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Assemblée nationale

COMPTE RENDU
ANALYTIQUE OFFICIEL

Session ordinaire de 2003-2004 - 78ème jour de séance, 197ème séance

2ème SÉANCE DU MERCREDI 14 AVRIL 2004

PRÉSIDENCE de Mme Hélène MIGNON

vice-présidente

Sommaire

      CONVOCATION D'UNE CMP 2

      BANQUE CENTRALE EUROPÉENNE 2

      MOTION D'AJOURNEMENT 8

      ORDRE DU JOUR DU JEUDI 15 AVRIL 2004 13

La séance est ouverte à vingt trois heures trente.

CONVOCATION D'UNE CMP

Mme la Présidente - J'ai reçu de M. le Premier ministre une lettre m'informant qu'il avait décidé de provoquer la réunion d'une CMP sur les dispositions restant en discussion du projet de loi pour la confiance dans l'économie numérique.

BANQUE CENTRALE EUROPÉENNE

L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant la ratification de la décision du Conseil réuni au niveau des chefs d'Etat ou de Gouvernement du 21 mars 2003 relative à une modification de l'article 10.2 des statuts du système européen de banques centrales et de la Banque centrale européenne.

M. Michel Barnier, ministre des affaires étrangères - Le Gouvernement vous soumet un projet autorisant la ratification de la décision du Conseil, réuni au niveau des chefs d'Etat, qui modifie les statuts de la Banque centrale européenne et du système européen de banques centrales. Cette réforme tend à garantir le fonctionnement efficace des institutions dans une union monétaire qui comptera, à terme, 25 membres.

Cinq principes la sous-tendent : une voix par membre pour les membres pourvus d'un droit de vote ; participation de tous les gouverneurs des banques centrales nationales au conseil des gouverneurs, même pour ceux qui n'ont pas de droit de vote ; maintien de la représentativité du conseil, qui implique que les « grands » Etats membres ont un poids plus important que les Etats moins importants économiquement ; solidité et transparence du système.

Quelles sont les modalités de la réforme ? Il s'agit de limiter le nombre de votants au sein du conseil des gouverneurs, organe de direction de la politique monétaire européenne, qui comprend aujourd'hui dix-huit membres : le gouverneur de chaque banque centrale nationale des douze pays membres de la zone euro et les six membres du directoire, dont le président, Jean-Claude Trichet. Dans la perspective d'une zone euro élargie, pouvant comprendre, à terme, 27 membres, il n'aurait pas été raisonnable que le conseil des gouverneurs comprenne 33 membres votants, car la lisibilité et la crédibilité de la politique monétaire en auraient été amoindries.

Les chefs d'Etat et de gouvernement ont donc décidé de plafonner à vingt-et-un le nombre de votants au sein du conseil des gouverneurs. Le directoire continuera de disposer de six voix, et quinze droits de vote seront attribués aux gouverneurs en fonction d'un classement des Etats membres en deux, puis en trois groupes. Ce classement sera réalisé, pour cinq sixièmes, en fonction de la richesse des Etats, c'est-à-dire de la part qu'ils représentent dans le PIB de la zone euro et, pour un sixième, de la part du secteur financier des Etats dans le total de la zone euro, parce que les banques et les entreprises financières des Etats sont les « courroies de transmission » de la politique monétaire dans l'ensemble de l'économie.

Au sein des groupes, une rotation des droits de vote aura lieu, et les quinze droits de vote se répartiront de la manière suivante : le premier groupe comprendra les cinq Etats les plus importants en termes économiques, et il exercera toujours quatre droits de vote. Le groupe des pays « moyens » comprendra la moitié des Etats membres et disposera de huit droits de vote. Le dernier groupe comprendra les Etats restants et aura trois droits de vote.

Supposons une Union de 24 membres : cinq grands Etats auront quatre droits de vote, douze Etats « moyens » auront huit droits de vote et les sept Etats restants auront trois droits de vote. Cet exemple montre qu'il est très avantageux pour un Etat d'être dans le groupe des grands pays membres, car cela lui permet de voter 4 fois sur 5, soit 80 % du temps.

Quelles seront les conséquences de la réforme pour notre pays ? La France est la deuxième économie de la zone euro, et son secteur financier est le deuxième de l'Union, derrière l'Allemagne. Elle a donc l'assurance d'être dans le groupe des grands Etats, qui bénéficiera de la fréquence de vote la plus élevée. Le gouverneur français pourra voter 80 % du temps. La réforme est donc bénéfique pour notre pays, car il est plus avantageux de bénéficier d'un quinzième des droits de vote quatre fois sur cinq que de bénéficier d'un vingt-septième des droits de vote tout le temps. La perte d'un droit de vote permanent est donc largement compensée par l'accroissement du poids du gouverneur français au sein du conseil de la BCE.

Les Etats membres ont tous accepté la réforme, même les plus soucieux de leurs intérêts nationaux ou de ceux de leur banque centrale.

Nous nous devons de respecter nos engagements européens et de ratifier la réforme, comme l'ont déjà fait douze Etats membres, dont l'Allemagne et le Royaume Uni. La France ne peut être le pays qui aura fait échouer un système qui assure un fonctionnement efficace de la BCE tout en nous avantageant. Et, pour que la réforme soit prise en compte par les dix nouveaux Etats membres au titre de l'acquis communautaire dès leur adhésion, l'échéance du 1er mai doit être impérativement respectée. A cet égard, sommes-nous « forclos », comme certains le prétendent ? Tel n'est pas le cas car, comme l'ont confirmé les juristes du Conseil, il convient de distinguer la ratification de la décision et son entrée en vigueur. De plus, le nouveau système ne trouvera à s'appliquer que lorsque la zone euro comprendra plus de quinze membres.

Je remercie votre commission du travail accompli, et j'invite votre assemblée à ratifier une réforme approuvée à l'unanimité des membres du Conseil (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Philippe Cochet, rapporteur de la commission des affaires étrangères - En prévision de l'élargissement de l'Union européenne à dix nouveaux membres le 1er mai prochain, la Banque centrale européenne a préparé une réforme de son fonctionnement interne pour prendre en compte l'augmentation, à terme, du nombre des représentants qui siègent en son sein. Cette réforme anticipe l'élargissement de la zone euro, et nous ne pouvons que saluer une démarche qui vise à préserver l'efficacité de la BCE. D'autres institutions européennes pourraient s'en inspirer car le même problème se posera à elles : comment parvient-on à travailler efficacement à vingt-cing ou vingt-sept Etats membres ?

Sur la base de l'article 10.6 du traité de Nice, la Banque centrale européenne a adopté, le 3 février 2003, une recommandation de décision portant réforme du fonctionnement de son conseil des gouverneurs. Le Conseil de l'Union, réuni au niveau des chefs d'Etat ou de gouvernement, a adopté sans modification cette proposition de réforme le 21 mars 2003. Pour entrer en vigueur, le nouveau statut doit être ratifié par tous les Etats membres de l'Union, et nous sommes les derniers à nous prononcer.

A défaut d'une ratification par les Quinze avant le 1er mai, date de l'élargissement, cette réforme ne fera pas partie de l'acquis communautaire dont la reprise s'impose aux dix pays entrants, dont l'accord serait alors nécessaire.

En quoi consiste la réforme ? Actuellement, tous les membres du conseil des gouverneurs, c'est-à-dire les six membres du directoire et les douze gouverneurs des banques centrales des Etats membres de la zone euro disposent en permanence d'un droit de vote chacun. La réforme proposée prévoit que le droit de vote s'exercera désormais par rotation : tous les gouverneurs des banques centrales des Etats membres de la zone euro pourront naturellement participer activement aux débats du conseil des gouverneurs, mais seuls quinze d'entre eux se verront reconnaître, pour une durée limitée, un droit de vote, le droit de vote individuel des six membres du directoire étant préservé.

Les Etats seront répartis en deux ou trois groupes en fonction de leur poids économique et de leur puissance financière, avec des droits de vote distincts attribués aux gouverneurs pour une durée identique et une fréquence d'exercice du droit de vote distincte .

Il y aura deux groupes tant que le Conseil des gouverneurs sera composé de 15 à 21 gouverneurs et trois avec plus de 21 gouverneurs. L'appartenance à un groupe sera fonction, pour cinq sixièmes, du poids économique du pays par rapport au PIB total des Etats membres de la zone euro, et, pour un sixième, de la part de ce pays dans le bilan agrégé des institutions financières monétaires.

M. Bernard Accoyer - Très bien !

M. le Rapporteur - La taille, le nombre, la composition des groupes et la fréquence d'exercice du droit de vote ont donc vocation à être modifiés en fonction de l'évolution de la situation économique et financière des Etats et de l'augmentation du nombre des gouverneurs. Cela traduit une vision pragmatique de l'avenir.

Quel que soit le nombre total des gouverneurs des Etats membres de la zone euro siégeant au Conseil des gouverneurs, le premier groupe, dont la France fait partie, sera toujours composé des cinq gouverneurs des Etats les plus importants de la zone euro qui se partageront quatre droits de vote. Par ailleurs, leur fréquence de vote ne pourra être inférieure à celle des autres groupes. Dans ces conditions, un des cinq grands pays ne disposera plus systématiquement du droit de vote. Ce pourra être l'Allemagne, l'Espagne, l'Italie, la France ou encore les Pays-Bas. Cette concession permet à la France de tirer avantageusement partie de cette réforme en ayant 80 % de fréquence de vote. Dans un premier temps, lorsque le nombre total des gouverneurs des Etats membres de la zone euro siégeant au Conseil des gouverneurs variera de 16 à 21 membres, le deuxième groupe oscillera entre 11 et 14 gouverneurs se partageant 11 droits de vote. Ensuite, lorsque le nombre total des gouverneurs des Etats membres de la zone euro siégeant au Conseil des gouverneurs passera de 22 à 27 membres, le deuxième groupe oscillera entre 11 et 14 gouverneurs se partageant 8 droits de vote et un troisième groupe sera créé, composé des 6 à 8 membres restants, qui se partageront 3 droits de vote.

Pour pouvoir accueillir d'autres Etats, l'Union doit adapter ses institutions, parmi lesquelles la Banque centrale européenne. Pour réussir cet élargissement, il est nécessaire de préserver la capacité de ces institutions à prendre des décisions de manière efficace et en temps opportun. Cette nécessité est ressentie au quotidien par nos compatriotes et nous devons favoriser cette démarche pour rendre l'Europe plus compréhensible et plus proche des Européens.

Ainsi, avec cette réforme, le Conseil des gouverneurs de la BCE pourra passer de 18 à 33 membres sans perdre son efficacité et sa capacité à prendre des décisions en temps utile. Un système de rotation constitue un procédé équitable, efficace et acceptable. Le choix d'attribuer 15 droits de vote aux gouverneurs permet de trouver un équilibre entre la continuité du dispositif actuel et l'efficacité de la prise de décision dans un Conseil des gouverneurs élargi.

En outre, ce système de rotation reflète cinq principes fondamentaux pour la BCE. Le premier, l'égalité de traitement entre tous les membres du Conseil des gouverneurs disposant du droit de vote, continuera de s'appliquer. Ensuite, tous les membres du Conseil des gouverneurs continueront de participer aux réunions à titre personnel et de manière indépendante, qu'ils disposent ou non du droit de vote. Par ailleurs, le système de rotation proposé sera à même de s'adapter à tout élargissement de la zone euro jusqu'au nombre maximal d'Etats envisagé. Ce système évitera également des situations dans lesquelles les gouverneurs ayant droit de vote viendraient de banques centrales nationales d'Etats perçus comme non représentatifs de l'économie de la zone euro dans son ensemble. Enfin, ce système est transparent.

En tout état de cause, dans la pratique, la Banque centrale européenne fonctionne en recherchant le consensus et il y est de tradition qu'aucune décision ne soit prise contre tel ou tel Etat.

M. Jacques Myard - Tu parles !

M. le Rapporteur - Pour toutes ces raisons, la commission des affaires étrangères a émis un avis favorable à l'adoption du présent projet (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP) .

M. Christian Philip - Ce texte est une fort bonne illustration de la nécessaire adaptation du système institutionnel de l'Union au moment de l'élargissement. Une Europe dans quelques jours à 25, après-demain à 27 ou plus, ne pourra pas fonctionner comme avec 15 Etats membres car il faut préserver sa capacité décisionnelle. En posant ce constat, il ne s'agit ni de prôner le fédéralisme, ni de défendre une conception souverainiste. Sauf à contester sa propre présence dans l'Union, notre pays n'a aucun intérêt à un système où plus aucune décision ne saurait être prise. Or tels seraient les effets de l'unanimité synonyme d'immobilisme donc, à terme, d'implosion.

Pour éviter ces effets pervers tout en tenant compte du poids respectif des Etats membres - car, sans être péjoratif, la population ou l'économie distinguent grands et petits pays -, il faut imaginer des systèmes de majorité qualifiée - ce sera l'objet de la constitution pour le Conseil - ou de groupes de pays disposant chacun de droits de vote différents.

C'est l'intérêt de notre pays, à la différence d' un système où il ne disposerait que d'une voix sur 25 et où plus rien ne serait décidé.

Le dispositif proposé est exemplaire aussi dans la mesure où il a été élaboré par les responsables directement concernés...

M. Jacques Myard - C'est bien le problème...

M. Christian Philip - ...cette décision du Conseil des gouverneurs ayant été prise à l'unanimité des Etats membres.

Il est vrai que la rotation nous conduira, un cinquième du temps, à ne pas voter.

M. Patrick Labaune - C'est grave !

M. Christian Philip - Comme l'a rappelé le rapporteur, la pratique au sein du Conseil des gouverneurs, ce n'est pas le vote mais le consensus...

M. Patrick Labaune - La France disparaît...

M. Christian Philip - Pourquoi cela changerait-il ?

On aurait pu défendre un système où chacun des membres du premier groupe garderait en permanence un droit de vote. Mais camper sur cette position serait difficile à expliquer aux autres Etats.

Ce système ne nous est pas défavorable. Comme l'a dit le ministre, un quinzième des droits de vote pendant 80 % du temps, c'est mieux qu'un vingt-septième pendant 100 %. C'est pourquoi l'Allemagne et le Royaume-Uni ont déjà ratifié ce texte.

M. Jacques Myard - On s'en brosse !

M. Christian Philip - Auraient-ils accepté un accord qui ne leur aurait pas paru équilibré ?

La révision s'appliquera seulement quand le nombre des pays de la zone euro sera supérieur à 15, et même à 18...

M. Jacques Myard - Par chance, ce ne sera jamais puisque l'euro va disparaître...

M. Christian Philip - Si on a prévu cette disposition, c'est bien qu'on pense la mettre en application... Elle sera alors indispensable pour que le conseil des gouverneurs puisse continuer à prendre des décisions.

Pour toutes ces raison, le groupe UMP se prononcera en faveur de la ratification (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Patrick Labaune - Pas moi !

M. Jacques Desallangre - La décision du Conseil que ce projet vise à ratifier est présentée comme une mesure strictement technique ; une conséquence logique de l'élargissement de l'Union. En fait, il s'agit de réformer le fonctionnement du Conseil des gouverneurs, instance décisionnelle de la BCE, en prévision de l'élargissement à dix nouveaux membres et de leur probable adhésion à l'euro.

En commission des affaires étrangères, des députés de tous bords ont affiché leur stupéfaction à l'égard de cette usine à gaz. D'autres mécanisme de pondération, plus respectueux du reste de souveraineté des Etats, étaient envisageables. Pour nous, priver un gouverneur de son droit de vote à certaines périodes serait inadmissible et renforcerait encore la nature totalement technocratique de la BCE.

Au-delà de l'objet du présent projet, minutieusement délimité et parfaitement symbolique du déficit démocratique de la construction européenne, rien ne permet d'envisager une réorientation de l'architecture issue des traités de Maastricht et de Nice.

Les abus de confiance succédant au référendum de 1992, qui a conduit à l'abandon de souveraineté des Etats et à la disparition des politiques monétaires nationales, ont-ils au moins apporté aux pays de la zone euro emplois, croissance et prospérité ? Certes pas : après une période de croissance moyenne, nous sommes en récession et le chômage ne cesse de croître. Les gouvernements regardent, impuissants, leurs peuples souffrir et feignent de s'agiter pour ne pas désespérer la démocratie. Les critères de Maastricht et le pacte de stabilité empêchent une politique de relance, menée grâce à une judicieuse utilisation des fonds publics. Vous faites même le contraire, en rendant le désengagement de l'Etat systématique ! Le très libéral dogme de l'indépendance de la Banque centrale européenne empêche de baisser les taux d'intérêt.

M. Patrick Labaune - C'est vrai !

M. Jacques Desallangre - On peut alors se demander si ce qui est présenté comme un simple ajustement technique pourra rompre l'alignement de la politique monétaire sur les impératifs des marchés. Le ministre ne vient-il pas de dire que la BCE devait être crédible aux yeux des marchés ? Je le remercie de sa franchise... Et Xavier Darcos, présentant ce texte au Sénat, a déclaré que l'objectif était de préserver l'efficacité et la crédibilité des décisions des gouverneurs dans la zone euro élargie. L'aveu est pathétique : rassurer les marchés financiers est le seul horizon proposé aux 450 millions d'habitants de l'Europe élargie...

C'est à une réforme de toute autre envergure que les députés communistes et républicains aspirent. Il est indispensable de modifier le Traité de l'union économique et monétaire qui impose à la BCE d'assurer coûte que coûte la stabilité des prix, ce qui s'est traduit par toujours plus de modération salariale, de flexibilité de l'emploi et de restriction des droits sociaux. Le dérapage des finances publiques de la France et de l'Allemagne aurait pu faire penser que le dogmatisme budgétaire vilipendé par Romano Prodi lui-même allait être remis en cause. Mais le sujet de la BCE a soigneusement été évité lors des débats sur le pacte de stabilité, qui ont ainsi été clos avant d'avoir véritablement commencé.

Pourtant, il y a urgence : la BCE est le c_ur d'une construction conçue tout entière pour les marchés financiers, et non pour répondre aux attentes de la population. Exempte de tout contrôle politique, la BCE continue de se fourvoyer dans un combat dérisoire contre une inflation déjà vaincue.

M. Jacques Myard - Il a raison !

M. Jacques Desallangre - Le Gouvernement a la passion du mimétisme : démolition du système de retraite par répartition, détricotage du code du travail sont à l'image de ce qui se fait chez nos voisins européens, qui se disent contraints de s'adapter bon gré mal gré à la mondialisation. Mais, outre-atlantique, la réserve fédérale des Etats-Unis est officiellement obligée de se préoccuper de l'emploi ! Elle est assujettie au contrôle politique du Congrès, qui peut à tout moment modifier ses statuts. On objectera que les Etats-Unis jouissent du pouvoir exorbitant du dollar, mais ils n'hésitent pas, eux, à créer de la monnaie et à stimuler leur croissance ! Toute la construction européenne s'oppose absolument à des actions analogues.

Le temps n'est plus aux promesses qui ont accompagné le passage à l'euro, présenté comme l'ultime clef vers la félicité, après l'austérité de la convergence maastrichtienne. Une nouvelle crise mondiale a éclaté en 2001, et le ralentissement de l'activité s'annonce durable. La croissance des pays de la zone euro est plus faible, avec une monnaie forte, que celle des pays non membres ; et les Etats-Unis n'ont-ils pas, avec une monnaie faible, une croissance forte ? Par conséquent, même les plus europhiles commencent à réclamer de la BCE une baisse significative des taux d'intérêt et des objectifs en matière d'emploi.

Les parlementaires communistes et républicains, voulant remettre en cause l'indépendance de la BCE et la dictature des marchés, plaident depuis de nombreuses années pour une baisse des taux, bénéficiant à l'emploi et à la formation. La BCE pourrait être contrôlée par une réunion du Parlement européen et des parlements nationaux, qui pourraient moduler la distribution du crédit bancaire dans leurs pays en les rendant d'autant moins chers qu'ils serviraient à financer des emplois et de la formation. Simultanément, il faudrait ouvrir aux citoyens, aux syndicats, aux associations et aux élus le pouvoir de proposer des projets d'emploi, de formation et de développement des activités. Ces mesures s'inscrivent dans la perspective d'un Traité de l'Union radicalement nouveau. Elles sont réalistes et représentent une alternative crédible.

Le débat sur ces questions très techniques, jusqu'à présent désespérément confiné aux sommets, tend à devenir politique. L'on entend dire clairement qu'on ne peut sérieusement prétendre parvenir aux objectifs de bien-être social contenus dans le Traité de l'Union si l'on s'entête dans la conception étroitement monétariste et libérale qui prévaut à la Banque centrale européenne. Vous comprendrez donc que nous voterons contre ce projet de loi.

M. Pierre Lequiller - Les statuts de la Banque centrale européenne sont uniques au monde. Relevant d'un traité, ils ne peuvent être modifiés qu'à l'unanimité des Etats et après une ratification pays par pays. Ils lui garantissent une indépendance presque absolue : interdiction pour les membres du Conseil d'accepter des instructions gouvernementales...

M. Patrick Labaune - C'est grave !

M. Pierre Lequiller - ...impossibilité d'accorder des crédits aux Etats, mandats des gouverneurs irrévocables et non renouvelables,

M. Patrick Labaune - C'est très grave !

M. Pierre Lequiller - ...et liberté totale pour définir sa stratégie.

M. Jacques Myard - La plus belle technocratie du monde !

M. Pierre Lequiller - Cette complexité préserve la BCE d'un changement à vue pour des considérations purement électorales. Les règles qui président à son fonctionnement doivent être solides et stables.

Le traité de Nice a modifié les statuts de la BCE et du Système européen des banques centrales pour introduire une clause d'habilitation, qui permet au Conseil de l'Union européenne de recommander des modifications relatives aux droits et aux modalités de vote au sein du Conseil des gouverneurs sans qu'il soit nécessaire de réunir une Conférence intergouvernementale. Ces modifications entreront en vigueur après avoir été ratifiées par tous les Etats membres. Sans cette réforme, chaque élargissement de la zone euro se solderait par une augmentation du nombre de membres du Conseil des gouverneurs possédant un droit de vote, ce qui amoindrirait considérablement, à terme, l'efficacité du processus décisionnel.

En effet, les votes au sein du Conseil des gouverneurs sont presque tous acquis à la majorité simple. L'élargissement aurait donc permis aux petits Etats d'imposer leurs vues. Dès lors, comment faire en sorte que les décisions conviennent à l'ensemble des pays de l'Union, grands et petits ? Comment garantir l'efficacité et la rapidité du pilotage monétaire dans une zone euro composée à terme de 27 membres ?

M. Jacques Myard - On peut rêver !

M. Pierre Lequiller - Réveille-toi !

Le projet de la BCE réforme le fonctionnement du Conseil des gouverneurs, organe en charge de la politique monétaire. Il prévoit à terme de scinder le Conseil en trois groupes, disposant de leurs voix pour un laps de temps donné, selon un système de rotation. Le premier cercle, constitué des gouverneurs des cinq grands pays, disposera de quatre voix à 80 % du temps. Le deuxième comptera la moitié des pays représentés et aura 8 voix pour 57 % du temps. Le dernier groupe, composé des gouverneurs des plus petits pays, disposera de 3 voix à 38 % du temps. L'objectif est de ne faire voter que 15 gouverneurs nationaux en plus des six membres du directoire de la BCE, lesquels conserveront leur droit de vote permanent. La période transitoire, pendant laquelle l'union monétaire comptera moins de 22 membres, ne comptera que deux groupes.

Cette réforme est, il faut en convenir, difficilement lisible, mais elle résulte d'un accord unanime des chefs d'Etat et de gouvernement, conclu le 21 mars 2004. Ce projet est apparu comme le meilleur, et aucune alternative crédible n'était présentée. Il convient donc d'autoriser la ratification de la décision du Conseil. Cela ne dispensera pas, lorsque la zone euro atteindra une masse critique, de s'attaquer à une véritable simplification et à une réforme en profondeur du système décisionnel de la Banque centrale. Ainsi, les décisions opérationnelles pourraient être prises par le directoire, tandis que les décisions stratégiques continueraient d'être prises par le Conseil des gouverneurs. Cela ne dispensera pas non plus d'une réflexion sur la mise en place d'une sorte de contre-pouvoir politique face à la BCE, sous la forme d'un Conseil Ecofin de la zone euro ou d'un Conseil de politique monétaire, afin d'améliorer la gouvernance économique de l'Union européenne et de favoriser, par un dialogue permanent, le retour rapide à une croissance forte et durable.

M. Patrick Labaune - D'où l'intérêt de reporter la discussion !

M. Pierre Lequiller - Cette proposition, qui n'est du reste pas incluse dans le projet de Constitution, me paraît essentielle. Ce système ressemblerait quelque peu à celui des Etats-Unis, où le président de la réserve fédérale décide certes en toute indépendance, mais est tenu de rendre compte devant la chambre des représentants et le Sénat de ses décisions. Un tel système ne constituerait pas un contre-pouvoir, puisque la Banque resterait indépendante, mais pour le moins un dispositif de consultation.

La délégation pour l'Union européenne s'est prononcée à l'unanimité en faveur de ce texte et à titre personnel, je le voterai (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

MOTION D'AJOURNEMENT

Mme la Présidente - J'ai reçu de M. Jacques Myard une motion d'ajournement, déposée en application de l'article 128, alinéa 2, du Règlement.

M. Jacques Myard - Ce projet revêt une importance de tout premier plan en raison des questions de principe que soulève la décision prise par les chefs d'Etat ou de gouvernement le 21 mars 2003. Il ne saurait donc être adopté à la sauvette, à la faveur d'une procédure simplifiée sans débat, comme cela avait été initialement proposé.

De quoi s'agit-il en effet ? De réformer les modalités de vote au sein du Conseil des gouverneurs de la Banque centrale, au motif que celui-ci doit avoir « la capacité de prendre des décisions de manière efficace et en temps opportun dans une zone élargie, quel que soit le nombre d'Etats membres qui adoptent l'euro ». L'objectif posé dans ce premier considérant est légitime, et j'y souscris.

Les Etats seraient donc classés en trois catégories : le groupe 1 regrouperait les Etats majeurs, les « poids lourds », dont la France ; le groupe 2, les Etats moyens et le groupe 3, les petits Etats. Dans l'hypothèse d'une zone euro de 27 membres, le groupe 1 compterait cinq Etats, le groupe 2 quatorze, le groupe 3 huit.

Classer les Etats en fonction de leur poids économique, de leur PIB, n'est en rien choquant et cela se pratique d'ailleurs déjà au sein du FMI et de la Banque mondiale. Mais là ne s'arrête pas la réforme proposée, loin s'en faut ! En effet, toujours dans ce souci d'efficacité que j'approuve, le premier considérant ajoute que « le nombre des gouverneurs disposant du droit de vote devra être inférieur au nombre total des gouverneurs siégeant au Conseil des Gouverneurs ». D'où un système de rotation dans les droits de vote des gouverneurs, au sein de chaque catégorie, système qui ferait par exemple que le Gouverneur de la Banque de France - représentant de la République au sein du Conseil, même s'il est indépendant du gouvernement en raison de son statut - perdrait son droit de vote une fois sur cinq ! Quant aux Etats du groupe 2, ils voteraient une fois sur deux à peu près, et ceux du groupe 3 une fois sur trois environ.

Saluez : c'est du jamais vu ! Et si vous ne me croyez pas, je vous renvoie à cette phrase du quatrième considérant de la décision : « Le principe une voix par membre, qui constitue le principe décisionnel essentiel du Conseil des Gouverneurs, continue de s'appliquer à tous les membres de celui-ci ayant le droit de vote. » Sic et resic ! Bel oxymore : on en perd son souffle... Imaginons qu'au sein de notre assemblée, une centaine de députés perdent leur droit de voter une fois sur cinq : si l'on en croit les banquiers centraux, cela ne porterait pas atteinte au principe d'une voix par membre ! Quelle audace ! Et pourtant, c'est ce qu'on nous demande d'approuver...

Qui aurait pu croire que les Gouverneurs centraux manqueraient autant d'imagination. Car c'est à eux que l'on doit cette géniale trouvaille. Comme dirait le Canard, ils ont franchi le mur du çon, enfermés qu'ils sont dans leurs certitudes technocratiques monétaristes et dans un souverain mépris pour les politiques. Or, si les politiques peuvent se tromper, et ils n'y manquent pas, eux ne sont pas nommés au-delà de leur seuil d'incompétence et ils ont des comptes à rendre au peuple - cela s'appelle la démocratie !

M. Patrick Labaune - Bravo !

M. Jacques Myard - Cette décision, qui vaut accord modificatif du statut de la BCE, bouleverse les conditions de vote au sein du Conseil des Gouverneurs, notamment en ce qui concerne la politique monétaire dont dépend la croissance et dont aucun Etat ne peut donc se désintéresser. Elle apparaît à la fois politiquement inacceptable, anticonstitutionnelle et, je le maintiens, inopposable aux dix nouveaux membres, son entrée en vigueur étant trop tardive.

Cette réforme est inacceptable, car elle aurait des conséquences politiquement désastreuses, au regard de la nature de la BCE comme en raison du précédent ainsi créé.

Au regard de la nature de la BCE : il est évident qu'en privant par intermittence du droit de vote les gouverneurs, en en faisant de nouveaux intermittents, on dénationalise encore un peu plus un système dont on sait combien il peut être attentif aux problèmes économiques et sociaux des Européens - le propos n'est pas tout à fait ironique ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP) Cette réforme accentue en effet le caractère technocratique de la BCE dont la politique découle d'un lien incestueux entre un monétarisme obsolète et abstrait et une prétendue « vertu » économique. L'économie, c'est avant tout le pragmatisme, l'ajustement permanent à la conjoncture ; ce n'est pas le dogmatisme ou la mise en _uvre de principes éthérés par des technocrates n'ayant de comptes à rendre à personne. Une telle politique n'est pas de nature à crédibiliser la monnaie unique, qui est aujourd'hui devenue une entrave à la croissance.

Le fait que cette réforme ait été mitonnée par les banquiers centraux, puis servie aux politiques comme propre à « rassurer les marchés », comme le prétend l'exposé des motifs du projet, en dit long sur la volonté de distanciation de la BCE par rapport aux volontés nationales. Dans son splendide isolement, cette institution se condamne sans appel à vouloir avoir raison contre la réalité du monde !

M. Pierre Lequiller - N'importe quoi !

M. Jacques Myard - Il est urgent que le politique la rappelle à l'ordre et la fasse rentrer dans le rang. Loin de la crédibiliser, la réforme va l'affaiblir car les marchés extrapoleront à partir de la présence ou de l'absence de tel ou tel Etat des résultats différents, s'agissant des décisions qu'elle arrêtera. D'où des décisions à géométrie variable, facteurs d'instabilité et d'incertitude : le contraire du résultat recherché !

M. Patrick Labaune - Il a raison !

M. Jacques Myard - Et comment ne pas évoquer ici la réforme des traités ? Ce chantier doit être l'occasion de réformer le statut de la BCE pour donner au Conseil européen et à l'Ecofin la possibilité d'adresser au Conseil des Gouverneurs des instructions sur la politique monétaire.

M. Pierre Lequiller - Ce serait un retour en arrière !

M. Jacques Myard - Non !

Ce n'est pas à des fonctionnaires promus largement au-dessus de leurs compétences à prendre le pas sur le politique, seul responsable devant les peuples ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP) Ils n'ont pas à commander !

Cette décision est également dangereuse en raison du précédent qu'elle crée. C'est en effet la première fois que la France accepterait de participer au fonctionnement d'une organisation internationale, et non des moindres, sans avoir le droit de vote. On m'opposera que le Gouverneur de la Banque de France est indépendant. Certes, il l'est dans le système maastrichtien, à l'égard du gouvernement, mais cela ne veut pas dire qu'il flotte dans un azur éthéré, en apesanteur. Dans l'esprit même du traité de Maastricht, son indépendance visait à renforcer le lien qui l'unit à la République, pour prendre des décisions libres des contingences partisanes. Jamais au grand jamais, il ne devait, dans cette optique, être coupé des économies nationales. Le Gouverneur de la Banque de France est donc bien le représentant de la République au sein du Conseil et le priver de droit de vote, c'est en priver la France !

L'accepter serait suicidaire. J'ai cru comprendre que la Commission elle-même se montrait réticente, tout comme la Finlande et les Pays-Bas - un comble ! Comment les Français pourraient-ils ne pas rejeter un système qui viole aussi allégrement leurs droits ? Au nom même de l'Europe, je vous en conjure, cessez de jouer avec le feu !

Quoi qu'on ait écrit dans le procès-verbal de la réunion du 7 mars 2003, il y a bien là un précédent, et un précédent inadmissible. C'est en effet une loi des institutions internationales qu'une règle bafouée s'y impose. Vous commettez en l'acceptant une faute sans appel, dont vous porterez le déshonneur devant l'histoire ! (Rires sur les bancs UMP)

Deuxième point : la décision du 21 mars 2003 est contraire à la Constitution et, plus particulièrement, aux articles 88-1 et 88-2.

Le premier dispose que « la République participe aux Communautés et à l'Union européenne constituées d'Etats qui ont choisi librement, en vertu des traités qui les ont instituées, d'exercer en commun certaines de leurs compétences. »

Proposer que le représentant de la France soit privé de vote une fois sur cinq est une violation de cet article, puisque la République ne participe plus, mais devient spectatrice. En voilà un bel exemple de cette souveraineté partagée dont on nous avait tant rebattu les oreilles !

Le même constat s'impose au regard de l'article 88-2 de la Constitution selon lequel, sous réserve de réciprocité, et selon les modalités prévues par le Traité sur l'Union européenne signé le 7 février 1992, la France consent aux transferts de compétence nécessaires à l'établissement de l'Union économique et monétaire. Votre proposition conduirait à modifier la composition du Conseil des Gouverneurs de la BCE au moment du vote, telle qu'elle résulte de l'article 112 du Traité consolidé. Dés lors, le retrait du droit de vote du gouverneur de la Banque de France modifierait les modalités prévues par le Traité sur l'Union européenne signé le 7 février 1992, telles qu'elles ont été soumises au référendum et actées dans l'article 88-2 de la Constitution.

Ce retrait viderait de son sens la notion de réciprocité qui figure en tête de l'article 88-2.

Par ailleurs, il faut noter que l'article 88-4 de la Constitution n'a pas rempli sa fonction d'alerte. De fait, la délégation de l'Assemblée nationale pour l'Union européenne a examiné cette décision en mars 2003, et n'a rien vu des écueils de ce texte.

J'ose espérer que si la décision du conseil européen du 21 mars 2003, si contraire à la Constitution, était adoptée par l'Assemblée, soixante députés de tous les bancs se retrouveraient pour saisir le Conseil constitutionnel, de même que le premier d'entre nous, le Président de l'Assemblée nationale.

La décision du conseil des chefs d' Etat ou de Gouvernement du 21 mars 2003, relative à la modification des statuts du système européen de banques centrales et de la BCE sera-t-elle opposable aux dix nouveaux membres de l'Union européenne ?

Aux termes de l'article 2 de l'acte d'adhésion, les dispositions des Traités originaires et les Actes pris, avant l'adhésion, par les institutions et la BCE, lient les nouveaux Etats membres.

Ainsi, toute modification des Traités ou du Droit dérivé, pour s'imposer aux nouveaux Etats membres, doit entrer en vigueur au plus tard le 30 avril 2004. Est-ce possible? Aux termes de son article 2-2, il est prévu que cette décision entrera en vigueur le premier jour du deuxième mois suivant le dépôt de l'instrument de ratification de l'Etat membre signataire qui procédera le dernier à cette formalité. Il semble que ce soit la France. Nous sommes le 14 avril. En allant vite, et sans recours devant le Conseil constitutionnel, la décision pourrait entrer en vigueur le 17 mai 2004 ou le 1er juin 2004. Reste à déterminer si le deuxième mois s'entend du mois de juin, ou s'il s'interprète comme une durée mensuelle. Il semble qu'aux termes de l'interprétation qui prévaut, ce soit le 17 mai 2004 qui ait été retenu. Ce texte n'est donc plus opposable aux dix nouveaux membres.

Du reste, il s'apparente à un marché de dupes : que diriez-vous, Madame la ministre, si, au moment de prendre possession d'un appartement, vous vous aperceviez que le règlement de copropriété vient d'être modifié à votre insu !

Il y avait une autre solution : pondérer les voix de tous les Etats qui auraient ainsi gardé leur droit de vote.

Mais personne n'ose dire non aux technocrates de la BCE, qui se rient du Conseil européen et du politique !

Au nom de la démocratie, ce texte doit être rejeté. Il crée un dangereux précédent aux termes duquel la France est privée du droit de vote au sein de l'Union européenne. Il est anticonstitutionnel. Il est inopérant et inopposable aux dix nouveaux Etats membres.

Ayez le courage de dire non aux technocrates ! Seuls les esclaves disent toujours oui.

Pour toutes ces raisons, je vous demande d'adopter cette motion d'ajournement.

M. Patrick Labaune - Très bien.

Mme Claudie Haigneré, ministre déléguée aux affaires européennes - Cette réforme de la BCE est une adaptation technique des règles de fonctionnement de son organe de décision, sans modifier le rôle de la BCE, pas plus que la définition de la politique monétaire.

Je tiens à remercier M. le rapporteur, M.Philip, M.Lequiller, pour leur analyse politique et technique, et leur dire que la solution retenue a été mûrement réfléchie.

Les Gouverneurs des Banques Centrales ne sont pas les représentants des Etats membres...

M. Jacques Myard - C'est faux!

Mme la Ministre déléguée - L'indépendance de la BCE est consacrée par l'article 108 du traité de 1992 et l'article 7 des statuts de la BCE. Monsieur Myard, il faut reconnaître que c'est un choix politique, qui existe depuis Maastricht, et a été validé par les Français, par référendum.

Pour le reste, vous utilisez cette réforme technique qui avantage la France, pour reprendre un débat déjà tranché au niveau politique.

Cette réforme, par ailleurs, n'est pas contraire à la Constitution, et je vous rappelle que le Conseil d'Etat a donné son avis sur ce présent projet...

M. Jacques Myard - Ce n'est pas une garantie!

Mme la Ministre déléguée - ...et a rappelé que le Conseil constitutionnel s'était déjà prononcé sur la question.

Cette réforme ne crée pas un précédent pour le fonctionnement de l'Union, le Conseil européen l'a réaffirmé. Vous le savez, le système institutionnel de l'Union est une construction sui generis qui ne peut pas être comparée au fonctionnement des autres organisations internationales.

Pour ce qui concerne la mise en _uvre, M. Barnier vous a répondu tout à l'heure. Je remercie tous ceux qui se sont associés à cette réflexion. Bien entendu, le Gouvernement vous invite à rejeter la motion d'ajournement (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. le Rapporteur - Malgré les qualités d'orateur et le talent de persuasion de M. Myard, la commission n'est pas favorable à l'adoption de sa motion d'ajournement.

M. François Loncle - Je m'exprimerai à la fois sur la motion d'ajournement et sur le texte lui-même, notamment pour rappeler à notre collègue Desallangre ce qui s'est passé en commission des affaires étrangères les 6 et 13 avril derniers. Le 7 avril, les commissaires se sont prononcés à l'unanimité pour la première motion d'ajournement de M. Myard parce qu'ils ont considéré que le calendrier était trop serré et qu'il était notamment indispensable que le nouveau ministre des affaires étrangères vienne présenter en commission un texte devant être adopté avant le 1er mai. M. Barnier l'ayant fait - et, en toute objectivité, je dois dire qu'il l'a bien fait - hier, nous n'avions plus aucune raison d'adopter une quelconque motion d'ajournement ! Nous approuvons un dispositif tendant à rendre plus efficace une institution issue de Maastricht et approuvée, à l'initiative de François Mitterrand, par la voie référendaire. Sur le fond, il sera temps de débattre des évolutions à apporter à la BCE lorsque l'UE sera en mesure de conduire de véritables politiques communes en matière économique et sociale...

M. Jacques Myard - M. Loncle rêve !

M. François Loncle - Pour l'heure, les députés socialistes approuvent ce projet de loi. La constance de M. Myard peut susciter la sympathie...

M. Jacques Myard - Mieux vaut se répéter que se contredire !

M. François Loncle - ...mais sur ces sujets européens, trop souvent abordés à une heure tardive, elle n'emportera pas notre conviction !

La motion d'ajournement, mise aux voix, n'est pas adoptée.

Mme la Présidente - J'appelle l'article unique du projet de loi, dans le texte du Sénat.

L'article unique du projet de loi, mis aux voix, est adopté.

Prochaine séance ce matin, jeudi 15 avril 2004, à 9 heures 30.

La séance est levée à 0 heure 50.

            Le Directeur du service
            des comptes rendus analytiques,

            François GEORGE

ORDRE DU JOUR
DU JEUDI 15 AVRIL 2004

A NEUF HEURES TRENTE : 1ère SÉANCE PUBLIQUE

Discussion de la proposition de loi (n° 1137) de M. Serge POIGNANT et plusieurs de ses collègues tendant à supprimer les limites d'âge pour les concours de la fonction publique.

M. Serge POIGNANT, rapporteur au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République. (Rapport n° 1517.)

A QUINZE HEURES : 2ème SÉANCE PUBLIQUE

Déclaration du Gouvernement relative à l'énergie et débat sur cette déclaration.

A VINGT ET UNE HEURES TRENTE : 3ème SÉANCE PUBLIQUE

Suite de l'ordre du jour de la deuxième séance.

Le Compte rendu analytique
est disponible sur Internet
en moyenne trois heures après la fin de séance.

Préalablement,
est consultable une version incomplète,
actualisée au fur et à mesure du déroulement de la séance.

www.assemblee-nationale.fr


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