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Assemblée nationale

COMPTE RENDU
ANALYTIQUE OFFICIEL

Session ordinaire de 2003-2004 - 61ème jour de séance, 155ème séance

1ère SÉANCE DU MARDI 10 FÉVRIER 2004

PRÉSIDENCE de M. François BAROIN

vice-président

Sommaire

            PERSPECTIVES DE L'INTÉGRATION
            ET DE L'ÉGALITÉ DES CHANCES 2

            FIXATION DE L'ORDRE DU JOUR 25

            A N N E X E ORDRE DU JOUR 25

La séance est ouverte à neuf heures trente.

PERSPECTIVES DE L'INTÉGRATION ET DE L'ÉGALITÉ DES CHANCES

L'ordre du jour appelle le débat sur les perspectives de l'intégration et de l'égalité des chances.

M. le Président - L'organisation de ce débat ayant été demandée par le groupe UMP, la parole est au premier orateur de ce groupe.

M. Philippe Douste-Blazy - Notre assemblée se prononcera cet après-midi sur le principe de laïcité. Ce faisant, elle refusera la voie du communautarisme. Chacun devra désormais abandonner, aux portes de l'école publique, les signes de son appartenance particulière.

C'est un message fort, mais qui ne serait qu'un faux-fuyant symbolique si nous refusions d'aborder les causes réelles de ce repli identitaire. C'est une question grave, que celle de l'égalité, car elle est au c_ur de l'identité républicaine.

« La passion de l'égalité », disait Tocqueville, « est le fondement même du régime démocratique, la source de ses institutions, de son fonctionnement, ce qui la distingue radicalement de tous les autres régimes ». Nous avons choisi de hisser l'égalité au plus haut de nos valeurs communes. Elle fonde notre attachement à la nation, et nous rassemble, par-delà nos différences, dans un sentiment partagé d'unité et de fierté nationales.

Cette égalité, il n'a pas suffi de la proclamer, au lendemain de 1789 pour la réaliser dans les faits, et nous voyons, à mesure que les inégalités grandissent, le tissu social se déchirer, le pacte républicain se fissurer. Peu à peu, les communautés se figent, la mobilité se fait plus rare, ralentie, sclérosée par les rigidités sociales, géographiques, ethniques, et les Français issus de l'immigration en sont les premières victimes.

Les minorités visibles, notamment noires ou maghrébines, connaissent un taux de chômage beaucoup plus important que la moyenne nationale. A diplôme équivalent, les Français fils d'Algériens sont quatre fois plus victimes du chômage que leurs concitoyens nés de parents français. Ils se heurtent, de surcroît, au « plafond de verre » qui les empêche d'accéder aux postes à responsabilité. Notre République, peut-être fatiguée d'avoir à combattre ces discriminations, les a ignorés, voire cachés, et nous assistons à la naissance de véritables ghettos.

Nous devons reconnaître l'échec de nos politiques publiques, et inverser notre action. C'est même toute notre perception de l'égalité des chances qui est à revoir. L'idée que la libre expression des valeurs de chacun serait spontanée est fausse. Les obstacles sont d'ordre systémique, et seule une politique d'envergure nous permettra de relever ce défi.

Je veux parler de l'action positive, qui repose sur une idée simple. Nous avons trop longtemps privilégié l'attachement aux grands principes au détriment du résultat concret. Le moment est venu de placer l'exigence de résultat au premier plan de nos préoccupations, que ce soit en matière d'éducation, d'emploi ou de logement.

A l'école, le mythe de la méritocratie formelle a vécu. Nous ne pouvons plus continuer de croire à l'égalité effective de tous devant le concours, l'examen. Il faut redoubler d'efforts à l'égard des élèves les plus défavorisés, les informer sur les parcours, les encourager, leur donner les moyens matériels de passer un concours ou de suivre une filière professionnelle valorisante. A cette fin, renforçons les dotations des lycées en ZEP, mettons en place des modules et des classes préparatoires aux grandes écoles.

Ces démarches positives existaient déjà au temps où les « hussards noirs de la République », immortalisés par Péguy, travaillaient pour que chacun progresse selon son mérite. Les instituteurs ne se sont pas contentés de dispenser leurs leçons, ils ont donné un sens concret à l'idée de citoyenneté et de civisme. C'est en suivant leurs traces que nous construirons la République de demain.

Dans l'entreprise, nous devons combattre les discriminations avec la même fermeté que nous combattons les incivilités ou la délinquance, avec une exigence de résultat. La création d'une autorité de lutte contre les discriminations n'y suffira pas. Il faudra, en outre, inverser la charge de la preuve au bénéfice des victimes.

Face au racisme ordinaire, exigeons la transparence des procédures de recrutement, de promotion, de rémunération, d'accès à la formation ! Incitons les entreprises à adopter une « charte de la diversité » où elles récapituleraient leurs actions, faisant ainsi la preuve du traitement équitable accordé au mérite de chacun.

M. Eric Raoult - Très bien !

M. Philippe Douste-Blazy - Ces actions positives existent déjà à l'étranger. Au Canada, une loi a été adoptée en 1986 pour résoudre le problème de l'inégalité des minorités sur le marché de l'emploi.

C'est enfin toute la politique d'attribution des logements qui doit être revue. Le communautarisme n'est pas le fruit du hasard ; il résulte du cloisonnement social, renforcé par la ségrégation ethnique et géographique. En la matière, la loi Borloo et la création de l'agence de rénovation urbaine ont marqué une mutation décisive de nos méthodes passées. Mais il reste beaucoup à faire.

Mener des politiques de minorité volontaristes et pragmatiques ne sera pas facile, car l'action positive fait peur. On la soupçonne de menacer l'orthodoxie républicaine, la promotion au mérite, l'égalité de traitement. Mais nous ne pouvons céder au chantage de ceux qui prônent l'égalitarisme pour maintenir les inégalités... Ne nous laissons pas abuser par des raccourcis trompeurs : ce seront toujours le mérite, le talent, les qualités personnelles d'un individu qui définiront sa place dans notre société. Ces mérites, ces talents, certains ont, plus que d'autres, du mal à les faire valoir, et c'est pour les remettre sur un pied d'égalité que nous devons trouver des solutions innovantes et efficaces.

Notre pays a les moyens de le faire. Notre Constitution permet déjà de combattre les ruptures d'égalité, la mise en place de traitements préférentiels en faveur de certains territoires en témoigne.

La France est aujourd'hui confrontée à une demande collective de reconnaissance et d'assimilation. Il y va de notre unité et de notre cohésion, de répondre à cette demande.

Mais ce qui fonde l'unité d'une nation, ce n'est pas l'existence d'une entité séparée, idéale, une « idée pure » qui guiderait une réalité sociale sommée de s'y conformer. Nous devons nous faire une autre image de l'unité. Leibniz avait choisi de penser celle-ci comme une notion dynamique, active, comme « l'unité de la conscience », rassemblant dans un même élan de pensée la diversité des perceptions. C'est cette vision dynamique que nous devons privilégier. Ce qui fonde l'unité d'une nation, c'est la permanence d'un projet ou d'une aventure qui rassemble dans un même élan la diversité des talents et des énergies.

Alain Peyrefitte disait : « Dans la nation France, on peut venir de partout, si l'on va ensemble quelque part ». L'appel nostalgique à quelque identité perdue ne peut forger ce projet national. Aujourd'hui certains d'entre nous restent exclus de notre aventure commune : donnons-leur les moyens d'y participer de nouveau.

L'égalité n'est certes pas une chose facile. Gardons-nous de la démagogie, comme du dogmatisme et de la frilosité. Nous savons qu'il n'y aura pas de grand soir de l'égalité parfaite. Mais il existe une voie entre l'utopie stérile et la résignation : celle de l'action positive à la française, qui n'ignore pas les mérites de chacun, et qui permet à tous de les exprimer. C'est dans cette voie que nous devons tous nous engager (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales - Dans les années 1880, les travailleurs belges doivent payer une taxe pour compenser leur exemption de service militaire - en fait pour freiner leur embauche. En 1930, les Polonais et Italiens naturalisés sont refusés dans la fonction, publique. A chaque fois, les mêmes symptômes se manifestent et pourtant les étrangers « de passage » s'enracinent.

Les Français n'ont jamais été un peuple d'exil et n'ont pas toujours le sens de l'hospitalité - les pieds-noirs en savent quelque chose ! Il est donc salutaire de les morigéner, à condition de rappeler aussi que peu de peuples ont accueilli autant d'étrangers. Un cinquième d'entre nous seraient issus des vagues d'immigration. Comme le disait Coluche, « les Français sont des étrangers qui n'aiment pas les étrangers »...

Mais puisque cette histoire s'est bien terminée, que Belges, Polonais, Italiens se marièrent, furent heureux et eurent de moins en moins d'enfants (Sourires), on a cru longtemps que les problèmes actuels se résoudraient de la même façon.

Aujourd'hui, il nous faudrait une certaine mauvaise foi, pour affirmer que nous vivons une poussée de fièvre identique à celles de 1880 et 1930. Ce qui est désormais en cause, ce n'est pas seulement l'équilibre du marché du travail, ni l'efficacité des actions socioculturelles, ou de notre politique urbaine.

De quoi s'agit-il alors ? Que s'est-il passé depuis les années 60 pour que nous en soyons encore à nous interroger sur les « perspectives de l'intégration » ?

J'évoquerai avant tout notre passé colonial. La dernière vague d'immigration est celle des « anciens colonisés ». On fait injure au bon sens en refusant d'admettre que ces retrouvailles, après une histoire douloureuse, posaient des problèmes particuliers, notamment avec l'Algérie. On a la mémoire longue sur les deux rives de la Méditerranée.

Je soulignerai ensuite, la très forte « désynchronisation » entre notre pays et les nouveaux arrivants. La France joyeuse et libertaire des années 70, qui accueille les enfants du « regroupement familial », tient la famille, l'autorité et la religion en si piètre estime qu'elle est incapable de s'intéresser aux questions qui tiennent à c_ur aux immigrés : la famille, la foi, le statut personnel, le mariage, la filiation, le divorce, la répudiation, l'endogamie et surtout, l'exogamie avec, à la clé, la transgression de la religion du père. Ces problèmes de fond, n'ont pas été évoqués... Nos _illères hexagonales nous ont empêchés de voir ce que Mengouchi et Ramdane appelaient, en 1978, « les souffrances de l'homme qui enjamba la mer », mais aussi d'affirmer d'emblée ceux de nos principes auxquels nous ne voulons pas renoncer, au premier rang desquels la place de la femme. Quinze ans plus tard, notre pays devait découvrir le voile et la question du statut de la femme. Il n'avait rien vu venir !

Notre approche de l'intégration, placée sous le signe du « jeunisme », s'est concentrée sur ceux qu'on appellera bientôt les « Beurs », déstabilisant cette cellule précieuse et chaleureuse qu'est une famille maghrébine. Les parents n'ont jamais été considérés comme des interlocuteurs dignes de ce nom.

Plutôt que de régler ces questions subtiles, on a préféré la problématique plus payante du racisme et de l'anti-racisme. L'immigration est vite devenue un enjeu de pouvoir, les uns en brandissant des programmes « anti-étrangers », les autres en flagornant la deuxième génération.

Notre modèle d'intégration, fondé jusque-là sur le pari de l'assimilation, sur un « effacement progressif des spécificités ethniques », a laissé place à une nouvelle lutte en faveur de la « culturo-diversité ». Comme on ne peut faire aimer aux autres ce qu'on a désappris à aimer soi-même, au lieu de proposer aux nouveaux Français des valeurs et des règles minimales communes, on a promu les particularismes à tout-va, cassant la machine qui avait fait de la France une « formidable mangeuse de minorités » comme le disait Bruno Etienne devant la commission Marceau Long.

C'est l'époque de la grande confusion intellectuelle et verbale : on mélange idées et réalités, immigrés et étrangers, français musulmans et musulmans français, kabyles et arabes, droit à la différence et à l'indifférence, assimilation et insertion, clandestins et réfugiés, immigration et asile, nationalité et citoyenneté, vote immigré et vote étranger. Tout est dit et son contraire. Et pour cause : le vide statistique, dans ce domaine, est total. Les pouvoirs publics ne disposent d'aucune information sur les immigrés et leurs familles. L'intégration, processus à long terme, ne peut s'étudier que si on dispose de données sur plusieurs générations, y compris sur celle née en France, et donc de nationalité française. Or, la mention des origines ethniques reste un tabou.

Première conséquence : nous avons abandonné le terrain aux démagogues et aux médias. Hier, on ne parlait que des Beurs, de la drogue et de la délinquance. Aujourd'hui « l'air du temps » conduit à regarder les « Franco-Maghrébins » par le prisme de la religion, voire de l'intégrisme. Les voici obligés de se définir comme musulmans pour se faire entendre, alors que beaucoup d'entre eux sont des Kabyles agnostiques. C'est le silence sur tous ceux qui se sont intégrés sans faire de bruit...

Deuxième conséquence : l'échec des processus d'intégration est présenté comme une donnée d'évidence, alors qu'aucun d'entre nous n'est capable de mesurer la part de succès et d'insuccès, de dire si la bouteille est à moitié vide ou à moitié pleine.

Que dire pour demain ? Il me semble prioritaire de réaffirmer, comme vous l'avez fait, Monsieur le ministre, devant le Haut conseil à l'intégration, que la France restera une nation ouverte et que nous avons un devoir de fraternité à l'égard de ceux qui s'installent légalement en France.

Il nous faut également poursuivre nos efforts pour que les Français issus de l'immigration se sentent des citoyens à part entière.

Cela suppose de savoir enfin parler de ce fameux passé colonial, qualifié par Pierre Chaunu de « tragédie grecque, zébrée de blessures cachées et d'élans déçus où la rancune et l'amour se croisent ». Cela suppose aussi de nous préoccuper enfin des questions de droit : les conflits de statut personnel et le contentieux international privé sont parmi les plus douloureux et les plus onéreux au monde. Cela suppose enfin d'en finir avec l'interdit statistique. Comment prétendre lutter contre les discriminations quand on en ignore la nature et l'étendue exactes ? De même, nous ne pouvons plus laisser les médias confondre émigrés, musulmans, Maghrébins, estimer leur nombre à 4 millions un jour, 6 millions deux mois plus tard, 7 millions il y a deux semaines !

Il faut surtout cesser d'enfermer les Français issus de l'immigration dans une identité confessionnelle, et dire clairement ce que nous souhaitons. Notre but n'est pas de procéder à un arasement de toute différence culturelle, mais simplement de préciser les règles minimales nécessaires pour vivre ensemble. A cet égard, je partage votre conviction, Monsieur le ministre : le modèle laïc et républicain constitue un « idéal moderne ».

Nous devons nous préoccuper des moyens autant que des fins. Tous les partis sont à peu près d'accord pour arrêter l'immigration clandestine, faciliter l'intégration, lutter contre le racisme, mais il reste à savoir si les parties prenantes dans ce domaine travaillent efficacement ou non, de concert ou pas.

La France a le potentiel pour relever tous ces défis, pour peu qu'elle ne se complaise pas dans une vision dépressive de son histoire.

Je terminerai par une note personnelle : je n'oublie pas Nadia, qui n'arrive pas à obtenir une inscription pour ses enfants dans une école privée, ni mon ami Konan, qui ne trouve pas d'appartement à louer, je n'oublie pas tous ces jeunes qui ne parviennent à décrocher d'entretien d'embauche pour cause de patronyme ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité - Je remercie le groupe UMP d'avoir pris l'initiative de ce débat. Il est bienvenu, alors que le Parlement s'apprête à adopter un texte moderne pour protéger le premier lieu d'intégration, l'école.

Depuis des siècles, des hommes et de femmes fuyant la guerre ou cherchant une vie meilleure sont venus rejoindre la communauté nationale, voyant d'abord en la France un idéal. Depuis la Révolution, cet idéal se confond avec la République qui, comme l'écrit Maurice Agulhon, est, plus qu'un système de gouvernement, un projet politique et social. Dans ce cadre, l'intérêt général prévaut sur les intérêts particuliers et chacun doit être prêt à transcender ses singularités. L'universalisme français facilite donc l'intégration, en ce que, comme l'observe Emmanuel Todd, la population d'accueil est prête à reconnaître les immigrés comme Français dès lors qu'ils acceptent, en plus de la langue, quelques valeurs définissant un fonds commun.

Or depuis vingt ans, la France n'intègre plus suffisamment. L'idéal républicain s'est essoufflé. Le patriotisme fut parfois moqué, le principe d'autorité contesté, les institutions traditionnelles qui concouraient au brassage et à un certain ordonnancement social - famille, syndicats, partis - ont perdu de leur force, la crise économique a brouillé les repères sociaux et moraux... Le doute s'est emparé du modèle français, et le processus d'intégration s'est grippé.

Dès lors, la crispation de notre société a entraîné un repli, une peur de l'Autre. Les immigrés sont devenus une catégorie à part. Et la République n'a pas su leur offrir la promotion en contrepartie de l'intégration, ni fixer les règles et devoirs qui la font respecter.

Certes il existe des réussites exemplaires. Mais pour l'essentiel, l'intégration est un demi-échec. Il tient en partie au discours des années 1980 sur le « différentialisme », antichambre du communautarisme. A la fin des années 1990, on en vint même, pour des raisons idéologiques, à substituer à l'intégration la lutte contre les discriminations, symbolisée par le numéro d'appel gratuit 114. Cette lutte est utile ; mais elle a conduit à négliger l'essentiel.

Aussi le Gouvernement a-t-il entrepris une refondation de la politique de l'intégration, en se débarrassant des complexes et de l'autodénigrement. Refondation, car il s'agit de rendre à l'Etat toute sa place pour garantir l'unité nationale ; d'instaurer entre la France et l'étranger un contrat, avec ses obligations et ses devoirs ; de porter les efforts sur la promotion sociale, à laquelle doit s'articuler une lutte contre les discriminations, sans céder à la « victimisation ».

Refondation, le terme n'est pas trop fort. Notre doctrine, nos institutions sont inadaptées à une immigration de plus en plus diverse et avant tout familiale. Elles répondent de plus en plus mal aux attentes des résidents de longue durée et de nos compatriotes issus de l'immigration, qui veulent une stricte égalité de traitement et des possibilités identiques de promotion sociale.

Nous avons donc mené depuis deux ans une politique volontariste qui a d'ailleurs inspiré les Pays-Bas, la Belgique et l'Allemagne et intéresse la Grande-Bretagne.

Nous avons d'abord nommé un Haut Conseil à l'intégration. Présidé par Mme Blandine Kriegel, il est à l'image de notre diversité et comprend de nombreuses femmes, des originaires d'Asie, d'Afrique, des DOM, des enfants de harkis. Cette instance de réflexion et de proposition a déjà remis au Premier ministre un avis sur les droits civils des femmes issues de l'immigration et un autre sur la promotion sociale des jeunes venus des quartiers en difficulté. Ces deux documents seront à l'ordre du jour du prochain comité interministériel à l'intégration. Cette seconde instance, créée en 1989, ne s'était plus réunie depuis 1990, ce qui est une grave erreur. Par décret du 30 janvier 2003, sa composition a été élargie. Il s'est réuni le 10 avril 2004 et le fera désormais tous les ans. Au printemps prochain, il sera consacré à la formation et à l'emploi.

Nous avons ensuite jeté les bases d'un véritable service public de l'accueil, dont la mesure phare, annoncée par le Président de la République à Troyes, est le contrat d'accueil et d'intégration. L'expérience menée dans douze départements au second semestre 2003 est satisfaisante puisque, au 31 décembre dernier, 8 027 contrats avaient été signés par des étrangers de 114 nationalités, ce qui représente, en année pleine, 25 000 contrats pour ces douze départements. Sont concernés les conjoints de Français, les bénéficiaires du regroupement familial ou titulaires d'une carte « vie privée et familiale », les titulaires d'une carte de séjour autorisant à travailler, les réfugiés statutaires et les bénéficiaires de régularisation. Sont exclus les étudiants et les mineurs.

74 % des signataires ont moins de 35 ans. 55 % sont des conjoints de Français, près de 15 % sont des personnes régularisées. Le contrat comprend une journée de formation civique obligatoire, des formations linguistiques - dont 35 % des signataires ont bénéficié - et un suivi social spécifique. Nous avons pour objectif en 2004 la signature de 45 000 contrats. Fin 2005, le contrat aura été proposé à tous les migrants réguliers - ils étaient 124 793 en 2002. Prochainement, sa signature sera liée à la délivrance de la carte de résident de longue durée. C'est d'ailleurs ce que le Parlement a souhaité en modifiant l'ordonnance de 1945.

Sur le terrain, dans les départements de forte immigration sont créées des plates-formes de l'OMI - il en existe dix et cinq autres seront créées avant juillet 2004 - tandis qu'ailleurs, la prestation est assurée par des équipes mobiles dans les locaux de la préfecture. Pour coordonner le dispositif, une agence nationale chargée de l'accueil et de l'immigration fusionnera l'OMI et le Service social d'aide aux émigrants, association subventionnée en totalité par l'Etat. Le nouveau réseau comptera 800 personnes. Le rétablissement de la taxe sur l'entrée en France de certaines catégories d'étrangers en loi de finances rectificative pour 2002 donnera les moyens de cette réforme.

L'agence aura pour mission la gestion administrative du regroupement familial et des autorisations de travail. En 2002, 20 989 personnes sont venues en France au titre du travail, à la demande des entreprises, dont 44 % de diplômés, ce qui nous place au deuxième rang en Europe derrière le Danemark. Notre politique est avant tout pragmatique, afin de répondre aux besoins des entreprises. J'ai lancé une réflexion à ce sujet avec le Commissariat général du Plan.

L'Agence est également chargée depuis le 1er juillet 2003 de la politique d'accueil de l'ensemble des migrants réguliers sur le plan administratif, sanitaire et social, et, depuis le 1er janvier 2004, de la coordination du dispositif national d'accueil et d'hébergement des demandeurs d'asile, ainsi que des dispositifs d'aide au retour volontaire. En 2005, l'ensemble des outils de ce nouveau service public de l'accueil seront en place.

Mais cette politique ne se limite pas à l'accueil. Il s'agit aussi d'instaurer une politique de promotion sociale et d'égalité des chances. Si les immigrés ne sont pas seuls à souffrir de la précarité sociale, ils sont les plus touchés. Dans les quartiers sensibles, la précarité accentue le repli sur soi et sur une communauté réelle ou supposée. Le Gouvernement réfléchit donc à une politique sociale spécifique envers ces populations et à sa coordination avec la politique de la Ville. L'une des pistes est la réorientation de la Délégation interministérielle à la Ville. Il existe actuellement un établissement public, le Fonds d'action et de soutien pour l'intégration et la lutte contre les discriminations - FASILD -, auquel l'Etat a accordé une subvention de 170 millions en 2003, et des crédits d'intervention en augmentation pour 2004. Mais selon un rapport de l'IGAS, sa politique d'intervention est peu dynamique et peu lisible.

M. Jean Leonetti - C'est le moins que l'on puisse dire !

M. le Ministre - Il est temps de choisir et de donner une cohérence aux politiques sectorielles concourant à la cohésion sociale que l'Etat a conservées. J'attends beaucoup, à ce sujet, du Haut conseil à l'intégration et de la Cour des comptes.

Il nous faut également réorienter nos actions, en priorité vers l'éducation, l'emploi et l'accès au logement, c'est-à-dire vers l'autonomisation des personnes.

La doctrine républicaine ne reconnaît pas les prétendues races et exclut le recours à des critères ethniques ; nous voulons mener une politique de promotion sociale et d'égalité des chances, fondée sur des critères sociaux et territoriaux et s'appuyant sur un accompagnement individualisé.

Ainsi, mon collègue Luc Ferry a adressé une instruction à ses services en juillet, afin que sur 30 000 bourses au mérite, 10 000 soient attribuées en zone d'éducation prioritaire. Cet objectif sera atteint à la rentrée 2004, 5 000 bourses ayant d'ores et déjà été attribuées.

De même, j'ai relancé le dispositif de parrainage vers l'emploi. En 2002, 12 466 personnes ont été parrainées par 432 réseaux comprenant 7 380 parrains. Les premiers résultats de 2003 marquent une progression et pour 2004, le comité interministériel à l'intégration a retenu un objectif de 25 000 parrainages des jeunes des quartiers. Le dispositif de parrainage figure dans la circulaire de territorialisation de la politique de l'emploi pour 2004 et pour la première fois, des objectifs quantifiés ont été définis par région.

Par ailleurs, il faut agir pour l'égalité de traitement. Nul ne doit se voir refuser un travail pour des raisons étrangères à sa compétence.

M. Philippe Douste-Blazy - Tout à fait !

M. le Ministre - Le fait que le taux de chômage des salariés étrangers, hors ressortissants de l'Union européenne soit le triple de celui des salariés français est largement dû aux discriminations à l'embauche.

M. Philippe Douste-Blazy - Bien sûr !

M. le Ministre - Un rapport sur ce sujet avait été remis à Mme Aubry par le Haut Conseil à l'intégration en 1997 mais je ne crois pas qu'il ait été suivi d'effet.... Aussi le Premier ministre a-t-il confié en juin dernier à Bernard Stasi une mission relative à la création d'une autorité administrative indépendante de lutte contre toutes les formes de discrimination. Son rapport qui sera remis dans les prochains jours, devrait être suivi du dépôt d'un projet de loi avant l'été.

Cette politique d'égalité des chances et de soutien personnalisé trouve également une traduction dans l'accès à la fonction publique. Le Gouvernement a, en effet, décidé de mettre en place des expériences de préparation aux concours, dans dix sites de ZEP appartenant à huit académies. Les formations ont commencé en janvier, pour permettre la présentation des stagiaires à une douzaine de concours de catégories B et C à la fin du printemps. Ce dispositif devrait être généralisé à l'ensemble des ZEP, dans l'esprit de la jurisprudence récente relative à l'accès à l'Institut d'études politiques de Paris.

Mme Martine Aurillac - Très bien !

M. le Ministre - Pour nombre de personnes qui ne sont pas nées en France, la naturalisation est la clé de l'accès aux concours mais les délais étaient trop longs. J'ai donc décidé une réorganisation qui porte ses fruits : en janvier 2003, il y avait 62 000 dossiers en retard ; au 31 décembre, il n'en restait plus que 34 000 et le délai d'instruction était passé de seize à sept mois. Dès le milieu de l'année prochaine, les dossiers de naturalisation seront traités par mon ministère dès leur arrivée. Restent les délais, encore trop longs, de constitution des dossiers en préfecture et d'établissement des pièces d'état civil français par le ministère des affaires étrangères : nous devons collectivement chercher à les réduire, afin que l'on puisse être naturalisé en un an. Par ailleurs, nous préparons les modalités d'examen des connaissances des responsabilités et avantages conférés par la citoyenneté française, conformément à la modification du code civil que vous avez adoptée en novembre.

Enfin, la cohésion nationale passe par la reconnaissance de ce que les immigrations successives ont apporté à notre pays. Le visage de la France s'est façonné avec ceux qui s'y sont installés, l'ont aimée et l'ont servie, parfois plus intensément encore que des Français dits « de souche »... Aussi Jacques Toubon a-t-il été chargé d'une mission de préfiguration du centre de ressources et de mémoire de l'immigration. Là encore, il y avait eu des rapports, mais rien n'avait été fait... Pour notre part, nous ferons preuve de volontarisme.

Le Président de la République et le Gouvernement sont déterminés à répondre aux difficultés que rencontre notre communauté nationale. Dans ce moment clé où notre pays s'interroge sur son avenir et son identité, trois options sont possibles : l'isolement national, qui est contraire aux intérêts de la France ; le communautarisme qui est contraire à la citoyenneté et à l'unité nationale, même si la montée de l'individualisme et la perte de certains repères collectifs peuvent en expliquer l'attrait ; enfin, l'intégration. La France est une nation ouverte et doit le rester. Elle doit être à la fois - sans qu'il n'y ait là aucune contradiction, bien au contraire - intransigeante vis-à-vis de l'immigration irrégulière qui est un cancer pour certains quartiers et y réduit à néant nos efforts d'intégration, et généreuse dans sa volonté d'accueil des jeunes de nos quartiers qui ne trouvent pas d'avenir et ne manquent pas d'énergie : celle-ci sera une chance pour la France si nous savons lui donner un idéal.

Mais l'intégration d'une partie de notre population dépend d'abord de notre foi collective dans nos valeurs citoyennes et nationales.

M. Jean Leonetti - Très bien !

M. le Ministre - L'intégration n'est que l'un des éléments d'une dynamique républicaine qui concerne tous les Français. Comme l'écrivait André Malraux, « la France n'est jamais plus grande que lorsqu'elle l'est pour tous » (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF).

M. Julien Dray - Pour que ce débat ait une utilité, il faut se parler franchement, employer des mots qui font mal, plutôt que répéter pour la énième fois des formules convenues dont les Journaux officiels de ces dix dernières années sont remplis.

Il y a en France des ghettos. Employé il y a dix ans, ce terme avait choqué. La réalité l'a désormais imposé comme une évidence. Le ghetto est ce lieu où une minorité vit séparée du reste de la société, refermée sur elle-même, dans la marginalité. Nos ghettos sont devenus ethniques : après s'être « ghettoïsée », la société française se communautarise. Le débat sur le voile est le révélateur de cet état de fait, qui sanctionne un échec social et urbain.

Nous sommes un certain nombre sur ces bancs à avoir tiré les sonnettes d'alarme. Les bonnes volontés comme les bonnes idées n'ont pas manqué, les ministres successifs nous ont écoutés ; dire que rien n'a été fait serait un mensonge, mais l'action n'a jamais été à la hauteur du défi à relever.

Dans les dix prochaines années, soit nous gagnons la bataille de la République, soit la France va s'aligner sur les modèles anglo-saxons (« Très bien ! » sur les bancs du groupe socialiste).

M. Jean Leonetti - Très juste !

M. Julien Dray - Pour gagner ce combat, il faudra des moyens considérables et une volonté politique d'acier. Je distinguerai quatre domaines d'urgence.

Premièrement, il y a aujourd'hui en France entre quatre et six millions de musulmans qui ne sont pas forcément pratiquants ni même croyants, mais qui revendiquent cette appartenance culturelle. Il faut donc banaliser la religion musulmane dans la société française, lui donner sa place comme pratique cultuelle, pour éviter qu'elle devienne l'étendard d'une révolte, d'une recherche identitaire ou, plus grave, d'une affirmation politique.

M. Jean Le Garrec - Très bien !

M. Julien Dray - Il faut donc qu'elle ait ses lieux de culte, financés par des fonds nationaux.

M. Manuel Valls - Très bien !

M. Julien Dray - Qu'elle ait un clergé reconnu et formé en France ; que ses pratiques rituelles disposent des lieux nécessaires - je pense en particulier à l'abattage ; que les cimetières comportent des carrés musulmans. Bref, que la pratique quotidienne de cette religion soit vécue avec simplicité.

De ce point de vue, une grave erreur a été commise dans la mise en place du Conseil français du culte musulman (« Très bien ! » sur les bancs du groupe socialiste). Cette construction bureaucratique a conduit à un pacte tacite avec les fondamentalistes : elle a légitimé, pour représenter des millions de musulmans en France, les plus extrémistes et les moins représentatifs. Mais je ne vais pas tirer sur l'ambulance : la majorité de nos collègues sont d'accord sur ce constat...

Il faudra assurer la représentation - nécessaire - de ce culte, sous une forme nouvelle, démocratique et transparente. Si pour cela il faut modifier la loi de 1905, alors engageons cette réflexion car il y a urgence. Il faut permettre à l'islam de devenir une religion moderne qui s'inscrive dans le pacte laïque. Il doit savoir sortir de ce qu'il vit comme une permanente humiliation ; il retrouvera son honneur dans cette modernité que nous devons construire avec lui. Il faut faire vite, car des forces extrémistes utilisent la situation pour créer un islam politique en France.

M. Jean Le Garrec et M. Gérard Bapt - Tout à fait !

M. Julien Dray - Le deuxième domaine d'action concerne la place faite à une nouvelle génération de Français. Je n'emploierai plus le mot « intégration » car force est de constater que l'intégration a marché : le creuset français a continué de fonctionner.

Les jeunes sont à la fois ceux qui sont les mieux intégrés culturellement et ceux qui subissent le plus de discriminations - et le mot trouve ici son sens exact. Leurs parents avaient accepté bien des contraintes en venant en France, car ils regardaient notre pays comme un Eldorado où leur situation ne pourrait que s'améliorer, mais eux ne se regardent pas comme des invités : nés en France, ils se considèrent comme étant citoyens français, avec les droits et devoirs que cela comporte. Cessons donc de parler de maîtrise des flux migratoires - elle est à peu près réalisée, même s'il y a encore quelques dérives - et admettons que ceux qui nous posent problème aujourd'hui dans nos quartiers ne sont plus des immigrés, mais de jeunes citoyens français, victimes de discriminations qu'ils brandissent parfois comme autant d'étendards pour justifier leur comportement antisocial.

Il nous faut donc lutter activement contre ces discriminations, ce qui ne signifie pas fabriquer une élite pour se donner bonne conscience, mais bien plutôt donner toute sa place à cette nouvelle génération de Français.

La troisième question qui se pose à nous, c'est celle du fonctionnement de l'institution scolaire. L'école est probablement l'outil essentiel dont nous disposons pour combattre les discriminations mais on voit bien que, loin de contribuer à l'égalité des chances, elle est devenue aujourd'hui le lieu où se mettent en place ces discriminations et où ces jeunes apprennent qu'ils ne seront jamais des citoyens comme les autres. Il importe par conséquent de tirer les enseignements de ce qui a été fait pour les ZEP - la formule a été efficace là où les moyens ont été suffisants - (Interruptions sur les bancs du groupe UMP) et donc de dégager des crédits pour rénover la pédagogie et rendre à l'école son rôle de creuset républicain.

La quatrième question est pour moi la plus décisive. Depuis vingt ans, grâce à la politique de la ville, nous avons revitalisé, rafistolé, reconstruit, rénové, mais nous n'avons, ce faisant, réussi qu'à contenir les difficultés, sans empêcher la formation de ghettos. Il faut donc refonder totalement cette politique au lieu de se contenter d'ouvrir un guichet pour faciliter les démolitions-reconstructions - car, au rythme actuel, il faudrait cinquante ans pour arriver au bout du programme. Dans les années 1960, la destruction de bidonvilles et la construction de cités HLM ont été vécues par les bénéficiaires de cette politique comme la réalisation d'un rêve et comme un puissant facteur d'intégration. Aujourd'hui, il nous faut reconstruire des cités nouvelles, ce qui est une tâche énorme. La mixité sociale ne peut être décrétée ni imposée, chacun préférant que les problèmes se posent chez le voisin plutôt que chez lui. Elle exige une nouvelle dynamique, un nouveau brassage et donc des cités nouvelles, offrant enfin un espoir à des gens qui ont aujourd'hui le sentiment qu'ils ne pourront jamais sortir de leur quartier et qu'ils en seront pour toujours marqués dans le regard des autres. Sachons rompre cet enfermement, y compris en facilitant l'accès à la propriété.

En définitive, le problème qui se pose au Gouvernement est assez simple : ou il saura affirmer une volonté en dégageant les moyens indispensables, ou nous continuerons de débattre sans voir que nous perdons une bataille, et il ne lui restera plus alors qu'à gérer les relations intercommunautaires ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur quelques bancs du groupe UMP)

M. Gilbert Gantier - Le problème de l'intégration était déjà, me semble-t-il, au c_ur de notre discussion sur le respect de la laïcité et sur le port du voile. Mais, - comment s'en étonner ? - ces revendications identitaires posaient avant tout la question de savoir si l'école continuait d'être un outil de promotion sociale et d'intégration.

Le Haut Conseil à l'intégration a relevé, dès novembre 2000, le lien entre ces affaires et l'échec scolaire ou la détresse sociale. Aujourd'hui, il est manifeste que, comme ensuite le marché du travail, l'école ne joue plus son rôle, que les différences sociales se muent en handicaps et que la société se cloisonne. L'échec scolaire frappe lourdement les enfants issus de l'immigration : la probabilité de sortir du système scolaire sans qualification, qui est de 8,7 % pour les élèves français, dépassent 15 % pour les élèves étrangers - avec des variations importantes selon la nationalité des familles.

Il faut donc s'attaquer de toute urgence à la question de l'intégration. Nos politiques ont certes connu de beaux succès mais, le plus souvent, elles n'ont fait que nourrir des frustrations, et ceux qui ont réussi à quitter les cités-ghettos de Villeurbanne ou Vénissieux ne doivent pas nous faire oublier ceux qui continuent d'y vivre, désoeuvrés et attirés par la délinquance.

Le mot même d' « intégration » pose problème : un certain nombre de nos concitoyens issus de l'immigration considèrent qu'ils n'ont pas à s'intégrer, étant depuis longtemps Français. Mais l'intégration n'est pas l'assimilation ou l'adoption d'autres m_urs : elle consiste à « fabriquer » un peuple à partir d'une multitude sans liens préalables, et elle concerne donc chaque citoyen.

L'UDF - mais c'est aussi le sentiment de la plupart des immigrés - juge que la discrimination positive serait une mauvaise méthode pour parvenir à cette fin. Il ne faut pas recruter quelqu'un parce qu'il est musulman ou immigré, mais pour sa compétence. L'intégration appelle donc la valorisation plutôt que la victimisation. Notre société abonde malheureusement en discriminations mais n'aborder la question de l'intégration que sous cet angle serait adopter un point de vue bien misérabiliste !

Nous devons aussi nous appuyer sur notre tradition républicaine, qui refuse de tenir compte des communautés en vertu du principe d'égalité devant la loi, et diffère donc profondément de la tradition américaine. Continuons de défendre notre idéal d'égalité !

Une seconde piste à explorer a trait à l'apprentissage de la langue, qu'il convient de développer. Mais il faut aller au-delà et mettre aussi l'accent sur l'apprentissage des principes républicains, de la Constitution et de nos lois. Nous devons également responsabiliser les parents grâce à des sortes de contrats « école-famille ».

En troisième lieu, il faut cesser de ne s'intéresser qu'à des groupes-cibles, qu'il s'agisse de ceux qui cumulent tous les handicaps ou, à l'autre extrémité, des diplômés qui ont du mal à trouver un emploi. On a trop négligé jusqu'ici les 12-16 ans, par exemple, alors qu'il faudrait s'en occuper en priorité en renforçant les politiques d'apprentissage professionnel et d'apprentissage du civisme. J'insisterai également sur la nécessité d'aider les femmes à prendre toute leur place dans la société : il y va en effet de la transmission de nos valeurs.

Enfin, il faut prendre en compte la dimension « géographique » de l'intégration. Pour éliminer les territoires d'exclusion, les ghettos, nous devons travailler à une réelle mixité sociale en corrigeant et en humanisant la politique du logement et la politique de la ville.

C'est l'un des soucis de la politique du logement préconisée par Gilles de Robien. Il s'agit d'humaniser le parc actuel grâce à la réhabilitation et au développement d'espaces communautaires conviviaux, de développer l'aide individuelle au logement, d'encourager les commerces et les petites entreprises à réinvestir dans les quartiers en difficulté.

L'intégration est affaire de tolérance et de respect. La France est le pays de la liberté, de l'égalité et de la fraternité, des droits de la personne et des droits sociaux.

Un jeune « Beur », à qui je demandais quand la question de l'insertion ne se poserait plus, m'a répondu simplement : « Le jour où on ne parlera plus de notre origine pour nous désigner. » (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. François Asensi - La France est depuis longtemps une terre d'asile et d'immigration. Plus d'un tiers de la population française, si l'on remonte à trois générations, est issue de l'immigration. C'est un atout inestimable, car la nation française est une création permanente dont la diversité fait la richesse. Toutes les périodes de repli ont abouti à un appauvrissement : que l'on songe, par exemple, à la révocation de l'Edit de Nantes ! Et si la France n'avait pas été terre d'accueil, elle n'aurait jamais connu Maria Sklodowska, c'est-à-dire Marie Curie, non plus que Picasso ou Joseph Kessel. Le droit du sol a donc été le creuset dans lequel se sont forgés le peuple et l'identité de notre pays.

Avant la IIIe République, la fracture fondamentale opposait le monde des notables aux classes « laborieuses et dangereuses ». Les « partageux », français ou étrangers, n'avaient aucun droit. Entre 1880 et 1930, l'étranger fut défini de façon négative : c'est celui qui ne dispose pas des droits nationaux.

Plus récemment, le droit du sol s'est payé au prix du sang. Plus de 100 000 « tirailleurs sénégalais » sont tombés sur les champs de bataille contre les armées allemandes. Quelle reconnaissance ont obtenu leurs familles à l'issue de la guerre ? Je pense également aux combattants de la MOI, au groupe Manouchian - « Vingt et trois étrangers et nos frères pourtant » comme l'écrivait Aragon - qui sont morts pour la France, le 21 février 1944.

A la Libération, certains étrangers résistants qui demandèrent la nationalité française se la virent refuser. En 1988, j'avais déposé une proposition de loi pour que la nationalité française soit automatiquement accordée à tout étranger qui avait lutté sur le sol national contre l'occupant nazi et le régime de Vichy. Cette proposition est restée lettre morte...

Sur le plan économique et social non plus, l'attitude de notre pays n'a pas toujours été à la hauteur de nos idéaux. Après la première guerre mondiale, le recours à la main d'_uvre étrangère a pourtant permis de panser l'effroyable saignée. En 1931, le nombre d'immigrés en France atteignait 2,7 millions, soit 6,6 % de la population totale - un record ! Ces immigrés ont participé à l'exploitation de nos mines, à la construction d'une sidérurgie nationale, à l'édification des grandes infrastructures du pays. L'histoire de notre développement industriel ne peut les oublier sans commettre une grave injustice.

On n'a reconnu que tardivement à ces travailleurs le droit de mener une vie privée digne de ce nom avec l'ordonnance du 2 novembre 1945 instaurant le regroupement familial ou la mise en place de la carte de résident, en 1984. Pendant les « Trente Glorieuses », la France a profité de son statut de puissance coloniale pour faire venir de la main d'_uvre bon marché. Georges Pompidou le disait sans ambages en 1963, ici même : « L'immigration est un moyen de créer une détente sur le marché du travail et de résister à la pression sociale ».

Appartenant pour l'essentiel à la classe ouvrière, les immigrés ont été repoussés à la périphérie des villes. La discrimination sociale s'est aggravée d'une relégation spatiale, terreau sur lequel prospèrent le communautarisme et tous les fanatismes. J'ai eu l'occasion de tirer le signal d'alarme, d'abord en 1982, comme rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères pour la population immigrée, puis en 1990, comme rapporteur de la loi contre le racisme et l'antisémitisme et le négationnisme. Comment un Etat peut-il avoir pour ambition d'intégrer alors que son système économique exclut ? Aujourd'hui, le taux de chômage des étrangers est le double de celui de l'ensemble de la population active. Il varie, chez les jeunes issus de l'immigration, de 37 % à 57 % suivant leur population d'origine.

Les municipalités communistes ont fait de gros efforts pour accueillir ces populations fragilisées par un système économique ultralibéral. L'accent a été mis sur le lien social à travers un vaste programme d'accès à la culture, d'aide aux devoirs, de projets éducatifs. Mais les collectivités locales ne pourront subvenir seules aux difficultés. En Seine-Saint-Denis, près de 50 000 demandes de logements sont en attente ! Nous avons besoin d'un plan global de réduction des inégalités sociales.

Quel avenir offre la France à ces jeunes, aujourd'hui assignés à résidence et stigmatisés ? N'est-il pas aberrant, d'ailleurs que la collectivité nationale parle d'intégration à des personnes qui sont de nationalité française ? Cela ne signifie-t-il pas que le problème est avant tout social ?

Les populations immigrées ne sont en effet pas les seules à être confrontées aux difficultés liées à l'insertion sociale et à l'inégalité des chances. Ainsi, moins d'un enfant d'ouvriers sur deux décroche un bac, contre 90 % des enfants issus des classes moyennes ou supérieures, et cet écart est encore accru pour les jeunes issus de l'immigration. Et que dire aussi de la situation des femmes, dans un pays patriarcal comme l'est encore la France ? Quelle extraordinaire course d'obstacles représente aujourd'hui, pour une jeune fille dont les parents sont immigrés et ouvriers, la voie de la réussite !

Dans la lutte pour l'émancipation sociale et l'égalité, l'école républicaine a un rôle fondamental à jouer. C'est pourquoi j'ai voté la loi sur la laïcité, même si elle ne suffira pas à venir à bout de la fracture sociale. Avec la réforme du régime d'indemnisation Unedic et de l'ASS, des centaines de milliers de personnes vont être encore un peu plus exclues. Le Gouvernement réduit de 3 % l'impôt sur le revenu, mais il ne touchera pas aux impôts indirects qui sont les plus injustes.

Parler d'intégration nécessite de réaffirmer un socle de valeurs communes. Il s'agit de promouvoir l'émancipation sociale de chacun. Tant que la question sociale ne sera pas remise au c_ur des politiques nationales, il sera vain de parler d'intégration.

Un geste symbolique consisterait à accorder le droit de vote aux étrangers vivant et travaillant depuis des années en France. Le temps n'est plus aux faux-fuyants. Des mesures fortes et symboliques s'imposent (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. Jean Leonetti - Pendant plus d'un siècle, la France a été un modèle d'intégration. Si l'on remonte à trois générations, un tiers d'entre nous est d'origine étrangère. Jusqu'à ces vingt-cinq dernières années, l'intégration n'a pas nécessité de politiques publiques : c'était un phénomène si naturel qu'il était inutile de le nommer.

Faut-il changer de vocabulaire ? Parler d'intégration n'est-il pas offensant pour des populations qui se sentent profondément françaises ? Faut-il y substituer les notions d'égalité des chances, de cohésion sociale, de lutte contre les discriminations, qui définissent davantage les moyens que le but ?

La notion d'intégration a le mérite de s'adresser à tous les citoyens qui le veulent, sur la base de nos valeurs républicaines. La République française, issue de l'Etat nation, n'est pas une simple technique de gestion du pouvoir démocratique. Elle est un idéal et un projet commun, en même temps que le lien qui rassemble les Français.

Aujourd'hui, notre modèle d'intégration est en panne : la Marseillaise sifflée au Stade de France, le port du voile islamique à l'école, la délinquance médiatisée d'une partie de la jeunesse issue de l'immigration, en témoignent. Parallèlement, le chômage, la discrimination à l'embauche, au logement, au loisir, condamnent à l'exclusion toute une partie de la population. Les causes en sont multiples : la mondialisation accélérée à la mode anglo-saxonne, la perte des repères d'autorité, les crises économiques récurrentes auxquelles s'ajoutent les séquelles douloureuses de la guerre d'Algérie. Les conséquences pour notre cohésion nationale en sont désastreuses. Certains proposent un repli national, le rejet de l'autre, l'isolement de notre pays. D'autres entretiennent l'illusion d'une intégration sans modèle, favorisant le particularisme et le communautarisme, autres formes de repli et d'exclusion.

Ils pensent qu'il suffit d'appliquer un traitement social à ce mal pour le résoudre, comme ils pensaient naïvement que la reprise économique résoudrait le problème de l'insécurité. Il faut aujourd'hui redéfinir les moyens et les buts. Rénovons et simplifions les outils. En moins de deux ans, le Gouvernement a réussi à créer un véritable service public d'accueil des étrangers, avec le contrat d'accueil et d'intégration des étrangers. Ce contrat, qu'il convient de généraliser, ménageant un équilibre entre les droits et devoirs, doit devenir la condition pour obtenir une carte de résident de longue durée ou de naturalisation.

L'Etat a aussi créé l'Agence nationale chargée de l'accueil et des migrations, qui se substitue à de multiples organismes antérieurs.

Quant au Haut Conseil à l'intégration, il a formulé de nombreuses propositions, en particulier en direction des femmes et des jeunes.

La politique d'intégration doit être plus claire, et rompre avec les politiques antérieures, faites d'idéaux brandis et d'actions vaines.

170 millions d'euros sont consacrés au fonds d'action et de soutien pour l'intégration et la lutte contre les discriminations. Ces moyens doivent être réorientés en faveur de l'école, de l'emploi et du logement, outils de l'intégration.

Trop longtemps, les moyens se sont plus attaqués aux symptômes qu'au mal, favorisant ainsi une politique d'assistanat, aux dépens du mérite et de l'égalité des chances. Ces moyens sont nécessaires pour gommer les handicaps des territoires.

Enfin, un partenariat fort doit être renoué au niveau des collectivités territoriales, notamment des communes, des EPCI et des conseils généraux. Ce partenariat doit se décliner à l'école - octroi de bourses dans les ZEP, accompagnement individualisé.

L'accès à l'emploi doit être facilité par le parrainage des jeunes vers l'entreprise et l'accès à la fonction publique territoriale en particulier.

Il faut imposer la mixité sociale dans notre habitat en donnant plus de responsabilités aux communes et en favorisant l'accès à la propriété du logement social.

Enfin, plutôt que d'accorder aux étrangers un droit de vote qui ne confèrerait qu'une sous-citoyenneté de résidence, facilitons l'accès à la nationalité française à ceux qui croient en nos valeurs.

La lutte contre les discriminations sera facilitée par la création d'une autorité administrative indépendante de lutte contre les discriminations, comme l'a voulu le Président de la République.

L'intégration ne réussira qu'à deux conditions : une politique concrète, décentralisée et lisible, en faveur de l'égalité des chances et du mérite, et la réaffirmation de notre idéal républicain, en le traduisant dans les actes.

L'Europe et le monde nous observent pour savoir si notre modèle républicain d'idéal universel résistera au choc d'un monde communautarisé dominé par une philosophie anglo-saxonne. C'est un des grands défis de ce début de siècle pour une France qui doit réaffirmer son ouverture au monde, son identité et ses valeurs (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

La séance, suspendue à 11 heures 10, est reprise à 11 heures 15.

M. Manuel Valls - Un an et demi après l'annonce, par le Président de la République, de la création d'un contrat d'intégration et à quelques heures d'un vote très important, le groupe UMP nous gratifie donc d'un débat sur les perspectives de l'intégration et de l'égalité des chances. Serait-ce un aveu de faiblesse de la politique gouvernementale en ce domaine - d'autant que l'intitulé ne fait aucune référence à des dispositions pratiques ? Au contrat d'intégration, contrat d'un an renouvelable offrant une formation linguistique et culturelle, louable certes, mais bien insuffisante, nous préférons un pacte national d'intégration qui offre des clés pour surmonter la crise de notre modèle social.

Ce pacte affirme notre volonté inébranlable de réparer l'ascenseur social, de casser le ghetto territorial et symbolique, de consolider les aspirations collectives pour l'école, celle de fonder une France nouvelle, qui s'assume dans sa diversité.

Notre débat, hanté par le spectre du Front National, s'est trop longtemps focalisé sur l'immigration, occultant la problématique centrale de l'intégration.

La sémantique, jonglant entre immigrés, musulmans, Maghrébins, Français issus de l'immigration, deuxième génération, empêche notre pays de s'accepter tel qu'il est, c'est-à-dire une terre d'immigration, une terre pluriethnique.

Cela crée des crispations qui se retrouvent dans la politique française d'immigration - une politique complexée, presque honteuse, qui n'ose pas dire que l'immigration est aussi une chance pour la France, ce qui n'est pas contradictoire avec une politique de gestion des flux migratoires.

La reprise de l'emploi et la politique de la ville, aussi volontariste soit-elle, ne suffisent pas à répondre à l'angoisse de nos concitoyens les plus modestes, qui vivent comme une fatalité sociale le fait d'habiter dans des quartiers stigmatisés, insuffisamment pourvus en services publics, et qui enferment leurs enfants, même diplômés, dans une impasse sociale.

C'est ce sentiment profond d'injustice qui mine le pacte républicain et sur lequel prospèrent l'extrémisme et le fondamentalisme. Comment ne pas comprendre que ces jeunes issus de l'immigration, Français pour la plupart, se cherchent une autre identité, dangereuse pour notre pacte républicain.

Une action doit être entreprise d'urgence pour marquer l'ambition des pouvoirs publics. C'est dans ce cadre que s'inscrit « l'action positive », terme sans doute préférable à celui de « discrimination positive », même si sur le fond il s'agit de la même chose. C'est une voie à explorer, mais le choix des critères est primordial : ils doivent être territoriaux et sociaux et non pas ethniques, sous peine de se heurter à l'incompréhension de centaines de milliers de nos concitoyens qui, sans être issus de l'immigration, subissent de plein fouet la désindustrialisation, le chômage, l'échec scolaire et la crise de notre modèle social.

Une action positive appliquée à l'enseignement supérieur, comme elle est expérimentée à l'Institut d'études politiques, au recrutement dans la fonction publique, notamment dans les IUFM, la police, l'armée ou les collectivités locales, constitue une correction tardive, mais nécessaire, des inégalités.

Elle n'est pourtant pas suffisante. Une action résolue doit être entreprise pour casser le ghetto territorial et le ghetto symbolique.

La priorité nationale doit aller aujourd'hui à la destruction et à la reconstruction massive des quartiers populaires, à la mise en _uvre de la mixité sociale, c'est-à-dire une autre politique de peuplement. Du développement de programmes d'habitat mixtes à la réforme de la fiscalité locale, il est des mesures qui changeraient en profondeur la donne dans les quartiers populaires. Le regroupement des bailleurs sociaux, la maîtrise du foncier, une révision des assiettes fiscales pour privilégier l'objectif de mixité sont indispensables - on paie aujourd'hui des impôts locaux beaucoup plus lourds aux Tarterets ou aux Pyramides qu'au c_ur de Paris. Il nous faut convaincre qu'il est de l'intérêt de tous les citoyens de ce pays d'instaurer cette mixité.

L'accession à la propriété doit être favorisée : c'est une aspiration très forte chez les familles d'immigrés et leurs enfants français.

La seule réponse policière qu'apporte ce gouvernement montre déjà ses limites. Quand l'éducation, l'emploi, le logement ne sont pas dotés, dans un quartier, de moyens exceptionnels, les classes populaires ne vivent pas mieux.

Une institution est essentielle dans la revitalisation de notre pacte républicain, parce qu'elle est le ferment de la promotion sociale : l'école. Elle seule peut apporter une issue à la crise civique, elle seule donne un sens à la nécessaire rénovation urbaine.

Oui, l'école doit être au c_ur de l'ambition nouvelle pour les quartiers populaires : ils doivent se transformer en véritables zones d'excellence pédagogique, comme le propose le rapport de l'Institut Montaigne, plus innovant que celui de Mme Blandine Kriegel. Cela implique de doter les ZEP de crédits supplémentaires ; de généraliser les contrats avec les grandes écoles ; de réorganiser les équipes scolaires en laissant plus d'autonomie aux enseignants qui le souhaitent ; de créer des postes d'accompagnement scolaire ; de développer les activités périscolaires dans les quartiers populaires ; d'officialiser l'extension des missions de l'éducation nationale à l'apprentissage des valeurs, des normes, des règles d'hygiène et de savoir-vivre ; de revoir la politique de recrutement et de carrière des enseignants - il n'est pas normal que 50 % des nouveaux enseignants du second degré soient dirigés vers les académies les plus difficiles ; de relancer la formation par alternance en la valorisant. C'est une véritable ambition éducative qui doit être mise en _uvre. Elle seule peut redonner du sens à notre modèle d'intégration.

Vous comprenez donc notre inquiétude et notre colère en constatant que pour ce gouvernement, l'éducation n'est plus la priorité. Rien aujourd'hui ne peut davantage handicaper notre pays que les renoncements sur la question éducative. La destruction du ghetto territorial passe par l'école et la formation.

Une action doit aussi être entreprise pour casser le ghetto symbolique, qui, lui, touche toutes les générations issues de l'immigration extra-européenne.

Les discriminations à l'embauche, au logement en sont les aspects les plus évidents. Une détermination inflexible des pouvoirs publics doit conduire à sanctionner ces pratiques qui pénalisent ceux qui ont un faciès « exotique » ou dont l'état civil ne renvoie pas à la « France ancestrale », caractéristiques qui souvent s'ajoutent à une adresse postale dans un quartier « indésiré ».

N'oublions pas non plus notre devoir de faire la lumière sur le passé colonial de la France et de présenter la laïcité, trop souvent vécue comme une contrainte, comme un facteur d'épanouissement et un principe de neutralité. Avancer sur ces sujets contribuera à promouvoir une intégration sans complexes.

La nation française a besoin de se lier par un pacte d'intégration à celles et ceux qui ont choisi de s'y établir, un pacte public, qui fixerait les attentes de notre pays vis-à-vis des nouveaux arrivants, mais aussi notre volonté de réparer l'ascenseur social, de casser les ghettos.

Cette volonté se matérialiserait par la citoyenneté de résidence, sans aller vers la naturalisation, qui reste, Monsieur le ministre, un parcours du combattant - rien n'a changé depuis l'époque où j'ai obtenu la nationalité française. Cette citoyenneté de résidence remplacerait la carte de séjour de dix ans et ouvrirait le droit de vote aux élections locales.

Une grande loi sur l'intégration est nécessaire et pas simplement pour les primo-arrivants, comme le contrat que vous proposez. Elle permettrait à la nation française de s'attaquer vraiment à la fracture civique et à la crise sociale qui minent notre pacte républicain. Au-delà de la simple défense de nos valeurs, qui est l'orientation nécessaire, mais pas suffisante de la loi que nous voterons cet après-midi, un grand texte sur l'intégration permettrait à la République de se faire aimer et désirer à nouveau, non par les seuls immigrés, mais par toute la communauté nationale (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. Jean Le Garrec - Je voterai la loi sur les signes religieux et la laïcité, non sans avoir beaucoup réfléchi et avoir rencontré des jeunes femmes, voilées ou non. Je la voterai car c'est un signal que nous donnons aux enseignants, à ces jeunes femmes qui se battent - je pense au livre de Fadela Amara - ou à ce Tunisien qui nous demandait il y a quelques jours de ne pas les « lâcher » dans le combat contre le voile - et cette raison emporte tout.

Mais cette loi est, à peine, un commencement. Au cours du débat, on a souligné que l'intégration était en panne. Le rapport Stasi a montré que c'est le mal-vivre qui nourrit les extrémismes et le communautarisme et que la laïcité ne se conçoit que dans l'égalité des chances. La mission Debré dit de même que c'est parce que l'école et le marché du travail ne jouent plus leur rôle d'intégration que la société se cloisonne. Tout se résume dans cette question de Bruno Mattei : « Une République peut-elle être laïque en se dispensant d'être fraternelle et sociale ? »

Pour y répondre, il faut savoir prendre en compte la mémoire et la culture et savoir porter un regard sans complaisance sur notre société.

La mémoire, c'est celle de nos politiques d'immigration mais aussi nos politiques coloniales souvent violentes - pensons aux « enfumades » de ce reître qu'était le maréchal de Saint Arnaud. On oublie trop souvent qu'après les avoir utilisés comme combattants dans toutes nos guerres, dans les années 1960, on fit venir des centaines de milliers d' immigrés - jusqu'à 300 000 en une année - pour utiliser leur force de travail. On l'a fait dans la précipitation, sans organiser l'accueil. Et dans ce que ne faisait pas alors la République, se profilaient les problèmes actuels. Il faut s'en souvenir, si l'on veut aujourd'hui parler de dignité.

En second lieu, il faut regarder sans complaisance notre société, individualiste, fracturée, craintive devant l'avenir. L'ampleur du surendettement m'effraie. Et quand on est dans la mouise, pour utiliser le vocabulaire expressif des années 30, on rend responsable des problèmes celui qui est encore plus dans la mouise. Il faut aussi avoir le courage d'affronter le problème du culte musulman. C'est une véritable bataille qu'il m'a fallu mener pour imposer une vraie mosquée à Petite Synthe, où personne n'en voulait. Il faut le dire, et il faut agir.

Des politiques ont été mises en place. Ce furent, sans remonter jusqu'aux lois Auroux, le rapport Belorgey de 1998, la création du conseil de l'intégration, des commissions d'accès à la citoyenneté. Vous avez tort sur un point : après le rapport Belorgey, une table ronde fut instituée le 11 mai 1999 avec les entreprises et les syndicats pour adopter la « déclaration de Grenelle » afin de lutter contre les discriminations et le numéro vert, le 114, qui fut créé a reçu des centaines de milliers d'appels. La proposition de loi de lutte contre les discriminations adoptée en première lecture en octobre 2000, dont je suis le premier signataire, renforçait le code du travail notamment en ce qui concerne la charge de la preuve, et l'excellent rapport de Philippe Vuilque demeure, hélas, d'actualité. Nous pouvions espérer que la création de deux millions d'emplois et le programme TRACE permettraient d'engager la lutte contre la discrimination. Mais, sans être négligeables, les résultats ne sont pas à la hauteur de ce qui était nécessaire. En la matière, la modestie s'impose. Selon une étude du ministère du travail de mars 2000, le taux de chômage des actifs les plus diplômés était de 5 % chez les Français d'origine et de 11 % chez ceux nés de parents étrangers. A Roubaix, sur 500 titulaires du RMI, 90 % ont au moins le bac. Il faut traiter le problème du logement, celui de l'école. Mais dans le Nord-Pas-de-Calais, où ces problèmes sont encore plus aigus, on supprime 600 emplois d'enseignants. Au lycée Nordover de Grande Synthe, 40 % des lycéens ont des noms d'origine étrangère et sont des citoyens français.

Les lois protégeant l'emploi existent. La rapport de Mme Kriegel ne fera pas mieux que le rapport Belorgey. Ce qu'il faut, c'est une volonté politique, une véritable impulsion de l'Etat. Peut-être faut-il réunir de nouveau les partenaires sociaux ; certaines entreprises, comme celles où j'ai travaillé, mènent une réflexion sur le sujet. Il faut relancer les structures intermédiaires qui accomplissent un travail de fourmi au quotidien. Il faut enfin éviter de remplacer le mot de solidarité par celui d'assistance, comme le Premier ministre l'a fait dans un de ses discours.

L'inquiétude taraude un corps social en proie au chômage de masse et où l'extrême droite instille lentement son poison, en particulier dans les milieux les plus populaires. Il souffle un vent mauvais. Des écrivains comme Oriana Fallaci ou Maurice Dantec, des extrémistes comme Mohamed Latreche entretiennent ce climat. Hâtons-nous de répondre à cette question de Bruno Mattei que je citais tout à l'heure : « Une République peut-elle être laïque en se dispensant d'être fraternelle et sociale ? » (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

M. Pierre Méhaignerie - Ce débat a d'abord le mérite d'aborder des questions sociales qui ont été constamment à l'arrière-plan du débat sur la laïcité. Les conflits autour du foulard renvoient à une sentiment de relégation chez une partie de nos concitoyens. Il a le mérite ensuite de ne pas porter seulement sur l'intégration mais aussi sur l'égalité des chances, dimension nécessaire car la très grande majorité des jeunes filles qui ont choisi le port du foulard sont nées et ont été scolarisées en France. N'oublions pas que cinq à six millions de Français sont issus de l'immigration, contre trois millions d'immigrés. Ils veulent accéder comme tous à la formation et à l'emploi. Enfin, ce débat doit conduire le Gouvernement, les collectivités locales, les entreprises également, à décider un programme d'action pour rétablir l'équité alors que les handicaps se sont accumulés.

Une partie de la population souffre d'un sentiment d'injustice, ce qui est d'autant plus inquiétant que notre société ne semble plus avoir la même capacité à redistribuer les cartes.

Première discrimination : celle devant l'emploi. L'embellie du marché de l'emploi en 1999-2000 s'est accompagnée d'une hausse du chômage dans les trois quarts des zones urbaines sensibles. Le chômage de longue durée des jeunes sans qualification est plus élevé qu'en Allemagne ou en Suède, et largement plus qu'aux Etats-Unis. Le taux de chômage des jeunes d'origine étrangère est particulièrement élevé - entre 22 et 26 %.

Discrimination, ensuite, dans l'éducation. Nos élites se recrutent dans un milieu de plus en plus restreint ; le procédé des concours conduit à retrouver dans les filières d'enseignement supérieur les plus cotées moins de 7 % d'enfants issus de milieux modestes, contre 15 % il y a vingt ans. Quant aux filières professionnelles, elles sont trop souvent perçues comme un déclassement et rejetées par les parents, alors qu'elles offrent les débouchés les plus nombreux.

Discrimination, enfin, par l'habitat. Certains quartiers sont en train de perdre leur diversité sociale et ethnique. Il n'est plus rare de trouver des collèges composés à 80 % d'élèves issus de l'immigration. Cette situation n'est pas saine et provoque indubitablement des attitudes de repli.

Pour corriger ces handicaps, il est urgent de repenser certaines de nos politiques publiques car rien ne dit que les choses s'arrangeront spontanément avec le temps.

Quelles sont les pistes d'action ?

Je partage ce qui a été dit par M. Dray sur le culte musulman. Je suis d'accord avec lui également sur le fait que l'école n'est plus le lieu où s'établit l'égalité des chances.

En matière d'éducation, nous sommes dans un régime d'excellence individuelle, qui fonctionne comme un entonnoir.

Ne faut-il pas assouplir le dogme du collège unique ? Trop d'élèves sont confrontés à l'échec scolaire sans entrevoir d'alternative. Ils sont dirigés vers les filières professionnelles alors qu'ils sont déjà en rupture de ban. Comment expliquer qu'un élève qui souhaiterait devenir carrossier ou menuisier ne puisse emprunter une voie adaptée avant la fin de la 3ème ?

Ne faut-il pas repenser la formation professionnelle, en la décentralisant plus franchement ? L'école, lieu d'acquisition des savoirs, n'est pas un lieu de formation à l'emploi. Les régions ont les solutions les plus inventives - vous le savez, Monsieur le ministre. La région Alsace s'oriente vers une cité des métiers regroupant tous les acteurs de la formation professionnelle. Il faudrait proposer aux élèves un plan de formation aux vingt métiers de demain, peut-être même avec des numerus clausus pour offrir une quasi-assurance de débouchés ; ce plan pourrait être expérimenté de façon décentralisée dans les quartiers prioritaires, où existe un véritable réservoir d'énergies.

L'Etat et les collectivités locales doivent donner l'exemple. Nous verrons quels efforts, les uns et les autres, nous avons su faire pour mettre certains de nos compatriotes en position éligible sur les listes des élections régionales... Mais ne faudrait-il pas ouvrir davantage la fonction publique territoriale et nationale par la voie contractuelle ?

En ce qui concerne l'école, il existe des marges de redéploiement budgétaire. S'il y avait, il y a trente ans, des raisons d'accorder des « sur-salaires » aux enseignants expatriés - doublement du salaire, plus un an de traitement pour trois ans de séjour -, ne faut-il pas aujourd'hui réorienter nos moyens afin de réduire l'inégalité des chances ? A cet égard, il faut applaudir des initiatives comme celle de Sciences-po.

Enfin, on ne pourra faire longtemps l'impasse sur le problème de la ségrégation par l'habitat. Ne faut-il pas repenser la construction des logements sociaux, l'ouvrir aux promoteurs privés dans certains secteurs, encourager les programmes mixtes ?

La crispation identitaire prend sa source dans le sentiment de relégation et dans la crise du système de promotion sociale. Les solutions exigent des changements de comportement, des prises de conscience, mais aussi une volonté de la part du Gouvernement, des élus locaux et des entreprises. Tant que nous n'aurons pas démontré qu'elles existent, la violence gagnera du terrain.

Ce débat aura montré une grande convergence entre les orateurs qu'ils soient de la majorité ou de l'opposition. Nous devons rechercher un consensus ; j'attends du Gouvernement, dans les mois à venir, la mise en place d'un programme d'équité dans l'accès à l'éducation et à l'emploi. La majorité des Français, j'en suis sûr - un sondage du JDD le prouve - nous suivra dans cette action (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF).

M. Hervé Mariton - Ce débat que le groupe UMP a voulu est bienvenu après la discussion du projet relatif au port de signes religieux à l'école. La loi que nous allons voter cet après-midi est peut-être la dernière chance pour le modèle républicain français mais parce que nous souhaitons que ce ne soit pas une loi de raidissement, il faut poursuivre une politique d'intégration.

Nous avons eu quelque hésitation dans la désignation du débat d'aujourd'hui. Fallait-il parler d'égalité des chances ? La république ne se résume pas à une arithmétique... Il faut parler d'intégration et le lien des deux est opportun.

Les mots ont d'ailleurs évolué au fil du temps. A une époque, il était question d'assimilation. On a ensuite parlé d'intégration. Il ne faudrait pas que tout se résume demain à l'égalité des chances.

L'intégration est une sorte de carré magique alliant générosité, volonté, identité et clarté.

Générosité : l'intégration, c'est d'abord, conformément à la tradition de notre pays, un a priori de bienveillance. Parce que l'histoire de notre pays est celle d'enrichissements successifs : la France est un pays peuplé d'une minorité de Francs...

Volonté, qui doit exister des deux côtés. Volonté de la France d'intégrer, volonté de la personne d'adhérer aux valeurs de la France. Encore faut-il une expression puissante de celles-ci afin de donner l'envie d'adhérer.

Identité : comme nous y invite Alain Finkielkraut, ne soyons pas ingrats à l'égard de notre héritage. L'autoflagellation constante sur l'histoire coloniale de la France va à l'encontre de l'intégration. MM. Douste-Blazy et Leonetti sont d'ailleurs signataires d'une proposition de loi de reconnaissance de l'_uvre de la France en Algérie.

L'intégration doit être toujours possible, mais ne doit pas être vidée de sens : accorder le droit de vote à des citoyens d'autres pays est une fausse bonne idée car ce serait reconnaître l'existence de citoyens de deuxième zone. On est citoyen ou on ne l'est pas ; il ne faut pas aggraver la confrontation entre les cités et la cité.

Clarté, enfin. Mesurons les dégâts qu'ont fait ces expressions allusives : les jeunes, la ville, la politique de la ville. Il faut trouver d'autres mots et faire des choix clairs. J'ai beaucoup apprécié ce qu'a dit Julien Dray, mais regretté que nos collègues Valls et Le Garrec réclament surtout des moyens.

Tout ne réside pas dans les « moyens » car l'intégration est avant tout un processus continu et la modestie qui est de mise dans cette affaire ne nous dispense pas d'un effort pour comprendre ce que cela implique d'exigence (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

Mme Valérie Pecresse - Notre société tend à simplement se reproduire, à se figer. Dans la France de 2004, le niveau de diplôme obtenu par un enfant dépend dans la plupart des cas de celui qu'ont atteint ses parents ! A cette panne de l'ascenseur social s'ajoute, pour ceux qui sont issus de l'immigration, la barrière de leur nom et de leur origine qui les exposent à la discrimination. Un collégien de ZEP n'entrera jamais à Polytechnique, et les familles le savent ! Dans les Yvelines, un enfant malien surdoué, issu d'une famille très nombreuse récemment immigrée et vivant dans un quartier sensible, n'a dû qu'à la mobilisation de ce quartier et de plusieurs maires d'obtenir avec les siens un logement social dans la zone de recrutement d'un grand lycée, seul à même de garantir sa réussite scolaire...

J'ai commencé ma vie professionnelle, il y a quinze ans, comme chargée de mission au Fonds social pour l'insertion des travailleurs immigrés. Le premier ministre s'appelait alors Michel Rocard et l'on croyait à la politique d'intégration, déclarée priorité gouvernementale. C'était l'âge d'or des ZEP et de la politique de la ville, les subventions et autres avantages pleuvaient sur les quartiers difficiles... Mais tout cet argent semblait absorbé par le sable. Les associations s'exténuaient, certains bénévoles faisaient de leur action une profession, d'autres sombraient dans l'amateurisme. Puis l'engouement est passé et l'Etat a oublié son rôle d'impulsion, se défaussant sur les maires et sur les associations de cette mission régalienne. Plus triste : beaucoup d'habitants des quartiers ont fini par ne même plus souhaiter l'intégration...

Je suis heureuse aujourd'hui que le Gouvernement ait décidé de donner un nouvel élan à cette politique, mais nous devons changer radicalement d'optique. Il nous faut agir en faveur des individus pour devenir des chercheurs d'or, des découvreurs de talents ! Chaque enfant a un don, un savoir-faire qu'il faut l'aider à développer. Acceptons d'aller à la recherche, dès l'école primaire, des meilleurs élèves de ZEP, pour les faire échapper à la sectorisation. Permettons-leur de rejoindre le meilleur collège de leur région, en ouvrant des internats, en créant des bourses. En leur donnant accès au meilleur de l'école de la République, à égalité avec les enfants privilégiés, nous formerons une élite issue des quartiers, reconnue et valorisée. Et, quand ces enfants reviendront dans leur famille, ils seront montrés en exemple aux plus jeunes.

On m'objectera que cette politique, vidant les collèges de ZEP de leurs meilleurs éléments, y fera baisser le niveau. Mais, outre qu'il ne s'agira chaque fois que de trois ou quatre élèves, il est toujours possible d'organiser un partenariat entre lycées prestigieux et collèges défavorisés et de développer le soutien scolaire. D'autre part, à la sortie de ces collèges, on pourrait ménager des dérogations similaires en faveur des élèves les plus méritants, ce qui aurait valeur d'incitation pour tous.

On me dira aussi, à l'inverse, que de telles dérogations sont injustes et discriminatoires, au détriment des élèves des établissements « normaux ». Soit, mais les parents des classes moyennes peuvent toujours inscrire leurs enfants dans des écoles privées. Cette politique pourrait même les inciter à les inscrire dans des écoles de ZEP, ce qui contribuerait à plus de mixité sociale.

Je sais que ma proposition est utopiste et élitiste - mais d'un élitisme républicain, inspiré de l'Ecole de la IIIe République. Cessons d'être hypocrites : si Zineddine Zidane joue en équipe de France, ce n'est pas parce qu'il est issu de l'immigration ou qu'il a bénéficié d'une discrimination positive : c'est parce qu'il est le meilleur, et qu'il a été repéré, sélectionné et formé pour cela dès son plus jeune âge. Pourquoi refuser aux bons élèves ce que nous acceptons pour les sportifs ?

Nous devons absolument aider les enfants de l'immigration à briser le plafond de verre qui les empêche de réussir, mais nous n'y parviendrons pas par une politique uniforme et aveugle de quotas. Il y faut la recherche et la promotion de tous ceux qui le méritent par leur talent et par leur travail (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Yves Jego - Avons-nous su et saurons-nous relever les défis de l'intégration pour les étrangers qui vivent sur notre territoire et pour leur enfants ? Cette question prend désormais une importance toute particulière, d'abord parce que nous vivons dans un monde bouleversé, aux contours incertains et fragiles, où le principal clivage n'est plus idéologique mais tend à devenir religieux. La dimension politique que certains souhaitent donner à l'islam ne vient-elle pas éclairer d'un jour nouveau et souvent cru le débat franco-français sur une diversité ethnique et religieuse encore mal acceptée ?

La deuxième raison de cette importance est à rechercher dans la persistance de nos traumatismes post-coloniaux. La France souffre d'un deuil non assumé, dont le « pathos » algérien est le signe le plus visible. Pour beaucoup de nos concitoyens, ce qui fait question n'est pas la capacité de notre République à accueillir les Asiatiques, par exemple, mais uniquement l'immigration issue du monde arabo-islamique et de nos anciennes colonies !

Enfin, la troisième raison de cette importance tient à notre passé politique récent. Pendant trop longtemps, par peur pour les uns et par calcul pour les autres, nous avons laissé ce chantier en jachère, abandonnant le débat à l'extrémisme. En laissant dire n'importe quoi, nous avons encouragé les peurs et fait peu à peu le nid des démagogues. Le fait que le Conseil interministériel pour l'intégration n'ait pas été réuni entre 1990 et 2002 est une illustration de cette lâcheté et de ce vide.

Pour toutes ces raisons, je me réjouis de ce débat et, surtout, des avancées réalisées en vingt mois par ce gouvernement. Cependant, pour répondre aux attentes de nos concitoyens, et donner corps aux espoirs suscités par le discours prononcé par Jacques Chirac à Troyes en octobre 2002, il me paraît essentiel de bien distinguer deux approches qui, bien que complémentaires et indissociables, ne sauraient être confondues. Se pose tout d'abord la question des moyens et de l'efficacité. Grâce au contrat d'accueil et d'intégration, une véritable révolution est en marche pour ce qu'il est convenu d'appeler les primo-arrivants et je plaide pour une amplification de ce dispositif ainsi que pour son extension à tous les étrangers demeurant en France. Dans le même esprit, nous devons mettre au point une méthode pour rendre l'apprentissage de notre langue obligatoire pour toutes celles et ceux qui aspirent à vivre sur notre territoire. Je me réjouis également de la création d'une grande agence nationale de l'accueil et de l'intégration des étrangers qui, à l'image de l'ANPE, pourra, non seulement, coordonner l'action de l'Etat, des associations et des collectivités, mais aussi garantir un suivi statistique et administratif par trop éclaté aujourd'hui.

Tout cela devrait donner plus d'efficacité, de cohérence et de lisibilité aux mesures destinées à garantir les droits des étrangers, mais aussi à exiger de chacun d'entre eux le respect de ses devoirs à l'égard de la République.

Il est cependant un autre aspect du sujet, et cette fois-ci est concernée une population beaucoup plus large que celle issue de l'immigration : je parle de notre ambition de rétablir ce que j'appellerai les mécanismes d'équilibre de la République, afin d'assurer des chances égales à tous. A mérite égal, quels que soient votre origine, votre apparence ou votre quartier de résidence, vos chances devraient être les mêmes d'accéder au logement, à l'emploi, aux grandes écoles, aux médias ou aux responsabilités politiques ! Or, de ce point de vue, la France régresse depuis des années. Comme on l'a dit, « l'ascenseur social » est en panne et celui qui cumule les handicaps en raison de son origine sociale, de son quartier de résidence, de la nationalité de ses parents, de son apparence physique et de son patronyme a toutes raisons de considérer que notre société n'est pas faite pour lui. Dès lors, peut-on sérieusement lui demander de s'intégrer sans qu'il vive cette exigence comme une discrimination supplémentaire ? Ne devrait-il pas légitimement bénéficier d'une sorte de « coup de pouce » ?

Je me garderai bien ici de m'engager dans la guerre des appellations d'origine plus ou moins contrôlée, qui me semble aussi stupide que stérile, quels que soient les mots, ce qui importe, c'est de faire prendre conscience de son retard à ce pays et de susciter la volonté républicaine de permettre à chacun d'exprimer ce qu'il a de meilleur.

Parce que s'intégrer, c'est avant tout croire dans les valeurs de la République et comprendre ce qu'elle peut vous apporter, je suis heureux que ce débat nous permette d'ouvrir de nouveaux horizons, en sorte que demain, à mérite égal, chaque enfant ait réellement les mêmes chances de faire valoir ses talents (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Jean-Jacques Descamps - Il est heureux que ce débat complète celui que nous avons eu sur la laïcité et sur le voile, qui m'avait laissé insatisfait, compte tenu de ce que je constate dans ma circonscription. La loi sur le voile ne peut d'ailleurs résoudre la grande question, à savoir celle de l'intégration de l'islam dans une République à l'équilibre fragile. Les réponses ne peuvent être trouvées que dans l'intégration la plus complète possible des populations issues de l'immigration, pour l'essentiel d'origine maghrébine et de religion musulmane mais de nationalité française.

Pour elles, et à la différence des immigrations polonaise, espagnole et portugaise, l'intégration ne peut être l'assimilation tant les différences culturelles sont fortes. On ne peut non plus envisager sans difficulté un communautarisme à l'image de celui que cultivent, pour d'autres raisons, les immigrés d'origine asiatique, organisés en groupes fortement protégés et apparemment peu susceptibles d'évoluer.

Mais ces communautés n'ont pas à être rejetées si elles reconnaissent les valeurs de leur pays d'accueil.

Le problème des immigrés d'origine maghrébine et de religion musulmane est plus complexe. Encourager le communautarisme serait une erreur. Ces populations « ghettoïsées » sont défavorisées socialement, rejetées, gangrenées par une délinquance qui pollue les quartiers. C'est un cercle vicieux dont elles ont du mal à sortir. Même dans les zones rurales, pourtant épargnées, l'inquiétude est grande et contribue à rendre l'intégration difficile dans tous le pays.

Si l'on encourage le repli, le fossé irait grandissant, au risque de laisser le dernier mot aux extrémistes et aux fondamentalistes, jusqu'à ce que se développe dans nos quartiers une guerre civile plus ou moins larvée, plus ou moins violente.

Il est urgent d'agir, et d'abord par un effort intense de pédagogie et de dialogue. Le Conseil des communautés musulmanes de France est de ce point de vue une structure essentielle.

Nous devons de plus prendre des mesures de discrimination positive sur le plan scolaire, pour l'emploi, l'accession à la propriété. Vous avez engagé cette action, Monsieur le ministre, mais pourquoi ne pas aller plus loin ? Pourquoi ne pas étendre les compétence du ministère de la ville ? Pourquoi ne pas lancer de véritables jumelages entre quartiers riches et défavorisés ?

M. Eric Raoult - Très bonne idée.

M. Jean-Jacques Descamps - La France a été une terre d'asile pendant ces cinquante dernières années. Ces immigrés, dont certains ont combattu pour nous, sont là avec leurs enfants, leur culture, leur religion. Nous leur devons l'intégration, pourvu qu'ils respectent nos lois, notre drapeau, notre Marseillaise. Nous devons les aider à s'adapter à notre mode de vie et à résister aux virus intégristes.

C'est notre honneur de combattre avec eux l'exclusion (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Michel Roumegoux - J'espère que nous voterons nombreux, cet après-midi, le projet de loi relatif à l'application du principe de laïcité. Derrière ce mot se cache une question : comment former des citoyens capables de vivre ensemble dans la seule communauté qui vaille : la République ? Nous ne voulons pas plus renoncer à la laïcité qu'à notre histoire, notre culture, à ce qui reste lorsque l'on a tout oublié de notre passé judéo-chrétien.

Ceux qui choisissent de vivre dans notre pays doivent adhérer à notre modèle national et ne pas imposer ostensiblement ou sournoisement leur mode de vie.

Nous ne pouvons tolérer l'intolérance. Il s'agit pour la représentation nationale de contribuer à la restauration de l'autorité de l'Etat. Depuis vingt ans, les politiques d'intégration ont échoué. Les règles étaient-elles assez claires ? Nous devons les réaffirmer avec force : il ne doit pas y avoir de principes religieux au-dessus de nos lois. Oui à un islam privé, non à un islam politique.

Pour les nouveaux arrivants, le contrat d'accueil et d'intégration me semble très positif. Néanmoins, à nos yeux, la question de l'immigration sélective se pose.

Nous devons lutter contre les discriminations, encourager la promotion sociale, préserver l'égalité des chances, faire admettre que la compétence et le mérite sont préférables à la discrimination positive, favoriser la mixité sociale. J'ai expérimenté, à ce propos, des jardins ouvriers où se mêlent toutes les catégories sociales. C'est un succès.

La France vit une crise de confiance. Les nouveaux Français doivent être sûrs que les Français historiques sont heureux de les accueillir.

A chacun de faire les efforts nécessaires d'attention et de respect. Les inévitables conflits se résolvent mieux entre individus qu'entre groupes. Prenons chaque homme, chaque femme en considération. Les règles doivent être acceptées par tous (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Eric Raoult - Monsieur le ministre, connaissez-vous le Clos Saint-Lazare, à Stains ? C'est depuis 1981, un quartier sensible. J'y étais hier soir, et j'y ai vu le contraire de l'intégration.

Lorsque l'on demande où se trouve le Clos Saint-Lazare, on vous répond : « Quelle partie ? Marocaine, tunisienne, antillaise ? » Sous une école primaire, c'est une salle de sport où l'on vous salue d'un : « Ici, c'est le peuple noir qui fait du sport » ! Plus loin, nous avons rencontré des commerçants, chez qui le drame qu'a vécu la boulangerie de Stains est encore présent.

Le groupe UMP a eu une heureuse initiative en organisant ce débat, car si nous ne voulons pas que notre pays, demain, ressemble à Stains, il est temps d'agir. Jamais le thème du pacte républicain n'a été aussi important.

L'intégration est en panne. Il faut une politique volontariste, avec la République comme horizon. Est-elle toujours capable de jouer son rôle ? Ne se résume-t-elle pas, pour trop de jeunes, à une station de métro ?

Après une permanence à Clichy-sous-Bois ou Montfermeil, une bonne séance de cinéma est souvent nécessaire.

Des taux de chômage qui dépassent la moyenne nationale et qui touchent en premier lieu les jeunes, une fracture urbaine entre l'ouest favorisé et l'est exclu, la montée du communautarisme et du repli identitaire qui alimente les extrémismes politiques et religieux, des discriminations à l'embauche et au logement qui empêchent de nombreux jeunes de vivre comme tout Français.

Je me souviens d'un chef de l'Etat interloqué par les propos d'un prêtre de la banlieue lyonnaise qui lui apprenait qu'on ne peut entrer dans les discothèques quand on a les cheveux frisés.

A Montfermeil et à Clichy-sous-Bois, on subit au quotidien les conséquences d'une politique communiste qui, depuis trente ans, n'a pas compris ce qu'il se passait.

Mais si cette intégration est en panne, c'est aussi parce que, sur les bancs de cet hémicycle, certains se sont évertué à compliquer le débat.

Ce n'est pas le droit de vote que les jeunes d'origine étrangère attendent de nous, mais l'assurance de vivre dans une société libre et harmonieuse, où la dignité sociale leur est reconnue.

C'est une véritable reconnaissance humaine qu'ils attendent, grâce à un travail, un logement, une école pour leurs enfants, et l'espoir de pouvoir quitter un jour leur cité pour un pavillon.

Intégrer par le respect, la dignité et la responsabilité, voilà les trois axes de la politique du Gouvernement - l'intégration, ce sont des gestes, mais surtout des directions.

Tout d'abord, l'intégration sociale.

Il s'agit de redonner à nos banlieues les couleurs du « Bien vivre ensemble », ce qui suppose une rénovation de l'habitat en sortant de l'image des « cités-ghettos ». Jean-Louis Borloo s'y emploie, son grand programme de rénovation urbaine en témoigne.

Il convient par ailleurs de renouer les liens de la solidarité, entre les différentes communautés, mais aussi entre les générations.

Encourageons encore les acteurs associatifs à relayer l'action des élus et des pouvoirs publics.

Surtout, redonnons un sens à l'école. En Seine-Saint-Denis, combien de plans de rattrapage, d'actions volontaires ? L'échec scolaire, l'illettrisme, la violence, le faible nombre d'élèves qualifiés : le grand débat sur l'école a permis d'établir ce diagnostic scolaire, d'écouter les acteurs du monde éducatif et de proposer des solutions.

Réussir l'intégration, c'est réussir l'école.

Un enfant de sixième, dans un collège de Clichy-sous-Bois n'a pas les mêmes chances au départ que celui d'un collège de 7e arrondissement de Paris.

« Donner plus à ceux qui ont moins ». Je dirais même, « donner mieux ».

Ensuite, l'intégration économique. Vous souvenez-vous, Monsieur le ministre, de l'inauguration de la Poste de La Courneuve, où nous avions reçu des _ufs ! En tout état de cause, il y a maintenant une zone franche dans ce quartier, mais personne n'est au courant ! Je vous adresse donc une supplique, faites en sorte que les décisions prises ici soient respectées par les collectivités locales !

J'avais, sous l'impulsion du Premier ministre, Alain Juppé, et du Président de la République, et avec Jean-Claude Gaudin, cherché à redonner vie aux « quartiers défavorisés », grâce au Pacte de relance pour la ville. Le dispositif des zones franches urbaines a ainsi permis entre 1996 et 2001, de créer près de 50 000 emplois, alors que nous n'en espérions pas plus de 10 000.

Ce dispositif partait d'un postulat simple - un jeune de banlieue peut, lui aussi, créer son entreprise, avoir des responsabilités, et redonner espoir à ses voisins de la cité.

Jean-Louis Borloo, à l'instar de son prédécesseur, a repris ce dispositif pour l'améliorer et l'étendre à de nouveaux quartiers.

Enfin, il y a l'intégration politique et culturelle. Monsieur le ministre, le projet de contrat d'intégration, proposé très tôt par le Président de la République, et que vous avez forgé, répond à cet objectif, en rappelant que vivre en France donne des droits, mais impose aussi des devoirs liés à l'appartenance à une culture, un héritage, une communauté de destin, la pratique d'une langue.

Depuis deux ans, vous donnez une réalité au mot « intégration » qui a longtemps été un slogan.

Le Gouvernement mène une nouvelle politique d'intégration, grâce au contrat d'intégration, à la création d'une autorité indépendante de lutte contre les discriminations - longtemps refusée par la gauche et par Mme Aubry -, à la relance de l'activité du Haut Conseil à l'intégration, laissée en sommeil par nos prédécesseurs, mais aujourd'hui animée par Mme Kriegel.

Il y a de nombreuses années, d'autres sont venus d'autres pays, et ils avaient une très belle expression, en yiddish « Heureux comme Dieu, en France ». Sur le chemin d'Israël, des Polonais, des Tchécoslovaques, des Russes s'étaient forgé cette idée du pays qui les accueillait.

Avant de voter le texte sur la laïcité cet après-midi, je souhaite que l'on puisse continuer à être heureux comme Dieu en France (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. le Ministre - Merci à chacun de vous pour la richesse et la profondeur de ce débat. Nous sommes d'accord sur l'essentiel. La France est un pays ouvert ; c'est sa vocation, mais aussi son intérêt. La politique d'intégration doit être refondée sur des critères positifs, et non sur une différenciation qui serait l'antichambre du communautarisme et que, du reste, personne n'a défendu ce matin.

L'école est le premier lieu d'intégration, ce qui justifie tous les efforts entrepris pour renforcer l'autorité des enseignants, assurer le respect du principe de laïcité, et améliorer la formation civique. A cet égard, je suis heureux que l'Assemblée s'apprête à voter de manière quasi consensuelle en faveur de la laïcité. Il fallait un acte collectif et symbolique. La politique de la ville doit être renforcée. Il faut reconstruire les cités, mais, Monsieur Dray, si ces politiques ont eu jusqu'à présent un effet limité, sans doute était-ce dû à une participation insuffisante des collectivités. Le Gouvernement souhaite allier le déterminisme et la décentralisation.

D'autre part, la lutte contre les discriminations au travail doit être sans complaisance. La création d'une autorité indépendante de lutte contre les discriminations est une étape essentielle.

Mais le retour d'une croissance durable, d'une politique économique débarrassée des expédients des emplois publics précaires et de la réduction du temps de travail, est un objectif essentiel. Toutefois, le paramètre économique n'est pas l'alpha et l'oméga de la politique de l'intégration.

Les trois années de croissance exceptionnelle que nous venons de connaître n'ont, en effet, pas permis de relancer l'intégration.

La question de l'intégration de la religion musulmane dans la société française est primordiale, mais elle dépend davantage de ses fidèles que de nos décisions, même si nous avons un rôle à jouer pour la sortie de la marginalité.

A cet égard, un point a été négligé ce matin, celui des influences extérieures, sur la radicalisation d'une partie des musulmans de France.

La refondation de notre politique d'intégration doit être conduite avec détermination. La première étape devait être l'accueil des primo-arrivants, aussi nous sommes-nous concentrés sur la réorganisation du service d'accueil et sur le contrat d'intégration.

La deuxième étape est la mise en place de la Haute autorité de lutte contre les discriminations, la généralisation du parrainage, un accès plus facile à la fonction publique, à la nationalité française, meilleure réponse que le droit de vote aux élections locales. La gauche a parlé ce matin de pacte pour l'intégration. Nous avons engagé l'action.

Ce matin s'est exprimée une volonté commune de mobiliser notre pays en faveur d'une politique d'intégration dont dépend l'avenir d'un pacte républicain qui se confond, depuis deux siècles, avec l'identité même de la France.

C'est bien, ce matin, comme cet après-midi, de notre identité dont il est question (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

FIXATION DE L'ORDRE DU JOUR

M. le Président - L'ordre du jour des séances que l'Assemblée tiendra jusqu'au vendredi 13 février, puis du mardi 24 février au vendredi 5 mars inclus, a été fixé ce matin en Conférence des présidents.

Cet ordre du jour sera annexé au compte rendu.

Prochaine séance, cet après-midi, à 15 heures.

La séance est levée à 12 heures 45.

                      Le Directeur du service
                      des comptes rendus analytiques,

                      François GEORGE

A N N E X E
ORDRE DU JOUR

L'ordre du jour des séances que l'Assemblée tiendra jusqu'au vendredi 13 février puis du mardi 24 février au vendredi 5 mars inclus a été ainsi fixé ce matin en Conférence des présidents :

CET APRÈS-MIDI, à 15 heures, après les questions au Gouvernement, et à 21 heures 30 :

_ Explications de vote et vote, par scrutin public, sur l'ensemble du projet relatif à l'application du principe de laïcité dans les écoles, collèges et lycées publics ;

_ Proposition, adoptée par le Sénat, portant création des communautés aéroportuaires ;

_ Projet relatif aux communications électroniques et aux services de communication audiovisuelle.

MERCREDI 11 FÉVRIER, à 15 heures, après les questions au Gouvernement, et à 21 heures 30 :

_ Eloge funèbre de Marcel CABIDDU ;

_ Explications de vote et vote, par scrutin public, sur le texte de la commission mixte paritaire sur le projet portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité ;

_ Suite du projet relatif aux communications électroniques et aux services de communication audiovisuelle.

JEUDI 12 FÉVRIER, à 9 heures 30 :

_ Proposition de résolution de MM. Jean-Luc WARSMANN et Jean-Louis DEBRÉ modifiant le Règlement en vue d'informer l'Assemblée nationale sur la mise en application des lois ;

(Séance d'initiative parlementaire).

à 15 heures et à 21 heures 30 :

_ Proposition, adoptée par le Sénat, permettant l'inscription sur la liste d'aptitude des élèves administrateurs du Centre national de la fonction publique territoriale (concours externe 2001) ;

_ Suite de l'ordre du jour de la veille.

EVENTUELLEMENT, VENDREDI 13 FÉVRIER, à 9 heures 30 et à 15 heures :

_ Suite de l'ordre du jour de la veille.

MARDI 24 FÉVRIER, à 9 heures 30 :

_ Questions orales sans débat ;

à 15 heures, après les questions au Gouvernement, et à 21 heures 30 :

_ Projet, adopté par le Sénat, relatif aux responsabilités locales.

MERCREDI 25 FÉVRIER, à 15 heures, après les questions au Gouvernement, et à 21 heures 30 :

_ Suite de l'ordre du jour de la veille.

JEUDI 26 FÉVRIER, à 9 heures 30, à 15 heures et à 21 heures 30 :

_ Suite de l'ordre du jour de la veille.

VENDREDI 27 FÉVRIER, à 9 heures 30, à 15 heures et à 21 heures 30 :

_ Suite de l'ordre du jour de la veille.

MARDI 2 MARS, à 9 heures 30 :

_ Séance d'initiative parlementaire ;

à 15 heures, après les questions au Gouvernement, et à 21 heures 30 :

_ Suite du projet, adopté par le Sénat, relatif aux responsabilités locales.

MERCREDI 3 MARS, à 15 heures, après les questions au Gouvernement, et à 21 heures 30 :

_ Eventuellement, texte de la commission mixte paritaire sur le projet relatif à la formation professionnelle tout au long de la vie et au dialogue social ;

_ Suite de l'ordre du jour de la veille.

JEUDI 4 MARS, à 9 heures 30 :

_ Proposition de M. Daniel PAUL et plusieurs de ses collègues, contre la précarité de l'emploi ;

(Séance d'initiative parlementaire)

à 15 heures et à 21 heures 30 :

_ Communication du Médiateur de la République ;

_ Suite de l'ordre du jour de la veille.

VENDREDI 5 MARS, à 9 heures 30, à 15 heures et à 21 heures 30 :

_ Suite de l'ordre du jour de la veille ;

_ Sous réserve de son adoption par le Sénat, projet portant habilitation du Gouvernement à transposer, par ordonnances, des directives communautaires et à mettre en _uvre certaines dispositions du droit communautaire.


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