COMMISSION des LOIS CONSTITUTIONNELLES,
de la LÉGISLATION et de l'ADMINISTRATION GÉNÉRALE
de la RÉPUBLIQUE

COMPTE RENDU N° 22

(Application de l'article 46 du Règlement)

Mercredi 29 janvier 2003
(Séance de 9 heures 30)

Présidence de M. Pascal Clément, président

SOMMAIRE

 

pages

- Proposition de loi, adoptée par le Sénat, portant réforme des règles budgétaires et comptables applicables aux départements (n° 472) (M. Alain Gest, rapporteur). (rapport)

2

- Informations relatives à la Commission

 

La Commission a examiné, sur le rapport de M. Alain Gest, la proposition de loi, adoptée par le Sénat, portant réforme des règles budgétaires et comptables applicables aux départements (n° 472).

Rappelant que la proposition de loi s'inscrivait dans le cadre d'une réforme d'ensemble de la comptabilité locale, commencée en 1994 avec l'instruction comptable M 14 applicable aux communes, le rapporteur a souligné la grande technicité du dispositif adopté par le Sénat à l'initiative d'un de ses membres. Il a précisé que le texte avait été élaboré en étroite concertation avec l'Assemblée des départements de France, les juridictions financières et le Centre national de la Fonction publique territoriale et faisait en outre l'objet d'une expérimentation, conduite dans seize départements en 2001 et étendue à six autres en 2003. Présentant les objectifs poursuivis par la proposition de loi, il a indiqué qu'il s'agissait d'instaurer des règles permettant de donner une image fidèle de la composition du patrimoine des départements et de faciliter le contrôle des autorisations de dépenses et de recettes, tout en améliorant l'information des élus et des citoyens. Il a ajouté que le texte avait également pour objet de moderniser des règles issues, pour certaines, de la loi du 10 août 1871 relative aux conseils généraux. Tout en exprimant sa satisfaction devant l'unanimité recueillie au Sénat, il a déclaré partager les réserves des sénateurs sur la complexité des documents comptables, et a rappelé que le ministre délégué aux libertés locales avait annoncé la création d'un groupe de travail sur ce sujet.

Il a ensuite évoqué les innovations principales du texte, en indiquant que le conseil général aurait désormais la faculté de voter le budget par nature ou par fonction, assortie d'une obligation d'annexer au budget une présentation croisée par nature si le budget est voté par fonction et d'une présentation par fonction si le budget est voté par nature. Il a mentionné la possibilité de procéder par autorisations d'engagement pour certaines dépenses de la section de fonctionnement, sur le modèle applicable aux autorisations de programme pour les dépenses de la section d'investissement. Il a ensuite exposé le mécanisme d'affectation et de reprise de résultat, qui permet aux conseils généraux d'anticiper les résultats de l'année précédente dans le budget primitif de l'année, puis précisé que les dotations aux amortissements et aux provisions seraient désormais comprises dans les dépenses obligatoires. Il a enfin souligné que la proposition de loi prévoyait une application sélective de ces nouvelles règles comptables aux services départementaux d'incendie et de secours.

Insistant sur les fondements de la règle de l'annualité, qui permet un examen régulier par l'assemblée délibérante des choix budgétaires proposés par l'exécutif, le président Pascal Clément s'est interrogé sur l'intérêt que présenterait, pour certaines dépenses de fonctionnement, un mécanisme d'engagement pluriannuel sur le modèle de celui des dépenses d'investissement. Il a jugé dangereux un dispositif pouvant conduire à dépenser des crédits de fonctionnement avant même de les avoir votés, et souligné que le système des autorisations de programme et crédits de paiement applicables à ces dépenses conduisait parfois à un hiatus entre les engagements pris sur plusieurs années et l'exécution des opérations programmées.

Tout en reconnaissant les avantages que les élus locaux pouvaient retirer d'une vision pluriannuelle des dépenses d'investissement, M. Christian Decocq a observé que le dispositif des autorisations de programme et des crédits de paiement restait facultatif et qu'il était susceptible d'aller à l'encontre de la volonté des assemblées délibérantes de peser pleinement, chaque année, sur le budget. Il a regretté que le caractère facultatif des mécanismes de pluriannualité puisse s'accompagner d'un manque de rigueur dans la gestion, la correspondance entre budget primitif, compte administratif et décisions modificatives s'avérant, dans ce domaine, souvent ardue à établir. Il a souhaité que de tels mécanismes soient instaurés dans le cadre d'une gestion budgétaire annuelle soucieuse de suivre, avec précision et de manière lisible, la gestion des programmes, sous peine d'assimiler toute annonce d'investissement à des promesses démagogiques qui échapperaient au contrôle juridique. Il a, enfin, jugé nécessaire de favoriser toute mesure de nature à rendre plus lisibles les documents budgétaires.

M. Bernard Derosier a estimé que la proposition de loi ne remettait pas en cause le principe de l'annualité budgétaire - toute convention étant susceptible d'être annulée par une délibération - tout en mettant fin à l'incertitude des partenaires des conseils généraux, à savoir, notamment, les associations, les communes et les régions. Réfutant l'argument selon lequel ce texte aurait été élaboré sans expérience préalable, il a cité l'application de l'instruction comptable M 14 pour les communes, avant de rappeler que les règles proposées faisaient l'objet d'une expérimentation depuis deux ans dans plusieurs départements. Estimant que l'Assemblée nationale ne devait pas se priver de son droit d'amendement sur ce texte, il a jugé souhaitable de limiter la durée de validité des engagements de dépenses, afin d'en éviter la reconduction systématique. Il s'est également interrogé sur la pertinence de la rédaction proposée au paragraphe IV de l'article 1er, relatif aux conditions dans lesquelles des virements de crédits peuvent être effectués. Après avoir rappelé que ce nouveau dispositif devait entrer en vigueur le 1er janvier 2004, il a insisté sur la nécessité de publier rapidement les dispositions réglementaires d'application.

Exprimant une réserve à l'encontre de l'idée de fixer des dates butoir dans le cadre de la programmation pluriannuelle, M. Bernard Roman a insisté sur le fait que la contractualisation de certaines dépenses pouvait conduire à les programmer sur une durée de cinq ou six ans. Il a jugé indispensables les engagements pluriannuels de dépenses de fonctionnement, en particulier pour les subventions aux associations agissant dans le domaine de l'action sociale, les conventions triennales conclues aujourd'hui pouvant être déférées par le préfet au tribunal administratif parce qu'elles contreviennent au principe de l'annualité. Regrettant que la lecture des documents budgétaires soit rendue plus complexe, il a souhaité qu'un travail soit entrepris pour en clarifier la présentation.

Évoquant les dispositions du paragraphe IV de l'article premier de la proposition de loi, M. René Dosière s'est demandé s'il ne serait pas préférable de prévoir que la possibilité d'effectuer des virements d'article à article est offerte au président du conseil général lorsque les crédits ont été votés par chapitre, et non seulement lorsqu'ils l'ont été par article comme le prévoit le texte adopté par le Sénat. Il s'est ensuite demandé si la présentation par nature et par fonction du budget des départements représentait un coût supplémentaire, auquel cas il y aurait lieu de demander une majoration du montant de la dotation globale de fonctionnement.

En réponse aux intervenants, le rapporteur a apporté les précisions suivantes.

- L'instauration d'un dispositif pluri-annuel pour les crédits de la section de fonctionnement constitue une innovation du droit budgétaire local. Ce dispositif est toutefois limité aux seuls crédits relatifs aux subventions ou aux conventions conclues avec des tiers. Il s'agit de permettre une plus grande lisibilité des engagements pluri-annuels du département, sur le modèle de ce qui a été prévu par la loi organique relative aux lois de finances pour le budget de l'Etat. Ce dispositif reste facultatif ; il est pourtant nécessaire à une gestion saine et sincère des finances du département, dans la mesure où il permettra aux élus locaux de vérifier que les départements ne s'engagent pas de façon inconsidérée sur plusieurs années. La technique utilisée actuellement n'est pas entachée d'illégalité dès lors que les subventions sont assorties d'une clause suspensive qui produit ses effets en cas de non-reconduction des crédits ; toutefois, cette technique n'est pas à l'abri de critiques émanant des partenaires des collectivités locales. Le dispositif des autorisations d'engagement facilitera les relations contractuelles des collectivités locales en assurant aux partenaires une réelle stabilité de l'engagement financier.

- Le souhait de voir le texte amendé pour limiter dans le temps les autorisations de programme et les autorisations d'engagement est sans doute légitime, mais il parait contradictoire de plaider pour une mise en application rapide de la réforme tout en proposant des modifications qui retarderaient le vote définitif du texte.

- L'obligation d'assortir le budget d'une présentation par nature ou par fonction ne facilitera pas sa compréhension par les élus et les citoyens ; elle est toutefois indispensable s'il l'on veut permettre les comparaisons ; un groupe de travail, dont la mise en place a été annoncée par le ministre délégué aux libertés locales, permettra de réfléchir à la simplification de la présentation des budgets.

La Commission est ensuite passée à l'examen des articles de la proposition de loi.

Articles 1er (art. L. 3311-1, L. 3312-1, L. 3312-2 et L. 3312-3 du code général des collectivités territoriales) : Modalités de présentation et de vote du budget ; 2 (art. L. 3312-4 et 4311-3 du code général des collectivités territoriales) : Autorisations de programme, autorisations d'engagement et crédits de paiement ; 3 (art. L. 3312-5 du code général des collectivités territoriales) : Adoption du compte administratif et du compte de gestion ;4 (art. L. 3312-6 et L. 3331-1 du code général des collectivités territoriales) : Reprise et affectation des résultats ; 5 (art. L. 3321-1 du code général des collectivités territoriales) : Amortissement et provisionnement ; 6 (art. L. 3321-2 du code général des collectivités territoriales) : Individualisation du chapitre consacré aux dépenses du RMI ; 7 (art. L. 3332-1, L. 3332-2 et L. 3332-3 du code général des collectivités territoriales) : Recettes des départements ; 8 (art. L. 3342-1 et L. 3342-2 du code général des collectivités territoriales) : Séparation de l'ordonnateur et du comptable ; 9 (art. L. 3241-1 du code général des collectivités territoriales) : Transposition aux SDIS des règles applicables aux départements ,

La Commission a adopté ces articles sans modification.

Article 10 (art. L. 3321-1, L. 3332-3 et L. 5711-1 du code général des collectivités territoriales) : Entrée en vigueur :

La Commission a été saisie d'un amendement présenté par M. Didier Quentin tendant à rendre immédiatement applicables aux régions les dispositions de l'article 2 de la proposition de loi, relatives aux autorisations d'engagement en matière de dépenses de fonctionnement. Après que le rapporteur eut fait observé que l'entrée en vigueur de ces dispositions nécessitait l'adoption de textes réglementaires et que le vote de tout amendement aurait également pour effet de retarder l'adoption définitive de ce texte, puisqu'il devrait de nouveau être examiné par le Sénat, la Commission a rejeté cet amendement. Elle a ensuite adopté cet article sans modification.

Article 11 : Décrets en Conseil d'État :

La Commission a adopté cet article sans modification

La Commission a adopté l'ensemble de la proposition de loi dans le texte du Sénat.

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Informations relatives à la Commission

La Commission a désigné M. Jérôme Bignon, rapporteur du projet de loi relatif à l'élection des conseillers régionaux et des représentants au Parlement européen ainsi qu'à l'aide publique aux partis politiques (n° 574).

La Commission a désigné M. Patrick Delnatte, rapporteur de la proposition de loi tendant à la création de délégations parlementaires aux droits des enfants (n° 586).


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