Mission d'information sur la mise en oeuvre
de la loi organique relative aux lois de finances
(28 avr. 2004 )
Propositions de modification de la nouvelle maquette
du budget de l’État
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Le Premier ministre a décidé de soumettre au
Parlement la maquette présentant la nouvelle architecture du budget de l’État. Pour répondre à cette demande, la Commission des finances, à partir des travaux de sa
Mission d’information sur la mise en œuvre de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances, a arrêté plusieurs propositions d’amélioration.
i.– trois principes pour améliorer l’architecture du budget
La maquette doit mettre en évidence les différents volets de l’action de l’État,
afin que le Parlement, par son vote, puisse clairement autoriser la mise en œuvre d’une politique publique identifiée. Cette exigence
de lisibilité suppose que les politiques publiques soient bien mises en évidence, et que la dimension interministérielle de certaines
d’entre elles soit prise en compte.
La loi organique vise à transformer la gestion publique en promouvant une
logique de résultats. Cette ambition passe par un renforcement des capacités de contrôle du Parlement. Les programmes doivent avoir une portée politique et une
lisibilité suffisantes pour être soumis à l’appréciation du Parlement, et ne peuvent pas se contenter de regrouper des actions manifestement éloignées les unes des
autres. Ils n’ont pas été conçus pour assurer le confort budgétaire des structures administratives, mais pour améliorer l’efficacité de leur gestion.
En contrepartie de l’autonomie qu’elle lui offre, la loi organique exige de
l’administration une responsabilisation accrue. Les ministères devront s’engager sur des résultats et rendre compte de leur gestion, dont l’efficacité sera analysée au
travers des objectifs et des indicateurs présentés dans les projets et rapports annuels de performances.
La maquette doit donner une véritable capacité de pilotage aux responsables des
programmes. Le principe de responsabilisation suppose que chaque gestionnaire, pour pouvoir atteindre ses résultats, maîtrise tous les moyens prévus pour mener à bien la
politique dont il a la charge.
ii.– Les principales propositions
a.– des missions mieux délimitées
La maquette prévoit 45 missions, dont 9
interministérielles. La Commission des finances propose d’améliorer cette architecture en recourant à 44 missions, dont 13 interministérielles.
1.– Les missions « mono-programme » sont supprimées
Le Gouvernement a prévu plusieurs missions constituées
d’un seul programme. Cette présentation n’est pas conforme à la loi organique qui exclut explicitement qu’une mission soit composée d’un seul programme. Elle aurait en
outre pour effet de soustraire une partie du budget au droit d’amendement des parlementaires.
2.– Trois nouvelles missions sont créées
– une mission « Politiques des territoires »
englobant les moyens de la Délégation à l’aménagement du territoire et à l’action régionale (DATAR), les crédits que le ministère de l’équipement consacre à la
stratégie et à l’aménagement, ainsi que le programme des interventions territoriales de l’État qui regroupera, pour les politiques locales justifiant une coordination
accrue par les préfets, des crédits venant de ministères différents ;
– une mission « Stratégie économique et pilotage
des finances publiques » regroupant la charge de la dette, les moyens des directions « d’état-major » du ministère de l’économie et des finances et ceux des services
du ministère de la santé chargés du pilotage de la sécurité sociale ;
– une mission « Écologie et maîtrise des risques »
couvrant l’ensemble des actions de l’État en matière d’écologie et de maîtrise des risques : sécurité civile ; météorologie ; interventions du ministère de l’écologie en
faveur de la prévention des risques naturels et de la gestion de milieux ; moyens des directions régionales de l’industrie, de la recherche et de l’environnement (DRIRE)
dédiés au contrôle des risques industriels ;
3.– Quatre missions sont élargies
– la gendarmerie nationale est rattachée à la
mission « Sécurité » afin de faire figurer les deux forces de l’ordre dans la même unité de vote ;
– le réseau à l’étranger du ministère de l’économie
et des finances est inclus, à côté de celui du ministère des affaires étrangères, dans la mission « Action extérieure de l’État », afin de mieux coordonner
les interventions des deux ministères ;
– afin de respecter sa dimension interministérielle, la mission « Recherche et enseignement supérieur »
est élargie aux établissements de formation et de recherche agricoles ;
– enfin, les budgets du logement et de la ville
sont rapprochés dans une même mission, de manière à ne pas réduire l’amélioration du cadre de vie en milieu urbain aux seules actions de l’État en faveur des zones
relevant de la politique de la ville.
B.– DES PROGRAMMES mieux ciblés et mieux pilotés
1.– Plusieurs programmes sont scindés
En prévoyant 141 programmes, le Gouvernement a poussé
très loin le mouvement de globalisation des crédits. Il offre ainsi aux ministères une liberté de gestion considérable : globalement, le degré de spécialisation serait
six fois moins important qu’aujourd’hui, et dix-sept programmes dépasseraient les 5 milliards d’euros.
La Commission des finances considère que l’exigence de
cohérence des programmes n’a pas toujours été respectée. Elle préconise de scinder plusieurs unités de spécialité, et propose ainsi une architecture en 157 programmes.
– les remboursements et dégrèvements d’impôt
sont décomposés en fonction de leur finalité, avec notamment la création d’un programme « Prime pour l’emploi » et d’un programme « Crédit d’impôt recherche » ;
– au sein des crédits de la défense, le
recrutement et la formation des personnels ainsi que l’armement nucléaire sont isolés dans des programmes spécifiques ;
– au sein du budget des universités, les
formations supérieures et la recherche sont distinguées dans des programmes séparés ;
– un programme dédié à la vie des élèves du second
degré public est créé ;
– les interventions du ministère de l’agriculture
sont présentées, en fonction des deux volets de la politique agricole commune, en deux programmes ;
– au sein du budget du logement, les aides à la
pierre et les aides à la personne font l’objet de programmes distincts ;
– enfin, un programme dédié à la réforme de l’État
et aux relations avec les citoyens est créé au sein du budget du Premier ministre.
2.– Les conditions de pilotage de certains programmes doivent être revues
– certains programmes du ministère de l’économie, des finances et de l’industrie couvrent plusieurs programmes. Le partage des responsabilités au sein De ce
ministère mérite d’être réexaminé, afin de donner aux futurs responsables de programme les moyens d’assurer pleinement leur fonction ;
– la prééminence du chef d’état-major des armées doit être renforcée, pour moderniser le ministère de la défense en recourant davantage à la mutualisation
des moyens.
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La Commission des finances a conscience que la finalisation de la maquette permettra de franchir une étape décisive. Elle mesure néanmoins l’importance du chemin qui
reste à parcourir, et souhaite émettre deux recommandations pour l’avenir.
a) La nouvelle architecture du budget doit garder une capacité d’évolution
Sur trois points, la maquette est destinée à permettre
une réforme de l’administration et revêt donc un caractère transitoire :
– la réforme de Bercy doit se traduire par la
mise en place de plusieurs programmes qui pourraient être : recouvrement des impôts, gestion des dépenses de l’État et gestion des dépenses du secteur public local ;
– de même, la présentation des crédits de la défense
est liée à la nécessité de réorganiser la gestion des armées qui doit, à terme, aboutir à une structuration des programmes en fonction des systèmes de force
prévus par la loi de programmation militaire :
– enfin, le rattachement de la recherche universitaire
dépend de la réforme du statut des enseignants chercheurs. L’identification de la recherche universitaire dans un programme spécifique constitue une première
étape vers un rapprochement entre les universités et les organismes de recherche, et, à terme, la constitution de programmes découpés par catégorie de discipline.
b) La nouvelle architecture du budget doit être suivie par une véritable rénovation de la gestion de l’État
La finalisation de la maquette est une condition
nécessaire, mais non suffisante, de la réussite de la réforme : elle ne doit pas constituer une simple façade derrière laquelle le statu quo pourrait perdurer.
Les ministères devront, en premier lieu, adosser au
nouveau budget le dispositif de gestion par la performance prévu par le texte, qui suppose un changement de culture administrative. La comptabilité devra
devenir un outil de modernisation, et le Gouvernement devra mener à terme la rénovation de la gestion des ressources humaines, en passant d’une approche
exclusivement statutaire à une approche fonctionnelle.
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En savoir plus :
- dossier sur
loi
organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances
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