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N° 1864

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DOUZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 13 octobre 2004.

AVIS

PRÉSENTÉ

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES, FAMILIALES ET SOCIALES SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2005 (n° 1800)

TOME VII

CULTURE ET COMMUNICATION

COMMUNICATION

Par M. Dominique Richard,

Député.

___

Voir le numéro : 1863 (annexe n° 14).

INTRODUCTION 7

I.- LES CRÉDITS DE L'AUDIOVISUEL PUBLIC : UNE AMBITION LIMITÉE 9

A. DES RECETTES CONSOLIDÉES MAIS LIMITÉES 9

1. La réforme du financement public : nécessaire mais insuffisante 9

a) La redevance nette pour 2005 : 2 201,8 millions d'euros 9

b) Les excédents de collecte seront nuls en 2005 11

c) Les remboursements d'exonérations de redevance : 440 millions d'euros 12

d) La subvention du ministère des affaires étrangères au budget de Radio France Internationale (RFI) 12

2. Une hausse des ressources propres encore une fois supérieure à celle des ressources publiques 12

a) La publicité et le parrainage : 730,9 millions d'euros 12

b) Les autres ressources propres : 72,6 millions d'euros 13

B. LA MISE EN œUVRE DES PRIORITÉS RISQUE D'ÊTRE FREINÉE PAR LE MANQUE DE MOYENS FINANCIERS 13

1. France Télévisions : préparer le lancement de la télévision numérique terrestre (TNT) et améliorer la qualité des programmes 13

2. ARTE France : préparer le lancement de la télévision numérique terrestre (TNT) 14

3. Les autres organismes : des projets lourds à financer en priorité 14

a) Radio France 14

b) Radio France Internationale (RFI) 15

c) L'Institut national de l'audiovisuel (INA) 15

d) le fonds de soutien à l'expression radiophonique 15

II.- LES AIDES À LA PRESSE 17

A. LES AIDES DIRECTES : EN TRÈS FORTE HAUSSE 17

1. Les aides à la diffusion de la presse : soutenir la modernisation 18

a) La réduction du tarif SNCF pour le transport de presse 18

b) L'aide à l'expansion de la presse française à l'étranger 18

c) L'aide au portage 18

d) L'aide à la modernisation de la distribution des quotidiens nationaux 19

e) L'aide à la modernisation de la diffusion 19

2. Les aides au pluralisme et à la diversité des titres 20

a) L'aide aux quotidiens nationaux d'information politique et générale à faibles ressources publicitaires 20

b) L'aide aux quotidiens régionaux, départementaux et locaux à faibles ressources de petites annonces 20

3. Les aides au développement multimédia et à la modernisation 20

a) Le fonds presse et multimédia 20

b) Le fonds de modernisation 20

c) L'aide à la modernisation sociale de la presse quotidienne d'information politique et sociale 21

B. L'IMPORTANCE TOUJOURS MARQUÉE DES AIDES INDIRECTES 21

C. L'AGENCE FRANCE PRESSE : UN SOUTIEN RENOUVELÉ 22

III.- LE SOUTIEN À LA PRODUCTION AUDIOVISUELLE FRANÇAISE 24

A. LES PARADOXES DE LA PRODUCTION AUDIOVISUELLE FRANÇAISE : ÉTAT DES LIEUX 25

1. Un dispositif de soutien étoffé 25

a) Une réglementation basée sur des quotas de diffusion et des obligations de production 25

b) Les aides à la production sont distribuées par le compte de soutien à l'industrie des programmes audiovisuels (COSIP) 26

c) Des améliorations importantes apportées par le projet de loi de finances 2005 28

2. Une comparaison européenne peu flatteuse 29

a) Quasiment tous les pays européens disposent de systèmes d'aides publiques à la production audiovisuelle 29

b) Dans le domaine de l'audiovisuel la France produit moins et plus cher que ses voisins 30

3. La faiblesse des ressources de l'audiovisuel public français 31

a) Un financement public insuffisant en France 32

b) Des recettes publicitaires en baisse et encore faibles en comparaison des autres pays européens et des télévisions françaises privées 33

c) Un budget global relativement faible 33

B. LA NÉCESSITÉ DE MIEUX SOUTENIR LA PRODUCTION AUDIOVISUELLE FRANÇAISE 34

1. L'indispensable augmentation des ressources du secteur audiovisuel et du fonds de soutien à la production audiovisuelle 35

a) Améliorer le rendement de la redevance : le rendez-vous manqué 35

b) Augmenter de manière rationnelle les recettes publicitaires 35

c) Inclure les recettes de diversification dans l'assiette de la taxe COSIP 36

d) Aligner le taux des taxes 36

2. L'intérêt d'une définition plus précise de la notion d'œuvre 36

3. Assouplir la réglementation sur quelques difficultés techniques handicapant la production audiovisuelle 37

a) Les tournages dans les lieux historiques publics 37

b) Renégocier les accords de rediffusion afin de développer le second marché 37

c) Aménager les règles de parrainage pour les fictions 38

4. D'autres pistes à explorer avec la profession 38

a) Intégrer la production audiovisuelle à d'autres politiques interministérielles 38

b) Encourager les jeunes réalisateurs 38

c) Les œuvres destinées à la jeunesse 39

d) L'importance d'une politique européenne cohérente 39

TRAVAUX DE LA COMMISSION 41

I.- AUDITION DU MINISTRE 41

II.- EXAMEN DES CRÉDITS 68

ANNEXE : LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES 71

INTRODUCTION

Le budget de l'audiovisuel public s'élèvera à 3 464,44 millions d'euros en 2005, soit une hausse de 2,63 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2004.

La part de financement public - c'est-à-dire la redevance et les dotations budgétaires - augmentera pour sa part de 62,5 millions d'euros (soit + 2,4 %), pour atteindre 2 659,61 millions d'euros. Les ressources propres du service public observeront quant à elles une hausse de 26,3 millions d'euros (+ 3,38 %), les recettes de publicité et de parrainage atteignant 730,9 millions d'euros, soit une hausse de 3,78 %.

Budget de l'audiovisuel public

LFI 2004

PLF 2005

2005/2004

en M€

en M€

en %

Crédits (HT) disponibles sur le CAS n° 902-15 d'emploi de la redevance

2 525,7

2 587,5

+ 2,45

dont :

- Encaissements TTC

2 191,8

2 266,8

+ 3,42

- excédents années antérieures

32,4

0

- 100

- Crédits budgétaires : remboursements des exonérations 1

428,1

440

+ 2,78

Subvention MAE

71,4

72,1

+ 0,98

Total ressources publiques (HT)

2 597,1

2 659,6

+ 2,4

Publicité-parrainage

704,3

730,9

+ 3,78

Ressources propres

72,9

72,6

- 0,41

Total

3 375,6

3 464,4

+ 2,63

1 Depuis la loi du 1er août 2000, ces crédits sont affectés sur le compte d'affectation spéciale 902-15 d'emploi de la redevance.

Source : ministère de la culture et de la communication.

La part de financement public fléchit donc très légèrement, pour passer de 76,94 % en 2004 à 76,77 % en 2005.

Budget des organismes de l'audiovisuel public

2004

2005

2005/
2004

en M€

en M€

France Télévisions*

2 531,3

2 612,7

+ 3,2 %

dont F2, F3 et F5

2 304,8

2 381,10

+ 3,3 %

dont RFO

226,5

231,6

+ 2,2 %

ARTE-France

197,03

201,86

+ 2,4 %

INA

102,56

106,31

+ 3,7 %

Radio France *

519,36

531,3

+ 2,3 %

RFI

128,90

129,76

+ 0,7 %

* Chiffre d'affaires.

Source : jaune budgétaire 2005 du secteur public de la communication audiovisuelle.

Quant aux aides directes à la presse écrite, elles s'élèveront à 77,45 millions d'euros en 2005 hors abonnements de l'Etat à l'AFP, ce qui représente une hausse de près de 140 %. Cette hausse s'explique par la création d'un nouveau chapitre d'aide à la modernisation de la presse d'information politique et générale, doté de 48 millions d'euros. Il s'agit cependant pour partie d'une réaffectation de crédits à la suite de l'accord entre l'Etat, la Poste et la profession en juillet 2003.

L'AFP bénéficiera quant à elle d'une hausse de 2,48 millions d'euros (+ 2,4 %) du montant des abonnements souscrits par l'Etat (soit un total de 105,68 millions d'euros).

*

Après avoir présenté et commenté le budget de l'audiovisuel public et des aides à la presse pour 2005, le rapporteur pour avis s'attachera, comme il est d'usage dans les avis budgétaires de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, à examiner un aspect de la politique publique dont ce budget est l'illustration. Son choix s'est porté cette année sur le soutien à la production audiovisuelle française.

L'article 49 de la loi organique du 1er août 2001 fixe une date butoir pour le retour des réponses aux questionnaires budgétaires au plus tard huit jours francs à compter du dépôt du projet de loi de finances, soit le 9 octobre 2004. A cette date, 75 % des réponses étaient parvenues au rapporteur pour avis.

I.- LES CRÉDITS DE L'AUDIOVISUEL PUBLIC :
UNE AMBITION LIMITÉE

Le budget de l'audiovisuel public pour 2005 ne tient pas toutes ses promesses. Le service public de l'audiovisuel et la profession attendaient beaucoup de la réforme de la redevance. Ces dernières années, et les grilles de cette rentrée accentuent ce phénomène, il s'est engagé dans une programmation qualitative qui réunit à l'antenne fictions françaises, documentaires, animation, grandes émissions politiques, diffusion culturelle, justifiant ainsi sa mission particulière. La question du taux et du rendement de la redevance n'est pas uniquement conjoncturelle. C'est aussi une question de société. Il est regrettable que le vote des recettes n'ait pas suffisamment permis de conforter la spécificité du secteur public de l'audiovisuel, de relancer le secteur de la production et d'affirmer ainsi notre identité culturelle.

A. DES RECETTES CONSOLIDÉES MAIS LIMITÉES

En 2005, l'augmentation des ressources publiques sera supérieure en volume à celle des ressources propres (+ 62,5 millions d'euros contre + 26,3 millions d'euros). Au total, les recettes du secteur public de l'audiovisuel public s'élèveront à 3 464,4 millions d'euros en 2005, soit une hausse de 2,63 % par rapport à 2004. Compte tenu de la prévision de hausse des prix retenue pour l'élaboration de la loi de finances pour 2005 (soit + 2,2 %), cette augmentation ne permettra donc d'accroître que de 0,43 % les moyens réels des sociétés de l'audiovisuel public... En cela, l'amendement adopté commun aux rapporteur pour avis spécial et pour avis visant à garantir les recettes pour 2005 est d'autant plus utile que les prévisions pour 2004 n'ont pas été atteintes et que des annulations de crédits budgétaires relatifs au remboursement des exonérations sont intervenues.

1. La réforme du financement public : nécessaire mais insuffisante

Les ressources publiques représenteront en 2005 76,77 % du budget des organismes de l'audiovisuel, ce qui marque un léger fléchissement par rapport aux niveaux atteints en 2004 (76,94 %). Cette part de financement est extrêmement variable selon les organismes, notamment en raison de leur inégale capacité à obtenir des ressources propres.

a) La redevance nette pour 2005 : 2 201,8 millions d'euros

En 2005, les tarifs de la redevance audiovisuelle seront en baisse, après trois ans de stagnation. Ils s'établiront à 116 euros pour la métropole (- 0,43 %) et 74 euros pour les départements d'outre-mer (- 0,42 %). La redevance perdra donc en 2005 encore plus qu'en 2004, de sa capacité contributive en euros courants.

En 2004, le principe de l'affectation directe de la redevance au financement du secteur audiovisuel public à travers un compte d'affectation spéciale a été confirmé par l'article 37 de la loi de finances pour 2004 du 30 décembre 2003. Certes, la mise en œuvre de la nouvelle réforme contribuera, dès 2005, au rendement accru du produit de la redevance, le recouvrement et la gestion des dégrèvements de redevance étant désormais assurés par les agents de la direction générale des impôts en charge de la taxe d'habitation. Mis en œuvre progressivement, ces redéploiements permettront de réduire les frais d'assiette et de recouvrement de la redevance audiovisuelle à 46 millions d'euros en 2005 puis à 23 millions d'euros en 2006 (contre 73,54 millions d'euros en loi de finances initiale pour 2004). Ce nouveau mode de collecte va également permettre une hausse du taux de recouvrement, le paiement spontané de la taxe d'habitation étant plus élevé que celui de l'actuelle redevance. En 2005, ce sont plus de 75 millions d'euros supplémentaires qui seront perçus.

Par ailleurs, la base juridique de l'affectation du produit de la redevance aux organismes de l'audiovisuel public est clarifiée, la redevance devenant une taxe fiscale directement affectée aux organismes investis des missions du service public de l'audiovisuel.

Ressources disponibles sur le CAS n° 902-15 et sur le compte d'avance
n° 903-60 
(1) d'emploi de la redevance

(en millions d'euros)

LFI 2003

LFI 2004

PLF 2005

encaissements bruts

2 104,2

2 191,75

2 266,82

frais de gestion

- 73,54

- 73,54

- 46

frais de trésorerie

0

0

- 19

encaissements nets

2 030,66

2 118,21

2 201,82

excédents années antérieures

39,97

32,44

0

remboursements exonérations

449,23

428,12

440

total TTC disponible

2 519,86

2 578,77

2 641,82

total HT disponible

2 468,03

2 525,73

2 587,48

Source : ministère de la culture et de la communication.

Répartition prévisionnelle de la redevance en 2005

(en millions d'euros)

Organismes

Montant HT

France Télévisions (y compris RFO)

1 781,08

Arte France

197,98

Radio France

481,97

RFI

53,71

INA

72,74

Total

2 587,48

Source : jaune budgétaire 2005 du secteur public de la communication audiovisuelle

Enfin, la redevance sera désormais recouvrée en novembre en même temps que la taxe d'habitation(2). Pour ne pas affecter la trésorerie des organismes, la création du compte d'avances aux organismes de l'audiovisuel public (n° 903-60) leur assurera des versements réguliers. Ces avances mensuelles correspondront à un douzième des recettes prévisionnelles inscrites en loi de finances initiale, déduction faite des frais d'assiette et de recouvrement (46 millions d'euros) et du montant des intérêts liés au versement des avances (19 millions d'euros).

Le fait générateur actuel de l'imposition, la détention d'un moyen de réception de la télévision, est maintenu. L'absence de détention de tout appareil récepteur devra être attestée sur l'honneur dans la déclaration de revenus. Une seule redevance sera due par foyer, quel que soit le nombre d'appareils détenus, mais aussi de résidences. Du fait de ce changement d'assiette, les résidences secondaires sont donc exonérées ce qui n'est pas sans conséquence pour la dynamique du rendement de la redevance, le moins-perçu n'étant pas compensé par l'Etat, contrairement aux moins-perçus liés à des exonérations pour motif social (3).

Ces moyens supplémentaires doivent notamment servir au financement des travaux de mise en sécurité de la Maison de la radio ; à la mise en place de la TNT pour les télévisions publiques (principalement la chaîne Festival, France 5 et ARTE, ces deux dernières devant développer de nouveaux programmes puisqu'elles seront diffusées toute la journée) ; à l'accélération de la numérisation des archives de l'INA.

Il convient d'ajouter à ces charges une réforme législative en cours, celle de l'obligation de sous-titrage des programmes pour les sourds et malentendants, qui sera coûteuse pour les télévisions publiques. A titre d'exemple, France 5 estime que la mise en œuvre de cette disposition lui coûtera 10 millions d'euros. Selon France Télévisions, cette obligation représente globalement 105 millions d'euros de dépenses supplémentaires en année pleine. Or, le groupe ne bénéficiera que d'une dotation de 3 millions d'euros à ce titre, ce qui lui permettra seulement de porter autour de 30 % la part de ses programmes adaptés aux personnes sourdes et malentendantes. Toutefois, un amendement conjoint des deux rapporteurs pour avis, voté lors de l'examen des recettes de la loi de finances pour 2005, permettra de garantir la perception effective des recettes prévues en fin d'exercice au cas où les prévisions auraient été mal évaluées du fait du changement du mode de perception.

b) Les excédents de collecte seront nuls en 2005

Selon les informations communiquées au rapporteur pour avis, les prévisions d'encaissements de redevances pour 2004 ont été trop optimistes : ils pourraient être inférieurs de 30 millions d'euros aux prévisions. L'évolution de la progression de l'assiette au 30 juin 2004 (+ 128 000 comptes payants depuis le début de l'année) ne permettra pas de dégager un excédent en fin d'année qui serait venu abonder le produit de la redevance perçue au cours de l'année 2005.

c) Les remboursements d'exonérations de redevance : 440 millions d'euros

Depuis la loi n° 2000-719 du 1er août 2000 modifiant la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, le montant des exonérations de redevance accordées pour des motifs sociaux doit être intégralement compensé par l'Etat par un versement sur le compte d'affectation spéciale. Le montant de ces crédits, calculé à partir du nombre prévisionnel de comptes exonérés, aurait dû être d'environ 520 millions d'euros en 2005. Or l'article 36 de la première partie du projet de loi de finances 2005 plafonne ce montant à 440 millions d'euros, uniquement pour 2005. Certes, ce montant est en hausse de 2,78 % par rapport à la loi de finances, du fait de l'élargissement du périmètre des exonérations (désormais dégrèvements) pour motifs sociaux prévu par la réforme de la redevance. Mais il est inférieur de 80 millions d'euros à la somme qui aurait dû être versée.

d) La subvention du ministère des affaires étrangères au budget de Radio France Internationale (RFI)

Elle s'élèvera à 72,1 millions d'euros en 2005, soit une hausse de 0,98 % par rapport à 2004. Le rapporteur pour avis observe que cette dotation stagne depuis plusieurs années et qu'elle est même en baisse en euros constants.

2. Une hausse des ressources propres encore une fois supérieure à celle des ressources publiques

Les objectifs de ressources propres assignés aux sociétés de l'audiovisuel public (803,5 millions d'euros) sont en hausse de 3,38 % par rapport à 2004.

a) La publicité et le parrainage : 730,9 millions d'euros

Les recettes de publicité et de parrainage observeront en 2005 une hausse de 26,6 millions d'euros, soit + 3,78 %. Les objectifs sont variables selon les organismes, comme l'indique le tableau ci-après.

Publicité et parrainage : objectifs PLF 2005

(en millions d'euros)

Objectifs en M€

2005/2004 en %

Part du budget en %

France Télévisions*

729,4

+ 2,31 %

30,63 %

RFO

15,8

+ 32,77 %

6,82 %

Radio France

35,89

+ 3,91 %

6,76 %

RFI

0,60

- 36,84 %

0,46 %

* Chiffre d'affaires publicitaire en net facturé

Source : jaune budgétaire 2005 du secteur public de la communication audiovisuelle

b) Les autres ressources propres : 72,6 millions d'euros

Ces ressources regroupent notamment les recettes commerciales, les produits financiers et les services rendus aux administrations. En 2005, elles observeront une baisse de 0,3 million d'euros, soit - 0,41 %.

B. LA MISE EN œUVRE DES PRIORITÉS RISQUE D'ÊTRE FREINÉE PAR LE MANQUE DE MOYENS FINANCIERS

1. France Télévisions : préparer le lancement de la télévision numérique terrestre (TNT) et améliorer la qualité des programmes

Selon les chiffres disponibles dans le jaune budgétaire de 2005 relatif au secteur public de l'audiovisuel, le chiffre d'affaires (qui réunit les dotations publiques, les recettes de publicité et de parrainage en net facturé et les refacturations internes) du groupe devrait s'élever en 2005 à 2 612,7 millions d'euros.

Répartition prévisionnelle du chiffre d'affaires de France Télévisions

(en millions d'euros )

France 2

France 3

France 5

RFO

2004

2005

2004

2005

2004

2005

2004

2005

Chiffre d'affaires

1020,7

1073,9

1110,2

1129,8

173,9

177,4

226,5

231,6

- Dont publicité et parrainage « net facturé »1

401,4

410

280,1

286,7

31,4

32,7

11,9

15,8

- Dont autre chiffre d'affaires2

3,4

40,2

50,1

43,5

4,6

4,1

7,9

4,3

1 Donnée prévisionnelle dont la réalisation dépend de l'évolution du marché en 2004

2 Essentiellement refacturations internes

Source : jaune budgétaire 2005 du secteur public de la communication audiovisuelle.

Le plan quinquennal « Synergia », de rationalisation des dépenses de fonctionnement, engagé par France Télévisions en concertation avec l'Etat, produit les économies attendues, et les efforts sont même supérieurs à ce qui était demandé. Sur le dernier exercice connu, c'est-à-dire 2003, le plan a produit 48 millions d'euros d'économie contre les 35 millions attendus. 50 millions d'euros d'économies sont prévus pour 2005 et 64 millions d'euros pour 2006. Ainsi, et par exemple, en 2003, la renégociation des achats de fonctionnement a généré 9 millions d'euros d'économie. Enfin, entre 2002 et 2004, le coût de l'heure régionale diffusée sur France 3 a baissé de 12%. Cet exercice de rigueur était indispensable, mais plus il est engagé, plus il est difficile d'en attendre de nouveaux résultats. Ce n'est donc pas là que l'on peut espérer de nouveaux gains significatifs.

France Télévisions bénéficie d'une dotation en ressources publiques en progression de 2,3 %, en deçà de l'engagement de l'Etat dans le contrat d'objectifs et de moyens (3%), par rapport à 2004. Le lancement d'une offre de programme enrichie constitue une priorité pour France Télévisions en 2005. Environ 35 millions d'euros y seront affectés, soit les deux tiers des ressources publiques supplémentaires du groupe. Les moyens de France Télévisions sont par ailleurs affectés à l'amélioration des programmes des chaînes. Compte tenu des hypothèses de croissance des ressources, France 2 et France 3 envisagent une hausse des coûts de grille de 2 %, France 5 de 4,1 % et RFO de 2,4 %. Enfin, l'année 2005 sera le premier exercice complet de l'intégration de RFO au groupe France Télévisions. Des moyens substantiels sont accordés à RFO (+3,2%) afin de lui permettre de s'intégrer dans les meilleures conditions, de renforcer la production locale outre-mer, et, parallèlement, d'améliorer la visibilité de l'outre-mer sur les écrans métropolitains.

2. ARTE France : préparer le lancement de la télévision numérique terrestre (TNT)

ARTE France bénéficiera en 2005 d'une hausse de 2,3 % des dotations publiques et son budget s'élèvera à 201,86 millions d'euros. L'accroissement du budget ne correspond pas aux dispositions du contrat d'objectifs et de moyens, qui prévoyait une hausse de 4 % en 2004 et 2005. Manquent donc 9,90 millions d'euros. Cette augmentation des ressources d'ARTE France sera essentiellement consacrée au financement de la diffusion de la chaîne toute la journée sur la télévision numérique terrestre (TNT), en mettant à l'antenne de nouveaux programmes avant 19 heures. La hausse de dotations publiques affectée spécifiquement à la TNT s'élève à 510 000 euros. Or, une heure de production de nouveaux programmes coûte en moyenne 90 000 euros. Quand on sait qu'une heure d'achat de programme coûte 15 000 euros, la chaîne risque de privilégier ce choix, ou celui des rediffusions, au détriment de la production, ce qui est regrettable au moment où ses succès d'audience sont notoires sur le territoire français.

3. Les autres organismes : des projets lourds à financer en priorité

a) Radio France

Afin que Radio France maintienne ses projets de développement et renforce la diversité et la qualité de ses programmes, les ressources publiques de la radio publique progresseront de 12,87 millions d'euros (+ 2,74 %) par rapport à 2004. Son chiffre d'affaires sera en hausse de 2,3 % en 2005, soit 11,94 millions d'euros supplémentaires. Ses objectifs de recettes publicitaires sont également en hausse de 3,91 %. Radio France ne dispose pas encore d'un contrat d'objectifs et de moyens, même si des orientations stratégiques, définies par les administrations de tutelle, structurent d'ores et déjà l'activité de cette société, la mise en sécurité de la Maison de la Radio constituant un préalable à la rédaction d'un tel contrat, compte tenu de l'importance financière de cet enjeu pour la société. L'Etat participe à l'effort de mise en sécurité, la dotation de 7 millions d'euros allouée à Radio France en 2004 étant renouvelée pour la prise en charge des frais liés à l'évacuation des parties centrales et au déménagement de France Inter. Or, selon les informations fournies au rapporteur pour avis, le surcoût global des opérations liées au déménagement se monte à 13,8 millions d'euros en 2003 et 2004. Par ailleurs, 2,27 millions d'euros de redevance supplémentaire lui permettront de financer les études en cours. Selon les dernières estimations, le coût des travaux de rénovation de la Maison de la Radio se monterait à 179 millions d'euros, autofinancés à 40%, 107 millions d'euros restant à la charge de l'Etat. Enfin, Radio France devra faire face aux engagements pris à l'issue du conflit social de l'hiver 2004.

b) Radio France Internationale (RFI)

La société verra son budget augmenter de 0,86 million d'euros en 2005, la redevance affectée à RFI progressant de 1,34 %. A ce jour, Radio France Internationale ne dispose pas encore d'un contrat d'objectifs et de moyens signé. Le retour à l'équilibre budgétaire et comptable, en cours, constituait en effet un préalable nécessaire à la précision des orientations stratégiques de RFI pour les années à venir. Les objectifs budgétaires pour 2005 sont principalement la numérisation de la production et la constitution de pôles rédactionnels régionaux.

c) L'Institut national de l'audiovisuel (INA)

L'Institut bénéficiera en 2005 d'une hausse de 3,7 % de son budget, sa dotation de redevance augmentant quant à elle de 5,73 % par rapport à 2004, soit la plus forte progression des dotations des organismes du secteur audiovisuel public. Cette hausse sera affectée à l'accélération du plan de sauvegarde et de numérisation (PSN) et permettra d'engager les travaux en vue de la sauvegarde à grande échelle de son fonds patrimonial. Par ailleurs, la négociation du deuxième contrat d'objectifs et de moyens (COM), est actuellement en cours.

d) le fonds de soutien à l'expression radiophonique

Ce fonds assure le financement des radios associatives qui n'ont pas accès à la publicité. Il est essentiel pour la sauvegarde du pluralisme, de la diversité et du lien social local. Or, il souffre d'un sous financement inquiétant. Ses crédits ont été reconduits à hauteur de 22,4 millions d'euros en 2005, du fait du plafonnement de la contribution des autres diffuseurs. Il faudra rapidement remédier à cette difficulté par la création de deux nouvelles tranches, sans quoi un certain nombre de radios locales associatives pourraient voir leur existence même fragilisée.

*

La réforme de la redevance est une bonne réforme, saluée par l'ensemble de la profession. Elle permettra notamment de réduire considérablement les frais de collecte et la fraude. Elle constituait une occasion, sans doute unique, d'abonder les ressources de l'audiovisuel public et de rapprocher quelque peu le groupe France Télévisions et ARTE des moyens dont disposent les grandes chaînes publiques européennes et, ainsi, de développer les industries de programmes et d'améliorer la spécificité de leur offre à côté des diffuseurs privés. Dans les années à venir, du fait de l'augmentation constante du coût de grille, il faudra envisager d'accorder à France Télévisions une augmentation significative de ses ressources. Cette progression ne pourra être assurée que de trois façons : soit par une augmentation significative et constante du taux de la redevance (la moyenne européenne est aujourd'hui à 170 euros) ; soit par le retour aux dispositions de la loi n° 2000-719 du 1er août 2000 modifiant la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, dite « loi Tasca », et donc à un remboursement intégral des exonérations ; soit faute de ces recettes liées à la redevance, par le retour à 10, voire 12 minutes de publicité, ce qui n'est pourtant pas souhaitable, si l'on veut affirmer la différence entre chaînes publiques et privées.

L'année 2005 aurait également dû être l'année du lancement, réclamé par tous, d'une chaîne française d'information internationale. Souhaitons qu'il ne s'agisse que d'un report et, selon le principe qu' « à tout malheur, quelque chose est bon », que cela permette au Gouvernement de revoir le projet dans un esprit plus conforme aux préconisations de la mission parlementaire, notamment en privilégiant clairement le service public, en intégrant pleinement les acteurs indispensables à la réussite du projet que sont Radio France internationale, CFI, l'Agence France presse, TV 5 et Euronews, et, enfin, en ne privant pas les téléspectateurs français de cette chaîne qu'ils seront appelés à financer eux-mêmes.

Enfin, le rapporteur pour avis se réjouit de l'annonce faite par le Premier ministre le 8 novembre 2004 de confirmer le lancement en mars 2005 des chaînes gratuites de la télévision numérique terrestre (TNT) et ce, avec la norme MPEG-2. Cette décision était attendue car notre pays avait pris un certain retard sur ses voisins européens et n'aurait pu supporter un nouveau report.

Le délai imparti pour le lancement des multiplexes payants va utilement permettre de préparer dans les meilleures conditions l'introduction de la télévision haute-définition (TVHD) dans le paysage audiovisuel français. Cette avancée technologique ne concerne d'ailleurs pas la seule télévision numérique terrestre (TNT) mais pour l'essentiel le câble, le satellite et l'ADSL.

II.- LES AIDES À LA PRESSE

Les aides accordées par l'Etat au secteur de la presse écrite sont de plusieurs ordres : les aides directes, dont les crédits sont inscrits au chapitre 41-10 du budget des services généraux du Premier ministre, le Fonds d'aide à la modernisation et à la distribution, alimenté par une taxe de 1 % sur la publicité hors médias, les abonnements auprès de l'Agence France Presse et enfin les aides indirectes, qui revêtent des formes variées (taux minoré de TVA, exonération de taxe professionnelle, contribution au budget de La Poste, etc.).

A. LES AIDES DIRECTES : EN TRÈS FORTE HAUSSE

Les crédits inscrits au projet de loi de finances pour 2005 au chapitre 41-10 (29,45 millions d'euros) sont en baisse de 8,81 % par rapport aux crédits de la loi de finances pour 2004, mais cette diminution quasi totalement liée au transfert des crédits de l'aide à la diffusion de la presse quotidienne nationale au sein d'un nouveau chapitre 41-11 plus vaste d'aide à la modernisation et au transport postal de la presse d'information politique et générale, doté de 48 millions d'euros.

Montant des aides directes à la presse

(chapitres 41-10 et 41-11 du budget des services généraux du Premier ministre)

(en millions d'euros)

Chapitre 41-10

LFI

PLF

Δ

article

Nature de l'aide

2004

2005

2005/2004

10

Aides à la diffusion

24,24

21,40

- 2,84 M€

dont :

- Remboursement SNCF

8,11

8,11

0

- Fonds d'aide à l'impression décentralisée (aide à la transmission par fac-similé)

0,61

0,62

+ 6067 €

- FAEPFE (1)

3,30

3,00

- 0,3 M€

- Fonds d'aide à la diffusion de la PHR

1,42

1,42

0

- Fonds d'aide au portage

8,25

8,25

0

- Distribution PQN (2)

2,55

-

- 2,55

20

Aides au pluralisme

8,05

8,05

0

dont :

- Fonds d'aide quotidiens nationaux

6,66

6,66

0

- Fonds d'aide quotidiens régionaux

1,4

1,4

0

30

Aide au multimédia (3)

Fonds d'aide multimédia

0

0

0

Chapitre 41-11 (nouveau)

LFI

PLF

Δ

article

Nature de l'aide

2004

2005

2005/2004

10

Aide à la modernisation sociale de la presse quotidienne d'information
politique et sociale

-

38,00

+ 38 M€

20

Aide à la modernisation de la distribution de la presse quotidienne régionale

-

6,50

- 6,5 M€

30

Aide à la modernisation de la diffusion

-

3,50

+ 3,5 M€

TOTAL

32,29

77,45

+ 45,16 M€

(1) Fonds d'aide à l'expansion économique de la presse française à l'étranger.

(2) Complété par un prélèvement sur le fonds de modernisation de la presse.

(3) financement sur fonds de concours.

La poursuite de l'effort de modernisation engagé par la presse est indispensable pour conforter son indépendance et créer les conditions de son développement futur. L'engagement et le soutien du gouvernement au secteur ne se sont jamais démentis. Trois dispositifs nouveaux sont mis en place : une aide à la modernisation sociale de la presse quotidienne d'information politique et générale, une aide à la modernisation de la distribution de la presse quotidienne nationale, et une aide à la modernisation du réseau des diffuseurs de presse.

1. Les aides à la diffusion de la presse : soutenir la modernisation

a) La réduction du tarif SNCF pour le transport de presse

Créée en 1948, l'aide au transport de la presse par la SNCF prend la forme d'une subvention versée annuellement par l'Etat à la SNCF, en compensation du tarif réduit (GV32) qu'elle accorde aux sociétés de messageries de presse (NMPP, TP, MLP) (4), que ces dernières répercutent dans les tarifs qu'elles proposent aux éditeurs. Depuis 1988, une convention signée par l'Etat et la SNCF fixe le taux de prise en charge par l'Etat du coût du transport de la presse. Elle est signée sur une base annuelle depuis 1999. En 2003, la convention prévoyait une contribution financière de l'Etat correspondant à 60 % du coût de transport des quotidiens et à 19 % du coût de transport des publications (taux de prise en charge inchangés depuis 2000). Toutefois, la SNCF enregistrait, après subvention de l'Etat, un déficit de 6,6 millions d'euros en 2002 et de 7,6 millions d'euros en 2003.

La réforme en cours doit permettre de remédier aux lacunes du système actuel et de recentrer le dispositif sur le transport des quotidiens. Une nouvelle convention entre l'Etat et la SNCF est en cours de négociation. Dans cette attente, la dotation allouée à cette aide pour 2005 sera identique à 2004, à hauteur de 8,11 millions d'euros.

b) L'aide à l'expansion de la presse française à l'étranger

Cette aide a pour objet de faciliter la diffusion des publications françaises contribuant au rayonnement de la langue, de la pensée et de la culture françaises hors de France. Elle sert essentiellement à minimiser l'impact des coûts de transport, afin de proposer un prix de vente local adapté au pouvoir d'achat. Les mutations profondes du secteur de la presse et les bouleversements du paysage géopolitique mondial ont rendu nécessaire une réforme de ce fonds : tout en conservant au fonds son objet actuel, le gouvernement propose de mieux définir les actions subventionnées en créant deux sections : l'une destinée à aider le transport des titres à l'étranger (principal facteur de renchérissement des prix de vente), l'autre ciblée vers les actions de promotion des ventes à l'étranger. Il propose également d'instituer un plancher de diffusion et de dépenses de promotion afin de limiter le saupoudrage. Enfin, il conviendra de cibler prioritairement une ou plusieurs zones géographiques. Le fonds est doté en 2005 de 3 millions d'euros, soit une baisse de 9,09 %.

c) L'aide au portage

En France, la vente au numéro, favorisée par la loi Bichet du 2 avril 1947, et l'abonnement postal, favorisé par les aides publiques, constituent les deux formes de diffusion les plus couramment utilisées. Le portage a néanmoins acquis, ces dernières années, une importance croissante dans la distribution de la presse écrite. Il constitue indéniablement un aspect important de la modernisation du secteur. Ce mode de diffusion, très utilisé en Europe du nord ou au Japon, où il est le premier mode de diffusion, reste encore peu développé en France.

Grâce à l'aide de l'État, le recours au portage a cependant progressé. Ainsi, en 2002 (5), toutes familles de presse confondues, 16,7 % des exemplaires diffusés sont parvenus à leurs lecteurs par portage (contre 14,4 % en 1998). Pour l'ensemble des quotidiens, ce pourcentage s'élevait à 28 % en 2001 (6) (contre 25 % en 1998). Au total, 66 quotidiens bénéficient de l'aide en 2004, soit 8 quotidiens nationaux, 35 quotidiens régionaux, 23 quotidiens départementaux. En 2005, comme en 2004, le fonds d'aide au portage sera doté de 8,25 millions d'euros.

d) L'aide à la modernisation de la distribution des quotidiens nationaux

Ce dispositif prend le relais de l'aide à la distribution de la presse quotidienne d'information politique et générale, instituée pour les années 2002 à 2004 à l'appui du plan de modernisation mis en œuvre par les Nouvelles messageries de la presse parisienne (NMPP) pour les années 2000 à 2003. Ce cadre rénové ménage plus de place à la contractualisation. L'aide publique vise à accompagner cette nouvelle phase de modernisation, qui combinera d'importantes réformes de structure et des baisses de charges.

Les crédits seront désormais inscrits à l'article 20 du nouveau chapitre 41-11. Ils s'élèveront à 6,5 millions d'euros en 2005, contre 2,55 millions d'euros en 2004 (+ 154,9 %) et seront complétés, comme les années passées, par le recours partiel aux ressources du compte d'affectation spéciale n° 902-32, pour un montant de 6,2 millions d'euros. La contribution totale de l'Etat à la modernisation de la distribution de la presse quotidienne s'élèvera donc en 2005 à 12,7 millions d'euros, soit une hausse de 4,1 % par rapport à 2004.

e) L'aide à la modernisation de la diffusion

Cette nouvelle aide vise à la modernisation du réseau des diffuseurs de presse. En effet, le nombre des points de vente de presse a chuté de 16 % depuis 1995. La nécessité de consolider le réseau des diffuseurs de presse est avérée. Les professionnels ont donc élaboré un plan de consolidation, de modernisation et de développement du réseau de vente de la presse, présenté le 30 juin 2004. Il prévoit une revalorisation de la rémunération des diffuseurs et la modernisation du réseau de vente. Le gouvernement a donc décidé de mobiliser 3,5 millions d'euros en 2005, sur l'article 30 du nouveau chapitre 41-11, pour soutenir ce plan.

2. Les aides au pluralisme et à la diversité des titres

a) L'aide aux quotidiens nationaux d'information politique et générale à faibles ressources publicitaires

Le Fonds d'aide aux quotidiens nationaux d'information politique et générale à faibles ressources publicitaires vise à soutenir les titres présentant une particulière vulnérabilité économique, notamment en ressources publicitaires. Le montant total des ressources allouées par le Fonds s'est élevé à 6,75 millions d'euros en 2003 et à 6,65 millions d'euros en 2004. Il est prévu de maintenir cette dotation au même niveau en 2005.

b) L'aide aux quotidiens régionaux, départementaux et locaux à faibles ressources de petites annonces

Le Fonds d'aide aux quotidiens régionaux, départementaux et locaux à faibles ressources de petites annonces est destiné à aider ces quotidiens. Il s'agit là aussi de concourir au maintien du pluralisme et à la préservation de l'indépendance des titres concernés (essentiellement de la presse quotidienne départementale) : 12 quotidiens en ont bénéficié en 2003, comme en 2002. La répartition du fonds pour 2004 est en cours. Il est prévu de doter ce fonds de 1,4 million d'euros dans le projet de loi de finances pour 2005, soit le même montant qu'en 2004.

3. Les aides au développement multimédia et à la modernisation

a) Le fonds presse et multimédia

Le Fonds presse et multimédia, géré jusqu'en 2002 par l'Institut de financement du cinéma et des industries culturelles (IFCIC), est destiné à soutenir les projets tendant notamment à la numérisation de leurs fonds éditoriaux et à leur présence sur les nouveaux réseaux de communication par le biais d'avances partiellement remboursables. Le Fonds presse et multimédia ne fait l'objet d'aucune dotation en 2005. Cependant, le soutien pourrait être relancé par le biais d'un fonds d'aide au développement des services en ligne des entreprises de presse. Ce fonds sera complémentaire du Fonds d'aide à la modernisation qui est réservé à la presse d'information politique et générale. Le fonds devrait être abondé grâce à la création d'un fonds de concours bénéficiant de remboursements d'avances antérieurement consenties.

b) Le fonds de modernisation

L'article 62 de la loi de finances pour 1998 a créé un compte d'affectation spéciale n° 902-32 intitulé « Fonds de modernisation de la presse quotidienne et assimilée d'information politique et générale ». Ce fonds est alimenté par une taxe de 1 % sur certaines dépenses de publicité hors média. Le décret précisant les modalités de fonctionnement du fonds a été modifié en avril 2002 afin, notamment, d'étendre l'usage du fonds à une aide à la distribution de la presse quotidienne nationale d'information politique et générale. Le montant des ressources attendues en 2004 s'élève à 29 millions d'euros. Ces ressources se répartissent en 21,98 millions d'euros de subventions, 2,44 millions d'euros d'avances et 4,57 millions d'euros pour les aides à la distribution des quotidiens nationaux. Depuis 2003, une nouvelle clé de répartition des ressources entre subventions et avances, plus favorable aux entreprises, a été décidée : 90 % des ressources vont aux subventions contre 10 % aux avances. La clé était de 80 % / 20 % en 2002. Le produit de la taxe attendu pour 2005 est le même qu'en 2004 : 29 millions d'euros, pour 22,32 millions d'euros de subventions (+ 1,55 %), 2,48 millions d'euros d'avances (+ 1,64 %), le différentiel étant affecté aux aides à la distribution de la presse quotidienne nationale d'information politique et générale (- 8,10 %).

c) L'aide à la modernisation sociale de la presse quotidienne d'information politique et sociale

38 millions d'euros seront consacrés en 2005 à une nouvelle aide à la modernisation sociale de la fabrication de la presse quotidienne d'information politique et générale. Les crédits sont inscrits à l'article 10 du nouveau chapitre 41-11 du budget des services généraux du Premier ministre. L'objectif du gouvernement est de soutenir les démarches de modernisation de l'appareil de production et de rénovation des relations du travail au sein de la presse quotidienne nationale et régionale. Un accord-cadre a en effet été signé le 10 février 2004 par le syndicat de la presse parisienne (SPP) et une partie du syndicat du livre-CGT, après une démarche négociée. Cet accord vise à redéfinir les métiers. Des négociations sont en cours et devraient aboutir à une évolution de la convention collective de la presse parisienne.

Le fonds pourra être utilisé afin d'accompagner les restructurations qui seraient susceptibles d'en résulter. Le fonds pourra également être mobilisé dans le même objectif par la presse quotidienne régionale et départementale, après négociations avec les partenaires sociaux.

B. L'IMPORTANCE TOUJOURS MARQUÉE DES AIDES INDIRECTES

Montant des aides indirectes à la presse

(en millions d'euros)

Nature de l'aide

2002

2003

2004

Contribution du budget général de l'Etat à l'équilibre financier du transport de la presse par La Poste

290

290

290

Moins-values de recettes du Trésor public en raison d'allégements et de régimes fiscaux particuliers aux entreprises de presse :

- allégements des taux de TVA*

190

200

200

- régime spécial des provisions pour investissements (article 39 bis A du code général des impôts)*

10

5

5

- exonération de la taxe professionnelle**

174,5

178

185

Total des aides indirectes

664,5

678

680

* Source : PLF 2005, évaluation des voies et moyens Tome II.

** Coût supporté par les collectivités locales.

Les aides indirectes à la presse sont les plus importantes puisque, pour 2004, elles sont estimées à 680 millions d'euros. Elles mettent à contribution le budget de l'Etat, mais également La Poste et les collectivités locales (exonération de taxe professionnelle) même s'il ne s'agit que d'une faculté qu'il conviendrait de rendre plus contraignante.

L'aide au transport postal de la presse

Le transport et la distribution de la presse font partie, en application de l'article 2 de la loi du 2 juillet 1990, du service universel postal. Depuis 1991, l'Etat participe à la prise en charge du coût de ce service obligatoire. Jusqu'à fin 2001, les accords Galmot, conclus le 4 juillet 1996, ont permis de fixer un cadre relationnel entre l'Etat, La Poste et la presse. La contribution annuelle de l'Etat est donc passée de 282 millions d'euros en 1998 et 1999 à 290 millions d'euros en 2000 et 2001, somme reconduite en 2002, 2003 et 2004. Un protocole d'accord sur les conditions de prise en charge, d'acheminement, de traitement et de distribution de la presse par La Poste a été signé le 22 juillet 2004 par les dirigeants des syndicats de presse et le président de La Poste. Cet accord est l'aboutissement des travaux de la mission confiée à M. Henri Paul en décembre 2002. L'accord couvre une période de quatre ans, de 2005 à 2008. Il prévoit une revalorisation progressive et maîtrisée des tarifs préférentiels accordés à la presse, nécessaire pour permettre à La Poste de consolider sa situation financière. En contrepartie, l'opérateur postal s'engage à développer des prestations mieux adaptées aux besoins de la profession. L'Etat continuera pour sa part à accorder une aide au transport et à la distribution postale de la presse, mais selon des modalités profondément rénovées.

L'ancien système, dans lequel une subvention globale était versée annuellement à l'opérateur postal, fait place à deux aides distinctes, correspondant à deux objectifs clairement identifiés, l'effort global correspondant à ces deux dispositifs étant fixé par l'accord à 242 millions d'euros par an :

- Une aide à l'exemplaire pour la diffusion postale de la presse d'information politique et générale, destinée à favoriser le pluralisme de l'information, par le biais d'un transfert de crédits de 66 millions d'euros en 2005 (chapitre 41-11, article 40 du budget des services généraux du Premier ministre).

- Une aide à l'exemplaire distribué en zones peu denses, permettant ainsi le maintien d'un tarif égal sur tout le territoire. Cette aide reste inscrite au budget du ministère chargé de l'industrie.

C. L'AGENCE FRANCE PRESSE : UN SOUTIEN RENOUVELÉ

Avec Associated Press et Reuters, l'Agence France Presse fait partie des trois premières agences de presse mondiales. Elle joue un rôle de premier plan dans l'information internationale et est reconnue comme un outil d'un grand professionnalisme par l'ensemble des médias, écrits et audiovisuels, mondiaux. Mais, malgré son dynamisme et le renforcement de ses positions commerciales sur plusieurs marchés, la situation économique de l'AFP reste fragile. L'Etat a décidé d'accompagner l'AFP, en s'engageant sur l'évolution de ses abonnements pour cinq ans, dans le cadre d'un contrat d'objectifs et de moyens signé le 20 novembre 2003.

Conformément à l'engagement pris par l'Etat en 2001, les crédits prévus au projet de loi de finances 2005 pour les abonnements de l'Etat à l'AFP s'établissent à 105,7 millions d'euros, soit une progression de 2,4 % par rapport à la loi de finances 2004. Toutefois, l'équilibre reste fragile dans un contexte social difficile. Afin de conforter les moyens de l'Agence, il conviendrait de s'interroger sur l'intérêt qu'il y aurait à ce qu'elle devienne éligible au fonds de modernisation.

Plus généralement, après cette période de consolidation consignée dans le contrat d'objectifs et de moyens, il conviendra de définir de nouvelles ambitions pour l'Agence, en l'associant étroitement au projet de création d'une chaîne d'information internationale et, concomitamment, en l'aidant à développer son secteur vidéo, secteur dans lequel l'Agence ne s'est pas engagée dans les années 90, contrairement à ses principaux concurrents. Il s'agit là d'une véritable mission d'intérêt général aussi bien pour alimenter les diffuseurs français que pour renforcer l'influence de notre pays dans le monde. Mais c'est également un choix politique car la rentabilité d'un tel développement vidéo est très hypothétique.

*

Globalement, le projet de loi de finances pour 2005 marque un progrès déterminant dans l'adaptation et l'évolution des aides de l'Etat au secteur de la presse puisque, à périmètre constant, la progression proposée par le Gouvernement est de 30% à 280 millions d'euros. Il est bienvenu dans un secteur en profonde mutation où la presse périodique d'opinion, et en particulier la presse quotidienne nationale, est confrontée à des défis nouveaux comme l'apparition des « gratuits », l'explosion de l'information par Internet et via les téléphones mobiles, la diminution inquiétante des points de diffusion ou le vieillissement lent mais continu du lectorat.

Les avancées de ce budget, prenant acte des remarquables travaux de la mission de M. Henri Paul, vont assurément dans le sens souhaité en ce qui concerne les questions structurelles des entreprises de presse et le problème - essentiel - de la distribution.

La question, fondamentale, de l'adaptation de la presse écrite aux nouveaux comportements des lecteurs et notamment des jeunes, a fait l'objet de la publication du rapport de M. Bernard Spitz dont les conclusions sont trop récentes pour faire l'objet d'une transposition dans le projet de loi de finances pour 2005. Il ouvre des pistes intéressantes qui, enrichies d'autres contributions, pourraient servir de base à une grande réflexion nationale sur l'avenir de la presse - et éventuellement d'une loi d'orientation - qui apparaît de plus en plus nécessaire pour préserver pluralisme, lien social, développement culturel et éducation des jeunes.

III.- LE SOUTIEN À LA PRODUCTION AUDIOVISUELLE FRANÇAISE

Ces dernières années, et les grilles de rentrée confirment ce phénomène, le service public de l'audiovisuel, refusant la téléréalité, s'est engagé dans une programmation de qualité qui regroupe fictions françaises, documentaires, animation, grandes émissions politiques et culturelles et justifie chaque jour un peu plus sa mission particulière(7). Les chaînes publiques françaises (France Télévisions et Arte) jouent un rôle de premier plan dans le soutien à la production audiovisuelle nationale, même si le poids financier des chaînes privées, et notamment de TF1, est loin d'être négligeable dans ce secteur.

Cette production audiovisuelle partage avec le cinéma une réglementation et un système d'aides d'inspiration commune. Mais, le cinéma occupant une place prépondérante dans la vie culturelle française, on oublie souvent l'importance économique de l'audiovisuel : en 2002, la production d'œuvres audiovisuelles a représenté 1 284 millions d'euros contre 860 millions d'euros pour la production cinématographique(8). On estime à plus de 20 000 le nombre d'emplois au sein de l'industrie audiovisuelle (hors diffuseurs). Dans le même temps, le secteur souffre de faiblesses structurelles, comme le souligne M. Antoine Schwarz (9) : « malgré la panoplie très complète des quotas et le système extrêmement sophistiqué du compte de soutien, les résultats de cette politique de soutien s'avèrent décevants : la production française de fiction - le genre le plus important - est la plus faible en volume des grands pays européens ; les chaînes françaises privées comme publiques ont des ressources nettement inférieures à leurs homologues d'Allemagne, du Royaume-Uni et d'Italie ; les entreprises de production demeurent financièrement très fragiles ; le tissu industriel français dans lequel s'inscrit la production audiovisuelle traverse une crise profonde du fait des délocalisations de tournage et de postproduction ; certaines inadéquations de la réglementation provoquent des tensions entre producteurs et diffuseurs qui ne sont guère favorables au développement de la production ».

Dans ce contexte, après un état des lieux comparatif, qui ne saurait être exhaustif, le rapporteur pour avis s'interrogera sur les modalités d'amélioration de ce dispositif de soutien à la production audiovisuelle. La question de fond est à la fois patrimoniale et économique : d'une part, voulons-nous que le public, à commencer par nos enfants se forgent une identité culturelle à partir des seuls téléfilms américains et des émissions de télé-réalité ? D'autre part, alors que nous avons déjà rétrogradé à la cinquième place européenne en matière de production audiovisuelle, voulons-nous que les emplois liés à la production audiovisuelle, les savoirs et talents qui vont avec, régressent ?

A. LES PARADOXES DE LA PRODUCTION AUDIOVISUELLE FRANÇAISE : ÉTAT DES LIEUX

Alors que la France dispose d'un système d'aides publiques et d'une réglementation de soutien à la production audiovisuelle très développée, elle produit relativement moins que ses voisins européens.

1. Un dispositif de soutien étoffé

Le dispositif français de soutien à la production audiovisuelle est fondé sur une réglementation de la diffusion et de la production d'œuvre audiovisuelles françaises et européennes et sur un système de soutien à la production. Les améliorations et novations importantes apportées à ce système par le projet de loi de finances pour 2005 sont tout à fait positives et démontrent une réelle et nouvelle prise en considération de l'enjeu par le Gouvernement.

a) Une réglementation basée sur des quotas de diffusion et des obligations de production

Afin de préserver la diversité culturelle et soutenir l'industrie nationale et européenne de programmes audiovisuels et cinématographiques, la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 impose aux chaînes des quotas de diffusion et d'investissement dans la production d'œuvres audiovisuelles européennes ou d'expression originale française (10). Le décret n°90-66 du 17 janvier 1990 modifié fixant les principes généraux concernant la diffusion des œuvres cinématographiques et audiovisuelles par les éditeurs de services de télévision est venu préciser les modalités d'application de la loi.

_ Les quotas de diffusion

Les chaînes sont tenues de diffuser au moins 60 % d'œuvres audiovisuelles européennes et au moins 40 % d'œuvres audiovisuelles d'expression originale française. Ces proportions doivent être atteintes tant sur l'ensemble de la diffusion qu'aux heures de grande écoute. Pour les chaînes du câble et du satellite ainsi que les futures chaînes de la TNT, les seuils de diffusion d'œuvres audiovisuelles peuvent être atteints en plusieurs années, selon une montée en charge. En outre, les chaînes du câble et du satellite disposent de la possibilité de voir leurs quotas de diffusion abaissés en contrepartie d'un engagement dans la production indépendante inédite d'expression originale française, sans toutefois que le seuil de 50 % de diffusion d'œuvres européennes (minimum fixé par la directive européenne Télévision sans frontières) puisse être remis en cause.

_ Les obligations de production d'œuvres audiovisuelles

Les chaînes peuvent choisir différents moyens pour atteindre l'objectif fixé. TF1 et France 5 ont choisi le régime de base. Il consiste à investir au minimum 16 % de leur chiffre d'affaires net de l'année précédente dans la production d'œuvres audiovisuelles d'expression originale française (et à diffuser 120 heures d'œuvres inédites européennes ou d'expression originale française débutant entre 20h et 21h, ce qui ne concerne pas France 5 en raison de ses horaires particuliers de diffusion). France 2, France 3 et M6 ont préféré adopter un régime dérogatoire qui consiste en un assouplissement de la règle des 120 heures en contrepartie d'un investissement supérieur dans la production d'œuvres audiovisuelles (18 % pour France 2 et 18,5 % pour France 3, sans que l'investissement dans les œuvres d'expression originale française soit inférieur à 16 %). Pour M6, l'obligation consiste à investir 18 % de son chiffre d'affaires de l'exercice précédent dans les œuvres européennes et 13,5 % dans les œuvres d'expression originale française.

Canal+, dont l'investissement dans les œuvres cinématographiques est élevé en raison de son caractère de chaîne cinéma, doit investir 4,5 % seulement de son chiffre d'affaires net de l'exercice précédent dans la production d'œuvres audiovisuelles européennes ou d'expression originale française. Pour les chaînes du câble et du satellite et les futures chaînes de la TNT, le régime général s'applique depuis 2003 avec un certain nombre d'assouplissements.

b) Les aides à la production sont distribuées par le compte de soutien à l'industrie des programmes audiovisuels (COSIP)

Face à la demande croissante de programmes audiovisuels, les pouvoirs publics ont voulu doter la France d'une capacité suffisante de production. Cette politique, mise en place progressivement, s'est largement développée avec la création, dans le cadre de la loi de finances pour 1986, d'un compte de soutien à l'industrie de programmes (COSIP) basé sur deux régimes d'aide : l'aide automatique et l'aide sélective. Le compte de soutien à l'industrie des programmes audiovisuels (COSIP) contribue à développer la création audiovisuelle en aidant des producteurs déjà présents sur le marché et en favorisant l'apparition de nouveaux producteurs. Ce compte est géré par le centre national de la cinématographie (CNC).

_ Les recettes

Le compte de soutien à l'industrie des programmes audiovisuels (COSIP) dispose de deux principales sources de recettes. En premier lieu, la taxe sur les diffuseurs télévisuels, qui abondera le compte de soutien à hauteur de 338 millions d'euros en 2005. Elle est basée sur les recettes de publicité (hors parrainage), de redevance et d'abonnements et ventilée à concurrence de 64 % pour l'audiovisuel. En second lieu, la taxe sur les éditeurs vidéo, qui abondera le compte de soutien à hauteur de 40 millions d'euros. Elle est ventilée à concurrence de 20 % pour l'audiovisuel.

_ Les dépenses

En 2003, le montant total du compte de soutien à l'industrie des programmes audiovisuels (COSIP) s'est élevé à 175,7 millions d'euros, dont 170,1 millions d'euros au titre de l'aide à la production et 5,6 millions d'euros au titre de l'aide à la préparation et au développement. La fiction a encore bénéficié de la plus grande proportion du compte de soutien à l'industrie des programmes audiovisuels (COSIP) (41,4 % des sommes distribuées), suivie par le documentaire (37,9 %), l'animation (10,9 %) et le spectacle vivant (8,7 %).

Le compte de soutien à l'industrie des programmes

(en millions d'euros)

2000

2001

2002

2003

Fiction

81,6

86,8

99,8

72,7

Documentaire

28

33,7

90,1

66,6

Animation

67,0

74,6

28,7

19,1

Spectacle vivant

8,4

12,3

21,5

15,2

Magazine

2,0

2,1

3,1

2,2

TOTAL

187

209,3

243,3

175,7

* aides à la production + aides à la préparation + compléments ventilés sur les exercices précédents

Source : CNC

Les aides automatiques concernent les producteurs ayant déjà produit et diffusé des œuvres audiovisuelles sur les chaînes de télévision françaises. La diffusion leur permet d'obtenir, sous certaines conditions, l'ouverture d'un « compte automatique » mobilisable sous forme de « subventions de réinvestissement », afin de financer la préparation ou la production de nouvelles œuvres audiovisuelles. En 2003, 124,4 millions d'euros (contre 151,9 millions d'euros en 2002) ont été versés au titre des aides automatiques.

Des avances peuvent être attribuées aux entreprises qui ont épuisé leur soutien automatique. En 2003, 22,9 millions d'euros ont été versés au titre des avances (contre 35,5 millions d'euros en 2002).

Enfin, les aides sélectives sont des subventions d'investissement accordées à des producteurs de programmes audiovisuels en vue d'apporter une aide au financement d'œuvres produites par des sociétés n'ayant pas de compte automatique. Elles peuvent également être accordées pour le financement de magazines présentant un intérêt culturel et d'œuvres télévisuelles de qualité réalisées à partir de spectacles vivants ou ayant trait au monde du spectacle. En 2003, 22,8 millions d'euros ont été versés au titre de l'aide sélective (contre 25,1 millions d'euros en 2002). Mais que ce soit pour les quotas ou le COSIP, la qualité des œuvres retenues suite à l'arrêt Popstars n'est pas sans fragiliser la philosophie du système. Parallèlement, certains militent pour la suppression des quotas comme nous l'ont rappelé les déclarations du Président de M6 à la fin de l'été 2003. Nous reviendrons ultérieurement sur la question de l'œuvre.

c) Des améliorations importantes apportées par le projet de loi de finances 2005

_ L'incitation à la relocalisation de la production d'œuvres audiovisuelles en France

En 2004, pour freiner le mouvement de délocalisation des tournages, un crédit d'impôt avait été institué au profit des producteurs de cinéma relocalisant leur production en France. On constate d'ores et déjà que la part des semaines de tournages réalisées en France est passée de 61% à 72 % en un an, soit un gain de 34,3 semaines. Sachant qu'en moyenne 20 techniciens et 10 ouvriers sont mobilisés sur un tournage, le gain en termes d'emplois n'est pas négligeable. Devant ce succès, le gouvernement a décidé d'étendre ce dispositif à la production audiovisuelle de fictions, d'animations et de documentaires. 40 millions d'euros seront disponibles à ce titre en 2005. On estime que le nombre de jours de travail conservés sur le territoire français grâce à ce nouveau dispositif devrait être de l'ordre de 350 000. Une méthode d'évaluation plus fine, par genre de programme, est en cours d'élaboration.

Le mécanisme sera simple : tout producteur réalisant l'intégralité de ses dépenses de tournage et de postproduction en France, et employant en France tous ses techniciens, collaborateurs de création et ouvriers, pourra demander un crédit d'impôt, qui prendra la forme d'une baisse de l'impôt sur les sociétés ou d'un remboursement de l'administration fiscale, si l'entreprise ne réalise pas de bénéfice imposable. Il s'agit là d'une avancée notoire attendue et saluée par toute la profession. Il conviendra qu'aucun plafonnement budgétaire n'en limite la portée.

_ L'ouverture à l'audiovisuel de la contribution du Centre national de la cinématographie (CNC) aux fonds d'aides mis en place par les collectivités territoriales

Depuis 2004, l'Etat abonde les fonds investis par les collectivités locales dans la production cinématographique, à hauteur d'un euro prélevé sur le compte de soutien du CNC, pour deux euros investis par la collectivité. En 2005, dans des conditions équivalentes, une dotation de 4 millions d'euros sera ouverte pour les collectivités investissant dans la production audiovisuelle. Cela portera à 14 millions d'euros l'effort de l'État au profit de la production en région et devrait permettre de dynamiser les tournages, mais également les opérations de postproduction, en région. Ce système semble remporter un franc succès pour le cinéma et la totalité des régions devrait à l'avenir s'y engager, alors qu'une minorité d'entre elles a aujourd'hui une politique propre en ce domaine. Il faudra veiller à ce que ce succès soit effectivement accompagné budgétairement par une dotation plus importante dans les prochains exercices.

_ La création d'un fonds de soutien à l'innovation audiovisuelle

Pour dynamiser la production audiovisuelle dans notre pays, il convient également de renouveler et d'enrichir l'offre de programmes télévisés. Pour ce faire, un fonds pour la promotion de l'innovation audiovisuelle sera créé en 2005 au sein du compte de soutien aux programmes audiovisuels du CNC. Il sera doté de 4 millions d'euros et financera les dépenses de recherche et développement de nouveaux concepts de programmes. Une concertation avec les professionnels doit être lancée au dernier trimestre 2004 pour étudier les modalités d'attribution des aides apportées par ce fonds, qui fonctionnera sur le modèle des aides sélectives du CNC. Ce fonds pourrait utilement encourager la captation moderne de spectacles vivants, afin de rendre leur diffusion plus attractive pour les téléspectateurs. Cela fait partie des progrès indispensables que doit fournir notre télévision et qu'appelle de ses vœux Mme Catherine Clément dans son rapport de décembre 2002, La nuit et l'été. La création de ce fonds constitue un progrès considérable en ce qu'il encourage la qualité, le développement et la prise de risque. C'est le signe tangible d'une véritable volonté politique du gouvernement.

Comme on le voit, la réglementation de soutien à l'industrie audiovisuelle est variée et foisonnante. Mais on peut s'interroger sur son efficacité dans un cadre budgétaire particulièrement contraint pour le secteur audiovisuel public. En effet, malgré ce dispositif, la France se situe loin derrière les principaux producteurs que sont l'Allemagne et le Royaume-Uni. Les avancées de ce budget 2005 sont d'autant plus bienvenues et d'autres pistes devront être explorées à l'avenir.

2. Une comparaison européenne peu flatteuse

Quasiment tous les pays européens disposent de systèmes de soutien à la production audiovisuelle, mais la production audiovisuelle est la plus dynamique en Allemagne et au Royaume-Uni, en grande partie du fait des ressources bien supérieures dont disposent les diffuseurs, principaux pourvoyeurs de fonds de la production audiovisuelle.

a) Quasiment tous les pays européens disposent de systèmes d'aides publiques à la production audiovisuelle

Un récent rapport de l'Observatoire européen de l'audiovisuel (11) présente une analyse comparative des systèmes d'aides publiques directes aux œuvres cinématographiques et audiovisuelles dans 35 états européens. Il existe en Europe une réelle convergence politique autour de l'idée que la création cinématographique et audiovisuelle ne peut répondre aux seules lois du marché et que les aides sont donc légitimes au nom de la diversité culturelle. Pratiquement tous les états européens, mais aussi les communautés territoriales, les régions, certaines municipalités, ainsi que les institutions européennes, ont mis en place des systèmes d'aides directes. On recense ainsi 169 organismes de soutien, offrant près de 600 programmes d'intervention. Les aides ont connu une croissance significative au cours des dernières années, même si l'on constate un relatif ralentissement ces deux dernières années. Dans les 31 pays pour lesquels des données sont disponibles, elles sont passées de 963 millions d'euros en 1998 à 1 272 millions en 2002.

La France est, de loin, le pays où les aides directes sont les plus importantes (38,7 % du total des aides disponibles en Europe), suivie par l'Allemagne (14,6 %). Les aides directes se sont renforcées au Royaume-Uni avec la mise en place de l'UK Film Council en 2001. Elles représentent 5,8 % du total européen en 2002. Les comparaisons doivent cependant être utilisées avec prudence car elles ne tiennent pas compte des aides indirectes, telles que les exemptions fiscales (qui sont importantes notamment au Royaume-Uni, aux Pays-Bas, en Irlande et au Luxembourg) ou des prêts à taux bonifiés par des organismes de crédit public (notamment en Italie et en Espagne).

b) Dans le domaine de l'audiovisuel la France produit moins et plus cher que ses voisins

En 2003, le compte de soutien à l'industrie de programme compte de soutien à l'industrie des programmes audiovisuels (COSIP) a aidé à la production de 4 059 heures de programmes, contre 4 653 heures en 2002, soit une baisse de 12,8 %. A l'exception du spectacle vivant, le volume de l'ensemble des genres diminue.

Volume d'heures de production aidées par le COSIP

Volume (heures)

1999

2000

2001

2002

2003

03/02

Fiction

684

708

717

712

667

- 6,3 %

Documentaire

1 880

2 262

2 639

2 748

2 466

- 10,3 %

Animation

294

235

327

256

208

- 18,8 %

Spectacle vivant

165

208

250

393

439

+ 11,7 %

Magazine

383

433

282

544

279

- 48,7 %

Total

3 406

3 846

4 215

4 653

4 059

- 12,8 %

Source : CNC

En 2003, les chaînes publiques ont commandé 356 heures de fiction, soit 8,9 % de plus qu'en 2002. Elles financent désormais 56,5 % de l'ensemble des apports des diffuseurs (49,4 % en 2002). Malgré une baisse importante de ses apports (-19,0 %) et du volume commandé (-21,9 %), TF1 demeure le premier investisseur français dans ce domaine, alors que les apports de M6 sont en repli de 49,2 %, le volume commandé diminuant de 44,1 %. Cette baisse doit être relativisée. Elle est due en partie au décalage de diffusion d'une fiction. Pour le documentaire, les chaînes publiques sont le premier diffuseur, mais financent 8,2 % d'heures de moins qu'en 2002, pour un investissement en baisse de 9,2 %. Les chaînes privées réduisent leurs investissements de près d'un tiers en 2003. Enfin, concernant l'animation, la part des apports des chaînes publiques dans le financement de leurs programmes d'animation augmente de 1,3 point mais elles financent un tiers de programmes d'animation de moins qu'en 2002, et réduisent leurs apports de 33,9 %. Les investissements des chaînes privées dans l'animation augmentent de 23,3 % pour un volume horaire en baisse de 5,9 %. Il est à noter, toutefois, que les diffuseurs couvrent difficilement le coût des œuvres : 20 % pour l'animation, 40 pour le documentaire et 60 pour la fiction.

Parallèlement, les comparaisons européennes ne sont pas vraiment flatteuses. Alors que la France est le pays où les aides directes sont les plus importantes, elle se situe pourtant seulement au cinquième rang européen en termes de production audiovisuelle de fictions, le genre financièrement le plus important. Le graphique ci-dessous souligne sans détour les difficultés de la production audiovisuelle hexagonale. Les chaînes diffusant les fictions qu'elles produisent, le nombre d'heures de fiction télévisuelles nationales diffusées constitue un indice intéressant du niveau de production nationale.

Eurofiction
Nombre d'heures de fiction télévisuelles nationales
diffusées de 1996 à 2003

graphique

Source : Observatoire européen de l'audiovisuel

Enfin, la valeur financière brute de la fiction dans les cinq grands pays européens était en 2001 de 3 milliards d'euros, à comparer avec le total des ressources des chaînes (40,7 milliards d'euros en 2000). Le tableau ci-dessous montre de façon intéressante que si la France produit moins, elle produit plus cher (ce qui explique l'augmentation des délocalisations).

Le poids des commandes de fiction en Europe

France

Allemagne

Royaume-Uni

Italie

Espagne

TOTAL

Ressources des chaînes (Mds€)

6,8

11,1

12,8

6,2

3,8

40,7

Volume horaire

553

1 800

1 463

761

548

5 125

Valeur horaire moyenne (K€)

827

594

641

422

229

585

Source : Eurofiction économie-INA 2003

3. La faiblesse des ressources de l'audiovisuel public français

On peut avec raison s'inquiéter de la paupérisation relative du secteur public de l'audiovisuel par rapport au secteur privé, car, derrière les moyens donnés au service public, c'est l'avenir de la production audiovisuelle française qui se joue. En effet, comme le rappelle à juste titre M. Antoine Schwarz dans le rapport précité, contrairement au cinéma : « La production audiovisuelle n'a en fait qu'un seul véritable mode d'exploitation : les chaînes gratuites de la télévision nationale. Elle ne peut espérer compenser un financement insuffisant par des espérances de recettes futures susceptibles d'attirer les investisseurs. Cette réalité fondamentale explique que la production audiovisuelle soit avant tout une production de commande et se trouve de ce fait dans la dépendance économique des chaînes qui la financent. Or l'une des caractéristiques françaises est la faiblesse des ressources des chaînes de télévision et le sous-financement chronique de la production audiovisuelle en découle ».

Parallèlement, les coûts de production, en raison de l'accroissement des moyens des chaînes privées, du niveau des charges et de l'évolution technologique, augmentent rapidement. Sans une progression identique du financement, cette tendance aura pour conséquence automatique sur les écrans du service public une augmentation des rediffusions, des émissions de plateau et des fictions internationales, moins coûteuses. Alors qu'une occasion historique, et saluée unanimement, se présente avec la réforme du mode de recouvrement de la redevance, il est légitime de se demander si cette occasion ne va pas être gâchée sous le double coup de butoir des nouvelles charges (notamment la mise en place de la TNT et le sous-titrage pour sourds et malentendants) et des nouvelles exonérations choisies par les pouvoirs publics, sans compensation intégrale.

a) Un financement public insuffisant en France

Le secteur audiovisuel allemand, qui est le premier producteur de fictions en Europe, avec près de trois fois le volume français, perçoit une redevance de 194 euros et dispose d'une progression annuelle garantie sur 4 ans de 5,3 % l'an. Il n'y a pas de hasard... La recette de redevance audiovisuelle par habitant s'établit à 74,2 euros en Allemagne et à 68,3 euros en Grande-Bretagne, contre 40,4 euros en France. Elle ne représente que 0,16 % du PIB, contre 0,26 % en Grande-Bretagne et 0,30 % en Allemagne, soit près du double.

Evolution des recettes de la redevance audiovisuelle par habitant

Evolution des recettes de la redevance audiovisuelle en %  du PIB

(en millions d'euros)

(en %)

1999

2000

2001

1999

2000

2001

France

34,0

38,1

40,4

France

0,15 %

0,16 %

0,16 %

Grande-Bretagne

58,4

65,4

68,3

Grande-Bretagne

0,25 %

0,25 %

0,26 %

Italie

21,7

21,9

22,1

Italie

0,11 %

0,11 %

0,10 %

Allemagne

68,2

71,3

74,2

Allemagne

0,29 %

0,29 %

0,30 %

Source : Observatoire européen de l'audiovisuel

La Finlande est le pays où les recettes publiques sont proportionnellement les plus importantes (94,5 % des recettes). Viennent ensuite la Grèce (environ 90 %), la Suède (88,4 % en 2000) et l'Allemagne (79,7 %). La France (65,9 %) et le Royaume-Uni (65,4 %) ont des proportions de financement publiques très proches de la moyenne européenne.

b) Des recettes publicitaires en baisse et encore faibles en comparaison des autres pays européens et des télévisions françaises privées

Les recettes publiques (redevance, subventions...) ne constituent pas nécessairement la forme principale de financement du secteur public audiovisuel en Europe. Au Royaume-Uni, Channel 4 tire l'intégralité de ses revenus d'activités commerciales (publicité, ventes de programmes et télévision à péage FilmFour). La proportion de recettes commerciales est plus importance que celle des recettes publiques pour l'ORF autrichienne, la RTVE espagnole et la RTE irlandaise. Il en est de même pour la RAI depuis 2000. On constate d'ailleurs, pour l'ensemble de l'Europe, une croissance des recettes commerciales (passées de 28,4 % du total des recettes en 1995 à 32,3 % en 2000) au détriment des recettes publiques (qui tombent de 69,1 % en 1995 à 65,4 % en 2000). Dans ce cadre, le relatif sous-développement du marché publicitaire télévisé est un handicap majeur puisque les recettes publicitaires n'arrivent pas à pallier le manque de ressources publiques allouées aux opérateurs hertziens publics. La situation est d'autant plus problématique que les télévisions privées, et notamment TF1, disposent de plus de 54 % des parts de marché publicitaire et captent donc la majeure partie de cette « manne », comme le montre le tableau ci-après.

Part de marché publicitaire TV des opérateurs hertziens

(en pourcentage)

TF1

France 2

France 3

Canal +

France 5

M6

Sous-total
chaînes publiques

Sous-total
chaînes privées

1998

50,2

17,6

11,1

2,7

0,4

17,9

29,1

70,8

1999

51,1

16,3

10,2

2,8

0,5

19,1

27

73

2000

53,8

12,7

8,3

3,2

0,6

21,4

27

78,4

2001

54,9

11,4

7,6

2,5

0,6

23,0

19,6

80,4

2002

54,0

11,9

8,0

2,5

0,7

22,9

20,6

79,4

2003

54,7

11,7

8,1

2,2

0,9

22,4

20,7

79,3

Source : Sécodip.

c) Un budget global relativement faible

Il existe un déséquilibre net entre, d'une part, l'Allemagne et le Royaume-Uni et, d'autre part, les trois autres grands pays européens, dont la France. L'Allemagne et le Royaume-Uni cumulent en effet l'avantage d'un marché publicitaire très développé et d'une redevance élevée. En conséquence, le budget de France Télévisions est relativement faible par rapport aux autres télévisions publiques européennes. Comme le montre le tableau ci-dessous, il est bien inférieur à celui des principaux groupes publics européens.

Chiffre d'affaires des groupes publics

(en millions d'euros)

1999

2000

2001

FTV (France)

1 910,8

2 102,3

2 179,9

BBC (Royaume-Uni) *

BBC « Public services »

4 561,6
3 800,6

5 207,5
4 296,3

5 443,8
4 471,3

RAI (Italie)

2 639,0

2 639,0

2546,0

RTVE (Espagne) **

764,1

834,4

918,7

ARD (Allemagne) **

2 511,3

2 566,6

2 766,8

ZDF (Allemagne)

1 517,4

1 576,9

1 769,4

* Chiffre d'affaires de BBC Group dans son ensemble. Pour mémoire : le budget des activités.

** Activité radio exclue.

Source : Observatoire européen de l'audiovisuel

Par ailleurs, en Europe, la situation financière comparative des télévisions publiques et privées est relativement défavorable aux premières, la France se situant là encore dans une position difficile. Sur la période 1997-2000, le taux de croissance annuel moyen des budgets des radios et télévisions publiques de l'Union européenne a été de 4,9 %, nettement inférieur à celui des télévisions privées sur la même période (+ 17,7 %). Le secteur public britannique a connu la croissance moyenne la plus forte (+ 9,6 %). C'est le cas également au Danemark (+ 6,6 %) ou en Italie (+ 6 %). La croissance du secteur allemand est inférieure à la moyenne (+ 4,8 %). Elle est très faible en Espagne (+ 1,9%) et en France (+ 1,8 %). En France, parallèlement, les ressources de TF1 et M6 ont cru respectivement de 57 et 79 % depuis 1998.

Au cours des dernières années, le secteur public français a donc vu ses ressources augmenter très modérément. Par ailleurs, la structure des ressources s'est profondément modifiée. Si le taux de la redevance est resté quasiment stable, la publicité a diminué depuis 2000 du fait de la limitation des écrans des chaînes publiques à 8 minutes en heure glissante (contre 12). Les pouvoirs publics ont compensé cet effet négatif par le remboursement intégral (prévu par la loi n° 2000-719 du 1er août 2000 modifiant la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication) des exonérations de redevance, ce qui a permis d'augmenter sensiblement le montant de la redevance disponible en 2000 et 2001. Mais ce ne sera pas le cas en 2005, puisque les remboursements d'exonérations sont plafonnés à 440 millions d'euros par l'article 36 de la première partie du projet de loi de finances pour 2005. Toutefois, un amendement du rapporteur spécial et du rapporteur pour avis voté en première partie de la loi de finances pour 2005 permettra de garantir la ressource estimée si elle n'est pas atteinte en fin d'exercice.

B. LA NÉCESSITÉ DE MIEUX SOUTENIR LA PRODUCTION AUDIOVISUELLE FRANÇAISE

Si les récentes améliorations réglementaires et fiscales évoquées précédemment laissent espérer un léger redressement de la production audiovisuelle française, la situation reste préoccupante. Or, mieux soutenir la production audiovisuelle française est une nécessité. C'est même un choix politique de première importance, en termes patrimonial, culturel et économique. Il s'agit en effet de favoriser la diffusion de la langue, de la culture et du patrimoine français, mais également de soutenir une industrie importante pour notre pays. Le constat réalisé après la mise en œuvre du crédit d'impôt cinéma doit nous faire réfléchir : il s'agit de la préservation et de la création de milliers d'emplois. Sachant qu'un téléfilm représente environ 1000 heures de travail, le doublement de la production audiovisuelle française pourrait générer 600 000 heures de travail(12). Mais il s'agit également d'un choix sociétal de première importance : comment transmettre à nos enfants des valeurs qui sont les nôtres, et non uniquement celles d'une société mondiale uniformisée ? Comment valoriser notre identité et nos spécificités ? Ou bien encore, comment mieux mettre en valeur la diversité de la société française ? Le développement de la production audiovisuelle française est essentiel à la préservation de notre mémoire collective, à la sauvegarde, à la valorisation et à la transmission de notre patrimoine historique et littéraire. Les fictions françaises fédèrent chaque jour un public très divers autour de grands sujets historiques ou de société, tout en contribuant à consolider le lien social. Elles sont appréciées par le public, puisque 60 des 100 meilleures audiences en 2003 ont été des fictions.

1. L'indispensable augmentation des ressources du secteur audiovisuel et du fonds de soutien à la production audiovisuelle

a) Améliorer le rendement de la redevance : le rendez-vous manqué

S'il convient de se réjouir de l'adossement de la redevance audiovisuelle à la taxe d'habitation, qui pérennise une ressource vitale pour la télévision publique, le rapporteur pour avis déplore l'exemption des résidences secondaires, l'arrondi à l'euro inférieur et le plafonnement du remboursement des exonérations sociales en 2005 (cf. première partie du rapport). Il aurait fallu affecter l'intégralité des 200 millions d'euros qu'aurait dû rapporter cette réforme au service public de l'audiovisuel et sanctuariser ce « supplément » de collecte pour l'affecter pour partie à la production audiovisuelle et à la création d'une chaîne d'information internationale. Ce supplément aurait par ailleurs pu être distribué en fin d'année aux chaînes qui auraient voulu aller au-delà du quota actuel de production, privilégiant ainsi l'incitation plutôt que l'obligation, la carotte plutôt que le bâton !

Dans le cadre actuel de la réforme, comme le rappelait M. Marc Tessier lors de son audition devant la commission le 21 septembre 2004, on peut craindre que le seul moyen de faire évoluer le produit de la redevance, dès lors que les résidences secondaires ont été exclues de son assiette, que le nombre de foyers fiscaux est relativement stable et que la lutte contre la fraude offre peu de marges pour des recettes supplémentaires, soit l'augmentation du taux, d'autant que - nous l'avons vu - la France est bien en-deçà de la moyenne européenne.

b) Augmenter de manière rationnelle les recettes publicitaires

Il conviendrait de réfléchir, avec l'ensemble des acteurs de la production audiovisuelle, à autoriser la seconde coupure des œuvres pour les chaînes privées. Parallèlement, afin de ne pas déséquilibrer davantage le marché publicitaire, et en l'absence de hausse significative du produit de la redevance dans les années à venir, les chaînes publiques pourraient être autorisées à couper les programmes de « flux » après 20 heures et, de manière progressive, à revenir à 10 minutes de publicité par heure (13). En contrepartie, elles s'engageraient à soutenir et programmer des fictions, notamment en deuxième partie de soirée.

c) Inclure les recettes de diversification dans l'assiette de la taxe COSIP

La taxe affectée au Compte de soutien à l'industrie de programme (COSIP) est actuellement assise sur les recettes des chaînes télévisées. Pourtant, malgré l'accroissement très rapide de la part des bénéfices liés à la diversification, l'assiette de cette taxe n'a pas été étendue aux recettes issues du parrainage, ni aux recettes liées aux appels surtaxés ou aux SMS. Cette manne financière ne contribue donc pas au soutien financier des industries cinématographique et audiovisuelle.

Il conviendrait d'intégrer ces recettes dans le calcul de l'assiette de la taxe. Cette décision permettrait d'ailleurs de prendre acte et d'adapter la réglementation à l'évolution de la structure des résultats économiques des chaînes. Il conviendrait sans doute de n'appliquer cette réforme qu'à compter de 2006, de façon à éviter d'accroître brutalement les charges des chaînes et de leur permettre de s'adapter à cette modification.

Selon les évaluations réalisées par M. Antoine Schwarz dans le rapport précité, à l'horizon 2007, l'effet global à attendre de ces mesures pour la production audiovisuelle est de l'ordre de 30 millions d'euros. Rien ne justifie en effet que les recettes de parrainage soient exclues de l'assiette alors que la publicité est comprise. Il ne s'agit que de deux techniques différentes de promotion, mais la finalité est identique. De la même façon, il serait symboliquement très important que les recettes générées par les SMS et les appels téléphoniques surtaxés, essentiellement liés à la téléréalité, participent au financement d'œuvres audiovisuelles.

d) Aligner le taux des taxes

Afin d'alimenter le fonds de soutien (COSIP), les entrées en salle de cinéma, le chiffre d'affaires des diffuseurs et, depuis l'année dernière, la vidéo à la demande, comme la location de VHS ou DVD, sont taxées à des niveaux différents. Il n'y a pas de raison de faire perdurer cette différence et il apparaîtrait logique d'aligner l'ensemble des redevables à cette taxe au même taux. Toutefois, un tel alignement ne pourrait intervenir que concomitamment à l'alignement à 5,5 % de la TVA, soutenu par le ministère de la culture.

2. L'intérêt d'une définition plus précise de la notion d'œuvre

Selon l'union syndicale de production audiovisuelle (USPA), 115 millions d'euros seraient restitués aux programmes « de stock » si on redéfinissait l'œuvre dans un sens plus strict, c'est-à-dire en ne prenant en compte que les documentaires, les fictions et l'animation dans le calcul des obligations d'investissement des chaînes. Aujourd'hui, plusieurs définitions de l'œuvre audiovisuelle coexistent, répondant chacune à un objectif spécifique (notamment pour la prise en compte au titre des quotas de diffusion et des obligations de production ou pour l'éligibilité au compte de soutien à l'industrie des programmes audiovisuels [COSIP]).

A l'automne 2001, s'appuyant sur les textes existants, le Centre national de la cinématographie (CNC), puis le conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA), ont reconnu la qualité d'œuvre audiovisuelle à Popstars, diffusé sur M6. Ces décisions ont suscité un tollé chez les producteurs et ayants droit qui ont saisi le Conseil d'Etat. Le 30 juillet 2003, le Conseil d'Etat a donné tort aux producteurs, en confirmant que Popstars était bien une œuvre audiovisuelle au sens du décret n°90-66 du 17 janvier 1990 modifié fixant les principes généraux concernant la diffusion des œuvres cinématographiques et audiovisuelles par les éditeurs de services de télévision. Parallèlement, le 11 mars 2004, le tribunal administratif de Paris a annulé la qualification d'œuvre audiovisuelle attribuée par le CNC à Popstars, et donc la subvention perçue à ce titre par la société de production.

A la suite de la décision du Conseil d'Etat, le ministre de la culture et de la communication de l'époque, M. Jean-Jacques Aillagon, a estimé qu'il importait de clarifier la notion d'œuvre, essentielle pour l'industrie française des programmes. Il a donc engagé, en septembre 2003, une consultation avec l'ensemble des parties prenantes. Il convient aujourd'hui de prendre une décision et de redéfinir l'œuvre dans un sens strict, afin de ne prendre en compte à l'avenir que les véritables programmes de stock, ayant une valeur patrimoniale, et d'exclure les programmes ou parties de programmes de flux.

3. Assouplir la réglementation sur quelques difficultés techniques handicapant la production audiovisuelle

a) Les tournages dans les lieux historiques publics

Il convient de faciliter les tournages dans les lieux historiques publics, afin de mieux mettre en valeur notre patrimoine. Selon les informations communiquées à votre rapporteur pour avis, les contraintes administratives et les coûts prohibitifs (350 000 euros pour tourner à Versailles, 100 000 euros dans la Cour carrée du Louvre) de ce type de tournages contraignent aujourd'hui nombre de producteurs à délocaliser la réalisation de leurs fictions, en reconstituant par les décors des éléments de notre patrimoine !

b) Renégocier les accords de rediffusion afin de développer le second marché

La renégociation des droits de rediffusion versés aux artistes interprètes est impérative et doit être menée conjointement avec les producteurs, les diffuseurs et les acteurs. Elle permettrait le déblocage d'une situation unique et frisant l'absurde : les chaînes ne peuvent rediffuser dans la journée que des programmes américains, en raison du coût des suppléments de cachets versés aux comédiens lors des rediffusions de fictions françaises. Cette mesure élargirait considérablement les possibilités de programmation des chaînes et créerait un véritable second marché. Ce serait par ailleurs un facteur de renforcement du lien social et culturel puisqu'elle permettrait de fidéliser les jeunes sur des séries et fictions françaises, à des heures où ils sont très présents devant la télévision. La situation actuelle montre combien une réglementation qui « surprotège » contient en elle-même des effets pervers contre-productifs.

c) Aménager les règles de parrainage pour les fictions

S'il est aujourd'hui possible de « placer » des produits et des marques dans une œuvre cinématographique en France, et d'obtenir une rémunération pour ce faire, ce n'est pas le cas pour les œuvres audiovisuelles, la marque devant être masquée, ainsi que « tout signe de reconnaissance de cette marque ». Cette position est intenable. Alors que la présence des marques est partout présente à la télévision et dans les téléfilms étrangers, elle devrait être totalement absente des fictions françaises ! Par ailleurs, lorsque ces fictions sont diffusées dans plus de 100 pays, aucune marque française n'est visible. Pour ne prendre qu'un exemple, un réalisateur de fiction audiovisuelle doit actuellement masquer la marque d'une automobile alors que rien ne restreint la diffusion d'un film tel que Taxi dont la vedette numéro 1 est une Peugeot 406. Il conviendra donc que le gouvernement prenne acte de cette incongruité et qu'une réflexion s'engage entre le CSA, les diffuseurs et les producteurs, afin d'assouplir la réglementation, tout en évitant les dérives.

4. D'autres pistes à explorer avec la profession

Comme nous l'avons vu, ce ne sont ni les sujets ni les talents qui manquent dans notre pays mais plutôt les financements et les écrans réservés par les diffuseurs. A côté des principales avancées décrites par le rapporteur pour avis, il conviendrait d'étudier avec la profession, dans sa diversité, d'autres pistes.

a) Intégrer la production audiovisuelle à d'autres politiques interministérielles

S'il est essentiel de confirmer l'audiovisuel dans le secteur culturel et sa pleine participation au principe de diversité culturelle, tel que l'UNESCO doit bientôt le définir, s'il est indispensable de conserver la règle de l'unanimité du projet de Constitution européenne, il n'en est pas moins utile que son existence économique soit pleinement intégrée aux politiques gouvernementales. Or, aujourd'hui l'audiovisuel français s'exporte moins bien que ses concurrents européens, notamment par le manque d'offre d'un nombre suffisant d'épisodes pour les séries françaises et du fait d'un formatage encore dominant de 90 minutes, qui ne correspondent pas à la majorité des écrans offerts par les diffuseurs internationaux. Alors que le Premier ministre a annoncé récemment un plan d'aide à l'export pour les PME françaises, il est essentiel que le secteur audiovisuel y soit associé dans sa spécificité.

b) Encourager les jeunes réalisateurs

Les écrans de journée sont quasiment totalement occupés par des séries étrangères, pour la plupart américaines. Il pourrait être opportun de réfléchir dans les années à venir à un abondement du fonds de soutien à l'innovation audiovisuelle nouvellement créé, pour qu'une aide spécifique encourage la diffusion des premières œuvres (unitaires ou séries). Cela faciliterait la première rencontre de jeunes réalisateurs avec le public.

c) Les œuvres destinées à la jeunesse

Le rapporteur pour avis regrette qu'aucun des multiplex gratuits de la future télévision numérique terrestre n'ait été utilisé pour créer une chaîne s'adressant à la jeunesse. Or, l'existence de chaînes pour les jeunes a assuré le succès de la télévision numérique terrestre anglaise. De la même manière, en France, le jeune public, lorsqu'il a accès à des chaînes thématiques dédiées via le câble ou le satellite, leur est extrêmement fidèle. Parallèlement, le cinéma d'animation français est reconnu internationalement par son excellence mais est, lui aussi, soumis à des délocalisations. Une réflexion particulière sur la production et la diffusion d'œuvres françaises pour la jeunesse devrait donc être menée, tant pour des raisons culturelles, éducatives qu'économiques.

d) L'importance d'une politique européenne cohérente

Les tentatives de la Commission européenne, et en particulier de la Direction générale à la concurrence, de contestation du caractère culturel particulier de la création cinématographique et audiovisuelle sont récurrentes. Le Gouvernement français s'est toujours montré très ferme sur la question et a été jusqu'à ce jour suivi, notamment grâce à l'appui de Mme Viviane Redding, Commissaire européenne à la culture. Il faut néanmoins rester très vigilant. L'harmonisation des aides est, à terme, indispensable. Dans ce cadre, la territorialité des tournages ou la nationalité du producteur et/ou du réalisateur comme critères d'accessibilité aux aides nationales sera un élément déterminant.

*

L'état du secteur de la production audiovisuelle française est contrasté. Parler de façon abrupte et non circonstanciée de « sous financement » serait inexact, tant les situations peuvent être différentes. Certaines œuvres audiovisuelles obtiennent des financements conséquents. Ces œuvres, souvent d'une exceptionnelle qualité, rencontrent alors un public nombreux. La problématique concerne bien plus la capacité de notre pays à financer un nombre nettement supérieur d'œuvres audiovisuelles, ce qui lui permettrait de se rapprocher des leaders européens que sont les Allemands et les Anglais, ou, tout du moins, dans un premier temps, d'arriver au niveau des Italiens et des Espagnols. Ce n'est pas une question de « gloriole », mais de rayonnement et, à terme, d'existence de l'imprégnation culturelle française dans ce secteur, sur le marché domestique, comme à travers le monde.

Le manque de financement n'est pas le fruit d'un dérapage récent. Il résulte d'un long glissement depuis une dizaine d'années. Le sous financement de l'audiovisuel public a été accéléré par son moindre accès à la ressource publicitaire organisé par la loi n° 2000-719 du 1er août 2000 modifiant la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, dite « loi Tasca ». Cette diminution de la durée des plages publicitaires sur le service public a profité aux chaînes privées hertziennes, sans que ce manque à gagner n'ait été compensé par une hausse significative du produit de la redevance audiovisuelle.

Si la majorité n'a pas jugé opportun - et le rapporteur pour avis le regrette - d'assurer la progression de la redevance, il n'en demeure pas moins qu'elle a posé les bases d'un renouveau qui constitue un progrès indéniable :

- en garantissant la pérennité de la ressource par la réforme du mode de collecte qui sera moins coûteux et plus équitable ;

- en apportant des solutions pour la relocalisation des tournages en France ;

- en favorisant la prise en compte de la diversité française par l'incitation des tournages en régions ;

- en encourageant la qualité des réalisations par la création du fonds de soutien à l'innovation audiovisuelle.

La production audiovisuelle doit être considérée comme une activité majeure, au même titre que le cinéma. La production de fictions, de documentaires ou de films d'animation crée de l'activité économique et participe au rayonnement et à l'attractivité de notre pays.

Enfin, et ce n'est pas la moindre de ses qualités, elle participe en première ligne à la structuration de nos enfants, à l'apprentissage du sens critique, au sentiment d'appartenance à une même communauté. Depuis l'année dernière, les jeunes Français passent plus de temps dans l'année devant un écran qu'assis sur les bancs de l'école. Ne pas prendre en compte cet état de fait, comme élément déterminant de la politique audiovisuelle et culturelle, et plus largement éducative, économique et sociale, de notre pays, serait une erreur coupable. La création appartient au champ de la culture mais l'ampleur du phénomène télévisuel (les Français y consacrent 3 h 28 par jour) intéresse l'ensemble de la communauté nationale.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

I.- AUDITION DU MINISTRE

La commission des affaires culturelles, familiales et sociales a entendu, en commission élargie à l'ensemble des députés, M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre de la culture et de la communication, sur les crédits de la communication pour 2005, au cours de sa séance du mercredi 10 novembre 2004.

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales - Je suis heureux de vous accueillir pour cette cinquième commission élargie. La clé du succès des commissions élargies est la dynamique de la discussion, et la formule va s'améliorant avec le temps. La séance publique du 19 novembre sera réservée à l'examen des éventuels amendements, aux explications de vote et au vote. La présente réunion s'y substitue pour le reste : les conditions de publicité sont donc identiques et l'Assemblée ne siège pas pour permettre à nos collègues d'être présents. Le but est que les échanges soient les plus vivants possible. Je vous demande donc de vous en tenir à des interventions courtes, quitte à reprendre ensuite la parole plusieurs fois. Je souhaite également que l'opposition s'exprime très tôt dans la discussion. Quant au ministre, il a souhaité ne pas prendre la parole tout de suite, ce que je trouve particulièrement respectueux des droits du Parlement.

M. Patrice Martin-Lalande, rapporteur spécial de la commission des finances - L'exercice 2005 sera marqué par trois caractéristiques. En premier lieu, la mise en œuvre de la LOLF permettra de clarifier le budget de la communication. La mission « medias » doit être préservée, et rassembler le programme « presse » et un programme « régulation de l'audiovisuel ». Une mission « avances aux organismes de l'audiovisuel public » doit être créée, qui comprendra un programme par opérateur, dont les indicateurs seront directement inspirés des contrats d'objectifs et de moyens signés avec l'Etat. Les indicateurs rattachés au programme « presse » devront être améliorés afin de mieux refléter les divers objectifs et outils de l'Etat.

Autre réforme de structure : la réforme de la redevance, qui se déroule pour l'instant de façon satisfaisante. Les principes du maintien d'une ressource affectée et du recouvrement conjoint avec la taxe d'habitation ont été retenus par le Gouvernement. La redevance devient un impôt plus juste, avec un million de nouveaux foyers exonérés - et un amendement prévoit l'exonération des jeunes de moins de 21 ans. Il faut rappeler que le principe de compensation des exonérations doit rester la règle, les exceptions doivent être strictement limitées à la période de rodage. La redevance devient également un impôt plus simple : déclaration effectuée dans la déclaration des revenus, une seule redevance par foyer, mensualisation plus facile... Les moyens de lutte contre la fraude sont renforcés, notamment grâce aux demandes d'informations auprès des opérateurs privés. Enfin, cette réforme permet à l'Etat de réaffecter un millier d'emplois. Le service de la redevance avait gagné en productivité ces dernières années, mais son cadre juridique lui interdisait tout nouveau progrès en la matière. Il faudra cependant porter une attention particulière au reclassement des personnels.

Des contrats d'objectifs et de moyens doivent être négociés avec chacun des opérateurs de l'audiovisuel public, afin de leur donner une vision pluriannuelle ainsi que des objectifs précis et quantifiés. Il est toutefois regrettable que de tels outils n'existent pas encore pour Radio France et RFI. Un amendement vous proposera que ces contrats soient transmis au Parlement pour débat avant signature. Enfin, les modifications aux contrats, qui trop souvent ne sont pas formalisées, devront désormais systématiquement faire l'objet d'avenants.

L'audiovisuel public connaît une progression modérée de ses ressources. Tous les bénéfices ne sont pas tirés de la réforme de la redevance, et des incertitudes pèsent sur les recettes de l'exercice 2004. Si elles sont inférieures aux prévisions, seront-elles compensées en loi de finances rectificative ? Pour 2005, les crédits affectés à l'audiovisuel public progressent de 2,4 %. Ils comprennent notamment la redevance, dont le produit augmentera de 3,9 %, les crédits de compensation des dégrèvements pour motifs sociaux et la subvention du ministère des affaires étrangères à RFI, qui augmente de 1 %. La progression modérée des ressources publiques l'année de la réforme s'explique par l'augmentation des exonérations non compensées. L'Assemblée a néanmoins voté un amendement pour garantir aux organismes de l'audiovisuel public des ressources au moins égales à ce qui était prévu en loi de finances initiale. C'est une sorte de filet de secours au cas où la réforme ne porterait pas les fruits attendus.

Les objectifs de ressources propres des organismes sont en hausse de 3,4 %, ce qui est ambitieux compte tenu du contexte. Des économies de gestion doivent également être réalisées. A France Télévisions, le plan Synergia a déjà permis d'économiser 48 millions et Arte a engagé le même type d'efforts. On entend trop souvent dire que le service public ne fait aucun effort de productivité. C'est faux : les mesures visant à mieux utiliser l'argent public portent leurs fruits aujourd'hui, et les progrès sont vérifiés par des audits extérieurs.

Etant donné les perspectives budgétaires, les opérateurs seront confrontés à des contraintes. France Télévisions bénéficiera cependant d'une dotation en progression de 2,3 %, soit une recette supplémentaire de 39,7 millions dont 15 millions seront consacrés au passage à la télévision numérique terrestre. La dotation d'Arte-France augmentera également de 2,3 %, ce qui permettra de financer le renforcement de la grille à hauteur de 1 million. Radio France verra sa dotation augmenter de 2,7 %, ce qui permettra de financer les évolutions salariales décidées dans le protocole d'accord qui a mis fin au conflit de février dernier ; une dotation spécifique légèrement supérieure à 2 millions permettra de financer la phase d'étude nécessaire avant l'indispensable rénovation de la Maison de la radio. Radio France Internationale verra sa dotation publique augmenter de 1,1 %, ce qui signifie que ses crédits stagnent pour la quatrième année consécutive. Enfin, la dotation de l'INA progressera de 5,7 %, ce qui permettra de financer le plan de sauvegarde et de numérisation.

L'année 2005 devrait être une année de profonde mutation pour l'audiovisuel. Il faudra en effet réussir le lancement de la TNT. A cet égard, l'annulation des autorisations du groupe Canal Plus par le Conseil d'Etat ne doit pas remettre en cause le calendrier prévu ; paradoxalement, elle pourrait permettre de renforcer l'offre gratuite de la TNT, facteur essentiel de son succès, qui dépendra aussi de l'attrait de ses programmes. Il faudra par ailleurs soutenir le développement des télévisions locales et aussi lancer, enfin, la chaîne d'information francophone internationale ; le projet conjoint TFI-France Télévisions semblant marquer une pause, la remise à plat du dossier semble s'imposer. Il faudra, enfin, redessiner le paysage radiophonique en recherchant un équilibre plus satisfaisant.

J'en viens à l'aide à la presse d'aujourd'hui, pour souligner qu'elle ne suffit pas à préparer la presse de demain. Certes, le projet de loi de finances prévoit des mesures de soutien supplémentaires, mais elles ne peuvent dispenser d'un effort de réflexion stratégique sur l'avenir d'une presse bien mal en point.

Enfin, l'AFP a signé à la fin de l'année un contrat d'objectifs et de moyens avec l'Etat, qui prévoit notamment une hausse importante des abonnements de ce dernier. Cet engagement est respecté dans le projet de loi de finances pour 2005.

Je souligne en conclusion tout l'intérêt des contrats d'objectifs et de moyens et je souhaite que l'année 2005 soit celle de leur généralisation, car ils doivent devenir les outils privilégiés des relations entre l'Etat et l'audiovisuel public, dans l'esprit de la LOLF.

M. Dominique Richard, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales - Je commencerai par une analyse budgétaire des moyens de l'audiovisuel public, en soulignant que la réforme du mode de collecte de la redevance est une bonne réforme, saluée par l'ensemble de la profession. Cela dit, le budget de l'audiovisuel public pour 2005 ne tient pas toutes ses promesses. Ces dernières années, le service public s'est engagé dans une programmation de qualité qui justifie sa mission particulière. Dans ce contexte, la question du taux et du rendement de la redevance n'est pas uniquement conjoncturelle : c'est une question de société de première importance. Il est donc regrettable que le vote des recettes n'ait pas permis de conforter la spécificité du secteur public de l'audiovisuel, de relancer la production et d'affirmer ainsi notre identité culturelle.

M. Michel Françaix - Très bien !

M. le Rapporteur pour avis - Je ne reviendrai pas dans le détail sur les chiffres du projet de budget qui nous est présenté, mais je tiens à souligner qu'étant donné le cadre budgétaire contraint auquel nous devons nous conformer, et du fait de l'augmentation constante du coût de grille, il conviendra de donner à France Télévisions des moyens plus importants à l'avenir. Cette progression ne pourra être assurée que de trois façons : par l'augmentation significative et continue du taux de la redevance ; par le retour aux dispositions de la loi Tasca, et donc au remboursement intégral des exonérations ; et, faute de recettes suffisantes provenant de la redevance, par le retour à 10, sinon 12 minutes de publicité, ce qui n'est pourtant pas souhaitable.

L'année 2005 aurait également dû être celle du lancement d'une chaîne française d'information internationale ; souhaitons qu'il ne s'agisse que d'un report. De même, la TNT doit être proposée aux Français le plus vite possible et les questions techniques ne peuvent servir d'alibi à des retards supplémentaires.

Les aides directes à la presse écrite sont en hausse de près de 140 %. Ce budget spécifique, qui tient compte des remarquables travaux de la mission de M. Henri Paul, va assurément dans le bon sens. En revanche, les conclusions du rapport de M. Bernard Spitz sur l'adaptation de la presse écrite aux nouveaux comportements des lecteurs sont trop récentes pour être transposées dans le projet de budget.

Le cinéma occupant une place prépondérante dans la vie culturelle française on oublie souvent l'importance économique de la production audiovisuelle. On estime ainsi à plus de 20 000 le nombre d'emplois au sein de cette industrie, mais le secteur souffre de faiblesses structurelles, soulignées par M. Antoine Schwarz dans son rapport sur le mode de financement de la production audiovisuelle française. Il convient donc de s'interroger sur les moyens d'améliorer le dispositif de soutien à la production audiovisuelle, car il s'agit d'un choix politique de première importance, en termes patrimoniaux, culturels et économiques.

Je tiens cependant à souligner les améliorations importantes apportées par le projet de budget pour 2005. Ainsi, devant le succès du crédit d'impôt « cinéma », le Gouvernement a décidé d'étendre ce dispositif à la production audiovisuelle de fictions, d'animations et de documentaires. Quarante millions seront disponibles à ce titre et l'on estime que 350 000 jours de travail devraient être ainsi conservés sur le territoire français. Cette mesure d'une grande portée était attendue par toute la profession, qui l'a saluée. Il conviendra qu'aucun plafonnement budgétaire n'en limite la portée. Par ailleurs, l'Etat abondera les fonds investis par les collectivités locales dans la production audiovisuelle à hauteur d'un euro prélevé sur le compte de soutien du CNC pour deux euros investis par la collectivité. La dotation de 4 millions ouverte à ce titre devrait permettre de dynamiser les tournages et la post-production dans les régions. Enfin, un fonds pour la promotion de l'innovation audiovisuelle sera créé et doté de 4 millions. Je suggère, comme Mme Clément l'avait fait dans son rapport de décembre 2002, qu'il serve notamment à encourager la captation moderne de spectacles vivants, ce qui rendra leur diffusion plus attrayante.

Les mesures décrites constituent autant de progrès bienvenus. Cependant, la situation de la production audiovisuelle française reste préoccupante. Elle doit donc être mieux soutenue. A cet égard, il aurait fallu affecter l'intégralité des 200 millions qu'aurait dû rapporter la réforme de la redevance au service public de l'audiovisuel et l'affecter pour partie à la production audiovisuelle. Mais, dans le cadre actuel de la réforme, on peut craindre que le seul moyen de faire évoluer le produit de la redevance soit l'augmentation du taux. Il conviendrait par ailleurs d'engager une réflexion tendant à autoriser une seconde coupure publicitaire des œuvres audiovisuelles et des films pour les chaînes privées et pour les programmes de « flux » des chaînes publiques, après vingt heures, afin d'en revenir progressivement à dix minutes de publicité par heure si une augmentation significative de la redevance est inaccessible. S'agissant enfin du COSIP, rien ne justifie que les recettes de parrainage, ni celles provenant des appels surtaxés, soient exclues de l'assiette de la taxe qui sert à son financement.

Il conviendrait aussi d'assouplir la réglementation pour faciliter les tournages dans les lieux historiques publics ; on comprendra d'autre part qu'un producteur préfère reconstituer la Cour carrée du Louvre à l'étranger si l'établissement public la lui loue 100 000 euros par jour...

En conclusion, la production audiovisuelle doit être considérée comme une activité majeure. On sait désormais qu'en 2003, les enfants ont passé davantage de temps devant la télévision qu'à l'école et qu'un adulte y a consacré chaque jour trois heures et demie en moyenne. On comprendra que, dans ces conditions, l'audiovisuel soit devenu une question politique de premier plan.

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances - Je tiens à assumer, au nom de la commission des finances, les choix faits en matière d'évolution des recettes, dont je sais que le ministre aurait préféré qu'ils soient différents. Au cours des années à venir, nos dépenses de retraite et de santé vont absorber 70 % de nos efforts de productivité. A qui devrons-nous affecter les 30 % restants, sinon aux plus défavorisés d'entre nous ?

Nous sommes évidemment tous attachés au respect de notre identité culturelle, mais il ne faut pas pêcher en la matière par excès de pessimisme. Si l'on considère l'effort global de la nation en faveur de la culture, nous nous situons tout en haut de l'échelle européenne.

S'agissant de la réforme de la redevance audiovisuelle, je comprends les observations faites par certains, mais j'assume pleinement le choix qui a été fait. Je sais que certains auraient souhaité une augmentation plus sensible de la redevance. Je considère pour ma part que l'effort de simplification ne pouvait s'accompagner d'une augmentation du tarif. Le Parlement assume en la matière toute ses responsabilités.

M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre de la culture et de la communication - Avant de poursuivre l'examen de ce projet de budget, je voudrais que de cette salle s'échappe une pensée pour nos deux journalistes retenus en otages et pour leur chauffeur syrien. N'oublions jamais que le pluralisme de l'information est mis en œuvre par des hommes et des femmes qui prennent des risques sur le terrain. Je salue l'unité nationale qui s'est faite pour soutenir le Gouvernement dans ses efforts en faveur de leur libération.

Respect du pluralisme et promotion de la diversité culturelle sont les deux axes de ma politique, tant pour ce qui concerne l'action culturelle proprement dite que pour la communication.

Je remercie vos rapporteurs pour la qualité de leurs travaux et pour leur souci de vérité. La rigueur de leurs analyses mérite d'être saluée, même si elle conduit parfois à des appréciations un peu sévères sur notre action !

Cher Dominique Richard, vous avez souligné à juste titre l'impact économique du secteur de la création audiovisuelle et, en particulier, l'effet multiplicateur de la redevance. Permettez-moi cependant de vous trouver un peu injuste dans votre critique de la réforme engagée. Très attendue, elle constitue un progrès certain et conserve au secteur une ressource pérenne de 2,659 milliards. Cher Patrice Martin-Lalande, vous devez être fier de voir l'un des chantiers que vous aviez conduit au sein de la MEC aboutir de si belle manière. La réforme de la redevance est juste, équilibrée et solide, tant pour le service public de l'audiovisuel que pour le contribuable. Les aspects les plus archaïques du mode de recouvrement sont abolis et l'adossement à la taxe d'habitation procède d'un objectif de rationalisation conforme à l'ambition de réformer l'Etat. Plus efficaces et moins coûteuses, les procédures de recouvrement et de contrôle évoluent dans un sens favorable à l'ensemble de la collectivité. Pour la troisième année consécutive, la redevance n'augmente pas et la simplification consistant à percevoir une seule redevance par foyer fiscal détenteur d'un récepteur constitue un progrès majeur. De la même manière, l'extension à la redevance des motifs sociaux justifiant l'exonération de taxe d'habitation permettra d'en dispenser un million de contribuables supplémentaires, en particulier parmi les personnes âgées à faibles ressources et les allocataires des minima sociaux.

Le projet de réforme de la redevance permet d'espérer une augmentation de 84 millions des recettes encaissées et un surcroît de ressources de 2,4 % pour le secteur public de l'audiovisuel, ce qui est loin d'être négligeable. Je sais que de vifs débats ont animé votre assemblée à l'occasion de l'examen de cette réforme de progrès et je tiens à saluer le vote de l'amendement de Patrice Martin-Lalande tendant à sécuriser les ressources de l'audiovisuel public en 2005, ce qui n'est pas le cas pour cette année. Merci d'avoir pris cette courageuse décision. C'est au vu des résultats de 2004 que le Gouvernement prendra toutes ses responsabilités pour ce qui concerne le financement du secteur.

Pour importante qu'elle soit, la réforme de la collecte de la redevance ne constitue pas une fin en soi, et mon ambition pour l'audiovisuel ne se réduit pas à cet aménagement technique. Deux priorités guident mon action : développer l'emploi dans le secteur et promouvoir une offre de qualité tendant à renforcer le pouvoir d'attraction de notre territoire.

Le premier volet de la stratégie pour l'emploi, c'est de consolider le secteur public de l'audiovisuel en relocalisant les tournages d'œuvres de fiction dans nos régions. Au moins 20 000 emplois sont en jeu et je serai très attentif à la bonne mise en œuvre de ce projet. Du reste, je vous demande de mettre tous les problèmes sur la table. S'il y a, ici ou là, des difficultés liées au coût de la mise à disposition de monuments, à la performance technique que constituent les modes modernes de captation, ou encore aux grilles d'emploi, je vous demande instamment de me les faire connaître.

Voté à la fin de l'année dernière, le crédit d'impôts cinéma a tenu toutes ses promesses. Grâce à lui, la proportion des semaines de tournage réalisées en France est passée de 61 % à 72 %. J'ai décidé d'étendre le crédit d'impôts aux films financièrement ambitieux, eu égard à la promesse d'emplois qu'ils représentent, en relevant le plafond d'éligibilité à la mesure. La qualité de nos techniciens et la beauté de nos paysages sont unanimement saluées. Tout doit donc être mis en œuvre pour que la plus grande part possible des tournages ait lieu sur notre sol. L'objectif, dépendant de l'esprit de responsabilité de chacun, est de rapatrier au moins 70 000 jours de travail, dans la fiction comme dans le documentaire. Le dispositif sera régulièrement évalué.

Les mesures nouvelles en faveur du cinéma et de la production audiovisuelle et du cinéma correspondent à une aide fiscale de 40 millions en 2005. Parallèlement, j'ai souhaité étendre à la production audiovisuelle, dès l'année prochaine, le système des fonds régionaux, qui fonctionne remarquablement bien, et, j'ai demandé à France Télévisions, dans le même esprit, d'améliorer le financement de certains secteurs fragiles de la production, tels que le documentaire, particulièrement précaire et mal financé.

La consolidation de l'emploi passe aussi par la requalification de l'emploi précaire dans le secteur public audiovisuel. (« Très bien ! » sur plusieurs bancs) J'ai réuni avant-hier une table ronde des diffuseurs, afin de dresser un bilan d'étape et de faire le point sur les actions à mener. En la matière, le secteur public audiovisuel se doit d'être exemplaire, et je soutiens sans réserve le plan du président Marc Tessier tendant à faire passer le recours à l'emploi précaire de 16 % à 10 %.

La politique de l'audiovisuel public que je conduis tend aussi à conforter l'identité propre du service public de l'audiovisuel. Sachant que les Français passent en moyen trois heures et demie par jour devant l'écran, la question est loin d'être négligeable. Je salue les initiatives les plus réussies, telle la récente soirée consacrée à l'élection présidentielle américaine.

La large diffusion de l'offre culturelle et la conquête de nouveaux publics constituent à mes yeux un défi majeur. Je crois à la possibilité d'enrichir les programmes de télévision et de radio, de donner au service public une identité plus forte et plus audacieuse et j'entends me battre à cette fin. Au reste, des résultats concrets sont déjà là : en 2005, l'effort additionnel de France Télévisions en faveur des programmes de culture et de connaissances s'élèvera à 6,3 millions et un accord avec les producteurs indépendants en faveur du documentaire de création - correspondant à un engagement financier de 64 millions dès cette année, assorti d'une enveloppe supplémentaire de dix millions pour les années 2005 à 2007 - vient d'être conclu. Là encore, il est cependant de mon devoir d'attirer votre attention sur le fait que cet engagement est conditionné par l'évolution des ressources publiques qui seront attribuées à France Télévisions au cours des trois années à venir. La télévision publique, il faut le souligner, investit au-delà de ses obligations dans la production audiovisuelle.

Je crois aussi à une plus grande diversité culturelle ; les succès récents du Silence de la mer ou de l'Odyssée de l'espèce démontrent que les Français sont très réceptifs à une offre de programmes audiovisuels de qualité. La promotion de la diversité culturelle passe aussi par une meilleure représentation des minorités à l'écran et par une plus large place donnée au dialogue des peuples et des cultures.

Enfin, l'enrichissement de l'offre de programmes se concrétisera dès l'année prochaine par la place donnée au secteur public au sein de la télévision numérique de terre. Je me réjouis que le cataclysme annoncé par certains qui se plaisaient à voir dans le ministre de la communication un simple valet n'aura pas lieu. Je suis ravi de la décision que vient de prendre le Premier Ministre et que nous avons annoncée ensemble il y a quelques jours...

M. Jean-Pierre Brard - Sans vous, il eût eu du mal à la prendre tout seul !

M. le Ministre - Prenez garde, cher Jean-Pierre Brard, à ne pas répéter vos erreurs d'analyse. A Cannes, vous vous étiez demandé si le ministre de la culture et de la communication n'était pas un leurre. Vous voyez aujourd'hui que les décisions annoncées sont prises !

M. Michel Françaix - Parlons plutôt d'une demi-décision !

M. le Ministre - Le Premier ministre a annoncé la décision prise au sujet des chaînes gratuites ; celle concernant les chaînes payantes interviendra dans les prochains jours.

Je voudrais dire à tous ceux qui critiquent la norme de diffusion de la TNT qu'il s'agit en fait d'un choix stratégique tendant à apporter un enrichissement immédiat de l'offre de programmes du secteur public audiovisuel. Pour le téléspectateur français, la TNT, ce sera avant tout la diffusion 24 heures sur 24 d'Arte et de France 5, deux chaînes emblématiques de la diffusion de la connaissance. De même, la création de la chaîne Festival permettra une plus large diffusion du spectacle vivant en général et des concerts en particulier. L'arrivée de la TNT sur les écrans de nos concitoyens traduit la volonté du Gouvernement de rendre accessibles à tous les programmes les plus ambitieux.

Je prends devant vous un engagement solennel, celui de veiller à ce que chaque euro versé par le contribuable trouve une juste contrepartie dans les programmes que lui offre le service public de l'audiovisuel. Vous avez insisté à juste titre sur la nécessité d'apprécier l'action dans la durée. Malgré les contraintes inhérentes à l'annualité budgétaire, je m'attacherai à ce que vous puissiez disposer d'une vision d'ensemble de l'action menée.

Je souhaite que l'année prochaine permette de rationaliser les relations entre l'Etat et les entreprises publiques de l'audiovisuel. Ainsi, le deuxième contrat d'objectifs de l'INA pourra être conclu dans les prochaines semaines.

Les contrats d'objectifs de Radio France et de RFI sont relancés. Je souhaite donner à l'engagement financier de l'Etat sens et crédibilité. Vos propositions, Patrice Martin-Lalande, vont dans la bonne direction. Le temps est peut-être venu d'une réflexion prospective et libre pour dissiper les critiques injustes et définir une stratégie de développement. Pourquoi ne pas constituer sur ce sujet un groupe de travail auquel serait associé le Parlement ?

Il convient d'abord de soutenir les options stratégiques de Radio France. En particulier, les travaux à la Maison de la Radio ne se bornent pas à une simple mise aux normes techniques ; il s'agit d'une véritable restructuration. De façon générale, les programmes de la radio publique doivent être constamment adaptés aux attentes des auditeurs. La situation des radios associatives me préoccupe. En effet, les recettes du Fonds de soutien à l'expression radiophonique diminuent. J'ai saisi de ce sujet mon collègue des finances. Il y va du respect du pluralisme, auquel nous sommes tous si attachés et qui constitue le fil conducteur de ce budget.

Ce principe se vérifie avec la presse écrite, pour laquelle nous consentons un effort historique afin de la moderniser. Les crédits qui lui sont consacrés atteignent près de 280 millions d'euros, soit une progression proche de 30 %. Ces moyens exceptionnels offrent à la presse une occasion unique de moderniser ses structures de production. La réforme de l'aide au transport postal s'inscrit dans cette dynamique nouvelle. Le protocole enfin signé le 22 juillet dernier définit le nouveau cadre des relations entre l'Etat, la presse et la Poste. Cette aide, d'un montant de 242 millions, est concentrée sur la diffusion des journaux d'information politique générale et sur la distribution de la presse écrite dans les zones de faible densité. La réforme du Fonds d'aide à la modernisation et à la distribution de la presse, qui entrera en vigueur en 2005, permettra à sa commission de contrôle d'évaluer réellement l'efficacité économique des subventions. En outre, de nouvelles aides interviendront à chaque étape du processus, en commençant par la fabrication. L'Etat consacrera 38 millions à soutenir la modernisation de la production et la rénovation des relations du travail dans les entreprises, qui pourront ainsi mieux maîtriser leurs conditions d'exploitation, conforter leur indépendance économique et contribuer à la préservation de la liberté de la presse. La distribution de la presse bénéficiera elle aussi d'une aide nouvelle, sachant que la vente au numéro continue de représenter plus de 60 % des ventes. L'aide à la distribution de la presse quotidienne d'information politique et générale, qui devait expirer le 31 décembre, est prorogée en 2005 à hauteur de 12,7 millions. Les NMPP doivent en effet poursuivre une réforme de restructuration afin de ramener le coût de la distribution à un niveau plus acceptable. Le nouveau dispositif fera une plus large place à la contractualisation avec l'Etat, afin d'optimiser l'aide versée.

Enfin, j'ai la conviction que l'érosion de la presse écrite n'est pas une fatalité. Sans doute le nombre des points de vente a-t-il diminué de 16 % depuis 1995, à l'image de l'évolution de la librairie de proximité. Aussi les professionnels ont-il élaboré un plan de modernisation et de développement du réseau. N'ayons pas peur d'être futuristes, et d'imaginer ce que pourrait être le kiosque de demain ! Le président du Conseil supérieur des messageries de presse a présenté les grandes orientations de ce plan le 30 juin dernier. Pour l'accompagner, j'ai décidé de créer un Fonds de modernisation du réseau de diffusion de presse à hauteur de 3,5 millions.

Dans notre budget, le lectorat des jeunes n'est pas oublié, car il représente l'avenir de la presse écrite. Une somme de 3,5 millions est inscrite à cet effet dans le Fonds de modernisation. Le rapport de M. Bernard Spitz sur la lecture de la presse quotidienne d'information politique et générale par les jeunes ouvre d'intéressantes perspectives. J'installerai très bientôt un comité de suivi et d'évaluation, et j'annoncerai aussi des initiatives très concrètes.

En conclusion, nous avons pour ambition, à travers ce budget, de favoriser la diversité des expressions, de faire éclore la pluralité des talents, de soutenir les pluralismes des opinions et de permettre à la liberté éditoriale d'éclairer le chemin de notre démocratie.

M. Didier Mathus - Monsieur le ministre, l'intervention de Pierre Méhaignerie a sonné le glas de vos illusions ! A l'entendre, la culture et la communication sont un secteur secondaire et accessoire.

M. le Président de la commission des finances - Ne caricaturez pas mes propos, s'il vous plaît !

M. Didier Mathus - Laissez-nous nous exprimer ! Le président de la commission des finances a bien dit que le budget de la culture, par rapport à l'effort consenti par nos partenaires européens, est tout à fait suffisant. Si on répare les toits des églises, pourquoi faudrait-il en plus mettre de l'argent dans l'audiovisuel public ? De fait, l'effort de l'Etat de en faveur de l'audiovisuel public diminue.

M. le Rapporteur pour avis - Pas du tout !

M. Didier Mathus - Chacun peut observer l'évolution en cours depuis deux ans et demi : mesures dilatoires sur la télévision numérique terrestre, abandon d'une grande ambition pour l'audiovisuel public, déstabilisation méthodique de France Télévisions, disparition de la dotation de 152 millions destinée au passage à la télévision numérique, interdiction de développer une chaîne entièrement consacrée à l'information, démantèlement par la loi de juillet 2004 du modeste dispositif anti-concentration - au préjudice de la démocratie et pour le plus grand profit du secteur privé.

Personne, Monsieur le président de la commission des finances, ne réclame la hausse de la redevance. Mais l'Etat aurait dû tenir l'engagement qu'il avait pris de rembourser les exonérations. Ce manquement à la parole donnée réduira de 80 millions les moyens de l'audiovisuel public. Quant à l'exonération des résidences secondaires, est-elle autre chose qu'un cadeau offert aux ménages les plus aisés ? Tous les propriétaires de résidence secondaire ne sont pas forcément riches, mais rares sont les personnes modestes qui en possèdent une ! La réforme de la redevance fournissait l'occasion de consolider les moyens de l'audiovisuel public, dans le cadre de l'équilibre entre le public et le privé qui caractérise le système français et qui donne au secteur public un rôle moteur au sein du PAF. Ce rôle, il ne sera plus en état de le jouer.

Dans le budget de l'audiovisuel public, les ressources publiques augmentent de 0,71 %, ce qui veut dire qu'en euros constants ses moyens diminuent. En revanche, ses ressources propres progressent, ce qui signifie, Monsieur le ministre, que vous comptez sur la publicité pour financer l'audiovisuel public. Vous commettez ainsi un contresens majeur, qui conduira à abandonner la réduction à huit minutes par heure de la durée des écrans publicitaires. Dans ces conditions, c'est l'identité même du service public qui est en cause. Le numérique, dites-vous, conduira Arte et France 5 à augmenter leurs heures d'antenne ; à moyens constants, je me demande bien comment elles y parviendront.

S'agissant de la télévision numérique, heureusement que l'opposition s'est exprimée pour vous aider à mettre de l'ordre dans la pensée majoritaire ! Cependant, vous vous trouvez aujourd'hui au milieu du gué. Je salue la décision prise au sujet de la norme MPEG 2, mais à terme elle ne règle rien, puisque rien n'est décidé pour l'application de MPEG 4 aux chaînes payantes. Le développement de la TNT gratuite pour tous n'est donc pas assuré. Le cas échéant, vous pouvez compter sur nous pour vous aider à franchir la deuxième moitié du gué.

Pas un centime ne figure dans le budget pour cette Arlésienne du PAF qu'est la CFII, chaîne française d'information internationale, après avoir tant dit qu'il s'agissait d'une ardente obligation pour le rayonnement de la France ! Le ministre des affaires étrangères l'a confirmé : aucun moyen ne lui est consacré. Dans ces conditions, mieux vaudrait en assumer clairement l'abandon.

La crise que traverse l'audiovisuel public est d'abord celle de la création. Je salue les propos tenus par Dominique Richard : la mesure relative au crédit d'impôt est en effet opportune. Mais elle n'est pas la panacée, car la part des émissions de plateau et de flux continue d'augmenter. Va-t-on laisser indéfiniment se développer une télévision publique nombriliste et auto-célébrative au détriment de la création véritable ? De plus, les sommes consacrées à l'achat de droits de football tarissent de plus en plus les moyens destinés à la création. Aujourd'hui, les droits de retransmission d'un match représentent le coût de production d'un film.

Enfin, l'Etat doit préciser clairement ce qu'il attend de la télévision numérique. La communication, Monsieur le président Méhaignerie, n'est pas seulement une dépense publique, elle est un enjeu démocratique. C'est un débat auquel nous sommes prêts.

M. Jean-Pierre Brard - Puisque le président Méhaignerie a tenu à s'exprimer sur le remboursement des exonérations, je commencerai par souligner que sa position n'est que celle de la majorité de la commission des finances. Quant à M. Richard, que j'ai écouté avec intérêt, son propos est quelque peu schizophrénique : il s'exprime librement, certes, mais, en bon soldat, il finit par rentrer dans le rang et par marcher au pas...

M. Michel Herbillon - C'est plutôt ce qui se passe dans votre groupe, en général !

M. Jean-Pierre Brard - Vous me dites cela à moi ?! Ne jugez pas à votre image.

Le président Méhaignerie part de l'idée que la France est en tête pour l'effort en faveur de la culture. Certes, mais au royaume des aveugles... En tout état de cause, il me semblerait nécessaire qu'une nation comme la nôtre ait en ce domaine d'autres ambitions que MM. Berlusconi et Blair ou que M. Schröder dont la culture est si vaste qu'il a réduit récemment l'apport des huguenots à l'Allemagne à la concoction de boulettes !

Il est exact que je me suis demandé un jour si le ministre n'était pas un leurre, mais je ne demande que la démonstration du contraire et je serais ravi qu'il entre au panthéon des ministres qui auront marqué l'histoire de cette République. Simplement, comme dans l'affaire des intermittents, nous jugerons sur pièces...

Nous saluons l'effort réel accompli en faveur de la presse écrite mais nous éprouvons quelques inquiétudes pour le reste. Un de nos collègues de la majorité a en effet, dans une déclaration du 22 septembre à l'AFP, souhaité une remise en cause des conventions collectives dans l'audiovisuel public. Ce faisant, il s'est inscrit dans une tradition bien attestée depuis le démantèlement de l'ORTF et de la SFP, et nous souhaiterions donc avoir votre sentiment, Monsieur le ministre.

Nous déplorons également de voir que la chaîne d'information internationale se trouve dans une impasse. Il faut sans doute du temps pour arrêter tous les choix nécessaires, mais cela ne devrait pas empêcher de prendre position. En tout cas, l'absence de ligne budgétaire ne fait que renforcer les craintes que nous avions exprimées l'an dernier.

Nous sommes par ailleurs inquiets de voir que les principaux médias sont aux mains, non de gens de culture, mais d'un petit groupe de capitaines d'industrie, ce qui est dangereux pour les libertés publiques. Pour M. Lagardère, pour les familles Dassault et de Wendel, les seules valeurs sont celles qui sont cotées en bourse. Ne pensez-vous pas qu'en matière de culture et d'audiovisuel, elles devraient tout de même être d'une autre essence ?

Nous défendons tout ce qui peut contribuer au pluralisme et par conséquent nous soutenons les radios associatives. Or, selon la confédération nationale des radios libres, la commission du Fonds de soutien à l'expression radiophonique a été composée sans tenir compte de la représentativité de ses membres. C'est ainsi que cette confédération, pourtant majoritaire, ne dispose plus que d'un poste de titulaire et d'un poste de suppléant, et que la CNRA, minoritaire, a raflé tous les autres. On dit même que vous seriez à l'origine de cette situation choquante, Monsieur le ministre... Qu'en est-il et, d'autre part, allez-vous effectivement renforcer ce fonds ?

Pour ce qui est de la redevance, je n'y reviendrai pas après l'ample débat que nous avons eu lors de l'examen de la première partie de la loi de finances. Je ne pourrai que me faire l'écho du rapporteur spécial... sans toutefois parvenir aux mêmes conclusions.

M. Pierre-Christophe Baguet - Je ne m'attarderai pas sur le détail des crédits ni sur les questions de technique budgétaire, la réforme induite par la LOLF n'ayant pas encore produit tous ses effets. En outre, l'examen de ces matières est un peu compliqué par l'organisation de nos débats, certains amendements devant être examinés vendredi et d'autres lorsque nous en viendrons aux articles rattachés. Je me bornerai à insister à nouveau pour que la discussion associe le ministre de la culture et le ministre des finances, car il n'y a pas lieu à mon sens de distinguer entre ministre dépensier et ministre économe quand il y va de la culture et de la création. N'oublions pas non plus que le budget de la presse écrite est de l'ordre de 10 milliards et que ce secteur est à l'origine de plus de 50 000 emplois.

D'autre part, je regrette profondément l'absence d'un dialogue préalable avec le Parlement sur toutes les grandes décisions qui engagent l'avenir de l'audiovisuel, en particulier sur les grands choix technologiques. S'agissant de la TNT, nous avons mis en place un groupe de travail informel, mais cela ne saurait suffire. La situation est telle qu'on pourrait se demander à quoi sert le Parlement. Ainsi, s'agissant des décisions de la ligue professionnelle de football, on se borne à créer des instances de régulation mais les décisions nous échappent totalement. Elles ont pourtant de graves répercussions pour l'audiovisuel.

La presse est au bord du désespoir, comme en témoigne le discours pathétique tenu par le président François d'Orcival, en présence du président Debré, la semaine dernière. Une table ronde géante ou des états généraux s'imposent peut-être. En tout cas il faut tout remettre à plat, et chercher des solutions en s'inspirant de ce qui a été fait pour le cinéma - crédit d'impôt, taxe de sauvegarde, réductions en faveur des particuliers souscrivant un abonnement, par exemple. Le groupe UDF a déposé des amendements en ce sens, mais, trop ponctuels, ils ne peuvent certes remplacer une vision globale.

Il faut également travailler sur le rapport Spitz, qui ouvre des perspectives intéressantes. Pour notre part, nous avons déposé un amendement visant à mieux prendre en compte les besoins des jeunes. Il faudrait en particulier réfléchir aux conditions d'un meilleur accès de ceux-ci à la presse et, de ce point de vue, je redoute un peu les effets de la distribution de journaux gratuits ou financés par l'Etat ou les collectivités. Il y a là quelque chose qui ressemble à une concurrence déloyale.

J'ai également déposé un amendement relatif aux kiosquiers. Nous avons accordé à ceux-ci un abattement sur les bases de taxe professionnelle, selon plusieurs tranches, mais les maires et les présidents de conseils généraux ont été trop peu nombreux à utiliser ce dispositif - 25 % seulement - il faudrait donc réfléchir à une disposition peut-être plus contraignante.

S'agissant toujours de la presse, le Sénat a, à l'initiative de M. de Broissia, voté un très bon amendement sur le travail de nuit, dans le cadre du projet de cohésion sociale. Il s'agit de considérer que ce travail commence à minuit, et non à 21 heures. Il importe en effet de bien distinguer entre les entreprises qui ne cherchent que le profit et celles qui sont obligées de travailler la nuit. Je souhaiterais que vous souteniez cet amendement Monsieur le ministre.

Une normalisation des rapports entre la presse et la poste est sans doute nécessaire, mais il ne faut pas oublier que la première a consenti de gros efforts et accepté une hausse de 10 % des tarifs postaux sur quatre ans. En contrepartie, vous lui accordez 19 millions d'euros. J'insiste pour que ce soutien se prolonge tout au long des quatre ans de l'accord. On ne peut en effet abandonner la presse à un moment difficile pour elle.

Pour ce qui est de la radio, la refonte de la bande FM progresse et le CSA a lancé un appel d'offres. Il importe que les Français puissent écouter la radio de leur choix où qu'ils se trouvent. Or, les radios associatives traversent une crise du fait de la disparition des emplois-jeunes, des CEC et des CES, ainsi que du plafonnement du fonds de soutien à l'expression radiophonique. Nous demandons donc un déplafonnement des tranches supérieures de ce fonds, afin de retrouver une marge de manoeuvre.

On a sans doute raison de demander un effort de productivité à la télévision, mais il faut que chacun tienne ses engagements. Ce doit notamment être le cas de l'Etat, qui doit se conformer aux contrats d'objectifs et rembourser les exonérations nouvelles. Je sais que certaines sociétés ont pris du retard mais leurs efforts sont indéniables et il faut donc les aider. Or, si je ne conteste pas le principe de la réforme de la redevance, je crains que ses effets ne soient un peu aléatoires.

Pour ce qui est de la politique audiovisuelle extérieure, je regrette qu'elle demeure sous double tutelle. Il me semblerait plus cohérent qu'elle soit sous la seule responsabilité du ministre de la culture. D'autre part, nous soutenons l'amendement de M. Kert, en ce qui concerne la chaîne d'information internationale.

Je salue les efforts du ministre, dans un contexte aussi contraint. L'UDF votera donc ce budget, mais j'attends beaucoup de vos réponses.

M. Alain Joyandet - L'UMP est très satisfaite du budget que vous présentez et des avancées importantes qui sont effectuées. Il faut souligner que le secteur est d'une extraordinaire complexité. Depuis vingt ans, et quels que soient les gouvernements, les décisions peu brillantes se sont succédé, qu'elles soient franchement mauvaises ou qu'elles se contentent de reprendre ce qui avait déjà été fait par le privé. Nous n'avons jamais été capables d'anticiper, alors que les nouvelles technologies changent la donne en permanence. Nous sommes tous attachés au pluralisme, mais il faut bien se rendre compte qu'il ne pourra être assuré que si le secteur marche économiquement. Il me semble que le débat public-privé est totalement dépassé dans la communication. Par exemple, l'ouverture de la bande FM aux radios dans les années 1980 a conduit à atomiser complètement l'audience, faisant passer celle du leader de 40 % à 10 % aujourd'hui. Une légère modification technologique peut donc avoir des conséquences considérables...

Il n'est donc pas aisé de réglementer dans ce secteur, et une réflexion globale est indispensable. Dans dix ans, lequel des médias sera au cœur de la démocratie ? Quelle place l'écrit occupera-t-il, comment sera-t-il repris par le numérique ? Quelle influence la TNT aura-t-elle sur le réseau hertzien ? Il va se passer des choses énormes ! Il n'y a pas un mois sans expérimentations nouvelles. Faut-il les autoriser ou non ?

M. Jean-Pierre Brard - Seillière et Lagardère !

M. Alain Joyandet - Il ne me semble pas, en faisant Canal Plus, que la gauche ait servi l'intérêt du grand service public ! Il ne me semble pas que pendant dix ans où elle a été au pouvoir, elle ait servi la démocratie et donné de l'oxygène à l'audiovisuel public ! C'est vous qui avez joué la partie qui se termine aujourd'hui ; surtout ne nous donnez pas de leçons ! Vos décisions, qu'elles aient été inefficaces ou carrément nuisibles, ont fait beaucoup de mal au secteur public de la communication.

Nous nous réjouissons des différentes réformes entamées à l'occasion de ce budget, et qui ne se résument pas à celle de la redevance. A ce propos cependant, il me semble qu'il est possible d'aller plus loin, et de faire de la redevance un outil pérenne de financement. Ne pourrait-elle devenir tout simplement une taxe universelle ? On peut aujourd'hui regarder la télévision sur un ordinateur ou un téléphone portable. Certes, on est censé faire une déclaration en achetant ce type de portable, mais est-ce vraiment le cas ?

En ce qui concerne la TNT, et je m'exprime là à titre personnel, l'éventualité de la double norme m'inquiète. Il me semble que la norme MPEG 4 pousserait l'industrie vers l'avant. Je sais que c'est la norme MPEG 2 qui a été choisie pour la première salve, mais il faut encore approfondir la réflexion.

L'avenir de la presse écrite d'information soulève beaucoup d'inquiétudes. Elle subit en effet de plein fouet les évolutions technologiques : on trouve maintenant l'information partout ! Il est certain qu'il y a quelque chose à faire en direction des jeunes. Je me demande également si les aides conjoncturelles, très ciblées, ne pourraient pas être avantageusement remplacées, à budget constant, par des aides pérennes à la presse, beaucoup plus générales. J'ai déjà proposé, par exemple, une prime aux entreprises de presse qui embauchent des journalistes professionnels.

Pour conclure, vous conduisez, malgré un contexte tendu, une action dynamique qui illustre un grand éclectisme d'approche, mais la réflexion doit continuer.

M. le Ministre - Monsieur Mathus, la caricature ne sert à rien, surtout quand elle est aussi facile à démentir. Nous avons à faire face à des responsabilités, et nous entendons faire de la culture et de la communication un atout stratégique pour notre avenir. Il ne s'agit pas de quelque supplément d'âme, de la cerise sur le gâteau, d'un petit plus ! Le lancement de l'année de la France en Chine a bien montré combien la communication contribue au rayonnement de notre pays et à son développement économique. Des centaines de millions de téléspectateurs chinois ont ainsi admiré de nombreux aspects de la création française.

Je ne peux donc pas laisser dire que le Gouvernement agit comme si cette activité était résiduelle. Vous nous accusez de déstabilisation méthodique : ridicule ! Vous avez même dit, en parlant de la TNT, qu'étant donné la soumission du Gouvernement aux intérêts particuliers, je pourrais tout aussi bien laisser mon fauteuil à M. Le Lay. Il me semble que nos concitoyens ont droit à la vérité. Dans une période d'évolution aussi rapide des technologies, la pertinence des choix concernant la TNT ne peut être vérifiée que par le dialogue entre responsables politiques, parlementaires et techniciens. Ce n'est que si nous n'y avions pas procédé que vous pourriez nous accuser de prendre des décisions à la légère. Nous avons choisi de faire passer l'offre gratuite de cinq chaînes à au moins quatorze, en nous servant du dispositif technologique pertinent au meilleur coût. A ce propos, ne parlez jamais de décodeur ! Il ne s'agit pas d'une télévision payante déguisée. L'offre élargie sera accessible avec un simple adaptateur, disponible à partir du 1er mars, qu'on achètera une fois pour toutes. Le prix n'en a pas encore été fixé. Je pense qu'il se situera entre 75 et 100 euros.

Dans ce domaine, l'ère de la bakélite et de la chaîne unique est révolue. La technologie ouvre plusieurs possibilités d'accès à la télévision. Notre objectif est d'offrir les chaînes gratuites au plus grand nombre. Quant aux chaînes payantes, leur diversité, tant en termes de capacité que de prix, fait partie de la réalité. Il faut maintenant déterminer la norme technologique qu'elles utiliseront, et il me semble qu'à ce propos, je fais preuve de la plus grande ouverture d'esprit (Interruptions sur les bancs du groupe socialiste). Accompagnez-moi donc lors des discussions avec les partenaires sociaux ou les professions en crise, vous serez les bienvenus ! Mais ne faites pas de ce débat un règlement de comptes à caractère financier.

Etant donné la diversité actuelle des moyens d'accès à la télévision, on voit bien que l'époque d'une redevance affectée est révolue et que l'on s'achemine vers une taxe universelle sur les ménages.

S'agissant de la TNT, nous souhaitons que le plus grand nombre de téléspectateurs possible aient accès à une gamme de chaînes étendue. Pour autant, nous ne pouvons ignorer l'évolution technologique, et devons nous donner le temps d'un choix éclairé.

Pour ce qui est de la chaîne d'information internationale, ne soyez pas injuste : le rayonnement international de la France est déjà assuré par des canaux multiples, qu'il s'agisse de l'AFP, de RFI, de France Télévisions, de CFI, d'Euronews ou de TV5. Et puisque j'évoque TV5, permettez-moi de m'associer aux hommages rendus à la mémoire de Serge Adda, son président récemment décédé, grand humaniste s'il en fut.

Pour assurer le rayonnement international de notre langue et de nos idées, plusieurs projets sont en discussion. Le premier, vous le savez, associe France Télévisions et TF1 ; je souhaite, s'il devait voir le jour, qu'y soient associés TV5, l'AFP et RFI. Poursuivre la réflexion sur un projet d'importance stratégique majeure comme celui-là ne signifie en rien se livrer à des manœuvres dilatoires. Dans le même temps, les services du ministère des affaires étrangères et les miens travaillent à d'autres projets, et des propositions seront faites ultérieurement au Premier ministre à ce sujet. Il n'y a pas de retard particulier en cette matière, mais nous souhaitons que tous les partenaires naturels d'une telle opération soient associés à sa mise en œuvre. Et si aucun crédit n'est prévu à cette fin dans le projet qui vous est soumis, je ne doute pas qu'aussitôt la décision prise, nous saurons trouver le budget nécessaire, avec l'aimable complicité de votre commission des finances. (Mouvements divers).

S'agissant du football, puis-je rappeler que le Parlement a fixé le cadre nouveau d'une négociation transparente ? Il le fallait, car les montants en jeu sont considérables et que l'issue de la négociation des droits a des conséquences directes sur la production cinématographique. Vous comprendrez que j'y attache la plus grande importance. Je rappelle toutefois que les droits sont, en France, inférieurs de moitié à ce qu'ils sont en Grande-Bretagne. Quoi qu'il en soit, c'est un excellent accord qui a été conclu entre Canal Plus et l'industrie cinématographique et je ne souhaite pas qu'il soit remis en cause.

Je vous remercie, Monsieur Brard, de vos aimables propos, mais je me satisferais que le jour où vous délibèrerez de mon éventuelle entrée au Panthéon soit le plus tardif possible ! (Sourires). J'ai le plus grand respect du pluralisme d'expression sous toutes ses formes, mais je ne peux vous suivre lorsque vous vous en prenez à de grandes entreprises françaises ou à leurs propriétaires. Je suis particulièrement vigilant à ce qu'il n'y ait pas de concentration excessive dans les secteurs de l'audiovisuel et de la communication, mais le cinéma, l'édition et la presse ont besoin de soutien. Je souhaite que l'argent s'investisse dans ces secteurs, et notamment dans la presse.

M. Brard s'est par ailleurs étonné de la composition de la commission d'attribution des aides du Fonds de soutien à l'expression radiophonique. Voilà qui est étonnant, puisque je n'ai fait que reconduire les dispositions de la loi Tasca, selon lesquelles les quatre sièges alloués aux représentants des radios associatives sont attribués pour trois d'entre eux au CNRA, le quatrième l'étant à la CNRL. Toutes les propositions à ce sujet sont bienvenues, mais si manque d'audace il y a eu, ce n'est pas de mon fait.

M. Jean-Pierre Brard - Le mimétisme ne fait pas une politique !

M. le Ministre - J'en suis persuadé ! M. Baguet s'est alarmé de la situation de la presse, et particulièrement de la presse écrite. Le projet de budget qui vous est soumis traduit cette urgence, que M. d'Orcival invite toutefois à relativiser en rappelant que si certains secteurs ont effectivement besoin de soutien, la presse magazine, elle, se porte bien. Il faut faire preuve de discernement, d'autant que certaines questions fâchent. Actuellement, l'aide est concentrée sur la presse d'information générale et politique ; certains voudraient élargir ce périmètre, préférant un soutien global à l'écrit. Telle n'est pas la position du Gouvernement ; il deviendrait en effet particulièrement difficile de définir des critères d'attribution de l'aide. Je suis, bien sûr, prêt à la concertation, à condition qu'elle ne se fasse pas dans une sorte de mouvement brownien : il faut une vision. Mais je suis prêt à soutenir toute expérimentation originale visant à améliorer la diffusion de la presse écrite auprès des jeunes. Pourquoi, par exemple, ne pas imaginer l'accès à la presse écrite dans les lieux où sont implantées des bornes internet ?

M. Baguet s'est également inquiété de la situation du Fonds de soutien à l'expression radiophonique, effectivement délicate. Non seulement ses recettes plafonnent parce que les contributions des régies publicitaires sont à leur maximum, mais ses dépenses augmentent considérablement. Cela s'explique par l'augmentation du nombre de chaînes radiophoniques et surtout par l'augmentation inconsidérée du barème des subventions décidée à la légère par le gouvernement Jospin, qui a réduit le fonds de roulement à néant. Une réflexion d'ensemble est donc nécessaire.

La décision prise par le Sénat à propos du travail de nuit est d'une grande sagesse. Pour ce qui est d'exonérer les kiosquiers de la taxe professionnelle, vous comprendrez qu'il n'appartient pas au Gouvernement de dicter leur conduite aux collectivités territoriales ; toutefois, toute proposition qui tend à aider la diffusion de la presse ne peut que recueillir mon approbation bienveillante.

Comme M. Baguet, M. Joyandet a dit la nécessité d'une réflexion d'ensemble sur l'avenir de la presse. J'y suis prêt, et les entreprises de la presse écrite doivent savoir qu'elles ont en l'Etat un partenaire solide, soucieux de la modernisation du secteur dans le respect de l'équilibre entre presses nationale, régionale et départementale.

S'agissant de la double norme, notre objectif n'est pas de créer le trouble, mais de faire que le plus nombre de Français possible bénéficie d'une offre gratuite de TNT attrayante, tout en garantissant la diffusion des chaînes payantes dans les meilleurs conditions techniques. Je le répète : pour la TNT gratuite, la décision est prise ; pour les chaînes payantes, la réflexion se poursuit.

M. Michel Françaix - Est-ce vraiment l'expression du pluralisme que de concéder sept minutes trente à l'opposition quand la majorité et le Gouvernement peuvent s'exprimer pendant deux heures et demi ? A cette aune, nous sommes les grands perdants de la nouvelle organisation, et nous préférons évidemment que les débats se tiennent en séance plénière. Sur le fond, notre collègue Joyandet a raison, il nous est arrivé de nous tromper. Ainsi, la Cinq n'est pas une réussite, non plus que la chaîne musicale. Mais notre objectif a été constant : nous voulions créer des espaces de liberté. Voilà ce qui explique Canal Plus, et voilà ce qui explique aussi le soutien accordé au cinéma.

Dans ces conditions, on peut s'interroger pour savoir si le ministre est un héros ou un leurre. (Mouvements divers). Est-il ce héros qui, bien qu'écartelé entre les contradictions de sa majorité, a réussi à sauver la redevance et la TNT ? Mais, alors, qu'allait-il faire dans cette galère ?

Pour ma part, je ne puis me contenter d'un discours sur le mode du « tout va bien ».

M. le Ministre - Je n'ai jamais dit ça !

M. Michel Françaix - Eh bien moi, j'ai un peu entendu cela ! Par contre, je n'ai rien entendu sur la politique de la « redevance audiovisuelle honteuse », sur le méli-mélo de la TNT, sur les atermoiements de la chaîne d'information internationale, sur les télévisions locale en rade, sur les droits de retransmission du football exorbitants, sur l'accentuation de la concentration dans nombre de secteurs, sur l'abandon du fonds de soutien à la création radiophonique, sur la presse en berne, sur l'AFP en crise ou sur la montée en charge des gratuits !

Sans rouvrir le dossier de la redevance, permettez-moi tout de même de m'étonner de l'abandon des exonérations partielles et de l'exemption des résidences secondaires, au prétexte de difficultés techniques à nos yeux aisément surmontables.

S'agissant de la TNT, qui faut-il croire ? Le ministre de l'industrie lorsqu'il nous explique que la priorité n'est pas de lancer de nouvelles chaînes en France, ou vous ?

M. le Ministre - Le Premier ministre a tranché la question.

M. Michel Françaix - Les contradictions entre ministres n'en sont que plus flagrantes. Les positions de la gauche et de la droite sur la TNT dessinent des lignes de clivage particulièrement tranchées : nous voulions beaucoup de chaînes publiques, nous aurons beaucoup de chaînes privées ; nous voulions privilégier les chaînes gratuites, les payantes seront majoritaires ; nous voulions donner la priorité aux nouveaux entrants, les sortants seront les mieux servis ; nous voulions encourager les chaînes locales, le national sera prépondérant.

Quant aux droits de retransmission des matchs de football, ils atteignent des niveaux proprement stupéfiants : 5,5 millions pour le dernier match PSG-OM, soit un niveau équivalent au coût de production de certains films. Vous nous dites, Monsieur le ministre, que c'est partout pareil, mais ce n'est pas vrai ! La compétition entre TPS et Canal Plus est un cas unique en Europe. Quant aux clubs, ils deviennent littéralement « télé dépendants » puisque 70 % de leurs ressources émanent des droits de retransmission. Si, demain, une des deux chaînes décrochait l'exclusivité du championnat, l'autre serait promise à une mort certaine à brève échéance.

En matière de création, n'est-il pas temps de redéfinir la notion « d'œuvre audiovisuelle » pour mieux la distinguer du pur divertissement ? Le même souci de rigueur devrait commander de distinguer pour chaque chaîne les recettes tirées des activités de diversification, afin de disposer d'une vision plus juste de leurs ressources respectives. Et ne faut-il pas faire en sorte que l'ouverture des secteurs publicitaires naguère interdits profite directement à la presse ?

La presse d'information - en particulier la presse quotidienne - se porte mal. Vous connaissez parfaitement les chiffres et ils sont éloquents : 24 millions d'exemplaires vendus chaque jour en Allemagne, pour 8,5 millions en France ; 385 exemplaires vendus pour 1 000 habitants en Allemagne, 180 en France ; 350 titres en Allemagne, 109 au Royaume Uni, 87 en France ; 6 milliards de recettes publicitaires en Allemagne, 3,4 milliards en Grande-Bretagne, 1,5 milliard en France. Quant à la part du marché publicitaire détenue par la presse quotidienne, elle ne représente que 16 % du total en France, contre 34 % en Allemagne. Le déclin rapide des quotidiens d'opinion est aujourd'hui avéré, et l'on ne peut plus se contenter d'une politique de saupoudrage des aides. L'ampleur de la crise, liée notamment au défaut d'adaptation du réseau de distribution, contraint les entreprises de presse à une augmentation régulière du prix de vente qui s'apparente à une fuite en avant : le prix moyen de vente au numéro atteint 1 € en France, contre 60 centimes au Royaume Uni et 75 centimes en Allemagne...

Et cela, paradoxalement, alors que nous avons la presse la plus aidée. On ne peut pas continuer comme ça, d'autant que l'aide principale consentie par les pouvoirs publics, c'est la TVA sur la Poste, laquelle profite à tous les titres sans distinction. Ne faudrait-il pas cibler l'aide publique, de sorte que le lecteur citoyen soit avantagé par rapport au lecteur consommateur ? La presse de loisirs se porte mieux que la presse d'opinion, ne faut-il pas en tenir compte ?

M. Christian Kert, suppléant M. le président de la commission des affaires culturelles - En ma qualité de président suppléant de séance, je vous invite, cher collègue, à conclure !

M. Michel Françaix - Les « gratuits » connaissent un développement continu et non maîtrisé. Faut-il les considérer comme de simples prospectus publicitaires ou comme un support particulièrement adapté à notre temps et aux attentes des jeunes ? Sans doute, un peu des deux. Mais il reste, comme le relevait plaisamment Jean-François Kahn, que si la presse est un produit comme les autres, elle ne peut être gratuite !

Le temps me manque pour évoquer la crise de l'AFP ou dénoncer les pratiques spéculatives particulièrement peu scrupuleuses de certaines entreprises de presse. Une question précise : est-il envisageable de rendre L'Equipe - dont le rôle social n'est plus à démontrer - éligible aux aides à la presse quotidienne ?

M. Dominique Paillé - Je salue l'action du Gouvernement en matière de soutien à la création audiovisuelle et l'opportunité du crédit d'impôt. Monsieur le ministre, je vous félicite aussi pour le soin que vous accordez à la résorption de l'emploi précaire, notamment dans le secteur public. Je tiens par contre à exprimer un profond désaccord, non pas sur la réforme de la redevance audiovisuelle dans son ensemble, mais sur l'exemption injustifiée des résidences secondaires et sur la décision de diminuer le montant de la redevance due pour cette année de 116,50 € à 116 €. Il y a là un très mauvais signal adressé à nos compatriotes d'autant que le montant de la taxe reste très en deçà de ce qui se pratique dans le reste de l'Union européenne. A l'instar de notre collègue Joyandet, je souhaite que la réforme ne soit pas close et que nous dégagions ensemble de nouvelles bases pour une forme de redevance universelle. La réforme qui vient d'intervenir me fait craindre le pire.

Désormais très attachés à la richesse que constituent les radios associatives, créées pour l'essentiel en 1981, nous souhaitons que les crédits du fonds de soutien à l'expression radiophonique ne diminuent plus. A terme, ne faudra-t-il pas envisager une réforme tendant à garantir l'existence même des radios associatives ?

L'avenir de la presse écrite constitue également un sujet de préoccupation majeure, et je souhaite là encore qu'une réflexion d'ensemble aboutisse sur un projet de réforme prenant la mesure de la gravité de la situation. S'agissant des métiers artistiques, le Gouvernement et le Parlement ont su nouer un partenariat fécond et les conclusions de notre groupe de travail seront disponibles dans quelques semaines. Puissions-nous nous inspirer de cette méthode pour préparer les indispensables réformes à venir dans le domaine de la communication.

M. Patrick Bloche - Je ne reviendrai pas sur le problème majeur du financement du secteur public de l'audiovisuel puisque nous l'avons largement abordé dans la séance publique du 22 octobre, consacrée à l'examen des recettes. Le cadre budgétaire est tellement contraint, que tout développement à ce sujet semble un peu vain. Quant à la chaîne française d'information internationale, son devenir est intimement lié à l'évolution du budget des affaires étrangères, lequel ne viendra en discussion que lundi prochain.

Quoi qu'il en soit, le groupe socialiste sera très attentif à l'évolution des sources de financement de l'audiovisuel public. L'amendement Martin-Lalande offre une garantie minimale, et nous aurions souhaité qu'il soit donné suite à notre proposition de relever le plafond du remboursement par l'Etat aux chaînes publiques des exonérations de redevance. Faute de l'avoir obtenu, le financement du secteur pour l'année qui vient ne nous semble pas garanti. Il y a tout lieu de craindre que l'audiovisuel public ne dispose pas de ressources suffisantes pour honorer ses engagements de production et participer valablement au lancement de la TNT.

S'agissant des recettes publicitaires, les hypothèses évoquées par M. Richard ne sont pas de nature à nous rassurer, et mériteraient pour le moins d'être replacées dans le cadre d'une réflexion sur les missions de service public de la télévision et de la radio. A cet égard, loin d'éclairer la situation, le rapport Aillagon a brouillé le message en amenant le débat sur des terrains sociétaux ne permettant pas de dégager des propositions concrètes. Résultat, selon une enquête parue récemment, plus du quart des Français considèrent que TF1 est la chaîne qui incarne le mieux le service public ! Monsieur le ministre, il semble hautement souhaitable que vous précisiez au plus vite quelles sont, selon vous, les missions de service public confiées à l'audiovisuel, et dans quelles conditions France Télévisions sera à même de les remplir.

Pour ce qui concerne la CFII, je ne reviens pas sur les travaux parlementaires ignorés en leur temps. La vérité, qui ressort notamment des déclarations de Patrice Martin-Lalande et du ministre des affaires étrangères, c'est qu'un grave problème de financement se pose, puisque rien n'est inscrit pour la CII dans le budget pour 2005, pas même quelques milliers d'euros pour étudier sa faisabilité. Je ne reviens pas sur le retard pris dans le calendrier ni sur l'idée de refaire passer cette chaîne sous votre tutelle, alors qu'elle engage la présence de la France à l'extérieur. En revanche, j'insiste sur une question de fond : une réflexion a été engagée sur la définition d'un standard, d'une sorte de CNN à la française ; or les standards passent vite. Je crains que le retard accumulé ait rendu caduque notre discussion ; il faudra sans doute réfléchir à un nouveau standard, sensiblement différent, en nous demandant quelles sont les attentes des publics auxquels cette chaîne est destinée. Je reviens d'une mission au Caire avec le sentiment que le temps qui passe remet nos conclusions en cause.

Pour l'édition de presse, le ministre nous a invités à être futuristes : un maire que je connais bien parlerait de créativité. Or, cette dernière ne me semble guère être au rendez-vous. La crise qui frappe les boutiquiers et les kiosquiers est si grave que le pluralisme et la démocratie sont en jeu. On parle depuis longtemps de ce problème, il est urgent de le traiter au fond. Il tient, on le sait, à la baisse de diffusion de la presse quotidienne et au développement des gratuits ; sur ce point, une définition plus précise du colportage s'impose. S'y ajoutent les difficiles conditions de travail des kiosquiers, surchargés par un excès de titres entassés dans des locaux exigus. Sur 2 000 publications que doit diffuser un kiosquier, 500 génèrent 100 % d'invendus. Enfin, l'insuffisance des commissions accroît la difficulté à subsister. Le montant de ces commissions devrait être reconsidéré, sauf pour les quotidiens. Certaines réformes nécessiteraient de revoir la loi Bichet de 1947. Y êtes-vous prêt ?

M. Michel Herbillon - La façon dont est organisée notre discussion est-elle satisfaisante ? Je n'en suis pas sûr.

Chers collègues de l'opposition, je ne dis pas que tout va bien, mais ne dites pas que tout va mal, car ce jugement négatif ne résiste pas à un examen objectif de ce budget. En effet, ce dernier contient beaucoup d'éléments que nous avions tous réclamés depuis longtemps, à commencer par une réforme de la redevance. Elle est faite, même si nous avons entendu des propos divergents sur l'opportunité ou non d'une augmentation. Il s'agit à mes yeux d'une réforme capitale, juste et équilibrée, exemplaire d'une réforme de l'Etat qui ne doit pas rester au stade de l'incantation. Dans ces conditions, et parce que l'Etat réalise ainsi une économie, les Français ne comprendraient pas que la réforme se traduise pour eux par une augmentation de la redevance. Notre démarche serait rendue illisible. Je suis en désaccord complet avec Dominique Paillé sur ce point, comme parfois sur d'autres...(Exclamations sur les bancs du groupe socialiste)

M. le Ministre - C'est comme sur l'Europe ! A chacun son débat !

M. Michel Herbillon - J'ai demandé de longue date que nous profitions de la réforme pour expliquer aux Français ce qu'est au juste la redevance. Il faut mener une action pédagogique, sous la forme d'un document de communication et d'information expliquant clairement que la redevance n'est pas simplement une taxe, mais qu'elle sert à financer l'existence de l'INA, de la radio et de la télévision publiques. Je ne désespère pas que le Gouvernement veuille bien associer en amont le Parlement à l'élaboration de ce document. De même, nous étions nombreux, Monsieur Mathus, à demander depuis longtemps que les crédits de l'INA augmentent, afin d'éviter que disparaissent des pans entiers de notre patrimoine audiovisuel. La hausse de 5,7 % en 2005 nous donne satisfaction.

Pourquoi, sur la TNT, toujours se livrer au récit de catastrophes annoncées ? Pour les chaînes gratuites, des décisions ont été prises qui, contrairement à ce qu'a compris Michel Françaix, permettront à nos concitoyens d'accéder à 15 chaînes gratuites. Au sujet de la mise des chaînes payantes sur la TNT, nous restons, Monsieur le ministre, un peu sur notre faiM. Dites-nous en plus sur les critères retenus pour le choix des normes, et sur la haute définition.

S'agissant du projet de chaîne internationale d'information, certains points ont été tranchés. La mission parlementaire qui a travaillé de longs mois sur ce sujet est parvenue à des conclusions et a adopté à l'unanimité un rapport dont nous estimons qu'il n'a guère été tenu compte. Si le Gouvernement est attaché au rôle du Parlement, on peut s'étonner du silence assourdissant qu'il a déployé à cette occasion. Vous n'êtes pas personnellement en cause, Monsieur le ministre, mais nous vous demandons de nous apporter davantage d'informations afin que nous puissions débattre utilement. Souvenons-nous de la rubrique de ce grand journal de télévision : « Si vous avez manqué le début... » Personne n'a manqué le début du feuilleton de la CII. Le moment est venu de trancher : ou partir de ce qui existe, ou créer quelque chose de nouveau. Où en est-on du choix de la ligne éditoriale, des langues d'émission, des zones de couverture, du mode de financement, des structures de fonctionnement, et aussi de la possibilité pour les Français de regarder une chaîne payée en partie par la redevance ?

M. le Rapporteur spécial - Je salue la volonté politique exprimée par le ministre, notamment pour renforcer l'identité du service public, lequel légitime seul la redevance. Pour la production audiovisuelle, je me félicite que mon amendement relatif au crédit d'impôt, refusé l'an dernier, ne le soit plus cette année. Ai-je bien compris que le manque à gagner dans la collecte de la redevance, qui pourrait s'élever à 15 millions ou même seulement à 8 millions, sera compensé par des crédits budgétaires ? Dans l'élaboration des contrats d'objectifs et de moyens, il serait souhaitable d'associer le Parlement plus en amont, afin qu'il se prononce en meilleure connaissance de cause. La productivité de l'audiovisuel public donne lieu à un procès d'intention qu'il faut combattre. Le service public, en effet, a réalisé d'énormes efforts.

M. Michel Françaix - C'est vrai !

M. le Rapporteur spécial - En application de l'article 58 de la LOLF, la Cour des comptes devrait procéder à une évaluation et à des contrôles, afin de lever définitivement le doute.

38 millions sont destinés à la modernisation sociale de la presse écrite. Cette aide sera-t-elle maintenue pendant quatre ans, durée qui est celle de l'accord conclu avec La Poste ?

Dominique Paillé s'est exprimé sur la redevance en termes surprenants. La réforme induit une économie pour l'Etat et apporte au service public de l'audiovisuel 80 millions de plus si la compensation est intégrale. Il n'y a donc pas lieu d'augmenter la redevance. Commençons plutôt par utiliser la réserve ainsi constituée. S'agissant des résidences secondaires, maintenir le système actuel aboutirait à ce que soit taxée la maison de campagne où un vieux poste irait finir sa vie, alors qu'elle ne le serait pas lorsque viennent y séjourner des personnes pouvant recevoir des émissions sur leur micro-ordinateur ou leur téléphone portable. Ce serait tourner le dos à l'évolution technologique. Le système d'une redevance par foyer est donc le meilleur. Il serait réactionnaire de maintenir le système actuel, mais il faut informer en permanence le contribuable téléspectateur, et lui expliquer à quoi sert la redevance.

Je signale à toutes fins utiles que le rapport qui vous a été distribué n'est que provisoire : il sera complété prochainement.

M. Christian Kert, suppléant M. le président de la commission des affaires culturelles - Pourriez-vous répondre à toutes ces questions en dix minutes, Monsieur le ministre ?

M. le Ministre - Si j'en oublie, vous en porterez la faute... Mais surtout, pour donner satisfaction à tous, il faudrait que je sois le Premier ministre afin d'être sûr que les bons arbitrages soient rendus. Or j'entends bien obéir au principe hiérarchique et me conformer aux décisions prises par le chef du Gouvernement. D'autre part, il me faut bien composer aussi avec l'annualité budgétaire, qui fait que vous décidez souverainement chaque année des dépenses permettant d'atteindre les objectifs fixés...

Suis-je un héros ou un leurre ? Ce n'est certainement pas en ces termes que je réfléchis. Ce qui m'importe, c'est d'essayer de transformer la réalité et à cet égard, je vous invite à ne pas noircir le tableau. Tous ceux qui comme moi sont allés à l'AFP au moment des élections américaines ont pu constater le rayonnement mondial de cette agence, dont les infographies ont été reprises par la presse étrangère. Il faut certes reconnaître les difficultés, mais il faut être fier aussi des réussites de nos entreprises.

M. Michel Françaix - Nous en sommes tous d'accord !

M. le Ministre - Ne doutez pas non plus que la TNT commence à prendre corps le 1er mars 2005 : quarante millions d'euros sont inscrits au budget de France Télévisions à cet effet. D'autre part les chaînes gratuites seront majoritaires dans le dispositif : compte tenu de la décision du Conseil d'Etat, elles seront au moins quatorze - et peut-être davantage une fois achevée la redéfinition entreprise par le CSA. Parmi les quatre nouveaux entrants, on comptera trois groupes privés et le quatrième entrant, Festival, est en train de rénover ses programmes afin de les rendre plus attractifs.

Le Gouvernement entend soutenir activement la création audiovisuelle et c'est à quoi servira le crédit d'impôt que vous avez voté. Cela passe-t-il par une politique uniforme ou par des politiques différenciées selon les types de supports ? Je pense quant à moi qu'il faut additionner les deux. Il est bon par exemple qu'il y ait en matière de TVA des mesures qui s'appliquent à l'ensemble de la presse, mais je tiens qu'une partie de celles-ci est justiciable de mesures spécifiques. Et, à ce propos, je n'entends pas éluder les questions qui fâchent : ainsi celle du journal L'Equipe. Je vous indique donc que le souci du pluralisme politique nous conduit à ne pas modifier en 2005 le périmètre de la presse d'information politique et générale.

Pour ce qui est des « gratuits », la question qui se pose est de savoir si leur apparition nuit à certains grands équilibres ou si, au contraire, elle n'a pas permis à un public qui n'aurait de toute façon pas acheté de journal de se familiariser avec la presse écrite. Il serait donc utile de se pencher sur « l'effet prix ».

Puisque M. Paillé a évoqué l'évolution du montant de la redevance, je lui opposerai que la solution retenue par le Gouvernement, celle de l'arrondi inférieur, est la disposition applicable à tous les impôts.

M. Michel Herbillon - Très bien.

M. le Ministre - Cela étant, il appartiendra au Parlement de trancher définitivement.

L'idée de chaîne d'information internationale a suscité une pluralité de projets et aussi bien le ministre des affaires étrangères que moi-même avons maintenant besoin d'y voir clair. Nous estimons également important de disposer d'un outil, qui pour être au service de notre langue et de la francophonie, n'en permettra pas moins la diffusion de messages en langues étrangères - l'affaire des otages en a prouvé la nécessité. Nous n'avons donc en rien abandonné ce projet, que nous considérons toujours comme une priorité : simplement nous en sommes à une phase de synthèse à l'issue de laquelle nous nous retournerons tout naturellement vers vous...

M. Michel Herbillon - Vous confirmez donc qu'il n'y a pas de renoncement de la part du Gouvernement ?

M. le Ministre - Il n'y a en aucune manière abandon de ce projet qui consiste à permettre sous une forme à déterminer, l'expression de la pensée française au-delà de nos frontières. Mais, je le répète, il y a au sein du Gouvernement un principe hiérarchique auquel je me plie. Lorsque le Premier ministre a pris une décision, je respecte celle-ci même si elle ne correspond pas à ce que je proposais. Je dois toutefois dire que jusqu'ici, j'ai eu beaucoup de chance.

S'agissant de la loi Bichet qui pose le principe de l'égalité de traitement entre titres de presse sans interdire de lutter contre des pratiques abusives ou contre l'encombrement des points de vente, le groupe de travail constitué par les professionnels a proposé de nouvelles régulations, par exemple en matière d'invendus, mais n'a nullement remis en cause ce texte de 1947. Je compte beaucoup sur ce travail en cours pour définir des mesures concrètes.

M. Herbillon a raison d'insister à nouveau sur l'information que nous devons fournir à propos de l'utilisation de la redevance...

M. Pierre-Christophe Baguet - Cela fait quatre ans que nous le demandons !

M. le Ministre - J'ai fait auprès du ministre de l'économie une démarche en ce sens, que je suis prêt à renouveler. Les Français ignorent trop que la redevance finance aussi la radio et l'INA.

M. Pierre-Christophe Baguet - Il est bien tard pour le leur expliquer !

M. le Ministre - Nous avions élaboré un document mais il est vrai qu'il était illisible. Nous allons essayer de faire mieux et rapidement.

Monsieur Martin-Lalande, pour ce qui est de la compensation, je veux essayer de cerner la réalité avant de prendre mon bâton de pèlerin. Mais, pour aujourd'hui, permettez que j'en finisse avec les questions de patrimoine avant de m'attaquer au financement à court terme de l'audiovisuel public. Il ne faudrait pas compromettre le résultat par une action maladroite et prématurée.

En conclusion, je souhaite que continue à régner entre nous une atmosphère de coopération. La situation n'est pas facile et nous devons essayer ensemble de relever tous les défis grâce à une volonté politique clairement affirmée.

M. Christian Kert, suppléant M. le président de la commission des affaires culturelles - Je vous remercie pour avoir clairement répondu à tant de questions en un quart d'heure.

II.- EXAMEN DES CRÉDITS

A l'issue de l'audition de M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre de la culture et de la communication, la commission des affaires culturelles, familiales et sociales a examiné pour avis, sur le rapport de M. Dominique Richard, les crédits de la communication pour 2005.

Article additionnel après l'article 62 (art. 302 bis KD du code général des impôts) : Ajout de nouveaux paliers au barème de la taxe sur la publicité télévisée

La commission a examiné un amendement de M. Pierre-Christophe Baguet visant à ajouter de nouveaux paliers au barème de la taxe sur la publicité télévisée, afin d'assurer le financement du Fonds de soutien à l'expression radiophonique (FSER), le barème pour la publicité radiophonique restant inchangé. Ce fonds est destiné à soutenir les radios associatives dont les ressources publicitaires sont inférieures à 20 % de leur budget, par l'octroi de subventions par le biais du FSER.

Le produit net de la taxe ne s'est élevé qu'à 20,08 millions d'euros en 2003, alors que le produit inscrit en loi de finances était de 22,1 millions d'euros. Les recettes pour 2004 ne devraient pas excéder 20 millions d'euros, alors que 22,4 millions avaient été inscrits en loi de finances. L'équilibre du fonds étant en péril, il est impératif que ses recettes augmentent sensiblement en 2005.

M. Dominique Richard, rapporteur pour avis, a indiqué qu'il partage ce diagnostic et ces préoccupations et qu'il est donc favorable à cet amendement.

M. Michel Françaix a souligné que cet amendement est attendu et indispensable.

La commission a adopté l'amendement.

Article additionnel après l'article 62 : rapport au Parlement sur l'opportunité d'élargir le champ d'application du Fonds d'aide à la modernisation de la presse quotidienne et assimilée d'information politique et générale à d'autres quotidiens

La commission a examiné un amendement de M. Pierre-Christophe Baguet visant à demander au gouvernement de déposer, à compter de 2005, un rapport au Parlement sur l'opportunité d'élargir le champ d'application du Fonds d'aide à la modernisation de la presse quotidienne et assimilée d'information politique et générale à d'autres quotidiens, comme l'Equipe notamment. Il semble en effet utile de mesurer l'impact de la lecture d'un quotidien comme L'Equipe sur les jeunes, journal plus proche de leurs centres d'intérêt, et d'en tirer éventuellement les conséquences en termes d'aide.

Le rapporteur pour avis s'est déclaré favorable à toute mesure permettant au Parlement d'être mieux informé, même si ce problème doit sans doute être examiné dans le contexte plus global de la réflexion sur l'efficacité des aides à la presse.

M. Michel Françaix a souligné que le sport joue un rôle fondamental en matière de cohésion sociale et qu'à ce titre des quotidiens comme L'Equipe doivent être soutenus. A l'inverse, Paris Turf n'entre bien sûr pas dans la même catégorie.

La commission a adopté l'amendement.

Article additionnel après l'article 73 (art. 302 bis KB du code général des impôts) : extension de l'assiette de la taxe sur les services de télévision au produit des SMS et des appels téléphoniques surtaxés.

La commission a examiné un amendement du rapporteur pour avis visant à étendre l'assiette de la taxe sur les services de télévision au produit des SMS et des appels téléphoniques surtaxés, à l'exclusion des SMS envoyés dans le cadre d'émissions servant une grande cause nationale ou d'intérêt général.

Le rapporteur pour avis a rappelé que la taxe sur les services de télévision, assise sur le chiffre d'affaires des chaînes hertziennes, est destinée à contribuer au financement des productions cinématographiques et audiovisuelles, via le COSIP (compte de soutien financier de l'industrie cinématographique et de l'industrie audiovisuelle) qui est géré par le Centre national de la cinématographie (CNC).

Cette taxe est assise sur l'ensemble des recettes des chaînes. Pourtant, malgré l'accroissement très rapide de la part des produits liés à la diversification dans les chiffres d'affaires et les bénéfices des diffuseurs, et plus particulièrement ceux dont les émissions de télé-réalité sont au cœur des grilles de programmes, l'assiette de cette taxe n'a pas été étendue aux recettes issues de l'envoi des SMS par les téléspectateurs ou du recours aux appels téléphoniques surtaxés. Cette modification permettrait d'ailleurs d'adapter la réglementation à l'évolution de la programmation des diffuseurs et de la structure de leurs résultats économiques.

La commission a adopté l'amendement.

M. Jean-Christophe Baguet a indiqué qu'il avait également déposé un amendement relatif aux kiosquiers, qui a reçu le soutien du ministre de la culture et de la communication, mais qui pour un problème de gage ne peut être examiné par la commission et sera donc redéposé en séance publique avec un gage adapté.

Conformément aux conclusions du rapporteur pour avis, la commission a émis un avis favorable à l'adoption des crédits de la communication pour 2005.

ANNEXE

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES

(par ordre chronologique)

_ Association des cinéastes documentaristes (ADDOC) : Mme Anne Toussaint, présidente, M. Denis Gheerbrant, membre du conseil d'administration, Mme Pascaline Simard, membre du bureau

_ TV5 : M. Serge Adda, président-directeur général, et Mme Marie-Christine Saragosse, directrice générale

_ Direction du développement des médias - Services du Premier ministre : M. Alain Seban, directeur

_ TF1 : M. Jean-Pierre Paoli, directeur délégué, et M. Takis Candelis, directeur de la fiction

_ Syndicat des producteurs de films d'animation (SFPA) : M. Christian Davin, président, et M. Stéphane Le Bars, délégué général

_ Syndicat interprofessionnel des radios et télévisions indépendantes (SIRTI) : M. Philippe Gault, président

_ France Télévisions : M. René Bonnell, directeur de la stratégie des programmes

_ Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) : M. Dominique Baudis, président, M. Denis Rapone, directeur général, et M. Francis Beck, conseiller du groupe de travail sur la production audiovisuelle

_ Mme Catherine Clément, auteur d'un rapport sur la culture à la télévision

_ Canal + : M. Olivier Courson, secrétaire général du groupe, et M. Olivier Segna-Rata, directeur des relations extérieures

_ Union syndicale de la production audiovisuelle (USPA) : Mme Simone Harari, présidente, et M. Jacques Peskine, délégué général

_ Société civile des auteurs, réalisateur, producteurs (ARP) : M. Michel Gomez, délégué général

_ Radio France international (RFI) : M. Antoine Schwarz, président-directeur général

_ Union guilde des scénaristes (UGS) : Mme Frédérique Topin, vice-présidente

_ Syndicat des journalistes de Radio-France : M. Matthieu Aron, président

_ Syndicat professionnel de la presse magazine et d'opinion (SPPMO) : M. François d'Orcival, président, et M. Paul Miguel, directeur

_ Cabinet du Premier ministre : M. Patrick Raude, conseiller technique (médias)

_ France 2 : M. Christopher Baldelli, directeur général

_ Centre national de la cinématographie (CNC) : M. David Kessler, directeur général, M. Eric Garandeau, directeur financier et juridique, et M. Laurent Cormier, directeur de l'audiovisuel

_ Agence France Presse (AFP) : M. Bertrand Eveno, président-directeur général, M. Pierre Louette, directeur général, M. Yves de Saint Jacob, directeur du développement multimedia, et Mme Anne Tavard, directeur délégué développement international

_ M6 : M. Michel Rey, directeur général adjoint, et M. Nicolas Coppermann, secrétaire général aux programmes

_ ARTE : M. Jérôme Clément, président, M. Jean-Michel Baer, conseiller aux questions internationales, et Mme Françoise Cazals, chargée des relations avec le Parlement

_ France 5 : M. Daniel Goudineau, directeur général, et Mme Geneviève Girard, directrice adjointe.

_ Chambre syndicale des producteurs et exportateurs de films français (CSPEFF) : M. Jean-François Lepetit, président, et M. Jean Cottin, délégué général

_ Syndicat SJA-FO : Mme Anne-Laure Dagnet, membre de la commission exécutive, et M. Renaud Bernard, trésorier

_ Société civile des auteurs multimédia (SCAM) : M. Ange Casta, président, et M. Laurent Duvillier, délégué général

_ Syndicat des producteurs indépendants (SPI) : M. Marc-Olivier Sebbag, délégué général, M. Patrick Sobelman, vice-président long métrage, et M. Emmanuel Priou, membre du collège télévision

_ Syndicat de la presse magazine et d'information (SPMI) : Mme Pascale Marie, directrice, et M. Francis Morel, président du conseil d'administration

_ Ecran Total : M. Serge Siritzky, président-directeur général

_ Société des auteurs et compositeurs dramatiques (SACD) : M. Pascal Rogard, directeur général, et M. Guillaume Prieur, chargé des relations institutionnelles

_ Société des réalisateurs de films (SRF) : Mme Catherine Legave, déléguée générale, et M. Jean-Paul Salomé, réalisateur

_ Radio France : M. Jean-Paul Cluzel, président-directeur général, M. Martin Adjari, directeur général, et M. Sébastien Chabanon, délégué aux relations institutionnelles

_ Syndicat de la presse parisienne (SPP) : M. Laurent Dubois, directeur

_ Syndicat de la presse quotidienne régionale (SPQR) : M. Bruno Hocquart de Turtot, directeur général, M. Michel Comboul, président, et Mme Aude d'Harcourt, conseillère pour les relations avec les pouvoirs publics

_ Groupe 25 images : M. Roger Kahane, co-président

_ TV France International (TVFI) : M. Jean-Louis Guillaud, président, et M. Mathieu Béjot, délégué général

_ Réseau France Outremer (RFO) : M. François Guilbeau, directeur général

_ Institut national de l'audiovisuel (INA) : M. Emmanuel Hogg, président, et M. Max Benoit, directeur délégué

_ France 3 : M. Rémy Pflimlin, directeur général

_ Agence nationale des fréquences : M. Boudet de Monplaisir, chargé de mission

_ Mme Elisabeth Couturier, journaliste et écrivain

_ France Télévisions : M. Marc Tessier, président-directeur général

_ Centre national de la cinématographie (CNC) : Mme Catherine Colonna, directrice générale, M. Eric Garandeau, directeur financier et juridique, et M. Laurent Cormier, directeur de l'audiovisuel

_ Skyrock - M. Pierre Bellanger, président, et M.  David Roizen, chargé des relations publiques

N° 1864 - tome 7 - Avis de la commission des affaires culturelles sur le projet de loi de finances pour 2005 : communication (Rapporteur : M. Dominique Richard)

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1 () Pour 2005.

2 () La redevance sera également due annuellement pour chaque appareil récepteur de télévision ou dispositif assimilé détenu dans un local situé en France. Les professionnels redevables de la TVA déclareront la redevance audiovisuelle suivant les mêmes modalités que leur TVA. Les professionnels non redevables de la TVA déclareront leur redevance en utilisant le formulaire annexe à la déclaration de TVA.

3 () Or, actuellement, la collecte de la redevance rapporte 110 millions d'euros pour 950 000 résidences secondaires taxées. Il existait 3,1 millions de résidences secondaires en France en 2003. Sachant qu'on estime que 55 % dispose d'un poste, 1,705 million de résidences secondaires sont donc taxables. Même avec une redevance à 75 euros, on obtient une recette potentielle de 128 millions d'euros.

4 () Quelques éditeurs de quotidiens régionaux sont également directement clients de la SNCF, en particulier dans le cadre de la remontée des titres vers Paris. Ils bénéficient des mêmes tarifs.

5 () Derniers chiffres disponibles.

6 () Derniers chiffres disponibles.

7 () La production audiovisuelle dont il sera question dans cet avis ne concerne que les oeuvres audiovisuelles « de stock » (fictions, documentaires, animation et spectacle vivant) à l'exclusion des programmes de flux (variétés, jeux, divertissement).

8 () Source : A. Schwarz, La production audiovisuelle française et son mode de financement, rapport au ministre de la culture et de la communication, décembre 2003

9 () La production audiovisuelle française et son mode de financement, rapport au ministre de la culture et de la communication, décembre 2003

10 () Le même type d'obligation s'impose pour les œuvres cinématographiques.

11 () Les aides publiques aux œuvres cinématographiques et audiovisuelles - Une analyse comparative, Observatoire européen de l'audiovisuel -BEI, 15 mai 2004.

12 () Journées internationales de la fiction TV, Versailles, 23 juin 2004.

13 () On était à 12 minutes jusqu'à la loi n° 2000-719 du 1er août 2000 modifiant la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication.


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