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Assemblée nationale

COMPTE RENDU
ANALYTIQUE OFFICIEL

Session ordinaire de 2003-2004 - 66ème jour de séance, 168ème séance

2ème SÉANCE DU JEUDI 26 FÉVRIER 2004

PRÉSIDENCE de M. Rudy SALLES

vice-président

Sommaire

RESPONSABILITÉS LOCALES (suite) 2

ARTICLE PREMIER (suite) 2

APRÈS L'ARTICLE PREMIER 3

ART. 2 4

APRÈS L'ART. 2 5

AVANT L'ART. 3 5

ART. 3 6

APRÈS L'ART. 3 8

ART. 4 9

ART. 4 BIS 10

APRÈS L'ART. 4 BIS 10

AVANT L'ART. 5 11

ART. 5 13

ART. 5 BIS 17

APRÈS L'ART. 5 BIS 17

ART. 5 TER 22

ART. 5 QUATER 23

ART.6 24

ART. 7 BIS 27

ART. 8 27

DÉCISION DU CONSEIL
CONSTITUTIONNEL 30

La séance est ouverte à quinze heures.

RESPONSABILITÉS LOCALES (suite)

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par le Sénat, relatif aux responsabilités locales.

ARTICLE PREMIER (suite)

M. Jean-Pierre Balligand - Les grandes métropoles sont aussi les grandes absentes de ce projet. Par l'amendement 640, nous proposons donc que le schéma régional de développement économique tienne compte des conventions passées entre les régions et ces métropoles, s'agissant par exemple de recherche et de développement ou de tertiaire supérieur, toutes activités qui portent en germe le développement économique futur. Cette disposition intéresse M. Queyranne et Mme Gautier, élus du grand Lyon, mais des élus de la majorité aussi, comme le montre l'amendement 1194, identique, de MM. Bur et Juppé.

M. Alain Gest - L'amendement 1194 est défendu.

M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur de la commission des lois - La commission a repoussé ces deux amendements. Le projet donne le rôle de chef de file économique à la région, et il y a d'autant moins lieu de compliquer un dispositif dont M. Balligand a précédemment critiqué la complexité supposée que la commission a, par amendement, réintroduit les groupements de communes à l'article 99A. Les amendements sont donc superfétatoires.

M. Patrick Devedjian, ministre délégué aux libertés locales - Les arguments de votre rapporteur sont pertinents, mais l'idée est bonne. Sagesse.

Les amendements 640 et 1194, mis aux voix, sont adoptés.

M. Jean-Pierre Balligand - L'amendement 639 était de repli. Il tombe.

M. le Rapporteur - L'amendement 292, parce qu'il définit le rôle du schéma régional de développement économique, a fait l'objet d'un large consensus en commission.

M. le Ministre délégué - Avis favorable à cet amendement très raisonnable.

L'amendement 292, mis aux voix, est adopté.

M. Alain Gest - L'amendement 1469 est défendu.

M. le Rapporteur - La commission a exprimé un avis défavorable à l'amendement, dont l'essentiel est satisfait par la rédaction du Sénat.

M. le Ministre délégué - Avis défavorable, car l'obligation de conventionnement introduirait une tutelle de fait de la région sur les autres collectivités.

M. Pascal Clément, président de la commission des lois - Ce qui serait intolérable.

L'amendement 1469, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 293 rectifié est retiré ; une meilleure rédaction sera trouvée au cours de la navette. Quant à l'amendement 294, il tend à apaiser les préoccupations de ceux qui nous font des procès d'intention en prévoyant l'établissement d'un rapport retraçant l'ensemble des sites fournis aux entreprises dans une région donnée.

M. le Ministre délégué - Avis favorable.

M. Philippe Vuilque - Il est regrettable que ce rapport soit communiqué « au représentant de l'Etat » ; cela semble mettre en doute la capacité des collectivités territoriales à traiter d'affaires économiques.

M. le Rapporteur - Cette disposition est prise par souci de cohérence et pour permettre à l'Etat de remplir ses obligations au regard du droit communautaire.

L'amendement 294, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 1536 est défendu.

L'amendement 1536, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. Alain Gest - Les collectivités territoriales doivent avoir un pouvoir de proposition. C'est l'objet de l'amendement 98.

L'amendement 98, accepté par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - Les amendements 295 et 296 sont rédactionnels.

Les amendements 295 et 296, acceptés par le Gouvernement, successivement mis aux voix, sont adoptés.

M. le Rapporteur - L'amendement 298 rectifié est défendu.

L'amendement 298 rectifié, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. Michel Bouvard - L'amendement 942 vise à prendre en compte les surcoûts de construction en zone de montagne. Plutôt que de dénoncer à la télévision les mauvaises conditions de logement des saisonniers, il faut aider les élus à sortir des logiques de zonage qui ne font aucun cas des surcoûts de construction liés à la spécificité des régions montagneuses. Ainsi, les objectifs à atteindre étant fixés en nombre de logements, la région Rhône-Alpes privilégie toujours la construction en ville, parce que moins coûteuse !

MM. Philippe Vuilque et Jean-Louis Dumont - Il a raison !

M. le Rapporteur - Franchement, ce problème bien réel et qui a déjà été évoqué dans le texte relatif au développement des territoires ruraux ne peut être traité à cet article. Avis défavorable.

M. le Ministre délégué - Même avis. Il conviendra plutôt d'en traiter dans le cadre de la réflexion sur l'évolution de la DGF.

M. Jean-Louis Dumont - Il semble qu'il ne soit jamais temps de traiter des vrais problèmes !

L'amendement 942, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 297 est défendu.

L'amendement 297, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

L'article premier, modifié, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L'ARTICLE PREMIER

M. Michel Bouvard - L'amendement 1304 est défendu.

L'amendement 1304, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Rapporteur - Les amendements 299 et 46 identiques, adoptés par la commission à l'initiative de Mme Pecresse, visent à simplifier la procédure de révision du schéma directeur de la région Ile-de-France.

Les amendements 299 et 46, acceptés par le Gouvernement, mis aux voix, sont adoptés.

M. Patrick Balkany - L'amendement 899 vise à transférer du préfet au maire le pouvoir d'autoriser l'ouverture dérogatoire des commerces le dimanche, pour une durée limitée. Cette évolution est tout à fait conforme à l'esprit du texte. J'indique par avance que je retirerai en revanche mes amendements tendant à étendre les possibilités d'ouverture des commerces le dimanche.

M. le Rapporteur - M. Balkany exprime une préoccupation connue de longue date mais qui sera abordée avec plus de profit dans le projet de loi de mobilisation pour l'emploi que défendra François Fillon au printemps. Rejet.

M. le Ministre délégué - J'invite en effet M. Balkany à retirer son amendement car il conviendra plutôt d'examiner son intéressante proposition dans le cadre de la loi Fillon.

M. Patrick Balkany - D'accord pour retirer les amendements relatifs à l'extension des jours d'ouverture autorisés mais je maintiens le 899. Opérant un transfert de compétences du préfet au maire, il trouve parfaitement sa place dans le présent texte.

M. le Ministre délégué - Tout ce qui est favorable à l'emploi mérite d'être abordé mais est-il opportun de traiter du même sujet dans deux textes différents à quelques semaines de distance ?

M. Patrick Balkany - Soyons sérieux ! Mon amendement est parfaitement justifié et je le maintiens.

L'amendement 899, mis aux voix, n'est pas adopté.

L'amendement 900 est retiré.

ART. 2

Mme Janine Jambu - Dans la droite ligne du précédent, cet article mal ficelé vise à dessaisir l'Etat de certaines de ses prérogatives en matière économique, au risque d'aggraver les inégalités territoriales et d'affaiblir encore les prérogatives de la puissance publique dans la sphère économique. En outre, le transfert de crédits envisagé ne pourra intervenir qu'à l'occasion du vote d'une loi de finances. Il est du reste surprenant de constater que le Parlement s'attache à adopter des dispositions sans réelle portée normative alors qu'il accepte sans sourciller d'être ignoré sur des sujets aussi essentiels que l'avenir de la sécurité sociale ! Ensuite, on ne connaît ni la nature, ni le montant des actions relevant aux termes de cet article de la « solidarité nationale » et le flou dans lequel nous laisse le Gouvernement à cet égard n'est pas de nature à nous rassurer. Enfin, la gestion des aides est décentralisée sans que soit rendue disponible la moindre étude d'impact sur les incidences de cette évolution, non plus que sur l'efficacité des dites aides. Une fois encore, le Gouvernement se distingue par son irresponsabilité. 

C'est pourquoi notre amendement 991 tend à supprimer cet article.

M. le Rapporteur - Une fois encore, Mme Jambu expose une philosophie foncièrement centralisatrice que nous ne pouvons nullement partager. La décentralisation des aides considérées, qu'il s'agisse des aides individuelles aux entreprises, de celles au titre du FISAC ou du soutien au développement des entreprises nouvelles porte sur un montant de 288 millions. Nous sommes convaincus que leur gestion au plus près du terrain sera plus efficace qu'un pilotage centralisé. Avis défavorable à l'amendement 991.

L'amendement 991, repoussé par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme Janine Jambu - Les amendements 992 et 993 sont défendus.

Les amendements 992 et 993, repoussés par la commission et par le Gouvernement, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. Serge Poignant, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques - Adopté par la commission des affaires économiques, l'amendement 237 rectifié vise à proposer, à l'instar des aides individuelles, la décentralisation des aides collectives.

La décentralisation des aides à l'innovation et aux transferts technologiques, notamment des crédits de l'ANVAR, serait une excellente chose.

M. le Rapporteur - Voilà l'un des très rares cas où je ne serai pas d'accord avec le rapporteur pour avis. L'Etat doit conserver des prérogatives dans un secteur aussi stratégique que la recherche.

M. le Ministre délégué - Le Président de la République a annoncé une grande loi sur la recherche (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste) dont la situation est actuellement un peu délicate.

M. Jean Le Garrec - Euphémisme !

M. le Ministre délégué - L'ANVAR fonctionne bien. Elle obtient des résultats...

M. Christian Paul - Lesquels ?

M. le Ministre délégué - A l'ANVAR, on trouve ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste) Nous préférerions, plutôt que d'en décentraliser les crédits, amener les régions à conclure des conventions avec elle.

M. Serge Poignant, rapporteur pour avis - Je comprends le souhait du Gouvernement de conserver des possibilités d'intervention dans un secteur aussi stratégique que la recherche. Pour autant, ce transfert des aides collectives ne les lui ferait pas perdre, non plus que celui des aides individuelles ne l'a fait. Je suis prêt à retirer mon amendement, mais je souhaiterais que nous puissions en rediscuter avec vous, Monsieur le ministre, ainsi qu'avec vos collègues de l'industrie et de la recherche.

L'amendement 237 rectifié est retiré.

Mme Janine Jambu - Les conclusions du CIADT de décembre dernier sont tout à fait préoccupantes. Il semble en effet que le Gouvernement souhaite recentrer les contrats de plan Etat-région sur quelques politiques structurantes et raccourcir leur durée d'application. Beaucoup d'élus locaux craignent que cela n'augure de désengagements supplémentaires de la part de l'Etat, inquiétude d'autant plus légitime que l'Etat ne respecte jamais en temps et en heure ses engagements.

La disparition programmée des contrats de plan Etat-région signifierait l'abandon par l'Etat de toute politique d'aménagement du territoire. C'est pour éviter cet abandon que nous avons déposé l'amendement 994. Celui-ci rappelle que « l'Etat mène, en partenariat avec les collectivités locales et notamment les régions, une politique d'aménagement du territoire dont le support privilégié est le contrat de plan Etat-région. »

M. le Rapporteur - Avis défavorable à ce psittacisme juridique. Point n'est besoin de répéter dans la loi ce qui y figure déjà.

M. le Ministre délégué - Même avis.

M. Philippe Vuilque - Il y a ce que dit la loi et ce que l'on constate sur le terrain ! L'Etat se désengage bien de la politique d'aménagement du territoire. Ce rappel me paraît donc tout à fait salutaire.

M. Jean Le Garrec - Je soutiens moi aussi cet amendement. L'Etat a très vite pris de mauvaises habitudes. Les contrats de plan Etat-région sont devenus plutôt des fonds de concours où l'Etat, sollicitant la participation des collectivités, « met aux enchères » certains projets d'aménagement, qu'une véritable programmation.

L'amendement 994, mis aux voix, n'est pas adopté.

L'article 2, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L'ART. 2

M. le Rapporteur - Je retire l'amendement 1537.

L'amendement 1537 est retiré.

AVANT L'ART. 3

M. le Rapporteur - L'amendement 1564 est de coordination.

L'amendement 1564, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

ART. 3

Mme Janine Jambu - Dans un contexte de réduction des crédits budgétaires du tourisme, le transfert aux régions et aux départements des compétences en ce domaine ne se justifie pas. La décentralisation de l'instruction des demandes d'agrément et de classement des équipements pourra aboutir à des traitements différents selon les départements, au risque de rendre illisibles ces agréments et ces classements pour les touristes. Tout comme la Fédération nationale des offices de tourisme et syndicats d'initiative, nous pensons que cette décentralisation risque de renforcer le lobby, déjà puissant, des acteurs du tourisme et de conduire à des dérives clientélistes, auxquelles le texte ne donne pour l'heure aucun moyen de remédier.

Le rôle de l'Etat en matière de tourisme se limitera à la promotion touristique de notre pays, à la valorisation de son image à l'étranger et à une fonction régulatrice en matière d'agréments et de classements. C'est tout à fait insuffisant. Après la mauvaise saison touristique 2003, ce désengagement rendra le secteur du tourisme encore plus dépendant des aléas de la conjoncture et du caractère cyclique de ses activités. Nos entreprises du tourisme ont par exemple beaucoup souffert de la dégradation de la conjoncture en Allemagne et des fluctuations des parités monétaires.

Est-ce à dire enfin que l'Etat abandonne toute ambition en matière de tourisme social ? Plus de 40 % de nos concitoyens ne partent pourtant toujours pas en vacances. Pour remédier à cette exclusion de quelque 24 millions de personnes, une politique ambitieuse et continue serait pourtant nécessaire de la part de l'Etat. A cet égard, nous regrettons que les efforts engagés par nos collègues ministres chargés du tourisme, Michelle Demessine et Jacques Brunhes, sous le précédent gouvernement n'aient pas été poursuivis.

Pour toutes ces raisons, nous demandons par l'amendement 995 la suppression de l'article 3.

M. Philippe Vuilque - L'amendement 533 tend lui aussi à supprimer l'article. L'application de la loi du 23 décembre 1992 donne toute satisfaction, malgré la baisse drastique de cinq millions d'euros du dernier budget du tourisme. Le transfert aux régions de l'ensemble des compétences en matière de tourisme va accentuer les inégalités dans un secteur qui a, dans certaines régions, un impact économique considérable et participe étroitement au développement local. L'amendement 641 est identique.

M. le Rapporteur - Défavorable. S'agissant de compétences plurielles, il a paru utile de recentrer le rôle de l'Etat, qui est de concevoir et de garantir l'intérêt général. La région est chef de file. Enfin certaines mises en _uvre peuvent se faire à l'échelon départemental ou communal. Nous sommes donc opposés aux amendements de suppression.

Quant à l'amendement 300 de la commission, il précise simplement cette compétence de l'Etat ; tout le reste en découle.

M. le Ministre délégué - Défavorable à la suppression, favorable à l'amendement 300.

Les amendements 533, 641 et 995, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

L'amendement 300, mis aux voix, est adopté.

M. Philippe Vuilque - L'amendement 643 a pour objet de compléter l'article 2 de la loi de 1992 par l'alinéa suivant : « Les collectivités territoriales conduisent, dans le cadre de leurs compétences propres et de façon coordonnée, des politiques dans le domaine du tourisme ». Certes, l'alinéa 2° de l'article 3 du projet abroge l'article 3 de la loi de 1992 précisant le rôle des collectivités territoriales en matière de tourisme. Mais il convient de rappeler ici ce rôle : il serait inopportun d'en faire disparaître la mention dans un texte qui entend précisément renforcer les compétences des collectivités.

L'amendement 643, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Philippe Vuilque - L'amendement 644 est défendu.

L'amendement 644, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Philippe Vuilque - L'amendement 645 corrigé a pour objet d'introduire de la cohérence et de la lisibilité dans l'exercice de la compétence tourisme. Alors que la compétence principale de l'animation touristique est transférée à la région, il est paradoxal que le département se voie transférer une compétence réglementaire sur l'agrément et le classement des organismes de tourisme.

M. le Rapporteur - Défavorable.

M. le Ministre délégué - Même avis : l'auteur de l'amendement ne semble pas tenir compte du texte tel que l'a voté le Sénat.

L'amendement 645 corrigé, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Philippe Vuilque - L'amendement 642 est défendu.

L'amendement 642, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Philippe Vuilque - L'amendement 534 a pour objet de récrire ainsi le 4° de l'article : « L'article 5 est complété par un alinéa ainsi rédigé : le département détermine les règles de procédure relatives à l'instruction des demandes d'agrément et de classement des équipements et organismes de tourisme ». En transférant au département cette mission réglementaire, nous conforterons cette collectivité dans son rôle de proximité. Les opérations touristiques sont souvent liées à des projets de développement local : l'outil départemental est le plus pertinent pour évaluer des micro-projets. La cohérence régionale continuerait d'être assurée dans le cadre du schéma régional de développement du tourisme et des loisirs prévu à l'article 3 de la loi du 3 janvier 1987.

M. le Rapporteur - Défavorable. J'ai du mal à suivre la cohérence de M. Vuilque : à l'amendement 645 il demande que l'agrément soit une compétence de la région, au 642 de l'Etat, et ici du département...

M. le Ministre délégué - C'est très habile : il est sûr d'avoir raison à un moment ou à un autre ! Défavorable.

L'amendement 534, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Michel Bouvard - L'amendement 944 est important, car la procédure de classement détermine toute la politique de la qualité. Le Gouvernement, avec raison, avait prévu que le classement des lits touristiques serait élaboré au plus près du terrain, donc par le département. La géographie touristique de notre pays plaide en ce sens : en Rhône-Alpes, par exemple, 90 % de la capacité d'hébergement touristique sont dans les Alpes, et il n'est pas forcément judicieux de les gérer depuis Lyon. Même chose en Provence-Alpes-Côte d'Azur. Vous observerez que l'amendement est signé par un représentant de chaque département du massif alpin, notamment le président du conseil général des Alpes-Maritimes. C'est une mesure de cohérence : la politique de qualité doit être gérée au plus près du terrain. C'est aussi une mesure d'économie pour le contribuable : la gestion du classement par les services régionaux n'est sans doute pas la solution la moins coûteuse. Nous souhaitons donc revenir à la rédaction initiale du Gouvernement.

M. le Rapporteur - Défavorable.

M. le Ministre délégué - Je ne peux pas dire que je ne comprends pas la position de M. Bouvard, puisqu'elle a été celle du Gouvernement. Celui-ci toutefois, après un débat nourri, a fini par se rallier à l'amendement du Sénat, et, ne souhaitant pas passer pour une girouette, je reste sur cette position. D'autant que l'ADF a également pesé en ce sens. Je pense que ce problème se règlera en CMP.

M. Michel Bouvard - Il faut pour cela qu'il n'y ait pas un vote conforme, donc que l'amendement soit adopté ! Ce serait donner un mauvais signal que d'éloigner la procédure de classement des territoires touristiques.

M. le Ministre délégué - Encore une fois, ce qui a fini par entraîner la conviction du Gouvernement, c'est la prise de position de l'association des présidents de conseils généraux.

M. Michel Bouvard - Mais nous, nous représentons 90 % des lits touristiques du quart sud-est de la France.

L'amendement 944, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 301 de la commission est de coordination. Il mérite toutefois un mot d'explication. Il ne fait que coordonner l'article 10 de la loi de 1992 sur le tourisme avec le présent projet, sans en remettre en cause le fond. L'abrogation de l'article 10 se justifie parce qu'à l'article 4 du projet les 4° et 5° en reprennent une série de dispositions ; de même ils préservent le principe du libre choix du statut juridique de l'office par les communes. Seul le 6° de la loi n'est pas repris dans ce projet : or je proposerai un amendement pour y remédier. Il n'y a donc pas de modification sur le fond, mais une simplification.

M. le Ministre délégué - Favorable. Ce pourrait être un amendement de M. Balligand, qui déplorait tout à l'heure l'ambiguïté et la complexité des lois. Il met fin en effet à l'ambiguïté qui existait entre l'article 10 de la loi de 1992, comportant des dispositions sur les offices de tourisme, et l'article 2231-9 du code général des collectivités territoriales, et il introduit de la lisibilité.

M. Jean-Pierre Balligand - Cet amendement a pourtant suscité un peu d'émoi. Il comporte en effet deux aspects. C'est d'abord la modification de l'article 2231-12 du code général des collectivités territoriales, qui change la composition du comité de direction : celui-ci ne sera plus constitué majoritairement de professionnels, mais d'élus, et là il y a un problème. Pour ma part je ne me battrai pas sur l'article 10, mais sur l'autre aspect : si l'on abroge totalement l'article 10, l'échelon communal semble disparaître du paysage touristique. Il faudrait une rédaction qui préserve sa place dans le champ territorial des compétences touristiques. C'est donc la réécriture de l'article 2231-12 qui pose problème.

Demander que les élus soient majoritaires, dans les offices de tourisme créés sous forme d'EPIC, c'est retenir la même règle que pour les régies de service public à caractère industriel et commercial. Pourquoi cette uniformisation à tout prix ? Il n'est pas sans risque d'écarter les professions du tourisme de la direction des offices, qui sont avant tout des outils de développement de l'activité touristique locale. Les communes qui souhaitent assurer un contrôle maximal peuvent actuellement choisir la régie ou la gestion directe, qu'il s'agisse de SPA ou de SPIC. Laissons celles qui souhaitent une gestion déléguée, mais professionnelle, faire le choix de l'EPIC, jusque là réservé aux stations classées, sans autre contrainte : il est dommage que la réécriture de l'article L. 2231-12 proposée à l'article 4 limite les possibilités offertes aux communes d'adapter le type de gestion de leur office de tourisme aux conditions particulières du tourisme local. N'oublions pas que les offices sont avant tout au service de la clientèle, et non des élus.

M. le Ministre délégué - Vous êtes sur la voie de l'ultralibéralisme !

M. le Rapporteur - Monsieur Balligand, vous venez de défendre l'article 4, selon lequel « une commune ou un groupement de collectivités peut (...) instituer un organisme chargé de la promotion du tourisme, dénommé office du tourisme, dont le statut juridique et les modalités d'organisation sont déterminés par le conseil municipal ou l'organe délibérant ».

Il y aura liberté de choix du statut ; nous ajoutons simplement que dans le cas où la forme de l'EPIC sera retenue, les élus seront majoritaires, mais sur tout le reste il n'y a aucun changement.

M. le Ministre délégué - La commune pourra aussi nommer des non-élus.

L'amendement 301, mis aux voix, est adopté.

L'article 3 modifié, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L'ART. 3

M. le Rapporteur - L'amendement 1571 rectifié est de coordination.

L'amendement 1571 rectifié, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. Patrick Balkany - Monsieur le ministre, vous nous avez expliqué que tous les maires étaient incompétents...

M. le Ministre délégué - Je n'ai pas dit cela !

M. Patrick Balkany - Leur refuser la responsabilité de décisions concernant le commerce dans leurs communes pour la laisser au préfet, c'est considérer qu'ils sont incompétents ! Mais peut-être les maires de communes touristiques le sont-ils moins que les autres... C'est pourquoi je propose par mon amendement 901 qu'à eux, au moins, on transfère cette responsabilité.

M. Michel Bouvard - C'est un bon amendement !

M. le Rapporteur - Défavorable car cela pose un vrai problème technique.

M. le Ministre délégué - Je suis favorable au principe de ce transfert, je l'ai dit, mais il n'a pas sa place dans ce texte.

M. Patrick Balkany - C'est pourtant un texte sur les responsabilités locales !

L'amendement 901, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Christian Paul - Jamais un amendement Balkany ne sera adopté !

M. Patrick Balkany - Rappel au Règlement ! Il est inadmissible de dire cela !

M. le Président - Les faits personnels sont renvoyés en fin de séance.

M. Patrick Balkany - Nous sommes ici pour juger des textes, pas pour juger des collègues !

ART. 4

Mme Janine Jambu - Cet article fait partie de ceux sur lesquels le Gouvernement comptait légiférer par ordonnance. Nous ne pouvons que nous féliciter du fait que le Sénat l'ait refusé, mais, malheureusement, les dispositions qu'il a proposées ne sont pas bonnes.

Plutôt que de rechercher une meilleure complémentarité entre les actions menées par les régions, les départements et les communes, il a préféré favoriser l'émergence de superstructures communales. Les compétences données aux offices de tourisme sont en effet très importantes, et malheureusement commerciales. Alors que 94 % des offices de tourisme sont actuellement organisés sous forme associative, le texte voté par les sénateurs encourage leur développement sous forme d'établissements publics industriels et commerciaux à caractère lucratif. Telle n'est pas notre conception de l'organisation locale du tourisme.

M. le Rapporteur - Vous n'avez pas lu le texte !

M. Augustin Bonrepaux - Que reste-t-il de la compétence de l'Etat en matière de tourisme ? Il ne définit plus la politique nationale du tourisme. Que devient l'agence française de l'ingénierie touristique ? Que deviennent les délégués régionaux ? Si on les supprime, on va bien sûr faire des économies mais est-il alors nécessaire de conserver un ministère du tourisme ?

Mme Janine Jambu - L'amendement 996 vise à supprimer l'article. Nous sommes opposés à la transformation des offices de tourisme en EPIC.

M. le Rapporteur - Je voudrais rappeler très respectueusement à Mme Jambu qu'il n'est nullement question de rendre la transformation des offices de tourisme en EPIC obligatoire. Ils peuvent également prendre la forme d'une association, d'une régie ou d'une société d'économie mixte. La liberté des communes est donc totale. Avis défavorable.

M. le Ministre délégué - La liberté des communes est même étendue ! Elles ont une possibilité de plus dans leur panoplie ! Avis défavorable.

L'amendement 996, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 615 est défendu. La commission y est favorable.

M. le Ministre délégué - Sagesse.

L'amendement 615, mis aux voix, est adopté.

Mme Janine Jambu - L'amendement 997 supprime le V de l'article, qui exprime une conception particulièrement mercantile de l'activité touristique.

M. le Rapporteur - Si on leur enlève l'accueil et l'information des touristes, la promotion de la commune et la coordination des partenaires, à quoi serviront donc les offices de tourisme ? Avis défavorable.

L'amendement 997, repoussé par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 616 est défendu. La commission lui a donné un avis favorable.

M. le Ministre délégué - Sagesse.

L'amendement 616, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 1538 est de conséquence.

L'amendement 1538, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 302 deuxième rectification est défendu.

L'amendement 302 deuxième rectification, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 303 corrige une erreur matérielle.

L'amendement 303, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

L'article 4, modifié, mis aux voix, est adopté.

ART. 4 BIS

M. le Rapporteur - Le Sénat a introduit une disposition favorable à la Guyane que nous comprenons parfaitement, mais il est nécessaire de circonscrire son champ afin d'éviter des effets pervers. C'est l'objet de l'amendement 305.

L'amendement 305, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

L'article 4 bis, ainsi modifié, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L'ART. 4 BIS

M. Michel Bouvard - Lors de la loi de finances pour 2002, le Parlement avait adopté à l'unanimité une modernisation de la taxe de séjour. Ce dispositif avait été préparé par une mission d'information, que j'avais conduite, à la suite d'une large concertation avec les professionnels, les associations d'élus, la direction générale des collectivités locales, dont j'ai pu vérifier à cette occasion l'ouverture et la capacité de dialogue, et avec la direction du tourisme. Chaque loi de finances étant déférée devant le Conseil constitutionnel par l'opposition du moment, celui-ci n'a validé que les articles qui relevaient de la stricte logique budgétaire. Le reste de la réforme a été considéré comme un cavalier qui n'avait rien à faire dans une loi de finances. Mais depuis, aucun texte de loi adapté ne nous a permis de rétablir ces dispositions. C'est ce que vous proposent les amendements 931, 932 et 933. La perception de la taxe de séjour est un exercice délicat, qui donne régulièrement lieu à des contestations. La réforme que vous aviez acceptée améliorait la cohérence du dispositif mais aussi sa transparence, et incitait les professionnels à mieux contribuer à la perception de la taxe.

Enfin, puisqu'il a été question des EPIC, je précise qu'il est tout à fait logique que les élus puissent être majoritaires dans un tel établissement puisque c'est lui qui, automatiquement, encaisse la taxe de séjour.

M. le Rapporteur - La commission a trouvé ces trois amendements très pertinents. Elle suggère simplement de modifier la rédaction de la dernière phrase du 931, qui deviendrait : « l'accueil et l'information des touristes ainsi que l'animation et la promotion touristique ».

M. Michel Bouvard - J'accepte.

M. le Rapporteur - Avis favorable donc sur les trois amendements.

M. le Ministre délégué - J'aurai un avis plus nuancé. L'amendement 931 a pour effet de restreindre le champ des dépenses auxquelles les collectivités locales peuvent affecter la taxe. Il me paraît donc contraire au principe de libre administration et à l'esprit du texte, ce pourquoi j'y suis plutôt défavorable. L'amendement 932 relatif aux mesures de publicité me paraît quelque peu bureaucratique, mais la transparence est toujours un bon objectif. Sagesse. Enfin, mentionner les augmentations de tarif dans le rapport sera utile et je suis donc favorable à l'amendement 933.

M. Michel Bouvard - La mission d'information avait constaté que l'utilisation des fonds provenant de la taxe de séjour était parfois sans lien réel avec le tourisme : achat de matériel de jardinage, par exemple...

M. le Ministre délégué - Si c'est pour améliorer les espaces verts de la commune !

M. Michel Bouvard - Le rapport de la mission donne d'autres exemples peu défendables... Ce n'est pas comme cela que l'on peut inciter les professionnels du tourisme à améliorer la perception de la taxe ! La transparence du dispositif passe également par le recentrage de l'utilisation des fonds. La déperdition est aujourd'hui importante.

M. Augustin Bonrepaux - Ces amendements sont justifiés. La taxe de séjour ne doit pas être confondue avec une recette ordinaire et intégrée peu ou prou dans le potentiel budgétaire. Elle doit être strictement affectée et servir l'accueil, l'information, l'animation et la promotion touristique. En outre, la population et les touristes doivent être informés de l'utilisation de cette taxe. L'amendement 933 permettrait donc de mieux faire accepter cette taxe de séjour, qui n'est pas facile à instituer ou à prélever.

L'amendement 931 rectifié, mis aux voix, est adopté.

M. Michel Bouvard - Je voudrais souligner la nécessité d'améliorer l'information des collectivités locales sur la perception de la taxe de séjour. Je suis extrêmement choqué que des éditions privées leur proposent un « guide pratique du gestionnaire de la taxe de séjour », commercialisé à 238 € ! C'est le travail du Gouvernement de les informer et il n'est pas normal que des officines s'engraissent de la sorte.

M. le Ministre délégué - La liberté du commerce est un principe intangible, mais les mêmes informations sont disponibles gratuitement auprès de la DGCL - à un prix, donc, beaucoup plus modique, vous en conviendrez (Sourires).

Les amendements 932 et 933, successivement mis aux voix, sont adoptés.

AVANT L'ART. 5

M. Christian Paul - Si vous le permettez, Monsieur le président, la défense des amendements 1485 et 1486 aura valeur d'intervention sur l'article 5, car nous abordons le volet « formation professionnelle » du projet et deux visions s'opposent. Vous proposez en effet par ce texte le désengagement total de l'Etat en cette matière par un transfert de compétence aux régions dont la compensation suscite une vive inquiétude. On a pu constater que la loi de finances pour 2003 attribuait aux régions une dotation destinée à compenser le transfert de l'apprentissage notoirement inférieure à ce qu'avait été l'investissement de l'Etat jusqu'alors. Par ailleurs, le budget de M. Fillon a été tellement comprimé en 2004 que si l'on prend cette année de vaches maigres comme année de référence, il est certain que les régions n'auront pas les moyens de financer la formation professionnelle comme il le faudrait. Enfin, votre vision étant exclusivement celle du marché, vous allez livrer la formation professionnelle au seul jeu de la concurrence, vous en ferez une jungle.

Il existe une autre vision, que traduisent nos amendements. Nous considérons pour notre part que l'Etat doit conserver une compétence en cette matière, ainsi qu'une capacité d'orientation, d'expertise et de péréquation nationale. Le ministre des affaires sociales constate la pénurie de personnel qualifié dans certains secteurs ; quelle solution nationale trouvera-t-il si l'Etat ne conserve aucune responsabilité en matière de formation professionnelle ? Il faut maintenir une compétence partagée entre les acteurs publics et les entreprises privées qui ont, bien sûr, un rôle à jouer. Voilà pourquoi l'amendement 1485 tend à rappeler la nécessité d'une politique nationale de formation professionnelle et d'apprentissage dont l'Etat est le garant. Par l'amendement 1486, il est précisé que l'Etat continue de fixer la rémunération des stagiaires.

M. le Rapporteur - Nous considérons en effet que la formation professionnelle doit être décentralisée et que, cette compétence étant transférée aux régions, l'Etat doit conserver une compétence résiduelle. Voilà pourquoi la commission a repoussé les amendements, les estimant contraires à l'esprit décentralisateur du texte.

M. Christian Paul - Mais pas du tout !

M. le Rapporteur - Il serait toutefois souhaitable que le ministre précise la notion de compétence résiduelle de l'Etat qui a fait l'objet de longs débats au Sénat.

M. le Ministre délégué - Le Gouvernement est défavorable aux deux amendements car il est favorable à la décentralisation...

M. Christian Paul - Mais nous aussi !

M. le Ministre délégué - Oui, comme les souverainistes sont favorables à l'Europe ! (Protestations sur les bancs du groupe socialiste) La formation professionnelle doit être du ressort des régions car les problèmes d'emploi diffèrent selon les bassins et appellent des solutions adaptées. Vouloir rappeler ce qui est inscrit en toutes lettres dans la Constitution tient du psittacisme juridique (Protestations sur les bancs du groupe socialiste). S'agissant de la rémunération des stagiaires, l'Etat, comme c'est son rôle, fixe un seuil minimum mais il ne lui appartient pas de faire davantage. Prétendre traiter uniformément ce qui est différent, c'est de l'aveuglement.

M. Christian Paul - Je suis effrayé de vous entendre dire que rappeler le rôle de l'Etat serait du « psittacisme juridique » et tout aussi effrayé d'entendre le rapporteur parler du rôle « résiduel » de l'Etat. Ce vocabulaire en dit long sur votre volonté de livrer la formation professionnelle au seul jeu du marché. Mais alors soyez cohérents, et dites aussi que l'Etat abdique toute responsabilité en matière de politique de l'emploi ! L'émiettage que vous préparez rendra impossible tout pilotage national.

M. Pierre Albertini - Je ne crois pas qu'il soit dans les intentions de quiconque de dessaisir l'Etat de ses compétences en matière de cadrage...

M. Christian Paul - Le rapporteur a parlé de compétences « résiduelles »...

Pierre Albertini - Les pays dont la politique de l'emploi s'est révélée la plus efficace sont ceux, tels les Pays Bas ou la Suède, qui conduisent les actions de formation professionnelle au plus près du terrain, à l'échelon local. Ne persistons pas dans l'erreur de concevoir des systèmes tirés au cordeau car ils sont souvent parfaitement inefficaces. La proximité est un gage de la réussite des actions de formation. L'Etat doit conserver une responsabilité d'ensemble mais les actions doivent être régionales.

M. Xavier de Roux - Très bien !

M. Dominique Tian, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles - Notre commission n'a pas été insensible aux arguments de M. Christian Paul. Il convient sans doute en effet de préciser la notion de compétences résiduelles, ainsi que celle de publics spécifiques. S'agissant de la politique de l'emploi, il demeure évident qu'il revient à l'Etat d'en fixer les grandes orientations.

M. Christian Paul - Je remercie M. Tian de développer une vision plus nuancée - et pour tout dire moins caricaturale - que MM. Daubresse ou Devedjian. En matière de formation, le débat n'est pas de savoir s'il faut tout confier à l'Etat ou tout à la région. Nous sommes du reste tout à fait favorables à ce que la formation professionnelle devienne une compétence de droit commun de la région. Et ce n'est pas faire preuve de jacobinisme que de considérer qu'il faut conserver à l'Etat une fonction de cadrage et de péréquation des moyens. Mais alors, on ne peut parler de compétences « résiduelles »... Nos amendements soutiennent par conséquent une vision républicaine - et non étatique - de la formation.

M. Xavier de Roux - Vous parlez tout de même de conserver à l'Etat un pouvoir de contrôle du bon usage des fonds publics dévolus aux actions de formation. L'Etat pourra donc toujours intervenir dans les systèmes locaux de formation...

M. le Rapporteur - Bien sûr ! C'est une vision centralisatrice, voire re-centralisatrice !

M. Christian Paul - Dans vos propres rangs - et je pense en particulier à M. Ueberschlag -, certains plaident avec la dernière énergie pour que l'on contrôle plus efficacement les fonds dévolus aux actions de formation, lesquels représentent chaque année plusieurs milliards d'euros.

M. Xavier de Roux - Soyez plus nuancé. Il faut distinguer les situations selon l'origine et la destination des crédits !

Les amendements 1485 et 1486, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. Alain Gest - L'amendement 912 de M. Mariani est défendu.

M. le Rapporteur - La commission a considéré qu'il s'agissait d'une proposition intéressante, même si elle relevait plutôt du domaine réglementaire.

M. le Ministre délégué - Le Gouvernement est tout à fait favorable à cet amendement.

L'amendement 912, mis aux voix, est adopté.

ART. 5

Mme Janine Jambu - Notre amendement 998 vise à supprimer cet article car nous désapprouvons le principe même du transfert aux régions de toutes les compétences en matière de formation. Seule une action publique menée au plan national peut garantir l'égal accès de tous à la formation professionnelle tout au long de la vie. En élargissant à l'ensemble des publics la responsabilité des régions en matière de formation, le présent article ne se borne pas à poursuivre dans la logique engagée en 1983 et il va bien au-delà des dispositions de la loi quinquennale de 1993 relative à la formation des jeunes. Si la région devient le pilote de droit commun de la formation professionnelle, comment l'Etat pourra-t-il remplir sa mission de régulateur et de garant de la cohérence de la politique de formation ? C'est parce que nous voulons que l'Etat conserve un rôle essentiel en matière d'insertion, d'emploi et de formation que nous proposons la suppression de cet article.

L'amendement 998, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Michel Bouvard - Par mon amendement 41, je propose que la politique régionale de formation prenne effectivement en compte les formations biqualifiantes permettant l'exercice de la pluriactivité dans les territoires où il est indispensable de posséder au moins deux métiers pour vivre toute l'année.

M. le Rapporteur - Défavorable car une disposition aussi contingente ne manquerait pas d'affaiblir un article que nous avons voulu de portée très générale.

M. le Ministre délégué - Même avis. Faisons confiance aux régions pour définir la politique de formation la mieux adaptée aux réalités locales.

M. Michel Bouvard - Je comprends ces arguments mais je ne suis pas sûr que l'on songe spontanément au problème essentiel des formations biqualifiantes. Il me semble donc utile d'en traiter dans le texte.

M. Christian Paul - Cet exemple montre toute l'utilité de maintenir une politique nationale de formation, fixant des orientations valables pour l'ensemble du territoire. Le moins que l'on puisse dire, c'est que le bilan des différentes régions en matière de formation est des plus contrastés...

Certaines régions exercent parfaitement cette responsabilité, d'autres beaucoup moins bien. Ainsi, après six ans, la région Bourgogne n'a-t-elle toujours pas élaboré de plan régional de développement des formations ! Je ne verrais donc, pour ma part, aucune objection à ce que la loi rende obligatoire l'élaboration d'un tel schéma. Ce serait peut-être même le seul moyen d'arriver à en avoir un en Bourgogne !

M. Pierre Albertini - Si la loi devait prendre en compte les particularités de tous nos territoires, elle contiendrait une infinité de détails et perdrait en valeur normative. Sur cette pente, pourquoi d'ailleurs ne tiendrait-elle pas compte également des diversités d'opinions politiques, philosophiques, religieuses... ? La reconnaissance des spécificités des territoires, souhait légitime de notre collègue Bouvard, c'est au mode de scrutin de la garantir en veillant à ce que soient représentés d'un côté, les hommes, d'un autre côté les territoires.

Les territoires de montagne ne sont pas seuls à présenter des caractères très spécifiques. Une des particularités de notre pays est d'avoir, avec 110 habitants/km², une densité moyenne très inférieure à celle de ses voisins. Notre population est de surcroît très inégalement répartie sur l'ensemble du territoire, ce qui aboutit à des situations très diverses.

M. Xavier de Roux - Il faudrait que notre collègue précise ce qu'il entend par « formations biqualifiantes permettant l'exercice de la pluriactivité ». Il est à craindre sinon que, dans quelques années, la formulation ne paraisse bien obscure à ceux qui auront à appliquer la loi !

L'amendement 41, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme Janine Jambu - En même temps que l'amendement 999, je défends tous les amendements tendant à garantir le droit d'accès à une formation sur l'ensemble du territoire. Tel qu'actuellement rédigé, le quatrième alinéa de l'article L 214-12 du code de l'éducation, objet du I de l'article 5, n'est pas satisfaisant. Si, aux termes de l'exposé des motifs, les formations mises en place par les régions sont accessibles à tous les stagiaires, sans discrimination, d'origine géographique notamment, le texte de l'article est moins clair, laissant place à des critères géographiques malvenus, qui seront source de rigidités. La notion de proximité, votre maître mot, n'est pas nécessairement la plus adaptée en matière de formation professionnelle. La nécessité de l'accord préalable de la région d'accueil du stagiaire, si celui-ci n'en est pas originaire, entraînera des lourdeurs. Enfin, il peut être plus facile pour un stagiaire de suivre une formation dans une ville proche de chez lui, même si elle est située dans une autre région administrative - ce peut être le cas dans des régions limitrophes - que dans une ville de sa région, située à plusieurs centaines de kilomètres. Quel que soit le degré d'éloignement à l'emploi, le niveau de formation, le lieu de résidence du demandeur d'emploi, la région assure l'accueil en formation de la population active dans son ressort ou dans une autre région. Tel est ce que nous demandons par notre amendement 999.

M. le Rapporteur - La commission l'a repoussé. Le Sénat a déjà adopté un amendement prévoyant que les régions sont tenues d'assurer les formations sans considération d'origine géographique des stagiaires.

M. le Ministre délégué - Même avis.

L'amendement 999, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Christian Paul - Notre amendement 1487 tend à créer un fonds national de péréquation en matière de formation professionnelle. Il existe aujourd'hui de profondes disparités régionales, notamment en matière d'implantation d'établissements de l'AFPA, de GRETA..., fruit de l'histoire, qu'il serait impossible de combler autrement. Nous ne sommes pas opposés au principe de la décentralisation de la formation professionnelle mais en combattons résolument les modalités actuelles, en particulier l'absence de péréquation.

Comment s'organiseront les formations interrégionales ? Vous parlez de signer des conventions entre régions. Quelle usine à gaz ! La création d'un fonds de péréquation serait beaucoup plus simple. Comment les stagiaires seront-ils accueillis lorsqu'ils voudront ou devront suivre une formation dans une autre région que la leur ? Je vous rappelle que c'est votre collègue Pierre-André Périssol qui, dans son rapport, préconisait qu'il fallait « garantir aux stagiaires l'accès aux formations nécessaires dans toutes les régions, quel que soit leur degré d'éloignement à l'emploi, leur niveau de formation et leur lieu de résidence. »

Si la question de la péréquation n'est pas réglée, votre belle décentralisation sur le papier ne sera que château de sable...

M. le Rapporteur - La solution que vous proposez serait beaucoup plus compliquée que celle du projet de loi. Pour les formations interrégionales, il sera très facile aux deux ou trois régions concernées de signer une convention.

Nous traiterons de la péréquation en son temps (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste). Elle doit intervenir entre collectivités riches et collectivités pauvres, et entre l'Etat et les collectivités (Mêmes mouvements). Vous n'allez pas dans chaque domaine de transfert de compétence demander la création d'un fonds de péréquation ? Nous reverrons tout cela à l'occasion de la loi organique.

M. Philippe Vuilque - Si on l'avait examinée en premier, toutes ces questions ne se poseraient pas.

M. Christian Paul - On nous demande de voter les yeux bandés.

M. le Ministre délégué - La dotation de solidarité interrégionale a augmenté cette année de 25 % et cet effort de correction des déséquilibres structurels entre régions sera poursuivi dans la loi de finances pour 2005. De véritables critères de péréquation doivent être établis. Chaque ministère, nous le constatons, aurait tendance à souhaiter un instrument de péréquation qui lui soit propre. Heureusement qu'il y a le Premier ministre pour coordonner l'ensemble des demandes, sinon, avec des instruments trop nombreux, la politique de péréquation perdrait son sens même.

Les impatients finissent toujours par nuire au but qu'ils veulent atteindre. Plus on multiplie les instruments de péréquation, moins on arrive à une vraie péréquation. C'est un peu la situation actuelle, et c'est pourquoi la péréquation est très diluée : quand tout le monde est éligible à la DSU, ce que chacun reçoit à ce titre est négligeable.

L'autre aspect, bien distinct, concerne le fait que certaines régions distribueront une formation professionnelle à des ressortissants d'autres régions. Mais ces problèmes pourront se régler de manière conventionnelle. Ce qui est d'autant plus approprié qu'il s'agit de situations très mobiles, qui évoluent avec le marché de l'emploi : ne créons donc pas un dispositif de péréquation rigide, une de ces usines à gaz que nous aimons tant, à gauche comme à droite. A ce train, nous finirons par avoir plus de gens qui vivent du traitement du chômage que de gens qui en souffrent... Mieux vaut une démarche conventionnelle, comme celle qui existe déjà entre les communes pour le forfait d'externat en matière scolaire.

L'amendement 1487, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Dominique Tian, rapporteur pour avis - L'amendement 1568 est issu de la commission mixte paritaire du 25 février, qui a accepté la création du Conseil national de la formation professionnelle. Celui-ci doit donner un avis avant que le décret en Conseil d'Etat fixe le montant minimal de l'indemnité compensatrice.

M. le Rapporteur - La commission ne l'a pas examiné. Favorable à titre personnel.

M. le Ministre délégué - Favorable : c'est de la coordination.

L'amendement 1568, mis aux voix, est adopté.

M. Dominique Tian, rapporteur pour avis - L'amendement 1346 a pour objet d'assurer une base juridique au versement de l'indemnité compensatrice forfaitaire pour les contrats d'apprentissage en cours lors de l'entrée en vigueur de la présente loi.

L'amendement 1346, accepté par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. Philippe Folliot - Le Sénat a supprimé dans cet article la mention des « obligations » des régions qui accompagnait celle de leurs « compétences ». Or le projet transfère aux régions les crédits de la formation professionnelle : elles devraient donc être dans l'obligation d'assumer les responsabilités de service public qui l'étaient précédemment par l'Etat. Nous proposons par l'amendement 1318 de rétablir la mention de ces obligations.

M. Christian Paul - Notre amendement 1488 est identique. Nous souhaitons éviter une situation où il y aurait d'un côté une compétence résiduelle de l'Etat, et de l'autre une compétence facultative des régions. La formation professionnelle n'est pas facultative. Nous ne proposons d'ailleurs que le retour au texte initial du Gouvernement.

M. le Rapporteur - Le terme juridique d'obligation est inapproprié dans une loi de décentralisation, car il est contraire au principe de libre administration des collectivités locales.

M. le Ministre délégué - Le Gouvernement avait accepté la rédaction du Sénat. Défavorable.

Les amendements 1318 et 1488, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

L'article 5, modifié, mis aux voix, est adopté.

La séance, suspendue à 17 heures 20, est reprise à 17 heures 40.

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances - Par souci de pédagogie et pour la sérénité des débats, je voudrais indiquer de quelle manière j'ai appliqué l'article 40 de la Constitution aux amendements déposés sur ce projet.

Les dépenses des collectivités territoriales constituant des charges publiques au sens de l'article 40, le transfert d'une compétence, qui a pour effet de faire supporter par la collectivité bénéficiaire des dépenses nouvelles, tombe sous le coup de cet article. Mes prédécesseurs comme moi-même l'avons toujours appliqué ainsi.

Toutefois, j'ai introduit pour ce texte une distinction entre la notion de transfert de compétence et celle de délégation de compétence. Cette innovation est favorable à l'initiative parlementaire.

Ainsi, j'ai dû opposer l'irrecevabilité aux amendements tendant à transférer le financement d'une compétence du budget de l'Etat à celui d'une collectivité territoriale ou entre les budgets de collectivités de niveaux différents, car il s'agissait de transferts de compétences à part entière. Je précise que le caractère expérimental ou non du transfert ne change rien à cet égard.

En revanche, j'ai déclaré recevables des amendements qui créaient ou étendaient une délégation de compétence, comme en matière d'attribution des aides à la pierre ou de gestion des crédits d'entretien des monuments historiques. J'ai même accepté un amendement rendant possible la délégation aux communes de compétences normalement exercées par les départements ou les régions, qu'elles exerceraient au nom et pour le compte des collectivités délégataires : en effet le financeur reste le même ; il n'y a donc pas de transfert de charge au sens de l'article 40, mais seulement une délégation de gestion.

Malgré cette souplesse, de nombreuses idées, dont certaines qui me semblaient fort opportunes, n'ont pas pu être déclarées recevables. C'est le cas par exemple du transfert aux départements de la compétence pleine et entière de la prise en charge des personnes âgées dépendantes ou des handicapés, qui constituerait pourtant une simplification intéressante, de la compétence de la jeunesse et des sports ou de celle du parc de l'équipement, ou du transfert aux régions de la politique de soutien aux énergies renouvelables. Au total, le taux d'amendements irrecevables est de 8 %. Les quelque 1 400 amendements qui restent en discussion permettront de garantir la richesse de nos débats. J'espère que cette explication permettra de limiter le nombre des rappels au Règlement.

ART. 5 BIS

M. le Rapporteur - L'amendement 306 vise à supprimer cet article introduit par le Sénat et qui prévoit que la formation professionnelle des Français de l'étranger reste assurée par l'Etat. On ne voit pas la raison de cette spécificité. Par ailleurs, un texte sur la décentralisation ne peut pas être immédiatement contredit par de telles dispositions. En définissant des publics spécifiques, on risque de ne pas être exhaustif et de créer des difficultés supplémentaires.

Mme Janine Jambu - L'amendement 1000 est identique.

M. le Ministre délégué - Avis favorable.

M. Dominique Tian, rapporteur pour avis - La commission des affaires sociales a été plus sensible aux arguments du Sénat, devant lequel le ministre s'était d'ailleurs montré plus nuancé. Il avait notamment beaucoup hésité sur la définition des publics spécifiques, qui vient juste après cet article. La réécrire permettrait de lever les obstacles juridiques qui avaient été évoqués. La position des sénateurs sur les compétences qui doivent rester à l'Etat me paraît sage et il ne faut pas supprimer cet article.

Les amendements 306 et 1000, mis aux voix, sont adoptés.

L'article 5 bis est ainsi supprimé.

APRÈS L'ART. 5 BIS

M. Christian Paul - Nous abordons donc la question de la formation des publics spécifiques. Il est clair que pour la majorité, l'Etat n'est plus le garant de la formation professionnelle et il renonce à la politique de l'emploi. Au moins, que ce qui relève de la solidarité nationale reste de sa compétence et que la loi le dise clairement ! C'est l'objet de l'amendement 1489. Une énumération non limitative est possible : elle permet au moins d'affirmer une volonté politique, sans que la liste devienne définitive.

M. le Rapporteur - Avis défavorable.

M. le Ministre délégué - Même avis. Distinguer des publics spécifiques est une véritable discrimination.

Plusieurs députés socialistes - Positive !

M. le Ministre délégué - Les traiter séparément des autres risque de les désavantager.

M. Philippe Vuilque - Et s'ils ne sont pas traités du tout ?

M. le Ministre délégué - Il faut qu'ils le soient.

M. Philippe Vuilque - Par qui ? Il n'y a aucun filet de sécurité !

M. le Ministre délégué - Que certaines personnes soient, par la loi, mises à part, ne me semble pas, du point de vue social, une bonne chose.

En outre, le terme « notamment » est une véritable catastrophe.

M. Christian Paul - C'est votre politique de formation professionnelle qui va être une catastrophe !

M. le Ministre délégué - Une loi qui dit « notamment », c'est un non-sens juridique. Relisez Portalis !

M. Christian Paul - Vous substituez un exercice de style à un débat politique.

M. le Ministre délégué - Pas du tout, c'est un exercice de cohérence intellectuelle. Une liste qui n'est pas exhaustive est sans valeur.

M. Dominique Tian, rapporteur pour avis - Il me semble facile de supprimer le « notamment ». La commission des affaires sociales est en revanche inquiète de l'immense zone grise qui est créée. Les Français de l'étranger ne seront plus formés par personne.

M. Christian Paul - Et les réfugiés, et les détenus !

M. Dominique Tian, rapporteur pour avis - Et les illettrés, bref, les publics spécifiques.

M. le Ministre délégué - Ils sont traités par la région.

M. Dominique Tian, rapporteur pour avis - La commission des affaires sociales pense qu'ils ne peuvent l'être que par l'Etat.

M. le Ministre délégué - Vous parlez des détenus, mais ce n'est pas une catégorie déterminée par la loi ! Ils tombent dans la compétence générale des régions. Dans le cas contraire, vous créez une discrimination qui ne leur rend pas service.

M. Christian Paul - Et les abandonner, c'est leur rendre service ?

M. le Ministre délégué - Ils ne sont pas abandonnés, puisqu'ils sont pris en charge avec tous les autres !

Plusieurs députés socialistes - Et si la région ne le fait pas ?

M. Dominique Tian, rapporteur pour avis - Le texte va donner lieu à un contentieux perpétuel entre les régions et l'Etat. C'est pourquoi il est nécessaire de préciser les choses dans la loi. C'est la position de la commission des affaires sociales et celle du Sénat, ce qui vaut bien qu'on y réfléchisse un instant.

M. Jean-Pierre Balligand - Bien sûr qu'il faut y réfléchir ! Le principe que vous voulez appliquer, c'est le transfert aux régions de la formation professionnelle - ou du moins de ce qu'il en restait à l'Etat. Mais certaines régions ont déjà, en l'état actuel des choses, de graves difficultés pour s'occuper de leurs publics fragiles. Pour dire les choses honnêtement, la Picardie s'occupe davantage des formations qualifiantes que de la remise à niveau des illettrés, même si M. Gest dit le contraire !

M. Alain Gest - Je suis mieux placé que vous pour savoir que ce n'est pas vrai !

M. Jean-Pierre Balligand - Je suis président d'une CLI, je sais de quoi je parle. Qu'allons-nous faire de tous les détenus dont l'Etat s'occupe déjà très mal et qu'il veut transférer aux régions - sans la moindre compensation bien sûr ? Quant aux réfugiés, ce n'est pas à la région de s'en occuper, c'est à l'Etat ! On ne peut pas s'étonner que les régions, quelle que soit l'orientation de leur exécutif, affectent leurs moyens en priorité à la population qui est directement de leur ressort. Ce n'est pas le cas des réfugiés et, souvent, des prisonniers. Vous devez être plus ouvert, dans ce domaine, à la discussion.

M. Pierre Albertini - Rapporteur spécial du budget de la justice, je suis bien placé pour savoir que la formation des détenus est déjà très loin d'être assurée par l'Etat. Je doute qu'elle le soit mieux par les régions. Je relève d'ailleurs que la répartition des prisons sur le territoire est loin d'être homogène, et que les détenus peuvent passer de l'une à l'autre. Quant aux réfugiés, il s'agit à l'évidence d'une question de solidarité nationale. Pourquoi les régions deviendraient-elles comptables de la politique d'asile, qui a toujours relevé, dans notre tradition juridique, de la nation ?

Je propose donc un sous-amendement pour rédiger ainsi l'amendement : « L'Etat est compétent pour mettre en _uvre la formation professionnelle des détenus et des réfugiés, qui relèvent de la solidarité nationale. »

M. le Ministre délégué - Notre objectif est le même : permettre que chacun ait accès à la formation professionnelle. Toutefois, l'expression « publics spécifiques » est trop floue. Par ailleurs, en l'état actuel du texte, il n'est nulle part mentionné que cette compétence est transférée. L'Etat la conserve donc, mais les régions ont aussi le droit de l'exercer. Cette dualité ne peut être que favorable aux publics fragiles qui sont visés par l'amendement et que l'Etat, quelles que soient les majorités successives, n'a, jusqu'à présent, pas très bien traités.

M. Alain Gest - Chacun convient que l'Etat n'a pas rempli son rôle, s'agissant de la formation professionnelle des détenus. Pourquoi donc tenter, par le biais de cet amendement, de revenir sur le principe du transfert de compétence ? Si les choses ont été mal faites, c'est aussi en raison d'une dilution des responsabilités. Il est temps qu'une responsabilité entière soit donnée aux régions dans ce domaine aussi. C'est ce que fait le texte, et il doit demeurer inchangé. Pourquoi ne faites-vous pas confiance aux élus locaux ? (Protestations sur les bancs du groupe socialiste) Pourquoi partir du principe que ce que l'Etat fait mal, les régions ne le feront pas mieux ?

M. Jean Le Garrec - Il ne s'agit pas de confiance ou de défiance envers les élus mais de l'exercice des compétences régaliennes de l'Etat, puisque nous parlons de réfugiés et de détenus. Nul n'ignore que la surpopulation atteint un niveau effrayant dans les prisons avec des conséquences dramatiques pour les jeunes. Comment peut-on imaginer de transférer aux collectivités territoriales la formation professionnelle de détenus alors qu'elles n'ont aucune prise sur la politique carcérale ? Si vous souhaitez que les régions contribuent à cette formation, que cela passe par des conventions, mais dans le cadre d'une responsabilité claire de l'Etat.

M. Pierre Albertini - Très bien !

M. Jean Le Garrec - Et ce qui vaut pour les détenus vaut aussi pour les réfugiés. Je suis bien placé pour savoir que la fermeture du centre de Sangatte n'a pas tari leur flux : il n'est pas question que les régions assument cela ! C'est bien la question de la responsabilité de la puissance publique qui est posée ici.

M. Philippe Vuilque et M. Jean-Pierre Balligand - Très bien !

M. Pascal Clément, président de la commission des lois - Nous ne nous comprenons pas. Je suis de ces élus qui, depuis vingt ans, pestent contre les compétences croisées. Je ne puis donc comprendre que certains en redemandent ! Demain, les régions auront compétence en matière de formation professionnelle pour tous les habitants. Et que l'on ne m'objecte pas le cas des Français de l'étranger. Pardi, il n'y a pas de régions à l'étranger !

S'agissant des détenus, ceux que l'on juge aptes à sortir des établissements pénitentiaires pour suivre une formation professionnelle seront pris en charge par la région au même titre que les autres habitants ; ceux que l'on estimera trop dangereux pour les laisser sortir continueront, parce qu'ils seront en centrale, à relever de la compétence de l'Etat. Restons-en donc au texte initial, et ne prêtons pas le flanc à la critique du Conseil d'Etat en introduisant dans le texte une énumération qui, quelle que soit la bonne volonté de ses auteurs, ne sera pas exhaustive. Personne n'est laissé au bord du chemin ; la sagesse commande donc de ne pas adopter l'amendement.

M. le Ministre délégué - La République française n'étant pas un Etat fédéral, l'Etat n'a pas à définir ses compétences : il les a toutes, hormis celles qu'il a explicitement transférées. Cela vaut, aussi, pour les publics spécifiques visés par l'amendement : n'étant pas transférées, ils demeurent de sa compétence.

M. Michel Bouvard - Très bien !

M. le Ministre délégué - Dès lors que vous dressez une liste, le risque, c'est que tous ceux qui n'y figurent pas soient automatiquement exclus du dispositif !

M. Christian Paul - M. Clément vient de nous dire le contraire ! (Murmures sur divers bancs)

M. le Président de la commission des lois - Pas du tout, mais je l'ai formulé autrement

M. le Ministre délégué - Chacun sait bien que le danger de toute liste, c'est d'exclure ceux qui n'y figurent pas, qu'ils aient été oubliés ou délibérément écartés. Dans une république unitaire telle que la nôtre, l'Etat ne peut pas définir ses compétences de manière limitative.

M. Xavier de Roux - Cet exercice de casuistique est-il bien nécessaire ?

M. Jean Le Garrec - On se le demande !

M. Xavier de Roux - A l'évidence, la formation des détenus incombe à l'Etat, au titre de ses missions régaliennes. Inscrivons-le noir sur blanc dans le texte pour prévenir toute difficulté d'interprétation.

M. Jean Le Garrec - Très bien !

M. Pierre Albertini - Puis-je vous rappeler, Monsieur le ministre, que la France est depuis mars dernier une république décentralisée ?

M. le Ministre délégué - Une république « dont l'organisation est décentralisée... ».

M. Pierre Albertini - Ne jouons pas sur les mots ! C'est une distinction byzantine.

M. le Ministre délégué - Ne calomniez pas Byzance !

M. Pierre Albertini - Disons que vous chinoisez !

M. le Président de la commission des lois - N'injuriez pas un pays ami !

M. Pierre Albertini - Si on fixe une compétence de droit commun à la région sans prévoir d'exceptions...

M. le Président de la commission des lois - Vous comprenez enfin le texte !

M. Pierre Albertini - ...laissez moi poursuivre et ne cherchez pas toujours à avoir raison contre tout le monde ! Je maintiens qu'il convient de prévoir deux exceptions - concernant respectivement les détenus et les réfugiés - au principe de prise en charge par la région des actions de formation. Pour ce qui concerne les détenus, il s'agit à l'évidence d'une fonction régalienne de l'Etat...

M. le Président de la commission des lois - C'est implicite !

M. Christian Paul - Rendons le explicite !

M. Pierre Albertini - La solidarité nationale doit s'exercer. Il serait anormal que les régions enregistrant un afflux de réfugiés suite à la fermeture du centre de Sangatte assument seules la prise en charge de leur formation !

M. Jean Le Garrec - Absolument !

M. Christian Paul - Une fois de plus, les propos de MM. Clément et Devedjian me semblent contradictoires. M. Clément dit « aux régions d'assumer », M. le ministre reconnaît bien qu'il y a là une mission de l'Etat mais nous exhorte à ne pas l'écrire pour prévenir toute interprétation exclusive du texte. Un désaccord de fond nous oppose donc bien, Monsieur le président de la commission des lois. A nos yeux, c'est bien l'Etat qui doit former les détenus et les réfugiés. Désigner une ou plusieurs catégories prioritaires ne revient pas à les stigmatiser, sinon, la discrimination positive prônée par M. Sarkozy n'a pas lieu d'être ! Il faut arrêter une position de principe et le sous-amendement de M. Albertini va dans le bon sens.

M. Jean-Pierre Balligand - Je n'ai pas les compétences juridiques du président Clément mais il me semble qu'il n'est pas correct d'affirmer que les prisons françaises relèvent d'un régime d'extraterritorialité

M. le Président de la commission des lois - Ai-je dit cela ?

Plusieurs députés socialistes - Oui !

M. Jean-Pierre Balligand - En toute hypothèse, il serait indécent de donner aux régions des compétences relevant du pouvoir régalien de l'Etat. Notre assemblée s'honorera de voter l'amendement tel que M. Albertini propose de le rectifier, sinon les populations considérées ne seront pas traitées...

M. Christian Paul - Elles seront littéralement abandonnées !

M. le Président de la commission des lois - Ce qui nous oppose, c'est que votre vieux fond d'étatisme vous incite à refuser de transférer aux régions une compétence de droit commun en matière de formation (« Mais non ! » sur les bancs du groupe socialiste). La règle souffre toujours des exceptions. Il est vain de prétendre en dresser une liste exhaustive. Autant écrire dans la loi qu'il fait jour à midi et nuit à minuit !

M. Christian Paul - Dans un pays où il arrive encore que des femmes accouchent menottées, il n'est pas vain de porter une attention particulière aux personnes détenues. C'est même une exigence humanitaire.

M. le Ministre délégué - Il était en effet indigne que des femmes détenues puissent accoucher menottes aux poignets, et c'est bien pourquoi nous avons voulu, contrairement à vous, mettre fin à ce scandale ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP) Reconnaissez aussi - et en tant que rapporteur du budget de la justice sous l'ancienne législature, je sais de quoi je parle - que vous n'avez pas donné suite au plan de rénovation des prisons que vous aviez pourtant annoncé à grand renfort de publicité ! Oui, nos prisons sont indignes. Et c'est bien pour y remédier qu'un ministère spécial a été crée dans le gouvernement de Jean-Pierre Raffarin (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. le Rapporteur - Chacun souhaite ici que les détenus et les réfugiés puissent bénéficier d'une formation (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste). Il serait indigne du pays des droits de l'homme qu'ils ne le puissent pas. De grâce, pas de procès d'intention ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

Si nous sommes défavorables à cet amendement, c'est sur un strict plan juridique. L'Etat continuera bien sûr d'assurer ses missions régaliennes, et à ce titre la formation des détenus et des réfugiés, mais si nous acceptions ce sous-amendement, de fait limitatif, cela exclurait tous les autres publics spécifiques que l'Etat peut être amené à former. Le ministre a fait une déclaration claire...

M. Christian Paul - Pas du tout. Et de toute façon, le président Clément a dit l'inverse.

M. le Rapporteur - Non, il a simplement rappelé que, hors compétences régaliennes, la formation était transférée aux régions. On ne peut être plus clair (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. le Ministre délégué - La formation de ces publics, qui est aujourd'hui de la compétence, non pas régalienne, mais républicaine dirai-je, de l'Etat, le restera. Le sous-amendement, en donnant une liste limitative, reviendrait, comme l'a souligné le rapporteur, à exclure tous les autres publics potentiels. Il n'y a aucune crainte à avoir, des lignes budgétaires spécifiques sont même prévues pour la formation de ces publics, à laquelle les régions pourront toujours s'associer par voie de convention.

M. Pierre Albertini - J'ai cru comprendre qu'aux termes de l'article 5 de ce texte, les régions allaient recevoir compétence pleine et entière en matière de formation, celle des jeunes comme celle des adultes. Voilà qui est clair. Je souhaite seulement par mon sous-amendement prévoir expressément deux exceptions, pour les détenus et les réfugiés. Sur le plan juridique, mes arguments me semblent aussi pertinents que ceux que l'on m'oppose.

On nous dit que l'Etat assure aujourd'hui la formation de ces publics. Qu'on me montre les textes lui en faisant obligation ! Je ne suis pas sûr qu'il y en ait un seul, hormis, pour la formation des mineurs emprisonnés, l'ordonnance de 1945.

M. Jean Le Garrec - C'est juste !

M. le Président - Je suis saisi par le groupe socialiste d'une demande de scrutin public sur le sous-amendement 1574 de M. Albertini.

M. Christian Paul - De l'avocat et du professeur de droit, c'est ce dernier qui m'a convaincu. Il appartient à la loi de fixer la règle et les exceptions. A défaut, sur quelles bases juridiques pourraient se fonder les exceptions ?

A la majorité de 33 voix contre 16 sur 49 votants et 49 suffrages exprimés, le sous-amendement 1574 n'est pas adopté.

L'amendement 1489, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Christian Paul - Notre amendement 1490 concerne, lui, la lutte contre l'illettrisme. Nous souhaitons que l'Etat continue à jouer un rôle en ce domaine, notamment qu'il puisse conclure avec une ou plusieurs régions des contrats d'objectifs. On nous objectera sans doute qu'il faut éviter les compétences croisées, mais il s'agit là d'une cause nationale et de solidarité. Il importe que l'Etat apporte son concours financier.

M. le Rapporteur - Si nous avions adopté le sous-amendement précédent, on aurait précisément exclu le public spécifique que constituent les personnes illettrées. Cet amendement est inutile. Il va de soi que l'Etat continuera de s'occuper de la lutte contre l'illettrisme.

M. le Ministre délégué Cet amendement me rappelle Francis Blanche : « Oui, il peut le faire ! » (Sourires). Oui, l'Etat peut assurer et continuera d'assurer la formation des publics illettrés. Et, comme l'a dit le rapporteur, si nous avions adopté le sous-amendement précédent, ce public serait automatiquement sorti de la compétence de l'Etat.

Naturellement l'Etat compte bien traiter ce problème, en collaboration avec tout le monde : c'est une grande cause nationale, et nous avons inscrit pour cela 14 millions d'euros au budget 2004.

M. Philippe Vuilque - Cet amendement est différent du précédent : il permet une incitation, une impulsion de l'Etat en direction des régions qui oublieraient d'instaurer une vraie lutte contre l'illettrisme. Il les pousse à faire de cette lutte une priorité.

L'amendement 1490, mis aux voix, n'est pas adopté.

ART. 5 TER

Mme Janine Jambu - Nous proposons par l'amendement 1001 la suppression de cet article. Celui-ci prévoit que la région sera destinataire des formalités administratives en matière de contrats d'apprentissage. Nous nous opposons à l'établissement d'une compétence pleine et entière de la région pour la formation et l'apprentissage. Nous voudrions aussi comprendre comment cette centralisation pourra faciliter le versement des indemnités. En outre, dans leur formation en alternance, il arrive que les jeunes ne soient pas traités conformément au contrat qu'ils ont signé ou aux engagements de l'employeur. Que se passera-t-il en pareil cas ? Ils vont probablement se tourner vers les services d'inspection de l'Etat, mais ceux-ci, avec votre projet, ne disposeront plus directement du dossier. Transférer à la région l'enregistrement des contrats d'apprentissage ne va pas dans le sens de l'intérêt des jeunes. Aujourd'hui, quand un dossier est présenté à l'enregistrement de la Direction du travail et de la formation professionnelle, celle-ci connaît les antécédents de l'employeur, et peut intervenir si des problèmes se sont précédemment posés. Dans un système totalement décentralisé, cette possibilité disparaîtra. Il deviendra très difficile de traiter les situations conflictuelles.

L'amendement 1001, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

L'article 5 ter, mis aux voix, est adopté.

ART. 5 QUATER

Mme Janine Jambu - Nous proposons par l'amendement 1002 la suppression de cet article. Il confie aux régions, par délégation de l'Etat, la gestion des SIFE, stages d'insertion et de formation à l'emploi, et des SAE, stages d'accès à l'entreprise. Ces stages sont destinés aux demandeurs d'emploi et aux personnes qui rencontrent des difficultés particulières d'accès au marché du travail. A ce titre ils relevaient de la politique de l'emploi de l'Etat. Nous demandons la suppression de l'article parce que sa terminologie prête à confusion : la compétence de l'Etat doit être exprimée en termes clairs, excluant un désengagement déguisé.

M. Dominique Tian, rapporteur pour avis - L'amendement 1345 tend également à supprimer l'article. Les SIFE et les SAE sont des outils de retour rapide à l'emploi : ils font partie de la politique de l'emploi conduite par le Gouvernement. Transférer leur gestion aux régions, ce n'est pas clarifier la répartition des compétences entre l'Etat, en charge de la politique de l'emploi, et les régions, en charge de la formation professionnelle.

M. Christian Paul - Notre amendement 1491 a le même objet. Nous pourrions sourire si le sujet n'était grave. Qu'allons-nous faire, en votant cette suppression ? Nous allons reconnaître qu'il y a des publics spécifiques pour lesquels l'Etat conserve une responsabilité.

M. le Rapporteur - C'est bien ce que nous disons depuis une demi-heure...

M. le Ministre délégué - Vous découvrez ce principe : tout ce qui n'est pas transféré est conservé !

M. Christian Paul - Mais vous avez donné aux régions une compétence de droit commun. Vous faites donc de la rétention implicite.

M. le Ministre délégué - Seriez-vous fédéraliste ?

M. Christian Paul - Vous considérez que ces publics ne doivent pas être nommés, qu'il ne faut pas en donner la liste. Dès lors on ne voit pas comment, juridiquement, vous pouvez fonder la responsabilité de l'Etat envers ces publics. Car enfin vous avez bien dit que la région recevait l'ensemble de la compétence formation professionnelle ; et en même temps vous dites, mais sans l'écrire dans la loi, que certains publics réclament un traitement spécifique... Nous voterons bien sûr la suppression de l'article, d'autant que le système baroque inventé au Sénat ne simplifie rien. Mais à nouveau le traitement qu'apportent au problème des publics spécifiques le Gouvernement et la majorité apparaît comme une aberration juridique.

M. le Rapporteur - La commission avait émis un avis défavorable à ces amendements, et j'avais tenté par un autre amendement de préciser les conditions de cette délégation, qui n'est pas un transfert. Mais au bénéfice des arguments de M. Tian, et sous réserve de ce que dira le ministre, je suis prêt à me rallier à la suppression de l'article. Cela éviterait bien des problèmes, d'autant que le dispositif de délégation, même amendé, reste très imparfait.

M. le Ministre délégué - Il s'agit ici d'une procédure : elle n'a pas vocation à s'adresser à tel public en particulier, mais constitue un mode d'action en matière de retour à l'emploi. D'autre part, mon collègue Fillon souhaite que ce problème soit traité au printemps dans la loi de mobilisation pour l'emploi ; et il a raison, car la politique du Gouvernement y gagnera en cohérence. Je suis donc favorable aux amendements de suppression.

Les amendements 1002, 1345 et 1491, mis aux voix, sont adoptés.

L'article 5 quater est ainsi supprimé.

ART.6

Mme Janine Jambu - Nous proposons par l'amendement 1003 la suppression de cet article. Celui-ci renforce la responsabilité du conseil régional quant aux modalités d'élaboration et au contenu du plan régional de développement des formations professionnelles. A nos yeux l'Etat doit rester l'initiateur de la politique nationale d'offre de formation. Depuis les modifications apportées par le Sénat, ce plan régional de développement des formations professionnelles vaut schéma prévisionnel d'apprentissage, schéma des formations sociales et sanitaires, et schéma régional de développement des enseignements artistiques préparant à une formation professionnelle. Il a vocation à prendre de l'importance, et à devenir le document de référence à l'échelon régional pour la politique de formation.

Selon nous, renforcer la valeur prescriptive de ce document ne permettra pas de mieux répondre aux besoins. De plus, quels seront ces besoins ? S'agira-t-il des besoins en formation d'adaptation exprimés par le tissu économique local, ou des besoins en formation qualifiante et diplômante des jeunes et des demandeurs d'emploi ? S'agira-t-il des besoins recensés, ou de ceux qui seront définis en fonction d'une enveloppe prédéterminée ? Les contraintes financières propres aux collectivités territoriales ne pèseront-elles pas sur la définition de ces besoins ? En l'état actuel du texte, rien ne garantit une offre de formation de qualité, ni la satisfaction des demandes. D'où notre amendement de suppression.

L'amendement 1003, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme Janine Jambu - J'aurais aimé plus d'explications.

M. Philippe Folliot - L'objectif premier de la formation professionnelle, c'est l'emploi. Pourtant la rédaction du Sénat à fait disparaître du texte initial la référence à cet objectif. Notre amendement 1320 tend à la rétablir.

M. Christian Paul - Notre amendement 1492 est identique.

M. le Rapporteur - Les dispositions proposées sont sans valeur normative, et ne font que répéter le contenu de l'article L. 901 du code du travail. Ces amendements sont donc inutiles.

M. le Ministre délégué - Même avis.

Les amendements 1320 et 1492, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. le Président - Trois amendements sont en discussion commune, l'amendement 1321 de M. Folliot, ainsi que les amendements 1493 et 1494 de M. Paul.

M. Philippe Folliot - Le Sénat a fait disparaître du texte la prise en compte des réalités socio-économiques et éducatives des différents échelons territoriaux dans la mise en place du plan régional de développement des formations professionnelles. Il faut réintroduire cette référence, car l'ensemble des filières de formation doit présenter une cohérence, non seulement au niveau de la région, mais aux niveaux interrégional et national. Tel est l'objet de notre amendement 1321.

M. Christian Paul - Notre amendement a le même objet.

M. le Rapporteur - Ici encore les dispositions proposées n'ont pas de portée normative. Ces amendements reprennent des formulations supprimées à juste titre par le Sénat. D'autre part l'article prévoit la possibilité de contrats pour le développement coordonné de différentes voies de formation, qui peuvent être signés par l'Etat, par une ou plusieurs régions et par les organismes concernés : votre souci est donc déjà satisfait.

M. le Ministre délégué - La lisibilité du texte passe par la suppression des dispositions inutiles. Défavorable, donc.

L'amendement 1321, mis aux voix, n'est pas adopté, non plus que les amendements 1493 et 1494.

M. Christian Paul - L'amendement 1494 n'aurait pas dû être mis en discussion commune avec les deux autres car il n'a rien à voir.

Mon amendement 1495 tend à consulter les associations de chômeurs et précaires sur le plan régional de formation professionnelle car leurs membres sont évidemment les premiers concernés.

M. le Président - Je vous confirme que votre amendement 1494 avait de bonnes raisons d'être mis en discussion commune avec les deux précédents.

M. Christian Paul - Ce n'est pas mon sentiment !

M. le Rapporteur - Nous revenons au débat que nous avons eu ce matin. Qui associe-t-on à la concertation ?

J'ai évidemment le plus grand respect pour les associations de chômeurs et de personnes en situation de précarité - expression qui me paraît préférable à « précaires » ; mais une concertation est prévue avec les organismes gestionnaires de l'assurance chômage. Tant sur cet amendement que sur les deux suivants déposés par MM. Mariani et Bouvard, avis défavorable.

M. le Ministre délégué - De même.

L'amendement 1495, mis aux voix, n'est pas adopté, non plus que l'amendement 913 de M. Mariani.

M. Michel Bouvard - Permettez que je défende mon amendement 926. Je souhaite que dans les régions comprenant un territoire de montagne, on consulte les comités de massif qui, réunissant élus, professionnels, représentants des chambres consulaires, ont précisément été institués pour émettre un avis sur les politiques publiques et ont donc vocation à se prononcer sur le plan de formation professionnelle.

M. Christian Paul - Ce matin, on nous a dit que les avis des partenaires seraient recueillis par l'intermédiaire du CESR. Mais nous souhaitons donner la parole à ceux qui sont dépourvus de représentation, qu'il s'agisse des chômeurs et précaires, des acteurs de l'économie sociale ou des habitants des zones de montagne, qui sont victimes d'une forme d'insularité. Nous voterons donc l'amendement de M. Bouvard.

M. Pierre Albertini - Les chômeurs, les précaires et les Alpins !

L'amendement 926, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Philippe Folliot - Les entreprises de l'économie sociale étant évidemment concernées par le schéma de développement des formations professionnelles, l'amendement 1323 demande la consultation des chambres régionales de l'économie sociale.

M. le Rapporteur - J'émettrai un avis défavorable à tous les amendements concernant les chambres régionales de l'économie sociale qui, je l'ai dit ce matin, ne sont définies par aucun document ayant valeur juridique. Plutôt que de construire des usines à gaz, donnons un véritable rôle au CESR. L'économie sociale étant incontestablement devenue une réalité importante, je suggère au ministre de prendre l'engagement de lui donner la représentation qu'elle mérite dans le CESR.

M. le Ministre délégué - Je suis tout à fait d'accord pour cette démarche car les CESR ont bien été institués pour cela. D'ailleurs, Monsieur Bouvard, les comités de massif ont vocation à y être représentés.

M. Michel Bouvard - Bien sûr que non !

M. le Ministre délégué - Nous en débattrons. En tout cas, la réforme des CESR est le seul moyen d'assurer la consultation la plus large.

M. Christian Paul - Il faudrait alors indiquer explicitement que le CESR doit être consulté sur le plan de formation.

M. le Rapporteur - Renforcer les CESR et mieux intégrer les organismes de l'économie sociale me semble souhaitable. Je serais favorable à un amendement oral prévoyant la consultation préalable des CESR.

M. le Ministre délégué - Mais c'est déjà dans le texte, ce qui prouve bien que nous sommes tous d'accord ! L'article L. 214-13 du code de l'éducation prévoit que le plan régional est approuvé après consultation, entre autres, du Conseil économique et social régional !

M. le Président de la commission - Cela a déjà été dit ce matin.

M. Christian Paul - Il s'agissait d'autre chose !

M. le Ministre délégué - C'était en effet un autre sujet, mais vous avez donc satisfaction. Reste le problème de la représentativité des CESR.

M. Philippe Folliot - Ce matin, nous avons trouvé suffisant de dire que le CESR était saisi pour avis de l'ensemble des politiques régionales. Soyons cohérents ! Il n'y a pas lieu d'écrire un alinéa spécifique, puisque les structures qu'il désigne sont toutes représentées au CESR ! Il faut simplement revoir la représentation des chambres régionales de l'économie sociale, dont tout le monde s'accorde à dire que la place devrait être plus importante. Si le CESR est rendu plus représentatif, nous pourrons débarrasser le texte de toutes les autres mentions. Si l'on commence à faire la liste des structures qu'il faut consulter, on en oubliera toujours !

M. Philippe Vuilque - Le ministre a fait une déclaration d'intention, mais nous voudrions quelque chose de plus concret. Dire que la composition des conseils va être améliorée ne mange pas de pain ! Je ne fais aucun procès d'intention au ministre, mais nous avons besoin de garanties.

M. le Rapporteur - J'aurais préféré ne pas le faire remarquer, mais la loi sur la démocratie de proximité comportait un chapitre sur les CESR. J'ai fait partie des députés qui ont voulu améliorer la représentation des organismes de l'économie sociale, et le gouvernement de l'époque a refusé !

M. Michel Bouvard - C'est vrai !

M. Philippe Vuilque - Il n'est jamais trop tard pour s'amender !

M. le Rapporteur - Nous avons un engagement concret du ministre, cela devrait suffire ! Ce n'est pas dans ce texte qu'il faut réformer les CESR !

Pour répondre à M. Folliot, il faut veiller à ne pas confondre le stade de l'élaboration, à laquelle on associe les employeurs, les organisations syndicales et les organismes de gestion de l'assurance chômage, et celui de la concertation, c'est-à-dire de l'avis sur le plan une fois qu'il a été élaboré.

L'amendement 1323, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Dominique Tian, rapporteur pour avis - Je suis sensible aux arguments qui ont été développés et je retire l'amendement 480 corrigé.

M. Christian Paul - L'amendement 1496 relaye à son tour l'aspiration du secteur de l'économie sociale à participer à l'élaboration de la politique de formation professionnelle. Je suis par ailleurs très surpris que M. Tian ait retiré aussi facilement un amendement qui avait été adopté par la commission des affaires sociales.

L'amendement 1496, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Dominique Tian, rapporteur pour avis - L'amendement 479 prévoit que le plan régional de développement des formations professionnelles s'appuiera sur le schéma régional de développement économique, également mis au point par la région.

M. le Rapporteur - Une collectivité peut difficilement ne pas être d'accord avec elle-même ! Avis défavorable.

M. le Ministre délégué - Et même si elle voulait changer d'avis, elle en aurait le droit !

M. Christian Paul - Les ministres aussi ont le droit !

M. le Ministre délégué - C'est même arrivé souvent, Monsieur Paul, vous en savez quelque chose.

L'amendement 479, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 308 rectifié est de coordination.

L'amendement 308 rectifié, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 309 est défendu.

M. le Ministre délégué - Je préfèrerais qu'il soit retiré, car il pose de gros problèmes.

M. le Rapporteur - Beaucoup des amendements proposés par M. Blessig sont très intéressants, mais je reconnais que celui-ci comporte des imperfections. Je le retire et je retire également l'amendement 1539 de la commission.

L'article 6, modifié, mis aux voix, est adopté.

L'article 7, mis aux voix, est adopté.

ART. 7 BIS

M. Dominique Tian, rapporteur pour avis - L'amendement 1569 propose, par coordination, la suppression de cet article.

M. le Rapporteur - L'amendement n'a pas été examiné par la commission. A titre personnel, avis favorable.

L'amendement 1569, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

L'article 7 bis est ainsi supprimé.

ART. 8

M. Christian Paul - Cet article appelle un débat. Deux visions de la décentralisation et de la formation professionnelle s'affrontent. Il ne s'agit ni plus ni moins, dans cet article, que de la disparition programmée de l'association nationale pour la formation professionnelle des adultes, l'AFPA. Sa mort lente est prévue sur quatre ans.

M. Michel Bouvard - Le rapport de la Cour des comptes a bien montré qu'il fallait une réforme !

M. Christian Paul - Cela ne m'empêche pas d'appuyer là où cela fait mal. Le groupe socialiste ne vous laissera pas mener à bien votre dessein sans réagir.

Du point de vue financier d'abord, l'AFPA était jusqu'à présent financée à 80 ou 85 % par une subvention nationale, qu'elle répartissait entre ses délégations régionales. Son objet est certes d'assurer des formations, mais également de fournir des prestations associées - hébergement, aide à la mobilité, orientation ou accompagnement social par exemple - pour les stagiaires. On nous dit que la subvention de l'Etat va dorénavant être répartie entre les régions, par le biais de la dotation générale de décentralisation. Il n'y a donc aucune garantie que les sommes soient reversées à l'AFPA ! Elles vont être fondues dans la masse de la dotation générale de décentralisation et ne seront pas affectées précisément à la formation professionnelle, et encore moins à l'AFPA.

Mais il n'y a pas que le financement... L'angoisse des 12 000 salariés et collaborateurs de l'AFPA tient aussi, comme je l'ai dit lors de la discussion générale sous les quolibets du rapporteur... (Exclamations sur les bancs du groupe UMP)

M. le Rapporteur - Pas du tout !

M. Christian Paul - ...à ce qu'en mettant, comme vous le faites, l'AFPA en concurrence, vous renoncez à l'idée du service public de la formation professionnelle. Dans bien des cas, l'AFPA, tout en étant la mieux-disante, ne sera pas la moins disante, si bien que toute région qui le souhaitera pourra se dispenser de travailler avec elle.

M. Daubresse n'explique-t-il pas, dans son rapport, que le nouveau code des marchés publics « exclut les services de formation professionnelle de la procédure d'appel d'offres » ? Cela signifie, en clair, que les régions pourront passer des marchés négociés. En d'autres termes, vous livrez la formation professionnelle à la marchandisation intégrale et nous réprouvons ce choix politique désastreux, dont s'émeuvent, à juste titre, les 12 000 agents de l'AFPA. Le groupe socialiste, qui demandera un scrutin public sur l'article, souhaite entendre le rapporteur et le ministre préciser leurs intentions.

M. le Président - Sur l'article 8, je suis saisi d'une demande de scrutin public par le groupe socialiste. Nous en arrivons à l'amendement de suppression.

M. Christian Paul - Je constate que ni le rapporteur ni le ministre ne souhaitent me répondre ni expliquer à la représentation nationale qu'une organisation de service public regroupant 12 000 agents va disparaître d'ici cinq ans (Exclamations sur les bancs du groupe UMP).

M. Jacques Le Guen - Mais enfin ! Il n'est pas question de cela !

M. le Président - Le Gouvernement et la commission vous répondront sans doute à propos de l'amendement.

M. Christian Paul - L'amendement 1498 est défendu.

M. le Rapporteur - Le respect de l'institution parlementaire devrait vous pousser, Monsieur Paul, à éviter les contrevérités. Le quolibet n'est pas dans mes habitudes, et je me suis borné à relever la contradiction entre les vitupérations de M. Montebourg, tout occupé au maintien des marchés publics, et vos propos tendant à y soustraire l'AFPA. Vous vous livrez à présent à un nouveau procès d'intention. Non, il n'est pas question de supprimer l'AFPA, dont je ne me désintéresse aucunement, comme le témoigne le fait que j'ai reçu son directeur général et un représentant syndical. D'autre part, j'ai cherché le moyen juridique d'éviter que l'AFPA soit soumise à la procédure d'appel d'offres des marchés publics, et c'est ce qui transparaît fidèlement, comme il se doit, dans mon rapport, qui décrit aussi quelles seront les conséquences...

M. Christian Paul - Elles seront dramatiques !

M. le Rapporteur - ...et le calendrier du transfert aux régions des compétences de l'AFPA. Il ne s'agit donc pas d'une opinion personnelle, mais d'une recension.

Je vous rappelle que ce transfert a été engagé par la loi de 2002 relative à la démocratie de proximité. Le projet qui nous est soumis permettra que le processus s'achève en 2008 et organise les modalités du transfert définitif, qui aura lieu en 2008 au plus tard. Rien, dans les dispositions prévues, ne remet en cause ni le statut de l'AFPA ni la convention collective, qui continuera de s'appliquer. Le personnel n'a donc pas lieu de s'inquiéter, et vous non plus, puisque la lettre de cadrage qu'a reçue l'an dernier le président de l'AFPA précise notamment que l'Etat aidera l'association à réussir sa modernisation, la subvention nationale étant recentrée sur la politique de l'emploi, l'offre de certification et l'accompagnement des publics spécifiques - ce qui ne peut que vous satisfaire.

L'AFPA demeurera bien l'opérateur de la politique de l'emploi du ministère, et il n'est pas question de remettre son existence en cause, ni avant ni après 2008.

En conséquence, la commission est défavorable à l'amendement de suppression.

M. le Ministre délégué - Votre rapporteur a excellemment exposé toutes les garanties...

M. Christian Paul - Ça ne marchera pas ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP)

M. le Ministre délégué - ...qui accompagneront l'achèvement de la régionalisation de l'AFPA que vous aviez engagée.

M. Christian Paul - De la bonne manière ! (Même mouvement)

M. le Ministre délégué - Finissez-en avec ce manichéisme ! Vous êtes déjà les intelligents et nous les idiots, les généreux et nous les égoïstes, et tout à l'avenant ! Mais les Français ne sont pas dupes, et ils vous ont dit, il n'y a pas si longtemps, ce qu'ils pensaient de tels raisonnements. Non seulement vous voulez que je parle quand vous l'exigez, mais il faut encore vous dire ce que vous avez envie d'entendre : voilà une étrange conception du débat démocratique !

M. Philippe Vuilque - Inutile polémique !

M. le Ministre délégué - Le présent texte se borne à tirer les conséquences financières des dispositions de la loi relative à la démocratie de proximité. Comme souvent, vous nous laissez régler la facture ! (« C'est leur habitude ! » sur les bancs du groupe UMP) Cédant au manichéisme, vous voulez nous présenter comme les méchants qui vont étrangler l'AFPA, cependant que ceux de vos amis qui dirigent des régions - ou qui aspirent à le faire - la préserveraient. Mais les élus de droite ont autant de conscience civique et de sens de l'intérêt général que vous ! L'AFPA est un instrument de bonne qualité. Nous sommes convaincus qu'il saura s'adapter à la décentralisation (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Christian Paul - Ayant été mis en cause, je souhaite répondre au Gouvernement.

M. le Président - Vous vous êtes déjà très longuement exprimé. L'Assemblée est éclairée...

M. Christian Paul - A défaut, je serai contraint de demander une suspension de séance...

M. le Président - Le ministre vous a longuement répondu. Soyez bref.

M. Christian Paul - Monsieur le ministre, vous êtes sur le point de lancer une machine infernale alors même que les dotations à l'AFPA ne sont pas sécurisées dans le budget des régions...

Plusieurs députés UMP - Vous l'avez déjà dit !

M. Christian Paul - Vous vous apprêtez à mettre l'AFPA en concurrence avec les autres opérateurs de formation sans appels d'offres, selon une procédure de marché allégé peu sûre. M. Tian n'a pas caché en commission que l'objectif était d'introduire l'AFPA sur le marché concurrentiel de la formation...

M. le Ministre délégué - La concurrence ne nous fait pas peur !

M. Christian Paul - Peut-être, mais bien des questions restent en suspens. Que va devenir le patrimoine de l'AFPA ?

M. le Ministre délégué - Il lui appartient !

M. Christian Paul - Pas toujours ! Compte tenu de l'accompagnement social qu'elle réalise conformément à sa vocation, l'AFPA a peu de chance de remporter les marchés. Que deviendront les 12 000 salariés concernés ? Continueront-ils à bénéficier de leur convention collective ? Pouvez-vous vous engager à ce qu'il n'y ait aucun plan de licenciement à l'AFPA ?

Monsieur le président, je n'ai pas le sentiment que nous ayons abusé de notre temps de parole et le Gouvernement ne nous a donné aucune précision sur ces différents points.

M. le Ministre délégué - Je vous réponds bien volontiers. La convention collective ne sera pas remise en cause, et un contrat de progrès entre l'AFPA et l'Etat est en cours d'élaboration. Il vise notamment à régler toutes les questions ayant trait à l'investissement...

M. Christian Paul - Alors, tout va très bien !

M. le Ministre délégué - Monsieur le député, le fond du problème c'est que vous êtes hostile à la décentralisation...

M. Philippe Vuilque - Telle que vous l'envisagez, c'est sûr !

M. le Ministre délégué - Comme les souverainistes se disent favorables au principe de la construction européenne mais combattent toutes ses avancées, vous êtes globalement favorable à la décentralisation mais résolument hostiles à toutes ses déclinaisons ! Quant aux conditions de mise en concurrence de l'AFPA, nous nous contentons d'appliquer la loi. En définitive, le plus méfiant de nous deux à l'égard de l'AFPA, c'est vous !

L'amendement 1498, mis aux voix, n'est pas adopté.

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

DÉCISION DU CONSEIL CONSTITUTIONNEL

M. le Président - J'informe l'Assemblée que le Conseil constitutionnel, saisi de la résolution adoptée le 12 février 2004 modifiant le Règlement, m'a fait parvenir le texte de sa décision rendue dans sa séance du 26 février 2004, en application de l'article 61, alinéa 1er, de la Constitution, déclarant conformes à la Constitution les dispositions de cette résolution. Celles-ci sont désormais applicables. La décision du Conseil constitutionnel sera publiée à la suite du compte rendu intégral.

Prochaine séance ce soir à 21 heures 30.

La séance est levée à 19 heures 55.

            Le Directeur du service
            des comptes rendus analytiques,

            François GEORGE


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