Version PDF

COMMISSION DES AFFAIRES ÉCONOMIQUES,
DE L'ENVIRONNEMENT ET DU TERRITOIRE

COMPTE RENDU N° 79

(Application de l'article 46 du Règlement)

Jeudi 21 septembre 2006
(Séance de 14 heures)

Présidence de M. Patrick Ollier, Président

SOMMAIRE

 

page

- Audition de M. Thierry BRETON, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie et de M. François LOOS, ministre délégué à l'Industrie, sur le projet de loi relatif au secteur de l'énergie



2

   

La Commission a entendu M. Thierry Breton, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie et M. François Loos, ministre délégué à l'industrie, sur le projet de loi relatif au secteur de l'énergie.

Le Président Patrick Ollier a remercié les deux ministres, MM. Thierry Breton et François Loos, de leur présence et, tout en remerciant également M. François Brottes, M. Jacques Dessalangre et M. Daniel Paul de leur participation, a regretté que l'opposition ne soit pas plus fortement représentée en ce début de réunion, observant qu'il l'avait organisée spécialement pour permettre, au prix de la perturbation d'un grand nombre d'agendas, leur information au sujet des propositions d'engagements adressées par Suez et GDF à la Commission européenne.

M. François Brottes, après avoir remercié le président Patrick Ollier et les deux ministres d'avoir permis cet échange, a demandé si ceux-ci pouvaient confirmer les informations de presse selon lesquelles la Commission européenne aurait autorisé la publication des réponses formulées par les deux entreprises GDF et Suez à la lettre de griefs. Il a ensuite souhaité des éclaircissements sur le contenu de ces réponses pour autant qu'il aurait un impact sur GDF en France. Quant aux filialisations envisagées, il a insisté sur la nécessité de distinguer celles qui correspondaient à des opérations sans impact sur le périmètre du groupe et celles qui préludaient à une cession, auquel cas une précision sur le repreneur envisagé lui semblait indispensable.

M. Daniel Paul a repris à son compte la question précédente sur la distinction à opérer entre les deux catégories de filialisation et a fait part de son inquiétude sur la part du portefeuille des contrats d'approvisionnement à long terme qui serait cédée, estimant qu'il s'agissait en ce cas, pour GDF, de s'amputer d'une part précieuse de son actif, ces contrats à long terme constituant des « pépites ».

M. Serge Poignant a jugé effectivement utile de préciser celles des filialisations qui anticipaient une cession, par opposition à celles pour lesquelles une cession ultérieure n'était pas prévue, par exemple celle concernant les terminaux méthaniers. Il s'est également interrogé sur le contrôle que conserverait l'Etat français sur les filiales qui demeureraient au sein du groupe GDF-Suez.

M. Thierry Breton, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, a remercié le président Patrick Ollier d'avoir pris l'initiative de cet échange qui s'inscrit en droite ligne de la volonté du Gouvernement d'assurer la pleine information des parlementaires sur l'opération projetée de fusion entre GDF et Suez, bien que le projet de loi en discussion n'aborde pas cette question. Il a rappelé qu'en tout état de cause, la fusion ne serait réalisable que si la privatisation était rendue possible par la loi. Il a ensuite indiqué que la procédure d'examen par la Commission européenne du projet de fusion en était au stade du test de marché, permettant d'étudier les remèdes, c'est-à-dire les contreparties offertes par les entreprises candidates à la fusion, à travers leurs réponses à la lettre de griefs. Il a rappelé qu'à ce stade une certaine discrétion était d'habitude de mise, mais qu'en l'espèce la Commission européenne avait autorisé une grande transparence, à titre exceptionnel.

Puis, il a présenté les remèdes proposés en réponse aux griefs de la Commission européenne, en commençant par ceux concernant le périmètre belge du groupe envisagé. Il a d'abord précisé que les sept réacteurs nucléaires d'Electrabel n'étaient en rien impliqués dans ces remèdes. Il a ensuite indiqué que des trois éléments d'actifs de Distrigaz, à savoir son portefeuille de clients électriciens, son portefeuille de clients individuels et son portefeuille de clients professionnels, seul le troisième devait être filialisé en vue d'être cédé, sans possibilité de rachat avant dix ans. S'agissant de Fluxys, il a signalé qu'un rééquilibrage de la part du capital détenu par les collectivités territoriales belges interviendrait mais qu'il était en tout état de cause déjà prévu par le groupe Suez. Il s'est réjoui enfin que le schéma retenu maintienne le terminal méthanier de Zeebrugge dans le périmètre du groupe envisagé et que la Commission européenne ait même admis qu'il faille renforcer les capacités de cette installation. Quant à la société SPE, détenue à ce jour à 25 % par GDF, il a indiqué que la cession de cette participation était prévue.

S'agissant de la France, le ministre a indiqué qu'aucune activité de GDF n'était concernée, à l'exception d'une petite filiale de Cofathec employant une cinquantaine de salariés. Il a par ailleurs précisé que la filialisation des terminaux méthaniers n'avait d'autre objet que de mettre davantage GDF en conformité avec le droit communautaire, imposant leur séparation comptable, mais que GDF en resterait pleinement propriétaire et que le contrôle de l'Etat sur ces terminaux serait assuré par la mise en place d'une action spécifique.

Il s'est ensuite félicité que la Commission européenne ait accepté que le terminal méthanier de Montoire puisse faire l'objet d'investissements importants de GDF visant à accroître ses capacités.

Il a donc conclu en indiquant que les effets de ces restructurations sur le nouvel ensemble GDF-Suez seraient très limités, d'autant que les cessions de portefeuilles lui permettraient des réinvestissements sur d'autres marchés.

Rappelant que le cœur du débat aurait lieu sur l'article 10, M. Jean-Pierre Soisson a estimé que la situation était évolutive, dans la mesure où la Commission européenne a été informée des engagements pris par les parties pour répondre à sa lettre de griefs. Il a estimé normal qu'une partie des informations relatives à ces engagements puisse faire l'objet d'un débat à l'Assemblée nationale mais qu'une autre partie reste du domaine des deux entreprises.

M. Daniel Paul a demandé quelle était la part des cessions d'actifs dans les contrats de long terme. Il a par ailleurs estimé que la filialisation de certaines activités était un préalable à leur privatisation et que l'instauration d'une action spécifique dans ces filiales démontrait que le Gouvernement anticipait cette privatisation.

M. François Brottes a demandé au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie de préciser plus clairement ce qui avait été demandé par la Commission européenne, ce qui a été proposé par les entreprises et ce qui a finalement été accepté par la Commission. Puis il s'est interrogé sur les conséquences de l'obligation faite à GDF de rendre accessibles, en toute transparence et neutralité, un certain nombre d'actifs, notamment de stockage.

M. Michel Vaxès a souhaité savoir ce qu'il en était du terminal de Fos.

M. Jacques Bobe a estimé que le prétendu démantèlement de GDF ne représentait qu'une part extrêmement faible de l'activité de l'entreprise. Il s'est par ailleurs étonné que le projet de fusion entre GDF et Suez - qui n'est par ailleurs pas le point sur lequel le Parlement doit se prononcer - occupe tous les esprits alors que l'Assemblée nationale devrait voir plus loin et s'intéresser non seulement au présent mais également à l'avenir, en s'inscrivant dans une perspective de long terme qui implique de s'interroger sur les alliances futures de GDF, alliances qui pourraient avoir une dimension bien différente de celle envisagée aujourd'hui.

M. Jean-Marc Ayrault a pour sa part interrogé le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, sur la date à laquelle était attendue la réponse définitive de la Commission européenne, estimant délicat pour les députés de se prononcer sur le texte en discussion sans avoir tous les éléments d'appréciation nécessaires.

M. Antoine Herth a posé une question relative à l'obligation de séparation juridique de la distribution imposée aux distributeurs non nationalisés : s'interrogeant sur l'existence, ou non, d'une obligation de filialisation de la gestion des réseaux de distribution ou sur la possibilité de procéder, en sens inverse, à la filialisation des autres activités du DNN, il a souhaité connaître la lecture faite par le Gouvernement des dispositions de la directive communautaire à ce sujet.

Avant de donner la parole aux ministres pour répondre, le Président Patrick Ollier a tenu à rappeler qu'il avait convoqué cette réunion afin que les députés puissent obtenir toutes les informations qu'ils jugent utiles et a souhaité qu'en conséquence, le même débat ne soit pas recommencé en séance.

M. Thierry Breton, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, au sujet de la filialisation des terminaux méthaniers, a rappelé qu'il s'agissait de mieux répondre à une obligation de transparence des comptes et de rentabilité de la gestion et que cette opération n'impliquait pas qu'il y ait une séparation patrimoniale. Sur la réponse définitive de la Commission, le ministre s'est dit confiant, considérant que si celle-ci avait décidé de lancer les tests de marché, c'était le signe qu'elle jugeait les solutions apportées suffisantes pour les soumettre aux concurrents et passer à l'étape suivante. À cet égard, il a exprimé sa reconnaissance à la Commission européenne pour sa diligence et estimé que sa réponse devrait être assez rapide.

Il a indiqué que la gestion du terminal de Fos n'était pas évoquée dans les remèdes envisagés. Il a ajouté que l'objectif du projet gouvernemental consistait à permettre à l'entreprise gazière d'augmenter son chiffre d'affaires, de trouver un partenaire et de devenir, de ce fait, un leader européen dans le secteur énergétique.

M. François Loos, ministre délégué à l'Industrie, a rappelé que la séparation des activités de distribution ne concernait, outre GDF et EDF, que les distributeurs non nationalisés desservant plus de 100 000 clients, soit 6 distributeurs, 2 pour le gaz, et 4 pour l'électricité. Après avoir rappelé que la filialisation de l'activité de transport avait déjà été opérée s'agissant d'EDF et GDF, il a souligné que l'objectif n'était pas en soi la filialisation, mais bien une séparation des responsabilités ainsi qu'une séparation comptable des activités de gestion des réseaux. Par conséquent, les distributeurs non nationalisés peuvent opter entre la filialisation de leur activité de gestion des réseaux de distribution, à l'instar des deux grandes entreprises, et la création de deux filiales, l'une pour la distribution, l'autre pour leurs autres activités.

Il a également indiqué que les dispositions du contrat de service public de GDF relatives à la part des contrats de long terme dans les approvisionnements de l'entreprise n'étaient pas remises en cause.

--____--


© Assemblée nationale