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Assemblée nationale

COMPTE RENDU
ANALYTIQUE OFFICIEL

Session ordinaire de 2003-2004 - 69ème jour de séance, 175ème séance

2ème SÉANCE DU MARDI 2 MARS 2004

PRÉSIDENCE de M. Jean-Louis DEBRÉ

Sommaire

QUESTIONS AU GOUVERNEMENT 2

DÉSINDUSTRIALISATION 2

PAUVRETÉ ET EXCLUSION 2

URGENCES MÉDICALES 3

DÉLOCALISATIONS 4

POLITIQUE D'IMMIGRATION 5

ACCESSION SOCIALE À LA PROPRIÉTÉ 6

CHÔMAGE 6

ÉTABLISSEMENTS PÉNITENTIAIRES 7

RECHERCHE 8

RECHERCHE 9

MAISONS DE RETRAITE 9

HÔPITAUX 10

MOTION DE CENSURE 10

MODIFICATION DE L'ORDRE DU JOUR 30

La séance est ouverte à quinze heures.

QUESTIONS AU GOUVERNEMENT

L'ordre du jour appelle les questions au Gouvernement.

DÉSINDUSTRIALISATION

M. Nicolas Forissier - Il y a quelques jours, un éditorialiste intitulait judicieusement son article : « La désindustrialisation fait débat ». En effet, sur le terrain, par exemple dans mon département de l'Indre, des restructurations industrielles lourdes s'opèrent, avec le cortège de drames humains que l'on sait, mais aussi, plus discrètement et, hélas, régulièrement, quantité de petites et moyennes entreprises ferment ou se délocalisent. Dans le même temps, comme un récent rapport de la DATAR en apporte la preuve, notre pays demeure la cinquième puissance industrielle au monde. Et si l'emploi industriel ne représente plus que 15 % de l'emploi total contre 24 % au début des années 1980, il faut tenir compte des externalisations, des gains de productivité, et du recours massif de l'industrie à l'intérim, qui fait que beaucoup d'emplois industriels sont comptabilisés en emplois de services.

Le Président de la République a récemment replacé la lutte contre la désindustrialisation au c_ur de ses priorités. Notre pays est en compétition avec le reste du monde, notamment avec la Chine et l'Inde. Il faut aider nos entreprises à exporter et à investir à l'étranger, car c'est ainsi qu'elles créent des emplois en France. Les dix secteurs industriels qui ont le plus investi à l'étranger ces dix dernières années ont dans le même temps créé 100 000 emplois industriels en France.

Quelle est, Madame la ministre de l'industrie, votre point de vue sur la question ? Quelle est l'action de ce gouvernement, notamment sur le plan européen ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

Mme Nicole Fontaine, ministre déléguée à l'industrie - Nous connaissons bien la situation difficile des bassins d'emplois fragilisés et la dure réalité vécue par leurs salariés. Faire face, c'est prévenir et réagir. Tout d'abord, prévenir le risque de désindustrialisation en allégeant les coûts de production, en soutenant l'innovation et en renforçant l'attrait de notre territoire. C'est pourquoi nous avons abaissé les charges sur les bas salaires, lancé un plan Innovation et allons tout prochainement, réformer la taxe professionnelle. Réagir, c'est accompagner les salariés sur le plan social et redonner un avenir industriel aux bassins d'emplois concernés, comme nous l'avons précisément fait dans l'Indre où une action de conversion est en cours. J'ai demandé qu'elle puisse concerner également les bassins d'emplois de La Châtre et d'Issoudun, qui avaient été exclus par le précédent gouvernement. Réagir, c'est aussi travailler avec les fédérations professionnelles aux orientations stratégiques pour leur secteur et y rallier nos partenaires européens. Je serai vendredi prochain à Bruxelles pour la mise en place d'un groupe de travail de haut niveau (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste), composé de quatre ministres et de trois commissaires, qui formuleront des propositions avant juillet prochain. Vous le voyez, notre politique est tout à fait claire. Elle peut se résumer en deux mots : action et détermination. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP ; exclamations sur les bancs du groupe socialiste).

PAUVRETÉ ET EXCLUSION

M. Jean Le Garrec - Monsieur le Premier ministre, de toute la France, s'élève un cri d'angoisse sur la montée de la pauvreté et de la précarité. Interrogée à plusieurs reprises sur ce sujet, votre secrétaire d'Etat, Mme Versini répond toujours que la loi de lutte contre les exclusions, que Mme Aubry a fait voter en 1998, est « une bonne loi » - Mme Anthonioz-de Gaulle allait, elle, plus loin, la qualifiant de « grande loi » - mais qu'elle « n'est pas appliquée ». Je réfute totalement ces propos (Interruptions sur les bancs du groupe UMP). Nous avons toujours su qu'une loi ne résoudrait pas tous les problèmes, surtout lorsque son application exige la coopération des collectivités, des associations, des administrations... et, en conséquence, en avons toujours suivi l'application de très près. Outre les rapports annuels de l'IGAS depuis 2001, dont le dernier remonte au 8 mars 2003, nous avons confié une mission à Mme Mignon sur les emplois-jeunes et fait adopter en 2001 un collectif budgétaire comportant 2,5 milliards pour la lutte contre les exclusions, dont cinq cents millions au profit des parcours Trace.

Le problème est que, depuis deux ans, méthodiquement, vous détruisez tous les outils que nous avions mis en place (Vives exclamations sur les bancs du groupe UMP). Politique de santé, péréquation, abandon du programme Trace,... (Mêmes mouvements) quelques centaines de Civis seulement, radiation des statistiques du chômage de 30 000 demandeurs d'emploi, réduits maintenant à demander de l'aide dans les CCAS... (Brouhaha grandissant sur les bancs du groupe UMP)

M. le Président - Pourriez-vous, je vous prie, poser votre question ?

M. Jean Le Garrec - J'y viens. Monsieur le Premier ministre, je vais vous transmettre un dossier bien étayé sur la politique d'abandon social de votre gouvernement. Votre seule réponse, pour l'instant, a été une réunion interministérielle... en octobre. Quelles mesures d'urgence allez-vous prendre ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste ; brouhaha sur les bancs du groupe UMP)

M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité - Monsieur Le Garrec, comme vous le savez, j'ai beaucoup de respect pour vous. C'est pourquoi la façon dont vous avez posé votre question me peine (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste). Car, sur un sujet comme celui de la pauvreté, tous les groupes politiques de l'Assemblée devraient réfléchir à leurs responsabilités. En effet, la pauvreté augmente régulièrement dans notre pays depuis plusieurs années. Un rapport récent a ainsi révélé qu'elle avait progressé de façon spectaculaire chez les enfants en 1999 et 2000 (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste). Si je cite ce rapport, ce n'est pas pour fuir nos responsabilités, mais vous appeler à plus d'humilité et à faire votre autocritique (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

En effet, si la pauvreté augmente, ce n'est pas du fait des réformes engagées par ce gouvernement, mais bien du fait que d'importantes réformes ont été trop longtemps différées. La défense des avantages acquis et la panne de l'ascenseur social ont provoqué une vague d'exclusion dans notre pays (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste). Ce gouvernement a entamé courageusement les réformes nécessaires pour lever ces blocages et remettre en marche l'ascenseur social (Mêmes mouvements). Mais ces réformes sont difficiles et ne porteront leurs fruits que progressivement. Toutefois, sans attendre, nous avons pris les mesures nécessaires pour que la solidarité continue de s'exercer. Ainsi avons-nous augmenté l'an passé de 210 millions d'euros les crédits de l'hébergement d'urgence, réformé la lutte contre le surendettement et revalorisé de 11,4 % en trois ans le SMIC hors inflation (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP ; interruptions sur les bancs du groupe socialiste). Vous ne pouvez pas ne pas vous demander quel a été l'impact de votre politique salariale sur l'augmentation de la pauvreté.

S'agissant de la loi contre les exclusions, texte, hélas, plus riche en déclarations d'intention qu'en mesures efficaces, elle pose bel et bien des problèmes d'application, toutes les associations le reconnaissent. C'est pourquoi le Premier ministre a l'intention de réunir au printemps un Conseil national de lutte contre l'exclusion pour voir comment améliorer cette loi (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP ; protestations sur les bancs du groupe socialiste).

URGENCES MÉDICALES

M. Jean-Luc Préel - Nous sommes très nombreux à nous inquiéter du fonctionnement des urgences, notamment de leur manque de moyens. Un changement de mentalités et de comportements des professionnels de santé comme des malades conduit à engorger les urgences hospitalières. Les médecins généralistes, de moins en moins nombreux, souhaitent eux aussi pouvoir se reposer et avoir une vie de famille. Les malades, angoissés, ont tendance à venir de plus en plus fréquemment à l'hôpital. Nous souhaiterions que la permanence des soins soit mieux assurée et que les appels des malades soient régulés par un médecin qui, au téléphone, puisse rassurer ceux qui peuvent attendre une consultation le lendemain, orienter vers le généraliste de garde ou une maison médicale ceux dont l'état exige un avis médical rapidement, et vers le SAMU les réelles urgences vitales.

Dans la pratique, en l'absence d'épidémie et alors que l'état sanitaire du pays ne s'est pas dégradé, la régulation des urgences est en crise. Les numéros d'appel sont saturés, ce qui a pour conséquence des délais de réponse dangereux ainsi que la démotivation des médecins et du personnel.

Monsieur le ministre, allez-vous augmenter rapidement les moyens des urgences ? Nous attendons votre réponse avec confiance. L'angoisse est grande dans le pays (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF).

M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées - Vous avez décrit une situation que nous connaissons. Pendant trop longtemps, les urgences ont été négligées. Elles doivent redevenir le c_ur battant de l'hôpital.

C'est pourquoi, dès septembre, après dix-huit mois de travail avec les urgentistes, j'ai annoncé un plan sur cinq ans en faveur des urgences, d'un montant de 489 millions d'euros. C'était la première fois qu'un gouvernement se donnait l'ambition de résoudre le problème des urgences dans sa globalité. En particulier, nous avons prévu des gardes par astreinte et la cogestion du « centre 15 » par les urgentistes et les médecins libéraux. Nous avons beau rendre plus attrayant le métier d'urgentiste, 40 % des postes ne sont pas pourvus. Ce métier sera encadré et reconnu.

En aval, 15 000 lits de soins de suite vont être créés.

Oui, les 150 millions prévus pour 2004 ont été débloqués il y a quinze jours et les agences sont en train de les distribuer. Il y aura des moyens pour redonner aux urgences la place qui leur revient (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

Plusieurs députés socialistes - Au revoir !

DÉLOCALISATIONS

M. Alain Bocquet - Ce matin, le groupe communiste et républicain a soumis au Parlement un plan de six mesures pour empêcher les délocalisations et préserver l'emploi.

Le Gouvernement et sa majorité UMP-UDF ont repoussé notre texte, n'acceptant même pas d'examiner les articles. Vous vous apprêtez d'ailleurs à faire subir le même sort à notre proposition contre la précarité, que nous présenterons jeudi matin.

Or, nos propositions, qui ne sont pas à prendre ou à laisser, ont pour objet de contribuer à combattre le chômage, qui ronge notre société. Vous avez beau maquiller les statistiques, les faits sont têtus : 30 000 emplois salariés ont disparu en 2003, 100 000 emplois ont été détruits dans l'industrie, le chômage des jeunes a progressé de 8 %.

Dans la région Nord-Pas-de-Calais, c'est à l'anéantissement de l'industrie textile que nous assistons : 2 500 emplois, soit l'équivalent de trois Metaleurop, ont encore disparu à Roubaix-Tourcoing, qui fut la capitale mondiale du textile.

Le gâchis industriel, le déclin économique, ça suffit !

Vous vous obstinez à mener une politique régressive, dure pour le monde du travail, la recherche et la culture, parce que vous cédez aux exigences boursières du Medef (« Ah ! » sur les bancs du groupe UMP).

Pour nous, entre l'être humain et les profits financiers, il n'y a pas photo ! Que comptez-vous faire pour empêcher les délocalisations, qui vident nos entreprises nationales et désertifient nos territoires régionaux ? (Applaudissements sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains)

Mme Nicole Fontaine, ministre déléguée à l'industrie - Vous m'avez entendue ce matin. Le débat sur la proposition de M. Gremetz a été utile. Il m'a donné l'occasion de dire mon intérêt et mon respect pour les personnes affectées par la perte de leur emploi (Interruptions sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains). Il m'a permis d'exposer la politique globale et cohérente du Gouvernement.

Il y a deux façons d'appréhender le problème. La vôtre, radicale, archaïque... (Protestations sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains) ...consiste à fermer les frontières, à administrer l'économie de manière dirigiste et à sanctuariser les entreprises non concurrentielles. Or, vous le savez, ces vieilles recettes nous mèneraient dans la même impasse que la Russie soviétique et les pays de l'Est qui aspirent aujourd'hui à la liberté (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

La bonne façon de combattre les délocalisations, c'est de renforcer la compétitivité de nos entreprises, en encourageant l'innovation industrielle, la création d'entreprises nouvelles, la différenciation des produits et la coopération européenne.

Le Gouvernement va résolument dans cette voie. C'est ainsi que nous retrouverons le chemin de l'emploi. Notre politique industrielle n'est pas économique et sociale, elle est sociale parce qu'elle est économique (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP). Nous l'avons montré, s'agissant des comportements inqualifiables de certains, nous saurons combattre les abus et préserver l'emploi (Même mouvement).

POLITIQUE D'IMMIGRATION

M. Michel Lejeune - Monsieur le ministre de l'intérieur, un pays comme le nôtre doit avoir une véritable politique de l'immigration, accueillante et ouverte pour ceux qui entrent légalement, ferme et efficace face à l'immigration clandestine. Tel est l'esprit de la loi sur la maîtrise de l'immigration de novembre 2003, qui a enfin donné à la France les moyens d'une politique ambitieuse et réaliste dans ce domaine. Localement, nous mesurons ses effets positifs. Ils sont sensibles en Seine-Maritime, notamment à Dieppe et au Havre.

S'agissant de l'immigration illégale, rien ne se fera sans coopération avec les pays sources. Vous avez effectué de nombreux déplacements, pour améliorer la lutte contre l'immigration clandestine et favoriser le codéveloppement.

Cinquante millions de passagers transitent par l'aéroport de Roissy-Charles-de-Gaulle, qui est la première frontière de la France. C'est là que le combat se joue. A certaines périodes des années 2002-2003, la zone d'attente de Roissy accueillait jusqu'à 550 personnes par jour.

M. le Président - Veuillez poser votre question.

M. Michel Lejeune - Votre politique de retours groupés a permis de ramener ce nombre à 80.

Quels enseignements tirez-vous de ce résultat ? En matière d'assistance juridique, comptez-vous signer une convention avec une association d'aide aux étrangers ? (Applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP)

M. Nicolas Sarkozy, ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales - La situation dans les zones d'attente de Roissy était proprement scandaleuse. Alors qu'elles ne comptaient que 240 places, 500 personnes en moyenne venaient s'y entasser, dans des conditions qui ne faisaient guère honneur à notre pays. Le débat était alors de savoir s'il fallait construire une troisième zone d'attente.

Le nombre de migrants placés dans ces zones est descendu en dessous de 100. La première raison de ce résultat est la multiplication des contrôles. Les filières criminelles savent qu'à Roissy, elles ne peuvent plus faire ce qu'elles veulent. Les Allemands ont procédé de la sorte à Francfort et les Hollandais à Amsterdam.

En zone de rétention, la présence d'un médecin 24 heures sur 24 n'était pas assurée. Nous avons signé une convention avec la Croix-Rouge, qui assure maintenant cette permanence. De même, vendredi, je signerai une convention avec l'Association nationale d'assistance aux frontières pour les étrangers, afin d'apporter une assistance juridique aux personnes retenues.

Les étrangers ont des droits, qui seront scrupuleusement respectés. Mais la France aussi a des droits et elle peut expulser ceux qui n'ont pas de papiers ou en présentent de faux. La politique du Gouvernement est juste parce qu'elle est ferme. Il est possible de concilier humanité et fermeté (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

ACCESSION SOCIALE À LA PROPRIÉTÉ

M. Patrick Ollier - Monsieur le ministre de l'équipement, notre pays ne compte que 56 % de propriétaires occupants. Nous sommes loin derrière la Belgique et le Royaume-Uni, où ce taux est de 70 %, sans parler de l'Espagne, où il atteint 82 %.

Ces statistiques sont d'autant plus préoccupantes qu'une enquête vient de montrer qu'en 2002, le taux des nouveaux acquérants était tombé de 12 à 7 %. Cette évolution résulte du manque d'ambition de vos prédécesseurs, qui ont laissé faire pendant cinq ans (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP ; protestations sur les bancs du groupe socialiste).

Un sondage montre qu'un tiers des locataires souhaiteraient devenir propriétaires de leur logement : 80 % d'entre eux accepteraient de dépenser plus dans cette perspective. Selon le même sondage, un locataire de HLM sur quatre aimerait acquérir son logement.

L'accession à la propriété est donc une des aspirations les plus fortes de nos concitoyens. Transmettre un patrimoine, constituer une épargne dans la pierre, telle est l'ambition légitime des Français, y compris les plus modestes. Beaucoup hésitent, jugeant ce rêve inaccessible. Nous devons avoir pour ambition de les aider à le réaliser. Oui, l'accession sociale à la propriété doit être un des objectifs de ce gouvernement (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF).

M. Gilles de Robien, ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer - Monsieur le président Ollier, la France se trouve depuis trop d'années dans cette situation paradoxale. Le Gouvernement a donc décidé de donner une nouvelle chance à l'accession sociale à la propriété, qui représente un beau projet de vie. Nous n'accepterons jamais que les personnes les plus modestes soient condamnées à payer un loyer jusqu'à la fin de leur vie, alors que les plus aisés auraient accédé à la propriété (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF et du groupe UMP). Aussi la loi « propriété pour tous » contiendra-t-elle deux mesures principales : d'abord, 10 000 logements seront ouverts à la location-accession dès 2004, bénéficiant du taux de TVA réduit à 5,5 % et de quinze ans d'exonération de taxe foncière ; ensuite, les bailleurs devront proposer à l'achat, à hauteur de 1 % de leur parc, des logements occupés par des locataires, même modestes (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF et du groupe UMP).

Lorsque nous sommes arrivés en 2002, la France ne construisait que 302 000 logements par an. Nous en sommes, depuis douze mois, à 318 500 (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF et du groupe UMP ; exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains).

CHÔMAGE

M. Daniel Vaillant - M. Fillon a beau répéter que tout ira mieux demain, rien n'y fait : entre le bilan du gouvernement de la gauche et le vôtre en matière d'emploi, il n'y a pas photo ! (Interruptions sur les bancs du groupe UMP)

Avec la gauche, 2 millions d'emplois ont été créés, et on a compté 900 000 chômeurs de moins ; avec vous, ce sont des emplois en moins et 196 100 chômeurs de plus.

Bien sûr, les chiffres publiés la semaine dernière font état de 27 600 chômeurs de moins en janvier. Cette embellie est aussi soudaine qu'opportune à trois semaines des élections régionales (Exclamations sur les bancs du groupe UMP). Pour mettre en valeur cette prétendue bonne nouvelle, je pensais qu'un député de la majorité vous poserait une question sur mesure. La ficelle aurait été si grosse qu'aucun d'eux n'a osé.

En réalité, 175 000 demandeurs d'emploi ont été radiés, soit 27,1 % de plus depuis décembre. Or radiation des listes ne signifie pas retour à l'emploi. Toutes ces personnes viennent à présent solliciter les services sociaux de nos communes et de nos départements (Approbation sur les bancs du groupe socialiste).

J'avais déjà interpellé M. Fillon sur les conséquences dramatiques de la nouvelle convention de l'UNEDIC. 800 000 personnes avais-je dit, perdront toute indemnisation. M. Fillon avait affirmé qu'il n'en serait rien. Eh bien, si ! En janvier, 175 000 personnes ont été radiées et c'est en juin que la nouvelle convention produira tous ses effets. Monsieur le Premier ministre, vous avez supprimé les emplois-jeunes (Interruptions sur les bancs du groupe UMP), réduit les CEC et CES, désossé la loi de modernisation sociale, attaqué les 35 heures (Vives interruptions sur les bancs du groupe UMP), supprimé l'ASS (Mêmes mouvements)...

M. le Président - Posez votre question !

M. Daniel Vaillant - Vous en êtes réduit à un subterfuge pour faire baisser artificiellement les chiffres du chômage (Vives interruptions sur les bancs du groupe UMP). Quand s'arrêteront la casse et la régression sociales qui vous tiennent lieu de politique ? Les Français ne sont pas dupes ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP ; applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains)

M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité - En janvier, le nombre de demandeurs d'emploi a diminué de 27 600 (Interruptions sur les bancs du groupe socialiste). Cette diminution est la deuxième en trois mois alors que le chômage a augmenté sans interruption depuis janvier 2001. Les douze derniers mois du gouvernement auquel vous apparteniez se sont soldés par 160 000 demandeurs d'emploi supplémentaires (Interruptions sur les bancs du groupe socialiste). C'est la réduction du chômage des jeunes qui est la plus nette, avec 1,8 %, alors que le dispositif de l'UNEDIC les concerne peu. Les licenciements économiques ont baissé de 10 % en janvier (Interruptions sur les bancs du groupe socialiste), et les autres licenciements de 4,5 %. Les reprises d'emplois se sont accrues de 22 000 et les offres d'emploi de près de 40 000. La réforme de l'UNEDIC n'explique en rien ces bons résultats. D'autant que le fait de ne plus être indemnisé ne conduit nullement à être radié des listes de l'ANPE. La vérité, c'est que la conjoncture s'améliore (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains). Pour la première fois au quatrième trimestre de 2003, les investissements ont augmenté après huit trimestres consécutifs de baisse. La consommation des ménages a augmenté de 2 % en janvier. Les baisses de charges commencent à produire leurs effets (Interruptions sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains). 26 000 Français, grâce aux textes votés par le Parlement, ont jugé possible de créer leur entreprise en janvier. Monsieur Vaillant, vous ne pourrez pas faire deux fois le coup de la manipulation des chiffres du chômage. Vous devrez vous habituer, tout au long de cette année, à ce que ces chiffres baissent. Si vous ne changiez pas d'attitude, serait-ce à dire que vous ne souhaitez pas que le chômage diminue en France ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF ; vives exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains)

ÉTABLISSEMENTS PÉNITENTIAIRES

M. Sébastien Huyghe - Le Gouvernement s'est attaqué au problème des conditions de vie carcérale. En effet, certaines de nos prisons ont besoin d'être modernisées et le nombre de places doit augmenter.

Un récent rapport du comité de prévention de la torture du Conseil de l'Europe a dénoncé l'état de vétusté de la maison d'arrêt de Loos, dont le taux d'occupation atteint 200 %, avec toutes les graves conséquences qui s'ensuivent pour les détenus et pour les gardiens.

Comment comptez-vous répondre à cette situation difficile ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF)

Mme Nicole Guedj, secrétaire d'Etat aux programmes immobiliers de la justice - L'établissement de Loos est en effet vétuste et inadapté, comme beaucoup d'autres. La moitié de nos maisons d'arrêt a été construite avant 1910. Je ne veux pas faire ici l'inventaire de la situation dont nous héritons (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste). La France a besoin d'établissements pénitentiaires modernes. Nous y travaillons (Mêmes mouvements). J'ai la ferme intention d'humaniser ces établissements, en pensant tout autant aux personnels, qui exercent dans des conditions difficiles et dangereuses, qu'aux détenus, qui vivent dans des conditions souvent indignes (Interruptions sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains).

Le Gouvernement a engagé un programme de construction sans précédent, avec 28 établissements et 13 200 places de plus en 2007. Ma volonté d'agir vite se heurte aux contraintes de temps qu'implique la réalisation de ces projets immobiliers. Mais notre législation comporte des mesures alternatives, comme le bracelet électronique, propres à faire reculer la surpopulation carcérale (Interruptions sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains).

La prison de Loos devra être fermée. Nous allons procéder par étapes, avec d'abord la création d'un établissement de 600 places à Séquedin (Interruptions sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains), puis d'un autre dans l'agglomération lilloise (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains ; applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

RECHERCHE

M. Pierre Lasbordes - Depuis plusieurs semaines, le collectif « Sauvons la recherche », et avec lui 50 000 pétitionnaires, manifestent leur vive inquiétude sur le sort de la recherche publique. Il s'agit avant tout d'une crise de confiance, qui se fixe sur l'évolution des crédits des laboratoires et sur les perspectives d'emploi des jeunes chercheurs. Elle exprime également une prise de conscience de l'inévitable adaptation de notre système de recherche, et aussi l'attachement de ces personnes de grand talent à la bonne poursuite de leurs travaux de recherche dans l'intérêt du savoir.

Malgré ce climat difficile, vous maintenez le dialogue avec la communauté scientifique et multipliez les rencontres afin de dégager des perspectives ambitieuses pour notre recherche. Il y a quelques jours, vous avez proposé des mesures concrètes. Pouvez-vous nous les exposer (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste) et préciser les orientations que vous entendez donner à notre système de recherche pour lui permettre d'affronter la concurrence internationale et préserver son niveau d'excellence ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

Mme Claudie Haigneré, ministre déléguée à la recherche et aux nouvelles technologies - Rappelons les faits. Les très nombreux signataires de la pétition des chercheurs ont manifesté leur inquiétude et demandé un geste significatif pour l'emploi, le dégel des crédits de 2002 et une large concertation sur l'avenir de la recherche.

Nous les avons entendus et nous leur donnons satisfaction (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste).

En ce qui concerne l'emploi scientifique, des mesures significatives sont prises : 120 postes supplémentaires de fonctionnaires au concours, 550 contrats de jeunes chercheurs, 200 contrats de postdoctorants supplémentaires et 300 allocations pour les jeunes chercheurs en cours de thèse.

Mais le problème de l'emploi scientifique réside aussi dans l'attrait des carrières pour les meilleurs chercheurs : nous sommes le premier gouvernement à avoir revalorisé de 15 % l'allocation de recherche.

En ce qui concerne le dégel total des crédits de 2002, nous l'avons accepté : 294 millions d'euros vont être mis à la disposition des laboratoires. Je rappelle que 675 millions d'euros avaient été reportés fin 2001 et que nous avions alors demandé aux laboratoires de contribuer à la maîtrise des dépenses publiques par un effort de gestion.

Depuis, une expertise que nous avons demandée a mis en évidence l'augmentation des dépenses des laboratoires. Aujourd'hui une stabilisation est nécessaire. Nous allons programmer les moyens des prochaines années et il n'y aura aucun gel sur les crédits pour 2004, nous nous y engageons.

Pour préparer l'avenir, nous avons tendu la main au collectif des chercheurs et sommes ouverts à toute initiative. Ce n'est pas le temps du recul ou de la démission : nos maîtres-mots pour l'avenir sont attractivité et excellence (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

RECHERCHE

M. Pierre Cohen - Nul n'a le monopole de l'intelligence ni du c_ur. Mais face à la colère sans précédent du monde de la recherche, vous avez apporté des réponses dérisoires. Rien ne laisse penser que vous allez revenir sur votre décision de supprimer des postes et des crédits. Vous mettez à mal la recherche française en précarisant les postes et en diminuant leur nombre. Les mesures annoncées, qualifiées de « miettes » par les chercheurs, ne comprennent pas les coupes sombres que vous avez opérées en 2002-2003 : 120 postes créés alors que vous en avez supprimé 550 ! Ayez le courage de les rétablir : c'est bien le minimum, surtout après les promesses électorales que vous avez faites aux restaurateurs et aux chefs d'entreprise.

Une fois cette mesure prise, le Gouvernement serait-il prêt à organiser de véritables assises de la recherche, au niveau des régions d'abord, puis au niveau national, pour préparer la future loi d'orientation ? (« La question » ! sur les bancs du groupe UMP).

Etes-vous capables de tenir ce pari de l'avenir ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

Mme Claudie Haigneré, ministre déléguée à la recherche et aux nouvelles technologies - J'ai écouté le concert des Cassandre nous accusant d'étrangler la recherche (Interruptions sur les bancs du groupe socialiste).

Je viens de répondre : 300 millions d'euros pour la recherche, 120 postes supplémentaires de chercheurs fonctionnaires, 550 contractuels, de meilleures rémunérations, voilà des gestes concrets !

Bien sûr, les salaires sont plus élevés aux Etats-Unis. Mais qu'avez-vous fait pour revaloriser les carrières et rajeunir les effectifs ? Vous avez créé des postes de fonctionnaires sans perspectives et attendu 2001 pour augmenter les moyens des laboratoires et engager de nouveaux programmes, sans dégager les crédits de paiement correspondants (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

La question n'est pas seulement celle du nombre des postes. Il faut aussi renforcer l'attractivité de la recherche pour les jeunes et nous y travaillons. Je propose une loi de programmation pour avancer.

Nos réformes n'ont pas pour but de « casser » la recherche - quelle inconscience cela serait ! - mais de la faire évoluer. Mais j'attends toujours des propositions constructives de l'opposition.

Et sachons aussi reconnaître nos succès : ce matin, Ariane 5 a mis sur orbite Rosette (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP), grâce à l'engagement du Gouvernement, de nos scientifiques et de nos entreprises. C'est ainsi que nous avancerons (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF).

MAISONS DE RETRAITE

M. Christian Kert - Les rythmes de vie ont évolué et aujourd'hui les personnes qui entrent en maison de retraite sont souvent très âgées et dépendantes. Monsieur le ministre, je vous avais remis, au nom des professionnels de santé du sud de la France, un document à ce sujet. Cette évolution appelle la médicalisation des établissements, c'est-à-dire l'augmentation de leur personnel de santé.

C'est l'objet des conventions tripartites signées entre l'Etat, les établissements et les départements. Vous en avez accéléré la conclusion : 330 conventions seulement ont été signées avant votre arrivée, 700 au cours du second semestre de 2002 et plus de 1 000 en 2003.

Certaines conventions prennent cependant du retard du fait de leur complexité !

Vous avez envoyé une circulaire budgétaire aux préfets pour 2004. Pouvez-vous nous préciser le montant des crédits qui seront alloués, le nombre d'établissements concernés et les effets sur les bénéficiaires de ces mesures ?

M. Hubert Falco, secrétaire d'Etat aux personnes âgées - A ce jour, 470 millions d'euros sont disponibles pour signer 2 000 conventions en 2004, soit le double de l'année 2003. Nous allons ainsi créer 160 000 lits médicalisés supplémentaires et améliorer le taux d'encadrement et les conditions d'accueil.

En outre, 70 millions d'euros sont prévus pour le maintien à domicile et l'accueil de jour.

C'est un effort exceptionnel, sans aucune mesure avec ce qui a été fait dans le passé et il est financé ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

HÔPITAUX

M. Alfred Trassy-Paillogues - Même si notre système de santé est considéré par l'OMS comme le plus performant, il est confronté à des difficultés qui appellent des réformes.

Le Gouvernement a pris des mesures cohérentes en matière de prévention des risques et de soins. Vous entendez également agir sur les structures pour assurer aux patients un service de qualité et mener une politique de santé ambitieuse.

L'un des axes majeurs est la modernisation de l'hôpital grâce au plan « Hôpital 2007 ». Cependant, dans mon département, la Seine-Maritime, les personnels de santé sont inquiets et expriment leur malaise. Comment entendez-vous apaiser ces inquiétudes ?

M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées - C'est vrai, il y a de la morosité à l'hôpital devant les équipements obsolètes et les bâtiments vieillis, mais nous y avons répondu par un plan d'investissement sans précédent de dix milliards deux cents millions d'euros sur cinq ans.

Morosité encore face au carcan budgétaire du budget global, mais nous avons inventé une nouvelle logique budgétaire de tarification à l'activité qui responsabilise et invite à l'innovation.

Morosité devant le fossé d'incompréhension qui s'est progressivement creusé entre les administratifs et les médecins, et nous a conduit à opérer une nouvelle répartition des responsabilités.

Morosité enfin face à une réduction du temps de travail qui, faute d'avoir été pensée et organisée, pénalise des équipes déjà insuffisantes. Nous y remédions par la création de 45 000 emplois non médicaux et de 3 500 postes de praticiens hospitaliers.

Par ailleurs, plus de 400 millions d'euros seront alloués aux hôpitaux avant la fin du trimestre pour financer les congés non encore pris.

La réforme est au c_ur de l'hôpital, porteur d'espérance (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. le Président - Nous en avons terminé avec les questions aux Gouvernement.

La séance, suspendue à 16 heures, est reprise à 16 heures 20.

MOTION DE CENSURE

L'ordre du jour appelle la discussion et le vote sur la motion de censure déposée en application de l'article 49, alinéa 2, de la Constitution par MM. Jean-Marc Ayrault, François Hollande et 129 membres de l'Assemblée.

M. François Hollande - Ce débat de censure est un exercice de vérité. Vérité sur votre projet de décentralisation, vérité sur votre bilan, vérité sur vos intentions au lendemain des scrutins de mars - consultation majeure pour l'avenir de nos territoires, dont il est bien de notre rôle d'éclairer l'enjeu, au moment même où nous discutons ici des compétences qui seront prochainement dévolues aux régions et aux départements.

Notre démocratie aurait tout à gagner, Monsieur le Premier ministre, à ce que nous fassions de la participation électorale aux scrutins de mi-mandat un objectif commun. Or, plutôt que de revendiquer votre action, vous paraissez fuir la confrontation, vous niez contre toute évidence la portée nationale de ces scrutins, alors que vingt-cinq de vos ministres sont candidats et que les autres, et vous le premier, battent la campagne. Vous semblez faire le pari de l'indifférence civique alors que l'abstention, l'éparpillement et l'extrémisme continuent de menacer les fondements mêmes de la représentation politique.

M. Jean Le Garrec - Très bien !

M. François Hollande - Si la gauche et la droite ne défendent pas leurs différences, si les gouvernements n'assument plus leur politique devant le peuple, à quoi sert de voter ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste) A vouloir brider l'expression des citoyens, à leur dénier le droit de juger votre action, vous leur interdisez la possibilité d'infléchir le cours des choses. Redoutez alors qu'ils le fassent sous d'autres formes que le vote ! Nous ne le souhaitons pas.

Le premier objet de notre motion de censure, donc, est d'alerter les Français sur le dévoiement de l'idée même de décentralisation. Pour nous, elle est l'expression des libertés locales ; pour vous, c'est le choix du libéralisme local (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste), c'est-à-dire d'abord celui du désengagement de l'Etat.

Je ne vous accuse pas, comme Jacques Chirac accusait Pierre Mauroy, en 1982, de vouloir « défaire la République », mais je vous reproche de vouloir décentraliser vos déficits, en les transférant aux collectivités locales (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. Guy Geoffroy - Que ne faut-il pas entendre !

M. François Hollande - Il est symptomatique que vous ayez reporté après les élections le volet financier de votre projet et l'examen par le Parlement de la loi organique : vous chargez les régions et les départements de compétences nouvelles, ô combien coûteuses - au moins 11 milliards - sans leur garantir les ressources financières nécessaires.

M. Bernard Accoyer - Mais si !

M. François Hollande - Bien des élus de votre majorité partagent notre inquiétude - sans toujours l'avouer publiquement -, plus encore depuis que le Président de la République a décidé, car tel était son bon plaisir, de supprimer la taxe professionnelle, principale rentrée financière des collectivités locales (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

Celles-ci vont se trouver devant un choix impossible : soit augmenter les impôts locaux, soit réduire le service rendu.

M. Guy Geoffroy - Et l'APA ?

M. François Hollande - J'en veux pour preuve les amendements de votre majorité visant à instaurer des péages à l'entrée des villes et des routes nationales - vite retirés, c'est vrai, pour cause électorale, mais qui révèlent l'ampleur du besoin de financement (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

Ce transfert est d'autant plus grave qu'il s'accompagne de l'abandon des missions de solidarité et d'aménagement du territoire. La dévolution du RMI et du RMA aux départements ainsi que du fonds de solidarité pour le logement, la remise en cause des contrats de plan, le transfert contraint des personnels éducatifs, l'absence de péréquation financière vont aggraver la fracture entre territoires riches et territoires pauvres (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste ; protestations sur les bancs du groupe UMP).

Enfin, à la clarté et à la simplification institutionnelle, qui supposaient de conforter l'intercommunalité, vous avez préféré l'empilement et la confusion. Ne vous étonnez pas que la décentralisation devienne impopulaire puisque vous la défigurez ! (Nouveaux applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

Mais votre projet n'est qu'une illustration de plus des choix que vous avez faits depuis deux ans. Alors que vous promettiez de rétablir la société de confiance, votre plus grande faute est d'avoir manqué à tous les principes de solidarité qui fondent le pacte républicain (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste ; exclamations sur les bancs du groupe UMP).

Vous vous êtes montrés impitoyables avec les plus fragiles et bienveillants à l'égard des plus privilégiés.

M. Dominique Dord - Tout en nuances !

M. François Hollande - Aux premiers, vous avez retiré une à une les protections qui préservaient leur dignité (Exclamations sur les bancs du groupe UMP). Vous avez ainsi accepté, en ce début d'année, de rejeter de l'UNEDIC plus de 230 000 chômeurs ; vous avez réduit les droits des bénéficiaires de l'allocation spécifique de solidarité ; vous avez diminué le nombre des contrats d'insertion ; vous êtes allés jusqu'à refuser la revalorisation des barèmes des aides au logement ; vous avez relevé le forfait hospitalier ; vous avez restreint l'accès à l'allocation personnalisée à l'autonomie et même à l'aide médicale d'Etat. Vous avez même poussé l'obstination jusqu'à baisser la rémunération du livret A et de l'épargne populaire tout en réduisant les crédits du logement social.

M. Marc-Philippe Daubresse - Pour construire 80 000 logements, quand vous en construisiez 50 000 !

M. François Hollande - La pauvreté et les inégalités se sont aggravées, toutes les statistiques le prouvent, et les témoignages des associations humanitaires le confirment. Vous avez, en quelque sorte, inventé la précarité durable ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste ; exclamations sur les bancs du groupe UMP)

Ces sacrifices sont apparus d'autant plus insupportables que, dans le même temps, vous avez multiplié les cadeaux fiscaux aux plus aisés et à vos clientèles : réduction de l'impôt sur le revenu et sur les grandes fortunes, baisse des charges sociales sans aucune contrepartie en matière d'emplois.... Bref, à l'insécurité sociale, vous avez ajouté l'injustice.

Le drame est que cette dureté sociale s'est traduite par une mollesse économique. Depuis deux ans, vous annoncez, et il faut sur ce point louer votre constance, une reprise de la croissance qui jamais ne vient...

Plusieurs députés UMP - Vous, vous l'avez eue ! Qu'en avez-vous fait ?

M. François Hollande - La croissance ne revient pas car depuis 2002, vous en avez stérilisé tous les ferments (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste). Faute de croissance et faute de volonté politique, le chômage a atteint un niveau record : 200 000 chômeurs de plus depuis votre arrivée, 26 % de plans sociaux en plus... (M. Fillon fait un geste de dénégation) Si, Monsieur le ministre du travail. Et le chômage des jeunes a connu une progression sans équivalent. Pour la première fois depuis dix ans, notre pays a détruit plus d'emplois qu'il n'en a créés (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

Plusieurs députés UMP - C'est faux !

M. François Hollande - C'est, hélas, vrai ! Vous vous défendez en invoquant une conjoncture difficile. Mais, en fait, vous avez agi sur l'emploi, comme sur le reste : avec aveuglement, retard et confusion. Vous avez commencé par commettre l'irréparable en supprimant tous les dispositifs de soutien public au marché du travail...

M. Jacques Barrot - C'est faux !

M. François Hollande - Il vous a fallu un an, et des plans de licenciements massifs, pour que vous découvriez, enfin, votre erreur et décrétiez, un peu tard, une « mobilisation nationale ». En fait de mobilisation, nous n'avons eu droit qu'à un « Monsieur plans sociaux » dont, soit dit au passage, on a perdu la trace, et à l'annonce d'une loi dont vous vous efforcez de dissimuler le contenu mais qui risque bel et bien de généraliser la précarité. Votre ministre des finances en résume en effet, avec sa candeur habituelle, l'esprit en affirmant « qu'il faut cesser de rire des petits boulots ». Il n'y a pas de quoi rire en effet.

Alors que vous prétendez vouloir réhabiliter le travail, vous le déréglementez, le déqualifiez, le dévalorisez. Vous créez des travailleurs pauvres avec des pauvres droits (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste ; exclamations sur les bancs du groupe UMP). Or, l'insécurité sociale fait perdre la confiance.

La politique que nous proposons, nous, vise à la stabilité, à la formation, à la préparation de l'avenir à travers une sécurité sociale professionnelle (Exclamations sur les bancs du groupe UMP) .

M. Dominique Dord - Expliquez-nous votre projet !

M. François Hollande - Nous souhaitons assurer à chacun une véritable qualification et un droit au reclassement tout au long de sa carrière. Tel est l'engagement que nous prenons, nous, socialistes, à rebours de ce que vous avez fait.

Non seulement injuste et inefficace, votre politique, Monsieur le Premier ministre, est également imprévoyante.

Vous avez laissé filer l'ensemble des déficits publics. En premier lieu, celui de l'Etat qui va atteindre 57 milliards d'euros en 2003, supérieur de plus de trois milliards aux prévisions - et encore est-ce aujourd'hui EDF qui, grâce à sa trésorerie, assure les fins de mois de l'Etat. Quant à la dette publique, elle a explosé, dépassant 1 000 milliards d'euros, soit 63 % du PIB, ce qui est un record absolu (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste). Pour ce qui est du déficit de la sécurité Sociale, vous l'avez laissé filer au point de crever tous les plafonds des avances de trésorerie de la Caisse des dépôts. Ce déficit atteint aujourd'hui près de 50 milliards d'euros, au point que vos ministres, en tout cas les plus sincères d'entre eux, finissent par admettre ce que vous refusiez hier, à savoir qu'il y aura bien une augmentation de la CSG au lendemain des élections (Exclamations sur les bancs du groupe UMP).

Par votre imprévoyance, vous ne vous contentez pas d'ignorer le présent, vous sacrifiez l'avenir. Tour à tour, l'éducation, la recherche, la culture ont été châtiées : 40 % de postes en moins dès cette année aux concours de recrutements de l'Education nationale ; gels, voire suppressions, de crédits pour la recherche ; remise en question du statut des intermittents du spectacle... Vous avez réussi, Monsieur le Premier ministre le tour de force de liguer contre vous les enseignants, les chercheurs, les artistes, les médecins, les avocats, les magistrats... Non dans un soulèvement hautain des détenteurs du savoir, comme vous voudriez le faire croire, mais dans un mouvement de solidarité de ces professions en faveur de l'égalité des chances et de l'accès de tous au savoir, à la science et à la culture. Il y a là un mouvement que je salue (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe socialiste ; huées sur les bancs du groupe UMP).

Ces raisons justifieraient, à elles seules, la censure de votre gouvernement. Mais, j'en ajouterai une autre, qui tient à la vérité à laquelle notre pays a droit, à la veille d'une consultation électorale.

Chacun sait, en effet, que vous préparez de nouvelles décisions au lendemain des scrutins de mars. Je ne parle pas de vos projets de remaniement ni de vos intentions en matière de direction de l'UMP qui intéressent vos amis, y compris au plus haut niveau, mais qui traduisent surtout l'impopularité de votre équipe gouvernementale... (Exclamations sur les bancs du groupe UMP)

Mme Nadine Morano - Occupez-vous plutôt du parti socialiste !

M. François Hollande - Je veux parler des préoccupations des Français dans trois domaines essentiels. Tout d'abord, l'avenir de l'assurance maladie. Le diagnostic est connu, l'ampleur des déficits aussi. Votre concertation ne vise qu'à gagner du temps (Exclamations sur les bancs du groupe UMP). En fait, votre projet est prêt, mais n'osez pas le dire.

M. François d'Aubert - Et le vôtre ?

M. Dominique Dord - Et vous, qu'avez-vous fait ?

M. François Hollande - Je saisis l'occasion de cette motion de censure pour vous poser quelques questions précises. Est-il vrai que vous vous apprêtez à relever la CSG sur les pensions et les allocations chômage ? Est-il vrai que vous envisagez une taxe d'un euro sur chaque boîte de médicament et chaque consultation ? Confirmez-vous que vous allez transférer la gestion du petit risque, comme M. Barrot l'a suggéré, sur les assurances et les mutuelles ? Allez-vous procéder à une nouvelle vague de déremboursement de médicaments ? (Exclamations sur les bancs du groupe UMP)

M. Dominique Dord - Et vous, que proposez-vous ?

M. François Hollande - Vos choix sont déjà faits. Ils traduisent une conception de l'avenir de l'assurance maladie qui n'est pas la nôtre. Mais le pire serait, Monsieur le Premier ministre, de dissimuler vos intentions et de prendre, durant l'été, par ordonnances, des mesures qui porteraient atteinte aux principes mêmes de notre sécurité sociale. Je vous demande au moins de démentir solennellement aujourd'hui le recours à cette procédure demain (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

La deuxième préoccupation des Français, c'est l'emploi. Sur ce sujet, vous avez annoncé une loi. Des rapports vous ont été remis, dont l'un envisage la généralisation des contrats à durée déterminée au travers du contrat de mission ou contrat de projet. (« Mais non ! » sur les bancs du groupe UMP). Votre ministre du travail, après avoir vanté les mérites de cette innovation, a démenti le projet, de peur sans doute d'effrayer les salariés dans cette période préélectorale. Là encore, je vous pose une question simple : quelle est votre position sur ce type de contrat et sur le toilettage du code que le Medef vous presse d'engager ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

En démocratie, l'esquive est la pire des pédagogies. En croyant vous abriter le temps d'un scrutin, vous vous exposeriez dangereusement, car au jeu de dupes, il n'y a que des perdants.

Troisième préoccupation : l'avenir des services publics. Vous asséchez aujourd'hui les réserves financières d'EDF, captez une soulte liée aux retraites pour tâcher de remplir les caisses de l'Etat... Vous préparez en catimini, non seulement un changement des statuts d'EDF et de GDF, mais leur privatisation. Votre besoin d'argent frais rejoint votre option idéologique (Exclamations sur les bancs du groupe UMP). Vous en avez le droit, mais il faut le dire ouvertement aujourd'hui, avant les prochains scrutins (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

Chacun sait aussi que quand bien même vos prévisions de croissance seraient confirmées, votre ministre des finances prépare déjà un plan de gel de crédits qui démantèlera la loi de finances que nous venons de voter. Là encore, nous souhaitons savoir ce qu'il en est. La dissimulation est la pire des méthodes de gouvernement. Le pays a le droit de connaître vos intentions, à la veille d'un scrutin, à nos yeux important.

Au-delà de vos résultats, nous souhaitons juger votre conception même de l'action publique. Vous faites peu de cas du Parlement. Votre dialogue social a trouvé ses limites dans les blocages que vous rencontrez pour être, ces derniers mois, toujours passé en force. Vous installez méthodiquement un « Etat UMP », sorte d'Etat RPR en plus grand (Exclamations sur les bancs du groupe UMP), et votre volonté de contrôle va jusqu'à installer à la direction des agences de sécurité sanitaire des responsables qui vous sont proches (Mêmes mouvements). Et que dire de la justice que vous souhaitez mettre au pas et voit la pression hiérarchique, de la Chancellerie jusqu'aux procureurs, se renforcer, et de la loi Perben II, qui permet au parquet de rendre la justice, ce qui constitue une rupture sans précédent dans notre organisation judiciaire (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

Plus généralement, vous couvrez du beau mot de « réforme » des régressions majeures. Non que notre pays n'ait pas besoin de modernisation, de mutations profondes, y compris au plan institutionnel ! Mais ces évolutions ne sont possibles que dans la solidarité et les garanties collectives. Quant au courage, Monsieur le Premier ministre, il n'est pas de s'aligner sur le conformisme économique dominant, mais de défendre les fondements de notre modèle républicain. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

La sécurité sociale, les services publics, les politiques industrielle, éducative, culturelle, tout cela représente à vos yeux des charges, des contraintes, des modèles désuets. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP). La mission que vous vous êtes assignée, sans l'avouer aux Français et en essayant de la camoufler par une communication confuse, est d'en finir avec la singularité française et d'imposer dans notre pays les normes libérales, ce que nous refusons (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

Il y a aujourd'hui une double exigence de vérité et de solidarité. Vous ne répondez ni à l'une ni à l'autre.

Le 5 mai 2002, les Français, et nous en étions, se sont levés massivement pour faire rempart à l'extrémisme. Ils ont confié au chef de l'Etat et à votre gouvernement la mission de préserver les fondements de notre pacte républicain. Vous ne respectez pas ce mandat. Au contraire, vous avivez la crise sociale et morale, vous faites le dangereux pari de la démobilisation civique et de l'abstention. Vous fondez vos espoirs électoraux sur l'indifférence et le fatalisme. Vous n'êtes pas le seul à droite à brouiller les enjeux.

Vos alliés de l'UDF annoncent que « le pays glisse de déception en déception et court même vers l'abîme ». Et ils vont pourtant vous renouveler leur confiance et s'allier avec l'UMP au deuxième tour des élections prochaines, comme pour rouler plus vite dans l'abîme, ils seront donc solidaires jusqu'au bout de vos choix... La mauvaise foi en plus. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

Pour ce qui nous concerne, il nous importe, au nom même des droits du Parlement, d'alerter les Français et de vous interpeller sur les conséquences de votre politique. L'ampleur de votre majorité vous met à l'abri de la censure. Mais craignez, Monsieur le Premier ministre, que les Français ne se substituent à nous le 28 mars en votant la défiance : ce serait légitime et justifié. (Mesdames et messieurs les membres du groupe socialiste se lèvent et applaudissent)

M. François Bayrou - J'ai cru que M. Hollande allait terminer son discours sans s'exprimer sur les vraies raisons de cette motion de censure. Heureusement, les derniers paragraphes ont éclairé l'Assemblée (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF et plusieurs bancs du groupe UMP).

Car la vraie nature de l'exercice imposé à cette assemblée n'a échappé à aucun observateur. (« Très bien ! » sur plusieurs bancs du groupe UMP)

Il ne s'agit pas d'une motion de censure : une telle motion n'aurait aucune chance d'être adoptée et aucun fait nouveau, aucun événement ne la justifierait.

Il ne s'agit pas de défendre une motion de censure, mais de poser une rustine sur la campagne électorale fatiguée du PS ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF et sur plusieurs bancs du groupe UMP)

M. Julien Dray - Où est l'UDF ? A droite !

M. François Bayrou - Monsieur Dray, je suis à vous dans une minute ! Un peu de patience.

M. Julien Dray - On sait où sont les grenouilles de bénitier. Rendez-nous Lecanuet !

M. François Bayrou - Ce n'est nullement qu'il n'y ait pas lieu de débattre. L'avenir du pays est en jeu. Mais ce n'est pas le problème du PS, qui ne cherche qu'à atteindre sa cible.

Or quelle est la cible du PS ? Est-ce le Gouvernement ? La précarité de l'emploi ? L'extrême droite ?

Non, la cible du PS, comme l'ont montré des déclarations de MM. Ayrault, Dray, Hollande, c'est l'UDF ! Voilà où en est le PS! (Interruptions sur les bancs du groupe socialiste).

M. Julien Dray - Ce sont des propos indignes.

M. François Bayrou - Monsieur Dray, nous allons mettre les montres à l'heure.

M. Julien Dray - Cessez ces attaques personnelles !

M. François Bayrou - Parce que j'ai parlé de montres ?

Monsieur Dray, quand vous m'avez traité de « grenouille de bénitier », c'était une attaque autrement plus personnelle et grave.

Voilà où en est un parti qui a subi, en 2002, une de plus grandes humiliations de l'histoire : un rejet, un désaveu comme on en trouve peu d'exemples ! (Interruptions sur les bancs du groupe socialiste). Un parti qui, depuis, n'a renouvelé ni ses idées, ni aucun de ses dirigeants : ceux-ci s'observent avant la bataille et se remobilisent enfin, en attendant les légions barbares ! On pense au couplet de La Marseillaise :

« Entendez-vous dans les campagnes

« Mugir ces féroces soldats ? »

Il est temps, en effet, qu'un sang impur abreuve nos sillons. Qu'est-ce qui suscite pareille mobilisation ? Rien n'est plus dangereux, pour les tenants de l'ordre ancien, que l'émergence d'une force nouvelle.

Entre l'opposition et le parti du Gouvernement, il y a comme une connivence. Elle ne se manifeste guère à haute voix, mais le peuple français sait aussi entendre les silences. Cette connivence est apparue avec l'adoption de la loi électorale qui visait à instituer le bipartisme en France, ce qui arrangerait bien certains ! (Protestations sur les bancs du groupe socialiste) De même, quand le débat s'est engagé sur l'allocation spécifique de solidarité, il a fallu des semaines pour que le PS accepte de se préoccuper du sujet.

Cette connivence a une raison : la certitude qu'entre les uns et les autres, le pouvoir peut se partager. Entre l'une et l'autre des deux forces qui occupent le pouvoir en France depuis vingt-cinq ans, il existe une alliance de fait. L'une et l'autre, à défaut de pouvoir le monopoliser, se satisfont de l'occuper une fois sur deux ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF ; interruptions sur les bancs du groupe socialiste)

Pourquoi ces hurlements ? Parce que mes propos vous gênent (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF). Mais beaucoup de citoyens se détournent de vous et recherchent d'autres solutions.

D'une certaine manière, les erreurs du Gouvernement ne sont pas graves pour le PS : elles font basculer, pense-t-il, les bataillons d'électeurs qui lui permettront de revenir au pouvoir dans trois ans. Il serait donc grave qu'une autre voix s'élève (Interruptions sur les bancs du groupe socialiste). C'est pourtant ce que les Français attendent. Ils veulent qu'on leur parle le langage de la vérité. L'inconvénient, pour vous, c'est que cela vous empêcherait de revenir au pouvoir (Interruptions sur les bancs du groupe socialiste).

Lionel Jospin - un nom qui devrait vous inviter au silence -, Lionel Jospin qu'on voit beaucoup ces temps-ci s'en était aperçu dans une tribune célèbre du Monde.

Laurent Fabius a repris son analyse quelques semaines plus tard. Le service des études du PS a préparé une note de dix pages contre l'ennemi irréductible.

Je veux dire au PS que des millions de Français ont besoin de s'exprimer. Au moment des élections, ils auront à dire quelque chose au Gouvernement. Ils ne lui diront pas de s'en aller, mais ils lui diront qu'il doit changer, que la confiance est compromise... (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste) ...qu'à trop tirer sur le fil, à la fin il rompt, que résoudre la question sociale ne consiste pas à punir les chômeurs mais à leur offrir du travail.

Quand vous allez, comme nous, comme les élus de l'UMP, sur les marchés, vous entendez les citoyens vous dire : « Les politiques on n'y croit plus ! ». Ils mettent tout le monde dans le même sac.

Quand, dans une démocratie, la confiance a disparu, le pire est à craindre. L'abîme qui s'est ouvert sous nos pieds le 21 avril 2002 peut s'ouvrir encore. C'est pourquoi il faut s'attaquer aux vraies questions (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF). La démocratie dans ce pays, c'est une vraie question. Le rôle du Parlement, la représentation, ce sont de vraies questions.

Nous avons accepté que le Parlement se transforme en chambre d'enregistrement, où tout est joué d'avance, où les amendements ne sont même plus reçus, où le vote n'est plus personnel (Interruptions sur les bancs du groupe UMP). Et maintenant, les ordonnances !

M. le Président - Vous devriez venir plus souvent à l'Assemblée. On ne peut pas l'attaquer ainsi. Vous verriez qu'on y accepte beaucoup d'amendements ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP ; rires sur bancs du groupe socialiste)

M. François Bayrou - Monsieur le Président, puisque vous intervenez dans le débat (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF) souffrez que l'on vous dise ceci : il n'est pas normal que la réforme la plus importante dont nous ayons à délibérer, celle de la sécurité sociale, soit, nous annonce-t-on, décidée par ordonnances, sans que l'Assemblée dispose du droit d'information et de décision (Interruptions sur les bancs du groupe UMP ; applaudissements sur les bancs du groupe socialiste). Souffrez que de la tribune un parlementaire conséquent vous le dise ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF ; exclamations sur les bancs du groupe UMP)

M. Pierre Lellouche - Ce sont des ordonnances qui ont créé la sécurité sociale !

M. François Bayrou - Quand on décide de procéder par ordonnances sur un sujet aussi grave, cela signifie que la politique se déshabille de son pouvoir au profit du technocratique ! Nous en avons assez souffert (Interruptions sur les bancs du groupe UMP ; exclamations sur les bancs du groupe socialiste). Quand l'ambiance devient aussi chaude, c'est qu'il se passe ici des choses intéressantes !

Plusieurs députés socialistes - Censure ! Censure !

M. François Bayrou - Nous avons un très grave problème de démographie médicale, dû aux numerus clausus successifs, et à la décision de réduire de plusieurs milliers le nombre de médecins français en leur accordant des indemnités conséquentes. Ces mesures prises par ordonnances, auxquelles aucun politique ne s'est intéressé ont conduit notre système médical dans une grave impasse (Exclamations sur les bancs du groupe UDF ; interruptions sur les bancs du groupe UMP). Tant pis si ce rappel gêne !

L'Assemblée, pour une fois, entendra des mots qui ne sont pas convenus à l'avance (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF ; exclamations sur les bancs du groupe UMP). Dans notre République, les contre-pouvoirs sont une vraie question. Les nominations au Conseil constitutionnel nous ont offert cette semaine un spectacle auquel nous sommes habitués depuis longtemps : elles ont été faites en fonction des liens d'amitié (Vives interruptions sur les bancs du groupe UMP), et ce n'est pas une honte de le dire.

Plusieurs députés socialistes - Censure ! Censure !

M. François Bayrou - Une nouvelle fois les journaux ont écrit que dans ce qui devrait être le plus haut lieu de l'impartialité la droite détenait sept sièges, contre deux pour la gauche. La conception que se fait un certain nombre d'entre vous de ce que devraient être ces instances et ces contre-pouvoirs, c'est que comme dans d'autres pays, leur impartialité devrait être garantie par l'accord donné par la majorité et par l'opposition à ces nominations (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF).

La justice fait question dans notre pays. Autre question, les commissions d'enquête. Une commission d'enquête sur la canicule vient de remettre son rapport. On sait maintenant que l'immense majorité des 15 000 morts de l'été dernier serait encore vivante (Vives protestations sur les bancs du groupe UMP). Quand une commission d'enquête sur un tel drame rend ses conclusions, on serait en droit d'attendre que des décisions soient prises et des changements fondamentaux apportés pour que le pays sente que l'enquête est suivie d'effets. Combien de fois la Cour des comptes a fait l'expérience de dénonciations demeurées sans suite ! (Interruptions sur les bancs du groupe UMP) La connivence existant entre les puissants et les initiés chaque fois qu'ils sont mis en cause creuse le gouffre qu'on dénonçait entre France d'en haut et France d'en bas.

M. Jean-Pierre Grand - C'est le discours du Front national !

M. François Bayrou - Ce n'est pas le discours de l'extrémisme (« Si ! » sur les bancs du groupe UMP), c'est celui d'un républicain qui voudrait que son pays change ! Quand la gauche était au pouvoir, vous teniez les mêmes discours que les miens ! Maintenant que vous êtes au gouvernement, vous les avez oubliés et ils ont repris de l'autre côté. C'est la République qui est en jeu ! C'est la démocratie qui est en question ! (Interruptions sur les bancs du groupe UMP) Vous ne pouvez pas vous en désintéresser ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF) Il faut de la conséquence ! (Interruptions sur les bancs du groupe UMP) Je veux défendre ici, au contraire du parti socialiste, l'esprit de réforme. La réforme est vitale pour notre avenir. Aucun homme politique ne se comporte en homme d'Etat s'il le nie. Nous avons avec le temps laissé l'Etat s'alourdir.

Comment alors réformer en étant juste ? La contrepartie de la réforme ne peut pas être la précarité croissante, ni la baisse d'impôts pour les plus favorisés. Cela ne peut pas être le déficit croissant, que tous les Français paieront, ni la mise en cause des ultimes garanties accordées aux chômeurs en fin de droits. Il y a eu là une faute du Gouvernement...

M. Jean-Pierre Grand - Vous n'avez plus qu'à adhérer au PS !

M. François Bayrou - ...et nous sommes alors montés en première ligne pour la combattre. Il n'est pas nécessaire d'adhérer au PS pour dire que supprimer aux chômeurs en fin de droits 13,49 € par jour n'était pas une mesure de justice (Interruptions sur les bancs du groupe UMP ; exclamations sur les bancs du groupe socialiste).

Mme Martine David - Tout cela, vous l'avez voté !

M. François Bayrou - Il n'est pas nécessaire d'être dans l'opposition pour dire que le sort réservé aux plus faibles des intermittents (Vives protestations sur les bancs du groupe UMP) n'était pas la justice ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF)

M. André Schneider - Et vous, ce n'est pas de la démagogie ?

M. François Bayrou - Il n'est pas juste de s'opposer à la réforme, mais l'esprit de justice consiste à l'expliquer au pays et à l'équilibrer par l'exercice de la solidarité nationale.

La réforme ne peut pas être uniquement comptable. Il s'agit d'une démarche stratégique, qui n'hésite pas à sanctuariser les dépenses qui répondent à de véritables priorités. Ainsi l'éducation, la recherche devraient bénéficier du soutien ininterrompu de nos gouvernements, comme aux Etats-Unis (Exclamations sur les bancs du groupe UMP). Nous croyons en effet que le Gouvernement, jusqu'à présent, n'a pas réalisé l'équilibre entre réforme, justice et lisibilité. Le pays ne pourra obtenir cette politique nouvelle que par le vote du 21 mars, un vote qui ne soit pas un retour en arrière, qui ne se borne pas, comme le souhaite l'opposition, à faire tomber le Gouvernement.

Nous ne voulons pas la chute du Gouvernement ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP) Nous voulons que le Gouvernement entende le pays ! Nous voulons, comme le pays, que le Gouvernement soit juste et qu'il assume un projet devant les Français (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste).

C'est pourquoi nous ne voterons pas votre censure (Mêmes mouvements). Nous garderons notre liberté de parole et nous continuerons à proposer à notre pays une voie nouvelle qui oblige les deux partis dominants à se réformer, à se poser les questions qui fâchent, à admettre le pluralisme, à faire de force ce qu'ils n'ont pas voulu faire de bon gré, à regarder l'intérêt du pays et non pas le leur en fonction de la prochaine alternance. Cette démarche dérange, on le voit bien. Tant mieux ! Vient un moment où il faut déranger l'ordre établi, l'ordre trop usé, pour que l'avenir prenne un autre visage. (Mmes et MM. les membres de l'UDF se lèvent et applaudissent ; exclamations sur les bancs du groupe UMP).

Mme Marie-George Buffet - Le 15 mars, nous allons célébrer le soixantième anniversaire du programme du Conseil national de la Résistance.

Dois-je rappeler que c'est lui qui fonde, depuis la Libération, le pacte social dans notre pays ? Que c'est dans une France sinistrée que ces choix courageux ont permis à notre peuple d'envisager une vie digne et solidaire ?

A l'évidence, oui. Car votre politique, Monsieur le Premier ministre, attaque, un à un, tous les piliers du programme du Conseil national de la Résistance. Services publics, entreprises publiques, sécurité sociale, tout cela serait aujourd'hui dépassé : vous menez une offensive brutale pour conformer notre pays aux exigences du capitalisme mondialisé.

Evoquons d'abord votre politique de l'emploi, ou plutôt de casse des acquis sociaux. Méticuleusement, vous procédez au démantèlement de notre législation du travail : remise en cause de la réduction du temps de travail, suppression des emplois-jeunes, passivité face aux licenciements boursiers, réforme du dialogue social dans le sens du patronat.

Vous combinez savamment l'apathie face à la dégradation du marché de l'emploi et le choix délibéré de la régression sociale. Les CDD et contrats en intérim représentent désormais 80 % des embauches et avec le contrat de mission vous programmez la fin du contrat à durée indéterminée, y compris dans la fonction publique.

Le chômage n'a cessé d'augmenter touchant 2,5 millions de personnes fin 2003, soit 140 000 de plus que fin 2002. Vous osez vous féliciter d'une baisse des chiffres en début d'année alors qu'elle n'est due qu'à la suppression brutale des allocations à des milliers de personnes, aujourd'hui plongées dans la détresse. Les associations de chômeurs, les syndicats vous ont demandé de surseoir à cette décision - en vain.

Vous réduisez les moyens des dispositifs d'insertion, sous couvert de redressement des finances publiques. Les queues s'allongent aux Restos du c_ur, aux portes du Secours populaire, du Secours catholique et on recense plus d'un million d'enfants pauvres.

Il est vrai que d'autres crédits ont été augmentés : plusieurs milliards d'euros ont « allégé le coût du travail » pour les multinationales, sans la moindre contrepartie ni le moindre contrôle. Moins de solidarité nationale, plus de solidarité envers les patrons, voilà votre politique !

Quand vous prétendez réformer les retraites, c'est pour en diminuer le montant, tout en faisant payer davantage les salariés.

Quand vous prétendez sauvegarder les services publics, c'est pour engager leur privatisation.

Quand vous prétendez rénover le dialogue social et moderniser le droit du travail, c'est pour supprimer les garanties collectives. En attendant la suppression d'un jour férié et la remise en cause du droit de grève.

Vous portez atteinte à la solidarité nationale en réduisant la durée de l'ASS et en créant le RMA, qui n'est rien moins qu'une nouvelle forme de servage.

Vous réservez un triste sort à l'assurance maladie afin de parachever les réformes déjà opérées - déremboursements, augmentation du forfait hospitalier, étranglement des hôpitaux. Et pour cela vous comptez légiférer en catimini, au mois de juillet et par ordonnances ! Ayez au moins le courage d'un vrai débat public et d'un vrai débat parlementaire sur cette question !

Votre politique fiscale inefficace et injuste mérite également sanction. Les baisses d'impôts, ciblées sur les seuls impôts progressifs, ont profité, pour les trois quarts, aux 10 % de Français les plus aisés.

Comment s'étonner, dans ces conditions, du déficit public record et des coupes sur les budgets sociaux et sur la recherche ?

Les associations, étranglées, mettent la clef sous la porte, y compris les associations d'aide humanitaire internationale puisque le Quai d'Orsay a réduit son soutien. Tout cela pour baisser l'impôt sur la fortune !

Votre politique de sécurité stigmatise les populations pauvres, les jeunes, la banlieue et attise les peurs. Votre loi sur la justice met en danger les libertés en accroissant considérablement les pouvoirs de la police et du parquet. Il va en résulter une justice à deux vitesses, arrangeante pour les plus puissants, mais intransigeante pour les plus faibles. La présomption d'innocence est sérieusement entamée.

De nombreux intellectuels, chercheurs et artistes, se sont élevés contre votre guerre à l'intelligence et ont dénoncé, hier encore, « le KO social » avec force et créativité. Ce que vous instaurez, c'est le « chacun pour soi », l'aggravation des inégalités, l'exploitation. Nombreux sont ceux qui ne veulent pas de votre société.

Les intermittents du spectacle ont déposé un contre-projet à la réforme de l'assurance chômage, qui sape insidieusement la démocratie culturelle. De nombreux députés, y compris quelques membres de l'UMP, vous ont fait part, Monsieur le Premier ministre, de leur inquiétude. Votre devoir est d'ouvrir les négociations.

Les enseignants ont lancé une grève unitaire le 12 mars pour défendre le service public.

Les associations familiales ont protesté contre la réduction projetée de l'API, qui s'ajoute à d'autres mesures de régression des droits des femmes - sans parler des péripéties de l'amendement Garraud. Les femmes manifesteront le 6 mars, comme les chômeurs, contraints de saisir la justice pour faire valoir leurs droits.

Les agriculteurs n'ont pas la tête à fêter la région Poitou-Charentes au salon de l'agriculture. Celle-ci connaît une crise profonde qui menace des dizaines de milliers d'emplois. A quand un Grenelle des prix agricoles ?

C'est pourquoi les parlementaires communistes ont voulu, cette semaine, faire entendre la voix de tous les « sans » - sans-logement, sans-papiers, sans-emploi - à travers deux propositions de loi. Ces textes ont été nourris de la réflexion des salariés face à la déferlante des plans sociaux et au silence coupable du Gouvernement devant ce gâchis. Nous ne nous contentons pas de censurer, nous avons des propositions, et nous ne doutons pas qu'elles sauront rassembler tous ceux qui ne veulent ni des délocalisations, ni du travail précaire. Alors, nous voici dans cet hémicycle pour cet exercice un peu convenu, en cette période électorale. Mais la meilleure des motions de censure viendra des luttes des salariés - et des urnes lors du prochain scrutin !

Nous sommes conscients que la condamnation de votre politique ne suffit pas. La meilleure façon de vous censurer, c'est de proposer une alternative à votre politique réactionnaire. Les députés communistes et républicains sont déterminés à hausser le niveau de la riposte, à faire sauter le verrou libéral qui bloque les politiques à tous les niveaux, à porter des propositions réellement progressistes pour aller chercher l'argent directement dans les poches de ceux à qui il est inutile !

Pour répondre à la précarisation de la société, nous proposons la sécurité d'emploi, de formation et de revenu.

Pour financer la sécurité sociale, une taxe additionnelle sur les produits financiers.

Pour le logement, un grand service public de l'habitat.

Les batailles électorales actuelles donnent naissance à une dynamique dont le Gouvernement a tout à craindre.

Monsieur le Premier ministre, les salariés vous censurent, mais aussi les intermittents, les retraités, les chômeurs, les juristes, les hospitaliers.

Depuis plus d'un an, en vrais légataires universels des intérêts du Medef, vous avez mené un combat à la solde d'une minorité de privilégiés.

Heureusement, la Constitution établit des droits inaliénables, et notre République arbore encore la fière devise « Liberté, Égalité, Fraternité ».

Au nom de tous ceux et celles que votre politique humilie, les députés du groupe des députés communistes et républicains voteront cette motion de censure (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains).

M. Bernard Accoyer - Cette motion de censure donne à l'UMP l'occasion d'exprimer sa confiance au Gouvernement (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP). Malgré le large soutien des Français, les socialistes tentent une diversion électoraliste (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste).

Le discours de François Hollande représente la caricature d'un socialisme amnésique de son bilan et du verdict du 21 avril 2002. Derrière ces contrevérités se cache le vide des idées d'un PS à la remorque de l'extrême gauche. Les Français ont choisi l'alternance il y a vingt mois, et il n'y aura pas de session de rattrapage, pas plus aujourd'hui à l'Assemblée nationale que demain dans les régions.

Je comprends votre embarras. Pendant cinq ans, la gauche plurielle s'est refusée à engager des réformes pourtant urgentes. Elle a laissé, le 21 avril, une France bloquée, exaspérée, endettée, désespérée (« Très bien ! » sur les bancs du groupe UMP).

La gauche plurielle n'a pas été sociale. Elle a bloqué la France par une application autoritaire et sans concertation des 35 heures, qui a découragé les investissements, poussé aux délocalisations et miné les finances publiques. Coûteuses pour les collectivités locales, les 35 heures ont désorganisé les hôpitaux. Injustes et régressive, elles ont empêché les salariés modestes de travailler plus pour gagner plus, bloqué les salaires et conduit à la multiplication des SMIC.

Est cela la justice sociale ? (« Très bien ! » sur les bancs du groupe UMP)

Une France bloquée par une loi démagogique dite de modernisation sociale !

Une France bloquée par l'absence de dialogue social - les responsables syndicaux Bernard Thibault et Nicole Notat en sont eux-mêmes convenu dans la presse.

Une France endettée par du social à crédit.

Une France endettée envers ses jeunes par des emplois publics précaires sans perspective ni formation. Et que dire des 350 000 emplois jeunes vainement promis dans le secteur privé ?

Une France endettée par des mesures non financées - l'APA, la CMU, l'AME.

Une France endettée par les déficits abyssaux des entreprises publiques, les freins à la création d'entreprises, le gaspillage des fruits de la croissance.

Une France immobile, abandonnant la sécurité sociale, la ponctionnant même pour financer les 35 heures.

Aucune des branches de la sécurité sociale n'aura été épargnée, mais c'est la branche vieillesse qui souffrit le plus de l'absence d'une réforme sur l'avenir de nos retraites.

Monsieur Hollande, cette « régression sociale de grande ampleur » est davantage le fait du bilan des cinq années du gouvernement Jospin, que des vingt mois du gouvernement Raffarin ! Et parlons-en, de ces vingt mois d'action.

Nous avons placé l'homme au c_ur de la société (Rires sur les bancs du groupe socialiste) et mis l'économie au service d'une solidarité renouvelée.

Cette politique commence à porter ses fruits - les derniers chiffres de création d'entreprises, du chômage ou de la croissance en témoignent. Le Gouvernement a replacé la valeur travail au centre de ses préoccupations. Je sais que l'opposition n'aime pas que nous évoquions cette valeur et, à cet égard, quel étrange renversement de l'histoire ! Hier, la gauche de Jaurès, de Blum, de Thorez vénérait le travail, célébrait l'effort et la production. La gauche d'aujourd'hui met tout cela en procès.

Nous nous battons pour un travail libéré grâce à l'assouplissement des 35 heures, pour un travail accessible aux moins qualifiés grâce aux contrats jeunes en entreprise - 130 000 ont déjà été signés et 60 000 Civis devraient être conclus cette année. Nous nous battons encore pour un travail reconnu, avec la création du RMA, pour un travail récompensé grâce à la hausse historique du SMIC - plus 11,4 %, contre 0,29 %, sous le gouvernement Jospin.

Et je ne parle pas de la hausse de 800 millions d'euros sur deux ans de la prime pour l'emploi, ni de la conclusion de 110 000 contrats initiative-emploi et 185 000 contrats emploi solidarité et contrats emplois consolidés en 2004, ni encore de la baisse des charges sur les bas salaires.

Mais d'autres mesures s'inscrivent dans cette priorité sociale, comme le financement de l'APA que la gauche plurielle avait promis, la procédure du rétablissement personnel en cas de surendettement, la restauration du dialogue social pour élaborer la réforme des retraites et de l'assurance chômage, l'instauration d'un droit individuel à la formation pour chaque salarié.

Surtout, c'est ce gouvernement qui sauve la sécurité sociale, héritage du général de Gaulle et pivot de la solidarité.

La branche famille, avec la prestation allocation jeune enfant pour 200 000 familles supplémentaires, cumulable avec l'allocation parent isolé.

La branche maladie qui sera prochainement rénovée, non pas selon je ne sais quel plan secret, mais à partir du constat unanimement partagé du Haut Conseil pour l'avenir de l'assurance maladie.

La branche vieillesse, désormais consolidée pour l'avenir, par la réforme que Lionel Jospin avait obstinément refusée et qui offre même à ceux qui ont commencé à travailler très jeunes le droit à la retraite avant 60 ans, que j'entends encore Mme Guigou refuser au groupe communiste, à cette tribune, le 27 novembre 2001 (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe UMP).

C'est également notre majorité qui assure le financement pérenne de la solidarité à l'égard des personnes âgées et des personnes handicapées, à hauteur de 9 milliards.

A ces mesures spécifiquement sociales, il faut ajouter les résultats remarquables du Gouvernement concernant la délinquance qui, parce que l'insécurité menace davantage les populations les plus fragiles, contribuent à atténuer leur sentiment d'abandon, et de précarité comme l'a souligné Nicolas Sarkozy. Au contraire de votre politique du « social éphémère », des statuts parking sans devenir, des prestations annoncées mais non financées, ce gouvernement et sa majorité construisent du « social durable » : la gauche plurielle avait choisi l'apparence et la communication, nous avons choisi le courage et l'action ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

Sur la décentralisation, Monsieur Hollande, vous nous faites aussi un mauvais procès, en parlant du désengagement financier de l'Etat. Or depuis la réforme constitutionnelle du 28 mars 2003, les collectivités territoriales peuvent être aujourd'hui certaines que, contrairement à ce qui s'était passé pour les lois de décentralisation de 1982 et 1983, tout transfert de compétences s'accompagnera d'un transfert de financement (Interruptions sur les bancs du groupe socialiste).

Mais ce propos m'oblige à évoquer une réalité : les socialistes ont, au niveau régional, le même goût pour l'impôt qu'au niveau national (« Eh ! oui » sur les bancs du groupe UMP). La fiscalité régionale des régions dirigées par la gauche dépasse de près de 11 % celle des régions qui ont un président UMP. Selon l'Expansion, la région la mieux gérée est la Champagne-Ardenne, région dirigée par l'UMP et la moins bien gérée est une région de gauche, le Nord-Pas-de-Calais. Pour l'emploi et la création d'entreprises, c'est la région Poitou-Charentes, Monsieur le Premier ministre, qui arrive en tête (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP). En bas du classement, il y a l'Ile-de-France, qui est encore socialiste pour quelques semaines !

L'acte II de la décentralisation repose avant tout sur la confiance en l'homme, à travers la responsabilisation des acteurs locaux.

Avant de conclure, il faut répondre à une question : pourquoi les socialistes ont-ils voulu déposer une motion de censure ?

Ne faut-il pas chercher la réponse dans l'échec historique de leur candidat le 21 avril 2002, dont ils ne se relèvent pas. Le PS n'a aucune proposition alternative, M. Hollande vient de le confirmer, et ses ténors, tels Dominique Strauss-Kahn encore récemment à Londres, tiennent un double langage ; il tombe dans le dogmatisme, l'idéologie, la caricature. Opter pour cette stratégie, c'est tout simplement se mettre à la remorque de l'extrême gauche (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP). Absents sur le plan des idées, le PS est écartelé entre ses archéos et ses libéraux, entre ses « bobos » et ses altermondialistes : à chacun sa tribu !

Monsieur le Premier ministre, l'épreuve renforce le juste. Votre gouvernement ne mérite évidemment pas la censure de l'Assemblée nationale.

La voie que vous avez tracée sous l'impulsion du Président de la République, avec lucidité, détermination et courage est la bonne pour notre pays. Nous devons construire cette société de confiance, cette France plus forte, plus généreuse, plus respectée dans la monde. Ceux qui, par calcul politicien, voteront dans quelques instants cette motion n'auront pas rendu service à la République, une fois de plus.

Bâtir un Etat moderne respecté de tous, préférer le travail à l'assistanat, libérer les énergies, encourager la création de nouveaux emplois, baisser les impôts, inviter les Français à repenser le fonctionnement de notre société, voilà notre bilan. Monsieur le Premier ministre, vous avez eu le courage de tenir un langage de vérité aux Français. Vous avez eu le courage d'agir plutôt que de choisir l'immobilisme : jamais un gouvernement n'aura initié autant de réformes de structure en si peu de temps. Le choix que nous faisons avec vous, ce n'est pas celui du conservatisme, de la nostalgie ou du déclin, mais au contraire celui du destin de la France et des Français, surmontant les égoïsmes et les individualismes, sans tomber dans les jeux politiciens (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste).

Nos idées sont justes, vos actions sont bonnes. C'est pourquoi, Monsieur le Premier ministre, nous sommes à vos côtés avec confiance ! (Applaudissements prolongés sur les bancs du groupe UMP)

Mme Martine Billard - Un million d'enfants vivent aujourd'hui, en France, sous le seuil de pauvreté. Ce chiffre, Monsieur le Premier ministre, que le CERC lui-même estime en deçà de la réalité, provient d'une étude antérieure à votre paquet de mesures contre les chômeurs. Or en moins de deux ans, votre gouvernement a mis le pays en situation de KO social, en s'attaquant tout particulièrement aux plus modestes.

Vous vous êtes attaqué aux chômeurs, en réduisant les droits ASSEDIC et les indemnités ASS, en durée et en montant. Vous vous êtes attaqué au statut des intermittents, et particulièrement aux femmes. Vous vous êtes attaqué aux retraités et aux futurs retraités du public comme du privé. Vous dites défendre la famille, mais vous avez cherché à réduire les allocations des femmes isolées avec enfants. Quant à la dégradation des conditions de travail des salariés précaires, elle touche là encore en majorité des femmes.

Vous précarisez les salariés, en modifiant les règles de la négociation collective et donnez au patronat la possibilité de faire pression sur les salaires. Vous cherchez à casser le SMIC par la création du RMA, dénoncée par les associations et les entreprises d'insertion, qui institue une catégorie de travailleurs pauvres, privés des droits sociaux élémentaires.

M. François Goulard - C'est de l'Arlette !

Mme Martine Billard - Dans six mois, quand vos mesures de « libération des énergies » auront produit tous leurs effets, quand tous les emplois-jeunes auront été envoyés au chômage, quand le nombre d'allocataires du RMI aura explosé, combien d'enfants vivront sous le seuil de pauvreté ?

Vous démantelez l'aide médicale d'Etat, contre l'avis de la Caisse nationale d'assurance maladie et malgré les risques sanitaires. Et vous vous apprêtez à réviser, par ordonnances, tout le système de l'assurance maladie, encore une fois au détriment des plus pauvres.

Vous justifiez les exonérations massives de cotisations patronales par la création d'emplois, mais force est de constater que celle-ci n'est pas au rendez-vous. 20 000 emplois ont même été supprimés dans les petites entreprises au dernier trimestre 2003, et les licenciements continuent.

Vous réduisez le budget du logement alors qu'on recense trois millions de mal-logés. Vous baissez les crédits FSL et les subventions aux associations qui aident à loger les personnes défavorisées.

Nous voyons réapparaître les bidonvilles, les soupes populaires ne suffisent plus aux besoins, les ouvriers licenciés se demandent s'ils vont être réduits à la mendicité.

Mais tout cela ne vous trouble pas car vous faites une politique pour votre électorat. Il est logique, dans ces conditions, que vous financiez la baisse des impôts des plus riches par la baisse des allocations des plus pauvres. Vous refusez les moyens nécessaires aux chercheurs, vous donnez un milliard et demi aux restaurateurs, vous cédez à chacune des demandes du lobby des chasseurs. Vous faites semblant d'interdire le Régent, mais vous justifiez l'écoulement des stocks par de basses considérations financières. N'avez-vous donc rien appris de la crise du sang contaminé et de celle de la vache folle ?

M. François Goulard - Pas de plaidoyer pro domo !

Mme Martine Billard - Constamment, vous cherchez à fuir vos responsabilités. Les morts de la canicule ? C'est la faute aux médecins, c'est la faute aux citoyens... mais certainement pas à vous.

La lutte contre l'homophobie ? Elle a été refusée en novembre par votre majorité au nom de la liberté d'expression. Alors que l'un de nos concitoyens est entre la vie et la mort, brûlé parce qu'homosexuel, vous commencez par promettre une loi, puis vous reculez sur son contenu.

Monsieur le Premier ministre, votre politique brise les grandes missions de l'Etat. Le secteur hospitalier est en crise, de même que l'éducation nationale, la recherche, la culture, la justice... La liste des secteurs sinistrés est longue. Le désengagement de l'Etat, vieille revendication néo-libérale, commence à apparaître pour ce qu'il est avec le projet de loi de décentralisation : l'Etat se décharge sur les départements et les régions, pour ne pas avoir à assumer son incurie. Comment les départements vont-ils gérer la politique sociale, avec le nombre croissant de personnes que la politique de ce gouvernement pousse vers le RMI ? Pour construire leurs budgets avec la taxe sur les produits pétroliers, devront-ils encourager la consommation d'essence, au détriment de notre santé, de notre sécurité et de notre environnement ?

Quant aux citoyens qui refusent la société que vous nous construisez, tout est prévu pour les faire taire. Chaque loi contre la délinquance contient des dispositions qui peuvent se retourner contre ceux qui refusent votre modèle. De plus en plus, on criminalise l'action syndicale.

Parce qu'ils n'ont pas la même conception des réformes que vous, les députés verts voteront la motion de censure (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains).

M. Yves Cochet - Très bien !

M. le Président - La parole est à M. le Premier ministre (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Jean-Pierre Raffarin, Premier ministre - J'ai compris que pour l'opposition, cette discussion avait davantage pour objet l'enjeu électoral que l'enjeu social (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP), sur lequel, néanmoins, je voudrais maintenant lui répondre.

Je remercie tous les orateurs, et tout particulièrement M. Bernard Accoyer (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP). Je me félicite de cette occasion qui m'est donnée d'expliquer la politique de mon gouvernement, et surtout de corriger les discours caricaturaux que la période électorale inspire (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

Comme M. Hollande, je souhaite que la participation électorale soit forte aux prochaines élections, mais je ne suis pas sûr que ce débat de censure y contribue, car, voyez-vous, les électeurs préfèrent l'esprit de projet à l'esprit partisan (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

Réforme des retraites, nouveau financement de la dépendance, droit individuel à la formation, décentralisation - principe qui figure désormais dans la Constitution -, procédure de rétablissement personnel qui permettra de donner une nouvelle chance aux personnes surendettées, rénovation des quartiers... : les réformes sont nombreuses, la méthode est nouvelle. Nous sommes sortis du social administré pour aller vers le social personnalisé (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP). Nos prédécesseurs ayant échoué aux yeux des Français, il nous fallait changer de politique pour améliorer la vie de nos concitoyens.

« Notre pays connaît une régression sociale de grande ampleur » (« Eh oui » sur les bancs du groupe socialiste), est-il écrit dans cette motion de censure. En noircissant le tableau, certains espèrent sans doute se blanchir les mains (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP). Je ne crois pas que les Français se retrouvent dans les discours extrémistes sans nuances. Souvenez-vous de cette phrase de Paul Claudel : « Quand les gens intelligents se mêlent de ne point comprendre, ils y réussissent mieux que les sots »...

Notre pays mérite mieux que procès d'intention, luttes bloc contre bloc, clan contre clan, parti contre parti. La lutte des classes n'est plus l'espoir des sociétés modernes. C'est l'extrémisme qui seul aujourd'hui profite du simplisme. Seul le gauchisme bénéficie de votre stratégie d'« opposition frontale » (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP). Déjà, dans vos discours, vous utilisez le vocabulaire des extrémistes (Protestations sur les bancs du groupe socialiste).

Pour ce qui est de votre posture sociale, je vous invite à un peu de mesure. Car en fait de social, vous avez surtout fait du social à crédit, du social éphémère. D'ailleurs, les Français l'ont clairement dit au printemps 2002 : le social socialiste, ça n'a pas marché ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

Si je suis critique, je suis aussi lucide. La lutte contre le chômage et la pauvreté reste difficile. Faire preuve de modestie, ce n'est pas renoncer. Je me souviens d'un Président de la République qui, dans les années 1980, déclara : « Contre le chômage, on a tout essayé ». Tel n'est pas notre état d'esprit (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste).

Nous proposons une action claire fondée sur une pensée claire. Non seulement j'assume les différences qui existent entre l'opposition et la majorité sur le plan des idées, mais je les revendique (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

Vous souhaitez, vous, toujours plus d'intervention étatique et vous vous méfiez aussi bien des partenaires sociaux que des échelons décentralisés ou déconcentrés. Cela vous a conduits à privilégier les mesures provisoires et systématiques comme la réduction administrée du temps de travail.

Pour ce qui est votre méthode, ce sont aussi beaucoup de dispositifs non financés comme l'APA (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste). Parlons-en en effet : il manquait 1,2 milliard d'euros en 2003 (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP). Quant à la prime de Noël des chômeurs, lorsque le Parlement l'a votée en 2003, il en a voté trois en même temps car celles versées en 2001 et 2002 l'avaient été sans être financées (Protestations sur les bancs du groupe socialiste ; applaudissements sur les bancs du groupe UMP). Il est facile d'être généreux avec le budget des successeurs.

Quant à vos résultats, ce sont un bilan social et financier des 35 heures préoccupant, un service public, notamment l'hôpital et La Poste, très affaibli, un SMIC éclaté, un chômage reparti à la hausse dès mars 2001 et une insécurité sous-estimée, alors même qu'elle explosait avec 600 000 victimes supplémentaires en cinq ans, d'abord issues des milieux les plus fragiles (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP ; vives exclamations sur les bancs du groupe socialiste). Vous avez fait le bilan de mon action. Permettez que je fasse le vôtre ! Et je n'oublie pas les difficultés liées aux accidents économiques survenus de votre temps, malgré la croissance. Moulinex, Vilvoorde, Lu..., autant de blessures qui ne sont pas cicatrisées. Non contents de sous-estimer l'insécurité physique des personnes, vous avez aussi sous-estimé l'insécurité sociale.

Plusieurs députés socialistes - Vous, vous l'aggravez !

M. le Premier ministre - Pourtant, parce que je ne suis pas, comme vous, caricatural (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste), je vois aussi des réussites dans votre action : la loi sur la parité, malgré les disparités salariales qui subsistent entre les hommes et les femmes, ou bien encore la loi contre l'exclusion...

Mme Paulette Guinchard-Kunstler - Ce n'est pas ce que dit Mme Versini.

M. le Premier ministre - Manquaient en effet les outils d'application.

Quand je regarde en Europe, je me sens plus proche que vous de MM. Blair et Schröder, que je croyais pourtant vos amis politiques (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP). Mais chacun sait bien que dans l'opposition, les gauches ne cherchent qu'à émouvoir, si bien qu'au pouvoir, elles ne peuvent que décevoir. N'oubliez jamais le 21 avril et combien ce jour-là, vous êtes tombés de haut et combien l'idée que vous vous faisiez de votre action a pris un coup !

Nos convictions se fondent sur des principes simples et pragmatiques. Nous croyons en l'égalité, nous refusons l'égalitarisme. Je ne crois pas que l'on puisse étouffer l'individu dans des statuts globaux. Je veux assurer le droit au mérite et à sa reconnaissance, dans le privé comme dans le public (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste). Peut-être la reconnaissance du mérite ne signifie-t-elle rien pour vous mais demandez à un grand nombre de Français si elle n'a aucun sens pour eux ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP) Je ne crois pas non plus que l'on puisse traiter toutes les entreprises de la même manière.

Quand nous allégeons les charges et souhaitons abaisser le taux de TVA dans l'hôtellerie-restauration, nous ne donnons pas satisfaction à « des privilégiés », comme j'ai entendu samedi dernier à la télévision un ancien ministre socialiste traiter les artisans et les PME de ce secteur (« Scandaleux ! » sur les bancs du groupe UMP). Nous créons de l'emploi et de la croissance par des moyens ciblés. Si le secteur de l'hôtellerie et de la restauration employait en proportion autant de personnes en France qu'aux Etats-unis, le nombre total d'emplois y serait égal au nombre total de nos chômeurs. Il y a donc là un gisement d'emplois considérable (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

Enfin, je crois aussi que la politique sociale est indissociable de la politique de sécurité car l'insécurité frappe toujours les plus fragiles. On ne parle pas assez de l'insécurité physique des personnes qui, trop longtemps, n'a pas cessé de croître et à laquelle nous avons enfin porté un coup d'arrêt puisqu'elle a diminué de 3 % en 2003...

Plusieurs députés socialistes - C'est faux !

M. le Premier ministre - Ce sont 140 000 victimes en moins. Et nous continuons de nous mobiliser, notre objectif étant de réduire l'insécurité de 20 % en cinq ans.

Je crois également en une économie fondée sur la création de richesses, parce que, avant de les redistribuer, il faut les créer.

Je crois aussi que les responsabilités sociales sont partagées. Je crois en l'engagement des individus, des familles, des associations, des collectivités locales et, surtout, des partenaires sociaux, que vous avez, vous, négligés.

Je crois à la responsabilité première de l'État, garant de la norme sociale mais capable de déléguer la gestion des prestations sociales de façon que celles-ci puissent être gérées au plus près des personnes.

La clé de la politique sociale, c'est le travail. Et la première politique sociale est de soutenir l'activité car un point de croissance, ce sont 150 000 emplois. Nous soutenons l'activité, nous avons eu raison de ne pas choisir une politique d'austérité, comme cela nous était proposé, car la France retrouve plus rapidement que prévu une croissance créatrice d'emplois (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste ; applaudissements sur les bancs du groupe UMP). De 4 % en 2000, la croissance était tombée à 2 % en 2001 puis 1 % en 2002. Grâce à la politique de ce gouvernement, elle est remontée de - 0,3 % au deuxième trimestre 2003 à + 0,5 % au quatrième trimestre 2003. Nous sommes donc bel et bien de nouveau sur une pente de 2 % (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP ; protestations sur les bancs du groupe socialiste). Vous devriez vous réjouir aussi de ce côté-ci de l'hémicycle du retour de la croissance.

Pour soutenir cette croissance, oui, nous avons baissé l'impôt sur le revenu qui n'est pas « un cadeau aux riches » mais un investissement pour la croissance ; nous avons diminué les charges sociales sur les bas salaires de dix milliards d'euros cette année, ce qui n'est pas un « cadeau aux entreprises » mais une incitation à l'embauche ; nous avons augmenté les bas salaires, notamment en revalorisant le SMIC comme il ne l'avait jamais été depuis vingt ans, ainsi que la prime pour l'emploi. C'est là un signal fort pour les plus modestes. Nous avons choisi de valoriser le travail et d'augmenter le pouvoir d'achat, principale préoccupation des Français (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP ; vives exclamations sur les bancs du groupe socialiste).

C'est pourquoi aussi nous avons assoupli les 35 heures qui empêchaient ceux qui voulaient travailler plus de gagner plus, et encouragé la création d'entreprises par des mesures simples, mais surtout en insufflant un nouvel état d'esprit.

Le nombre des créations d'entreprises atteint des records : 200 000 en 2003, 25 000 en janvier 2004. Au total, ces entreprises nouvelles vont créer 500 000 emplois (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP ; protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains).

Nous continuerons dans cette voie en 2004, avec la réforme de la taxe professionnelle, avec le soutien aux projets créateurs d'emplois comme les 85 zones franches que nous avons créées, avec nos 50 « grands travaux » d'infrastructure pour un aménagement durable du territoire, avec la poursuite de la simplification des démarches, avec le titre emploi-entreprise et le chèque emploi associatif.

Ce sont là des réalités concrètes dont tous les acteurs mesurent l'intérêt sur le terrain (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP). Pour permettre aux jeunes de trouver un premier emploi, nous avons supprimé les charges dans le cadre des « contrats jeunes en entreprise ». Aujourd'hui, près de 150 000 jeunes bénéficient de vrais contrats à durée indéterminée. Pour vous, ce n'est rien : vous confondez les statistiques et les personnes. Mais il s'agit de vrais contrats dans de vraies entreprises, et non de solutions électorales ! (Applaudissements prolongés sur les bancs du groupe UMP)

Pour les seniors, nous permettons aux entreprises qui embauchent des chômeurs de plus de 50 ans de recevoir une prime de 500 € par mois pendant cinq ans : c'est un effort sans précédent. Pour que les entreprises bénéficient de l'expérience acquise, 110 000 contrats initiative-emploi sont prévus en 2004.

De même, 185 000 contrats aidés sont prévus en 2004 pour les plus éloignés de l'emploi.

Mais l'accès à l'emploi, c'est aussi une formation mieux adaptée. C'est pourquoi nous allons vous proposer une grande réforme de l'apprentissage : 500 000 jeunes pourront ainsi s'engager sur une des meilleures voies de l'insertion professionnelle (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

Nous allons aussi prendre des mesures concrètes pour faciliter la transmission d'entreprise. Elle feront partie de la loi de mobilisation voulue par le chef de l'Etat.

Le Gouvernement refuse la génération... la généralisation... (Interruptions sur les bancs du groupe socialiste) Cela ne vous arrive jamais de vous tromper ? Un peu d'humilité ! Voltaire disait : « La gentillesse est une qualité de l'intelligence ». De temps en temps, cela ne fait pas de mal ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

Le Gouvernement s'oppose à la généralisation du contrat de mission. Nous sommes des adversaires de la précarité.

L'accompagnement social du chômage fait partie de nos valeurs, mais il doit favoriser la reprise d'activité et non la rupture avec le monde du travail. Je sais que certains préfèrent les statuts qui excluent aux activités qui intègrent. Mieux que l'assistance, le travail est un vecteur de promotion et d'intégration sociales (Interruptions sur les bancs du groupe socialiste). C'est pourquoi nous préférons le RMA au RMI, le revenu minimal d'activité au revenu minimal d'insertion qui trop souvent est facteur d'exclusion. Chacun sait que l'insertion ne fonctionne pas : le « I » de RMI est un leurre. On ne passe pas du RMI au CDI du jour au lendemain. C'est pourquoi nous avons prévu une étape entre les deux (Interruptions sur les bancs du groupe socialiste). Vous pouvez en sourire. On peut se réjouir des clientèles constituées ici ou là (Mêmes mouvements). Ce que nous voulons, c'est faire vivre le « I » de l'insertion pour aller vers le « A » de l'activité (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

Notre état d'esprit est celui de la Constitution de 1946 : « Chacun a le devoir de travailler et le droit d'obtenir un emploi ». Telle est notre ambition.

Dans un monde qui change, la meilleure assurance emploi, c'est la formation. Nous avons pris une mesure importante et voulue par les partenaires sociaux en reconnaissant le droit individuel à la formation. C'est un progrès social majeur. Il ne s'agit certes pas d'un statut, mais d'un dispositif personnalisé qui permet à chacun d'éviter que, dans sa vie professionnelle, le changement soit une rupture. C'est cela, une politique sociale durable, une politique d'accompagnement qui n'enferme pas les personnes dans un statut ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

Je n'occulte pas pour autant les difficultés. Je mesure les conséquences humaines de l'augmentation du chômage l'an dernier. J'ai lu comme vous le rapport de Jacques Delors sur la pauvreté chez les enfants jusqu'en 1999. Ces situations ne sont pas acceptables. Sur un tel sujet, nous devrions nous retrouver pour trouver des solutions et empêcher que des enfants pauvres soient mis à la rue (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF).

Malgré les difficultés, nous avons stabilisé l'emploi salarié (Interruptions sur les bancs du groupe socialiste). J'ai entendu, sur ce sujet, des chiffres inexacts. Entre fin 2001 et fin 2003, il y a eu 67 000 Français de plus au travail (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP). Je défie quiconque de contester ce chiffre (Interruptions sur les bancs du groupe socialiste). Les Français sentent qu'ils pourront récolter dès 2004 les fruits de leurs efforts. La consommation augmente plus que prévu. Les investissements industriels aussi. Le chômage est à la baisse, la création d'entreprises à la hausse. Tous les indicateurs le montrent, la politique que nous avons choisie est efficace et pertinente.

Notre République est fidèle à sa tradition sociale (« Non ! » sur les bancs du groupe socialiste).

En matière de retraites, nous avions trouvé une situation dégradée. Sans les initiatives de mes prédécesseurs Balladur et Juppé,... (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste) notre système de retraites se serait effondré.

Je le dis comme je le pense : je suis fier d'être à la tête du gouvernement qui a donné des droits nouveaux aux salariés travaillant depuis l'âge de quatorze ou seize ans. Ils pourront toucher une retraite à taux plein avant soixante ans. C'est une avancée sociale unique en Europe (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

Pour la première fois également, les retraités les plus fragiles auront la garantie de toucher une retraite au moins égale à 85 % du SMIC net. Nous avons ainsi créé une dynamique favorable aux petites retraites comme il fallait le faire dans une France fraternelle.

Je ne vous ai pas entendus parler des personnes handicapées. Un texte important que nous allons soumettre au Parlement vise à leur accorder des droits nouveaux et à leur donner un accès plus large à leurs droits. Leur assurer la place à laquelle elles ont droit fait partie de la politique sociale du Gouvernement (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

Nous avons créé 40 000 places d'accueil et prévu 6 000 auxiliaires de vie scolaire.

Nous agissons aussi en faveur des personnes âgées. Pour les accidentés de la vie, les habitants de ces quartiers-ghettos qui blessent notre République, nous avons mis en place une nouvelle politique de lutte contre le surendettement, de rénovation urbaine et de création d'emplois dans les zones franches.

S'agissant des familles, nous avons augmenté de 15 % l'aide pour la garde d'enfants. Nous permettons aux mères de famille de prendre un congé parental dès le premier enfant.

Contre l'exclusion, nous avons entamé la professionnalisation du secteur : plutôt que des actions au coup par coup, nous mettons en place un plan d'action avec des moyens importants et nous finançons les centres d'accueil que les 35 heures menaçaient de faillite (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

Nous relançons aussi une politique de logement social, car la perte de logement est une des premières causes d'exclusion. On n'a jamais financé autant de logements sociaux depuis dix ans (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

En 2004, nous allons moderniser notre système de santé menacé par des facteurs structurels. Avec des principes simples : l'égalité d'accès aux soins ; ni privatisation, ni étatisation ; plus de responsabilité ; amélioration de la santé pour tous. Avec une méthode claire, le dialogue social.

M. Hollande m'a posé la question. Il est vrai que la sécurité sociale a été fondée par le général de Gaulle au moyen d'ordonnances en 1945. Je tiens à le dire ici, vous ne serez pas privés de débat parlementaire.

Notre ambition est aussi de discuter la réforme avec l'ensemble des partenaires sociaux. Il y a déjà une concertation, un Haut Conseil, un diagnostic partagé. Les travaux de la commission Fragonard sont intéressants. Nous les soumettrons aux organisations syndicales concernées pour négocier un projet que nous vous soumettrons (Interruptions sur les bancs du groupe socialiste). Tout n'est pas prêt ! Vous l'aviez oublié, mais pour nous les partenaires sociaux existent, et tant qu'ils ne se sont pas prononcés, nous demeurons à leur écoute ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

J'espère que, comme en Allemagne, nous pourrons nous rassembler, majorité et opposition, sur cette réforme de progrès qui intéresse l'ensemble des Français (Interruptions sur les bancs du groupe socialiste).

Pour les enfants de l'immigration, nous engagerons une nouvelle politique, rendue nécessaire par l'échec de l'intégration. Nous créerons à la fin de l'année l'autorité administrative indépendante de lutte contre les discriminations. Nous nous battrons pour la jeunesse de notre pays, d'autant mieux que nous aurons réussi à rétablir les finances publiques qui ont été détériorées (Interruptions sur les bancs du groupe socialiste). La culture et la recherche font partie des domaines d'avenir auxquels nous sommes attachés parce que l'avenir du pays se trouve dans la création, l'innovation et non pas dans la standardisation ni la banalisation (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

Il existe ici des divergences importantes sur la politique sociale. Nous proposons des formules innovantes, avec une simplification des procédures et une personnalisation des dispositifs. L'essentiel à nos yeux est de replacer la personne au c_ur de l'action sociale (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains) plutôt que de raisonner procédures, administration, étatisation, complexité, distance. Nous avons fait le choix de l'individu pour la société, et de la société pour la personne. Nous devons nous préparer au nouvel espace européen, en nous rapprochant de nos partenaires pour mieux coordonner nos efforts et préparer l'avenir.

Républicain et démocrate, je souhaite le débat, je me réjouis même de la confrontation. Mais, majorité et opposition, nous avons la France en commun, son avenir entre nos mains.

Evitons donc, les uns et les autres, les réductions de la pensée. Mesurons le temps nécessaire à l'action. André Malraux n'a-t-il pas évoqué « la tentation vaine de se passer du temps » ? Nous avons besoin du temps.

Mesurons aussi les conséquences, dans notre société, des caricatures, voire des injures. Tout à l'heure, j'ai trouvé que le débat prenait un tour qui pouvait créer une distance regrettable entre le citoyen et la démocratie. Ni les injures, ni le mépris, ni bien sûr la haine ne peuvent être aujourd'hui des moyens d'expression pour quelque responsable que ce soir (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP). La politique se définit comme ce qui enlève à la haine son caractère éternel. Contre toutes les haines, faisons appel à la République et défendons ses valeurs, à commencer par la cohésion sociale. Je lis ici ou là des mots brutaux, des mots guerriers, pour qualifier la politique française. Ne nous prêtons pas à cette dérive.

Pour son avenir, la République française doit demeurer ce qu'elle est, avant tout un rassemblement ! (Mmes et MM. les députés UMP se lèvent et applaudissent)

M. le Président - La discussion sur la motion de censure est terminée. Je vais mettre aux voix cette motion de censure. Le scrutin va être ouvert. Il sera clos à 19 heures 20.

La séance, suspendue à 18 heures 35, est reprise à 19 heures 20.

M. le Président - Voici le résultat du scrutin :

Majorité requise pour l'adoption de la motion de censure : 289 suffrages.

Pour l'adoption : 175 suffrages.

La majorité requise n'étant pas atteinte, la motion de censure n'est pas adoptée.

MODIFICATION DE L'ORDRE DU JOUR

M. le Président - J'ai reçu une lettre du secrétaire d'Etat aux relations avec le Parlement m'annonçant que la discussion des conclusions de la CMP sur le projet de loi relatif à la formation professionnelle et au dialogue social, initialement fixée au 3 mars, après les questions au Gouvernement, aura lieu ce même jour à 21 heures 30.

Je rappelle que les explications de vote et le vote sont fixés au mercredi 7 avril, après les questions au Gouvernement.

Prochaine séance ce soir, à 21 heures.

La séance est levée à 19 heures 25.

            Le Directeur du service
            des comptes rendus analytiques,

            François GEORGE


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