COMMISSION DES AFFAIRES ÉCONOMIQUES, DE L'ENVIRONNEMENT ET DU TERRITOIRE

COMPTE RENDU N° 11

(Application de l'article 46 du Règlement)

Mercredi 2 novembre 2005
(Séance de 17 heures)

Présidence de M. Patrick Ollier, Président

SOMMAIRE

 

pages

- Audition de M. Jean-Louis BORLOO, ministre de l'Emploi, de la cohésion sociale et du logement, et de Mme Catherine VAUTRIN, ministre déléguée à la Cohésion sociale et à la parité, sur les crédits de leur ministère pour 2006 ;



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- Avis sur les crédits de la mission ville et logement : :

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- programmes rénovation urbaine, équité sociale et territoriale et soutien (M. Philippe PEMEZEC, rapporteur pour avis)


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- programmes aide à l'accès au logement ; développement et amélioration de l'offre de logement (M. Jean-Pierre ABELIN, rapporteur pour avis) ;


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- Information relative à la Commission

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La Commission a entendu M. Jean-Louis Borloo, ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement et Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité, sur les crédits de la mission « ville et logement » pour 2006.

Le Président Patrick Ollier a souhaité la bienvenue à M. Jean-Louis Borloo, ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement et à Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. La Commission abordant l'examen des crédits de la mission « ville et logement » du projet de loi de finances pour 2006, mission qui illustre la poursuite de la politique pluriannuelle de cohésion sociale engagée par le ministre, il s'est félicité que le cap défini par la loi de programmation de janvier 2005, en matière de construction de logements sociaux et de réhabilitation de logements anciens notamment, soit tenu. Il s'est en outre réjoui des mesures contenues dans le projet de loi d'engagement national pour le logement, et tout particulièrement de l'application d'un taux de TVA réduit aux opérations d'accession sociale à la propriété, et a demandé au ministre de bien vouloir donner à la Commission quelques précisions sur ce dispositif au terme de la présentation des crédits du ministère.

M. Jean-Louis Borloo, ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement, a souligné que la mission « ville et logement » doit être replacée dans un contexte plus large. La crise du logement est profonde, et toute la chaîne est affectée car le mal a pris racine il y a une quinzaine d'années. Dans les années 1970, et pendant dix à quinze ans, on a construit en France environ 450 000 logements chaque année, dont 80 000 logements conventionnés, et l'on a même connu des pics de 500 000 logements. On peut certes discuter la qualité de ces constructions, mais le pays était équipé pour les réaliser. L'Etat, très présent dans le dispositif, intervenait beaucoup. Le rattrapage nécessaire a donc eu lieu pendant un certain temps, puis la décentralisation est venue sans que des conventions soient passées à ce sujet entre les partenaires. Le logement a depuis lors fait l'objet d'actions disparates, si bien que l'on s'est progressivement trouvé construire un nombre de logements inférieur de près de moitié au nombre atteint pendant les années historiques, le nombre de logements conventionnés étant lui-même divisé par deux. Certes, la situation variait selon les années, mais les retards cumulés ont fait peser une pression très forte sur l'ensemble du parc, et rendu très difficile la constitution d'équipes. L'ensemble de la chaîne de production a été touché de proche en proche : on a fait moins de ZAC et de SEM d'aménagement, la Caisse des dépôts et consignations s'est faite moins présente et, à mesure que l'activité décroissait, toute l'ingénierie publique et privée se retirait du secteur. On a par ailleurs constaté la concentration des difficultés dans certaines zones particulièrement frappées par le chômage et confrontées à des problèmes urbains complexes. Des secteurs entiers se sont dégradés très rapidement, comme l'a montré le rapport publié en 2002 par la Fondation Abbé Pierre.

Le ministre a cependant considéré qu'il fallait, malgré tout, se garder de certaines idées fausses, et en particulier de celle selon laquelle la commune, autorité publique compétente, rechignerait à construire des logements sociaux. Il peut se trouver des cas particuliers mais, en réalité, la courbe de la réduction générale des constructions de logement est exactement parallèle à la courbe descendante de fabrication de logements conventionnés. Autrement dit, c'est l'acte même de construire qui est devenu difficile.

C'est pourquoi le ministre a réuni, il y a deux ans, tous ceux qui concourent au logement, social ou non, pour définir les mesures propres à sortir de la crise. Un accord s'est fait, qui s'est traduit dans la loi de cohésion sociale, en contrepartie duquel le secteur HLM s'est engagé à doubler, voire tripler le parc dans les cinq années suivantes. Cet accord, signé le 21 décembre 2004, est, dans l'ensemble, respecté et de 75 000 à 76 000 logements sociaux auront été financés en deux ans. Par ailleurs les dispositifs fiscaux mis au point ont permis de relancer la construction, si bien qu'au 31 décembre 2005 on atteindra vraisemblablement 400 000 mises en chantier et environ 550 000 dépôts de demandes de permis de construire. Il reste à maintenir cet effort durablement et à l'amplifier, sachant que ni la crise du logement, ni la dégradation du logement conventionné ne se font sentir de manière homogène sur le territoire.

Le budget du logement reprend les engagements pris dans le plan de cohésion sociale et, pas plus en 2005 qu'en 2006, il n'y aura de problème de financement du logement social. La difficulté sera plutôt de maintenir une pression suffisante pour que les dossiers sortent et de parvenir à reconstituer l'offre foncière au cours des années à venir.

Le ministre a souligné que le montant alloué au plan de rénovation urbaine diffère de 100 millions d'euros de ce que prévoit le plan. Le solde du fonds de rénovation urbaine (FRU) de la Caisse des dépôts et consignations a bien été affecté au logement pour 100 millions en autorisations d'engagement et 60 millions en crédits de paiement. Quant au prêt à taux zéro (PTZ), jusqu'à présent budgétisé, il se traduit maintenant par un effort fiscal, ce qui explique l'apparente contradiction des chiffres. Pour ce qui est de l'aide personnalisée au logement (APL), on peut être surpris que sa revalorisation de 1,8 % le 1er septembre 2005 n'apparaisse pas dans les chiffres prévus pour 2006, d'autant que l'arrêté pris l'année dernière permet désormais de la réaffecter à ceux qui ont des difficultés de paiement de loyer s'ils sont de bonne foi. L'explication tient au fait que le montant retenu a été évalué en tenant compte de la réduction du nombre des bénéficiaires du taux maximal, calculée en fonction des simulations de retour à l'emploi de l'UNEDIC.

N'apparaissent pas dans le budget, a précisé le ministre, certaines mesures complémentaires qui auront un puissant effet de levier, à commencer par la diminution des taux, qui, après plusieurs baisses consécutives, sont aujourd'hui de 3 %. L'allègement du coût du foncier dans les prêts locatifs à usage social (PLUS) et les prêts locatifs sociaux (PLS) par l'allongement à 50 ans de la durée autorisée des emprunts est l'autre mesure propre à améliorer de 8 % l'équilibre des opérations de logement conventionné.

Ne figure pas davantage dans le budget la mesure destinée à favoriser l'accession sociale à la propriété qu'est la réduction de 19,6 % à 5,5 % de la TVA sur les opérations d'accession. Dans un premier temps, ce sera fait dans les zones de redynamisation urbaine (ZRU) parce que de grands espaces y sont disponibles, que les maires le souhaitent et que l'on constate une volonté partagée de tous les acteurs. L'objectif est que le coût de l'accession sociale à la propriété soit au maximum de 8 % supérieur à la location d'un logement du même type. Le ministre a dit espérer que la mesure aurait un effet de levier très fort. Il a observé que l'engagement pris par l'Etat que des logements soient construits sur de nombreuses parcelles, répertoriées de longue date, appartenant à la SNCF, à Voies navigables ou encore à RFF ne transparaît pas non plus dans le budget. Pourtant, 153 opérations sont prévues, qui permettront de réaliser plus de 20 000 logements, dont deux tiers de logements en Ile-de-France. Une délégation interministérielle a été constituée à cette fin. Enfin, trois zones d'intérêt national ont été définies en Ile-de-France : Seine amont, Seine aval - le pays mantois - et le plateau de Massy-Saclay.

Tels sont les principaux éléments du budget du logement, mais chacun sait, a observé le ministre, qu'un budget n'est que l'accompagnement d'une action nécessaire. Il n'était pas concevable que la France, qui n'a de problèmes fonciers que de court terme, ne rattrape pas son retard. Qu'à dater du 1er janvier prochain, la Caisse des dépôts et consignations puisse accorder aux collectivités territoriales et aux OPHLM des prêts d'acquisition foncière, sur simple déclaration, sur 50 ans sans opération désignée autre que « logement » y contribuera également.

Le ministre a ensuite brièvement évoqué le projet de loi relatif à l'engagement national pour le logement, qui fixera le cadre législatif général de la politique souhaitée par le Gouvernement et par les collectivités territoriales, dont l'abaissement à 5,5 % du taux de TVA sur les opérations d'accession. A cela s'ajouteront les effets des ordonnances simplifiant le permis de construire et permettant la résorption plus rapide de l'habitat indigne, et ceux de la réforme, voulue par tous, du statut de l'OPAC, ainsi que la modification de l'ANAH qui lui permettra d'intervenir plus largement. Le texte définira le cadre juridique plus ferme qui fondera la décision libre des collectivités locales qui le souhaitent, d'imposer une certaine proportion de logements sociaux dans les programmes de construction.

Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité, a indiqué qu'en 2006 les moyens d'engagement alloués aux programmes « rénovation urbaine » et « équité sociale et territoriale et soutien » atteindront 1,051 milliard d'euros - dont 465 millions d'euros destinés à l'ANRU -, les moyens de paiement s'élevant au total à 904 millions d'euros. Priorité sera donnée à l'accélération du programme de rénovation urbaine, à la sanctuarisation des crédits spécifiques du fonds d'intervention pour la ville (FIV) et de l'opération « ville, vie, vacances », et aux programmes de réussite éducative.

Pour ce qui est de la rénovation urbaine, 131 projets portant sur 240 quartiers ont été examinés par le comité d'engagement, pour un total de 4,8 milliards d'euros devant servir à 61 700 démolitions, 58 700 constructions et 112 000 réhabilitations. D'ici à 2011, 250 000 logements sociaux situés en zone urbaine sensible (ZUS) auront été démolis et 400 000 réhabilités. Ce programme de réhabilitation urbaine, qui a un objectif de mixité sociale, sera renforcé par la réduction à 5,5 % du taux de TVA prévue dans le projet de loi d'engagement national pour le logement.

Le programme « équité sociale et territoriale et soutien », complémentaire du programme de rénovation urbaine, regroupe tous les moyens d'intervention de la politique de la ville. Il intègre 339 millions d'euros d'exonération de charges sociales pour les programmes de zones franches urbaines, ainsi que les moyens de fonctionnement de la délégation interministérielle à la ville (DIV), hors frais de personnel. A cela s'ajoutent les effets de la réforme de la dotation de solidarité urbaine (DSU), dotée en 2005 de 120 millions d'euros complémentaires, dont 808 communes ont bénéficié. La DSU augmentera du même montant en 2006. Il est par ailleurs proposé de reconduire la dotation exceptionnelle de 20 millions d'euros pour les communes de moins de 10 000 habitants et d'étendre aux communes de plus de 200 000 habitants les règles de répartition, sans incidence pour les autres communes.

Le programme « équité sociale et territoriale et soutien » est axé sur la prévention, l'éducation et l'emploi. 62 millions d'euros seront consacrés à la prévention de la délinquance, dont 9 millions aux opérations « ville, vie, vacances » et 10 millions à la justice de proximité. Par ailleurs, grâce aux outils prévus dans le cadre du plan de cohésion sociale, le dispositif des adultes relais fera l'objet d'une nouvelle approche. Tous les postes venant à échéance en 2006 seront reconduits sous la forme de contrats d'accompagnement vers l'emploi, ce qui permettra aux titulaires de bénéficier de formations ; jusqu'à présent, les adultes relais n'avaient que des contrats à durée déterminée (CDD) de trois ans, qui ne prévoyaient aucune formation particulière. Enfin, 8 millions d'euros seront consacrés au financement des chargés de mission « prévention ».

Le programme de réussite éducative a été doté de 1,45 milliard d'euros sur cinq ans ; les crédits seront de 62 millions d'euros dès 2006. Plus de 200 équipes ont déjà été installées, et 185 communes ont présenté des dossiers. Le Gouvernement veut amplifier ce programme, notamment par la création des internats de réussite éducative, dont cinq existent à ce jour.

S'agissant de la revitalisation économique et de l'emploi, les entreprises exerçant leur activité dans des zones franches urbaines (ZFU) bénéficieront d'exonérations de charges à hauteur de 339 millions d'euros et d'exonérations d'impôt sur les bénéfices des sociétés. Dix millions d'euros seront consacrés à la revitalisation économique dans le cadre des contrats de ville. Pour mémoire, on compte 88 400 salariés dans les ZFU.

Enfin, a souligné la ministre déléguée, l'emploi et la prévention seront les thèmes du comité interministériel à la ville qu'il a été proposé au Premier ministre de réunir à la fin de 2005.

M. Philippe Pemezec, rapporteur pour avis pour les programmes « rénovation urbaine » et « équité sociale et territoriale et soutien » a dit sa satisfaction de voir le Gouvernement mettre fin à l'empilement des dispositifs et à la multiplicité des sources de financement qui caractérisaient la politique de la ville. Le dispositif est aujourd'hui plus clair, ce qui est heureux car l'actualité, hautement préoccupante, montre l'urgence qu'il y avait à agir. Le rapporteur pour avis s'est félicité que les crédits annoncés soient au rendez-vous, que les plafonds d'octroi du PTZ aient été revus à la hausse, et a salué le travail de l'Agence nationale de rénovation urbaine (ANRU), ainsi que les programmes de prévention, d'éducation, d'emploi, de sécurité et de santé, qui concourent à la mixité.

Tout en jugeant très satisfaisant le projet de budget, le rapporteur pour avis a estimé que deux sujets de préoccupations demeurent. En premier lieu, le projet de loi d'engagement national pour le logement ne prévoit pas grand chose en faveur de l'acquisition des logements sociaux par leurs occupants, hormis la réduction du taux de TVA. Comme les offices HLM ne veulent pas vendre, ou qu'ils mettent en vente à des prix dissuasifs, sans doute conviendrait-il de les inciter à vendre à un prix raisonnable, et ce partout où le parc est important.

Il a regretté, en second lieu, que soit modifié le dispositif « Robien », vieux de deux ans seulement, et qui crée à la fois des emplois et des recettes non négligeables pour l'Etat, et a jugé que mieux vaudrait se contenter d'en limiter les excès éventuels.

Il a enfin annoncé qu'il inviterait la Commission à émettre un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « ville et logement ».

M. Jean-Pierre Abelin, rapporteur pour avis pour les programmes « aide à l'accès au logement » et « développement et amélioration de l'offre de logement », a constaté que les crédits prévus pour ces deux programmes traduisent en termes budgétaires la poursuite du plan de cohésion sociale et la mise en œuvre de l'engagement national pour le logement.

La loi de programmation pour la cohésion sociale comportait, a-t-il rappelé, un volet « logement » dont l'objectif était de remédier à la crise du logement social due à l'insuffisance du nombre des constructions au cours des dix à quinze dernières années, en prévoyant pour cela les crédits nécessaires à la construction de 100 000 logements sociaux par an entre 2005 et 2009. Cette programmation, qui apparaissait dans la loi de finances initiale pour 2005, est confirmée dans le projet de loi de finances pour 2006. En effet, 482 millions d'euros en autorisations d'engagement sont inscrits pour le développement et l'amélioration du parc locatif social en 2006, ce qui permettra le financement de 100 000 logements locatifs sociaux et de 40 000 réhabilitations hors programme national de rénovation urbaine. La dotation en crédits de paiement destinée aux opérations locatives sociales augmente de 15 % par rapport à 2005, ce qui permettra d'accélérer les paiements aux organismes HLM et de répondre ainsi à une demande ancienne. En outre, 250 millions d'euros supplémentaires destinés au logement social seront ouverts dès 2005.

Le rapporteur pour avis s'est également réjoui que le plan d'engagement national pour le logement prévoie l'amélioration des conditions de prêt au logement social et facilite la mise à disposition de terrains pour la construction de logements. Les moyens d'engagement de l'ANAH sont portés à 505 millions d'euros en 2006 contre 417 millions en 2004 et 487 millions en 2005. Les aides versées par l'Agence permettront la production de plus de 35 000 logements privés à loyers maîtrisés, la remise sur le marché locatif de 16 000 logements vacants et la réhabilitation de 39 000 logements indignes. Le rapporteur pour avis a déploré le gel de 40 millions d'euros de crédits de l'ANAH intervenu en 2005, soulignant que l'ensemble des parlementaires est sensible à l'action de l'Agence, qui sera encore amplifiée par la future loi sur le logement.

S'agissant de l'accession sociale à la propriété, le projet de loi relatif à l'engagement national pour le logement prévoit, a-t-il souligné, d'appliquer un taux de TVA réduit à 5,5 % lorsque les opérations s'effectueront dans le cadre d'un projet de rénovation urbaine. Il s'est en outre félicité de la revalorisation de 1,8 % des aides personnalisées au logement. Il a par ailleurs noté que la nouvelle présentation du projet de budget permet de prendre la mesure de l'importance des mécanismes fiscaux dans les politiques du logement et de la ville, en montrant que les dépenses fiscales, qui s'élèvent à 9,96 milliards d'euros, dépassent largement les crédits budgétaires, qui sont de 7,2 milliards d'euros, et que l'abaissement à 5,5 % du taux de TVA sur les travaux dans le logement constitue près de la moitié du total des aides fiscales accordées au logement ; ce dispositif, a-t-il estimé, doit être pérennisé.

Il a ensuite demandé au ministre de donner son sentiment sur l'application du plan de cohésion sociale dans le secteur du logement, notamment quant à la mobilisation des acteurs, au rythme de consommation des crédits et aux conséquences possibles d'un échec à renouveler l'offre foncière.

S'agissant du volet fiscal, il a rappelé que le bénéfice du prêt à taux zéro était étendu aux foyers gagnant jusqu'à 7 000 euros par mois. Cependant, une grande partie du fonds de garantie à l'accession sociale (FGAS) ayant été prélevée au profit du budget de l'État, cinq banques ont menacé de suspendre la distribution des prêts aidés, et ce dès le 1er décembre selon certains journaux. Aussi a-t-il interrogé le Gouvernement sur la réalité et la portée de cette menace, et sur les négociations éventuellement en cours avec les banques.

Poursuivant son propos, le rapporteur pour avis a estimé que le dispositif « Robien » fonctionnait bien : 60 000 logements en ont bénéficié en 2004 et le nombre sera sans doute équivalent en 2005. Toutefois, l'augmentation du coût du dispositif, passé de 80 millions d'euros en 2004 à 190 millions en 2005 et à 300 millions en 2006, ayant suscité certaines critiques et amené le ministre à annoncer un recentrage sur les marchés tendus, ainsi qu'un nouveau dispositif fiscal destiné à encourager l'investissement locatif privé à destination des locataires à revenus modestes ou intermédiaires, il a demandé des informations sur ces nouvelles mesures et émis la crainte que la superposition des dispositifs ne nuise à leur lisibilité. Il s'est inquiété, par ailleurs, de la pérennité du dispositif « Malraux », compte tenu du plafonnement annoncé des « niches » fiscales.

Approuvé par Mme Janine Jambu, le rapporteur pour avis a également demandé au ministre si les objectifs visés par l'article 55 de la loi SRU ont été atteints et quel dosage d'incitation, de contractualisation et de contrainte il compte appliquer aux communes qui ne respectent pas leurs obligations.

S'agissant enfin des ventes de terrains par l'Etat, il s'est prononcé en faveur d'un effort supplémentaire : pourquoi prévoir seulement une décote de 25 % et non une obligation de construction d'un pourcentage de logements sociaux ? L'Etat doit, a-t-il estimé, montrer l'exemple.

En conclusion, le rapporteur pour avis a annoncé qu'il inviterait la Commission à émettre un avis favorable à l'adoption des crédits.

S'exprimant au nom du groupe socialiste, M. Jean-Yves Le Bouillonnec a souligné que le prix de l'immobilier avait augmenté cette année de 10 %, celui du foncier de 12 %, celui de la construction de 5 % et les loyers de 2 % à 12 % selon les régions, mais qu'en dépit de cette réalité économique, et malgré la volonté affichée par le Gouvernement de remédier à la crise du logement, les dépenses budgétaires de l'Etat pour le logement baissaient, hors dépenses fiscales, de 3,2 % en crédits de paiement et de 2,14 % en autorisations d'engagement. Certes, il faut y ajouter les 300 millions d'euros d'avantages fiscaux liés au dispositif « Robien » et les 515 millions d'euros consacrés cette année au nouveau PTZ, mais cela revient à faire peser la charge sur les exercices futurs.

S'agissant de la rénovation urbaine, l'orateur s'est étonné d'avoir entendu le ministre dire que l'enveloppe avait été sous-estimée : aucun groupe politique, pourtant, n'avait estimé les besoins à moins de 30 milliards d'euros, et le groupe socialiste les avait même chiffrés à 50 milliards d'euros, dont seulement 6 milliards financés. Le Gouvernement a eu beau promettre que ce budget serait sanctuarisé, il intègre en fait dans les crédits présentés les 150 millions d'euros dérivés du FRU, géré par la Caisse des dépôts et consignations, pour paraître tenir son engagement : financer chaque année la rénovation urbaine à hauteur de 465 millions. Or, déjà l'ANRU explique avoir besoin de 3 milliards d'euros, et invite les collectivités locales à verser leur écot, tandis que l'Etat fait appel à la Caisse des dépôts et consignations pour respecter l'engagement qu'il a pris.

L'orateur a observé en outre que les crédits destinés à l'accompagnement social dans les quartiers sont réduits de 7,8 %, ce qui signifie l'arrêt forcé des programmes négociés avec les associations dans le cadre des contrats de ville.

S'agissant des aides à la personne, il a souligné que la revalorisation intervenue au 1er septembre 2005 est la première depuis le changement de majorité. En revanche, en relevant de 15 à 24 euros le seuil de versement de l'APL en avril 2004, et en décidant que les pensions de réversion seraient désormais incluses dans l'assiette considérée, le prédécesseur du ministre a exclu 250 000 personnes du dispositif, ce dont s'est d'ailleurs offusqué le Médiateur de la République, M. Jean-Paul Delevoye, oubliant qu'il appartenait au Gouvernement qui a décidé cette mesure. Non seulement l'injustice n'est pas corrigée, mais le Gouvernement prévoit de relever de 3 euros la participation des allocataires. Avec un budget d'APL diminué de 1,38 %, il sera plus que difficile de tenir compte de l'évolution des situations, alors que les charges s'accumulent : en particulier, l'augmentation du prix du gaz atteindra de plein fouet les locataires des offices de HLM.

Evoquant enfin le développement de l'offre locative, M. Jean-Yves Le Bouillonnec a considéré que le problème essentiel était celui des engagements financiers, car si le dispositif fonctionne bien pour les PLS, il en va tout autrement pour les prêts locatifs aidés d'intégration (PLAI), et estimé qu'il faudrait se résoudre à évaluer un jour l'efficacité des exonérations fiscales au regard de l'objectif visé.

M. Rodolphe Thomas, prenant la parole au nom du groupe UDF, s'est félicité qu'après dix ans d'inaction, l'habitat ait fait l'objet d'une grande loi de programmation et que le Gouvernement ait confirmé l'engagement de tous les crédits prévus en faveur du logement social. Sans revenir sur le panorama complet dressé par le ministre, l'orateur lui a demandé comment le nouveau dispositif « Robien » s'articulera avec les autres mécanismes destinés à favoriser l'acquisition. Il a aussi souhaité savoir si le projet de réduire le taux de TVA ne risque pas de se heurter à l'opposition de la Commission européenne. Il s'est encore interrogé sur les effets éventuels du plafonnement de la défiscalisation : les investisseurs ne risquent-ils pas de se concentrer sur la réhabilitation des petits logements ? La mesure aurait alors l'effet inverse à celui recherché en matière de logement, car il faut préserver la diversité de l'offre et faciliter le logement des familles nombreuses.

L'orateur s'est à son tour déclaré préoccupé par l'efficacité des PLAI, qui reposera en grande partie sur la volonté des élus de s'engager dans cette politique. S'agissant enfin de l'APL, il a souligné que la revalorisation de 1,8 % intervenue le 1er septembre 2005 n'avait pas suffi à combler le retard accumulé.

Mme Janine Jambu a déploré que la ligne APL soit en baisse sensible alors même que les loyers et les charges, énergétiques notamment, supportés par les familles modestes ne cessent d'augmenter. Après dix-huit mois de gel, la revalorisation de 1,8 % - qui ne sera en fait que de 1,5 ou 1,6 % -, conjuguée à l'abaissement du seuil de versement minimal à 15 euros et au relèvement de 3 euros de la participation minimale payée par l'ensemble des allocataires, rapportera finalement plus qu'elle ne coûte... On est en droit de se demander si l'engagement de l'État est à la hauteur des besoins des centaines de milliers de familles modestes, de plus en plus précarisées.

Elle a également douté que le Gouvernement ait pris la mesure des besoins et fait du logement social une priorité, puisqu'il n'y consacre que 60 millions d'euros sur 480 millions et persiste à privilégier une montée en charge des PLS, auxquels ne peuvent accéder que 60 % des quelque 1,3 million de demandeurs de logements, par ailleurs déjà éligibles au PLAI, pour lesquels l'effort de financement est le plus faible.

Non seulement l'article 65 de la loi du 13 août 2004 a fusionné les fonds de solidarité « eau » et « énergie » au sein du fonds de solidarité logement (FSL), mais il en a transféré la gestion et le financement aux départements. Le concours financier d'EDF, GDF, autres distributeurs d'énergie et des distributeurs d'eau reste obligatoire, mais régi par convention. Enfin, la participation de l'État n'est plus qu'une faculté, tout comme celle des bailleurs publics et privés. La conséquence en est une réduction des moyens affectés à la prévention des expulsions et des coupures des fournitures énergétiques. Aussi l'oratrice s'est-elle interrogée sur la réalité de l'engagement de l'État et des moyens nouveaux affectés à ce dispositif.

Enfin, a-t-elle souligné, le Premier ministre s'était engagé, répondant à une question du président du groupe communiste, à dégager 50 millions d'euros pour la mise en sécurité des hébergements collectifs, après les dramatiques incendies de cet été. Non seulement la somme annoncée est insuffisante, mais on peut se demander où sont passés les crédits engagés au titre de cette mise en sécurité. Si le budget propose d'ouvrir 5 000 places de résidence en deux ans, nulle part on ne trouve les financements correspondants.

Au nom du groupe UMP, M. Gérard Hamel a tenu à souligner la cohérence du budget « ville et logement », dans lequel 7,19 milliards d'euros en crédits de paiement sont prévus pour 2006. Le programme de rénovation urbaine engagé apparaît comme un axe majeur de la politique de la ville. Rénover, reconstruire, démolir, ré-urbaniser les villes tout en prévoyant l'accompagnement social indispensable : c'est à l'évidence la meilleure façon de résoudre bon nombre de problèmes des quartiers dits en difficulté. La fermeté à l'égard de délinquants notoires va de pair avec une vraie politique de main tendue à leurs habitants.

L'effort consenti en faveur de la dotation de solidarité urbaine, a-t-il ajouté, n'est pas non plus négligeable : 120 millions d'euros supplémentaires en 2005 représentent, pour une petite ville comme Dreux, 800 000 euros de plus, qui ont permis d'y mener une véritable politique de proximité en sus des opérations majeures réalisées dans le cadre de l'ANRU. Mais on ne saurait pour autant passer sous silence la relance des programmes de zones franches urbaines - 41 depuis 2005 -, source d'activité, mais aussi de paix sociale. Enfin, la mise en œuvre du plan de cohésion sociale participe également de la cohérence de ce budget.

L'orateur a également considéré que le mécanisme de l'investissement locatif « Robien » garde tout son intérêt et que, d'un autre côté, le relèvement du plafond à 62 500 euros par an du prêt à taux zéro permettra à environ 80 % de la population d'y accéder. Il a par ailleurs noté l'effort consenti en faveur de l'ANAH, qui permettra la réhabilitation de 40 000 logements en centre ville au lieu de 20 000, que les propriétaires privés pourront mettre à disposition sous forme de logements conventionnés ou non. Dans le même souci de cohérence, une série de dispositions sont prévues pour lutter contre l'habitat insalubre, à Paris mais aussi dans les petites villes.

L'orateur a toutefois critiqué l'insuffisance des dispositions propres à développer l'accession sociale à la propriété, qui a pourtant donné d'excellents résultats. Les maisons dites « à 100 000 euros » participent du même objectif, en permettant à des familles modestes d'accéder à la propriété. Il a également insisté sur la nécessité de créer des places d'hébergement en résidence hôtelière ou en logements d'urgence, afin d'accueillir les personnes en très grande difficulté.

Toutes ces dispositions, complétées par le projet de loi à venir sur l'engagement national pour le logement, participent, a-t-il estimé en conclusion, d'une politique enfin dotée des moyens nécessaires, propre à résoudre en profondeur et dans la durée les difficultés des quartiers sensibles, comme certains témoignages semblent d'ores et déjà l'attester. Un bon budget n'est pas nécessairement un « budget plus » ; l'essentiel est qu'il permette, d'une manière globale, d'appliquer une vraie politique.

Mme Janine Jambu a fait remarquer que l'argument n'était pas nouveau.

En réponse aux rapporteurs et aux intervenants, le ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement a apporté les éléments de réponse suivants :

- le dispositif « Robien » a permis la construction de 65 000 logements et de répondre en partie à la crise du logement en contribuant à l'accroissement général de l'offre. Restait à savoir s'il était possible de le recentrer en mettant en avant le produit « logement » plutôt que le produit fiscal qui, sur quelques sites, s'est traduit par une inadéquation aux besoins. Rien n'est pire que de voir certains « effets retour » finir, à force de ne pas répondre au problème posé, par rendre l'ensemble du dispositif inopérant et obsolète. Il s'ensuit la nécessité d'une adaptation à la lumière de l'expérience ;

- en complément du dispositif « Robien » ainsi recentré, le Gouvernement a mis en place un deuxième mécanisme d'amortissement classique, auquel s'ajoute une déduction forfaitaire de 40 % sur les loyers en contrepartie d'un niveau de loyer inférieur de 30 % aux tarifs du marché, les locataires étant eux-mêmes soumis à des conditions de ressources. Ce complément était attendu par tous les opérateurs privés et publics. Le dispositif « Robien » demeurera donc en usage là où il répond à la demande ; ailleurs, il sera concurrencé par un produit plus adapté aux besoins ;

- la mobilisation des acteurs est tout à fait sensible. On ne passe pas de 40 000 à 75 000 logements simplement parce que le Gouvernement l'a demandé : cela exige un cheminement extraordinairement complexe et une démarche générale, républicaine, morale impliquant tous les acteurs. La « famille » HLM, qui a vocation à gérer, à entretenir, mais également à produire, s'est mise en ordre de marche ; encore lui a-t-il fallu organiser un dialogue interne dans la mesure où la moitié seulement des organismes est concernée, l'autre moitié n'ayant présenté aucun dossier de financement depuis deux ou trois ans, pour des raisons diverses et parfois tout à fait justifiées. Les élus, le parc HLM, les directions départementales de l'équipement (DDE) se sont approprié ce dossier très difficile et caractérisé par des délais de réaction assez longs. La création de l'Agence de rénovation urbaine, avec un conseil d'administration parfaitement transparent où siègent tous les partenaires, a du reste largement permis de sortir d'une situation où chacun renvoyait la responsabilité à l'autre et d'instaurer un véritable climat de confiance et de mobilisation générale. Le logement conventionné apparaît aux yeux de tous les élus comme une nécessité. Les logements sont de très bonne qualité et le tissu urbain généralement bien structuré ;

- l'extension du PTZ ne s'applique qu'à quelques zones, très limitées, où la situation est extrêmement tendue : le pays genevois français, une petite partie de l'Ile-de-France et une partie de la Côte d'Azur. L'étendre ailleurs n'aurait aucun sens ;

- s'agissant du dispositif « Malraux », le plafonnement à 10 700 euros du déficit foncier imputable sur le revenu des investisseurs, indépendamment du plafonnement à 8 000 euros du montant total des avantages fiscaux prévu par le projet de loi de finances, permet d'atténuer très fortement le risque d'un éventuel désavantage. Mais plus que des aspects techniques, les mouvements observés depuis deux mois montrent que les réservations, tant sur le nouveau dispositif que sur le « Robien » ou sur le « Malraux », dépendent d'abord de la pérennité supposée de la niche fiscale liée au produit ;

- l'application de l'article 55 de la loi SRU montre que, globalement, le résultat est supérieur aux prévisions. Un gros tiers des collectivités est très au-delà du taux légal, un autre gros tiers est en dessous, mais a largement fait progresser son taux et un gros quart reste très peu actif - celles des activités qui étaient en dessous de 5 % n'ont pratiquement pas fait d'effort pour augmenter ce taux. Les préfets dresseront, de manière contradictoire comme le prévoit la loi, des constats de carence avant le 31 décembre. Dans l'ensemble, on peut considérer que la mobilisation a été bonne ;

- la possibilité de décote de 25 % pour les ventes de terrains publics destinés à des logements sociaux n'est qu'un signal. Le fait déterminant reste que les terrains en questions sont bien affectés au logement. À l'État de gérer le différentiel constaté avec la valeur foncière du bien. S'il faut aller au-delà, notamment lorsqu'il s'agit d'établissements publics sous tutelle, cela sera possible, quitte à prévoir les compensations budgétaires correspondantes ;

- la remarque de M. Jean-Yves Le Bouillonnec dénonçant la baisse des dépenses budgétaires a de quoi surprendre ; encore a-t-il eu l'honnêteté intellectuelle de préciser que c'était hors dépenses fiscales ou hors dépenses budgétaires connexes, ce qui revient à faire l'impasse sur le PTZ, sur la baisse des taux, sur les exonérations de taxe foncière sur les propriétés non bâties (TFNB), sur l'actuel dispositif Robien, sur le nouveau dispositif fiscal, sur la TVA à 5,5 % - sans parler de l'affectation depuis quatre ans de l'intégralité de la collecte du « 1 % logement » au logement social, alors qu'auparavant, entre 300 et 600 millions d'euros étaient désaffectés chaque année du logement social pour alimenter le budget général ;

- chacun sait aussi que le FRU est un crédit d'État confié provisoirement à la Caisse des dépôts et consignations - et non un crédit de la Caisse des dépôts et consignations -, et dont le solde revient prématurément aux opérations d'État, tout comme l'année dernière, à hauteur de 80 millions d'euros ;

- le programme national de rénovation urbaine, confié à l'ANRU, est une opération d'une extrême complexité. Ouvert pour 200 sites prioritaires, il est partout respecté à 100 %. La seule question qui se pose est de savoir s'il ne faudrait pas l'étendre à quelques sites complémentaires qui, sans appeler de rénovation lourde, montrent des signes de dégradation, par le biais du mécanisme dit de dérogation au titre de l'article 6 de la loi n° 2003-710 du 1er août 2003 d'orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine, donnant suite aux demandes conjointement exprimées par de nombreux maires, organismes HLM et préfets. La difficulté est que les demandes de dérogation au titre de l'article 6 se comptent par centaines, au point de représenter quasiment un deuxième programme, ce qui exigera en toute logique une augmentation à due concurrence de la contribution de chacun. L'État et les partenaires sociaux ont donné un accord de principe ; il est demandé aux collectivités de faire de même, comme pour le premier programme ;

- le plan de cohésion sociale distingue bien les PLUS et PLAI, dont le pays a effectivement le plus grand besoin, des PLS. Par ailleurs, la délégation de compétence en matière d'aides à la pierre est en train de se mettre concrètement en place, et les demandes présentées par des collectivités locales à cette fin couvrent 55 % de la population française. Cette démarche s'inscrit dans une logique de responsabilité locale, dans un cadre contractuel, l'État se cantonnant à un rôle de régulation ;

- s'agissant de la TVA à 5,5 %, l'annexe H de la 6ème directive du Conseil n° 77/388 CEE du 17 mai 1977 précise bien que le logement social - et même, à croire une interprétation assez fine, le logement tout court - est de la compétence non de l'Union, mais des États membres. L'affaire est donc réglée, a fortiori pour le logement soumis à condition de ressources ;

- l'APL est un droit de tirage automatique ; autrement dit, la ligne sera abondée si les chiffres sont supérieurs aux prévisions. Celles-ci ont été calculées au vu des évaluations de retour à l'emploi fournies par l'UNEDIC ; d'où la diminution constatée ;

- le PLS ne vient aucunement en substitution des PLS et PLAI, dont les dotations augmentent de 15 %. Au demeurant, le problème se pose au niveau non des financements, mais bien des décisions locales ;

- s'agissant du FGAS-FSL, la question était de savoir si un mécanisme de contribution bloqué à 1,4 milliard d'euros et rapportant chaque année 200 millions d'euros de produits financiers était le système le plus pertinent en matière de logement social ou d'accession à la propriété. Il conviendra de mettre en place, en accord avec les partenaires bancaires, un dispositif plus efficace dans les mois à venir. On ne peut imaginer développer les PTZ et les divers mécanismes d'accession sociale sans un mécanisme garantissant la distribution la plus large ;

- les crédits de mise en sécurité des hébergements d'urgence n'apparaissent pas dans le projet de loi de finances pour 2006 du fait qu'ils ont déjà été mandatés tout récemment, à hauteur de 50 millions d'euros, pour partie à l'ANAH et pour partie à des organismes tels que la SONACOTRA. De même que n'apparaissent pas 250 millions d'euros liés au raccourcissement des délais exagérément longs des créances des organismes HLM, qui relèvent de l'exercice 2005 et non 2006.

La ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité a rappelé, à propos des crédits et de la politique de la ville, que le FIV 2005 a été délégué à plus de 93 %. Le FIV, les opérations VVV et les équipes de réussite éducative représentent 180 millions d'euros et la DSU, dont chaque commune peut user comme elle l'entend, 240 millions d'euros.

M. Pierre Cohen a estimé que les récents événements conduisaient à s'interroger sur le décalage entre les lignes budgétaires mises en place dans le cadre de la politique de la ville et les solutions affichées par le Gouvernement pour régler les problèmes des quartiers. Certains dispositifs qui, sans avoir été totalement efficaces, n'en avaient pas moins permis à des acteurs de terrain de commencer à traiter les problèmes sont peu à peu remis en cause : ainsi en est-il des contrats de ville, toujours financés, mais pratiquement relégués au second plan dans les politiques locales définies par les préfets, ou encore des hésitations à propos des emplois associatifs qui permettaient jusque-là à des associations d'assurer pratiquement des missions de service public en matière de soutien scolaire, de relations intergénérationnelles ou d'accompagnement social. Enfin, si des dispositifs tels que les ZFU ont donné quelques résultats, le bilan montrera qu'ils ne sont pas à la hauteur des ambitions affichées.

D'un côté, a conclu l'orateur, on brandit le bâton de la répression dont beaucoup, même parmi des représentants de l'UMP, estiment qu'il ne résoudra pas les problèmes. De l'autre côté, des dispositifs qui avaient pourtant montré leur efficacité sont peu à peu délaissés. Tout cela est très dommageable et se paie au final fort cher.

Mme Odile Saugues a rappelé que le FGAS avait permis pratiquement un million d'accessions à la propriété pour un prix moyen précisément de 100 000 euros, mettant fin au « mal-logement » de bon nombre de personnes tout en les préservant du surendettement, et regretté de le voir ainsi aspiré dans le budget général. Le président du Crédit mutuel lui-même s'est élevé contre ce qu'il considérait comme une grave erreur qui empêcherait les trois réseaux de proposer des prix plus sociaux aux demandeurs.

Par ailleurs, tous les élus qui ont des secteurs sauvegardés connaissent les difficultés de la rénovation. La loi Malraux depuis 1962, de même que les OPAH ont largement aidé à la revivification des 82 secteurs sauvegardés de France. Maire-adjointe d'une ville qui comporte un important secteur sauvegardé, l'oratrice a dit mal comprendre ce recul, qui procède à ses yeux d'une mentalité mesquine.

Jugeant en revanche excellente la réduction à 5,5 % de la TVA sur les opérations d'accession sociale dans les quartiers, elle a souhaité que ce taux réduit puisse s'appliquer aux coopératives d'HLM qui constituent également des outils efficaces de mixité sociale.

Revenant enfin sur la question des biens de RFF transférés en pleine propriété à une société détenue par l'État, elle a souhaité recevoir l'assurance que ces terrains serviront réellement à construire du logement social à un coût abordable. Si tel n'est pas le cas, la question reste posée de savoir quelle sera leur destination.

M. Daniel Boisserie s'est dit dubitatif sur l'idée de réaliser une maison à 100 000 euros tout compris, se demandant s'il ne faudra pas revoir le montant à la hausse, ou bien d'exclure certaines prestations. Si les ZRU ouvrent droit, a-t-il observé, à une subvention de 10 000 euros, à la TVA à 5,5 % et aux PTZ, d'autres zones, sans être dites de rénovation urbaines, ont un coût du foncier modéré ; or on n'y parle que de location-accession. Pourquoi ne pas aller directement à l'accession ? Vient enfin une troisième catégorie, pour laquelle on dissocie le foncier et le bâti selon un mécanisme bien compliqué. Comment faire pour que le rêve de l'accession à la propriété devienne une réalité ?

M. Serge Poignant s'est déclaré tout à fait d'accord sur la priorité à réserver aux ZRU et sur l'abondement des crédits de la DSU. Pour autant, la cohésion sociale suppose de ne pas se limiter au logement locatif public et de prendre en compte l'ensemble du logement. À cet égard, la loi SRU ne tient pas compte des efforts déployés, notamment au niveau des intercommunalités, dans le cadre des programmes locaux de l'habitat (PLH), ni de l'extrême diversité historique et sociologique des collectivités. Nombre de primo-accédants sont dans l'impossibilité d'acquérir un terrain du fait de l'envolée du foncier dans toutes les grandes villes et alentour. Une véritable réflexion en profondeur s'impose sur l'accession sociale au sens large du terme, et particulièrement sur le sort de toute une classe intermédiaire, en particulier les jeunes couples qui n'ont rien à faire dans les HLM et rêvent d'accéder à la propriété, mais n'en ont pas les moyens.

En réponse aux différents orateurs, le ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement a apporté les éléments suivants :

- l'inquiétude exprimée par M. Pierre Cohen peut être comprise et partagée. L'état de l'habitat dans certains quartiers peut effectivement paraître scandaleux alors que les moyens apportés par tous les partenaires, dont l'État - par les canaux de la DSU, des équipes de réussite éducative, etc. -, ont considérablement augmenté. Les contrats de ville peuvent effectivement poser un problème de visibilité. Le Parlement s'était déjà demandé si les variations de DSU devaient être fléchées pour amener les collectivités locales à l'affecter à la politique dite de la ville. La question de l'affectation réelle de la DSU - et de sa perception - mérite d'être posée ;

- si le dispositif du FGAS est amené à changer, sa fonction sera assurée et même amplifiée. Trois ou quatre semaines suffiront pour se mettre d'accord sur le dispositif, qui ne pose véritablement aucune difficulté. Les réseaux sont parfaitement fondés à réclamer un dispositif garanti ou co-garanti ;

- s'agissant des secteurs sauvegardés, la question est de savoir comment conjuguer le dispositif « Malraux » et les autres dispositifs - OPAH et interventions lourdes de l'ANAH -, dont le total pourra atteindre 5 000 euros par logement, ce qui rendra l'opération d'autant plus intéressante. S'il apparaît que ce montage n'est pas le plus pertinent, il conviendra de trouver une autre formule, voire de réexaminer la question au niveau interministériel. Les secteurs sauvegardés constituent un enjeu crucial sur le plan de la mixité ; se pose également le problème des centres villes dégradés ;

- la réalisation d'hébergements d'urgence, en résidence hôtelière ou autre, est une nécessité. L'État se doit de le faire, mais d'une manière intelligente - sous forme de toutes petites unités pourvues de l'accompagnement social adapté - et en concertation avec les collectivités locales. Reste que ces questions soulèvent suffisamment d'appréhensions et d'inquiétudes pour entraîner les plus grands retards si personne ne se décide à prendre ses responsabilités. C'est tout le sens de l'autorisation donnée, dans ces cas très précis, par la loi ;

- la maison « à 100 000 euros » n'est évidemment pas une maison au rabais, bien au contraire. Lorsque l'on décompose les coûts, on s'aperçoit que la construction elle-même représente un peu moins de 60 % du total, le reste étant constitué par la levée des incertitudes juridiques et administratives, les coûts commerciaux, les intérêts de la charge foncière, le coût du foncier lui-même et la TVA. Il s'agit de ramener ce reste, soit 40 % actuellement, à un niveau aussi proche de zéro que possible. Le fait que les sites de rénovation urbaine soient déjà maîtrisés et viabilisés réduit d'autant les frais liés aux incertitudes juridiques et administratives. Les coûts commerciaux sont totalement nuls, puisque l'affaire relève soit de l'office HLM, soit de la mairie. Le foncier est pris en charge via le prêt à cinquante ans de la CDC. Par le jeu de la dissociation du foncier et de la construction, l'acheteur paiera pendant quinze ans 600 ou 650 euros par mois pour la maison puis, durant les dix ans qui suivent, 190 euros par mois pour acheter le foncier. Quant à la question de l'accession sociale, elle a déjà donné lieu à une fière bataille pour arracher la TVA à 5,5 % sur près de 700 sites en France... Les ministres du « pôle social » auraient évidemment préféré plus, mais on ne saurait pour autant oublier que ramener la TVA de 19,6 à 5,5 % n'est pas une mince affaire.

La ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité a ajouté que le contrat de ville reste l'outil de l'accompagnement social, même s'il est encore un peu tôt pour en mesurer précisément les effets. Le deuxième rapport de l'observatoire national des ZUS met en avant des éléments déjà soulignés : éducation, emploi, logement, santé. Parce que l'aggravation de la violence dans les quartiers a pour principales victimes les habitants eux-mêmes, le Premier ministre a demandé un plan qui nécessitera la mobilisation de tous les partenaires, à l'instar de celle qui a lieu autour des équipes de réussite éducative : 180 projets ont été soutenus cette année, ce qui traduit bien la montée en puissance du dispositif.

Le Président Patrick Ollier a remercié le ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement et la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité d'avoir répondu avec précision à toutes les questions posées par les membres de la commission.

La Commission a ensuite examiné les crédits de la mission « ville et logement ». Elle a approuvé les conclusions du rapporteur Philippe Pémezec sur les crédits des programmes « rénovation urbaine » et « équité sociale et territoriale et soutien » ainsi que celles du rapporteur Jean-Pierre Abelin sur les crédits des programmes « aide à l'accès au logement » et « développement et amélioration de l'offre de logement ».

En conséquence, elle a émis un avis favorable à l'adoption des crédits de cette mission.

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Information relative à la Commission

La Commission a désigné M. Jean-Louis Christ rapporteur sur la proposition de résolution de M. Jean-Marie Sermier (n° 2603) sur la réforme de l'organisation commune des marchés dans le secteur du sucre (COM (2005) 263 final / E2916).

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