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Assemblée nationale

COMPTE RENDU
ANALYTIQUE OFFICIEL

Session ordinaire de 2003-2004 - 16ème jour de séance, 41ème séance

2ème SÉANCE DU MERCREDI 29 OCTOBRE 2003

PRÉSIDENCE de M. Jean LE GARREC

vice-président

Sommaire

          LOI DE FINANCEMENT
          DE LA SÉCURITÉ SOCIALE POUR 2004 (suite) 2

          ARTICLE PREMIER 2

          AVANT L'ART. 2 10

          ART. 2 14

          ART. 3 15

          APRÈS L'ART. 3 18

          ART. 4 19

          ORDRE DU JOUR DU JEUDI 30 OCTOBRE 2003 23

La séance est ouverte à vingt et une heures quarante-cinq.

LOI DE FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE POUR 2004 (suite)

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2004.

M. le Président - Je souhaite que le débat se déroule dans la sérénité et dans le respect du Règlement, lequel, je le rappelle, interdit les interpellations de député à député.

ARTICLE PREMIER

M. Jean-Luc Préel - Je me félicite que nous commencions l'examen des articles par l'approbation du rapport annexé, et donc des orientations de la politique de santé et de sécurité sociale, sans nous limiter à un exercice comptable sans base médicale et décrédibilisé un peu plus chaque année, l'ONDAM étant systématiquement dépassé. En procédant de la sorte, le Gouvernement montre qu'il n'entend pas avoir recours à des expédients conjoncturels mais qu'il entend réformer en profondeur notre système de soins. C'est ce que souhaite le groupe UDF, que le projet de loi relatif à la politique de santé publique a beaucoup déçu. Nous espérons qu'il sera amélioré à l'occasion des navettes.

La crise financière que connaît notre système de soins s'explique pour partie par l'évolution économique, mais aussi par le fait que la santé est considérée par nos concitoyens comme un « bien supérieur ». Il faudra bien finir par dire comment nous pourrons continuer de financer une protection sociale si précieuse à tous, car nous ne pouvons cumuler ainsi des déficits qui pèseront sur les générations futures.

S'agissant de la gouvernance de l'assurance maladie, la meilleure solution n'est pas celle qu'a retenue le Gouvernement. Le paritarisme ne règlera pas tout dans un système qui est entièrement étatisé, et créer un nouveau « machin » n'aura d'efficacité qu'illusoire.

Je regrette enfin que le rapport annexé ne dise pas un mot de la régionalisation alors même que les expériences de nos voisins dans ce domaine montrent que la responsabilisation des acteurs du système de santé passe par la régionalisation et donc, aussi, la maîtrise des dépenses de santé.

M. Jean-Marie Le Guen - Si nous en venons dès maintenant à l'examen des articles, c'est que l'opposition n'a pas voulu se livrer à l'un de ces épisodes de flibusterie auxquels nous avons assisté dans le passé. Quant à l'article premier proprement dit, il ne mérite pas d'amendements, car il se limite en quelque sorte à reprendre un exposé des motifs dont nous avons dit ce que nous pensions. Autant dire que le rapport annexé n'est pas du tout ce qu'il devrait être : il sert de cadre à des réflexions institutionnelles alors qu'il devrait définir des objectifs de santé publique. Il ne trace pas davantage les contours d'un ONDAM médicalisé, et ne reprend rien des propositions, pourtant judicieuses, du rapport Coulomb à ce sujet. Il y a loin de la théorie à la pratique !

Nous ne voterons pas cet article, qui ne nous éclaire pas et qui, surtout, n'est pas animé par l'ambition de réformer notre appareil de soins, mais nous nous abstiendrons de ressasser des arguments déjà défendus, car notre intention n'est pas de faire de l'obstruction.

Mme Jacqueline Fraysse - L'article n'a rien de normatif : c'est un catalogue de bonnes intentions. Nous n'avons donc pas déposé d'amendements visant à le modifier, car il aurait fallu le reprendre dans son intégralité et, surtout, définir les moyens de son application. Il présente en effet bien des lacunes et énonce même des contrevérités. Certains objectifs sont constructifs, mais leur réalisation est des plus aléatoires puisque le financement n'en est pas défini, faute d'avoir été choisi.

Vous énoncez des engagements séduisants mais trompeurs. Ainsi, vous proclamez « priorité à la santé publique », mais l'on voit ce qu'il en advient : création d'un outil de maîtrise régionale des dépenses de santé sans aucun financement prévu !

De même, on suppose que par « modernisation de l'hôpital », il faut entendre tarification à l'activité. Je ne sais si c'est une mesure de modernisation, mais c'est en tout cas une mesure restrictive et, probablement, discriminatoire.

Vous vous prononcez encore « pour une politique du médicament favorable à l'innovation », mais vous multipliez les déremboursements et vous instituez la liberté de fixation des prix, ce qui pose de graves problèmes à certains services hospitaliers, tel celui de cancérologie de l'hôpital Avicenne. Quant aux médicaments déremboursés, ils ont vu leur prix augmenter de 30 à 50 %, et la note est à la charge des assurés sociaux - du moins ceux qui peuvent payer ! Pour les autres, tant pis ! C'est bien pourquoi nous parlons de médecine à deux vitesses.

Et encore : vous évoquez « une meilleure prise en compte des personnes les plus fragiles », mais vous gelez les crédits et vous diminuez l'APA. Quant à la prise en charge de la dépendance par la sécurité sociale comme un risque nouveau, c'est l'Arlésienne ! D'ailleurs, l'amendement que nous avions déposé à ce sujet a été rejeté en commission. Nous regrettons que vous ayez refusé de créer une prestation dépendance-perte d'autonomie.

S'agissant des maladies professionnelles et des accidents du travail, vous reconduisez l'existant alors qu'il faudrait tendre à la réparation intégrale des préjudices. Et pour la branche vieillesse, votre objectif est de faire appliquer la loi portant réforme des retraites, texte massivement rejeté parce qu'il porte en germe une régression sociale historique.

Autant dire que le rapport annexé participe de « l'_uvre » engagée : la casse de notre système de protection sociale. Nous nous attacherons à le montrer à nos concitoyens et à formuler, avec eux, d'autres propositions, car il en existe.

M. Pierre Morange, rapporteur de la commission des affaires culturelles pour les recettes et l'équilibre général - L'amendement 18 est rédactionnel.

L'amendement 18, accepté par le Gouvernement et mis aux voix, est adopté.

Rapport annexé

M. Pierre Morange, rapporteur - L'amendement 19 est de précision.

L'amendement 19, accepté par le Gouvernement et mis aux voix, est adopté.

M. Jean-Marie Le Guen - L'amendement 169 a le mérite d'opérer une clarification : s'appuyant sur des propos que vous avez tenus à une certaine époque, Monsieur le Ministre, il indique qu'en aucune façon les assurances privées n'ont vocation à gérer la protection sociale obligatoire. Nous nous attendons donc à une approbation quasi unanime de l'Assemblée...

M. Pierre Morange, rapporteur - Avis défavorable. L'amendement relève du procès d'intention : votre phobie n'a aucun fondement. Comme le Premier ministre et le ministre l'ont déclaré, il n'y aura ni privatisation, ni étatisation de la sécurité sociale.

Accessoirement, vous supprimeriez la référence faite au pacte républicain, de même que la mention d'un « financement dépendant des revenus de chacun » !

M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées - Même avis.

L'amendement 169, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme Catherine Génisson - Le Gouvernement n'a pas voulu entamer la réforme de notre système de protection sociale, probablement en raison des élections du début de l'an prochain. Toujours est-il que ce refus est profondément regrettable. Quoi qu'il en soit, puisque vous avez installé un Haut Conseil de l'assurance maladie et puisque vous lui avez demandé de faire des propositions pour cette réforme, il est inopportun d'apporter dans d'autres textes des modifications à notre système de santé : attendons que le Haut Conseil ait remis ses conclusions ! Tel est le sens de l'amendement 170.

M. Pierre Morange, rapporteur - Cet amendement est anticonstitutionnel : il vise à paralyser l'action du Gouvernement et aurait pour effet d'empêcher le Parlement de légiférer.

L'amendement 170, repoussé par le Gouvernement et mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme Paulette Guinchard-Kunstler - L'amendement 171 vise à inscrire dans ce PLFSS les objectifs qui, je pense, seront repris dans le plan « Vieillissement-Solidarité ». Depuis deux ou trois ans, et plus encore depuis cet été, nous mesurons de mieux en mieux la nécessité de réorganiser notre système social pour prendre en compte l'allongement de la durée de la vie et la fragilité des personnes âgées. L'an dernier, Monsieur le Ministre, vous avez vous-même accepté un amendement appelant à définir un dispositif complet à cette fin. Quant à nous, outre que nous avons institué l'allocation personnalisée d'autonomie, nous avons commencé à élaborer un plan en faveur de la gériatrie hospitalière et un plan « Alzheimer » ; nous avons pris conscience de la nécessité de réorganiser les services de maintien à domicile et de lancer des recherches sur la prise en charge des personnes âgées.

Or, nous pouvons douter que les moyens soient au rendez-vous en 2004, puisque nous ne les trouvons pas dans ce PLFSS. Pourtant, tous autant que nous sommes, nous comprenons bien qu'il nous faut définir une politique sanitaire et sociale aussi complète que possible en faveur des personnes âgées - pour elles, mais aussi autour d'elles, tant cette tâche peut être de nature à faire évoluer notre conception de l'organisation sanitaire et sociale. La grande vieillesse peut en effet apporter beaucoup à la société.

L'amendement 171 vise donc à inscrire dans cette loi de financement l'obligation que nous avons tous à l'égard des personnes âgées fragiles - je préfère ce mot à « dépendantes ». Il nous permettra de poursuivre le cheminement que nous avons commencé depuis que nous nous préoccupons des soins palliatifs - et sa discussion vous donnera peut-être aussi, Monsieur le ministre, l'occasion de répondre aux questions que j'ai posées sur le financement de cette prise en charge en 2004 !

M. Pierre Morange, rapporteur - Avis défavorable. L'amendement vise à « rattraper » un « retard ». Mais qui est responsable de ce retard ? Qui a omis de financer l'APA et d'aider les établissements à se moderniser ? (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste)

M. le Ministre - Je m'apprêtais à vous répondre, Madame Guinchard-Kunstler. Je ne doute pas un instant de la force de vos convictions, sur ce sujet qui vous tient à c_ur, mais je vous garantis qu'en 2004, ce sont 300 millions d'euros qui iront à la prise en charge des personnes âgées, cependant que l'ONDAM-personnes âgées croîtra de 10 %, contre 8,3 % auparavant.

Je ne veux entrer dans aucune polémique, mais, entre 1997 et 2002, les dépenses de l'enveloppe « personnes âgées » de l'ONDAM ont augmenté de 626 millions d'euros, soit de quelque 130 millions par an. Entre 2002 et 2004, la progression sera d'un milliard d'euros ! Par conséquent, en dépit de ce que certains ont appelé le « gel » ou le « débasage » et nous une reprise des négociations tripartites, nous amplifierons l'action entreprise. Le 30 septembre, j'ai annoncé dans le cadre du plan « Urgences » plusieurs mesures visant à améliorer la filière des soins gériatriques ; 207 établissements dotés d'un service d'accueil des urgences seront équipés avant la fin de 2004 de lits de court séjour gériatrique - 117 l'ont déjà été pratiquement. Nous allons généraliser les équipes mobiles chargées de faire des recommandations pour la prise en charge des personnes âgées fragilisées dans les hôpitaux. S'agissant de la maladie d'Alzheimer, nous prévoyons de développer les pôles ambulatoires d'évaluation et des centres mémoire, afin de poser des diagnostics aussi précoces que possible. Enfin, d'ici à 2005, nous disposerons de 8 000 places d'hospitalisation à domicile et l'ouverture de ces lits ne supposera plus comme auparavant la fermeture des lits d'hôpital.

Votre préoccupation est donc la mienne mais je ne saurais accepter les termes de votre amendement.

Mme Paulette Guinchard-Kunstler - Si vous êtes, comme je le crois, attaché à la poursuite de la politique que nous avons lancée, que n'acceptez-vous cet amendement ? Depuis des années, les financements nécessaires étaient clairement inscrits dans l'annexe 1.

D'autre part, il n'existe pas d'ONDAM « personnes âgées » - et ce serait d'ailleurs dangereux car cela équivaudrait à stigmatiser une catégorie de population. En revanche, il y a un ONDAM médico-social... que 300 millions ne suffiront pas à financer, car les besoins sont grands en matière de qualité des soins, de formation des personnels ou de relations avec les familles.

Monsieur le rapporteur, j'ai veillé à ne pas utiliser d'arguments politiciens. Je vous assure que le rapport de l'an dernier avançait des chiffres faux, s'agissant du financement de l'APA notamment. Nous avions prévu une montée en charge en deux ans ; les choses sont allées plus vite que prévu et vous n'avez pas été capables de faire face, préférant utiliser le fait à des fins politiciennes... (Protestations sur les bancs du groupe UMP)

M. Bernard Accoyer - Vous avez institué l'APA, mais c'est nous qui l'avons financée ! Et voici que vous nous accusez !

M. Yves Bur - Les leçons, cela suffit !

Mme Paulette Guinchard-Kunstler - Ecoutez plutôt ce que je dis, je ne donne pas de leçons...

La loi avait prévu qu'un bilan serait dressé et le financement adapté en conséquence. Avez-vous vu le moindre bilan, ou la moindre proposition d'adaptation de la loi de financement ? Vous avez choisi de tronquer les chiffres - relisez les documents de la DRES !

Monsieur Jacquat, nous avions identifié 800 000 personnes âgées dépendantes, mais seules 720 000 sont financées. Ce gouvernement a choisi de faire payer les départements. Je crois qu'il était nécessaire de rétablir la vérité ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

M. Gaëtan Gorce - Ils sont sans voix.

M. Maxime Gremetz - Quel dommage de polémiquer sur une mesure si importante que nous l'avions votée à l'époque malgré son insuffisance.

M. Bernard Accoyer - C'est vrai, vous avez manqué de vigilance ! Vous avez été abusés !

M. le Président - J'ai rappelé tout à l'heure que les interpellations de député à député étaient interdites.

M. Maxime Gremetz - Nous n'avons nullement été abusés. Cette mesure a été victime de son succès, parce que, contrairement à tant d'autres, elle répondait à un besoin réel. Le débat sur le financement, nous l'avons déjà eu à l'époque. Je crois me souvenir qu'alors vous rejetiez, comme nous, le financement par les conseils généraux...

M. Denis Jacquat - Très juste !

M. Maxime Gremetz - ...et souteniez notre proposition de créer un risque de dépendance (« Absolument ! » sur les bancs du groupe UMP), basé sur les cotisations et sur la participation des entreprises. Or, aujourd'hui, le problème de financement subsiste, et vous ne le traitez pas, allant jusqu'à refuser en commission notre amendement visant à créer ce risque dépendance.

Comment pouvez-vous à ce point changer de discours, une fois passés dans la majorité ?

M. le Président - Sur l'amendement 171, je suis saisi par le groupe socialiste d'une demande de scrutin public.

M. Denis Jacquat - Les deux dernières phrases de l'amendement de Mme Paulette Guinchard-Kunstler sont certes sujettes à polémique, mais, sur le fond, nous sommes d'accord, la perte d'autonomie doit être prise en compte.

Mécontents de la PSD, nous avons proposé un nouveau type d'allocation et je faisais partie de ceux qui se sont battus pour qu'il soit assis sur le cinquième risque, mais nous n'avons pas obtenu satisfaction. Cela étant, quand nous avons débattu ici-même, le 1er avril 2001, de l'APA, j'avais alerté l'Assemblée sur les problèmes de financement, en indiquant que les conseils généraux n'arriveraient pas à assumer cette charge. Il y a un problème de fond pour le financement de l'APA, et le Gouvernement proposera prochainement un plan dont j'espère qu'il assumera un financement pérenne.

Le plus important est maintenant de ne plus raisonner en termes de dépendance des personnes âgées, mais de perte d'autonomie, pour tout le monde.

A la majorité de 44 voix contre 14, sur 60 votants et 58 suffrages exprimés, l'amendement 171 n'est pas adopté.

M. Jean-Luc Préel - Si le rapport fixe les grandes priorités, les amendements permettent de l'améliorer, aussi suis-je surpris par le rejet de deux amendements importants, l'un sur le stationnement des professionnels de santé...

M. Bernard Accoyer - C'était un cavalier !

M. Jean-Luc Préel - ...l'autre pour corriger les effets de seuil de la CMU.

Par ailleurs, concernant le dépistage du cancer du sein, il avait été prévu que les mammographies seraient prises en charge par l'assurance maladie. Or, il semblerait que les coûts soient intégrés dans la dotation globale budgétaire. Mon amendement 249, identique au 20 corrigé de la commission, tend donc à les réintégrer au sein de l'assurance maladie.

Les amendements 20 corrigé et 249, acceptés par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, sont adoptés.

M. Pierre Morange, rapporteur - L'amendement 354 propose la création d'un ordre des pédicures-podologues analogue à celui des masseurs-kinésithérapeutes.

M. le Ministre - Sagesse.

M. Jean-Luc Préel - Mon amendement 250, que nous examinerons tout à l'heure, a le même objet, mais je propose en outre de créer une Union régionale de ces professionnels libéraux.

M. Jean-Marie Le Guen - Toutes les professions de santé méritent le plus grand respect. Chacune d'entre elles devra jouer un rôle de plus en plus important.

Mais ce n'est pas leur rendre service que de satisfaire la demande d'une petite minorité d'enter elles. Qui dit ordre dit cotisation et donc bureaucratie.

M. Richard Mallié - Caricature !

M. Jean-Marie Le Guen - Au nom de quoi ? D'une logique corporatiste et électoraliste, quand l'heure est à la coordination des professionnels de santé, non à leur isolement.

M. le Président - Effectivement, Monsieur Préel, votre amendement 250 a un objet analogue, mais il n'est pas placé au même endroit.

L'amendement 354, mis aux voix, est adopté.

Mme Catherine Génisson - L'amendement 172 tend à prendre en compte les inégalités territoriales en matière de santé publique. Le Gouvernement de M. Jospin avait d'ailleurs prévu un rattrapage pour les régions concernées.

Concernant le Nord-Pas-de-Calais, avant 1997, le niveau de cotisation des assurés était supérieur au niveau de remboursement dont ils bénéficiaient.

Depuis 1997, le rattrapage a permis à cette région de se moderniser, mais il est incomplet, ce qui est également le cas des régions Limousin, Poitou-Charente, Picardie.

C'est une décision très grave que de ne pas vouloir maintenir cette mesure.

Je rappelle que le Nord-Pas-de-Calais est la première région française pour le nombre d'accidents cardio-vasculaires, des cancers digestifs, des problèmes liés à l'alcoolisme.

Ces régions doivent pouvoir bénéficier d'une discrimination positive.

M. Pierre Morange, rapporteur - Avis favorable.

M. le Ministre - Avis favorable, pour témoigner de la bonne volonté du Gouvernement

Mais je rappelle qu'avec la tarification à l'activité, cet ONDAM avec péréquation n'aura plus de sens puisque les hôpitaux construiront leur propre budget en fonction de leur activité.

En la matière, nous devons changer nos modes de pensée.

Mme Catherine Génisson - La tarification à l'activité prévoit que des zones géographiques bénéficieront de dotations particulières. C'est dans ce cadre que nous demandons la poursuite du système de rattrapage.

M. le Ministre - Il faudra accorder certes des moyens spécifiques aux régions mais dans le cadre de la politique globale de santé publique.

L'ONDAM hospitalier perdra progressivement son importance.

Je connais les difficultés particulières de votre région, mais elles ne sont pas limitées à l'hôpital.

L'amendement 172, mis aux voix, est adopté.

M. Bernard Accoyer - L'amendement 320 vise à permettre aux établissements de santé des zones frontalières à continuer leur activité, malgré la désaffection des personnels soignants et en particulier des infirmiers.

En effet, les différences de change, de salaires, de conditions de travail attirent les étudiants vers les établissements étrangers.

Nous proposons qu'en 2004 le Gouvernement prenne les mesures nécessaires pour permettre aux établissements de santé de ces zones de fidéliser les étudiants.

Mme Muguette Jacquaint - Je soutiens également l'amendement 320 (« Ah ! » sur les bancs du groupe UMP). J'ai moi-même souligné dans la motion de renvoi en commission la nécessité de prendre des dispositions pour fidéliser ces étudiants.

J'ai proposé en particulier, qu'il soit désormais possible de les loger.

L'amendement 320, accepté par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. Jean-Luc Préel - Dans le but d'améliorer la qualité des soins, la formation médicale continue ne doit pas être réservée aux médecins mais doit bénéficier à tous les professionnels de santé.

Cette formation médicale continue doit être obligatoire, évaluée et financée. Ses conditions de mise en _uvre seront précisées par décret. Tel est le sens de l'amendement 251.

M. Pierre Morange, rapporteur - Avis favorable.

Cet amendement reprend des dispositions du projet de loi sur la santé publique. Je m'étonne, dans ces conditions, de la contradiction entre le dépôt de cet amendement et votre position de vote sur ladite loi.

M. Jean-Luc Préel - Si le rapporteur souhaite que les débats restent sereins, peut-être pourrait-il éviter de telles provocations. Je lui rappelle par ailleurs que j'avais déposé le même amendement dans le projet de loi de santé publique et qu'il avait été refusé, au motif que ce n'était pas le bon texte. Vous comprendrez que je n'aie pas pu voter cette loi !

M. Jean-Marie Le Guen - Je voudrais d'abord exprimer la stupéfaction de mon collègue Gaëtan Gorce devant l'usage du futur dans cet amendement. La loi s'écrit au présent. Par ailleurs, je comprends le raptus de M. Préel, qui sait que la disposition pourtant évidente sur laquelle il insiste ne sera pas appliquée. C'est la raison pour laquelle il a rédigé son amendement au futur. Sans doute aurait-il pu utiliser le conditionnel... Malgré vos v_ux pieux, les médecins français ne bénéficieront pas d'une formation médicale continue, contrairement à n'importe quelle autre profession de ce niveau de compétence.

M. Pierre Morange, rapporteur - Je voudrais préciser qu'il faut bien comprendre « Ses conditions de mise en _uvre », au lieu de « Ces » conditions.

L'amendement 251, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. Jean-Luc Préel - L'amendement 250 est très proche du 354, précédemment adopté et je m'étonne qu'ils n'aient pas été discutés conjointement...

M. le Président - Ils ne sont pas à la même place.

M. Jean-Luc Préel - Ce n'est pas la première fois que nous voyons nos amendements déplacés...

L'amendement 250 propose la création d'un ordre des pédicures podologues. Il paraît essentiel d'instituer parallèlement une union régionale des professions paramédicales libérales qui leur permettrait de travailler ensemble et de coordonner leurs actions au niveau régional.

M. Pierre Morange, rapporteur - La proposition relative aux unions régionales de professions libérales, semblables aux URML des médecins, doit s'inscrire dans la réflexion en cours du Haut conseil pour l'avenir de l'assurance maladie. Il ne serait pas respectueux envers les partenaires sociaux et la démocratie sociale de l'adopter dès maintenant. Je demande donc à M. Préel de retirer cet amendement.

M. Jean-Luc Préel - En soulignant une nouvelle fois l'intérêt d'une union régionale des professions paramédicales, je retire l'amendement 250.

L'amendement 285, qui tient tout particulièrement à c_ur au président de notre groupe Hervé Morin, demande un rapport sur la revalorisation de la fonction d'auxiliaire de vie, notamment en ce qui concerne le statut et la pénibilité de cet emploi. Les auxiliaires de vie ont une formation et un statut particuliers depuis 1981. Titulaires du diplôme d'Etat d'auxiliaire de vie, ils assurent une aide dans la vie quotidienne, pour le maintien à domicile, l'amélioration de l'autonomie des personnes, leur insertion sociale et la lutte contre l'exclusion. Ces personnes assurent un accompagnement et un soutien indispensable, qui justifient une revalorisation de leurs fonctions.

M. Pierre Morange, rapporteur - Avis défavorable. La représentation nationale est certainement sensible à l'utilité des auxiliaires de vie, notamment dans un contexte démographique difficile. Cependant, la rédaction d'un rapport ne sera d'aucune utilité pour résoudre ce problème.

L'amendement 285, repoussé par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jean-Luc Préel - L'amendement 252 a trait à un problème majeur : la fin de vie. Sans anticiper sur les conclusions de la mission, je pense que chacun s'accorderait à augmenter le nombre de lits de soins palliatifs et d'équipes mobiles. Je sais que le ministre est très attaché au développement des services de soins palliatifs.

M. Pierre Morange, rapporteur - Cet amendement a été accepté par la commission. Le sujet est douloureux et la première loi adoptée sur le sujet avait d'ailleurs été votée à l'unanimité. Cette préoccupation est au c_ur de l'action gouvernementale.

M. le Ministre - On ne peut qu'être favorable à cet amendement, mais je tiens à souligner qu'il ne fait que reprendre des évidences qui figurent dans le plan 1999-2002 que j'ai reconduit. Il n'apporte rien, mais je ne suis pas opposé à ce qu'il figure dans la loi.

M. Maxime Gremetz - Cet amendement est extrêmement important. Après le drame sanitaire que nous avons vécu, toutes les auditions que nous avons menées et toutes les personnalités ont insisté sur le manque de lits de soins palliatifs et d'équipes mobiles. Nous sommes donc favorables à cet amendement sur lequel nous demandons un scrutin public.

M. le Président - Sur l'amendement 252, je suis donc saisi par le groupe communiste et républicain d'une demande de scrutin public.

A l'unanimité des 51 voix sur 51 votants et 51 suffrages exprimés, l'amendement 252 est adopté.

M. Jean-Luc Préel - L'amendement 300 demande un rapport au Gouvernement sur la modification des conditions portant sur l'exercice antérieur d'une activité professionnelle pour l'ouverture du droit au complément de libre choix d'activité. Ce projet de loi comporte des avancées très intéressantes, notamment en ce qui concerne la liberté donnée pour la garde des enfants. Un rapport est souhaitable pour préciser les conditions d'ouverture du droit au complément de libre choix.

M. Claude Gaillard, rapporteur de la commission des affaires culturelles pour la famille - Cet amendement n'a pas été examiné par la commission. A titre personnel, je considère qu'il est dans l'esprit du texte. Avis favorable.

M. le Ministre - Sagesse.

L'amendement 300, mis aux voix, est adopté.

M. Yves Bur - L'amendement 283, déposé par Mansour Kamardine, propose de mener une réflexion sur la suppression du plafond de trois enfants pour le versement de prestations familiales à Mayotte, qui date de l'ordonnance du 7 février 2002 sur la protection sociale à Mayotte.

Il convient donc qu'une mission de l'inspection générale des affaires sociales examine ce qu'il en est de cette disposition, et de la discrimination qu'elle entraîne au détriment des familles de Mayotte, afin peut-être de la supprimer.

M. Claude Gaillard, rapporteur - La commission n'a pas examiné l'amendement, auquel il paraît prématuré de donner une suite favorable.

M. le Ministre - Sagesse.

L'amendement 283, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jean-Marie Le Guen - En défendant l'amendement 289, je reviens sur un épisode toujours inexpliqué de l'examen du projet de loi de finances de l'an dernier, et sur le cheminement des déclarations du Gouvernement sur les finances de la sécurité sociale. Il y a un an, ici même, nous jugions choquante la présentation d'un projet de loi de finances en déficit, d'autant plus que ce déficit était largement sous-estimé selon nous. Vous nous répondiez faire le pari de la confiance, tout en ajoutant qu'en cas de dérapages financiers vous reviendriez au printemps avec un projet de loi de finances rectificative. Nous avions pris acte de cet engagement, que le Conseil constitutionnel a relevé de son côté puisqu'il en a tiré argument pour valider votre projet en dépit des doutes qu'il pouvait éprouver sur la sincérité de vos chiffres.

Quand, au printemps, les dérapages ont atteint une telle ampleur que vos chiffres avaient perdu tout sens, interpellé par l'opposition, vous nous avez dit qu'il n'y aurait pas de loi de finances rectificative parce qu'à l'automne vous reviendriez avec des propositions très importantes pour l'assurance maladie. Puis, à mesure que les déficits se creusaient de façon abyssale, l'inquiétude gagnait le Président de la République lui-même qui, vous prenant à contre-pied, déclarait urgent de ne rien faire. Le projet de loi doit désormais attendre dix-huit mois. C'est qu'il s'agit de passer les échéances électorales du début de l'an prochain.

Nous incitons le Gouvernement à revenir à une plus sage orthodoxie financière, en lui demandant de nous présenter aussi tôt que possible un projet de loi de finances rectificative.

M. Pierre Morange, rapporteur - La commission n'a pas examiné l'amendement. J'y suis personnellement défavorable puisque le Premier ministre a porté sur les fonts baptismaux le Haut conseil pour l'avenir de l'assurance maladie. Laissons aux partenaires sociaux le temps de formuler des préconisations face à des déficits qui ne sont jamais que l'héritage de la politique précédente.

M. le Ministre - Même avis que le rapporteur.

M. Maxime Gremetz - Nous ne sommes pas favorables à l'amendement. Nous n'avons pas encore abordé, dans la discussion de ce PLFSS, la question du financement, et l'on nous propose déjà de renvoyer au premier trimestre 2004 la présentation de moyens de financement. Quels moyens ? Une hausse de la CSG ? Nous sommes contre ! (Interruptions sur les bancs du groupe socialiste) Modifier l'assiette des cotisations nous conviendrait mieux, ou encore une taxation des revenus financiers (Mêmes mouvements).

Cet amendement est une forme d'abdication. C'est que personne ne veut en fait s'attaquer aujourd'hui au problème du mode de financement (Interruption de M. Yves Bur). Si vous m'interrompez, je le ferai à mon tour !

Nous proposerons des recettes originales, car il est temps d'innover.

L'amendement 289, mis aux voix, n'est pas adopté.

L'article premier et le rapport annexé modifiés, mis aux voix, sont adoptés.

AVANT L'ART. 2

M. Pierre Morange, rapporteur - L'amendement 21 rectifié tend à créer un comité des finances sociales, afin de prendre acte de la suppression du FOREC. Il a compétence pour l'ensemble de la protection sociale, et il est chargé de surveiller les flux financiers entre l'Etat et les régimes sociaux. Il est composé de huit parlementaires, huit représentants des caisses et quatre représentants de l'Etat. Son secrétaire général est désigné conjointement par les présidents des deux assemblées. Nous disposerons ainsi d'un outil de démocratie sociale permettant d'éclairer l'affectation des différents budgets sociaux.

M. le Ministre - Avis favorable.

M. Claude Evin - On ne peut qu'approuver tout ce qui permet de mieux identifier les flux entre les différents systèmes de protection sociale. Cela n'exclut pas de rechercher davantage de transparence dans la façon dont sont décidées les exonérations ou les cotisations.

La proposition de M. Morange est recevable si elle n'induit pas des lourdeurs supplémentaires. S'il s'agit pour ce comité d'éclairer les travaux de l'Assemblée, je ne suis pas sûr que la date du 15 octobre retenue pour remettre son rapport soit la plus opportune, car l'examen du PLFSS a déjà commencé en commission. De plus, revient-il à la loi de préciser le détail de la composition du comité ?

Ce dernier devra disposer de moyens s'il doit remplir les objectifs que vous lui assignez. Réunir trois fois par an quelques personnes pour regarder un rapport élaboré par l'administration n'éclairera pas beaucoup sur les flux financiers entre les différents régimes. Nous sommes favorables à la transparence, mais la proposition qui nous est faite comporte bien des incertitudes.

M. Yves Bur - Je suis favorable à la création d'un comité des finances sociales, car le FOREC n'a jamais brillé par sa transparence. Or, la transparence doit être de règle, et une instance doit être chargée de valider les transferts des masses financières liées aux exonérations de charges sociales...

M. Maxime Gremetz - Ah !

M. Yves Bur - ...décidées par le Gouvernement pour lutter contre le chômage. Il convient donc, comme le souhaite le rapporteur, d'élargir la mission du futur comité par rapport au champ de compétences de la commission des comptes de la sécurité sociale, de manière qu'il ait une vue exhaustive des flux financiers des différents régimes, fonds et organismes, y compris l'APA et la CMU. Plus largement, nous devrons sans nul doute revoir le périmètre du PLFSS, dont le champ est trop réduit.

Je retire l'amendement 7 rectifié au bénéfice de l'amendement 21 rectifié de la commission, dont la rédaction est plus complète et, pour faire droit à l'observation qui vient d'être faite, je propose de le modifier pour indiquer que le rapport sera rendu public « avant le 15 septembre », ce qui donnera en effet plus de temps pour en prendre connaissance.

Mme Muguette Jacquaint - Le groupe communiste et républicain est favorable à la création d'un comité des finances sociales parce qu'il est favorable à la transparence en tous temps et en tous lieux, transparence qui fait parfois gravement défaut, tant il est vrai que l'on a bien du mal à déterminer où va parfois l'argent des exonérations de cotisations sociales...

Soucieux de transparence, nous le sommes aussi de pluralisme. Or, en l'état, nous ne serons pas représentés au sein du comité ni, donc, associés aux discussions préalables à la réforme. Le président de notre groupe a fait part, par écrit, de son indignation au Président Debré, et nous demandons, par le sous-amendement 282 rectifié, que toutes les sensibilités politiques représentées au Parlement siègent au sein du comité des finances sociales.

M. Pierre Morange, rapporteur - J'accepte la proposition de modification faite par notre collègue Bur. Je comprends, d'autre part, que Claude Evin puisse considérer que la composition du comité soit d'ordre réglementaire plutôt que législatif, mais nous avons tenu, pour des raisons symboliques, à ce qu'elle figure dans la loi.

S'agissant du sous-amendement 282 rectifié, la commission a exprimé un avis défavorable, considérant qu'il ne relevait pas de la loi mais du Président de chaque assemblée de garantir la représentativité des groupes politiques au sein de l'instance nouvelle.

M. le Ministre - Le Gouvernement accepte l'amendement 21 rectifié tel que modifié, et se gardera de prendre parti sur le sous-amendement 282 rectifié, qui ressort des prérogatives du Président de notre assemblée.

M. Maxime Gremetz - Vous ne pouvez pas dégager en touche comme ça ! Lorsque la même question s'est posée pour le COR, le principe d'une représentation équitable de tous les groupes a été acquise en cours de débat, à l'unanimité, avec l'accord de M. Fillon. Dans sa réponse à Alain Bocquet, le président de notre groupe, le Président Debré indique que le problème évoqué est réel : il doit donc être réglé et je ne vois pas pourquoi ce qui a été réglé avec M. Fillon ne pourrait pas l'être cette fois.

M. Pierre Morange, rapporteur - Parce que ce que vous souhaitez n'a pas à être inscrit dans la loi : cela relève des prérogatives du Président de notre assemblée.

Mme Catherine Génisson et M. Maxime Gremetz - Vous faites erreur.

M. Pierre Morange, rapporteur - Je ne le pense pas, et la réponse qu'a faite le Président Debré à M. Alain Bocquet montre que la demande de votre groupe sera prise en compte.

M. Yves Bur - Ces questions d'organisation seront réglées au cours de la navette. Ne tranchons pas aujourd'hui.

M. Maxime Gremetz - Je le répète : ce qui a été une première fois inscrit dans une loi avec l'accord de M. Fillon doit l'être dans une autre avec l'accord de M. Mattei. La moindre des choses, quand on parle de démocratie, c'est que toutes les sensibilités politiques soient représentées au sein d'instances importantes.

M. le Président - Je n'ai pas eu le temps de vérifier, Monsieur le rapporteur, mais je crois me souvenir en effet que ce point avait été inscrit dans la loi.

M. Pierre Morange, rapporteur - Je souhaite que nous trouvions un terrain d'entente, mais vous voyez bien que l'amendement vise à asseoir le crédit de ce comité des finances sociales en lui donnant une composition véritablement démocratique. L'importance du sujet l'impose d'ailleurs. Cela étant, la procédure suggérée par M. Bur semble pertinente, s'agissant de trouver une rédaction sans ambiguïté.

M. Gérard Bapt - Nous partageons la position du groupe communiste et républicain, d'autant qu'il n'y a pas si longtemps, cette assemblée comptait cinq groupes politiques.

Monsieur le rapporteur, vous avez mentionné parmi les représentants des régimes obligatoires de base le « président de la commission des accidents du travail ». Or ce n'est pas un président de caisse. A quel titre le faites-vous figurer dans ce comité ?

Enfin, le comité assumera des compétences qui sont celles de nos rapporteurs ou rapporteurs spéciaux. Ne conviendrait-il pas, dès lors, de faire de ces derniers des membres de droit de cette institution ? Les laisser à l'extérieur reviendrait à nier leur droit de contrôler sur pièces et sur place, donc à vider de son contenu le contrôle parlementaire.

M. le Ministre - Je n'interviendrai pas sur le fond, mais il me semble que faire dépendre la composition du comité du nombre de groupes politiques n'aurait pas de sens, d'autant que, s'il y a quatre groupes à l'Assemblée, il y en a cinq au Sénat. Et qui vous dit que la prochaine Assemblée n'en comptera pas six ? Il faut arrêter des règles pérennes et identiques pour les deux assemblées.

M. Maxime Gremetz - Comme mes collaborateurs sont prompts, ils viennent de me faire parvenir les documents auxquels nous devons nous référer, y compris le compte rendu du débat. « La composition étant fixée par décret, pouvez-vous vous engager à ce que chaque groupe parlementaire soit représenté ? », avait-on demandé au ministre de la fonction publique, qui a répondu : « La qualité des travaux du COR dépend évidemment de sa composition, qui doit être pluraliste ; le décret fera en sorte que tous les groupes politiques y soient représentés. »

Voilà ce que j'appelle une bonne réponse, et simple !

M. Claude Evin - Le problème vient de ce que le rapporteur veut mettre tout dans la loi alors qu'on pourrait renvoyer ce point au décret.

M. Pierre Morange, rapporteur - La remarque du ministre me semble marquée au coin de la sagesse : il faut en effet rechercher la pérennité et donc dépasser les aléas politiques. D'autre part, le comité des finances sociales aura vocation à travailler avec la Cour des comptes : y faire siéger quatre députés et quatre sénateurs ne peut que favoriser cette collaboration et c'est une autre raison de repousser le sous-amendement.

M. le Président - Je pense que l'Assemblée est suffisamment éclairée.

Le sous-amendement 282 rectifié, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Maxime Gremetz - Nous nous abstiendrons sur l'amendement.

L'amendement 21 rectifié, mis aux voix, est adopté.

M. Maxime Gremetz - Monsieur le Ministre, puisque vous avez en main le document que je vous ai lu, vous pouvez constater que je n'ai pas menti : le ministre de la fonction publique a bien pris l'engagement de faire figurer dans le décret une représentation de tous les groupes parlementaires. Ce n'est d'ailleurs que le strict respect de la démocratie pluraliste et je regrette que vous-même n'ayez pas pris le même engagement - c'est d'ailleurs pourquoi nous nous sommes abstenus. Mais j'espère que vous réfléchirez et que vous finirez par imiter votre collègue...

Obéissant à un souci d'équité et d'efficacité à la fois, l'amendement 144 vise à procurer à la sécurité sociale des ressources nouvelles grâce à une contribution sociale assise sur les produits financiers des entreprises. Il est en effet indécent de ne pas les taxer alors qu'on taxe ceux des particuliers ! C'est d'ailleurs ce que je disais ce matin à M. Seillière (Exclamations sur divers bancs), que nous entendions dans le cadre de la mission créée à l'initiative de M. Marsault pour étudier le cas de ces patrons pleins de fric qui se comportent comme des charlatans ! Je lui ai démontré que les patrons français étaient ceux qui, en Europe, gagnaient le plus au CAC 40. Il y a donc, d'un côté, ces revenus financiers formidables mais aussi, de l'autre, des exonérations de cotisations sociales tout aussi extraordinaires. Songez que la part des profits dans la valeur ajoutée produite est passée de 25 % en 1982 à 31,6 % en 2002 ! Dans le même temps, les salaires ont baissé. M. Ernest-Antoine Seillière n'en a d'ailleurs pas disconvenu, faisant seulement valoir que les temps étaient durs... Quant aux allégements de cotisations patronales, selon le ministère des finances lui-même, ils se montent à 20 milliards d'euros.

Depuis des années, on laisse croître les revenus financiers et l'on justifie les exonérations par les emplois qu'elles contribueraient à créer - ce qui est faux, comme le reconnaissent tous les analystes et, en particulier, le conseil d'analyse économique, installé auprès du Premier ministre et dont vous devriez bien lire le rapport du 9 octobre dernier. On y préconise en effet de taxer les revenus de placements qui ne sont pas investis dans la production. Même le CAE ! Mais vous ne lisez même pas ce qu'il écrit !

Notre amendement 144 est un amendement à double détente : d'une part, il rapporterait près de 20 milliards d'euros à la sécurité sociale ; d'autre part, il contribuerait à l'investissement et à l'emploi.

M. Pierre Morange, rapporteur - Défavorable. Le groupe communiste et républicain avait déjà formulé cette proposition au cours du débat sur les retraites, mais asseoir le financement de la protection sociale sur des revenus boursiers par nature fluctuants n'est pas pertinent.

M. le Ministre - Même avis.

L'amendement 144, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme Muguette Jacquaint - Quand M. Accoyer propose un amendement pour tenir compte de la situation spécifique des établissements de santé frontaliers, nous le votons. Quand M. Préel réclame des lits supplémentaires pour les personnes en fin de vie, nous le soutenons. Et nos votes sont cohérents ! Qui dit besoins nouveaux dit recettes nouvelles, aussi devriez-vous voter nos amendements 143, 123 et 124.

M. le Président - Je suis saisi par le groupe communiste et républicain d'une demande de scrutin public sur les amendements 143, 123, 124. Le résultat du scrutin public qui aura lieu sur le premier vaudra pour les deux suivants.

M. Maxime Gremetz - Aux armes camarades !

M. Pierre Morange, rapporteur - Avis défavorable sur ces trois amendements. Les modalités de financement proposées impliquent des transferts de charge excessifs entre les entreprises, ce qui déstabiliserait leurs marges budgétaires entreprenariales.

M. le Ministre - Même avis.

M. Maxime Gremetz - C'est un peu court ! Vous ne réfutez aucun des chiffres donnés par le ministère des finances, par le conseil d'analyse économique, par le ministère du travail. Je ne les invente pas, ces exonérations ! Et pendant ce temps, le déficit de la sécurité sociale se creuse encore, le chômage augmente, et le pouvoir d'achat des ménages baisse de 2,3 points, ce qui ne s'était pas vu depuis longtemps ! Vous reconnaissez l'existence de besoins nouveaux, mais vous ne proposez aucune ressource pour y répondre !

A la majorité de 37 voix contre 11, sur 48 votants et 48 suffrages exprimés, l'amendement 143 mis aux voix, n'est pas adopté, non plus que les amendements 123 et 124.

ART. 2

M. Jean-Luc Préel - L'article 2 concerne les modalités de remboursement, par la CADES, de la seconde moitié de la dette 2000 du FOREC.

La CADES, créée en 1996, a permis de rendre autonome la sécurité sociale, et avait pour fonction initiale de rembourser, grâce à la CRDS, les déficits sociaux de 1993 à 1996. Alors qu'elle devait prendre fin en 2009, sa durée de de vie a été prolongée, en 1998, jusqu'en 2014, et elle s'est trouvée chargée d'une dette de 1,097 milliard d'euros. J'avais d'ailleurs émis à l'époque l'espoir qu'elle ne serait pas régulièrement prolongée de trois ans tous les ans. Il serait en effet tentant, mais irresponsable d'augmenter la CRDS et de prolonger à ce point sa durée de vie. Nous ne devons pas faire payer aux générations futures notre inconséquence. Il est urgent de mener une politique de maîtrise des dépenses, tout en assurant un financement pérenne.

L'article 2 tend à faire prendre en charge par la CADES une dette de l'Etat de 1 100 millions d'euros. Si la CADES peut l'assumer aujourd'hui, vous dégradez ses résultats et vous recourez à un procédé bien peu orthodoxe, qui fait sortir la CADES de son rôle, puisqu'il s'agit d'une dette de l'Etat envers l'assurance maladie.

M. Claude Evin - M. Préel a tout dit et je pense qu'il votera la suppression de cet article...

Le Gouvernement prétend clarifier les responsabilités entre l'Etat et la sécurité sociale. Outre que cette clarification devrait porter sur différents autres points, vous nous proposez de poursuivre le remboursement de la dette FOREC, qui est une dette de l'Etat, par la CADES, qui n'a pas été créée pour cela mais pour financer la dette de la sécurité sociale. Loin de clarifier, vous fragilisez le financement de la sécurité sociale, déjà précaire, compte tenu du montant du déficit.

M. Préel craignait une éventuelle prolongation de la durée de vie de la CRDS. Mais M. Lambert disait il y a peu qu'il faudrait y recourir.

Dans ces conditions, nous proposons, par l'amendement 223, de supprimer cet article.

M. Maxime Gremetz - Nous avons demandé la suppression du FOREC, je le rappelle, car il s'inscrivait dans une politique d'exonération des cotisations patronales.

En outre, ce fonds était alimenté par des taxes qui privaient la sécurité sociale de recettes.

Vous proposez de faire supporter la créance du FOREC par la CADES, dont la ressource essentielle est la CRDS. Quelle simplicité !

Vous proposez en fait de faire payer l'exonération des cotisations patronales aux ménages, c'est-à-dire, en grande partie, aux salariés.

Déjà, l'an passé, la CADES a remboursé la moitié de la dette du FOREC au régime général.

Or, la loi de 1994 impose que tous les allégements de charges des régimes de sécurité sociale soient compensés par l'Etat. Tel est le principe strict du partage des compétences entre l'Etat et la sécurité sociale, que vous transgressez une fois de plus.

La CADES a été instituée pour financer le « trou » de la sécurité sociale. Vous dénaturez sa mission pour éponger les cadeaux faits au patronat, qui a ainsi empoché 21 milliards au titre des exonérations, lesquelles creusent le déficit de la sécurité sociale sans contrepartie en termes de recettes liées aux créations d'emplois.

Les fonds de la CADES doivent aller à la protection sociale. Qui pourrait nier que les hôpitaux aient besoin de moyens supplémentaires ?

De plus, si la CADES est excédentaire, pourquoi maintenir l'inique CRDS ?

Nous proposons donc, par l'amendement 133, la suppression de cet article.

M. François Goulard, rapporteur pour avis de la commission des finances - Avis défavorable sur les deux amendements de suppression.

Il est relativement plaisant d'entendre M. Evin faire un procès au Gouvernement pour absence de rigueur financière.

Je rappelle que la dette du FOREC remonte à l'exercice 2000 et que le PLF pour 2002 proposait purement et simplement d'abandonner la créance. Bel exemple de rigueur financière !

Le juge constitutionnel ayant censuré l'article que vous aviez adopté, le ministre des affaires sociales n'en a pas moins donné instruction aux agents comptables des caisses de sécurité sociale concernées de provisionner cet abandon de créance pour constater que l'Etat, impécunieux, était incapable de rembourser.

Ce gouvernement propose cette année, comme l'an dernier, une solution pour que les comptes du FOREC soient soldés. Sachant que la CADES peut être excédentaire, cette question est enfin réglée.

M. le Président - Je suis saisi par le groupe communiste et républicain d'une demande de scrutin public sur l'amendement 133, qui vaudra également pour l'amendement 223.

M. le Ministre - J'ajoute à ce qu'a dit M. Goulard qu'après ces désillusions, le gouvernement précédent a décidé dans le PLF pour 2002 de doubler le remboursement de la CADES à l'Etat en le faisant passer de 1,5 à 3 milliards.

L'Etat peut donc demander à la CADES davantage que ce qui est prévu. Pourquoi faire compliqué quand on peut faire simple ? L'Etat aurait pu demander à la CADES de lui rembourser la somme nécessaire pour qu'il puisse rembourser la sécurité sociale, mais le mécanisme aurait été particulièrement complexe. Il est bien plus simple que la CADES rembourse la sécurité sociale pour le compte de l'Etat.

M. Pierre Morange, rapporteur - Avis défavorables sur les deux amendements de suppression.

Concernant la CADES, je rappelle que l'échéance a été repoussée en 2014.

La perméabilité, pour ce qui concerne les dettes, entre les comptes sociaux et le budget de l'Etat, était jadis un fait.

Le président de la CADES a certifié le caractère parfaitement sain de cette structure. Un excédent d'environ 10 milliards est envisagé pour 2014.

Je précise que le comité des finances sociales est composé, outre de son président nommé en conseil des ministres, « notamment de représentants des assemblées parlementaires et des organisations professionnelles ». Rien n'est précisé quant à la représentativité parlementaire.

M. Maxime Gremetz - Il n'y a pas de chiffre.

M. Pierre Morange, rapporteur - M. le ministre de la fonction publique a évoqué un nombre de quatre parlementaires. Vous pouvez vous reporter au compte rendu de séance.

A la majorité de 44 voix contre 13 sur 57 votants et 57 suffrages exprimés, les amendements 133 et 223 ne sont pas adoptés.

L'article 2, mis aux voix, est adopté.

ART. 3

M. Jean-Luc Préel - L'article 3 concerne la suppression du FOREC. Je rappelle que ce fonds a été créé par le PLF de 2000 pour prendre en charge les compensations d'exonérations de cotisations liées à la réduction du temps de travail.

Nous avions alors dénoncé sa création. La suppression répond donc à nos v_ux, mais nous devrons vérifier que l'Etat honorera les engagements pris de compenser intégralement les exonérations qu'il décidera. Dans le passé, il est en effet arrivé à l'Etat d'être léger et d'ignorer avec superbe ses engagements.

Des exonérations demeurent d'ailleurs, antérieures à 1994, à hauteur de 11 %, que l'Etat n'a jamais compensées. S'il l'avait fait, le déficit aurait été allégé.

L'UDF souhaite par ailleurs que la totalité des taxes prélevées sur l'alcool et le tabac soient affectées à l'assurance maladie pour financer la prévention et les soins des victimes de ces fléaux. Pour le moment, il n'en est rien. Pour le tabac, 27 % des droits de consommation restent affectés au budget de l'Etat, 50 % au BAPSA, seuls 22 % sont affectés à la CNAM. Il serait souhaitable que les 27 % affectés au budget de l'Etat abondent les recettes de la protection sociale.

La compensation des exonérations de cotisations d'avant 1994 et l'affectation de la totalité des taxes sur l'alcool et le tabac résoudraient pour l'essentiel le problème de la protection sociale pour cette année.

M. Claude Evin - Nous souhaitons tous la transparence. Le comité des finances sociales peut y contribuer. Mais un autre mécanisme peut garantir que les fonds utilisés sont en effet renvoyés aux organismes pour lesquels ils ont été prévus. Le FOREC permettait d'isoler les exonérations de charges et de veiller à ce que l'Etat respecte ses engagements. Il faut d'ailleurs rappeler qu'il rassemble l'ensemble des exonérations, qu'il s'agisse de la réduction du temps de travail ou des ristournes Juppé de 1996 ! En supprimant le FOREC, on se prive de toute garantie sur le respect de ses engagements par l'Etat. C'est pourquoi l'amendement 224 tend à supprimer l'article 3.

M. Maxime Gremetz - Nous demandons un scrutin public sur cet amendement.

M. le Président - Sur l'amendement 224, je suis saisi par le groupe communiste et républicain d'une demande de scrutin public.

M. Maxime Gremetz - L'an dernier, nous avions déposé un amendement de suppression du FOREC, qui avait été déclaré irrecevable. Il ne s'agissait bien sûr pas de remettre en cause, comme vous le faites, la réduction du temps de travail, à laquelle nous sommes très attachés, mais plutôt les exonérations de charges et augmentations d'impôts qui frappent injustement les assurés sociaux. Nous nous étions opposés à la création du FOREC car il était destiné à abriter les circuits de compensation d'exonérations dont l'efficacité en termes d'emplois est plus que limitée. Cette politique de diminution du coût du travail instaure des trappes à bas salaires et creuse le déficit de la sécurité sociale pour toujours mieux la remettre en cause. Les recettes qui viennent compenser ces cadeaux au patronat - taxes sur l'alcool et le tabac notamment - reposent encore sur les assurés. Le fonds détourne donc ces impôts, en les affectant à d'autres fins que la prévention et les soins.

Nous ne pouvions donc accueillir que favorablement la suppression du FOREC, mais vous ne faites en réalité que réintégrer ses dépenses dans le budget général et réaffecter les taxes qui le finançaient ! L'instrument disparaît, mais la logique demeure. Ces exonérations atteindront 20 milliards d'ici deux ans, mais leur effet sur l'emploi demeure aléatoire.

Vous voulez imputer à la réduction du temps de travail, et donc au FOREC, tous les maux de notre société. Vous espérez masquer ainsi les effets dramatiques de votre politique sur les salariés, les chômeurs et les personnes en situation précaire. La récession, le déficit budgétaire, la canicule et l'augmentation du chômage seraient donc tous des effets des 35 heures ! En revanche, personne ne s'interroge sur les restrictions budgétaires, les exonérations fiscales en tout genre et l'attitude du patronat... D'ailleurs, une récente étude montre que la réduction du temps de travail s'est soldée par la limitation, voire la baisse des salaires.

M. Yves Bur - Nous n'avons cessé de le dire !

M. Maxime Gremetz - Nous aussi, vous le savez bien ! Il est donc nécessaire de faire la lumière sur l'utilisation des fonds publics et les dispositifs d'exonérations des entreprises, afin d'en évaluer le montant et l'efficacité en toute transparence. Cette démarche est d'autant plus nécessaire que les montants concernés avoisinent les 45 milliards chaque année !

M. le Président - Monsieur Gremetz, veuillez conclure...

M. Maxime Gremetz - Nous soutenons donc la suppression de cet article, bien que pour des raisons différentes.

M. Yves Bur - Le FOREC a été introduit dans notre système de financement pour masquer l'incapacité du gouvernement de l'époque à financer la réduction du temps de travail. Il avait engendré une complexité dénoncée par l'ensemble des partenaires sociaux, ce qui vous a valu des votes négatifs dans tous les organismes sociaux. M. Evin soutient qu'il permettait de contrôler l'Etat, mais cela n'a pas empêché ce dernier de laisser un montant de 3,5 milliards à la charge de la sécurité sociale ! Le FOREC n'était donc pas l'outil de transparence que vous prétendez. M. Fillon s'est engagé, lors des discussions sur les emplois jeunes en entreprise et le réalignement des SMIC, à compenser intégralement les exonérations qu'il décidait. Le comité des finances sociales que nous venons de créer contribuera à garantir cette transparence et nous nous en réjouissons.

M. François Goulard, rapporteur pour avis - Il est parfaitement normal que les exonérations de cotisations sociales soient imputées sur le budget de l'Etat et non sur la loi de financement de la sécurité sociale, puisqu'elles résultent de la politique décidée par le Gouvernement. Je passe sur les recettes de tout poil, les fonds de tiroir qui ont été raclés pour alimenter le FOREC. Il demeure que celui-ci finance à hauteur de 7 milliards les ristournes Juppé, ces allègements de cotisations sociales génératrices d'emplois et bien antérieures à la réduction du temps de travail. Il s'agit d'ailleurs là de véritables allègements, contrairement aux vôtres, qui ne font que compenser partiellement la hausse du coût du travail due aux 35 heures !

La réduction du temps de travail a pesé sur la hausse des dépenses publiques, par l'augmentation des effectifs des trois fonctions publiques. Par ailleurs, il devenait indispensable d'aligner par le haut les cinq, puis six, puis sept SMIC qui devaient coexister, et le Gouvernement a dû compenser le surcoût qui en résultait pour les entreprises. Toutes ces sommes s'ajoutent aux montants qui avaient été initialement prévus, et lorsque nous disons que la réduction du temps de travail coûte 15 milliards, il ne faut pas confondre avec les 15 milliards du FOREC, qui incluent les ristournes Juppé ! En 2006, le coût strict de la réduction du temps de travail dépassera les 17 milliards...

Plusieurs députés UMP - Merci de le rappeler !

M. Gaétan Gorce - M. Goulard nous inflige de nouveau cette démonstration totalement illusoire, mais il ajoute les dépenses en oubliant toujours les recettes ! Il ne prend en compte ni les emplois créés, ni les cotisations qui en résultent, ni les économies réalisées sur l'Unedic... La commission d'enquête nous donnera tous les éléments utiles. Vous ne pourrez en tout cas pas nous resservir cet argument l'an prochain, car les exonérations qui auront cours n'auront plus grand chose à voir avec la réduction du temps de travail : les allègements Fillon modifient en effet à la fois le profilage des exonérations et leur conditionnement à une réduction du temps de travail... Assumez les conséquences de votre politique comme nous assumons les 35 heures et ne nous refaites pas le coup de l'héritage en permanence ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

M. Maxime Gremetz - Je regrette que M. Goulard engage un débat alors que nous avons décidé de créer une mission d'information qui va nous permettre d'examiner, sans polémique, les résultats concrets des lois de réduction du temps de travail.

Ce qui est incontestable, c'est que les exonérations de cotisations patronales sont toujours plus importantes. Arrêtez ! M. Seillière a dû reconnaître qu'il n'avait jamais vu tant de gentillesses de votre part ! De fait, il suffira de faire le compte des primes, des exonérations, au titre de contrats en tous genres... Mais cette politique n'a pas d'avenir. La RTT, elle, en a un. Comme l'a déclaré M. de Robien, elle correspond à un mouvement historique.

M. François Goulard, rapporteur pour avis - M. de Robien ne connaît donc pas l'histoire économique !

M. Maxime Gremetz - Vous êtes des rétrogrades ! Vivez donc avec votre temps !

M. Pierre Morange, rapporteur - La commission des affaires culturelles a émis un avis défavorable. La suppression du FOREC, qui répond à un souci de clarté et de transparence, est conforme aux dispositions de la loi de juillet 1994, qui mettent à la charge de l'Etat le financement des exonérations de cotisations patronales. Le retard dans la mise en place du FOREC, les tuyauteries qui lui ont été ajoutées, ont renforcé le caractère aléatoire et inadapté de ce fonds.

A la majorité de 41 voix contre 12 sur 53 votants et 53 suffrages exprimés, l'amendement 224 n'est pas adopté.

M. Pierre Morange, rapporteur - Par l'amendement 22, nous proposons de donner une base légale aux opérations de liquidation des droits et obligations du FOREC. Ces opérations seraient confiées au directeur du FSV, le service de liquidation devant prendre fin au plus tard le 30 juin 2004.

L'amendement 22, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. Pierre Morange, rapporteur - L'amendement 23 tend à toiletter le code de la sécurité sociale.

L'amendement 23, accepté par le Gouvernement, est adopté.

L'article 3 modifié, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L'ART. 3

M. Yves Bur - Par l'amendement 253 rectifié, MM. Fourgous et Dassault demandent que le Gouvernement dépose chaque année un rapport dans lequel les dépenses et les recettes sont présentées par fonction et par région dans un tableau financier annexé.

M. Pierre Morange, rapporteur - Rejet. Le nouveau comité des finances sociales satisfera à cette demande.

M. le Ministre - Avis défavorable.

L'amendement 253 rectifié, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Claude Evin - Par l'amendement 173, M. Le Guen et les membres du groupe socialiste demandent au Gouvernement de remettre au Parlement un rapport annuel sur l'affectation des droits sur l'alcool et le tabac au financement de l'assurance maladie.

M. Maxime Gremetz - Qui a demandé cela ?

M. Pierre Morange, rapporteur - Avis favorable. C'est le Gouvernement qui a affecté la hausse des taxes sur le tabac au budget de l'assurance maladie. Reste que la multiplication des rapports pourrait compliquer le travail parlementaire.

M. le Ministre - Depuis le début de la discussion, nous en sommes à plus de dix amendements destinés à obtenir des rapports du Gouvernement. Je n'en fais pas une affaire politique. Mais quel est l'intérêt de tels rapports, alors que ce dont il s'agit est connu de tous ? Je m'en remets à la sagesse de l'Assemblée, mais je ne suis pas sûr qu'il soit digne d'elle de commander des rapports dont quatre sur cinq ne sont jamais rédigés.

Mme Catherine Génisson - Notre amendement est destiné à obtenir du Gouvernement l'engagement que le produit des taxes sur le tabac et l'alcool est destiné au financement de la sécurité sociale. S'il nous répond positivement, nous pourrons le retirer.

M. le Ministre - Je vous remercie de faire ainsi état de vos préoccupations. Le Gouvernement est engagé dans une redéfinition de clés qui accroît la part des produits des taxes sur le tabac et l'alcool dans le financement de l'assurance maladie. Ces clés sont connues, et je peux vous les communiquer chaque fois qu'elles sont arrêtées.

L'amendement 173 est retiré.

ART. 4

M. Jean-Luc Préel - L'article 4 porte sur le majoration du droit de consommation sur les tabacs. Le tabac représente un réel problème de santé publique. Il est responsable de 60 000 morts aujourd'hui, peut-être demain du double en raison de l'augmentation de la consommation, en particulier chez les femmes jeunes. Les politiques doivent tout faire pour renverser cette tendance. Répétons-le, il est vital de réduire la consommation de tabac. Suivant en cela ses prédécesseurs, mais de façon beaucoup plus vigoureuse, le Gouvernement s'est engagé dans une hausse de la taxe sur le tabac, en espérant à la fois des rentrées fiscales supplémentaires et une réduction de la consommation.

Ces augmentations successives mettent en cause la survie des buralistes, qui tiennent des commerces de proximité. Elles conduisent aussi à développer la contrebande, qu'il faut combattre, et le commerce transfrontalier. De plus, la hausse de la taxe risque de ne pas produire l'effet escompté. En 2003, sur 1 milliard de recettes attendu, 220 millions ont été enregistrés, sur lesquels 160 millions iront à l'aide aux buralistes. Qu'en sera-t-il des 800 millions attendus de la nouvelle hausse en 2004 ? En Suède, l'augmentation des taxes a abouti à une diminution de leur produit. Il serait sage de ne plus charger la barque, et de tout faire pour obtenir rapidement une harmonisation des taxes et des prix européens. L'UDF y est très favorable.

Surtout, la lutte contre le tabagisme ne peut pas se réduire à une augmentation des taxes et des prix. Elle passe d'abord par un travail de prévention et d'éducation à la santé.

Il conviendrait aussi d'appliquer avec rigueur et persévérance une loi au nom célèbre.

M. Jean-Claude Lefort - La hausse de la fiscalité sur le tabac est à vos yeux l'arme essentielle de lutte contre le tabagisme. Le tabac cause en effet chaque année le décès de plus de 60 000 personnes, soit 12 % des décès enregistrés. Face à ce problème de santé publique, les politiques sanitaires successives se sont révélées insuffisantes. La hausse du prix du tabac influe, selon vous, de façon certaine sur la consommation. On l'a en effet constaté dans le passé, mais de façon très marginale. Le baromètre santé 2000 précise que le prix du paquet de cigarettes ne représente que 10 % des motivations pour arrêter de fumer. De plus, l'effet de la hausse sur la consommation est difficile à mesurer car la baisse des ventes chez les buralistes en France ne traduit pas de manière mécanique une baisse de la consommation. Des études montrent que, tandis que les dernières hausses faisaient baisser les ventes de 9 %, la consommation ne diminuait que de 1 %.

M. Yves Bur - C'est ce que dit le lobby des cigarettiers !

M. Jean-Claude Lefort - Ne parlez pas de lobby dans cette assemblée ! En parallèle, la contrebande s'est développée. Le fondateur de la société française de tabacologie souligne que cette hausse ne dissuadera pas les fumeurs dépendants, et qu'elle peut même avoir des effets pervers : « En 1993, lorsque le Gouvernement Balladur a augmenté le prix de 13,5 %, le poids moyen des mégots diminuait. Les gens fumaient plus profondément les cigarettes aggravant la toxicité ».

Une politique ambitieuse de soutien au sevrage tabagique est nécessaire ; or la prise en charge de l'arrêt du tabac n'est encore que marginale en France, dans la médecine de ville comme à l'hôpital et les consultations de tabacologie sont bien trop nombreuses.

Dans ces conditions, comment s'étonner d'entendre le professeur Thierry Philip, président de la Fédération nationale des centres de lutte contre le cancer, exposer que la France a le plus mauvais système de prévention du tabagisme ?

M. le Ministre - Il a raison.

M. Jean-Claude Lefort - Et pourtant, même en tenant compte des consultations dont vous annoncez l'ouverture, il n'y en aura toujours que 250 sur tout le territoire ! Et puis, comment ne pas évoquer le coût du traitement ? Une semaine de substituts nicotiniques revient à 24 € ! Enfin, l'évaluation de la politique que vous menez en cette matière devrait faire l'objet d'un rapport au Parlement. Les délais seront-ils tenus ? Qui procédera à l'évaluation ?

M. Charles de Courson - Tous les gens de bon sens approuvent l'objectif de lutter contre le tabagisme, et le groupe UDF avec eux. Seulement, une hausse de 56 % en six mois du prix du tabac est-elle l'outil adapté pour y parvenir ? Nous considérons que toute hausse excessive est inefficace et même contre productive. En premier lieu, ces hausses permettront-elles de faire chuter la consommation ?

M. le Ministre - Oui !

M. Charles de Courson - Apparemment, oui, car la consommation légale est en baisse. Le problème, c'est que le prix des cigarettes ne bouge pas chez nos voisins, et qu'il est sensiblement moins élevé en Suisse, en Italie, en Belgique mais surtout au Luxembourg, en Espagne et en Andorre. Il se passe donc ce dont on a vu un exemple hier, des importations massives, qui ne sont même pas toutes illégales, car il est parfaitement licite d'aller tous les jours en Espagne si on le souhaite, et de rapporter, à chaque fois, de nombreuses cartouches de cigarettes ! De ce fait, la situation en France sera, sous peu, ce qu'elle est en Grande-Bretagne, où les importations sauvages représentent 25 % du marché.

Il serait bon, aussi, de s'intéresser à ce qui s'est passé en Suède après qu'en 1997 le prix du tabac a été augmenté de 57 % en six mois. La consommation apparente a chuté de 28 % mais des importations massives ont eu lieu depuis le Danemark et les pays baltes, et les recettes fiscales ont chuté de 7 à 8 %. Dès l'année suivante, le gouvernement suédois a fait machine arrière.

En bref, on ne peut mener une lutte contre le tabagisme par une politique de prix dans un espace où les droits d'accise ne sont pas harmonisés. A quoi va-t-on assister ? A l'explosion de la consommation clandestine, d'autant que les gangsters ne risquent que des amendes fort douces, et jamais la prison. Pourquoi se priveraient-ils de faire voyager des containers pleins de cigarettes dont un seul rapporte un bénéfice évalué à un million ? Pendant ce temps, les buralistes ont été déstabilisés, particulièrement dans les régions frontalières, et aucun plan ne permettra de compenser les pertes qu'ils subissent déjà et qui vont s'aggraver. Il ne faut pas poursuivre cette politique, mais lui préférer la seule politique intelligente, celle qui consiste à définir une politique européenne coordonnée. C'est pourquoi le groupe UDF est défavorable à l'article.

Mme Catherine Génisson - Le problème de l'efficacité de la hausse massive du prix du tabac est réel, mais je ne m'y attarderai pas. Monsieur le ministre, je vous pose à nouveau la question que je vous ai posée lors de l'examen du projet de loi de finances : comptez-vous prendre des mesures réellement dissuasives pour interdire la vente de tabac qui a lieu par le truchement d'Internet, à des conditions tarifaires bien plus avantageuses que chez les buralistes ?

M. Yves Bur - Nous devons faire preuve de cohérence dans la lutte contre le tabagisme, ce fléau qui tue chaque année, dans la plus parfaite indifférence, 60 000 personnes, après de terribles souffrances. C'est quatre fois plus de morts que la canicule n'en a causées ! Il faut donc augmenter les prix de manière très dissuasive et éviter les déports de consommation par une taxation adaptée, ce qui est l'objet de l'article 4.

On peut, certes, citer des chiffres comme l'a fait Charles de Courson, mais notre collègue a omis de dire qu'il les tenait de la British American Tobacco ! Ce faisant, il participe de la désinformation permanente à laquelle se livrent les cigarettiers, ces marchands de mort (Protestations sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains).

M. Maxime Gremetz - Il veut les supprimer ! Incroyable !

M. Yves Bur - Affirmer que la baisse de la consommation est illusoire, c'est se faire l'écho des mensonges des cigarettiers, mensonges mis en évidence par l'augmentation de 40 % des ventes de substituts nicotiniques. Bien sûr, on peut s'interroger sur le prix de ces produits mais tout gros fumeur qui dépassera 200 € dans l'année pour se sevrer au lieu des 1 500 € que lui auraient coûté ses cigarettes sera gagnant sur tous les tableaux : sur le plan sanitaire bien sûr, mais aussi parce qu'il fera une économie très significative.

Certes, cette politique ne suffit pas, et elle doit s'insérer dans une politique globale de santé publique, qui suppose en particulier l'interdiction complète du tabac dans les établissements d'enseignement. Il convient, aussi, de suivre attentivement l'évolution de la situation des buralistes, particulièrement dans les régions frontalières.

M. Maxime Gremetz - C'est grave, de dire aux cigarettiers et aux buralistes qu'ils sont des marchands de mort ! (Protestations sur les bancs du groupe UMP)

M. Yves Bur - Je n'ai pas parlé des buralistes.

M. Maxime Gremetz - Ne soyez pas hypocrite ! Vous savez que cela n'a rien à voir avec la santé ! Voyez donc cet article du Figaro-Eco (L'orateur le montre) : la France est le pays où le prix des cigarettes est le plus élevé. Quant aux taxes, qui ne rentrent pas dans les caisses de la sécurité sociale ni dans celles des buralistes, elles se montent à 82 % : le record d'Europe !

M. François Goulard, rapporteur pour avis - Non, c'est la Grande-Bretagne qui le détient.

M. Maxime Gremetz - Vous êtes un grand professeur, de je ne sais quoi d'ailleurs, et vous aimez donner des leçons, mais je me fie à ces données incontestables plutôt qu'à vous.

Qu'est-ce que ce pays où l'on vous empêche de fumer, mais non de travailler et d'être contaminé par l'amiante, comme je l'ai été ? Quant à boire, si c'est déjà interdit, ce ne l'est pas pour ceux qui ont un chauffeur ! J'ai l'habitude de dire aux buralistes que cette politique n'est qu'une fumisterie : on invoque la santé publique, mais c'est de fric qu'il s'agit. S'il en était autrement, on ne lésinerait pas comme on le fait sur la prévention, on ne refuserait pas de rembourser les patches aux jeunes qui veulent se libérer du tabac.

M. le Président - Deux amendements de suppression de l'article ont été présentés : le 15 de M. Luca et le 322 de MM. de Courson et Santini.

M. Pierre Morange, rapporteur - Avis défavorable. L'article 4 ne vise pas à augmenter le prix des cigarettes, mais seulement à harmoniser les prix des différents produits du tabac. Quant au relèvement des minima de perception, leur objet est d'éviter des phénomènes de transfert.

Ces dispositions entrent dans une politique de santé publique en direction des jeunes. En raison de leur pouvoir d'achat limité, ces derniers sont particulièrement sensibles au prix. En tout état de cause, si nous livrons une guerre, c'est au tabac, et non aux débitants. Il nous appartiendra d'évaluer dans quelques mois les effets de cette majoration marquée sur la consommation et d'apprécier les résultats au regard de la priorité donnée par le Président de la République à la lutte contre le cancer.

M. le Ministre - Madame Génisson, la vente du tabac par internet est déjà illégale. Une équipe des Douanes surveille ce trafic et son effectif croît à mesure que le phénomène se développe.

Il est prévu de mettre des substituts nicotiniques à disposition dans les infirmeries scolaires et le remboursement de ces produits va être expérimenté dans deux régions afin d'en évaluer l'intérêt. Je serais personnellement porté à croire que la mesure vaut la peine d'être prise.

Monsieur de Courson, je ne conteste pas vos compétences en matière de budget et de finances, mais je ne vous reconnais pas de qualification particulière à parler de cancer ou de santé publique. Nous avons d'ailleurs reçu au ministère les mêmes statistiques que vous, envoyées par deux ou trois producteurs de tabac. Celles que vous avez citées portent la marque de British Tobacco, mais d'autres sont moins honnêtes : seul le courrier d'accompagnement mentionne leur origine ! Toutes n'affichent que ce qu'on a envie d'afficher...

Selon M. Gremetz, les taxes seraient moins élevées en Grande-Bretagne qu'en France. Pourtant, les cigarettes y sont plus chères, en raison d'un accord entre Etat et cartels. On sait que le prix comprend la rémunération et la marge du producteur, la marge des buralistes - de l'ordre de 8 % - et les taxes - 75 ou 76 %. En Grande-Bretagne, le prix est conçu différemment. Mais laissons cette question, qui n'est pas essentielle.

Si l'OMS a travaillé pendant plusieurs années à une convention internationale de lutte contre le tabagisme, elle ne l'a pas fait en songeant à la contrebande. A celle-ci, on répond en faisant agir la douane, non en renonçant à toute politique de santé publique. L'OMS a cette vertu de s'affranchir aussi des contraintes budgétaires : elle juge exclusivement sur des considérations sanitaires. Savez-vous que neuf fumeurs adultes sur dix ont commencé à fumer avant 18 ans, que la moitié mourront du tabac et qu'un quart mourront prématurément du cancer - de la langue, du poumon, de la gorge, de la vessie, etc. ?

Vous avez aujourd'hui une lourde responsabilité à assumer et peu m'importerait que les motifs invoqués pour ne pas voter ces dispositions soient vrais ! Il ne s'agit pas, bien entendu, de faire la guerre aux buralistes : nous avons avec eux des accords et nous allons de plus élargir leurs charges de service public. Ce ne sont certes pas des vendeurs de mort, mais ils vendent des paquets sur lesquels il est écrit : « Fumer tue ». De fait, le tabagisme est cause de morts, d'invalidités et de bronchites chroniques et une augmentation brutale et importante des prix est le meilleur moyen de diminuer la consommation.

Vous donnez la Suède en exemple, Monsieur de Courson, mais n'est-il pas étrange que, dans le temps où la consommation diminue de 8 %, les ventes de patches augmentent de 40 % ? Dans les centres de tabacologie, les files d'attente sont de trois mois ! C'est d'ailleurs pourquoi nous allons en créer de nouveaux et renforcer notre action dans les lycées et collèges.

C'est donc bien une guerre au tabac que nous déclarons ici. Nous n'aurions pas ces 800 millions mais pas de fumeurs non plus que nous nous en porterions beaucoup mieux ! Ne nous accusez donc pas d'augmenter le prix du tabac pour avoir de l'argent : la raison de notre décision, c'est que le tabac est le premier facteur cancérigène et elle devrait suffire à vous convaincre de voter cet article (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Charles de Courson - Je n'ai jamais touché à une cigarette de ma vie mais, pour les avoir constatés dans ma famille, je suis parfaitement conscient des effets désastreux du tabac. Je prétends seulement que votre politique de prix, excessive, ira à l'encontre du but recherché. Les Suédois, qui sont aussi sensés que nous, l'ont expérimentée : ils ont essayé la même politique en 1997 et y ont renoncé dès l'année suivante. Ils ont compris que le seul remède se trouvait dans une politique européenne coordonnée : sans celle-ci, la hausse des prix va se changer en une baisse des prix, en raison de l'importation massive de tabacs étrangers, moins chers...

M. Yves Bur - Nous pouvons en effet envisager une politique européenne de convergence, mais cet alignement des prix de vente supposerait d'ouvrir le dossier, infiniment plus délicat encore, de la taxation des alcools.

Les amendements 15 et 322, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. Charles de Courson - L'amendement 309 est défendu.

M. Pierre Morange, rapporteur - Avis défavorable. Le taux de la fiscalité sur les cigares aura baissé de 33 % entre 2000 et 2004. L'article ne vise qu'à une normalisation en portant ce taux à 25 %.

M. le Ministre - Même avis.

M. Maxime Gremetz - Monsieur le Ministre, s'il est vrai que la seule façon de combattre le tabagisme est de relever les prix, je suis prêt à déposer un amendement pour les augmenter de 1 000 % !

L'amendement 309, mis aux voix, n'est pas adopté.

L'article 4, mis aux voix, est adopté.

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance qui aura lieu ce matin, jeudi 30 octobre, à 9 heures 30.

La séance est levée à 1 heure 15.

                      Le Directeur du service
                      des comptes rendus analytiques,

                      François GEORGE

ORDRE DU JOUR
DU JEUDI 30 OCTOBRE 2003

A NEUF HEURES TRENTE : 1ère SÉANCE PUBLIQUE

Suite de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2004 (n° 1106).

MM. Pierre MORANGE, Bruno GILLES, Claude GAILLARD et Mme Paulette GUINCHARD-KUNSTLER, rapporteurs au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales. (Tomes I à V du rapport n° 1157)

M. François GOULARD, rapporteur pour avis au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du plan. (Avis n° 1156)

A QUINZE HEURES : 2ème SÉANCE PUBLIQUE

Suite de l'ordre du jour de la première séance.

A VINGT ET UNE HEURES TRENTE : 3ème SÉANCE PUBLIQUE

Suite de l'ordre du jour de la première séance.

Le Compte rendu analytique
est disponible sur Internet
en moyenne trois heures après la fin de séance.

Préalablement,
est consultable une version incomplète,
actualisée au fur et à mesure du déroulement de la séance.

    www.assemblee-nationale.fr


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