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N° 1864

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DOUZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 13 octobre 2004.

AVIS

PRÉSENTÉ

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES, FAMILIALES ET SOCIALES SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2005 (n° 1800)

TOME X

ÉDUCATION NATIONALE, ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR
et RECHERCHE

RECHERCHE et NOUVELLES TECHNOLOGIES

Par M.  Pierre-André PÉRISSOL,

Député.

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Voir le numéro : 1863 (annexe n° 30).

INTRODUCTION 5

I.- UN BUDGET POUR L'AVENIR 7

A. UN MILLIARD D'EUROS SUPPLÉMENTAIRE POUR LA RECHERCHE 7

1. La plus forte augmentation du budget civil de recherche et de développement depuis dix ans 7

2. La création d'une Agence nationale pour la recherche 8

3. Le soutien de l'innovation par des mesures fiscales 9

B. LES DOTATIONS DES ORGANISMES DE RECHERCHE EN PROGRESSION 10

1. Les moyens des établissements publics scientifiques et technologiques 11

2. Les moyens des établissements publics industriels et commerciaux 12

3. Les fondations et les institutions de recherche 12

II.- RÉFLEXIONS SUR L'AVENIR DU SYSTÈME DE RECHERCHE FRANÇAIS 15

A. DE BAS EN HAUT, UN SYSTÈME MALADE 16

1. Un pilote introuvable, une stratégie absente 16

2. L'université, parent pauvre de la recherche française 22

B. ENTRE MYTHES ET RÉALITÉS, QUELLES LEÇONS TIRER DE L'ÉTUDE D'UN MODÈLE ÉTRANGER POUR NOURRIR LA RÉFLEXION SUR LA RÉFORME DU SYSTÈME DE RECHERCHE FRANÇAIS ? 27

1. Le pilotage atypique du système américain de recherche 28

2. L'université au cœur du système de recherche américain 30

C. POUR UNE NOUVELLE GOUVERNANCE DE LA RECHERCHE FRANÇAISE 33

1. Faire de la future Agence nationale de la recherche une véritable agence de moyens 34

2. Placer les universités au cœur des pôles de compétitivité 36

3. Faire de l'évaluation la clé de voûte d'un système de recherche performant 37

4. S'appuyer sur un ministère pilote et stratège 39

TRAVAUX DE LA COMMISSION 41

ANNEXE : LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES 45

INTRODUCTION

Promesse tenue... Le milliard d'euros supplémentaire promis aux chercheurs est inscrit dans le projet de loi de finances pour 2005. Dans un contexte budgétaire difficile, le gouvernement démontre ainsi toute l'attention qu'il porte à la communauté des chercheurs et les ambitions qui sont les siennes dans un domaine dont la vitalité conditionne, à bien des titres, l'avenir de notre pays.

La recherche française est en effet à un carrefour. De toutes parts des réflexions sont en cours qui se proposent d'envisager l'avenir de la recherche dans le cadre du vaste débat qui précède la rédaction, par le gouvernement, du projet de loi attendu d'orientation et de programmation sur la recherche.

A partir de demain et jusqu'au 29 octobre, se tiendront à Grenoble les états généraux de la recherche d'où ressortiront les propositions de réforme de la communauté scientifique toute entière.

A l'Assemblée nationale, les travaux de la mission d'information sur la recherche publique et privée en France face au défi international se poursuivent.

Conscient de l'importance de l'enjeu - dans un monde soumis à une compétition, y compris scientifique, de plus en plus forte et où les progrès de la science sont plus que jamais source de compétitivité économique - et tout à la fois soucieux d'y répondre avec la célérité nécessaire sans anticiper sur le résultat des consultations en cours et sur le contenu de la future loi d'orientation et de programmation, le gouvernement répond au malaise exprimé par la communauté des chercheurs en revalorisant de manière considérable les crédits de la recherche et en dessinant, sans les figer, des perspectives d'avenir (création d'une Agence nationale pour la recherche et des pôles de compétitivité).

Face à un constat partagé par tous, le gouvernement, désireux d'assumer ses responsabilités tout en restant à l'écoute, trace ainsi le cap, mais, dans l'attente des propositions issues de la consultation, n'anticipe pas sur les contours à donner précisément à la réforme.

Le rapporteur pour avis salue la méthode. Il se félicite de l'augmentation des crédits alloués à la recherche (I) et entend apporter la contribution de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales au grand débat sur l'avenir du système de recherche français (II).

I.- UN BUDGET POUR L'AVENIR

Conformément aux engagements qui avaient été pris auprès de la communauté des chercheurs, les moyens de la recherche1 seront dotés d'un milliard d'euros supplémentaires en 2005. Cette décision s'inscrit dans la volonté affirmée du gouvernement d'augmenter, d'ici à 2007, de 3 milliards d'euros son soutien financier en faveur de la recherche publique et privée dans la perspective de s'approcher au plus près de l'objectif des 3 % du produit intérieur brut (PIB) consacrés à la recherche à l'horizon 2010, objectif adopté par les chefs d'Etat réunis en conseil européen à Barcelone en 2002.

A. UN MILLIARD D'EUROS SUPPLÉMENTAIRE POUR LA RECHERCHE

Cette manne est répartie selon trois parts quasi équivalentes entre l'augmentation du budget civil de recherche et développement (BCRD), la dotation d'une Agence nationale pour la recherche nouvellement créée et le renforcement des mesures de soutien à l'innovation.

1. La plus forte augmentation du budget civil de recherche et de développement depuis dix ans

L'année prochaine, 356 millions d'euros supplémentaires seront affectés au BCRD, ce qui constitue, en volume, la plus forte augmentation depuis dix ans et une progression annuelle de 4 % très supérieure à l'évolution du PIB.

Les crédits du ministère délégué à la recherche bénéficient au premier chef de la hausse des crédits avec une augmentation de plus de 263 millions d'euros. Les crédits destinés à l'effort de recherche du ministère de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche ainsi que ceux du ministère délégué à l'industrie croissent également de manière très significative.

La quasi-totalité de cette hausse (97 %) est destinée à renforcer les moyens financiers et humains des établissements publics scientifiques et technologiques (EPST), des établissements publics industriels et commerciaux (EPIC) et de la recherche universitaire, lesquels augmenteront, en moyenne, à un rythme deux fois supérieur à celui du BCRD.

L'augmentation du BCRD se traduit également par le renforcement ou la création de mesures destinées à rendre la recherche française plus attractive auprès des jeunes chercheurs : les moyens consacrés à la formation par et à la recherche sont en progression de 6,4 %, 4 000 allocations de recherche et 40 conventions industrielles de formation par la recherche (CIFRE) supplémentaires seront créées en 2005 et 2 millions d'euros seront destinés à mettre un terme à la pratique des « libéralités 2 » et à garantir aux jeunes doctorants une véritable couverture sociale. Enfin, afin de lutter contre la « fuite des cerveaux », 5 000 euros seront attribués, dans le cadre du programme « Initiative Post-doc », aux 100 meilleurs post-doctorants français en poste à l'étranger et candidats au retour en France dans le système national de recherche et d'enseignement supérieur.

Par ailleurs, le BCRD affirme la priorité donnée par le gouvernement, conformément aux orientations arrêtées lors de la dernière réunion du Conseil interministériel de la recherche scientifique et technologique (CIRST), à la recherche dans le domaine des sciences du vivant, avec notamment une forte progression des crédits de l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm), de l'Agence nationale de recherches sur le sida (ANRS) et de la subvention de l'Etat à l'Institut Pasteur.

Enfin, il amplifie encore l'effort en direction de l'innovation avec l'augmentation de 40 % des moyens budgétaires destinés au dispositif « Jeune entreprise innovante » qui rencontre un franc succès et la progression de 11 % des moyens d'engagement du Fonds de compétitivité des entreprises (hors produits des avances remboursables).

2. La création d'une Agence nationale pour la recherche

Autre point fort du projet de loi de finances pour 2005 dans le domaine de la recherche, la création d'une Agence nationale de la recherche (ANR) dotée, dès sa création, de 350 millions d'euros de crédits.

Conformément aux engagements pris par le Premier ministre, le 29 juin dernier, et faisant suite aux premiers éléments de convergences issus du grand débat sur la recherche, l'Agence nationale pour la recherche sera opérationnelle dès le 1er janvier 2005.

Véritable agence de moyens, sa mission consistera à soutenir, dans le cadre de la politique nationale de recherche, le développement des recherches fondamentale et appliquée, l'innovation et le partenariat entre le secteur public et le secteur privé par le financement de projets de recherche sélectionnés sur des critères d'excellence scientifique et technique. L'agence pourra également faire des dotations en capital à des fondations de recherche reconnues d'utilité publique.

Pour des raisons tenant aux règles budgétaires, le gouvernement a souhaité inscrire dans la loi le principe de la création d'une telle agence afin qu'elle puisse au plus vite devenir une réalité et disposer d'un financement. Toutefois, soucieux de respecter le temps du débat et de ne pas hypothéquer les conclusions des états généraux de la recherche et de la mission d'information parlementaire sur la recherche publique et privée en France face au défi international, il a renvoyé à plus tard les contours précis de son organisation.

Dans l'attente du vote du projet de loi d'orientation et de programmation sur la recherche, l'Agence nationale pour la recherche se présentera donc sous la forme juridique d'un groupement d'intérêt public (GIP) associant acteurs publics et privés de la recherche et doté, selon les vœux du gouvernement, d'une structure administrative légère.

Enfin, l'agence prendra, dès le 1er janvier 2005, le relais des actions incitatives conduits antérieurement au titre du Fonds de la recherche et de la technologie (FRT) et du Fonds national de la science (FNS). La continuité des actions en cours sera assurée puisque les engagements du FNS et du FRT pris jusqu'à fin 2004 seront couverts par des crédits inscrits au budget 2005.

3. Le soutien de l'innovation par des mesures fiscales

Troisième et dernier volet de l'effort exceptionnel consenti par le gouvernement à la recherche pour l'année 2005 : un ensemble de mesures fiscales pour une dépense globale s'élevant à 300 millions d'euros en crédits de paiement.

Ces mesures se déclinent selon trois orientations majeures. La première, et de loin la plus importante, est la progression des dépenses en faveur du crédit d'impôt-recherche pour un montant de 235 millions d'euros à la suite des améliorations qui ont été apportées au dispositif par l'article 87 de la loi de finances pour 2004.

Autre mesure fiscale proposée par le gouvernement dans le cadre du projet de loi de finances pour soutenir l'innovation, la réforme des fonds communs de placement dans l'innovation (FCPI) afin d'intégrer dans le dispositif les entreprises « médianes » (500 à 2 000 salariés).

Une des grandes faiblesses du dispositif de recherche française et l'une des causes de l'insuffisance de l'effort privé de recherche 3 dans notre pays est en effet la difficulté rencontrée par les petites entreprises innovantes françaises pour croître et devenir des acteurs majeurs de l'économie. Comme le montrent les travaux du Comité Richelieu 4, les Etats-Unis ont réussi - grâce à une législation spécifique, le Small business innovation research program (SBIR) de 1982 -, à permettre aux entreprises innovantes de se développer et d'opérer leur mutation en de grandes entreprises capables de devenir de véritables moteurs de la croissance du pays tout entier, sur le modèle de Microsoft. La réforme des FCPI ainsi que l'annonce, mardi 12 octobre dernier, d'un rapprochement au sein d'un holding de l'Agence française de l'innovation (ANVAR) et de la Banque du développement des petites et moyennes entreprises (BDPME), laquelle proposera, entre autres, « une action de mobilisation positive pour permettre aux PME d'accéder aux marchés publics 5 », sont autant de dispositions qui marquent la volonté du gouvernement d'agir avec détermination pour permettre aux PME d'atteindre la taille critique nécessaire à un positionnement international.

Enfin, dans le but de favoriser la constitution de pôles de compétitivité, le gouvernement propose d'exonérer d'impôt sur les bénéfices, de taxe professionnelle et de taxe foncière sur les propriétés bâties (sous réserve de la décision des collectivités locales), et d'alléger les cotisations sociales patronales pour les entreprises participant à un projet de recherche et développement (50 % pour les PME et 25 % pour les autres entreprises) dans l'un des pôles labellisés par le gouvernement. Cette mesure s'inscrit dans le droit fil des propositions formulées par le comité interministériel d'aménagement et de développement du territoire (CIADT) réuni pour la dernière fois le 14 septembre dernier lequel prônait la mise en place de « pôle de compétitivité » résultant de la « combinaison, sur un même territoire, de trois ingrédients : entreprises, centres de formation et unités de recherche » et permettant l'émergence de « trois facteurs décisifs : partenariat, innovation, visibilité internationale » 6. Un appel à proposition labellisera, dès le début de l'année prochaine, une première série de pôles dont les pouvoirs publics soutiendront activement le développement. Le gouvernement entend ainsi affirmer sa volonté de placer la France dans le peloton de tête de la recherche internationale et de maintenir la compétitivité économique de la nation.

B. LES DOTATIONS DES ORGANISMES DE RECHERCHE EN PROGRESSION

Si la mise en place de l'Agence nationale pour la recherche marque la volonté du gouvernement d'accentuer le financement de la recherche sur la base de projets et selon des critères d'excellence scientifique, l'augmentation d'un milliard d'euros de l'effort national en faveur de la recherche autorise une progression simultanée et substantielle des moyens dévolus au financement récurrent de la recherche. De sorte que les subventions adressées aux EPST et aux EPIC - hors Commissariat à l'énergie atomique (CEA) et Centre national d'études spatiales (CNES) - seront, pour l'année 2005, les plus importantes reçues par ces établissements au cours des quinze dernières années et seront en forte progression par rapport aux crédits 2004.

1. Les moyens des établissements publics scientifiques et technologiques

En 2005, l'ensemble des EPST, c'est-à-dire neuf établissements, verront leur subvention augmenter par rapport à son niveau de 2004. Plus remarquable encore, à l'exception du Laboratoire central des ponts et chaussées (LCPC), la subvention reçue par chacun de ces établissement atteindra, en dépenses ordinaires et crédits de paiement, son plus au niveau depuis quinze ans.

L'analyse des crédits par établissement traduit la volonté du gouvernement à la fois de raffermir globalement les capacités de la recherche française 7 et d'accentuer principalement les efforts en direction des thématiques prioritaires. C'est ainsi que les établissements qui voient leur subvention augmenter de la manière la plus substantielle sont ceux dont les activités concernent les sciences de la vie (Inserm, INRA, CNRS), les sciences et technologies de l'information et de la communication (INRIA) et l'énergie et le développement durable (INRETS).

L'emploi scientifique bénéfice également très largement de l'accroissement des moyens des EPST puisque le gouvernement s'engage à ce qu'en 2005 tous les emplois statutaires soient préservés. Compte tenu de la démographie des personnels en question, le taux de renouvellement dans les EPST se situera autour de 4 %.

En complément, le projet de loi de finances pour 2005 propose la création de 200 nouveaux postes d'accueil de haut niveau. Venant s'ajouter aux 235 recrutements opérés en 2004, cette mesure permettra d'accentuer la capacité des établissements à accueillir, sur la base de contrats à durée déterminée, des personnels étrangers de haut niveau dans des conditions attractives par rapport aux standards internationaux. Elle renforce en outre la politique d'accueil des établissements dans sa double dimension de formation par et à la recherche et de fertilisation croisée dans les échanges avec les partenaires scientifiques de la France.

Enfin, il est prévu de doubler le nombre des mesures de transformations d'emplois - dont la vocation est d'améliorer la fluidité des carrières et d'adapter les emplois à l'évolution des besoins des établissements -, et d'élargir (pour un montant de 0,4 million d'euros) le champ des bénéficiaires de l'indemnité pour fonctions d'intérêt collectif au CNRS et à l'Inserm.

2. Les moyens des établissements publics industriels et commerciaux

Avec une augmentation de 27,9 millions d'euros, les crédits des établissements publics industriels et commerciaux (EPIC) dont le financement dépend exclusivement des crédits du ministère délégué à la recherche sont également en forte croissance (plus 7,9 %) par rapport à l'année dernière. A l'exemple des EPST, tous les EPIC verront leur subvention augmenter.

Le soutien de base aux unités augmente plus vite encore, à un rythme de 10 %. Les 8,7 millions d'euros supplémentaires ainsi dégagés seront affectés prioritairement à la poursuite du plan de renouvellement de la flotte océanographique de l'Institut français de recherche pour l'exploitation de la mer (IFREMER), à la mise en service de la station polaire franco-italienne « Concordia » pour l'Institut polaire Paul-Emile Victor (IPEV)8 et à l'accompagnement des nouvelles interventions dévolues à l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME) dans le cadre du « plan climat ».

Si l'on tient compte des dotations budgétaires du Commissariat à l'énergie atomique (CEA) et du Centre national d'études spatiales (CNES), la progression des crédits des EPIC, quoique ralentie, se confirme puisque les deux établissements voient leur dotation également augmenter.

3. Les fondations et les institutions de recherche

Ni organismes publics de recherche, ni entreprises, certaines structures n'en constituent pas moins des acteurs privilégiés de la recherche française qui ont fait leur preuve ou dont la réussite est à encourager placés qu'ils sont à la confluence de la recherche sur les thématiques prioritaires définies par le gouvernement et de la volonté exprimée par ce même gouvernement de favoriser l'émergence de nouvelles structures associant plus étroitement acteurs publics et acteurs privés.

· L'Agence nationale de la recherche sur le sida

Créée en 1992, l'Agence nationale de la recherche sur le sida (ANRS) est une véritable agence de moyens constituée sous la forme juridique d'un groupement d'intérêt public dont la mission est d'animer, de coordonner et de financer l'ensemble des recherches sur le virus du sida. Constituant un modèle original, l'agence, dont la compétence est reconnu jusqu'aux Etats-Unis9, a vu ses prérogatives s'étendre, depuis le 1er janvier 1999, à l'animation et au financement de la recherche clinique, thérapeutique et en santé publique sur l'hépatite C, prérogatives encore élargies au début de cette année à l'ensemble des recherches sur les hépatites virales B et C. Afin que l'agence puisse assumer pleinement ses nouvelles compétences, le gouvernement a décidé d'augmenter de 5,4 %
- 2 millions d'euros en volume - ses moyens d'intervention pour les porter à 38,740 millions d'euros.

· L'Institut Pasteur

Animé du même souci de donner à la recherche les moyens de ses ambitions dans les domaines prioritaires, le gouvernement a décidé d'augmenter de 5,7 % la subvention de l'Etat à l'Institut Pasteur de Paris dont le montant s'élèvera désormais à 55,985 millions d'euros. Fondation privée à but non lucratif, l'institut a été créé par souscription nationale en 1887 à l'initiative de son fondateur, Louis Pasteur, dans le but de contribuer à la prévention et au traitement des maladies, en priorité infectieuses. Porteur d'un modèle original de recherche, associant recherche fondamentale et liens privilégiés avec l'industrie, il a été sauvé de la faillite en 1975 par l'intervention de la ministre de la santé, Mme Simone Veil, qui a décidé que l'Etat prendrait en charge 49 % du budget de l'institut, en valeur. Fort du développement des activités de l'institut et de ses ressources propres, la part de l'Etat est aujourd'hui retombée au tiers du budget. A l'heure où les menaces bactériologiques, aussi bien d'ordre naturel (SRAS10, grippe aviaire, etc.) que terroristes, deviennent malheureusement des éléments dont la politique de santé publique doit tenir compte, et au moment où l'institut étend encore son réseau international en Uruguay et en Chine (Hong-Kong et bientôt Shangaï)11, justifiant de la sorte son caractère d'instrument unique du rayonnement du savoir-faire de la recherche française dans le monde, il est naturel que le gouvernement accroisse le montant des crédits qu'il destine à l'institut.

· Les Fondations de recherche

Enfin, poursuivant sa volonté d'encourager le recours à de nouveaux modes de financement de la recherche, le gouvernement s'engage résolument en faveur de la création des « fondations de recherche ». En effet, force est de constater qu'au contraire de nos voisins les fondations sont encore très insuffisamment développées dans notre pays. D'ores et déjà, dix projets de fondations à caractère scientifique suivent une procédure de reconnaissance d'utilité publique12.

Adossées sur la réforme du régime juridique et fiscal des fondations mise en œuvre par la loi du 1er août 2003 relative au mécénat, aux associations et aux fondations, qui propose un nouveau statut-type de fondation d'utilité publique dotée d'un cadre fiscal incitatif, et plus particulièrement sur le statut type spécifique approuvé par le Conseil d'Etat en faveur des fondations à caractère scientifique ou des fondations de recherche, ces fondations ont vocation à mobiliser les ressources des particuliers ou des entreprises.

La création en loi de finances initiale pour 2004 d'un « fonds des priorités de la recherche », abondé, à hauteur de 150 millions d'euros, par les recettes de privatisation via le compte d'affectation spéciale des produits de cessions de titres, parts et droits de société, a parachevé le dispositif en permettant à l'Etat de doter ces fondations, lors de leur création, d'un capital à concurrence de l'apport d'origine privée ou, par la suite, d'accompagner de nouveaux projets de fondations existences qui mobilisent, pour les réaliser, de nouveaux moyens auprès de partenaires privés. Le soutien en capital de l'Etat pourra également émaner de l'Agence nationale pour la recherche nouvellement créée.

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L'article 49 de la loi organique du 1er août 2001 fixe une date butoir pour le retour des réponses aux questionnaires budgétaires : au plus tard huit jours francs à compter du dépôt du projet de loi de finances, soit le 9 octobre 2004.

A cette date, 23 réponses (29 %) des réponses étaient parvenues à votre rapporteur. Au jour de l'examen pour avis des crédits de la recherche pour 2005 par la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, le 26 octobre 2004, 19 questions (23 %) étaient demeurées sans réponses.

II.- RÉFLEXIONS SUR L'AVENIR DU SYSTÈME
DE RECHERCHE FRANÇAIS

Point n'est besoin de s'étendre longuement sur le malaise de la recherche française et la nécessité qu'il y a à mettre en place une réforme. Après le mouvement des chercheurs au début de l'année 2004, ce constat est désormais partagé par tous : communauté scientifique, opinion publique et pouvoir politique.

L'heure est désormais moins à l'analyse de ce qui est qu'à l'étude de ce qui doit être. Sur ce point, la seconde partie de ce rapport se veut une contribution au grand débat qui, des états généraux de la recherche à la mission d'information sur la recherche publique et privée en France face au défi internationale, constituée au sein de l'Assemblée nationale à l'initiative de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, irrigue le pays tout entier et doit aboutir, dans les prochaines semaines, à la présentation par le gouvernement d'un projet de loi d'orientation et de programmation de la recherche.

Le champ de la réforme est étendu et les axes de réflexion sont multiples : statut des chercheurs, organisation de la recherche publique, devenir des organismes publics de recherche, implication du secteur privé, etc. La matière est vaste, trop vaste, pour être embrassée d'un seul mouvement dans le cadre forcément limité de l'exercice de l'avis budgétaire.

C'est pourquoi, néanmoins soucieux d'apporter sa pierre à l'édifice et d'inscrire ce rapport dans l'actualité du monde de la recherche, le rapporteur pour avis a souhaité, dans la seconde partie de son développement, mettre l'accent sur deux points : d'une part, le pilotage et le processus décisionnel de la recherche publique française, d'autre part la place de l'université dans le dispositif de recherche français. Ces deux instruments majeurs de la politique de recherche sont en crise et concentrent une part importante des déficiences du système français 13. Comme l'illustre les propos lapidaires de MM. François Jacob, Philippe Kourilsky, Jean-Marie Lehn et Pierre-Louis Lions : « L'architecture du dispositif de recherche public est bancale. La centralisation est excessive. Les universités n'ont pas la possibilité de jouer un rôle suffisant. Il existe une confusion généralisée des rôles entre opérateurs et les agences de moyens. » 14

Désireux enfin d'inscrire sa démarche dans le cadre d'une politique ambitieuse - une recherche performante n'ayant de sens que lorsqu'elle vise à l'excellence - le rapporteur pour avis a ordonné sa réflexion en trois temps : le constat d'abord pour définir précisément les insuffisances du système (A) ; l'exemple ensuite pour comprendre les ressorts d'un dispositif dont les caractéristiques sont différentes du modèle français, dans le cas précis le système de recherche américain (B) ; les orientations enfin pour, fort du constat et, le cas échéant, des vertus de l'exemple, proposer de nouvelles orientations à la recherche française (C).

A. DE BAS EN HAUT, UN SYSTÈME MALADE

La déficience du pilotage de la recherche en France et la place insuffisante occupée par le système universitaire français dans le dispositif académique de recherche sont deux éléments qui reviennent sans cesse chez les observateurs du système de recherche français. Si les solutions à apporter diffèrent, le constat est partagé.

Accusée tour à tour, et parfois par les mêmes, de disposer tout à la fois d'un système de recherche trop centralisé et excessivement fragmenté, la France n'a plus les moyens, à elle seule, de s'engager sur une recherche tous azimuts. Notre pays, s'il souhaite maintenir au plus haut son niveau de performance, doit donc nécessairement opérer des choix clairs. Or cette capacité à développer des stratégies, à définir des priorités et à obtenir des résultats semble s'être émoussée avec le temps. Notre pays ne semble plus en mesure d'orienter sa recherche comme il l'a fait par le passé avec les grands programmes conduits par le général de Gaulle. A tous les niveaux, saupoudrage et doublons, semblent s'être substitués à la concentration des moyens et à l'efficacité.

1. Un pilote introuvable, une stratégie absente

La dispersion de la thématique de la recherche à l'intérieur de la structure gouvernementale peut se mesurer à l'aune de deux facteurs : le nombre de ministères contributeurs au BCRD et la multiplicité des tutelles ministérielles exercées sur les organismes publics de recherche.

Pas moins de seize ministères différents contribuent au financement du BCRD. Au nombre de ceux-ci, on compte, outre le ministère délégué à la recherche, sept ministères qui contribuent de manière significative à l'effort civil de recherche (pour un montant supérieur à 100 millions). Si le ministère délégué à la recherche demeure, et de loin, le premier contributeur avec une participation supérieure à 70 % de l'ensemble, il n'en demeure pas moins qu'une part importante du financement des actions en faveur de la recherche lui échappe.

Très logiquement, cette fragmentation budgétaire se retrouve au niveau des tutelles exercées par les ministères sur les organismes publics de recherche et ne constitue pas un élément de nature à simplifier la gestion administrative et la conduite stratégique de ces établissements.

Dans son rapport au Président de la République de 2003, la Cour des comptes avait déjà pointé la difficulté du ministère délégué à assumer son rôle de pilotage, estimant, selon les termes du rapport, « qu'à l'heure où la priorité est de permettre aux organismes de recherche et aux chercheurs français de prendre une place dans le nouvel espace européen de la recherche, la tête de réseau que doit constituer le ministère de la recherche ne dispose ni de l'autorité politique ni de l'efficacité nécessaire pour agir ». Poursuivant son raisonnement, la cour analysait les raisons de cette situation et mettait en avant le rôle des structures tout à la fois datées et instables.

De fait, l'organisation de la recherche publique en France est l'héritière des propositions avancées lors du colloque de Caen, en novembre 1956, qui constitue le terme d'une réflexion sur un projet global de développement scientifique initiée par Pierre Mendès France, Président du Conseil (juin 1954 - février 1955), mais dont il reviendra au général de Gaulle de mettre en œuvre les conclusions. Bien que le CNRS ait été créé en 1939, c'est du début de la Ve République que date le partage entre un gouvernement chargé, via un comité interministériel de la recherche scientifique et technique (CIRST) animé par une délégation générale (DGRST), de donner les grandes orientations de la politique de recherche publique et des établissements de recherche chargés de mettre en œuvre ces politiques.

Si un tel partage des rôles n'a jamais été remis en cause au cours des cinquante dernières années, les structures de pilotage de la recherche ont toutefois connu une très grande instabilité qui a nui à l'efficacité du dispositif tout entier en provoquant, selon les termes de la Cour des comptes, « une discontinuité dans l'action » et une « absorption par la gestion au détriment de l'orientation et de l'impulsion stratégiques ».

Ainsi, au fil des années, la dimension interministérielle de la recherche, affirmée avec force en 1958 avec la désignation d'un ministre délégué auprès du Premier ministre, s'est estompée. Dès le début des années 1970, le chef du gouvernement cesse de présider le comité interministériel de la recherche scientifique. En 1981, la nomination d'un ministre d'Etat, ministre de la recherche et de la technologie, si elle augmente le poids relatif du secteur de la recherche dans l'organigramme du Gouvernement en affirmant l'autonomie du secteur, entérine de fait la rupture avec la dimension interministérielle du portefeuille qui dès lors ne cessera de voir son influence décliner. En 1983, il est rattaché au ministère de l'industrie, puis, en 1986, au ministère de l'éducation nationale, avant d'être absorbé, en 1997, au sein d'un vaste ministère de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie pour retrouver depuis 2000 son existence de ministère délégué.

Tant et si bien que l'ensemble des acteurs de la recherche dénoncent aujourd'hui la faiblesse d'un ministère qui peine à s'imposer comme pilote stratégique et coordonnateur d'une politique de recherche cohérente. La dilution des responsabilités est telle qu'il devient difficile d'identifier précisément les interlocuteurs. La critique porte d'autant plus qu'elle est affirmée indépendamment des différentes personnes qui, tour à tour, ont occupé la fonction ministérielle et dont l'implication et la compétence ne sont jamais remises en cause.

Par-delà une répartition des compétences qui se fait à son détriment, le ministère délégué à la recherche est aussi privé, dans l'accomplissement de ses responsabilités, d'importants moyens d'action. Ainsi, comme le relève la Cour des comptes, « central au moment de la prévision, le ministère de la recherche est absent de l'exécution budgétaire du BCRD et n'est informé qu'a posteriori des mouvements de crédits affectant cet agrégat ». Dans l'incapacité de peser sur la mise en œuvre des politiques de recherche relevant des autres administrations, le ministère délégué à la recherche est contraint de voir son rôle de pilote stratégique se réduire comme peau de chagrin.

Ce rôle est d'autant plus faible que les circuits du processus décisionnel en matière de recherche, depuis la conception jusqu'à la mise en œuvre et le suivi des politiques, sont au mieux complexes et, au pire, inexistants, c'est-à-dire ne relevant d'aucune logique précise ni ne s'appuyant sur une quelconque légitimité. L'absence de réponse du ministère à la question posée sur ce point par le rapporteur pour avis, dans le cadre du traditionnel questionnaire budgétaire, est pour le moins éclairante. Les éléments apportés de vive voix par Mme Elisabeth Giacobino, directrice de la recherche au ministère délégué à la recherche, et son adjoint, M. Michel Eddi, lors de leur audition par le rapporteur pour avis, permettent de retracer les grandes lignes du dispositif actuel.

Aussi étonnant que cela puisse paraître, aussi bien du point de vue politique que scientifique et a fortiori dans un monde en mutation rapide, les priorités qui fondent la politique de la recherche française datent du 1er juin 1999, jour de la dernière réunion en date du CIRST présidé par le Premier ministre et dont c'est précisément la mission 15. Au passage, on remarque, d'une part, que le rôle du ministère délégué à la recherche dans la définition des orientations de la recherche publique est faible, et, d'autre part, que les priorités alors retenues - sciences du vivant, nouvelles technologies de l'information et de la communication, énergie et développement durable - sont des thématiques très larges pour ne pas dire floues.

Si l'on observe ensuite les moyens dont dispose le ministère délégué pour traduire la volonté politique ainsi exprimée dans les faits, le constat n'est guère plus encourageant.

Conséquences du caractère duale de la recherche académique française, partagée entre les organismes publics de recherche et les universités, trois éléments sont ici à distinguer.

En direction des organismes de recherche, le ministre délégué procède par instructions aux établissements dont il a la tutelle. Il veille également à ce que le contrat d'objectifs, qui lie désormais les organismes à l'Etat, mentionne expressément les orientations décidées. Néanmoins, à l'exception du cas de l'INRIA qui est lié avec l'Etat par un contrat d'objectifs et de moyens, il n'y a pas véritablement dans les autres EPST de corrélation évidente entre le surcroît éventuel de ressources apportés par l'Etat dans le but de poursuivre des recherches sur des thèmes précis et une affectation effective des crédits à ce type de recherche. En effet, doté d'une personnalité juridique propre, ces établissements définissent eux-mêmes leurs budgets et in fine c'est le conseil d'administration - où figure le (ou les) ministère(s) de tutelles - de ces établissements qui décide de l'affectation des ressources. Bien que les établissements veillent à prendre en compte les recommandations du ministère délégué, la marge est étroite. Elle l'est d'autant plus que la part des crédits « incitatifs » n'excède pas en moyenne 10 % des financements publics alloués à ces établissements 16.

Le processus est différent pour ce qui concerne les universités, lesquelles ne disposent pas de budget global puisque les dépenses correspondant à la rémunération des agents de l'Etat sont directement prises en charge par le ministère de l'éducation nationale. Au contraire des organismes à qui le ministère délègue la gestion des crédits qui leur sont affectés, le financement de la recherche universitaire s'effectue directement au niveau de chercheurs selon des contrats d'une durée de quatre ans, terme à partir duquel les projets sont évalués soit par les structures d'évaluation dans le cas des unités mixte de recherche (UMR) 17, soit par la mission scientifique, technique et pédagogique (MSTP), évaluation qui servira de base pour décider de l'attribution des financements dans le futur. La méthode est réellement sélective puisque l'amplitude des crédits reçus par les équipes peut varier de un à trois en fonction de la pertinence du projet et qu'une part significative des projets transmis ne reçoivent aucun financement 18. Si ce processus demeure une démarche de type bottom-up 19 et que le ministère délégué est donc tributaire des projets qui lui sont transmis, il n'en demeure pas moins que ces derniers tendent à reprendre les priorités définies par le gouvernement de façon à accroître les chances d'obtenir un financement.

Enfin, l'outil privilégié d'orientation de la recherche par le ministère est constitué par les financements incitatifs jusqu'alors regroupés dans deux fonds distincts : le Fonds de la recherche et de la technique (FRT) et le Fonds national de la science (FNS) 20 qui sont indifféremment destinés aux organismes de recherche et aux universités et dont les financements sont attribués selon des procédures d'appel d'offre. Outils budgétaires et stratégiques les plus réactifs, ils sont aussi les moins pourvus et donc insuffisants pour développer des programmes d'envergure. Avec des autorisations de programme inscrites en loi de finances initiale pour 2004 de 197 millions d'euros pour le FRT et de 137 millions d'euros pour le FNS, crédits portés à 350 millions d'euros pour l'année 2005 dans le cadre de la nouvelle ANR, la marge de manœuvre du ministère est limitée même s'il ne faut pas mésestimer l'effet de levier de ces financements 21. En effet, malgré leur masse importante et leur forte croissance, ces crédits ne représentent que 3,8 % de l'effort public de recherche et pèsent de peu de poids face aux crédits récurrents des organismes de recherche 22 que le ministère délègue immédiatement à leurs destinataires qui en assurent eux-mêmes la gestion dans le cadre du contrat d'objectif signé avec l'Etat.

Sans entrer dans le débat sur l'opportunité même de ces crédits qui s'opposent aux crédits récurrents destinés à financer les organismes de recherche et sur lequel on reviendra plus loin, force est de constater qu'ils ne permettent pas le développement d'une politique ambitieuse et suivie d'orientation de la recherche par le ministère. Leur trop courte « durée de vie », laquelle n'excède pas quatre ans, soit une durée très inférieure à la plupart des programmes de recherche, une gestion excessivement centralisée, le fait qu'en définitive, les équipes des EPST sont les principales bénéficiaires de ces aides et l'absence d'évaluation sérieuse des recherches menées au moyen de ces crédits, sont autant d'éléments supplémentaires dénoncés par la Cour des comptes pour mettre en doute l'efficacité des actions incitatives telles qu'elles ont été menées jusqu'à aujourd'hui.

Au final, le ministère délégué à la recherche agit, pour l'essentiel, comme une « gare de transit » qui reçoit des crédits pour les redistribuer aussitôt vers tel ou tel organisme en sachant que la clé de répartition lui échappe pour une large part. Et pour les crédits dont la vocation est précisément d'orienter la recherche, ils sont à la fois insuffisants et empruntent des voies souvent complexes pour parvenir à destination. Ainsi, une unité mixte de recherche associant l'université et un EPST peut-elle recevoir des crédits incitatifs par trois canaux différents. Et si la Cour des comptes a dénoncé l'excessive centralisation du système de recherche français et la tendance du ministère à confondre la tutelle qu'il exerce sur les organismes avec un pouvoir hiérarchique, il apparaît que cette concentration des attributions ne s'est pas traduite par une plus grande lisibilité de la politique de la recherche. Bien au contraire, celle-ci est à l'image de la lecture du « bleu » budgétaire Recherche : absconse.

Certes, l'agrégat n° 11 figurant dans ce fascicule récapitule les moyens alloués sur les neuf thématiques prioritaires - auxquelles s'ajoute une catégorie « fourre-tout » - définies par le comité interministériel de la recherche scientifique et technologique (CIRST) 23. Mais, outre que le mode de calcul de cet agrégat est sujet à critique en ce qu'il reprend les frontières des organismes de recherche - et, pour les organismes pluridisciplinaires, de type CNRS ou CEA, les frontières des différents services internes par discipline -, plus qu'il ne s'appuie sur la réalité des thématiques étudiées, il regroupe des sujets de recherche trop vastes pour devenir des éléments d'une politique fédératrice en faveur de la recherche.

Ainsi, les crédits mobilisés pour la lutte contre le cancer, désignée priorité nationale par le Chef de l'Etat, n'apparaissent pas dans ce tableau et, de fait, ne sont pas disponibles. Cela est symptomatique de l'organisation actuelle de la recherche et dommageable à plus d'un titre : d'une part, parce qu'il est ainsi difficile de suivre dans sa nécessaire continuité la réalisation de l'action politique ; d'autre part, parce que présentés de telle sorte, ces chiffres ne traduisent que très imparfaitement les priorités et les objectifs de l'action publique en matière de recherche et ne permettent pas de mobiliser la population autour de problématiques bien délimitées, les seules susceptibles de devenir fédératrices.

Or, dans un contexte de méfiance de l'opinion publique en direction des progrès de la science, souvent envisagés, en raison de l'actualité récente (maladie de Creutzfeldt-Jakob, sang contaminé, vaccin contre l'hépatite B, incertitude sur l'innocuité des OGM, etc.), comme une menace plutôt que comme la promesse d'un avenir meilleur, il est nécessaire de réussir à associer plus étroitement la population aux travaux de chercheurs lesquels ont bien souvent la douloureuse impression d'être rejetés par elle tandis qu'ils travaillent précisément à son bien-être. Un des moyens de lever cette contradiction est précisément de mieux identifier les orientations de la politique publique de recherche et de rendre lisible le processus aboutissant à la définition des priorités nationales de recherche afin que chaque Français se sente associé à ce qui doit être une œuvre collective.

Un tel projet, qui avait trouvé son accomplissement durant la présidence du général de Gaulle avec la mise en place, sous l'impulsion de la DGRST présidée par le Premier ministre, de grands programmes de recherche, clairement identifiés et menés à bien - plan calcul, politique d'indépendance énergétique, politique aéronautique, etc. - semble s'être étiolé au fur et à mesure des vicissitudes du portefeuille de la recherche dans l'organigramme ministériel 24.

Dernier exemple, la prolifération des conseils scientifiques - dont la nécessaire existence n'est pas en cause, puisque la matière devenant de plus en plus complexe à mesure que la science progresse, il s'avère nécessaire que le ministre soit entouré d'experts capables de le conseiller scientifiquement dans ses choix - témoigne de la dilution de la définition et du suivi des politiques de recherche. D'un seul conseil 25 composé de douze scientifiques placé auprès du Premier ministre au début de la Ve République, on est aujourd'hui passé à pas moins de treize structures à vocation plus ou moins pluridisciplinaires 26. Il n'est pas certain que l'inflation du nombre de ces instances de conseils, placées auprès d'un ministre dont le poids dans le dispositif gouvernemental et l'autorité sur les organismes de recherche dont il a la tutelle sont pour le moins insuffisants, soit de nature à éclairer les décisions à prendre.

Au final en effet, est-il plus facile aujourd'hui qu'hier pour le citoyen - et pour les parlementaires - de connaître les priorités de la recherche française, d'être informé des motifs qui ont conduit à choisir celles-ci plutôt que d'autres, du financement qui est alloué à leur réalisation et du calendrier retenu pour leur mise en œuvre ?

2. L'université, parent pauvre de la recherche française

A l'autre extrémité du dispositif, l'université est l'autre corps malade de la recherche française. La relative faiblesse de l'institution en matière de recherche ne date pas d'hier. Elle s'inscrit en fait dans une longue histoire dont le marqueur essentiel est, après l'initiation du système des grandes écoles sous l'ère révolutionnaire 27, la création, à l'aube de la Seconde Guerre mondiale, du CNRS 28 destiné à suppléer les carences d'une université jugée, à l'époque, comme n'étant pas capable de mener à bien une recherche performante. Elle se prolonge ensuite avec la massification de l'enseignement supérieur qui conduit l'université à privilégier sa fonction d'enseignement au détriment de ses activités de recherche.

Dans ce contexte, l'annonce dans la presse, en mars dernier, du classement des cinq cents meilleures universités du monde établi par l'université Jiao Tong de Shangaï a fait l'effet d'un coup de semonce. La France n'apparaissait qu'à la 65e position avec l'université Pierre-et-Marie Curie (Paris VI), puis à la 72e position avec l'université d'Orsay (Paris XI), ne plaçant que ces deux établissements parmi les cent meilleures universités du monde.

Si l'on peut légitimement s'interroger sur la pertinence des critères, au nombre de cinq, retenus pour l'établissement de ce classement 29 - en évoquant par exemple le fait qu'ils accordent une place excessive aux sciences du vivant sur les mathématiques par exemple 30 -, il n'en demeure pas moins que celui-ci donne une idée de la place de l'université française sur la scène mondiale et qu'a défaut d'offrir une photographie exacte de la réalité il agit comme un révélateur.

Ainsi, si le classement entérine sans réelle surprise l'écrasante domination des universités américaines que l'on retrouve aux quatre premières places 31 et figurent au nombre de huit dans les dix premières, le lecteur non averti sera sans doute plus surpris de constater que cinq universités britanniques devancent la première université française ou que des pays comme le Japon, l'Allemagne, le Canada, la Grande-Bretagne encore, la Suisse, la Suède, les Pays-Bas placent plus d'établissements supérieurs parmi les cent premiers mondiaux que la France. Toutes réserves faites sur la méthode choisie pour établir ce classement, une telle position de la France ne laisse pas que d'étonner sinon que d'alarmer. Et la nouvelle mouture du classement chinois, qui fait faire aux universités françaises un sérieux bond en avant - l'université Pierre-et-Marie Curie (Paris VI) passant de la 65e à la 41e place, l'université d'Orsay (Paris XI) avançant de la 72e à la 48e place tandis que deux autres institutions françaises font leur entrée parmi les 100 meilleurs établissements du monde : l'université Strasbourg I (82e place) et l'Ecole normale supérieure de Paris (85e place) 32 - ne doit pas faire illusion.

Dans un contexte de concurrence intellectuelle et scientifique de plus en plus exacerbée au niveau mondial - il n'est pas anodin de constater que le classement en question n'émane pas d'une université européenne, ni nord-américaine, mais asiatique et précisément chinoise - la France a de plus en plus de mal à affirmer son rang en matière de recherche. Cela est d'autant plus alarmant que de nouveaux acteurs de la recherche (la Chine et l'Inde) émergent sur la scène internationale qui, compte tenu de leur poids démographique et de leur dynamisme économique et scientifique, sont appelés dans ce secteur comme dans d'autres à devenir des acteurs majeurs et incontournables dans les années à venir 33. Autre motif d'inquiétude, compte tenu de sa position perfectible sur la place européenne2, la France ne manquera pas de rencontrer des difficultés pour attirer des étudiants issus des pays de l'Union européenne voire pour retenir les étudiants français dans « un espace européen de l'enseignement supérieur et de la recherche » de plus en plus ouvert avec la généralisation du modèle LMD (Licence Master Doctorat). Avec 13 universités parmi les 100 meilleures européennes, la France occupe un rang qui n'est même pas conforme à sa démographie. A titre de comparaison, dans ce même classement, les universités britanniques occupent les quatre premières places et figurent au nombre de 29, l'Allemagne placent 27 de ses universités et les Pays-Bas 10. M. Bernard-Pierre Roques, professeur à l'université René Descartes (Paris V), auditionné par le rapporteur pour avis, n'hésite pas à affirmer « qu'aucun étudiant étranger n'aspire à faire ses études scientifiques en France. »

On pourrait ne pas s'en émouvoir et, en considérant que les structures importent moins que les résultats, estimer qu'il importe peu que la recherche universitaire n'occupe qu'une place limitée dans le dispositif de recherche académique tant que la recherche dans les organismes est performante. Le classement de l'université de Shangaï vient à point nommer balayer une telle analyse en démontrant qu'il est au moins aussi important d'être performant que de le faire savoir et d'être reconnu comme tel dans le monde entier. On n'attire pas autrement les talents comme le montre l'exemple des Etats-Unis. Et il ne fait pas de doute que le morcellement de la recherche académique française, dispersée entre les organismes de recherche, l'université et les grandes écoles, eux-mêmes fragmentés en de très nombreuses structures, nuit à la compétitivité de la recherche française toute entière 34, surtout lorsque que sur la scène internationale l'université est l'unité de base et la référence en matière de recherche académique. Sur ce point, le modèle anglo-saxon du campus, c'est-à-dire d'une université centre autour de laquelle s'agrégent laboratoires et entreprises et qui donne son nom à l'ensemble, est la règle.

Deux enseignements majeurs peuvent être tirés de ce classement. D'une part les universités françaises n'ont pas atteint une taille suffisante pour s'affirmer sur la scène internationale. Quatre-vingt-deux universités et assimilées pour la seule France métropolitaine, c'est assurément beaucoup, surtout lorsque l'on sait que tous ces établissements exercent des activités de recherche, à des niveaux, il est vrai, très inégaux. D'autre part les grandes écoles parce qu'elles renvoient à une réalité trop spécifiquement française, incomprise de nos partenaires étrangers, n'obtiennent pas sur la scène internationale la visibilité et le prestige qui leur est reconnu sur notre territoire par nos compatriotes. On touche ici à la fois à une forme de paradoxe et à la racine même du mal de l'université française. Tiraillée entre les grands organismes de recherche et les grandes écoles, l'université cède ses forces vives.

D'un côté, il ne fait pas de doute que le prestige des grandes écoles, assis sur la possibilité pour ces établissements de sélectionner les élèves qu'ils recrutent, les place en position de force face à des universités qui ont pour mission d'accueillir l'ensemble des titulaires du baccalauréat 35. Les effectifs du premier cycle pèsent ainsi d'un poids très lourd - 47,4 % en moyenne 36 - dans l'effectif global des universités et expliquent pour une large part le déséquilibre important constaté entre l'effort de recherche des universités et les sommes consacrées à leur mission d'enseignement en faveur de cette dernière. Ainsi, selon des données recueillies auprès du ministère de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, la part du « budget » des universités 37 consacrée aux activités de recherche, pour les exemples transmis, se situe-t-elle, hors rémunération des agents de l'Etat, autour de 20 % pour les universités scientifiques et technologiques et n'excède pas les 10 % pour les universités dispensant des enseignements de droit et de sciences humaines 38. En valeur, l'échantillon dont le rapporteur pour avis a pu disposer montre que le budget de recherche le plus important, celui de l'université de Rennes I (université regroupant notamment des enseignements de sciences et de santé) est de 19,5 millions d'euros 39 tandis que le plus important budget d'une université en droit et sciences humaines est celui de l'université Panthéon-Sorbonne (Paris I), laquelle, alors qu'elle est l'université qui accueille le plus grand nombre d'étudiants toutes disciplines confondues (38 473), ne consacre que 7,4 millions d'euros à l'activité de recherche 40. On est bien loin ici des sommes dépensées pour la recherche par les plus grandes universités américaines ou, plus près de nous, des budgets de beaucoup d'organismes de recherche, même si, en la matière, toute tentative de comparaison doit être maniée avec la plus extrême prudence dans la mesure où les chiffres recouvrent des réalités différentes et où les données relatives aux universités françaises ne tiennent pas compte des frais de personnel qui, en France comme à l'étranger, constituent le poste budgétaire le plus important. Toujours est-il qu'à la lumière de ces éléments l'écart à combler pour la recherche universitaire française reste conséquent. En effet malgré un effort considérable, avec une hausse de 11 %, les crédits de la recherche universitaire s'élèveront à 554 millions d'euros en 2005.

Enfin, le fait que des directeurs d'unités mixtes de recherche français associant des grands organismes publics de recherche, tel que le CNRS par exemple, et une université, préfèrent - pour des raisons de « prestige » -, lorsqu'ils publient les résultats de leurs travaux dans des revues scientifiques internationales, signer de leurs fonctions au CNRS plutôt que de leur titre universitaire n'aboutit qu'à brouiller un peu plus le message, à rendre le système français peu lisible à l'étranger, et constitue une des raisons avancées du classement décevant des universités françaises 41.

Tout évidemment n'est pas question d'image et façon de présenter les choses. D'autres éléments concourent également à placer l'université française dans une position difficile. Citons pêle-mêle : l'absence de budget global des universités qui les prive d'une réelle autonomie de gestion et d'un outil stratégique de développement, des structures de direction favorisant l'endogamie plutôt que la mise en œuvre d'une véritable politique d'établissement, un système d'évaluation des personnels de recherche perfectible, un statut d'enseignant-chercheur trop rigide n'autorisant pas assez de flexibilité entre les différentes missions des personnels, une valorisation insuffisante des produits de la recherche universitaire, des règles de gestion administrative tatillonnes et inadaptées à la nécessaire réactivité de la recherche et ne permettant pas de rémunérer à leur juste valeur les meilleurs enseignants-chercheurs, etc.

Ces éléments, pour pénalisants qu'ils puissent apparaître, ne doivent cependant pas aboutir à condamner un système universitaire qui a su relever le défi de la massification de l'enseignement supérieur, le nombre des étudiants à l'université passant de 660 000 en 1970 à 1 470 000 en 1995 pour se stabiliser depuis. L'université doit au contraire saisir l'opportunité du retournement démographique pour devenir le fer de lance de la recherche française. Dans cette perspective, l'analyse d'un modèle extérieur de recherche, dans lequel l'université occupe une place centrale, enviable et enviée, n'est pas inutile.

B. ENTRE MYTHES ET RÉALITÉS, QUELLES LEÇONS TIRER DE L'ÉTUDE D'UN MODÈLE ÉTRANGER POUR NOURRIR LA RÉFLEXION SUR LA RÉFORME DU SYSTÈME DE RECHERCHE FRANÇAIS ?

Mirage ou réalité, le rêve américain fonctionne à plein pour de nombreux chercheurs qui voient dans les Etats-Unis un « paradis » où toutes leurs initiatives seraient financées et couronnées de succès. La récente attribution des prix Nobel n'est certes pas de nature à inverser la tendance. A l'exception des prix Nobel de littérature et de la paix, sept des dix prix décernés cette année par l'académie suédoise l'ont été à des Américains auxquels il faut ajouter un huitième prix décerné à M. Finn E. Kydland, de nationalité norvégienne mais travaillant aux Etats-Unis 42. Qu'il s'agisse des prix Nobel de physique, de chimie, de médecine ou d'économie, aucun n'a échappé, du moins en partie, aux Américains. Autre élément à porter au crédit de la réussite américaine en matière de recherche : dix-sept parmi les vingt premières universités du classement des meilleures universités du monde établi par l'université Jiao Tong de Shangaï sont américaines. Et si les Etats-Unis ne sont pas le pays qui consacre la part la plus importante de son PIB à l'effort de recherche 43, ils sont en revanche servis, en raison du fossé démographique qui les séparent de la France, par un effet de masse qui leur permet de se positionner comme le pays qui investit le plus dans ce domaine avec, pour l'année 2002, une dépense évaluée à 290 milliards de dollars dont près des deux tiers sont assurés par les entreprises 44. Ainsi, selon les données fournies par l'OCDE, les Etats-Unis effectuent environ 37 % de la dépense totale mondiale en recherche et développement, devançant ainsi largement l'Union européenne (25 %), le Japon (14 %), la Chine (10 %) et la France (5 %). Enfin, il faut avoir présent à l'esprit que plus de la moitié de l'effort de recherche public américain (52 %) est consacré à la recherche militaire.

Ces précautions sur la validité et la pertinence d'une analyse comparative rappelées, le rapporteur pour avis, a cru opportun, au moment où vont se décider les évolutions du système de recherche français pour les années à venir, d'étudier le système de recherche qui obtient, à ce jour, les meilleurs résultats sur la scène internationale et ce afin d'y puiser, le cas échéant, des exemples à suivre 45. Car s'il ne fait pas de doute que l'effort français de recherche n'atteindra jamais, en masse, l'effort de recherche américain - sur ce point, l'échelon européen est seul de taille à rivaliser avec les Etats-Unis -, il appartient en revanche au système français de se donner les moyens de ses ambitions en terme d'organisation. Assurément, le modèle américain de recherche ne constitue pas nécessairement « le » modèle à suivre mais ses performances autorisent qu'on le considère comme une source d'inspiration légitime.

1. Le pilotage atypique du système américain de recherche

Identique en ceci au modèle français, le modèle américain de recherche est l'héritier d'une tradition et d'un système, respectivement libérale et décentralisé. Il s'oriente autour de trois pôles principaux : le gouvernement fédéral, l'université et le secteur privé.

Contrairement à la France, les Etats-Unis ne disposent pas de ministère de la recherche. La direction fédérale de la recherche est assurée par l'Office of science and technology policy 46 lequel fait partie de l'Executive office de la Maison Blanche 47. A ce titre, le directeur de l'office est le conseiller pour la science du Président des Etats-Unis quoiqu'il n'ait pas rang de Cabinet member 48. Le rôle de cet office est important puisqu'il a en charge la coordination de l'action du gouvernement et la préparation du budget proposé par le Président au vote du Congrès. Il donne ainsi les grandes orientations de la recherche conformément aux vœux présidentiels et sous réserve que le Congrès accepte les orientations ainsi arrêtées 49.

L'analyse du budget fédéral en recherche et développement pour 2004 montre que, dans une conjoncture où le Président dispose de la majorité au Congrès, celui-ci imprime véritablement sa marque à la politique de recherche du pays. Ainsi, conformément aux vœux de l'administration Bush, le budget fédéral de la recherche pour l'année 2004 a été en forte croissance par rapport à l'année 2003 (plus 9,5 % pour atteindre 127 milliards de dollars 50) et les domaines qui ont le plus bénéficié de cet effort sont, dans la droite ligne des orientations souhaitées par la Maison-Blanche, la défense et la sécurité déclarées, dans le contexte de l'après 11 septembre, priorités nationales.

L'unicité de la source de décision permet une traduction quasi immédiate du discours présidentiel dans les faits. Cela est aussi permis par une autre originalité du dispositif américain : l'existence, au niveau fédéral, d'agences indépendantes ou de départements qui constituent ou bien directement les opérateurs de la recherche ou bien, dans la majorité des cas, les interfaces entre le gouvernement et les laboratoires à charge pour elles de distribuer les fonds fédéraux de façon à optimiser les objectifs de recherche.

Eléments centraux du dispositif de recherche américain, les agences, - les plus connues sont la National science foundation (NSF), la NASA (National aeronautics and space administration) ou les National institutes of health (NIH) -, sont également les structures qui suscitent une grande curiosité chez ceux qui s'interrogent sur les évolutions du système français de recherche.

Encore faut-il connaître précisément le rôle de ces agences. Contrairement à une idée relativement répandue, toutes les agences, à l'exception de la NSF, disposent de leurs propres laboratoires de recherche 51. Ainsi, le budget qu'elles ont la charge d'exécuter l'est en partie par leurs propres chercheurs comme cela est le cas en France avec les organismes de recherche de type CNRS ou Inserm. Cette endogamie est toutefois à relativiser. L'exemple des NIH, qui disposent, parmi les agences américaines, du plus gros budget derrière le département de la défense avec, pour l'année 2005, une dotation s'élevant à 28,6 milliards de dollars, attribuent 90 % des sommes qu'elle reçoit à des chercheurs « extra-muros ». Ainsi, si les agences américaines s'avèrent avoir, à l'exemple de certains organismes français, tel que l'Inserm, une fonction duale - agence de moyens et opérateurs de recherche -, du moins opèrent-elles à front renversé puisqu'aux Etats-Unis, c'est bien la fonction d'agence de moyens qui prédomine sur la fonction d'opérateur.

D'autre part, si les agences jouent indéniablement un rôle important dans le dispositif de recherche américain, il n'en demeure pas moins que plus de la moitié du budget recherche et développement des Etats-Unis est directement géré par l'administration fédérale, au niveau des ministères.

Ainsi, le department of defense (ministère de la défense) dispose-t-il, à lui seul, de plus de la moitié du budget de la recherche américaine 52. et le department of energy (ministère de l'énergie) était, en 2004, doté de 8,7 milliards de dollars pour développer notamment les recherches nucléaires (militaires et civiles) du pays. Si certains de ces départements ministériels disposent également de leurs propres laboratoires où sont installés la plupart des grands équipements de recherche américains 53, in fine, la majeure partie des financements fédéraux (70 %) sont redistribués vers les entreprises industrielles et les universités, ces dernières bénéficiant de l'essentiel de la manne.

En effet, tous secteurs d'activité confondus, les entreprises financent sur leurs fonds propres 90 % de la recherche et développement qu'elles effectuent. Pour le reste, elles bénéficient, à hauteur d'environ 20 milliards de dollars par an, du soutien financier fédéral, sachant que ces aides sont concentrées sur un très petit nombre de secteurs parmi lesquels l'industrie aérospatiale de défense. Le reste des ressources fédérales est affecté aux universités au point que 60 % des dépenses de recherche et développement des universités américaines sont financées par le gouvernement fédéral.

2. L'université au cœur du système de recherche américain

Ainsi, contrairement à une idée couramment répandue, le principal contributeur de la recherche universitaire américaine n'est pas l'entreprise mais bien l'Etat au sens large du terme, fédéré et fédéral, puisque, en moyenne, la part des ressources publiques dans l'effort universitaire de recherche est de 67,5 % 54, très loin devant les ressources propres des universités 55 (20 %) et les contrats de recherche des entreprises (7,5 %) 56.

De la même façon, et quoiqu'une des grandes forces du système américain de recherche soit effectivement la très grande proximité existant entre les universités et le secteur industriel et commercial, plus des deux tiers (69 %) des recherches menées dans le cadre universitaire sont orientées vers la recherche fondamentale. De sorte que le secteur universitaire contribue pour près de la moitié (43 %) à la dépense nationale en recherche fondamentale.

Enfin, le poids des ressources liées à la valorisation des transferts de technologie dans le budget des universités est relativement faible. Sur l'année 2002, les universités américaines ont déposé 2 % des brevets déposés aux Etats-Unis et le produit de ces derniers n'a constitué que 3 % de leurs budgets en recherche et développement 57.

Cela posé, il convient de relever deux aspects importants du système universitaire de recherche américain qui le différencient profondément du modèle français.

D'une part, contrairement aux universités françaises qui ont toutes vocation à exercer des activités de recherche, seule une fraction relativement faible des établissements d'enseignement supérieur américains assure cette mission. En effet, seuls 6 % des 4 000 établissements supérieurs que comptent les Etats-Unis, soit un peu plus de 200, proposent à leurs étudiants des études doctorales et disposent de laboratoires de recherche de haut niveau 58. Autre chiffre très éclairant, 96 % des crédits fédéraux attribués à la recherche et développement académique sont concentrés sur les établissements les mieux dotés. Les meilleurs établissements reçoivent ainsi des subventions fédérales de l'ordre de 500 millions de dollars par an. Il y a donc très clairement, de la part des autorités américaines, une volonté de concentrer les moyens sur les universités jugées les plus performantes, indépendamment de leur statut, public ou privé. Cela explique en grande partie les moyens considérables dont disposent certaines d'entre elles 59 et le classement flatteur qu'elles occupent sur la scène internationale. Ce à quoi il faut encore ajouter le capital des fondations (endowment) des universités privées qui s'élève pour la plus importante d'entre elles, Harvard, à plus de 19 milliards de dollars soit un montant très largement supérieur à la dépense totale annuelle des financeurs finals des établissements d'enseignement supérieur public français qui s'élève à un peu plus de 10 milliards d'euros 60.

L'autre originalité du financement des universités américaines tient aux modalités d'attribution des crédits. Contrairement aux universités françaises, dans lesquelles les crédits (hors les personnels qui sont rémunérés directement par l'Etat) sont attribués - pour ce qui regarde l'enseignement - par université et selon une clé de répartition où le nombre d'élèves accueillis par l'établissement constitue l'élément déterminant, et - pour ce qui concerne la recherche -, essentiellement aux équipes de recherche en fonction de la pertinence de leur projet 61, 78 % des crédits fédéraux attribués aux universités le sont par le moyen de subventions individuelles (grants) aux enseignants-chercheurs 62.

C'est ainsi qu'en 2002, plus de 108 000 subventions individuelles ont été attribuées à un responsable de projet, ou principal investigator, selon des procédures d'appels d'offre, très largement ouvertes, dont le cahier des charges a été établi par un organisme fédéral, agence ou département ministériel, en fonction des objectifs à atteindre. Une fois la subvention attribuée, après une procédure de choix qui a sollicité l'avis de très nombreux experts 63, l'Etat fédéral n'assure qu'une évaluation scientifique a posteriori. Il laisse au responsable la libre conduite scientifique et administrative du projet et cède à l'institution attributaire des fonds les droits de propriété intellectuelle 64.

De sorte que, quoiqu'il soit exact, « qu'une des caractéristiques du système américain de recherche est son pluralisme 65 », comme l'affirme une étude récente de l'OCDE sur la gouvernance de la recherche publique américaine qui s'achève sur ces mots, le gouvernement fédéral américain dispose des moyens lui permettant d'orienter véritablement la recherche académique et de se comporter en pilote stratégique de la recherche fondamentale.

Les modalités retenues pour l'attribution des crédits permettent en effet une allocation efficace des moyens en terme d'objectif à atteindre et de choix des compétences pour y parvenir sans toutefois remettre en cause l'autonomie des universités. Celles-ci maintiennent leur capacité à définir elles-mêmes leur politique de recherche via le recrutement des chercheurs. Le système est ainsi fait qu'il conduit également à privilégier un recrutement de grande qualité dans la mesure où les chercheurs sont les premiers pourvoyeurs de fonds pour le budget de recherche de l'université.

Au final et comme n'hésite pas à l'affirmer le Dr. Charles Wessner, directeur de la technologie et de l'innovation aux National academies américaines, « les meilleurs chercheurs ne sont pas américains mais le système américain permet d'attirer vers lui les meilleurs chercheurs du monde 66 ». La place qu'occupent actuellement les Etats-Unis dans le haut du classement mondial est donc, pour beaucoup, non pas liée à la qualité intrinsèque de ses propres chercheurs mais à sa capacité à attirer les talents du monde entier. Il est en effet éclairant de constater que plus de la moitié des post-doctorants (55 %) qui travaillent dans les institutions académiques de recherche américaines sont étrangers 67. De la même façon, le désintérêt des jeunes pour les carrières scientifiques est un phénomène qui existe aux Etats-Unis comme en France, avec une ampleur plus grande encore outre-atlantique 68, et se nourrit, en partie, des mêmes causes : une reconnaissance en terme de salaire insuffisante. Richard Freeman, économiste à l'université d'Harvard, s'interroge ainsi sur l'attractivité de carrières où l'on est « payé comme un étudiant pendant un quart ou un tiers de [sa] vie de travail et [où l'on attend] d'avoir trente-cinq ans pour avoir un véritable emploi  69».

De sorte que l'action conjuguée du gouvernement en faveur d'une revalorisation des financements de la recherche - via notamment le programme des « chaires d'excellence » - et d'un renouvellement de l'organisation du système offrant aux chercheurs la capacité de s'y épanouir complètement doit permettre aux talents de demeurer, de venir ou de revenir en France. Sur ce point, la réforme est en cours mais le chantier reste vaste.

C. POUR UNE NOUVELLE GOUVERNANCE DE LA RECHERCHE FRANÇAISE

Ainsi que le rappellent les documents annexés au budget fédéral pour la recherche et le développement des Etats-Unis pour 2005  « Comme l'écrivait Aubrey Eben : « La science n'est pas une vache sacrée. La science est un cheval. Ne la vénérez pas. Nourrissez-la.  70 » 

Le rapporteur pour avis fait sienne cette déclaration et y ajoute ce complément indispensable : l'accent ne doit pas seulement être mis sur les dépenses mais, de façon toute aussi marquée, sur la performance. En effet, s'il ne fait pas de doute que les moyens affectés à la recherche doivent être augmentés - ce que le gouvernement soutenu en cela par la majorité s'emploie actuellement à faire - la première des préoccupations qui doit guider l'action d'un représentant de la nation est la bonne allocation des ressources. Croire que la crise de la recherche française n'a de source que financière serait mésestimer l'ampleur du malaise des chercheurs et ne lui apporter de réponses que sous la forme de moyens budgétaires supplémentaires serait ignorer l'inquiétude manifestée par une communauté de chercheurs autant préoccupée de son propre avenir que de celui de la nation toute entière.

Guérir la recherche, ce n'est donc pas seulement augmenter les ressources qui lui sont affectées mais renouveler ses structures. A ce titre, la volonté du rapporteur pour avis et de la majorité, dans le grand débat qui s'annonce, n'est pas de revoir les ambitions de la recherche française à la baisse mais précisément de lui donner enfin les moyens de ses ambitions. A l'instar des Etats-Unis qui, au cours des années 1970, ont su faire leur aggiornamento afin de contrer l'influence grandissante d'un Japon en plein essor technologique et commercial et jeter ainsi les bases des deux plus grandes mutations scientifiques et économiques de ce début de XXIe siècle, les technologies de l'information et les biotechnologies, domaines dans lesquels leur leadership est aujourd'hui incontesté, la France doit être capable d'initier les réformes nécessaires au maintien de son rang sur la scène internationale.

La question qui se pose à la recherche française n'est pas de renier une organisation qui a fait ses preuves par le passé mais d'adapter ces structures, telles qu'elles ont évolué au cours des dernières années, à un environnement nouveau et soumis, dans un avenir proche, à de nouvelles mutations. Pour cela, il importe de mettre en place une structure adaptée au temps présent et suffisamment flexible pour épouser les transformations à venir. Dans cette perspective, l'architecture du dispositif de la recherche que le rapporteur pour avis se propose de brosser ici à grands traits tient compte de deux éléments : elle entend s'inscrire dans les orientations déjà ébauchées par le gouvernement (création de l'ANR et des pôles de recherche) et être compatible avec une insertion dans un schéma plus global, à l'échelon européen, le seul qui apparaît véritablement pertinent dans le cadre de la nouvelle compétition mondiale.

A cette fin, elle doit s'organiser autour des quatre fonctions essentielles du dispositif de recherche identifiées par l'opération FutuRIS : « pilotage stratégique, programmation, évaluation, réalisation 71 ». La confusion de ces quatre fonctions explique en effet pour une large part les difficultés rencontrées actuellement par la recherche française ; leur distinction et l'identification d'un ou plusieurs opérateurs pour chacune d'entre elles sont au fondement de la nouvelle architecture proposée par le rapporteur pour avis.

1. Faire de la future Agence nationale de la recherche une véritable agence de moyens

Il faut prendre garde aux concepts qui, particulièrement dans les périodes d'effervescence et de bouillonnement d'idées telles qu'en connaît aujourd'hui la recherche, semblent faire l'unanimité alors même qu'ils cachent des réalités différentes. Ainsi, si tous les acteurs de la recherche, privés ou publics, semblent aujourd'hui favorables à la création d'une « agence de moyens », il apparaît en revanche que, derrière le concept, chacun entend une réalité différente. En ce sens, la démarche du gouvernement consistant, après l'annonce, par le Premier ministre, de la création d'une telle structure à l'acter en loi de finances est une bonne méthode qui permet à la fois de valider sa création tout en laissant au débat le temps nécessaire à en dessiner plus précisément les contours.

La postérité du concept est très largement à mettre au crédit de l'influence de la National science foundation (NSF) américaine qui apparaît comme un modèle du genre. De quoi s'agit-il en réalité ? Quelques éléments ont déjà été évoqués plus haut : créée en 1950, la NSF est une agence indépendante de moyens ne disposant d'aucun laboratoire propre et dont l'activité se concentre essentiellement sur le financement de projets de recherche fondamentale. Pour remplir cette mission, la NSF s'organise autour d'un directeur, d'un conseil de vingt-quatre scientifiques et de sept grandes divisions thématiques. Si l'agence est statutairement indépendante, il n'en demeure pas moins qu'elle travaille en étroite collaboration avec l'Office of science and technology policy (OSTP) et le Congrès - c'est-à-dire le pouvoir exécutif et le pouvoir législatif - pour la définition des priorités de recherche et reste très attentive, comme l'a confirmé au rapporteur pour avis M. Mark Suskin, directeur de son bureau européen, à la prise en compte des priorités gouvernementales. A ce titre, la NSF peut légitimement constituer un modèle à suivre pour l'organisation de la future ANR.

Néanmoins, au-delà des questions relativement contingentes de savoir si l'ANR doit avoir une vocation pluridisciplinaire ou bien être subdivisée en autant de structures qu'il y a de disciplines de recherche à financer, les interrogations que pose la mise en place de cette agence sont les suivantes : à qui seront attribués les financements, en fonction de quelles priorités et selon quelles modalités ?

A la première question, dans la mesure où l'agence succède aux deux fonds incitatifs qui n'attribuaient de crédits qu'aux institutions publiques de recherche, il est à craindre que son champ de financement soit réduit de même. Interrogé sur ce point par les journalistes du Figaro 72, le ministre délégué à la recherche, M. François d'Aubert, a toutefois laissé ouverte la porte à une attribution plus large des crédits, déclarant : « L'agence sélectionnera les meilleurs projets qui pourront associer, le cas échéant, la recherche privée ». Ainsi que le dit le ministre, l'important en effet, si l'on désire avoir un système de recherche performant, est moins de fonder le choix des opérateurs de recherche en raison de leur statut (public ou privé) que sur leurs compétences et leur capacité à mener à bien un projet 73. Cette dernière conception qui fait de l'ANR non seulement une véritable agence de moyens mais également une « agence de programme », dans le sens qu'en donne FutuRIS74, semble au rapporteur pour avis la plus pertinente.

2. Placer les universités au cœur des pôles de compétitivité

Plus intéressant encore, il est à souhaiter que le rééquilibrage - amorcé mais timide - du financement de la recherche publique française en faveur du financement sur projet plutôt que sur financement récurrent, permette à la recherche universitaire de s'inscrire plus fortement encore dans la voie de l'excellence scientifique 75. La mise en place de l'ANR, dont les fonds ne seront pas distribués selon un critère de nature de l'établissement mais selon des critères de performance, conjuguée à la mise en place de pôles de compétitivités, dont il reste à définir plus précisément les contours, sont autant d'éléments de nature à offrir à l'université la possibilité de devenir, selon l'expression des auteurs de l'appel « Du NERF ! » : « la brique fondamentale [servant] à recomposer le dispositif de recherche français : le campus de recherche doté d'une véritable autonomie ».

Il ne s'agit pas en effet d'opposer universités, grandes écoles et organismes de recherche pour favoriser l'un en « déshabillant » les deux autres 76 mais de mettre en place à la fois des structures - les pôles de compétitivités - qui permettent de mutualiser les efforts et de donner à des centres une masse critique suffisante pour apparaître sur la scène internationale et, dans le même, temps, en privilégiant les financements sur projets, de mettre en concurrence les moyens de la recherche française afin de privilégier non pas telle ou telle structure mais bien les projets et les compétences intrinsèques des chercheurs ; ou comment éviter l'affrontement entre les différentes institutions de la recherche académique sans céder à l'empilement des structures...

Comment penser raisonnablement en effet que les 82 universités métropolitaines - sans compter plusieurs grandes écoles - puissent à elles seules obtenir une visibilité sur la scène internationale lorsque l'on sait que les Etats-Unis - cinq fois plus peuplés que la France, et qui disposent d'un territoire près de dix-sept fois plus étendu - n'entretiennent pas plus de 200 universités pratiquant des activités de recherche. La mise en commun des ressources est une condition indispensable au dynamisme de la recherche française. Toutefois afin de pas remettre en cause ni le maillage universitaire du territoire ni la double dimension de celle-ci de formation à et par la recherche, sans doute serait-il souhaitable d'envisager, parallèlement à la mise en place de pôles de compétitivités, la création de réseaux inter-universités permettant aux « petites » universités de s'associer à des établissements-pôles pour le développement de leurs activités de recherche de façon à maintenir l'ancrage local des universités sans obérer leur vocation internationale, notamment leur capacité à nouer des partenariats au niveau européen et à attirer des financements communautaires.

Un tel objectif ne doit cependant exonérer les responsables, à tous les niveaux, d'une réflexion plus globale sur la capacité des universités à tenir, en l'état actuel de leurs structures, un tel rôle. Sur ce point, il est impératif d'éviter toute position de principe au risque de placer les acteurs dans la situation d'être incapables de faire face à leurs responsabilités.

3. Faire de l'évaluation la clé de voûte d'un système de recherche performant

Troisième temps de la réforme de la recherche publique et contrepoint indispensable à la mise en place d'une agence de moyens : l'évaluation. En effet, l'ANR ne pourra fonctionner de façon optimum que dans la mesure où elle pourra s'appuyer sur une structure d'évaluation efficace lui permettant, à l'issue de la procédure d'appel d'offre, de choisir les meilleures équipes pour faire aboutir ses projets.

Or, à l'image du système de recherche français tout entier, le dispositif d'évaluation dont dispose actuellement la recherche française est complexe et perfectible. La complexité du système tient essentiellement au fait qu'il reprend le découpage de la recherche entre université, grandes écoles et organismes, chacun disposant de son propre système d'évaluation et, à l'intérieur de ce système, de procédures différenciées selon le type d'évaluations à mener (enseignement, recherche, évaluation individuelle, collective, etc.).

L'instance la plus connue en la matière est sans nul doute le Comité national de la recherche scientifique, instance d'évaluation du CNRS mais également des organismes et des universités pour les travaux qu'elles effectuent dans le cadre d'unités mixtes comprenant le CNRS. Une autre instance d'évaluation importante est le Conseil national des universités (CNU) qui participe au recrutement et aux promotions des enseignants-chercheurs (mais n'évalue pas les unités de recherche).

Trois critiques majeures sont régulièrement formulées à l'égard de ses instances. Premièrement, nombreux sont ceux qui stigmatisent l'endogamie du système. Si le « jugement par les pairs » est le mode d'évaluation le plus courant au niveau international, le poids trop important des chercheurs élus dans les dispositifs d'évaluation (les deux tiers des membres du Comité national de la recherche scientifique sont élus ainsi que la totalité des membres du CNU) n'offre pas, selon les auteurs de l'appel « Du NERF ! », « de garantie d'optimisation des compétences et introduit à l'inverse une certaine forme de consanguinité » ; et d'ajouter : « en bonne logique, un système électif n'offre aucune garantie dans la poursuite de l'excellence ». Conséquence également de cette endogamie, l'insuffisante représentation des personnalités internationales dans les instances d'évaluation.

D'autre part, l'évaluation individuelle des enseignants-chercheurs, réalisée par le CNU est trop irrégulière. Ceux-ci ne sont évalués que lors de leur recrutement, lorsqu'ils demandent une promotion (de grade ou de corps) ou sollicitent une prime d'encadrement doctoral de recherche (PEDR) ou encore lorsqu'ils effectuent des recherches en collaboration avec des EPST où l'évaluation est bisannuelle. Hors de ces cas, l'enseignant-chercheur n'est jamais évalué et il peut donc poursuivre normalement sa carrière sans rendre de comptes puisque l'avancement se fait à l'ancienneté.

Enfin, dans le cas où l'évaluation, comme au CNRS par exemple, a lieu à intervalles réguliers et selon des modalités qui pour être perfectibles n'en demeurent pas moins relativement efficaces, celle-ci ne se traduit pas, dans les faits, par des différences de traitement - au sens large du terme - notables entre les chercheurs et les équipes les plus méritants et les autres. Ainsi, le CNRS établit une typologie entre les différentes équipes selon les résultats qu'elles ont obtenus lors de leur évaluation : « A » pour les meilleures jusqu'à « D » pour celles ayant obtenu les résultats les plus faibles. Or, si la différence de notation se traduit par l'attribution d'une subvention différente selon le niveau des équipes, l'écart n'excède guère les 10 % entre les équipes jugées les meilleures - de niveau internationales - et celles connues pour être moins performantes ; en tout état de cause, cette différence est insuffisante pour motiver les meilleurs et leur donner les moyens d'une recherche performante et véritablement ambitieuse.

Cela est d'autant plus dommageable que, s'il y a véritablement un domaine où l'objectif visé ne peut être que l'excellence, c'est bien la recherche. Comme l'a affirmé au rapporteur pour avis M. Bernard-Pierre Roques, membre de l'Académie des sciences, professeur et ancien directeur de l'unité de recherche associée (URA) pharmacochimie moléculaire et structurale de l'université René Descartes (Paris V) : « évaluation et compétition », tels sont les maîtres mots de l'activité de recherche.

La création par décret n° 317-2003 du 7 avril 2003 portant organisation de l'administration centrale du ministère de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, d'une mission scientifique, technique et pédagogique (MSTP) chargée de l'évaluation et de l'expertise, notamment des recherches menées dans le cadre universitaire et des recherches menées sur financements incitatifs du ministère (FNS et FRT), constitue une évolution satisfaisante vers plus et mieux d'évaluation. La MSTP a d'ores et déjà recours à plus de 1 300 experts et l'internationalisation de ce panel est en cours. Autre point positif, le gouvernement et la MSTP tendent à faire en sorte que l'ensemble des activités des enseignants-chercheurs soit pris en compte dans leur évaluation.

De tels efforts sont nécessaires au moment où la mise en place de l'ANR, et son développement dans les années futures, fera véritablement de l'évaluation la clé de voûte du système de recherche tout entier. Si les évolutions en cours au sein de la MSTP se confirment, celle-ci aura toute légitimité pour jouer le rôle d'évaluateur à moins que, à l'exemple des propositions formulées sur ce point par le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, M. François Fillon, la solution consiste à « faire confiance aux acteurs eux-mêmes, c'est-à-dire aux établissements, en développant en leur sein et à leur initiative une véritable culture de l'évaluation et d'en valider publiquement les bonnes pratiques 77 ».

4. S'appuyer sur un ministère pilote et stratège

Dernier aspect de la réforme mais le plus fondamental, la première partie de ce développement ayant montré les évidentes carences du processus de décision dans le système de recherche français, quid du pilotage de la recherche publique française. En effet, si les grands organismes de recherche, en raison de leur structure, qui fait d'eux à la fois des agences de moyens et leurs propres opérateurs, leur permet de continuer leurs travaux en dépit d'un pilotage global chaotique, une agence de moyens ne pourra fonctionner correctement que dans la mesure où elle sera chargée de mettre en œuvre et de décliner sous forme de projets des orientations définies en amont.

A ce niveau intervient un autre élément important du débat actuel sur la recherche qui est la question de la création d'un « Haut conseil » (ou toute autre structure équivalente quel que soit le nom qu'on lui donne) composé en majorité ou en totalité d'experts scientifiques, placé auprès du pouvoir exécutif (Président de la République, Premier ministre, ministre de la recherche) et chargé de conseiller ce dernier dans la définition des orientations de la recherche.

Sur ce point, le rapporteur pour avis souhaite apporter quelques précisions. Premièrement, il apparaît que la création d'une telle structure n'a de sens que si elle vient se substituer aux nombreux conseils existants. Par ailleurs, si les scientifiques et les experts ont naturellement vocation à y siéger et que les orientations choisies ne seront suivies d'effet que dans la mesure où elles seront prises selon des procédures et par des personnalités respectées de la communauté scientifique dans son ensemble, il n'en demeure pas moins qu'in fine la définition des orientations de la recherche publique, dans la mesure où elle engage les finances de l'Etat et où elle conditionne également pour une large part l'avenir de la nation, ne peut légitimement être arrêtée que par le pouvoir politique. Cela étant, il apparaît désormais assez évident que la création d'une telle structure, étant donné l'état du processus de décision actuel, apparaît comme le pendant naturel de la création d'une Agence nationale de la recherche.

Reste enfin à savoir auprès de qui placer ce conseil. Faut-il comme beaucoup le préconisent le placer auprès du Premier ministre afin d'affirmer la vocation interministérielle de la recherche 78, revenant ainsi sous une forme un peu différente à ce qui se faisait sous l'ère gaullienne avec la DGRST, ou bien le placer auprès du ministre de la recherche ? On peut en effet se poser la question du positionnement du ministère de la recherche une fois l'ANR créée. Quid en effet d'un ministère dont plus de 95 % des crédits qui lui sont attribués sont immédiatement délégués, pour leur gestion, aux organismes de recherche qui en sont destinataires - dans le cadre réglementé d'un contrat d'objectifs conclu entre l'Etat et l'établissement concerné - et dont les quelques pourcents restants qui constituaient le moyen direct et privilégié d'orientation de la politique de recherche seront, à partir du 1er janvier de l'année prochaine, gérés par une agence de moyens « indépendante » ?

Une telle situation ne doit certainement pas aboutir à un effacement du ministère mais, bien au contraire, à un accroissement de son rôle stratégique. Il apparaît en effet évident que, d'une façon ou d'une autre, la recherche publique française a besoin d'un pilote et qu'une telle fonction ne saurait être mieux assurée que par le ministère de la recherche. Dans un contexte où le citoyen est de plus en plus enclin à s'interroger sur le bien-fondé du progrès scientifique, la recherche publique française doit absolument être soutenue par des choix et des orientations claires et assumées par le pouvoir politique. Cette situation intervenant à un an de l'entrée en vigueur des dispositions de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) du 1er août 2001, il est donc à souhaiter que ce que le ministère de la recherche perdra en terme de gestion il puisse le gagner en terme de capacité stratégique. L'insertion du ministère dans le nouveau cadre législatif de la mission interministérielle de la recherche et de l'enseignement supérieur composée de treize programmes, dont six seulement relèvent du ministère de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, constitue, à n'en pas douter, le défi majeur de cette administration dans les années à venir. A ce titre, la question de l'élargissement du périmètre du ministère, dans le but qu'il recouvre au plus près le champ de compétences de la mission, reste plus que jamais d'actualité.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

La commission a examiné pour avis, sur le rapport de M. Pierre-André Périssol, les crédits de la recherche pour 2005 au cours de sa séance du mardi 26 octobre 2004.

Un débat a suivi l'exposé du rapporteur pour avis.

Le président Jean-Michel Dubernard a salué le travail effectué par le rapporteur pour avis sur le thème de la gouvernance. Concernant la référence faite à la National Science Foundation (NSF) américaine, cette dernière constitue en effet un exemple très intéressant : agence de moyens, elle travaille avant tout dans le domaine des sciences « dures » et finance aussi bien les laboratoires publics que les laboratoires privés. Elle entreprend également des actions en direction des highschool, équivalents des lycées, afin de promouvoir la science auprès des jeunes générations. Toutefois, la NSF ne constitue pas la seule agence de moyens américaine dans le domaine de la recherche. D'autres agences, telles que les National Institutes of Health (NIH), disposent quant à elles de laboratoires en propre comme c'est le cas en France de l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm), lequel s'est inspiré lors de sa création du modèle américain des NIH. Dès lors, la question qui se pose est la suivante : de quel modèle doit s'inspirer la future Agence nationale pour la recherche (ANR) et a-t-elle vocation à demeurer une agence unique ou bien des agences thématiques doivent-elles, à l'avenir, être créées à ses côtés ou sous sa responsabilité ? On constate en effet, notamment dans l'étude des sciences du vivant, un manque de coordination de la recherche qui aboutit à ce que plusieurs laboratoires dépendant d'organismes de recherche différents - Inserm, Commissariat à l'énergie atomique (CEA), Centre national de la recherche scientifique (CNRS), par exemple - travaillent chacun de leur côté sur des projets similaires dispersant du même coup les moyens humains et financiers. Toutefois, il faut prendre garde à ce que la mise en cohérence de l'ensemble n'aboutisse pas à créer une nouvelle superstructure venant s'ajouter à d'autres.

Pour le pilotage de la recherche, il est indispensable de renforcer le rôle du ministre de la recherche. La recherche est en effet une activité à vocation transversale. C'est pourquoi il serait opportun de rattacher directement le ministère délégué à la recherche auprès du Premier ministre. De la même façon, la création d'un haut conseil chargé de guider le ministre dans ses choix n'a de sens que si ce dernier vient se substituer aux structures actuellement en place. A tous les niveaux, une simplification des structures administratives et une clarification du rôle de chacun sont nécessaires. Par ailleurs, la question complexe des statuts des chercheurs et des enseignants-chercheurs et de leur évolution mériterait un éclairage particulier.

Après s'être félicité de l'effort important consenti par le gouvernement en faveur de la recherche, M. Pierre Lasbordes a toutefois indiqué qu'une partie de la communauté scientifique juge l'augmentation des crédits insuffisante dans la mesure où une part du milliard d'euros supplémentaire sera consacrée au financement de la recherche privée. Après avoir déploré l'absence de création d'emplois nouveaux, il a formulé les observations et questions suivantes :

- Il est à regretter que la revalorisation des allocations de recherche n'ait pas été poursuivie dans le projet de loi de finances pour 2005. En effet, compte tenu de l'augmentation importante du SMIC au 1er juillet de cette année, le montant des allocations de recherche va une nouvelle fois se trouver décroché du salaire minimum.

- Qu'en est-il de la consommation des 150 millions d'euros de crédits affectés à la création des fondations de recherche en loi de finances pour 2004 ? La représentation nationale avait alerté le gouvernement sur ce point lors de la discussion budgétaire l'an passé, certains députés estimant que le montant alloué à cette action était trop élevé pour être consommé en totalité. Il serait désormais temps d'obtenir des précisions.

- L'ANR a-t-elle, à terme, vocation à devenir une agence de moyens généraliste ou bien doit-elle être subdivisée en plusieurs agences thématiques ?

- L'évaluation a un rôle très important dans le dispositif de recherche, qu'il s'agisse d'évaluer les chercheurs, les projets scientifiques ou les structures. L'UMP publiera prochainement un rapport sur ce thème.

Après avoir remercié le rapporteur pour le thème retenu dans son rapport et salué l'effort budgétaire important consenti par le gouvernement en faveur de la recherche en soulignant que le projet de loi de finances pour 2005 présente la plus forte augmentation du BCRD depuis dix ans, M. Michel Herbillon a indiqué que, nommé rapporteur pour mener une étude sur les relations entre l'enseignement supérieur et la recherche dans le cadre des travaux de la délégation pour l'Union européenne, il a également pu constater à quel point l'université est le parent pauvre de la recherche française, alors même que ces liens sont très étroits dans d'autres pays comme aux Etats-Unis par exemple où de surcroît les synergies entre les universités et le monde de l'entreprise sont fortes. Il ne s'agit pas d'être béat devant le modèle américain mais force est de constater qu'en la matière il constitue un exemple à suivre pour refonder le lien entre les universités et la recherche. Il y a véritablement un manque de coordination dans la conduite des recherches en sciences du vivant. Ainsi dans la circonscription du Val-de-Marne dont il est l'élu et où sont situés dans un même périmètre l'Ecole nationale vétérinaire de Maisons-Alfort, l'Institut de veille sanitaire, l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments (AFSSA) et l'Agence française de sécurité sanitaire environnementale (AFSSE), constituant ainsi un véritable pôle de compétences au cœur de l'Ile-de-France, les synergies ne sont pas suffisamment mises en valeur. Si les initiatives ne manquent pas, il faut impérativement trouver le moyen de mieux les accompagner. Enfin, l'évaluation du système public de recherche est indispensable et il est nécessaire de clarifier, simplifier et renforcer le pilotage de la recherche en France.

En réponse aux différents intervenants, le rapporteur pour avis a apporté les précisions suivantes :

- La National Science Foundation (NSF) américaine constitue moins un modèle à importer tel quel qu'un exemple dont il faut savoir tirer des leçons. En effet, si le principe de la création d'une agence de moyens semble aujourd'hui faire l'unanimité au sein de la communauté des chercheurs, il n'en demeure pas moins que, derrière le concept, chacun entend des choses très différentes. En fait, l'élément primordial est de ne pas confondre, au sein d'une même structure, les fonctions de programmation et de réalisation : la première relève de l'agence, la seconde des opérateurs chargés de conduire effectivement la recherche. Et s'il est vrai, comme l'a rappelé le président Jean-Michel Dubernard, que la plupart des agences américaines disposent en interne de leurs propres laboratoires, les sommes consacrées aux travaux effectués directement par ceux-ci sont relativement faibles au regard du budget des agences en question. Plus intéressant encore, l'étude du fonctionnement de la NSF montre que, malgré une réelle indépendance, celle-ci relaie très efficacement les orientations définies par le pouvoir politique. La situation en France est en tout point inverse : notre système est incapable de définir des priorités et il ne permet que très imparfaitement de vérifier a posteriori que les orientations de la recherche sont effectivement prises en compte prioritairement par les acteurs publics dans leurs programmes de recherche. Il est ainsi symptomatique qu'interrogé, dans le cadre du questionnaire budgétaire, sur les crédits consacrés à la lutte contre le cancer, pourtant érigée en « chantier » prioritaire par le Président de la République, le ministère délégué à la recherche n'a pu fournir de réponse. Cela démontre toute l'importance de la problématique de la coordination des efforts de recherche, le but n'étant évidemment pas de mettre en place une nouvelle superstructure mais d'avoir la capacité de définir des priorités et de les mettre en œuvre. Pour cela, il importe plus que jamais que le ministère de la recherche puisse retrouver son rôle de pilote et de stratège. Sur ce point, et sans faire injure au ministre délégué à la recherche, M. François d'Aubert, il semble que des marges de progression existent.

- La politique menée par le gouvernement en faveur de la création de fondations de recherche est une bonne chose car, en matière de recherche, il est important de mobiliser toutes les énergies, qu'elles soient privées ou publiques.

- Sur la question des emplois, le gouvernement s'est engagé à renouveler tous les postes faisant l'objet de départ en retraite, ce qui aboutit à un maintien des effectifs.

- Le montant de l'allocation de recherche est effectivement insuffisant et il serait souhaitable de le revaloriser.

- Sur la question de savoir comment doit s'organiser la nouvelle Agence nationale pour la recherche et notamment si elle doit être une agence unique ou bien au contraire être déclinée en autant d'agences qu'il existe de thématiques de recherche, l'important, à présent, est qu'elle joue bien son rôle d'agence de moyens finançant la recherche selon des orientations définies en amont. Pour le reste, l'expérience montrera quelles sont les voies à suivre en terme d'organisation.

- Concernant l'évaluation, on retrouve les mêmes débats qu'autour de l'agence de moyens, à savoir que si la nécessité de renforcer l'évaluation semble faire l'unanimité au sein de la communauté des chercheurs, chacun semble avoir une idée différente de son contenu. Une chose semble acquise cependant : l'évaluation doit concerner à la fois les chercheurs et les structures.

- Les sciences du vivant sont effectivement l'objet d'un manque de coordination. Malheureusement, elles ne sont pas les seules disciplines de recherche victimes de ce phénomène que l'on retrouve dans beaucoup de domaines scientifiques.

- La place insuffisante occupée par les universités dans le dispositif de recherche français est, comme l'a indiqué le président Jean-Michel Dubernard, un véritable serpent de mer. Toutefois, la publication du classement des meilleures universités du monde établi par l'université Jiao Tong de Shangaï - dans lequel seules deux universités françaises figuraient parmi les cent premières - a permis une prise de conscience forte autour de ce problème, et ce en dépit des réserves qui peuvent être apportées sur la méthode de classement et les critères retenus pour établir celui-ci. De fait, tout le monde a désormais conscience que la situation de l'université pénalise la recherche française toute entière. A ce titre, le renforcement du rôle de l'université dans le dispositif de recherche constitue un enjeu majeur pour l'avenir de la recherche. Pour la poursuite de cet objectif, l'université pourra disposer de deux leviers mis à sa disposition par le gouvernement : la constitution des pôles de compétitivité et l'agence de moyens laquelle, en distribuant des fonds directement aux équipes de chercheurs et selon des critères de qualité et de pertinence des recherches entreprises, doit permettre de favoriser le recentrage de la recherche autour de l'université.

Poursuivant le raisonnement du rapporteur pour avis, M. Michel Herbillon a indiqué que le renforcement du lien université-recherche doit également s'accompagner d'une intégration plus forte des grandes écoles et d'une implication accrue des entreprises - sur le modèle de la Silicon Valley - dans le dispositif de recherche via notamment les futures pôles de compétitivité.

Le président Jean-Michel Dubernard s'est déclaré surpris que jamais au cours du débat n'ait été évoqué le système britannique de recherche, pourtant très intéressant.

Conformément aux conclusions du rapporteur pour avis, la commission a émis un avis favorable à l'adoption des crédits de la recherche pour 2005.

ANNEXE

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES

¬ Ambassade des Etats-Unis en France : M. Robert W. Dry, ministre conseiller aux affaires scientifiques, technologiques et d'environnement, et Mme Marie-Hélène Massing, son assistante française

¬ Laboratoire de pharmacochimie moléculaire et structurale, unité mixte de recherche 8600 placée sous la tutelle de l'université René Descartes (Paris V), du CNRS et de l'Inserm : Pr. Bernard-Pierre Roques, directeur, membre de l'Académie des sciences

¬ Laboratoire de minéralogie et de cristallographie de Paris (LMCP), unité mixte de recherche 7590 placée sous la tutelle des universités Pierre et Marie Curie (Paris VI) et Denis Diderot (Paris VII), du CNRS et de l'Institut de physique du globe (IPG) : M. Bernard Capelle, directeur, et M. Georges Calas, directeur-adjoint

¬ National science Foundation (NSF) : Dr Mark Suskin, directeur du bureau européen, et Mme Mary Brodbec, sa collaboratrice

¬ Ministère délégué à la recherche : Mme  Elisabeth Giacobino, directrice de la recherche, et M. Michel Eddi, directeur-adjoint

M. Jean-Jacques Gagnepain, directeur de la technologie au ministère délégué à la recherche, contacté, n'a pas souhaité se rendre à l'invitation du rapporteur pour avis

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N° 1864 - Tome X - Avis au nom de la commission des affaires culturelles sur le projet de loi de finances pour 2005 : Recherche et nouvelles technologies (M. Pierre-André Périssol)

1 Si au sens strict, les crédits sur lesquels sont amenés à se prononcer la commission puis l'Assemblée nationale sont les crédits spécifiques du ministère délégué à la recherche figurant au fascicule budgétaire « bleu », dans les faits, l'effort public en faveur de la recherche dépasse de très loin ces seuls crédits et se mesure depuis 1982 au travers du budget civil de recherche et de développement (BCRD) lequel fait l'objet d'un fascicule budgétaire « jaune » regroupant les actions de recherche menées par l'ensemble des ministères.

2 Sommes versées pour l'accomplissement d'un travail de recherche sans contrat de travail.

3 Le conseil des chefs d'Etat européens réunis à Barcelone en 2002 a fixé un objectif de financement de la recherche à hauteur de 3 % du PIB en 2010, un tiers de la contribution étant assuré par l'Etat et deux tiers par le secteur privé. Actuellement, l'effort français (2,19 %) est en retrait, essentiellement du fait de la faiblesse du financement privé estimé, selon les chiffres fournis par le ministère, à 1,36 %, l'effort public de recherche étant relativement proche, avec 0,83 % du PIB, de l'objectif européen.

4 Cf. http://www.comite-richelieu.com/cr-index.html.

5 Intervention du ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, M. Nicolas Sarkozy, à l'occasion du lancement du rapprochement de l'ANVAR et de la BDPME le mardi 12 octobre 2004.

6 Cf. dossier de presse du CIADT du 14 septembre 2004.

7 Ce dont témoigne en parallèle l'accroissement significatif des moyens de la recherche universitaire de plus de 11 % en dépenses ordinaires et crédits de paiement.

8 L'IPEV est en réalité un groupement d'intérêt public (GIP) placé sous la tutelle du ministère délégué à la recherche. Ce GIP est traditionnellement rattaché, dans la nomenclature budgétaire, à la catégorie des EPIC.

9 Auditionné par le rapporteur pour avis, M. Bernard-Pierre Roques, membre de l'Académie des sciences, professeur à l'université Paris V - René Descartes et ancien directeur de l'unité de recherche associée (URA) pharmacochimie moléculaire et structurale du CNRS et de l'université Paris V - René Descartes, a indiqué que, fort des recherches menées par l'ANRS, les Etats-Unis considéraient la France comme le deuxième pays le plus performant en matière de recherche en rétrovirologie.

10 Syndrome respiratoire aigu sévère.

11 Le réseau international des Instituts Pasteur associe vingt-cinq instituts indépendants répartis sur les cinq continents (Europe, Amérique, Afrique, Asie et Océanie).

12 Fondation habitat sans effet de serre, fondation cœur et artères, fondation aéronautique et espace, fondation institut Europlace de finance, fondation STIC et santé, fondation recherche en alimentation, fondation utilisation raisonnée de l'expérimentation animale, fondation sécurité routière et fondation méthodes physiques d'exploration et de traitement du cerveau et du cœur.

13 Pour autant, ils ne sont pas les déterminants uniques de la crise de la recherche française et le projet de loi d'orientation et de programmation de la recherche devra nécessairement intégrer, dans le champ des réformes qu'il proposera, la recherche privée.

14 Cf. « Du NERF ! (Donner un nouvel essor à la recherche) », texte paru dans la revue Commentaire (n° 106, été 2004). M. François Jacob, biologiste, est prix Nobel de médecine ; M. Philippe Kourilsky, immunologiste, est directeur général de l'Institut Pasteur ; M. Jean-Marie Lehn, chimiste, est prix Nobel de chimie ; M. Pierre-Louis Lions est mathématicien, décoré de la médaille Fields. Les quatre auteurs sont tous membres de l'Académie des sciences et professeurs au Collège de France.

15 Il est pourtant prévu que ce Comité se réunisse une fois par an.

16 Même si elle peut atteindre 80 % pour certains laboratoires très performants.

17 Unités de recherche associant un organisme de recherche et une université.

18 Cette situation pose néanmoins un problème dans la mesure où le statut d'enseignants-chercheurs impose aux maîtres de conférences et aux professeurs d'université de poursuivre une activité de recherche. Or, si ces derniers ne disposent pas de financement public, ni de financements privés, quelle peut être la réalité de cette recherche ?

19 Du bas vers le haut.

20 Le projet de loi de finances pour 2005 prévoit en effet qu'à partir du 1er janvier de l'année prochaine, l'Agence nationale pour la recherche (ANR) prendra le relais des actions incitatives conduites antérieurement au titre des fonds d'interventions FNS et FRT.

21 Cet effet est d'autant plus fort que ces crédits vont directement à la recherche tandis que les crédits récurrents financent également le personnel, les locaux et les frais de fonctionnement des laboratoires.

22 Les crédits alloués aux organismes de recherche sont dans leur montant sans commune mesure avec ceux dont dispose le ministère pour orienter la politique de recherche puisque dépenses ordinaires et en capital confondues ils atteignent, pour 2005, 5 914 millions d'euros (montant de l'agrégat budgétaire n°11 qui regroupe les moyens couvrant les frais de personnel, le soutien de base aux unités et les crédits d'investissement consacrés par le ministère à l'ensemble des organismes de recherche dont il assure la tutelle : établissements publics à caractère scientifique et technologique (EPST), établissements publics à caractère industriel et commercial (EPIC), fondations de recherche reconnues d'utilité publique et groupements d'intérêt public) dont 3 204 millions d'euros prévus pour les seuls EPST.

23 Les prévisions pour 2005 sont les suivantes (en millions d'euros) : Sciences du vivant, 1 753 ; nouvelles technologies d'information et de communication, 386 ; sciences humaines et sociales, 514 ; environnement et sciences de la planète, 524 ; énergie et transports, 585 ; espace, 1 255 ; mathématiques et physique, 513 ; chimie, 138 ; recherche et développement en faveur du développement, 172 ; thématiques non ventilées, 74.

24 Sans préjuger des conclusions qu'elle entend donner à ses travaux qui s'achèveront le 15 janvier 2005, la mission d'analyse et de proposition visant à définir les conditions d'une relance ambitieuse d'une politique de grands programmes scientifiques et technologiques, dont la présidence a été confiée, le 30 septembre dernier, par le Chef de l'Etat, M. Jacques Chirac, à M. Jean-Louis Beffa, président de Saint-Gobain, éclairera sans aucun doute les voies susceptibles de redonner à la recherche française sa compétitivité et sa cohérence.

25 Le Comité consultatif de la recherche scientifique et technique.

26 Parmi les instances chargées de conseiller le ministre délégué dans ses choix, on compte :

- cinq conseils : le Conseil national de la science (CNS), le Conseil supérieur de la recherche et de la technologie (CSRT), le Conseil national de coordination des sciences de l'homme et de la société, le Conseil scientifique de la culture et de l'information scientifiques et techniques et des musées, le Conseil -pour la coordination des actions de recherche à l'étranger (CARE) ;

- sept comités : le Comité consultatif du développement technologique (CCDT), le Comité consultatif des ressources biologiques (CRB), le Comité consultatif sur le traitement de l'information en matière de recherche dans le domaine de la santé (CCTI), le Comité de concertation pour les données en sciences humaines et sociales, le Comité de coordination des sciences du vivant (CCSV), le Comité de coordination des sciences de la planète et de l'environnement (CCSPE), le Comité de coordination des sciences et technologies de l'information et de la communication (CCSTIC) ;

- une commission : la Commission de génie génétique.

27 A titre d'exemple, la création de l'Ecole polytechnique et de l'Ecole normale supérieure de la rue d'Ulm date de 1794.

28 Le CNRS a été créé par décret du Président de la République, M. Albert Lebrun, le 19 octobre 1939.

29 Nombre de prix Nobel issus des établissements, présence des chercheurs les plus cités dans 21 grands domaines, nombre d'articles publiés dans les revues Nature et Science, nombre de citations dans les articles de Nature et Science et performance académique par facultés.

30 Et par là lèsent la recherche française qui traditionnellement obtient de meilleurs résultats en mathématiques qu'en sciences du vivant.

31 L'université d'Harvard occupant la tête du classement.

32 http://ed.sjtu.edu.cn/rank/2004/top500(1-100).pdf

33 Selon l'institut Thomson ISI, le nombre de publications d'origine chinoise a été multiplié par vingt entre 1981 et 2003 dans les revues scientifiques internationales. Les indicateurs de l'effort de recherche fournis par l'OCDE montrent que, si pour l'année 2002, le nombre de chercheurs rapporté à la population active est encore très inférieur en Chine (1,1 pour mille) à ce qu'il est en France (6,9 pour mille), le rapport étant supérieur à 6, le dynamisme de la recherche chinoise est quant à lui très supérieur à l'effort français de recherche puisque, entre 1996 et 2001 (dernière année où des chiffres sont disponibles), la dépense intérieure de recherche et développement (DIRD) rapportée au produit intérieur brut (PIB), a pratiquement doublé en Chine, passant 0,68 % à 1,23 %, tandis que, dans le même temps, elle a régressée en France, passant de 2,3 % à 2,23 %. Les performances de la recherche indienne sont moins saisissantes puisque, selon les chiffres et les analyses fournies par l'Observatoire des sciences et des techniques (OST) dans son rapport sur l'Inde de juin 2004, le rapport DIRD sur PIB exprimé en pourcentage serait de 0,81 % pour les derniers chiffres connus, en timide augmentation, par rapport aux chiffres de 1996 (0,71 %). Il n'en demeure pas moins que l'Inde nourrit, à l'égal de son géant de voisin, de fortes ambitions en la matière puisque, en 2003, Atal Bihari Vajpayee, alors Premier ministre, a déclaré qu'à l'issue du dixième plan quinquennal, c'est-à-dire en 2007, l'effort de recherche indien visait à dépasser le seuil des 2 % du PIB. Si cet objectif risque fort de n'être pas atteint, il témoigne en revanche de la direction ambitieuse suivie par le pays.

34 Et ce, même si dans les faits le morcellement est moins prononcé qu'un tel découpage le laisse entrevoir puisque l'essentiel des unités de recherche des grands organismes de recherche sont désormais des unités mixtes de recherche associées aux universités. Cette situation n'épuise cependant pas la problématique puisque la question se pose alors du partage des charges et des revenus de ces unités entre organismes et universités. Sur ce point, les auditions menées par le rapporteur pour avis ont plutôt concouru à faire apparaître une fois encore un partage au détriment des universités.

35 Le premier alinéa de l'article L. 612-3 du code de l'éducation dispose : « Le premier cycle est ouvert à tous les titulaires du baccalauréat et à ceux qui ont obtenu l'équivalence ou la dispense de ce grade en justifiant d'une qualification ou d'une expérience jugées suffisantes conformément à l'article L. 613-5. »

36 Source : ministère de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, Repères et références statistiques sur les enseignements, la formation et la recherche.

37 En réalité, cette notion n'existe pas puisque la rémunération des agents de l'Etat est directement prise en charge par le ministère.

38 Données établies à partir des budgets de l'université du Havre et des universités Lille I, Paris I - Panthéon Sorbonne, Paris XII - Val de Marne, Paris XIII - Paris Nord, Rennes I. Ces chiffres n'ont qu'une valeur indicative et ne prétendent pas refléter exactement la situation des universités dans leur ensemble.

39 Hors rémunération des agents de l'Etat et pour une université comptant 24 000 étudiants dont 45,4 % dans le premier cycle.

40 Hors rémunération des agents de l'Etat.

41 Réagissant au classement établi par Jiao Tong de Shangaï, M. Michel Kaplan, président de l'université Paris I et vice-président de la Conférence des présidents d'université, déclarait en effet, dans le Figaro étudiant de mars 2004 : « En matière de sérieux de recherche, le prestige des organismes est plus grand que celui des universités. Signer CNRS fait mieux que signer Paris I, même si c'est moins vrai dans les sciences humaines et sociales. Les gens n'oublient jamais de mentionner le CNRS mais oublient souvent leur université. Nous avons donc un travail pédagogique à faire. »

42 M. Finn E. Kydland travaille à l'université Carnegie-Mellon de Pittsburg et à l'université de Californie à Santa Barbara. Il a obtenu le prix Nobel d'économie 2004 avec M. Edward C. Prescott lequel travaille à l'université d'Etat de l'Arizona et pour la Federal reserve bank of Minneapolis.

Le prix Nobel de physique a été attribué à MM. David J. Gross du Kavli Institute for theoretical physics de l'université de Californie à Santa Barbara, H. David Politzer du California Institute of technology de Pasadena et à Frank Wilczek du Massachusetts Institute of technology (MIT).

Le prix Nobel de médecine a été attribué à M. Richard Axel de l'Howard Hughes Medical Institute de l'université Columbia de New York et à Mme Linda B. Buck, du Fred Hutchinson cancer research Center de Seattle.

Le prix Nobel de chimie a été attribué à un Américain, M. Irwin Rose de l'université de Californie à Irvine et à deux Israéliens, MM. Aaron Ciechanover et Avram Hershko, du Technion - Israel Institute of Technology d'Haïfa.

43 En 2001, selon les chiffres de l'OCDE, le rapport DIRD sur PIB était, en pourcentage, de 2,74 % aux Etats-Unis tandis qu'il était de 3,07 au Japon et de 4,27 en Suède.

44 Le gouvernement fédéral et les entreprises constituent les deux principales sources de financement de la R&D américaine puisque, à eux deux, ils financent 93 à 94 % de celle-ci.

45 Une grande partie des développements qui vont suivre s'appuient sur les informations contenues dans les rapports publiés par la Mission pour la science et la technologie de l'ambassade de France aux Etats-Unis.

46 Office des politiques scientifiques et technologiques.

47 Lequel regroupe 18 conseils ou bureaux chargés de conseiller le Président sur les questions de sécurité, d'économie, d'environnement, etc.

48 Figurent au nombre des membres du Cabinet du Président, le Vice-président, les membres du Gouvernement ainsi que cinq conseillers.

49 La discussion du budget de la recherche fait l'objet de longues et âpres discussions et ce d'autant plus que la négociation puis le vote portent en fait sur treize lois aux contours parfois brumeux.

50 La croissance du budget se ralentit puisque le budget 2005 est de 132 milliards de dollars.

51 Au nombre de ces agences, on compte, en plus de celles déjà citées : la National oceanic and atmospheric administration (NOAA), le National institute of standards and technology (NIST) et l'Environmental protection agency (EPA).

52 En réalité, le department of defense consacre la plus grande partie de son budget à des activités de développement. Toutefois, 11 milliards de dollars sont exclusivement consacrés à des activités de recherche.

53 Le department of energy dispose ainsi des National laboratories.

54 Avec un poids considérable de l'Etat fédéral : 60 % contre 7,5 % financés par l'Etat local.

55 Essentiellement composés des droits d'inscription, des dons d'entreprises ou de fondations et des revenus des placements financiers de l'université.

56 A titre de comparaison, la structure du financement des établissements publics d'enseignement supérieur en France (dépenses totales des financeurs finals) est la suivante (enseignement et recherche confondus) : Etats et collectivités locales : 89,8 % ; Ménages (inscriptions) : 6,3 % ; entreprises : 3,3 % ; autres : 0,5 %.

57 La seule exception est l'université de Yale où la part des revenus liés aux brevets déposés dans le budget de l'université est de 18,8 %, soit 282 millions de dollars.

58 Les autres établissements sont pour l'essentiel des collèges en deux ans (1750) ou en quatre ans et des master collèges délivrant, comme leur nom l'indique, des masters.

59 Selon les données fournies par la mission scientifique pour la science et la technologie de l'ambassade de France aux Etats-Unis dans son rapport intitulé Les Universités américaines : quelques données (juillet 2004), le budget recherche de l'université de Harvard s'élève à 431 millions de dollars et celui du Massachusetts Institut of technology, le plus élevé parmi les universités américaines, à 944 millions de dollars.

60 Enfin, l'université UCLA - Berkeley, classée première université publique américaine et vingtième université dans le classement global des universités (publiques et privées) par US News en 2002 (l'université Berkeley apparaît en quatrième position dans le classement mondial de l'université de Shangaï), disposait, en 2002, d'un budget de fonctionnement de 1340 millions de dollars.

61 Cf. supra.

62 Le reste des subventions (awards) est attribué sous forme d'accords de coopérations (13,2 %) ou de contrats (8,5 %).

63 La mission pour la science et la technologie de l'ambassade de France aux Etats-Unis, dans son rapport sur la place des universités dans le système de recherche et développement aux Etats-Unis, note que ce système n'est pas économe et repose sur l'abondance.

64 Disposition introduite par le Bayh-Dole Act de 1980 (du nom des deux sénateurs à l'origine de la loi).

65 « A defining feature of the US research system is pluralism » (OCDE, Steering and funding of research institutions country report : United States).

66 Propos tenus lors d'une conférence sur le thème « Rebâtir la recherche : comment utiliser le modèle américain pour éclairer les débats français ? - Le couplage privé-public en France et aux Etats-Unis » qui s'est déroulée à l'Institut Pasteur le 23 septembre 2004 à l'initiative de l'Association nationale de la recherche technique (ANRT) et de la French-American foundation (FAF).

67 Cf. Mission pour la science et la technologie de l'ambassade de France aux Etats-Unis, La place des universités dans le système de recherche et développement aux Etats-Unis, mai 2004.

68 En 1975, avec 4 % des jeunes détenteurs d'un diplôme supérieur en sciences, les Etats-Unis se plaçaient juste derrière la Finlande et le Japon et loin devant la France (2 %). La tendance s'est aujourd'hui inversée puisque, en 2000, ce même taux était de 5,7 % pour les Etats-Unis tandis qu'il s'élevait à 11 % pour la France.

69 Mission scientifique pour la science et la technologie de l'ambassade de France aux Etats-Unis, Les Universités américaines : quelques données, juillet 2004.

70 « Author Aubrey Eben noted : "Science is not a sacred cow. Science is a horse. Don't worship it. Feed it." » (2005 Budget of the United States, Chapter 5, Research and development).

71 Cf. Le document réalisé par FutuRIS (recherche, innovation, société), opération d'analyse et de prospective constituée à l'initiative de l'Association nationale de la recherche technique (ANRT), et intitulé Le Réformoscope : un outil pour mieux voir où nous mènent les propositions de réformes.

72 Le Figaro, 23 septembre 2004.

73 Les propositions de la Conférence des présidents d'université (CPU), dans leur rapport du 6 mai 2004 intitulé : Organisation et fonctionnement de la recherche publique en France : situation et avenir, ne disent rien d'autre : « Rien ne permet de différencier la nature de l'activité de recherche ou de formation exercée selon le statut de celui qui la pratique. Seule la qualité, évaluable selon des critères identiques pour tous les acteurs de la recherche, constitue une dimension de comparaison acceptable. ».

74 Une agence à la fois chargée de distribuer des financements mais également chargée de décliner les grandes priorités définies par ailleurs en des programmes de recherche précis et ciblés.

75 Sur ce point, s'il ne fait pas de doute que le relèvement de la part du financement de la recherche publique sur la base de projets, actuellement extrêmement faible, doit se poursuivre et s'accélérer, il est, en revanche, difficile de déterminer le point d'équilibre idéal entre ce type de financement et le financement récurrent. Une chose est certaine cependant : la nécessité de maintenir à un niveau satisfaisant les crédits récurrents lesquels sont plus spécifiquement adaptés au financement de la recherche fondamentale qui est une recherche de type bottom-up, par définition non prévisible et donc difficile à intégrer dans le cadre de projets définissant des objectifs de recherche précis.

76 L'exemple a contrario de l'université déshabillée par le CNRS démontre, plus de soixante ans après les faits, l'ineptie du concept.

77 Propos tenus le 30 septembre 2004 à l'occasion d'une intervention du ministre lors de la pose de la première pierre de l'université Denis-Diderot - Paris VII.

78 Ou bien, sur le modèle du Conseil de défense, auprès du Président de la République, ce qui pour les partisans de cette solution aurait l'avantage de maintenir la cohérence du système en cas de cohabitation.


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