faire des provisions de nourriture et d'eau potable,

    - enlever des alentours des maisons tous les objets pouvant devenir des projectiles lancés par le vent,

    - conserver son calme en vaquant à ses occupations habituelles tout en évitant de trop s'éloigner de son domicile.

Lorsque l'alerte est donnée

    - garder son sang-froid,

    - ranger à l'intérieur de l'habitation tous les objets qui peuvent souffrir du vent ou de la forte pluie. Amarrer ce qui ne peut être rentré. Mettre hors d'eau les objets de valeur,

    - vérifier le bon fonctionnement de l'éclairage de secours,

    - faire le cas échéant le plein d'essence de la voiture,

    - essayer de supprimer les installations formant auvent et susceptibles de causer l'arrachement de la toiture. Démonter les installations aériennes qui peuvent l'être,

    - coller des bandes de papier en croix sur les vitres,

    - fermer portes, fenêtres et volets,

    - si le logement est sûr, prévoir le séjour dans la pièce la mieux abritée et s'assurer qu'une porte ou fenêtre pourra être rapidement ouverte,

    - dans la cas contraire, gagner un abri plus sûr,

    - si le logement est équipé pour la collecte de l'eau de pluie, débrancher l'alimentation de la citerne et bien recouvrir le réservoir,

    - ne pas entreprendre de déplacements, ceux en voiture étant strictement interdits par le préfet quelques heures avant que la dépression n'aborde l'île,

    - obéir aux directives de la municipalité, et notamment se tenir prêt à exécuter les ordres d'évacuation qu'elle pourrait être amenée à donner en raison des risques de marée de tempête.

Pendant le passage du cyclone

    - couper le courant électrique au compteur et éteindre les flammes nues,

    - rester dans l'abri choisi. Ne sortir sous aucun prétexte.

Après le passage du cyclone (mise en _uvre des secours)

    - éviter les déplacements. Conduire avec la plus grande prudence une fois les routes dégagées,

    - ne pas s'attrouper près des lieux sinistrés, sauf si l'on est qualifié pour aider les services de secours,

    - s'éloigner des points bas, du voisinage des cours d'eau, des pentes abruptes,

    - attention aux serpents.

Chaque préfecture (SIDPC) a un plan de secours spécialisé « cyclones », qui a tenu compte des précédents et notamment de LUIS, MARILYN et BERTHA.

Aux Antilles, l'information des services, des collectivités s'intensifie en juin. Le point sur le matériel est fait avant le 15 juin, tout comme l'inventaire des bâtiments sûrs, des bâtiments peu sûrs, des malades, des personnes à évacuer.

Entre le 15 juin et le 15 juillet a lieu un exercice de 3 jours, en passant par toutes les alertes et une demi-journée intense avec les mesures prises à chaque phase. La mise en garde des services et des municipalités se fait de 48 à 72 heures avant l'arrivée.

L'alerte 1 est en fait la confirmation de la menace (24/36 h), et provoque le rappel de personnel et une diffusion à la population (en période scolaire, si le cyclone est de type « capverdien », on laisse venir, s'il est de type « barbadien », on ferme).

L'alerte 2 intervient quand le phénomène doit intervenir dans un délai de 4 à 6 h, et ce avec 99 % de certitude sur le fait d'être touché. Il est alors nécessaire de tout fermer et de rejoindre les habitations et les abris.

L'alerte 2 renforcée consiste en une diffusion vers les services : mairies, police, gendarmerie. Ce sont les dernières recommandations et d'ultimes vérifications qu'il n'y a plus d'isolés.

Après le phénomène (alerte 3), a lieu la phase de déclenchement des secours, de P.C. à P.C., des services opérationnels et des municipalités : on procède aux évacuations et au rétablissement des réseaux. Le danger est cependant permanent, car la population commence à re-circuler alors que les conditions ne le permettent pas (consigne 3 : population doit rester à proximité du domicile sauf cas exceptionnels).

La dernière phase est la levée de l'alerte et la gestion de crise post cyclonique.

Le seul problème de cette organisation est un problème d'adaptation d'un plan général pour des cyclones qui ne sont pas de même classe.

Votre Rapporteur s'est rendu sur l'île de Saint-Martin, qui avait été touchée l'année précédente par le cyclone LUIS. Il a constaté qu'après la crise, il est plus facile de sensibiliser la population, y compris les Haïtiens. 6 h après LUIS, les grands axes étaient dégagés et la forte collaboration SEM/Etat/Commune a permis une reconstruction rapide. L'Etat a permis des réquisitions et la mobilisation des secours sur St Martin, secours estimés à 12 MF.

La reconstruction a été facilitée par une intervention européenne, du FEDER et du Conseil Régional de Guadeloupe, ce qui a permis en six mois d'avoir les premières reconstructions et 200 logements sociaux en un an. Sur la partie française de l'île, l'application des normes et l'intervention d'un bureau de contrôle ont été respectées. Même dans l'auto-construction, la reproduction des constructions publiques semble s'être opérée.

Le Sous-Préfet de Saint Martin complétait les propos du directeur de la SEMSAMAR sur l'efficacité de l'Etat qui avait permis les réquisitions, les reconstructions des réseaux indispensables. L'indemnisation par l'assureur intervient trop tardivement.

Le Maire de Saint-Martin soulignait le problème des gens qui ne remplissaient pas les conditions pour être indemnisés, avec des habitats sans permis de construire suivant une habitude « îlienne ». La surface disponible pour construire sur l'île est faible : cela incline à une souplesse nécessaire pour la construction.

Cependant, les constructions sauvages doivent être combattues car il y a des difficultés de mise en conformité avec les normes paracycloniques par méconnaissance des constructeurs. La procédure pour construction sans permis est trop longue dans les îles : il faut arrêter immédiatement les constructions -une transmission au Parquet prend de six mois à trois ans- donc seule une intervention le premier jour est efficace. Cette procédure d'urgence est nécessaire, mais pour cela il faudrait autoriser la puissance publique à la voie de fait : démolir dès la première brique, au risque, ainsi que le souligne le Maire, de voir l'ensemble de la population s'y opposer.

Des intérêts contradictoires surgissent de ce fait avec les assurances, qui refusent d'assurer ou doublent, voire triplent, des primes qui deviennent ainsi excessives. Si après « Hugo », CAT NAT s'applique bien aux DOM, le problème du vent cyclonique demeure, à tel point que nombre d'assureurs se sont retirés de la Réunion, étant dans l'impossibilité d'y faire face.

Tenir compte de l'intensité des cyclones, et prendre en charge à partir d'un certain seuil, pourrait être une solution.

MITCH est le dernier gros cyclone ayant défrayé l'actualité au moment de la rédaction de ce rapport. Hors la controverse sur le nombre de morts, MITCH a fait plus de dégâts par les pluies très abondantes qui l'ont précédé après une très longue période de sécheresse que par la puissance de ses vents.

Votre Rapporteur a eu l'occasion d'accueillir en une journée d'auditions les principaux acteurs français qui sont intervenus en Amérique centrale (compte rendu de cette journée en annexe). Il ressort de cette journée que la prévention est essentielle, mais faut-il encore pouvoir la mettre en pratique dans des pays qui rencontrent des difficultés.

trajectoire de l'ouragan MITCH (source Météo-France)

A ce sujet, les cyclones ayant touché les Petites Antilles ont été étudiés, et notamment Hugo, l'un des plus dévastateurs.

Trajectoire de l'ouragan Hugo sur la Guadeloupe (source Météo-France)

Sur la zone balayée par l'_il de l'ouragan, on a compté 98 % de sinistrés.

Le secteur de la pêche a été sinistré à 100 %, les cultures ont été détruites (bananeraies sinistrées à 100 %, canne à sucre à 60 %, cultures vivrières et maraîchères à 85 %). L'élevage a également souffert, ainsi que le tourisme.

Cet ouragan de force 4 dans l'échelle cyclonique SAFFIR-SIMPSON, n'a provoqué que 11 victimes (7 indirectement) en Guadeloupe, tandis que le cyclone de 1928 y faisait 1 200 victimes. Deux raisons sont à l'origine de cette importante différence : dans le cas de Hugo, d'une part, la population était prévenue du danger et, d'autre part, le passage nocturne du cyclone a sensiblement réduit le risque de céder à la tentation de quitter les abris. En effet, l'anxiété et la curiosité liée à une certaine forme de bravoure incitent les personnes à quitter leur abri, ce qui entraîne souvent des conséquences graves.

Hugo en quelques chiffres : tableau des conséquences du passage de l'ouragan

Pays

Bilan

Guadeloupe

11 morts - 107 blessés - 25 000 sans abri - 35 000 sinistrés - 4 milliards de francs de dégâts

Dominique

35 MF de dégâts - 75 % des bananeraies détruites

Antigua

1 mort - 160 MF de dégâts

Monserrat

10 morts - 770 MF de dégâts

Saint-Kitts et Nevis

1 mort - 2 000 sans abri

Iles Vierges britanniques

1 200 MF de dégâts - 10 % de sans abri

Iles Vierges américaines

6 morts - 90 % des bâtiments endommagés

Porto Rico

12 morts - 30 000 sans abri - 1 300 MF de dégâts

Etats-Unis

41 morts - 50 000 sans abri - 250 000 personnes
au chômage

TOTAL

82 morts - 60 milliards de francs de dégâts

Les catastrophes naturelles provoquent de nombreuses victimes, et tout particulièrement les cyclones tropicaux, ouragans, ou typhons. Le recensement des victimes de 1947 à 1980, effectué par SMITH en 1989, les place d'ailleurs en tête des cataclysmes.

Dans les pays sous-développés, compte tenu de la précarité des logements, de la pression démographique ainsi que du manque de moyens économiques et financiers pour assurer une meilleure prévention, le nombre de victimes reste aujourd'hui encore très élevé. En revanche, dans les pays développés, les pertes en vies humaines diminuent d'une décennie à l'autre. Les études conduites aux Etats-Unis (SMITH, 1989) révèlent que les pertes en vies humaines occasionnées dans ce pays par les ouragans de 1900 à 1990 ont diminué (figure suivante), bien que la population ait beaucoup augmenté durant cette période. A l'inverse, les dommages matériels sont en augmentation.

Nombre de personnes tuées par les ouragans aux Etats-Unis

et évolution des populations côtières en Floride

A titre indicatif, la même figure (échelle de droite) montre l'augmentation de la population de Floride (SMITH, 1989), en zone côtière de 1900 à 1985. Il s'agit des régions les plus touchées par les cyclones ; par ailleurs, il semble raisonnable d'admettre qu'une croissance similaire des populations ait été observée pour l'ensemble des régions des Etats-Unis concernées par ce phénomène.

La diminution des pertes en vie humaine dans les pays développés peut être attribuée à :

    ù une amélioration de la prévision du phénomène, ce qui permet aux autorités d'organiser efficacement la prévention avant l'arrivée du cyclone en prodiguant des conseils et en incitant les personnes dont le logement n'offre pas une sécurité suffisante à se rendre dans des lieux sûrs ;

    ù une meilleure information et une formation des populations concernées ;

    ù un plus grand respect des normes de construction anticyclonique ou bien l'aménagement d'un endroit suffisamment isolé dans une habitation où l'on peut s'abriter de la pluie, du vent et des projectiles.

L'accroissement de la valeur des pertes matérielles est dû essentiellement au développement économique rapide de ces régions (voir tableau suivant), ce qui se traduit par :

    ù une concentration importante des biens matériels de grande valeur (voitures, bateaux de plaisance, résidences privées, etc.) difficiles à protéger lors du passage d'un cyclone ;

    ù le développement d'un tissu industriel, commercial et administratif représentant des investissements très importants qui contribuent à augmenter la valeur des dégâts potentiels ;

    ù l'existence d'une infrastructure coûteuse, propre aux régions développées (ports de plaisance, installations sportives, réseau routier dense, réseau de télécommunications, etc.) qui subit des dégâts importants lors du passage d'un ouragan.

En définitive, même si dans le temps et en valeur relative, les dégâts enregistrés ont diminué, en valeur absolue, ils restent élevés.

Panorama de quatorze cyclones parmi les plus meurtriers ayant affecté

les Etats-Unis d'après SIMPSON et RIEHL (1981)

Année

Ouragan

Régions

Nombre de morts

Dégâts (millions de dollars)

1900

 

Galveston, Texas

6 000

30

1919

 

Florida Keys, Corpus Christi

600

20

1928

 

Palm Beach, Okeechobee, Floride

1 836

25

1935

 

Florida Keys

408

6

1938

 

New England

600

306

1957

Audrey

Southwest Louisiana

390

150

1960

Donna

Floride, New York, New England

50

387

1961

Carla

Texas

46

408

1961

Betsy

Floride, Louisiane

75

1 420

1969

Camille

Louisiane, Mississipi, Virginie

256

1 420

1972

Agnès

Floride, Virginie, Maryland, Pennsylvanie

122

2 100

1979

Frédéric

Alabama, Mississipi, Floride

5

2 300

1989

Hugo

Iles Vierges, Porto Rico, Caroline du Sud

59

12 000

1992

Andrew

Floride, Bahamas, Louisiane

54

15 000
à 30 000

Les ouragans aux Antilles françaises

Les îles françaises de la Caraïbe ont subi de nombreux ouragans au cours de leur histoire. Pour la période allant de 1635 à 1885, les informations et les estimations ne sont que très approximatives quant à la trajectoire et à l'intensité du phénomène. Cependant, on recense 74 ouragans ou fortes tempêtes pendant cette période de 251 ans. De 1886 à 1989, 52 ouragans ont touché les îles françaises, dont 29 ont affecté la Guadeloupe.

Les cyclones les plus meurtriers ayant affecté les Petites Antilles,

d'après SMIR Antilles-Guyane (1990)

année

cyclone

régions

nombre de morts

dégâts

1766

 

Martinique

Saint-Pierre

400

80 navires disparus

1780

 

Guadeloupe

Martinique

9 000

non évalués

1891

 

Martinique

700

non évalués

1928

 

Guadeloupe

1 200

très importants (non évalués)

1966

Inès

Guadeloupe

27

très importants (non évalués)

1989

Hugo

Guadeloupe

11

4 milliards de francs français

Par ailleurs, les cyclones, par les transformations brutales induites sur les activités économiques, ont souvent été à l'origine de changements structuraux importants dans la vie économique d'un pays, plus particulièrement dans le secteur agricole. C'est ainsi qu'après le cyclone de 1929 et la quasi-destruction des plantations de café, on a introduit en Guadeloupe la plantation et l'exploitation de la banane destinée à l'exportation.

Dans d'autres secteurs, comme le secteur de l'industrie et du bâtiment, la destruction des usines ou des logements a permis une reconstruction qui tient mieux compte des normes anticycloniques et rend par conséquent les nouveaux bâtiments plus résistants face aux vents et aux eaux. Un exemple récent est celui de la Guadeloupe où les logements précaires (cases en bois) détruits lors du passage de Hugo ont été remplacés par des maisons plus résistantes et répondant mieux au risque cyclonique. D'après BARNAUD et GANDEMER (1993), l'habitat traditionnel, avec des toits à deux versants et faible pente, est peu résistant aux forces de soulèvement. Par contre, les expérimentations ont démontré qu'un toit à quatre versants (pente de l'ordre de 30°) constitue une amélioration intéressante, car elle permet une diminution sensible des dépressions et localement une forte réduction des charges sur les rives de toiture. Sur le même principe, en Jamaïque, s'est depuis longtemps développé l'habitat à double toits déconnectés, ce qui permet, en cas de « crash » accidentel, de sauvegarder la moitié de la maison. De même, aux Etats-Unis, à partir de 1975 (New Texas), les nouveaux logements correspondent aux normes paracycloniques (SIMPSON et RIEHL, 1981).

Cette importance de la prévention est donc capitale dans la préservation des vies humaines. L'information et la mise en _uvre de « Plan de secours spécialisé Cyclone » -à titre d'exemples, celui de la Guadeloupe comprend 163 pages, celui de la Martinique 80 pages- permettent aussi de se préparer à la venue du cataclysme. Une bonne prévision permet aussi de se préparer à l'après cyclone, de mobiliser les forces pour une remise en état rapide. La situation dans les îles est d'ailleurs symptomatique, et Saint-Martin en est une parfaite illustration. La partie française de l'île avait retrouvé son aspect accueillant quelques semaines après LUIS, la partie néerlandaise portait encore les stigmates du cyclone plus de deux ans après.

La qualité des services avait non seulement permis de sauver des vies humaines, mais aussi d'entreprendre les reconstructions nécessaires. Il faut rendre hommage aux unités de sécurité civile et aux sauveteurs français en général, pour l'excellence de leurs prestations, et les populations d'Amérique centrale victimes de Mitch leur ont d'ailleurs manifesté leur reconnaissance.

Il reste toujours des choses à améliorer ; ainsi par exemple à Saint-Martin, faudrait-il se doter d'une salle opérationnelle dans un P.C. de crise, la sous-préfecture ne pouvant, par sa position géographique et son exposition au vent, l'abriter.