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N° 1867

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DOUZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 13 octobre 2004.

AVIS

PRÉSENTÉ

AU NOM DE LA COMMISSION DE LA DÉFENSE NATIONALE ET DES FORCES ARMÉES,

SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2005 (n° 1800)

TOME VI

DÉFENSE

AIR

PAR M. Jean-Louis Bernard,

Député.

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Voir le numéro : 1863 (annexe n° 39)

S O M M A I R E

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Pages

INTRODUCTION 5

I. -  UN BUDGET DE RÉMUNÉRATIONS ET DE FONCTIONNEMENT MAÎTRISÉ 7

A. DES CRÉDITS DE RÉMUNÉRATIONS AJUSTÉS 7

1. Des dépenses de personnel stables 7

2. Une gestion des effectifs adaptée 8

B. UNE GESTION OPÉRATIONNELLE PERFORMANTE 10

1. Des crédits de fonctionnement en augmentation 10

2. L'activité des forces 11

3. Le développement maîtrisé de l'externalisation 12

C. DES STRUCTURES EN COURS D'ADAPTATION 13

1. Le réseau des bases aériennes 13

2. Les structures de commandement 14

II. -  LA MODERNISATION ET L'ENTRETIEN DES ÉQUIPEMENTS 15

A. UN EFFORT POURSUIVI EN FAVEUR DES ÉQUIPEMENTS 15

B. L'ATTENTION SOUTENUE PORTÉE À L'ENTRETIEN DES MATÉRIELS 17

1. Un effort volontariste engagé 17

2. De réels progrès enregistrés 18

3. Les limites à l'amélioration de la disponibilité des matériels 19

B. LES MOYENS DE SURVEILLANCE, DE CONTRÔLE ET DE CONDUITE DES OPÉRATIONS 20

1. Des ambitions affichées en matière de drones 20

a) La livraison attendue du système de drone intérimaire Male 20

b) Le lancement du démonstrateur Euromale 21

c) Le programme de démonstrateur UCAV 22

2. La mise en place d'une capacité de gestion opérationnelle globale 23

a) La poursuite du déploiement du SCCOA 23

b) L'achèvement de la modernisation du réseau de télécommunications des bases aériennes 24

3. La défense sol-air : le programme SAMP/T 24

C. LA MODERNISATION DE LA FORCE AÉRIENNE DE COMBAT 25

1. La poursuite du programme Rafale 25

a) Un équipement répondant aux besoins d'une armée de l'air moderne 25

b) La livraison des premiers exemplaires, une commande sur le point d'être passée 26

2. Les programmes de missiles air-air 27

a) L'équipement en missiles Mica 27

b) Le programme Meteor 28

3. Les programmes d'armements air-sol 29

a) Le missile de croisière Scalp 29

b) L'armement air-sol modulaire 30

D. LES ENJEUX MAJEURS DU RENOUVELLEMENT DE LA FORCE AÉRIENNE DE PROJECTION 31

1. Le renouvellement tardif de la flotte tactique 31

a) Une aviation de transport tactique sous tension 31

b) Les premiers jalons du programme A 400 M 32

c) Une transition complexe dans l'attente des premières livraisons de l'A 400 M 34

2. Le développement de la flotte logistique et de ravitaillement en vol 34

a) Des flottes aux capacités insuffisantes 34

b) Vers un renouvellement anticipé des avions ravitailleurs ? 35

TRAVAUX DE LA COMMISSION 37

I. -  AUDITION DU GÉNÉRAL RICHARD WOLSZTYNSKI, CHEF D'ÉTAT-MAJOR DE L'ARMÉE DE L'AIR 37

II. -  EXAMEN DES CRÉDITS 45

INTRODUCTION

L'armée de l'air assume des missions d'une grande diversité, allant de la protection du territoire national, par son dispositif de surveillance et de contrôle de l'espace aérien, à la projection de forces et de feu, en passant par la dissuasion. Ainsi que le montrent ses interventions récentes en Afghanistan et en République démocratique du Congo, elle apporte une contribution spécifique et déterminante à la gestion des conflits et des crises modernes. Elle se caractérise notamment par sa souplesse d'emploi et sa réactivité : en permanence, ses appareils sont susceptibles de se déployer en quelques heures sur un théâtre d'opérations et d'y exercer une pression durable, offrant ainsi aux autres composantes des forces armées une plus grande liberté d'action.

La réalisation de l'ensemble de ces missions par l'armée de l'air repose sur sa cohérence globale, laquelle s'appuie sur un réseau fonctionnel et polyvalent de bases aériennes. Celles-ci constituent des tremplins pour la projection de forces, mais aussi des structures d'accueil pour toute unité opérationnelle, de quelque armée que ce soit.

Ces impératifs de réactivité, de gestion en temps réel et de cohérence ont de fortes implications pour les personnels et imposent à l'armée de l'air de disposer d'équipements adaptés.

La reconnaissance de ces exigences s'est traduite par le fort accroissement de ses moyens budgétaires en 2003, puis en 2004, en conformité avec les dispositions de la loi de programmation militaire pour 2003-2008. En dépit d'un contexte économique et budgétaire difficile, cet effort est poursuivi en 2005 et les crédits alloués à l'armée de l'air apparaissent préservés ; ils se stabilisent à un niveau élevé, atteignant 6,1 milliards d'euros, soit une hausse de 0,58 % par rapport à 2004. Ces moyens permettront à l'armée de l'air de poursuivre l'indispensable renouvellement de son aviation de combat et de transport, de maintenir l'effort consenti en faveur de l'entretien de ses matériels ainsi que d'assurer sa gestion courante dans des conditions satisfaisantes.

ÉVOLUTION DES CRÉDITS DE LA DÉFENSE
ET DE L'ARMÉE DE L'AIR

(en millions d'euros courants)

Crédits de paiement
2004

Crédits de paiement
2005(1)

Variation en %

Défense

32 402

32 923

1,61 %

dont titre III

17 504,23

17 725,13

1,26 %

dont titres V et VI

14 897,89

15 197 ,99

2 %

Air

6 069,96

6 105,12

0,58 %

dont titre III

2 455,25

2 470,17

0,6 %

dont titres V et VI

3 614,71

3 634,95

0,56 %

(1) Projet de loi de finances

Le rapporteur avait demandé que les réponses à son questionnaire budgétaire lui soient adressées au plus tard le 8 octobre 2004, date limite résultant de l'article 49 de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances.

A cette date, 36 réponses étaient parvenues, soit un taux de 85,7 %.

I. -  UN BUDGET DE RÉMUNÉRATIONS ET DE FONCTIONNEMENT MAÎTRISÉ

Le montant des crédits ordinaires de l'armée de l'air inscrits dans le projet de loi de finances pour 2005 s'établit à 2,470 milliards d'euros, en hausse de 0,6 % par rapport à 2004, et il permet d'assurer la gestion courante dans le respect des objectifs définis par la loi de programmation militaire. De même qu'en 2004, il inclut une expérimentation de globalisation des crédits selon les principes de la loi organique relative aux lois de finances du 1er août 2001, au sein de la base aérienne 116 de Luxeuil.

Évolution par chapitre du titre III

pour l'armée de l'air

(en millions d'euros courants)

2004

2005(1)

Rémunérations et charges sociales

1 925,11

1 900,8

Alimentation (34-10, art 10)

50,94

51,1

Fonctionnement (34-03)

452,32

491,07

BA 116 (37-01, art 10 et 20)

22,73

23,05

Musée de l'air et de l'espace (36-01, art 90)

4,15

4,15

TOTAL

2 455,25

2 470,17

(1) Projet de loi de finances

A. DES CRÉDITS DE RÉMUNÉRATIONS AJUSTÉS

1. Des dépenses de personnel stables

La quasi-stabilité des dépenses de rémunérations et de charges sociales recouvre des mouvements contrastés. Parmi les augmentations de dépenses, doivent être mentionnés les mesures relatives au plan d'amélioration de la condition militaire, qui représentent 6,12 millions d'euros, la revalorisation du point fonction publique, pour 8,09 millions d'euros, le rebasage de la masse salariale, pour 3,77 millions d'euros, ainsi que le versement de la cotisation employeur au titre des retenues sur pensions résultant de l'intégration d'une partie des indemnités dans le calcul des retraites, à hauteur de 12,89 millions d'euros.

Dans le même temps, le transfert des crédits de prestations familiales vers les caisses d'allocations familiales se traduit par une diminution des dépenses de 32,177 millions d'euros, tandis que des mesures d'économies sont réalisées par le biais de la réduction de 109 postes, pour un montant de 3,375 millions d'euros : 95 postes sont supprimés, afin de tirer les conséquences de la mise en œuvre de l'externalisation de certaines fonctions, telles que la gestion des véhicules de la gamme commerciale et celle des rechanges des matériels aéronautiques, un poste disparaît en raison du développement de l'économat des armées, dix postes sont supprimés en raison du transfert de la gestion des prestations familiales et trois postes disparaissent au titre des restructurations. Interviennent également plusieurs mesures de transferts internes de personnels, concernant 371 postes : corrélativement à la délégation de certaines missions sanitaires au service de santé des armées, 336 sous-officiers relèveront désormais du budget de ce dernier ; vingt-deux postes permanents à l'étranger seront également transférés, ainsi que treize autres au titre de l'expérimentation de la globalisation de la dotation du service à compétence nationale des archives.

Enfin, des mesures de transfert externe de personnels concernent quatorze postes, dont douze en direction du secrétariat général de la défense nationale (SGDN) et de l'institut des hautes études de la défense nationale (IHEDN). Au total, compte tenu des mesures d'économies et de transfert, les effectifs budgétaires militaires de l'armée de l'air vont diminuer de 494 personnes en 2005.

2. Une gestion des effectifs adaptée

La diminution des effectifs budgétaires militaires, rompant avec la stabilité observée en 2004, s'accompagne de l'évolution de leur ventilation.

Effectifs budgétaires de l'armée de l'air

Catégories

2004 (1)

2005 (2)

Evolution

Officiers

6 923

6 903

- 20

Sous-officiers

37 214

36 477

- 737

Engagés

17 578

17 852

+ 274

Volontaires

1 891

1 880

- 11

Effectifs militaires

63 606

63 112

- 494

Effectifs civils

5 521

5 373

- 148

TOTAL GÉNÉRAL

69 127

68 485

- 642

(1) Loi de finances initiale

(2) Projet de loi de finances

A la suite des importantes modifications apportées en 2004 par la transformation, à bilan financier constant, de 483 droits budgétaires de sous-officiers en 87 droits d'officiers, 3 droits de sous-officiers et 393 droits de militaires techniciens de l'air (MTA), deux mesures seront mises en œuvre en 2005, afin d'adapter les niveaux de qualification des personnels aux postes à pourvoir. D'une part, 300 postes de sous-officiers seront transformés en 300 postes de MTA, ce qui répond à la volonté d'élargir les domaines d'emploi des MTA et de recentrer les sous-officiers sur leur rôle d'encadrement et d'expertise technique. D'autre part, il sera procédé à la transformation de 102 postes de sous-officiers supérieurs en 102 postes de sous-officiers subalternes.

La comparaison entre le niveau des effectifs budgétaires et celui des effectifs réels laisse apparaître un sous-effectif global d'environ 4,2 %. Ainsi que l'a expliqué le chef d'état-major de l'armée de l'air lors de son audition devant la commission, le 20 octobre, l'armée de l'air a fait le choix d'exclure tout dépassement du montant autorisé pour sa masse salariale, ce qui suppose, par construction, d'accepter un sous-effectif. De fait, la notion de sous-effectif moyen n'a guère de signification sur le terrain, les ajustements étant décidés en fonction des besoins.

Comparaison des effectifs budgétaires et des effectifs réels

2004

2005

Effectifs budgétaires

Effectifs réels

Ecart

Effectifs budgétaires

Effectifs réels

Ecart

Officiers

6 923

6 880

- 0,6 %

6 903

6 903

0,00 %

Sous-officiers

37 214

35 594

- 4,3 %

36 477

35 624

- 2,3 %

Militaires du rang engagés

17 578

17 064

- 2,9 %

17 852

16 505

- 7,5 %

Volontaires

1 891

1 179

- 37,6 %

1 880

1 212

- 35,5 %

Total militaires

63 606

60 717

- 4,5 %

63 112

60 244

- 4,5 %

Total civils*

5 521

5 473

- 0,9 %

5 373

5 366

- 0,1 %

TOTAL GENERAL

69 127

66 190

- 4,2 %

68 485

65 610

- 4,2 %

* Effectifs air uniquement (hors administration centrale).

Ce constat n'exclut évidemment pas l'instauration de mesures d'aménagement des effectifs ; les sous-effectifs enregistrés dans le corps des sous-officiers ont ainsi conduit à engager en 2003 et 2004 une hausse des recrutements et, en 2005, le volume de ces derniers se stabilisera au niveau élevé atteint en 2004. De plus, afin de corriger le déficit de candidatures recensé dans certaines spécialités bien identifiées, une prime d'attractivité a été instaurée par le décret du 27 juin 2003 (1).

Recrutement des sous-officiers (1)

Ecole

1999

2000

2001

2002

2003

2004(2)

2005(2)

Rochefort

1 135

1 209

1 140

1 120

1 268

1 642

1 624

Saintes

184

154

153

165

182

180

180

Total

1 319

1 363

1 293

1 285

1 450

1 822

1 804

(1) L'année est celle de sortie d'école.

(2) Prévisions.

Par ailleurs, il convient de souligner que le sous-effectif prévisionnel des engagés, c'est-à-dire des militaires techniciens de l'air, s'avère important ; or, cette catégorie de personnel, créée en 1997 lors de la mise en place de la professionnalisation, assure des missions essentielles, par exemple en matière de logistique et de protection des bases aériennes. Il s'agit là d'un problème de gestion concernant une catégorie de personnels relativement nouvelle, qui n'est pas encore stabilisée.

B. UNE GESTION OPÉRATIONNELLE PERFORMANTE

1. Des crédits de fonctionnement en augmentation

Les crédits alloués au fonctionnement de l'armée de l'air connaissent une hausse marquée de 8,6 %, passant de 452,3 millions d'euros en 2004 à 491 millions d'euros en 2005. Une partie de cette augmentation résulte d'une modification de la construction budgétaire : la compensation financière versée à la SNCF en contrepartie des réductions consenties aux militaires, jusqu'à présent versée globalement par le ministère de la défense, est désormais à la charge des différentes armées. Le transfert de cette indemnité compensatrice se traduit par l'inscription de 26,98 millions d'euros supplémentaires dans le budget de l'armée de l'air, mais ne correspond pas à une augmentation de ses moyens de fonctionnement. Par ailleurs, la dotation en carburants et fluides d'aéronefs s'accroît de 8 %, passant de 148,7 millions d'euros en 2004 à 160,7 millions d'euros en 2005. La détermination de ce montant s'est fondée sur l'hypothèse d'un baril de pétrole à 24,40 dollars.

L'augmentation de la dotation en carburants est évidemment positive ; toutefois, les experts s'accordent à espérer, dans le meilleur des cas, un cours moyen avoisinant 30 dollars, tandis que le prix du baril atteint actuellement des niveaux historiques, de plus de 50 dollars. Le chef d'état-major de l'armée de l'air a indiqué à la commission que la dotation budgétaire inscrite ne permettra pas de couvrir l'ensemble des besoins liés aux activités d'entraînement si le prix du baril de pétrole se maintient à son niveau actuel. Il convient de rappeler que, pour le budget de 2004, qui avait tablé sur un baril de pétrole à 23 dollars, l'écart entre les hypothèses de prix et le tarif constaté atteint plus de 60 %, ce qui a conduit à une insuffisance de la dotation en carburant estimée à 69,7 millions d'euros au 30 septembre 2004. C'est pourquoi il conviendra d'être particulièrement vigilant sur l'évolution du prix du carburant et sur son incidence sur l'activité des forces aériennes.

Parallèlement, les crédits de fonctionnement des bases aériennes restent stables, s'établissant à 139,44 millions d'euros, contre 139,39 millions d'euros en 2004 ; de même, les dépenses liées à l'activité opérationnelle, qui comprennent notamment les dotations correspondant à la réalisation des grands exercices et revêtent à ce titre une grande importance, se stabilisent à 29,59 millions d'euros en 2005, après une croissance de 3 % en 2003, puis en 2004.

2. L'activité des forces

La qualité d'une armée professionnelle repose largement sur l'entraînement opérationnel des forces et c'est à ce titre que la loi de programmation militaire pour 2003-2008 définit des objectifs quantitatifs d'entraînement des équipages : le nombre annuel d'heures de vol est fixé à 180  pour les pilotes de chasse - norme qui est également celle de l'OTAN - et à 400 pour les pilotes de transport.

Si la norme retenue pour les pilotes de combat a été strictement respectée entre 1998 et 2001, elle n'a pas été atteinte en 2002, l'activité annuelle des pilotes s'étant limitée à 165 heures en raison de la disponibilité insuffisante de certains appareils. Toutefois, l'entraînement opérationnel s'est redressé en 2003, atteignant 178 heures (dont 183 heures en moyenne pour les forces aériennes stratégiques) et devrait s'établir à un niveau similaire en 2004.

Les résultats obtenus au regard des objectifs fixés pour les pilotes de l'aviation de transport apparaissent moins favorables ; sans doute, le niveau de 400 heures est-il quelque peu ambitieux, notamment en raison de la forte mobilisation de la flotte de transport dans des opérations extérieures, conjuguée à la disponibilité limitée de cette flotte. De surcroît, le retrait progressif de plusieurs appareils de transport en 2004, puis en 2005, devrait entraîner une baisse de l'activité des pilotes. En tout cas, tant pour l'aviation de combat que pour celle de transport, il apparaît que la disponibilité des appareils constitue une variable décisive pour l'entraînement des forces.

Activité moyenne des pilotes
de la force aérienne de projection

(heures de vol)

1999

2000

2001

2002

2003

2004
estimation

2005
prévision

Pilotes à l'instruction (1)

330

240

270

240

270

270

250

Pilotes qualifiés (2)

370

400

320

320

330

310

300

(1) Pilotes en progression professionnelle, depuis leur arrivée en unité opérationnelle jusqu'à l'obtention de la qualification de « pilote opérationnel ».

(2) Pilotes opérationnels, commandants de bord et moniteurs en vol.

Outre ces objectifs quantitatifs, la loi de programmation militaire définit pour les forces aériennes une norme qualitative d'entraînement, à savoir la participation à un exercice international majeur par pilote tous les deux ans ; ce type de formation est devenu indispensable, les missions communes réunissant des aviations de plusieurs pays se multipliant, comme l'illustrent les opérations conduites au Kosovo et en Afghanistan. En 2004, l'armée de l'air a ainsi pris part à de nombreux exercices multinationaux, tels que Eole (réunissant la France, l'Italie, l'Espagne et le Portugal), à vocation interarmées, Maple Flag, qui se tenait au Canada, et Nato Air Meet ; pour la première fois, elle a participé à l'exercice Pitch Black en Australie, lequel rassemblait les aviations australienne, américaine, singapourienne et thaïlandaise. En revanche, elle a été contrainte d'annuler sa participation à l'exercice Cooperative Key en raison de l'indisponibilité de sa flotte d'avion de transport C 160.

Au-delà de ces activités d'entraînement, il convient de souligner l'importante sollicitation des forces aériennes dans les opérations extérieures. Les moyens de la force aérienne de projection (FAP), combinés à des matériels affrétés par l'armée de l'air, tels que des Antonov 124, sont ainsi mobilisés en Afghanistan, pour l'opération Heracles, et en Côte d'Ivoire, pour l'opération Licorne, tandis que des avions et hélicoptères ont été envoyés à Haïti entre mars et juin 2004, afin d'assurer la protection des ressortissants français et de participer à la force intérimaire multinationale en Haïti (FIMH) de l'ONU.

Dans le même temps, ces moyens relevant de la FAP sont mobilisés de façon plus ponctuelle pour des opérations humanitaires, comme à Madagascar en mars 2004, après le passage du cyclone Gafilo, ainsi qu'à Haïti, en septembre 2004, après les ravages provoqués par le cyclone Jeanne. En août dernier, l'armée de l'air a également pris part à l'opération Dorca, dispositif humanitaire mis en place par la France pour aider les populations déplacées au Darfour.

3. Le développement maîtrisé de l'externalisation

La professionnalisation des armées et la réduction de format qui l'a accompagnée impliquent un recentrage des personnels sur les activités proprement militaires. Dans ce contexte, le recours à l'externalisation de certaines fonctions ne relevant pas du cœur du métier militaire constitue un instrument fort utile, que l'armée de l'air emploie de façon pragmatique. Depuis 2000, celle-ci a généralisé cette pratique, au profit de toutes les bases aériennes, pour l'entretien des locaux et des espaces verts, le ramassage des ordures et le nettoyage des tenues ; elle s'emploie à l'élargir à des fonctions nouvelles, telles que le transport du personnel, l'entretien des installations et le soutien bureautique, en procédant à des expérimentations qui, selon leurs résultats, sont ensuite pérennisées ou interrompues. A titre d'exemple, l'externalisation de l'ensemble des fonctions de soutien du détachement « air » de Varennes-sur-Allier a donné pleine satisfaction et cette démarche doit être mise en œuvre dans d'autres implantations : l'externalisation du soutien de l'entrepôt du commissariat de l'air situé à Portes-les-Valence et la poursuite de l'externalisation de certaines fonctions de soutien sur le site de Romorantin ont été proposées par l'armée de l'air et acceptées par le ministère de la défense ; elles devraient être mises en application en 2005. De plus, l'armée de l'air est concernée par le projet d'externalisation de la gestion du parc de véhicules de la gamme commerciale, qui, conduit par le ministère de la défense, doit être mis en œuvre à la fin du premier trimestre de 2005.

La structure du budget ne permet pas de rendre compte de l'ensemble de l'effort d'externalisation. Si l'article 94 du chapitre 34-03 comporte 16,85 millions d'euros destinés à la sous-traitance pour 2005, ce sont environ 72,5 millions d'euros qui sont consacrés par année pleine au paiement des charges externalisées.

C. DES STRUCTURES EN COURS D'ADAPTATION

1. Le réseau des bases aériennes

Les deux décennies précédentes ont été caractérisées par une réduction drastique du nombre d'implantations de l'armée de l'air, vingt-sept bases aériennes (2), dont six dotées d'une piste d'envol, ayant été dissoutes ou transformées entre 1980 et 2002, afin de regrouper les forces sur des bases plus importantes. Ce mouvement est désormais infléchi, aucune base aérienne n'ayant été fermée depuis 2002 ; l'armée de l'air compte aujourd'hui trente-deux bases en métropole, dont vingt-quatre bases plateforme - incluant treize bases majeures de stationnement -, et huit bases non-plateforme - comprenant trois bases radars, une base entrepôt et quatre bases diverses ; s'y ajoutent deux écoles, l'école d'enseignement technique de l'armée de l'air de Saintes et l'école des pupilles de l'air de Grenoble, ainsi que quatre détachements « air », contre cinq en 2003. L'armée de l'air dispose de six bases aériennes hors de métropole, dont quatre en territoire français (Fort-de-France/Pointe-à-Pitre, Cayenne, Saint-Denis de la Réunion et Papeete) et deux à l'étranger, situées à Dakar et à Djibouti, auxquelles s'ajoute l'élément air de Nouméa.

Ainsi que le chef d'état-major de l'armée de l'air l'a indiqué à la commission, l'armée de l'air envisage d'engager une nouvelle rationalisation de son réseau de bases aériennes, laquelle pourrait se traduire par une réduction sensible du nombre des implantations, qui seraient alors modernisées, au-delà de 2010. De fait, même si les crédits dont dispose l'armée de l'air étaient maintenus à leur haut niveau actuel, l'entretien du patrimoine considérable que constituent les bases aériennes resterait difficile. Il convient donc d'adapter le volume des infrastructures à celui de la flotte, alors que le nombre d'avions de combat est passé de 450 en 1992 à 330 en 2004. Les travaux d'élaboration d'un schéma directeur des bases aériennes ont été confiés à un groupe de projet, dénommé « Air 2010 », qui s'est adjoint les services d'une entreprise de consultants.

Afin de compléter cette présentation des bases aériennes, doit être mentionnée la mise en place par l'armée de l'air d'une formation franco-belge des pilotes de combat sur la base aérienne de Cazaux ; la Belgique dispose de vingt-neuf appareils Alphajet pour ne former qu'un nombre limité de pilotes par an et il est apparu pertinent de créer un outil de formation commun. Six Alphajet, trente mécaniciens et des instructeurs sont d'ores et déjà présents et les premiers élèves belges sont arrivés. Cette base offrira ainsi un outil de formation attractif, qui suscite l'intérêt de plusieurs pays, tels que Singapour, la Grèce et la Suisse.

2. Les structures de commandement

Dès 2001, l'armée de l'air a engagé une réflexion sur l'évolution de ses structures, en se fixant pour objectif de renforcer sa réactivité et de s'adapter, à effectifs constants, aux nouvelles structures interarmées et interalliées. Une première étape a été franchie par la création, au sein du commandement de la défense aérienne et des opérations aériennes (CDAOA), d'un état-major opérationnel Air, remplaçant le centre d'opérations Air, en janvier 2003 ; cette réorganisation accompagnait la création par l'état-major des armées du centre de planification et de conduite des opérations (CPCO), au 1er juin 2003, et a permis à l'armée de l'air de mieux prendre en compte la dimension interarmées qui prévaut désormais dans la conduite des opérations militaires.

Toutefois, la constitution d'un tel pôle « opérations » au sein de l'armée de l'air ne constitue qu'un élément précurseur de la réorganisation de celle-ci en quatre pôles, les trois pôles restants correspondant respectivement à la préparation de forces, à leur soutien et à la gestion des ressources humaines. C'est dans cette perspective que l'équipe de projet « Air 2010 » est également chargée, outre ses travaux sur la rationalisation des bases aériennes, d'engager des réflexions sur la simplification des structures de l'administration centrale ainsi que sur sa déconcentration, alors même que l'armée de l'air rencontre des difficultés pour attirer les personnels en région parisienne. Ces travaux de conception du groupe « Air 2010 » doivent s'achever à la mi-2005.

Enfin, au titre des évolutions des structures de commandement européennes impliquant l'armée de l'air, doit être saluée la transformation de l'EAAC (European Airlift Coordination Cell), créé en septembre 2001, en EAC (European Airlift Centre), le 1er juillet 2004. L'EACC, mis en place sur la base aérienne d'Eindhoven, avait pour mission de coordonner, de façon incitative, l'emploi des capacités de sept pays européens (3) en matière de transport aérien et de ravitaillement en vol ; après trois années de fonctionnement, il a pleinement répondu aux attentes de ses fondateurs, en contribuant notamment au succès de l'opération Artémis conduite en Ituri. Rebaptisé EAC, il acquiert une compétence supplémentaire, en disposant de la capacité de planifier les besoins en transport militaire aérien, tout en coordonnant les efforts de ses membres dans la préparation de la mise en service prochaine des nouvelles flottes de transport (A 400 M, avions ravitailleurs) en Europe. L'armée de l'air contribue à l'EAC, organisme de vingt-cinq personnes, à hauteur de cinq personnes, dont le chef d'état-major de cette structure.

II. -  LA MODERNISATION ET L'ENTRETIEN DES ÉQUIPEMENTS

A. UN EFFORT POURSUIVI EN FAVEUR DES ÉQUIPEMENTS

Après un fort accroissement des crédits de paiement destinés à l'équipement de l'armée de l'air au cours des deux années précédentes, atteignant respectivement 17,7 % en 2004 et 16,6 % en 2003, l'année 2005 se caractérise par la stabilisation des moyens ; les crédits de paiement s'élèvent ainsi à 3,635 milliards d'euros dans le projet de loi de finances pour 2005, contre 3,614 milliards d'euros en 2004, soit une hausse de 0,56 % en euros courants.

Maintenus à un niveau satisfaisant, les moyens alloués à l'armée de l'air lui permettent de faire face aux échéances de paiement de programmes d'équipement majeurs, tels que le Rafale, l'A 400 M, le Mica et SCCOA, et de continuer l'effort de restauration de la disponibilité de la flotte aérienne engagé depuis 2002.

La poursuite de l'équipement en avions Rafale représente, comme les deux années précédentes, le tiers des crédits d'équipement de l'armée de l'air et les moyens qui y sont consacrés augmentent de 28,9 %, alors que se profile la mise en service du premier escadron de Rafale en 2006 et que se concrétise la passation, longtemps attendue, de la commande globale de 46 exemplaires. La mise en œuvre du programme d'avion A 400 M se traduit par l'inscription de 226,5 millions d'euros de crédits de paiement, en hausse de 17,5 % par rapport à 2004.

En revanche, les autorisations de programme connaissent une diminution drastique de 50,8 %, passant de 4,075 milliards d'euros en 2004 à 2,003 milliards d'euros pour 2005. L'évolution des autorisations de programme d'une année sur l'autre n'est pas toujours significative, compte tenu du montant des autorisations de programme ouvertes en loi de finances rectificative, ainsi que ce fut le cas en 2002, avec l'inscription en collectif de fin d'année de 2,27 milliards d'euros pour le financement de la commande de 46 Rafale Air ; de surcroît, la baisse constatée en 2005 intervient après une forte hausse, de 31 %, en 2004. On peut toutefois s'interroger sur les incidences de l'évolution prévue pour 2005, le montant des autorisations de programme étant inférieur de 33 % à celui prévu par la loi de programmation militaire pour 2003-2008 ; toutefois, la mobilisation de l'en-cours d'autorisations de programme de l'armée de l'air devrait permettre de tempérer les conséquences de cette diminution.

Titres V et VI air : crédits de paiement

(en millions d'euros)

Dotation
2004

Dotation
2005

Évolution
en %

Etudes (52-81, art. 11 et 12)

4,46

2,577

- 42,2 %

Espace. Systèmes d'information et de commandement (51-61, art. 11 à 13) dont :

66,16

114,11

+ 72,46 %

- MTBA (art. 12)

30,05

44,75

+ 48,9 %

- Syracuse III (art. 3)

5,39

11,86

+ 120 %

Forces nucléaires (51-71, art. 11, 12 et 81)

212,43

160,92

- 24,25 %

dont SIMMAD

120

87,03

- 27,47 %

Equipements interarmées

1 151,10

1 320,16

+ 14,69 %

(53-71, art. 11 à 17) dont :

- FSAF (SAMP/T) (art. 12)

27,6

19,18

- 30,5 %

- MICA (art. 13)

99,17

58,87

- 40,6 %

- Rafale (art. 15)

898,01

1 157,95

+ 28,9 %

- Scalp/EG (art. 16)

95,52

39,72

- 58,4 %

- AASM (art. 17)

13,24

25,17

+ 90,1 %

Equipement Air (53-81, art. 11 à 22 et 82)

993,9

894,98

- 9,9 %

dont :

- ATF (art. 17)

192,62

226,46

+ 17,5 %

- Mirage 2000 D (art. 18)

19,32

17,83

- 7,7 %

- SCCOA (art. 19)

210,55

205,73

- 2,3 %

- Apache (art. 21)

10,10

0,46

- 95,4 %

- Mirage 2000-5 (art. 22)

8,62

6,91

- 19,8 %

- MRTRV (art. 82)

56,81

7,58

- 86,6 %

Infrastructures (54-41, art. 11 à 13),

178,35

159,68

- 10,4 %

dont :

- Infrastructures (art. 11)

158,14

147,63

- 6,6 %

- SCCOA (art. 13)

16,64

11,24

- 32,4 %

Soutien des forces et munitions
(55-11, art. 11 à 15)

163,66

152,04

- 7,1 %

Entretien programmé des matériels
(55-21, art. 11, 13 et 61)

839,04

824,17

- 1,8 %

dont SIMMAD (art 11)

803,14

795,75

- 0,9 %

Total titre V

3 609,10

3 630,68

+ 0,6 %

Titre VI

5,63

4,26

- 24,3 %

TOTAL

3 614,71

3 634,94

+ 0,56 %

B. L'ATTENTION SOUTENUE PORTÉE À L'ENTRETIEN DES MATÉRIELS

1. Un effort volontariste engagé

L'amélioration de la disponibilité des équipements constitue l'une des priorités définies par la loi de programmation militaire ; cette volonté s'est traduite par une hausse importante des crédits alloués à l'entretien programmé des matériels (EPM) pour toutes les armées en 2003 et en 2004. Le projet de loi de finances pour 2005 poursuit cet effort : si, par rapport à 2004, on constate une diminution des crédits d'EPM dans leur ensemble et de ceux destinés à l'armée de l'air, leur niveau reste supérieur à la moyenne annuelle définie par la loi de programmation militaire.

Evolution des crédits d'entretien programmé des matériels
de l'armée de l'air depuis 1999

(en millions d'euros courants)

1998

1999

2000

2001

2002

2003

2004

2005

Autorisations de programme

743,04

945,18

778,25

817,13

994,67

989,85

1 094,64

944,80

Crédits de paiement

719,25

781,61

712,24

725,96

731,45

900,42

1 004,92

945,39

Cet effort financier s'est conjugué à la réorganisation de la maintenance des aéronefs, par la création de la SIMMAD (structure intégrée de maintien en condition opérationnelle des matériels aéronautiques de la défense) en 2000. La SIMMAD s'est vu confier la mission d'assurer le maintien en condition opérationnelle (MCO) de tous les matériels aériens des trois armées ainsi que de la gendarmerie, ce qui représente en 2004 un parc de 2 029 aéronefs, dont 1 164 unités pour l'armée de l'air (1 076 avions et 88 hélicoptères). La mise en place d'une telle structure intégrée avait pour objectif de centraliser et d'optimiser les processus de maintenance et, partant, de restaurer la disponibilité des matériels.

La SIMMAD a peu à peu reçu tous les leviers d'action nécessaires pour accomplir sa mission, assurant notamment depuis le 1er septembre 2003 la maîtrise d'ouvrage déléguée de la maintenance aéronautique et de la distribution des pièces de rechange, et sa mise en place est désormais achevée. Ses effectifs budgétaires atteignent 914 (4) ; il convient toutefois de noter que ses effectifs réels s'établissaient, au 30 septembre 2004, à 824, soit un sous-effectif de 9,8 % ; cette situation trouve son origine non dans un manque de moyens financiers, mais dans des difficultés de recrutement. Si ce sous-effectif n'apparaît pas pénalisant pour l'accomplissement des tâches de maintenance, il se traduit sans doute par une moindre activité d'analyse du retour d'expérience, alors même que celui-ci permet d'améliorer à terme les processus retenus.

2. De réels progrès enregistrés

Les efforts de redressement de la disponibilité des matériels ont porté leurs fruits, puisque le taux moyen de disponibilité des aéronefs est passé de 54,2 % en décembre 2000 à environ 63 % en août 2004, ce qui se traduit par 145 avions en ligne rendus aux armées.

Disponibilité des principaux avions de l'armée de l'air

Type d'aéronef

Avions

2002 (en %)

2003 (en %)

Août 2004 (en %)

Avions de combat

Taux global

60,76

65,36

68,98

Mirage 2000 B/C

62,65

70,25

68,38

Mirage 2000 -5F

53,31

64,82

66,02

Mirage 2000 D

50,76

54,75

60,91

Mirage 2000 N

56,16

69,55

71,29

Mirage F1 B

59,72

60,00

74,96

Mirage F1 CR

62,06

62,54

71,32

Mirage F1 CT

57,39

61,90

72,32

Avions de soutien

Taux global

58,62

62,44

63,48

DC8 S

92,83

82,11

89,56

Alphajet

57,68

67,07

69,02

Epsilon

57,98

51,62

52,37

Tucano

45,51

46,15

59,76

Xingu

60,38

68,36

69,95

Mystère

51,49

53,96

53,64

TBM 700

67,76

73,70

75,60

E3F

84,33

94,41

98,76

Avions de transport et de ravitaillement

Taux global

58,37

58,60

58,68

C 130

48,19

51,38

61,75

C 160

56,86

56,55

53,38

DC8

82,01

65,22

93,47

CN 235

65,72

61,18

61,89

A 319

98,37

98,47

97,74

A 310

92,65

88,03

91,83

KC 135

69,66

75,55

77,53

Disponibilité des hélicoptères de l'armée de l'air

Type d'aéronef

Avions

2002 (en %)

2003 (en %)

août 2004 (en %)

Hélicoptères de soutien

Taux global

65,98

69,81

69,55

Fennec

65,98

70,10

70,86

Ecureuil

67,58

60,38

Hélicoptères de transport

Taux global

57,92

58,55

61,54

Super Puma

57,94

55,33

62,55

Puma

57,91

59,54

61,23

Cette amélioration est particulièrement perceptible pour les avions de combat, dont la disponibilité frôle désormais 70 %, contre 60,7 % en 2002, ainsi que pour les avions de soutien. Si la disponibilité des hélicoptères de transport de l'armée de l'air reste moindre, s'établissant à 61,5 %, elle a connu une hausse significative depuis 2002. Enfin, la disponibilité des avions de transport et de ravitaillement s'avère quelque peu en retrait, ce qui résulte de la forte sollicitation de cette flotte ainsi que de son vieillissement.

Ces progrès marqués résultent de l'accroissement des crédits d'EPM, mais aussi de l'amélioration de la gestion de la maintenance, notamment par le développement des marchés globalisés de plus longue durée, de préférence à des marchés fractionnés, au périmètre limité. Cette démarche permet aux industriels de mieux s'organiser et, partant, de pratiquer des prix moins élevés.

La création du dispositif ORRMA (optimisation du réapprovisionnement des rechanges consommables des matériels aéronautiques), en 2004, s'inscrit dans cette logique ; face au fractionnement des réapprovisionnements en rechanges, qui ne garantissaient pas l'exhaustivité de la couverture contractuelle, et au manque de hiérarchisation de l'urgence des besoins des différentes armées, la SIMMAD s'est vu confier la mise sur pied d'un contrat unique de prestation de service pour les rechanges consommables (5), couvrant toutes les armées. Ce contrat doit permettre de réduire les délais d'approvisionnement ainsi que les stocks de pièces détachées, des obligations de résultats, associées à des pénalités en cas de non-respect, étant assignées au prestataire. Le 14 avril 2004, ce marché a été attribué à la société INEO ; il atteint 1,17 milliard d'euros pour une période de dix années, soit une durée donnant une bonne visibilité à l'industriel. La passation de ce contrat constitue une avancée indéniable, en allant dans le sens d'une meilleure rationalisation ; elle a imposé une préparation minutieuse, notamment parce qu'elle impliquait une évolution substantielle de l'organisation actuelle, et se traduira logiquement par une diminution des effectifs budgétaires de la SIMMAD de l'ordre de 20 à 30 personnes.

3. Les limites à l'amélioration de la disponibilité des matériels

Si les progrès enregistrés depuis deux années sont significatifs, subsistent des limites d'ordre structurel au redressement du taux de disponibilité des matériels aériens, lequel, atteignant aujourd'hui 63 %, reste en deçà de l'objectif ambitieux de 75 % défini par la loi de programmation militaire.

Le vieillissement de certaines flottes, telles celles de transport, et leur absence d'uniformité renchérissent le coût de leur maintenance. C'est d'ailleurs pour maîtriser les dépenses de MCO que l'armée de l'air a décidé d'avancer à 2004 le retrait des avions Nord 262, lesquels étaient entrés en service en 1970, ainsi que celui des Mystère 20 et des DC 8 de transport logistique, entrés en service respectivement en 1968 et en 1981. Dans le même temps, de nouveaux appareils sont livrés à l'armée de l'air et sont nécessairement plus coûteux à entretenir à leurs débuts.

De plus, les industriels assurant les prestations d'entretien jouissent souvent d'une situation de monopole, ce qui les conduit parfois à pratiquer des augmentations de tarifs considérables, sans véritable justification. A titre d'exemple, le coût annuel du MCO du DC 8 Sarigue a atteint 18 millions d'euros, soit le budget de fonctionnement de six bases aériennes ; cet élément, conjugué à des arguments opérationnels, a justifié son retrait du service, décidé en septembre 2004.

Enfin, les progrès technologiques continus, notamment dans le domaine des microprocesseurs, conduisent au fort développement des obsolescences des appareils, lesquels doivent être traités en conséquence.

Ce sont autant de facteurs sur lesquels ni la SIMMAD ni l'armée de l'air n'ont véritablement de prise, mais qui pèsent sur le taux de disponibilité des équipements.

B. LES MOYENS DE SURVEILLANCE, DE CONTRÔLE ET DE CONDUITE DES OPÉRATIONS

1. Des ambitions affichées en matière de drones

Les travaux engagés sur les drones au sein de l'armée de l'air ont mis en lumière l'intérêt de ces équipements pour des missions complémentaires de celles des appareils de combat pilotés. L'usage des drones apparaît ainsi justifié soit pour des missions d'observation d'une durée longue, dépassant la capacité de vigilance d'un pilote, soit pour des missions présentant des dangers disproportionnés pour un équipage. La France, qui assume la présidence du groupe de projet sur les drones au sein du processus ECAP (European capabilities action plan), a adopté une position volontariste dans le domaine des drones, en lançant tour à tour deux programmes de démonstrateur, de nature très différente ; ouverts à des coopérations européennes, ils ont d'ores et déjà suscité l'intérêt de plusieurs pays.

a) La livraison attendue du système de drone intérimaire Male

A partir de 2000, l'armée de l'air a procédé à l'expérimentation du système polyvalent de surveillance et d'action Hunter, qui, fabriqué par Israel Aircraft Industry (IAI), comprend quatre drones et deux stations sols ; celui-ci a été déployé deux fois au Kosovo, ainsi qu'à l'occasion du sommet du G8 à Evian, en juin 2003, et lors des cérémonies commémoratives du débarquement en Normandie, en juin 2004. Il a été retiré du service en septembre 2004 et c'est au système intérimaire de drones Male (6) (SIDM), également dénommé Eagle, qu'il appartiendra de prendre la relève. Solution présentée par EADS, le SIDM est fondé sur le système Héron (produit par la société IAI) profondément remanié et rééquipé. Il comprend trois véhicules et deux stations sol. Lui seront dévolues des missions de surveillance et de reconnaissance, de jour comme de nuit, ainsi que la désignation d'objectifs. Son plafond opérationnel sera de 8 000 mètres et son endurance de 12 heures ; muni de capteurs optiques, infrarouges et radars, il sera doté de liaisons par satellite et à vue pour son pilotage à distance et pour le transfert des informations qu'il aura recueillies.

Le contrat a été notifié en août 2001 et la livraison du système était initialement prévue en 2003 ; toutefois, en raison de retards successifs, elle n'interviendra qu'au printemps 2005, pour une mise en service en novembre 2005 ; ce décalage se traduira par une diminution des capacités de l'armée de l'air dans la période comprise entre le retrait du système Hunter et l'arrivée du SIDM.

Le programme SIDM a pour vocation de fournir des moyens d'observation et de reconnaissance à l'armée de l'air, tout en lui permettant d'affiner le concept d'emploi de ce type d'équipement, dans l'attente du programme de drone Male ; celui-ci, offrant des performances accrues, devrait être mis en service à l'horizon 2010 et c'est pour préparer cette échéance qu'a été lancé le démonstrateur Euromale.

b) Le lancement du démonstrateur Euromale

Le futur système Male doit surclasser en tous points le SIDM ; avec un volume et une masse deux à trois fois supérieurs à ceux de ce dernier, son autonomie doit atteindre 24 heures et son altitude 15 000 mètres ; il pourra emporter de 250 à 400 kilogrammes de charges utiles. Il doit disposer, outre les aptitudes du SIDM, de capacités de relais de communication, de recueil de renseignements d'origine électromagnétique, de brouillage et de leurrage des capteurs adverses ainsi que de détection de missiles balistiques. Six systèmes à quatre vecteurs et 25 stations sols devraient être livrés aux armées.

Dès mai 2002, ce programme a fait d'un accord de coopération avec les Pays-Bas. Toutefois, une plus large coopération européenne était recherchée dans le cadre de la démarche ECAP. C'est dans cette perspective que la ministre de la défense a annoncé, en juin 2004, le lancement d'un programme de démonstrateur de drone Male, baptisé Euromale, en soulignant qu'il était largement ouvert à des coopérations européennes. La notification du contrat couvrant l'ensemble des travaux du démonstrateur est fixé à 2005 ; en vue d'une livraison aux armées des premiers systèmes Male en 2010, le démonstrateur devra voler en 2008.

Un tel programme de démonstrateur est destiné à répondre à un besoin opérationnel stratégique des armées françaises et européennes - dans le cadre du processus ECAP, les différents états-majors européens avaient exprimé à la fin de 2003 un besoin de 39 systèmes de drones Male à l'horizon 2010 -, mais il a également pour objectif de structurer une offre industrielle européenne autonome dans ce domaine. C'est pourquoi la réalisation du démonstrateur Euromale, reprenant les technologies de l'Eagle 2, produit par IAI, a été confiée à quatre industriels : EADS, qui en assure la maîtrise d'œuvre, ainsi que Dassault, Thales et Snecma, intervenant chacun dans leurs domaines d'activité. Ce programme de démonstrateur suscite l'intérêt d'autres pays européens : outre les Pays-Bas, la Suède et l'Espagne pourraient s'y adjoindre, ce qui devrait se traduire par l'association d'autres industriels.

Le coût global du projet Euromale est estimé à 300 millions d'euros, dont 75 millions d'euros seront pris en charge par l'Etat, les industriels devant également apporter une contribution significative au financement, supérieure à 150 millions d'euros.

c) Le programme de démonstrateur UCAV

Le lancement du démonstrateur Euromale fait suite à celui du démonstrateur d'avion de combat sans pilote dit UCAV (Unmanned combat aerial vehicle), en juin 2003. Toutefois, le programme UCAV, rebaptisé Neuron, relève d'une logique tout à fait différente de celle de l'Euromale ; celui-ci répond à un besoin opérationnel bien identifié et s'inscrit dans la perspective d'une production de série, une fois son développement achevé, à partir de 2008, tandis que Neuron a pour objectif premier de préserver les compétences et les technologies nationales, voire européennes, en matière d'avions de combat, et n'a pas vocation à devenir un matériel opérationnel dans l'immédiat. De fait, si les drones ont pour mission de compléter l'action des avions pilotés, l'UCAV relève d'un concept différent, qui se rapproche davantage de celui de l'avion de combat. Le débat est ouvert sur le mode d'utilisation de ce nouvel outil et la livraison du démonstrateur doit permettre à l'armée de l'air de définir son concept opérationnel.

C'est à Dassault qu'a été attribuée la maîtrise d'œuvre du démonstrateur ; il a été décidé, en juin 2004, qu'EADS deviendrait un partenaire privilégié sur ce programme. En effet, à l'occasion du lancement de l'Euromale, les deux industriels, concurrents dans le domaine des avions de combat pilotés, ont conclu un accord instaurant une coopération croisée entre eux dans le domaine des drones UCAV et Male ; cet accord répartit de facto la responsabilité de chacun, Dassault jouant un rôle prédominant dans le domaine des UCAV et EADS détenant une position de leader sur les drones Male.

Dès l'origine, le programme de démonstrateur UCAV a été ouvert aux autres pays européens, lesquels ont été invités à apporter les capacités technologiques de leur industrie et à participer au financement. De fait, ce schéma de coopération proposé par la France a remporté un succès incontestable auprès de nos partenaires européens : quatre pays, la Suède, la Grèce, la Suisse et l'Italie, ont rejoint le programme UCAV, tandis que se tiennent des négociations avancées avec l'Espagne et la Belgique. Au total, le coût prévisionnel du programme est estimé à 300 millions d'euros, mais la détermination des participations financières des différents pays n'est pas achevée. Pour la France, ce financement sera assuré par le budget d'études amont de la DGA.

2. La mise en place d'une capacité de gestion opérationnelle globale

a) La poursuite du déploiement du SCCOA

Le programme SCCOA (Système de conduite et de commandement des opérations aériennes) est destiné à améliorer et à renouveler les dispositifs de l'armée de l'air en matière de surveillance, d'information, de gestion des forces ainsi que de planification et de conduite des missions opérationnelles. Il répond à un double objectif : doter l'armée de l'air d'une capacité de gestion globale de ses systèmes d'armes, à partir d'un commandement unique des opérations aériennes, fortement automatisé ; assurer l'interopérabilité de ce dispositif avec celui des autres armées, en étant cohérent avec le programme ACCS (Air Command and Control System) de l'OTAN, qui a des finalités communes à celles du SCCOA, tout en couvrant un périmètre moindre. Le SCCOA comporte également des éléments projetables, de façon à pouvoir être utilisé en opérations extérieures.

Le programme a été lancé en 1993 et comprend trois étapes ; celles-ci s'étalent sur une longue période et se chevauchent, en se complétant mutuellement. La troisième étape, lancée en 2001, se poursuivra tout au long de la période couverte par la loi de programmation militaire, pour s'achever en 2012 ; une quatrième étape est à l'étude.

Ce programme complexe met en oeuvre des équipements nombreux, tels que des radars de détection, un radar de surveillance de l'espace dénommé Graves et le radar de veille lointaine Nostradamus, le logiciel STRIDA (système de traitement des informations de défense aérienne), faisant l'objet d'évolutions au fil du temps. Il inclut la mise en place de centres chargés de la conduite des opérations aériennes ainsi que de missions de détection et de contrôle.

Au cours de l'année 2004, des contraintes budgétaires ont conduit à procéder à des ajustements sur ce programme : le périmètre initial de la troisième étape a été restreint, les éléments ôtés ayant été reportés dans la quatrième étape à venir, tandis que des opérations de la troisième étape seront décalées d'une à deux années. Toutefois, ces retards n'affectent pas la cohérence du SCCOA avec le programme ACCS de l'OTAN, lequel a connu un décalage similaire.

Au coût des facteurs 2004, le coût total du SCCOA est évalué à 2,172 milliards d'euros. Dans le projet de loi de finances initiale pour 2005, 216,97 millions d'euros sont inscrits en crédits de paiement au titre de ce programme.

b) L'achèvement de la modernisation du réseau de télécommunications des bases aériennes

Le programme MTBA (Modernisation du réseau de télécommunications des bases aériennes) a pour objet de couvrir l'ensemble des besoins de communications fixes de l'armée de l'air, de façon complémentaire avec le réseau interarmées Socrate ; il prend également en compte les besoins de communication des unités projetées sur des théâtres d'opérations extérieurs, en incluant une version déployable.

Composé de stations modulaires ainsi que d'un ensemble d'artères de communication assurant le transport des informations sous une forme unique, ce programme comprend 36 MTBA fixes, concernant cent sites de l'armée de l'air, et 6 MTBA déployables. Le programme MTBA s'insère dans le programme SCCOA, en prenant en compte ses besoins de télécommunications sur les bases aériennes.

La livraison des MTBA a débuté en 1999 et s'achèvera en 2005, avec l'arrivée de la dernière unité fixe. Le coût total du programme est aujourd'hui estimé à 474,1 millions d'euros, au coût des facteurs 2004, et sont prévus à ce titre 45,5 millions d'euros en crédits de paiement dans le projet de loi de finances pour 2005.

3. La défense sol-air : le programme SAMP/T

Le programme SAMP/T (sol-air à moyenne portée) est celui d'un missile pour la défense sol-air à l'horizon 2010-2020. Lié au programme PAAMS (principal anti-air missile system) qui équipera les frégates Horizon et utilisera lui aussi le missile Aster, il s'inscrit dans le programme FSAF (famille sol-air futur). Le SAMP-T concerne les armées de l'air et de terre françaises, ainsi que l'armée de terre italienne, et il est intégré dans l'OCCAR (organisation conjointe de coopération en matière d'armement). En commandant cet équipement, l'armée de l'air a pour objectif d'assurer la défense de ses points sensibles face aux menaces aériennes que représentent les avions de combat, les drones et les missiles évoluant à toute altitude. Le SAMP-T disposera également d'une capacité ATBM (Anti tactical balistic missile) face aux missiles balistiques de théâtre d'une portée inférieure à 600 kilomètres (soit 80 % de la menace balistique actuelle) afin de protéger des forces projetées (concept dit de la DAE ou défense aérienne élargie).

Le système actuellement développé est un système multicibles, efficace contre un objectif situé entre 3 et 80 kilomètres de distance. Il utilisera le missile antimissile Aster 30 et le radar multifonction Arabel. Chaque système ou « section » est composé d'une conduite de tir, de quatre lanceurs, qui peuvent être chargés chacun de huit missiles Aster 30, et de deux modules de rechargement.

L'armée de l'air souhaite se doter de six sections et 300 missiles Aster 30. La mise en service opérationnel du système est prévue pour 2010, avec une section et 40 missiles Aster. La livraison des sections devrait se faire au rythme d'une en 2010, deux en 2011 et 2012, et une en 2013 et celle des Aster 30 s'échelonner de 2010 à 2016. Il convient de rappeler qu'initialement, la livraison du système d'armes SAMP/T devait intervenir plus tôt ; toutefois, la mise au point du radar et du missile, conjuguée aux difficultés de financement du programme et à la volonté de doter le SAMP/T d'une capacité ATBM, impliquant des études et développements supplémentaires, a conduit à décaler ce programme dans le temps.

Le coût total du programme est estimé à 3,976 milliards d'euros. L'article 12 du chapitre 53-71, consacré au SAMP/T, prévoit 19,2 millions d'euros de crédits de paiement en 2005.

C. LA MODERNISATION DE LA FORCE AÉRIENNE DE COMBAT

1. La poursuite du programme Rafale

a) Un équipement répondant aux besoins d'une armée de l'air moderne

L'insertion progressive du Rafale au sein de l'armée de l'air est engagée, cet appareil devant représenter désormais 120 de ses 300 avions de combat en 2015. C'est donc au cours de la loi de programmation 2009-2014 que l'armée de l'air se réorganisera autour de cet appareil, tandis que la période 2003-2008 correspond à l'entrée en service de celui-ci, 40 unités devant être en ligne en 2008.

L'appareil Rafale correspond pleinement aux besoins d'une armée de l'air moderne. Avion polyvalent, le Rafale est capable de remplir aussi bien des missions de supériorité ou de défense aériennes que des missions tactiques d'attaque, classiques, mais aussi, au besoin, nucléaires, ou de reconnaissance, avec des capacités supérieures aux actuels Mirage. Il n'aura qu'un seul homologue, le F 22 américain, qui sera encore plus puissant, mais qui, au contraire du F 35 (ex-JSF), n'est pas destiné à l'exportation.

Deux des équipements du Rafale méritent d'être spécifiquement évoqués. Le nouveau radar RBE2 est un équipement clé pour la polyvalence du système. Radar multimode à balayage électronique dans les deux plans, il est de ce fait capable à la fois en mode air-air de détecter les menaces et de guider les missiles tirés en défense et, en même temps, en mode air-sol, d'offrir les capacités de suivi de terrain en vol très basse altitude nécessaires au succès des missions d'attaque tactique. La DGA a notifié en juillet dernier un contrat d'études d'un montant de 85 millions d'euros pour le développement et l'expérimentation d'un deuxième démonstrateur du radar RBE2 muni d'une antenne active, destiné à accroître considérablement la portée du radar RBE2 ; l'objectif de ce contrat est de maîtriser cette technologie pour en équiper le Rafale à l'horizon 2012, date d'entrée en service des futurs missiles Meteor, lesquels sont d'une portée très supérieure aux missiles actuels et impliquent une mise en cohérence des capteurs du Rafale. De surcroît, le radar à antenne active est susceptible de répondre aux spécifications de portée demandées par Singapour, sérieux client potentiel à l'exportation du Rafale.

L'autoprotection du Rafale est assurée non seulement par ses caractéristiques de furtivité, mais aussi par un système nouveau de contre-mesures, brouillage et leurrage, dénommé Spectra (Système de protection et d'évitement contre les conduites de tir du Rafale), intégré au sein de l'appareil ; lors de la mise en service du Rafale au standard F 1 dans la marine, des limitations d'ordre opérationnel de Spectra ont été mises en évidence et sont actuellement traitées.

Le Rafale destiné à l'armée de l'air comprend deux versions, l'une biplace, l'autre monoplace. A l'origine, la cible adoptée était l'acquisition de deux tiers d'avions biplace et un tiers de monoplace ; cette répartition avait été retenue à l'issue de la guerre froide et sa révision était inéluctable en raison de l'évolution du contexte géostratégique. Ainsi que l'a indiqué le chef d'état-major de l'armée de l'air à la commission, au regard des aspects opérationnels et de formation, le ratio d'avions Rafale biplace et monoplace a été revu, pour arriver progressivement à un équilibre entre les deux types d'appareil. A terme, cette proportion pourrait même s'inverser, avec deux tiers d'avions monoplace et un tiers d'avions biplace. A ce jour, les deux commandes déjà passées concernent pour 40 % des appareils biplace, ce qui constitue déjà une inversion de la répartition initiale.

Les Rafale mis en service opérationnel en 2006 seront au standard F 2, c'est-à-dire avec l'intégralité des fonctionnalités nécessaires à la défense aérienne et les fonctions essentielles pour mener des missions tactiques. C'est en 2008 que sera constitué le premier escadron de Rafale au standard F 3. Avec ce standard, le Rafale deviendra capable indifféremment de toutes les missions de défense aérienne et tactique, y compris nucléaires (7) ; l'appareil disposera également des premiers éléments de l'aptitude à la mission de reconnaissance et de ceux d'une conduite de tir air-mer. En février 2004, le contrat couvrant le développement du standard F 3 a été notifié par la délégation générale pour l'armement, pour un montant de 659 millions d'euros. L'évolution des capacités du Rafale continuera à être poursuivie après la période de programmation 2003-2008.

b) La livraison des premiers exemplaires, une commande sur le point d'être passée

Conformément aux dispositions de la loi de programmation militaire, le premier escadron opérationnel de Rafale de l'armée de l'air sera formé à la mi-2006 sur la base de Saint-Dizier, où d'ores et déjà des travaux d'infrastructures sont en cours, afin de préparer l'arrivée de ces appareils. Cinq avions Rafale seront livrés à l'armée de l'air d'ici la fin de l'année 2004, les premiers exemplaires ayant été remis au centre d'expérimentations aériennes militaires de Mont-de-Marsan en septembre, tandis que dix autres appareils seront livrés en 2005, ainsi que cela était prévu.

Les livraisons des Rafale à l'armée de l'air à partir de 2006 ont toutefois été légèrement revues à la baisse en raison du retard de la commande de 59 appareils, dont 46 pour l'armée de l'air.

Échéancier des commandes et des livraisons du Rafale air

Etat au 31/12/02

2003

2004

2005

2006

2007

2008

Etat au 31/12/08

Après 2008

TOTAL

Commandes

36

0

46

0

0

48

0

46

104

234

Livraisons

2

1

5

10

11

6

11

46

188

234

Cette commande globale devait intervenir en 2003, les autorisations de programme nécessaires ayant été ouvertes à cette fin dans la loi de finances rectificative du 30 décembre 2002 (8). Ainsi que l'a indiqué le chef d'état-major des armées lors de son audition devant la commission, le 12 octobre, la passation de cette commande s'est avérée complexe ; conformément aux travaux élaborés sous l'égide de l'état-major des armées, la délégation générale pour l'armement avait tenu à inclure dans le contrat le traitement des obsolescences et les conséquences potentielles des exportations du Rafale. Ces deux paramètres, qui ont donné lieu à de longues négociations, sont désormais inclus dans le coût global du contrat et la commande devrait être passée d'ici la fin de l'année 2004. Le projet de loi de finances pour 2005, quant à lui, inscrit 1 157,95 millions d'euros en crédits de paiement et 527,7 millions d'euros en autorisations de programme.

2. Les programmes de missiles air-air

a) L'équipement en missiles Mica

Le missile Mica (missile d'interception, de combat et d'autodéfense) est depuis 1999 le missile air-air du Mirage 2000-5 ; il constituera l'armement principal du Rafale dans ses missions de défense aérienne ainsi que son armement d'autodéfense dans les missions d'intervention et d'attaque au sol. D'une portée d'environ 60 kilomètres, il peut recevoir deux types d'autodirecteurs interchangeables, soit infrarouge (IR), soit électromagnétique (EM). Il est destiné à succéder à la fois au Super 230 D pour les missions d'interception et au Magic II pour le combat aérien.

Ce programme a fait l'objet de plusieurs aménagements en 2004 ; pour des raisons budgétaires, la cible d'acquisition de 1 070 missiles, dont 370 Mica EM et 700 Mica IR, a été réduite pour passer à 840 unités, dont 370 Mica EM et 470 Mica IR, et le calendrier de livraisons a été modifié, celles-ci devant s'échelonner jusqu'en 2013, au lieu de 2011.

Compte tenu de la passation d'une commande globale de 395 missiles (245 EM et 150 IR) en 2003, l'intégralité des missiles Mica EM destinés à l'armée de l'air a été commandée ; 125 unités ont déjà été fournies, tandis que les livraisons devraient s'achever en 2009. C'est en 2005 qu'interviendront les premières livraisons de missiles IR, à hauteur de 120 unités, tandis que, cette même année, doivent être commandées 260 unités. Les livraisons de missiles IR s'étaleront jusqu'en 2013.

Échéancier des livraisons des missiles MICA à l'armée de l'air

Situation
en 2002

2003

2004

2005

2006

2007

2008

2009

2010

2011

2012

2013

Total

Mica EM

125

-

-

30

55

65

45

50

-

-

-

-

370

Mica IR

-

-

120

75

15

-

-

70

70

70

50

470

Le coût total de ce programme est évalué à 1,815 milliard d'euros, en diminution en raison des ajustements intervenus ; le projet de loi de finances pour 2005 ouvre pour ce programme 58,87 millions d'euros en crédits de paiement et 138,3 millions d'euros en autorisations de programme.

b) Le programme Meteor

Le programme Meteor est celui d'un missile d'interception air-air, bien plus performant que le Mica, car capable d'intercepter et de détruire des cibles aériennes à plus longue distance, avec une portée pouvant atteindre 150 kilomètres dans certains cas. Il sera propulsé par un statoréacteur, technologie jusque-là réservée aux missiles nucléaires, ce qui lui conférera une vitesse en portée sans équivalent à ce jour.

Le programme Meteor est conduit en coopération européenne, ce missile étant destiné à équiper, à l'horizon de 2012, les avions de combat Rafale, Eurofighter et Gripen. A l'issue de longues négociations, un mémorandum d'entente a été signé en 2001 par le Royaume-Uni, pays à l'origine du programme, la France, la Suède, l'Italie et l'Espagne, rejoints en 2002 par l'Allemagne ; le contrat de développement a été notifié au maître d'œuvre, MBDA, en décembre 2002 et sa gestion a été confiée à l'OCCAR. L'organisation industrielle de ce programme s'avère complexe, mais a été simplifiée par la création de MBDA en 2001 : ce groupe a ainsi réuni l'essentiel des contributions française, britannique et italienne à ce programme, c'est-à-dire la liaison de données (9) pour MBDA France, le calculateur pour MBDA UK et l'autodirecteur actif (10) pour MBDA Italie et MBDA UK ; la propulsion a été confiée à l'allemand Bayern Chemie, tandis que le suédois SAAB est chargé de la fusée de proximité et l'espagnol Inmize des gouvernes.

La répartition des charges de travail nationales reflète celle du financement de ce programme, qui est présentée dans le tableau suivant, avec les intentions d'achat des différents pays - seul le Royaume-Uni s'étant engagé à ce jour pour une commande :

Pays

Part de financement (en %)

Commandes et intentions d'achat

Royaume-Uni

39,6

565

Allemagne

16

600

France

12,4

396

Italie

12

400

Espagne

10

400

Suède

10

300

L'intention d'achat de 396 missiles formulée par la France inclut 296 missiles pour l'armée de l'air et 100 pour la marine, les commandes fermes aujourd'hui envisagées étant de 252 missiles. La France n'a pas encore défini le calendrier de commandes et de livraisons de ce programme ; toutefois, une première commande est envisagée en 2007 et les premiers missiles devraient être livrés en 2012 pour équiper le Rafale.

Sont inscrits au titre de ce programme 3,8 millions d'euros en autorisations de programme et 15,2 millions d'euros de crédits de paiement dans le projet de loi de finances pour 2005, le coût unitaire du missile étant évalué à 0,89 million d'euros.

3. Les programmes d'armements air-sol

a) Le missile de croisière Scalp

Le missile de croisière Scalp-EG (emploi général) est destiné à détruire des infrastructures (bases militaires, ponts, usines) situées dans la profondeur d'un territoire ou d'un dispositif adverse. Dérivé du programme de missile anti-piste Apache, achevé en 2004 par la livraison des derniers exemplaires, il dispose d'une portée bien supérieure, celle-ci atteignant 400 kilomètres, contre 140 kilomètres pour l'Apache. En raison de ses caractéristiques, son concept d'emploi est spécifique ; il est considéré comme une arme de niveau stratégique, ce qui implique que son utilisation relève de processus décisionnels particuliers. Par ce programme, apportant une capacité de tir à distance de sécurité, tout temps, de jour et de nuit, avec une précision décamétrique, puis métrique, la France entre dans le club très fermé des pays disposant de missiles de croisière.

Le missile Scalp-EG est développé en coopération avec le Royaume-Uni, l'Italie ayant ensuite rejoint le programme. La version britannique du Scalp-EG, dénommée Storm Shadow, a d'ailleurs déjà été utilisée en Irak au printemps 2003.

Ce missile équipe le Mirage 2000 D ; déclaré opérationnel en juin dernier, il arme désormais trois escadrons de Mirage 2000 D de la base aérienne de Nancy-Ochey ; il équipera ensuite le Rafale à partir de 2006.

Les 500 missiles (dont 450 pour l'armée de l'air et 50 pour la marine) devant être acquis dans le cadre de ce programme ont fait l'objet d'une commande globale en 1997 et les livraisons à l'armée de l'air ont débuté en 2003, à hauteur de 30 missiles, contre 60 initialement prévus, en raison de difficultés rencontrées sur certains équipements. Le déroulement du programme a été renégocié en 2004, ce qui a conduit à décaler les livraisons dans le temps ; celles-ci s'achèveront en 2008 au lieu de 2007. Cette décision se traduit par la diminution des crédits de paiement alloués à ce programme dans le projet de loi de finances pour 2005 ; ils s'établissent à 39,72 millions d'euros, contre 95,52 millions d'euros en 2004.

b) L'armement air-sol modulaire

L'armement air-sol modulaire (AASM) est un armement tiré sur coordonnées, mais beaucoup moins ambitieux et coûteux qu'un missile de croisière ; il s'agit d'un armement d'usage banalisé pour des objectifs dont le système de protection ne justifie pas l'emploi des missiles Apache et Scalp-EG.

Il consiste à adjoindre à des armements classiques, tels que des bombes de 250 kilogrammes, un kit d'accroissement de portée (propulseur) et un kit de guidage. Sa portée oscille entre 15 et 50 kilomètres selon l'altitude du tir. L'AASM doit pouvoir être emporté par n'importe quel type d'avion et tiré par tout temps.

Le nombre de munitions envisagé reflète le caractère général qu'il est prévu de donner à cet armement. Doivent être fabriquées 3 000 unités, dont 2 000 pour l'armée de l'air et 1 000 pour la marine. Une première commande de 496 unités, dont 240 décamétriques et 256 métriques, a été passée en 2000 ; des retards liés à des difficultés techniques ont conduit à un décalage des commandes suivantes, qui, initialement prévues en 2005 pour la version décamétrique et en 2006 pour la version métrique, seront passées en 2007 ; cet ajustement se traduit également par un étalement du calendrier de livraison, lequel est présenté ci-dessous.

Calendrier de livraison des AASM jusqu'en 2013

2006

2007

2008

2009

2010

2011

2012

Après 2012

Total

Version décamétrique

10

140

90

120

120

120

120

248

968

Version métrique

200

120

120

120

120

352

1 032

2 000

Les premiers exemplaires doivent être fournis à l'armée de l'air en 2006, la délégation générale pour l'armement ayant effectué un premier tir guidé de l'AASM en septembre dernier au centre d'essais en vol de Cazaux. Ils équiperont les Rafale ainsi que les Mirage 2000 D.

Le coût total de ce programme atteint 421,8 millions d'euros et le projet de loi de finances initiale pour 2005 inscrit à ce titre 25,17 millions d'euros de crédits de paiement et 10,1 millions d'euros d'autorisations de programme.

D. LES ENJEUX MAJEURS DU RENOUVELLEMENT DE LA FORCE AÉRIENNE DE PROJECTION

1. Le renouvellement tardif de la flotte tactique

a) Une aviation de transport tactique sous tension

La flotte aérienne française de transport tactique est aujourd'hui vieillissante et ses capacités apparaissent insuffisantes. Elle doit pour une large part sa configuration actuelle au contexte de la guerre froide, durant laquelle l'aviation de transport avait pour mission le soutien des forces terrestres en Europe, forces qui intervenaient dans la continuité territoriale et emportaient donc avec elles leurs équipements, y compris les plus lourds. Dans ce contexte, il suffisait de disposer d'appareils à l'allonge et au gabarit modestes. C'est pour répondre à ce besoin que fut conçu et construit le C 160 Transall franco-allemand, qui constitue encore aujourd'hui l'ossature de la flotte de transport aérien français. Celle-ci se compose de 66 Transall : 46 d'entre eux, dits de première génération, sont entrés en service à partir de 1967 ; leur capacité d'emport est de quatre tonnes, sur une distance de 4 400 kilomètres ; les 20 autres appareils, dits de deuxième génération, sont entrés en service à partir de 1981 et bénéficiaient de capacités et d'une allonge renforcées (huit tonnes sur 6 600 kilomètres).

S'ajoutent à ces appareils des C 130 Hercules, de fabrication américaine, disposant d'une capacité de dix tonnes sur 5 500 kilomètres, ainsi que des appareils espagnols Casa 235-100 entrés en service à partir de 1991. Ces derniers, plus petits que les Transall, emportant trois tonnes de fret sur 2 000 kilomètres environ, sont destinés à des missions de liaison et d'entraînement plutôt qu'à des missions de projection tactique proprement dites ; après avoir reçu respectivement deux et trois unités en 2002 et 2003, l'armée de l'air détient en 2004 dix-neuf Casa 235-100.

flotte d'avions de transport tactique de l'armée de l'air

Type d'avion

Nombre

Entrée en service

Retrait du service

C 160 1ère génération

46

1967

à partir de 2005

C 160 2ème génération

20

1981

à partir de 2015

C 130

14

1987

vers 2020

Casa 235-100

19

1991

non défini

Toutefois, ces augmentations d'allonge et de capacité n'apparaissent pas suffisantes pour répondre aux nouvelles conditions des interventions en opération extérieure : les matériels sont de plus en plus lourds et volumineux ; les théâtres d'opération sont désormais parfois très éloignés des implantations françaises à l'étranger et il est de plus en plus fréquent que la force d'intervention ne puisse compter sur aucun équipement préalablement installé. Les appareils doivent être capables d'emporter tous les équipements destinés à être utilisés en opération extérieure, tels que des véhicules blindés de combat d'infanterie, des camions, des hélicoptères, jusqu'à des hôpitaux de campagne. Les appareils en service n'offrant pas toutes les capacités nécessaires, l'armée de l'air doit régulièrement recourir à l'affrètement d'avions étrangers. Pour l'opération Artémis en République démocratique du Congo, en 2003, ainsi que pour l'opération Licorne en Côte d'Ivoire, l'armée de l'air a dû ainsi affréter des avions Antonov 124.

De surcroît, la flotte de C 160 connaît des problèmes de corrosion et de vieillissement prématuré mis en évidence au cours des essais de fatigue menés actuellement. Suivant les résultats de ces essais, attendus en 2005, le déficit capacitaire en projection pourrait alors être aggravé ou, au contraire, réduit à la marge. De fait, l'utilisation intensive des C 160 sur des théâtres d'opération aux conditions climatiques très difficiles a accéléré le vieillissement de leur cellule (corrosion, usure de la soute) et de leur moteur. Un premier appareil a ainsi été retiré en janvier 1999 en raison de sa corrosion tandis que d'autres C 160 de première génération doivent être soumis à un traitement adapté, ce qui alourdit leurs coûts de maintenance.

b) Les premiers jalons du programme A 400 M

Pour remplacer les Transall, dont les premiers devraient être retirés du service à partir de 2005, les états-majors des armées de l'air européennes ont donc proposé un appareil totalement neuf. En juillet 1997, la France, l'Allemagne, la Belgique, l'Espagne, l'Italie, le Portugal, le Royaume-Uni et la Turquie ont élaboré une fiche commune de caractéristiques militaires, dite ESR (European Staff Requirement), qui définissait un appareil, l'Avion de Transport Futur (ATF), répondant au besoin opérationnel nouveau. La France signifiait son intention de commander 50 appareils, ce nombre apparaissant suffisant à l'armée de l'air pour remplacer l'ensemble de la flotte de Transall et de Hercules.

Les spécifications, telles qu'elles ont été stabilisées depuis lors, sont les suivantes : la charge utile de l'A 400 M doit atteindre 25 tonnes, pour un rayon d'action de 4 540 kilomètres, et doit pouvoir être portée à 37 tonnes pour de plus courtes distances. Sa vitesse maximum, atteignant Mach 0,72, et son plafond de croisière ont été fixés de façon à donner à l'appareil une capacité de ravitaillement en vol des avions de chasse sur les théâtres d'opérations. Parmi les caractéristiques adoptées, figure le choix d'un turbopropulseur à hélice rapide plutôt que d'un réacteur, pour préserver la capacité de l'appareil à utiliser des terrains d'atterrissage aménagés de façon sommaire.

Le lancement de ce programme a connu diverses vicissitudes ; alors que l'industriel retenu, Airbus Military, fixait un seuil minimum de 180 commandes pour s'engager dans ce programme, l'Italie, en 2001, puis le Portugal, en 2003, se sont retirés, tandis que l'Allemagne a longtemps tergiversé sur le nombre d'appareils dont elle souhaitait se doter. Ce n'est qu'après plusieurs années de retard que le contrat a enfin pu être signé, le 27 mai 2003, entraînant par là même le décalage des premières livraisons de 2007 à 2009. Pour l'armée de l'air française, le calendrier complet de livraisons est le suivant :

Echéancier des livraisons de l'A 400 M

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

2018

2019

2

6

6

5

5

5

4

6

5

5

1

Les premiers jalons du programme sont aujourd'hui posés, le premier vol de l'appareil étant prévu en janvier 2008. Dans le cadre de sa politique d'acquisition, Airbus Military a déjà attribué plusieurs contrats, dont le système d'atterrissage intégré, pour Messier-Dowty, et le système de guidage de l'avion en vol, dit Flight Management System, confié à Thales ; les premiers essais du turbopropulseur TP400-D6, réalisé par le consortium EPI (11) (Europrop International), doivent intervenir en 2005, et le moteur devrait voler pour la première fois en novembre 2006.

La totalité des autorisations de programme nécessaires, soit 6,662 milliards d'euros, a été inscrite dans les lois de finances rectificatives pour 2000 et 2001 ; le financement de l'A 400 M ne repose donc plus que sur les crédits de paiement, 226,5 millions d'euros étant inscrits à ce titre dans le projet de loi de finances initiale pour 2005.

c) Une transition complexe dans l'attente des premières livraisons de l'A 400 M

Le retard du programme A 400 M va imposer à l'armée de l'air de gérer une délicate période de transition jusqu'en 2011, année à partir de laquelle l'accroissement de la flotte d'A 400 M permettra de compenser, puis de surpasser, l'effet des retraits des Transall de première, puis, après 2015, de deuxième génération.

Afin de limiter la diminution de la capacité de projection de l'armée de l'air prévisible à l'horizon 2005, plusieurs voies sont explorées. Tout d'abord, l'armée de l'air s'efforce de remplacer les Transall, partout où cela est possible, par les nouveaux appareils Casa 235-100 dont elle s'est dotée. Les Transall ainsi libérés des missions de liaison et d'entraînement sont rendus disponibles pour les opérations de projection et viennent renforcer la flotte affectée à cette mission, tandis que leur usage hors des opérations extérieures est limité au maximum.

Ensuite, l'armée de l'air cherche à faire appel aux appareils de nos partenaires européens, notamment dans le cadre de l'EAC, dont la constitution en juillet 2004 constitue une avancée significative vers la mise en place d'un état-major européen en matière de transport tactique et stratégique. Elle devrait permettre de soulager la flotte française de transport lors des opérations réunissant des partenaires européens.

Le recours ponctuel à des avions affrétés, à l'exemple des opérations en Afghanistan, en République démocratique du Congo et en Côte d'Ivoire, devrait être poursuivi.

Enfin, la réorganisation de la flotte de transport tactique de l'armée de l'air autour de l'A 400 M amène aussi à la réorganisation de la flotte dite de complément de l'armée de l'air, celle qui sert essentiellement aux liaisons. Eu égard à leur masse, les A 400 M n'auront pas vocation à remplacer les Transall dans leurs missions de liaison et d'entraînement des forces et l'augmentation du nombre de Casa 235-100 trouve sa légitimité au-delà de la période de transition. Ces appareils reprendront donc ces missions ; leur masse et leurs coûts d'entretien réduits les qualifient aussi pour reprendre des missions de liaison autrefois assurées par des appareils plus petits que les Transall, tels les Nord 262, dont le retrait du service s'est achevé au 1er juillet 2004.

2. Le développement de la flotte logistique et de ravitaillement en vol

a) Des flottes aux capacités insuffisantes

La modernisation et le développement des flottes de transport logistique et de ravitaillement en vol constituent le second dossier important incombant à l'armée de l'air en matière de projection.

L'armée de l'air dispose actuellement de quatorze appareils de ravitaillement en vol, onze Boeing C 135 FR, acquis à partir de 1964 et destinés à l'origine aux forces nucléaires, et trois Boeing KC 135 achetés d'occasion à l'US Air Force, remotorisés et livrés en 1997 et 1998. Cette flotte a deux caractéristiques : l'avionique des appareils, surtout celle des trois KC 135, présente des éléments d'obsolescence, y compris pour leur bonne insertion dans le trafic aérien civil ; le nombre des appareils reste insuffisant, d'autant plus que les avions KC 135, moins modernisés que les C 135 FR, sont essentiellement utilisés sur le territoire national. Or, les interventions conduites au Kosovo, puis en Afghanistan, ont montré la nécessité pour l'armée de l'air de disposer d'une solide flotte d'appareils ravitailleurs, le nombre de ravitailleurs à déployer lors d'une opération étant de l'ordre d'un pour trois ou quatre avions de combat.

La flotte d'appareils de transport logistique de l'armée de l'air apparaît elle aussi limitée dans son format. Elle comporte trois Airbus A 310 achetés d'occasion, tandis que l'obsolescence des deux DC 8 en service et le coût croissant de leur maintenance ont conduit à procéder au retrait d'un premier appareil au début de 2004, le retrait du second devant intervenir d'ici la fin de cette même année. Le remplacement des DC 8, initialement prévu plus tardivement, sera donc accéléré par la mise en service de deux avions à très long rayon d'action (avion de type Airbus A 330 ou A 340) en 2005. Ces deux appareils accroîtront la capacité de projection de l'armée de l'air et reprendront également une partie de la charge long courrier actuellement assurée par les trois A 310, ce qui permettra d'utiliser davantage ces derniers sur d'autres missions, plus diversifiées. L'acquisition de ces deux avions permettra également d'homogénéiser la flotte de transport à très long rayon d'action.

b) Vers un renouvellement anticipé des avions ravitailleurs ?

Les coûts élevés de modernisation et de soutien des C 135 FR et des KC 135 conduisent à anticiper leur retrait et à envisager l'acquisition d'appareils modernes. Une telle solution, moins coûteuse à terme, permettra de réduire considérablement le périmètre des travaux de modernisation des C 135 FR, en ne retenant que le remplacement des équipements nécessaires à leur intégration, à court terme, dans la circulation aérienne générale.

Alors que le modèle d'armée 2015 prévoyait seize avions ravitailleurs, la loi de programmation militaire dispose que c'est vingt appareils, dont six multirôles, qui devront équiper l'armée de l'air à cette date. Les avions ravitailleurs dont dispose l'armée de l'air ne permettent pas, en général, d'emporter également des charges logistiques ; toutefois, l'utilisation en tant que ravitailleurs d'appareils à long rayon d'action construits d'abord pour être des avions de transport change la donne et le concept d'avions multirôles, dits MRTT (Multirôle Transport Tanker), appareils capables à la fois de ravitailler et d'être utilisés en version cargo pour la projection, est aujourd'hui généralisé. En réponse à un appel d'offre lancé par le Royaume-Uni, EADS a ainsi proposé une solution d'avion A 330 MRTT, résultant de la transformation de l'A 330-200, concurrençant ainsi l'américain Boeing, qui, avec le B 767, détenait un monopole de fait dans le domaine des ravitailleurs.

L'armée de l'air française s'oriente aujourd'hui vers le choix d'un programme MRTT, qui lui permettra d'accroître ses capacités opérationnelles en matière de ravitaillement en vol et de transport stratégique, de rationaliser ses flottes et de procéder au retrait des appareils anciens. Une flotte de quatorze avions MRTT de la classe A 330, appuyés le cas échéant par l'utilisation de six A 400 M en configuration « ravitailleurs intra-théâtres », permet de répondre aux besoins de projection de l'armée de l'air.

Plutôt que d'envisager l'acquisition patrimoniale de ces appareils, l'armée de l'air souhaite recourir à un mode de financement innovant, qui présente l'avantage d'étaler la charge financière dans le temps. Toutefois, ainsi que l'a souligné le chef d'état-major de l'armée de l'air lors de son audition devant la commission, la mise en place d'un financement innovant doit être associée à une logique d'emploi innovant, où l'armée de l'air ne serait plus le seul propriétaire des avions qu'elle utilise. Telle est l'approche retenue par le Royaume-Uni dans son programme d'avions ravitailleurs FSTA (Future Strategic Tanker Aircraft), en cours de négociation, pour lequel l'offre d'EADS a été préférée à celle de Boeing ; s'étalant sur vingt-sept années, ce programme doit organiser le partage de l'utilisation des capacités des avions avec un acteur privé. L'armée de l'air étudie donc deux options : une coopération avec le Royaume-Uni ou le recours au leasing auprès d'EADS. En toute hypothèse, certaines garanties devront absolument être préservées, seule la partie des avions ravitailleurs ne contribuant pas aux forces aériennes stratégiques pouvant être disponible pour un usage non militaire.

Il conviendra de prêter une attention particulière aux conditions de transition entre la flotte actuelle de C 135 et celles d'avions MRTT, afin d'assurer le maintien des capacités opérationnelles de l'armée de l'air.

L'investissement nécessaire pour financer une flotte de quatorze avions MRTT devrait s'échelonner entre 2 et 2,6 milliards d'euros, selon le niveau d'équipements requis et le recours à des appareils neufs ou d'occasion.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

I. -  AUDITION DU GÉNÉRAL RICHARD WOLSZTYNSKI, CHEF D'ÉTAT-MAJOR DE L'ARMÉE DE L'AIR

La commission de la défense nationale et des forces armées a entendu le général Richard Wolsztynski, chef d'état-major de l'armée de l'air, sur le projet de loi de finances pour 2005 (n° 1800), au cours de sa réunion du mercredi 20 octobre 2004.

Le général Richard Wolsztynski a estimé que l'atout principal de l'armée de l'air réside dans sa cohérence opérationnelle globale. Trois à cinq armées de l'air au monde seulement disposent de la capacité à se projeter sur un théâtre d'opération situé à des milliers de kilomètres et à y exercer une pression de façon durable. C'est cette cohérence opérationnelle globale qui, liée à la réactivité des différentes composantes de l'arme aérienne, permet aujourd'hui à l'armée de l'air de disposer des capacités d'action et de commandement dans un cadre multinational, notamment sous l'égide de l'Union européenne et de l'OTAN.

Dans cette perspective, il est nécessaire de préserver l'aptitude des personnels à s'adapter à toutes les formes nouvelles d'engagement, le rythme et la variété de celles-ci les contraignant à une polyvalence permanente. Aussi, la gestion des effectifs doit-elle être conduite en cohérence avec la rationalisation du réseau des bases aériennes et l'aménagement des structures, par une simplification et une décentralisation de ces dernières, alors même que l'armée de l'air rencontre des difficultés pour attirer les personnels en région parisienne. Cet aménagement, confié à un groupe de projet dénommé « Air 2010 », s'inscrit dans la logique de la loi organique relative aux lois de finances et doit conduire à une meilleure répartition des effectifs, notamment au sein de l'administration centrale. La rationalisation passe également par l'aménagement du réseau des bases aériennes, lequel pourrait se traduire par une réduction sensible du nombre des implantations, qui seraient alors modernisées, au-delà de 2010. Le groupe « Air 2010 », qui s'est adjoint les services d'une entreprise de consultants, travaille à l'élaboration d'un schéma directeur.

Le contexte opérationnel actuel met en lumière l'importance des exercices régionaux pour l'entraînement des personnels. L'armée de l'air a notamment pris part, pour la première fois, à un exercice organisé en Australie en juillet dernier, lequel réunissait les aviations australienne, américaine, singapourienne et thaïlandaise. La qualité des outils français de formation suscite un réel intérêt parmi nos partenaires européens, comme l'illustrent la mise en place de l'école franco-belge de pilotes d'avions de combat et ses perspectives d'élargissement à d'autres Etats ; ce projet laisse apparaître des perspectives d'économies substantielles dans le domaine de la formation des personnels et cette démarche de « mutualisation » doit être encouragée et étendue à d'autres spécialités.

Dans le projet de loi de finances pour 2005, le titre III permet de maintenir l'activité des forces au même niveau qu'en 2004, sous réserve de l'évolution quelque peu erratique des prix du carburant. La dotation budgétaire inscrite ne permettra pas de couvrir l'ensemble des besoins liés aux activités d'entraînement avec le prix du baril de pétrole à son niveau actuel.

Il est nécessaire de poursuivre le redressement de la disponibilité opérationnelle des différents équipements. Si d'importants progrès ont été réalisés, des difficultés subsistent et pèsent sur l'activité opérationnelle, comme l'illustrent les problèmes techniques ponctuels qui affectent actuellement les moteurs du Mirage 2000. Le rétablissement de la disponibilité n'est pas sans engendrer des coûts importants, d'autant plus que certains industriels jouissent d'une situation de monopole. Toutefois, l'effort consenti pour l'entretien des équipements doit être maintenu puisqu'il conditionne la qualité opérationnelle des unités. Il représente un engagement financier important, avec 26 % des crédits dévolus au titre V.

La cohérence opérationnelle globale et la réactivité de l'armée de l'air reposent sur la qualité du réseau des bases aériennes ainsi que sur les structures de commandement et de conduite. A ce titre, l'armée de l'air française compte parmi les seules en Europe à disposer d'une capacité de projection de structures complètes, comme elle l'a montré lors des opérations menées en Afghanistan et en République démocratique du Congo. Ces structures sont d'ailleurs parfaitement adaptées à la conduite de missions sur le territoire national, telles que celles effectuées à l'occasion du 60ème anniversaire des débarquements de Normandie et de Provence. Ces capacités de commandement et de conduite des opérations aériennes garantissent l'autonomie d'engagement de la France, le cas échéant en tant que nation-cadre, dans des opérations européennes, transatlantiques et au sein de coalitions ad hoc.

La cohérence opérationnelle globale de l'armée de l'air repose également sur le renouvellement de ses matériels. Si la loi de programmation militaire engage un effort de modernisation des équipements, il ne faut pas pour autant sous-estimer les difficultés de gestion rencontrées en 2004, qui ont conduit à décaler la satisfaction de certains besoins, notamment dans le domaine de la projection.

L'acquisition d'avions de transport à très long rayon d'action (TLRA) renforcera les capacités de projection de l'armée de l'air dès la fin de l'année 2005, alors que les avions Transall seront peu à peu retirés du service, probablement à partir de 2007. Dans le même temps, le développement de la coopération européenne offre des perspectives d'amélioration en matière de projection des forces, comme l'illustre la mise en place de l'European airlift center (EAC) le 5 juillet dernier, lequel prend la suite de l'European airlift coordination cell (EACC). L'évolution de cette structure permet la constitution d'un embryon d'état-major européen en matière de transport stratégique.

La recherche de financements innovants et, partant, d'un emploi innovant des équipements, doit être poursuivie, notamment pour le remplacement de la flotte d'avions ravitailleurs, avec le programme Multirole Transport Tanker (MRTT).

Dans le domaine de la projection de puissance, les récents aménagements apportés au programme Rafale dans la répartition entre avions monoplace et biplace ne remettent pas en cause les objectifs de la loi de programmation militaire. Avec l'arrivée du Rafale, l'armée de l'air accroît significativement ses capacités de frappe dans la profondeur et de maîtrise du milieu aérospatial. Le même objectif est poursuivi avec la livraison des missiles de croisière Scalp-EG, tandis que les reports de livraison de certains matériels, tels que l'armement air-sol modulaire (AASM) et le missile d'interception et de combat aérien (MICA), demeurent cohérents avec le déroulement des programmes qui leur sont associés.

Le retrait anticipé du service de certains matériels, comme le DC 8 Sarigue, s'est imposé du fait des coûts liés à leur entretien. Loin d'altérer la cohérence opérationnelle, ces mesures se traduisent par des économies permettant de ne pas retarder l'acquisition des équipements futurs.

L'autonomie d'action et de décision doit être préservée, car elle conditionne notre capacité d'influence au sein des alliances et des coalitions auxquelles la France prend part, ainsi que la ponctualité aux rendez-vous fixés dans le cadre de la NATO Response Force (NRF) 5 et 6. Cette autonomie repose sur le renforcement des capacités de surveillance, de reconnaissance et de communication et la mise en service opérationnelle des systèmes intérimaires de drones MALE, dès 2005, y contribuera de façon significative. La consolidation de la capacité de la France à conduire et commander des opérations s'inscrit dans une dynamique interarmées ; les opérations centrées sur des réseaux doivent favoriser la circulation de l'information provenant des différents capteurs, quelle que soit l'armée dont ceux-ci proviennent. De plus, il importe d'améliorer l'intéropérabilité de nos équipements avec ceux de nos partenaires, afin de garantir l'intégration de nos dispositifs au sein des coalitions. L'acquisition de liaisons de données tactiques constitue un élément déterminant ; elles seront intégrées sur le Mirage 2000-5 en 2008 et sur le Mirage 2000 D en 2009.

Le renforcement des capacités de réaction et de flexibilité des différentes composantes de l'armée de l'air et l'amélioration de l'interopérabilité de ses structures doivent guider le processus de modernisation en cours. Le projet de loi de finances pour 2005 permet la poursuite de ces évolutions, qui demeurent résolument inscrites dans une démarche d'ouverture vers l'Europe.

Le général Richard Wolsztynski a clos son propos en évoquant deux événements récents illustrant la permanence de l'activité de l'armée de l'air. Il a d'abord indiqué qu'un nouveau détachement de Mirage F1CR de reconnaissance était parti vers Douchanbé, au Tadjikistan, afin de soutenir l'action des forces françaises déployées en Asie centrale, pendant deux à trois semaines ; il a ensuite salué les prestations de la patrouille de France en République populaire de Chine, notamment à Hong-Kong.

Le président Guy Teissier a indiqué que la mission d'information sur le contrôle de l'exécution des crédits de la défense avait appris, en septembre dernier, que l'armée de l'air enregistrait alors un sous-effectif moyen de 4,26 % et que ce chiffre devrait atteindre 4,75 % à la fin de cette année. Il a demandé quelles étaient les conséquences de cette situation sur le fonctionnement de l'armée de l'air, notamment la maintenance de ses appareils. Se réjouissant ensuite de la mise en service du premier escadron de Rafale en 2006, il a souhaité avoir des précisions sur les mesures mises en œuvre pour préparer l'arrivée de cet appareil totalement nouveau, aussi bien en matière de formation des personnels que d'aménagement des infrastructures.

Le général Richard Wolsztynski a rappelé que l'armée de l'air avait fait le choix d'exclure tout dépassement du montant autorisé pour sa masse salariale, ce qui supposait, par construction, d'accepter un sous-effectif. Il ne faut pas regretter ce choix ; la capacité opérationnelle de l'armée de l'air repose sur le réseau de ses bases aériennes, qui rassemble une mosaïque d'unités très variées et l'appréciation des effectifs doit s'effectuer selon une logique de métiers. Il en résulte que la notion de sous-effectif moyen n'a pas de signification sur le terrain, car les ajustements sont décidés en fonction des besoins. A titre d'illustration, l'escale de la base d'Istres ne pouvant souffrir de tensions sur les effectifs en raison de son importance logistique, à la différence des escales d'autres bases, des prélèvements de personnels sont possibles sur les secondes au profit de la première en cas de difficulté majeure.

S'agissant de la gestion des effectifs, toute décision prise aujourd'hui ne saurait avoir des répercussions à très court terme sur le nombre des officiers et des sous-officiers. Les sous-officiers diplômés de l'école de Rochefort cette année ont été recrutés en 2003. En tout cas, des à-coups dans la gestion des effectifs ne sont pas satisfaisants et doivent être évités. Si, au sein des différentes catégories de personnels, ce sont les sous-officiers qui constituent l'ossature des bases aériennes, notamment dans le domaine mécanique, il ne faut pas pour autant oublier que les engagés, c'est-à-dire les militaires techniciens de l'air (MTA), assurent des missions fondamentales au sein des installations de l'armée de l'air, par exemple en matière de protection des bases et de sécurité. Or, le déficit en engagés excède 6 %. Il s'agit là d'un problème de gestion qui concerne une catégorie de personnels relativement nouvelle ; mise en place il y a seulement cinq ans et demi, elle n'est pas encore stabilisée.

Le président Guy Teissier a demandé si le déficit de MTA résultait des difficultés de recrutement ou s'il répondait à la volonté de maîtriser la masse salariale.

Le général Richard Wolsztynski a répondu qu'il ne s'agissait pas de difficultés de recrutement, en précisant que l'armée de l'air avait utilisé cette catégorie de personnels comme variable d'ajustement de court terme, car il s'agissait du seul levier d'action rapidement disponible. En outre, le déficit de 6 % de MTA constitue un point de vigilance pour la gestion de cette catégorie de personnels.

Pour ce qui concerne l'entrée en service du Rafale, l'armée de l'air est confiante. Cet événement était attendu et il sera désormais possible de déployer cet appareil et de montrer ses capacités à d'éventuels clients. Son admission au service a conduit à élaborer une approche interarmées au niveau national, la marine et l'armée de l'air devant bénéficier d'une mutualisation de sa maintenance et de sa logistique. De plus, si de nouveaux débouchés s'ouvraient à l'exportation, il serait envisageable de partager la charge de formation des équipages avec d'autres pays. Le choix de Singapour, en 2005, sera déterminant à cet égard.

Actuellement, le centre d'expérimentations aériennes militaires (CEAM) de Mont-de-Marsan forme les personnels mécaniciens. Les conditions d'emploi opérationnel du Rafale y seront également définies. L'armée de l'air se verra livrer une version véritablement polyvalente de l'appareil, puisque ses exemplaires seront configurés au standard F2, à la différence de la marine qui ne dispose que d'une version de défense aérienne. Le noyau initial des Rafale de l'armée de l'air sera constitué à Mont-de-Marsan et, fin 2005, il sera transféré vers Saint-Dizier, où d'ores et déjà des travaux d'infrastructure sont en cours. L'inauguration du premier escadron de l'armée de l'air à Saint-Dizier est prévue en 2006.

M. Jean-Louis Bernard a demandé si la récente décision de la marine nationale d'abandonner la version biplace du Rafale aura des répercussions sur la répartition de la cible de l'armée de l'air, qui est actuellement de 95 appareils monoplace et de 139 appareils biplace. Il a également souhaité avoir le sentiment du chef d'état-major de l'armée de l'air sur la proposition faite par EADS de remplacer la flotte de ravitailleurs par des A 330 MRTT, avec le recours à un financement innovant. Enfin, remarquant qu'au-delà des effets des mesures de régulation budgétaire, nombre de problèmes étaient liés à un manque de coordination entre états-majors, délégation générale pour l'armement et industriels, il a souhaité savoir quels pourraient être les moyens d'améliorer et de renforcer cette collaboration.

Le général Richard Wolstzynski a indiqué que, pour le programme Rafale, la cible initiale prévoyait deux tiers d'appareils biplace et un tiers d'appareils monoplace. Cette répartition avait été retenue à l'issue de la guerre froide et sa révision était inéluctable en raison de l'évolution du contexte géostratégique. Plusieurs facteurs doivent être pris en compte. La longueur des missions varie selon les composantes des forces aériennes ; des missions comportant sept heures de vol et plus, comme celles conduites en Afghanistan à partir de la base de Manas, nécessitent, compte tenu des contraintes pesant sur l'équipage, une configuration biplace des appareils ; en revanche, une patrouille composée de plusieurs appareils peut comprendre des unités biplace et d'autres monoplace. La nature des missions et, corollairement, la mise en œuvre des systèmes d'armes, revêtent également une grande importance pour le choix d'une version biplace ou monoplace De plus, dans la mesure où l'armée de l'air assure seule la formation initiale de ses pilotes, il est nécessaire de pouvoir disposer d'appareils biplace opérationnels, c'est-à-dire dotés de systèmes d'armes. Il serait donc dangereux de sous-dimensionner la flotte de Rafale biplace à l'occasion de la révision du ratio. Ce risque n'avait d'ailleurs peut-être pas été suffisamment pris en compte lors de la constitution de la flotte des Mirage 2000 biplace, laquelle n'a été dimensionnée qu'au regard des besoins strictement nationaux, sans tenir compte des demandes de formation qui seraient faites par les pays acquérant le Mirage 2000 ; de fait, cette flotte, très sollicitée aujourd'hui, s'use trop vite. Au total, au regard des aspects opérationnels et de formation, le ratio d'avions Rafale biplace et monoplace a été revu, pour arriver progressivement à un équilibre entre les deux types d'appareil. A terme, cette proportion pourrait même s'inverser, avec deux tiers d'avions monoplace et un tiers d'avions biplace. A ce jour, les deux commandes déjà passées concernent pour 40 % des appareils biplace, ce qui constitue déjà une inversion de la répartition initiale.

S'agissant des ravitailleurs, les Australiens seront les premiers à acquérir une flotte d'A 330 MRTT. Ils devraient être suivis des Britanniques, même si leur processus décisionnel n'est pas encore achevé. La France pourrait être la troisième à adopter ce programme, ce que l'armée de l'air souhaite, car elle ne dispose à ce jour que de quatorze avions ravitailleurs : onze d'entre eux ont été modernisés, mais les trois autres, qui ne l'ont pas été, seront prioritairement utilisés sur le territoire national. S'agissant des modalités d'acquisition, au-delà du recours au financement innovant, concept qui demeure flou, c'est, plus fondamentalement, d'abord une logique d'emploi innovant, où l'armée de l'air ne serait plus le seul propriétaire des avions qu'elle utilise, qui s'impose. Il convient donc de savoir avec quels partenaires s'engager et selon quelles modalités. Certaines garanties doivent absolument être préservées. Seule, la partie des avions ravitailleurs ne contribuant pas aux forces aériennes stratégiques pourrait être utilisée pour un emploi innovant et serait donc disponible pour un usage non militaire.

Si la collaboration tripartite entre les états-majors, la délégation générale pour l'armement et les industriels s'améliore compte tenu des actions en cours, il subsiste encore quelques marges de progrès. L'armée de l'air souhaite l'approfondissement de cette collaboration et la mise en service du Rafale au standard F2 sera l'occasion de mettre en pratique cette orientation.

M. Yves Fromion a souhaité avoir des précisions sur le plan « Air 2010 » : ce plan correspond-il à une modification du dispositif opérationnel ou s'agit-il seulement d'une évolution répondant à un besoin de rationalisation ? Il a également souhaité avoir plus d'informations sur la mise en place de l'école franco-belge de pilotes d'avion de combat. Enfin, il a demandé si l'armée de l'air disposait d'une réserve de carburant acquise au fil du temps, à l'instar de la marine.

M. René Galy-Dejean a demandé si, dans le cadre du projet « Air 2010 », il serait envisageable d'instaurer à terme une mutualisation des bases en Europe, compte tenu des perspectives d'évolution du groupe aérien européen. Il a également souhaité connaître les incidences de l'arrivée en service de drones de combat sur la notion même de base aérienne.

Le général Richard Wolsztynski a estimé que la réflexion engagée par le groupe de projet « Air 2010 » était nécessaire au regard des délais relativement courts, mais aussi afin d'obtenir l'adhésion des personnels au processus de réforme. Les personnels ont d'ailleurs dans l'ensemble bien compris que, même si les crédits dont dispose l'armée de l'air étaient maintenus à leur haut niveau actuel, l'entretien du patrimoine considérable que constituent les bases aériennes resterait difficile à réaliser. Il convient donc d'adapter le volume des infrastructures à celui de la flotte, le nombre d'avions de combat étant passé de 450 en 1992 à un peu plus de 300 aujourd'hui. Le projet « Air 2010 » doit également engager une réflexion sur la nécessaire simplification des structures de l'administration centrale, l'existence de trois commandements distincts pour les flottes de combat, de transport et de ravitaillement n'apparaissant plus justifiée, ainsi que sur la déconcentration de cette administration ; un tel processus permettra de tenir compte de la faible attractivité de la région parisienne pour les personnels. Enfin, le processus de restructuration des bases doit être mené dans un cadre interarmées, tout particulièrement avec l'armée de terre, ce qui n'avait pas été le cas lors de la précédente restructuration.

En ce qui concerne la mutualisation des moyens à l'échelle européenne, l'A 400 M constituera une occasion remarquable de fédérer l'utilisation des plateformes, notamment en ce qui concerne la formation. La mise en place de l'école franco-belge de pilotes d'avion de combat sur la base de Cazaux progresse très rapidement. D'ores et déjà, six Alphajets, trente mécaniciens et des instructeurs sont présents et les premiers élèves belges sont arrivés. Singapour, la Grèce et la Suisse semblent intéressés par cet outil de formation et il n'est pas à exclure que les Allemands finissent également par s'y intéresser, compte tenu du coût élevé de la formation dispensée à leurs pilotes de chasse aux Etats-Unis.

En ce qui concerne les stocks de carburant, l'armée de l'air peut s'appuyer sur les réserves stratégiques dont dispose l'état-major des armées et sur celles du service des essences.

M. Jérôme Rivière a souligné que l'un des objectifs principaux de la loi de programmation militaire 2003-2008 avait été de mettre l'accent sur le maintien en condition opérationnelle, afin de rétablir le niveau de disponibilité des équipements. Il a souhaité savoir si cette disponibilité d'ensemble et l'approvisionnement en pièces détachées étaient satisfaisants, soulignant par ailleurs que le niveau des heures d'entraînement des pilotes d'avion de combat atteignait désormais le seuil minimal fixé par l'OTAN.

Le général Richard Wolsztynski a estimé que les structures de maintenance permettaient d'assurer une bonne disponibilité des appareils projetés sur des théâtres extérieurs et de ceux affectés aux écoles de pilotage en regard du contrat opérationnel fixé. La principale difficulté est d'accepter ce paradoxe entre le taux de disponibilité des matériels, qui se situe aux alentours de 65 %, et leur modernité, laquelle laisse supposer un taux bien supérieur. S'il est souvent reproché à l'armée de l'air une forme de « surmaintenance », il convient de garder à l'esprit qu'à la différence des flottes commerciales, la flotte militaire doit être préservée pour assurer une durée de vie des matériels de l'ordre de trente-cinq ans, ce qui implique de lourds cycles de maintenance. De plus, les opérations d'entretien liées aux besoins de disponibilité instantanée des matériels ne sont pas toujours bien perçues par les personnels.

En trois ans d'existence, la structure intégrée du maintien en condition opérationnelle des matériels aéronautiques de la défense (SIMMAD) a réussi à faire passer le taux moyen de disponibilité d'un appareil sur deux à deux appareils sur trois, ce qui constitue une performance remarquable. Le taux de disponibilité des avions de combat frôle 70 %, mais celui des avions de transport diminue en raison du vieillissement des Transall. Le coût du maintien en condition opérationnelle peut être parfois jugé excessif lorsqu'il résulte de situations de monopole de certains industriels. Ainsi, Air France international a été amené à augmenter significativement le prix de ses prestations de maintenance. De ce fait, le coût d'entretien du DC 8 Sarigue a atteint le budget de fonctionnement de six bases aériennes, alors que, dans le même temps, se profilait la perspective d'une modernisation de cet appareil, qui aurait encore alourdi la facture. Dans la mesure où d'autres moyens de renseignement électronique sont disponibles, la prise en compte des arguments opérationnels et économiques a conduit au retrait du DC 8 Sarigue.

II. -  EXAMEN DES CRÉDITS

La commission a examiné pour avis, sur le rapport de M. Jean-Louis Bernard, les crédits de l'armée de l'air pour 2005, au cours de sa réunion du mercredi 3 novembre 2004.

Un débat a suivi l'exposé du rapporteur pour avis.

M. Gilbert Meyer a rappelé que, si le taux moyen de disponibilité opérationnelle des appareils de l'armée de l'air plafonnait à 54 % il y a deux ans, il était toutefois déjà supérieur à 60 % pour certains d'entre eux. Les résultats atteints aujourd'hui doivent-ils être relativisés ? Quelle est la réalité de l'effort réalisé ?

M. Jean-Louis Bernard, rapporteur pour avis, a indiqué que l'objectif de disponibilité initialement assigné à la SIMMAD était probablement trop élevé, compte tenu de l'obsolescence de certains matériels, mais aussi de l'arrivée de matériels neufs, dont le coût de maintien en condition opérationnelle (MCO) est nécessairement élevé à leurs débuts. De plus, le retrait de quelques appareils sur des flottes limitées peut avoir un impact statistique important sur le taux de disponibilité de celles-ci. La SIMMAD éprouve des difficultés à recruter certains personnels très qualifiés, ce qui se traduit par des sous-effectifs. Pour autant, si l'on se réfère au taux de disponibilité opérationnelle d'environ 50 % il y a six ans, l'amélioration est significative.

M. Jérôme Rivière a relevé l'annonce récente d'une levée partielle de la mise en réserve demandée au ministère de la défense ; cette mesure porte sur 208 millions d'euros, destinés notamment aux programmes Rafale et A 400 M. Or, compte tenu des besoins respectifs de 147 millions d'euros pour le premier et de 114 millions d'euros pour le second, il manque 53 millions d'euros, dont on peut craindre qu'ils feront l'objet d'un report de charges sur la gestion de 2005. Il a par ailleurs demandé quelle était l'appréciation de l'armée de l'air sur la pertinence opérationnelle du choix du missile Meteor.

M. Jean-Louis Bernard, rapporteur pour avis, a indiqué que le programme Meteor faisait l'unanimité, même s'il représente un coût important. En ce qui concerne les levées de mises en réserve de crédits, il convient de noter que le ministère de la défense raisonne en masse globale, le financement des différentes tranches des programmes faisant souvent l'objet de reports calendaires. Toutefois, le financement du Rafale sera garanti, de même que celui de l'A 400 M. Si ce dernier programme est aujourd'hui très avancé, les retards de son lancement vont imposer à l'armée de l'air de faire face à une période de transition difficile à partir du retrait des premiers avions Transall, la conduisant à recourir de nouveau à l'affrètement d'avions de transport, tels que les Antonov 124.

Indiquant que le Royaume-Uni envisageait la possibilité de lancer des missiles Scalp-EG à partir des avions A 400 M, M. Jean-Michel Boucheron a demandé si la France entendait participer à ce projet.

M. Jean-Louis Bernard, rapporteur pour avis, a souligné que tel n'était pas le cas ; les difficultés techniques d'un tel lancement ne sont pas encore résolues, en raison des phénomènes de turbulences, plus délicats à maîtriser que sur des avions de combat.

Le président Guy Teissier a souhaité savoir quel était l'état d'avancement du projet d'externalisation de la formation des pilotes de chasse sur la base de Cognac.

M. Jean-Louis Bernard, rapporteur pour avis, a précisé qu'une étude avait été lancée sur ce sujet.

Conformément aux conclusions du rapporteur pour avis, la commission a émis un avis favorable à l'adoption des crédits de l'armée de l'air pour 2005.

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Au cours de sa réunion du mercredi 10 novembre 2004, la commission a émis un avis favorable à l'adoption des crédits de la défense pour 2005, le groupe socialiste votant contre.

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N° 1867 - tome VI - Avis au nom de la commission de la défense sur le projet de loi de finances pour 2005 sur la défense : air (Jean-Louis Bernard)

1 () Décret n° 2003-609 du 27 juin 2003 relatif au régime des primes d'engagement attribuées aux militaires non-officiers servant sous contrat.

2 () Les « bases aériennes » correspondent aux implantations importantes de l'armée de l'air et ne se limitent pas aux bases disposant d'une piste d'envol et susceptibles d'accueillir des aéronefs.

3 () Allemagne, Belgique, Espagne, France, Italie, Pays-Bas et Royaume-Uni.

4 () Auxquels s'ajoutent huit personnels étrangers et quarante-deux personnels dans les cellules logistiques Air.

5 () Ce contrat n'inclut pas les cinq maîtres d'œuvre industriels (Dassault, EADS, Eurocopter, Snecma et Thales), mais il permet de les introduire à terme.

6 () Moyenne altitude et de longue endurance.

7 () L'escadron ne sera en mesure d'accomplir des missions nucléaires qu'à partir de 2009.

8 () Loi n° 2002-1576 du 30 décembre 2002.

9 () En partenariat avec BAe Systems et Ericsson.

10 () En partenariat avec Thales.

11 () Ce consortium réunit les motoristes Snecma, Rolls Royce, MTU et ITP.


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