COMMISSION de la DÉFENSE NATIONALE et des FORCES ARMÉES

COMPTE RENDU N° 7

(Application de l'article 46 du Règlement)

Mercredi 22 octobre 2003
(Séance de 10 heures)

Présidence de M. Guy Teissier, président,
puis de M. Joël Hart, secrétaire

SOMMAIRE

 

pages

- Examen de l'avis budgétaire affaires étrangères (M. François Lamy, rapporteur pour avis)

2

- Audition des représentants des syndicats des personnels civils de la défense

3

- Audition de Mme Evelyne Ratte, secrétaire générale pour l'administration du ministère de la défense, sur le projet de loi de finances pour 2004 (n° 1093)

8

- Examen de l'avis budgétaire espace, communications et renseignement (M. Yves Fromion, rapporteur pour avis)

14

- Information relative à la commission

17

Loi de finances pour 2004 : affaires étrangères (avis)

La commission de la défense nationale et des forces armées a examiné pour avis, sur le rapport de M. François Lamy, les crédits des affaires étrangères pour 2004.

Analysant les crédits du chapitre 42-31, où figurent les cotisations françaises à l'ONU et les dépenses relatives à l'Europe de la défense, M. François Lamy, rapporteur pour avis, s'est félicité que, cette année encore, la France tienne à assurer la solidité financière de l'ONU, aussi bien par ses cotisations au budget ordinaire qu'au budget des opérations de maintien de la paix, montrant son souhait de voir l'organisation internationale être le lieu de règlement des crises internationales contre les volontés unilatérales. Les crédits destinés à la sécurité et la défense européennes méritent également d'être approuvés. Avec les opérations Concordia en Macédoine, mais surtout Artémis en République démocratique du Congo, l'Union européenne a montré une première capacité à gérer de vraies crises ouvertes. Le récent Conseil européen de Bruxelles a fait apparaître l'accord unanime des Etats membres de l'Union pour doter celle-ci d'une politique étrangère et de défense commune. Si la création d'un état-major européen permanent pour conduire la gestion opérationnelle des crises fait encore débat, l'idée d'une force militaire de l'Union européenne distincte de l'OTAN commence à s'affirmer.

Le rapporteur pour avis a ensuite rappelé que, en 2003, avec 93,5 millions d'euros, les crédits de la coopération militaire et de défense, qui constituent le chapitre 42-29, étaient passés pour la première fois sous les 100 millions d'euros, en contradiction avec la propre politique du ministère des affaires étrangères : dès lors qu'en Afrique, la volonté de la France est que les interventions pour le maintien de la paix soient d'abord le fait des pays africains eux-mêmes, il paraissait logique que la France travaillât à ce que les forces de ces pays fussent aussi opérationnelles que possible. L'ampleur de la contraction des crédits de la direction de la coopération militaire et de défense allait clairement contre cette politique. Le projet de budget pour 2004 ne traduit aucune amélioration. Les crédits de la DCMD sont maintenus à 93,5 millions d'euros. Ce maintien n'est qu'apparent : la DCMD termine l'année 2003 avec 11,7 millions d'euros de dettes envers le ministère de la défense, pour le remboursement des traitements de ses personnels militaires, qu'il détache auprès d'elle.

Tirant sans doute les conclusions de l'impossibilité pour la DCMD d'amorcer une coopération de défense du niveau et du volume requis hors d'Afrique, le conseil de défense tenu en mai 2003 est revenu sur la réorientation géographique instituée par celui de 1998, qui avait confié la coopération de défense au ministère des affaires étrangères ; la DCMD est désormais invitée à se recentrer sur l'Afrique. Le reste de la coopération militaire, considérée en fonction du type d'opérations soit comme de la coopération opérationnelle, soit comme de l'assistance aux exportations, est laissé aux armées. Le ministère de la défense dispose des personnels, mais aussi des méthodes, comme le système de la commission mixte, pour conduire la coopération militaire hors d'Afrique. Il apparaît aussi que 200 postes d'officiers vont être ouverts au sein d'états-majors multilatéraux, notamment européens, à ces fins. Ces postes, qui s'ajoutent aux 609 postes des armées à l'étranger, dont 380 au sein du réseau des attachés militaires, remplaceront sans doute avantageusement en Europe les 20 postes de coopérants militaires permanents dans les pays d'Europe centrale et orientale que la DCMD va supprimer dans l'année qui vient, après avoir eu tant de difficultés à les ouvrir.

Plus généralement, le nombre de postes de coopérants militaires, qui était de 390 en 2002, va passer à 349 en 2004. Il semble que l'état des dotations de matériels affectés au programme de renforcement des capacités africaines de maintien de la paix Recamp, dont le financement incombe au ministère des affaires étrangères, soit critique.

Dans ce véritable naufrage de la coopération militaire et de défense au ministère des affaires étrangères, un élément d'organisation apparaît cependant. A la suite du conseil de défense, il a été décidé de créer un dispositif de pilotage de la coopération militaire et de défense commun aux ministères des affaires étrangères et de la défense : le comité d'orientation stratégique, coprésidé par les deux ministres, se réunira une fois par an. Ses réunions seront préparées par un comité de pilotage, coprésidé par le directeur de la coopération militaire et de défense et le sous-chef d'état major « relations internationales » de l'état-major des armées. Ce comité de pilotage a récemment tenu sa première réunion.

Le rapport d'information sur la coopération militaire et de défense élaboré lors de la précédente législature s'était interrogé sur le dispositif à mettre en place pour garantir le contrôle politique de la coopération militaire au cas où le ministère des affaires étrangères échouerait dans son entreprise de la conduire directement et où elle serait en conséquence confiée au ministère de la défense. On doit constater que le dispositif permettant l'orientation et le contrôle politique de la coopération militaire et de défense par le ministère des affaires étrangères est en cours d'installation, mais aussi que c'est bien le ministère de la défense qui petit à petit prend la direction opérationnelle de celle-ci, dans une réforme qui n'ose pas dire son nom.

Le rapporteur pour avis a conclu que, tenté par l'abstention face à un élément positif, la mise en place de ce dispositif, et un élément très négatif, l'état des dotations de la coopération militaire et de défense, il s'en remettait à la sagesse de la commission.

La commission a alors émis un avis favorable à l'adoption des crédits des affaires étrangères pour 2004.

Audition des représentants des syndicats des personnels civils de la défense.

La commission a entendu des représentants des syndicats des personnels civils de la défense.

M. Charles Sistach, secrétaire général de la fédération syndicaliste FO de la défense, des industries de l'armement et des secteurs assimilés, a déclaré que le projet de budget 2004 se situait dans la continuité des budgets précédents et a regretté qu'il ignore l'amélioration de la condition des personnels civils du ministère de la défense.

En 2004, les effectifs civils diminueront de 852 postes, soit près de 1 %, alors qu'ils ont déjà été réduits de plus de moitié durant les dix dernières années. Aucune mesure de recrutement d'ouvriers de l'Etat n'a été décidée, le retour des personnels de Giat Industries et de DCN ne pouvant être considéré comme des embauches. Cette volonté politique de réduction permanente d'effectifs pose le problème de la réalisation des missions du ministère. Cette situation, sciemment provoquée, sert de prétexte à l'externalisation, sous couvert de recentrer les personnels sur le cœur de leur métier. Or, il n'est pas évident que l'externalisation aboutisse effectivement à des économies.

L'amélioration de la condition des personnels civils constituera la portion congrue du budget 2004 : seules 223 mesures d'avancement sont prévues pour les ouvriers d'Etat, sur un effectif global de 46 000 personnes, et rien n'est prévu pour les personnels issus d'établissements restructurés ni pour les personnels fonctionnaires. Les crédits de formation sont essentiellement affectés aux personnels dont les emplois sont restructurés et ne participent aucunement à l'amélioration de la technicité de l'ensemble des agents.

Si les personnels militaires, notamment les réservistes, retirent quelques avantages de ce budget en trompe-l'œil, les personnels civils du ministère de la défense sont superbement ignorés. L'externalisation négociée avec le MEDEF, la déconcentration, la rémunération au mérite déstructurent le ministère de la défense, qui ne peut dès lors plus être considéré comme le ministère de la défense « nationale ».

M. Didier Duret, secrétaire général adjoint de la fédération nationale des travailleurs de l'Etat - CGT, a déclaré que la politique ultralibérale menée par l'actuel gouvernement en matière de défense suscitait un rejet profond parmi les agents du ministère ainsi que parmi les personnels des sociétés nationales sous sa tutelle. Les choix opérés tournent le dos à une véritable politique de défense nationale. Le projet de loi de finances 2004 en est la démonstration.

Avec le projet baptisé « Giat 2006 », c'est à un véritable crime d'Etat que veulent se livrer le Président de la République, la ministre de la défense et le président directeur-général de Giat Industries. C'est l'un des fleurons de l'industrie nationale mécanique de haute technologie qui est menacé, à terme, de disparition. Les propositions industrielles et sociales alternatives formulées par les organisations syndicales dans le cadre de l'accord de méthode ont été prises en compte par de nombreux élus, mais n'ont reçu aucun écho de la part de la direction du groupe. Cependant, le plan de M. Vigneron, qualifié d'exemplaire par la ministre, vient d'être suspendu par une décision du tribunal de grande instance de Versailles. Les propositions de reclassement des salariés de Giat, que ce soit au sein du ministère de la défense ou dans l'ensemble des fonctions publiques, ne sont pas crédibles. Face à ce blocage, la seule solution serait d'organiser une table ronde impliquant l'ensemble des parties concernées, mais la ministre n'a pas donné de réponse positive à cette proposition syndicale.

Quatre mois après le changement de son statut, DCN est déjà agitée par des perspectives d'alliances sans projet industriel, alors que les capacités de l'entreprise continuent de se réduire par manque d'investissements dans l'outil de production, du fait aussi d'une organisation du travail essentiellement fondée sur l'accélération de l'externalisation des activités.

Le projet de loi de finances pour 2004 accélère la destruction des capacités industrielles des établissements et réduit les moyens humains, ce qui risque de compromettre les livraisons et commandes des matériels dès 2004. L'aspect social est quasiment absent de ce projet de budget, puisque le ministère ne lui consacrera que 0,38 euro par jour et par agent civil. Dans le même temps, avec une hausse de 27 millions d'euros par rapport à 2003, ce projet fait la part belle au financement de l'armée de métier, consacrant en particulier d'énormes efforts financiers au renforcement de l'arme nucléaire et à sa modernisation, au détriment des commandes d'équipements conventionnels dont ont besoin nos forces armées, de l'amélioration de la condition sociale des salariés de la défense et, au-delà, d'autres secteurs, comme la santé publique ou l'éducation.

M. Jacques Lepinard, secrétaire général de la fédération établissements et arsenaux de l'État - CFDT, s'est félicité que, dans un contexte économique difficile, le projet de budget pour 2004 fasse de la défense une priorité gouvernementale. La progression des crédits du titre V était indispensable pour rétablir le niveau de disponibilité des matériels. Toutefois, l'exécution du budget pour 2004 ne doit pas reproduire les dysfonctionnements affectant actuellement certains services et le principe de « neutralité fiscale » du changement de statut de DCN doit être pleinement respecté. Par ailleurs, il apparaît nécessaire que les crédits d'équipement consacrés aux armements terrestres, plus particulièrement ceux susceptibles de concerner Giat Industries, permettent de limiter les conséquences du plan social de l'entreprise ; la suspension de l'application de ce plan par le tribunal de Versailles est positive, le temps ainsi dégagé devant permettre d'améliorer le traitement social.

La volonté d'externaliser la gestion du patrimoine immobilier de la défense et des parcs automobiles suscite la plus grande inquiétude parmi les personnels civils. Il est souhaitable que des études d'impact soient conduites avant toute prise de décision.

Enfin, M. Jacques Lepinard a salué les efforts prévus en 2004 au profit des personnels civils pour l'amélioration de leur condition. Cependant, les mesures proposées, à hauteur de 13,5 millions d'euros, se conjuguent à la poursuite de la déflation des effectifs et à l'absence persistante de perspectives pour certains personnels. L'effort effectué en direction de la composante militaire ne doit pas conduire à oublier la composante civile.

Mme Marie-Christine Ledieu, secrétaire générale adjointe de l'union nationale des syndicats autonomes, a exprimé sa satisfaction sur le respect par l'Etat de ses engagements de 2003 et sur la hausse des crédits d'équipement proposée dans le projet de budget pour 2004, qui devrait permettre de préserver les carnets de commandes et les emplois des industries de défense.

Cependant, la situation économique peu favorable ainsi que le contexte budgétaire contraint font peser le risque d'une inflexion à la baisse des dépenses militaires de la France et pourraient conduire à ne pas respecter les annuités fixées par la loi de programmation militaire. Il convient de s'interroger sur l'avenir de Giat Industries, dont le plan social vient de faire l'objet d'une décision de justice allant dans le sens des propositions syndicales.

S'agissant de la gestion des ressources humaines, elle a déploré la part très faible des mesures nouvelles réservées au personnel civil, en dépit de certaines avancées. Les conséquences des restructurations projetées par la stratégie ministérielle de réforme risquent d'affecter en priorité les personnels civils, dont les effectifs vont diminuer de 1 %, alors même que la professionnalisation exigerait une augmentation.

M. Denis Lefebvre, président de la fédération CFTC des personnels civils du ministère de la défense, a souligné la pertinence de la hausse du budget du ministère de la défense de 4,3 % dans le contexte international actuel, ainsi que l'intérêt d'exclure les dépenses militaires du pacte de stabilité. Le surcoût lié aux opérations extérieures ne doit pas non plus peser sur le budget du ministère. La CFTC regrette cependant la stagnation des dépenses de fonctionnement et la diminution de 852 postes affectant les personnels civils, notamment les ouvriers d'Etat. 344 de ces emplois doivent être supprimés en région Sud-Ouest, alors que des reclassements devront être trouvés pour les personnels des établissements de DCN à Ruelle et de Giat Industries à Tarbes, Toulouse et Tulle. L'effort réalisé en vue d'améliorer les régimes indemnitaires des fonctionnaires du ministère de la défense répond à une nécessité, car ces personnels ont été largement touchés par des restructurations successives ces dernières années. La CFTC attache une importance particulière à la revalorisation des indemnités des adjoints administratifs et des personnels techniques de catégorie C, ainsi qu'à la fluidité de l'avancement.

S'agissant de Giat Industries, après une première décision de justice encourageante en référé, la CFTC demande une révision totale du projet Giat 2006, tant dans son volet industriel que dans son volet social. DCN, désormais dotée d'un nouveau statut de société de droit privé, devra pour sa part bénéficier d'un plan de charge conséquent. Enfin, la mutualisation des ressources, déjà mise en place pour le soutien de la délégation générale pour l'armement (DGA), laisse présager un recours excessif à l'externalisation qui constitue, avec la mise en œuvre de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF), un des grands thèmes de la modernisation du ministère. La plus grande vigilance s'impose en la matière.

Tout en reconnaissant la conformité du projet de budget aux orientations de la loi de programmation militaire, M. Gérard Aubert, président de la fédération de l'encadrement civil de la défense - CGC, a insisté sur les difficultés affectant le secteur industriel du ministère. À l'instar de ce qui s'est passé pour l'armée de terre avec Giat en 1990, la marine ne peut plus s'appuyer sur le soutien de la direction des constructions navales, depuis sa transformation en société nationale de droit privé le 1er juin dernier. DCN devra être capitalisée en trois ans à hauteur de 350 millions d'euros, au détriment des crédits d'investissement de la DGA, et la marine devra acquitter la TVA. De plus, les cadres n'ont plus confiance dans la nouvelle société et souhaitent massivement réintégrer les services de l'Etat. Les deux composantes industrielles subsistant à la DGA rencontrent aussi des difficultés. À la suite de l'interdiction de recruter opposée à la SIMMAD, le service de la maintenance aéronautique a dû faire face à de graves retards de paiement, assortis d'intérêts moratoires, qui perturbent l'approvisionnement et menacent l'activité des trois ateliers industriels de l'aéronautique. Les crédits d'investissement de la direction des centres d'expertise et d'essais sont par ailleurs réduits de 30 % en 2004, cette baisse des moyens s'ajoutant au vieillissement des personnels. D'une façon générale, le syndicat défense-CGC craint que la politique d'armement évolue vers une mise en concurrence accrue et vers le recours aux achats sur étagères, dictés par un souci de rentabilité immédiate, aux dépens d'une industrie nationale de pointe.

Des économies peuvent néanmoins être réalisées sur les frais de fonctionnement du ministère, les efforts engagés jusqu'ici s'étant cantonnés aux personnels civils ou aux hommes du rang. Le personnel civil coûtant moins cher que le personnel militaire à l'Etat, il serait judicieux d'employer exclusivement des civils sur des postes non projetables. De plus, les primes d'embarquement ou de vol ne devraient pas être attribuées à des militaires occupant un poste administratif en métropole et ne partant jamais en opérations extérieures. Les distorsions de traitement existant entre personnels civils et militaires, y compris sur des postes identiques, ne sont pas toujours justifiées. Une rationalisation des emplois entre personnels civils et militaires s'impose donc. Elle permettrait ainsi de réduire le titre III et de laisser des marges de manœuvre pour le titre V.

Le président Guy Teissier a souligné l'importance de l'augmentation du budget de la défense et précisé que les crédits prévus pour 2003 seront consommés en totalité, ce qui n'était pas arrivé depuis très longtemps. La mission d'information sur le contrôle de l'exécution des crédits de la défense a ainsi pu constater que 97 % des crédits du titre III avaient été consommés au 30 septembre. Pour la deuxième année consécutive, l'annuité prévue par la loi de finances initiale sera exactement conforme à la loi de programmation militaire.

L'externalisation de certaines activités va de pair avec l'existence d'une armée moderne et professionnelle. Le président Guy Teissier a précisé qu'à titre personnel il n'était pas favorable à une externalisation trop poussée et empiétant sur le cœur du métier militaire. L'exemple de l'armée britannique, qui tente actuellement de revenir sur le processus d'externalisation du service de santé, doit être médité.

En ce qui concerne les crédits destinés à l'acquisition de matériels, les prévisions de la loi de programmation militaire ainsi que les livraisons prévues en 2004 montrent que l'effort est soutenu. Les crédits d'investissement des titres V et VI progressent de 9 % en 2004.

Il est nécessaire que le changement de régime de TVA pour DCN soit neutre pour le budget de la marine, les crédits nécessaires devant être ouverts dans le collectif de fin d'année 2003. Le plan de charge de DCN reste convenable et sera consolidé à terme par le programme Barracuda. La commande du deuxième porte-avions est prévue pour 2006, la décision sur le mode de propulsion de ce bâtiment devant être prise prochainement.

Il conviendrait de traiter différemment les dépenses militaires dans le cadre du pacte de stabilité, afin de tenir compte de l'effort consenti pour la sécurité de tous les Européens par certains Etats, dont au premier chef la France.

La SIMMAD s'est révélée être un outil précieux qui a permis d'améliorer sensiblement la disponibilité des matériels de l'armée de l'air. Si des retards de paiement ont pu être constatés, ils ont été comblés depuis lors. En 2003, les armées n'ont pas constitué une variable d'ajustement du budget. Les effectifs d'officiers supérieurs sont parfois considérés comme élevés, mais il convient de souligner avec quelle efficacité la réduction du format des armées et le passage à la professionnalisation ont été conduits, notamment au regard des difficultés que connaissent certains pays voisins. La possibilité pour les militaires de cumuler leur retraite avec un emploi civil apparaît nécessaire. S'agissant des officiers généraux, leurs compétences peuvent être mises à profit par les industries de défense et ils peuvent servir de lien entre les armées et le monde civil.

M. Jean-Claude Viollet a rappelé que la commission de la défense lui avait confié, ainsi qu'à M. Georges Siffredi, une mission d'information sur le suivi des mesures sociales d'accompagnement relatives à Giat. Il convient d'étudier avec attention les propositions formulées par les syndicats dans le cadre de l'accord de méthode ainsi que le traitement qui leur a été réservé par la direction, de prendre en considération la complexité des statuts des personnels et de ne pas oublier le sort des sous-traitants, tout en ayant conscience des limites des possibilités de reclassement dans les fonctions publiques ainsi que de celles offertes par les emplois créés en vue de revitaliser les bassins concernés par la réforme de Giat Industries. Enfin, la question des alliances dans le cadre européen est posée.

Rappelant qu'il avait publié, en 2002, un rapport sur l'externalisation, M. Michel Dasseux a constaté avec satisfaction que les organisations syndicales étaient sensibles aux problèmes soulevés par ce sujet et que même les députés les plus libéraux étaient conscients des difficultés. L'externalisation ne doit pas conduire la puissance publique à déléguer ses fonctions régaliennes et l'expérience britannique montre qu'il est très difficile de revenir en arrière.

M. Jean-Claude Sandrier a souligné que deux événements nouveaux étaient intervenus s'agissant de Giat : le rapport des cabinets mandatés par les syndicats, concluant à la possibilité de mettre en œuvre un plan alternatif, et le désaveu infligé à la direction par le tribunal de grande instance de Versailles. Le choix de s'adresser au Président de la République, chef des armées, est fondé puisqu'il s'agit d'une question humaine et industrielle, mais également stratégique. Il convient de soutenir l'initiative d'une table ronde réunissant tous les acteurs concernés afin de définir une solution industrielle et stratégique, cette dernière étant indispensable pour assurer l'indépendance nationale en matière de défense.

M. Charles Sistach a souligné que ses inquiétudes portaient sur le recours à l'externalisation lorsqu'il s'agit d'activités du cœur du métier de la défense. En la matière, le respect du dialogue social et des intervenants doit être réel. Il est à craindre que ce processus corresponde davantage au souhait de dégager des marges de manœuvre plutôt qu'à celui d'améliorer les capacités militaires.

Le président Guy Teissier a indiqué qu'il n'était pas persuadé que les marges éventuellement dégagées bénéficient au ministère de la défense.

M. Jérôme Rivière s'est déclaré choqué de l'exacerbation par certains syndicats des différences entre les personnels civils et militaires. Les officiers ont mené à bien les restructurations des armées et la professionnalisation. Compte tenu de la forte amélioration des crédits de la défense en 2003 et 2004, on peut s'interroger sur l'attitude de ces organisations syndicales lorsque ce même budget diminuait lors de la précédente législature.

Audition de Mme Evelyne Ratte, secrétaire générale pour l'administration du ministère de la défense, sur le projet de loi de finances pour 2004.

La commission a entendu Mme Evelyne Ratte, secrétaire générale pour l'administration du ministère de la défense, sur le projet de loi de finances pour 2004 (n° 1093).

Mme Evelyne Ratte a indiqué que l'élaboration des lois de finances concernait ses services à plusieurs titres :

- le secrétariat général pour l'administration (SGA) participe, par l'intermédiaire de la direction des affaires financières, à la préparation du budget du ministère et dispose d'une vision d'ensemble sur les grands équilibres qui le composent ;

- le SGA gère l'évolution statutaire et indemnitaire des personnels, en particulier civils, par l'intermédiaire de la direction de la fonction militaire et du personnel civil ;

- à travers les deux directions issues en tout ou partie de l'ex-secrétariat d'Etat aux anciens combattants, le SGA a la responsabilité de l'évolution et de la négociation des crédits en faveur du monde combattant ;

- enfin, le SGA est lui-même gouverneur de crédits.

Le SGA ne gère en propre que 169,1 millions d'euros de crédits de fonctionnement et, en ce qui concerne les investissements, 125,7 millions d'euros d'autorisations de programme et 143,1 millions d'euros de crédits de paiement.

Ces crédits sont affectés à cinq missions principales :

- la gestion de l'administration centrale, qui bénéficie de 57 millions d'euros en fonctionnement, tandis que les investissements s'élèvent à 45 millions d'euros d'autorisations de programme et 62 millions d'euros de crédits de paiement ;

- la mise en œuvre de la journée d'appel et de préparation à la défense (JAPD), pour 26,7 millions d'euros ;

- l'action sociale ;

- les travaux d'infrastructure en matière de logements civils et militaires : 10 millions d'euros seront affectés à l'entretien et 54 millions d'euros à la construction ;

- l'aide au monde combattant, par le biais de subventions aux établissements publics et notamment à l'office national des anciens combattants, pour 49,4 millions d'euros, et à l'institut national des Invalides, pour 7,1 millions d'euros ; 6,5 millions d'euros sont affectés au fonctionnement des directions interdépartementales des anciens combattants.

Les crédits de fonctionnement augmentent de 4 % du fait de la modification du périmètre de calcul ; les crédits d'investissement diminuent en raison de la fin de certaines opérations. La gestion des crédits du secrétariat général pour l'administration s'inscrit à la fois dans la recherche d'une meilleure efficacité et dans l'anticipation des méthodes que la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) va introduire.

Dans cette optique, trois priorités ont été définies :

- la mise en place d'enveloppes de crédits limitatifs pour chaque entité dont le SGA assure le soutien. L'expérience concerne cette année les frais de déplacement. En 2004, il est prévu de l'étendre aux dépenses d'informatique, d'abonnements, d'achat de mobilier et de formation. Un système de compte rendu périodique de consommation de crédits et d'alerte, en cas de consommation trop rapide, a été mis en place. En 2005, l'exercice concernera les dépenses d'entretien immobilier, d'équipements informatiques et télématiques. La mise en place progressive d'une comptabilité analytique sur la base d'unités d'oeuvres permettra de rapprocher une activité et son coût ;

- l'année 2004 sera consacrée à améliorer les outils de pilotage des effectifs civils. Le SGA emploie, au 1er mai 2003, 7 451 agents, soit 1,8 % des effectifs du ministère (76 % de civils et 24 % de militaires), ce qui représente une masse salariale de 210 millions d'euros. Ces effectifs ne sont pas identifiés en nomenclature budgétaire, dans la mesure où les militaires, mis à disposition par les armées, sont comptabilisés dans les effectifs budgétaires des armées ; les personnels civils sont intégrés dans l'ensemble des personnels civils de l'administration centrale et des services déconcentrés du ministère. Les effectifs du secrétariat général pour l'administration ont baissé de 8,4 % entre mai 2002 et mai 2003. Cette diminution va se poursuivre en 2004, du fait de la non compensation partielle des départs à la retraite et d'économies en emplois dans certaines directions ;

- le contrôle de gestion sera développé ; certaines directions, comme la direction du service national, font déjà l'objet d'un contrôle de gestion articulé sur des indicateurs d'activité trimestriels. Cette direction a connu une profonde réorganisation depuis 1997 et a été contrainte d'améliorer sa productivité : ses effectifs sont passés de 7 150 postes en 1996 à 2 900 en 2003. Le coût de la journée d'appel et de préparation à la défense est passé de 162 euros en 2002 à 134 euros en 2003. L'objectif, pour 2004, est d'appliquer le contrôle de gestion à la fonction immobilière et à la fonction archives. La mission d'aide au pilotage par le contrôle de gestion sera rattachée directement au SGA qui aura ainsi la responsabilité d'un système coordonné et cohérent de contrôle de gestion pour l'ensemble du ministère. En 2004, des efforts devront être consentis en matière de recrutement de contrôleurs de gestion et de formation des personnels. Ils porteront également sur la définition d'outils permettant d'extraire les données des systèmes comptables et financiers et sur la présentation d'indicateurs statistiques. La conduite des programmes d'armement, la maintenance opérationnelle des équipements, les fonctions de soutien sont les domaines sur lesquels portera cet effort.

Abordant la politique des ressources humaines du ministère de la défense, Mme Evelyne Ratte s'est déclarée convaincue que la professionnalisation n'était pas un défi pour les seuls militaires, mais concernait également les personnels civils.

Les effectifs civils connaîtront en 2004 une légère réduction de 1 % (- 852 emp1ois, ce qui portera les effectifs budgétaires à 97 721 emplois). Cette évolution marque la participation du ministère à l'effort de maîtrise des emplois publics. Elle résulte de l'absence de renouvellement d'une partie des départs à la retraite (612), de la suppression de postes vacants (81) et de la transformation d'emplois (15). Comme, en contrepartie, le ministère de la défense accueille des emplois du compte de commerce DCN à hauteur de 421 postes, le solde se situe donc à - 431 emplois. Les suppressions concernent prioritairement l'administration centrale civile et militaire, ainsi que la délégation générale pour l'armement (DGA), même si cette dernière a été autorisée à créer cent emplois d'acheteurs.

Dans la continuité du budget 2003, le plan de reconnaissance professionnelle pour les personnels civils bénéficie d'un nouvel effort en vue d'améliorer l'attractivité du ministère. En deux ans, le montant des mesures nouvelles atteint près de 27 millions d'euros, ce qui est supérieur au total des crédits obtenus dans les budgets de la période 1998-2002. Ces mesures qui se partagent en revalorisation de primes et amélioration de déroulement de carrière concernent cette année tout particulièrement trois catégories de personnels :

- les personnels d'encadrement, qui mettent en œuvre la réforme de l'Etat ;

- les personnels de la filière sociale, qui accompagnent et soutiennent les agents dans les transformations et adaptations de structure ;

- les fonctionnaires de l'ordre technique, afin de leur donner des déroulements de carrière rénovés correspondant à la nature et à la qualification des compétences techniques.

Le ministère de la défense comptera, en 2004, 356 752 militaires. Des créations de postes sont prévues : 1 200  gendarmes, 1 000 engagés volontaires de l'armée de terre (EVAT) et 179 personnels pour le service de santé. L'effort d'amélioration de la condition militaire est poursuivi et les objectifs du fonds de consolidation de la professionnalisation (FCP) devraient être atteints. Le plan d'amélioration de la condition militaire (PACM) représente 53,08 millions d'euros en 2004 et permettra de financer onze mesures catégorielles. L'annuité du FCP s'établit en 2004 à 49,93 millions d'euros, en augmentation de 27 millions, et assure le financement de mesures d'attractivité et de fidélisation. Ces dispositions incluent notamment la mise en place, à hauteur de 11,92 millions d'euros, de primes d'engagement, dont le taux est modulé en fonction de la difficulté à recruter. 33,93 millions d'euros sont prévus en 2004 pour financer l'attribution d'une indemnité de haute technicité reconnaissant les responsabilités exercées par les sous-officiers comptant plus de vingt ans de service. Des primes pour les spécialités soumises à une forte concurrence sur le marché de l'emploi sont instaurées tandis qu'est poursuivi le programme immobilier d'accueil des jeunes engagés chargés de famille.

La reconnaissance de la compétence et des résultats par la politique de rémunération est engagée au ministère de la défense depuis plusieurs années. Pour les militaires, elle se fonde sur la notation ainsi que sur le renouvellement ou non des contrats. Il convient d'aller plus loin, notamment pour les officiers supérieurs et généraux, afin d'introduire la possibilité de moduler les rémunérations. La création d'une prime de résultat pour les personnels de la gendarmerie est également envisagée. S'agissant des personnels civils, les primes des cadres supérieurs peuvent déjà varier du simple au triple et sont attribuées par les directeurs en fonction des résultats individuels.

Mme Evelyne Ratte a ensuite abordé la réforme de l'Etat et la modernisation des méthodes de gestion.

Les actions d'externalisation doivent être développées, afin d'améliorer l'efficacité des dépenses militaires. Une directive ministérielle du 26 mars 2003 définit le cadre de cette démarche, le recours à l'externalisation étant considéré comme un moyen d'améliorer la performance des services et de revaloriser le travail du personnel. La poursuite des actions d'externalisation s'inscrit dans une approche pragmatique et doit être réversible, en fonction des résultats obtenus. Parallèlement, un dispositif de formation à la mobilité sera proposé aux personnels civils dont l'emploi est concerné par une mesure de restructuration liée à l'externalisation. Plusieurs nouveaux projets d'externalisation seront examinés en 2004, en ce qui concerne la gestion des logements, la formation initiale des pilotes d'hélicoptères, la gestion du parc des véhicules automobiles ainsi que le soutien en opérations extérieures.

La mise en commun, au niveau régional, des moyens affectés aux activités de soutien sera encouragée. Des travaux en ce sens sont actuellement conduits par les comités interarmées régionaux qui comportent des représentants des forces armées et des services interarmées. Cela concerne, en particulier, le dépannage des véhicules militaires, le regroupement de certains marchés de services et de fournitures courantes et l'interarmisation du transport de fret et des transports collectifs de personnel.

La ministre a souhaité dynamiser la politique immobilière et a engagé à ce titre plusieurs études. Un groupe de travail définit actuellement les critères de répartition du patrimoine du ministère, afin de déterminer les immobilisations qui doivent être impérativement conservées, celles qui peuvent être vendues et celles sur lesquelles persistent des interrogations.

La cohérence de l'outil informatique d'administration et de gestion sera renforcée, notamment par la création de bases de données communes et la mise en place d'équipements compatibles, afin de réaliser des économies d'échelle.

Enfin, le ministère de la défense a engagé un processus de dématérialisation des procédures d'achat, en ouvrant sur Internet une véritable place de marché du service public de défense qui concerne la totalité des achats du ministère. Cet outil est très largement utilisé par les entreprises : en août, près de 2 000 sociétés y étaient inscrites.

Ces différentes initiatives ont pour objectif d'améliorer la qualité du service rendu et de réaliser des gains de productivité ; cette démarche s'inscrit pleinement dans la volonté du Premier ministre de mettre en œuvre une véritable réforme de l'Etat.

Le président Guy Teissier a exprimé son inquiétude au regard de la faiblesse du recrutement prévu pour la direction générale de la sécurité extérieure (DGSE) : une personne sous statut militaire et quelques dizaines de civils viendront renforcer les effectifs de la DGSE, dont le budget baissera légèrement. Il a souhaité connaître par ailleurs l'état d'avancement des travaux de la commission de révision du statut général des militaires, présidée par M. Renaud Denoix de Saint-Marc, vice-président du Conseil d'Etat.

Mme Evelyne Ratte a indiqué que les personnels civils de la DGSE étaient nombreux. L'encadrement est assuré par le corps particulier des chargés d'études, qui devrait bénéficier des mêmes revalorisations que celui des administrateurs civils. Un effort est fait dans le projet de loi de finances pour 2004 en vue d'améliorer l'attractivité des postes civils de la DGSE. Sur les 13,5 millions d'euros prévus pour le personnel civil, 2 millions sont réservés à cette direction, afin de financer des revalorisations indemnitaires et des congés spéciaux.

Abordant la question de la réforme du statut militaire, elle a précisé que le rapport de la commission présidée par M. Denoix de Saint-Marc serait remis à la ministre dans les prochaines semaines. Les travaux ont duré un peu plus longtemps que prévu, dans la mesure où l'examen de l'incidence de la réforme des retraites sur les limites d'âge a dû être ajouté au programme de travail. Les conclusions du rapport devraient être présentées aux conseils de la fonction militaire (CFM) et au conseil supérieur de la fonction militaire (CSFM) lors de leur session de décembre. Un projet de loi pourrait être déposé à la fin du printemps.

M. René Galy-Dejean a souligné que l'action exemplaire de réforme accomplie par le ministère de la défense, comparativement à d'autres, devait être davantage mise en valeur. Évoquant l'éventualité d'une gestion interministérielle des cessions d'actifs, il a souhaité savoir dans quelle mesure le ministère de la défense était concerné. Enfin, il a demandé des précisions sur l'implication du secrétariat général pour l'administration dans la mise en œuvre de la loi organique relative aux lois de finances : le budget du ministère ne sera plus organisé par armée, mais par agrégats couvrant les grands programmes, ce qui implique une évolution par rapport aux structures actuelles du ministère.

Mme Evelyne Ratte a rappelé que le Premier ministre s'était engagé à ce qu'un million de mètres carrés publics puissent être aliénés au cours des prochaines années. Un chargé de mission a été nommé pour mettre en œuvre cet engagement. Cette décision suppose-t-elle la création d'une agence interministérielle supplémentaire ? Aucune modification n'a été apportée à ce jour au processus de décision en cours au sein du ministère de la défense, ni à la structure financière, notamment pour ce qui concerne les retours financiers issus des cessions. Le ministère apportera son concours à la réalisation de l'objectif fixé par le Premier ministre.

La LOLF sera un outil très puissant qui contribuera à faire évoluer le ministère. La ministre a souhaité améliorer le processus de décision, en donnant au chef d'état-major des armées la possibilité d'influer sur les arbitrages en matière capacitaire. Jusqu'ici, ce dernier, très présent lors de l'élaboration des lois de programmation militaire, l'était moins lors de la mise en œuvre annuelle de la programmation à travers les lois de finances. Il convient de permettre une cohérence des choix tout au long de la loi de programmation.

M. Charles Cova a souhaité avoir des informations sur les conséquences du rattachement au ministère de la défense du secrétariat d'état aux anciens combattants.

Mme Evelyne Ratte a estimé que cet adossement bénéficiait largement au secrétariat d'Etat en lui facilitant notamment les négociations budgétaires. Le ministère de la défense et le secrétariat d'Etat aux anciens combattants tirent tous deux profit de cette solution. Cette réforme a été accompagnée d'une rationalisation de la politique de la mémoire, jusqu'ici exercée conjointement par l'office national des anciens combattants (ONAC), les directions interdépartementales des anciens combattants et par la direction de la mémoire, du patrimoine et des archives (DMPA). Désormais, l'ONAC s'est vu confier la responsabilité de l'ensemble de cette politique dans le cadre d'un contrat d'objectifs. Cent postes de chargés de mission seront créés afin de lui permettre de remplir sa mission. Les emplois correspondant à la politique de la mémoire des directions interdépartementales des anciens combattants ont été supprimés, tandis que ceux de la DMPA le seront en deux ans.

M. Jérôme Rivière a interrogé Mme Evelyne Ratte sur la valeur marchande des actifs pouvant être cédés. Puis, il a souhaité savoir si l'utilisation d'Internet destinée à rendre immatérielles les procédures d'appel d'offres est facturée aux entreprises et, dans l'affirmative, s'il est envisageable de moduler ce coût en fonction du degré d'engagement de ces dernières en faveur des réserves. Enfin, il a demandé si, dans le cadre de la politique d'externalisation, les comparaisons entre les prix pratiqués par les entreprises privées et le coût du service public tiennent compte de l'impact de la TVA.

Mme Evelyne Ratte a indiqué que le secrétariat général pour l'administration ne disposait pas d'une évaluation d'ensemble de la valeur marchande du patrimoine susceptible d'être cédé. Les évaluations sont conduites en fonction de la réalisation de chaque opération et l'on ne dispose pas encore d'une capacité de gestion systématique et d'arbitrage des actifs, comme cela se pratique dans le secteur privé.

L'utilisation d'Internet pour accéder aux marchés publics du ministère de la défense est un service facturé aux entreprises, mais dont le coût diminue régulièrement. L'idée de moduler les prix des prestations en vue d'inciter les entreprises à soutenir les réserves mérite d'être étudiée.

La TVA est un élément qui vient perturber les comparaisons entre le coût des prestations réalisées par le service public et celles fournies par le secteur privé. L'analyse précise du coût du maintien d'une activité au sein du service public reste très difficile à réaliser.

M. Yves Fromion a précisé que, si les crédits de la DGSE baissent en 2004, c'est en raison de l'évolution du titre V, liée à l'achèvement du programme d'infrastructures immobilières. En revanche, les crédits du titre III augmentent de trois millions d'euros et permettent le recrutement de 47 agents civils supplémentaires.

M. Jean Lemière a demandé si le suivi du sort des blessés de l'attentat de Karachi était de la compétence du secrétariat général pour l'administration, en relevant que la revendication des associations de blessés portant sur l'obtention d'une rente à 100 % n'a pas été satisfaite.

Mme Evelyne Ratte a précisé que ce suivi relevait pour l'essentiel de DCN et de la délégation générale pour l'armement, mais que le secrétariat général pour l'administration avait participé à la rédaction de textes, à l'accompagnement en vue de la recherche d'emplois et à la gestion des dossiers de pension. S'il paraît difficile d'accéder aux demandes complémentaires, l'instruction de ce dossier continue toutefois.

Loi de finances pour 2004 : espace (avis)

La commission a examiné pour avis, sur le rapport de M. Yves Fromion, les crédits de l'espace, des communications et du renseignement pour 2004.

M. Yves Fromion, rapporteur pour avis, a précisé que l'espace, les communications et le renseignement sont un ensemble cohérent, que reflète le système de forces « commandement, communications, conduite des opérations et renseignement », plus connu sous l'acronyme C3R. Dans chacun de ces domaines, les applications spatiales sont déterminantes, ce qui justifie que la France consacre à l'espace militaire un budget de 402,3 millions d'euros en crédits de paiement et de 333,6 millions d'euros en autorisations de programme, aux termes du projet de loi de finances pour 2004, loin toutefois derrière les Etats-Unis, qui y consacrent plus de 20 milliards de dollars.

L'espace est devenu un paramètre technologique du champ de bataille, qu'il s'agisse de la mise en œuvre de satellites d'observation et de télécommunications, qui permettent aux informations de circuler entre les forces, ou de satellites de navigation, qui sont indispensables pour l'usage de missiles de croisière ou de bombes guidées. Les équipements des armées disposent de systèmes de réception de données ou de communication par satellites. Même les forces spéciales possèdent des récepteurs du système de navigation américain Global positionning system (GPS), en attendant le Galileo européen. Demain, l'ensemble des fantassins sera équipé de moyens de communication ou de positionnement tout aussi sophistiqués, grâce au système individuel d'infanterie FELIN. Des expérimentations vont même être conduites pour examiner la possibilité d'une liaison optique haut débit entre un satellite et un aéronef en 2006, en attendant la généralisation de ce mode de diffusion d'informations sur un théâtre d'opération.

L'effort de la France en faveur du C3R doit se poursuivre, car son autonomie de décision et son ambition de devenir une nation-cadre européenne en dépendent. De ce point de vue, le projet de loi de finances pour 2004 est satisfaisant, car il conduira à la mise en orbite des premiers satellites de télécommunications et d'observation optique de nouvelle génération, Syracuse III-A et Hélios II-A. De même, la mise en œuvre du système informatique de commandement des armées (SICA) continuera, tandis que la modernisation de la chaîne de commandement des forces se poursuivra, à travers le système d'information et de commandement des forces (SICF) de l'armée de terre, le système de commandement et de conduite des opérations aériennes (SCCOA) de l'armée de l'air ou le système d'information et de commandement du XXIème siècle (SIC 21) de la marine. Les investissements en faveur des moyens de transmission automatique de données, notamment la liaison 16 équipant les matériels les plus récents, devront toutefois s'intensifier pour préserver l'interopérabilité des forces.

A compter de 2004, les moyens de renseignement des armées seront renouvelés grâce à la mise en service de dix-huit drones Sperwer, dans le cadre du programme de système de drone lent et tactique intérimaire (SDTI), et à celle de trois drones de moyenne altitude longue endurance (MALE) Eagle, dans le cadre du programme de système intérimaire de drone MALE (SIDM). A plus long terme, la loi de programmation militaire prévoit que les armées possèderont quarante drones tactiques multicapteurs-multimissions (MCMM), livrés à partir de 2008, et douze nouveaux drones MALE, commandés en 2009. Le ministère de la défense a également décidé d'engager un programme complémentaire de démonstrateur d'unmanned combat aerial vehicle (UCAV), pour un montant de 300 millions d'euros. Il permettra d'évaluer un nouveau drone de combat en situation opérationnelle dès 2009, évitant ainsi que la France et l'Europe se laissent distancer dans la maîtrise de ces technologies. Des projets de mini et micro-drones seront menés en parallèle, mais aucun programme de drone volant à haute altitude avec une longue endurance (HALE) n'est actuellement envisagé, malgré un potentiel intéressant pour le renseignement électromagnétique et des possibilités de coopération avec l'Allemagne. Dans le domaine du renseignement humain, les dotations de l'agrégat regroupant la direction générale de la sécurité extérieure (DGSE), la direction du renseignement militaire (DRM) et la direction de la protection et de la sécurité de la défense (DPSD) devraient augmenter de 1,5 % au titre III et diminuer de 12 % au titre V, cette baisse étant essentiellement imputée aux dépenses d'infrastructure de la DGSE et non aux équipements. L'accélération de la course aux nouvelles technologies constituant un défi technique majeur, les services de renseignement doivent disposer des moyens financiers pour le relever. Il leur est également indispensable de recruter davantage, ce qui n'exclut pas de réfléchir sur les missions, ni sur un éventuel redéploiement de moyens humains au bénéfice de la recherche de renseignements.

Deux décisions importantes ont été prises lors du conseil ministériel de l'agence spatiale européenne (ESA) des 26 et 27 mai 2003.

En premier lieu, 960 millions d'euros ont été débloqués sur la période 2005-2009 pour rétablir la rentabilité et la fiabilité d'Ariane V. De même, 314 millions d'euros seront consacrés à l'implantation à Kourou d'un pas de tir spécifique à Soyouz, de manière à compléter la gamme des lanceurs d'Arianespace. En contrepartie, les coûts de production des industriels diminueront. Grâce à la conjugaison de ces efforts, la spirale des pertes d'exploitation d'Arianespace, de l'ordre de 630 millions d'euros entre 2000 et 2002, devrait s'interrompre.

En second lieu, la phase de développement du programme Galileo a été financée à hauteur de 1,1 milliard d'euros, mettant fin à près de deux ans d'atermoiements. Sous l'impulsion de la France, l'Europe a réagi. Mais, sur le plan industriel, plus de deux ou trois maîtres d'œuvre peuvent-ils subsister en l'état actuel du marché ? Aux Etats-Unis, Loral et Lockheed Martin fusionneront sans doute leurs branches satellites. En Europe, Alcatel Space, EADS-Astrium et Alenia Spazio pourraient aussi rassembler leurs activités, à moins qu'ils n'optent pour des coopérations avec d'autres industriels, notamment russes.

Pour ce qui concerne la dimension militaire de l'Europe spatiale, la Convention sur l'avenir de l'Europe et les réflexions de la Commission européenne dans le Livre vert sur la politique spatiale évoquent des pistes d'évolution intéressantes. Actuellement, les Etats membres privilégient l'exploitation en commun d'équipements nationaux. Leurs besoins et leurs centres d'intérêt sont pourtant les mêmes. De sources industrielles et militaires, le coût d'un système spatial militaire complet au service des Etats membres de l'Union européenne n'excèderait pas 700 millions d'euros annuels. Partagé entre les Etats membres, ce financement représenterait le tiers de leur contribution globale à l'ESA. C'est indéniablement l'objectif à poursuivre à moyen terme, après qu'auront été définis les besoins communs et les structures chargées de les satisfaire. Des analyses sont en cours à ce sujet, dans le cadre du plan d'action européen sur les capacités (ECAP). Un groupe d'action, présidé par la France, est chargé de formuler des propositions en matière d'équipements spatiaux pour permettre à l'Union européenne de conduire des missions de Petersberg. Regroupant la France, l'Italie, l'Espagne, le Royaume-Uni, l'Allemagne, la Belgique, la Grèce et les Pays-Bas, il pourrait déboucher, à terme, sur des coopérations structurées dans le domaine spatial. La France, dans cette dynamique, a un rôle important à jouer. C'est en tout cas la volonté du Gouvernement, dont le projet de loi de finances pour 2004 apporte une illustration budgétaire concrète.

M. Joël Hart, président, a souligné l'importance que revêt désormais le secteur spatial pour le renseignement et la conduite des opérations militaires. Il s'agit d'un domaine certainement plus abstrait que l'équipement ou les effectifs des différentes armées, mais il est essentiel. A cet égard, les possibilités de coopérations spatiales européennes sont très intéressantes et méritent de retenir l'attention, notamment dans la perspective de la construction de l'Europe de la défense.

M. Yves Fromion, rapporteur pour avis, a insisté sur l'implication grandissante des applications spatiales dans l'art de la guerre. L'espace n'est pas pour autant une nouvelle dimension du combat militaire, qui s'adjoindrait aux dimensions terrestre, maritime et aérienne. Il a simplement modifié les techniques et les équipements des forces.

Conformément aux conclusions du rapporteur pour avis, la commission a émis un avis favorable à l'adoption des crédits de l'espace, des communications et du renseignement pour 2004.

Information relative à la commission

La commission a nommé M. Jean Lemière rapporteur d'information sur l'industrie navale en Europe.

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