COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES

COMPTE RENDU N° 54

(Application de l'article 46 du Règlement)

Mercredi 21 mai 2003
(Séance de 9 heures 30)

Présidence de M. Edouard Balladur, Président

SOMMAIRE

 

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- Modification de la loi relative au droit d'asile (n° 810) - avis
- Amendement à la convention de Bâle sur le contrôle des mouvements de déchets dangereux (n° 266) -     rapport
- Emploi des personnes à charge des agents de missions officielles ; accord avec l'Australie (n° 403) et avec     le Brésil (n° 551) - rapport


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Examen pour avis du projet de loi modifiant la loi n° 52-893 du 25 juillet 1952, relative au droit d'asile

La Commission a examiné pour avis, sur le rapport de M. Eric Raoult, le projet de loi modifiant la loi n° 52-893 du 25 juillet 1952, relative au droit d'asile (n° 810).

M. Eric Raoult, Rapporteur pour avis, a indiqué que la réforme du droit d'asile devait respecter deux principes, l'équité et l'efficacité, conformément à la volonté exprimée par le Président de la République le 14 juillet dernier. Ainsi, la réforme du droit d'asile proposée par le Gouvernement ne consiste pas à en restreindre la portée mais, au contraire, à le rendre plus effectif, dans le respect des obligations internationales de la France, notamment la Convention de Genève du 28 juillet 1951 sur le statut des réfugiés, et de notre culture historique d'accueil, principe à valeur constitutionnelle.

Il a ensuite expliqué que le droit d'asile connaît une véritable crise en France, crise qui s'explique par une augmentation substantielle des demandes sans commune mesure avec l'évolution du nombre de réfugiés. La complexité des procédures a contribué à l'explosion des demandes d'asile : entre 1998 et 2002, les demandes d'asile conventionnel sont passées de 23 000 à 53 000, alors que les demandes d'asile territorial, procédure créée en 1998, sont évaluées à 35 000 en 2002. Cette augmentation a engendré un allongement des durées d'instruction, ce qui a pour conséquence d'accroître les demandes puisque, pendant toute la durée d'instruction, le demandeur d'asile peut rester sur le territoire et bénéficier de prestations sociales. Manifestement, le droit d'asile est détourné de son objet dans la mesure où les rejets dépassent les 85 % pour l'asile conventionnel, et 95 % pour l'asile territorial.

La réforme du droit d'asile s'inscrit dans un cadre européen. En effet, dans un espace européen sans frontières, les différences de législations en matière d'asile ont pour conséquence d'augmenter l'attrait des Etats dont la législation en la matière est la plus attractive. Or, plusieurs pays européens ont récemment réformé leur législation en la matière dans un sens très rigoureux, notamment le Danemark, les Pays-Bas, l'Italie, l'Allemagne et même le Royaume-Uni.

Au-delà de cette convergence spontanée des législations, le rapprochement des procédures d'asile résulte également de l'application de normes communautaires dans ce domaine. Ainsi, le règlement dit « Dublin II », adopté en février 2003, rénove et remplace la Convention de Dublin par un instrument communautaire. Par ailleurs, deux propositions de directives sont également en cours de discussion et devraient déboucher sur un accord avant la fin de l'année 2003 : l'une porte sur la définition du réfugié et de la protection subsidiaire, l'autre sur les normes minimales applicables aux procédures d'octroi et de retrait du statut de réfugié.

M. Eric Raoult a donc estimé que les procédures d'asile en France devaient tenir compte des évolutions en cours en Europe, ce qui ne signifie pas pour la France de revenir sur une tradition ancienne d'accueil, apparue dès la Constitution de 1793, et réaffirmée dans le préambule de la Constitution de 1946. D'ailleurs, le projet de loi contient des dispositions favorables pour les demandeurs d'asile. En effet, il est significatif que le Gouvernement ait choisi de distinguer ce projet de loi, défendu par le Ministre des Affaires étrangères, de celui relatif à la maîtrise de l'immigration et au séjour des étrangers en France, défendu par le Ministre de l'Intérieur. Ainsi, le point le plus fort du projet de loi est l'unification du dispositif d'asile autour de l'OFPRA, organisme qui connaît bien les problèmes des réfugiés, et qui sera désormais compétent pour les demandes d'asile formulées en application de la Convention de Genève ainsi que pour l'asile subsidiaire, qui remplace l'asile territorial.

Par ailleurs, l'entrée en vigueur de la loi aura une conséquence majeure sur l'interprétation de la Convention de Genève par la France dans un sens favorable aux demandeurs d'asile. Jusque là, les juridictions françaises appliquaient de façon restrictive la Convention en ce qui concerne l'origine des persécutions prises en compte pour l'attribution de la qualité de réfugié, en considérant que celles-ci devaient être le fait d'un Etat. Or, depuis 1951, le monde a considérablement changé. En conséquence, la notion de réfugié au sens de la Convention de Genève sera élargie, et pourront donc en bénéficier des personnes aujourd'hui exclues de la protection conventionnelle.

Le Rapporteur a également indiqué que l'adoption du projet de loi entraînerait une amélioration de la situation des actuels demandeurs d'asile territorial, grâce à l'unification des dispositifs d'asile, le recours suspensif possible devant la CRR et le caractère automatique de la protection subsidiaire lorsque les critères d'attribution sont remplis. Enfin, l'un des buts de la réforme étant la rationalisation des procédures et la réduction des délais d'instruction (actuellement de dix mois en moyenne à l'OFPRA), les personnes demandant légitimement l'asile pourront obtenir plus rapidement la qualité de réfugié, et donc rester moins longtemps dans l'incertitude sur leur sort et dans une situation précaire, marquée notamment par l'interdiction de travailler, peu favorable à leur intégration dans la société française.

M. Eric Raoult a cependant fait valoir que le droit d'asile visait à assurer la protection de personnes persécutées, non à constituer un moyen de régulariser une présence illégale sur le territoire français. Si tout réfugié a droit à la protection, cela peut certes passer par une installation sur le territoire français, mais il ne s'agit pas de l'unique solution envisageable. Le projet de loi prévoit ainsi que les Etats ne seront plus considérés comme les seuls agents pouvant offrir une protection, ce qui signifie concrètement que si des personnes peuvent obtenir une protection effective de la part d'organisations non étatiques, la France pourra refuser de leur octroyer la qualité de réfugié. L'asile interne - autre concept nouveau - permettra à l'OFPRA de refuser des demandes d'asile si le demandeur peut trouver une protection sur une partie de son territoire d'origine.

M. Eric Raoult a estimé légitime de faire obstacle à l'utilisation des procédures de demande d'asile par des personnes à qui il n'est pas destiné. Par exemple, il ne semble pas absurde d'instaurer une procédure d'examen plus rapide, et sans recours suspensif, pour les ressortissants de pays dits sûrs, notion très encadrée par le projet de loi. De même, il est normal de permettre à l'OFPRA de communiquer au ministère de l'Intérieur des documents d'état-civil ou de voyage de personnes dont la demande d'asile a été rejetée, afin de permettre la mise en œuvre d'une mesure d'éloignement. Or, la situation actuelle est particulièrement peu satisfaisante : seuls 3 à 4 % des déboutés du droit d'asile sont effectivement reconduits à la frontière.

M. Eric Raoult a enfin précisé que cette réforme ne permettra pas à elle seule de résoudre la crise du droit d'asile. Au contraire même, l'effet à court terme sera l'accroissement considérable de la charge de travail de l'OFPRA et de la Commission des recours des réfugiés, qui relèvent du budget du ministère des Affaires étrangères. En effet, ces institutions seront dorénavant compétentes pour toutes les demandes d'asile, alors qu'elle n'en traitait jusque là qu'une partie. Des crédits, non reconductibles, ont été inscrits dans la loi de finances 2003 afin de résorber le stock de dossiers en attente. Si un tel effort n'est pas reconduit et augmenté en 2004, les délais de traitement des demandes ne pourront que s'allonger, en contradiction avec l'objectif du projet de loi. Cela serait d'autant plus regrettable qu'une réduction effective des délais de traitement permettrait de faire des économies en matière de prestations sociales versées aux demandeurs nettement supérieures aux moyens supplémentaires nécessaires.

Souhaitant que la Commission des Affaires étrangères veille à ce que les moyens nécessaires au succès de la réforme soient dégagés, lors de l'examen du budget du ministère des Affaires étrangères, le Rapporteur a conclu en recommandant de donner un avis favorable à l'adoption du présent projet de loi.

M. Richard Cazenave a indiqué que l'asile territorial n'avait, en fait, pas été créé en 1998, expliquant qu'il s'agissait d'une pratique discrétionnaire du Ministre de l'Intérieur. Cependant, son inscription dans la loi a pu laisser croire que les demandeurs recevraient un accueil plus favorable ; ce fut un leurre en l'absence de définition juridique de l'asile territorial. C'est ainsi que 1% seulement des demandes ont été acceptées. Ce leurre est une source de fraude et a eu un effet désastreux. En outre, les refus n'ont pas fait l'objet d'un accompagnement social, obligeant les demandeurs à des conditions de vie scandaleuses. Aussi, il s'est félicité qu'un cadre juridique et une harmonisation avec les Etats membres de l'Union européenne aient été définis.

Il s'est enquis de la prestation d'aide sociale accordée aux demandeurs. Auront-ils dans le nouveau dispositif les mêmes garanties sociales ?

Constatant que l'OFPRA n'a pas la capacité de traiter les demandes actuelles (60 000), et qu'un stock de demandes est en souffrance, il a souhaité que la Commission soit très mobilisée pour renforcer les capacités de l'OFPRA afin qu'il puisse remplir sa mission. Il serait intéressant que le Rapporteur puisse rencontrer les responsables de l'OFPRA et que la Commission prenne une position, après étude préalable, lors du débat budgétaire.

M. Eric Raoult a répondu que la reconnaissance de l'asile territorial dans la loi de 1998 avait pour but de répondre à la situation de ressortissants algériens qui ne pouvaient pas bénéficier de l'asile conventionnel. Par rapport à l'asile territorial, la protection subsidiaire fait l'objet d'une définition juridique précise car elle est encadrée par des critères.

En ce qui concerne les prestations versées aux demandeurs d'asile, dont le montant est estimé à 270 millions d'euros pour 2002, elles seront identiques pour tous les demandeurs. Une réforme des délais d'instruction des demandes permettrait ainsi de réduire le volume de ces dépenses.

L'OFPRA aura effectivement besoin de davantage de moyens, ainsi que d'une rationalisation de ses méthodes de travail. A cet égard, il faut souligner que le directeur de l'OFPRA souhaite la conclusion d'un « Contrat d'objectifs et de moyens » afin de permettre à cet organisme de faire face à la réforme dans les meilleures conditions. Les parlementaires devront rester vigilants sur cette question et se montrer attentifs à d'éventuelles évolutions du nombre de demandeurs d'asile.

Tout en se félicitant de la qualité du projet de loi, qui unifie les procédures, rationalise les moyens et rapproche la législation française de celle des Etats membres de l'Union, M. Roland Blum a relevé que la Commission nationale consultative des droits de l'Homme a rendu un avis négatif sur ce texte, regrettant l'intervention croissante du Ministre de l'Intérieur et la remise en cause du rôle central du HCR.

M. Eric Raoult a estimé que beaucoup des critiques faites à cette réforme reposaient sur un avant-projet de loi contenant d'importantes différences avec la version finalement adoptée par le Conseil des ministres. Un effort d'information est donc nécessaire. En ce qui concerne le rôle du HCR, la France est très attachée à sa place centrale dans son dispositif d'asile, l'objectif du projet de loi n'est pas du tout de revenir dessus.

Mme Martine Aurillac a jugé qu'il était nécessaire de conférer à l'OFPRA les moyens nécessaires à l'efficacité de sa mission. Rappelant que l'asile territorial était accordé pour une durée d'un an renouvelable, elle a demandé selon quelle procédure l'OFPRA examinerait les demandes de renouvellement qui ne manqueront pas de lui être transmises.

Le Président Edouard Balladur a fait valoir qu'il y aurait une certaine automaticité dans le renouvellement de ces demandes.

M. Eric Raoult a également estimé que, dans la pratique, l'examen des demandes de renouvellement de la protection subsidiaire devrait être quasi automatique en l'absence d'évolution interne dans le pays de la personne bénéficiant de la protection subsidiaire. Il est cependant nécessaire de renouveler cette protection sur une base annuelle car la carte de séjour qui leur est accordée est elle-même valable un an.

M. Jean Glavany, commentant les propos du Rapporteur, a émis des doutes sur le fait que le remplacement du texte, adopté par la précédente majorité, par deux textes distincts constitue réellement un progrès pour les demandeurs d'asile. La baisse des délais d'instruction des demandes d'asile est un souci partagé par tous et elle dépend davantage des moyens supplémentaires qui seront alloués à l'OFPRA que de la simplification des procédures. Le contexte budgétaire actuel suscite à cet égard de grandes craintes. Enfin, il ne faut pas exagérer les différences entre l'avant-projet de loi et le projet de loi qui nous est soumis : beaucoup des critiques de la Commission nationale consultative des droits de l'Homme restent justifiées.

M. Eric Raoult a reconnu qu'il y avait des divergences d'appréciation avec les associations qui défendent le droit d'asile, qui ont une logique différente de celle des politiques. En effet, elles ont d'abord une mission humanitaire, destinée à tous les demandeurs d'asile, lesquelles sont tous dans la détresse. La mission des parlementaires est différente : préserver le droit constitutionnel d'asile tout en évitant la multiplication de nouveaux Sangatte. Il a par ailleurs indiqué qu'un certain nombre de dispositions du projet de loi convenaient aux associations.

M. André Schneider a indiqué que les préfets recommandaient aux parlementaires de ne plus intervenir pour régulariser la situation de personnes sans papier. Il a demandé quelle attitude adopter face aux nombreux cas dramatiques auxquels il était confronté dans sa permanence.

M. Eric Raoult a répondu qu'il était utile d'entretenir de bonnes relations avec les officiers de protection de l'OFPRA qui sont des spécialistes des zones géographiques concernées, et qui peuvent donc être de bon conseil. L'OFPRA pourrait d'ailleurs accentuer ses efforts d'information et de communication en direction des maires et des parlementaires, qui sont souvent les premiers recours vers lesquels se tournent les demandeurs d'asile.

Puis, la Commission est passée à l'examen des articles du projet de loi dont elle est saisie pour avis.

Le Rapporteur a présenté un amendement à l'article 6 du projet de loi, visant à dresser par décret la liste des pays considérés comme des pays d'origine sûrs. Le projet de loi prévoit en effet, d'introduire dans nos procédures d'asile la notion de pays d'origine sûr. Cette disposition vise à soumettre les demandes d'asile faites par des ressortissants de tels pays à une procédure accélérée. Pour des raisons de transparence comme d'efficacité, il est souhaitable que la liste des pays soit connus à l'avance, notamment afin de permettre aux agents des préfectures de pouvoir effectivement l'appliquer. D'ailleurs, l'introduction de ce concept dans notre droit est liée à l'harmonisation européenne et à sa présence dans la proposition de directive en cours de discussion. Or cette dernière prévoit que la liste des pays considérés comme sûrs par l'Union européenne sera fixé par un règlement du Conseil. Pour autant, la proposition de directive relative aux procédures d'octroi et de retrait du statut de réfugié est encore en cours de discussion, il serait donc souhaitable de prévoir comment la liste des pays d'origine sûrs sera fixée en attendant la mise en œuvre effective de la directive, et l'adoption du règlement communautaire.

Le Président Edouard Balladur a demandé combien de pays pouvaient être considérés comme sûrs.

Le Rapporteur a estimé que leur nombre était faible. Citant la liste établie par le Danemark, il a indiqué que celle-ci comportait une vingtaine de pays en plus de ceux de l'Union européenne. La liste dressée par la France sera vraisemblablement plus restreinte.

Le Président Edouard Balladur a considéré qu'il sera difficile de dresser une telle liste en raison de ses implications diplomatiques. Compte tenu du caractère sensible de cette liste, ne devrait-elle pas faire l'objet d'un décret en Conseil d'Etat ?

Le Rapporteur a estimé qu'une telle procédure serait trop lourde, alors même que la liste doit être rapidement révisable, le cas échéant au gré des évènements politiques.

M. Richard Cazenave a estimé que la liste des pays sûrs devrait permettre aux services en charge d'examiner les demandes d'asile d'écarter plus facilement les demandes infondées. Il a demandé si la notion de pays sûr s'appliquait aux Etats dans leur ensemble ou si elle pouvait s'appliquer à certaines portions du territoire de ces Etats.

Le Président Edouard Balladur a estimé qu'il fallait appliquer le dispositif par pays, même si ceux-ci peuvent connaître une situation difficile uniquement sur une portion de leur territoire.

La Commission a adopté l'amendement présenté par le Rapporteur pour avis.

Conformément aux conclusions du Rapporteur pour avis, la Commission a émis un avis favorable à l'adoption du projet de loi (n° 810) ainsi modifié.

Amendement à la convention de Bâle sur le contrôle des mouvements de déchets dangereux (n° 266)

La Commission a examiné, sur le rapport de M. Didier Julia, le projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant l'approbation de l'amendement à la convention de Bâle sur le contrôle des mouvements transfrontières de déchets dangereux et leur élimination (n° 266).

M. Didier Julia, Rapporteur, a indiqué que la convention de Bâle trouve son origine dans la sensibilisation de l'opinion publique internationale aux problèmes suscités par les mouvements transfrontières de déchets dangereux. Cette prise de conscience date du début des années quatre-vingt avec la disparition, en août 1982, de conteneurs de déchets contaminés par des dioxines, en provenance de Seveso mais également, au cours de l'été 1988, avec l'arraisonnement de cargos transportant des matières toxiques, notamment le Zanobia et le Karin B, avant le débarquement de leur cargaison dans des ports africains.

Il a ensuite rappelé les grandes lignes de la convention de Bâle. Adoptée le 22 mars 1989 sous l'égide du Programme des Nations unies pour l'Environnement (PNUE), cette convention concerne essentiellement les déchets issus du monde industriel et minier mais également ceux des hôpitaux ou des laboratoires et exclut de son champ d'application les déchets radioactifs dont les mouvements sont contrôlés par l'Agence internationale de l'énergie atomique, et ceux « provenant de l'exploitation normale d'un navire » qui sont régis par la convention de Londres. Elle fait en sorte que les mouvements transfrontaliers de matières toxiques constituent une pratique exceptionnelle. La convention de Bâle prévoit notamment l'interdiction absolue d'exporter des déchets dangereux  vers un Etat qui en a interdit l'importation sur son territoire ou qui n'a pas les moyens de les gérer « selon des méthodes écologiquement rationnelles ». De façon générale, l'exportation n'est autorisée, que lorsque l'Etat d'exportation ne dispose pas des moyens d'éliminer les déchets ou lorsque l'Etat d'importation envisage de les recycler.

L'amendement du 22 septembre 1995 a pour objet d'interdire les mouvements de déchets dangereux des pays industrialisés, définis par l'annexe VII de la convention qui regroupe les Etats membres de l'OCDE, de la Communauté européenne et le Liechtenstein, vers les pays en développement. Un tel dispositif était déjà en germe lors des négociations de la convention de Bâle, au cours desquelles, un nombre important de pays en développement, particulièrement les Etats africains, plaidèrent pour une prohibition pure et simple des exportations de déchets dangereux alors qu'un autre courant estimait que des dispositifs stricts associés à des incitations politiques étaient de nature à moraliser et sécuriser des flux importants.

L'approbation de l'amendement n'aura aucune incidence en France, puisque les importations et les exportations de déchets dangereux y sont régies par le règlement (CEE) n°259/93 du 1er février 1993 qui met déjà en œuvre le dispositif de l'amendement. De même, l'activité des entreprises françaises n'a rien à craindre d'une interdiction qui leur est déjà applicable car la France est importatrice nette de déchets et a, par conséquent, la capacité de s'en occuper comme le montre l'exemple de la région Île-de-France qui accueille des sites consacrés au traitement de déchets industriels spéciaux. Ses exportations sont essentiellement dirigées vers des pays européens composant l'annexe VII de la convention.

À ce jour, seuls 35 Etats et la Communauté européenne ont ratifié l'amendement. Or, ce dernier n'entrera en vigueur que lorsque 62 Parties auront accompli cette formalité. Aussi, la France n'a-t-elle que trop tardé à approuver l'amendement du 22 septembre 1995.

Conformément aux conclusions du Rapporteur, la Commission a adopté le projet de loi (n° 266).

Emploi des personnes à charge des agents de missions officielles ; accord avec l'Australie (n° 403) et avec le Brésil (n° 551)

La Commission a examiné, sur le rapport de M. Jean-Paul Bacquet, le projet de loi autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de l'Australie sur l'emploi des personnes à charge des membres des missions officielles d'un Etat dans l'autre (n° 403) et le projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République fédérative du Brésil relatif à l'emploi salarié des membres des familles des agents des missions officielles de chaque Etat dans l'autre (ensemble un échange de lettres) (n° 551).

M. Jean-Paul Bacquet, Rapporteur, a rappelé que la carrière de diplomate fait partie des ces métiers qui rendent difficiles l'exercice d'un emploi par le conjoint, à la fois pour des motifs pratiques (mobilité, fossé culturel, écart de développement des économies) et pour des motifs juridiques. Ces derniers sont liés au statut protecteur dont bénéficient les diplomates et, par extension, leur famille, en vertu des Conventions de Vienne sur les relations diplomatiques (18 avril 1961) et consulaires (24 avril 1963). Ces conventions prévoient l'inviolabilité de leur personne, de leur demeure et de leurs biens qui implique l'impossibilité de l'arrestation et de la détention. Elles posent également le principe d'une complète immunité de juridiction pénale et cette immunité vaut également, avec des limites spécifiques, pour les juridictions civiles et administratives. L'Etat accréditant peut renoncer à l'immunité de juridiction de ses agents diplomatiques et des membres de sa famille mais cette renonciation doit toujours être expresse. De même, la renonciation à l'immunité de juridiction n'emporte pas automatiquement renonciation à l'immunité d'exécution du jugement pour laquelle une renonciation distincte est toujours nécessaire. Enfin, ces Conventions attribuent des privilèges fiscaux et douaniers même si des tempéraments à cette immunité sont prévus concernant, en particulier, la fiscalité indirecte.

Aussi, l'objectif général des deux accords bilatéraux consiste, sur la base de la réciprocité, à autoriser les personnes à charge des agents des missions officielles de l'Etat d'envoi à exercer une activité professionnelle dans l'Etat d'accueil. Dans la pratique, l'ambassade concernée formulera officiellement sa demande au service du protocole du Ministère des Affaires étrangères de l'autre Etat. Bien évidemment, la personne à charge concernée ne sera pas dispensée de remplir les conditions régissant l'exercice de l'emploi envisagé telles que les diplômes et autres qualifications professionnelles. En outre, les deux accords prévoient une clause de sauvegarde en permettant à l'Etat d'accueil de ne pas délivrer l'autorisation « si des motifs d'ordre public ou de sécurité nationale s'y opposent ».

Les évolutions de la société depuis les années 60 font que l'exercice d'une profession par les deux membres d'un couple constitue, aujourd'hui, la règle. La conclusion de conventions sur l'emploi des personnes à charge répond donc au souhait légitime de ne pas voir s'interrompre une carrière pendant la durée du séjour à l'étranger. La France est liée par ce type d'accord avec le Canada et l'Argentine. Outre ceux conclus avec le Brésil et l'Australie, objets du présent rapport, un accord du même type a été signé avec la Nouvelle-Zélande en 1999 et des négociations sont prévues avec une dizaine de pays, dans lesquels existent de réelles possibilités d'emploi. Dans le cadre de l'accord avec le Brésil, 64 personnes sont susceptibles de solliciter une autorisation d'emploi sur le marché local et ce chiffre est d'une vingtaine s'agissant des missions brésiliennes en France. L'accord avec l'Australie pourrait intéresser une demi-douzaine de « personnes à charge » dans les deux pays.

Enfin, il convient de noter que les accords concernent les seules activités donnant lieu à un contrat de travail et qu'ils excluent les professions libérales. Par ailleurs, les deux accords ne prévoient rien pour les concubins et les signataires d'un PACS.

M. Serge Janquin a souhaité obtenir des précisions sur la notion de « personnes à charge » et a regretté que les concubins et les signataires d'un PACS soient exclus du bénéfice des accords, d'autant que les liens entre ces derniers ont été reconnus par le législateur.

M. Jean-Paul Bacquet a précisé qu'il fallait entendre par « personnes à charge » le conjoint, les enfants à charge handicapés physiques ou mentaux et les enfants à charge célibataires. Enfin, il a indiqué que, pour le Ministère des Affaires étrangères, si, juridiquement, l'extension du bénéfice de l'accord à ces derniers peut être étudiée, sous réserve de réciprocité (droit des pays cosignataires), la notion de concubin ne saurait être reconnue dans ce type d'accord.

Conformément aux conclusions du Rapporteur, la Commission a adopté les projets de loi (nos 403 et 551).

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· Droit d'asile

· Déchets dangereux

· Conjoints de diplomates


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