COMMISSION de la DÉFENSE NATIONALE et des FORCES ARMÉES

COMPTE RENDU N° 9

(Application de l'article 46 du Règlement)

Mercredi 16 octobre 2002
(Séance de 18 heures)

Présidence de M. Guy Teissier, président

SOMMAIRE

 

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- Audition de M. Yves Gleizes, délégué général pour l'armement, sur le projet de loi relatif à la programmation militaire pour les années 2003 à 2008 (n°187) et sur le projet de loi de finances pour 2003 (n° 230)



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- Examen de l'avis budgétaire services communs : délégation générale pour l'armement, service de santé, service des essences (M. Jean-Yves Le Drian, rapporteur pour avis)


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- Vote sur l'ensemble des crédits de la défense pour 2003

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Audition de M. Yves Gleizes, délégué général pour l'armement, sur le projet de loi de programmation militaire 2003-2008 et le projet de loi de finances pour 2003.

La commission de la défense nationale et des forces armées a entendu M. Yves Gleizes, délégué général pour l'armement, sur le projet de loi relatif à la programmation militaire pour les années 2003 à 2008 (n°187) et sur le projet de loi de finances pour 2003 (n° 230).

M. Yves Gleizes a évoqué l'activité de la DGA au cours de l'année écoulée. Si les programmes nationaux se sont déroulés de façon satisfaisante en 2002, le bilan est plus nuancé pour les programmes en coopération. Des programmes majeurs ont franchi des étapes importantes au cours de cette année : les programmes des frégates multimissions, des systèmes de drones MALE (moyenne altitude longue endurance) et MCMM (multi capteurs multi missions), ainsi que du missile de croisière naval ont été lancés, les essais de qualification du missile de croisière Scalp-EG ont été engagés, 20 Rafale supplémentaires ont été commandés. Pour les programmes en coopération, le bilan est plus mitigé, notamment en raison du report des programmes d'avion de transport A 400 M et du missile d'interception Météor, qui sont suspendus à la décision de l'Allemagne ; en outre, l'Espagne n'a pas encore annoncé son choix quant à son entrée dans le programme d'hélicoptères Tigre. En revanche, l'année 2002 a été plus favorable dans le secteur de l'observation spatiale : un accord franco-allemand pour l'accès à une capacité radar a été conclu et vient compléter un accord intervenu en 2001 avec l'Italie, et le programme « segment sol d'observation » (SSO) a été lancé. Enfin, les ministres français et italien ont donné une forte impulsion à la coopération sur les futures frégates multimissions.

Le délégué général pour l'armement a souligné que le taux d'exécution budgétaire est très satisfaisant : il a insisté sur la bonne consommation des crédits, qui contredit l'idée souvent avancée selon laquelle le ministère de la défense ne dépenserait pas les crédits qui lui sont alloués. La DGA prévoit de respecter ses objectifs d'engagement en 2002 : le niveau d'engagement devrait se situer au-dessus des résultats atteints en 2001, notamment grâce aux commandes globales. Ces dernières devraient atteindre un montant de 6 milliards d'euros en 2002 : elles concernent l'avion de transport futur, le programme Rafale, le programme de missiles sol-air futurs (FSAF) et le missile M 51. En ce qui concerne la commande de ce dernier, il s'agit en fait de l'affermissement d'une tranche conditionnelle du marché notifié le 27 décembre 2000. Toutefois, les autorisations de programme correspondantes n'ont pas encore été mises en place dans le budget 2002, il est donc nécessaire qu'elles soient intégrées dans le collectif budgétaire de fin d'année, afin de respecter la date de notification fixée au 27 décembre 2002.

La DGA s'est profondément transformée depuis 1997. Son coût d'intervention a été réduit de 30 % et ses effectifs ont diminué de 25 %. Elle a considérablement réduit le coût des programmes d'armement, réalisant 9,6 milliards d'euros d'économie sur l'ensemble des programmes, ce qui représente une augmentation d'environ 10 % du pouvoir d'achat du ministère de la défense. La réduction du coût des programmes n'a pas pour autant porté atteinte aux marges des industriels : les économies ont été réalisées grâce à de nouveaux modes de passation des contrats et à une organisation en plateau avec les états-majors et les industriels, afin de mieux faire correspondre les besoins des utilisateurs avec les équipements fournis. La DGA est à présent une administration moderne : elle utilise de façon croissante les nouvelles technologies et met en place des possibilités d'achat par Internet avec les fournisseurs. Cette approche permet notamment de faciliter l'accès des petites et moyennes entreprises aux marchés d'armement et participe à la modernisation de la gestion de la DGA.

Le délégué général pour l'armement a ensuite évoqué le projet de loi de programmation militaire pour les années 2003 à 2008. Le rétablissement de la disponibilité des matériels des armées constitue une priorité. Les ressources supplémentaires votées dans la loi de finances rectificative d'août dernier et les ressources inscrites dans la loi de programmation répondent à ce besoin. En parallèle, les structures étatiques de maintenance évoluent avec la mise en place des structures intégrées de soutien, la structure intégrée de maintien en condition opérationnelle des matériels aéronautiques de la défense (SIMMAD) et le service de soutien de la flotte (SSF). La DGA a d'ores et déjà mis à la disposition de ces structures plus de 450 personnes. Enfin, il convient désormais de raisonner sur la disponibilité d'un système complet et non plus d'un équipement particulier et de globaliser les prestations afin de gagner en flexibilité. Des expériences d'ampleur limitée ont été lancées par la DGA, telles que l'optimisation du réapprovisionnement des rechanges consommables des matériels aéronautiques des forces armées (ORRMA) : ce programme, qui responsabilise l'industriel dans la gestion des consommables aéronautiques, est en cours de notification.

Le projet de loi de programmation militaire pour 2003-2008 prévoit la réalisation des équipements prévus par le modèle d'armée 2015. La DGA compte maintenir l'effort sur la réduction des coûts et des délais des programmes, en visant notamment à approfondir la phase de levée de risques. Face à des maîtres d'œuvre en situation dominante, la DGA veillera à maintenir une mise en concurrence au niveau des équipements en imposant des plans d'acquisition à l'industriel maître d'œuvre. Le développement d'un portail d'armement qui sera mis en ligne sur Internet avant la fin de l'année permettra à la DGA de mieux communiquer avec sa base de fournisseurs, plus particulièrement avec les petites et moyennes entreprises, afin de faciliter leur accès aux marchés et d'élargir le panel de fournisseurs de la DGA. Enfin, le recrutement de véritables acheteurs spécialisés est déjà bien engagé.

Les ressources que le projet de loi de programmation militaire prévoit de consacrer aux actions de recherche et de technologie s'élèvent à 3,8 milliards d'euros sur six ans, ce qui représente une hausse d'environ 16  % par rapport à la précédente loi de programmation militaire. Cette montée en puissance doit permettre à la France d'atteindre le niveau du Royaume-Uni en 2008. La DGA s'est fixé des objectifs précis en matière de recherche et de technologie, notamment le recours au développement de démonstrateurs technologiques, le renforcement de la coordination entre les travaux de recherche des ministères civils et les travaux financés par la défense, ainsi que le renforcement de la coopération européenne.

Souhaitant continuer à jouer un rôle moteur dans la construction de l'Europe de l'armement, la DGA soutient activement la montée en puissance de l'Organisation conjointe de coopération en matière d'armement (OCCAR), ainsi que la transposition en droit interne des dispositions de la lettre d'intention (LoI) signée en 1998 par six pays pour améliorer le fonctionnement de l'industrie européenne de défense. Elle s'efforce d'obtenir des résultats concrets du processus ECAP (European capability action plan) d'identification des lacunes capacitaires des Etats de l'Union européenne, qui pourraient déboucher à terme sur des programmes d'acquisition.

Le délégué général pour l'armement a ensuite dressé un panorama de l'évolution des industries de défense françaises.

Les travaux se poursuivent activement pour aboutir à la transformation de DCN en société nationale, le plus tôt possible au cours de l'année 2003. Les programmes prévus par le projet de loi de programmation militaire sont favorables ; DCN disposera d'une période de transition de cinq ans durant laquelle elle bénéficiera de garanties d'activité.

Le plan stratégique, économique et social (PSES) mis en œuvre par GIAT-Industries arrive à son terme et s'est traduit notamment par une réduction importante d'effectifs. Cependant, malgré cet effort, GIAT-Industries ne semble pas en mesure de parvenir à un équilibre et son plan de charge prévisionnel, avec notamment l'arrêt à terme de la production du char Leclerc, ne suffira pas à garantir la stabilisation du format de l'entreprise.

La SNPE connaît pour sa part une situation difficile, après la catastrophe survenue à Toulouse en 2001 : ses activités chimiques sont fragilisées en raison de l'arrêt de la production de phosgène. Avec le projet de formation de la société Héraklès conjointement avec SNECMA, le délégué général pour l'armement a indiqué toutefois que l'avenir de la branche matériaux énergétiques paraît bien assuré.

Dans les autres secteurs de l'industrie de défense, les consolidations se sont poursuivies. On peut signaler en particulier que dans le domaine de l'électronique de défense, Alcatel s'est désengagé du capital de Thales et que les activités spatiales de EADS ont été réorganisées.

Les prises de commande à l'exportation des industries françaises de défense en 2001 se sont inscrites en recul par rapport aux commandes enregistrées en 2000, ce qui illustre le caractère fluctuant des résultats à l'exportation. Après un début d'année 2002 difficile, marqué par l'échec de la vente d'avions Rafale à la Corée du Sud et un contexte de forte concurrence américaine, l'industrie française a ensuite enregistré des succès notables, tels que la fourniture de sous-marins Scorpène à la Malaisie. D'autres contrats importants sont espérés avant la fin de l'année.

Le délégué général pour l'armement a ensuite rappelé les perspectives ouvertes par le projet de loi de finances pour 2003, qui est cohérent avec le projet de loi de programmation militaire. Quant au budget de fonctionnement de la DGA, il est en stabilisation, après six années de diminution continue.

M. Yves Gleizes a indiqué en conclusion que ses priorités pour l'avenir étaient la préparation du futur et les actions de recherche et de technologie, le renforcement de la construction de l'Europe de l'armement et la poursuite de la modernisation de la délégation générale pour l'armement, en cohérence avec la réforme de l'Etat.

M. Jean-Yves Le Drian, rapporteur pour avis pour les services communs, a souhaité obtenir la confirmation que la réduction de 25  % de l'effectif de la DGA était calculée sans inclure DCN dans le périmètre. Il a ensuite demandé si, dans le cas où une coopération franco-italienne serait engagée pour le programme de frégates multimissions, la société qui serait maître d'œuvre avait déjà été choisie.

Après avoir confirmé que le chiffre de 25  % cité concernait bien la seule DGA étatique, M. Yves Gleizes a indiqué que pour le programme de frégates multimissions, la coopération se présentait bien avec l'Italie et, quelle que soit la solution qui serait retenue en définitive, ce programme favoriserait la mutation de la nouvelle société DCN.

M. Jean-Yves Le Drian s'est félicité des propos du délégué général pour l'armement sur DCN. Ils sont en accord avec l'objectif de la loi de finances rectificative pour 2001, qui est de garantir un plan de charge suffisant à DCN pour réussir son changement de statut. La loi prévoit aussi que l'ensemble des commandes garanties doit faire l'objet d'un contrat d'entreprise qui sera présenté aux commissions de la défense et des finances dans les trois mois suivant l'entrée en vigueur du statut.

Il a ensuite demandé si le délégué général pour l'armement considérait encore la DGA comme un industriel ou s'il ne pensait pas plutôt que celle-ci, du fait des réformes réalisées depuis 1997, avait changé de nature, devenant essentiellement un donneur d'ordres.

M. Yves Gleizes a répondu qu'une grande partie de la DGA avait exercé des métiers industriels dans le passé. Néanmoins, cette part de son activité n'avait cessé de diminuer, avec le départ successif des activités d'explosifs, d'armement terrestre et de construction navale militaire. La DGA a permis de développer et de renforcer l'industrie de défense française par son action d'orientation et de développement des programmes. Ce métier est commun à tous les grands pays producteurs d'armement. Dans chacun de ceux où se développe une puissante industrie d'armement, un organisme similaire à la DGA a été créé pour orienter et encadrer son action.

Evoquant les modalités d'une éventuelle coopération avec les Britanniques pour la construction du deuxième porte-avions, M. Jérôme Rivière a demandé si une coopération sur des sous-ensembles ne serait pas plus fructueuse qu'une coopération sur l'ensemble du programme, puisqu'il semblait que les Britanniques étaient sur le point de faire le choix d'un porte-aéronef pour appareils à décollage vertical, plutôt que d'un porte-avions classique.

M. Yves Gleizes a répondu qu'il avait été simplement demandé à la DGA de fournir une étude sur trois options, en vue de guider la décision gouvernementale. La première option est celle d'une coopération avec les Britanniques. On sait peu de choses aujourd'hui sur les caractéristiques retenues par ceux-ci, elles ne seront connues qu'en mars 2003. La deuxième option, la plus simple, est celle d'un sister-ship du Charles de Gaulle. Cependant, la propulsion nucléaire fait l'objet d'un débat. La troisième option est celle d'un porte-avions construit par la France seule, qui serait sans doute proche du Charles de Gaulle, mais avec une propulsion classique. Les échéances prévues par le projet de loi de programmation militaire permettent de mener une réflexion approfondie. La DGA s'efforcera de favoriser la réalisation d'un nombre maximal d'équipements en coopération.

Soulignant la discordance entre les dates retenues pour l'entrée en service de la première frégate multimissions, soit 2008, et pour celle du missile de croisière naval, soit 2011, M. Charles Cova a demandé si un calendrier plus adapté, permettant d'assurer la cohérence du système d'armes et de rallier au programme de missile de croisière naval des pays européens tels que la Grande-Bretagne et l'Italie ne pourrait pas être recherché, en avançant la réalisation de ces programmes : en effet, le coût supplémentaire de l'accélération de ce programme de missile de croisière semble relativement modeste.

M. Yves Gleizes a répondu que les frégates prévues pour entrer en service en 2008 étaient des frégates de lutte anti-sous-marine, les nouvelles frégates destinées à la lutte contre la terre entrant en service en 2011. C'est là le besoin exprimé par la marine. Dès lors, le calendrier des missiles de croisière navals et celui des frégates destinées à les emporter sont cohérents.

Si l'industriel souhaite que le missile de croisière naval puisse être opérationnel avant la date pour laquelle le besoin français est formulé, il lui revient de rechercher des coopérations internationales. La France ne financera pas seule le développement d'un programme de ce type à seule fin de permettre son exportation avant même d'en avoir l'usage. Cela a été fait, mais les frais ont été trop importants.

Faisant allusion au débat qui oppose le ministère de la défense aux industriels, M. Yves Fromion a demandé quelles étaient les perspectives d'aboutissement du projet de missile mer-mer Exocet block III.

Par ailleurs, à enveloppe financière égale, ne serait-il pas plus judicieux d'acheter davantage d'hélicoptères NH 90, plutôt que de rénover des Puma et des Cougar dont certains ont déjà quarante ans d'âge ?

M. Yves Gleizes a répondu qu'il n'est envisagé à ce jour qu'une modernisation de l'électronique de l'Exocet. Toutefois, le ministère de la défense examine la possibilité de s'impliquer dans le développement de l'Exocet block III, mais aucune décision n'a encore été prise.

Le choix de la rénovation des Puma et des Cougar a fait l'objet d'une longue réflexion. L'achat de quinze NH 90 supplémentaires plus modernes peut paraître une solution intellectuellement plus satisfaisante, mais ne permettrait pas à l'armée de terre de bénéficier de la capacité aéromobile souhaitée. C'est pourquoi elle a été écartée.

Le président Guy Teissier a soulevé la question de l'équité entre les armées, puisque la marine recevra ses premiers NH 90 dès 2005, alors que l'armée de terre devra attendre jusqu'en 2011.

Indiquant que 27 hélicoptères NH 90 devaient être livrés à la marine à partir de 2005 à raison de deux par an, M. Richard Mallié s'est inquiété des problèmes logistiques résultant d'un délai de production aussi important. En 14 ans, l'appareil ne manquera pas d'évoluer et la flotte d'hélicoptères de la marine sera disparate.

M. Yves Gleizes a rappelé qu'initialement, la marine devait recevoir 4 hélicoptères par an, mais que c'est faute de crédits suffisants que le rythme de livraison avait été révisé à la baisse. Il faut toutefois souligner que le NH 90 bénéficie d'un bon niveau de commandes à l'exportation, ce qui permettra de maintenir une cadence de production rationnelle du point de vue industriel.

Loi de finances pour 2003 : services communs (avis).

La commission a examiné pour avis, sur le rapport de M. Jean-Yves Le Drian, les crédits des services communs : délégation générale pour l'armement, service de santé, service des essences, pour 2003.

M. Jean-Yves Le Drian, rapporteur pour avis, a indiqué que les services communs intégraient des services divers et qu'il avait choisi d'aborder parmi eux la délégation générale pour l'armement, le service de santé et le service des essences.

L'étude de la DGA l'a amené à s'intéresser à la construction de l'Europe de l'armement, ainsi qu'à l'évolution des industries de défense, plus particulièrement au changement de statut imminent de DCN.

La DGA a connu depuis 1997 une refonte totale de son organisation et de ses méthodes, afin de satisfaire à l'objectif de réduction de 30 % du coût des programmes d'armement sur six ans qui lui a été assigné. Afin d'atteindre cet objectif, la DGA a entrepris de réduire son coût d'intervention de 30 % et d'améliorer sa maîtrise de la conduite des programmes d'armement et sa gestion des crédits. Elle a réalisé avec un an d'avance l'objectif de diminution du coût d'intervention assigné en 1996. Le cumul des réductions obtenues sur le coût des programmes depuis 1997 atteint à ce jour un montant de 9,56 milliards d'euros, ce qui constitue un progrès considérable. Cette diminution de coût a été obtenue par une baisse de 25 % des effectifs, par une évolution des relations entre la DGA et les industriels, illustrée par la pratique des commandes globales pluriannuelles, et par l'amélioration de la gestion des programmes d'armement. Aujourd'hui, la réforme est en cours d'achèvement : la DGA a réalisé une mutation considérable et s'est recentrée sur ses fonctions de fournisseur d'équipements aux armées, abandonnant progressivement son rôle d'opérateur industriel. Toutefois, il est nécessaire qu'elle conserve une fonction de définition de politique industrielle d'armement, dans un contexte de concentration des industries de la défense ; elle ne doit pas devenir un simple donneur d'ordres.

Le rapporteur pour avis a ensuite évoqué le changement de statut de DCN, actuellement en cours d'achèvement. La transformation de DCN en société nationale était indispensable, afin de lui permettre de s'affranchir des contraintes administratives liées à son statut d'administration et de nouer des alliances structurelles avec des partenaires nationaux et étrangers. Lors de la préparation de cette réforme, quatre grands principes avaient été fixés : le respect de l'unicité de l'entreprise, le contrôle intégral de la société par l'Etat, le maintien du statut des personnels et la conclusion d'un contrat d'entreprise entre DCN et l'Etat. Ces principes ne sont pas aujourd'hui remis en cause, mais il faut rester vigilant. Le calendrier doit être respecté. Des problèmes techniques subsistent. La répartition des immobilisations entre DCN, la marine et la DGA est quasiment achevée, mais le processus s'est révélé long et complexe, en raison de l'imbrication des installations. Un plan de charge suffisant doit être garanti à DCN pour les cinq années à venir, afin que la société puisse conserver sa compétitivité et se développer sans encombres sous son nouveau statut : le contrat d'entreprise qui sera conclu entre l'Etat et DCN dans les prochains mois aura à prendre en compte cet impératif. La capitalisation de DCN doit être fixée à un niveau convenable : la dotation initiale en capital de Giat-Industries était insuffisante et il a fallu ajouter par la suite 3,1 milliards d'euros. Le changement de DCN est d'autant plus indispensable que le secteur de la construction navale militaire connaît d'importantes restructurations. DCN dispose de compétences reconnues et a obtenu d'importants succès à l'étranger, elle pourra désormais nouer des alliances et jouer un rôle central dans les restructurations européennes en cours, face à une offensive américaine sans précédent.

Les modalités de la coopération européenne sont complexes et variées. L'Europe de l'armement est encore en gestation. La DGA peut jouer un rôle majeur pour promouvoir l'Europe de l'armement en favorisant des coopérations européennes d'envergure, notamment dans le cadre de l'Organisation conjointe de coopération en matière d'armement (OCCAR). Il est indispensable de poursuivre le programme d'avion de transport A 400 M, dont l'intégration dans l'OCCAR est prévue après la signature du contrat définitif. Ce programme pourrait être structurant pour les coopérations européennes et renforcer l'OCCAR. La DGA doit s'engager activement dans la construction de l'Europe de l'armement.

M. Jean-Yves Le Drian a ensuite évoqué le budget des services de soutien interarmées que sont le service de santé et le service des essences.

Rappelant que la situation du service de santé des armées faisait l'objet d'un rapport d'information présenté à la fin du mois devant la commission, il a indiqué que le budget de ce service était en hausse de 15,4 %. Les dépenses de rémunérations et charges sociales progressent de 13,2 % et se traduisent, comme en 2002, par la création de postes afin de pallier les prélèvements en personnels dus aux opérations extérieures et de répondre aux nouvelles exigences de l'accréditation. Pour résorber le déficit en médecins d'active, 20 postes d'élèves-médecins supplémentaires sont créés et permettent de poursuivre le renforcement du recrutement initial engagé depuis 1997, dont les effets ne se ressentiront qu'à partir de 2006, en raison de la durée des études médicales. Pour infléchir la tendance au départ des médecins après 25 ans de service, de nouvelles mesures de fidélisation amplifient le plan de revalorisation mis en place en 2001 et 2002. Les crédits d'équipement et d'infrastructure augmentent très fortement, en raison du démarrage de la construction du nouvel hôpital Sainte-Anne à Toulon à la fin de l'année et de la remise aux normes d'incendie de l'hôpital Bégin de Saint-Mandé, à la suite de l'avis défavorable émis par la commission civile de sécurité en mars 2002.

En ce qui concerne le service des essences, l'année 2001 a été marquée par un accroissement des approvisionnements, en raison de la baisse des cours au dernier trimestre et de la nécessaire remise à niveau des stocks, qui avaient baissé de 16 % l'année précédente. Le service des essences a une nouvelle fois montré son efficacité et sa réactivité en assurant le soutien pétrolier en opérations extérieures, notamment pour l'ensemble de la KFOR, la France assurant pour la troisième année la mission de Role Specialist Nation. Les personnels sont cependant très sollicités et, à l'occasion des relèves, le service a franchi le seuil limite d'emploi pour les sous-officiers et les militaires du rang. A ce titre, une politique volontariste de limitation des départs est menée et la revalorisation de primes est prévue. Le service des essences verra néanmoins son budget légèrement diminuer de 1,33 %. Le service est particulièrement contraint sur les crédits du titre V, qui sont en baisse de 3,17 % par rapport à 2002. Cette baisse, si elle se poursuivait, pourrait remettre en cause l'autorisation d'exploitation de certaines installations.

Concluant à une nécessaire vigilance, M. Jean-Yves Le Drian s'en est remis à la sagesse de la commission sur le vote des crédits, indiquant qu'à titre personnel, il s'abstiendrait.

La commission a émis un avis favorable à l'adoption des crédits des services communs : délégation générale pour l'armement, service de santé, service des essences, pour 2003, les commissaires socialistes s'abstenant.

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Loi de finances pour 2003 : crédits défense (vote sur l'ensemble).

La commission de la défense nationale et des forces armées a procédé au vote sur l'ensemble des crédits de la défense pour 2003.

Au nom du groupe socialiste, M. Gilbert Le Bris, reconnaissant que le projet de loi de finances pour 2003 comporte de nombreuses dispositions satisfaisantes, a estimé qu'il faut rester vigilant sur son exécution ; c'est pourquoi le groupe socialiste s'abstiendra.

Au nom du groupe UMP, M. Yves Fromion a fait valoir les nombreux aspects positifs du projet de loi de finances pour 2003, qui prend en compte aussi bien les problèmes des personnels que l'impératif de redressement de l'entretien des matériels et les défis de la recherche-développement. Le groupe UMP votera en faveur de ce budget.

La commission a émis un avis favorable à l'adoption des crédits de la défense pour 2003.

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