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le 9 novembre 2004

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N° 1863

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DOUZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 13 octobre 2004

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L'ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU PLAN SUR
LE PROJET DE
loi de finances pour 2005 (n° 1800),

PAR M. GILLES CARREZ,

Rapporteur Général,

Député.

--

ANNEXE N° 24


ÉQUIPEMENT, TRANSPORTS, AMÉNAGEMENT du TERRITOIRE,

TOURISME et MER :

TRANSPORTS AÉRIENS

Rapporteur spécial : M. Charles de COURSON

Député

____

INTRODUCTION 7

I.- LE DERNIER PROJET DE BUDGET AVANT LA RÉFORME BUDGÉTAIRE 9

A.- L'EXÉCUTION DES CRÉDITS DIFFICILE EN 2003, PLUS SEREINE EN 2004 9

1.- L'exécution des crédits « transports aériens » du budget général, victime de mesures de régulation 9

2.- L'exécution, délicate en 2003, des crédits du budget annexe de l'aviation civile 12

3.- Le décalage de l'exécution des crédits du Fonds d'intervention pour les aéroports et le transport aérien par rapport aux prévisions 18

4.- L' exécution sans problème des crédits de Météo France 21

B.- LA CONSTRUCTION DU PROJET DE BUDGET POUR 2005 23

1.- Les crédits du budget annexe de l'aviation civile sont fragilisés par l'incertitude des hypothèses économiques 23

2.- Les dépenses du FIATA, qui est supprimé, figureront désormais dans le budget général 29

3.- La baisse de la contribution du budget général au financement des avances remboursables et du soutien à la recherche traduit l'avancement des programmes 31

4.- Les dotations à Météo France s'inscrivent dans la continuité du soutien de l'État à la météorologie nationale 32

C.- L'INCIDENCE CONSIDÉRABLE DE LA RÉFORME BUDGÉTAIRE SUR LA PRÉSENTATION DES CRÉDITS DES TRANSPORTS AÉRIENS 34

1.- Les transports aériens en missions et programmes 34

2.- Des objectifs et des indicateurs de performance à améliorer 37

3.- Des plafonds d'autorisation des emplois en cours de préparation 41

4.- La réforme de la DGAC traduit la mise en œuvre de la loi organique relative aux lois de finances et du « Ciel unique » européen 41

II.- LA SITUATION CONTRASTÉE DES COMPAGNIES AÉRIENNES 43

A.- EN DÉPIT DE LA RÉCENTE REPRISE, LA CRISE A FORTEMENT AFFAIBLI LA PLUPART DES COMPAGNIES 43

1.- Un trafic stationnaire en 2003, en nette hausse en 2004 43

2.- De nombreuses compagnies affaiblies 44

B.- APRÈS SON RAPPROCHEMENT AVEC KLM ET SA PRIVATISATION, AIR FRANCE SE PORTE BIEN 45

1.- Le rapprochement Air France-KLM et la privatisation de la compagnie 45

2.- Des résultats qui se redressent 46

3.- La question de l'âge de cessation d'activité des personnels navigants 48

C.- LA SITUATION CONTRASTÉE DES PETITES COMPAGNIES 50

1.- La disparition d'Air Littoral 50

2.- Les difficultés rencontrées par l'ensemble des transporteurs régionaux français 53

3.- L'irrésistible développement des compagnies à bas coûts 54

III.- LES AÉROPORTS AU CœUR DES RÉFORMES 59

A.- AÉROPORTS DE PARIS : UNE SITUATION CORRECTE À LA VEILLE D'UNE RÉFORME STATUTAIRE 59

1.- Une reprise de l'activité en 2004, après une année 2003 atone 59

2.- L'effondrement d'une partie du terminal 2E 61

3.- Le projet de réforme statutaire 62

B.- LES AÉROPORTS RÉGIONAUX EN VOIE DE DÉCENTRALISATION 63

1.- Malgré la disparition du compte d'affectation spéciale, les liaisons aériennes réalisées dans l'intérêt de l'aménagement du territoire continueront à être subventionnées au même niveau 63

2.- La situation des aéroports de province ne parvient pas à s'améliorer 65

3.- Vers une large décentralisation en matière aéroportuaire 66

C.- LES QUESTIONS SPÉCIFIQUES AUX AÉROPORTS D'OUTRE-MER 70

1.- Un léger redressement de l'activité et de la situation financière des aéroports d'outre-mer 70

2.- Des spécificités de financement inacceptables en Polynésie et en Nouvelle-Calédonie : la nécessité d'y créer une taxe d'aéroport 71

D.- DES MODALITÉS DE FINANCEMENT EN COURS DE RÉNOVATION 73

1.- La mise en place de la taxe sur les nuisances sonores aériennes 73

2.- L'assouplissement des règles applicables aux redevances aéroportuaires 77

IV.- LES DÉPENSES DE SÛRETÉ : UNE VAINE FUITE EN AVANT 79

A.- UN ÉNORME GASPILLAGE FINANCIER 79

1.- Une augmentation vertigineuse des dépenses 80

2.- Un suréquipement inutile 81

B.- UN MODE DE FINANCEMENT À RÉFORMER 82

1.- Des gestionnaires d'aérodromes déresponsabilisés par la prise en charge intégrale des coûts par l'État 82

2.- Certaines dépenses de sûreté ne devraient pas être financées par le produit de la taxe d'aéroport 83

3.- Pour un financement public forfaitisé et limité à des prestations de base 84

4.- Pour l'heure, il faut empêcher une nouvelle hausse des dépenses 85

C.- DES MOYENS INADAPTÉS AUX ENJEUX 85

V.- DES SOUTIENS À L'INDUSTRIE AÉRONAUTIQUE INJUSTEMENT CRITIQUÉS 87

A.- LES ENTREPRISES AÉRONAUTIQUES FRANÇAISES SONT PARMI LES PREMIÈRES MONDIALES 87

1.- La poursuite des bons résultats d'EADS, et en particulier d'Airbus 87

2.- La bonne tenue des résultats de Snecma a permis une ouverture du capital dans des conditions satisfaisantes, et le rapprochement de Sagem 90

3.- Les activités aéronautiques civiles du groupe Dassault 93

B.- DES SOUTIENS INJUSTEMENT CRITIQUÉS 94

1.- Des aides américaines massives aux industries aéronautiques, qui n'empêchent pas la contestation des soutiens européens 94

2.- Une contestation qui risque de se retourner contre son initiateur 95

C.- DES DISPOSITIFS D'AIDE À AMÉLIORER 96

1.- Des imperfections techniques à corriger 96

2.- Des soutiens à la recherche aéronautique française d'un montant trop faible 98

3.- Rendre possible un remboursement anticipé des avances pour accroître le montant des subventions à la recherche 101

EXAMEN EN COMMISSION 105

L'article 49 de la loi organique du 1er août 2001 fixe comme date butoir, pour le retour des réponses aux questionnaires budgétaires, au plus tard huit jours francs à compter du dépôt du projet de loi de finances. Cette date était donc le 9 octobre. À cette date, environ 95 % des réponses étaient parvenues à votre Rapporteur spécial qui a pu, in fine, travailler avec l'ensemble des réponses.

LES PRINCIPALES TENDANCES DU BUDGET 2005

- Le projet de budget annexe de l'aviation civile (BAAC) présente un total net de 1.556,6 millions d'euros en 2005 contre 1.512,9 millions d'euros en 2004 (+ 2,89 %). Les recettes sont globalement en hausse de 2,47 %, grâce à la hausse de 4,36 % du produit de la taxe d'aviation civile affectée au BAAC (à 216,8 millions d'euros), tandis que les redevances de navigation aérienne augmentent de 1,2 % à 1.193,44 millions d'euros, du fait de la progression de 2,45 % de la redevance de route, la redevance pour services terminaux étant prévue en baisse. La création de 215 emplois sur le budget annexe explique les deux tiers de la hausse de 4,73 % des dépenses de personnel (853,5 millions d'euros).

- Le Fonds d'intervention pour les aéroports et le transport aérien (FIATA) est supprimé en 2005 et ses actions seront poursuivies sur des crédits du budget général. Alors que la dotation de continuité territoriale (30 millions d'euros en 2004) sera inscrite sur la section de l'Outre-mer, figureront sur la section des Transports et de la sécurité routière les crédits destinés aux missions de sécurité et de sûreté aéroportuaires (47 millions d'euros, en hausse de 4,68 %), de sûreté, de sauvetage et de lutte contre les incendies d'aéronefs et de péril aviaire (15,28 millions d'euros, soit + 1,19 million d'euros), et les subventions aux dessertes aériennes réalisées dans l'intérêt de l'aménagement du territoire (21,5 millions d'euros de crédits de paiement). En baisse de 23,2 %, cette dernière dotation sera abondée par des reports de crédits de l'ordre de 6 millions d'euros. La dépense prévue en 2005 est au même niveau que celle prévue en 2004, mais incomplètement réalisée.

- Les crédits consacrés aux programmes aéronautiques civils s'élèvent à 259,8 millions d'euros en autorisations de programme (- 3,62 %) et à 272,11 millions d'euros en crédits de paiement (- 7,54 %), étant donné la fin de certains programmes d'avances remboursables financièrement lourds.

- Les crédits consacrés à la météorologie s'élèvent à 190,13 millions d'euros en 2005, soit une augmentation de 1,37 % par rapport à 2004.

INTRODUCTION

Le budget des transports aériens est étroitement lié à la situation économique du secteur, qui a des conséquences sur le niveau des recettes, comme sur celui des dépenses. Le projet de budget pour 2005 traduit la reprise de l'activité des transports aériens.

Après les attentats du 11 septembre 2001, l'activité aérienne a traversé une crise particulièrement grave qui a été marquée par une contraction du trafic et des difficultés financières plus ou moins graves pour les compagnies aériennes et les plates-formes aéroportuaires. Alors qu'un sursaut d'activité était attendu en 2003, le déclenchement de la guerre en Irak et l'épidémie de pneumopathie atypique en Asie ont constitué de nouveaux freins à la reprise.

Pendant ces trois années, les recettes du budget annexe de l'aviation civile ont été inférieures aux prévisions, et des mesures de régulation des dépenses ont dû être prises.

Les perspectives pour 2005 sont nettement meilleures, grâce aux résultats très encourageants enregistrés en 2004. La crise semble avoir enfin été surmontée, même si elle a laissé des traces : plusieurs compagnies aériennes ont disparu, d'autres ne sont pas encore sorties de leurs difficultés financières, les dépenses de sûreté ont explosé, grevant l'ensemble des coûts du secteur.

Ce retour à une situation normale a permis de relancer des chantiers temporairement ajournés : rapprochement entre Air France et KLM, ouverture du capital, et bientôt privatisation de facto, de Snecma, réforme du statut d'Aéroports de Paris...

Afin de préparer ce rapport, votre Rapporteur spécial a rencontré, notamment, les dirigeants des groupes aéronautiques français, d'Air France et d'Aéroports de Paris, des responsables de la direction générale de l'aviation civile, des spécialistes en matière de sûreté, de responsables syndicaux. Il tient à remercier chacun d'eux pour le temps qu'ils lui ont consacré et pour les informations qu'ils lui ont données.

I.- LE DERNIER PROJET DE BUDGET AVANT LA RÉFORME BUDGÉTAIRE

Jusqu'au projet de budget pour 2005, le financement des transports aériens reposait sur trois types de supports : le budget annexe de l'aviation civile, le compte d'affectation spéciale appelé Fonds d'intervention pour les aéroports et le transport aérien (FIATA) et le budget général, à travers des crédits inscrits sur la section des Transports et de la sécurité routière en ce qui concerne le soutien à la recherche aéronautique, sur la section des services communs du ministère pour les dépenses en faveur de la météorologie.

L'article 38 du projet de loi de finances pour 2005, adopté le 25 octobre, prévoit la suppression du FIATA en tant que compte d'affectation spéciale. Les actions menées par ce dernier seront poursuivies sur des crédits du budget général. Cette suppression répond aux règles plus rigoureuses prévues par la loi organique relative aux lois de finances en matière d'affectation de recettes.

En 2006, les crédits qui sont l'objet du présent rapport seront répartis entre trois missions, ce qui ne facilitera pas le travail de synthèse des moyens destinés aux transports aériens.

A.- L'EXÉCUTION DES CRÉDITS DIFFICILE EN 2003, PLUS SEREINE EN 2004

En 2003, le marasme du secteur aérien s'est traduit par un manque de recettes pour le budget annexe comme pour le FIATA. La reprise sensible en 2004 a heureusement permis une gestion moins contrainte.

1.- L'exécution des crédits « transports aériens » du budget général, victime de mesures de régulation

a) Un exercice 2003 marqué par la rigueur

Les dotations du budget général votées pour 2003 se sont élevées à 263,69 millions d'euros en autorisations de programme et 300,68 millions d'euros en crédits de paiement, répartis entre deux chapitres :

CRÉDITS DE PAIEMENTS OUVERTS EN LOI DE FINANCES INITIALE POUR 2003

(en millions d'euros)

Chapitre 53-22

Programmes aéronautiques civils - Études, essais et développement

296,68

Chapitre 63-20

Subventions d'investissement aux programmes aéronautiques civils

4,00

Source : ministère de l'économie, des finances et de l'industrie.

Dans le cadre du dispositif de maîtrise de la dépense publique mis en œuvre au cours de la gestion 2003, le ministère de finances a demandé (1) une mise en réserve de 28,91 millions d'euros en autorisations de programme et de 27,88 millions d'euros en crédits de paiement sur le chapitre 53-22 et de 1,2 million d'euros en autorisations de programme et crédits de paiement sur le chapitre 63-20. Quelques semaines plus tard, la totalité des montants mis en réserve était annulée (2) sur le chapitre 63-20, ainsi que 8,71 millions d'euros d'autorisations de programme et 14,84 millions d'euros de crédits de paiement sur le chapitre 53-22 (dont 13,46 millions d'euros sur le seul chapitre 84 - Autres aéronefs).

En cours de gestion, les crédits du chapitre 53-22 ont été abondés à hauteur de 0,94 million d'euros par un transfert (3) et à hauteur de 19 millions d'euros par un virement provenant du chapitre 53-46 géré par la direction des routes. Ces crédits, gelés sur le chapitre 53-46, le sont restés sur le chapitre 53-22. Ils ont été imputés sur l'article 13 - Recherche amont de l'aéronautique civile afin de résoudre les graves difficultés induites par un niveau de crédits de paiement insuffisants pour faire face aux contrats en cours, problème que votre Rapporteur spécial avait signalé.

EXÉCUTION DE L'EXERCICE 2003
(crédits de paiement)

(en millions d'euros)

Chapitres

Loi de finances initiale

Annulations de crédits

Transferts et virements

Reports 2002/2003

Total dotations

Paiements

Taux de consommation
(en %)

53-22

296,68

- 14,84

19,94

29,26

331,04

269,28

81,34

63-20

4

- 1,36

-

0,16

2,8

2,68

95,78

Total

300,68

- 16,2

19,94

29,42

333,84

271,96

81,46

Source : rapport annuel de gestion du contrôle financier central.

Le taux de consommation des crédits est nettement en retrait par rapport à 2002, année où il a atteint 94,5 %, essentiellement sous l'effet du maintien d'un volume important de crédits mis en réserve. En revanche, 92,45 % des autorisations de programme ont été affectées.

Les 29,26 millions d'euros de crédits reportés de 2002 sur 2003 sont restés gelés pendant tout l'exercice 2003 et font partie des 61,76 millions d'euros reportés sur 2004. Cette somme comprend aussi le solde de la réserve de précaution (13,04 millions d'euros) et le virement de crédits de 19 millions d'euros.

b) La persistance des gels en 2004

S'agissant du budget en cours, les dotations votées se sont élevées à 269,57 millions d'euros en autorisations de programme et à 294,30 millions d'euros en crédits de paiements. Un gel de 18,30 millions d'euros d'autorisations de programme et de 31,32 millions d'euros de crédits de paiement a réduit, à la fin du premier semestre, la dotation utilisable.

Au 1er août 2004, 61,88 millions d'euros de reports avaient porté la dotation en crédits de paiement à 356,18 millions d'euros. Déduction faite des crédits mis en réserve, 324,86 millions d'euros étaient utilisables, et 233,34 millions d'euros avaient été consommés, soit 71,8 % de la dotation utilisable et 65,5 % de la dotation ouverte. Fin août 2004, près de 70 % de la dotation ouverte étaient consommés.

Les difficultés rencontrées en fin de gestion 2003 sur l'article 13 du chapitre 53-22 consacré aux soutiens à la recherche, dont les crédits de paiement étaient très insuffisants, ne devraient pas se reproduire avec la même gravité en 2004, essentiellement du fait de la baisse des autorisations de programme et du retard dans l'exécution des contrats.

PROGRAMMES AÉRONAUTIQUES CIVILS - ÉTUDES, ESSAIS ET DÉVELOPPEMENT

(en millions d'euros)

Crédits votés en 2004

(loi de finances initiale)

Autorisations de programmes

affectées au

1er août 2004

Crédits de paiements

payés au 1er août 2004

AP

CP

Chapitre 53-22 : Programmes aéronautiques civils Études et développement

Articles 12, 13 et 14 - Recherche amont

Article 36 - Moteurs

Article 60 - Équipements de bord

Article 81 - Avions de transport

Article 84 - Autres aéronefs

Article 90 - Études, recherches et matériel pour la sécurité des aéronefs

58,00

5,50

32,00

157,10

11,77

1,20

60,70

13,20

43,50

159,80

12,10

1,00

34,47

7,63

30,10

157,10

18,02

0,93

33,69

-

39,88

155,61

3,85

0,24

Total

265,57

290,30

248,26

233,34

Chapitre 63-20 : Subventions d'investissements aux programmes aéronautiques civils

Article 21 - Soufflerie ETW

Article 22 - Subventions à divers organismes

-

4,00

-

4,00

-

0,39

-

-

Total

4,00

4,00

0,502

-

Total général

269,57

294,30

248,64

233,34

2.- L'exécution, délicate en 2003, des crédits du budget annexe de l'aviation civile

a) Les recettes du BAAC : une baisse du produit de la taxe et des redevances en 2003, une situation plus équilibrée en 2004

Le produit net des recettes du BAAC en 2003, qui atteint 1.670,9 millions d'euros, est détaillé dans le tableau suivant :

SITUATION DÉFINITIVE DES RECETTES DE 2003,
COMPARÉE À LA LOI DE FINANCES INITIALE

(en millions d'euros)

Loi de finances initiale

Exécution

Écart
(en %)

Section d'exploitation

Redevance route

911,46

897,55

- 1,53

Redevance services terminaux

217,43

202,49

- 6,87

Autres prestations de service

7,91

7,2

- 8,98

Vente de marchandises

1,40

1,27

- 9,29

Autres recettes d'exploitation

6,37

6,09

- 4,40

Taxe de l'aviation civile

223,98

220,42

- 1,59

Subvention d'exploitation

0

0

-

Produits financiers

1,07

0,44

- 58,88

Produits exceptionnels

0,23

37,45

16.182,61

Reprises sur provisions

6,73

5,06

- 24,81

Total des recettes d'exploitation

1.376,57

1.377,99

0,10

Section des opérations en capital

Autofinancement

159,83

159,92

0,06

Recettes sur cessions

4,03

1,21

- 69,98

Subventions d'investissement reçues

0

3,84

-

Produit brut des emprunts

127,52

127,93

0,32

Total des recettes d'investissement

291,39

292,91

0,52

Total des recettes

1.667,96

1.670,90

0,18

Source : rapport de gestion du contrôle financier central.

Le montant des recettes d'exploitation inscrit en loi de finances initiale s'élevait à 1.376,57 millions d'euros. En exécution, le montant des recettes d'exploitation constatées en 2003 s'élève à 1.377,99 millions d'euros et dépasse donc de 1,42 million d'euros les prévisions inscrites dans la loi de finances initiale, essentiellement grâce au niveau nettement plus élevé que prévu des produits exceptionnels au titre du mécanisme correcteur (4) (37,45 millions d'euros, contre 0,23 million d'euros inscrits dans les prévisions). Sur tous les autres postes, les recettes sont en retrait par rapport aux montants retenus en loi de finances initiale.

S'agissant des redevances, l'écart est négatif à hauteur de 28,84 millions d'euros (soit 2,5 %). La situation est moins inquiétante qu'en 2002, année où les résultats étaient inférieurs aux prévisions de 69,7 millions d'euros ; le niveau de l'écart négatif est voisin de celui enregistré en 2001 (26,4 millions d'euros), alors que les exercices précédents avaient été marqués par des excédents de ressources par rapport aux prévisions. Après deux années de légère baisse du trafic, celui-ci, exprimé en « unités de service » a augmenté en 2003 de 4 % par rapport à 2002 pour la redevance de route, mais diminué de 1,4 % pour la redevance pour services terminaux de la circulation aérienne, ce qui explique que les recettes aient été inférieures aux prévisions. Elles ont toutefois progressé de 10,6 % par rapport à 2002, essentiellement en raison de l'augmentation des taux pratiqués.

S'agissant de la taxe d'aviation civile, on constate une diminution des recettes de 3,56 millions d'euros par rapport aux prévisions, sans commune mesure avec les 25,2 millions d'euros de manque de recettes constatés au cours de l'exercice 2002. Quant aux recettes d'investissement, le financement des opérations en capital était prévu en loi de finances initiale par l'autofinancement et l'emprunt pour un total de 286 millions d'euros : en exécution, cette section a bénéficié de diverses cessions de biens corporels et fonds de concours pour 10,1 millions d'euros, l'emprunt ayant été mobilisé à hauteur de 126 millions d'euros.

Selon les informations obtenues par votre Rapporteur spécial sur les prévisions d'exécution en 2004, extrapolées à partir de l'exécution au 1er septembre, le produit des redevances serait inférieur de 16,7 millions d'euros aux prévisions initiales, et celui des taxes leur serait supérieur de 18 millions d'euros. En fait, la redevance de route devrait rapporter 12,3 millions d'euros de plus que prévu grâce à la hausse des survols et des vols internationaux au départ et à l'arrivée de la France, mais le produit de la redevance pour services terminaux serait inférieur de 19,5 millions d'euros en métropole, à cause d'une surestimation de la reprise des vols domestiques, et de 9,5 millions d'euros sur la redevance perçue outre-mer du fait d'une revalorisation des tarifs limitée à 25 %, au lieu des 75 % prévue en loi de finances initiale. Quant au produit de la taxe de l'aviation civile, la hausse induite par la reprise du trafic, estimée à 6 millions d'euros, devrait être portée à 18 millions d'euros par la loi de finances rectificative pour 2004 qui proposera de modifier la quotité de répartition de la taxe au profit du budget annexe après que 12 millions d'euros ont été ouverts sur les crédits de l'outre-mer au titre de la dotation de continuité territoriale, réduisant d'autant le besoin de financement couvert par le FIATA (voir infra, à propos de l'exécution du FIATA).

PRÉVISIONS DES RECETTES EN 2004

(extrapolation à partir de l'exécution au 1er septembre)

(en millions d'euros)

Loi de finances initiale

Prévisions d'exécution

Redevances

1.179

1.162,3

Taxes

207,8

225,8

Autres recettes

31,2

31,2

Subvention d'exploitation

0

0

Total des recettes d'exploitation

1.417,9

1.419,3

Autofinancement

176

176

Recettes diverses

-

7,5

Produit brut des emprunts

95

95

Total des recettes d'investissement

271

278,5

Total brut des recettes

1.688,9

1.697,8

Total net des recettes

1.512,9

1.521,8

Source : direction générale de l'aviation civile.

b) Les dépenses du BAAC, fortement marquées par les conséquences de la crise du secteur aérien

L'exécution brute des dépenses du BAAC en 2003, qui se sont établies à 1.706,5 millions d'euros, est retracée dans les tableaux suivants :

LES DÉPENSES DU BAAC EN 2003

(en millions d'euros)

Chapitres

Loi de finances initiale

Total dotations

(1)

Total paiements

Paiements/
dotations

(en %)

60-00 - Achats et services

112,43

132,78

119,09

89,69

60-03 - Variation des stocks

0

0

0

-

61-01 - Dépenses d'informatique

14,85

20,99

14,04

66,91

63-00 - Impôts et taxes

5,51

6,39

5,31

83,13

65-01 - Prestations des organismes extérieurs

201,75

212,72

200,52

94,26

65-03 - Subventions diverses

2,13

4,78

1,96

40,96

65-04 - Autres charges de gestion

6,73

6,73

8,71

129,55

66-00 - Charges financières

23

34,08

18,47

54,20

66-01 - Pertes de change

0

0

0,01

-

67-00 - Charges exceptionnelles

37,8

37,8

37,8

100,00

68-01 - Dotations aux amortissements

159,83

159,83

159,83

100,00

68-02 - Dotations aux provisions

16,95

16,95

58,94

347,73

69-00 - Virement à la 2e section

0

0

0

-

Total des dépenses de fonctionnement

580,98

633,05

624,71

98,68

64-03 - Rémunérations des personnels

331,97

331,97

324,17

97,65

64-04 - Rémunérations des personnels ouvriers

33,27

33,27

30,71

92,30

64-05 - Vacataires

2,26

2,26

2,13

94,25

64-06 - Primes et indemnités

273,63

273,63

258,05

94,31

64-07 - Cotisations sociales

45,05

45,05

45,51

101,02 (2)

64-08 - Prestations sociales et familiales

8

8

7,08

88,49

64-09 - Prestations au titre des œuvres sociales

6,68

6,68

6,27

93,94

64-10 - Revalorisation des rémunérations publiques

0

0

0

-

64-11 - Fonds spécial des ouvriers de l'État

7,95

7,95

7,95

100,00

64-12 - Charges de pensions

83,5

83,5

83,5

100,00

67-01 - Frais judiciaires

3,05

3,05

13,67

(ns)

Total des dépenses de personnel

795,36

795,36

779,05

97,95

81-00 - Amortissement

91

136,73

90,96

66,52

82-01 - Équipement

194,5

322,22

211,72

65,71

82-02 - Subventions d'investissement

0,5

4,35

0,07

1,56

Total des dépenses d'investissement

286

463,3

302,75

65,35

Total des dépenses

1.662,34

1.891,71

1.706,51

90,21

(1) compte tenu des annulations et reports de crédits.

(2) non significatif, les crédits étant évaluatifs.

Sources : rapport annuel de gestion du contrôle financier central.

En 2003, les dépenses d'exploitation ont progressé vivement de 11,9 %, contre 3,3 % entre 2001 et 2002, sous l'effet de la hausse des dépenses de personnel (+ 4,4 %), des contributions aux organismes extérieurs (+ 6 %), et surtout de la comptabilisation des mécanismes correcteurs et des non-recouvrements en charges exceptionnelles (+ 37,8 millions d'euros pour le mécanisme correcteur relatif à la redevance de route) et en dotation aux provisions (+ 12 millions d'euros pour ce même mécanisme, et 46,9 millions d'euros pour les dettes des usagers au titre de la redevance pour services terminaux et la taxe d'aviation civile (5)). Pour ce qui est des dépenses en capital, marquées par une diminution de la consommation des crédits en 2001 et 2002, elles ont augmenté de 5,3 % en 2003, malgré une régulation des crédits de paiement portant sur un volume de 63,4 millions d'euros, qui a conduit à différer un certain nombre d'investissements de la navigation et des bases aériennes.

L'importance du niveau des non-recouvrements montre combien le budget annexe est utilisé comme un moyen de soutenir les compagnies en difficultés, en n'exigeant pas qu'elles paient leur dette et en faisant peser le poids de celle-ci, l'année suivante, sur les autres compagnies.

Cette année encore, votre Rapporteur spécial souligne l'importance, et la croissance, des montants de reports sur le BAAC. En 2003, trois arrêtés (6) ont reporté les crédits disponibles à la fin de la gestion 2002 pour des montants encore plus élevés qu'en 2002 : 51,84 millions d'euros de report de crédits de paiement disponibles sur les chapitres de fonctionnement (dont 18,52 millions sur le chapitre 66-00), contre 34,92 millions d'euros reportés de 2001 sur 2002, et 168,58 millions d'euros sur les chapitres d'équipement (dont 119 millions d'euros sur le chapitre 82-01, ce qui représente 61 % de la dotation initiale et 37 % de la dotation totale), soit presque autant qu'en 2002 (170,36 millions d'euros). Les basculements d'autorisations de programme ont atteint 57,85 millions d'euros sur le chapitre 82-01, et un total de 63,14 millions d'euros.

En 2004, le montant des dotations ouvertes sur la section d'exploitation, soit 1.417,9 millions d'euros, a été complété en cours de gestion par des reports de crédits à hauteur de 49,5 millions d'euros : fin 2004, le montant des dépenses nettes prévisibles devrait atteindre 1.433 millions d'euros. Quant aux dépenses de la section « capital », elles devraient avoisiner 309,5 millions d'euros en fin de gestion 2004, soit 91 millions d'euros de remboursements du capital des emprunts et 218,5 millions d'euros au titre des investissements.

PRÉVISIONS DES DÉPENSES EN 2004

(extrapolation à partir de l'exécution au 1er septembre)

(en millions d'euros)

Loi de finances initiale

Prévisions d'exécution

Exploitation (hors écriture d'ordre)

1.417,9

1.433

Capital

271

309,5

Total brut des dépenses

1.688,9

1.742,5

Total net des dépenses

1.512,9

1.566,5

Source : direction générale de l'aviation civile.

c) Les critiques réitérées de la Cour des comptes sur les conditions d'exécution du budget annexe

Dans son rapport sur l'exécution des lois de finances pour l'année 2003 (7), la Cour des comptes constate que les problèmes structurels qu'elle a soulignés dans son rapport sur l'exécution des lois de finances pour 2002 ont eu tendance à s'amplifier en 2003.

Elle déplore le solde d'exploitation négatif du BAAC et la diminution de son fonds de roulement. Le jugement est sévère : « Le déficit du BAAC, et le niveau d'endettement particulièrement élevé, démontrent à la fois l'absence de souci de maîtrise des coûts et l'incapacité de la DGAC à piloter ses dépenses en cours d'année, en fonction des recettes attendues. » En effet, l'accroissement de 14,6 % du niveau de l'emprunt en 2003 conduit l'encours de la dette au niveau record de 761,2 millions d'euros, alors que la privatisation probable d'Aéroport de Paris devrait entraîner une nouvelle hausse de cet encours en engendrant pour le BAAC l'obligation de payer environ 30 millions d'euros d'investissement par an, alors que l'avance était jusqu'à présent effectuée par ADP.

Par ailleurs, les charges d'exploitation courantes ont crû deux fois plus fortement qu'en 2002 et à un taux deux fois supérieur à celui prévu en loi de finances initiale. 65 % du total correspondent aux charges de personnels, qui ont progressé de 4,4 %. La Cour estime que 43 % de cette hausse ne sont pas expliqués par les effets du protocole triennal du 7 décembre 2000 pour la navigation aérienne. Elle attribue en outre la dérive des dépenses de fonctionnement hors personnel, amortissement et provisions, lesquelles ont crû de 20 %, à « l'effet déresponsabilisant du mécanisme correcteur, qui permet d'ajuster les dépenses aux coûts en fin d'année ». Elle souligne aussi la progression considérable des frais judiciaires, de 1,6 à 13,7 millions d'euros, qui résulte de deux jugements défavorables à la DGAC sur des affaires nouvelles, les contentieux relatifs à la RSTCA n'étant pas encore réglés.

Globalement, c'est la présentation de la situation financière du BAAC qui est jugée déconnectée de la situation réelle, notamment à cause de l'opacité qui entoure le mécanisme correcteur. Aussi la Cour des comptes formule-t-elle la recommandation suivante : « L'absence de présentation en loi de finances initiale des coûts analytiques associés à chaque redevance ne permet pas au Parlement d'exercer un véritable contrôle de l'autorisation budgétaire. La Cour estime que cette information devrait figurer à l'avenir dans la loi de finances initiale. »

En fait, votre Rapporteur spécial tient à souligner que cette information figure dans le rapport au Parlement réalisé en application de l'article 99 de la loi de finances pour 1996 : il présente les coûts analytiques de l'exercice achevé (2003) et une prévision pour l'exercice à venir (2005). Le tableau figure infra et met en évidence une adéquation imparfaite entre les coûts analytiques et le produit des redevances, le rapprochement étant effectué selon trois sections, et non pour chaque redevance. Votre Rapporteur spécial estime qu'il conviendrait de faire en sorte que les redevances correspondent d'une manière plus satisfaisante aux coûts qu'elles sont censées couvrir.

3.- Le décalage de l'exécution des crédits du Fonds d'intervention pour les aéroports et le transport aérien par rapport aux prévisions

a) Des recettes 2003 très inférieures aux prévisions

La loi de finances pour 2003 avait prévu des recettes à hauteur de 70,58 millions d'euros, en diminution de 21,5 % par rapport au montant prévu en loi de finances initiale pour 2002 (89,95 millions d'euros), recettes issues essentiellement de la quotité affectée au FIATA (fixée à 23,96 % pour 2003) de la taxe de l'aviation civile d'une part et, de façon aujourd'hui très marginale, de l'ex-taxe de péréquation d'autre part. Les recettes réellement encaissées se sont élevées à 66,37 millions d'euros, dont 66,32 millions d'euros au titre de la part de la taxe de l'aviation civile affectée au FIATA et moins de 0,04 million d'euros au titre de l'ex-taxe de péréquation.

Comme le souligne le rapport annuel de gestion du contrôle financier central, le montant des recettes encaissées s'étant avéré, en fin d'exercice, en recul de 4,3 % par rapport à celui de 2002 et inférieur de 5,96 % aux prévisions de la loi de finances initiale, il devait être procédé, au titre de 2003, à l'annulation des autorisations de recettes et par conséquent des autorisations de dépenses, à due concurrence du déficit constaté, soit 4,21 millions d'euros en crédits de paiement et 2,26 millions d'euros en autorisations de programme. Ces montants d'annulation sont nettement moins élevés que ceux enregistrés au titre de 2002, qui étaient respectivement de 20,602 et 8,132 millions d'euros.

Au niveau de l'exécution budgétaire des dépenses, les reports de 2002 sur 2003 ont été conformes aux prévisions, à hauteur de 13,1 millions d'euros (contre 20,689 millions d'euros reportés de 2001 sur 2002). Compte tenu du déficit de recettes, le FIATA a disposé pour 2003 d'une enveloppe d'autorisations de dépenses de 79,47 millions d'euros, répartie entre le fonctionnement à hauteur de 59,83 millions (dont 55,32 millions d'euros ont été consommés) et l'investissement à hauteur de 19,64 millions d'euros en crédits de paiement (qui a donné lieu à un montant de paiement de 11,02 millions d'euros). Alors que les autorisations de dépenses sont passées de plus 90 millions d'euros à moins de 80 millions d'euros entre 2002 et 2003, les dépenses de fonctionnement réalisées ont crû de 4,2 millions d'euros (soit de 8,36 %), au détriment des dépenses d'investissement pour lesquelles les paiements ont diminué de près de 60 %.

Le résultat des ouvertures de reports de 2002, des dotations de la loi de finances initiale et des modifications réglementaires de crédits (soit 79,47 millions d'euros), diminué des dépenses (66,34 millions d'euros), aboutit à un montant de crédits reportables de 2003 sur 2004 de 13,13 millions d'euros, très proche du niveau des reports réalisé entre 2002 et 2003. Le montant des reliquats d'autorisations de programme disponibles en fin de gestion 2003 s'est élevé à 0,3 million d'euros.

b) Une gestion 2004 compliquée par la dotation de continuité territoriale

Pour l'exercice 2004, la loi de finances a prévu que les recettes du FIATA au titre de la taxe d'aviation civile atteignent 118 millions d'euros ; elles s'établissaient à 85,98 millions d'euros au 30 septembre. À cette date, 44,90 millions d'euros avaient été affectés aux subventions accordées aux gestionnaires d'aéroports relatives au service de sauvetage et de lutte contre les incendies d'aéronefs, au péril aviaire et en matière de sûreté et 6,62 millions d'euros aux subventions aux entreprises de transport aérien. Seulement 4,2 millions d'euros ont été utilisés pour la dotation de continuité territoriale, sur une dépense dont l'estimation révisée s'établit à 17,6 millions d'euros pour l'année 2004. La lenteur de la consommation de ces crédits est directement liée à la phase de mise en œuvre du dispositif qui nécessitait que chaque collectivité bénéficiaire fixe le montant et les conditions d'attribution de l'aide. Cette phase est désormais achevée, mais le dispositif doit encore recevoir l'aval de la Commission européenne en ce qui concerne les départements d'outre-mer.

L'article 73 de la loi de finances pour 2004 a chargé le FIATA d'assurer le financement de la participation de l'État au financement d'un dispositif destiné à faciliter la mobilité des résidents des collectivités d'outre-mer, prévu par l'article 60 de la loi n°2003-660 du 21 juillet 2003 de programme pour l'outre-mer. Une dépense de 30 millions d'euros a été inscrite à ce titre sur le FIATA en loi de finances initiale. Votre Rapporteur spécial avait d'ailleurs vivement critiqué cette imputation budgétaire dans la mesure où le compte d'affectation spéciale n'était pas compatible avec cette nouvelle dépense et où un tel mode de financement, déjà peu orthodoxe dans le cadre de l'ordonnance de 1959, était manifestement contraire à la loi organique du 1er août 2001 (8)

Il était prévu que la dépense soit compensée, sur le BAAC, à hauteur de 15 millions d'euros par une augmentation de 75 % de la redevance pour services terminaux outre-mer - laquelle est très inférieure au coût réel des services - et à hauteur de 15 millions d'euros par une hausse du taux de la taxe d'aviation civile. La part financée par l'outre-mer a été réduite à 12 millions d'euros, puis à 4 millions d'euros, une hausse brutale de 75 % de la RSTCA n'apparaissant pas opportune. Parallèlement, le ministère de l'outre-mer a souhaité participer à la gestion du dispositif, ce qui supposait qu'il en assure une partie du financement, chose faite par redéploiement de crédits, à hauteur de 12 millions d'euros (9). Finalement, le FIATA n'a donc plus la charge de financer que 18 millions d'euros au titre de la continuité territoriale, si bien que 12 millions d'euros, financés par les compagnies aériennes, resteront sans utilisation en fin d'année. Selon les informations données à votre Rapporteur spécial, le projet de loi de finances rectificative pour 2004 devrait comporter un article qui modifiera la quotité de répartition du produit de la taxe d'aviation civile au profit du budget annexe, afin d'éviter que cette somme ne devienne une recette du budget général après la suppression du FIATA.

Votre Rapporteur spécial déplore que l'imputation, indue, de la dotation de continuité territoriale sur le FIATA soit venue perturber sa gestion. Une affectation des crédits nécessaires sur le budget de l'Outre-mer dès la loi de finances initiale pour 2004 aurait évité toutes ces difficultés.

4.- L'exécution sans problème des crédits de Météo France

On précisera, au préalable, que Météo France est un établissement public à caractère administratif placé sous la tutelle du ministère de l'Équipement, créé en 1994 par transformation de la direction de la météorologie nationale. Sa principale mission consiste à surveiller et à prévoir le comportement de l'atmosphère, du manteau neigeux et de l'océan superficiel et à assurer ainsi la sécurité des personnes et des biens. L'activité de Météo France comprend ainsi la conception, le développement, le maintien en conditions opérationnelles et la mise en œuvre de tous les moyens nécessaires à la prévision du temps. Météo France est également chargée de l'étude du climat et de son évolution.

L'article 111 de la loi de finances pour 1994 (10) prévoit que, « à compter du 1er janvier 1994, l'établissement public Météo France est subrogé dans les droits et obligations détenus par l'État au titre de la météorologie nationale ».  Cette subrogation, ainsi que le transfert des biens de l'État à Météo France (11), ne donnent lieu à « aucune indemnité ou perception d'impôts, droits ou taxes, ni à aucun versement au profit des agents de l'État d'honoraires ou des salaires prévus à l'article 879 du code général des impôts ». La quasi-totalité des opérations budgétaires intéressant la météorologie s'exerce donc désormais dans ce cadre.

Toutefois, demeurent sur le budget général, sur la section des services communs du ministère chargé des transports les deux chapitres de subvention à Météo France, le chapitre 36-20 - Subvention à Météo France et le chapitre 63-21
- Subvention d'investissement à Météo France. Les versements effectués à partir de ces deux chapitres se retrouvent, selon les cas, en recettes de fonctionnement ou d'équipement au budget de Météo France.

Ils sont la traduction des engagements pris dans le cadre du contrat d'objectifs pour la période 2001-2004.

L'exécution financière du budget de Météo France en 2003 est retracée dans les tableaux ci-après.

L'EXÉCUTION DU BUDGET DE MÉTÉO FRANCE EN 2003

(en millions d'euros)

Section de fonctionnement

Dépenses

Recettes

Rémunérations, traitements et charges sociales

195,51

Ventes de marchandises, produits fabriqués, prestations de services

41,33

Achats

87,89

Subventions d'exploitation (tutelle)

184,21

Impôts et taxes

0,09

Autres subventions et concours

0,65

Autres charges externes

0,15

Autres produits d'exploitation dont redevances aéronautiques

73,86

Charges financières

0,01

Produits exceptionnels

4,84

Charges exceptionnelles

0,32

Produits financiers

1,11

Dotations aux amortissements

17,24

Excédent de la 1ère section

4,79

Total

305,99

Total

305,99

Section des opérations en capital

Dépenses

Recettes

Immobilisations financières

0

Subventions d'investissement

3,8

Immobilisations incorporelles

0,68

Autofinancement

17,66

Immobilisations corporelles

15,84

Produits des cessions d'éléments d'actifs

0,003

Immobilisations en cours

4,56

Total

21,07

Total

21,46

Apport au fonds de roulement budgétaire

0,39

Prélèvement sur le fonds de roulement budgétaire

0

Source : rapport de gestion annuel du contrôle financier central.

Le montant total des recettes de la section d'exploitation a progressé de 1,8 % en 2003, notamment sous l'effet de la hausse de 3,3 % des produits et prestations de service, ressources qui avaient diminué de 3,8 % entre 2001 et 2002. Les ressources des opérations en capital, hors produits des cessions d'éléments d'actifs, ont augmenté de 2,1 % par rapport à 2002. Les subventions reçues au titre des investissements proviennent de l'État, pour 2,74 millions d'euros inscrits sur le chapitre 63-21 précité, et d'autres collectivités publiques et organismes internationaux, à hauteur de 1,06 million d'euros.

Parmi les dépenses de fonctionnement, d'un total de 301,2 millions d'euros en 2003, figure, au sein des achats, à hauteur de 39,08 millions d'euros, la subvention versée à Eumetsat, l'organisation européenne des satellites météorologiques. À l'issue de cet exercice, le fonds de roulement, en légère augmentation, s'établit à 35,57 millions d'euros.

B.- LA CONSTRUCTION DU PROJET DE BUDGET POUR 2005

La présentation du projet de budget pour 2005 est marquée par la suppression du FIATA en tant que compte d'affectation spéciale. Les actions menées par ce dernier seront poursuivies sur des crédits du budget général.

Comme l'an dernier, votre Rapporteur spécial souligne que les hypothèses économiques ayant servi de fondement au calcul des recettes sont entourées d'un certain nombre d'incertitudes.

1.- Les crédits du budget annexe de l'aviation civile sont fragilisés par l'incertitude des hypothèses économiques

La construction de tout budget annexe repose sur des hypothèses de recettes comme de dépenses. Le projet de budget pour l'année « n » étant élaboré au début de l'année « n-1 », les hypothèses retenues apparaissent souvent caduques avant même d'avoir été votées.

Cette situation a été particulièrement vraie en 2002, dont le budget avait été construit plusieurs mois avant les événements du 11 septembre 2001 et leurs pesantes répercussions sur le secteur aérien. Les recettes du budget annexe ont ainsi été inférieures de près de 70 millions d'euros aux prévisions. En 2003, le décalage entre prévisions et exécution a été relativement moins marqué en recettes, mais important en dépenses à cause de la comptabilisation des mécanismes correcteurs et des non-recouvrements en charges exceptionnelles et en dotation aux provisions. Le retour à la croissance du trafic espéré pour 2003 a été entravé par le conflit du Moyen-Orient et l'épidémie de pneumopathie atypique.

Le projet de budget pour 2005 a été préparé depuis le début de l'année 2004, sur la base d'une évolution modérée du trafic, alors que la reprise s'est fait nettement sentir au deuxième trimestre. Il est donc probable que le surplus de recettes au titre de la taxe d'aviation civile attendu pour 2004 se renouvelle et s'amplifie en 2005, même si l'impact de l'augmentation du prix du pétrole sur le trafic reste incertain. Votre Rapporteur spécial se réjouit néanmoins de la stabilisation du taux de cette taxe, et de la perspective d'une légère baisse de ceux des redevances. Les taux sont en effet calculés à partir des dépenses prévues ; or celles-ci devraient augmenter moins vite que le trafic.

Le tableau ci-après présente les crédits du budget annexe pour 2005 et leur évolution par rapport à la loi de finances initiale pour 2004 :

BUDGET ANNEXE DE L'AVIATION CIVILE POUR 2005

(en millions d'euros)

EXPLOITATION

CHARGES

PRODUITS

Intitulé

Loi de finances initiale pour 2004

Projet de loi
de finances pour 2005

Évolution 2005/2004
(en %)

Intitulé

Loi de finances initiale pour 2004

Projet de loi
de finances pour 2005

Évolution 2005/2004
(en %)

Achats et services

127,3

131,6

3,38

Redevance de route

932,8

955,7

2,45

Impôts et taxes

5,6

5,9

5,36

Redevances pour services terminaux en métropole

214,9

210,0

- 2,26

Charges de personnel

810,0

848,3

4,73

Redevances pour services terminaux en outre-mer

31,2

27,7

- 11,22

Autres charges de gestion courante

234,5

245,2

4,56

Taxe de l'aviation civile

207,8

216,8

4,36

Charges financières

23,0

20,0

13,04

Autres produits

13,7

14,6

6,28

Charges exceptionnelles

25,9

10,4

- 59,84

Produits financiers

0,5

0,5

-

Dotations aux amortissements et aux provisions

191,5

191,4

0,05

Reprises sur provisions

16,9

27,56

62,60

Total brut (exploitation)

1.417,9

1.452,9

2,47

Total brut

1.417,9

1.452,9

2,47

OPÉRATIONS EN CAPITAL

Amortissement financier

91,0

100,2

10,11

Autofinance-ment

176,0

179,5

2,0

Investissements

180,0

183,0

1,67

Produit brut des emprunts

95,0

103,7

9,16

Total brut (capital)

271,0

283,2

4,5

Total brut

271,0

283,2

4,5

À déduire :

À déduire :

Dotations aux amortissements

- 176,0

- 179,5

(ns)

Autofinance-ment

- 176,0

- 179,5

(ns)

total net du BAAC

1.512,9

1.556,6

2,89

1.512,9

1.556,6

2,89

Source : documents budgétaires.

a) Des recettes globalement en hausse de 2,5 %

Le produit attendu de l'ensemble des redevances de navigation aérienne au titre du projet de budget 2005 s'établit à 1.193,44 millions d'euros, en hausse de 1,2 % par rapport au montant inscrit en loi de finances initiale pour 2004.

Cette augmentation cache une progression du produit de la redevance de route (et donc des coûts qu'il doit couvrir), alors que les redevances pour services terminaux devraient voir leur produit diminuer en 2005. Les valeurs définitives des taux unitaires de ces redevances seront déterminées, fin décembre 2004, en fonction de l'évolution du trafic en 2004 et des prévisions estimées pour 2005. Selon les informations fournies à votre Rapporteur spécial, les taux devraient être en légère baisse, ce qui constitue une bonne nouvelle pour les compagnies aériennes.

Ces prévisions de recettes reposent sur l'hypothèse d'une assiette totale des redevances de 1.218,6 millions d'euros, et d'une assiette facturable de 1.175,5 millions d'euros ; quant aux prévisions du nombre d'unités de services, les taux de progression retenus sont les mêmes que pour 2004 : une hausse de 3,5 % du trafic pour la redevance de route et une augmentation de 4 % pour la redevance pour services terminaux de la circulation aérienne. Votre Rapporteur spécial observe que ces hypothèses de calcul ont été maintenues alors même qu'elles n'ont pas été parfaitement réalisées en 2004 : il semblerait en effet que la progression du trafic a été légèrement supérieure aux prévisions pour la redevance de route, mais inférieure au taux retenu pour la redevance pour services terminaux, notamment en raison de la stagnation des vols domestiques, et ce malgré une progression significative des vols internationaux amorcée au début de l'été.

Le produit de la taxe de l'aviation civile doit financer les dépenses, non couvertes par les redevances, qui ont pour objet d'assurer la sécurité du transport aérien. 65,58 % du produit total de la taxe seront affectés au budget annexe, en application de l'article 40 du projet de loi de finances. Ils devraient se traduire par une recette estimée à 216,82 millions d'euros, en hausse de 4,4 % par rapport au projet de loi de finances pour 2004, sous l'effet de la hausse attendue du trafic et d'une quotité de la taxe plus élevée qu'en 2004 (65,58 %, contre 63,78 % en 2004). Les tarifs unitaires resteront inchangés en 2005 soit 4,48 euros par passager embarquant sur un vol intracommunautaire et 7,60 euros par passager embarquant sur un vol extra-communautaire. Votre Rapporteur spécial se réjouit de cette stabilisation qu'il a appelée de ses vœux. Les taux de croissance retenus pour le trafic passagers en 2005 sont de 1,3 % pour l'intracommunautaire et de 2,5 % pour l'extra-communautaire, soit au total une progression estimée à 1,6 %. Ces hypothèses tiennent compte d'une reprise du transport aérien, mais restent prudentes suite aux trois années marquées par une conjoncture difficile. Il est probable que la hausse du trafic sera supérieure à ces hypothèses, mais l'impact de l'augmentation du prix du kérosène sur le trafic est encore incertain.

L'autofinancement, qui est prévu en hausse de 2 % par rapport à 2004, doit couvrir les remboursements d'emprunts, la totalité des investissements du secteur « régalien » du budget annexe et une partie des investissements du secteur « redevances ».

Le niveau d'endettement du BAAC sera pratiquement stable en 2005 (autour de 765 millions d'euros), les remboursements d'emprunt autorisés s'élevant à 100,2 millions d'euros et l'emprunt autorisé à 103,7 millions d'euros. Il a été indiqué à votre Rapporteur spécial que, si le produit de la taxe d'aviation civile dépassait les prévisions, le surplus serait utilisé au désendettement du budget annexe, ce qui lui semble une bonne chose.

b) Des dépenses en nette augmentation

Le total brut des dépenses du projet de budget 2005 du BAAC progresse de 2,8 % à 1.736,06 millions d'euros, soit 1.452,88 millions d'euros pour la section exploitation (+ 2,5%) et 283,17 millions d'euros pour la section en capital (+ 4,5%).

Après deux années de stabilité, les moyens des services (dépenses d'exploitation, impôts et taxes hors personnel, frais judiciaires et subventions diverses) sont réévalués à 137,6 millions d'euros (soit + 3,3%), revalorisation due principalement à la réintégration, en prévision du changement de statut de cet établissement, de la direction des opérations aériennes d'ADP.

Au budget 2005, le flux net des emplois du budget annexe de l'aviation civile présente un solde positif de 215 emplois, dont 176 emplois techniques et 25 emplois administratifs, soit deux années (2004 et 2005) de créations d'emplois issues des prévisions de recrutement arrêtées au protocole signé le 17 mars 2004. Cette évolution prend en compte notamment les prévisions de recrutement, les futurs départs à la retraite et les délais de formation des personnels techniques sur un horizon pluriannuel. Ainsi, les dépenses de personnel (853,5 millions d'euros) évoluent globalement de 4,73 %, les deux tiers de cette hausse étant la conséquence des mesures nouvelles liées à la mise en œuvre du protocole (y compris la prise en compte budgétaire des mesures applicables à compter de 2004). Une telle hausse apparaît bien forte à votre Rapporteur spécial, dans la situation budgétaire actuelle. Il sera très attentif à ce qu'elle ne se renouvelle pas en 2006.

Le montant des crédits d'investissement demandés sur le BAAC s'établit à 273 millions d'euros en autorisations de programme et à 183 millions d'euros en crédits de paiement. Par rapport à la loi de finances initiale pour 2004, ces projets de dotations sont en respectivement en augmentation de 24,1 % et de 1,6 %. Cette forte hausse en autorisations de programme trouve son origine dans la prise en charge directe des investissements de l'activité navigation aérienne d'ADP (25 millions d'euros sur une augmentation de 55 millions d'euros pour la navigation aérienne), figurant jusqu'alors sous forme d'amortissements dans la convention DGAC-ADP imputée sur le chapitre de fonctionnement « organismes extérieurs », et également dans le lancement de la deuxième tranche du projet « European Flight Data Processing » de la direction de la navigation aérienne, nouveau système de traitement des plans de vol réalisé en commun avec le service de navigation aérienne italien (pour 45 millions d'euros). Le taux de croissance modérée en crédits de paiement s'explique par la volonté de décroissance des crédits sans emploi en fin de gestion.

Le tableau suivant présente l'exécution du BAAC 2003 et le projet pour 2005 sous forme analytique, en rapprochant les charges des produits.

L'équivalence globale entre le produit des redevances et les charges de la navigation aérienne est obtenue grâce à l'ajustement permis a posteriori par le mécanisme correcteur. Elle est en revanche inexistante outre-mer, le taux des redevances étant très bas. Environ 20 millions d'euros sur un total de charges de 90 millions d'euros étaient couverts, en 2003, par le produit des redevances. L'augmentation progressive du taux de la RSTCA outre-mer permettra d'améliorer cette situation, mais un écart important subsistera. Comme les exonérations et exemptions de redevances, cet écart est pris en charge hors redevances, et financé grâce à un produit supérieur à la prévision, attendu sur la taxe d'aviation civile (qui est pourtant censée financer les missions hors navigation aérienne), et à une participation dite « implicite » du budget général, qui correspond à la prise en charge de certains personnels et services par les ministères de l'équipement et de la défense, qui n'en demandent pas remboursement au budget annexe. Ces dépenses sont intégrées dans l'assiette à partir de laquelle sont fixés les taux des redevances dues par les compagnies en métropoles, et le budget annexe perçoit ainsi une recette, qu'il affecte à la couverture d'une partie des dépenses effectuées outre-mer.

Votre Rapporteur spécial estime que ces mécanismes sont inacceptables, et qu'il convient de mieux ajuster les produits aux charges.

BUDGET ANNEXE DE L'AVIATION CIVILE
Présentation en termes de charges et produits

Charges

2003

2005

Produits

2003

2005

Section des missions entrant dans le champ des redevances de navigation aérienne

Métropole

Moyens des services

Charges de personnel

Organismes extérieurs

Charges financières

Autres charges de gestion courante

Dotations aux provisions

Dotation mécanisme correcteur

Dotation aux amortissements

Charges exceptionnelles

Charges supplétives d'intérêt

Charges supplétives organismes extérieurs

Outre-mer

Moyens des services

Charges de personnel

84,8

545,5

193,7

9,4

2,9

19,9

12,1

177,2

37,8

13,4

46,7

2,3

14,8

84,7

600,9

218,7

3,4

7,1

8,7

182,1

7,4

27,6

37,9

3,7

24,0

Redevance de route

RSTCA métropole

RSTCA outre-mer

Autres produits : recettes annexes (SIA)

Reprise sur provisions autre que mécanisme correcteur

Reprise sur provision mécanisme RSTCA

Mécanisme correcteur 2003 (produit à recevoir)

Produits exceptionnels sur opérations de gestion

Produits cession éléments d'actif

Produits à recevoir

897,6

185,4

17,1

5,4

5,1

0,0

28,9

5,4

3,1

12,4

955,7

210,0

27,7

6,0

7,1

12,1

- 12,4

Total redevances navigation aérienne

1.160,4

1.206,2

Total redevances navigation aérienne

1.160,4

1.206,2

Section des missions hors navigation aérienne

Moyens des services

Charges de personnel

Organismes extérieurs

Charges financières

Autres charges de gestion courante

Dotations aux provisions

Dotation aux amortissements

Aides aux compagnies

Contribution à la section navigation aérienne hors champs des redevances

54,0

120,4

2,1

6,0

4,1

27,0

45,4

0,0

0,0

41,9

139,5

3,5

12,4

4,3

3,2

11,4

0,0

19,0

Taxes TSS/TAC

Subventions

Autres produits

Produits financiers

Reprise sur provisions

Produit taxe à recevoir

Prélèvement sur fonds de roulement

220,4

0,0

9,1

0,4

0,0

0,8

28,2

216,8

0,0

8,5

0,5

8,4

0,9

0,0

Total autres missions

259,0

235,1

Total autres missions

259,0

235,1

Section des missions navigation aérienne hors champ des redevances

Exonérations et exemptions métropole

Moyens des services

Charges de personnel

Organismes extérieurs

Dotation aux amortissements

Charges financières

Charges supplétives organismes extérieurs

Autres charges de gestion courante

5,5

35,4

4,8

10,8

1,1

1,2

1,4

5,3

36,1

5,4

10,1

1,4

0,9

3,3

Rémunération des capitaux propres

Participation implicite du budget général

Apport en recettes fiscales

Insuffisance de recettes

13,4

46,7

0,0

74,6

27,6

37,9

19,0

52,4

60,1

62,7

Outre-mer non financé par RSTCA

Moyens des services

Charges de personnel

Dotation aux amortissements

Charges financières

Autres charges de gestion courante

7,5

49,3

15,4

1,9

0,3

7,3

47,6

15,8

2,7

0,8

74,5

74,2

Total navigation aérienne hors redevance

134,6

136,9

Total navigation aérienne hors redevance

134,6

136,9

Source : rapport au Parlement en application de l'article 99 de la loi de finances pour 1996.

2.- Les dépenses du FIATA, qui est supprimé, figureront désormais dans le budget général

Dans le cadre de l'introduction progressive des règles et principes issus de la loi organique relative aux lois de finances, l'article 38 du projet de loi de finances pour 2005 propose de clore le compte d'affectation spéciale n° 902-25 « Fonds d'intervention pour les aéroports et le transport aérien » (FIATA) (12) au 31 décembre 2004. Les opérations en compte sur ce fonds seront reprises au sein du budget général, sur lequel seront reportés les crédits disponibles à la clôture du compte. Ces crédits disponibles proviendront essentiellement du chapitre 01 destiné aux subventions pour les dessertes dans l'intérêt de l'aménagement du territoire ; ils devraient être de l'ordre de 5 à 6 millions d'euros.

Pour 2005, l'article 40 du même projet de loi (13) affecte au budget général 34,42 % du produit de la taxe d'aviation civile, soit un total de 113,78 millions d'euros. Cette somme sera répartie entre le nouveau chapitre 59-04 - Programme « Transports aériens » - Intervention pour les aéroports et le transport aérien de la section « Transports et sécurité routière », à hauteur de 83,78 millions d'euros, et le nouvel article 40 - Dotation de continuité territoriale du chapitre 41-51 de la section « Outre-mer », à hauteur de 30 millions d'euros (cette dotation est par ailleurs portée à 30,99 millions d'euros). Le chapitre 59-04 financera les dépenses « traditionnelles » du FIATA ; les crédits de l'article 40 du chapitre 41-51 de la section « Outre-mer » sont destinés à la dotation de continuité territoriale dont le financement avait été mis à la charge du FIATA par l'article 73 de la loi de finances pour 2004 (14).

LE DEVENIR DES DÉPENSES DU FIATA EN 2005 (1)

(en millions d'euros)

Loi de finances initiale 2004

Projet de loi de finances 2005

Évolution
(en %)

Dépenses du FIATA

Dépenses du budget général

Chapitre 06 : Subventions aux gestionnaires d'aérodromes relatives au SSLIA (2) et au péril aviaire ou en matière de sûreté

44,90

Art. 10 du chapitre 59-04 de la section « Transport et sécurité routière » : Sécurité et sûreté aéroportuaires

47

4,68

Chapitre 05 : Dépenses directes de l'État en matière de sûreté, de SSLIA et du péril aviaire

9,10

Art. 20 du chapitre 59-04 : Développement, coordination et réglementation

15,28

1,19

Chapitre 07 : Dépenses directes d'investissements de l'État relatives au SSLIA, au péril aviaire et en matière de sûreté

6

Chapitre 01 : Subventions aux entreprises de transport aérien en vue d'assurer l'équilibre des dessertes aériennes réalisées dans l'intérêt de l'aménagement du territoire

28

Article 30 du chapitre 59-04 : Régulation économique

21,5

- 23,21

Chapitre 08 : Dotations aux collectivités locales au titre de la continuité territoriale

30

Art. 40 du chap. 41-51 de la section « Outre-mer » : Dotation de continuité territoriale

30,99

3,3

Total dépenses traditionnelles du FIATA

88

Total chapitre 59-04

83,78

- 4,79

Total FIATA

118

Total toutes sections

114,77

- 2,74

(1) en crédits de paiement.

(2) SSLIA : services de sauvetage et de lutte contre les incendies d'aéronefs.

Source : documents budgétaires.

On peut observer que les trois articles du chapitre 59-04 correspondent aux trois actions du programme « Transports aériens ».

Sur l'ensemble du chapitre 59-04, les autorisations de programme atteindront 139,45 millions d'euros, parmi lesquels 73,87 millions d'euros figurent sur l'article 30 - Régulation économique, c'est-à-dire sont destinés à faire face aux engagements pluriannuels pris en matière de subvention des dessertes aériennes réalisées dans l'intérêt de l'aménagement du territoire. Cette dotation élevée correspond à l'ensemble des autorisations d'engagement à ouvrir pour couvrir les engagements de l'État relatifs aux conventions déjà signées et à celles qui devraient l'être en 2005. Cet article recevra 21,5 millions d'euros de crédits de paiement. La baisse de ces crédits de 6,5 millions d'euros par rapport à 2004 sera compensée par les reports attendus.

Les crédits de l'action « Sécurité et sûreté aéroportuaire » (47 millions d'euros) se rapportent aux subventions aux gestionnaires d'aérodromes en matière de sauvetage et de lutte contre les incendies d'aéronefs et de sûreté, au titre de la péréquation nationale qui complète le financement par la taxe d'aéroport. La hausse de ce poste, de 4,67 %, résulte à la fois du solde des reports de charges des années antérieures et de l'évolution des coûts.

L'action « Développement, coordination et réglementation » retrace les dépenses directes de l'État, en fonctionnement et en équipement, en matière de sûreté, de sauvetage et de lutte contre les incendies d'aéronefs et de péril aviaire.

En fonctionnement (ancien chapitre 05 du compte spécial), les dépenses sont évaluées à 8,78 millions d'euros contre 9,10 millions d'euros en 2004, soit une évolution à la baisse de 3,5 %. La principale dépense de fonctionnement programmée pour 2005 (7,12 millions d'euros) est relative au fonctionnement de la gendarmerie du transport aérien (GTA) et à la formation à la sûreté dispensée par l'École nationale de l'aviation civile (ENAC). S'y ajoutent 0,46 million d'euros pour les dépenses directes de fonctionnement de l'État entrant dans le champ de la sécurité incendie et du péril aviaire, 0,5 million d'euros pour les missions de contrôle de performance des systèmes de sûreté par les personnels, le fonctionnement des systèmes informatiques et l'achat de petit matériel, du service technique des bases aériennes, et 0,7 million d'euros pour couvrir les dépenses de fonctionnement de trois nouvelles unités de la GTA.

En équipement (ancien chapitre 07), en 2005, le montant des dépenses directes de l'état en matière d'investissement devrait s'établir à 6,5 millions d'euros, soit une progression de 8,3 %, répartis à hauteur de 5,5 millions d'euros pour la sûreté et 1 million d'euros au titre du sauvetage et de la lutte contre les incendies d'aéronefs

Dans le cadre de la phase d'expérimentation, les crédits dévolus aux interventions dans le domaine aéroportuaire, en fonctionnement et en équipement, seront regroupés en 2005 sur un chapitre et un article uniques pour un montant de 15,28 millions d'euros en crédits de paiement et de 18,28 millions d'euros en autorisations d'engagement.

3.- La baisse de la contribution du budget général au financement des avances remboursables et du soutien à la recherche traduit l'avancement des programmes

Outre les crédits de l'ancien FIATA désormais inscrits sur le chapitre 59-04, la section « Transports et sécurité routière » participe à la politique nationale dans le domaine des transports aériens par le financement de dépenses en capital visant à soutenir le développement de l'industrie aéronautique civile. Par ailleurs, on notera que, cette année encore, aucune subvention au budget annexe n'est ouverte sur le chapitre 36-25.

AUTORISATIONS DE PROGRAMME ET CRÉDITS DE PAIEMENT DEMANDÉS EN 2005
(dépenses en capital de la section « Transports et sécurité routière »)

(en millions d'euros)

Autorisations de programme

Crédits de paiement

Chapitres

Dotation 2004

Projet de loi de finances

Évolution
(en %)

Dotation 2004

Projet de loi de finances

Évolution
(en %)

53-22

265,57

255,80

- 3,68

290,30

268,11

- 7,64

63-20

4,00

4,00

-

4,00

4,00

-

Total

269,57

259,80

- 3,62

294,30

272,11

- 7,54

Source : documents budgétaires.

Les soutiens aux programmes aéronautiques civils sont orientés à la baisse, en autorisations de programme comme en crédits de paiement. Certes, l'abandon de l'assujettissement à la TVA des soutiens depuis 2003 avait entraîné une progression de près de 20 % des aides, à enveloppe budgétaire constante. Mais la baisse de près de 16 % et 10 millions d'euros de la dotation en crédits de paiement de l'article 13 du chapitre 53-22 qui finance la recherche amont apparaît très regrettable à votre Rapporteur spécial, qui développera ce thème infra.

Les dotations destinées aux avances remboursables sont aussi en repli de plus de 5,4 %, à 216 millions d'euros en crédits de paiement et 195,6 millions d'euros en autorisations de programme. Cette évolution est due pour l'essentiel à la fin des programmes d'avances remboursables dans les domaines des moteurs et des avions d'affaires. Les dotations réservées aux développements d'équipements de bord sont maintenues en autorisations de programme (32 millions d'euros), mais chutent de 43,5 à 34,5 millions d'euros en crédits de paiement. En revanche, les dotations destinées à financer les études relatives à la sécurité des aéronefs et celles consacrées à l'aide aux investissements des centres de recherche (respectivement 1 et 4 millions d'euros de crédits de paiement) sont maintenues.

Parallèlement, les remboursements d'avances remboursables sont estimés à 205 millions d'euros en 2005, soit un montant très proche de celui des dotations ouvertes (216 millions d'euros).

4.- Les dotations à Météo France s'inscrivent dans la continuité du soutien de l'État à la météorologie nationale

Le tableau ci-après retrace l'évolution des crédits de paiement consacrés à la météorologie au titre des subventions à Météo France, qui figurent sur la section des services communs et de l'urbanisme du ministère de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer.

ÉVOLUTION DES DOTATIONS À MÉTÉO FRANCE

(en millions d'euros)

Chapitres

Loi de finances initiale pour 2004

Projet de loi de finances pour 2005

Évolution

(en %)

36-20 : Subvention à Météo France dont :

148,23

150,80

1,73

- Subvention de fonctionnement

133,41

135,98

1,92

- Recherche : subvention de fonctionnement (BCRD)

14,82

14,82

-

63-21 : Subvention d'investissement (1) à Météo France dont :

39,33

39,33

-

- Contribution à Eumetsat

36,59

36,59

-

- Recherche : Subvention de fonctionnement

2,74

2,74

-

Total

187,56

190,13

1,37

(1) En crédits de paiement comme en autorisations de programme.

Source : documents budgétaires.

L'évolution des crédits s'inscrit dans la logique des budgets précédents. Le montant des subventions à Météo France pour 2004 s'élève à 190,13 millions d'euros, dont près de 136 millions d'euros au titre de la subvention de fonctionnement hors recherche (+ 1,92 %), la reconduction des 14,82 millions d'euros au titre de la subvention de fonctionnement du Budget civil de recherche et développement et de 2,74 millions d'euros au titre de la subvention d'investissement du BCRD, et enfin celle des 36,59 millions d'euros au titre d'Eumetsat, organisation européenne en charge des programmes de satellites météorologiques.

L'évolution positive de la subvention de fonctionnement est le résultat de mesures d'ajustement liées aux rémunérations, pour un total de 4,47 millions d'euros, de deux mesures de révision des services votés, parmi lesquelles la suppression de 21 emplois, l'ensemble entraînant une baisse de 4,64 millions d'euros, d'un abondement de la subvention de fonctionnement, à hauteur de 1,9 million d'euros, et de transferts internes pour un solde positif de 0,82 million d'euros.

Le projet de budget de l'établissement pour 2005 sera soumis au vote du conseil d'administration le 26 novembre prochain. Il prévoit 315,6 millions d'euros pour la section du fonctionnement et 25,05 millions d'euros pour l'investissement.

L'établissement s'efforce d'accroître ses recettes propres (15) : elles sont passées de 38,7 millions d'euros en 2002 (en baisse de 3,3 % par rapport à l'année précédente) à 39,8 millions d'euros en 2003, et devraient atteindre 42,8 millions d'euros en 2004. Elles représentent ainsi environ 12 % de son budget. Cette proportion est de l'ordre du tiers si on y ajoute les autres produits d'exploitation, dont les redevances aéronautiques.

Un nouveau contrat d'objectifs liant Météo France à l'État est en cours de négociation pour la période 2005-2008. Il devrait reconduire les principes actuels en matière d'évolution de la subvention de fonctionnement (en baisse de 0,3 % par an en euros constants) et de la redevance de navigation aérienne (en hausse de 1 % par an en euros constants). L'objectif de progression des recettes commerciales est d'un million d'euros par an. Par ailleurs, un objectif de réduction des effectifs sera fixé.

C.- L'INCIDENCE CONSIDÉRABLE DE LA RÉFORME BUDGÉTAIRE SUR LA PRÉSENTATION DES CRÉDITS DES TRANSPORTS AÉRIENS

1.- Les transports aériens en missions et programmes

Si le financement des dépenses des transports aériens se caractérisait jusqu'ici par la pluralité des supports budgétaires (budget annexe, crédits du budget général répartis entre deux sections, compte d'affectation spéciale), la présentation qui en sera faite à partir de 2006 en application des règles fixées par la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances ne sera pas beaucoup plus simple. Même si le FIATA est budgétisé dès 2005, et fait l'objet d'une expérimentation, la répartition des crédits entre trois missions ne facilitera pas le travail de synthèse des moyens destinés aux transports aériens.

a) La maquette retenue est globalement satisfaisante

La maquette budgétaire présentée le 16 juin 2004 en conseil des ministres prévoit en effet la création d'une mission correspondant au budget annexe, dont le champ va être réduit, et le rattachement des autres crédits du transport aérien à trois programmes relevant de deux autres missions :

LES CRÉDITS DES TRANSPORTS AÉRIENS ET DE LA MÉTÉOROLOGIE
SELON LA NOUVELLE PRÉSENTATION BUDGÉTAIRE

(en millions d'euros)

Missions

Programmes et responsables

Actions

Crédits de paiement (1)

Transports

Transports aériens

(le directeur général de l'aviation civile)

- Sécurité et sûreté aéroportuaires

- Développement, coordination et réglementation

- Régulation économique

- Stratégie et développement de l'aviation civile

- Autorité de contrôle des nuisances sonores aéroportuaires

99,09

(environ 800 emplois, à partir de 2006)

Météorologie

(le président-directeur général de Météo France)

- Observation et prévision météorologiques

- Recherche dans le domaine météorologique

190,13

Recherche et enseignement supérieur

Recherche dans le domaine des transports, de l'équipement et de l'habitat

(le directeur de la recherche et des affaires scientifiques et techniques)

- Recherche et développement dans le domaine du génie civil et de l'aménagement

- Recherche et développement dans le domaine de l'aéronautique civile

- Recherche et développement dans le domaine des transports

- Recherche et développement dans le domaine de l'urbanisme et du logement

396,44

(dont 272,11 pour l'action relative à l'aéronautique civile)

Contrôle et exploitation aériens

Soutien aux prestations de l'aviation civile

(le directeur général de l'aviation civile)

- État-major

- Ressources humaines et formation

- Fonction financière

- Systèmes d'information et réseaux

380

(environ 1.000 emplois)

Navigation aérienne

(le directeur général de l'aviation civile)

- Management et gestion

- Centre en route

- Aéroports

- Exploitation du contrôle aérien outre-mer

- Ingénierie technique de la navigation aérienne

1.010

(environ 7.800 emplois)

Surveillance et certification

(le directeur général de l'aviation civile)

- Management et gestion

- Constructeurs

- Exploitants aériens

- Personnels aéronautiques

- Aéroports sûreté

- Opérateur navigation aérienne

80 à 90

(environ 1.000 emplois)

Formation aéronautique

(le directeur général de l'aviation civile)

- École nationale de l'aviation civile

- Service d'exploitation de la formation aéronautique

100 à 110

(environ 1.600 emplois)

(1) Dans le projet de loi de finances pour 2005.

Source : ministère de l'Équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer et documents budgétaires.

Cette maquette tient compte d'une partie des critiques formulées par les membres de la mission d'information sur la mise en œuvre de la loi organique relative aux lois de finances (16), dont votre Rapporteur spécial faisait partie. En particulier, les quatre programmes de la mission « Contrôle et exploitation aériens » ne sont plus « mono-action », comme ils l'étaient dans un premier temps. Chacun comporte désormais entre deux et six actions, choisies avec pertinence. En revanche, la demande du rattachement du programme « Météorologie » à une mission « Écologie et maîtrise des risques », dont la création était demandée, n'a pas été retenue, la mission n'ayant pas été mise en place. Votre Rapporteur spécial persiste à penser que ce programme aurait plus sa place dans une mission consacrée à l'écologie que dans la mission dédiée aux transports.

Il observe en outre que, dans le programme « Transports aérien » du budget général, l'action « Intervention pour l'aménagement du territoire et des aéroports » n'apparaît plus. Si la séparation des deux grandes missions du FIATA était pertinente, elle aurait pu conduire à la mise en place d'une action « Intervention pour l'aménagement du territoire » et d'une action « Sécurité et sûreté aéroportuaires ». Or, il a été choisi d'intégrer la première mission du FIATA dans l'action « Régulation économique », qui figurait déjà dans le projet de maquette et dont la dénomination n'est pas très parlante, et de créer une action « Sécurité et sûreté aéroportuaires ». Il aurait d'ailleurs été logique que le subventionnement des dessertes aériennes soit rattaché au programme « Aménagement du territoire » de la mission « Politique des territoires », dans lequel auraient pu être regroupées toutes les aides de ce type accordées aux différents modes de transport, et en particulier au transport ferroviaire.

La direction générale de l'aviation civile a indiqué à votre Rapporteur spécial que les actions du programme « Transports aériens » étaient encore susceptibles d'évoluer pour être en cohérence avec la nouvelle organisation de la direction générale, qui est en cours de finalisation (voir infra).

b) Le périmètre du budget annexe devra évoluer

Si le projet de budget pour 2005 ne prévoit pas de changement en ce qui concerne le périmètre du budget annexe, celui-ci devra évoluer pour répondre à la définition de l'article 18 de la loi organique relative aux lois de finances qui fixe les principes applicables aux budgets annexes à compter du 1er janvier 2006.

Le budget annexe de l'aviation civile ne devra plus retracer que les missions de prestation de service pouvant donner lieu à paiement de redevances, tandis que les missions régaliennes exercées par la DGAC seront retracées dans le programme « Transports aériens » du budget général.

Ces modifications de périmètre sont actuellement à l'étude. D'après les informations qui ont été données à votre Rapporteur spécial, elles devraient avoir un impact financier limité dans la mesure où les missions régaliennes de la DGAC étaient partiellement imputées sur le FIATA, et le seront à partir de 2005 sur le budget général.

c) Un champ d'expérimentation réduit

Votre Rapporteur spécial a présenté supra l'expérimentation mise en place à l'occasion du rattachement des crédits de l'ancien FIATA au budget général. Il aurait en effet été peu pertinent de ne pas profiter de cette occasion pour globaliser la gestion de ces crédits, qui aurait sans cela dû être partagés entre les différents titres issus de l'ordonnance organique encore en vigueur sur ce point pour une année. Dans la mesure où ces crédits sont de plusieurs natures, le chapitre globalisé a été inscrit sur le titre V, dans le respect des instructions données par le secrétaire d'État au budget et à la réforme budgétaire dans une circulaire du 25 juin dernier.

On peut en revanche regretter que le budget annexe ne fasse l'objet d'aucune expérimentation.

2.- Des objectifs et des indicateurs de performance à améliorer

Dans la mesure où l'article 66 de la loi organique qui prévoit une présentation des crédits selon les nouveaux principes budgétaires dès le projet de loi de finances pour 2005 ne concerne que le budget général, les travaux de préfiguration relatifs aux budgets annexes n'ont pas constitué une priorité en 2004. C'est pourquoi le contour exact du budget annexe de l'aviation civile n'a pas encore été déterminé et son responsable n'est pas officiellement désigné. De la même manière, le travail sur les objectifs et les indicateurs de performance n'est pas aussi avancé que pour les crédits du budget général.

a) Les objectifs et indicateurs du budget général

Les deux missions du budget général sur lesquelles figureront des crédits en lien avec les transports aériens ont fait l'objet d'avant-projets annuels de performance des programmes.

- Les programmes de la mission « Transports »

En ce qui concerne le programme « Transports aériens », trois objectifs sont présentés : limiter les impacts environnementaux du transport aérien, améliorer le désenclavement des territoires par une desserte aérienne économiquement pertinente, contribuer à la sécurité de l'activité aérienne par l'amélioration de l'efficacité dans la conduite des enquêtes techniques sur les accidents et les incidents d'aviation civile. Si les deux premiers objectifs sont bien choisis, le troisième apparaît surprenant : les missions régaliennes en matière de sécurité aérienne ne sont-elles pas d'abord destinées à éviter les accidents ? Il est vrai que bien connaître la cause des dysfonctionnements permet d'éviter qu'ils se renouvellent, mais cela ne peut constituer le seul objectif de la DGAC dans le domaine de la sécurité !

Les indicateurs relatifs à la limitation des impacts environnementaux sont le pourcentage, pour les dix aéroports principaux, de mouvements effectués avec des appareils de nouvelle génération, et le taux annuel de récidive des compagnies aériennes sanctionnées au titre de la réglementation environnementale. Ils mesurent, l'un l'efficacité de l'action réglementaire de la DGAC dans le domaine environnemental, l'autre le caractère dissuasif du dispositif de sanction. Votre Rapporteur spécial estime qu'il conviendrait d'y ajouter le taux d'infraction, qui est le premier témoin de ce caractère dissuasif.

Les indicateurs qui portent sur le désenclavement des territoires sont contestables. Le premier est censé mesurer l'effort financier de l'État consacré au désenclavement des principales collectivités par le transport aérien. C'est un indicateur très composite, dont la lecture ne sera pas facile. L'avant-projet indique que « le gain de temps moyen sera évalué en pondérant le gain de temps obtenu sur chaque liaison aidée par le nombre de passagers transportés sur chacune d'entre elles. L'indicateur est le rapport du coût annuel à ce gain de temps. L'enjeu est de réduire ce coût par une sélection rigoureuse des projets soutenus sur la base d'une analyse précise de leur pertinence économique. » Le second indicateur, destiné à apprécier la pertinence de l'intervention de l'État, est le ratio entre le nombre de passagers effectivement transportés et le nombre de passagers prévu. Il n'est pas sûr que ce ratio soit très significatif. En effet, de nombreux facteurs purement conjoncturels peuvent intervenir pour expliquer la variation du nombre de passagers, facteurs sur lesquels la DGAC n'a guère de prise : rythme de la croissance économique, degré de confiance dans le transport aérien, politique tarifaire des autres moyens de transport... Pour votre Rapporteur spécial, le taux de remplissage des avions assurant les liaisons subventionnées devrait être indiqué. Par ailleurs, le prix du temps gagné devrait être mesuré, dans le cadre d'un modèle « prix/horaire/temps » et d'une comparaison complète avec les autres modes de transport.

Parallèlement aux critiques relatives au choix de l'objectif en matière de sécurité du transport aérien, votre Rapporteur spécial ne juge pas non plus que l'indicateur retenu pour cet objectif soit très judicieux. Outre le fait qu'il consiste encore une fois en un ratio, juger de l'efficacité d'une action à travers la part « du nombre d'enquêtes clôturées dans l'année dans le délai de douze mois à compter de la survenance de l'accident ou de l'incident rapporté au nombre d'enquête clôturées dans l'année » risque de conduire au « bâclage » des enquêtes ou à la multiplication des enquêtes sur des incidents insignifiants. Le temps pris par celles-ci dépend évidemment de la gravité de l'accident ou de l'incident, un chiffre global est absurde. En outre, le meilleur moyen d'améliorer le ratio serait d'augmenter les effectifs du bureau en charge de ces enquêtes ; il ne constitue donc pas réellement un indicateur d'efficacité. Il conviendrait de mesurer l'évolution du nombre d'incidents, pondéré par leur gravité, et de prendre en compte le coût des mesures de sécurité censées les éviter.

Pour ce qui est du programme « Météorologie », les quatre objectifs retenus sont : disposer du meilleur système de prévision météorologique à courte échéance sur l'Europe, assurer la prévention des risques d'origine météorologique, développer les utilisations de la météorologie par secteurs économiques et maintenir au niveau mondial, dans le domaine de la modélisation opérationnelle du temps et du changement climatique, le Centre national de recherche météorologique.

Les indicateurs associés à ces objectifs sont plutôt satisfaisants. Ils consistent en des comparaisons avec les résultats d'autres modèles de prévision utilisés par des grands pays (notamment avec le meilleur d'entre eux et la moyenne de leurs résultats) et en des taux de fiabilité des prévisions à plus ou moins long terme. Il conviendrait néanmoins de rapprocher ces résultats du coût du service et de les comparer à celui enregistré dans les autres pays. Les indicateurs rattachés à la prévention des risques d'origine météorologique apparaissent moins significatifs : le taux de notoriété de la procédure de vigilance météorologique est obtenu à partir d'un sondage et le taux de pertinence de cette procédure de vigilance est calculé de manière peu exigeante. Ainsi, il n'y a fausse alerte que si aucun phénomène d'intensité relevant de la vigilance orange ne se produit dans la période annoncée ; il suffit qu'il s'en produise un, même hors de la zone signalée, pour qu'il n'y ait pas de fausse alerte. De même, il n'y aurait non-détection que si un événement qui aurait nécessité une vigilance orange s'est produit alors qu'aucun département n'avait été mis en orange ; une erreur de localisation n'est donc pas non plus prise en compte.

En lien avec le troisième objectif, c'est encore un sondage qui permettra de juger de la confiance et de la satisfaction des usagers dans les prévisions météorologiques. En revanche, l'évolution du nombre de clients par grands secteurs d'activité et celle des recettes propres de l'établissement sont des données pertinentes, mais elles devraient être comparées à la situation dans les autres grands pays. Enfin, pour juger du niveau de la recherche, sont retenus des indicateurs du même type que ceux des programmes de la mission « Recherche et enseignement supérieur », à l'exemple du nombre de publications de niveau international ou du nombre de contrats de recherche.

Le programme de la mission « Recherche et enseignement supérieur »

Une action, parmi les quatre que compte le programme « Recherche dans le domaine des transports, de l'équipement et de l'habitat », concerne le domaine de l'aéronautique civile. Ce programme comporte trois objectifs et cinq indicateurs transversaux pour les trois autres actions et deux objectifs associés à trois indicateurs pour l'action qui nous intéresse.

Ces objectifs sont : préparer l'avenir en favorisant les innovations technologiques et maintenir ou améliorer la part de marché de l'industrie aéronautique. Les indicateurs mesurent l'effet de levier de l'aide publique, l'évolution des parts de marché pour les avions de plus de cent places et le taux de remboursement cumulé et actualisé des avances remboursables depuis la mise en œuvre de ce dispositif.

Votre Rapporteur spécial estime que ces indicateurs ne sont guère pertinents. L'effet de levier ne devrait pas être calculé au niveau des centres de recherche mais à celui des entreprises, en mesurant le niveau de l'effort financier consenti par les entreprises en faveur de la recherche et du développement rapporté au montant de l'aide publique reçue, et en retraçant l'évolution de ce ratio. Le succès d'un produit se mesure au nombre d'unités vendues : celui de la recherche aéronautique doit se traduire par des ventes d'aéronefs. Il conviendrait donc de comparer le nombre de ventes réalisées, aux objectifs de ventes. Le taux de remboursement des avances n'est pas une donnée intéressante puisqu'il suffirait de ne plus en accorder de nouvelles pour qu'il augmente. Le calcul du taux d'intérêt a posteriori des avances constituerait une information plus intéressante.

b) Les actuels objectifs et indicateurs du budget annexe de l'aviation civile

Dans sa configuration actuelle, le budget annexe est présenté accompagné de vingt-et-un objectifs, associés à de nombreux indicateurs. Une partie d'entre eux n'aura plus lieu d'être en 2006 puisque le périmètre du BAAC aura été réduit. C'est le cas notamment de ceux relatifs à la réduction de la gêne sonore des aéroports, qui sont d'ores et déjà rattachés au budget général, comme indiqué ci-dessus.

Une proportion importante de ces indicateurs témoigne plus de l'activité de la DGAC que de l'efficacité de son action. Il en est ainsi de toutes les données relatives à l'évolution du trafic et de la flotte, au taux d'équipement des aéroports en matière de sécurité ou de sûreté...

D'autres sont en revanche très intéressants et pertinents. Citons par exemple le temps de retard par vol imputable au système de navigation aérienne, comparée au temps de retard « toutes causes confondues » et aux moyennes dans des pays voisins. Les indicateurs relatifs au recouvrement des redevances de navigation aérienne et de taxe d'aviation civile sont eux aussi bien choisis. Est aussi présentée une comparaison entre le niveau et l'évolution de la redevance de route en France et dans d'autres pays d'Europe.

Dans la mesure où il est prévu que la mission correspondant au budget annexe comporte quatre programmes, le nombre d'objectifs et d'indicateurs pourra demeurer de l'ordre d'une vingtaine. Un effort devra être fait pour trouver des indicateurs relatifs au programme « Formation aéronautique », qui en est aujourd'hui dépourvu. Surtout, les nombreux indicateurs d'activité devront être remplacés par de véritables systèmes de mesure de l'efficacité. La DGAC a encore quelques mois pour améliorer les indicateurs actuels.

3.- Des plafonds d'autorisation des emplois en cours de préparation

Le nombre d'emplois budgétaires inscrits au budget annexe de l'aviation civile est actuellement de 12.059 emplois, nombre porté à 12.274 emplois par le projet de loi de finances pour 2005. Ces emplois devraient figurer dans les plafonds d'autorisation des emplois du ministère pour les programmes « Transports aériens » et « Recherche dans le domaine des transports, de l'équipement et de l'habitat » ou du budget annexe pour la mission « Contrôle et exploitation aériens ». Des emplois, actuellement inscrits aux budgets des ministères de l'équipement et de la défense, viendront compléter ces effectifs.

La ventilation 2006 des emplois retracés jusqu'à présent sur le budget annexe n'est pas disponible aujourd'hui. En effet les budgets annexes n'étant pas compris dans la préfiguration prévue à l'article 60 de la loi organique, les services concernés n'ont pas encore procédé aux travaux contradictoires de répartition.

À titre indicatif et provisoire on peut considérer que, sur le total des emplois actuellement retracés au budget annexe, soit 12.059 en 2004, de 600 à 700 seront sortis du budget annexe en 2006 pour être ventilés au programme « Transports aériens » de la mission « Transports » (600 agents environ actuellement gérés par la DGAC) et à l'action « Recherche dans le domaine de l'aéronautique civile » du programme « Recherche dans le domaine des transports, de l'équipement et de l'habitat », intégré dans la mission interministérielle « Recherche et enseignement supérieur ».

Le nombre de mises à disposition dont les services de la DGAC bénéficient au 31 juillet 2004 est de 315 agents. À compter de 2006, corrélativement au transfert des emplois, seul un petit nombre d'entre eux restera « mis à la disposition » des services de la DGAC.

Les nombres de détachements et de mises à disposition d'agents gérés par la DGAC au bénéfice d'autres structures, au 31 juillet 2004, sont respectivement de 124 et 30 agents. Les structures bénéficiaires sont des ministères, des collectivités territoriales ou bien des établissements publics. Aucune évolution importante de ces pratiques n'est prévue pour le prochain exercice budgétaire.

4.- La réforme de la DGAC traduit la mise en œuvre de la loi organique relative aux lois de finances et du « Ciel unique » européen

En matière de transport aérien, la stratégie ministérielle de réforme s'inscrit tout à la fois dans le vaste cadre de la réforme de l'État menée au plan national, et en particulier en lien direct avec la mise en œuvre de la loi organique, et dans l'évolution européenne du secteur de l'aéronautique civile.

En 2004, elle s'est orientée de façon prioritaire vers la réorganisation en profondeur des services de la DGAC. Ce chantier de réorganisation est l'un des vingt chantiers de transformation du ministère. Il s'efforce de tenir compte, dans les structures, de la nouvelle maquette budgétaire et traduit la mise en œuvre des quatre règlements européens « Ciel unique » du 10 mars 2004 qui encadrent désormais les conditions de gestion de l'espace aérien et de fourniture des prestations de services en matière de navigation aérienne et la création, en 2002, par un autre règlement européen, de l'agence européenne de la sécurité aérienne (AESA).

La réorganisation projetée, dont les principes ont été arrêtés dans ce cadre général par le Gouvernement en novembre 2003, conduit à l'émergence de trois principaux pôles d'organisation :

- un pôle régalien, en charge de la stratégie, des politiques de soutien sectoriel, notamment dans le domaine de la construction aéronautique, de la part de la réglementation encore de compétence nationale, et de la régulation économique du secteur ;

- un pôle en charge des activités de surveillance et de certification, largement financé par des redevances, travaillant en étroite complémentarité avec les instances et organismes européens et internationaux du secteur, dont l'Agence européenne de sécurité aérienne (AESA) et Eurocontrôle ; il correspond à la création du programme « Surveillance et certification » ;

- un pôle d'exploitation, avec deux principaux domaines de production : les services de navigation aérienne, service à compétence nationale bénéficiant d'une large autonomie financière, liés au programme « Navigation aérienne », et la formation aéronautique, notamment des pilotes. Dans ce dernier pôle, la réorganisation se traduit essentiellement par la création d'un grand opérateur intégré de navigation aérienne, qui prendra la forme juridique d'un service à compétence nationale œuvrant dans le cadre d'un des programmes du budget annexe de l'aviation civile.

Les neuf premiers mois de l'année 2004 ont permis de définir de façon précise les différents éléments de cette réorganisation majeure (définition des nouveaux périmètres des services, définition du système de redevances du pôle surveillance et certification, maquette budgétaire et indicateurs, nouveaux processus de gestion) en restant jusqu'à présent dans le cadre du calendrier prévu, avec une mise en place de la nouvelle organisation au tout début 2005, conformément, pour ce qui concerne plus spécifiquement la navigation aérienne, aux échéances des règlements européens « Ciel unique ».

Les trois derniers mois de 2004 devraient permettre de finaliser cette phase de mise en place de la nouvelle organisation, via un dispositif législatif (création des nouvelles redevances) et réglementaire (textes d'organisation, notamment).

Si la stratégie ministérielle de réforme s'est ainsi, en 2004, essentiellement traduite par la conduite de ce grand chantier de réorganisation de la DGAC, l'utilisation d'autres vecteurs s'est poursuivie, tels que la poursuite du développement d'une très forte démarche « qualité » associée notamment à la démarche « sécurité », la rénovation des outils de pilotage constitués par le contrôle de gestion et la gestion prévisionnelle des emplois, des effectifs et des compétences appuyés sur de nouveaux systèmes d'information de gestion en cours de définition et de développement.

II.- LA SITUATION CONTRASTÉE DES COMPAGNIES AÉRIENNES

A.- EN DÉPIT DE LA RÉCENTE REPRISE, LA CRISE A FORTEMENT AFFAIBLI LA PLUPART DES COMPAGNIES

L'année 2003 constitue une année de consolidation pour l'activité du transport aérien mondial, et non pas réellement de reprise. En effet, à la suite des mauvais résultats des deux années 2001 et 2002, on s'attendait à une reprise plus forte qui a été perturbée par des préoccupations constantes de sûreté, les événements d'Irak et la survenue du syndrome respiratoire aigu sévère. Il faut attendre 2004 pour que la reprise attendue se fasse réellement sentir.

1.- Un trafic stationnaire en 2003, en nette hausse en 2004

Pour les services réguliers assurés par l'ensemble des compagnies mondiales, l'Organisation de l'aviation civile internationale (OACI) enregistre pour l'année 2003 un peu plus de 1,6 milliard de passagers réguliers et quelque 34 millions de tonnes de fret transportées.

Ces chiffres représentent une augmentation par rapport à 2002 d'environ 2 % du trafic total régulier, exprimé en tonnes kilomètres transportées totales(17). Le trafic total de passagers et de fret a enregistré respectivement une augmentation d'environ 1 % et 5 %. Cependant, l'évolution de la seule activité internationale est moins favorable puisque le trafic international régulier des compagnies aériennes mondiales, exprimé sous la même forme, est stationnaire.

On constate que le trafic de passagers de 2003 demeure inférieur d'environ 1,5 % aux niveaux atteints en l'an 2000, dernière année de croissance. Toutefois, si l'on combine les activités passagers et fret, le niveau atteint en 2000 est à nouveau franchi.

Les premiers résultats de l'année 2004 témoignent d'une reprise dans le transport aérien au premier semestre, particulièrement sensible sur l'Asie et le Moyen-Orient, faisceaux les plus durement affectés au cours des années précédentes. Ainsi, les compagnies membres de l'International air transport association (IATA) affichent une très forte reprise de leur trafic de passagers (+ 20,4%) et une progression importante de leur trafic fret (+ 13%).

Les compagnies européennes membres de l'Association of european airlines (AEA) enregistrent, quant à elles, pour l'ensemble de leurs vols réguliers, une hausse de 11,7 % pour le trafic de passagers sur le premier semestre de l'année 2004. Le coefficient de remplissage s'établit à 73,4 % sur ce semestre, en hausse de 2,5 points par rapport à l'année précédente. Pour ce qui concerne le fret aérien, les compagnies européennes ont enregistré au premier semestre 2004 une augmentation du trafic de 10,2 % par rapport au premier semestre de l'année précédente. Les compagnies américaines membres de l'Air Transport Association (ATA) enregistrent des évolutions du même ordre.

2.- De nombreuses compagnies affaiblies

La crise que traversent les grandes compagnies aériennes américaines depuis les attentats du 11 septembre 2001 n'a paradoxalement pas accéléré la concentration du secteur ni provoqué encore de disparition. On dénombre cependant quatre compagnies, et non des moindres, placées sous la protection du chapitre 11 de la loi sur les faillites (United Airlines, US Airways, Hawaiian Airlines et Sun Country Airlines). Une cinquième, Delta Airlines, pourrait les rejoindre. D'importantes restructurations en 2002 et 2003 (licenciements de personnel, baisse de salaires, augmentation du temps de travail) sont intervenues et n'ont, en effet, pas suffi à améliorer les résultats économiques. Les compagnies traditionnelles(18) restent pour la plupart fragiles financièrement. La hausse du prix du pétrole depuis le début de l'année 2004 et la concurrence très forte des compagnies à bas coûts américaines comme Southwest Airlines et JetBlue sur le marché domestique accentuent leurs difficultés.

Les compagnies aériennes européennes sortent de la crise, moins ébranlées que leurs homologues américaines. Toutefois, le paysage est contrasté : si Air France-KLM améliore globalement ses résultats, nous y reviendrons, Lufthansa, Alitalia et SAS affichent des performances pour 2003 en baisse par rapport à 2002. La disparition, au début de l'année 2002, des compagnies Swissair et Sabena n'a pas modifié fondamentalement le paysage européen puisque des intérêts privés et politiques belges et suisses ont incité le lancement de nouvelles compagnies « nationales » au printemps 2002 (SN Brussels Airlines et Swiss International Airlines). Cependant, les grandes compagnies connaissent une concurrence accrue de la part des compagnies à bas coûts qui pourrait s'accentuer avec l'élargissement de l'Union Européenne depuis mai 2004, et qui les pousse à multiplier les offres tarifaires bas de gamme.

Les principales compagnies asiatiques ont connu les mêmes difficultés que les autres transporteurs dans le monde, mais l'épidémie de pneumopathie atypique au premier semestre 2003 a été particulièrement dévastatrice pour certaines d'entre elles. Le trafic a repris de façon soutenue depuis le début de l'année 2004. Certaines compagnies asiatiques traditionnelles se sont aussi engagées dans des restructurations. Les compagnies à bas coûts commencent à se développer dans certains pays depuis deux ans, exploitant à la fois des liaisons intérieures et régionales. Les principales compagnies à bas coûts (lancées ou en cours de lancement) se sont développées en Malaisie (Air Asia), en Indonésie (Lion Air), à Singapour (Valuair, Jetstar Asia, Tiger Airways), en Inde (Air Deccan, Air India Express), en Thaïlande (Thaï Air Asia, Nok Air). La menace de ces nouvelles compagnies pour les compagnies traditionnelles reste, pour l'instant, encore marginale.

B.- APRÈS SON RAPPROCHEMENT AVEC KLM ET SA PRIVATISATION, AIR FRANCE SE PORTE BIEN

1.- Le rapprochement Air France-KLM et la privatisation de la compagnie

Le gouvernement a annoncé fin juillet 2002 son intention de privatiser la compagnie Air France, inscrite depuis 1993 sur la liste des sociétés privatisables. Cette privatisation est intervenue le 6 mai 2004 dans le cadre de la prise de contrôle de la compagnie néerlandaise KLM par Air France.

En effet, le 16 octobre 2003, les sociétés Air France et KLM ont conclu des accords prévoyant leur rapprochement par le biais d'une offre publique d'échange, en vue de créer le premier groupe de transport aérien européen en termes de chiffre d'affaires, de trafic et de passagers transportés.

Le 5 avril 2004, après que ces accords ont été approuvés par les autorités européenne et américaine de la concurrence, Air France a lancé une offre publique d'échange sur les actions de la société KLM, qui s'est terminée avec succès. Au 21 mai 2004, la société Air France détenait 96,33 % des actions de KLM. L'augmentation de capital réalisée par Air France le 6 mai 2004 pour rémunérer les titres apportés par les actionnaires de KLM a dilué mécaniquement la part détenue par l'État dans son capital, qui est passée de 54,4 % à 44,07 %, ce qui a entraîné la privatisation de la société.

Le capital d'Air France est désormais détenu (à la date du 24 mai 2004) à hauteur de 44,07 % par l'État, 10,42 % par ses salariés, les autres actionnaires détenant 45,51 %, dont 18,4 % pour les anciens actionnaires de KLM.

Le gouvernement compte réduire sa participation au capital de la société ; il choisira le moment et les modalités de cette opération en fonction des conditions des marchés financiers et dans le souci des intérêts patrimoniaux de l'État.

La spécificité du transport aérien et de la compagnie imposait que des dispositions législatives fussent prises avant de la privatiser ; tel était l'objet de la loi n° 2003-322 du 9 avril 2003 relative aux entreprises de transport aérien et notamment à la société Air France. La privatisation d'Air France a, entre autres, eu pour conséquence juridique l'entrée en vigueur de certaines des dispositions de cette loi, qui a été modifiée par la loi n°2004-734 du 26 juillet 2004, afin de prendre en compte les aménagements techniques rendus nécessaires par la création du groupe Air France-KLM.

Les dispositions d'application réglementaires de la loi du 9 avril 2003 ont fait l'objet du décret n°2003-571 du 27 juin 2003 relatif aux entreprises de transport aérien et notamment à la société Air France et modifiant le code de l'aviation civile. La loi du 26 juillet 2004 nécessite pour sa part un décret fixant l'âge de cessation d'activité des personnels de cabine, qui devrait être pris prochainement. Votre Rapporteur spécial, qui a été le rapporteur de deux projets de loi, reviendra sur ce sujet.

2.- Des résultats qui se redressent

Au cours de l'exercice allant de mars 2003 à mars 2004, le trafic du groupe Air France a progressé de 1,7 % en passagers kilomètres transportés et l'offre de 2,4 % en sièges kilomètres offerts. Le coefficient de remplissage du groupe s'est établi à 75,6 %, en baisse de 0,6 point. S'agissant de la seule compagnie Air France, le trafic de passagers a également progressé de 1,7 %, Air France ayant transporté 43,7 millions de passagers.

Le chiffre d'affaires consolidé d'Air France s'élève pour l'exercice 2003/2004 à 12.337 millions d'euros, en baisse de 2,76 % par rapport à l'exercice précédent.

CHIFFRE D'AFFAIRES CONSOLIDÉ D'AIR FRANCE

(en millions d'euros)

2002-2003

2003-2004

Variation
(en %)

Passage

10.527

10.260

- 2,54

Fret

1.479

1.412

- 4,53

Maintenance

540

508

- 5,93

Autres

141

157

11,35

Total

12.687

12.337

- 2,76

Source : Air France.

Le transport de passagers sur vols réguliers a généré sur l'exercice 2003/2004 un chiffre d'affaires de 9.465 millions d'euros, en baisse de 2,55 %. Cette activité représente 76,7 % du chiffre d'affaires total, contre 76,6 % lors de l'exercice précédent. Les filiales de transport aérien régional contribuent à hauteur de 6,8 % au chiffre d'affaires passage consolidé (8,1 % pour l'exercice précédent).

C'est une légère baisse du trafic en volume qui explique la diminution du chiffre d'affaires sur le transport de fret. La recette unitaire à la tonne kilomètre offerte a diminué de 5,4 % après un effet de change négatif de 6,1 %. Cette activité représente 10,2 % du chiffre d'affaires total, soit 0,2 point de moins qu'en 2002/2003.

Le chiffre d'affaires « autres » s'est élevé à 157 millions d'euros sur l'exercice 2003/2004, en hausse de 11,35 %, constitué uniquement par l'activité « catering » du groupe Servair. Cette augmentation s'explique par une bonne réactivité de Servair qui lui a permis de gagner de nouveaux clients, en particulier sur la plate-forme de Roissy Charles-de-Gaulle (principale base d'activité de la société) et sur les aéroports desservant les départements d'outre-mer.

Entre l'exercice 2002/2003 et l'exercice 2003/2004, l'effectif moyen annule pondéré de la compagnie a progressé de moins de 0,1 %, au profit des personnels navigants, mais la masse salariale a augmenté de plus de 5 %.

RÉPARTITION DES CHARGES DE PERSONNEL DE LA SOCIÉTÉ AIR FRANCE EN 2003/2004

Charges de personnel
(en millions d'euros)

Effectif moyen
annuel pondéré

Coût unitaire
(en euros)

Personnel sol

2.124,0

43.269

46.088

Personnel navigant commercial

678,0

12.466

54.388

Personnel navigant technique

812,3

4.053

200.419

Total

3.614,3

59.731

60.452

Source : Air France.

Au cours du premier trimestre de l'exercice 2004/2005, le trafic passager du groupe Air France-KLM a enregistré une hausse de 16,9 % pour une offre en augmentation de 12,9 %, par rapport au premier trimestre de l'exercice 2003/2004. Le coefficient de remplissage reste élevé, à 77,7 % (+ 2 points) et la recette unitaire au passager kilomètre transporté a diminué de 3,9 %, dont 2 % dus à un effet de change défavorable. L'activité fret a aussi progressé, avec un trafic en augmentation de 11,7 % en volume.

Établi à 4,46 milliards d'euros, le chiffre d'affaires consolidé d'Air France-KLM enregistre une progression de 12,3 % sur le premier trimestre de l'exercice 2004/2005 par rapport au premier trimestre de l'exercice 2003/2004. Celui de l'activité passager augmente de 12,2 % pour atteindre 3,55 milliards d'euros. En ce qui concerne le fret, le chiffre d'affaires croît de 7,6 % sur le trimestre et s'établit à 537 millions d'euros. Enfin, le chiffre d'affaires de la maintenance augmente également, de 5,7 %, à 185 millions d'euros.

Les perspectives de résultats pour l'exercice 2004/2005 sont donc très encourageantes. Le président directeur général d'Air France a précisé à votre Rapporteur spécial que les résultats de KLM avaient été meilleurs que ceux d'Air France au premier trimestre, mais que tous étaient supérieurs à ceux de l'année précédente. Cette différence relative de situation est liée au fait que le plan de restructuration de KLM est engagé depuis l'exercice 2003/2004, a déjà permis d'économiser 200 millions d'euros au 31 mars 2004, alors que le nouveau plan triennal d'économies d'Air France n'est effectif que depuis le 1er avril dernier. Il vise une amélioration des coûts unitaires de 6 %, grâce à des économies de 200 millions d'euros au cours de l'exercice 2004/2005, de 400 millions d'euros sur l'exercice suivant et de 600 millions d'euros sur la troisième année.

Sur l'exercice 2003/2004, les dépenses de carburant ont poursuivi la baisse amorcée au cours de l'exercice précédent (- 5,1 % en 2002/2003 et - 4,9 % en 2003/2004), grâce à un effet dollar favorable (- 15,7 %), une consommation stable et une hausse du prix d'acquisition après couverture limitée à 10,5 %. Le président directeur général d'Air France s'inquiète en revanche de la hausse de ce poste de dépense pour l'exercice en cours, la vive augmentation du prix du pétrole risquant de peser à hauteur de 300 à 400 millions d'euros sur les comptes d'exploitation. Une surcharge de trois euros par billet a été mise en place depuis la fin du printemps 2004 pour compenser une partie de ce surcoût pour le groupe.

3.- La question de l'âge de cessation d'activité des personnels navigants

a) Les spécificités françaises dans ce domaine

Sur proposition de votre Rapporteur spécial, la loi n° 2004-734 du 26 juillet 2004 modifiant la loi n° 2003-322 du 9 avril 2003 relative aux entreprises de transport aérien et notamment à la société Air France comporte un article 4 qui porte sur l'âge de cessation d'activité du personnel navigant commercial.

En effet, alors que l'article L. 421-9 du code de l'aviation civile interdit l'activité de pilote ou de copilote dans le transport aérien public au-delà de l'âge de 60 ans, c'est une disposition du statut du personnel d'Air France qui fixe à 55 ans l'âge limite pour exercer les fonctions de personnel de cabine. Dans la mesure où l'article 3 de la loi n° 2003-322 du 9 avril 2003 relative aux entreprises de transport aérien et notamment à la société Air France prévoit que les dispositions de ce statut cesseront de s'appliquer au plus tard deux ans après le transfert au secteur privé de la majorité du capital d'Air France, le personnel navigant commercial aurait été soumis aux règles de droit commun selon lesquelles l'employeur ne peut prendre l'initiative d'une mise à la retraite avant l'âge de 65 ans, ou après 60 ans et 160 trimestres de cotisation.

C'est pour permettre le maintien d'un âge limite d'activité pour ces personnels que votre Rapporteur spécial a proposé une disposition législative. Cette dernière prévoit la fixation de cet âge par décret. Selon les informations qui ont été recueillies par votre Rapporteur spécial, le projet de décret fixe cet âge à 55 ans, comme le statut le prévoit actuellement. Les organisations syndicales ont été consultées et se sont déclarées en faveur de ce choix, tout en souhaitant que des dispositions transitoires soient mises en place pour les personnels qui, quoique ayant dépassé 55 ans, ont obtenu de la compagnie la possibilité de poursuivre leur activité en cabine, ce qui ne sera plus possible dans le nouveau cadre législatif.

Votre Rapporteur spécial tient à souligner le fait que cet âge limite n'est pas synonyme d'âge de mise à la retraite. La compagnie est théoriquement soumise à une obligation de reclassement. Faute de reclassement dans un poste au sol, la personne concernée est licenciée et touche donc, en plus d'une confortable indemnité de départ, dont l'article 4 précité précise les modalités de calcul, une allocation de chômage jusqu'à ce qu'elle ait atteint l'âge légal de la retraite. Force est de constater que l'ensemble des salariés français finance ainsi indirectement les retraites anticipées des personnels navigants. En outre, cette allocation de chômage est cumulée avec une pension versée par la caisse de retraite complémentaire d'Air France.

Si votre Rapporteur spécial estime nécessaire qu'un âge limite existe pour les activités de pilote comme de personnel de cabine, la question de son niveau ne lui semble pas définitivement réglée. Des questions de sécurité sont avancées pour justifier le départ à 55 ans des personnels navigants commerciaux. Les conditions financières, très favorables, de ce départ expliquent aussi qu'il soit volontiers accepté par l'immense majorité des personnels concernés. En outre, les compagnies peuvent rajeunir leurs effectifs plus rapidement, et réduire ainsi leur masse salariale. Toutes ces justifications ne sont pas dépourvues de fondements, mais il faut reconnaître que, si les pilotes peuvent rester en activité sans danger jusqu'à 60 ans (19), les personnels navigants commerciaux doivent certainement pouvoir faire de même. Les syndicats de pilotes sont d'ailleurs partagés sur la pertinence d'un éventuel report de la limite d'âge de 60 à 65 ans. Dans le cas où cette mesure serait adoptée (20), le maintien de l'âge de 55 ans pour les personnels commerciaux ne serait guère, à terme, envisageable.

Votre Rapporteur spécial rappelle que la France, l'Italie et le Portugal font figure d'exception en Europe dans ce domaine. Il y a de nombreuses entreprises de transport aérien où l'âge de départ à la retraite est de 60 ans et non de 55 ans. À British Airways et à Lufthansa, l'âge de cessation d'activité du personnel navigant commercial est de 55 ans alors que l'âge légal de la retraite est de 63 ans en Grande-Bretagne et de 60 ans en Allemagne. Chez KLM, le personnel navigant commercial cesse son activité à 56 ans, l'âge légal de départ à la retraite étant de 65 ans. En outre, la directive communautaire 2000/78/EC du 27 novembre 2000 interdit toute discrimination fondée sur un critère d'âge, dans le but de préserver la liberté de déplacement des travailleurs à l'intérieur de l'Union.

b) Les conséquences dommageables du fonctionnement actuel du système

En plus de son impact sur l'assurance chômage, il faut aussi avoir conscience de l'impact que ces limites d'âge ont sur le système de retraite, et en particulier sur le régime de retraite complémentaire des personnels navigants. Le départ à la retraite précoce des personnels navigants fait qu'ils ont rarement cotisé pendant l'ensemble des trimestres nécessaires à l'obtention d'une retraite à taux plein, ce qui se traduit, surtout depuis la réforme des retraites de l'été 2003, par une baisse plus que proportionnelle du montant des pensions versées. L'allongement de leur carrière leur permettrait de cotiser assez longtemps pour bénéficier d'une retraite à taux plein, qui serait d'autant plus élevée que les dernières années d'une carrière sont celles où les navigants touchent les salaires les plus hauts. Enfin, il aurait des conséquences positives sur l'équilibre de la caisse complémentaire de retraite des personnels navigants, évitant des augmentations de charge qui pèsent sur les salariés et sur la compagnie.

Les partisans du report de l'âge de cessation d'activité des personnels navigants, qui sont nombreux parmi les pilotes, mais rares parmi les personnels navigants commerciaux, estiment qu'il serait favorable aux personnels, dont les pensions seraient augmentées, et aux compagnies, dont les charges sociales seraient moins lourdes, alors même qu'elles sont déjà plus fortes en France que dans la plupart des autres pays européens.

Pour votre Rapporteur spécial, deux options sont possibles :

- soit les âges de cessation d'activité des personnels navigants sont, à terme, repoussés, ce qui n'est possible que si cela ne porte aucune atteinte à la sécurité et si les personnels ne s'y opposent pas fermement ;

- soit ces âges sont maintenus, mais l'obligation de reclassement au sol de l'ensemble des personnels est appliquée effectivement, grâce à une organisation repensée des carrières, afin d'assurer à tous une carrière pleine ou un départ à la retraite à l'âge légal.

C.- LA SITUATION CONTRASTÉE DES PETITES COMPAGNIES

L'année 2003 avait été marquée par la liquidation judiciaire de la compagnie Air Lib, qui avait fait l'objet d'une commission d'enquête de l'Assemblée nationale (21). Sans revenir sur les détails de cette affaire, votre Rapporteur spécial indique seulement que, sur les 130 millions d'euros de soutien public apportés à Air Lib, l'État est parvenu à obtenir 20 millions d'euros pour solde de tout compte par le jugement du tribunal de commerce de Créteil du 29 juin 2004. La perte pour les finances publiques est donc finalement de 110 millions d'euros. Pour ce qui est des conséquences sociales, près de 75 % des 2.500 salariés licenciés inscrits à la cellule de reclassement (sur un total d'environ 3.000 licenciements) ont été reclassés, dont 842 chez Air France et 41 à Aéroports de Paris. Enfin, l'information judiciaire ouverte le 24 juillet 2003 a conduit à la mise en examen de neuf personnes physiques et d'une personne morale.

Un an après la liquidation d'Air Lib est intervenue celle d'Air Littoral, une autre petite compagnie française, à l'issue d'une agonie longue mais apparemment moins critiquable d'un point de vue judiciaire. Les autres compagnies régionales se heurtent à des difficultés structurelles, dont l'amélioration de la conjoncture contribue néanmoins à réduire les effets. En revanche, les compagnies à bas coût continuent à se développer, quelle que soit la conjoncture du secteur.

1.- La disparition d'Air Littoral

Courant 2003, Air Littoral employait encore 721 salariés et possédait une flotte de trente et un appareils. La compagnie assurait des liaisons régulières, principalement au départ de Nice et de Montpellier, dont notamment des liaisons vers l'Algérie et le Maroc. L'exploitation d'une partie de ses lignes a été abandonnée dès le mois de novembre 2003. Au moment de sa liquidation, en février 2004, elle ne comptait plus que dix-sept appareils et 448 salariés.

a) Une lente agonie

- Des premières difficultés au plan de restructuration

Les premières difficultés de la compagnie sont liées aux conditions de sa reprise par Marc Dufour, dans le cadre d'un protocole signé avec le groupe Swissair. Celui-ci prévoyait le versement par Swissair d'environ 130 millions d'euros afin de financer la restructuration de la compagnie. Suite aux graves difficultés rencontrées par le groupe suisse, Air Littoral n'a pas reçu le dernier versement de 15 millions d'euros et estime en outre que la défaillance de Swissair s'est traduite pas un manque à gagner commercial de 15,55 millions d'euros. Cette défaillance a été aggravée par les événements du 11 septembre 2001, à la suite desquels la compagnie a constaté une forte baisse de ses taux de remplissage.

Afin de faire face à ses difficultés, Air Littoral a engagé, dès l'été 2001, un plan de réduction des coûts comprenant un plan social réduisant l'effectif de 27 %, une réduction de sa flotte par la cession de sept appareils et l'arrêt des principales liaisons déficitaires. Dans le courant de l'année 2002, Air Littoral a prolongé ce plan de restructuration par l'ouverture de nouvelles lignes en Europe et un redéploiement de ses moyens vers le bassin méditerranéen (ouverture de lignes au départ de Nice et Montpellier vers l'Algérie et le Maroc). Elle a également noué des accords de partenariat avec des compagnies étrangères, afin de renforcer sa présence dans les pays qu'elle desservait (Air Algérie, la compagnie italienne Air One, la compagnie espagnole Spanair et Lufthansa).

- L'intervention de soutiens publics

En dépit de ces mesures de restructuration et d'efforts commerciaux, l'exploitation d'Air Littoral est restée déficitaire, laissant la compagnie dans une situation financière très critique. Ainsi, en 2002, la compagnie a dû procéder à des cessions d'actif, notamment à la vente de son siège social au conseil régional de Languedoc-Roussillon.

C'est également la raison pour laquelle elle a sollicité le soutien de l'État et des collectivités locales. En décembre 2002, la puissance publique a accordé à Air Littoral une aide au sauvetage de 15 millions d'euros, partagée à parité entre l'État et les collectivités locales. Une première tranche de 4 millions d'euros d'un prêt du Fonds de développement économique et social (FDES) de 7,5 millions d'euros a ainsi été versée à cette date, mais la contribution des collectivités locales de 7,5 millions d'euros ne s'est finalement jamais concrétisée, bloquant ainsi tout versement complémentaire de l'État. Parallèlement, l'actionnaire Marc Dufour a apporté une contribution de 300.000 euros à l'entreprise. Le groupe Air Littoral a également bénéficié d'un moratoire sur les dettes fiscales et sociales jusqu'à la fin de l'année 2002, qui a été poursuivi de fait, par le groupe, jusqu'en février 2003. Un nouveau moratoire a été accordé pour le mois de juin 2003.

- Du dépôt de bilan à la liquidation judiciaire

Afin de préserver ses chances de reprise, la compagnie a déposé le bilan le 21 août 2003 et a été placée par le tribunal de commerce de Montpellier en redressement judiciaire, en même temps que ses filiales Air Littoral Industrie et l'École Supérieure des Métiers de l'Aéronautique (ESMA). Par jugement du 5 novembre 2003, le tribunal de commerce de Montpellier a désigné la société AzzuraAir-Littoral, constituée par le groupe italien 7Group et la compagnie AzzurraAir-Spa, comme repreneur de la compagnie aérienne Air Littoral et de ses deux filiales, dans le cadre d'un plan de reprise par voie de cession.

Au vu de diverses garanties apportées par ses actionnaires, une licence d'exploitation de transporteur aérien a été délivrée le 15 novembre 2003 à AzzurraAir-Littoral. Les repreneurs n'ont toutefois finalement jamais versé les fonds prévus pour la reprise (11 millions d'euros). Ayant constaté, lors de son audience du 15 décembre 2003, la défaillance de 7Group dans le cadre du plan de cession d'Air Littoral, le tribunal de commerce de Montpellier a prononcé le 23 décembre 2003 la résolution de ce plan de cession et la réouverture, au profit de la société Air Littoral, d'une période d'observation jusqu'au 15 janvier 2004.

À la suite du retrait du groupe Ionis, qui s'était ensuite montré intéressé par la reprise de la compagnie, le tribunal de commerce a successivement prolongé la période d'observation jusqu'au 4 février 2004, et a finalement retenu, le 5 février, le plan de redressement par voie de cession présenté par la société Filature du Favreuil. Mais ce repreneur s'est retiré avant que la cession ne devienne effective, et Air Littoral a finalement été placée en liquidation judiciaire le 17 février 2004, après que son certificat de transport aérien a été suspendu le 13 février à minuit, pour des raisons de sécurité.

b) Un lourd bilan

Au cours de l'exercice clos le 31 décembre 2002, Air Littoral a réalisé un chiffre d'affaires de 171 millions d'euros pour un résultat d'exploitation négatif de 55,62 millions d'euros et une perte nette de 53,14 millions d'euros. À la même date, ses fonds propres étaient négatifs à hauteur de 22,30 millions d'euros et le total de ses dettes s'élevait à 126 millions d'euros. La direction générale de l'aviation civile n'a pas été en mesure de transmettre à votre Rapporteur spécial les éléments financiers de l'année 2003, ses chiffres n'étant pas disponibles du fait de la disparition de la société au tout début de l'année 2004.

Le groupe Air Littoral se composait de trois sociétés employant au total un peu moins d'un millier de salariés dont 65 % à Montpellier et 27 % à Nice. La compagnie Air Littoral, qui représentait les trois-quarts de cet ensemble, avec 721 salariés avant la reprise par 7Group (dont 270 personnels navigants techniques et 160 personnels navigants commerciaux), était le donneur d'ordres principal des deux autres sociétés, Air Littoral Industrie (211 personnes) et ESMA (63 personnes). Alors que l'ESMA a finalement rejoint le groupe Aéroconseil, préservant 56 emplois, Air Littoral et Air Littoral Industrie ont été mises en liquidation judiciaire.

Le plan de sauvegarde de l'emploi a prévu la création d'une cellule de reclassement. Le suivi opéré par le cabinet chargé du reclassement permet de constater que l'essentiel de l'effectif licencié a adhéré à la cellule et que, au 30 juillet 2004, 243 personnes, dont 173 licenciées au moment de la liquidation, ont trouvé une solution de reclassement alors que 50 personnes, dont 32 licenciées au moment de la liquidation, sont en formation.

Les créances auprès de l'État et des autorités aéroportuaires déclarées au passif de la procédure collective ouverte le 21 août 2003 atteignaient 28,29 millions d'euros, dont 7,67 millions au titre de la redevance pour services terminaux, 8,46 millions d'euros au titre de la taxe d'aviation civile et 12,16 millions au titre de la taxe d'aéroport.

Entre le 21 août et le 31 décembre 2003, elles se sont accrues de 5,73 millions d'euros, dont près de la moitié au titre de la taxe d'aéroport. Le montant de la créance due pour les vols effectués en janvier et février 2004 n'est pas encore connu. Il portera au-delà de 35 millions d'euros le total de la perte de recettes induite par la disparition d'Air Littoral pour l'État et les autorités aéroportuaires, auquel s'ajoutent les 4 millions d'euros prêtés par le FDES.

Une nouvelle fois, le soutien des collectivités publiques accordé à des sociétés dont la viabilité est proche de zéro aboutit à des résultats désastreux pour le personnel et les contribuables.

2.- Les difficultés rencontrées par l'ensemble des transporteurs régionaux français

Le transport régional français représente environ 15 % du trafic aérien touchant la France. En termes de parts de marché, il est très concentré, en dépit d'un nombre important de compagnies. Cette tendance s'est renforcée en 2000 avec le rachat par le groupe Air France des compagnies Brit Air, Proteus, Flandre Air puis Regional Airlines, puis en 2003 et 2004, avec la disparition successive des compagnies Air Lib et Air Littoral, mais aussi Air Jet ou encore Air Atlantique.

Pour leur part, les transporteurs sans lien capitalistique avec Air France développent principalement leur activité sur des marchés étroits exploités avec de petits modules et, pour certains, dans le cadre de lignes subventionnées par le FIATA et les collectivités locales (Airlinair, Hexair, Twinjet, Finist'Air).

Depuis plusieurs années, le transport aérien français connaît des difficultés, le pavillon français perdant des parts de marché notamment sur le transport intra-européen.

La concurrence du TGV et la disparition récente de plusieurs transporteurs majeurs ont suscité une baisse notable du trafic intérieur métropolitain ces dernières années (- 5,2% par an en moyenne depuis 2000).

Les transporteurs régionaux, tout comme l'ensemble des transporteurs fréquentant les aéroports français, ont subi ces dernières années une hausse importante de leurs charges aéronautiques, sans pouvoir répercuter ces hausses sur leurs tarifs, sous peine de trop réduire la demande. En 2004, le phénomène s'est encore accentué avec le financement par le FIATA des mesures de continuité territoriale avec l'outre-mer et l'augmentation des prélèvements au titre de la taxe générale sur les activités polluantes. Les transporteurs souhaiteraient donc une évolution des taxes et redevances afin d'éviter de pénaliser plus encore le transport régional.

Par ailleurs, l'exploitation des liaisons sur lesquelles pèsent des obligations de service public est rendue difficile par les rigidités de la procédure d'octroi des subventions, et le mode de rémunération des transporteurs est jugé peu incitatif. La réforme en cours du FIATA et la révision prévue des procédures d'attribution des liaisons d'obligations de service public devraient toutefois à terme apporter de la souplesse au dispositif de subvention de l'exploitation de ces liaisons.

Enfin, la piste d'une plus grande implication des collectivités locales dans l'économie des compagnies a également été évoquée.

Malgré ces difficultés structurelles importantes, les transporteurs régionaux toujours en activité profitent de la reprise du trafic aérien sensible depuis plusieurs mois. Si Brit Air a eu un résultat net légèrement négatif en 2003-2004, c'est essentiellement à cause de la quasi-absence de plus-values de cession d'appareils au cours de cet exercice ; Régional Compagnie aérienne Européenne a enregistré un bénéfice net alors que l'exercice précédent avait conduit à des pertes. La situation des deux transporteurs régionaux appartenant à Air France est donc satisfaisante. La compagnie Corse méditerranée, qui a reçu 39,2 millions d'euros de subventions au titre de la continuité territoriale, est parvenue à un résultat net légèrement positif pour l'exercice clos le 31 mars 2004. Il en a été de même pour Airlinair, qui prévoit un chiffre d'affaires en progression de plus de 50 % pour l'exercice commencé le 1er avril 2004, pour Twin Jet, qui espère doubler son chiffre d'affaires en 2004 grâce à la réalisation de nouvelles liaisons soumises à obligations de services publics, comme la liaison Épinal-Paris, et pour Hex'Air.

3.- L'irrésistible développement des compagnies à bas coûts

Alors que les petites compagnies classiques rencontrent des difficultés, les compagnies à bas coûts se développement, en France comme dans le reste du monde. Bien que l'année 2003 ait été très morose pour le transport aérien, le trafic de ces compagnies en métropole est passé de 5,4 à 7,5 millions de passagers et leur part de trafic de 5,6 % à 7,8 %. La reprise de 2004 devrait les porter respectivement de 9,5 millions de passagers et 9,5 % du trafic.

a) Des compagnies plus nombreuses, multipliant les liaisons aériennes

Au cours des dernières années, de nombreuses compagnies à bas coûts ont vu le jour en Europe et en France. Certaines ont connu un essor rapide, à l'image d'easyJet et de Ryanair, alors que d'autres ont disparu ou ont été rachetées par les plus robustes.

En 2001, sept compagnies à bas coûts exploitaient un total de 29 liaisons vers la France ; l'année suivante, cinq transporteurs à bas coûts font leur apparition dans le ciel français, portant à 69 le nombre total de liaisons touchant la France. En 2003, on a assisté à de multiples mutations : la disparition de CiaoFly, Goodjet et Aeris Express, l'absorption de Buzz par Ryanair et de GO par easyJet, et par ailleurs l'arrivée sur le marché français de DBA, FlyBE, Germania Express, Hapag Lloyd Express, Jet2.com, SkyEurope, Snalskjutsen, Snowflake et Volareweb.com. Au total, à la fin de l'année 2003, on dénombrait 86 liaisons exploitées par 17 compagnies à bas coûts vers la France.

En 2004, d'autres compagnies à bas coûts apparaissent sur le marché français : Air Polonia, Flyglobespan, Helvetic, Norwegian, Smart Wings, Thomsonfly.com, V BIRD, Vueling et Wizz Air. Au total, 26 compagnies à bas coûts sont présentes en France ; elles devraient exploiter 139 liaisons d'ici à la fin 2004, dont 32 par easyJet et 24 par Ryanair.

Le trafic des compagnies à bas coûts pour des liaisons intérieures à la métropole, inexistant en 2001, est de l'ordre de 1,1 million de passagers en 2003 pour environ 300.000 en 2002. Sur le faisceau entre la métropole et l'Europe(22), la part globale des compagnies à bas coûts est de 16 % en 2003 contre 12 % en 2002 et 7 % en 2001. La part des compagnies à bas coûts dans le trafic intérieur à la métropole est de 5 % en 2003 contre 1 % en 2002.

Au cours du premier semestre 2004, les compagnies à bas coûts européennes ont transporté, sur des liaisons touchant la France, 4,8 millions de passagers, soit un trafic en augmentation de 49 % par rapport à celui du premier semestre de l'année précédente. Les deux principaux transporteurs à bas coûts en France, sont easyJet et Ryanair qui ont assuré respectivement 44 % et 28 % de ce trafic. Suivent Volareweb.com avec une part de 7 % puis, avec des parts de l'ordre de 2 ou 3 %, les six compagnies suivantes : bmibaby, Virgin Express, BasiqAir, Germanwings, FlyBE et Sterling.

On notera qu'il n'y a plus, depuis la disparition d'Aéris Express, de compagnie à bas coûts française.

L'essor des compagnies à bas coûts a d'abord largement profité aux régions françaises ; leur présence sur les deux grands aéroports parisiens s'est développée plus récemment, en particulier depuis 2003. Au total, en 2003 et 2004, une trentaine d'aéroports sont desservis par des transporteurs à bas coûts, avec Nice à leur tête, qui accueille à la mi-2004 seize compagnies à bas coûts desservant un total de 40 destinations.

En 2008, la DGAC estime que le trafic des compagnies à bas coûts devrait avoisiner les 14,5 millions de passagers, sur un trafic total en métropole de 112 millions de passagers, soit 13 % du trafic.

b) L'invalidation d'une partie des aides accordées à Ryanair

Dans le cas des services aériens au départ d'aéroports secondaires, certains des transporteurs à bas coûts présents sur le marché français subordonnent l'ouverture ou le maintien de dessertes aériennes à l'octroi d'avantages accordés par les gestionnaires d'aéroport et les collectivités publiques.

- Les contentieux jugés en France

Dans deux cas précis (Pau et Strasbourg), les contrats signés entre les chambres de commerce et d'industrie concernées et Ryanair ont conduit à des recours contentieux de compagnies concurrentes auprès des juridictions administratives. Le contentieux de Strasbourg initié par la compagnie Britair, filiale d'Air France s'est traduit par le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 24 juillet 2003, ainsi que par l'arrêt de la cour administrative d'appel de Nancy, en date du 18 décembre 2003, qui ont conduit à l'annulation de la délibération de la Chambre de commerce et d'industrie de Strasbourg et du Bas Rhin et à la résiliation des deux conventions passées avec la compagnie Ryanair.

En effet, il a notamment été estimé en l'espèce que les actions de promotion publicitaire profitaient essentiellement à ce transporteur sans que celui-ci n'ait à supporter la moindre conséquence au cas où il n'atteindrait pas son engagement de trafic. En conséquence, les juridictions administratives ont considéré que l'engagement de la chambre de commerce et d'industrie constituait une aide financière au profit de Ryanair et que celle-ci, dont la majeure partie relevait des collectivités territoriales, était assimilable à une aide d'État, au sens de l'article 87 du traité instituant la Communauté européenne. Cette aide aurait dû de ce fait être notifiée préalablement à la Commission européenne, conformément aux dispositions de l'article 88 du traité.

Votre Rapporteur spécial tient à souligner qu'il existe de nombreuses pratiques critiquables en matière d'aide des collectivités territoriales ou des gestionnaires d'aéroport, même si le nombre de contentieux est relativement limité. Il estime que des instructions devraient être données aux préfets pour qu'ils soient particulièrement vigilants sur ce sujet dans le cadre du contrôle de légalité des décisions des collectivités territoriales et du contrôle des actes des chambres de commerce.

- La jurisprudence communautaire

Dans l'attente des lignes directrices relatives aux modalités d'octroi des aides apportées par les aéroports aux compagnies aériennes, qui devraient être publiées prochainement par la Commission, les pratiques et donc la légalité des contrats conclus sur les aéroports français doivent être appréciées sur la base de la décision de la Commission, du 30 avril 2004, concernant les aides apportées par l'aéroport de Charleroi à la compagnie Ryanair.

Selon la Commission, les mesures prises en faveur de Ryanair par la région wallonne et Brussels South Charleroi Airport (BSCA), entité gestionnaire de l'aéroport, sont constitutives d'aides d'État dans la mesure où le principe de l'investisseur privé en économie de marché n'a pas été respecté. La Commission a en effet conclu qu'aucun opérateur privé, placé dans les mêmes conditions, n'aurait concédé des avantages identiques compte tenu des perspectives incertaines de rentabilité sur la période de référence de quinze ans. Cependant, en dépit de leur qualification d'aides d'État, les avantages consentis par l'aéroport de Charleroi font l'objet d'un traitement différencié qui se traduit soit par la confirmation de leur compatibilité avec le marché commun soit par une invalidation.

Cette décision est importante car la Commission indique « qu'elle accepte pour la première fois dans le transport aérien, ce principe d'aide au démarrage tout en assurant le respect des règles habituelles des aides d'État ». Dans la mesure où certains critères sont vérifiés dans les contrats passés entre les gestionnaires d'aéroports et/ou collectivités publiques et les compagnies à bas coûts, de telles aides sont acceptables.

En revanche, en raison de leur incompatibilité avec le marché commun, certaines aides octroyées par BSCA à Ryanair sont invalidées et doivent être rétrocédées par Ryanair. Le montant de ces aides est évalué à 4 millions d'euros sur un total de 15 millions d'euros perçus par le transporteur. Il s'agit des rabais accordés sur les charges aéroportuaires, ceux-ci n'étant envisageables que dans un cadre non discriminatoire et à condition d'être limités dans le temps, des rabais sur les redevances d'assistance en escale dont les pertes éventuelles, qui en résulteraient, seraient compensées par des recettes liées aux missions d'autorité aéroportuaire ou de services d'intérêt économique général de l'aéroport, et des incitations ponctuelles versées à l'ouverture de lignes de manière forfaitaire et indépendamment de tout objectif.

III.- LES AÉROPORTS AU CœUR DES RÉFORMES

A.- AÉROPORTS DE PARIS : UNE SITUATION CORRECTE À LA VEILLE D'UNE RÉFORME STATUTAIRE

L'atonie de l'activité d'Aéroports de Paris (ADP) en 2003 est la conséquence de l'onde de choc mondiale provoquée par les attentats du 11 septembre 2001, conjuguée à une faible croissance économique, à la concurrence du TGV, aux faillites des compagnies Air Lib, Aéris et Air Littoral, au conflit en Irak et à l'épidémie de pneumopathie en Irak. Heureusement, le trafic renoue avec la croissance depuis le début de l'année 2004, essentiellement au profit de l'aéroport de Paris Charles-de-Gaulle.

1.- Une reprise de l'activité en 2004, après une année 2003 atone

Avec 70,7 millions de passagers accueillis en 2003, les aéroports parisiens ont connu une légère baisse de leur activité (- 1,2  %) par rapport à 2002. Ce résultat est jugé satisfaisant par le président d'ADP qui a rappelé à votre Rapporteur spécial que les prévisions initiales d'une hausse de 3,5  % de l'activité avaient cédé la place à une prévision de baisse à hauteur de 3  % à la suite de déclenchement de la guerre en Irak et de l'apparition de l'épidémie de pneumopathie atypique.

ÉVOLUTION DU TRAFIC SUR AÉROPORTS DE PARIS EN 2003 ET 2004

Résultats 2003

Variation
2003/2002

(en  %)

Variation
1er semestre 2004 /
1er semestre 2003

(en  %)

Mouvements commerciaux

(en milliers)

709

- 0,09

5,9

Intérieur

194

- 6,9

1

Union européenne

307

3,12

7,8

International (hors Union européenne)

208

2,2

Tonnage atterri commercial

(en milliers de tonnes)

32.569

1

(nd)

Passagers commerciaux

(en milliers)

70.677

- 1,2

8,8

Intérieur

17.439

- 4,9

3,2

Union européenne

22.845

1,3

7,4

International (hors Union européenne)

30.195

- 1,2

4,7

Transit direct

199

- 0,2

(nd)

Fret commercial et poste

(en milliers de tonnes)

1.589

3,4

5,2

Intérieur

92

11,5

- 16,9

International

1.497

2,8

7

Source : Aéroports de Paris.

L'évolution très positive constatée au premier semestre 2004 provient, pour une part, d'un rattrapage par rapport au premier semestre 2003 qui avait été marqué par le conflit en Irak, l'épidémie de pneumopathie atypique en Asie du Sud-Est, la faillite de la compagnie Air Lib, et des conflits ou mouvements sociaux en mai. Elle résulte, pour une autre part, d'une reprise significative du transport aérien mondial dans son ensemble.

Sur l'ensemble de l'année 2004, le trafic de passagers devrait croître de 5 % et le trafic de fret aérien de 7 %. Pour 2005, les prévisions sont actuellement de + 2,8% pour le trafic de passagers et de + 2 % pour les mouvements commerciaux.

Les principaux résultats financiers d'Aéroports de Paris pour l'année 2003 sont retracés dans le tableau ci-dessous. Ils sont corrects étant donné la situation difficile à laquelle le secteur a été confronté au cours de l'année.

RÉSULTATS D'AÉROPORTS DE PARIS EN 2002 ET 2003

(en millions d'euros)

2002

2003

Variation

(en %)

Chiffre d'affaires

1.413,5

1.621,7

14,7

Valeur ajoutée

952,7

1.072,8

12,6

Excédent brut d'exploitation

436,1

536,9

23,1

Bénéfice courant avant impôt

130,2

216,8

66,5

Capacité d'autofinancement

301,4

353,4

17,3

Capitaux propres et provisions

1.751,6

1.732,4

- 1,1

Dettes à long et moyen termes

2.009,3

2.252

12,1

Investissements

629,1

549,6

- 12,6

Effectif au 31 décembre

8.096

8.203

1,32

Ratios

Excédent brut d'exploitation / chiffre d'affaires (en %)

31

33

Dettes long et moyen termes / capitaux propres et provisions

1,15

1,3

Autofinancement / investissements (en %)

48

64

Investissements / excédent brut d'exploitation

1,44

1,02

Dettes long et moyen termes / autofinancement

6,7

6,4

Source : Aéroports de Paris.

L'évolution des charges courantes d'exploitation, en hausse de 8,9 %, est sensiblement inférieure à celle du chiffre d'affaires, en progression de 14,7 %. Toutefois, hors produits de la taxe d'aéroport en forte augmentation en 2003 (+ 123 %), la progression du chiffre d'affaires n'est que de 4 %.

À la fin 2003, l'endettement à long et moyen terme d'Aéroports de Paris s'élevait à 2.252 millions d'euros (2.009 millions d'euros en 2002), le ratio endettement sur capitaux propres à 1,68 (1,31 en 2002) et le ratio endettement sur capacité d'autofinancement à 6,37 (6,7 en 2002).

Pour 2004, la croissance du trafic étant nettement plus forte que les prévisions retenues dans l'élaboration du budget primitif de l'établissement, les résultats de fin d'année devraient être meilleurs qu'en 2004, nonobstant les charges exceptionnelles liées à l'accident du terminal 2E. L'endettement devrait continuer d'augmenter, pour atteindre 2.475 millions d'euros.

En effet, après plusieurs années marquées par des investissements de l'ordre de 500 millions d'euros par an, ADP a encore un lourd programme en la matière, lequel devrait atteindre 700 à 800 millions d'euros par an sur la période 2004-2007. Le plus lourd projet consiste en la création d'un satellite S3 à Paris Charles-de-Gaulle pour y installer l'alliance Skyteam, et notamment les A380 qui devraient commencer à voler en 2007 ; s'y ajoutent la poursuite de la rénovation de l'aérogare 1 du même aéroport, dont la première tranche est en cours, et le lancement d'un système automatique de transport entre les aérogares qui a déjà pris cinq ans de retard, selon le président d'ADP. Ces gros projets ne doivent pas cacher le grand nombre d'investissements de moindre ampleur, mais souvent très urgents, qui doivent être réalisés chaque année. Globalement, hors frais d'études et de surveillance technique, les investissements pour les prochaines années sont estimés à 2.375 millions d'euros courants, dont 1.375 millions d'euros pour le développement des capacités.

2.- L'effondrement d'une partie du terminal 2E

Le 23 mai 2004, l'effondrement d'un pan du toit du terminal E2 de l'aéroport Charles-de-Gaulle, à Roissy, a tué quatre personnes et en a blessé trois autres. Quelques instants après l'apparition de fissures, une section de 24 mètres, dans une coque de béton armée de 650 mètres de long, s'est effondrée. Ce nouveau terminal avait été inauguré le 25 juin 2003, une semaine plus tard que la date initialement prévue, une commission de sécurité n'ayant pas rendu, dans un premier temps, un avis favorable à son ouverture.

Dès le début du mois de juillet, la commission chargée de l'enquête administrative rendait un rapport d'étape attribuant « la cause dominante de l'effondrement brutal du terminal » à une « perforation de la voûte en béton » par les « butons » (pièces métalliques qui la soutenaient). Une « dégradation préalable et progressive du béton » pourrait aussi être en cause.

Le terminal 2E devant traiter 20.000 passagers par jour, ce trafic a dû être réparti immédiatement sur l'ensemble des autres terminaux de Paris Charles-de-Gaulle, les compagnies ayant toutes refusé que leurs vols soient transférés vers Orly. Des modifications structurelles ont dû être engagées pour assurer le trafic intense de la période estivale. Les vols long-courriers du terminal 2E ont été déplacés vers les terminaux 1, 2A, 2C et 2F2 et les vols moyen-courriers ont été transférés vers les terminaux 2B et 2D. Par ailleurs, le nombre de postes d'inspection-filtrage a été accru de 30 % pour assurer une gestion plus fluide des files d'attente allongées par les passagers venus du terminal 2E ; le terminal 2B ne traite plus que des vols moyen-courriers à destination de pays extérieurs à l'espace Schengen et les capacités du terminal 2D ont été augmentées. Depuis le mois de septembre, une nouvelle salle d'embarquement créée dans le terminal 2C est opérationnelle. Enfin, avec l'accord des techniciens chargés de la sécurité des locaux, la partie non sinistrée du terminal 2E est utilisée comme salle d'embarquement provisoire.

Le coût du sinistre pour ADP n'est pas encore connu. En juillet dernier, son président a indiqué à votre Rapporteur spécial que le coût de la restauration ou la reconstruction du terminal sera couvert par les assurances. Il n'en sera pas de même pour les pertes d'exploitation, dont il estime qu'elles ne devraient pas dépasser 50 millions d'euros. Elles devraient être liées au coût des contentieux et à celui des constructions temporaires nécessaires à la poursuite de l'activité. Des économies devraient permettre de les compenser. Tragique, et pénalisant pour l'image d'ADP, cet effondrement ne devrait pas remettre en cause la réforme statutaire engagée par le Gouvernement.

3.- Le projet de réforme statutaire

L'avant-projet de loi dit de modernisation du secteur aéroportuaire (rebaptisé depuis « projet de loi relatif aux aéroports ») a été présenté au conseil d'administration d'ADP, puis soumis au Conseil d'État en juillet dernier. Il a été adopté par le Conseil des ministres le 29 septembre dernier et déposé le même jour sur le bureau du Sénat (23). La première partie du projet de loi porte exclusivement sur le statut d'ADP.

D'établissement public industriel et commercial, ADP devrait devenir une société anonyme, dont l'État continuerait à détenir au moins la majorité du capital. Il pourrait même en conserver la totalité pendant un certain temps. Ainsi, le groupe ADP ne pourra être privatisé sans qu'une nouvelle loi le permette.

L'objectif du projet est de maintenir le statut du personnel et les missions de service public actuellement remplies par ADP. Il est prévu qu'un cahier des charges précise les conditions dans lesquelles ces missions seront accomplies. Les terrains actuellement utilisés par ADP deviendront propriété de la société. Mais cette dernière devra verser à l'État une indemnité en cas de fermeture à la circulation aérienne de tout ou partie d'un aérodrome. Cette indemnité ne pourrait être inférieure à 70 % de la différence entre la valeur à laquelle ces terrains ont été transférés à ADP, majorée des coûts de remise en état des terrains et de fermeture des installations aéroportuaires, et leur valeur vénale au moment de la fin de leur utilisation pour la circulation aérienne. Cette disposition a pour objectif d'assurer à l'État une partie de la plus-value qui pourrait être réalisée par ADP à l'issue de la vente de terrains actuellement utilisés par les aéroports de la périphérie de Paris, parmi lesquels certains pourraient être fermés à moyen terme.

À l'issue de ce changement de statut, ADP deviendra une société propriété de ses actifs et détentrice du monopole de l'aménagement, l'exploitation et le développement des aérodromes civils d'Île-de-France, dont la liste sera fixée par décret. Elle ne sera pas en situation de simple concession, ce qui aurait eu pour conséquence d'imposer à l'État une mise en concurrence. En revanche, hors du champ de ce monopole, elle pourra avoir d'autres activités. L'objection, parfaitement juste, faite par la Cour des comptes dans son rapport public pour 2002 (24), selon laquelle les interventions extérieures (à l'étranger et en province) d'ADP étaient contraires à la spécialité de l'établissement public, sera ainsi levée.

Surtout, la possibilité d'une ouverture du capital, dont le calendrier n'est pas encore arrêté, donnera à ADP une chance d'augmenter son capital, alors que l'État n'a pas souhaité procéder à une recapitalisation et a laissé croître l'endettement de l'établissement public. Le ministère n'a pas répondu à la question de votre Rapporteur spécial sur la valeur estimée d'ADP dans le cadre d'une éventuelle ouverture de son capital.

B.- LES AÉROPORTS RÉGIONAUX EN VOIE DE DÉCENTRALISATION

1.- Malgré la disparition du compte d'affectation spéciale, les liaisons aériennes réalisées dans l'intérêt de l'aménagement du territoire continueront à être subventionnées au même niveau

Depuis 2000, vingt liaisons en métropole sont ou ont été exploitées avec une participation financière du FIATA. Par ailleurs, le fonds intervient pour sept liaisons outre-mer (trois en Guyane, quatre liaisons entre Saint-Pierre et Miquelon et le Canada). Au 20 août 2004, six transporteurs (Régional CAE, Hex'Air, Finist'Air, Airlinair, Twin Jet et Air France) exploitaient avec la participation financière du FIATA quatorze liaisons métropolitaines, et deux transporteurs (Air Guyane SP et Air Saint Pierre) exploitaient sept liaisons outre-mer. À la même date, le montant total des compensations financières versées par le Fonds depuis son instauration pour l'aide aux dessertes aériennes, incluant la période transitoire de 1995 et 1996, s'élève à 92 millions d'euros.

Les dépenses prévisionnelles au titre des conventions signées en 2004 et antérieurement comprennent le versement des soldes des conventions antérieures à l'année 2003 (pour 4,43 millions d'euros) ainsi que la totalité des acomptes exigibles en 2005 au titre des conventions en cours (pour 10,17 millions d'euros). Au total, le montant des dépenses prévisionnelles au titre des conventions signées en 2004 et antérieurement devrait être de 14,6 millions d'euros.

FIATA 2005 - DÉPENSES PRÉVISIONNELLES
AU TITRE DES CONVENTIONS EN COURS

(en millions d'euros TTC)

Début d'exploitation

Acomptes

Soldes (2004)

Angoulême - Paris

01/06/2004

0,53

0,13

Aurillac - Paris

13/07/2004

0,51

0,25

Bergerac - Paris

13/05/2002

-

0,09

Béziers - Paris

15/06/2004

2,15

0,56

Brive - Paris

05/01/2004

1,04

0,28

Brest - Ouessant

01/10/2002

0,05

0,01

Castres - Paris

13/05/2002

-

0,27

Castres / Rodez / Lyon

30/06/2002

-

0,17

Cherbourg - Paris

15/03/2002

-

0,21

Épinal - Paris

01/09/2004

0,62

0,15

La Rochelle - Lyon

15/10/2004

0,42

0,21

Le Puy - Paris

01/01/2002

-

0,06

Lorient - Lyon

01/10/2002

0,54

0,54

Périgueux - Paris

11/02/2002

-

0,27

Rennes - Mulhouse

26/08/2002

0,23

0,25

Saint-Étienne - Paris

19/09/2004

1,15

-

Tarbes - Paris

01/06/2004

2,93

0,71

Cayenne - St Georges

01/06/2002

-

-

Cayenne - Maripasoula

01/06/2002

-

-

Cayenne - Saül

15/07/2002

-

-

St-Pierre-et-Miquelon

01/01/1998

-

0,27

Total

10,17

4,43

Source : direction générale de l'aviation civile.

Au titre de nouvelles conventions, les dépenses prévisionnelles sont estimées à 12,7 millions d'euros. Elles pourraient concerner, notamment, les lignes suivantes : Le Puy-Paris, Bergerac-Périgueux-Paris, Castres-Paris, Castres- Rodez-Lyon, Cherbourg-Paris, Lorient-Lyon et Rennes-Mulhouse.

Il est proposé, dans le projet de budget pour 2005, de supprimer le compte d'affectation spéciale « FIATA » et de reverser les crédits du fonds sur le budget général. Un nouveau chapitre relatif au subventionnement des liaisons aériennes réalisées dans l'intérêt de l'aménagement du territoire est ainsi créé dans la section « Transports et sécurité routière » du budget du ministère chargé de l'équipement et des transports. La dotation budgétaire initiale de ce chapitre dans le projet de loi de finances pour 2005 s'élève à 73,87 millions d'euros d'autorisations d'engagement (dont 31,26 millions d'euros de services votés et 42,61 millions d'euros de mesures nouvelles) et à 21,50 millions d'euros de crédits de paiement. Le ministère des finances s'est engagé à ce que le reliquat de crédits 2004, qui devraient être compris entre 5 et 6 millions d'euros, soit intégralement reporté sur 2005, ce qui portera les crédits disponibles à un niveau équivalent à celui de 2004 (28 millions d'euros). L'importance du reliquat de la fin de l'exercice 2004 est liée à la liquidation des compagnies Air Littoral et Air Atlantique, qui assuraient trois liaisons subventionnées, à la résiliation de trois conventions par la compagnie Airlinair, à la déclaration d'infructuosité prononcée par les collectivités sur quatre des douze appels d'offres prévus et le refus de la Commission européenne de la mise en place du soutien de deux autres des douze liaisons nouvelles (25).

2.- La situation des aéroports de province ne parvient pas à s'améliorer

Pour la troisième année consécutive, le trafic total de passagers des dix principaux aéroports régionaux français est, en 2003, en baisse de 1,8 % par rapport à 2002, même si ce repli est moins marqué que ceux enregistrés en 2001 et 2002 (respectivement - 3,3 % et - 3,4 %). Ce résultat est plus mauvais que celui de l'ensemble du trafic français qui a décru de seulement 1,6 % en 2003, après une progression de 0,5 % en 2002. Les trafics intérieur et international continuent à baisser, tandis que le trafic à destination de l'Union européenne continue de croître. Le tableau suivant met en évidence des résultats contrastés selon les aéroports, entre la progression de 2,8 % du trafic à l'aéroport de Lyon et la chute de 18,8 % de celui de Bâle-Mulhouse, qui a perdu plus du tiers de son trafic entre 2000 et 2003, sous l'effet des difficultés rencontrées par les compagnies aériennes issues du groupe Swissair. Le trafic de fret avionné se stabilise (+ 0,3 % par rapport à 2002), après le repli de 21 % enregistré l'année précédente ; il en est de même pour le fret total (qui inclut le fret camionné), en légère progression de 0,2 % après une baisse de 8,6 %.

TRAFIC PASSAGERS ET FRET DES PRINCIPAUX AÉROPORTS
DE PROVINCE EN 2002 ET 2003

Aéroports

Trafic de passagers

Trafic de fret (en tonnes)

2002

2003

Évolution
(en %)

2002

2003

Évolution

(en %)

Nice-Côte d'Azur

9.197.158

9.141.525

- 0,6

23.512

19.951

- 15,1

Lyon-Saint Exupéry

5.778.224

5.939.895

2,8

130.644

127.614

- 2,3

Marseille-Provence

5.457.443

5.364.763

- 1,7

40.760

38.775

- 4,9

Toulouse-Blagnac

5.337.707

5.304.833

- 0,6

45.105

47.429

5,2

Bordeaux-Mérignac

2.932.779

2.823.846

- 3,7

21.547

19.135

- 11,2

Bâle-Mulhouse

3.056.964

2.482.547

- 18,8

79.767

81.277

1,9

Strasbourg-Entzheim

2.018.442

2.065.324

2,3

17.552

17.720

1

Nantes-Saint-Nazaire

1.884.044

1.915.426

1,7

36.115

38.549

6,7

Montpellier-Méditerranée

1.565.755

1.568.382

0,2

2.831

1.903

- 32,8

Lille-Lesquin

923.148

867.519

- 6

38.712

45.053

16,4

Total

38.151.664

37.474.060

- 1,8

436.545

437.406

0,2

Source : direction générale de l'aviation civile.

En dépit du repli du trafic, le chiffre d'affaires global des aéroports considérés s'élève à près de 520 millions d'euros, en augmentation moyenne de 5,3 % par rapport à 2002, l'aéroport de Bâle-Mulhouse étant le seul à enregistrer une baisse de son chiffre d'affaires. La recette unitaire moyenne par passager passe de 12,94 euros en 2002 à 13,88 euros en 2003. Cette hausse du chiffre d'affaires est liée à des revalorisations des taux des redevances aéronautiques et à la progression du produit de la taxe d'aéroport liée au renforcement des mesures de sûreté. Alors que le chiffre d'affaires avait augmenté plus vite que les charges en 2002, l'évolution inverse s'est produite en 2003 : les charges d'exploitation ont progressé de 14,8 %, sous l'effet conjugué d'une nouvelle hausse de 11,8 % des charges externes, liées à la sous-traitance en matière de sûreté, et d'une augmentation plus modérée (de 4,2 %) des frais de personnel. Finalement, le résultat net global de l'exercice s'est détérioré, passant d'une perte limitée à 0,4 million d'euros en 2002 à un résultat négatif de 9,9 millions d'euros en 2003 (alors qu'il s'établissait seulement à - 5,2 millions d'euros en 2001).

L'année 2003 a aussi été marquée par le ralentissement du développement des infrastructures, les investissements réalisés, à 159,9 millions d'euros, ayant chuté de 30 % par rapport à 2002. Le ratio investissement sur chiffre d'affaires s'est établi à 31 %, contre 46 % en 2002.

3.- Vers une large décentralisation en matière aéroportuaire

a) Une expérimentation qui n'a pas abouti

La loi sur la démocratie de proximité (26) avait prévu une expérimentation de transfert des compétences de l'État en matière d'aménagement et d'exploitation de plates-formes aéroportuaires au bénéfice de collectivités territoriales volontaires. Tous les aéroports civils de l'État pouvaient potentiellement faire l'objet d'un transfert, la délimitation du champ de la décentralisation étant renvoyée à une convention signée entre la collectivité bénéficiant du transfert et l'État. Du reste, toute collectivité territoriale pouvait se porter candidate à l'expérimentation. Enfin, les concessions d'exploitation venant à échéance durant l'expérimentation auraient été prorogées au-delà de l'échéance de celle-ci.

Six collectivités avaient fait connaître, sous des formes diverses, leur intérêt pour une telle démarche. Il s'agissait des régions Languedoc-Roussillon, Midi-Pyrénées, Rhône-Alpes, Guadeloupe et de la Réunion ainsi que du département de la Manche. Dans la pratique, aucune expérimentation n'a été engagée.

Sur les 186 aérodromes civils qui ont été créés - pour des raisons historiques - par l'État, 42 ont été pris en charge au cours de ces vingt dernières années par des collectivités locales suivant la procédure dite de « mutation domaniale ». Une telle procédure a encore récemment été mise en œuvre avec le département de l'Isère pour l'aéroport de Grenoble-Saint-Geoirs et avec celui de la Savoie pour la plate-forme de Chambéry-Aix-les-Bains. En outre, la loi n° 2002-92 du 22 janvier 2002 relative à la Corse a transféré à la collectivité territoriale Corse la compétence et le patrimoine relatif aux aéroports d'Ajaccio, Bastia, Figari et Calvi.

En dehors des quatorze plates-formes relevant d'Aéroports de Paris, l'État assure donc encore la responsabilité, en tant qu'autorité concédante, du développement, de l'aménagement et de l'exploitation de 136 aérodromes de toute taille dont la plupart a une vocation régionale ou locale. Par ailleurs, la grande majorité de ces plates-formes est financièrement portée par les collectivités territoriales qui sont, de fait, les mieux placées pour apprécier l'équilibre entre les choix de développement de l'aéroport et les retombées économiques locales susceptibles d'en être attendues.

b) Vers le transfert aux collectivités locales d'un grand nombre de plates-formes

L'article 28 de la loi relative aux libertés et responsabilités locales (27) abroge l'article 105 de la loi relative à la démocratie de proximité afin d'inscrire le secteur aéroportuaire dans le cadre du mouvement général de décentralisation. Il définit les finalités, le champ et les modalités du transfert de compétences en matière aéroportuaire.

À l'issue de ces transferts, seule une trentaine de plates-formes restera de la compétence de l'État. Il s'agit :

- des quatorze plates-formes relevant d'Aéroports de Paris et de celle de Bâle-Mulhouse régie par un traité international ;

- des principaux aéroports des départements d'outre-mer, qui constituent des infrastructures majeures pour la continuité territoriale ;

- des principales plates-formes régionales qui jouent un rôle structurant dans la desserte, notamment internationale, du territoire ou dont la zone d'influence s'étend sur plusieurs régions, ainsi que les aérodromes qui leur sont indissociables pour des raisons d'exploitation.

Conformément aux termes de la loi précitée, tous les autres aéroports, qui ont une vocation régionale ou locale, doivent être décentralisés. Leur transfert doit être opéré au plus tard le 1er janvier 2007 en s'appuyant sur les volontés exprimées par les collectivités territoriales ou leurs groupements. Des transferts peuvent être prononcés avant cette échéance et éventuellement revêtir un caractère expérimental. Les mutations domaniales, opérées avant la date de promulgation de la loi, au profit de collectivités locales ne sont pas remises en cause. Sauf si elles s'y opposent, les collectivités concernées bénéficient automatiquement d'un transfert définitif des aéroports qu'elles ont d'ores et déjà pris en charge.

Sous réserve d'une éventuelle période d'expérimentation, tout transfert de compétence emporte transfert, à titre gratuit et en pleine propriété, des terrains et des biens appartenant à l'État nécessaires à l'exploitation de l'aéroport concerné, à l'exception des emprises et des installations réservées aux besoins de la défense nationale, de la sécurité civile, de la sécurité de la circulation aérienne et de la météorologie.

L'État continue à assurer les fournitures des services de navigation aérienne et reste le garant de la sécurité ainsi que de la sûreté et les tâches effectuées dans ces domaines par les exploitants des aéroports demeurent placés sous son autorité et son contrôle.

Chaque transfert d'un aéroport doit être organisé par une convention entre la collectivité locale concernée et l'État, prise en application de l'article L.221-1 du code de l'aviation civile. L'objectif de cette convention est de préciser le domaine et les biens décentralisés et d'organiser les relations entre, d'une part, les services de la collectivité ou de son délégataire et, d'autre part, ceux de l'État demeurant sur la plate-forme.

c) Le projet de modernisation de la gestion des grands aéroports régionaux continuant à relever de la compétence de l'État

L'article 7 du projet de loi relatif aux aéroports a pour objectif d'assurer la modernisation des conditions d'exploitation des aéroports régionaux d'intérêt national ou international continuant à relever, en vertu de la loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux responsabilités et libertés locales, de la compétence de l'État.

Les aéroports qui appartiennent à l'État sont aujourd'hui exploités dans le cadre de contrats de concessions par les chambres de commerce territorialement compétentes. Malgré la révision du cahier des charges type intervenu en 1997, le système actuel soulève certaines difficultés, tant sur le plan économique que juridique. Il est peu incitatif et motivant pour les gestionnaires, contraints de réinvestir la totalité des bénéfices dans le financement des investissements, et ne disposant souvent que d'une visibilité limitée compte tenu de la faible durée de leurs contrats de concession. Le système est par ailleurs porteur de risques financiers directs et indirects pour l'État, du fait notamment du statut d'établissement public des chambres de commerce et d'industrie. Il interdit toute implication de l'initiative privée dans ce secteur d'activités, alors que cette tendance prévaut dans les autres pays européens.

L'objectif du Gouvernement est donc aujourd'hui d'engager une modernisation du mode de gestion de ces grands aéroports régionaux. Elle vise à clarifier la situation actuelle, à faciliter leur développement au profit de l'économie régionale et nationale, à préserver les compétences des opérateurs historiques et à permettre un engagement progressif de l'initiative privée dans ce secteur d'activité, tout en limitant les risques financiers encourus par l'État.

La solution retenue permet d'associer l'ensemble des acteurs intéressés à l'exploitation de ces aéroports régionaux. Elle est basée sur un mécanisme volontairement consenti par les établissements publics exploitants. L'article permet à ceux-ci de céder l'exploitation de chacun des aérodromes concernés à une société majoritairement détenue par des personnes publiques. Ces dernières pourront notamment inclure la chambre de commerce et d'industrie, dans la mesure où la réforme engagée doit tenir compte du rôle majeur joué jusqu'ici par celles-ci dans le développement aéroportuaire, ainsi que les collectivités territoriales intéressées, par dérogation aux articles L. 2253-1, L. 3231-6, L. 4211-1 et L. 5111-4 du code général des collectivités territoriales. Ces articles subordonnent les prises de participations des collectivités territoriales dans le capital de sociétés commerciales autres que les sociétés d'économie mixte locale à une autorisation donnée par décret en Conseil d'État.

Le Gouvernement prévoit que chacune de ces sociétés soit spécialement créée à cet effet, avec des capitaux intégralement détenus par des personnes publiques. L'ouverture du capital sera envisagée dans un second temps. L'allongement de la durée des contrats, qui sera au maximum de vingt ans, ainsi que la mise en conformité avec un nouveau cahier des charges type, sont la contrepartie de la renonciation à la garantie de passif et vise à permettre d'assurer leur équilibre économique et l'amortissement des investissements.

Dans un souci de continuité de la gestion sociale, cet article prévoit également, pour les personnels agents de droit public actuellement employés par les établissements publics, un mécanisme de mise à disposition au profit des sociétés nouvellement concessionnaires, avec, à l'issue d'un délai de dix ans, ou moins sur l'initiative de l'agent, un droit d'option en faveur de ces personnels, pour le maintien dans le cadre d'un contrat de travail dans la société nouvellement exploitante. Une solution de cette nature a d'ailleurs été adoptée pour les fonctionnaires de la Caisse des dépôts et consignations mis à la disposition de CDC Ixis par l'article 75 de la loi n° 2001-420 du 15 mai 2001 sur les nouvelles régulations économiques.

d) La création des communautés aéroportuaires

La loi n°2004-172 du 23 février 2004 portant création des communautés aéroportuaires met en place un cadre juridique nouveau qui doit contribuer à améliorer les retombées économiques de l'activité des grands aéroports au bénéfice de leur population riveraine. Ce texte permet d'associer, au sein d'un établissement public à caractère administratif, les collectivités territoriales, qui défendent les droits des riverains, et les acteurs économiques, qui bénéficieront de l'activité aéroportuaire, au soutien d'actions territoriales et des projets destinés à favoriser :

- la correction des atteintes aéroportuaires à l'environnement et à la qualité de vie urbaine et rurale ;

- l'accès des riverains aux emplois et aux équipements collectifs ;

- l'information relative aux impacts de l'aéroport sur son territoire et aux actions menées pour en corriger les effets.

La communauté aéroportuaire est créée par le représentant de l'État dans la région, et sur proposition du conseil régional. Ses différentes ressources sont énumérées par la loi.

À ce jour, aucun président de Conseil régional n'a manifesté formellement son intention de demander la constitution d'une communauté aéroportuaire. Dans une communication récente, le président du Conseil régional d'Île-de-France a indiqué que la région exprimerait sa position en la matière à l'automne 2004.

C.- LES QUESTIONS SPÉCIFIQUES AUX AÉROPORTS D'OUTRE-MER

Les spécificités de l'outre-mer, liées en particulier à leur grand éloignement de la métropole, ont justifié la mise en place, récente, de dispositifs d'aide à la mobilité des personnes, en particulier à travers la dotation de continuité territoriale (voir supra). Mais elles ont conduit aussi, de manière moins visible, à faire prendre en charge les coûts des services rendus, plus élevés qu'en métropole, par l'ensemble des compagnies aériennes. Votre Rapporteur spécial a évoqué le faible taux de la redevance pour services terminaux, et les difficultés rencontrées pour l'augmenter ; il devrait finalement progresser de 25 % par an pendant trois ans, la première étape ayant été franchie en 2004. L'absence de taxe d'aéroport en Polynésie française et en Nouvelle-Calédonie pose d'autres problèmes que votre Rapporteur spécial souhaite voir enfin résolus.

1.- Un léger redressement de l'activité et de la situation financière des aéroports d'outre-mer

Après deux années consécutives de baisse (- 5,6 % en 2001 et - 3,9 % en 2002), le trafic total de passagers des principaux aéroports d'outre-mer se stabilise en enregistrant une hausse de près de 1 % en 2003. Ce résultat est meilleur que celui des principaux aéroports régionaux métropolitains qui ont connu une baisse globale de 1,8 % de leur trafic par rapport à 2002. Ainsi, tous les aéroports, exceptés celui de Pointe-à-Pitre, connaissent une hausse de leur trafic de passagers par rapport à 2002, laquelle s'échelonne entre 0,5 % pour Fort-de-France à 3,4 % pour Tahiti.

Les aéroports antillais sont touchés par la baisse du trafic transatlantique qui fait suite à la disparition de la compagnie Air Lib en février 2003. La hausse du trafic inter-îles (notamment entre la Martinique et la Guadeloupe), du fait de l'arrivée en octobre 2002 de la nouvelle compagnie Air Antilles Express, a permis de limiter la baisse du trafic total à Pointe-à-Pitre, et a permis à Fort-de-France d'enregistrer une légère croissance.

TRAFIC PASSAGERS ET FRET DES AÉROPORTS
D'OUTRE-MER EN 2002 ET 2003

Aéroports

Trafic de passagers

Trafic de fret (en tonnes)

2002

2003

Évolution
(en %)

2002

2003

Évolution

(en %)

Tahiti

2.001.828

2.079.055

3,9

12.839

14.433

12,4

Pointe-à-Pitre

1.805.420

1.761.455

- 2,4

15.683

15.088

- 3,8

Fort de France

1.518.175

1.519.114

0,1

14.140

13.353

- 5,6

Saint-Denis

1.450.345

1.473.338

1,6

27.000

25.494

- 5,6

Cayenne

374.455

383.889

2,5

5.534

4.404

- 20,4

Nouméa

359.293

371.247

3,3

5.112

5.212

2

Total

7.509.516

7.588.098

1

80.308

77.984

- 2,9

Source : direction générale de l'aviation civile.

D'une manière plus générale, le trafic des principaux aéroports d'outre-mer est resté très inférieur, en 2003, au niveau qu'il avait atteint en 2000 (- 8,9 %). Seul l'aéroport de Nouméa a vu son trafic augmenter sur cette période (+ 2,4 %).

En ce qui concerne le fret, réalisé majoritairement sur des avions transportant également des passagers, les principaux aéroports d'outre-mer affichent un repli pour la deuxième année consécutive, alors que, par comparaison, la situation des principaux aéroports régionaux métropolitains se stabilise.

Pour l'ensemble des aéroports dont les données financières ont été transmises à la DGAC (28), le total des produits d'exploitation, à 111,2 millions d'euros, est en légère progression par rapport à 2002 (+ 0,7 %). Cela est essentiellement lié à l'augmentation du produit de la taxe d'aéroport et des subventions du FIATA qui visent à couvrir les coûts de sûreté et de sécurité. Leur chiffre d'affaires atteint 93,8 millions d'euros, en augmentation de 2,2 %, les hausses les plus fortes étant enregistrées sur les aéroports de Saint-Denis (+ 11 %) et Nouméa (+ 12,2 %). Du fait d'une réduction globale des charges et d'une légère augmentation des produits d'exploitation, le résultat net global de l'exercice redevient positif, passant de - 2,2 millions d'euros à + 5,1 millions d'euros.

2.- Des spécificités de financement inacceptables en Polynésie et en Nouvelle-Calédonie : la nécessité d'y créer une taxe d'aéroport

Outre le fait que la réglementation européenne relative aux transports aériens ne s'applique pas dans ces territoires, les dessertes aériennes de la Nouvelle-Calédonie et de la Polynésie française présentent la particularité de faire l'objet d'un partage de compétences entre l'État et les autorités locales. En effet, le législateur organique (29) a transféré aux autorités locales des compétences en matière de desserte aérienne, sauf pour les dessertes entre ces territoires et les autres points du territoire de la République, pour lesquelles l'État reste compétent. En conséquence, la Polynésie française et la Nouvelle-Calédonie exercent désormais la tutelle économique des compagnies aériennes basées dans leurs territoires respectifs.

Dans son précédent rapport budgétaire, votre Rapporteur spécial a vivement critiqué le fait que, sur les aéroports de Tahiti et de Nouméa, les missions de lutte contre l'incendie des aéronefs, de prévention du péril aviaire et de sûreté sont intégralement couvertes par des subventions du FIATA, en l'absence de taxe d'aéroport, alors que, dans les départements d'outre-mer, le dispositif de financement est identique à celui de métropole.

On rappellera brièvement que, suite à l'arrêt du Conseil d'État du 20 mai 1998, à la loi n° 98-1171 du 18 décembre 1998 relative à l'organisation de certains services au transport aérien et à la loi de finances pour 1999, l'exécution des missions de lutte contre l'incendie des aéronefs, de péril aviaire, de sûreté et de contrôle environnemental relève des exploitants d'aérodromes en application de l'article L. 213-3 du code de l'aviation civile, qui a été étendu à la Polynésie française et à la Nouvelle-Calédonie. Dans les territoires d'outre-mer où la fiscalité relève a priori de la compétence des gouvernements territoriaux, ni la taxe d'aéroport, ni la taxe de l'aviation civile, ni aucune autre taxe ayant le même objet n'ont été instituées. En l'absence d'autre ressource, le financement des missions précitées est donc assuré, pour les aéroports relevant de l'État, par des subventions du FIATA.

Le tableau ci-après détaille les subventions versées en la matière pour les aéroports d'État implantés en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française.

SUBVENTIONS VERSÉES AUX AÉROPORTS D'ÉTAT IMPLANTÉS
EN NOUVELLE-CALÉDONIE ET EN POLYNÉSIE FRANÇAISE

(en milliers d'euros)

1999

2000

2001

2002

2003

2004 (prévisions)

Nouméa-La Tontouta

181

556

1.109

1.083

935

1.796

Tahiti-Faa'a, Bora-Bora, Rangiroa, Raiatea

445

1.451

1.503

4.612

4.964

4.623

Total subventions du chapitre 06 du FIATA

2.301

6.601

9.662

31.006

33.293

44.518

Part de ces subventions sur le total de celles accordées sur le FIATA pour la sûreté et la sécurité (en %)

27

30

27

18

18

14

Source : direction générale de l'aviation civile.

Le Conseil d'État a été saisi en août 2004 par le Gouvernement d'une demande d'avis sur les modalités de mise en œuvre d'une fiscalité équivalente à la taxe d'aéroport sur les aéroports d'État des territoires d'outre-mer. La mise en place d'une telle fiscalité pourrait permettre, sur ces plates-formes et sur la base des coûts supportés en 2003, d'assurer la quasi-totalité du financement des missions considérées.

En effet, en Polynésie française, les dépenses réalisées en 2003 au titre de ces missions s'élèvent à 4,28 millions d'euros, alors qu'en Nouvelle-Calédonie, sur la base de données encore provisoires, elles atteignent 1,56 million d'euros.

Au vu du trafic accueilli par ces aéroports, le coût moyen par passager est respectivement de 6,15 euros et 8,50 euros, donc inférieur au taux plafond de 9,50 euros applicable, pour les plates-formes de même trafic, à la taxe d'aéroport en métropole et dans les départements d'outre-mer. Toutefois, un financement partiel par le FIATA pourrait subsister, en complément de la taxe d'aéroport, sur les plates-formes de Bora-Bora, Rangiroa et Raiatea.

D.- DES MODALITÉS DE FINANCEMENT EN COURS DE RÉNOVATION

Plusieurs chantiers de réforme sont actuellement en cours en ce qui concerne la lutte contre les nuisances environnementales induites par le transport aérien, d'une part, et les modalités de calcul des redevances aéroportuaires, d'autre part.

1.- La mise en place de la taxe sur les nuisances sonores aériennes

a) L'évolution de la taxe générale sur les activités polluantes due par les exploitants d'aéronefs

L'article 45 de la loi de finances pour 1999 a institué la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) perçue notamment auprès des exploitants d'aéronefs de masse maximale au décollage de plus de 2 tonnes. Jusqu'au 31 décembre 2003, les crédits nécessaires à l'isolation acoustique des bâtiments situés aux abords des aérodromes étaient affectés à l'état prévisionnel des recettes et des dépenses de l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME) au travers de la dotation budgétaire de cet établissement. Par construction, le dispositif considéré était marqué par une séparation des recettes et des dépenses et entraînait un décalage entre le produit de la taxe (12,5 millions d'euros en 2002) et les dotations budgétaires pour l'insonorisation des logements (24,24 millions d'euros en 2002).

L'article 19 de la loi de finances rectificative pour 2003 a profondément réformé le dispositif précité en :

- supprimant à compter du 1er janvier 2005 le volet « transport aérien » de la taxe générale sur les activités polluantes pour le remplacer par une taxe spécifique, dénommée taxe sur les nuisances sonores aéroportuaires, dont le produit sera totalement affecté aux exploitants des dix aéroports concernés ;

- confiant aux exploitants des aéroports intéressés la gestion du dispositif d'aide à l'insonorisation à partir du 1er janvier 2004 ;

- maintenant en 2004 le volet « transport aérien » de la TGAP mais en affectant aux gestionnaires des aéroports toutes les sommes qui seront encaissées à ce titre à partir du 1er janvier prochain par l'administration des douanes - le décret du 11 octobre 2004 (30) vient de prendre les mesures réglementaires nécessaires à ce transfert.

Les conditions d'établissement des plans de gêne sonore ont été modifiées par le décret du 26 avril 2002 suite aux recommandations de l'Autorité de contrôle des nuisances sonores aéroportuaires (ACNUSA). Ce texte a notamment élargi les plans de gêne sonore pour mieux prendre en compte la gêne ressentie par les riverains et accroître le nombre des bénéficiaires des aides à l'insonorisation.

Afin de répondre aux besoins croissants en terme d'aides, la taxe a été revalorisée. Ainsi, les taux unitaires de la TGAP ont été relevés par la loi de finances rectificative pour 2002 et sont fixés à 22 euros pour les aéroports parisiens et à 8 euros pour les autres plates-formes.

En application de la loi de finances rectificative pour 2003, la fourchette des coefficients de modulation de la taxe a été élargie de façon à la faire peser plus lourdement sur les vols effectués la nuit ou opérés avec des avions bruyants ; les coefficients varient désormais de 0,5 à 12 pour la journée (6 heures - 22 heures) et de 5 à 120 la nuit (22 heures - 6 heures). Ainsi, les nouveaux coefficients de modulation instaurés par le décret n° 2004-62 du 14 janvier 2004 conduisent à des coefficients de nuit dix fois supérieurs aux coefficients de jour, alors que le ratio n'était que de deux par le passé. En outre, un arrêté du 16 janvier 2004 redéfinit les groupes acoustiques des aéronefs permettant de déterminer la valeur du coefficient de modulation. Ces groupes correspondent à des caractéristiques acoustiques plus exigeantes.

Selon les données fournies par la direction générale des douanes et des droits indirects, le produit de la TGAP s'est élevé à 7,1 millions d'euros en 2000, à 10,3 millions d'euros en 2001, à 12,5 millions d'euros en 2002 et à 12 millions d'euros en 2003. En 2004, le montant des sommes perçues par les exploitants des dix aérodromes concernés au titre de la TGAP devrait s'élever à 34 millions d'euros.

b) Son remplacement par la taxe sur les nuisances sonores aériennes, à compter du 1er janvier 2005

À compter du 1er janvier 2005, le volet « transport aérien » de la TGAP est remplacé par la taxe sur les nuisances sonores aériennes (TNSA) qui sera collectée par les services de la DGAC et dont le produit sera affecté à l'aéroport où se situe son fait générateur. Cette nouvelle taxe sera calculée sur les mêmes bases que l'actuelle TGAP.

La gestion du dispositif ayant été transférée aux aéroports dès le 1er janvier 2004, la continuité du traitement des dossiers en cours se fera sans difficulté. C'est uniquement la source du financement qui changera, passant d'une TGAP affectée aux exploitants des aérodromes concernés comme indiqué précédemment, à la TNSA, affectée elle aussi, aux exploitants, mais versée mensuellement par la DGAC.

La loi de finances rectificative pour 2003 prévoit que le taux de base de la TNSA soit fixé à l'intérieur d'une fourchette comprise :

- entre 10 euros et 22 euros pour les aérodromes de Paris-Charles-de-Gaulle, Paris-Orly et Toulouse-Blagnac ;

- entre 4 euros et 8 euros pour les plates-formes de Bordeaux-Mérignac, Lyon-Saint-Exupéry, Marseille-Provence, Nantes-Atlantique, Nice-Côte-d'Azur et Strasbourg-Entzheim.

Ce taux sera fixé pour chaque aéroport concerné par un arrêté interministériel pris par les ministres respectivement chargés de l'aviation civile, de l'économie et de l'environnement. La détermination des taux devra s'appuyer sur une évaluation des besoins, conduite avec les exploitants des aéroports concernés. Les directions de l'aviation civile territorialement compétentes y seront directement associées. Le produit global de la taxe devrait atteindre 55 millions d'euros par an.

Dans le rapport qu'elle a diffusé au début de l'année 2003, l'ACNUSA a formulé plusieurs recommandations visant à simplifier pour les riverains le dispositif d'aide à l'insonorisation concerné et à en accroître l'efficacité. L'année 2004 est consacrée à la définition concrète des mesures qui pourraient être prises pour répondre à ces objectifs, dans le cadre d'un groupe de travail.

c) Les adaptations à apporter à cette nouvelle taxe

La fixation du taux de la future TNSA pour chaque aéroport, dans les limites prévues par le législateur, n'est pas encore intervenue. Il n'y avait pas d'urgence puisque ces taux ne seront applicables qu'à compter du 1er janvier 2005. Il n'y a actuellement qu'un taux par groupe ; le IV de l'article 1609 quatervicies A du code général des impôts précise que « Le tarif de la taxe applicable sur chaque aérodrome est compris entre les valeurs inférieure et supérieure du groupe dont il relève, en fonction du besoin de financement sur chaque aéroport, tel qu'il résulte notamment des aides à accorder en application de la réglementation en vigueur, de l'évolution prévisible des plans de gêne sonore et de celle des coûts d'insonorisation. » Ces nouvelles dispositions donnent une grande marge de manœuvre au Gouvernement, les fourchettes étant larges (entre 10 et 22 euros pour le groupe 1, entre 4 et 8 euros pour le groupe 2) et les critères de détermination relativement imprécis.

La DGAC estime que, à l'exception des aérodromes de Strasbourg et Bordeaux, les sept autres aéroports concernés par la TNSA seront taxés au taux le plus élevé de la fourchette de leur groupe, les besoins en matière d'insonorisation étant encore considérables. Le taux applicable à Bordeaux sera probablement inférieur à 8 euros mais supérieur à 4 euros, tandis que celui de Strasbourg sera probablement de 4 euros. La publication du décret fixant ces taux est prévue, dans le meilleur des cas, pour la fin de cette année.

Votre Rapporteur spécial trouve regrettable que la loi ne prévoie pas la possibilité que d'autres aéroports que ceux qu'elle cite atteignent le seuil d'assujettissement de leur exploitant à la taxe, seuil qui correspond à un « nombre annuel de mouvements d'aéronefs de masse maximale au décollage supérieure ou égale à 20 tonnes » ayant dépassé « vingt mille lors de l'une des cinq années précédentes » (I de l'article 1609 quatervicies A du code général des impôts). Un aéroport de province qui accueillerait un grand transporteur de fret pourrait dépasser rapidement ce seuil. S'il est situé en pleine campagne et que son plan de gêne sonore est en conséquence d'un coût peu élevé, il est absurde de le placer dans le deuxième groupe et de lui appliquer le taux minimal de 4 euros la tonne.

Il apparaît même que ce taux s'avère trop élevé pour les besoins en insonorisation pris en charge par l'aéroport de Strasbourg. Votre Rapporteur spécial estime en conséquence qu'il serait pertinent de recréer un troisième groupe, tel qu'il en existait un avant sa suppression par l'article 24 de la loi de finances rectificative pour 2002. Un taux compris entre 0,5 et 3 euros la tonne pourrait lui être affecté.

Une telle mesure ne semble pas relever de l'urgence, dans la mesure où le seuil d'assujettissement n'est pas encore franchi. Pourtant, votre Rapporteur spécial juge qu'elle est indispensable au choix des investisseurs, qui ont besoin de connaître précisément l'ensemble des charges qui pèseront sur eux avant de choisir de s'implanter en France ou à l'étranger. Alors que des projets existent et ont une chance réelle d'aboutir, il faut pouvoir rassurer les investisseurs sur ce sujet.

Par ailleurs, il serait très utile de prévoir un dispositif permettant aux collectivités concernées de préfinancer une partie des travaux d'insonorisation, afin d'en accélérer la réalisation, et donc de réduire plus vite les nuisances induites par l'intensification du trafic aérien, voire de prendre des mesures avant même que les nuisances apparaissent. Une partie du produit de la taxe pourrait ensuite leur être versée pour assurer le remboursement de l'emprunt qu'elles auraient contracté à cette fin.

Selon les informations transmises à votre Rapporteur spécial, qui s'en félicite, des dispositions permettant de résoudre la difficulté liée à l'existence de seulement deux catégories, d'une part, et autorisant l'intervention de collectivités territoriales pour accélérer les investissements, d'autre part, devraient figurer dans le projet de loi de finances rectificative pour 2004. En revanche, il ne semble pas qu'il soit envisagé d'ouvrir la possibilité pour les collectivités de réaliser des travaux d'insonorisation avant l'apparition de la gêne, puis d'obtenir remboursement de l'investissement sur le produit de la taxe perçu après l'accroissement du trafic. Votre Rapporteur spécial le regrette, car il est préférable d'intervenir en amont pour éviter toute gêne aux populations, plutôt que d'attendre qu'elles la subissent.

2.- L'assouplissement des règles applicables aux redevances aéroportuaires

Dans son rapport public 2002 (31), la Cour des Comptes formulait une série de critiques sur la politique tarifaire d'ADP : en ce qui concernait les redevances aéroportuaires, elle estimait que le rapport qualité/prix des aéroports parisiens n'était pas très bon et que les tarifs conduisaient à pénaliser les gros porteurs par rapport aux petits avions et les échanges intracommunautaires par rapport aux vols en métropole ; en matière de redevances domaniales, elle contestait les grilles tarifaires trop complexes et sans lien réel avec le service rendu. La réforme des modalités de calcul des redevances aéroportuaires, qui constitue le troisième volet du projet de loi relatif aux aéroports, vise à permettre une certaine évolution des redevances.

Alors que les tarifs des redevances aéroportuaires sont actuellement fixés chaque année par le pouvoir réglementaire, le projet de loi maintient le principe de tarifs réglementés, justifiés par l'existence d'une part de monopole naturel dans l'activité des aéroports, mais prévoit un encadrement plus souple. Pour ADP et les exploitants d'aéroports appartenant à l'État, l'évolution des redevances sera fixée dans un contrat pluriannuel d'une durée de cinq ans au maximum. Les nouvelles règles s'inspirent de mécanismes en place dans les autres pays européens.

Aujourd'hui, les redevances sont censées correspondre, globalement, au coût comptable des services rendus. L'article 8 du projet de loi rend possible la prise en compte de leur coût total, c'est-à-dire l'intégration du coût du capital. En effet, il est proposé que « le montant des redevances tient compte de la rémunération des capitaux investis, ainsi que, le cas échéant, de dépenses, y compris futures, liées à la construction d'infrastructures ou d'installations nouvelles avant leur mise en service ». Le coût d'un investissement pourra donc entrer dans le calcul du tarif des redevances avant qu'il soit réalisé, ce qui n'est pas possible actuellement. En outre, conformément à une pratique répandue en Europe et en accord avec une observation de la Cour des Comptes, les tarifs pourront être modulés en fonction de motifs d'intérêt général : par exemple, les avions les plus bruyants pourront être surtaxés, sous réserve, néanmoins, que le montant des redevances « ne soit pas manifestement excessif au regard des services rendus ».

Le projet de loi pose une limite à la marge de manœuvre des exploitants d'aérodromes en matière de fixation des tarifs : « le produit global des redevances [ne doit pas excéder] le coût des services rendus ». Votre Rapporteur spécial observe que ce principe, nécessaire au demeurant pour éviter des abus de la part d'opérateurs en situation de monopole partiel, ne s'applique pas à chacune des redevances mais seulement globalement. Chaque redevance n'a pas à être fixée en relation directe avec le service auquel elle correspond (atterrissage, passage, parking, distribution de carburant...), ce qui serait pourtant logique. Le projet de loi maintient la possibilité que certaines redevances (payées pour l'installation de commerces ou la gestion d'un parking pour les passagers, par exemple) soient fixées à un niveau élevé pour permettre de réduire la charge pesant directement sur les compagnies aériennes. Votre Rapporteur spécial estime qu'il conviendrait, pour le moins, d'établir précisément quelle est la part du coût de chacun des services rendus effectivement couverte par la redevance correspondante.

L'article 10 du projet de loi vise à sécuriser les ressources des exploitants d'aérodrome en ouvrant la possibilité à ces derniers, de requérir de la justice la saisie conservatoire d'un aéronef en cas de non-paiement ou de paiement insuffisant de redevances aéroportuaires. Est en outre prévue, dans ce même article, la possibilité de saisies conservatoires d'aéronefs en cas de créances portant sur des redevances de navigation aérienne.

En effet, les exploitants d'aérodrome restent aujourd'hui souvent démunis en cas de créances difficiles à recouvrer. Si le code de l'aviation civile prévoit une possibilité, de mise en œuvre difficile, de rétention administrative d'aéronefs, il limite la possibilité de saisie des aéronefs affectés à des transports publics ou à un service d'État à certains types de créances, au rang desquelles n'entrent pas celles portant sur des redevances. L'État est tout aussi dépourvu vis-à-vis des transporteurs, surtout étrangers, qui ne paient pas les charges qui leur reviennent en matière de redevance de navigation aérienne.

Par ailleurs, l'article 9 du projet de loi autorise l'exploitant d'un aérodrome établi sur le domaine public à percevoir des redevances domaniales auprès des tiers occupant ou utilisant ce domaine et, pour ce qui concerne les aérodromes de l'État, à en fixer le montant, par dérogation à l'article L. 30 du code du domaine de l'État.

IV.- LES DÉPENSES DE SÛRETÉ : UNE VAINE FUITE EN AVANT

A.- UN ÉNORME GASPILLAGE FINANCIER

La sûreté aéroportuaire s'inscrit dans un cadre législatif et réglementaire qui a considérablement évolué ces dernières années, notamment à la suite des attentats du 11 septembre 2001.

LES ÉVOLUTIONS RÉGLEMENTAIRES EN MATIÈRE DE SÛRETÉ ENTRE 2002 ET 2004

1) Les règles nationales

Les dispositions législatives du code de l'aviation civile encadrant l'action des agents de sûreté ont été complétées par la loi relative à la sécurité quotidienne du 15 novembre 2001 qui autorise désormais la fouille des passagers et de leurs bagages à main. La loi relative à la sécurité des infrastructures et systèmes de transport du 3 janvier 2002 a renforcé le dispositif de sûreté du fret aérien par l'instauration d'un système d'agréments pour les différents opérateurs de fret.

La partie réglementaire du code de l'aviation civile a été elle aussi complétée par les décrets en Conseil d'État n° 2002-24 du 3 janvier 2002 et n° 2002-1026 du 31 juillet 2002 et par la publication de deux arrêtés, l'un ministériel en date du 1er septembre 2003 et l'autre interministériel en date du 12 novembre 2003 pris en application des décrets précités. Ces évolutions réglementaires ont permis de stabiliser les fondements juridiques nécessaires à la mise en œuvre des mesures de sûreté. Les obligations que doivent respecter les différents acteurs de la sûreté sont désormais plus clairement définies, ce qui, corrélativement, facilite les contrôles exercés par l'État. Celui-ci dispose, en outre, d'une panoplie de sanctions efficaces et adaptées.

2) Les règles communautaires

La Commission européenne a de son côté, adopté des règles communes en matière de sûreté de l'aviation civile. Le règlement (CE) n° 2320/2002 du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2002 qui fixe ces règles se fonde sur les recommandations du document 30 de la Conférence Européenne de l'Aviation Civile et est applicable depuis le 19 janvier 2003.

Ce règlement institue également un système d'inspection permettant à la Commission européenne de vérifier l'application effective par les États membres et sur les aéroports européens des mesures qu'elle a édictées.

Cinq textes sont venus compléter ce règlement en 2003 et 2004. Il s'agit :

- du règlement (CE) n° 622/2003 qui apporte des précisions sur les moyens acceptables de conformité au règlement n° 2320/2002, et fournit la liste des articles interdits à bord des aéronefs ;

- du règlement (CE) n° 1217/2003 qui arrête les spécifications communes auxquelles doivent répondre les programmes nationaux de contrôle de la qualité en matière de sûreté de l'aviation civile ; ce texte définit une méthodologie commune pour l'exécution de ces contrôles ainsi que des critères communs applicables aux contrôleurs ;

- du règlement (CE) n° 1486/2003 qui décrit les modalités des inspections devant être effectuées par la Commission en vue de contrôler l'application par les États membres du règlement (CE) n° 2320/2002 au niveau de chaque État et de chaque aéroport ;

- du règlement (CE) n° 1138/2004 qui caractérise les parties critiques des zones de sûreté à accès réglementé dans les aéroports et précise les contrôles que doivent subir les personnels et les objets qu'ils transportent avant d'être autorisés à pénétrer dans ces parties critiques ;

- du règlement (CE) n° 849/2004 du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 modifiant le règlement (CE) n° 2320/2002 du 16 décembre 2002 qui autorise la création de « zones délimitées » séparées des zones de sûreté à accès réglementé et à l'intérieur desquelles les mesures de sûreté peuvent être adaptées.

1.- Une augmentation vertigineuse des dépenses

Selon les chiffres fournis à votre Rapporteur spécial par la direction générale de l'aviation civile, le coût des missions de sûreté supporté par les exploitants d'aérodromes et l'État serait passé de moins de 116 millions d'euros en 2000 à plus de 403 millions d'euros en 2003. Il approchera vraisemblablement 450 millions d'euros en 2004. Alors que ces missions représentaient 55 % de l'ensemble des coûts relatifs à la sûreté, la sécurité et les contrôles environnementaux en 2000, elles dépassaient 80 % en 2004.

COÛTS DES MISSIONS DE SÉCURITÉ, DE SÛRETÉ ET DE CONTRÔLES ENVIRONNEMENTAUX, À LA CHARGE DES EXPLOITANTS D'AÉRODROMES ET DE L'ÉTAT, EN MONTANTS ET POURCENTAGES EN 2000, 2003 ET 2004

(en millions d'euros)

Année 2000 (pour mémoire) :

Coûts par intervenant et par mission (1)

Répartition des coûts
par mission

Répartition des coûts
par intervenant

Exploitants

État

Total

Exploitants

(en %)

État

(en %)

Total

(en %)

Exploitants

(en %)

État

(en %)

Total

(en %)

Sécurité

71,4

16,1

87,5

43

39

42

82

18

100

Sûreté

90,1

25,7

115,8

54

61

55

78

22

100

Environnement

5,8

0,0

5,8

3

0

3

100

0

100

Total

167,3

41,8

209,1

100

100

100

80

20

100

Année 2003 :

Coûts par intervenant et
par mission
(1)

Répartition des coûts
par mission

Répartition des coûts
par intervenant

Exploitants

État

Total

Exploitants

(en %)

État

(en %)

Total

(en %)

Exploitants

(en %)

État

(en %)

Total

(en %)

Sécurité

93,9

4,8

98,7

19

27

19

93

7

100

Sûreté

390,9

13,2

403,1

80

73

80

97

3

100

Environnement

6,1

0,0

6,1

1

-

1

100

0

100

Total

490,9

18,0

508,9

100

100

100

96

4

100

Année 2004 (prévisions) :

Coûts par intervenant et
par mission
(1)

Répartition des coûts
par mission

Répartition des coûts
par intervenant

Exploitants

État

Total

Exploitants

(en %)

État

(en %)

Total

(en %)

Exploitants

(en %)

État

(en %)

Total

(en %)

Sécurité

99,3

1,8

101,1

19

11

18

98

2

100

Sûreté

432,5

14,2

446,7

80

89

81

97

3

100

Environnement

7,1

-

7,1

1

-

1

100

0

100

Total

538,9

16,0

554,9

100

100

100

97

3

100

(1) Les dépenses de l'État en tant qu'intervenant sont celles financées par les chapitres 05 et 07 du FIATA. Les dépenses des exploitants sont financées par la taxe d'aéroport, les subventions du chapitre 06 du FIATA, les subventions des collectivités locales voire, en 2002, les dotations exceptionnelles de l'État.

Source : direction générale de l'aviation civile (DGAC).

En y ajoutant les coûts pris en charge par les compagnies ariennes et les opérateurs de fret pour les tâches qui leur incombent, le total serait compris entre 592 et 638 millions d'euros en 2003.

Le coût de la sûreté est largement pris en charge par le passager, ce qui contribue au renchérissement du prix du transport aérien. Il est particulièrement difficile de mesurer l'impact négatif que son explosion a eu sur le trafic, dans la mesure où les efforts en direction de la sûreté favorisent aussi le retour des voyageurs vers ce mode de transport. La direction générale de l'aviation civile propose une fourchette de pertes de trafic comprise en 100.000 et 670.000 passagers pour chiffrer les conséquences de la hausse de ces dépenses entre 2002 et 2003 ; la perte de recettes se situerait entre 15 et 98 millions d'euros.

Quoi qu'il en soit, les politiques tarifaires des compagnies aériennes mettent en avant une part du coût strictement lié à la sûreté aéroportuaire très variable, y compris sur la même distance : elle serait de l'ordre de 15 euros pour un aller-retour Paris-Marseille sur Air France, soit entre 3 et 15 % du prix du billet selon la tranche tarifaire.

Votre Rapporteur spécial estime que les coûts incompressibles et croissants de la sûreté et les délais supplémentaires induits par le processus de contrôle vont finir pas pénaliser fortement le transport aérien, en particulier sur les moyennes distances pour lesquelles il existe des moyens de transport concurrents. En effet, le surcoût de l'avion sur le train va s'accroître, alors que le gain de temps permis par le choix du premier est réduit par les contrôles dans les aéroports.

2.- Un suréquipement inutile

Si la sûreté aéroportuaire coûte aussi cher à la France, c'est que celle-ci a tenu, à partir de 2001, à s'équiper très rapidement, se privant des gains de productivité générés par un délai « d'apprentissage » plus long, alors même que ses voisins européens étalaient leurs investissements sur plusieurs années, et que cette urgence a conduit à une situation de suréquipement.

Pris dans sa globalité, le parc d'appareils de contrôle installé sur les aéroports français correspond à une capacité théorique de traitement de 350 millions de bagages par an pour le premier niveau de contrôle, soit plus de 5,5 fois le trafic de passagers au départ des aéroports français en 2003. Par exemple, à Orly-Ouest, même en tenant compte des pointes horaires de trafic, les appareils ne sont utilisés qu'à moins d'un quart de leur capacité théorique.

Ce grand nombre, et donc cette faible productivité des machines, est lié au fait que la rapidité de leur mise en place a amené à les installer en position isolée, faute de temps pour adapter l'ensemble de la chaîne de traitement de bagages à ces contrôles supplémentaires. Ainsi, l'aéroport de Londres-Heathrow, dont le trafic est inférieur de 15 % à celui d'ADP, procède au contrôle de 100 % des bagages avec un nombre d'appareils inférieur de 40 %.

Des aéroports régionaux dont le trafic est limité ont eux aussi été équipés d'appareils très coûteux qui sont nécessairement sous-utilisés, alors que des machines plus simples, voire une fouille manuelle, auraient permis d'atteindre l'objectif de 100 % des bagages contrôlés pour une dépense largement inférieure.

Lorsque l'on prend conscience du coût des appareils en question (compris entre 200.000 et 700.000 euros, sans le coût d'entretien, de l'ordre de 10 % du prix d'achat), on mesure le gaspillage financier induit par ce suréquipement généralisé.

B.- UN MODE DE FINANCEMENT À RÉFORMER

Un tel suréquipement a été rendu possible par le mode financement des dépenses de sûreté, qui a déresponsabilisé les gestionnaires d'aérodromes.

1.- Des gestionnaires d'aérodromes déresponsabilisés par la prise en charge intégrale des coûts par l'État

Suite à l'arrêt du Conseil d'État du 20 mai 1998 Syndicat des compagnies aériennes autonomes, qui a proscrit le financement par voie de redevances des dépenses publiques résultant des « coûts des missions d'intérêt général qui incombent par nature à l'État », a été mise en place, à compter du 1er juillet 1999, la taxe d'aéroport perçue sur les passagers commerciaux au départ d'un aéroport français et dont le tarif est « fonction du besoin de financement sur chaque aérodrome, tel qu'il résulte notamment des prestations assurées en application de la réglementation en vigueur, de l'évolution prévisible des coûts et des autres recettes de l'exploitant » (article 1609 quatervicies du code général des impôts).

Ce dispositif institue une obligation pour l'État de rembourser au gestionnaire les dépenses qu'il a engagées en matière de sûreté sans définition précise du contenu de celles-ci et sans réel contrôle sur le montant ou l'opportunité de ces dépenses. Dans ce cadre, le gestionnaire n'est guère incité à optimiser ses dépenses.

Les différences considérables constatées entre les grands aéroports français en ce qui concerne le nombre de machines installées témoignent de cette situation : tous pratiquent le contrôle à 100 % des bagages de soute mais le nombre de départs par rapport au nombre d'appareils varie parfois du simple au double selon les plates-formes. Certains gestionnaires ont visiblement été plus respectueux de l'argent public que d'autres... ADP, mais aussi les gestionnaires des aéroports de Strasbourg et Nice, assurent ainsi plus de un million de départs par tomographe (et presque 1,4 million à Orly), quand d'autres (à Marseille ou Lyon) se limitent à environ 700.000.

Une étude faite par un corps d'inspection sur les coûts arrive à la même conclusion : ils vont de 1 à 3 selon les aéroports, pour un processus relativement standardisé. Une partie des écarts peut être justifiée par la plus ou moins grande adaptation des infrastructures, mais l'essentiel est lié aux efforts faits par le gestionnaire pour optimiser le processus de sûreté. Or, rien n'est fait pour stimuler de tels efforts, puisque la totalité des coûts est prise en charge sur le produit de la taxe.

2.- Certaines dépenses de sûreté ne devraient pas être financées par le produit de la taxe d'aéroport

Actuellement, est financé sur le produit de la taxe d'aéroport l'ensemble des dépenses présentées par le gestionnaire de l'aéroport comme relevant de la sûreté. C'est notamment le cas des charges liées au contrôle des accès, alors qu'une partie au moins d'entre elles relève incontestablement des charges de fonctionnement afférentes à toute entreprise, et devrait être couverte par une redevance.

Le système actuel conduit aussi à faire prendre en charge par la taxe d'aéroport, et donc par les seuls passagers commerciaux, des dépenses de sûreté induites par des situations particulières et qui ne profitent nullement à l'ensemble des passagers.

a) Le trafic d'affaires profite des dépenses de sûreté sans participer à leur financement

Ainsi, le trafic d'affaires bénéficie des dispositifs de sûreté sans être assujetti à la taxe d'aéroport, alors même que les mesures de sûreté qui leur sont dédiées coûtent particulièrement cher étant donné la faiblesse du trafic. Lorsqu'un aéroport accueille à la fois un trafic d'affaires et un trafic commercial, il utilise le produit de la taxe d'aéroport au profit de la sûreté de l'ensemble des vols ; les aérodromes réservés à une clientèle d'affaires reçoivent pour leur part des subventions du FIATA. Dans les deux cas, les passagers commerciaux subventionnent la sûreté de l'aviation d'affaires.

Votre Rapporteur spécial estime qu'il serait juste de mettre en place une tarification équitable pour ce type de trafic. Il devrait au moins être soumis à la taxe d'aéroport. Une deuxième étape pourrait consister à facturer à prix réel d'éventuels services de sûreté dédiés à ce type de trafic.

b) Certaines prestations spécifiques devraient être facturées

Il n'apparaît pas non plus équitable à votre Rapporteur spécial que l'ensemble des passagers participe également au financement de dispositifs de sûreté qui ne profitent qu'à quelques uns d'entre eux : il peut s'agir, par exemple, de machines plus nombreuses pour assurer une moindre attente à la clientèle d'affaires ou d'appareils permettant le contrôle de bagages hors gabarit.

Votre Rapporteur spécial est favorable à ce que ces services soient facturés à ceux auxquels ils bénéficient et sortent du champ des dépenses prises en charge sur le produit de la taxe d'aéroport.

3.- Pour un financement public forfaitisé et limité à des prestations de base

Il est urgent de mettre un frein à la dérive des dépenses de sûreté, ce qui passe nécessairement par une responsabilisation des gestionnaires d'aéroport et par une restriction du champ des dépenses payées par l'État.

a) Seule une part des charges de sûreté doit relever du financement public

Dans la logique des observations précédentes, votre Rapporteur spécial se rallie à l'idée selon laquelle il conviendrait de définir une prestation de base, que l'on peut qualifier de « service universel », en matière de sûreté, au regard de critères comme le délai de traitement du processus pour chaque passager et chaque bagage, et au regard des pratiques moyennes constatées en France et à l'étranger pour un service comparable.

Le niveau de prise en charge sur fonds publics devrait alors être limité aux coûts d'investissements et de fonctionnement nécessaires à la mise en place de cette prestation de base. Des prestations différenciées pourraient être établies par les aéroports ou les compagnies, mais elles seraient alors financées hors concours public.

b) Vers une forfaitisation des versements publics

Au-delà, il conviendrait d'évaluer le coût d'un tel service et de limiter les versements publics à celui-ci. Un tel système inciterait fortement les aéroports à optimiser leurs investissements et la gestion du processus de sûreté, puisque tout coût supérieur à ce niveau de prise en charge leur incomberait.

Parallèlement, il serait indispensable de renforcer les contrôles et les sanctions en cas de manquements, afin d'éviter qu'une telle réforme ne conduise les aéroports à faire des économies au détriment du respect des règles de sûreté.

4.- Pour l'heure, il faut empêcher une nouvelle hausse des dépenses

Dans l'attente d'une réforme inspirée par le souci de réduire et rendre plus efficaces les dépenses publiques en matière de sûreté, votre Rapporteur spécial juge urgent de mettre au moins un terme à la dérive des dépenses. Une nouvelle augmentation de la taxe d'aéroport n'est pas acceptable. La sûreté aéroportuaire serait-elle donc le seul domaine dans lequel l'efficacité de la dépense publique ne devrait pas être améliorée ? Alors que les aéroports sont déjà suréquipés, est-il raisonnable d'accroître encore les dépenses ? La direction générale de l'aviation civile elle-même n'en a-t-elle pas conscience, lorsqu'elle retarde la sortie de l'arrêté ministériel fixant les critères de certification des appareils de contrôle, ce qui met un coup de frein, bienvenu, aux nouvelles acquisitions ?

C.- DES MOYENS INADAPTÉS AUX ENJEUX

Votre Rapporteur spécial a déjà dénoncé à de nombreuses occasions les limites du système de sûreté aéroportuaire. Ses critiques relatives au manque de formation des agents de sûreté, à l'incohérence et l'inadaptation des mesures prises et à la mauvaise appréhension des menaces terroristes demeurent parfaitement d'actualité.

Même le meilleur des processus de contrôle ne garantira un risque nul. Pourtant, des appareils de plus en plus perfectionnés et coûteux continuent à être mis sur le marché et achetés par les gestionnaires de plates-formes aéroportuaires. Ce sont maintenant les détecteurs de traces d'explosif qui se généralisent ! Votre Rapporteur spécial estime que cette course technologique est vaine, et ne profite qu'aux industriels, en petit nombre, qui occupent ce marché très lucratif.

Votre Rapporteur spécial déplore, en outre, vivement que les audits conduits par l'OACI dans le domaine de la sûreté aérienne ne soient transmis qu'aux États audités. Alors que les soixante études réalisées à travers le monde en 2004 donnent certainement une bonne idée de la qualité de la mise en œuvre des règles imposées par l'OACI et de leur efficacité, il est très regrettable que leurs principales conclusions n'en soient pas publiées. Seule la réalisation d'un audit sur une plate-forme française, ce qui n'a pas été le cas en 2004, permettrait aux autorités françaises d'avoir connaissance des conclusions de l'OACI en ce qui la concerne. Cette absence de publicité fait incontestablement peser un doute sur les résultats des audits.

V.- DES SOUTIENS À L'INDUSTRIE AÉRONAUTIQUE INJUSTEMENT CRITIQUÉS

A.- LES ENTREPRISES AÉRONAUTIQUES FRANÇAISES SONT PARMI LES PREMIÈRES MONDIALES

La France compte trois des plus grands groupes aéronautiques mondiaux, qui font de ce secteur le premier poste de l'excédent commercial national. Il induit de nombreux emplois, directs et indirects, hautement qualifiés, et repose sur un effort de recherche parmi les plus importants de tous les secteurs industriels français.

1.- La poursuite des bons résultats d'EADS, et en particulier d'Airbus

EADS a enregistré un chiffre d'affaires de 30.133 millions d'euros en 2003, quasiment identique à celui en enregistré au cours de l'exercice 2002 (29.901 millions d'euros). Les exportations ont représenté 54 % du chiffre d'affaires (hors Europe), principalement à destination de l'Amérique du Nord (27 %) et de la zone Asie-Pacifique (13 %).

VENTILATION DU CHIFFRE D'AFFAIRES D'EADS PAR BRANCHE

(en millions d'euros)

2002

2003

Variation 2003/2002

(en %)

1er semestre 2004

Airbus

19.512

19.048

- 2

10.024

Avions de transports militaires

524

934

78

234

Aéronautique (1)

3.834 (4)

3.804

- 1

1.631

Espace

2.216

2.424

9

1.090

Systèmes de défense et de sécurité (2)

4.770 (4)

5.165

8

2.119

Total (3)

29.901

30.133

0,8

14.567

(1) Cette branche comprend notamment Eurocopter, Sogerma, Socata, ATR. Depuis 2003, cette branche ne comprend plus l'activité « Avions militaires » transférée à la branche « Systèmes de défense et de sécurité ».

(2) Depuis 2003, cette nouvelle division regroupe les activités Systèmes de missiles, Défense Électronique, Avions militaires, Systèmes de défense et de télécommunications et les services associés.

(3) Total après élimination du chiffre d'affaires interbranches

(4) À périmètre constant par rapport à 2002.

Source : EADS

En 2003, Airbus a représenté 63 % du chiffre d'affaires d'EADS (contre 65 % en 2002) et les autres activités aéronautiques 13 % (comme en 2002, à périmètre constant). Cette prépondérance se retrouve au niveau du résultat d'exploitation. Airbus a en effet été, une fois encore, la branche la plus rentable, aussi bien en valeur relative qu'en valeur absolue.

RÉSULTAT D'EXPLOITATION D'EADS

(en millions d'euros)

2002

Marge opérationnelle

(en %)

2003

Marge opérationnelle

(en %)

1er semestre 2004

Marge opérationnelle

(en %)

Airbus

1.361

7

1.353

7,1

982

9,7

Avions de transports militaires

- 80

- 15,3

30

3,2

- 10

- 4,2

Aéronautique

261

4,9

217

5,7

56

3,4

Espace

- 268

- 12,1

- 400

- 16,5

- 11

- 1,0

Systèmes de défense et de sécurité

122

2,3

171

3,3

- 82

- 3,9

Total (1)

1.426

4,8

1.543

5,1

985

6,7

(1) Total après élimination du chiffre d'affaires interbranches.

Source : EADS.

EADS a enregistré en 2003 un volume de commandes de 61.150 millions d'euros, presque deux fois supérieur à celui de 2002 (31.009 millions d'euros), surpassant ainsi le volume record de 2001 (60.208 millions d'euros). Portées par le succès de la gamme Airbus à la fois dans le domaine civil (254 commandes nettes d'avions dont 34 A380), mais aussi, pour la première fois, dans le domaine militaire (A400M), les prises de commandes représentent deux fois le niveau de chiffres d'affaire de l'année 2003.

Le carnet de commandes total du groupe progresse légèrement à 179.280 millions d'euros, contre 168.339 millions d'euros en 2002. Ce niveau représente près de six années d'activité au regard du chiffre d'affaires 2003. Airbus représente 79 % de l'ensemble du carnet de commandes (141.800 millions d'euros) et les activités civiles 74 %.

Le résultat opérationnel d'EADS s'est établi à 1.543 millions d'euros en 2003 contre 1.426  millions d'euros en 2002, soit une hausse de 8 %. La marge opérationnelle reste satisfaisante et s'établit à 5,1 % en 2003. Toutes les divisions ont contribué à l'amélioration de ce résultat à l'exception des activités spatiales
(- 400 millions d'euros), pénalisées par la prise en compte des charges de restructuration d'un montant de 288 millions d'euros, effort qui a permis de supprimer les doublons existant entre les partenaires européens. Enfin, le résultat net, qui était de - 299 millions d'euros en 2002, est redevenu positif en 2003 (+ 152 millions d'euros).

Au premier semestre 2004, les résultats d'EADS ont été supérieurs aux prévisions de début d'année. Ainsi, le chiffre d'affaires a augmenté de 12 %, à 14.567 millions d'euros (13.060 millions d'euros en 2003). Pour le même semestre, le chiffre d'affaires d'Airbus augmente de 14 %, à 10.024 millions d'euros (contre 8.773 millions d'euros en 2003) en raison d'une hausse des livraisons (161 appareils pour les six premiers mois de l'année contre 149 au premier semestre 2003) et d'un meilleur « mix-produit » (proportion de gros porteurs A330/A340 plus élevée).

A contrario, les prises de commandes des six premiers mois de l'année 2004 ont fortement diminué : en repli de 69 %, à 13.458 millions d'euros, contre 43.190 millions d'euros en 2003 pour l'ensemble du groupe. En effet, sur la même période en 2003, le groupe avait enregistré d'importants contrats, tels que pour l'A400M (pour 20 milliards d'euros) et pour l'A380 (21 commandes). Au 31 juillet 2004, Airbus dispose néanmoins d'un carnet de commandes bien fourni, avec par exemple 259 commandes fermes de A330-200, dont les premiers ont été livrés en 1998, 1.743 commandes de A320, fabriqués depuis 1988, et 129 de A380, dont les premières livraisons sont prévues pour 2006.

Le résultat opérationnel d'EADS du premier semestre s'établit à 985 millions d'euros, contre 592 millions d'euros en 2003, et le résultat net à 387 millions d'euros, contre 177 millions d'euros en 2003 (+ 119 %). Pour l'ensemble de l'année 2004, EADS a relevé ses prévisions de résultat opérationnel de 1,9 milliard d'euros à 2,1 milliards d'euros. Même si le président exécutif du groupe estime que les résultats du premier semestre sont peu significatifs, du fait de la saisonnalité des activités de défense, EADS prévoit une amélioration de son activité concernant toutes ses divisions. En particulier, la crise de l'aviation commerciale semble arrivée à son terme et le rythme des commandes antérieur à 2001 devrait être dépassé dans un proche avenir. Les dirigeants du groupe estiment que l'augmentation du volume des commandes compensera le niveau élevé du dollar.

Les effectifs sont passés de 103.967 en 2002 à 109.135 au 31 décembre 2003 et 109.413 au 30 juin 2004. Cette progression provient, notamment, de la poursuite de la montée en charge du programme A380 et de certains programmes militaires tels que le NH90, le Tigre ou l'Eurofighter. On peut aussi noter qu'Eurocopter a renforcé son implantation industrielle aux États-Unis au cours de l'année passée en construisant une nouvelle usine dans le Mississippi.

Le groupe EADS se consacre principalement à ses métiers de concepteur et d'intégrateur en maîtrisant les techniques et les technologies clefs. Il fait en conséquence appel à des entreprises extérieures pour les métiers ne répondant pas à sa vocation. Fin 2003, la nouvelle stratégie d'approvisionnement harmonisé a contribué à la majeure partie des 234 millions d'euros de réduction des coûts engagée par EADS.

Le titre EADS est passé de 9,85 euros à 18,85 euros au cours de l'année 2003, soit une progression de 91 %, supérieure à celles des principaux indices boursiers (tels que le CAC 40 à Paris ou l'indice spécialisé MSCI World Aero/Defence).

2.- La bonne tenue des résultats de Snecma a permis une ouverture du capital dans des conditions satisfaisantes, et le rapprochement de Sagem

Après des exercices 2002 et 2003 marquées par les suites des attentats du 11 septembre, la situation de Snecma présente des signes d'amélioration, sous l'effet de la reprise du secteur du transport aérien et des perspectives positives d'activité d'Airbus et de Boeing.

a) Une activité soutenue

Le chiffre d'affaires de Snecma s'est élevé à 6.431 millions d'euros en 2003, contre 6.504 millions d'euros en 2002, soit une diminution de 1,1 %. La répartition de l'activité entre les deux pôles a peu évolué en 2003 : la propulsion a représenté 62 % de l'activité du groupe en 2003, et les équipements 38 %. Snecma est ainsi le deuxième motoriste européen et le quatrième mondial ; il est le premier équipementier européen. Les activités militaires ont représenté 24 % du chiffre d'affaires du groupe (19 % en 2002).

Le montant des commandes reçues en 2003 s'est élevé à 5.400 millions d'euros (à comparer à 5.235 millions d'euros et 6.723 millions d'euros pour les années 2002 et 2001). Le niveau du carnet de commandes était de 9.700 millions d'euros à la fin 2003 (contre 10.000 millions d'euros en 2002). Il est constitué à 23 % de commandes militaires essentiellement nationales. Les commandes civiles sont quant à elles destinées à 82 % à l'exportation.

Les résultats financiers du groupe pour l'exercice 2003 ont été sensiblement meilleurs que ceux enregistrés en 2002. Le résultat d'exploitation s'est ainsi établi à 476 millions d'euros (soit une marge d'exploitation de 7,4 %), contre 466 millions d'euros en 2002. Le résultat net s'est élevé à 182 millions d'euros (marge nette de 2,8 %), contre 106 millions d'euros en 2002, soit une augmentation de 70 %.

Lors du premier semestre 2004, le chiffre d'affaires du groupe, dont les effectifs s'élevaient à 39.676 personnes, a augmenté de 8,1 % à 3.274 millions d'euros (contre 3.028 millions d'euros lors de la même période en 2003). L'augmentation de l'activité est de 9,6 % pour la branche propulsion (2.163 millions d'euros) et de 6,4 % pour la branche équipements (1.192 millions d'euros). La marge d'exploitation, de 7,6 %, est stable par rapport au premier semestre 2003. En juillet dernier, son président a indiqué à votre Rapporteur spécial qu'il espérait un résultat net aussi élevé en 2004 qu'en 2003 et que les perspectives pour les deux prochaines années étaient bonnes. Depuis, il est apparu que le résultat net était de 120 millions d'euros au premier semestre, soit 64 % de plus que pour la même période de 2003. Aussi, pour l'ensemble de l'année 2004, une légère progression du chiffre d'affaires, un maintien de la marge opérationnelle et une croissance du bénéfice net sont attendus.

b) L'ouverture du capital de Snecma et son rapprochement de Sagem

Alors que l'ouverture du capital de Snecma était possible d'un point de vue législatif depuis 1993, elle n'a été effectivement envisagée qu'en 2001. Les attentats du 11 septembre ont conduit à son ajournement, dans l'attente d'une amélioration de la situation du secteur. La forte progression du résultat net du groupe en 2003 a permis de relancer le processus.

Le 3 juin 2004 a été publié le décret n° 2004-478 autorisant l'ouverture minoritaire du capital de Snecma. Le placement des titres auprès des investisseurs s'est déroulé pendant la période du 4 au 16 juin 2004. Le prix de cession a été fixé par le gouvernement à 15,70 euros pour les investisseurs institutionnels et à 15,60 euros pour le particulier. Plus de 800.000 ordres ont été reçus dans le cadre de l'offre réservée aux particuliers, correspondant à une demande de plus de 1 milliard d'euros. Le placement auprès des investisseurs institutionnels a été souscrit plus de deux fois. Les salariés de Snecma ont également répondu très favorablement à l'offre qui leur a été réservée ; plus de la moitié d'entre eux est devenue actionnaire du groupe.

L'État a retiré environ 1,45 milliard d'euros de cette opération, qui a valorisé le groupe à 4,24 milliards d'euros (soit les deux tiers de son chiffre d'affaires de 2003), et à l'issue de laquelle le capital du groupe est composé comme suit :

RÉPARTITION DU CAPITAL DE SNECMA À L'ISSUE DE SON OUVERTURE (1)

Détenteur du capital

Part détenue (en  %)

État français

62,22

Autocontrôle

1,08

Salarié du groupe

3,5

UTC

1,73

Public

31,5

dont personnes physiques

15,75

institutionnels

15,75

(1) au 18 juin 2004.

Source : ministère de l'Équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer.

La première cotation sur le marché à la bourse de Paris (Euronext) a eu lieu le 18 juin 2004. Depuis lors, sur une période de deux mois, le cours de l'action a oscillé entre 15,4 euros et 16,7 euros.

L'ouverture du capital devrait faciliter les alliances de Snecma avec des entreprises étrangères, grâce aux échanges d'actions désormais possibles. Elle lui permettra aussi de faire appel à ses actionnaires si une opportunité de croissance externe se présente, mais sa situation financière autorise pour l'heure un développement de ses produits sans augmentation de capital.

Le 29 octobre 2004, a été annoncée la fusion entre Snecma et l'électronicien Sagem, qui sera effective au 1er janvier 2005 et donnera naissance à une nouvelle entité de 10 milliards d'euros de chiffre d'affaires, dont l'État détiendra 30 % à 35 % du capital, ce qui entraîne de facto la privatisation du motoriste. L'opération se fera par apport des titres de Snecma à Sagem, avec compensation de l'État en liquide. Dans la mesure où les deux groupes ont des spécialités différentes (Sagem est spécialisé dans l'avionique, les petits drones et les systèmes de communication, la téléphonie mobile, les télécopieurs et les écrans plats), cette fusion repose sur une complémentarité de savoir-faire, de technologies et d'hommes, les puces occupant une place de plus en plus importante dans les moteurs d'avion. En l'absence de doublons ou de concurrence entre les deux groupes, la fusion ne devrait conduire à aucun licenciement.

SAGEM ET SNECMA AVANT LEUR RAPPROCHEMENT

(en millions d'euros)

Sagem

Snecma

Chiffre d'affaires

3.180

6.431

Résultat net

119,7

182

Effectifs

14.034

39.214

Source : Sagem et Snecma.

LE NOUVEAU GROUPE

Chiffre d'affaires

graphique

Actionnariat

graphique
Source : Sagem et Snecma.

Votre Rapporteur spécial s'interroge sur la pertinence industrielle de ce rapprochement, entre deux groupes très dissemblables, et dont il n'était pas question voici seulement quelques semaines.

3.- Les activités aéronautiques civiles du groupe Dassault

Principal constructeur européen d'avions d'affaires, la société Dassault Aviation a vendu 13 % du parc mondial de cette catégorie actuellement en exploitation, qui compte 23.000 avions (dont 72 % en Amérique du Nord et 10 % en Europe).

Depuis l'arrêt de la fabrication du Falcon 100 en 1988, la gamme de Dassault Aviation est composée des triréacteurs Falcon 50 et Falcon 900 et du biréacteur Falcon 2000, auxquels viendra s'ajouter le futur F7X dont le premier vol est prévu en 2005. Ces avions occupent les segments moyen et large de l'aviation d'affaires à réaction. Les concurrents directs de Dassault Aviation sont le groupe canadien Bombardier et les américains Gulfstream et Cessna.

En 2003, les livraisons/ventes d'avions d'affaires ont baissé globalement de 16 %, avec 729 unités vendues, contre 865 en 2002. La part de Dassault, avec 49 unités livrées, représente moins de 7 % en volume, mais plus de 8 % en valeur catalogue, et si l'on se concentre sur le secteur ciblé par les Falcon (jets d'affaires moyens et larges), les jets de Dassault représentent plus de 20 % de part de marché, inférieure à celle de Gulfstream, mais légèrement supérieure à celles de Bombardier, Cessna ou Raytheon. Si on considère les six dernières années, les Falcon ont représenté, sur les segments qu'ils couvrent, environ 20 % des livraisons en nombre et 36 % en valeur catalogue. Dassault Aviation a réalisé en 2003 un chiffre d'affaires de 3.298 millions d'euros dont 51 % (soit 1.692 millions d'euros) liés à ses activités civiles ; cette part était de 65 % (soit 2.236 millions d'euros) en 2002. Pour les années à venir les prévisions sont en croissance. Dassault devrait ainsi avoir une part de marché, tous segments confondus, de plus de 16 % en valeur sur les années 2004 à 2013.

B.- DES SOUTIENS INJUSTEMENT CRITIQUÉS

La polémique entre les États-Unis et l'Europe sur l'octroi de soutiens publics aux industries aéronautiques n'est pas nouvelle. L'accord bilatéral conclu en juillet 1992 en matière de subventions semblait offrir un cadre satisfaisant : relatif aux avions de plus de cent places et conclu à une période où Boeing dominait largement le marché de l'aviation commerciale, il autorise les gouvernements à avancer directement jusqu'à 33 % des frais de recherche et développement pour l'aéronautique, sous forme de prêts remboursables selon un rythme préétabli ; les aides indirectes sont limitées à 3 % du chiffre d'affaires annuel de l'industrie aéronautique civile résultant de la vente des produits couverts par l'accord, et de 4 % du chiffre d'affaires annuel correspondant d'une seule entreprise.

Cet accord n'a pas empêché la mise en place aux États-Unis d'un système fiscal appelé « foreign sales corporation » qui a été condamné dans le cadre de l'Organisation mondiale du commerce (OMC). Il aurait notamment permis à Boeing de s'affranchir de 291 millions de dollars d'impôt fédéral en 2000. L'Europe a obtenu de pouvoir appliquer des mesures de rétorsion à hauteur de 4 milliards d'euros par an ; elles ont été mises en œuvre le 1er mars 2004 sous forme de droits de douane à hauteur de 5 % sur une liste de produits américains importés dans l'Union européenne. Ces droits augmentent de 1 % chaque mois, jusqu'à atteindre 17 % au 1er mars 2005, à moins que le gouvernement américain mette en œuvre une nouvelle législation conforme aux règles internationales.

1.- Des aides américaines massives aux industries aéronautiques, qui n'empêchent pas la contestation des soutiens européens

Pour ce qui est des aides directes, il n'existait pas de contentieux entre les États-Unis et l'Europe, jusque très récemment. S'il est vrai que le gouvernement américain a posé de nombreuses questions sur la notification qui lui avait été faite des avances remboursables accordées à Airbus pour le programme A380, il n'a pas recouru aux procédures prévues tant dans l'accord bilatéral de 1992 qu'au titre du règlement des différends de l'OMC.

Par contre le lancement du nouveau programme de Boeing, le B7E7, a relancé la polémique. L'industriel américain, dûment relayé par son gouvernement, réclame la révision de l'accord bilatéral de 1992. Il estime que les aides accordées au constructeur européen sont injustes et refuse l'argument avancé par les Européens selon lequel les contrats de défense sont une forme de subvention. Cette demande, qui peut être considérée comme conjoncturelle, a cependant un objectif clairement affiché, celui de ne pas permettre aux États européens d'accorder des avances remboursables au futur programme d'Airbus qui devrait concurrencer le B7E7.

Votre Rapporteur spécial juge cette position parfaitement infondée.

Le système américain d'aides massives à la recherche, dont une partie passe par le budget de la défense, profitera évidemment au programme B7E7. En particulier, en 2005, la NASA devrait attribuer près de 642 millions de dollars à des industriels, presque exclusivement américains, au titre des crédits technologiques aéronautiques. La Federal aviation administration (FAA) avait un budget de 119,4 millions de dollars en 2004 pour la recherche et le développement et le Department of defence a accordé, en 2002, 643 millions de dollars de crédits en faveur de la recherche et des développements exploratoires dans l'aéronautique, auxquels s'ajoutent quelque 4,88 milliards de dollars pour les autres développements et activités de support. La même année, Boeing a bénéficié de 19,6 milliards de dollars de contrats fédéraux, dont 14 % pour des appareils civils. Ces contrats représentent 36,2 % de son chiffre d'affaires. Ces montants colossaux d'aides directes ou indirectes sont absolument sans commune mesure avec les dispositifs français et européens (voir infra).

D'autre part, Boeing bénéficie, notamment via l'État de Washington, de subventions à la production interdites par l'accord de 1992. Enfin, en s'associant à l'industrie italienne et à l'industrie japonaise, le programme de Boeing bénéficiera des avances remboursables que les gouvernements japonais et italien ont décidé d'accorder à leur industrie. Une étude de l'université de l'État de New York, publiée en juillet 2004, a fait état du montant des subventions dont pourrait bénéficier Boeing pour le lancement du B7E7. Pour un coût total du programme estimé à 13.394 millions de dollars, Boeing financerait 31,3 % du projet (4.200 millions de dollars) et ses partenaires industriels 23 % (3.100 millions de dollars). Le solde serait constitué de subventions diverses provenant notamment de l'État de Washington (3.716 millions de dollars), l'État du Kansas (200 millions de dollars), le Japon (1.588 millions de dollars) et l'Italie (590 millions de dollars).

2.- Une contestation qui risque de se retourner contre son initiateur

Il semblerait que la demande américaine vise à la fois à préparer l'avenir et à consolider les aides déjà reçues, en particulier les subventions contraires à l'accord de 1992 ainsi accordées au programme B7E7. Le 16 septembre dernier, la Commission européenne s'est montrée ferme sur ce sujet. Elle a mis en garde les États-Unis contre la tentation de porter le différend devant l'OMC, qui risque fort de se retourner contre Boeing, et a souligné qu'une révision de l'accord de 1992 devrait conduire à exiger plus de transparence des entreprises bénéficiaires de subventions. Comme le président exécutif d'EADS l'a expliqué à votre Rapporteur spécial, les aides directes bénéficiant à Airbus sont parfaitement identifiables et contrôlables, ce qui est loin d'être le cas des soutiens accordés à Boeing.

Votre Rapporteur spécial souhaite aussi mettre l'accent sur le fait que certaines industries aéronautiques « européennes » intègrent à leurs productions une partie importante d'équipements fabriqués aux États-Unis, où elles favorisent ainsi de la création de valeur ajoutée et d'emplois. Ainsi, Boeing achète une unité produite en Europe quand EADS en achète quatre produites aux États-Unis, et induit entre 100 et 120.000 emplois. C'est la raison pour laquelle les équipementiers américains sont très attachés à maintenir leurs relations commerciales avec Airbus et ne s'attaquent pas aux systèmes d'aides européens. Inversement, le tiers environ de la valeur ajoutée d'un Boeing est produit au Japon, et ne contribue guère à la croissance américaine.

Finalement, l'offensive conduite par Boeing et relayée par le Gouvernement américain n'est pas fondée, et pourrait faire plus de tort à l'activité aéronautique américaine qu'aux industries européennes.

Elle est néanmoins à prendre d'autant plus au sérieux que l'accord communautaire relatif à l'encadrement communautaire des aides d'État à la recherche et au développement doit être renégocié avant le 31 décembre 2005, au sein d'une Europe élargie dont les nouveaux membres ne participent pas à EADS et qui sont parfois sensibles aux arguments américains.

C.- DES DISPOSITIFS D'AIDE À AMÉLIORER

Paradoxalement, les attaques américaines visent un système d'aide qui est en fait nettement moins doté et efficace que ceux qui sont mis en œuvre aux États-Unis. Son existence est largement justifiée par l'importance du secteur aéronautique dans l'industrie française, mais les montants demeurent limités au regard de l'ampleur des investissements consentis par les entreprises.

1.- Des imperfections techniques à corriger

Comme votre Rapporteur spécial l'a fait à plusieurs reprises, le référé de la Cour des comptes sur les crédits d'avances remboursables à l'aéronautique civile du 16 juillet 2004 critique le traitement juridique et comptable des avances remboursables, et en particulier le fait que « l'avance remboursable est formellement traitée dans la procédure budgétaire comme une subvention, alors même qu'elle n'en a pas le caractère définitif et que l'intervention de l'État aboutit à la constitution d'une créance qui résulte d'une convention négociée avec le débiteur. » La situation actuelle dans laquelle les crédits sont inscrits sur le budget des transports puis subdélégués à la direction générale de l'armement du ministère de la défense est néanmoins un progrès par rapport au système antérieur dans lequel les crédits étaient transférés en cours de gestion du budget des transports vers celui de la défense.

L'application de la loi organique relative aux lois de finances devrait consacrer, dans les comptes publics, le caractère de créances exigibles de ces avances. Une harmonisation du traitement comptable des avances par les entreprises bénéficiaires serait nécessaire pour qu'elles soient toujours traitées comme des dettes financières.

Après avoir souligné la baisse du niveau des concours à la construction aéronautique au cours des douze dernières années (en valeur constante, elles sont passées de 439 millions d'euros d'autorisations de programme en 1990 à 328 millions d'euros en 2002 et de 412 millions d'euros d'autorisations de programme à 266 millions d'euros, alors que les années 2001 et 2002 ont été marquées par l'amorce d'un mouvement de hausse), la Cour observe que l'incidence de cette réduction de crédits, qui a affecté particulièrement les avances remboursables, a été atténuée par deux évolutions : la restructuration et la concentration des entreprises du secteur, qui ont favorisé l'autofinancement de la recherche, et le développement de programmes européens drainant des concours publics en provenance d'autres pays.

Le référé déplore que « l'information sur les remboursements donnée par les seuls documents budgétaires demeure encore sommaire, alors même que leur niveau, devenu significatif, est une justification du bien fondé du système ». Il présente un intéressant tableau (voir infra) qui compare, année après année, le total des crédits de paiement ouverts aux remboursements exigibles : entre 1997 et 2001, les remboursements ont été chaque année plus élevés que les crédits de paiements ouverts.

COMPARAISON ENTRE LES MONTANTS DES CRÉDITS DE PAIEMENTS ET LES REMBOURSEMENTS D'AVANCES DEPUIS 1990

(en millions d'euros)

Année

Indice INSEE

Total des crédits de paiement

Remboursements (exigibles)

Courant

Actualisé

Courant

Actualisé

1990

1,22

412

502

218

266

1991

1,18

428

505

182

215

1992

1,15

351

402

277

318

1993

1,13

373

421

222

251

1994

1,11

327

363

186

206

1995

1,09

361

395

173

189

1996

1,07

273

293

178

191

1997

1,06

220

234

257

273

1998

1,05

221

233

343

361

1999

1,05

218

228

284

298

2000

1,03

216

223

230

237

2001

1,01

242

245

252

255

2002

1,00

266

266

175

175

Totaux

3.907

4.310

2.976

3.234

Moyenne sur 1990-2002

248,8

Variation annuelle moyenne

- 0,7

Source : Cour des comptes.

Pour améliorer l'information du Parlement sur ce point, la Cour estime qu'il serait pertinent de constituer, dans le cadre de l'application de la loi organique relative aux lois de finances, un programme propre aux avances remboursables à l'aéronautique. Comme votre Rapporteur spécial l'a indiqué supra, dans la maquette présentée en Conseil des ministres le 16 juin dernier, l'ensemble des crédits de recherche et développement dans le domaine de l'aéronautique civile forme pourtant seulement une action du programme « Recherche dans le domaine des transports, de l'équipement et de l'habitat » qui fait partie de la mission interministérielle « Recherche et enseignement supérieur ».

Tout en observant une rationalisation positive de l'ensemble des procédures en matière d'instruction, de conclusion et d'exécution des conventions, la Cour met en évidence une série d'imperfections : absence de rapprochement ex post entre la réalité du coût de développement d'un projet et son évaluation initiale, absence de vérification des états et des échéanciers de ventes des équipements aidés, gestion passive des conventions en cours, qui conduit à ne pas apurer les plus anciennes, superposition de crédits d'études et d'avances remboursables pour un même équipement, sans état récapitulatif. Finalement, l'État « n'est pas en situation d'évaluer les retombées positives des aides à la recherche et des avances remboursables sur l'ensemble du secteur des entreprises aéronautiques ».

Dans un souci de transparence, la Cour s'étonne aussi « de ce que la procédure d'attribution n'implique pas, préalablement à la décision discrétionnaire du directeur des programmes aéronautiques civils, la saisine pour avis d'une instance délibérante formée d'experts et de fonctionnaires ».

La Cour évalue à 8.728 millions d'euros actuels le cumul des montants mandatés entre 1970 et 2002, toutes conventions confondues ; 7.265 millions d'euros actuels ont été mandatés sur des conventions non terminées et 4.531 millions d'euros actuels sont exigibles.

En ce qui concerne la présentation budgétaire, votre Rapporteur spécial estime que les avances remboursables et les recettes issues de leur remboursement, devraient figurer, en application de la loi organique relative aux lois de finances, sur un compte de concours financiers. En effet, les avances sont en fait des prêts sous condition, avec des clauses d'intéressement, et en aucun cas des subventions à proprement parler. Cette solution conduirait nécessairement à la création d'une mission consacrée aux aides à l'industrie aéronautique. Son principal inconvénient réside dans la publicité qu'elle donnerait à ces aides : positive pour l'information du Parlement, elle pourrait être utilisée par les adversaires de ce système d'aide. Il faut néanmoins reconnaître que ceux-ci sont déjà parfaitement informés et que ce système d'aide directe est, déjà actuellement, nettement plus transparent que celui des aides indirectes utilisées hors de l'Union européenne.

2.- Des soutiens à la recherche aéronautique française d'un montant trop faible

Parallèlement à ses défauts techniques, les soutiens français à la recherche apparaissent bien limités, au regard des investissements nécessaires. Ils ne sont complétés que de manière marginale par les aides communautaires.

a) Des dotations budgétaires nationales insuffisantes

Les crédits du chapitre 53-22 de la section des Transports et de la sécurité routière ne sont consacrés qu'à hauteur de 20 à 25 % au financement de la recherche amont en aéronautique civile. Si les autorisations de programme sont stables à structure constante entre 2004 et 2005, les crédits de paiement sont en recul de 16 %, passant de 60,7 millions d'euros à 51 millions d'euros. Votre Rapporteur spécial met en garde le Gouvernement contre le risque que réapparaisse une crise des crédits de paiements, telle celle traversée en fin de gestion 2003.

ÉVOLUTION DES CRÉDITS OUVERTS POUR LA RECHERCHE AÉRONAUTIQUE SUR LE BUDGET DU MINISTÈRE DES TRANSPORTS (1)

(en millions d'euros)

2000

2001

2002

2003

2004

Projet pour 2005

Dotations votées pour les soutiens à la recherche aéronautique (en équivalent hors taxes)

95,6

76,5

44,6

48,8

58,0

59,0 (2)

(1) en autorisations de programme votées en loi de finances initiale.

(2) dont 1 million d'euros destinés à des travaux de recherche spécifiques à l'aviation légère, auparavant inscrits avec des crédits destinés à des avances remboursables sur l'article 84 ; la dotation est donc stable à 58 millions d'euros à structure constante.

Source : direction générale de l'aviation civile.

Malgré l'abandon, en 2003, de l'assujettissement à la TVA des soutiens à la recherche aéronautique, qui a conduit à une progression de près de 20 % des moyens correspondants, la tendance à la baisse des moyens de soutien à la recherche aéronautique civile est incontestable. Votre Rapporteur spécial estime, après en avoir discuté avec les dirigeants des entreprises du secteur, qu'une enveloppe annuelle de 100 millions d'euros serait absolument nécessaire au soutien de ce domaine de recherche.

Environ le quart de ces crédits est destiné à l'Office national d'études et de recherches aérospatiales (ONERA). Celui-ci conduit, en liaison étroite avec les pouvoirs publics et les industriels concernés, un grand nombre de recherches de base, de recherches appliquées et d'études techniques concernant l'aéronautique civile et militaire, les missiles stratégiques et tactiques, l'espace militaire et civil et les systèmes militaires divers. La production totale de l'ONERA s'est élevée à 175 millions d'euros hors taxes en 2003, en hausse de 5,2 % par rapport à 2002. L'effectif qui n'avait pas cessé de décroître et était passé de plus de 2.500 personnes en 1991 à 1.736 personnes équivalent temps plein en moyenne sur l'année 2001, est désormais stabilisé autour de 1.750. Le financement de l'ONERA est assuré d'une part par des contrats, d'autre part par une subvention de fonctionnement accordée par le ministère de la défense. La part des contrats a atteint 61 % en 2003, contre 58,3 % en 2002. Le ministère des transports finance la réalisation par l'office de programmes de recherche amont dans le champ de la construction aéronautique civile. Les financements notifiés à ce titre ont atteint, en 2003, 15,9 millions d'euros. Pour 2004, la prévision s'établit entre 13 et 18 millions d'euros en fonction des hypothèses de l'exécution budgétaire. Le ministère des transports a également alloué à l'ONERA en 2003 une subvention d'investissement de 2,18 millions d'euros pour financer ses moyens d'essais ; elle devrait s'établir à 2,8 millions d'euros en 2004.

b) Des perspectives européennes à conforter

L'industrie de la construction aéronautique représente un enjeu majeur à l'échelle de l'Europe, tant en raison de sa contribution à l'emploi, au commerce extérieur et au progrès technologique pour l'ensemble de l'Union que des moyens nécessaires à son développement qui sont hors de portée d'un seul État.

La recherche aéronautique a ainsi été prise en compte prioritairement dans les programmes cadres européens de recherche et développement technologiques (PCRD) à partir de 1989 pour des montants respectifs de 35, 61 et 245 millions d'euros. Le 5e PCRD (1998-2002) a vu une augmentation notable du financement de la recherche aéronautique au travers d'une action-clé spécifique « Nouvelles perspectives pour l'aéronautique » dotée de 700 millions d'euros. Les actions de recherche au profit de l'aéronautique que permettent ces programmes apportent une contribution désormais essentielle au développement des compétences technologiques européennes, en complémentarité des politiques menées par les États.

Le 6e PCRD a été lancé en fin d'année 2002, l'aéronautique, associée à l'espace, étant retenue comme l'une des huit thématiques prioritaires. Le budget global réservé à cette thématique s'élève à 1.075 millions d'euros dont 840 pour l'aéronautique. Un premier appel à propositions doté d'un budget de 259 millions d'euros s'est conclu en mars 2003, et un deuxième, d'un budget de 300 millions d'euros, en mars 2004. La France, en particulier, ne peut que se réjouir des premiers résultats de ces appels, qui confirment la forte participation et le succès des candidats français (respectivement 28 % des contributions demandées pour le premier appel et 25 % pour le second appel), en particulier des industriels du secteur.

L'importance accordée, ces dernières années, à la recherche aéronautique par la Commission européenne ne suffit toutefois pas à garantir que l'effort communautaire en sa faveur sera maintenu dans le futur programme cadre, qui doit couvrir la période 2007-2011. La Commission ayant fait connaître au mois de juin ses orientations pour le 7e PCRD, pour lequel elle propose de doubler le budget de recherche de l'Union, et devrait faire des propositions au début de l'année 2005, il apparaît essentiel de veiller, dans les discussions à venir, à ce que des ressources suffisantes soient consacrées à la recherche aéronautique en Europe.

3.- Rendre possible un remboursement anticipé des avances pour accroître le montant des subventions à la recherche

Face à ces constats, votre Rapporteur spécial souhaiterait dynamiser le système des avances remboursables, au profit des subventions à la recherche.

a) La proposition de votre Rapporteur spécial

Depuis plusieurs années, le montant des avances remboursables versées chaque année équivaut à celui des remboursements. Il y a donc un équilibre dans ce système.

Votre Rapporteur spécial observe que les avances remboursables présentent un double aspect : elles constituent une forme de prêt consenti par l'État aux entreprises aéronautiques, mais elles ne sont remboursées qu'en cas de succès du programme. L'État prend donc à sa charge le risque de l'échec, pour la partie financée par l'avance remboursable.

En application de la convention qui la lie à l'État, l'entreprise commence à rembourser l'avance lorsque le programme a atteint un certain niveau de rentabilité, c'est-à-dire à partir d'un certain nombre d'appareils vendus par exemple. Une fois le remboursement effectué, l'entreprise verse à l'État une redevance qui correspond à un pourcentage du chiffre d'affaires (1 %) généré par les ventes du produit, et ce jusqu'à la fin de la durée de la convention.

Seul le calcul du taux d'intérêt a posteriori des avances permet de mesurer le coût réel, pour l'État comme pour l'entreprise bénéficiaire, du dispositif. À la demande de votre Rapporteur spécial, la direction générale de l'aviation civile a effectué ce calcul pour certains programmes. Il apparaît que ce taux est parfois supérieur aux taux d'intérêt de marché. Par exemple, le taux actuariel brut de l'avance remboursable perçue par Airbus pour l'A320 s'établit à 3,3 % au 30 juin 2004 et devrait atteindre 3,5 % en fin de programme. Le taux actuariel de l'avance remboursable accordé pour l'A380 est estimé à 5,9 % en fin de programme. Même s'ils doivent être pondérés par le risque pris en charge par l'État, de tels taux montrent que l'avantage économique accordé aux entreprises aéronautiques est souvent un coût, et non une aide.

C'est justement à cause de ce coût que la société Dassault a décliné l'offre d'avance remboursable de l'État, préférant financer son projet de développement du Falcon F7X sur sa propre trésorerie, alors que ses sous-traitants ont demandé à bénéficier de soutiens par avances remboursables. Interrogé par votre Rapporteur spécial, le président-directeur général de la société Dassault Aviation a expliqué que le système des avances était intéressant soit lorsque le projet était risqué, soit lorsque l'entreprise rencontre des difficultés de financement, parce qu'elle est très endettée par exemple. Dans la mesure où son entreprise mène des programmes aux risques limités (leur durée d'amortissement sera plus ou moins longue) et où elle dispose de moyens financiers propres et d'une capacité d'emprunt, elle n'a pas besoin de recourir au système des avances remboursables.

Si le système n'est pas revu, dans une période de taux d'intérêts bas, il risque de n'être plus utilisé que pour les projets les plus risqués, pour lesquels l'aide de l'État est plus cruciale, mais qui pourraient coûter cher au contribuable. C'est pourquoi votre Rapporteur spécial estime qu'il serait nécessaire d'étudier la possibilité de renégocier les conventions en cours pour accélérer le rythme des remboursements.

Les entreprises seraient ainsi plus rapidement dégagées des obligations de la convention, tandis que l'État enregistrerait des recettes supplémentaires. Votre Rapporteur spécial est d'avis que la moitié de ces recettes pourrait être utilisée à la réduction du déficit public, et que l'autre moitié pourrait être affectée à la dotation en faveur des subventions à la recherche aéronautique. Dans la mesure où les remboursements sont de l'ordre de 200 millions d'euros par an, il suffirait d'accroître leur montant d'un quart pour porter les dotations à la recherche au-delà des 100 millions d'euros qui seraient nécessaires.

b) Une proposition bien accueillie par les entreprises

Votre Rapporteur spécial a présenté cette proposition aux entreprises aéronautiques françaises. Leurs dirigeants lui ont exprimé leur intérêt.

Le président-directeur général de Dassault Aviation est d'autant plus favorable à cette possibilité de renégociation qu'il tente déjà d'obtenir une modification d'une convention qui prévoit le paiement d'une redevance sur un produit dont le succès est en grande partie dû à des améliorations qui ont été financées après la fin du versement par l'État de l'avance remboursable. Il estime donc que celui-ci bénéficie d'un effet de rente indu.

Le président de EADS est lui aussi partisan d'ouvrir la possibilité d'un rachat des avances remboursables. Comme son groupe est le premier bénéficiaire de ce dispositif, son avis est important.

Quant aux dirigeants de Snecma, ils y sont favorables en théorie, mais pensent que ces remboursements anticipés ne trouveraient pas à s'appliquer aux conventions qu'ils ont signées. Ils jugent que leurs programmes sont soit trop récents, soit trop risqués, ou que le remboursement anticipé pèserait trop lourd dans les charges d'exploitation de leur entreprise.

c) Les réticences du ministère chargé des transports

Le ministère estime que, cette possibilité n'étant actuellement pas prévue dans les conventions, la négociation d'un remboursement anticipé en cours d'exécution de la convention exposerait à des risques de contentieux en raison des conditions strictes de cette réglementation.

Ainsi, s'agissant de programmes d'aéronefs de plus de cent places, l'accord de juillet 1992 conclu entre l'Europe et les États-Unis interdit de revenir en cours de programmes sur les clauses de remboursement définies à l'origine, et de les modifier dans un sens qui serait favorable à l'entreprise. Or, le simple fait de procéder à un remboursement anticipé accepté par l'entreprise serait d'emblée apprécié comme un avantage accordé à celle-ci et serait donc interprété comme contraire à l'accord.

Votre Rapporteur spécial remarque, d'une part, que cet accord ne portant que sur les aéronefs de plus de cent places, il n'empêche pas d'envisager de conclure des avenants aux conventions portant sur les programmes d'aviation d'affaires. D'autre part, si cet argument vaut pour les conventions déjà signées, il ne s'oppose pas à l'introduction d'une clause de remboursement anticipé dans les futures conventions.

Par ailleurs, le ministère reconnaît que la réglementation européenne ne s'oppose pas au principe d'une renégociation des clauses de remboursement. Il objecte qu'elle obligerait cependant, lorsque les soutiens ont fait au préalable l'objet de l'accord de la Commission européenne, à solliciter à nouveau son aval pour toute modification du schéma initial. Or la Commission pourrait contester les aménagements qui seraient décidés sur des bases trop favorables à l'entreprise, en tant qu'ils ne respecteraient pas les règles de concurrence.

Votre Rapporteur spécial observe, en outre, que le courrier qu'il avait adressé au ministre en charge des finances pour lui présenter sa proposition est resté sans réponse à ce jour.

EXAMEN EN COMMISSION

Au cours de sa séance du 26 octobre, votre Commission a examiné, les crédits des Transports aériens et du budget annexe de l'aviation civile.

Votre Rapporteur spécial a tout d'abord rappelé que ces crédits étaient répartis entre le budget annexe de l'aviation civile, deux sections du budget général, et le fond d'intervention pour les aéroports et le transport aérien (FIATA) dont la suppression a été votée en première partie de la loi de finances et dont les moyens figureront désormais aussi sur le budget général. La maquette proposée par le Gouvernement pour présenter les crédits en application de la loi organique relative aux lois de finances témoigne d'un souci de clarification. Les indicateurs proposés couvrent uniquement les crédits du budget général et apparaissent très hétérogènes. Si certains indicateurs portant sur Météo France, relatifs à la fiabilité des prévisions à plus ou moins long terme notamment, sont très pertinents, d'autres mesurent davantage l'activité ou les moyens des services que l'efficacité de leurs actions. Le rapport présentera quelques propositions d'indicateurs plus pertinents. Mais la maquette traduit un réel effort d'application de la LOLF.

La stratégie ministérielle de réforme vise à réorganiser la direction générale de l'aviation civile pour que ses directions correspondent aux différents programmes de la mission « Transports aériens ». À compter du 1er janvier 2005, elle comportera un pôle régalien, un pôle chargé de la surveillance et de la certification, et un pôle regroupant la navigation aérienne et la formation aéronautique. À terme, cette administration a vocation à s'intégrer dans une grande agence européenne chargée de l'optimisation de la circulation aérienne.

Si les recettes du budget annexe de l'aviation civile augmentent de 2,5 %, elles ne nécessiteront pas d'augmentation de la taxe d'aviation civile et devraient même permettre une baisse du taux des redevances, qui sera fixé en fin d'année. La hausse des recettes repose sur l'hypothèse d'une augmentation du trafic modérée et sur une quotité de répartition de la taxe d'aviation civile plus favorable au budget annexe.

Le rapprochement entre le produit des redevances et l'ensemble des coûts qu'elles sont censées couvrir d'une part, et entre la taxe d'aviation civile et les missions qu'elle doit financer d'autre part, montre qu'il n'y a pas une adéquation parfaite. Une partie non négligeable de l'augmentation des dépenses du budget annexe résulte de la réintégration de la direction des opérations aériennes d'Aéroports de Paris, en prévision du changement de son statut. Les dépenses de personnels devraient progresser de 4,73 %, les deux tiers de cette hausse étant la conséquence de la mise en œuvre du protocole du 17 mars 2004 qui prévoit un nombre de création d'emplois particulièrement élevé. Pour ce qui est de la section des opérations en capital, la dette est stable et le taux d'auto-financement correct.

La budgétisation des actions du FIATA est aussi l'occasion de rattacher aux crédits de l'outre-mer la dotation de 31 millions d'euros destinée à la continuité territoriale. L'évolution la plus importante concerne les subventions aux dessertes aériennes réalisées dans l'intérêt de l'aménagement du territoire : leur niveau est réduit de 23 %, mais l'importance des reports prévus entre 2004 et 2005 devrait les porter à hauteur de 28 millions d'euros, soit un montant nettement supérieur aux crédits effectivement consommés en 2004. La disparition de la compagnie Air Littoral a contribué à la sous-exécution de ces crédits.

Les attaques de Boeing contre les avances remboursables accordées à l'aéronautique française interviennent à quelques mois de la renégociation de l'accord communautaire sur les aides d'État à la recherche et au développement. Elles remettent en cause la situation créée par l'accord de 1992 entre les États-Unis et l'Union européenne. Le calcul des taux d'intérêt actuariels a posteriori montre pourtant que les avances remboursables ne constituent pas un dispositif particulièrement favorable aux entreprises. Ces avances ne peuvent être considérées comme à l'origine du succès de ces programmes ; elles limitent seulement les pertes financières de l'entreprise en cas d'échec. La baisse des enveloppes prévues pour les avances remboursables est liée à l'avancement des programmes. L'encours de prêt dépasse 7 milliards d'euros. Votre Rapporteur spécial s'est dit favorable à l'accélération du rythme des remboursements et à la réutilisation d'une partie de ces recettes en faveur des subventions à la recherche. Les entreprises du secteur, qu'il a interrogées, y sont favorables, mais le Gouvernement n'a pas répondu à cette proposition.

Les dotations à Météo France augmenteront de 1,37 %. L'établissement public développe les services marchands et a des résultats qualitatifs très honorables. Il s'autofinance à hauteur d'environ 25 %, mais commence à subir la concurrence d'entreprises étrangères, ou d'entreprises françaises qui lui achètent les données brutes.

M. Louis Giscard d'Estaing a approuvé le rattachement de la dotation de continuité territoriale aux crédits de l'outre-mer et a demandé si, dans la même logique, les subventions aux dessertes dans l'intérêt de l'aménagement du territoire ne devraient pas être rattachées à la mission consacrée à l'aménagement du territoire.

Votre Rapporteur spécial s'est dit favorable à cette proposition et a souligné que l'intitulé de « régulation économique » était particulièrement inadapté. La direction générale de l'aviation civile a visiblement rencontré beaucoup de difficultés pour élaborer des indicateurs sur cet objectif. Il conviendrait d'utiliser un modèle du type « horaires-tarifs-temps » pour évaluer le coût de l'économie de temps qui devrait être rapporté au nombre de passagers. Le taux de remplissage des lignes subventionnées constitue aussi une information utile. Ces subventions représentent des montants limités pour l'État, mais ils sont abondés par les collectivités locales et les chambres de commerce. Faire gérer la participation de l'État par la Délégation à l'aménagement du territoire et à l'action régionale (DATAR) semble pertinent, mais la même logique devrait être suivie pour les subventions aux autres modes de transport, à commencer par le train.

M. Michel Bouvard a ajouté qu'il serait utile que ces différentes politiques de subventionnement soient dotées des mêmes indicateurs, afin que des comparaisons soient possibles. L'idée d'utiliser, en faveur de la recherche, le surplus de remboursement au titre des avances semble intéressante.

Votre Rapporteur spécial a précisé qu'il avait écrit au ministre des Finances pour lui proposer cette idée. Si l'accord de 1992 interdit de modifier les conventions en cours, les conventions futures pourraient contenir des clauses permettant les remboursements anticipés. En 2005, les remboursements devraient atteindre 205 millions d'euros pour 216 millions d'euros de dépenses au titre des avances. La Cour des comptes vient de terminer un contrôle sur ces avances.

La Commission a adopté les crédits des Transports aériens et du budget annexe de l'aviation civile et vous demande d'émettre un vote favorable à leur adoption.

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N° 1863-annexe 24 - Rapport spécial au nom de la commission des finances sur le projet de loi de finances pour 2005 : Transports aériens (M. Charles de Courson)

1 () par la note du 3 février 2003.

2 () par le décret n° 2003-226 du 14 mars 2003.

3 () Un arrêté en date du 31 octobre 2003 a opéré ce transfert. Ces crédits correspondent aux produits des redevances perçues en 2003 par le ministère de la défense pour le compte de la direction générale de l'aviation civile, au titre d'un marché d'études relatif aux équipements et aux rechanges du supersonique Concorde.

4 () Le mécanisme correcteur consiste à mesurer l'écart, pour une année n, entre les recettes collectées et les coûts réels de l'assiette des recettes, et à reporter cet écart en n+2.

5 () 21,85 millions d'euros sont dus au titre de la taxe d'aviation civile, dont 8,93 millions d'euros par AOM Air Liberté, 7,1 millions d'euros par Air Littoral, 2,2 millions d'euros par Euralair Horizons et 1,3 million d'euros par Aéris ; la dette au titre de la RSTCA est de près de 24 millions d'euros, dont AOM Air Liberté est débiteur pour moitié, près de 8 millions d'euros étant dus par Air Littoral, 1,45 million d'euros par Aéris et 0,9 million d'euros par Euralair Horizons.

6 (2) Arrêtés en date du 17 avril 2003 (J.O. du 23 avril 2003).

7 () Cour des Comptes, L'exécution des loi de finances pour l'année 2003, rapport sur les résultats et la gestion budgétaire, juin 2004, pp. 166-168.

8 () Voir son rapport spécial sur le projet de budget des transports aériens pour 2004 (Assemblée nationale, XXème législature, n° 1110 annexe 24), pp. 107-120.

9 () Le décret d'avance n° 2004-544 du 14 juin 2004 a été gagé par le décret d'annulation n° 2004-543 du même jour.

10 () Loi n° 93-1352 du 30 décembre 1993.

11 () Ce transfert est prévu par l'article 20 du décret n° 93-861 du 18 juin 1993 portant création de l'établissement public Météo-France.

12 () Voir le commentaire de M. Gilles Carrez, Rapporteur général, sur l'article 38 du projet de loi de finances pour 2005.

13 () Voir le commentaire de M. Gilles Carrez, Rapporteur général, sur l'article 40 du projet de loi de finances pour 2005.

14 () Loi de finances pour 2004 (n° 2003-1311 du 30 décembre 2003).

15 () Les recettes prises en compte ici sont celles des serveurs kiosques de l'établissement, des produits disponibles sur le serveur Internet et le minitel et celles relatives aux prestations réalisées au profit des professionnels, selon la définition retenue par l'avant-projet annuel de performance.

16 () Michel Bouvard, Didier Migaud, Charles de Courson et Jean-Pierre Brard, Une nouvelle architecture du budget de l'État pour une plus grande efficacité de l'action publique. Propositions de la Mission d'information sur la mise en œuvre de la loi organique relative aux lois de finances, Assemblée nationale, XIIème législature, n° 1554, pp. 87-98.

17 () La tonne kilomètre transportée est une mesure combinée du trafic de passagers, de fret et de poste, dans laquelle les passagers sont comptabilisés à raison de 90 kg.

18 () American Airlines, Continental Airlines, delta Airlines, Northwest Airlines, United Airlines, US Airways.

19 () Tout comme, d'ailleurs, les officiers mécaniciens navigants, pour lesquels il n'existe par d'âge de cessation d'activité.

20 () La direction d'Air France est très sceptique sur la possibilité de mettre en œuvre cette idée, notamment à cause du problème - parfois rencontré - du survol par des pilotes de plus de 60 ans de pays n'autorisant les personnels navigants techniques à exercer leur activité que jusqu'à l'âge de 60 ans. Des discussions sont en cours sur cette question au sein de l'OACI.

21 () Charles de Courson, Air Lib : enquête sur une débâcle annoncée, rapport de la commission d'enquête sur les causes économiques et financières de la disparition d'Air Lib, Assemblée nationale, XIIème législature, 11 juin 2003.

22 () Le trafic pris en compte est celui entre la métropole, d'une part, les 24 pays actuels membres de l'Union Européenne hormis la France, ainsi que l'Islande, la Norvège et la Suisse, d'autre part.

23 () Projet de loi relatif aux aéroports, texte n° 452 (2003-2004).

24 () Cour des Comptes, Rapport public 2002, 2ème partie, pp. 389-436.

25 () Il s'agit des liaisons Avignon-Paris et Avignon-Clermont Ferrand : la Commission, qui est chargée de publier les obligations de service public avant toute prise en charge par le FIATA, a refusé de le faire estimant que ces liaisons ne présentaient par un caractère vital pour l'agglomération avignonnaise, du fait de la proximité de l'aéroport de Marseille.

26 (1) Article 105 de la loi n°2002-276 du 27 février 2002 sur la démocratie de proximité.

27 () Loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales.

28 () C'est-à-dire les aéroports de Pointe-à-Pitre-Le Raizet, Fort-de-France-Le Lamentin, Saint-Denis-Gillot et Nouméa-Tontouta.

29 (2) Lois organique du 12 avril 1996 portant statut d'autonomie de la Polynésie française et loi organique du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie.

30 () Décret n° 2004-1079 du 11 octobre 2004 relatif à l'aide à l'insonorisation des logements des riverains des aérodromes mentionnés au I de l'article 1609 quatervicies A du code général des impôts.

31 () Ibidem.


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