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Assemblée nationale

COMPTE RENDU
ANALYTIQUE OFFICIEL

Session ordinaire de 2003-2004 - 84ème jour de séance, 209ème séance

1ère SÉANCE DU MERCREDI 5 MAI 2004

PRÉSIDENCE de M. Jean-Louis DEBRÉ

Sommaire

QUESTIONS AU GOUVERNEMENT 2

ORGANISATION D'UN RÉFÉRENDUM
SUR LA CONSTITUTION EUROPÉENNE 2

POLITIQUE INDUSTRIELLE 3

ORGANISATION D'UN RÉFÉRENDUM
SUR LA CONSTITUTION EUROPÉENNE 3

ÉLARGISSEMENT DE L'UNION EUROPÉENNE 4

MARIAGE ENTRE PERSONNES DE MÊME SEXE 5

INTERMITTENTS DU SPECTACLE 5

ASSURANCE MALADIE 6

INSTITUT NATIONAL DU SPORT
ET DE L'ÉDUCATION PHYSIQUE 7

BÂTIMENT ET TRAVAUX PUBLICS 7

ASSURANCE CHÔMAGE 8

LUTTE CONTRE LE RACISME ET L'ANTISÉMITISME
AU SEIN DE L'OSCE. 9

MODERNISATION DE L'ADMINISTRATION. 9

NOMINATION D'UN VICE-PRÉSIDENT
ET D'UN QUESTEUR 9

SOLIDARITÉ POUR L'AUTONOMIE
DES PERSONNES ÂGÉES ET DES PERSONNES HANDICAPÉES (suite) 10

QUESTION PRÉALABLE 10

La séance est ouverte à quinze heures.

QUESTIONS AU GOUVERNEMENT

L'ordre du jour appelle les questions au Gouvernement.

M. le Président - Comme chaque premier mercredi du mois, les quatre premières questions seront consacrées à des thèmes européens.

ORGANISATION D'UN RÉFÉRENDUM SUR LA CONSTITUTION EUROPÉENNE

M. Jérôme Lambert - Depuis cinq jours, l'Union européenne compte dix nouveaux membres et 75 millions d'habitants supplémentaires. Les Français approuvent dans leur grande majorité le nouveau visage de l'Europe et nous saluons tous, avec eux, fraternellement, les nouveaux citoyens de l'Union. Nos compatriotes regrettent toutefois l'embarras de notre pays, tel qu'il s'est manifesté lors de la dernière conférence de presse du Président de la République, sur des sujets essentiels pour l'avenir de notre pays. Embarras sur le contenu de la future constitution européenne comme sur la détermination de notre pays à faire aboutir ce projet ; embarras quant à l'organisation d'un référendum sur cette constitution - le Président de la République semble si peu sûr de la pertinence d'un futur accord qu'il redoute par avance de le soumettre aux Français ; embarras enfin sur l'adhésion de la Turquie, que le Président de la République souhaite quand « les conditions requises seront réunies » alors que sa majorité parlementaire y est définitivement hostile... alors même qu'au Parlement européen elle fait alliance avec le parti gouvernemental turc au sein du Parti populaire européen (Interruptions sur les bancs du groupe UMP). Monsieur le Premier ministre, qui croire de votre majorité ou du chef de l'Etat ?

Par ailleurs, la situation de nos finances publiques, que votre politique sociale et fiscale injuste a fortement contribué à dégrader depuis deux ans, fragilise la position de notre pays en Europe (Exclamations sur les bancs du groupe UMP). Les mesurettes annoncées hier n'y changeront rien : notre pays est affaibli par tant de contradictions, d'embarras et d'incertitudes. Quand allez-vous dire enfin la vérité aux Français et les interroger par référendum ? Quand enfin cesserez-vous d'affaiblir par votre politique la position de la France en Europe ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

M. Michel Barnier, ministre des affaires étrangères - Je vous remercie d'avoir rappelé, avec vos mots, l'importance, historique, de la réunification de l'Europe intervenue samedi dernier. Pour le reste, je ne partage pas votre appréciation sur notre engagement dans le projet européen. Pour ce qui est de l'organisation d'un référendum sur la constitution européenne, je vous rappelle qu'elle relève de la prérogative exclusive du Président de la République. C'est lui qui, le moment venu, décidera, souverainement, de faire ratifier le texte de la constitution par le peuple ou par les représentants du peuple, dont vous êtes (Interruptions sur les bancs du groupe socialiste). Pour que ce référendum ait lieu, il faudrait aussi que le projet de constitution ait abouti, ce qui n'est pas encore le cas. Soyez assurés que nous ferons tout pour mettre à profit les quelques semaines de négociation qui restent pour conserver l'élan donné par la Convention et améliorer encore le texte qu'elle a proposé, en particulier sur la dimension sociale (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste). J'aimerais d'ailleurs beaucoup que vous essayiez de convaincre vos amis de certains gouvernements européens socialistes de nous soutenir dans cette démarche (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

POLITIQUE INDUSTRIELLE

M. Philippe Folliot - Le thème de la politique industrielle, intimement lié à celui de la lutte contre les délocalisations et la désindustrialisation, a fait irruption dans la campagne présidentielle aux Etats-Unis. Nul doute qu'il en ira de même lors des élections européennes de juin prochain en France, nos concitoyens attendant, légitimement, beaucoup de l'Union européenne en ce domaine. Le volontarisme du Gouvernement ne nous a pas échappé, qui a trouvé une traduction concrète dans les dossiers Aventis et Alstom notamment. Mais au-delà des grands groupes, beaucoup de petites et moyennes entreprises font face à de graves difficultés. Tel est le cas, dans ma circonscription, de l'entreprise de machines-outils Comau, anciennement Renault Automations, intégrée au groupe Fiat par le gouvernement précédent. L'établissement de Castres, qui maîtrise pourtant une technologie et un savoir-faire mondialement reconnus, prépare ainsi un plan social, lequel est d'autant plus douloureusement vécu qu'il affecte un bassin industriel déjà durement éprouvé par les restructurations de l'industrie textile. Ouvriers, techniciens et cadres s'interrogent avec angoisse sur leur avenir. Monsieur le ministre délégué à l'industrie, que compte faire le Gouvernement pour éviter les graves conséquences sociales, hélas aujourd'hui prévisibles, de la situation très dégradée de Comau ? (« Rien ! » sur les bancs du groupe socialiste)

D'une manière plus générale, comment le Gouvernement compte-t-il lutter contre les délocalisations industrielles ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF)

M. Patrick Devedjian, ministre délégué à l'industrie - Monsieur le député, je comprends votre préoccupation. Comau, entreprise de machines-outils appartenant au groupe Fiat et qui compte 470 emplois, s'apprête à en supprimer 160 pour regagner en compétitivité... (Exclamations sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains)

Mon cabinet suit ce dossier avec beaucoup d'attention. Il semble d'ores et déjà que trente emplois supplémentaires pourront être sauvegardés. Des mesures d'âge seront par ailleurs possibles. Enfin, pour ce qui est de la revitalisation du bassin industriel de Castres, le Gouvernement sera très exigeant (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains). Si nous comprenons en effet les mutations économiques et industrielles, notamment celles induites par la mondialisation, nous nous sentons également responsables de la vie quotidienne des hommes et des femmes qui ont besoin de ce travail. Notre politique sera volontariste (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains) pour créer dans tous les bassins industriels sinistrés des emplois nouveaux à forte valeur ajoutée (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF).

ORGANISATION D'UN RÉFÉRENDUM SUR LA CONSTITUTION EUROPÉENNE

M. Michel Vaxès - Monsieur le Premier ministre, jeudi dernier, le Président de la République ne s'est pas engagé à organiser un référendum sur le traité instituant une constitution européenne. Il serait, selon lui, prématuré de trancher entre la ratification de ce texte par le peuple ou par le Congrès au motif que l'on n'en connaît pas encore le contenu exact. Cette dérobade appelle trois remarques.

Premièrement : le texte de la constitution n'était pas davantage connu lorsque le candidat Chirac à la présidentielle promettait de soumettre sa ratification au suffrage universel. Il y a loin des actes du Président aux promesses du candidat...

Deuxièmement : quel que soit le contenu du texte, il aura des conséquences majeures sur nos institutions, sur nos politiques nationales, et par conséquent sur la vie de chacun des peuples de l'Union. Ceux-ci doivent donc être consultés.

Troisièmement : une Europe qui se construit sans la participation de ses citoyens continuera de se construire sans eux.

Engageons le débat avec les Françaises et les Français. Donnons-leur la possibilité de décider de leur destin européen. Laissons-les choisir entre votre Europe libérale, qui les enferme dans une logique meurtrière de concurrence effrénée hostile aux services publics, et une autre Europe, celle que nous souhaitons, une Europe juste, solidaire et fraternelle, qui répond à leurs besoins et à leurs attentes, parce qu'elle se réalise avec eux. Comme vous y invite l'article 11 de la Constitution, allez-vous, monsieur le Premier ministre, proposer l'organisation du référendum que nous demandons et que réclament les concitoyens dans les 25 Etats de l'Union ? Si vous n'assumez pas cette responsabilité constitutionnelle et politique, nous déposerons une motion proposant à notre assemblée de soumettre à référendum le texte de ce traité (Applaudissements sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains).

M. Michel Barnier, ministre des affaires étrangères - A ce que j'ai répondu tout à l'heure à M. Lambert, à savoir que l'organisation d'un référendum, que cela vous plaise ou non, demeure une prérogative exclusive du Président de la République, j'ajouterai qu'il est une belle idée que j'aimerais que vous partagiez. Quelle que soit la voie empruntée par les pays européens pour ratifier la constitution, référendum ou, comme nos amis allemands, procédure parlementaire, l'important est qu'ils le fassent tous la même semaine, voire le même jour et qu'il y ait, pour la première fois en Europe, un débat européen sur un texte européen, et non pas vingt-cinq débats nationaux juxtaposés. Enfin, qu'il y ait ultérieurement référendum ou non, rien n'interdit de discuter dès maintenant du texte issu des travaux de la Convention, lequel n'est pas celui que vous dites, Monsieur Vaxès. Les services publics y sont protégés, la dimension sociale prise en compte, les droits sociaux consolidés... (Protestations sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains) J'ai vraiment l'impression que nous parlons pas du même texte. Pour que vous preniez connaissance du texte réel, je suis prêt à vous remettre mon exemplaire personnel, et même à vous le dédicacer (Sourires et applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

ÉLARGISSEMENT DE L'UNION EUROPÉENNE

Mme Irène Tharin - L'Union européenne à vingt-cinq a fêté samedi dernier à Dublin son premier jour d'existence. L'entrée de dix nouveaux partenaires dans l'Union est une étape historique pour l'Europe et une chance pour nous.

Cet élargissement marque le renforcement de notre communauté de valeurs et de principes. C'est aussi une chance dans le domaine économique, la croissance et l'investissement créant une nouvelle dynamique au service de l'emploi.

L'Europe à vingt-cinq fait aujourd'hui de l'Union une puissance économique de premier rang, dans laquelle chacun sera gagnant.

Cet élargissement est porteur d'espoirs, parfois de craintes, mais aussi de responsabilités. Il nous faudra relever de nombreux défis, tous ensemble.

Comment la France pourra-t-elle contribuer au succès de cette grande Europe ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

Mme Claudie Haigneré, ministre déléguée aux affaires européennes - Le 1er mai, dix nouveaux Etats sont devenus membres à part entière de l'Union européenne. Dans toute l'Europe, de la Pologne au Portugal, nous avons célébré dans la joie et la fierté ce moment historique. L'Europe est enfin réunie, à l'issue d'un long processus qui a exigé beaucoup de volonté de la part de ces pays. C'est une chance pour eux, c'en est une aussi pour l'Europe tout entière.

La force du projet européen se trouve à nouveau confirmée. Nous avons maintenant à relever d'importants défis. D'abord, il nous faut garantir le bon fonctionnement de l'Europe à vingt-cinq, pour pouvoir faire ensemble les meilleurs choix. Ensuite, nous devons créer un espace économique favorisant la croissance et l'emploi. Nous avons enfin besoin d'un espace de solidarité, de justice et de sécurité.

L'élargissement nous l'avons voulu. A nous maintenant de le faire vivre, au bénéfice de chaque citoyen européen. La France, qui a accompagné les nouveaux membres dans leur démarche, les considère comme des partenaires essentiels pour une Europe plus forte et plus présente dans le monde (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF).

MARIAGE ENTRE PERSONNES DE MÊME SEXE

Mme Marie-Hélène des Esgaulx - Le 31 mars, des élus se sont publiquement prononcés en faveur d'unions homosexuelles, et ont annoncé leur intention de célébrer les mariages entre personnes de même sexe. Un de nos collègues a fait connaître sa décision de célébrer le 5 juin un mariage de ce type dans mon département de Gironde (Exclamations sur les bancs du groupe UMP), alors qu'il sait parfaitement que cet acte est illégal. En effet, le code civil indique clairement que le mariage ne se conçoit qu'entre un homme et une femme. De plus, la Cour européenne des droits de l'homme a consacré à deux reprises une jurisprudence selon laquelle un mariage entre deux personnes de même sexe ne peut pas être validé.

La volonté du maire de Bègles de célébrer un mariage homosexuel pose une vraie question : un élu, officier d'état-civil, peut-il bafouer impunément les lois de la République (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP), et faire passer ses opinions personnelles au-dessus de la légalité ? (Mêmes mouvements) Cette provocation juridique ne doit pas masquer le vrai problème de fond : dans notre société, voulons-nous ou non de telles unions ? Allez-vous donner instruction au parquet de faire opposition à ce mariage, et contraindre cet élu à respecter les lois que nous votons ici depuis deux cents ans ? (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Dominique Perben, garde des sceaux, ministre de la justice - Mon rôle est de rappeler la loi qui organise le mariage entre personnes de sexe différent. L'article 75 du code civil est parfaitement clair, et une jurisprudence abondante va dans le même sens.

Le maire, officier d'état-civil, est à ce titre agent de l'Etat, et doit donc respecter la loi (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

Face à la perspective d'un tel mariage, soit le parquet s'y oppose préventivement, et les intéressés peuvent alors demander l'arbitrage du tribunal, soit le parquet demande la nullité après coup. J'ai donné au parquet général de Bordeaux instruction de s'opposer à ce mariage (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

Par ailleurs, à la demande du Président de la République et du Premier ministre, j'ai engagé des consultations pour examiner comment améliorer le fonctionnement du PACS. Enfin, je proposerai bientôt un texte tendant à aggraver les sanctions contre les violences homophobes. Cet ensemble de démarches me paraît cohérent, et conforme à l'évolution de notre société (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF).

INTERMITTENTS DU SPECTACLE

M. Bernard Brochand - Comme vous l'avez dit, Monsieur le ministre de la culture, votre feuille de route est chargée. Y figure en bonne place la situation des intermittents du spectacle (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste). Là encore, vous avez pris le problème à bras-le-corps (Rires sur les bancs du groupe socialiste ; applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

Ce matin vous avez proposé de créer un fonds spécifique provisoire doté de 20 millions et géré par l'UNEDIC, afin de résorber la précarité des artistes et des techniciens les plus vulnérables.

Pensez-vous ces mesures propres à apaiser les esprits et à protéger durablement les plus fragiles ? Face aux nombreux abus et à leur coût pour les finances publiques, comment y porter remède et réduire le périmètre de l'intermittence ? Enfin, à la veille de l'ouverture du 57e festival de Cannes, dont je suis le maire, pensez-vous que les décisions annoncées permettront à cette manifestation de se dérouler dans le calme ? Le festival de Cannes, vous le savez, est un événement très fortement médiatisé, avec 5 000 journalistes accrédités et de nombreuses stars venues du monde entier ? L'image de notre pays est en jeu (Exclamations sur les bancs du groupe UMP).

M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre de la culture et de la communication - Comment sortir de la crise et régler concrètement le sort des plus précaires, exclus du système d'indemnisation, comment favoriser durablement l'emploi culturel ? Ce n'est pas facile ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste) Si c'était facile, ce serait réglé par les uns et par les autres depuis longtemps (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP). Mon devoir est d'écouter et de dialoguer, puis de décider. Ce matin, j'ai annoncé des mesures d'urgence, avec la création d'un fonds provisoire géré par l'UNEDIC pour rétablir dans leurs droits les laissés-pour-compte. L'ancien directeur de la sécurité sociale a reçu mission d'ouvrir sans délai la discussion avec les partenaires sociaux. Nous devons maintenir concrètement la spécificité de notre système de soutien à l'action culturelle et artistique, par des mesures d'urgence concernant les abus et la délimitation du périmètre nécessaire. Je travaille quotidiennement avec Jean-Louis Borloo sur ces questions (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste).

Les congés de maladie et de maternité doivent faire l'objet d'un examen immédiat par les partenaires sociaux. Ce n'est pas une question financière, c'est un impératif humain.

Un dispositif opérationnel précis doit être mis en _uvre pour soutenir l'action culturelle et artistique. Sur ce sujet, le Premier ministre a souhaité qu'à l'automne le Parlement soit saisi d'un débat d'orientation.

S'agissant du prochain festival de Cannes qui est un moment de fierté nationale, il n'y a pas d'incompatibilité entre l'activité artistique et le débat, pour lequel je serai disponible à tout moment à l'occasion du festival.

J'en appelle au respect des artistes, de la création, du public, et du rayonnement international de notre pays. Sachons tous nous donner la main. Le cri d'Antigone « tout, tout de suite, ou alors je refuse », n'est pas une méthode d'action concrète (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Maxime Gremetz - Rendez-nous Aillagon !

ASSURANCE MALADIE

M. Gérard Bapt - Voilà des mois que le Gouvernement annonce une grande réforme portant à la fois sur la gouvernance et sur l'offre de soins de notre système de santé, ainsi que des mesures pour traiter le déficit de l'assurance maladie - que le ministre de la santé a lui-même qualifié de « sidéral ».

Alors que votre avant-projet de loi devrait être transmis avant la fin du mois au Conseil d'Etat, ni la mission d'information, ni les partenaires sociaux, ni les professionnels de santé ne disposent de propositions concrètes. Il est vrai que vous compensez ce vide « sidérant » par une agitation médiatique remarquable mais contestable - remarquable car vous parvenez, Monsieur le ministre de la santé, à concurrencer M. Sarkozy (Protestations sur les bancs du groupe UMP), mais contestable car votre message est centré sur la fraude à la carte Vitale, au risque de susciter des sentiments populistes ou xénophobes.

Votre message est également contestable lorsque, à propos de la canicule, vous retrouvez la vieille bonne idée de la brumisation : suffit-il de donner aux personnes âgées, après la boîte de chocolat à Noël, un brumisateur de la Pentecôte ? (Protestations sur les bancs du groupe UMP ; applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

Quand présenterez-vous votre projet de réforme de l'assurance maladie à la représentation nationale ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

M. Philippe Douste-Blazy, ministre de la santé et de la protection sociale - Le rapport de l'inspection générale des affaires sociales estime qu'il y a dix millions de cartes Vitale en surnombre et cela vous est égal ? Ceux qui nous écoutent apprécieront (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

Nous n'aurions rien proposé quant à la réforme de l'assurance maladie ? Le président de la Mutualité française appréciera, tout comme les syndicats, alors que nous travaillons avec eux depuis près de trois semaines. Mais il est vrai que vous ne faites pas confiance au dialogue social et que vous êtes accoutumés à tout régler par la loi. Nous préférons, nous, le contrat et la discussion (Protestations sur les bancs du groupe socialiste ; applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

Vous avez ironisé sur le brumisateur. Après la catastrophe de l'été dernier, il me semble nécessaire de faire preuve d'un peu plus de respect à l'endroit des personnes âgées (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains ; applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

J'ai présenté ce matin, avec M. Falco et Mme Montchamp, un plan « canicule » pour tirer les leçons du drame de l'an dernier. Le professeur San Marco à Marseille a insisté sur les conseils à donner aux personnes âgées.

Dès vendredi, je recevrai syndicats et partenaires sociaux et nous présenterons alors un calendrier précis pour cette réforme que vous n'avez jamais su entreprendre (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP ; protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains).

INSTITUT NATIONAL DU SPORT ET DE L'ÉDUCATION PHYSIQUE

M. Patrick Beaudouin - Monsieur le ministre de la jeunesse et des sports, vous venez d'annoncer un plan de rénovation et de modernisation des locaux de l'Institut national du sport et de l'éducation physique.

Elu d'une circonscription et d'une commune situées à proximité du bois de Vincennes, je me réjouis de cette annonce, les locaux de l'INSEP n'étant plus à la hauteur de ses missions. Vous allez ainsi permettre à nos sportifs de s'entraîner dans des conditions optimales pour que la France soit à même d'organiser les Jeux Olympiques de 2012.

Quels sont les éléments principaux de ce plan de rénovation et de modernisation ? Pouvez-vous rassurer les populations riveraines quant à l'intégration de ce futur chantier dans ce dernier poumon vert de l'Est parisien qu'est le bois de Vincennes ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Jean-François Lamour, ministre de la jeunesse, des sports et de la vie associative - Je partage votre sentiment sur la situation de l'INSEP, dont les équipements sont dans un état calamiteux. Nous ne pouvons laisser des athlètes de haut niveau s'entraîner sans leur offrir les meilleures conditions possibles.

J'ai deux priorités, et tout d'abord une meilleure intégration de l'INSEP dans un environnement boisé important dont nous allons doubler la surface. Nous allons également faire en sorte que les voitures ne puissent plus circuler à proximité.

Nous voulons de plus donner aux athlètes des équipements de grande qualité, avec des supports techniques qui permettront en effet de préparer dans les meilleures conditions les Jeux olympiques.

Les travaux seront achevés en 2008, ce qui est de bonne augure pour que Paris puisse organiser les Jeux de 2012 (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

BÂTIMENT ET TRAVAUX PUBLICS

M. Jean-Yves Hugon - Les entreprises du BTP jouent un rôle essentiel. Elles entretiennent et rénovent le patrimoine immobilier de la nation et donnent corps aux projets de l'Etat : routes, chemins de fer, logements. Elles donnent du travail à près de 1,3 million de personnes.

Or, plus de 70 % de ces entreprises ont des difficultés de recrutement. La situation risque de plus de s'aggraver : à long terme, c'est la capacité même du pays à entretenir son patrimoine qui pourrait être remise en cause.

Quelles mesures le Gouvernement entend-il prendre pour répondre aux préoccupations de ces entreprises ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Gilles de Robien, ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer - Souvenez-vous de la morosité qui régnait dans les entreprises du BTP en 2002. Nous arrivions alors à créer péniblement de 2 000 à 4 000 emplois quand l'Espagne en créait des dizaines de milliers. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains ; applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF) Dès 2002, nous avons pris des mesures pour restaurer la confiance. Ainsi, en 2003, 20 000 emplois ont-ils été créés dans le BTP, soit quatre fois plus que l'année précédente (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF). Je suis persuadé comme vous que le BTP constitue un gisement fantastique en matière d'emplois - nous les évaluons entre 200 000 et 300 000. Je réunirai dès le mois de juin les professionnels de ce secteur pour réfléchir à la façon de rendre ces métiers plus attractifs. Nous verrons avec M. Fillon s'il est possible de créer des formations spécifiques.

Grâce aux mesures en faveur du logement prises par MM. Borloo et Daubresse, grâce aux réformes engagées, 2004 et 2005 seront des années de croissance et d'emplois pour le BTP (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF et du groupe UMP).

ASSURANCE CHÔMAGE

M. Gaëtan Gorce - Depuis plusieurs mois nous alertons le Gouvernement sur les conséquences sociales et humaines désastreuses de la réforme de l'assurance chômage dont vous devez aujourd'hui, dans l'urgence, gérer les conséquences financières (Protestations sur les bancs du groupe UMP). En prétendant financer la réintégration des chômeurs injustement exclus par le report de la créance de 1,2 milliard d'euros que l'Etat avait sur l'UNEDIC, vous sauvez peut-être les apparences mais non le régime d'assurance chômage.

En effet, le coût de cette réintégration sur 2004 et 2005, pour plus de 600 000 chômeurs, s'élève à plus de deux milliards d'euros. Il manque donc 800 000 millions d'euros - si l'on peut toutefois se fier à votre annonce de 1,2 milliard.

Or, ce milliard ne figure ni dans les recettes prévues dans la loi de finances pour 2004, ni en charges, au passif de l'UNEDIC. Supprimer des recettes qui n'existent pas pour financer une dépense qui n'est pas prévue, c'est un tour de passe-passe (Protestations sur les bancs du groupe UMP ; applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

Ce jonglage vise-t-il seulement à répondre aux exigences du Medef (« Ah ! » sur les bancs du groupe UMP) qui refuse une augmentation des cotisations chômage ou bien, faute d'accord avec les partenaires sociaux, êtes-vous prêts à prendre toutes vos responsabilités par décret, à moins que vous ne soyez résignés à l'idée injuste d'un emprunt qui reporterait sur les générations futures le financement de ces déficits ? (Protestations sur les bancs du groupe UMP)

Quelles réponses allez-vous apporter à un déficit de plus de 9 milliards ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains)

M. Jean-Louis Borloo, ministre de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale - Je vais vous répondre très précisément. Tout d'abord, je pensais que vous vous réjouiriez de la réintégration dans leurs droits de 600 000 chômeurs, comme s'en sont félicités tous les partenaires sociaux.

A nouveau, le paritarisme s'exerce sereinement dans ce pays.

Quant au financement, le régime de l'UNEDIC sera à nouveau excédentaire en 2006.

Permettez-moi de rappeler qu'en octobre 2000, pour être assurés d'obtenir l'agrément, les partenaires sociaux ont accepté de verser à l'Etat vingt milliards de francs, à l'origine du déficit de l'UNEDIC ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste ; huées sur les bancs du groupe UMP)

Vous êtes particulièrement mal placés pour nous donner des leçons à ce propos ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF)

LUTTE CONTRE LE RACISME ET L'ANTISÉMITISME AU SEIN DE L'OSCE.

M. Michel Voisin - L'actualité le montre, la lutte contre le racisme et l'antisémitisme ne souffre aucune faiblesse, ni aucun relâchement. Comme l'a rappelé hier M. le Premier ministre, la France est profondément blessée par les comportements antisémites. A cet égard, je salue la détermination du Gouvernement à combattre ces violences inacceptables et à faire prévaloir les principes républicains qui fondent notre pacte social.

Présent mercredi et jeudi derniers, à la conférence de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe, à Berlin, j'ai constaté que la France n'était pas la seule à être confrontée à ce phénomène. Nos efforts pour adapter la législation ont d'ailleurs été salués par les 55 Etats de l'OSCE.

Nous y avons abordé de nombreux thèmes, dont le renforcement de la législation réprimant les crimes et les délits racistes ou antisémites, le contenu des programmes scolaires, et les mesures pour lutter contre la propagande véhiculée par internet.

Monsieur le secrétaire d'Etat, vous qui étiez aussi présent, pourriez-vous nous préciser la position du Gouvernement ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Renaud Muselier, secrétaire d'Etat aux affaires étrangères - Monsieur le député, je commencerai par saluer le remarquable travail de l'OSCE. De ces deux journées passées à Berlin il ressort une déclaration qui vise à renforcer la législation des Etats membres signataires afin de lutter efficacement contre la montée de ce mal.

C'est vrai, les intervenants ont salué le modèle français, Quant à la propagande raciste et antisémite par internet, un comité interministériel, piloté par le Premier ministre, a pris des mesures pour la combattre efficacement.

Nous organisons, à Paris, les 16 et 17 juin, une réunion de l'OSCE, qui devra établir une charte éthique. Qu'on sache bien que la France n'est ni raciste, ni antisémite, ni xénophobe (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF).

MODERNISATION DE L'ADMINISTRATION.

M. Maurice Giro - Nos concitoyens se plaignent des lenteurs de l'administration, de même que les chefs d'entreprise, qui ont besoin de davantage de réactivité.

Quant aux élus locaux, ils perdent trop souvent leur temps dans des réunions formelles et inutiles.

Afin de moderniser et simplifier le fonctionnement de l'administration, vous avez annoncé la suppression de plusieurs dizaines de commissions administratives centrales ou déconcentrées.

Pourriez vous nous préciser cette mesure?

M. Eric Woerth, secrétaire d'Etat à la réforme de l'Etat - Vous connaissez la célèbre formule, quand on veut enterrer un problème, on crée une commission. Le Gouvernement, qui fait au contraire face aux difficultés, supprime nombre de commissions devenues inutiles, afin de redonner à la concertation toute sa valeur.

Au niveau central, le nombre de commissions administratives est réduit de 645 à 200. Quant au niveau déconcentré, 130 sont supprimées. Je salue à cet égard la qualité du travail du ministère de l'intérieur. Un dispositif de suivi sera mis en place. Enfin, nous inciterons à de nouveaux modes de gestion de la concertation et du dialogue.

Avec Renaud Dutreil, nous sommes persuadés que la souplesse est la clé d'une concertation réussie avec les Français. A cette fin, il était nécessaire de faire un peu le ménage (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

NOMINATION D'UN VICE-PRÉSIDENT ET D'UN QUESTEUR

M. le Président - Mes chers collègues, avant de suspendre la séance, je voudrais vous indiquer que sont nommés vice-président de l'Assemblée nationale, M. Yves Bur et questeur de l'Assemblée nationale, M. Guy Drut.

En votre nom, je leur adresse de chaleureuses félicitations (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF).

La séance, suspendue à 15 heures 55, est reprise à 16 heures 25 sous la présidence de M. Salles.

PRÉSIDENCE de M. Rudy SALLES

vice-président

SOLIDARITÉ POUR L'AUTONOMIE DES PERSONNES ÂGÉES
ET DES PERSONNES HANDICAPÉES (suite)

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion, après déclaration d'urgence, du projet de loi relatif à la solidarité pour l'autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées.

QUESTION PRÉALABLE

M. le Président - J'ai reçu de M. Jean-Marc Ayrault et des membres du groupe socialiste une question préalable.

Mme Danièle Hoffman-Rispal - J'ai l'honneur de poser, au nom du groupe socialiste, une question préalable d'autant plus nécessaire que le sujet est grave. Dans un tel domaine, nous ne pouvons nous permettre une approche aussi parcellaire que celle du texte. Nous vous demandons donc à nouveau, solennellement, de le reporter, non par esprit polémique, le sujet mérite mieux, ni parce que nous jugeons la question inutile, mais au contraire pour que le Parlement puisse étudier une réponse globale.

Séparer les éléments d'une même politique en de multiples textes n'est pas faire preuve de respect envers la représentation nationale. Nous avons déjà examiné, en première lecture, un texte sur la décentralisation qui transfère aux départements la responsabilité de la politique en faveur des personnes âgées, mais dont on nous dit que la deuxième lecture le bouleversera. Nous examinons cette semaine un texte sur l'autonomie des personnes âgées ou en situation de handicap, mais nous devons attendre les conclusions de la mission de préfiguration de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie, conduite par Raoul Briet et Pierre Jamet. Un autre projet pour l'égalité des droits et des chances, à la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, doit être réinscrit à l'ordre du jour de l'Assemblée. Enfin, la réforme de l'assurance maladie devrait être proposée dans les prochaines semaines... Ce découpage laisse un goût prononcé d'improvisation. Il vous permet de multiplier les effets d'annonce, mais au détriment de la transparence.

Le rapporteur estime lui-même, dans son rapport, qu'il aurait été plus judicieux de commencer par le texte sur la sécurité sociale, afin de clarifier les questions de financement.

M. Denis Jacquat, rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales, et sociales - Vous m'avez bien lu !

Mme Danièle Hoffman-Rispal - Le Gouvernement invoque l'urgence. La canicule a eu lieu l'été dernier ; le Premier ministre et M. Fillon ont annoncé le plan « vieillissement et solidarité » en novembre, après plusieurs mois de réflexion, et il a fallu attendre six mois encore pour que le Parlement soit saisi d'un texte partiel, puisque nous attendons le rapport de la mission Briet-Jamet. Il y a urgence, bien sûr, pour éviter que le drame ne se renouvelle. Mais ce projet n'a pas pour objet de présenter des mesures pour l'été 2004. Compte tenu de la date de promulgation puis des textes d'application, aucune mesure nouvelle ne pourra être prise avant une éventuelle canicule. On pouvait donc, comme l'ont souhaité en commission certains membres de l'UMP, attendre quelques semaines de plus.

Un recensement des personnes fragiles et isolées serait à effectuer d'urgence avant l'été. Certaines villes - dont Paris - n'ont pas attendu pour prendre de premières mesures de prévention et d'urgence. Sur le recensement, je ne serai pas aussi sévère que M. Bur, qui l'a jugé inapplicable et même scandaleux. Mais c'est un fait qu'il pose des problèmes de réalisation et de respect des libertés. Avant d'en confier la responsabilité aux maires, il aurait au moins fallu pratiquer une certaine concertation. D'autre part, cette mesure sera-t-elle efficace ? Le Conseil d'Etat a indiqué que ne pourraient être recensés que ceux qui en feraient la demande. Qu'en sera-t-il d'une personne seule et atteinte de troubles mentaux ? M. Jacquat, qui s'est posé la même question, propose que les personnes mentalement déficientes puissent seulement s'opposer au recensement. Mais dans leur cas, cette possibilité de refus reste bien théorique.

M. le Rapporteur - Ce n'est pas facile.

Mme Danièle Hoffman-Rispal - Pourtant l'isolement est réellement un facteur aggravant en cas de canicule. Il aurait donc fallu prévoir des mesures un peu moins illusoires.

M. le Rapporteur - Le recensement répond à l'urgence.

Mme Danièle Hoffman-Rispal - Certes, mais vous avez eu un an.

En pratique, les élus locaux seront tenus pour responsables de ce dispositif mal préparé.

En second lieu, le Gouvernement souhaite, ou souhaitait jusqu'à la semaine dernière, financer ces mesures en supprimant un jour férié, dénommé « journée de solidarité ». Ce jour devait être le lundi de Pentecôte. Mais les résistances ont été vives pour des raisons religieuses, économiques, car le tourisme en pâtirait ; et tout simplement parce qu'on a pris l'habitude d'organiser de grandes manifestation sportives ou régionales pendant ce week-end. Pour leur part, les partenaires sociaux, qui n'ont pas été associés à la décision, l'ont dénoncée comme un recul social. Selon les études économiques, il n'est même pas sûr que l'on produirait ce jour-là la richesse supplémentaire que vous escomptez ; au contraire, il y aurait un risque réel de détruire des emplois. Enfin, un député de la majorité a même estimé en commission qu'il ne fallait pas appliquer cette mesure dans l'Education nationale car le coût serait trop important. Bref, il se pourrait que ce jour-là les parents travaillent mais que les enfants n'aillent pas à l'école, ce qui simplifierait tout !

A l'évidence, le financement prévu est donc bien aléatoire. Ce qui est certain, c'est qu'aucune ressource nouvelle ne sera disponible avant l'été. Les entreprises paieront les 0,3 % de cotisations au mieux le 15 juillet, et elles ne seront donc dans les caisses qu'à la fin du mois. En outre, elles ne correspondront pas à une création de richesse. Bref, la confusion l'emporte.

D'autre part, cette « solidarité » - ne faudrait-il pas parler plutôt de charité ? - pèsera essentiellement sur les salariés. La loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades spécifie pourtant que toute personne handicapée a droit à la solidarité de l'ensemble de la collectivité nationale. M. Fillon a expliqué en commission pourquoi on a exonéré les retraités, les professions libérales et les travailleurs indépendants. Mais certaines catégories sociales ont un revenu plus élevé en moyenne que celui des salariés ; on n'en a pas tenu compte. Grâce à ce jour de travail supplémentaire non rémunéré, le Gouvernement escompte une recette de 1,7 à 1,9 milliard. Mais la baisse de l'impôt sur le revenu et de l'ISF inscrite dans le projet de loi de finances pour 2004 fait perdre 1,8 milliard.

Mme Paulette Guinchard-Kunstler - Très bonne comparaison !

Mme Danièle Hoffman-Rispal - Vous invoquez la fraternité. Mieux aurait valu ne pas diminuer un impôt redistributif dont l'objet est précisément de contribuer à la solidarité nationale. Les Français vous l'ont dit aux régionales : ils n'acceptent pas les réformes injustes. Vous auriez dû en tenir compte.

En fait, cette mesure traduit directement la pression idéologique du Medef...

M. René Couanau - Il n'y a pas d'idéologie du Medef !

Mme Danièle Hoffman-Rispal - ...pour allonger la durée du travail. Pourtant les 35 heures ont créé des milliers d'emplois et amélioré la qualité de la vie. Le récent rapport parlementaire à ce sujet est si partial que le Gouvernement l'a enterré au plus vite. En portant la durée annuelle légale du travail de 1 600 à 1 607 heures, vous inversez pour la première fois la tendance séculaire à la baisse de la durée du travail.

Avant de constituer un progrès pour les personnes en perte d'autonomie, votre projet de loi consiste surtout à faire travailler les salariés un jour de plus sans être payés, car c'est bien de cela dont il s'agit. On ne sert pas la cause des personnes âgées et handicapées en les rendant responsables de l'allongement de la durée du travail.

Mais que restera-t-il en définitive de cette journée de solidarité ? Face à la fronde de sa majorité, dont j'ai été témoin en commission, le Gouvernement est prêt à laisser les partenaires sociaux choisir eux-mêmes, de façon décentralisée, le jour idoine. Le lundi de Pentecôte ne serait choisi qu'à défaut d'accord, dans le privé comme dans le public. On entend même dire maintenant que cette journée pourrait être divisée en autant d'heures, voire de minutes, de travail supplémentaire tout au long de l'année. Si le financement ne repose plus sur une journée supplémentaire de sept heures, mais sur quatorze demi-heures, vingt-huit quarts d'heure, ou pourquoi pas, cent quarante fois trois minutes, la richesse créée ne sera plus seulement aléatoire, elle risque d'être nulle. Je me demande bien comment le Medef réagira à cette trouvaille ! Derrière la journée de solidarité, se profile bel et bien, ne vous en déplaise, un nouvel impôt.

Mme Elisabeth Guigou - Eclatante démonstration !

M. Hubert Falco, ministre délégué aux personnes âgées - Parole d'expert !

Mme Paulette Guinchard-Kunstler - Laissez Mme Hoffman-Rispal poursuivre !

M. le Ministre délégué - Arrêtez de nous donner des leçons ! Vous n'êtes plus secrétaire d'Etat aux personnes âgées.

Mme Paulette Guinchard-Kunstler - Quel manque de courtoisie !

Mme Danièle Hoffman-Rispal - Une vision globale était nécessaire, mais vous vous contentez d'improviser.

Le plus grand risque que présente ce texte, c'est de démanteler l'assurance maladie. Il ne saurait être question, sous couvert d'aide à l'autonomie, de rompre avec le principe d'universalité et de sortir du champ de l'assurance maladie des dépenses de santé qui lui incombent. Or, ce risque existe avec le flou qui entoure la création de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie, qui regroupera l'actuel fonds de financement de l'APA, le produit des 0,3 % prélevés sur les entreprises et une partie de l'ONDAM médico-social.

Ce dernier point est particulièrement inquiétant. En effet, demain, une infirmière ou un médecin salariés par une maison de retraite ne seront plus, contrairement à leurs collègues libéraux, payés par l'assurance maladie. Si on comprend mal la logique, on discerne bien le risque de cette dissociation. On pourra ainsi, demain, mettre en avant le coût « exorbitant » des personnes âgées. Notre pays doit en finir avec l'esprit du rapport Laroque de 1962, qui affirmait que, de façon progressive et inéluctable, le vieillissement grevait les conditions d'existence de la collectivité française. Le préjugé est difficile à combattre, mais il faut s'y atteler et faire comprendre que toute politique sociale en direction des personnes âgées et handicapées a un coût, et que celui-ci doit être assumé.

Mme Elisabeth Guigou - Très bien !

Mme Danièle Hoffman-Rispal - Qu'est-ce donc que la CNSA dans ce contexte ? Un fonds ? Un conseil ? En tout cas, pas une caisse au sens traditionnel de la sécurité sociale, comme l'on fait valoir les partenaires sociaux. La loi se contente de transférer des ressources vers ce fonds afin de lui permettre de financer une prestation existante, l'APA. Où est donc l'intérêt de parler de caisse, si ce n'est pour faire croire qu'il pourrait s'agir d'un cinquième risque ?

Il semble que l'on se dirige sans le dire vers la création d'une nouvelle branche de la sécurité sociale au rabais.

Mme Elisabeth Guigou - Tout à fait !

Mme Danièle Hoffman-Rispal - Ces ambiguïtés doivent absolument être levées. Or, l'avant-rapport de MM. Briet et Jamet ne nous rassure pas, bien au contraire. Le Gouvernement a renoncé à réformer l'assurance maladie par ordonnances, mais c'est par un texte réglementaire qu'il statuera sur le financement de la prise en charge de la perte d'autonomie des personnes âgées.

Au lieu de créer une nouvelle structure, il aurait très bien pu abonder les crédits de l'ONDAM médico-social.

Mme Elisabeth Guigou - Bien sûr !

Mme Danièle Hoffman-Rispal - Cela aurait été plus efficace que cette usine à gaz...

M. le Rapporteur - Le terme est excessif.

Mme Danièle Hoffman-Rispal - Les 300 millions d'euros supplémentaires inscrits cette année ne suffiront pas, absorbés pour l'essentiel par l'augmentation des salaires et des prix. Bien peu restera pour recruter des personnels supplémentaires. Et l'on imagine aisément qu'il vous sera plus difficile d'obtenir une augmentation de l'ONDAM médico-social l'an prochain !

Pour faire face cet été à une éventuelle canicule, il faut d'ores et déjà augmenter ces crédits pour permettre des recrutements d'urgence et créer dans chaque maison de retraite la pièce « rafraîchie » que réclament tous les professionnels de la prise en charge des personnes âgées. Vous l'avez demandé par circulaire en février dernier. Mais la mesure était demandée bien tardivement, surtout lorsqu'il faut recourir à un marché public, et elle n'était pas financée. Après avoir longtemps prétendu que les établissements et les collectivités pouvaient en assumer seuls la charge, le Gouvernement a annoncé ce matin que 20 à 40 millions d'euros pourraient être dégagés, soit 15 à 20 000 € par tranche de quatre-vingts places. C'est un premier pas, mais il faudrait que l'intégralité du coût de la création des pièces « rafraîchies » soit financée sur le forfait soins, car on ne climatise pas là pour le confort, mais parce que cet équipement est vital en cas de canicule.

Il faut regarder les chiffres de plus près. Vous prétendez dégager neuf milliards sur cinq ans, mais il n'y a cette année que 1,7 milliard - 850 millions pour les personnes âgées et autant pour les personnes handicapées. On est loin des annonces gouvernementales, et même assez loin des objectifs que s'était fixés le gouvernement de Lionel Jospin pour la période 2001-2005.

Mme Nathalie Gautier - Tout à fait !

Mme Danièle Hoffman-Rispal - Les réactions sont unanimes. Ce projet ne sera pas suffisant pour créer des places d'accueil en établissement, développer l'aide et les soins infirmiers à domicile ou l'accueil de jour. Comme vous envisagez une « montée en charge progressive », l'ensemble des crédits annoncés ne sera pas consommé les premières années. En dégageant des moyens très insuffisants, vous organisez aujourd'hui la pénurie de demain.

La canicule a dévoilé une réalité trop longtemps occultée : la prise en charge des personnes âgées dans notre pays demeure très en dessous des besoins et même du minimum acceptable par une société développée. Chacun s'accorde désormais sur le constat et le rapport de la commission d'enquête sur les conséquences de la canicule va dans ce sens.

S'il n'y a qu'un défi à relever, c'est celui-là : trouver les moyens de prendre en charge dignement les personnes âgées, à domicile comme en établissement. Or, rien n'est dit concernant les aides à domicile, leur nombre, pourtant largement insuffisant, ni sur leur formation, ni sur les moyens accordés aux personnes en perte d'autonomie pour obtenir un nombre d'heures correspondant réellement à leurs besoins. Que va devenir le fonds de modernisation de l'aide à domicile, qui accompagnait jusqu'à présent l'APA et aidait à la formation et à la professionnalisation ?

Mme Elisabeth Guigou - Excellente question !

Mme Danièle Hoffman-Rispal - Issues de la réforme de la tarification, les conventions tripartites, qui permettent, dans les établissements de lier une augmentation des moyens à une amélioration de la qualité du service rendu, doivent maintenant atteindre leur rythme de croisière. Vous aimez à dire, Monsieur le ministre, que c'est grâce à vous que ces conventions sont progressivement signées. Il serait plus sage de reconnaître que vous recueillez les fruits d'un travail de longue haleine lancé dès 2000 et surtout en 2001, qui a exigé de longues négociations, souvent ralenties par la faiblesse des moyens des DDASS. Et ce système ne doit pas tenir lieu de bonne conscience aux pouvoirs publics, qui conditionneraient l'attribution de maigres moyens à la réalisation de normes toujours plus drastiques. De fait, les financements annoncés ne sont toujours pas disponibles, suite à des gels de crédits en 2002 et 2003. l'exécution du budget 2004 n'augure rien de bon à cet égard.

Vous ne pouvez pas vous décharger de vos responsabilités sur les directeurs d'établissement, qui vous demandent d'accroître des moyens, dont le drame de l'été dernier a révélé l'insuffisance. Votre gouvernement a toujours privilégié une approche strictement financière, au lieu de favoriser le changement de regard indispensable sur le vieillissement. Il faut parler de dignité, de chaleur humaine, plutôt que de répéter que tout cela coûte cher.

Une politique responsable et répondant au drame de l'an dernier aurait consisté à établir un plan de programmation pluriannuel, pour faire évoluer les normes d'encadrement de personnels vers un ratio plus conforme à ceux de l'Allemagne ou de la Suisse, et pour que l'APA prenne davantage en charge les besoins des personnes en perte d'autonomie.

Vous n'avez jamais caché votre intention de revoir les critères de versement de l'allocation au détriment de certains bénéficiaires, alors qu'au contraire la grille AGGIR devrait devenir un outil d'évaluation commun à toutes les personnes en situation de handicap, comme le suggèrent le Conseil économique et social dont je salue le rapporteur, M. Maurice Bonnet, et le comité scientifique chargé d'évaluer cette grille. Mais le Gouvernement, auquel cela ne convenait pas, n'en a tenu aucun compte.

Rien non plus n'est prévu pour les personnes classées en GIR 5 et 6, souvent isolées et en voie de perdre leur autonomie, et qui furent dans nos villes les premières victimes de la canicule. Plutôt que de tenter maladroitement de culpabiliser leurs familles, mieux valait leur apporter une aide supplémentaire.

Tout au contraire, l'an dernier, à l'occasion de la révision de l'APA, les bénéficiaires d'une aide à domicile, souvent les plus modestes, ont été mis à contribution, privés d'une part de l'aide qui leur était apportée.

Contrairement à vos propos maintes fois répétés, le coût de l'APA n'a pas été sous-évalué lors de sa mise en place. Les chiffres prévus en 2001 par le rapporteur de la loi, Pascal Terrasse, sont à comparer au bilan établi par le fonds de financement de l'APA en décembre 2003. Votre gouvernement n'avait de toute façon pas attendu la « clause de revoyure » pour diminuer le montant de l'aide perçue par de nombreux bénéficiaires.

Mais la bataille des chiffres n'est pas l'essentiel.

M. Pascal Terrasse - De toute façon, nous l'avons gagnée, y compris aux cantonales.

M. le Ministre délégué - Dans mon département, je vous ai battu !

Mme Danièle Hoffman-Rispal - L'inéluctable allongement de la durée de vie est une chance personnelle qui peut devenir une richesse pour la société tout entière, en offrant un gisement d'emplois considérable. Ainsi la première PME du 12ème arrondissement de Paris est-elle une association d'aide à domicile.

Pourtant, le Gouvernement considère les personnes âgées avant tout comme un coût pour la collectivité, comme le montrent vos réponses à nos questions. Le changement d'approche initié par le gouvernement de Lionel Jospin, sous l'égide de Mmes Guigou et Guinchard-Kunstler, n'est plus à l'ordre du jour. Le progrès considérable et reconnu, y compris par vous, qu'a représenté l'APA n'a malheureusement pas eu la suite qu'appelle une société civilisée.

Les personnes âgées ont droit à une qualité de vie meilleure, y compris grâce à des activités organisées dans les établissements d'accueil, qui avaient recruté des animateurs par le biais de contrats emplois-jeunes, auxquels il a été mis fin. Là aussi, le désengagement public est réel.

Vous avez commandé un rapport à M. Bernard Hervy sur l'animation en gérontologie. Ses propositions sont excellentes. J'espère que vous tiendrez davantage compte de ses propositions que de celles d'autres rapports qui vous sont remis.

Vous faites vôtre l'affirmation du droit à compensation tout en vous assurant qu'il ne reste qu'à l'état de concept. Il est pourtant nécessaire de créer un droit général à compensation. Brisons la barrière d'âge à 20 ans et à 60 ans, au profit de réponses adaptées aux différents cas de perte d'autonomie (« Très bien ! » sur les bancs du groupe socialiste).

Or, ce projet et ceux réputés lui faire suite maintiennent une « vision catégorielle et partielle des personnes en situation de handicap », selon l'avis même du Conseil économique et social, plutôt que de créer un droit général à compensation. Et vous n'apportez concrètement rien de nouveau puisque, par un tour de passe-passe, l'addition de l'APA déjà existante et des crédits de l'ONDAM ne fait qu'agréger deux dispositifs existants, tout en créant un objet administratif non identifié : la CNSA.

Le Conseil économique et social a pourtant montré la nécessité de créer une prestation unique destinée à compenser les incapacités dans toute leur diversité, et qui ne devrait en aucun cas se substituer aux aides dispensées actuellement par les régimes de sécurité sociale.

Votre projet, bien loin de cette approche, se contente de reprendre les mots en les vidant de leur substance. Alors que la Suède consacre près de 4 % de son PIB aux différentes mesures de compensation du handicap, le gouvernement français se contente aujourd'hui de déclarations d'intention.

Les associations représentant les personnes handicapées s'expriment fortement sur ce thème, et c'est heureux. On entend moins la voix des personnes âgées, mais la réalité est bien la même. Les carences dans leur prise en charge, tragiquement révélées l'été dernier, auraient exigé une réponse adaptée de la collectivité nationale.

Ce projet ne présente aucun progrès. Il se borne à mêler des dispositifs financiers complexes et insuffisants à une déclaration d'intention vide de tout contenu. Après les dernières déclarations du Premier ministre et les vôtres sur la question du jour férié, il est bien difficile de s'y retrouver. Au lieu d'avoir du sens, ce projet part dans tous les sens (« Très bien ! » sur les bancs du groupe socialiste). Cette question préalable se justifie d'autant plus qu'elle correspond à ce que pensent et disent un grand nombre de députés de la majorité qui ont qualifié votre projet de « mal ficelé » - ils se montrent plus loquaces dans les couloirs que dans l'hémicycle. Le Premier ministre a témoigné hier qu'il s'agissait d'abord pour vous de faire adopter un texte de principe avant l'été. Ce n'est pas sérieux.

Ce projet n'est ni généreux, ni innovant, ni courageux, contrairement à ce qu'a déclaré M. Falco. Son étude ne peut être dissociée de celle des textes sur le handicap, l'architecture financière de la Caisse pour l'autonomie ou la réforme de l'assurance maladie. Je vous propose en conséquence d'adopter cette question préalable (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

Mme Marie-Anne Montchamp, secrétaire d'Etat aux personnes handicapées - Vous avez une approche par trop figée de la construction législative...

M. Pascal Terrasse - Voilà un langage technocratique qui ne vous ressemble pas.

Mme la Secrétaire d'Etat - La méthode du « tout en un » est impossible à mettre en _uvre. Nous devrons dorénavant imaginer des procédures législatives plus souples, progressives.

Concernant les questions liées à la dépendance, plusieurs aspects doivent être pris en considération : il faut réformer des textes fondateurs, s'adresser à des opérateurs de proximité, préparer l'effectivité du texte, trouver les financements. Or, l'histoire récente nous montre que les opérations législatives peuvent être bouclées en omettant la question décisive du financement.

Mme Elisabeth Guigou - C'est faux !

Mme la Secrétaire d'Etat - Il faut prendre en compte la dimension particulière du financement de la protection sociale.

Mme Paulette Guinchard-Kunstler - Nous sommes d'accord là-dessus.

Mme la Secrétaire d'Etat - De plus, la mise en place du droit à compensation est complexe. Nous devons l'étudier précisément, en parallèle avec l'élaboration du texte.

J'ajoute que votre propos, Madame Hoffman-Rispal, comprenait quelques inexactitudes. Vous prétendez que l'on « va sortir de l'assurance maladie des dépenses de santé ». Mais vous faites erreur en citant le nursing : ces techniques ne relèvent pas de l'assurance maladie mais de la compensation qui sera mise en _uvre.

Il faut remettre les textes en perspective. Celui dont nous débattons fonde le financement d'un dispositif complexe ; nous aurons demain un éclairage nouveau, grâce aux conclusions du rapport Briet-Jamet sur les solutions à mettre en place ; nous pourrons ensuite réformer les lois de 1975.

Nous proposons une démarche cohérente qui laisse toute sa place au débat. Je vous demande donc de ne pas voter cette question préalable (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. le ministre délégué - Je vous ai écoutée attentivement, Madame la députée, et j'ai apprécié la courtoisie de votre propos. Mais je me permettrai de corriger quelques points.

Vous avez affirmé que les ressources prévues ne seraient pas effectives avant l'été. Or, 470 millions sont déjà inscrits pour la médicalisation. C'est une somme sans précédent. En outre, j'ai fait inscrire 300 millions d'euros sur l'ONDAM 2004.

M. Pascal Terrasse - Et les gels de crédits ?

M. le Ministre délégué - Vous savez fort bien que les crédits dont il est question ne proviennent pas du budget de l'Etat.

Vous avez également prétendu, Madame, que la construction de pièces rafraîchies serait soumise aux règles des marchés publics et que nous n'aurions donc pas le temps de les mettre en place. Or, pour une dépense de 10 000 à 15 000 €, les règles des marchés publics ne s'appliquent pas, une élue locale comme vous l'êtes doit le savoir.

Vous avez regretté que je n'aie pas évoqué l'aide à domicile. Vous m'avez sans doute mal écouté. J'ai précisé hier soir que nous allons créer 17 000 places supplémentaires de SIAD, que nous pourrons recruter 10 000 soignants à domicile, créer 4 000 places d'hébergement temporaire et 8 000 places d'accueil de jour. 70 millions d'euros ont été inscrits en 2004 pour l'aide à domicile.

De plus, grâce à l'agrément de l'accord de branche, M. Fillon et moi-même, dès notre arrivée, avons mis en place une revalorisation de 24 % de l'aide à domicile sur trois ans.

M. Pascal Terrasse - Payée par les conseils généraux. C'est la France d'en bas qui paie ! 

M. le Ministre délégué - En ce qui concerne le recensement, c'est le respect des libertés individuelles qui explique que les personnes âgées et handicapées ne soient pas automatiquement recensées, vous l'avez rappelé. Ces dernières doivent en faire la demande. Vous évoquez la question de la responsabilité des maires, nous y sommes également très sensibles. Le Gouvernement présentera donc un amendement à ce sujet.

Différents rapports, dont celui de M. Bonnet, apportent en effet des éléments concernant l'évolution de la grille AGGIR, qu'il faut faire évoluer. Les besoins des personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer doivent être mieux pris en compte.

Enfin, je rappelle que tout le monde profite des baisses d'impôts : les 8,5 millions de salariés les plus modestes bénéficient de la hausse de la prime pour l'emploi, couplée à la hausse du SMIC. Les 17 millions de foyers fiscaux imposables paieront en 2004 un impôt sur le revenu inférieur à 10 % par rapport à mai 2002. Les familles ayant des personnes âgées ou handicapées à domicile bénéficieront également de ces baisses.

Cette loi constitue bien une grande avancée sociale (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. le rapporteur - Je m'adresse à Mme Hoffman-Rispal comme à Mme Guinchard-Kunstler, à qui l'on m'a reproché hier soir de ne pas avoir répondu : des moyens supplémentaires seront rapidement mis en place ; les crédits seront affectés, et le détail en est connu, je vous renvoie à la page 72 du rapport. Il faut mettre l'accent sur le quantitatif, avec davantage de personnels affectés aux personnes âgées, mais aussi sur le qualitatif, par des formations initiales et continues et une valorisation des acquis. C'est une position que nous défendons depuis de nombreuses années et que nous allons continuer dans cette voie.

M. Maurice Giro - Le Gouvernement et la majorité ont souhaité légiférer sur ce dossier à la suite d'un constat : la France n'a pas su prendre la juste mesure du vieillissement de sa population. Notre pays compte 12 millions de personnes de plus de 60 ans, soit 21 % de la population; elle seront 17 millions en 2020 - plus de 27 % de la population - et plus nombreuses que les moins de vingt ans en 2010 !

Par ailleurs, l'insertion des personnes handicapées a pris beaucoup de retard depuis les lois fondatrices de 1975 et 1987. On compte trois millions et demi de personnes handicapées et poly-handicapées. Si les évolutions de la science et des techniques leur ont ouvert de nouvelles perspectives de vie, il reste beaucoup à faire au niveau de leur prise en charge.

Pour ces raison, le Gouvernement a décidé d'appeler à la solidarité de tous...

M. Maxime Gremetz - Pas de tous!

M. Maurice Giro - ...par l'institution d'une journée de solidarité pour financer, par le travail et non l'impôt,...

M. Maxime Gremetz - Les esclaves des temps modernes!

M. Maurice Giro - ....l'amélioration de la prise en charge de la perte d'autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées.

Le choix de cette journée appartiendra aux partenaires sociaux dans le secteur privé, à l'assemblée territoriale compétente dans la fonction publique territoriale, au directeur de l'établissement dans la fonction publique hospitalière, et au ministre compétent dans la fonction publique d'Etat. C'est mal connaître la générosité des Français que de douter de cette journée de solidarité.

Quant à la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie, elle permettra de ne pas fondre dans le budget de l'Etat le produit de la contribution, qui sera ainsi exclusivement affecté aux personnes dépendantes. Chaque année, 2,1 milliards d'euros seront affectés à cette caisse, soit 9 milliards d'euros supplémentaires d'ici 2008.

Ensuite, il fallait dégager des moyens nouveaux au service d'une politique ambitieuse et humaine. Le financement de l'APA est assuré, et pour faire face à l'imprévoyance du gouvernement Jospin, un emprunt de 400 millions d'euros a été souscrit en 2003.

L'accompagnement des personnes âgées sera amélioré, afin de respecter leur choix de vie : accélération de la médicalisation des établissements, renforcement de l'encadrement à domicile et en établissement, et création d'une prestation de compensation personnalisée pour les personnes handicapées.

Il va de soi que le groupe UMP ne votera pas cette question préalable.

Mme Paulette Guinchard-Kunstler - Je voudrais tout d'abord féliciter Mme Hoffman-Rispal pour la qualité de son intervention (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste), et remercier M. Jacquat, avec qui, depuis longtemps, nous travaillons de façon constructive et courtoise sur ce dossier.

J'étais ce matin à la mission d'information sur l'assurance maladie, et le représentant du Medef a réitéré son opposition à la réforme que vous menez ! Aucun représentant extérieur ne soutient donc votre proposition.

M. René Couanau - Le Medef avec vous !

M. Jean Le Garrec - Pour une fois que l'on s'appuie sur le Medef !

Mme Paulette Guinchard-Kunstler - Nous sommes tous d'accord sur la nécessité de dégager des moyens financiers supplémentaires, mais nous ne nous entendons pas sur la méthode.

Pourquoi le monde salarié serait-il le seul à participer ? Il y a pourtant bien d'autres sources de revenus.

M. René Couanau - Lesquelles ?

Mme Paulette Guinchard-Kunstler - Je laisserai à M. Terrasse le soin d' y revenir, mais les 900 millions d'euros de financement du FAPA provenaient, par exemple, du transfert de 0,1 point de CSG sur les personnes âgées.

Second point de désaccord : la création d'une caisse. Nous ne pourrons faire l'économie d'une réflexion sur le lien entre le sanitaire et le social.

Madame la ministre, vous avez posé deux questions essentielles. Tout d'abord, celle de l'égalité des chances, et de l'éventuelle compétence des conseils généraux. Ensuite, celle du nursing, c'est-à-dire de la toilette des personnes dépendantes. Jusqu'à présent prise en charge par l'assurance maladie, vous proposez que ce secteur entre dans le domaine du droit à compensation (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste). Je ne suis pas certaine que ce débat ait été clairement expliqué aux Français!

M. le Président - Sur le vote de la question préalable, je suis saisi, par le groupe communistes et républicains d'une demande de scrutin public.

M. Maxime Gremetz - A propos du drame de l'été dernier, je voudrais dire combien j'ai été choqué par les propos de M. Douste-Blazy qui, aux questions d'actualité, s'est permis de dédouaner le Gouvernement.

En commission d'enquête parlementaire, nous avons auditionné de nombreux experts, mais vous ne suivez absolument pas leurs recommandations ! Le drame de la canicule n'a été que le révélateur du manque de places et de personnel dans les hôpitaux.

Un député UMP - Les 35 heures !

M. Maxime Gremetz - Tous ceux qui se sont dépensés sans compter durant cette période ne méritent pas ce genre de polémique.

Vous faites donc semblant d'agir, mais avec l'argent des autres ! En disant que la solidarité nationale est exercée par tous, vous prenez une nouvelle fois les gens pour des imbéciles. Ne vous étonnez pas s'ils vous infligent une seconde claque ! Vous menez une politique régressive et vous êtes persuadés que ceux qui en souffrent croiront n'importe quoi... Ce n'est plus possible ! Vous serez jugés aux actes. D'abord, il est évident que tous les citoyens ne sont pas traités de la même façon. Pourquoi demander un effort aux salariés, mais pas aux indépendants ni aux professions libérales ? L'injustice est flagrante. Ensuite, vous prétendez que le Medef va payer 1,3 milliard.

M. le Président - Veuillez conclure, Monsieur Gremetz.

M. Maxime Gremetz - Je viens à peine de commencer.

M. le Président - Votre temps de parole est épuisé.

M. Maxime Gremetz - Je n'ai pas parlé cinq minutes, vérifiez votre montre !

M. le Président - Les services me disent que vous avez déjà dépassé votre temps de parole. Concluez, ou je vous arrête.

M. Maxime Gremetz - Sur cette somme due par le Medef, 300 millions seront payés par les patrons et un milliard par les salariés ! Et on veut nous faire croire que ce sont eux qui y gagnent...

M. le Président - Merci, Monsieur Gremetz.

M. Maxime Gremetz - Enfin, vous ne voulez pas d'un cinquième risque, mais d'une caisse indépendante dont les patrons bénéficient encore plus...

M. le Président - La parole est à M. Leteurtre pour les explications de vote du groupe UDF.

M. Maxime Gremetz - Je demande une suspension de séance.

M. le Président - Elle est de droit. Vous l'aurez après l'intervention de M. Leteurtre.

M. Claude Leteurtre - Je voudrais souligner la qualité des interventions de Mmes Hoffman-Rispal et Guinchard-Kunstler, qui ont excellemment posé le problème. En entendant M. Jacquat tout à l'heure m'est revenu l'épisode de la suppression de la vignette automobile.

M. Hervé Morin - Les effets de manche de M. Fabius !

M. Claude Leteurtre - Il était bien regrettable alors, pour les chargés d'affaires sociales des départements, dont j'étais, de se trouver privés d'une telle recette. Aujourd'hui, le financement est toujours au c_ur du problème.

Comme beaucoup d'entre nous ici, j'ai participé à la mission d'information et à la commission d'enquête sur la canicule. Le sujet est extrêmement grave : nous n'avons pas réussi à trouver la place des personnes âgées dans notre société. Toutefois, Mme Montchamp vient d'affirmer le droit à la compensation intégrale du handicap, quels que soient l'âge et la cause de la dépendance. C'est un sujet primordial et nous ne pouvons pas ne pas l'aborder dès maintenant. Par ailleurs, tout en restant réservé sur la question du financement par un jour férié, un des aspects du projet de loi me semble déterminant : celui du rôle dévolu aux maires et aux préfets. On n'a pas le droit de prendre le risque d'un nouveau drame de la canicule. Il faut donc définir clairement le rôle des élus et des représentants de l'Etat dans le département. Le groupe UDF ne votera donc pas cette question préalable (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF et du groupe UMP).

M. Pascal Terrasse - Vous avez tort !

A la majorité de 54 voix contre 11 sur 65 votants et 65 suffrages exprimés, la question préalable n'est pas adoptée.

La séance, suspendue à 17 h 50, est reprise à 18 heures.

M. Claude Leteurtre - Ce projet s'inscrit dans un ensemble législatif : la réforme de l'assurance maladie que le Gouvernement proposera en juin, celle de la loi d'orientation de 1975 sur le handicap dont nous débattrons dans deux semaines, les travaux de la mission Briet-Jamet sur la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie, et le projet sur les responsabilités locales, qui redéfinit les compétences sociales des départements. Il doit aussi prévenir la répétition du drame de l'été dernier.

En le présentant, le Gouvernement a parlé à plusieurs reprises de la création d'une nouvelle branche de l'assurance sociale. A l'évidence, il n'en est rien, avec des recettes de 1,8 milliard par an, alors que le budget social consacré au seul handicap atteint 24 milliards. En revanche, il eût été opportun de s'interroger sur la création d'un cinquième risque, celui de la dépendance ou de la perte d'autonomie, que l'origine en soit le vieillissement ou le handicap. C'est la question de fond ; le texte n'y répond pas. Il permet plutôt, par un artifice financier, de ponctionner 1,8 milliard sans pour autant mettre en cohérence les politiques en faveur des personnes âgées et handicapées. Avant de réformer, mieux vaut se demander pourquoi. On évite ainsi ces réformes comptables qui ne résolvent rien, comme nous l'ont montré les plans de sauvetage successifs de l'assurance maladie. D'ailleurs, si ce texte est voté, une de ses dispositions essentielles sera obsolète dans quelques mois, celle qui concerne la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie, dont l'intitulé n'est pas définitif.

Dès lors, pourquoi ne pas avoir pris le temps de la réflexion ? Dans quelques jours, nous examinerons la réforme de la loi d'orientation de 1975 sur le handicap. Il faut espérer que nous opérerons de véritables avancées. Il faudra les financer. Le Gouvernement compte-t-il le faire avec les seuls 900 millions qu'il entend consacrer au handicap sur les 1,8 milliard que rapportera la journée de solidarité ? Si tel était le cas, ce serait une réforme en trompe-l'_il. Sinon - ce que nous espérons - la journée de solidarité n'est pas un financement adapté, car la recette escomptée ne représente que 2,5 % des 40 milliards du budget total consacré au handicap. Or j'ai entendu votre engagement, Madame la ministre, d'assurer un droit de compensation intégrale de la dépendance qu'elle qu'en soit la cause.

Après la canicule, on a longuement débattu des mesures à prendre pour qu'une telle catastrophe ne se reproduise plus. Ce texte permettra de faire face à l'urgence. Mais il reste muet sur les moyens à mettre en place. La journée de solidarité permettra de financer de nouvelles actions et d'en renforcer d'autres. Mais cela reste vague. Je crains qu'on ne glisse du médical au médico-social, surtout si l'on donne aux départements toutes les compétences sur la politique à mener dans ce domaine. Il est urgent de clarifier ce qui relève du médical, donc de l'assurance maladie, et ce qui relève du social. Le rapport d'étape Briet-Jamet va d'ailleurs dans ce sens.

Il y a un problème de cohérence des réformes en cours. Comment discuter utilement d'une journée de solidarité sans savoir à quoi les recettes seront affectées et par qui ? Faut-il instaurer cette journée, quand d'autres solutions sont possibles ? On ne fera sans doute pas l'économie d'une augmentation de la CSG...

M. Maxime Gremetz - Et voilà !

M. Claude Leteurtre - ...pour rééquilibrer les comptes de l'assurance maladie. N'aurait-on pu financer en même temps la prise en charge de la dépendance ?

M. Pascal Terrasse - C'est le bon sens !

M. Claude Leteurtre - De plus, la solidarité - obligatoire - qu'on nous propose est sélective. Pourquoi les seuls salariés supporteraient-ils un effort qui relève de la solidarité de toute la nation ?

M. Maxime Gremetz - Très bien !

M. Claude Leteurtre - On pouvait penser au volontariat. Nos compatriotes sont généreux, puisqu'ils consacrent 5,2 milliards par an au bénévolat.

Le Gouvernement pourra prélever la cotisation de 0,3 % sur les salaires dès ce mois de juillet. Y avait-il une telle urgence ? A qui fera-t-on croire que cela permettra de financer des mesures applicables dès cet été ? Et la journée de solidarité n'est plus forcément le lundi de Pentecôte. Cela donne un sentiment de précipitation. Aussi, malgré le talent du rapporteur, le groupe UDF reste-t-il dubitatif. Il lui semble peu cohérent d'instaurer une journée de solidarité supportée par les seuls salariés, plutôt que de s'inscrire dans une réforme d'ensemble concernant la dépendance et le handicap. N'est-on pas, une nouvelle fois, en train de gâcher une bonne idée ? Nous espérons que le débat nous rassurera (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF).

M. Maxime Gremetz - Ce projet, qui aurait dû apporter une réponse au drame de l'été dernier, constitue en fait un recul social. Qu'on parle de suppression d'un jour férié, d'un jour de RTT ou de 7 heures de travail supplémentaires, il s'agit de faire travailler plus, et gratuitement !

Nous avons été meurtris par la canicule, en raison du nombre de décès, en raison aussi des conditions dans lesquelles ils ont eu lieu. Les appels des professionnels de santé et même de la météo ont été vains, notre système de santé était étouffé par des budgets toujours plus étriqués. Plus choquant encore, le Gouvernement a essayé de culpabiliser les Français plutôt que de s'interroger sur ses propres errements et de reconnaître sa responsabilité. C'est indécent. Ce ne sont ni les professionnels partis en congé ni les familles qui ont abandonné nos aînés, ce sont les pouvoirs publics, en sacrifiant des pans entiers de notre système sanitaire et social. Oui, ce sont bien les choix politiques qui sont en cause. Notre groupe n'a cessé de lancer des cris d'alarme sur le manque de moyens du système de santé, et, faute d'être entendu, a refusé de voter tous les projets de loi de financement de la sécurité sociale, quels que soient les gouvernements.

La disparition des structures de soins de proximité, au nom d'une carte sanitaire décidée autoritairement, la fermeture de services à l'activité jugée insuffisante au seul regard de seuils fixés de manière aléatoire, les milliers de postes d'infirmières et de médecins non financés et non pourvus, le gel des crédits de l'Etat en faveur des personnes âgées et du secteur médico-social en général, toutes mesures prises au nom d'une maîtrise des dépenses de santé, « comptable » pour les uns, « médicalisée » pour les autres, sont autant d'explications de la catastrophe sanitaire de l'été dernier.

Malheureusement en manque d'inspiration pour rattraper ses erreurs tragiques, le Gouvernement maintient un projet de loi qui ne répond en rien aux problèmes posés et n'est absolument pas à la hauteur des besoins - il fait d'ailleurs l'unanimité contre lui.

Le Gouvernement souhaite supprimer un jour chômé, c'est-à-dire bel et bien, quelle que soit la forme que prendra la mesure, augmenter la durée du travail pour financer un plan dépendance très en deçà des besoins. Deux misérables petites gouttes d'eau dans la mer !

Vous expliquez que cette journée de solidarité financera un cinquième risque. Mensonge, car cela n'est en rien rattaché au système de protection sociale ! D'ailleurs, le cinquième risque n'est pas près de voir le jour, étant donné les dispositions de ce texte, d'une part, les orientations de la réforme de l'assurance maladie, d'autre part. Syndicats, gestionnaires, associations... personne n'est dupe ! « La solidarité détournée », « une journée de travail offerte aux employeurs et non aux personnes âgées », « une mauvaise réponse à une bonne question » : voilà ce qu'ils pensent de votre projet de loi ! La suppression d'un jour chômé comme la création de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie font toutes deux l'unanimité contre elle, y compris dans les rangs de la majorité, en dépit de la méthode Coué appelant « à ne plus parler de jour férié, mais à positiver. » En réalité, vous vous êtes davantage soucié de faire taire les divisions de votre majorité que de négocier avec les partenaires sociaux.

La suppression d'un jour férié, ou bien encore sept heures de travail gratuites, constituent une duperie qui traduit seulement la solidarité du Gouvernement avec le Medef. Alors qu'il multiplie les cadeaux fiscaux pour les grandes entreprises, abaisse les impôts pour les plus riches, ce gouvernement organise une nouvelle injustice sociale en demandant aux seuls salariés du privé et du public de travailler une journée de plus gratuitement. Jamais depuis 1936 aucun gouvernement n'a augmenté la durée du travail. Vous voudriez faire tourner la roue de l'histoire à l'envers - alors même que notre pays compte trois millions de chômeurs -, mais vous n'y réussirez pas.

La patronat sera le principal gagnant de la mesure, puisque les deux tiers du bénéfice lui reviendront directement, quand un tiers seulement profitera aux personnes âgées et handicapées (Interruptions sur les bancs du groupe UMP). Je ne sors pas de l'ENA, mais il n'y en a pas besoin pour faire ce calcul. Après vingt milliards d'euros d'exonérations de charges, la baisse de l'impôt sur le revenu pour les plus riches et de l'ISF, l'assouplissement des 35 heures, la réforme du dialogue social, et dans l'attente d'une baisse de la taxe professionnelle à hauteur de 2,5 milliards, voilà sept heures de travail gratuites pour le patronat. Pourtant, ce sont les personnes âgées qui ont besoin de solidarité, pas le Medef. Mais il semble que vous ne connaissiez que la solidarité de classe. Votre mesure inquiète par ailleurs certains secteurs d'activité et n'est pas exempte de dangers, aux dires même des économistes. Ainsi travailler un jour de plus rend plus difficile l'écoulement de la production et peut conduire à des suppressions d'emplois, dans la mesure où les entreprises produiront davantage à effectifs constants. Les critiques ne manquent donc pas contre ce projet et ce n'est pas l'amendement du rapporteur, aussi habile soit-il, ni les opérations de communication du Gouvernement parlant non plus de jour férié travaillé mais de travail supplémentaire, qui y changeront quelque chose.

D'autres pistes existent qui ne passent pas par des reculs sociaux. Sait-on que la suppression d'un jour férié, qui doit rapporter 1,6 milliard d'euros, représente l'équivalent de la baisse de 5 % de l'impôt sur le revenu consentie aux plus riches, ou que quatre cents millions d'euros seront prélevés sur les salariés des trois fonctions publiques quand l'ISF a été allégé de 500 millions, que les revenus financiers ne sont toujours pas taxés alors que Sanofi peut mettre tranquillement sur la table 55 milliards d'euros pour une OPA financière menaçant l'emploi ?

Vous ne savez pas où trouver dix milliards dans le budget pour financer vos mesures, mais vous avez bien su en trouver 21 pour les exonérations de charges patronales - dont, soit dit au passage, trois ne sont pas compensés, ce qui constitue un véritable hold-up sur l'argent des salariés. N'allégez pas la taxe professionnelle de 2,5 milliards, beau cadeau pour le Medef, comme vous vous apprêtez à le faire, et vous n'aurez pas à supprimer un jour férié ni à augmenter la CSG ! Enfin, pourquoi le produit des amendes issues des infractions constatées par les radars automatiques ne pourrait-il pas aller à la solidarité envers nos aînés ?

Pour ce qui est de la nouvelle Caisse, elle va mettre à mal notre pacte républicain et les principes fondamentaux de notre système de protection sociale issu du Conseil national de la Résistance. Alors que chacun s'accorde à reconnaître que la dépendance devrait être prise en charge par la sécurité sociale, comme nous l'avions proposé,...

Mme Paulette Guinchard-Kunstler - C'était une bonne idée.

M. Maxime Gremetz - ...vous n'attendez même pas la réforme de l'assurance maladie.

Ce projet de loi, à l'évidence, vient trop tôt. En effet, nous devons examiner prochainement le texte relatif au handicap. Puis viendront les conclusions de MM. Briet et Jamet, d'ici à trois semaines, qui devraient, nous dit-on, influer sur la réforme de l'assurance maladie. Vous hypothéquez toute possibilité de créer un risque dépendance au sein de la sécurité sociale, financée solidairement par les employeurs et les salariés, comme nous le proposerons par un amendement. Celui-ci propose de créer une véritable prestation handicap-invalidité-dépendance, seule garantie d'un traitement équitable de tous et d'un financement pérenne, solidaire et universel.

M. le Président - Veuillez conclure, Monsieur Gremetz.

M. Maxime Gremetz - Alors que le plus sage serait de retirer ce texte, vous le maintenez envers et contre tout. Seul le Medef est satisfait car vous revenez, par une voie détournée, sur la réduction du temps de travail, comme il le souhaitait.

Par votre décision, vous allez contraindre les partenaires sociaux à renégocier toutes les conventions collectives et les accords de branche. Le patronat tentera par tous les moyens d'imposer des accords dérogatoires au code du travail. Mais les salariés ne se laisseront pas faire.

M. le Président - Il faut vraiment conclure maintenant.

M. Maxime Gremetz - Dans un contexte où les salariés vous ont déjà dit clairement ce qu'ils pensaient de votre politique, où les chômeurs vous ont fait céder, où 60 % des Français refusent ce projet, vous ouvrez une bien dangereuse boîte de Pandore...

Attendez-vous donc à une bataille déterminée de la part des députés communistes pour vous faire accepter une autre idée de la solidarité. Les amendements de fond que nous avons déposés correspondent à celle qu'attendent les Français en faveur des personnes âgées et handicapées (Applaudissements sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains).

M. le Président - Monsieur Gremetz, vous avez largement dépassé votre temps de parole.

M. Maxime Gremetz - La majorité a été largement battue aux dernières élections ! S'il faut aller vite maintenant, nous prendrons tout notre temps ce soir.

M. Bernard Perrut - A un moment où il nous faut tenir compte de l'allongement de l'espérance de vie, véritable révolution de la longévité, ce texte est historique. Il pose les bases institutionnelles d'une prise en charge globale du vieillissement, et apporte ainsi une première réponse à la question du lien social dans notre pays. Fidèle à la tradition de solidarité qui est à l'origine de la sécurité sociale, le Gouvernement a décidé d'élaborer un plan pragmatique et ambitieux pour prendre en charge les besoins induits par la dépendance. A chacun de nous, ici, de prendre maintenant ses responsabilités.

Le nombre de personnes âgées de plus de 60 ans s'élève à 12 millions, dont 4 millions ont plus de 75 ans. On compte 800 000 personnes dépendantes, et ce chiffre ne va cesser d'augmenter. D'ici 2020, le nombre de personnes âgées de plus de 85 ans doublera. Il est donc urgent d'agir, d'autant que notre pays compte 3 500 000 handicapés. Ainsi nous est-il proposé de créer une compensation personnalisée du handicap, sous la forme d'une prestation universelle. Comme l'a dit hier le Premier ministre, notre responsabilité est de dire oui aux prestations nécessaires, mais oui aussi aux efforts nécessaires, surtout où l'on pense au drame de l'été dernier, qui a mis en lumière nos lacunes et nos retards, et dont les personnes les plus fragiles ont été les principales victimes. Sur ce sujet, la mission d'information présidée par Denis Jacquat a réalisé un excellent travail, dont le titre I du projet reprend les conclusions.

On peut bien déplorer l'individualisme, l'éloignement familial, le relâchement de la solidarité. Ne soyons pourtant pas trop sévères. Nos concitoyens à l'occasion, en 2003, de l'année européenne des personnes handicapées, ont montré qu'ils savaient s'engager. Oui, les Français ont du c_ur ! En nous efforçant de resserrer le lien entre les générations, nous saurons dépasser le constat du prix Nobel de la paix Elie Wiesel, selon lequel « la société moderne ne montre guère aux vieillards un excès de tendresse ; seule la jeunesse intéresse ». N'opposons pas les générations, unissons-les !

L'allongement de la durée de la vie constitue un défi auquel nous devons répondre en construisant une société de tous les âges où chaque personne serait en mesure de réussir parfaitement son vieillissement. « Les personnes fragilisées par handicap », a déclaré notre président Jean-Louis Debré, « attendent de la représentation nationale qu'elle assure leur intégration dans toutes les composantes de la société. » Dans cette perspective, il est essentiel que la personne soit libre de choisir son mode de vie, en application du principe d'autodétermination. Or le maintien à domicile est la première aspiration des personnes âgées de plus de 75 ans. C'est pourquoi le projet tend à le faciliter, par une offre de services diversifiés et le versement d'allocations diverses. Les aidants familiaux, qui exercent dans ce cadre une mission fondamentale, sont fondés à demander la professionnalisation de leur statut. 30 000 places seront créées dans les quatre années qui viennent, et déjà le Gouvernement a multiplié par six le nombre d'auxiliaires de vie pour les personnes handicapées.

Nous offrirons ainsi à nos aînés de mieux vieillir en conservant leurs habitudes et leur environnement. C'est qu'il ne suffit pas d'ajouter des années à la vie ; encore faut-il donner de la vie aux années !

Pour ce faire, le Gouvernement a entrepris un programme d'action globale, en commençant par présenter, en novembre dernier, un plan dépendance, comportant 9 milliards d'ici 2008, outre les 660 millions déjà inscrits dans le PLFSS. M. Falco a souligné le déficit en lits médicalisés. Aussi 470 millions sont-ils destinés à accélérer la médicalisation des établissements, et nos 6 500 maisons de retraite seront modernisées, en particulier avec l'installation d'une climatisation. La mise en _uvre du plan canicule fait l'objet de réunions quotidiennes au ministère depuis le 28 avril, afin de tout faire pour que la situation insupportable de l'été dernier ne se reproduise plus. Les plans départementaux de veille et d'alerte devraient permettre de se prémunir efficacement contre les risques exceptionnels. Les communes doivent être associées au dispositif, car elles ont toujours joué un rôle important dans les politiques à destination des personnes âgées. Elles contribueront à ouvrir de véritables chantiers gérontologiques. Les initiatives émanant des associations méritent également d'être soutenues.

L'intégration dans la cité passe par une simplification de l'accès aux droits, que facilitera la création dans chaque département d'une maison des personnes handicapées.

Au total, le Gouvernement a pour objectif d'assurer le financement de la prestation de compensation et d'améliorer réellement la prise en charge des personnes âgées. Ne reproduisons pas la démarche des socialistes, qui avaient créé l'APA sans concevoir tous les moyens de son financement (Protestations sur les bancs du groupe socialiste). Les départements et l'Etat ont dû prendre des mesures pour faire face aux engagements pris.

Aujourd'hui, nous sommes saisis d'un plan de financement pérenne et équilibré, qui ne repose pas sur des prélèvements supplémentaires mais sur la générosité du c_ur exprimée par quelques heures de travail. La CNSA nouvellement créée sécurise financièrement le dispositif. Loin d'introduire une sécurité sociale au rabais, elle garantit la prise en charge de la perte d'autonomie.

Nous ne pouvons pas cacher à nos concitoyens que notre système de protection sociale a un coût, et nous déplorons la démagogie de la gauche qui tente de faire croire que le projet porte atteinte aux principes fondateurs de notre pacte social et aux 35 heures (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste).

Non, l'effort ne sera pas supporté par les seuls salariés, qui ne subiront aucune perte de pouvoir d'achat. Ce sont les employeurs qui restitueront à la solidarité nationale une journée supplémentaire de production. Les revenus du capital seront également sollicités, hormis l'épargne populaire.

Sur certains bancs, une opposition parfois systématique s'est substituée au sens de la responsabilité. Pourtant plus de cent députés avaient signé l'an dernier un appel dans un grand journal. L'auraient-ils oublié ?

Le Gouvernement a écouté les députés, et la commission a modifié le projet en tenant compte des remarques exprimées, en particulier sur les différences de situation entre les divers secteurs d'activité, qui nécessiteront une démarche souple. C'est ainsi que pour le choix du temps de solidarité seront privilégiées la négociation et la concertation. Ainsi, dans le secteur privé, c'est par le dialogue social que devront être fixées les modalités de cette mesure. C'est ainsi une nouvelle fois la méthode de la démocratie participative qui s'applique. Dans la fonction publique, plusieurs solutions sont proposées pour qu'il y ait, là aussi, de la souplesse. Nous aurons l'occasion d'en reparler en discutant un amendement de M. le rapporteur.

Ce projet va dans le bon sens, mais nous devons également rétablir le lien entre les générations. C'est là un enjeu de société.

Je suis convaincu que les Français répondront à l'élan de solidarité que nous leur proposons. Chacun aura à c_ur de contribuer à son niveau à l'effort collectif.

L'UMP soutient ce projet, même si certains parmi nous ont fait état de leurs inquiétudes ou de leurs interrogations. Le statu quo est impossible. La fraternité a été déclarée grande cause nationale pour 2004. C'est une force de notre République (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Jean Le Garrec - Le sujet dont nous débattons ne prête pas à polémique, aussi mesurerai-je mes propos qui consisteront à vous dire les raisons de mon désaccord.

Je considère, en effet, que la journée de solidarité est une mauvaise réponse à de véritables questions.

Ce texte n'est d'ailleurs pas cohérent avec la politique menée par ailleurs par le Gouvernement. M. Sarkozy a déclaré vouloir relancer la consommation, en particulier populaire : il découvre enfin ce que nous disons depuis deux ans et que la baisse des impôts n'a eu aucun effet sur la croissance. Mais comment allier relance de la consommation et journée travaillée non payée ?

66 % des salariés sont en désaccord avec cette mesure. Huit sur dix ne savent même pas que cette journée de travail supplémentaire ne sera pas payée - et le Premier ministre, lorsqu'il parle d'heures supplémentaires, alimente cette ambiguïté.

Vous avez-vous même déclaré, Monsieur le ministre, que la journée de solidarité serait rémunérée. C'est faux !

M. Pascal Terrasse - Ou alors, c'est un scoop (Sourires).

M. Jean Le Garrec - Le texte est clair.

M. le Rapporteur - Il n'y aura pas de rémunération en heures supplémentaires.

M. Jean Le Garrec - Bien évidemment, mais il n'y aura pas de rémunération du tout.

M. Pascal Terrasse - C'est le retour de la corvée !

M. Jean Le Garrec - Lorsque M. Fillon parlait de RMA, il affirmait que l'assistanat avait des limites : c'était un retour à des conceptions du XIXe siècle. Mais voilà que voulant convaincre de la nécessité d'une journée de travail non payée, vous redécouvrez subitement le mot « solidarité » !

Mme Hélène Mignon - Excellent !

M. Jean Le Garrec - En définitive, la manipulation des mots à laquelle vous vous livrez vise à culpabiliser les Français, comme vous avez culpabilisé les familles après la canicule de l'été dernier.

Mme la ministre a du talent, certes, mais elle oublie, d'une part, à propos de l'Allemagne, que le système est plus complexe que chez nous...

M. Pascal Terrasse - Il est bismarckien.

M. Jean Le Garrec -...et, d'autre part, que la situation de l'emploi et des rémunérations en France, aujourd'hui, n'est pas comparable à celle qui existait en Allemagne en 1994.

En outre, en inscrivant dans le code du travail 1 700 heures au lieu de 1 600, vous remettez en cause les 35 heures. Vous prétendez vouloir permettre à ceux qui le souhaitent de travailler plus pour gagner plus, ce qui a toujours été possible avec les heures supplémentaires. Avec la journée de travail non rémunérée, les salariés travailleront plus pour gagner moins.

Mme Elisabeth Guigou - Exact !

M. Jean Le Garrec - De plus, vous vous engagez sur la voie de la renégociation d'accords de branche et d'entreprise sans aucune maîtrise possible. Tous les chefs d'entreprise nous ont dit qu'il ne fallait pas le faire, le président du Medef lui-même l'a dit. Je souhaite bien du bonheur à qui devrait renégocier, par exemple, à cause de la journée de travail non payée, un accord d'annualisation. Les entreprises auront d'énormes difficultés.

Quant au prélèvement de 0,3 %, encore faut-il qu'il y ait un retour en terme de création de richesses. C'est tout à fait aléatoire, M. le rapporteur s'en est rendu compte. Vous allez vous heurter à des obstacles qui n'auront aucun rapport avec la politique concernant les personnes âgées ou handicapées. Je vous recommande à ce propos l'étude d'impact de l'AFCE, qui fait état de grands risques pour l'ensemble de notre équilibre économique et évoque même la possibilité de perdre 30 000 emplois.

Enfin, le financement que vous proposez est socialement injuste et déséquilibré. Vous qui êtes un honnête homme, monsieur le rapporteur, l'avez noté dans votre rapport. Ceux qui sont pris pour cible sont toujours les mêmes alors qu'on pourrait recourir à des redéploiements, aux cotisations sociales, à la CSG. L'exposé des motifs de l'amendement 104 du Gouvernement montre bien le caractère injuste du seul financement retenu.

Raisonnement économique aléatoire, répartition de l'effort injuste, détournement du grand mot de solidarité, introduction d'une monstruosité juridique dans le code du travail, le travail non rémunéré !

Mme Elisabeth Guigou - Du jamais vu !

M. Pascal Terrasse - Si ! En 1942 !

M. Jean Le Garrec - Vous ruinez une politique pourtant indispensable en faveur des personnes dépendantes! Ce pays a perdu confiance et ne sait plus où vous voulez le mener. Je conclurai sur un trait d'humour grinçant en citant les Shadocks qui disaient : « Quand on ne sait pas où on va, il faut y aller le plus vite possible » et « Pour qu'il y ait le moins de mécontents possibles, il faut toujours taper sur les mêmes » (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

Mme Elisabeth Guigou - Démonstration implacable !

M. Hervé Morin - J'ai des doutes sur l'économie générale du texte, sur la création d'une cinquième branche qui séparerait la maladie de la dépendance, sur la nécessité de consacrer toujours plus d'argent à la solidarité, car l'argent n'est pas la seule réponse à ce qu'exige la prise en charge des personnes dépendantes, mais je limiterai mon propos à la journée de solidarité et vous dirai : vous faites fausse route !

Tout d'abord, vous manquez de cohérence. Comment pouvez-vous nous expliquer, pendant deux ans, que l'on ne peut revenir sur les 35 heures, que la loi Fillon en est l'assouplissement ultime, et proposer aujourd'hui d'augmenter la durée du temps de travail ? Que faites-vous des déclarations du Président de la République pour qui, il y a trois mois, les 35 heures étaient un acquis social sur lequel il n'était pas question de revenir ?

M. Jean Le Garrec - Ah!

M. Hervé Morin - L'UDF vous a pourtant souvent proposé une adaptation des 35 heures qui aurait résolu le problème : maintenir la réduction du temps de travail, mais permettre à ceux qui le souhaitent de travailler davantage, avec une majoration de 25 % pour les salariés de la 35e à la 39e heure, en contrepartie d'une réduction proportionnelle des cotisations sociales. Ce système récompensait le travail, tout en créant de la richesse.

Par ailleurs, le Gouvernement veut réhabiliter le travail, mais c'est la première fois depuis 1789 que l'on rétablit la corvée en France ! (« Voilà ! » sur les bancs du groupe socialiste).

Et que dire de votre calcul économique pour le moins aléatoire ! Vous nous parlez d'abord d'une augmentation théorique de l'activité de 0,45 %, puis vous passez à 0,3 %. Quid d'ailleurs de ceux qui travaillent déjà les jours fériés - le tourisme, la presse, les hôpitaux....

M. Pascal Terrasse - Les grandes surfaces !

M. Hervé Morin - Quelle sera alors la valeur ajoutée supplémentaire ?

En réalité, vous créez une cotisation sociale supplémentaire de 0,3 % sur le travail. Aucune entreprise ne pourra exiger de ses salariés qu'ils travaillent gratuitement une journée : elles seront obligées d'augmenter leur salaire. Vous créez ainsi un prélèvement supplémentaire de 0,3 % sur la masse salariale !

Mme Elisabeth Guigou - Parfaitement !

M. Hervé Morin - Il est temps d'abandonner cette idée que le système de protection sociale doit être financé par le seul travail. Comme pour l'assurance maladie ou la dépendance, il faut réfléchir à de nouveaux dispositifs.

J'ai posé la question ce matin au président du Medef, devant la mission d'information, et il était parfaitement d'accord.

Quant à la mise en _uvre de cette mesure, elle sera inégale d'une entreprise à l'autre. Si elle peut encore être supportable au sein d'une grande entreprise où la durée du temps de travail est annualisée, avec une quinzaine de RTT, il en va bien différemment dans les petites entreprises, restées parfois à 39 heures, où la suppression d'un jour de repos sera difficilement vécue dans la vie quotidienne.

Enfin, Monsieur Jacquat, vous avez déposé un amendement pour que le lundi de Pentecôte ne soit retenu qu'en cas d'absence d'accord. En réalité, cette journée sera forcément choisie, car aucune entreprise n'osera remettre en cause la négociation durement acquise sur la durée du temps de travail.

M. Jean Le Garrec - C'est évident !

M. Hervé Morin - Après ce qui s'est passé pour l'UNEDIC, les retraites, connaissez-vous un seul syndicat qui accepte de signer un accord selon lequel les salariés travaillent une journée de plus sans être payés ?

M. Jean Le Garrec - Aucun !

M. Hervé Morin - En admettant même que la négociation collective réussisse, que se passera-t-il, par exemple, pour les parents salariés d'un enfant qui n'aura pas classe le lundi de Pentecôte ?

Vous avez gâché une bonne idée - celle de créer de la valeur pour financer de nouveaux systèmes de protection - en punissant une fois de plus nos compatriotes ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

M. le Ministre délégué - Je vous ai connu plus à droite !

M. Hervé Morin - Pour les 35 heures, oui !

M. Georges Colombier - Moins d'un an après la canicule de l'été dernier, je me réjouis de débattre aujourd'hui de ce projet, qui représente une étape importante vers une meilleure prise en charge de la perte d'autonomie.

Il y a deux ans, je saluais la création de l'APA. Fin décembre 2003, 1 760 000 demandes étaient déposées auprès des conseils généraux.

Ce succès confirme l'existence des besoins des personnes âgées. L'allongement de l'espérance de vie entraîne une modification structurelle de la démographie. La proportion de personnes âgées de plus de 80 ans augmente notablement, et les situations de dépendance avec elle. Ce phénomène nous mène tout autant à changer notre regard sur la vieillesse qu'à renouveler nos perspectives d'action. Nous avons pris conscience depuis longtemps déjà de l'attention que nous devons porter à nos aînés, mais la tragédie de la canicule a mis en lumière la nécessité de refondre le système. La commission d'enquête sur la canicule a dessiné les orientations à prendre pour que ce drame ne se reproduise pas. L'heure est maintenant aux actions concrètes pour remédier aux carences et au manque de réactivité du dispositif actuel, et je pense que le plan de veille et d'alerte sanitaire intégré par le Gouvernement à ce projet de loi sera très efficace.

L'anticipation est la meilleure arme contre l'urgence. Une meilleure prise en charge des personnes en situation de dépendance passe nécessairement par un renforcement de la coordination entre l'Etat, les collectivités territoriales et les acteurs locaux. Il est indispensable de responsabiliser ces derniers afin de créer une démarche de solidarité. Je plaide depuis longtemps pour le développement des centres locaux d'information et de coordination gérontologique. A l'échelle de mon canton, le partenariat en la matière a fait ses preuves de longue date. Les CLIC sont particulièrement aptes à la prévention et à l'alerte en cas de crise, notamment du fait du maillage territorial qu'ils constituent. C'est grâce à l'implication des acteurs locaux que nous lutterons plus efficacement contre l'isolement des personnes les plus fragiles.

Si tout le monde s'accorde sur une prise en charge généreuse et efficace de la perte d'autonomie, encore faut-il que notre société s'en donne les moyens. Le Gouvernement a fait un choix courageux. Il aurait certes pu succomber à la tentation d'augmenter les taxes, ou de creuser encore les déficits publics. A l'heure de l'élargissement européen, il a choisi de s'inspirer d'un modèle original d'ouverture et de solidarité entre les générations, expérimenté avec succès par l'Allemagne. La dépendance y est reconnue comme un nouveau risque social depuis 1995. Le Gouvernement propose aujourd'hui aux Français une démarche volontaire. Je suis sensible au fait que le financement de la réforme repose sur la création de richesses, et non sur un prélèvement passif. Les personnes en activité offriront une journée de travail, les entreprises une journée de profit et les revenus du capital seront associés à cet effort. Deux impératifs conditionnent le succès de cette démarche. D'abord, nous ne pourrons faire l'économie d'une campagne d'explication sur ce projet et de sensibilisation sur la place des personnes âgées et handicapées. Ensuite, l'effort doit porter sur le plus grand nombre, afin de susciter un élan national de solidarité, et de ne pas donner l'impression d'une taxe supplémentaire sur les seuls salariés. Garantir la souplesse dans le choix du jour de solidarité permettra de mieux impliquer nos concitoyens.

Ce projet de loi organise une prise en charge globale de la dépendance, qu'elle soit provoquée par la vieillesse, le handicap ou la maladie. Je me réjouis que le critère d'âge dans le plan d'alerte et d'urgence départemental y soit supprimé. C'est une avancée importante, mais il est nécessaire de poursuivre nos efforts pour qu'une personne ne soit plus considérée comme handicapée avant 60 ans et dépendante au-delà. Certaines affections, à commencer par Alzheimer ou Parkinson, n'attendent hélas pas cet âge pour se déclarer ! A ce propos, j'insiste sur l'écart important qui subsiste entre les aides servies à domicile ou en établissement. Il faut trouver le juste équilibre entre maintien à domicile et soutien à l'hébergement. En outre, du fait de l'insuffisance chronique de lits médicalisés, les frais restant à la charge des familles sont beaucoup trop élevés. Pourquoi le coût des installations doit-il être supporté par les familles, via le prix de journée ? Tout doit être fait pour que les personnes âgées soient plus solvables, qu'elles résident en établissement ou dans leur famille.

Depuis de nombreuses années, j'attire l'attention des gouvernements successifs sur la nécessité de créer une cinquième branche de la sécurité sociale, avec une cotisation spécifique pour assurer la prise en charge de la perte d'autonomie. Notre excellent rapporteur abondait dans ce sens. Si les fondateurs de la sécurité sociale s'étaient bien gardés d'énumérer les risques couverts, c'était pour qu'elle puisse s'adapter à l'évolution des besoins de notre société. Je me réjouis du grand pas effectué aujourd'hui vers la prise en charge de la dépendance, par la création d'une Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie qui permettra de rassembler des moyens spécifiques, de veiller à l'égalité de traitement sur tout le territoire et de fixer des orientations nationales. Afin que cette journée de solidarité remplisse bien son but, il est primordial de ne pas fondre son produit dans le budget de l'Etat. Si nous demandons un effort général, il nous incombe de veiller à la transparence du dispositif, pour ne pas renouveler l'expérience de la vignette automobile qui avait largement été détournée de sa vocation originelle.

Je suis heureux que le Gouvernement ait voulu renforcer l'APA, fragilisée par son propre succès. La création de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie permettra non seulement de pérenniser son financement, mais également d'accélérer la médicalisation des établissements, de créer des places nouvelles et de financer la modernisation des services d'aide et de soins infirmiers à domicile. A ce propos, je tiens à souligner le rôle des associations d'aide à domicile. Malheureusement, et depuis trop longtemps, leur personnel manque de moyens. Leurs salariés souffrent également de l'absence de filières de formation et de la faiblesse de leur rémunération.

Nous cherchons tous, aujourd'hui, à porter un autre regard sur la vieillesse et à accorder plus de dignité aux personnes âgées et handicapées. Ne laissons pas l'opportunité que constitue ce texte nous échapper. Nous avons le devoir d'agir, et d'agir rapidement (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Pascal Terrasse - J'ai beaucoup de mal à comprendre la logique et les orientations du Gouvernement. Je commencerai donc par une question simple : un plan vieillissement et solidarité a été annoncé par le Premier ministre le 6 novembre. Quand la représentation nationale aura-t-elle à l'examiner ?

M. le Ministre délégué - Aujourd'hui !

M. Pascal Terrasse - Aujourd'hui, nous examinons un projet de loi visant à créer une caisse propre aux personnes handicapées et âgées. J'essaye de connaître les suites législatives qu'il emporte. Par exemple, un autre texte devra décliner celui-ci, en réformant la loi de 1975. Mme la ministre nous présentera peut-être dans quelques semaines l'enveloppe financière dégagée pour le secteur du handicap.

Mme la Secrétaire d'Etat - Pourquoi peut-être ?

M. Pascal Terrasse - Mais s'agissant des personnes âgées, le plan vieillissement et solidarité ne semble avoir aucune déclinaison propre. Quand et comment nous la présenterez-vous ? Vous nous parlez de financements sur plusieurs années, fixés par la loi de financement de la sécurité sociale, mais je vous rappelle que les lois de finances sont, constitutionnellement, annuelles : les crédits peuvent être remis en cause tous les ans, aucun n'est sanctuarisé. Votre engagement se résume donc à un effet d'affichage...

Deuxième élément de confusion, et qui n'est pas le moindre : le Premier ministre a chargé le conseiller maître à la Cour des comptes Raoul Briet de réfléchir à des orientations nationales, d'établir des référentiels d'évaluation ou encore de proposer des solutions d'organisation ou de surveillance du système. Surtout, il lui demande d'établir les modalités de fonctionnement et de financement de la caisse. Mais le rapport Briet n'est pas connu au moment où nous examinons le projet de loi ! Et ce que nous en connaissons est contesté par l'ensemble des organisations professionnelles ! Le dernier compte rendu du CNRPA, qui représente l'ensemble des retraités et des personnes âgées de ce pays, est très virulent à l'égard du prérapport Briet ! Je vous conseille de prendre rapidement contact avec les acteurs concernés pour savoir ce qu'ils veulent. La grande majorité des conseils généraux vous demandent aujourd'hui de stopper net votre réforme !

En ce qui concerne la journée de travail non rémunérée, l'OFCE estime que sept heures de travail supplémentaire représentent bon an mal an 0,46 % du PIB. Vous prévoyez d'en utiliser 0,30 %, soit à peu près deux milliards d'euros. Où vont passer les 0,16 % restants ? Envisageriez-vous de constituer encore une cagnotte ?

Sur le plan économique, MM. Morin et Le Garrec ont raison. Le ministre de l'économie vient de nous décrire une situation dramatique, un coût du travail excessif, les délocalisations. Il faudrait, dans votre logique, diminuer les charges. Vous créez une nouvelle cotisation au 1er juillet ! Selon l'OFCE, elle risque de faire disparaître 30 000 emplois, sans compter les effets des hausses pour financer la réforme des retraites.

Vous accusez les socialistes d'avoir sous-estimé le nombre de bénéficiaires de l'APA. Dans le rapport que j'ai présenté fin 2003, je l'estimais à 800 000. Selon vos services, il est de 792 000. Il sera peut-être plus élevé demain. Devant l'assemblée des départements à Rodez, le ministre de l'intérieur de l'époque, Monsieur Vaillant, avait bien dit qu'en cas de problème il faudrait trouver un financement. Et si le sort des urnes avait été différent, nous l'aurions fait bien sûr, car nous n'aurions pas remis en cause un pan fondamental de notre politique. Mais nous n'aurions pas fait comme vous. Pour trouver les 1,2 milliard qui sont nécessaires, vous en prélevez 400 millions sur les personnes âgées dépendantes, 400 millions sur les conseils généraux et 400 sur la Caisse des dépôts.

Mais vos collèges savent-ils bien que le FFAPA est excédentaire depuis 2002 ? Je me le demande.

M. le ministre délégué - Vous n'avez pas le monopole de l'intelligence !

M. Pascal Terrasse - Vous leur avez parlé de déficit. Mais qu'ils se reportent au rapport. Le FFAPA a eu 59 millions d'excédents non distribués en 2002 et 12 millions en 2003. Mauvaise gestion, direz-vous. Mais où sont passés ces excédents ? En 2004, l'Etat va encaisser 1,7 milliard au titre du 0,1 % de CSG et le FFAPA va en affecter 1,3 million. Où vont passer les 400 millions de différence ? (« Très bien ! » sur les bancs du groupe socialiste) C'est la moitié de ce que vous allez demander aux Français en supprimant un jour férié.

Mais ce n'est pas à vous que j'en veux, Monsieur le ministre. Vous avez envie de faire des choses. Mais vous êtes prisonnier de Bercy, qui, chaque jour, vous demande de serrer la ceinture.

Quant au plan d'alerte, c'est une mascarade. Les services de communication du ministère de la santé annoncent 20 à 40 millions d'euros pour l'installation de climatiseurs. Puis l'on comprend que ce ne sera que 40 % et même, que ces 40 % seront pris sur le budget d'action sociale de la CNAV. Chers collèges, ne vous étonnez pas ensuite si elle refuse de financer les heures d'aide ménagère dans vos départements ! Je m'adresse ici à M. Jacquat, président du conseil de surveillance de la CNAV, dont je fais partie. Sur ce point au moins, nous aurions dû être consultés.

J'aurais souhaité évoquer de vrais sujets, par exemple l'humanisation des établissements. M. Larcher, qui est maintenant ministre, vous avait écrit pour en obtenir le financement. Pas un sou n'est prévu. Les crédits d'investissement du chapitre 66 ont été gelés l'an dernier ; je crains qu'ils ne le soient encore cette année. J'aurais parlé aussi de la valorisation des acquis professionnels, des pharmacies à usage interne. Enfin, selon vos services, 15 % des maisons de retraite ne sont pas aux normes. J'attends des réponses sur ce point en particulier (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

Mme Martine Aurillac - Il est heureusement révolu le temps où la femme de 30 ans semblait aux contemporains de Balzac déjà fort âgée. Mais l'allongement considérable de la vie représente aujourd'hui un enjeu redoutable, avec 12 millions de personnes de plus de 60 ans, 4 millions de plus de 75 ans et 800 000 personnes ayant perdu leur autonomie.

Il est en outre une autre forme de dépendance, celle des handicapés, dont, malgré les avancées des lois de 1975 et de 1987, la prise en charge repose encore largement sur le dévouement sans limite des associations. Aux faiblesses de l'hébergement en établissement, aux difficultés du maintien à domicile, aux insuffisances des effectifs, se sont ajoutées, l'été dernier, les lacunes de notre dispositif d'alerte.

Dès l'automne, François Fillon présentait un double programme d'action. Pour les handicapés, il comprenait, pour la première fois, un droit à la compensation des surcoûts liés au handicap, une simplification des démarches, une meilleure intégration dans la cité. Pour les personnes âgées, au-delà de l'APA qu'il faut pérenniser, la médicalisation des maisons de retraite, tout en privilégiant le maintien à domicile, et le développement des services gériatriques, avec plusieurs milliers de places nouvelles.

Vous avez tenu, Monsieur le ministre, à financer vos engagements, en créant un dispositif pérenne fondé sur la solidarité, à l'instar de ce qui existe en Allemagne. Cette journée de solidarité est parfaitement acceptable pour les Français si elle est équitable. Vous avez entendu notre message et le rapporteur a présenté des amendements à ce sujet. La voie de la liberté est la meilleure pour trouver les modalités les moins pénalisantes, notamment dans l'Éducation nationale. Entreprises unipersonnelles et retraités sont exemptés. Ce geste de fraternité, à raison de 7 heures de travail par an, permettra non pas grâce à une « corvée », Monsieur Morin, mais à une contribution de 0,3 % à la charge des employeurs - il faudra l'aménager - et sur les revenus du capital et des placements, d'apporter 2 milliards au fonds de solidarité.

Nous souscrivons également à l'amélioration du dispositif de prévention et d'alerte sanitaire. Les signalements pourront être effectués par les intéressés ou leurs tuteurs, mais aussi par des tiers. Notre commission a prévu que les personnes isolées et vulnérables soient mieux prises en compte, avec des mécanismes d'anticipation fiables.

Ce projet n'est qu'un élément d'une réforme globale ambitieuse. Il ne règle pas tout, mais constitue une avancée. Rendons hommage au Gouvernement d'avoir relevé le défi de la dépendance. Dans le contexte budgétaire actuel, il vous fallait du courage. Vous l'avez eu, et nous vous faisons confiance (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance, qui aura lieu ce soir, à 21 heure 30.

La séance est levée à 19 heures 40.

              Le Directeur du service
              des comptes rendus analytiques,

              François GEORGE


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